libertés janvier 2010

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DÉPOT À BRUXELLES X BELGIQUE- BELGIE PP 1/2345 BXL X Ne paraît pas aux mois de juillet-août. 9, rue Berckmans 1060 Bruxelles RÉPUBLIQUE TCHÈQUE À L’ÉCOLE DE LA DISCRIMINATION IRAN RENCONTRE AVEC UNE DÉFENSEUSE SYRIE : LA RÉPUBLIQUE DE LA PEUR JANVIER 2010 – N°460 – LE MENSUEL D’AMNESTY INTERNATIONAL L ibertes!

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Dans ce numero, on trouve un editorial sur la Conference «ratee» de Copenhague sur le rechauffement climatique, deux articles d'actualite sur la Palestine et la discrimination des Roms dans l'enseignement en Tchequie, un dossier thematique sur la Syrie («La Republique de la Peur») et une interview de la defenseuse iranienne Shadi Sadr.

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BXL X

Ne paraît pas auxmois de juillet-août.

9, rue Berckmans1060 Bruxelles

RÉPUBLIQUE TCHÈQUEÀ L’ÉCOLE DELA DISCRIMINATION

IRANRENCONTRE AVECUNE DÉFENSEUSE

SSYYRRIIEE ::

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JANVIER 2010 – N°460 – LE MENSUEL D’AMNESTY INTERNATIONALLibertes!

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ACTUEL■ Palestine : La révolte n’est pas une

étude de marché■ République tchèque : Les Roms à l’école de

la discrimination■ Insolites-Brèves

DOSSIERSYRIE : LA RÉPUBLIQUE DE LA PEUR■ L’hiver de Damas■ La relégation kurde■ Le supplice du défenseur■ «Une caricature de “despotisme oriental”»

MOUVEMENT■ «Le régime iranien a besoin d’un

ennemi extérieur»■ Contre le terrorisme, la justice

ISAVELIVES.BE■ Lettres du mois : Mozambique, Corée du Nord

et Territoires palestiniens occupés■ Bonnes nouvelles

CULTURE/AGENDA■ Mégaphones et bulldozers■ Le bal des mensonges■ Humour divin

É D I T O R I A L

S O M M A I R E

Libertés! • Rue Berckmans, 9 – 1060 Bruxelles • Tél : 02 538 81 77 Fax : 02 537 37 29 • [email protected] • www.libertes.be • Éditrice responsable: ChristineBika • Rédacteur en chef: Pascal Fenaux • Comité de rédaction : Bruno Brioni, Thandiwe Cattier, Véronique Druant, Samuel Grumiau, Anne Lowyck,Brian May, Suzanne Welles • Ont collaboré à ce numéro : Gilles Bechet, Céline Remy (st.) et Pierre Vanrie • Iconographie: Brian May • Maquette: RIF• Mise en page: Gherthrude Schiffon • Impression (sur papier recyclé non blanchi) : Remy Roto • Couverture: Entouré de Moustafa Tlass (d) et HassanTurkmani (g), deux «durs» historiques du régime, le président syrien Bachar el-Assad célèbre le 29e anniversaire de la guerre israélo-arabe d’octobre 1973.Damas, 7 octobre 2002 © REUTERS

CHANGEMENT D’ADRESSE – ATTESTATION FISCALE – MODIFICATION, ANNULATION OU NOUVELLE COTISATION DE

MEMBRE/DONATEUR(TRICE)Madame Michele Ligot : [email protected]

je change d’adresse (inscrire uniquement la nouvelle adresse)Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom: . . . . . . . . . . N° de membre: . . . . . . .Adresse: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . N° . . . . . bte . . . . . . . . . .Code postal: . . . . . Localité: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Tél (obligatoire): . . . . . . . . . . . . . . . E-mail: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Oui, j'adhère aux objectifs d'Amnesty et souhaite devenir membre

Je répartis le montant de : ma cotisation de mon abonnement sur toutel’année en complétant ce coupon et en le renvoyant à Amnesty International, 9 rue Berck-mans à 1060 Bruxelles. Tout montant qui dépassera 14,87 e (prix de la cotisation oude l'abonnement), sera considéré comme un «don», et par là-même jouira de la déduc-tibilité fiscale pour autant que ce supplément soit de 30 e ou plus.Je verse tous les mois, au départ de mon compte n° . . . . . . . . . . – . . . . . . . . . . . . . . lasomme de : 6 e 10 e 20 e . . . . . . . . e (ou tout autre montant demon choix) au profit du compte 001-2000070-06 de Amnesty International à partirdu . . . . . . . . . . et jusqu’à nouvel ordre. Je conserve le droit d’annuler ou de modi-fier cet ordre à tout moment. ou je verse en une fois le mandat de . . . . . . . . . . . . . . au compte 001-2000070-06Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Prénom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date de naissance: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Adresse: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . N° . . . . . . . . bte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Code postal: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Localité: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Tél (obligatoire): . . . . . . . . . . . . . . . . E-mail: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Profession: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Date: . . . . . . . . Signature:

Ne rien inscrire dans cette case s.v.p. (réservé à l'organisme bancaire)

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le 18 décembre dernier, à Copenhague, la 15e «Conférence desParties» (COP15) de la Convention-cadre des Nations uniessur les Changements climatiques s’est terminée sans que ses

participants ne soient parvenus à l’accord juste, ambitieux etlégalement contraignant que des millions de citoyens de la planèteattendaient. Les quelque 120 chefs d’État réunis à Copenhaguen’ont pas réussi à résoudre les problèmes empêchant de parvenirà un accord équitable, laissant les habitants les plus démunis et lesplus vulnérables de la planète confrontés au risque grandissant deperdre leur toit, leur santé et leur mode de subsistance en raisondu réchauffement climatique, toutes préoccupations au cœur dela campagne «Exigeons la Dignité» lancée par Amnesty en 2009.Malgré la déception causée par l’issue de la COP15, l’espoirdemeure. Un mouvement impliquant des millions de personnesdans des centaines de pays a pris son essor dans le monde, lessociétés civiles ayant agi conjointement sur ce thème comme rare-

ment auparavant. Ainsi, plus de 250 organisations, dont AmnestyInternational, se sont rassemblées au sein d’une alliance sansprécédent sous la bannière TckTckTck de la Global Campaign forClimate Action.Cependant, sous l’angle de la défense des droits humains, la luttecontre le réchauffement climatique va être de plus en plusconfrontée à un cruel dilemme. Ainsi, un débat oppose schémati-quement deux modes de pensée et d’action. Certains estimentque l’urgence planétaire est telle qu’elle n’autorise plus le «luxe»de la discussion démocratique et nécessite l’imposition de solutionspar la contrainte. À l’inverse, d’autres craignent qu’une telle radi-calité ne mette entre parenthèses la démocratie, voire la fassepasser de vie à trépas. Autrement dit, l’urgence évidente est àl’adoption de mesures économiques et technologiques coura-geuses contre un réchauffement climatique qui menace les droitshumains que sont nos droits économiques, sociaux et culturels, tantindividuels que collectifs. Mais, il faudra à l’avenir rester vigilantquant au risque que des autorités politiques, même (voire surtout)animées de bonnes intentions, soient un jour tentées de restreindretout ou partie de nos libertés individuelles et fondamentales, aunom de l’imminence de la menace climatique, tandis que d’autresy trouveront une nouvelle justification à leur refus obstiné detoute démocratisation. À cet égard, les errements législatifs etéthiques de la «guerre contre le terrorisme» menée durant ladécennie qui vient de s’écouler constituent un précédent quidevrait nous faire méditer. À l’avenir. ePascal Fenaux

MENACECLIMATIQUE ETDROITS HUMAINS

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Qu’est-ce qui vous a poussée à faire ce film?J’étais en Cisjordanie en train de préparerMur, mon précédent documentaire, quand

Rachel Corrie a été tuée. J’étais entourée de Palesti-niens et j’ai senti leur émotion. Une ligne rouge avaitété franchie. C’était la première fois qu’un jeuneétranger, venu en solidarité avec les civils palestiniens,était tué par l’armée israélienne, c’était très effrayant.Et puis, Gaza, c’est l’endroit de Palestine où la souf-france est la plus évidente, quotidienne et terrible.C’est le trou noir où l’on ne peut pas aller et où il n’ya pas de témoins. Si nous, documentaristes, n’allons paslà où on ne veut pas de nous, c’est la fin du cinémadocumentaire.

Le film est construit comme une enquête minu-tieuse.J’ai enquêté sur Rachel Corrie comme si j’enquêtais surun grand personnage historique. C’est une «petite mortcollatérale», un tout petit épisode dans une grandetragédie, mais j’ai voulu redonner à ce petit scandale-là une ampleur universelle. C’est très rigoureux. Jetenais à avoir tous les témoins, toutes les versions et tousles documents, pour donner à l’écran le procès auquelRachel n’a pas eu droit. C’est un film sur la mort d’unemilitante, mais ce n’est pas un film militant.

Le film évoque d’autres victimes palestiniennestuées dans le silence.On retrouve régulièrement des corps sous les décom-bres, des vieux, des gens qui n’ont pas entendu, desenfants qu’on n’a pas pu emmener dans la panique(parce que les gens ont très peu de temps pour fuir) oudes Palestiniens qui se sont interposés pour qu’on nedétruise pas leur propre maison. La différence avec lamort de Rachel Corrie, c’est que là, il y a huit témoins.

Il y a beaucoup de non-dits dans le film, je veux que lespectateur travaille un peu, qu’il réfléchisse et qu’il sedemande: «si pour elle, c’est allé jusque-là, qu’est-ce que ça doitêtre pour les autres ?».

Une image forte est celle du Palestinien dans lesruines de sa maison.Cette image du Palestinien qui déambule dans lesruines de sa maison comme si elle était encore là, c’estune image tellement palestinienne. Les maisonsperdues, les maisons détruites, c’est un fil rouge dansl’histoire de la Palestine. Nous qui connaissons leterrain, on le vit, on le voit très souvent. Très souvent,un Palestinien vous emmène voir son village quin’existe plus, même si c’est depuis 1948.

