les disparités sociogéographiques des parcours scolaires · quelques points de repère 1965-1970...
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Michel Perron, Ph. D.
Professeur, Université du Québec
à Chicoutimi (UQAC)
Titulaire, Chaire UQAC−Cégep de Jonquière
sur les conditions de vie, la santé
et les aspirations des jeunes (VISAJ)
Chercheur, Projet Transitions
Colloque CAPRES-ACFAS, Ottawa, 14 mai 2009
Les disparités sociogéographiques
des parcours scolaires :tendances québécoises et régionales
révélées par les méthodes
d’écologie sociale
Plan de la présentation
1- Un regard territorial sur les parcours scolaires au Québec à l’ordre
secondaire
2- Différences régionales quant au vécu affectif et scolaire des jeunes
3- L’effet de certaines caractéristiques sociogéographiques sur la
persévérance scolaire
4- Jeunes urbains et jeunes ruraux : ressemblances et différences
– 1 –
Un regard territorial
sur les parcours scolaires au Québec
à l’ordre secondaire
Quelques points de repère
1965-1970 La Révolution tranquille
Démocratisation et accessibilité
1970-1975 Régionalisation de l’offre scolaire
Diplomation en vue de postes à combler
1975-1985 Les taux de diplomation plafonnent
1985-1995 Les parcours scolaires se diversifient
De nouvelles mesures de la réussite
1995-1996 Les États généraux sur l’Éducation
L’heure des bilans
1996-2000 De nouveaux fichiers scolaires
L’allongement de la durée des études
2000-2009 Le décrochage scolaire préoccupe
Système de coordonnées géographiques
Unités géostatistiques du recensementCanadien (municipalités)
Données géocodées du recensementCanadien (2001, 2006)
Modèles sociogéographiques
(aires sociales ou autres)
Clientèles géocodées (fichiers scolaires)
L’écologie sociale appliquée aux études
sur la scolarisation des jeunes québécois
Inégalités régionales et locales des parcours scolaires
au Québec : les travaux d’ÉCOBES
1993 Les inégalités géographiques et sociales de l’accessibilité au
collégial
1996 Création du CRÉPAS à la suite d’une large diffusion de l’étude
de 1993 par ÉCOBES
2000 Jeunes de la ville ou de la campagne : quelles différences?
2005 Site interactif d’indicateurs scolaires spatialisés (phase 1)
2009 Sociogéographie de l’éducation au Québec (phase 2)
Taux de diplomation après 7 ans
d’une cohorte au secondaire
Il s’agit de la proportion d’élèves ayant obtenu un premier diplôme du
secondaire après sept années (avant l’âge de 20 ans au secteur des
jeunes).
Ce taux est calculé pour une cohorte d’élèves inscrits pour la première
fois en 1re secondaire à une année donnée.
Les diplômes considérés sont le diplôme d’études secondaires (DES),
le diplôme d’études professionnelles (DEP), le certificat d’études
professionnelles (CEP) et l’attestation de formation professionnelle
(AEP).
Taux de diplomation essentiellementinchangé en 2 décennies au Québec
15
96 97 98 99 01 02 03 04 05 06 07
16
69
0
100
88 89 90 91 92 93 94 95
10
20
30
40
50
60
70
80
90
*Diplôme d’études secondaires ou professionnelles
Sources : Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport; McKinsey & Compagnie
• Diplôme
obtenu avant
20 ans
Chaque année, 28 000 jeunes fêtent
leurs 20 ans sans diplôme
• Diplôme obtenu après 20 ans
• Pas de diplôme
1987 20082000
%
Taux de diplomation au secondaire*, population âgée de 16 ans et plus
Le Québec est dans une position peu enviable
Classement des pays de l’OCDE*
% de la population ayant obtenu l’équivalent d’un
DES ou DEP** dans les délais prescrits
1 Allemagne
2 Grèce
3 Finlande
4 Corée
5 Japon
6 Norvège
7 Islande
8 République Tchèque
9 Suisse
10 Royaume-Uni
16 Canada
18 États-Unis
28 France
Classement des provinces canadiennes***
Taux de diplomation, population 20-24 ans
1 Colombie-Britannique
2 Ontario
3 Nouveau-Brunswick
4 Nouvelle-Écosse
5 Saskatchewan
6 Terre-Neuve-et-Labrador
7 Île-du-Prince-Édouard
8 Alberta
9 Québec
10 Manitoba
Le Québec a glissé du
7e au 9e rang canadien
depuis 1992
*OECD Education Outlook 2008; données pour les années 2005-2006
**Diplôme d’études secondaires ou Diplôme d’études professionnelles
***Statistique Canada, moyenne pour les années scolaires 2005-2006 à 2007-2008
Sources : Organisation de coopération et de développement économiques; Statistique Canada; McKinsey & Compagnie
Taux de sortie sans diplôme du secondaire
Il s’agit de la proportion d’élèves qui sont sortis sans diplôme par rapport
au total des sortants.
