l'expression corporelle. un enseignement de la communication

24

Upload: others

Post on 22-Jun-2022

3 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication
Page 2: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

L'expression corporelle Un enseignement de la communication

Page 3: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

COLLECTION DIRIGÉE PAR GASTON MIALARET

Page 4: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

L'ÉDUCATEUR

L'expression corporelle Un enseignement

de la communication

JACQUES SALZER Maître-Assistant à l'Université Paris - Dauphine

Préface de Michel Lobrot

PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE

Page 5: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

Je remercie tous les participants des différents groupes de travail centrés sur le corps dans lesquels je suis intervenu.

Les impressions que j'ai reçues à travers leur parole et leurs corps m'ont permis de bâtir progressivement ce travail.

Je remercie plus particulièrement les très nombreuses per- sonnes qui m'ont apporté leurs avis, leurs conseils, leur aide, parfois sans le savoir : par leur présence, leur regard, leur geste, leur voix, en étant simplement là.

ISBN 2 13 O36781 x 1 édition : 3 trimestre 1981

© Presses Universitaires de France, 1981 108, Bd Saint-Germain, 75006 Paris

Page 6: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication
Page 7: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication
Page 8: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication
Page 9: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication
Page 10: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication
Page 11: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication
Page 12: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

Jacques Salzer appartient à la deuxième génération des animateurs de groupe, que je ne définirai pas tant par l'âge (encore que celui-ci ait une importance) que par le moment où ils ont commencé à animer des groupes et à réfléchir sur cette animation.

La première génération — celle à laquelle j'appartiens — émerge vers 1958 et se pose en priorité le problème du rapport du groupe avec le moniteur, autrement dit le problème de la directivité et de la non-directivité. Dans quelle mesure le moniteur peut-il ou ne peut-il pas avoir un projet sur le groupe ? Dans quelle mesure peut-il prendre des décisions pour ou à la place de celui-ci ? Peut-il intervenir ? Doit-il rester dans une position d'observateur ?, etc. Telles sont les questions que se posaient les psychosociologues de ma génération, qui toutes renvoient au problème de l'autorité. Peu à peu s'élaborent un certain nombre de conceptions plus ou moins structurées, d'abord celle de K. Lewin, puis celle de C. Rogers, puis celle des institu- tionnalistes qui définissent des solutions possibles par rapport à ce problème. Solution de K. Lewin et des psychosociologues classiques : le moniteur doit laisser le groupe s'autodéterminer et vivre sa propre vie ; il se contente de l'aider à se connaître lui-même par des analyses plus ou moins subtiles mais peu nombreuses. Solution de C. Rogers et des tenants de l'empathie : le moniteur a un rôle important puisqu'il autorise par son acceptation incessante, qui se révèle dans la « reformulation », le groupe à aller de l'avant et à se construire lui-même ; sans cette acceptation et cet encouragement chaleureux, le groupe serait paralysé. Enfin, la solution des institutionnalistes est

Page 13: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

que le moniteur ne peut pas se contenter de laisser faire et d'encourager, mais qu'il doit aussi intervenir par des propo- sitions, des offres, des questions, des informations, bref par une véritable participation. J'ai même précisé que cette intervention nécessaire pouvait rester non directive si elle se faisait dans le champ du désir explicite (qui n'est pas nécessairement une demande) des participants.

Au terme de cette évolution, vers 1970, vint le « potentiel humain » qui balaya d'un revers de main toutes ces belles préoc- cupations. Résolument techniciste, il prétendait, lui, apporter des méthodes concrètes et efficaces pour « faire sortir » les émo- tions, permettre les décharges, favoriser la prise de conscience, résoudre les tensions, être mieux dans son corps, etc., sans se préoccuper de savoir si le moniteur devait prendre ou non de la distance et se soucier d'écraser ou de ne pas écraser le groupe. Il est résolument pour la directivité sans se demander si celle-ci est ou non légitime. Les techniques du Potentiel humain, de la Gestalt, du co-conseil, de la créativité vont dans ce sens.