Quel impact a eu la mort de Rachel sur l’engagementdes jeunes Occidentaux?Elle a eu deux impacts contradictoires. D’une part,Rachel fut la première et par la suite d’autres étrangersont été tués dans des situations différentes. Dans tousles groupes, les activistes étrangers ont dû remettre enquestion la tactique qu’ils avaient adoptée et élaborerde nouvelles règles plus prudentes d’engagement oud’action non-violente. D’autre part, la mort de RachelCorrie a fortement radicalisé les volontés de solida-rité. Dans son université, dans les mois qui ont suivi,l’ISM (International Solidarity Movement) a reçu pleinde demandes de jeunes Américains qui voulaient alleren Palestine.Le témoignage d’un militant israélien faisant réfé-rence au ghetto de Varsovie remet en perspective laquestion de la finalité et de l’efficacité de l’actionnon-violente. C’est la leçon qu’il nous donne. La révolte n’est pasune étude de marché. On se révolte parce que c’est

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A C T U E L

AMNESTYNOUVEAU SECRÉTAIREGÉNÉRALSuccédant à Irene Khan, le prochain secré-taire général d’Amnesty International seraSalil Shetty. D’origine indienne, Salil Shettydirige la campagne des Objectifs du Millé-naire pour le Développement des NationsUnies depuis 6 ans, après avoir été directeurgénéral d’ActionAid, ONG internationale delutte contre la pauvreté. Jusqu’à l’entrée enfonction de Salil Shetty en juin 2010, c’estClaudio Cordone, directeur général chargéde la recherche et des régions, qui assureles fonctions de secrétaire général adintérim. e

LITUANIEPRISON SECRÈTEPour la première fois, le 22 décembre 2009,un gouvernement européen a reconnu qu’un«site noir» avait existé sur son territoire, aprèsqu’une commission d’enquête parlementairelituanienne ait conclu que la CIA avait faitfonctionner une prison secrète en Lituaniedurant la «guerre contre le terrorisme» etque, en toute illégalité, des responsables de laDirection de la Sûreté de l’État y avaientprêté assistance sans en avertir le chef del’État et le Premier ministre. La Pologne et laRoumanie font également partie des paysqui, selon le Parlement européen et leConseil de l’Europe, pourraient avoir fournià la CIA des centres de détention secrets. e

BRÉSILGRAVE CRISE POLITIQUEUne crise sans précédent a éclaté entre leprésident Luiz Inacio Lula da Silva et lahiérarchie militaire. Le conflit a été provoquépar le lancement, la veille de Noël, duProgramme national des Droits humains quiprévoit la création d’une «Commission de laVérité» pour enquêter sur les crimes de ladictature (1964-1985), ouvrant la voie à unerévision de la loi d’amnistie approuvée par leParlement le 22 août 1979. Contrairementaux autres pays latino-américains, cette loiqui a permis le retour des exilés politiques auBrésil mais protège également les tortion-naires, est toujours en vigueur. Elle garantitl’absence de poursuites contre les militairestortionnaires ou auteurs de crimes. e

CÔTE D’IVOIRETENTATIVE DE SPOLIATIONUne organisation portant le nom de «Coordi-nation nationale des Victimes de Déchetstoxiques de Côte d’Ivoire» (CNVDT-CI) prétendabusivement représenter 30000 demandeursd’une action contre Trafigura intentéedevant la justice britannique. Cette organisa-tion demande que les 45 millions de dollarsd’indemnisation dus aux victimes soienttransférés sur son compte en banque. Enaoût 2006, des déchets toxiques, acheminésà bord d’un navire affrété par l’entreprisede courtage pétrolier Trafigura, avaient étédéversés en divers lieux de l’agglomérationd’Abidjan, provoquant une tragédie sanitaireet le décès de 15 personnes. Les 45 millions dedollars d’indemnisation sont actuellementsous séquestre et les victimes n’ont toujourspas reçu leur argent. e

LA RÉVOLTE N’EST PAS UNE ÉTUDE DE MARCHÉDans son film Rachel, la documentariste franco-israélienne Simone Bitton explore les circonstancesde la mort, en mars 2003, d’une jeune militante pacifiste américaine à Gaza. Transcendant lesparticularismes de ce drame, elle en fait une méditation cinématographique sur la jeunesse,l’idéalisme et l’engagement.

jL’activistepacifisteaméricaineRachel Corrie (d)entourée de lafamillepalestinienne deRafah quil’hébergeait etdont la maison,située sur laligne dedémarcationentre l’Égypteet la bande deGaza, fut raséepar l’arméeisraélienne.Rafah, 2003. © DR

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Des élèves dans une classe préparatoire d’une école réservée aux seuls Roms. Ostrava, avril 2009. © AI

L’INSOLITE

A C T U E L

révoltant. Bien sûr, si vous pensez qu’il ne faut se révolterque si vous êtes certain de gagner, il n’y aura plus beaucoupde révoltes dans le monde.

Cela étant, on peut tout même se poser la question dela stratégie la plus efficace.À partir du moment où l’on milite, où l’on se révolte, on vase poser les questions de l’efficacité, du courage et de larépression. Mon film donne à méditer sur ces questions. Ceserait un très mauvais film s’il donnait les réponses. C’està chacun de se pencher sur ses propres engagements dejeunesse ou d’âge mûr, de rentrer dans toutes ces probléma-tiques qui sont universelles et intemporelles. Il y a trois ans,j’ai arrêté le cinéma pendant un an, j’ai pris une annéesabbatique pour militer en faveur des sans-papiers enFrance. On a tout perdu, on n’a rien gagné, maintenant c’estpire. On les renvoie par charters, la cruauté, la déshumani-sation sont absolues. La militance est souvent présentée comme une imbécillitéaccomplie par des gens un peu idiots, mais ce sont lesautres qui me paraissent plutôt idiots. Le personnage deRachel m’a aussi beaucoup touchée par ses e-mails où ellese montre très fine. Elle découvre des tas de choses qu’ellesait mettre en mots. Elle découvre l’hospitalité du pauvre.À vingt ans, ça vous change une vie. La tragédie de Rachelest une petite histoire qui finit mal, mais dans laquelle onpeut puiser de la force et de l’intelligence.

Quelle est la place de l’action non-violente et son imagepar rapport à celle des combattants?Pour moi, les Palestiniens sont les champions de la non-violence, même s’ils n’appellent pas ça comme cela. Lors dela première Intifada, quand les Palestiniens «de l’intérieur»se sont réapproprié leur combat, les gamins avec les frondescontre les chars, c’était vraiment une révolte non-violente.Jusqu’ici, le bilan est désespérant, rien n’a marché: la négo-ciation a échoué, la lutte armée a échoué. Comme tout aéchoué, les Palestiniens sentent qu’ils doivent trouver autrechose. Depuis quatre ou cinq ans, il y a maintenant unmouvement d’action non-violente qui part essentiellementdes villageois dépossédés de Cisjordanie, des villages quisont grignotés par le Mur. Toutes ces manifestations hebdo-madaires sont coordonnées par les comités populaires desvillages, lesquels sont rejoints par des militants internatio-naux comme Rachel, mais aussi par des militants israéliens.C’est une résistance complètement décentralisée parcequ’il n’y a plus de stratégie politique. Il n’y a plus de direc-tion palestinienne, il y en a deux qui sont aussidéconsidérées l’une que l’autre. Les choses viennent de lasociété civile qui est en train d’expérimenter de nouvellesformes de résistance. Malheureusement, elles sont de plusen plus rudement réprimées. Dans ces manifestations, il ya désormais des morts tout le temps. La situation est graveet nul ne sait sur quoi cela va déboucher. e Propos recueillis par Gilles Bechet

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Les discriminations et la ségrégation dont sont systématiquementvictimes les enfants roms dans le domaine de l’éducation continuent,bien qu’elles soient dénoncées tant à l’échelon nationalqu’international.

Publié le 13 décembre 2010 à Prague et intitulé Injustice renamed – Discrimi-nation in education of Roma persists in the Czech Republic, un rapport AmnestyInternational examine les discriminations systématiques continuant à

caractériser le système éducatif tchèque, en dépit d’un jugement prononcé en 2007par la Cour européenne des Droits de l’Homme.La Cour estime ainsi que la République tchèque discrimine des enfants roms enles plaçant dans des «écoles spéciales» destinées aux élèves souffrant de handicapsmentaux légers, où ils reçoivent un enseignement de qualité médiocre. En adop-tant une nouvelle loi sur les écoles en 2005, les autorités tchèques se sontcontentées de rebaptiser les écoles spéciales «écoles élémentaires pratiques», mais lesystème d’orientation des enfants vers ces écoles n’a pas réellement changé. Demême, les mesures annoncées par les autorités tchèques en décembre 2009 etcensées soutenir les enfants roms dans le cadre du système scolaire classique nevont pas suffisamment loin car elles ne sont ni exhaustives, ni légalement contrai-gnantes. Des délégués d’Amnesty International se sont rendus dans plusieurs écoles de laville d’Ostrava où, en 1999, 18 mineurs roms ont déposé la plainte qui a finalementdébouché sur le jugement de la Cour européenne. Dans certaines zones, lesenfants roms représentent plus de 80 % des élèves des écoles élémentairespratiques. Certains enfants roms sont victimes d’une autre forme de ségrégationlorsqu’ils se retrouvent dans des écoles réservées aux seuls Roms, qui proposentsouvent une instruction de moindre qualité, limitant ainsi leurs perspectivestant sur le terrain éducatif que professionnel. Ainsi, Mirek, 12 ans, et ses cinq frères et sœurs étaient élèves dans une école ordi-naire de leur ville de Karvina. Cependant, après que sa famille eut été expulsée de

F O C U S

force de son appartement, situé dans cette ville, leur mère, Helena, a décidé deplacer les enfants dans une école pratique, dans la ville voisine d’Ostrava. Elle crai-gnait qu’ils ne soient victimes de brimades et de discriminations dans une écoleordinaire accueillant en majorité des non-roms, et ne voulait pas qu’ils aillent àl’école ordinaire réservée aux seuls Roms, car elle avait entendu dire que laviolence y était très présente. Lorsque les enfants ont finalement été évalués en2009, à l’issue de la période de diagnostic, Helena leur a donné l’instruction de fairedélibérément des erreurs lors de l’évaluation psychologique, de sorte qu’ils soientadmis dans une école pratique. Mirek a confié à Amnesty International que laplupart des sujets étudiés à l’école pratique avaient déjà été abordés dans des classesinférieures de son école précédente, et qu’on lui donnait moins de devoirs. L’orientation vers des écoles et classes pratiques censées accueillir les élèvesprésentant des «handicaps mentaux légers» est déterminée par les résultats d’éva-luations qui ne prennent pas en compte la différence des enfants roms sur le planculturel et linguistique, et sont susceptibles d’être faussés par les préjugés despersonnels chargés de mener l’évaluation. Or, l’éducation est le principal moyende rompre le cercle vicieux de la pauvreté et de la marginalisation qui font le quoti-dien d’une grande partie de la population rom du pays. eP.F.

IRANPEUT-ON RIRE DE TOUT ?Entre répression sanglante et crise poli-tique, l’atmosphère n’est pas à larigolade en Iran. Pour combattre la sinis-trose ambiante, la ville de Téhéran alancé des clubs de rire. C’est du moins ceque rapporte le journal iranien Tehran-e Emrooz, repris par The Guardian.Organisés dans des centres culturels,ces cours devraient être étendus auxcercles de retraités, aux centres de santéet même aux prisons. Ils sont ouvertsaux dames : une initiative hardie dansun pays où rire est considéré comme lecomble de la vulgarité pour une femme.Ce projet n’a pas toujours été une partiede plaisir. L’ouverture des clubs, prévuel’an dernier, avait été ajournée : pasquestion de s’amuser pendant les tradi-tionnels mois de deuil de Moharram etSafar qui commémorent le martyr del’imam Hussein. e (D’après Courrier international)

LES ROMS ÀL’ÉCOLE DE LADISCRIMINATION

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Le président syrien Bachar el-Assad entouré du «Commandement régional» (syrien) du parti Baas et dont la composition a subi un relatif coup de jeune. Damas, 12 juin 2005. © AFP/SANA

Libertés ! Janvier 2010 5

D O S S I E R

Le 6 mars 1963, le Baas, partiultranationaliste panarabe,prenait le pouvoir en Syrie à lasuite d’un coup d’État. Sept ansplus tard, à la tête d’unmouvement de «rectification», legénéral Hafez el-Assad prenaitles commandes du Baas et del’État jusqu’à sa mort en juin2000, le pouvoir revenant alors àson fils Bachar el-Assad. Depuis1963, la société syrienne vit sousla coupe d’une dictature militaireet idéologique qui exerce unpouvoir absolu sous le doublerégime de la loi martiale et del’état d’urgence. L’arrivée aupouvoir de Bachar el-Assad avait,un temps, fait espérer lelancement de réformesdémocratiques. Mais le«Printemps de Damas» fit longfeu et les défenseurs des droitshumains et les opposantsretrouvèrent le chemin de laprison, de l’exil ou du cimetière.En 2005, la probable implicationde l’appareil sécuritaire syriendans l’assassinat du Premierministre libanais Rafic Haririrelança les spéculations quant àune possible déstabilisation durégime syrien. En effet, endevant fuir le Liban sous lespressions, non seulement lesservices syriens perdirent nonseulement de faramineusesprébendes, mais un milliond’ouvriers syriens furent aussiprivés de salaires essentiels à uneéconomie exsangue. Cinq ansplus tard, en ayant repris pied auLiban par l’intermédiaire de sesalliés locaux, le régime baasistesyrien semble avoir retrouvétoutes ses couleurs.