Ces élèves sortent du secondaire sans avoir obtenu, une année donnée,
un premier diplôme d’études secondaires et ne sont pas réinscrits dans
le réseau scolaire québécois pour l’année suivante.
C’est l’indicateur le plus juste pour estimer un pourcentage fiable de
décrocheurs pour un territoire ou une école.
Variabilité du décrochage à l’échelle régionale
*Diplôme d’études secondaires ou professionnelles
Sources : Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport; McKinsey & Compagnie
74
75
76
77
4062
63
64
65
66
73
72
71
70
69
68
67
%
Population
(total : 7,7 millions)
Nord-du-
Québec
Côte-Nord
Montérégie
Saguenay-Lac-St-Jean
Outaouais
Laurentides
Estrie
Montréal Lanaudière
Abitibi
Gaspésie
Centre-du-Québec
Mauricie
Chaudière-Appalaches
Bas-St-Laurent
Capitale-Nationale
Laval
Taux de diplomation après 7 ans* (régions administratives du Québec, 2006-2008)
Mettre carte txdssd-M-SLSJ
Mettre carte txdssd-M-Laurentides
Mettre carte txdssd-M-Capitale-Nationale
Mettre carte txdssd-F-SLSJ
Mettre carte txdssd-F-Laurentides
Mettre carte txdssd-F-Capitale-Nationale
– 2 –
Différences régionales
quant au vécu affectif et scolaire
des jeunes
Marco Gaudreault Nadine Arbour Mélanie GagnonAvec la collaboration de : Julie Auclair, Luc Parent, Josée Thivierge,
Luc Laberge, Marie-Ève Blackburn, Michel Perron
Enquête interrégionale sur les habitudes de vie, la santé
et les aspirations des jeunes (ÉCOBES, 2008)
Élèves du secondaire (niveaux 1 à 5) dans trois régions
Écoles publiques, privées, anglophones, francophones
Questionnaire autoadministré de 157 questions
Population admissible au secondaire : 87 640
Taille de l’échantillon initial : 7 486
Taux de réponse : 54,2 % (4 126)
Marge d’erreur : ± 1,4 % pour une proportion de 30 %
Précisions sur l’enquête interrégionale
30,0 24,3C34,6C
31,7
12,0 11,815,4
21,9
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
(%)
Filles Garçons
Capitale-Nationale (n filles = 700; n garçons = 711)Saguenay–Lac-St-Jean (n filles = 693; n garçons = 749)Laurentides (n filles = 494; n garçons = 540)Collèges Laurentides (n filles = 238; n garçons = 157)
Proportion des filles et des garçons présentant
de la détresse psychologique
Perception du climat éducatif au sein
de l’établissement fréquenté
9,2b8,8c
16,2bcd
1,6d
14,8b 14,4c
23,3bcd
7,9d
75,9b 76,7c
60,5bcd
90,5d
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
(%)
Négative Mitigée Positive
Perception du climat éducatif
Capitale-Nationale (n = 1 390) Saguenay–Lac-St-Jean (n = 1 411)
Laurentides (n = 1 015) Collèges Laurentides (n = 394)
Manifestations comportementales
de désengagement scolaire
61,8b 62,9
c
55,2bc
25,1 23,2 25,7
13,1b 13,9c19,2bc
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
(%)
Aucune manifestation 1 manifestation 2 à 4 manifestations
Manifestations comportementales de désengagement scolaire
Capitale-Nationale (n = 1 348) Saguenay–Lac-St-Jean (n = 1 379)
Laurentides (n = 989)
– 3 –
L’effet de certaines caractéristiques
sociogéographiques
sur la persévérance scolaire
Proportion d’individus sans diplôme
du secondaire1 selon les milieux
Régions
métropolitaines
Pop. 100 000
et plus
Petites
localités
1 000 à 9 999
Régions
ruralesTotal
% % % %
Province de Québec 11,3 19,6 19,4 12,6
Province de l’Ontario 8,6 12,5 14,8 9,1
Canada 9,2 15,1 17,2 10,2
Moyenne des années scolaires 2001-2002 à 2004-2005, sexes réunis
1 Personnes de 20 à 24 ans sans diplôme d’études secondaires et ne fréquentant pas l’école.
Source : Enquête sur la population active, Statistique Canada, 2006.