Certains pourtant qui travaillent comme on dit sur le corps ou avec le corps, c'est-à-dire qui se situent peu ou prou dans la ligne du « Potentiel humain » refusent actuellement de se laisser embarquer dans le tourbillon techniciste et autori- tariste. Ils veulent réfléchir et sont souvent influencés par des préoccupations humanistes, voire politiques, qui les amènent à se poser le problème de l'intervention de l'animateur.

Cependant ils ne reviennent pas aux préoccupations philo- sophiques des théoriciens de la première génération. Et, d'autre part, ils admettent comme un postulat que l'intervention de l'animateur est nécessaire, sous forme de propositions, d'exer- cices, de conseils, bref d'un guidage concret et efficace qui ne met pas l'animateur sur la touche, mais le rend tout à fait présent.

Autrement dit, ils admettent la position des institution- nalistes et se situent résolument dans le cadre de celle-ci. Le

I. L'animation non directive des groupes, postface de l'édition de 1979, Ed. Payot.

Page 14: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

problème qu'ils posent, et qui ne se pose que dans ce contexte, est celui-ci : comment faire pour que cette intervention néces- saire reste une intervention « ouverte », c'est-à-dire en accord avec les principes de la non-directivité ?

Leur réponse est claire et fait vraiment avancer les choses : pour qu'une telle intervention soit ouverte, il faut qu'elle se constitue comme un ensemble de « possibles » entre lesquels l'animateur aura à choisir. On pourrait dire que c'est l'affir- mation d'un principe de choix. Si l'animateur est rivé à une technique, il ne choisit pas, il impose sa technique. Si, au contraire, il se trouve face à une multitude de techniques qu'il connaît et qu'il maîtrise, il peut adapter son intervention aux participants, à leurs demandes et à leurs désirs.

Certes, la connaissance par l'animateur de toutes les méthodes possibles d'action et d'intervention ne garantit pas automatiquement sa disponibilité et le fait qu'il soit en prise sur les participants. Ce n'est qu'une condition. Mais c'est une condition nécessaire. Un animateur obsédé par une seule technique ne peut pas être vraiment centré sur les parti- cipants.

Jacques Salzer se situe incontestablement dans cette der- nière ligne. Son livre, sorte de nomenclature ou de revue de toutes les attitudes possibles, de tous les choix possibles, de toutes les solutions possibles en expression corporelle, pourrait s'intituler : le Livre des possibles de l'expression corporelle. C'est un ouvrage d'ouverture dans la mesure où il ne préconise pas, comme la plupart des livres de ce genre, une méthode, considérée comme la méthode unique et universelle, la seule valable, pour des raisons métaphysiques, mystiques ou transcen- dantales, mais se contente d'énumérer les positions possibles, les problèmes qu'on peut rencontrer, les solutions qu'on peut adopter.

Ce n'est pas une œuvre dogmatique, comme celle de beau- coup aujourd'hui qui partent en guerre « pour le corps » comme on partait jadis pour la croisade (pour aboutir à des solutions souvent bien misérables), mais une œuvre modeste, qui peut aider bien des gens qui se lancent dans l'expression corporelle à être

Page 15: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

à l'écoute des autres et à adapter leur action à leurs besoins. C'est aussi une œuvre de science et d'objectivité, qui, comme le faisait remarquer quelqu'un, ferait penser au travail de Linné en sciences naturelles, soucieux de classifier et de mettre chaque chose à sa place.

Cet objectivisme peut étonner quand on connaît Jacques Salzer, sa fougue, sa flamme, sa spontanéité. C'est une autre face de lui-même qu'il présente ici, complémentaire de la pre- mière. Preuve de sa richesse et de sa multiplicité. Preuve aussi qu'il possède, dans l'action, tout le recul nécessaire même s'il manifeste surtout une extrême chaleur. La rigueur de cet ouvrage équilibre la chaleur de son action.

Michel LOBROT.