L’HIVER DE DAMASPrès de dix ans après la mort d’Hafez el-Assad et l’arrivée au pouvoir de son fils Bachar el-Assad, lerégime syrien est toujours fondé sur une alliance d’airain entre le parti Baas, la minoritéconfessionnelle alaouite, la moyenne bourgeoisie sunnite rurale et quelques argentiers sunnitescitadins, le tout contrôlé par des services de sécurité et de renseignements omniprésents.

Àl’instar des autres États de l’aire syrienne histo-rique (Liban, Palestine/Israël et Jordanie), laRépublique arabe syrienne se caractérise par le

caractère multiconfessionnel de sa société : 75 % desunnites, 11% d’alaouites, 10% de chrétiens (melkites etorthodoxes), 3 % de druzes et 1 % de chiites ismaéliens.À cette répartition confessionnelle, on peut en ajouterune autre qui oppose la «ville» (hadâra) à la «campagne»,à la montagne et à la «steppe» (bâdiya). Selon ces catégo-ries, il apparaît que, à l’exception du sud-est, la «ville»voit cohabiter une majorité sunnite et des minoritéschrétiennes, tandis que la «steppe» voit cohabiter musul-mans sunnites, alaouites et druzes.Qui sont les alaouites? Également appelés «nusayrîs», lesalaouites sont issus d’un schisme survenu parmi lesmusulmans chiites. Si les musulmans chiites se distin-guent des sunnites par la prééminence donnée à Ali,gendre et cousin de Mahomet, les musulmans alaouitesaccordent en outre à Ali un caractère divin proche decelui accordé au Christ par le christianisme. À cettespécificité, on peut en ajouter une autre qui voit ladoctrine alaouite, à l’instar des druzes, mêler deséléments antérieurs à l’apparition de l’islam

(mazdéisme persan, manichéisme et christianisme).Leurs alter ego au Moyen-Orient sont les alevis (turcs etkurdes) de l’actuelle République turque.Longtemps méprisés par les gouvernants sunnites(arabes ou ottomans), les alaouites se concentrent pourl’essentiel dans le nord-ouest de la Syrie, sur le djebelAnsariyya qui jouxte le Liban et où ils représentent90 % de la population. Le développement des alaouitescomme communauté politique a été encouragé par laFrance durant toute la période du Mandat (1918-1946),lorsque, après en avoir détaché le Liban (destiné àdevenir un État dominé par la «montagne» des chrétiensmaronites et des druzes) (1), Paris a organisé la Syrie surle mode d’une confédération entre quatre États : Damas(sunnite) au centre, Alep (sunnite) au nord-est, Lattaquié(alaouite) au nord-ouest et le Djebel druze au sud.C’est dans cette configuration confessionnelle que leBaas («Renaissance»), un parti ultranationalistepanarabe, s’est hissé au pouvoir lors d’un coup d’État enmars 1963, avant de passer sous l’autorité d’Hafez el-Assad en novembre 1970. Fondé en 1946 et puisantdans les théories raciales et autoritaires de l’Europe del’époque, ce parti était à l’origine animé par des théo-

SYRIE :

LA RÉPUBLIQUE DE LA PEUR

Page 6: Libertés Janvier 2010

sanglantes rivalités qui opposèrent longtemps l’oncle (Rifaat) et le père(Hafez) de l’actuel président Bachar el-Assad ou aux rivalités entre clansalaouites issus de villages traditionnellement opposés.Le Baas et son idéologie «laïque» panarabe étaient censés transcender desclivages confessionnels considérés comme des résidus traditionalistes, anti-modernes et nuisibles à l’unification panarabe. En fait, depuis que ce partiest devenu l’un des leviers de la domination d’un clan régional et confes-sionnel sur le reste de la société, le discours «universaliste» et panarabejoue désormais un rôle de leurre. Ce discours permet de discréditer touteforme d’opposition à la dictature en lui imputant un caractère confes-sionnel et de masquer la domination particulariste du clan Assad derrièreun écran de fumée panarabe.Le système de pouvoir mis sur pied par Hafez el-Assad (et consolidé par sonfils depuis 2000) a pourtant été menacé au début des années 80, lorsque lesprincipales villes du pays (celles du nord), à l’exception de Damas, se sontlancées dans un mouvement de contestation de la dictature et ont revendiquél’établissement d’un système politique pluraliste. Outre des intellectuels etdes syndicats «laïques», ce mouvement était animé au niveau des classesmoyennes et populaires par les Frères musulmans, «remontés» contre la mino-risation de la ville sunnite par un régime dominé par la minorité alaouite.Plus grave pour le régime, même une ville comme Lattaquié, largementalaouite, fut touchée par la contestation et la répression.Brandissant l’épouvantail de la contagion de l’islamisme révolutionnaire(nous sortons tout juste de la révolution iranienne), le président Hafez el-Assad,épaulé par les «Brigades de Défense» de son frère ennemi Rifaat el-Assad,décida en 1981 de répondre à la contestation par une répression qui, pourla seule ville d’Hama, allait se solder par la mort de quelque 25000 civils. Sonpouvoir contesté jusqu’au sein même de la communauté alaouite, le clanAssad n’eut d’autre issue que de recourir à la provocation interconfession-nelle pour s’assurer le regroupement des alaouites derrière sa personne. C’estainsi que des massacres d’officiers alaouites furent sciemment orchestrés parla Sûreté syrienne.Fondamentalement, le système de pouvoir à l’œuvre en Syrie se caractérisepar la manipulation au fer-blanc des subtils déséquilibres entre classes,régions et confessions. La survie du régime passe par la menace perma-nente (et parfois l’exercice comme en 1981) du recours à la violence «aveugle»et massive contre la société civile, menace doublée de la menace d’un chan-gement d’alliance entre le noyau clanique des Assad et ses obligés sunnitesou druzes. C’est la quintessence et le modèle de l’«État de Barbarie» décrit parfeu Michel Seurat, ce sociologue français mort en 1986 au Liban alorsqu’il y était retenu en otage par le Hezbollah fondé quatre ans auparavant.La survie du régime syrien passe également par le maintien d’un état deguerre (fût-il uniquement verbal) avec l’État d’Israël. Ce qui fait parfois direà certains que, très paradoxalement, la poursuite de l’occupation et de la colo-nisation du Golan par l’État juif est l’un des meilleurs gages de survie durégime syrien, toute contestation interne étant accusée de collusion objec-tive avec l’«impérialisme» et le «sionisme».À la mort d’Hafez el-Assad en juin 2000, le régime baasiste sembla s’ouvrirquelque peu en autorisant, non pas le multipartisme, mais la réunion de clubsde réflexion et de discussion, ainsi qu’un semblant de début d’assouplisse-ment d’une économie dirigiste contrôlée par un quatuor de services desécurité et de renseignements communément appelés les Moukhâbarât. C’estce qu’on appela le «Printemps de Damas», un printemps qui vira rapidementà l’hiver lorsque ses principaux initiateurs furent arrêtés et condamnés. Auprintemps 2005, soumis à une intense pression internationale suite à unevague d’assassinats d’hommes politiques et de journalistes libanais, la Syriefut contrainte de retirer son armée du Liban, un État qu’elle occupait depuis1976 et son engagement dans la guerre civile libanaise. À nouveau, lesobservateurs pensèrent un instant qu’en essuyant un tel échec politique sousla pression occidentale et en perdant un Liban source de trafics et de devisespour les services de renseignement syriens, le régime baasiste allait, sinons’effondrer, devoir composer. Las ! Le régime fit une fois de plus appel aux Moukhâbarât pour renforcer samainmise sur le pays. Ainsi, en mai 2006, au cours d’une vaste opération, unedouzaine de militants pour la démocratie et les droits civiques furentarrêtés, parmi lesquels l’avocat défenseur des droits humains Anwar al-Bunniet l’écrivain Michel Kilo. Depuis lors, la répression s’est accentuée et Bacharel-Assad a définitivement renoncé à réformer un État syrien branlant etsclérosé, mettre fin à sa dépendance paranoïaque à l’égard des services de sécu-rité et moderniser son économie. Le rideau est donc tombé définitivementsur le Printemps de Damas. e Pascal Fenaux

(1) . Voir notre dossier «Liban-Syrie : transitions à haut risque», Libertés ! n°415 de juin 2005.

riciens d’origine chrétienne et sunnite. Panarabe, le Baas se dote d’un«Commandement national» (c.à.d. panarabe) et de deux «Commandementsrégionaux» (Damas et Bagdad). Traversé par d’importantes dissensions régio-nales, confessionnelles et sociopolitiques, le Baas, outre son éclatemententre ailes irakienne et syrienne, loin de devenir le parti de masse rêvé parses fondateurs, est ensuite devenu un parti d’encadrement des masses,avant de se «normaliser» à partir des années 90, à l’ère de l’effondrement desidéologies nationalistes arabes et surtout après la disparition du régimebaasiste irakien en avril 2003.Au terme de développements qu’il est impossible de résumer ici, le Baas, àl’instar de l’armée, est devenu un instrument de promotion sociale pour lesmembres issus des minorités confessionnelles non citadines (alaouitesd’abord, druzes ensuite), même si les sunnites y restent majoritaires. Cela dit,ce n’est pas «la» communauté alaouite qui dirige la Syrie au travers de sonemprise sur l’armée et le Baas. Ce sont «des» clans majoritairement alaouitesqui, grâce à des alliances ponctuelles et instables avec d’autres groupessociaux, régionaux ou confessionnels, s’assurent le contrôle du régime. Leconsensus entre alaouites est d’ailleurs loin d’être acquis, que l’on songe aux

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La foule se presse dans le célèbre bazar du Souk al-Hamidiyeh pour faire sesachats à l’approche de la fête islamique de l’Aïd el-Fitr qui marque la fin du moisde Ramadan. Damas, 24 novembre 2003. © AFP/Louai Beshara

