l’édification de la forteresse numérique de nokia

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Lucie Louvet i IEP Rennes Lucie LOUVET Section Ecofi Année 2007-2008 L’édification de la forteresse numérique de Nokia : Comment Nokia verrouille-t-il sur le long terme le succès de son virage vers les services Internet ? Monographie réalisée dans le cadre du Séminaire Stratégie des Firmes Multinationales Sous la direction de Monsieur Bernhard KITOUS

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Page 1: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Lucie Louvet i IEP Rennes

Lucie LOUVET Section Ecofi Année 2007-2008

L’édification de la forteresse numérique de Nokia :Comment Nokia verrouille-t-il sur le long terme le succès de son virage vers les services

Internet ?

Monographie réalisée dans le cadre du Séminaire Stratégie des Firmes MultinationalesSous la direction de Monsieur Bernhard KITOUS

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Page 3: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

REMERCIEMENTS

Je tiens tout d’abord à remercier Monsieur Bernhard Kitous, Responsable de la section Ecofi

de l’Institut d’Etudes Politiques de Rennes, pour son précieux enseignement, et pour avoir accepté

d’accompagner à nouveau des étudiants dans leur travail de recherche.

J’adresse également tous mes remerciements aux professionnels qui ont accepté de me

rencontrer :

Gilles Fontaine, Rédacteur en chef délégué de Challenges, pour m’avoir aidé à « sentir » la firme

Nokia.

J.B. de Bouygues Télécom, pour sa gentillesse et sa disponibilité, et pour avoir pris le temps de me

recevoir au siège de Bouygues Télécom, à Boulogne-Billancourt. Ses explications sur le

fonctionnement du marché de la téléphonie mobile et sur les relations entre les équipementiers et les

opérateurs ont été d’une importance majeure pour le bon déroulement de mes recherches.

Xavier des Horts, Directeur de la communication de Nokia, pour avoir accepté de me recevoir au

siège de Nokia, à Saint-Ouen.

Thomas Husson, analyste chez Jupiter Research, pour m’avoir accordé un entretien passionnant au

cours duquel il m’a fait partager sa connaissance du terrain.

J’exprime sincèrement ma reconnaissance à Thomas Pelloquin, Emmanuelle et Anne

Monnier, étudiants et amis qui ont bien voulu m’apporter leur regard extérieur.

Un grand merci à Anne-Sophie Grosdoit et Marion Choppin, les deux autres membres de mon

équipe-firme, pour avoir partagé cette aventure du début jusqu’à la fin.

Lucie Louvet i IEP Rennes

Page 4: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

EXECUTIVE SUMMARY

Le secteur de la téléphonie mobile arrivant aujourd’hui à saturation dans les pays développés,

il s’agit pour les fabricants de téléphones mobiles de fidéliser leurs clients actuels, et de trouver de

nouveaux relais de croissance. A cette fin, dans un contexte de convergence entre l’Internet et la

téléphonie mobile, il semble pertinent de se tourner vers les services Internet mobiles. C’est l’actuelle

démarche de Nokia, l’équipementier finlandais, qui a pour ambition de construire dans les années à

venir une véritable forteresse numérique.

Ainsi, Cette monographie a pour objet le lancement d’OVI, portail d’accès aux services Internet

mobiles présenté par Nokia en Août 2007. Il ne sera pas question ici d’une étude de la pertinence de

chacun des sept services accessibles depuis OVI par rapport à l’offre présente sur le marché, mais

plutôt de l’étude de la structure OVI dans son ensemble. Il s’agit donc d’examiner quelles sont les

fondations qui se cachent sous la future forteresse numérique OVI, et d’évaluer la solidité de ces

fondations. En d’autres termes : Comment Nokia « verrouille »-t-il sur le long terme le succès de son

tournant vers les services Internet mobiles? Plus précisément, l’objectif de cette étude est de montrer

en quoi le rachat de contenu par Nokia lui permet de verrouiller sur le long terme sa place sur le

marché des services Internet mobiles, et en quoi ces acquisitions lui permettent de contourner les

blocages auxquels la firme doit faire face ?