Taux de diplomation après 7 ans et taux de sortie
sans diplôme selon la taille des cohortes (garçons)
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
Taux de diplomation après 7 ans
Taux de sortie sans diplôme
Nombre d'élèves
Taux de diplomation après 7 ans 51,7 57,7 59,1 60,4 59,8 62,9 63,8 67,2 68,7 59,9
Taux de sortie sans diplôme 43,4 40,2 39,5 36,6 36,3 32,5 31,4 26,6 25,2 33,2
Nombre d'élèves 4 001 9 419 9 824 8 683 13 180 19 026 25 159 60 482 34 201 57 615
0-50 51-100 101-150 151-200 201-300 301-500 501-1000 1001-3000 3001-50005000 et
plus
Taille des cinq cohortes
(%)
Source : ÉCOBES
1997 à 2003
(inscrits de 1992 à 1996)
0,0
10,0
20,0
30,0
40,0
50,0
60,0
70,0
80,0
90,0
100,0
Taux de diplomation après 7 ans
Taux de sortie sans diplôme
Nombre d'élèves
Taux de diplomation après 7 ans 72,2 76,0 77,2 77,9 76,9 79,2 79,0 80,2 80,1 72,9
Taux de sortie sans diplôme 22,2 23,6 22,5 18,8 19,0 17,0 17,5 15,5 15,5 21,2
Nombre d'élèves 3 724 9 119 9 241 8 278 12 720 18 075 24 164 57 087 32 584 54 853
0-50 51-100 101-150 151-200 201-300 301-500 501-1000 1001-3000 3001-50005000 et
plusTaille des cinq cohortes
(%)
Taux de diplomation après 7 ans et taux de sortie
sans diplôme selon la taille des cohortes (filles)
1997 à 2003
(inscrits de 1992 à 1996)
Source : ÉCOBES
Relation entre le taux de sortie sans diplôme des garçons
et la proportion de la population sans diplôme
Diplôme d’études secondaires, Municipalités les plus populeuses de chacune des régions du Québec
Source : ÉCOBES
Relation entre le taux de sortie sans diplôme des filles
et la proportion de la population sans diplôme
Diplôme d’études secondaires, Municipalités les plus populeuses de chacune des régions du Québec
Source : ÉCOBES
– 4 –
Jeunes urbains et jeunes ruraux :
ressemblances et différences
L’enquête sur les habitudes de vie des jeunes de 12 à 18
ans du Saguenay–Lac-Saint-Jean (ÉCOBES)
Source
Perron, M. et al. (2000), Jeunes de la ville ou de la campagne : quelles différences?, ÉCOBES, Cégep de Jonquière, 103 p.
Population visée
Jeunes fréquentant les établissements d’enseignement public ou privé
Élèves des niveaux 1 à 5 de l’enseignement secondaire incluant le cheminement particulier
Échantillonnage
En 1997 : n = 1 665, marge d’erreur + 2,2 % (SLSJ)
Les quatre types de municipalités
Types Municipalités
Ville Chicoutimi et Jonquière
Petite ville ( 30 000 habitants et moins) Alma, Dolbeau-Mistassini, La Baie,
Roberval et St-Félicien
Municipalité périurbaine Delisle, Larouche, Laterrière,
Mashteuiatsh, Métabetchouan,
St-Ambroise, St-Bruno, St-Fulgence,
St-Gédéon, St-Honoré, St-Nazaire,
St-Prime, Shipshaw et Canton-Tremblay
Municipalité rurale Les 37 autres municipalités
Identification des caractéristiques discriminantes
des élèves selon le type de municipalité de résidence
Dimension
Nombre de
caractéristiques
disponibles
Caractéristiques
retenues lors des
analyses discriminantes
unidimensionnelles
Caractéristiques
retenues lors de
l’analyse discriminante
multidimensionnelle
Sociodémographique 2 0 0
Psychosociale et culturelle 22 4 4
Économique 2 0 0
Famille 9 3 2
École 9 1 1
Réseau social 4 1 0
Loisirs 5 0 0
Événements préoccupants 3 1 0
Consommation de tabac 7 0 0
Consommation d’alcool 5 0 0
Consommation de drogues 4 1 0
Activités délinquantes 1 1 0
TOTAL 73 121 7
1 Les facteurs retenus à cette étape sont les aspirations scolaires, le secteur d’études, l’échelle de civisme public, le degré d’enracinement dans sa municipalité, le nombre de frères et sœurs, la scolarité du père et de la mère, la satisfaction de l’école, le nombre de confidents, le nombre
d’effets négatifs subis lors du déluge de 1996, la consommation de drogues chez des amis et l’indice d’activités délinquantes.