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Les Kurdes de Syrie sont sujets à de sérieuses violations des droitshumains, ainsi que les Syriens dans leur ensemble, mais en tant quegroupe, ils subissent également des discriminations systématiques

basées sur leur identité, particulièrement dans le domaine des droits civilset politiques. Les Kurdes forment le deuxième plus grand groupe ethniquede Syrie : dans un pays à large majorité arabe (90%), ils représentent près de10% de la population avec près de 2 millions d’âmes. Ils sont principalementsitués dans le nord et le nord-est du pays (le long de la frontière avec laTurquie et l’Irak), régions à la traîne par rapport au reste du pays en termesd’indicateurs sociaux et économiques, une situation liée aux discriminationsdirectes et indirectes à l’encontre de la population kurde.En 1962, le gouvernement syrien a lancé une politique d’«arabisation» deszones à majorité kurde : près de 100 000 Kurdes de 300 villages ont étédéplacés de force et remplacés par des Arabes dans le but de créer une «cein-ture arabe» entre les Kurdes de Syrie et ceux de Turquie et d’Irak. Les villeset les villages ont été renommés en arabe. Bien que l’interdiction de l’utilisation de la langue kurde (incluant lespublications en langue kurde, les noms kurdes pour les entreprises oumagasins, les cours de langue kurde ou la diffusion de culture kurde)semble être peu appliquée au niveau local, elle reste profondément injusteet ne s’applique pas aux membres des autres minorités ethniques du pays(Arméniens, Circassiens, Assyriens et Juifs) lesquels peuvent donner des nomsrusses ou arméniens à leurs magasins ou tenir des écoles privées. En 1992,le ministère de l’Intérieur a interdit l’enregistrement d’enfants avec des noms«non-arabes» dans la province à majorité kurde d’al-Hassaka. Ces dernièresannées, des dizaines de Kurdes ont été arrêtés pour avoir célébré le Nawruz,le nouvel an kurde.Plus inquiétant, une grande proportion de Kurdes de Syrie se voit dénier lanationalité syrienne et sont de ce fait tenus à l’écart de droits fondamentauxcomme l’éducation, le travail ou les soins de santé. On estime à près de360 000 ces Kurdes syriens «apatrides» qui ne peuvent se procurer ni passe-port ni documents de voyage (et ne peuvent ainsi ni quitter la Syrie ni y

retourner légalement), ne peuvent ni voter ni être propriétaires, ne peuventêtre employés dans le secteur public ou exercer une profession nécessitantl’adhésion à une corporation (journalistes, avocats, médecins, ingénieurs),et n’ont pas accès à l’université ou aux hôpitaux publics.Enfin, les défenseurs des droits des Kurdes et les militants de la société civilekurde en général sont victimes d’une répression sévère et sont particuliè-rement exposés au risque d’être arrêtés ou emprisonnés, ce qui dans denombreux cas signifie la torture et les mauvais traitements. Les chefs d’in-culpation habituellement (et souvent uniquement) utilisés contre les Kurdessont l’«implication dans des groupements cherchant à affaiblir la conscience natio-nale», la «tentative de séparation d’une partie du territoire syrien en vue de l’annexerà un État étranger» ou «l’’incitation au factionnalisme», cette dernière pouvant êtrepunie par la peine capitale.Le climat de haine semble s’être aggravé suite aux incidents de mars 2004.La tension a grimpé entre supporters arabes et kurdes durant un match defoot à Qamishli, en région kurde, et les forces de police ont réagi en tirantà balles réelles sur la foule, apparemment dans la seule direction dessupporters kurdes, faisant plusieurs morts. La manifestation et la processionfunéraire qui se sont déroulées le lendemain ont aussi essuyé des tirs desforces de sécurité, ce qui a déclenché des émeutes pendant deux jours. Autotal, ce sont au minimum 36 personnes qui ont été tuées, presque unique-ment kurdes. Aucune enquête n’a été menée sur l’usage de la force par lesservices de sécurité, ni sur les arrestations massives (près de 2 000 Kurdesarrêtés), ni sur les accusations de torture en détention, ni tout simplementsur les causes possibles de ces événements. En outre, dans les mois qui ontsuivi, au moins six Kurdes accomplissant leur service militaire sont décédésdans des circonstances suspectes, sans doute lors de passages à tabac ou detirs à l’arme à feu portés par des supérieurs militaires ou des collègues.L’année suivante, en 2005, la mort d’un haut dignitaire religieux a ravivéle sentiment de persécution des Kurdes de Syrie. Figure importante de lacommunauté kurde, Sheikh Muhammad Mashuq al-Khiznawi présidaitle Centre sunnite d’Études islamiques et s’était prononcé en faveur deréformes en Syrie et d’un dialogue plus poussé entre les différentes commu-nautés religieuses syriennes. Sheikh Muhammad Mashuq al-Khiznawi a«disparu» à Damas le 10 mai 2005. Vingt jours plus tard, son corps étaitremis à sa famille par les autorités, après avoir manifestement subi destortures.eCéline Remy

LA RELÉGATION KURDEPrincipale minorité ethnique d’une république syrienne qui se définit commearabe et dont le parti au pouvoir est officiellement panarabiste, les Kurdessont particulièrement ciblés par les services de sécurité et derenseignements.

jLa police anti-émeutesyriennequadrille unfaubourg deDamas pourempêcher denouvellesmanifestationssuite auxévénements deQamishli, dans lenord-est du pays.Dummar,14 mars 2004. © REUTERS/Khaled al-Hariri

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Les préoccupations d’Amnesty International concernant la situation enSyrie sont nombreuses. Elles concernent principalement les arresta-tions arbitraires et les emprisonnements pour le seul motif d’avoir

exercé pacifiquement leurs droits humains fondamentaux (tels que celui àla libre expression), les disparitions, les longues détentions au secret, l’usagegénéralisé de la torture et des mauvais traitements en détention, les juge-ments inéquitables, l’impunité pour les membres des forces de sécuritésoupçonnées de violations des droits humains, les strictes restrictions à laliberté d’expression et d’association, le harcèlement des défenseurs desdroits humains et le maintien de l’application de la peine de mort.Pierre d’angle de ce système, le maintien de l’état d’urgence est particuliè-rement inquiétant. En vigueur depuis 1963, date du coup d’État baasiste, l’étatd’urgence autorise depuis 47 ans des mesures «d’exception» qui réduisent dras-tiquement les droits théoriquement accordés aux citoyens (principalementceux à la liberté d’expression, d’association et de réunion) et confèrent auxforces de sécurité de vastes pouvoirs en matière d’arrestation et de détention.Le décret législatif relatif à l’état d’urgence permet également aux autoritésde censurer les correspondances, les communications et les médias et deréprimer des manifestations pacifiques ainsi que des actes et des propos consi-dérés comme critiques envers les autorités.La législation d’état d’urgence a ainsi pour résultat la détention, souvent ausecret, sans inculpation ni procès et accompagnée de torture, de milliers d’op-posants politiques présumés. Des centaines de prisonniers d’opinion sontmaintenus en détention, parmi lesquels deux au moins – Ziad Ramadan etBahaa Mustafa Joughel – sont détenus sans jugement depuis 2005.Cette législation spéciale a instauré des tribunaux «d’exception» (les tribu-naux militaires et la Cour suprême de Sécurité d’État) qui appliquent uneprocédure non conforme aux normes minimales d’équité internationalementreconnues. La Cour suprême de Sécurité d’État, créée en 1968 avec pour tâchede juger les délits politiques et d’atteinte à la sécurité de l’État, a été utiliséepour condamner de nombreux défenseurs des droits humains à de lourdespeines d’emprisonnement à l’issue de procès inéquitables. Les accusés ne sevoient pas reconnaître le droit d’interjeter appel et ne peuvent consulter leuravocat que de façon très restreinte. Les juges bénéficient d’un large pouvoirdiscrétionnaire. En outre, lorsque la Cour est informée que des déclara-tions ont été extorquées sous la torture, elle les considère tout de mêmecomme des «aveux» recevables. Le Comité des Droits de l’Homme de l’ONU

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estime que les procédures suivies par cette juridiction ne satisfont pas auxdispositions du Pacte international relatif aux Droits civils et politiques(PIDCP), auquel la Syrie est partie.Quant à la torture en détention, Amnesty recense pas moins de 38 méthodesdifférentes utilisées par les agents de sécurité, des brûlures de cigarettes auxcoups à l’aide de câbles électriques en passant par l’arrachage d’ongles, lessimulacres d’exécution et la brisure d’os ou de dents. Les décès résultant detortures et mauvais traitements en prison sont fréquents, que les détenussoient politiques ou de crime ordinaire, et sans qu’aucune enquête ne soitjamais menée sur ces morts suspectes. Amnesty dispose de rapports prouvantque des enfants d’à peine 12 ans auraient été torturés en prison. Pour l’année2008, l’association a recensé au moins 17 prisonniers qui auraient été tuéspar des membres de la police militaire. En outre, le gouvernement apromulgué, le 30 septembre 2008, un décret-loi qui confère aux agents de laSécurité politique, de la police et des douanes l’immunité des poursuites pourles crimes commis dans l’exercice de leurs fonctions, hormis le cas où unmandat d’arrêt est décerné par le commandement général des forces armées.Le travail des défenseurs des droits humains est donc important, mais trèsrisqué. Il est pratiquement impossible, étant donné la législation syrienne,de critiquer les lois, le régime politique ou la politique en matière de droitshumains sans risquer d’être arrêté et emprisonné. Les organisations dedéfense des droits humains fonctionnent souvent sans autorisation. Lesdéfenseurs des droits humains sont en butte à des actes de harcèlement. Lesavocats Muhannad al-Hassani et Razan Zeitouneh figurent parmi les20 défenseurs des droits humains – au moins – auxquels il est interdit de serendre à l’étranger. En mai 2008, le Groupe de Travail sur les détentions arbi-traires créé par la Commission des Droits de l’Homme de l’ONU, estime quel’incarcération d’Anwar al-Bunni, Michel Kilo et Mahmoud Issa est arbi-traire car ils ont été condamnés pour l’exercice légitime de leur droit à laliberté d’expression à l’issue de procès qui n’avaient pas, loin s’en faut,respecté les normes d’équité internationalement reconnues. L’avocat Anwaral-Bunni a été condamné en avril 2007 à une peine de 5 ans d’emprisonne-ment pour ses activités légitimes en faveur des droits humains. En mai 2007,Michel Kilo et Mahmoud Issa se sont vu infliger une peine de 3 ans de prisonpour avoir signé la «Déclaration Beyrouth-Damas», un texte, signé par quelque300 Syriens et Libanais, qui prône une normalisation des relations entre lesdeux États. Exigeant longtemps la «réintégration» du Liban (détaché de la Syriefrançaise en 1926), la République arabe syrienne ne reconnaît officielle-ment l’existence d’un Liban indépendant que depuis peu de temps et du boutdes lèvres. Michel Kilo a finalement été libéré en mai 2009, mais toutecontestation n’en reste pas moins dangereuse pour les défenseurs. e C.R.