Lucie Louvet ii IEP Rennes

Page 5: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

SOMMAIRE

1. PRESENTATION DU CAS : L’ANNONCE DE LA CREATION D’OVI....................1

1.1 La création de la marque OVI : du produit aux services.............................................................................. 1

1.2 L’âme de Nokia.................................................................................................................................................2

1.3 L’incident critique ............................................................................................................................................3

2. ANALYSE ET RESOLUTION DU CAS....................................................................4

2.1 Du produit au service : OVI un nécessaire relais de croissance ................................................................. 4L’analyse des causes et des conséquences, issue de la méthode des cas ............................................................ 4Le marché des services Internet mobiles..............................................................................................................7Le partage des recettes sur le marché des services Internet mobiles..................................................................10Les racines de Nokia dans les services Internet mobiles :..................................................................................11

2.2 Une stratégie de rachat de contenus ............................................................................................................. 14Le modèle Merger & Acquisition :.................................................................................................................... 14Le cas de Navteq, fournisseur de cartographie numérique.................................................................................17Le modèle des 5 forces de Porter ...................................................................................................................... 19L’influence des gouvernements dans le jeu stratégique ................................................................................... 21

2.3 La négociation avec les opérateurs................................................................................................................ 23Les relations traditionnelles avec les opérateurs................................................................................................ 23L’état des négociations avec les opérateurs sur le marché européen ................................................................ 24Le point central des négociations....................................................................................................................... 25Etude des issues possibles à la négociation .......................................................................................................26Quel est l’impact de la stratégie de rachat dans les négociations ?.................................................................... 28

3. DIAGNOSTIC, PRONOSTIC ET LIMITES............................................................. 29

3.1. Diagnostic final............................................................................................................................................... 29

3.2 Pronostic...........................................................................................................................................................30

3.3 Limites ............................................................................................................................................................. 31

SOURCES...................................................................................................................32

ANNEXES...................................................................................................................35

“ Ovi – Open the door to your world ”................................................................................................................36 ........................................................................................................................................................................... 44

Lucie Louvet iii IEP Rennes

Page 6: L’édification de la forteresse numérique de Nokia
Page 7: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

1. PRESENTATION DU CAS : L’ANNONCE DE LA CREATION D’OVI

1.1 La création de la marque OVI : du produit aux services

La révélation de la marque OVI au cours de la conférence « Go Play » organisée à Londres le

29 Août 2007 sur les thèmes d’Internet et de la mobilité restera sans doute une annonce phare dans

l’histoire de Nokia. « Today is certainly not routine », lança d’un air énigmatique Anssi Vanjoki, le

vice président de Nokia, avant de dévoiler à la presse son ambition de construire la marque OVI au

cours des douze mois qui viennent. OVI, qui signifie « porte » en finnois, se présente effectivement

comme une porte ouverte, un sésame vers les services Internet Nokia.

Le PDG du groupe, Olli Pekka Kallasvuo, suit ce jour là le déroulement de la conférence d’un œil

bienveillant, et introduit un à un les intervenants qui animeront la grand-messe, sur les thèmes de la

Mobilité et d’Internet1. Celui qui participa à redresser la situation financière de Nokia en 1992 alors

que la firme s’enfonçait dans une situation désastreuse, en a pris les rênes en 2006. Dès lors, il a

finement engagé le groupe vers de nouveaux relais de croissance. « Devices are not enough

anymore »2 : sur le marché de la téléphonie mobile, les clients recherchent à présent une expérience

mobile intégrée. Il s’agit alors pour Nokia de remonter la chaîne de valeur, en passant du produit aux

services. OVI est la future structure qui regroupera l’ensemble de ces services, à la fois sur PC et

téléphone mobile.

A son annonce, la marque OVI est une coquille vide. Du futur portail proposant sept services (Jeux,

Musique, Vidéo&TV, Contacts, Cartes, Photos, Internet) seuls trois sont développés au cours de la

présentation : Nokia Maps, service de géolocalisation, N-Gage, plateforme de jeu mobile, et Nokia

Music Store, plateforme de téléchargement de musique. Finalement, seul le service de géolocalisation

est alors disponible. « We don’t know what it is going to be, because people will decide it »3 : Si

Nokia fait semblant de ne pas avoir de stratégie à long terme, les ambitions de la firme d’Espoo sont

fortes puisqu’à terme elle compte générer autant de revenus avec les services en ligne qu’avec la vente

de ses terminaux. Par ailleurs, un rapide coup d’œil historique montre que Nokia a déjà de solides

racines sur le marché des jeux mobiles. Autre témoin de la profondeur de cette orientation stratégique,

l’organigramme de la firme est remis à plat au 1er janvier 2008 avec la création d’une division

« Services & Software ».