Page 16: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

Introduction

J'ai toujours été étonné de ce qui apparaît dans le corps, selon le temps, le lieu et les personnes dans le système où elles vivent. Sur les bords de la Méditerranée où je suis né en 1942, le corps me semblait avoir une lenteur qu'il n'avait pas à Paris où je suis arrivé en 1958. Les corps des gens rencontrés en amphi au cours de mes études me semblaient proches de ceux que je rencontrais plus tard, assis dans les bureaux, quand j'ai travaillé en entreprise (1962-1966). Ces mêmes personnes me semblaient différentes lorsque je les retrouvais au café ou dans leur famille.

A la même époque, le soir, je travaillais avec des troupes de théâtre, comme acteur. Je ressentais à la fois le plaisir et la crainte de donner mon corps à voir à des milliers de spectateurs. Je constatais, dans les répétitions, que chacun y laissait aller sa fantaisie comme il ne le faisait pas ailleurs. Le théâtre était le lieu où tout devenait possible, dans le jeu. « Ici, on peut. » C'est ainsi que j'ai acquis depuis dix-neuf ans une connaissance directe du corps au théâtre dans une dizaine de théâtres à Paris. J'assurais aussi la responsabilité de groupes centrés sur l'improvisation et la communication gestuelle et vocale tant dans des institutions relevant de l'Education nationale que dans des institutions de loisir ou d'Education permanente.

Il y a sans doute des motivations profondes à cette évo- lution ; la compréhension réciproque, l'accès au désir et au bonheur pour chacun et non seulement pour quelques-uns étaient les thèmes qui me paraissaient essentiels. Les rela- tions économiques et sociales, comme toute communication, se traduisent dans un état du corps dans ses relations avec les autres. Bref, je recherchais toujours à aider à la com-

Page 17: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

préhension des causes des difficultés de communication et des moyens d'y arriver. Et cette réhabilitation du corps et de son désir, recherchée à travers les pratiques qui vont suivre, n'était peut-être que la réhabilitation de mon propre corps qui demandait à être reconnu.

L'enseignement m'intéressait. Là aussi une personne, « le prof », s'offrait au regard d'une quarantaine d'élèves, un peu comme au théâtre. Il leur transmettait des informations avec ses mots mais aussi avec son corps : sa tension et sa détente, ses mains, sa position dans l'espace. Il recevait des impressions à partir du corps des élèves : premières impres- sions d'antipathie ou de sympathie par la seule apparence physique, sourcils froncés, regard approbateur, corps retourné vers le voisin ou vu de face... Je constatais peu à peu qu'il en était ainsi, en permanence, dans la vie courante. Après avoir enseigné en lycée technique (1963-1971), bien que parti d'une formation en économie, j'eus le plaisir d'enseigner à l'IUT de Reims puis à l'Université de Paris IX- Dauphine et en formation permanente, les techniques d'expression et de communication. A l'Université de Paris VII- Censier, j'approfondis dans le cadre de l'uv de « Techniques du Corps », les pratiques du théâtre ou du mime appliquées à la découverte des relations quotidiennes traversant le corps. Le lecteur trouvera en fin d'introduction un tableau des activités dont ce livre relate l'expérience. Il est extrait d'un travail de recherche sur le concept et la pratique de l' « Expression par le corps », doctorat de 3 cycle que j'ai mené ces dernières années, dont le titre était : La place de l' « expression corporelle » dans la formation : analyse descriptive et critique de pratiques pédagogiques liées au geste, à la posture, au regard et à la voix.

Quelle était la thèse développée dans cette recherche ? Voici le projet. Contrairement à la pratique la plus répandue des techniques d'expression et de communication, qui se limitent à la prise de conscience et la formation à la partie la plus

Page 18: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

instrumentale et habituelle de la communication (le langage oral et écrit), il existe une possibilité de prise de conscience et de formation à la partie tout aussi présente que le langage oral et écrit dans les relations. C'est l'expression par le corps dans la vie quotidienne centrée sur la relation duelle et la relation en groupe.