LE SUPPLICE DU DÉFENSEUREn Syrie, il faut une certaine dose de courage ou d’inconscience pourmiliter en faveur des libertés politiques et des droits humains, courage etinconscience que d’innombrables défenseurs paient au prix fort.

jRiad al-Turk,dirigeant del’Alliance nationaledémocratique.Ancien prisonnierd’opinion détenusans jugement de1980 à 1998, il futà nouveaucondamné à14 mois de prisonen septembre2001 pour son rôledans le«Printemps deDamas». © AI

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Cela fait plus de 30 ans que vous vivez en France. Quelle Syrie avez-vousquittée ?En 1975, j’ai quitté Damas pour passer mon doctorat en philosophie. Le

goût de la liberté m’a amené à prendre des positions ouvertement hostiles à lapolitique du régime d’Hafez el-Assad, que ce soit à l’égard du Liban [envahi parl’armée syrienne en 1976] (1) et des Palestiniens, ainsi qu’en faveur des libertésdémocratiques. Pour moi, la politique du général Assad consistait à réprimer toutmouvement de libération nationale et démocratique, qu’il soit palestinien,libanais ou syrien. La Syrie est gouvernée depuis 1963 par deux lois : la loimartiale et l’état d’urgence. Et, depuis l’arrivée du général Assad en 1970, le paysest écrasé par un arsenal législatif et répressif laissé à la discrétion absolue duprésident syrien. En quatre décennies de «cure» sécuritaire, l’État et les institu-tions publiques ont totalement disparu. Il s’agit en fait d’un pouvoir sans État,d’un régime contre l’État.Nous sommes dans une caricature de «despotisme oriental», un système danslequel un semblant de pouvoir exécutif gère les affaires et l’administration, maisoù, dans les faits, il ne fait que gérer la corruption et la violence contre les organescivils. Le pouvoir exécutif n’a aucun pouvoir politique concernant les orienta-tions de politique intérieure ou extérieure, il ne fait que gérer. Si l’on chercheune société civile, on doit bien admettre qu’elle n’est réduite qu’à quelques intel-lectuels. À vrai dire, il n’y a plus de société en Syrie. Il y avait bien une sociétéen formation durant les années 40, 50, à la fin de l’occupation française et dansles premières années de l’indépendance. Ces germes de société remontaient àla fin du XIXe siècle et aux dernières années du régime ottoman, à l’époque dece qu’on a appelé la Nahda [Renaissance]. Mais le coup d’État du 8 mars 1963 estvenu arrêter net toute évolution de la société, au point que l’individu n’existeplus. Un pays où il n’y a pas de droit est un pays où il n’y a pas d’homme. Si onprend la personnalité du citoyen syrien, on verra qu’elle s’est complètementdéstructurée sous la pression d’appareils répressifs en guerre contre la sociétédepuis 40 ans.

«UNE CARICATURE DE “DESPOTISME ORIENTAL”»Philosophe et journaliste syrien indépendant, Hassan Chatila est réfugiéen France depuis 34 ans. En 2006, il nous avait accordé une interviewdont nous reproduisons des extraits restés, hélas, d’actualité.

Comme au temps du Baas irakien, c’est une société où tout le monde seméfie de tout le monde?Parfaitement. Chaque fois qu’une organisation sociale se forme, elle ne tardepas à se disloquer parce qu’il est impossible de nouer des liens sociaux entre lesindividus.

Dans quelles circonstances êtes-vous resté «coincé» sur le sol français ?L’officier des Renseignements (les Moukhâbarât) auprès de l’ambassade de Syrieà Paris a refusé de renouveler mon passeport et j’en ai déduit que mes interven-tions publiques me mettaient en danger. Cela dit, dans ce malheur, j’ai eu dela chance. Je ne suis pas venu «allonger» la liste des «disparus» syriens et mafamille n’a pas été spécialement inquiétée. Il faut dire que je ne représente pasune menace pour le pouvoir syrien, je ne suis pas un responsable politique, jen’ai ni pris les armes ni appelé à prendre les armes contre le pouvoir. Mais j’aieu de la chance car les intimidations à l’encontre des familles et des prochessont monnaie courante. Regardez le cas du journaliste Ali Abdallah, membredu Forum Atassi. En mars [2006], il était arrêté pour avoir à nouveau manifestédevant la Cour suprême de Sûreté de l’État et réclamé la levée de l’État d’urgence.Non contents de l’arrêter, les services de sécurité ont également incarcérédeux de ses fils, Muhammad Ali et Omar. Il a été détenu deux fois depuis l’in-terdiction du Forum en 2005.

Après la mort d’Hafez el-Assad et l’intronisation de son fils Bachar, d’au-cuns avaient parié sur un «Printemps de Damas». C’était du vent ?C’était une illusion. La succession ne pouvait pas se faire dans le sang. Il fallaitdresser un écran de fumée, nourrir des illusions. Six mois après l’investiture dufils, la répression était bel et bien revenue, comme en témoigne l’arrestationde plusieurs dizaines d’intellectuels et d’hommes politiques et condamnés à despeines de dix ans.

Les Frères musulmans, bête noire et alibi du régime dans sa répression, ont-ils évolué ?Historiquement, ils portent une lourde responsabilité dans la pérennité durégime baasiste. En 1980, alors que l’opposition de gauche syrienne commen-çait enfin à adhérer progressivement au concept de démocratie libérale

parlementaire, la Confrérie isla-miste a préféré fonder sa stratégiesur la prise du pouvoir par lesarmes. Cela a permis au régime deréprimer dans le sang les Frèresmusulmans, d’embastiller toute lagauche démocratique et dedissoudre tous les ordres profession-nels.

Dans un jeu aussi piégé, quelle estla marge de manœuvre des ONGde défense des droits humains?Les ONG syriennes sont en crise.Indice d’une société civile éclatéeet méfiante, quand elles ne sont pasréprimées, elle s’avèrent incapablesde coopérer. Dans ce contexte, lerôle d’ONG internationales commeAmnesty est essentiel pour les aiderà se fédérer. ePropos recueillis parPascal Fenaux

jÀ l’occasion de la Journéeinternationale des Droits del’Homme, des opposants syriensréfugiés au Liban manifestentpour le respect des droits humainsen Syrie. Beyrouth, 10 décembre2009. © REUTERS/Cynthia Karam

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FORMATIONS

Consultez sans tarder notre programme des forma-tions 2010 ! Vous y retrouverez les modules sur lapeine de mort, les réfugiés, les droits des femmes,la torture, la mission et le fonctionnement d’Am-nesty, etc. Vous y découvrirez deux nouveauxateliers de courte durée (01h30) : l’un porte sur lesdifférentes façons de lutter contre l’injustice avecAmnesty et l’autre est consacré à des échanges surla manière de parler de ses positions en faveur desdroits humains dans son entourage. De plus, pourla première fois, nous vous inviterons à suivre uncycle complet sur la campagne «Exigeons ladignité». Notre catalogue est disponible en formatpdf. Nous vous l’enverrons par e-mail ou par cour-rier sur simple demande. Vous pouvez égalementl’obtenir sur notre site internet et vous inscrire enligne à l’adresse suivante : http://www.amnesty.beLes premières formations de l’année aurontlieu à Bruxelles.

13 février de 10h00 à 16h00La protection internationale des droits fondamentaux

27 février de 09h00 à 13h00Les droits des femmes

6 mars de 10h00 à 11h301001 façons de soutenir les droits humains

18 mars de 19h30 à 21h00Militant-e et fier-re de l’être… Comment en parler etdéfendre ses positions ?

20 mars de 09h30 à 16h30Mission et fonctionnement d’Amnesty ePour tout renseignement complémentaire, contactez-nouspar e-mail à [email protected] ou par téléphone au 02 538 81 77

FESTIVAL PAROLES D’HOMMES

«NOUS NE NOUS ÉTIONS JAMAISRENCONTRÉS…»À HERVE, SOUMAGNE, BLEGNY ETVERVIERSDU 30 JANVIER AU 13 FÉVRIER 2010

Réservations au 087 66 09 07Infos : Clara Beelen 087 78 62 09 – 0498 03 09 66 –[email protected]

Pensez-vous que la mobilisation qui s’orga-nise à l’extérieur de l’Iran pour soutenir lesdéfenseurs iraniens soit réellement en

mesure de peser sur le sort de ces prisonniersd’opinion ?Je pense que c’est très important et que cela peuteffectivement avoir une certaine influence sur leursort. J’ai pu le constater moi-même dans monmétier d’avocate où cela n’est jamais resté sanseffets. Cela s’est également vérifié après mon arres-tation en juillet dernier. Je n’aurais jamais pu êtrelibérée aussi rapidement si une mobilisation aussiimportante n’avait pas été organisée autour demon cas. Pour être efficaces, ces campagnes desensibilisation doivent absolument atteindre unniveau très important afin que le gouvernementcomprenne que les inconvénients de ce genre d’in-carcération sont supérieurs à ses avantages et qu’ildevient dès lors plus intéressant de libérer cettepersonne. Il s’agit là d’un point fondamental. Bienentendu, les autorités enjoignent systématique-ment les parents, et même les avocats desprisonniers politiques, de «rester discrets et ne pasfaire de bruit» autour du cas de leurs proches dansla mesure où toute campagne internationale pour-rait «s’avérer contre-productive». Il s’agit là d’undiscours récurrent émanant des tribunaux révolu-tionnaires et des services de renseignementsadressé tant aux proches des prisonniers politiquesqu’à ces derniers directement. L’expérience montrequ’il ne faut pas écouter ce type de «conseil» parceque le prisonnier se trouve de toute façon souspression et n’est donc pas en mesure de raisonnersereinement.Nous, qui travaillons sur ces cas d’atteinte flagranteaux droits humains, savons combien la médiatisa-tion et les pressions internationales sontimportantes pour que ces personnes puissent êtrelibérées ou que leurs conditions d’emprisonne-ment soient moins pénibles et plus généralementpour que les droits humains soient davantagerespectés. Vous me direz que dans un contexte oùl’une des accusations systématiquement adresséesaux défenseurs des droits humains en Iran estqu’ils sont «liés à étranger», les pressions internatio-nales qui s’exercent pour qu’ils soient libérésrisquent dès lors de fournir un bon prétexte aurégime pour justifier et accentuer la répression.

Sauf que dans mon métier d’avocate, j’ai vu passerde nombreux cas où des prisonniers politiques quin’avaient bénéficié d’absolument aucun soutieninternational étaient de toute façon accusés par lesautorités de la République islamique d’être«soutenus par l’étranger». Pour la République isla-mique, toute personne active dans le domaine desdroits humains, qu’elle soit connue ou pas endehors de l’Iran, ne peut être que liée à des «agentsde l’extérieur». Ils n’ont donc même pas besoin deprétexte dans la mesure où cette théorie est dura-blement inscrite dans leur esprit.

On a assisté récemment à des changements ausein de la Justice iranienne avec la nomination àla tête du pouvoir judiciaire d’un nouveau chef enla personne de Sadegh Laridjani – frère du prési-dent du Parlement Ali Laridjani – ainsi que celled’un nouveau Procureur général de Téhéran enlieu et place du très dur et controversé SaidMortazavi. Pensez-vous que ces nouvelles nomi-nations pourraient un tant soit peu élever leniveau de liberté en Iran et bénéficier à des mili-tants de droits humains comme vous?On pourrait en effet éventuellement imaginerqu’avec le départ de Said Mortazavi (1), la situationpuisse s’améliorer, mais je ne pense pas que lechangement puisse ne tenir qu’à quelques nomina-tions. Des individus un peu plus modérés peuventse montrer effectivement enclins à une certaineclémence. Mais le problème, c’est que le chef dupouvoir judiciaire en Iran n’est pas indépendant.Nous n’avons d’ailleurs pas de juges indépendantsen Iran. Tous les juges des tribunaux révolution-naires qui doivent se prononcer sur des caspolitiques reçoivent tous directement leurs ordresdu ministère du Renseignement, lequel est lui-même désormais entièrement sous la coupe desGardiens de la Révolution [Pasdarans, armée idéo-logique du régime qui s’est substituée à l’arméerégulière]. Dans ces conditions, aucun changementnotable n’est envisageable. La libération d’unprisonnier politique peut certes faire croire qu’uneévolution se dessine, sauf que cette personne n’afinalement pu être libérée que contre le paiementd’une caution extrêmement lourde(2) et qu’elle esttout de même condamnée à une longue peine deprison (3).