Annexe 1 : Présentation de la marque OVI

1 «Discover the latest evolutions in mobility and the internet»2 « Les terminaux ne suffisent plus » Olli Pekka Kallasvuo, PDG de Nokia, au Go and Play Event le 29/08/073 « Nous ne savons pas ce que [OVI] va devenir, parce que nos clients le décideront » Anssi Vanjoki, Vice Président de Nokia, au Go and Play Event le 29/08/07

Lucie Louvet 1 IEP Rennes

Page 8: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

1.2 L’âme de Nokia

Il faut savoir que Nokia, le géant de la téléphonie mobile, est à l’origine une petite entreprise

de pâte à papier. C’est une firme qui s’est réinventée à plusieurs reprises, et la décision de s’orienter

vers les services Internet s’inscrit dans cette veine : « Today’s story is very much about how Nokia is

evolving, renewing itself »1 affirme Olli Pekka Kallasvuo au Go and Play Event.

La firme a, par le passé, fait évoluer son cœur de métier à plusieurs reprises, et a ainsi développé une

forte culture du changement. Nokia Corporation est née en 1966 de la fusion de trois firmes :

- Nokia Company, un fabricant de papier,

- Finnish Rubber Works, un fabricant de caoutchouc et de pneus

- Finnish Cable works, un ancien fabricant de câbles téléphones.

Le groupe issu de cette fusion oeuvrait dans quatre secteurs : la pâte à papier et le papier, le

caoutchouc, les câbles, et l’électronique, qui représente alors seulement 3% du chiffre d’affaires

global. Cette branche s’oriente petit à petit vers les télécommunications, avec en 1982, le lancement

des premiers téléphones de voiture, et en 1987, le lancement du premier téléphone mobile. Le

conglomérat « touche-à-tout » se recentre pourtant en 1992 sur les télécommunications: suite à la

chute de l’URSS, son principal client, le groupe se trouvait dans une situation désastreuse. Les

télécommunications, secteur déjà fortement concurrentiel, offrent alors de fortes possibilités de

croissance.

Aujourd’hui, le marché des télécommunications arrive à maturité dans les pays développés. C’est

pourquoi Nokia voit dans les services Internet mobiles un nouveau relais de croissance possible, dans

un contexte de convergence des secteurs Internet et mobile. La firme leader du marché de la

téléphonie mobile avec 40% de parts de marché, ne s’est pourtant jamais aussi bien portée sur le plan

financier :

2007 2006 2005

Chiffre d’affaires (EURm) 51 058 41 121 34 191

Résultat net (EURm) 6 746 4 306 3 616

Marge opérationnelle 13,21% 10,47% 10,56

Source : Nokia Financial Report 2007

1 « Ce qui se passe aujourd’hui concerne directement l’évolution de Nokia, sa renaissance »

Lucie Louvet 2 IEP Rennes

Page 9: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

1.3 L’incident critique

Reste qu’avec l’annonce de la construction d’une « forteresse numérique »1, Nokia entre de

front dans le champ des opérateurs et des fournisseurs de contenus. Pour la marque MSN par exemple,

il n’y a pas de place pour l’équipementier finlandais : « Notre première conviction est que la

révolution des usages de l'Internet mobile se fera avec les acteurs historique du Web. Notre deuxième

conviction est que cette révolution se fera avec les opérateurs car ce sont eux qui maîtrisent

aujourd'hui la relation client, la facturation et la tarification de l'accès et de la consommation de data

sur le mobile. »2. Face à ces agressions, Nokia agite les chiffres de son parc multimédias : 300 millions

de terminaux multimédias vendus dans le monde, dont 140 millions de téléphones intégrant un lecteur

de musique MP3 vendus en 2007. « Nokia est légitime sur les contenus de par son parc de terminaux

installés » réplique Jacques Sylvander, le Directeur général de Nokia France.

Si le fil rouge du développement de Nokia réside dans sa capacité à se renouveler, il faut signaler que

ces changements s’inscrivent sur le long terme (un siècle, puis un demi siècle). Pour cette raison, il

m’a fallu raisonner sur le long terme également, et en particulier sur les moyens de pérenniser la

présence de Nokia sur le marché des services Internet mobiles. Le défi qu’a embrassé l’équipementier

finlandais prend tout son sens quand on sait que la visibilité sur ce marché n’excède pas cinq ans, tout

comme l’ensemble des marchés qui touchent à la sphère Internet. Face à cette difficulté, ma méthode

est la suivante : tout d’abord regarder si Nokia s’est effectivement donné les moyens de verrouiller sa

présence sur le marché des services Internet pour les 5 années à venir ; puis soulever la question de la

pérennité en se demandant si Nokia est effectivement capable de soutenir sur le long terme une

stratégie d’investissement dans les services Internet mobiles.