Source : ÉCOBES
Les variables discriminantes du type de municipalité
de résidence de l’élève
Dimension familiale
1. Scolarité du père
2. Nombre de frères et sœurs
Dimension psychosociale et culturelle
3. Désir d’enracinement
4. Aspirations scolaires réalistes
5. Civisme public
Dimension scolaire
6. Enseignement régulier ou non
7. Satisfaction de l’école
Conclusion
Les jeunes de milieu rural se distinguent
en matière de scolarisation
Comparativement aux jeunes qui résident dans les villes, ceux en
milieu rural ont :
des taux de diplomation plus faibles
des taux de sortie sans diplôme plus élevés
des aspirations plus faibles quant aux études universitaires
plus souvent un père qui n’a pas complété ses études secondaires
plus souvent une mère qui n’a pas complété ses études secondaires
un désir d’enracinement plus élevé dans leur région
Par contre, le vécu psychosocial, les habitudes de vie, les habitudes de
consommation d’alcool et de drogues et les relations sociales des jeunes
ruraux diffèrent peu de ceux des jeunes urbains de 12 à 18 ans.
La reproduction des inégalités de scolarisation
au Québec à 100 ans d’intervalle
« Dans la montagne, l’exploitation agricole pauvre, faute de pouvoir,
assurait longtemps la subsistance des enfants, forçait ceux-ci, dès qu’ils
avaient l’âge, à s’engager dans les chantiers de bois et à se marier.
Selon les statistiques officielles, 23 personnes sur 100 ne savaient ni lire
ni écrire à Saint-Didace [village forestier de la montagne ], contre 10 à
Saint-Justin [village agricole de la plaine], tandis que Maskinongé [la
petite ville de la région] fournissait le plus grand contingent des
personnes destinées aux professions libérales et au clergé »
Léon Gérin, « L’habitant de Saint-Justin »,
dans Mémoires de la Société royale du Canada,
2e série, t. IV, mai 1898.
L’influence de la communauté d’appartenance
sur la scolarisation
Des différences importantes entre les dix-sept régions du Québec
Des clivages urbain/rural dans chacune des régions
L’avance systématique des filles dans 95 % des municipalités
Une relation étroite entre le faible taux de diplomation au secondaire des jeunes et la faible scolarisation de la population adulte :
• à l’échelle des municipalités du Québec (Perron et Blackburn, 2006)
• à l’échelle des MRC du Québec (Perron et al., 2000)
• à l’échelle des municipalités du SLSJ (Perron et al., 2000) et de Lanaudière (Lemire, 2003)
La mobilisation régionale et locale se poursuit au Québec depuis 1996. Comment arrimer l’engagement des communautés, des parents, des entreprises et du milieu scolaire pour favoriser la persévérance scolaire? Piste: Les instances régionales de concertation (IRC).
L’OBSL sur la persévérance scolaire (Secrétariat à la jeunesse et Fondation Chagnon), disposant de 50 millions de dollars pour cinq ans, sera en place à l’automne 2009
Le Groupe d’action sur la persévérance et la réussite scolaires au Québec, présidé par Jacques Ménard, poursuivra son action au cours des prochaines années
Et demain?
Dix actions pour porter à plus de 80 % le tauxde diplomation avant l’âge de 20 ans d’ici 2020
Faciliter et encourager la transition vers la formation professionnelle
Mettre en œuvre des projets communautaires ciblant les jeunes à risque au secondaire dans les quartiers les plus défavorisés
Renforcer la stratégie Agir autrement au moyen de méthodes d’intervention éprouvées
Gros-sesse
Petite enfance Enfance au primaireAdolescence au secondaire
Accroître les services d’accompagnement offerts aux futurs parents, aux parents et aux enfants de 0 à 5 ans issus de milieux défavorisés
Favoriser et instaurer des pratiques d’excellence pour réduire les retards d’apprentissage au primaire
Incorporer dans le système d’éducation des mesures incitatives et des outils de gestion de la performance ciblant la persévérance scolaire, en s’appuyant sur la loi récemment promulguée à cet effet
Créer une instance nationale de concertation en persévérance scolaire, dans le cadre d’un partenariat entre le gouvernement, le milieu scolaire, le secteur civil et le milieu des affaires
Mener des projets pilotes communautaires – complémentaires aux services de garde – ciblant les enfants à risque de 0 à 5 ans dans les milieux défavorisés afin de préparer leur intégration au primaire
Élargir à l’ensemble de la société québécoise le consensus sur la nécessité de valoriser l’éducation et la persévérance scolaire
Sources : Groupe d’action sur la persévérance et la réussite scolaires au Québec; McKinsey & Compagnie
3
10
5
9
8
4
1
Renforcer la mobilisation régionale en ce qui touche à la persévérance scolaire2
7
6
Pour plus d’information
Michel Perron, Ph. D.
Département des sciences humaines
Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)
555, boulevard de l’Université
Chicoutimi (Québec) G7H 2B1
418 545-5011, poste 5649