C O O R D I N A T I O N S

«LE RÉGIME IRANIEN ABESOIN D’UN ENNEMIEXTÉRIEUR»Shadi Sadr est une journaliste et avocate iranienne spécialisée dans la défense des droitshumains et en particulier des droits des femmes en République islamique d’Iran. Elle s’estnotamment illustrée en militant pour l’abolition de la lapidation en Iran. Emprisonnée enjuillet 2009 dans la prison d’Evin dans le contexte des manifestations contestant laréélection de Mahmoud Ahmadinejad à la présidence de la république, Shadi Sadr a étélibérée onze jours plus tard à la suite de nombreuses pressions internationales, dont uneAction Urgente d’Amnesty International. Elle a reçu plusieurs prix internationaux au coursde l’année 2009. Nous l’avons rencontrée à Bruxelles en décembre dernier.

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ASSEMBLÉE

GÉNÉRALE

2010

L’Assemblée générale (AG) ordinaire d’AIBF estconvoquée le 20 mars 2010 à 09h30 au siège de l’as-sociation. Conformément aux statuts, une AGstatutaire n’est valable que si 2/3 des membres sontprésents ou représentés. AIBF comptant actuelle-ment plus de 25 000 membres, il est peu probableque le quorum sera atteint et une seconde AG seradonc convoquée le 24 avril 2010 à Bruxelles-Capi-tale, AG qui pourra délibérer quel que soit lenombre de membres présents ou représentés. LeCarrefour Finances aura lieu le 17 avril au siège del’association.

RÉSOLUTIONSLes projets de résolution et les amendements auxstatuts et au règlement d’ordre intérieur doiventêtre adressés au Conseil d’administration (CA) aumoins 60 jours avant la date de l’AG, soit pour le 23février 2010. Les projets et les amendements intro-duits après l’écoulement du délai sontautomatiquement écartés à l’exception des projetsde résolutions d’urgence.Les projets de résolution et les amendements auxstatuts et au règlement d’ordre intérieur ne sontrecevables qu’à la condition d’être appuyés par lasignature de 5 membres au moins.Toute résolution soumise à l’AG doit être accompa-gnée d’une brève déclaration d’intention et desmotifs de la résolution. Toute résolution dontl’adoption aurait des répercussions non négligeablessur l’utilisation des ressources financières et/ouhumaines de la section doit, pour être recevable,être introduite par des considérants, soit accom-pagnée d’une notice qui explique son lien avec leplan stratégique ou, à tout le moins, avec le planopérationnel de la section.

CANDIDATURES AU CA OU AU COMITÉ D’ÉVALUATION ÉTHIQUE DESPARTENARIATSConseil d’administrationSeuls les membres de l’association depuis au moins2 ans, en règle de cotisation, peuvent poser leurcandidature au poste d’administrateur. Sauf déro-gations prévues par le règlement d’ordre intérieur,les candidatures au CA doivent être envoyées parécrit au moins 60 jours avant la date de l’AGannuelle, soit pour le 23 février 2010, et adresséesau siège de l’association, à l’attention de la prési-dente du CA (Christine Bika). Les candidat(e)sjoignent à leur acte de candidature un bref curri-culum vitae (une dizaine de lignes) et une lettre demotivation.Comité d’évaluation éthique des partenariatsLes candidats au Comité d’évaluation éthique despartenariats doivent compter au moins 2 ans d’an-cienneté en tant que membres d’AIBF et être enrègle de cotisation. Ils doivent envoyer leur candi-dature au Secrétariat national au moins 60 joursavant l’AG, soit pour le 23 février 2010, sauf déroga-tion accordée par cette dernière. e

Comment les autorités iraniennes peuvent-ellespenser que les aveux forcés des personnescondamnées récemment dans des procès à huisclos rappelant ceux de Moscou puissent paraîtrecrédibles aux yeux de l’opinion iranienne et de lacommunauté internationale?Certes, à l’extérieur de l’Iran, peu de gens croientà ce type d’aveux. Cependant, en Iran, beaucoup ycroient, en particulier dans les couches les moinséduquées de la population ou dans celles qui viventdans les petites villes de province. Ceux-là croientencore au régime. C’est une des raisons pourlesquelles la pratique des «aveux» peut continuer àfonctionner. Mais, plus fondamentalement, si lesystème des «aveux» peut perdurer, c’est parce queles personnes qui les extorquent en ont besoin.Tout le système de la République islamique reposesur la théorie du complot grâce à laquelle ellecroit pouvoir se régénérer. Si la République isla-mique ne dispose pas dans son arsenal idéologiqued’un «ennemi extérieur», alors l’identité de cerégime risque d’être remise en question. Il ne fautpas oublier que ce régime s’est construit et s’eststabilisé au cours d’une guerre terrible [la guerreIran-Irak de 1980-1988] et qu’à cette époque, l’en-nemi extérieur, incarné par Saddam Hussein etses alliés occidentaux, était bien réel. Cependant,après la guerre, cette réalité n’a plus vraiment étéde mise, sauf qu’il était vital pour le régime que laperspective de la menace d’un «ennemi extérieur»reste présente dans les esprits, comme c’est souventle cas avec les régimes totalitaires.Dans un tel contexte, il est donc très importantpour le régime de pouvoir accuser ceux qui veulentle changement d’être des «agents de l’étranger» et deprouver ainsi que les revendications en faveur duchangement n’émanent pas de l’intérieur de lasociété iranienne. «Tout cela vient d’individus formés àl’extérieur de l’Iran. D’ailleurs l’opinion intérieure est avecnous», entend-on ainsi dire. J’ai moi-même étéconfrontée à ce type d’accusations. Lors des inter-rogatoires, on me disait : «vous qui défendez les droitsdes femmes, vous êtes en réalité des agents l’Amérique etvous travaillez à la réalisation du projet américain deGrand Moyen-Orient» (4). Lorsque j’expliquais que, «non,je mène ce combat parce que j’ai constaté moi-même qu’ily avait un problème au quotidien pour les femmes enIran», ils me répondaient que, sans m’en rendrecompte j’étais en train de travailler pour les Améri-cains. Dans ces conditions, si je prenais consciencede cela mais que, malgré tout, je poursuivais mesactivités, alors je devenais une espionne au serviced’une puissance étrangère. Il s’agit là pour eux

d’une théorie inébranlable vis-à-vis de laquelleaucun compromis, aussi minime fût-il, n’estpossible.

Concernant la peine de mort, il semble que laRépublique islamique ait recours, depuis bienavant les élections de juin dernier, à des exécu-tions visant particulièrement les crimes de droitcommun en jouant sur la sensibilité de la popu-lation concernant des criminels ou despédophiles dans une démarche qui vise à fairemieux accepter la peine de mort en Iran ...Tout à fait. D’ailleurs, il y a deux ans, unecampagne dont le but était de «nettoyer les rues desvoyous et de la racaille» avait été menée de façonextrêmement brutale et s’était soldée par l’exécu-tion d’un grand nombre d’entre eux. «Ce sont eux quiviolent vos enfants», avait alors affirmé le régimepour justifier cette répression très dure. Or, bonnombre de personnes arrêtées lors de cettecampagne, certes pas toutes, étaient des meneursde l’insurrection spontanée qui avait éclaté lorsquele prix de l’essence avait connu une forte augmen-tation et que la population avait incendié desstations-service. Bien entendu, ils n’ont pas étéaccusés ouvertement de cela. Ils ont alors été jugéset exécutés très rapidement, en moins d’un mois.Dans ces conditions, la population n’a manifestéaucune empathie à l’égard de ces personnes présen-tées uniquement comme de dangereux criminels.Idem pour ces Kurdes qui ont été récemmentexécutés après avoir été présentés comme des «terro-ristes poseurs de bombes» ou des activistes politiquesprésentés à tort comme «membres de l’organisation desMoudjahiddines du peuple» et donc qualifiés de «terro-ristes». Le régime joue ainsi habilement sur la cordesensible de la population et sait pertinemmentque les qualificatifs de «voyou», de «violeur» ou de«terroriste» suffisent à susciter de l’indifférence.ePropos recueillis par Pierre Vanrie

(1) Said Mortazavi, désormais adjoint du Procureur général etégalement en charge de la lutte contre la contrebande, s’estrendu célèbre pour sa sévérité à l’égard de la presse et pour sonimplication dans la mort en détention en 2003 de la journa-liste irano-canadienne Zahra Kazemi.(2) La journaliste Fariba Pajooh arrêtée le 22 août 2009 n’a puêtre libérée fin décembre que grâce au paiement d’une cautiond’environ 50 000 dollars.(3) La journaliste Hangameh Shahidi, libérée sous caution enattendant que son cas soit conclu en appel, a été condamnée àsix ans de prison.(4) Le «Grand Moyen-Orient» était un concept néo-conservateurforgé par l’administration Bush visant à remodeler le Moyen-Orient et à y insuffler une culture politique censée pacifier les relations entre cette vaste région et les États-Unis.

jShadi Sadr reçoit laMensenrechtentulp(«Tulipe des Droits humains»)des mains duministrenéerlandais desAffaires étrangères Maxime Verhagen.La Haye,9 novembre 2009.© AP Photo/Peter Dejong

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12 Libertés ! Janvier 2010

M O U V E M E N T

BHOPAL, 25 ANS APRÈS

Le 2 décembre 2009, cela faisait 25 ans une usine depesticides de la société Union Carbide explosait eninde, à Bhopal. Au moins 20000 personnes y perdi-

rent la vie, dans les jours, les semaines et les mois quisuivirent. Aujourd’hui, le site n’est toujours pas déconta-miné et la population n’a ni assez d’eau potable ni un accèssuffisant aux soins médicaux. Personne n’a jamais étéinculpé pour la catastrophe (1). La catastrophe industriellede Bhopal provoqua une onde de choc et d’indignationmondiale et souleva des questions sur la justiciabilité desentreprises. Le débat ne mena cependant pas à des résul-tats satisfaisants pour la population de Bhopal. Seule uneinfime partie des victimes reçut une indemnisation.

Les terrains industriels affectés n’ont jamais été déconta-minés correctement. L’usine a depuis lors été rachetéepar la société Dow Chemical Company, laquelle refusetoute responsabilité dans la catastrophe et la contamina-tion de Bhopal.Le 2 décembre 2009, une action a donc été organiséedevant le siège européen de Bhopal à Bruxelles pourdemander que Dow Chemical assume ses responsabilitésen collaborant avec les autorités indiennes pour assainirl’environnement autour du site contaminé et en indemni-sant financièrement les victimes.

(1) Voir Libertés ! n° 458 de novembre 2009.

Dès son arrivée à la Maison Blanche, le présidentObama posait un geste fort en signant l’ordre defermer la prison de Guantanamo avant le 22

janvier 2010. Aujourd’hui, le bilan est mitigé. Malgré uneréelle volonté de la nouvelle administration de rompre avecla politique de son prédécesseur, les résultats concrets sefont attendre. En janvier 2009, Amnesty pensait mani-fester une dernière fois pour que Guantanamo soit fermé,pour qu’on juge les prisonniers ou qu’on les libère enaccord avec les normes du droit international.