Dans ce contexte, comment Nokia, premier équipementier à investir massivement dans les contenus,

peut-il construire des bases solides afin d’assurer la construction de sa forteresse numérique ? En

d’autres termes, la stratégie de rachat de contenus menée par Nokia lui permet-elle de contourner les

opérateurs de téléphonie mobile, et de s’établir durablement sur le marché des services Internet,

nécessaire relais de croissance ?

1 Challenges.fr, « Nokia contraint d'ajourner le lancement de son service de jeux », 02.11.20072 Thomas Romieu, Directeur marketing et stratégie de MSN France

Lucie Louvet 3 IEP Rennes

Page 10: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

2. ANALYSE ET RESOLUTION DU CAS

Le soucis de posséder son outil de production est une constante qui se retrouve au fil du temps

dans l’histoire de Nokia. Même en 2001, alors que le marché des terminaux mobiles est en crise et que

plusieurs équipementiers se voient contraint de céder leur outil de production pour devenir des

« entreprises sans usines »1, Nokia restera maître du sien. Le Finlandais dispose aujourd’hui de neufs

usines : quatre en Europe (Finlande, Royaume-Uni, Roumanie, Hongrie), deux en Amérique

(Mexique, Brésil) et trois en Asie (Chine, Corée du Sud, Inde). C’est face à ce constat que la stratégie

de Nokia prend sens : racheter des contenus, pour verrouiller son tournant vers les services

Internet mobiles, nécessaire relais de croissance (Hypothèse de départ).

2.1 Du produit au service : OVI un nécessaire relais de croissance

L’analyse des causes et des conséquences, issue de la méthode des cas

(1) Cause: Les cabinets d’analyses s’accordent sur un ralentissement des ventes de terminaux sur le

marché mondial. Les meilleurs prévisions s’accordent sur 10% de croissance pour 2008 (Gartner,

Strategy Analytics, IDC). Les plus pessimistes tablent sur 8,2% (Isuppli), voir 5,7% (IMS Research),

alors que la vente des terminaux mobile à connu des rythmes de croissance nettement plus élevés en

2005 (21 %), 2006 (21,4%) et 2007 (16%) selon le cabinet Gartner.

1 Serge Tchuruk, PDG d’Alcatel

Lucie Louvet 4 IEP Rennes

Cause :

Ralentissement des ventes de terminaux, due à une saturation des marchés matures (1) et (1) bis.

Problème :

Ralentissement des recettes sur le marché de la téléphonie mobile (3).

Conséquence :

Recherche de relais de croissance sur les services, tout en conservant leur ancien cœur de métier, la vente de terminaux (4).Cause :

Baisse du prix de vente moyen des terminaux (2).

Page 11: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

(1) bis Cause : Ce ralentissement s’explique par une saturation du marché de la téléphonie mobile en

Europe, avec un taux de pénétration égal ou supérieur à 100% dans 18 pays sur 25 au sein de l’Union

Européenne:

Source : « Téléphonie mobile en France. Analyse critique de l’étude de l’AFOM »

Que choisir, 10/07/07

(2) Cause : L’évolution du prix de vente moyen (Average Selling Price) des terminaux Nokia est à la

baisse : de 103 € au Q1 2006, il passe à 89 € au Q1 2007, pour s’établir à 79€ au Q1 20081.

(3) Problème : Ces deux constats expliquent que les équipementiers, dont Nokia, doivent faire face à

un fort ralentissement des recettes issues de la vente des terminaux. D’après le cabinet d’analyse Idate,

les revenus du marché mondial des terminaux s’élèvent à $131 milliards en 2007, en croissance de

12% par rapport à 2006 ($117 milliards). Leurs projections établissent un revenu de $150 milliards à

horizon 2011, soit une croissance de 6,2 % par an.