J'entends par « Expression » toute émission consciente ou non de signes et messages. J'entends par « Communi- cation » tout ce qui fait que n'importe quel signe ou message émis par quelqu'un est reçu par quelqu'un d'autre. Tout ce qui fait qu'il est compris et senti de manière commune : tout ce qui peut aider ou nuire au rapprochement dans la compréhension réciproque.

J'utilise souvent dans ma pratique des activités centrées sur l'observation du regard, du geste, de la posture et de la voix, chez soi et chez les autres, dans les relations. Elles répondent, par exemple, à une sensibilisation aux questions suivantes :

1. Le regard et l'image du corps Exemples : Quand je suis avec quelqu'un d'autre ou

quand je lui parle, est-ce que cela m'est facile de le regarder, d'être regardé par lui ? En est-il de même devant un groupe ? Quelles impressions peut transmettre un regard ? Comment peut-il être un lieu du corps où s'inscrit le pouvoir que l'on exerce ou que l'on subit ? Comment chacun imagine-t-il son corps, vu par les autres ? Est-il satisfait ou pas de cette perception ? Quelles sont les possibilités et les limites du magnétoscope dans la perception de l'image du corps ?

2. Le geste, la posture, la voix Exemples : On pourrait établir une liste de questions

similaires. Comment je perçois mon geste, ma posture et ma voix ? Comment l'autre perçoit mon geste, ma posture et ma voix ? Y a-t-il des correspondances entre ces percep- tions ? Des questions semblables peuvent être posées sur la démarche, la respiration, la tension, la distance à l'autre...

Page 19: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

3. Les relations à deux et en groupe Il est proposé des pratiques corporelles permettant

d'analyser et d'observer dans les corps plus spécialement les relations d'initiative, de rejet, de disponibilité, de pouvoir, de conflit... et amenant à réfléchir sur la manière dont peu- vent se résoudre ces relations dans le groupe et dans la vie quotidienne.

Cette pratique, que j'ai héritée en partie du théâtre, j'ai eu la possibilité de la compléter par un certain nombre de mises en situation que j'ai imaginées, ainsi que par des procédures dérivées des groupes de rencontre qui se sont développés à la suite des travaux de Carl Rodgers et W. Schütz.

Ma thèse était située dans le champ des activités d'édu- cation. Elle ne prétendait pas rechercher les causes pro- fondes, étudiées par la psychologie ou l'économie, mais les manifestations apparentes dans le corps, des relations sociales. Elle montrait que le « non-dit » du corps est en fait reçu et observé. Il est dit, parfois involontairement. Il contribue aussi aux illusions de la communication et aux malentendus. Il est utile de le savoir, en connaissant sa place dans les relations. Il les conditionne et permet d'appro- cher, à travers les signes qu'il porte, l'état et l'évolution des relations de compréhension ou d'incompréhension entre individus. Au cas où le signe transmis par le corps permet ainsi de poser des repères susceptibles de mieux comprendre et faire comprendre une personne à elle-même et à une autre, il serait souhaitable d'introduire cet enseignement dans celui des Techniques d'Expression. Ce mouvement a d'ailleurs déjà commencé. La fin de cette étude dira les limites et les possibilités d'une telle formation, telles que je les analyse après expérience.

Ceci s'inscrit dans un contexte social où le corps et les activités corporelles ont pris ces dernières années une place

Page 20: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

grandissante. Des pratiques qui vont de l'expression corpo- relle au yoga, au mime, à la relaxation et à la communication non verbale (langage du corps) ont pénétré certaines struc- tures de formation de l'école maternelle à l'Université, en passant par la formation permanente. Des matières, portant sur les relations y avaient été officialisées, telles que techniques d'expression (BTS, IUT, maîtrises diverses...), expression orale et écrite (matière d'une demande croissante de stages de formation continue), communication et dynamique de groupe, sensibilisation à la communication, relations humaines, forma- tion de formateurs, relation enseignant-enseigné...