Le 21 janvier 2010, 1 an et 1 jour après le début du mandatdu président Barack Obama, Amnesty International rappel-lera donc les obligations internationales des États-Unis etles promesses faites par le nouveau présidentaméricain. eQUAND ? Le jeudi 21 janvier de 12h30 à 13h15.OÙ ? Face à l’ambassade des États-Unis, boulevard duRégent 27, 1000 Bruxelles. Rassemblement côté avenue desArts, entre la rue de la Loi et la rue Guimard.RENSEIGNEMENTS : [email protected]

MANIFESTATION

CONTRE LE TERRORISME,LA JUSTICE

SECRÉTARIAT NATIONAL AIBF

Rue Berckmans 9, 1060 Bruxelles 02 538 81 77Fax: 02 537 37 29www.amnesty.be

SECRÉTARIAT INTERNATIONAL

Easton Street 1, London WC1X ODWUnited Kingdom00 44 207 413 5500

AMNESTY INTERNATIONAL VLAANDEREN

Kerkstraat 156, 2060 Antwerpen 603 271 16 16

RESPONSABLES RÉGIONAUX D’AMNESTY

BRABANT WALLON

Jean-Philippe CHENUchemin de la Terre Franche 131470 Genappe010 61 37 73 – [email protected]

BRUXELLES

Luis SCHOEBERLAvenue du Loriot 221150 Bruxelles (Woluwe-Saint-Pierre)02 660 08 [email protected]

HAINAUT ORIENTAL

Nicole GROLETav. Elisabeth 6, 6001 Marcinelle071 43 78 [email protected]

LIÈGE

Poste à pourvoirChristine BIKAResponsable de la gestion de la permanence – C/O Bureau régional d’AI –rue Souverain Pont 11 – 4000 Liège – du lundi au vendredi de 13h30 à 17h3004 223 05 [email protected]

LUXEMBOURG

Daniel LIBIOULLEAvenue de la Toison d’Or 266900 Marche en Famenne084 31 51 [email protected]

NAMUR

Romilly VAN GULCKRue Vivier Anon 8, 5140 Sombreffe071 88 66 [email protected]

WALLONIE PICARDE

Marie NOËLRue Cheny 1, 7536 Vaulx069 77 66 13 – 0499 13 57 [email protected]

Ce sont aussi 80 groupes locaux qui, sur leterrain, font un travail d’action et desensibilisation aux droits humains. Pourvous y joindre, contactez votre régionale.

© Bruno Brioni

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Libertés ! Janvier 2010 13

I S A V E L I V E S . B E

Le 8 novembre 2007, des policiers ont abattul’homme d’affaires Julião Naftal Maculependant son sommeil, dans un hôtel de

Massinga, dans le sud du pays (province d’Inham-bane). Il a par la suite succombé à ses blessures.Personne n’a été traduit en justice pour cemeurtre. Lorsque Julião Naftal Macule est arrivéà l’hôtel, la veille de sa mort, une personneemployée dans l’établissement, croyant recon-naître Agostinho Chauque, un criminelrecherché, a prévenu la police. Les forces del’ordre ont encerclé le bâtiment. Une dizaine depoliciers, parmi lesquels des membres de la Forced’intervention rapide, ont fait irruption dans lachambre de Julião Naftal Macule et l’ont tué. Desresponsables de la police ont annoncé avoircapturé et tué Agostinho Chauque, présenté

comme «l’Ennemi public n° 1». Après que desjournalistes eurent demandé à voir la dépouille,la police a finalement admis ne pas avoir capturéAgostinho Chauque, affirmant néanmoins qu’elleavait tué un «dangereux criminel». Le lendemain,la police a fait savoir à la famille de Julião NaftalMacule qu’elle l’avait pris par erreur pour Agos-tinho Chauque. À la demande pressante de la famille, uneautopsie a été pratiquée. Elle a révélé que JuliãoNaftal Macule, touché à la cuisse gauche, s’étaitvidé de son sang et avait fini par succomber àl’hémorragie. En mai 2009, le procureur générala indiqué à Amnesty International que sept poli-ciers avaient été mis en cause dans le cadre de cetteaffaire. Aucune information supplémentaire n’aété communiquée à la famille. e

MODÈLE DE LETTRE

Monsieur le Procureur général,Confondu avec Agostinho Chauque, un criminel recherché, l’homme d’affaires Julião Naftal Macule a été

abattu dans son sommeil par la police le 8 novembre 2007, dans un hôtel de Massinga. Personne n’a été traduiten justice pour ce meurtre. Lorsque Julião Naftal Macule est arrivé à l’hôtel, la veille de sa mort, une personneemployée dans l’établissement, croyant le reconnaître, a prévenu la police. En tant que membre/sympathisant(e)d’Amnesty International, je vous demande, monsieur le Procureur général, que soit menée une enquêteexhaustive, indépendante et impartiale sur la mort de Julião Naftal Macule, et que les responsables présuméssoient traduits en justice. Je vous prie, monsieur le Procureur, d’agréer l’expression de ma considérationdistinguée.

Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À :Exmo. Sr. Dr. Augusto Paulino, Procurador Geral da República, Procuradoria Geral da RepúblicaMaputo, MozambiqueFax : +258 21 492 758/80

COPIE À ENVOYER À :Ambassade de la République du Mozambique, Boulevard Saint-Michel, 97B – 1040 Bruxelles (Etterbeek)E-mail : [email protected] ou [email protected] : 02 732 06 64

MOZAMBIQUE

HOMME D’AFFAIRES TUÉPAR BALLES

BONNESNOUVELLESDans tous les pays du monde, des gens sontlibérés grâce au travail des membres d’Amnesty.Des témoignages émouvants nous parviennentdes prisonniers libérés ou de leur famille. Ilsmontrent qu’une action de masse peut avoir desrésultats pour un meilleur respect des droitshumains.

BELGIQUECONVENTION RATIFIÉELe 22 décembre 2009, la Belgique a ratifié la Conventionsur les armes à sous-munitions au siège des Nationsunies à New York, portant à 26 le nombre d’États àl’avoir ratifiée. En 2006, la Belgique avait été le premierÉtat au monde à interdire la production, le transfert, lestockage et l’utilisation d’armes à sous-munitions, ainsique leur financement un an plus tard. Peu de tempsaprès, la Norvège prenait l’initiative d’un processusinternational conduisant à l’adoption de la Conventionsur les armes à sous-munitions. En mai 2008, plus d’unecentaine de pays avaient approuvé son texte, avant quela Convention ne soit signée à Oslo par 94 pays. Plus de80 pays détiennent actuellement plusieurs milliards desous-munitions et 15 pays en ont utilisé dans plus de 30pays et territoires de par le monde. e

CHINEDÉFENSEURS RELÂCHÉSZhuang Lu, une femme de 27 ans qui travaillait pourl’Open Constitution Initiative (OCI, également appeléeGongmen en chinois) – une organisation d’aide et derecherche juridiques – séjourne actuellement chez sesparents, dans la province du Fujian (sud-est de la Chine).Selon ses amis, la police de Pékin a renvoyé Zhuang Ludans la province du Fujian le 23 août. Elle l’avait relâchéela veille. La police lui a ordonné de ne pas parler de sadétention aux médias. Le 29 juillet, elle avait été inter-pellée par la police en même temps que Xu Zhiyong,l’avocat qui a fondé l’OCI, car ils étaient soupçonnésd’«évasion fiscale». La police de Pékin a relâché Zhuang Lule 22 août. Le 23 août, Xu Zhiyong a été libéré souscaution en attendant les conclusions de l’enquête. e

BRÉSILDROIT AU LOGEMENTLes familles qui avaient été violemment expulsées enaoût 2009 du bidonville Olga Benário, dans le sud de laville de São Paulo, ont remporté une victoire décisivedans le combat qu’elles mènent depuis longtemps pourfaire respecter leur droit au logement. Soumises à despressions nationales et internationales, les autorités del’État de São Paulo ont accepté de saisir le terrain dontles familles avaient été chassées ainsi qu’une parcelleadjacente à Capão Redondo. Le terrain servira à cons-truire des logements sociaux pour les familles expulsées.Le Conseil municipal a assuré qu’il allait prendre desmesures d’urgence en leur faveur pendant les travaux,notamment sous la forme d’allocations logement.D’après des ONG locales, le changement d’attituderadical des autorités est en partie lié aux pressions inter-nationales exercées à la suite du lancement de l’actionurgente d’Amnesty International. e

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© Privé

Page 14: Libertés Janvier 2010

Kang Gun, ressortissant sud-coréen,a été enlevé en Chine par desagents nord-coréens. Il a été vu

pour la dernière fois le 4 mars 2005 dansla province du Jilin, frontalière de la Coréedu Nord. Selon les informationsrecueillies, il a été emmené en Corée duNord. Détenu durant six mois dans uncentre dépendant de l’Agence de sécuriténationale à Chongjin, dans la provincedu Hamgyong du Nord, il a été soumis àdes interrogatoires et peut-être torturé. Ila ensuite été conduit dans un centre dedétention de la capitale, Pyongyang. Ilpourrait subir de nouvelles tortures, voireêtre exécuté. Kang Gun, qui a grandi enCorée du Nord, était agent dans lesservices de la sécurité nationale. En 2000,il a fui son pays, gagnant d’abord la Chinepuis la Corée du Sud. Il a acquis la natio-nalité sud-coréenne. En 2004, il militaitpour faire connaître les violations des

droits humains perpétrées dans son paysd’origine et aidait les Nord-Coréens quicherchaient à gagner la Corée du Sud. Enfévrier de cette année-là, il a transmis àune chaîne de télévision japonaise desimages tournées secrètement dans uncamp pour prisonniers politiques de laprovince du Hamgyong du Sud. Descentaines de Nord-Coréens franchissentchaque année la frontière avec la Chine.Depuis les années 1990, des milliers depersonnes ont été arrêtées dans ce pays etrenvoyées de force en Corée du Nord, oùun grand nombre sont placées en déten-tion durant de longues périodes etsubissent la torture. Certaines sont exécu-tées. e

14 Libertés ! Janvier 2010

I S A V E L I V E S . B E

Le 3 mars 2008, les autorités israé-liennes arrêtaient Khaled Jaradat,enseignant du secondaire à Silat

al-Harthiya, un village de Cisjordanie. Il estdétenu sans inculpation ni jugement enIsraël, à la prison de Ketziot. Un moisaprès son arrestation, Khaled Jaradat s’estvu notifier son placement en détentionadministrative pour une durée de sixmois. La mesure a été renouvelée enoctobre 2008, puis une deuxième fois enavril 2009. Selon le Shabak (Service deSécurité générale), Khaled Jaradat estmembre du Djihad islamique, une organi-sation radicale palestinienne responsabled’actions violentes contre des civils israé-

liens et interdite en Israël. Comme leShabak n’a présenté aucun élément àl’appui de ses allégations, Khaled Jaradatet son avocat ne sont pas en mesure decontester sa détention devant les tribu-naux. Khaled Jaradat a été placé plusieursfois en détention administrative ; lapériode la plus récente s’est dérouléeentre août 1998 et mai 2001. Il a ensuiteété assigné à résidence dans sa ville natalependant une année. Ses enfants ontgrandi sans la présence régulière de leurpère. Son épouse, Um Hadi, ne peutactuellement aller le voir en prison car sonpermis de visite a expiré en mars 2009 etn’a pas été renouvelé. e

TERRITOIRES PALESTINIENSOCCUPÉS

DÉTENU SANSJUGEMENT

TARIFS POSTAUXLettres (jusqu’à 50 grammes)Belgique: 0,59e; Europe: 0,90e; restedu monde: 1,05e. La surtaxe aérienneest incluse (étiquette requise).