(4) Conséquence : C’est face à cette tendance de fond que les sociétés du secteur se tournent vers un

nouveau relais de croissance : le marché des services Internet mobiles, marché à fort potentiel en

Europe* :

1 Source : Données disponible à partir de 2006 uniquement, Seeking Alpha, Nokia Earning Call Transcript 2006, 2007, 2008

Lucie Louvet 5 IEP Rennes

Page 12: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

2006 2011 évolution

Revenus liés aux services

de messagerie**

19,7 milliards

d’euros

19,8 milliards

d’euros

+0,5%

Revenus liés aux contenus

mobiles***

2,2 milliards

d’euros

7,9 milliards d’euros +259%

Marché total des services

mobiles

21,9 milliards

d’euros

27,7 milliards

d’euros

+26%

Source : Jupiter Research, Etude “European Mobile Forecast, 2006-2011”, Thomas Husson,16/11/06

* l’Europe définie ici comprend 17 pays (Angleterre, Irlande, Allemagne, France, Italie, Espagne,

Portugal, Grèce, Suisse, Autriche, Pays-bas, Belgique, Norvège, Suède, Finlande, Danemark,

Luxembourg) et les revenus mentionnés excluent le trafic data

** La croissance des MMS, de l’e-mail et de l’instant messaging mobile fera plus que compenser le

déclin des revenus SMS

** Les revenus des services d’infotainment (Vidéo/TV, jeux, musique, etc) seront près de 3 fois

supérieurs à ceux des services de personnalisation (sonneries, logos,..)

Lucie Louvet 6 IEP Rennes

Page 13: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Le marché des services Internet mobiles

Définition des services Internet mobiles

L’expression « Internet mobile » est utilisée pour décrire la convergence entre la téléphonie mobile et

l’Internet. Il faut entendre par là la possibilité d’avoir une expérience client de qualité sur Internet

depuis son mobile. Le marché des services Internet mobiles regroupe l’ensemble des services délivrés

par un terminal mobile au cours d’une connexion Internet, ou téléchargés sur Internet et délivrés après

la connexion. Une typologie des services Internet mobiles peut être ébauchée1 :

- les services multimédia (Ex : Flickr, Picasa) ;

- les fonctions associées à la localisation géographique de l’utilisateur (Ex : Mappy, Google

Map) ;

- la communication interpersonnelle par l’intermédiaire de communautés (Ex : Facebook,

MySpace) ;

- les services d’information (actualités générales, sport, musique, météo, horoscope) ;

- les services professionnels de type « bureau-mobile » (Ex : Microsoft Office) ;

- les services de personnalisation et de divertissement (Musique, Jeux) ;

- les services d’utilité publique (urgence, sécurité, médecine) ;

- le commerce mobile (Ex : Ebay, Amazone) ;

- la communication interpersonnelle sous forme d’email (Ex : Hotmail, Gmail, Yahoo Mail) ;

- la communication machine/machine.

Le contexte favorable au développement de ce marché

Il prend actuellement son essor à la faveur de la croissance des débits des réseaux de téléphonie

mobile. Aujourd’hui, le réseau HSDPA permet le transport de tous types de données (voix, images,

vidéos), et peut potentiellement offrir au client une réelle expérience Internet mobile, similaire à une

expérience Internet sur PC. Cette barrière technique tend à être dépassée au cours de l’année 2008.

Autre barrière au développement de ce marché : le prix de l’offre trop élevé proposé par les

opérateurs. Cette barrière est également en train de tomber, avec l’apparition d’offres illimitées, telle

l’offre « star », lancée par Orange en mars 2008 qui propose un accès Internet et TV mobile illimitée.

1 Karine Poupée, La Téléphonie Mobile, Que-Sais-Je n°3661, 2003

Lucie Louvet 7 IEP Rennes

Page 14: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

La croissance des débits des réseaux de téléphonie mobile, du GSM à l’HSPA :

Sources : sites Internet d’Orange, SFR, ,et Bouygues Télécom

La demande des clients

Les services pertinents sur mobile ne sont pas les mêmes que les services pertinents sur PC fixe : « Sur

un PC je vais vouloir consulter mes comptes bancaires, sur un mobile, je veux recevoir un SMS qui

m’alerte si je suis dans le rouge»1. Deux sphères sont particulièrement pertinentes en terme de services

Internet mobiles : la communication et la mobilité. Il faut garder en tête qu’un client achète un

mobile pour communiquer. Aujourd’hui, c’est le SMS qui est le service-roi, avec un taux de marge

supérieur à 90%. Les services qui sont le plus attendus à l’avenir sont les services de communication :

envoi de photo, MMS, email, Windows Live Messenger sur mobile. Les autres usages émergents qui

peuvent rencontrer un certain succès sont ceux qui ont une pertinence en terme de mobilité. C’est le

cas de la géolocalisation, qui a énormément de sens sur un mobile.