Ceci montre que cette inquiétude récente sur ce qui se passe dans les relations entre les individus est forte, qu'elle a pénétré l'Education nationale. Dans certaines de ces matières ainsi que dans la formation d'animateurs, il est de plus en plus fait appel à l'expression du corps comme lieu d'apprentissage des relations. Ainsi le Bulletin Officiel du 6 septembre 1979, publiant le programme du diplôme d'Etat relatif aux fonc- tions d'animation, fait figurer l'Expression corporelle comme technique pouvant faire l'objet d'une unité de formation.

Je me posais plusieurs questions sur ma propre pratique. Ces activités changent-elles quelque chose à la vie de

chacun après la formation ? Ou sont-elles une mise en acte du corps limitée à la rencontre de groupe, n'ayant pas d'autres effets en dehors de la rencontre ? Ou, pire, ces pratiques auraient-elles parfois pour fonction, en donnant l'illusion temporaire du « mieux-être » dans un groupe exceptionnel de camoufler le « mal-être » dans le quotidien anonyme des grandes villes, dans le travail mécanisant le corps, dans l'angoisse du manque de sécurité matérielle et affective qui s'incruste dans le corps inquiet ?

Comment fonctionne le système de l' « Expression corporelle » dans ce contexte ?

1. Hypothèse évoquée par Max PAGÈS, Le travail amoureux, Ed. Dunod, 1979.

Page 21: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

« L'EXPRESSION CORPORELLE » ESSAI DE DÉFINITIONS ET CLASSIFICATIONS

La revue Pour a publié un numéro spécial sur les nou- velles formations au corps, classées dans « Le mouvement du potentiel humain ».

On y lit sous la plume de Jacques Ardoino : « ... On parle ainsi du corps pour dénoncer le verbalisme, le

« parolisme », l'intellectualisme bimillénaire de notre culture. On « fait » même du corps comme on faisait, il n'y a pas si longtemps du piano, de l'anglais, du dessin ou de la dentelle... »

Tandis que la formation au corps devient une mar- chandise comme les autres, pourvue d'un numéro de code et mise sur le marché de la formation :

Des éducateurs ayant à traiter de l'expression corporelle s'interrogent sur cette matière dans les Cahiers de l'Ani- mation :

«... Une des notions les plus floues et les plus « à la mode » employées d a n s not re secteur. . . »

«... Si cette expression a eu autant de succès, alors qu'elle recouvre sûrement des notions très différentes selon les utilisateurs, c'est qu'elle est certainement liée à une idée de droit à l'expression, de revendica-

2. Jacques ARDOINO, Prendre corps, incarnation ou réification, in Pour, n° 41, p. 111, 130.

3. Les Cahiers de l'Animation, n° 3, Institut national d'Education populaire, Marly-le-Roi, 1973.

Page 22: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

tion, pour ceux qui ne sont ni mimes ni danseurs ni même artistes de s'exprimer avec leur corps. Oui, c'est bien ce besoin de libération, ... qui a dû faire la fortune de cette expression, même si on ne sait pas très bien ce qu'el le recouvre »

Un éducateur ajoute : « ... C'est un fatras de « non-méthodes », beaucoup plus qu'un

exercice réfléchi et méthodique »

Pour d'autres, l'expression corporelle devient un concept totalisant :

« ... Notre vivance quotidienne est expression corporelle... tout acte corporel perçu par autrui est expression corporelle »

Alors que le concept d'expression corporelle est lui- même critiqué. Michel Bernard rappelle que l'expressivité corporelle est un discours : le corps vu est dit expressif (la volonté de parler et d'écrire sur l'expressivité corporelle n'est pas une fantaisie, un supplément gratuit... mais la seule façon de la signifier)6. Pour lui l'expression corporelle n'existe pas en soi. Elle n'existe que quand on en parle.