COMMENT AGIR EFFICACEMENT ?Les cas exposés concernent des victimes de violations des droits humains dont s’occupe Amnesty International. Chaque appel compte.Un texte (à écrire ou à photocopier) vous est proposé pour chaque cas. Dans l’intérêt des victimes, écrivez en termes mesurés et cour-tois aux adresses indiquées. Ces lignes sont lues partout dans le monde par les quelque 1800000 membres d'Amnesty International.Elles sont reproduites dans de nombreux pays par des dizaines de journaux et constituent la clé de voûte de l'action du mouvement.

MODÈLE DE LETTRE

Monsieur le Président,Kang Gun a été enlevé en Chine par des agents nord-coréens en mars

2005. Détenu et sans doute torturé pendant six mois à Chongjin, il a ensuite étéconduit dans un centre de détention de Pyongyang. Il risque de nouvellestortures, voire d’être exécuté. Monsieur le Président, en tant quemembre/sympathisant(e) d’Amnesty International, je vous demande, de remettreen liberté Kang Gun et de l’autoriser à quitter la Corée du Nord, à moins qu’il nesoit inculpé d’une infraction dûment reconnue par la loi et traduit sans délaidevant les tribunaux, dans le respect des normes d’équité. Je vous demandeégalement de reconnaître la détention de Kang Gun et de révéler le lieu où il setrouve. Je vous prie, Monsieur le Président, d’agréer l’expression de maconsidération distinguée.

Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À :Kim Jong-ilChairmanNational Defence CommissionPyongyang, République populaire démocratique de Corée

COPIE À ENVOYER À :Ambassade de la République populaire démocratique de Corée73, Gunnersbury Avenue,W5 4LLOND LondresFax : +44 20899220

MODÈLE DE LETTRE

Mon Général,Arrêté le 3 mars 2008, Khaled Jaradat est placé en détention

administrative, c’est-à-dire, sans inculpation ni jugement en Israël, à la prison deKetziot. Selon le Shabak, Khaled Jaradat est membre du Djihad islamique. Mais,sans preuve à contester, Khaled Jaradat et son avocat ne sont pas en mesure decontester cette détention devant les tribunaux. En tant quemembre/sympathisant(e) d’Amnesty International, je vous demande la remise enliberté de Khaled Jaradat, à moins qu’il ne soit inculpé d’une infraction dûmentreconnue par la loi et jugé sans délai et de manière équitable. Je vous prie, mongénéral, d’agréer l’expression de ma considération distinguée.

Signature : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Nom: . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

LETTRE À ADRESSER À :Major General Gadi ShamniCommander of the Israel Defense Forces in the West BankGOC Central CommandMilitary Post 01149, Battalion 877, Israel Defense Forces, IsraëlFax : +972 2 530 5724

COPIE À ENVOYER À :Ambassade de l’État d’Israël, Avenue de l’Observatoire, 40B – 1180 – Bruxelles (Uccle)E-mail : [email protected] : 02 373 56 17

CORÉE DU NORD

ENLEVÉEN CHINE

© Privé

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Page 15: Libertés Janvier 2010

A G E N D ATHÉÂTRE AU POCHETERRORISM

Ecrite avant le 11 septembre, Terrorism meten scène le terrorisme insidieux qui teinteles rapports quotidiens entre les individus.La violence raciale, sexuelle, psycholo-gique, hiérarchique que chacun dans lasociété d’aujourd’hui peut subir ou fairesubir à ses semblables. Un groupe de passagers est bloqué à l’aé-roport suite à une alerte à la bombe, unefemme reçoit son amant chez elle maisleur jeu sexuel tourne à la violence, unesecrétaire harcelée se pend dans la salle derepos de son entreprise, une vieille dameinvite son amie à empoisonner son gendre«ethnique», des pompiers visionnent desphotos morbides de catastrophes et sedéfoulent sur le souffre-douleur de labrigade...Les frères Presnyakov exposent avec unhumour acide et une acuité certainel’effet de la terreur sur nos consciences,cette obsession grandissante de la sécu-rité (ou de l’insécurité) ainsi que ce que lapeur de l’Autre provoque dans nos incons-cients à la fois collectifs et individuels. Lapièce, écrite en 2000, est précurseure del’air du temps actuel où les effets du terro-risme sont profondément inscrits enchacun de nous aujourd’hui. La peur duterrorisme est désormais un phénomènequi s’immisce de plus en plus sournoise-ment dans les facettes intimes, familiales,professionnelles et sociales de nos collec-tivités. Âgés respectivement de 40 et 35 ans, lesfrères Oleg et Vladimir Presnyakov viventen Sibérie. Inséparables, ils sont à la foisdramaturges, scénaristes, metteurs enscène, producteurs et acteurs. Leurs piècessont animées d’un esprit sardonique etimpudent. Les frères Presnyakov se nour-rissent des conversations entendues dansla rue et les commerces. Écrite en duocomme toutes les autres, Terrorism est laplus connue de leurs dix pièces. A sa créa-tion au Théâtre d’art de Moscou en 2002,elle a reçu le Prix de la meilleure nouvellepièce. eDu 12 janvier au 6 février 2010 à 20h30 (relâcheles dimanches et lundis).Bois de la Cambre, 1A Chemin du Gymnase - 1000BruxellesRéservations : 02 649 17 27 [email protected]

MÉGAPHONES ETBULLDOZERS

Le 16 mars 2003, Rachel Corrie, une jeuneAméricaine de 23 ans, périt enseveliedevant un bulldozer blindé de l’armée israé-

lienne. En compagnie d’autres pacifistesoccidentaux, elle tentait de s’opposer à la destruc-tion de maisons palestiniennes dans le sud de labande de Gaza à quelques mètres de la frontièreégyptienne. Après une enquête sommaire, l’arméeisraélienne a classé l’affaire, s’exonérant de toute responsabilité. Avec patience et obstination, Simone Bitton mènel’enquête, confronte les images du drame, les témoignages des compagnons de la jeune activiste et les affirmationsde l’armée israélienne. Au-delà d’une impossible reconstitution des faits, elle cherche avant tout à comprendre lecontexte du drame et ce qui a poussé ces jeunes gens à se lancer dans un combat généreux et inégal. Dans les e-mailsque Rachel envoyait à sa famille, on la sent partagée entre la lucidité et l’idéalisme, et un sentiment d’accomplis-sement personnel qui contraste avec la dureté du réel. Simone Bitton ne cherche pas à faire de la jeune Américaineune sainte ou un martyr. Entre naïveté et inconscience, le don de soi obéit autant à une quête de sens personnellequ’à des motivations altruistes. Puisant dans toutes les sources d’images disponibles, qu’elles proviennent descaméras de surveillance israéliennes, de films et photos amateurs ou de journaux personnels, la réalisatrice s’inter-roge aussi sur le statut et la place de l’image dans ce type de combat. Et comme le constate avec fatalisme une compagnede Rachel, la mort d’un Palestinien anonyme ne vaudra jamais un film.. e Gilles BechetRachel, de Simone Bitton, Sortie le 6 janvier 2010 au Flagey

LE BAL DESMENSONGES

Cela promettait d’être une belle soirée. Une entre-prise pharmaceutique invite tout son personnelà une réception dans un château. Tout le monde

est sur son 31 et tout le monde a des nœuds dans l’es-tomac, car sous le couvert du lancement d’un nouveauproduit, il s’agit en réalité d’une épreuve de coachingoù une conversation impromptue entre un verre demousseux et un plateau de zakouskis cache une évalua-tion des compétences, décisive quant au futur de lacarrière. On assiste à un jeu de massacre et de faux-semblants, alimenté par le moulin à rumeurs, car l’entreprisea quelques soucis financiers. Dans une écriture astucieuse, le réalisateur revient sur des scènes-clés en dévoilant certainséléments volontairement occultés, en fonction du point de vue des personnages. Un jeu de caches et contre-cachesqui réserve des surprises, celui qui apparaissait comme une victime devenant un bourreau. Une métaphore pour resti-tuer le fonctionnement du monde de l’entreprise où chacun est de fait interchangeable et où tout le mondesurveille tout le monde. Écrit bien avant la crise actuelle, ce premier film d’un jeune réalisateur français qui a étudiéà l’INSAS prend évidemment aujourd’hui une résonance toute particulière. Très plaisant à voir, Rien de personnel n’arien d’un film militant et rappellerait plutôt les comédies sophistiquées où souffle un vent d’anarchie. Une brisebienvenue pour contrer les vents mauvais de l’économie spéculative balayant le monde du travail. e G.B.Rien de personnel, de Mathias Gokalp, sortie nationale le 20 janvier

HUMOUR DIVIN

Un beau matin, un singe du Zoo du Bronx reçoit une conscience en cadeau et avec elle les concepts de dieu,de mort et de culpabilité et ... une érection en béton. Pour se libérer de tout ce qui rumine dans son crâneet dans son corps, il se met à peindre avec des excréments sur la vitre de sa cage. Comme le soulagement

attendu ne vient pas, il décide de se noyer dans la marre de son enclos. À sa mort, un autre primate reçoit à son tourune conscience. Dans les notes qu’il jette sur le papier pour préparer un exposé sur la Shoah, un adolescent vivantà New York distille des bouts d’histoires entendues dans sa famille, il imagine aussi ce qu’il ferait si des nazis débar-quaient en pleine nuit pour l’emmener en camp de concentration. Pour surmonter cette épreuve, il puise des leçonsde sagesse dans le film Holocauste autant que dans ceux de Bruce Lee. Epstein, cadre subalterne d’une multinationaledécide un jour de créer un Golem à partir de 12 sacs de terre. Pour la première fois de sa vie, il a sous ses ordres quel-qu’un qui voit en lui, Dieu tout puissant. Dans les premiers temps, c’est chouette d’avoir sous la main quelqu’un pourapporter une bière, faire la vaisselle ou le jardin jusqu’à ce qu’il se rende compte qu’il n’y a pas de marche arrière,puisque la Kabbale n’indique pas comment détruire un Golem. Une deuxième créature n’y changera, bien entendu,rien du tout. Absurdes, iconoclastes et hilarantes, les nouvelles de ce jeune auteur new-yorkais né dans une famillejuive orthodoxe explorent par l’humour les liens de l’homme et de la religion, les limites et les tabous qu’elle luiimpose. Confronté à ses peurs et à ses doutes, l’homme voit le cadre rassurant qu’il s’est construit se fissurer avecses certitudes. Passant de la légèreté au drame, de la trivialité à l’émotion, les nouvelles d’Auslander jettent un regardironique sur siècle qu’on nous avait dit religieux. e G.B.Attention Dieu méchant, Shalom Auslander, Belfond, 157 pages, 18,50 e

Libertés ! Janvier 2010 15

C U L T U R E

Page 16: Libertés Janvier 2010

CECI EST UNE ARME DE LIBERATION MASSIVE.Participez aux actions urgentes d’Amnesty International et vous aussi faites de votre téléphone portable une arme...