C'est d'ailleurs pourquoi je préfère utiliser les mots d'« expression par le corps » marquant ainsi qu'il s'agit plus d'une émergence dans ce corps, que la personne n'a pas véritablement codée et choisie. L'interlocuteur voit un « signifié » derrière le « signifiant » qu'est le corps sans que celui-ci connaisse lui-même ce qui est signifié à travers lui. Quand on dit « habiter son corps », « être bien dans son corps », comme le dit François Chirpaz : « ... je dis mon corps, mais quel est le sens de cette propriété ? »

Cet effet d'appartenance marque en fait l'appartenance à l'univers, comme partie d'un tout et montre bien que le corps fonctionne quand il est dans les mots sous le contrôle de l'idéologie qui le domine. Finalement, « le langage du

4. G. MANDRIN, CTP-Art dramatique, ibid. 5. M. T. ERMONT-LECOMTE, ibid. 6. Michel BERNARD, texte de présentation de thèse d'Etat, et L'expres-

sivité du corps, Paris, Ed. universitaire, 1976. 7. Fr. CHIRPAZ, Le corps, Paris, Ed. PUF, 1963.

Page 23: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

Dès la première seconde où une personne inconnue apparaît, elle transmet des impressions à travers son corps. Elle parle. Son corps porte les mots et continue à transmettre des impressions. Regard, mimique, posture, geste, tension, détente, disposition des corps dans l'espace, voix... portent des intentions, révèlent des sentiments, sont traversés par des rapports de pouvoir.

De l'analyse de ces signes est né un enseignement de la communi- cation qui passe par le corps. Mais où vont les activités liées à l' « expres- sion corporelle » ? Que peuvent-elles apporter ? A qui ? Comment ? Avec quel effet ? Durant combien de temps ?

A ces questions, l'auteur et les participants des groupes qu'il a connus apportent leurs réponses. A partir de son expérience de groupe depuis 1967, portant sur plusieurs milliers de participants de tous âges, l'auteur :

— s'interroge sur les objectifs annoncés par les divers praticiens : libération, harmonie corporelle, dynamique de groupe, thérapie, rencontre, spectacle...

— décrit les méthodes et ses observations sur la multitude de facteurs qui, parallèlement aux « exercices », influencent en fait la manière d'être du corps de chacun dans le groupe : le choix du lieu, les âges, les sexes, les catégories sociales, les premiers contacts, le choix des exercices et des consignes, la durée, l'existence d'un temps de parole, les rapports d'auto- rité, les habitudes sociales du corps...

— analyse les effets décrits par d'anciens participants : prise de conscience de soi et des autres, rencontre, bien-être, confiance, plaisir, illusion, malaise, manque, modification de relations quotidiennes... ou... rien ?

Quelles sont les possibilités mais aussi quelles sont les limites des groupes centrés sur l' « expression corporelle » lorsqu'il s'agit de trans- férer dans la vie quotidienne ce qui a été découvert en groupe ?

Jacques Salzer réunit une pratique d'acteur de théâtre (depuis 1963), d'animateur de groupe d'expression par le corps (depuis 1967), une formation en économie (HEC, Sciences politiques) et une expérience de l'enseignement en techniques d'expression orale, écrite et corporelle (IUT, Université de Paris VII-Censier et Paris IX-Dauphine).

22212076/2/81

Page 24: L'expression corporelle. Un enseignement de la communication

Participant d’une démarche de transmission de fictions ou de savoirs rendus difficiles d’accès par le temps, cette édition numérique redonne vie à une œuvre existant jusqu’alors uniquement

sur un support imprimé, conformément à la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012 relative à l’exploitation des Livres Indisponibles du XXe siècle.

Cette édition numérique a été réalisée à partir d’un support physique parfois ancien conservé au sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.

Elle peut donc reproduire, au-delà du texte lui-même, des éléments propres à l’exemplaire qui a servi à la numérisation.

Cette édition numérique a été fabriquée par la société FeniXX au format PDF.

La couverture reproduit celle du livre original conservé au sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.

*

La société FeniXX diffuse cette édition numérique en accord avec l’éditeur du livre original, qui dispose d’une licence exclusive confiée par la Sofia ‒ Société Française des Intérêts des Auteurs de l’Écrit ‒

dans le cadre de la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012.