1 Bouygues Télécom

Lucie Louvet 8 IEP Rennes

Nom du

réseau

Débit

moyen

Date de

lancement

Acronyme Couverture du

réseau (France)

Remarque

GSM

2G

24,7

Kbps

1992 Global System for

Mobile

communications

Orange: 99% de la

pop

GPRS

2,5G

40 Kbps 2000 General Packet

Radio Service

Orange: 99% de la

pop

WAP, SMS,

MMS

EDGE

2,75G

200 Kbps 2000 Enhanced Data

Rates for GSM

Evolution

Orange: 99% de la

pop

Norme

plébiscitée par

Bouygues

UMTS

3G

300 Kbps 2004 Universal Mobile

Telecommunication

s System

SFR : 70% de la

pop

Orange:70% de la

pop

Plébiscitée par

Orange et

SFR.

Le saut

qualitatif

attendu ne

s’est pas

concrétisé.

HSPA

3G+

3,6 – 7,2

– 14,4

Mbps

2006 High-Speed Packet

Access

SFR : 70% de la

pop

Orange : 70% pop

Réel saut

qualitatif.

Page 15: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Les offres concurrentes

Nokia n’est pas le seul à vouloir se tailler une part de choix sur le marché des services Internet

mobiles. En face de l’équipementier se dressent les opérateurs de téléphonie mobiles : Vodafone,

Orange, Telefónica Mobiles, TIM, et T-Mobile, pour ne citer que les plus importants sur le marché

européen, et surtout le japonais NTT DoCoMo, l’indien Bharti Airtel, et China mobile pour les

marchés asiatiques. Ce sont des acteurs historiques sur ce marché, qui contrôlent aujourd’hui l’accès

au client, et disposent d’une importante offre de services Internet mobiles. Autres grands noms bien

décidés à profiter de ce marché: les acteurs du web traditionnel qui, à l’instar de Yahoo, Google, et

MSN, possèdent déjà une offre de services Internet étoffée sur PC, et qui débarquent aujourd’hui sur

les mobiles.

Aux côtés de Nokia, Google, le numéro 1 du web, se distingue de par sa stratégie agressive de rachat

pour les services :

- de communication (rachat de Getonic Software) ;

- vidéo (Youtube) ;

- Photo (Picasa) ;

- localisation géographique (Where2, Map Analysis, Neven vision, Endoxon, Image America).

Les opérateurs de téléphonie mobile adoptent plutôt une stratégie de signature, à l’image d’Orange,

qui a des accords pour ses services de :

- communication (Meetic) ;

- jeux (Goa) ;

- musique (Musiline) ;

- photo (Photoservice.com) ;

- localisation géographique (Mappy) ;

- commerce mobile (alapage.com) ;

- et ses services d’utilité publiques (Maxicours).

Annexe 2 : Les offres concurrentes sur le marché des services Internet mobile

Lucie Louvet 9 IEP Rennes

Page 16: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Le partage des recettes sur le marché des services Internet mobiles

Les services représentent aujourd’hui 3€ sur une facture moyenne de 50€ par mois. La

question du partage des revenus est primordiale. En effet, les équipementiers ne sont pas les seuls à

prévoir une baisse de leurs revenus traditionnels : les opérateurs s’attendent également un effritement

de leurs revenus tirés du vocal, et recherchent donc un nouveau relais de croissance sur le non-vocal.

Les recettes se partagent entre les acteurs présents sur le marché de la téléphonie mobile, qui sont au

nombre de 3 : les propriétaires, les distributeurs, et les transporteurs.

Les propriétaires : ce sont les ayants droit qui possèdent le contenu. Il s’agit des fournisseurs

de contenus (dont les Maisons de disques, Editeurs de jeux, Média, Fournisseur de sites

communautaires, de sites de partage de photos), des constructeurs de téléphones (tel Nokia,

avec le rachat de Navteq, spécialiste de cartographie numérique), des marques Internet

(comme Microsoft, Yahoo ou Google qui proposent leur boîte mails et moteur de recherche),

et des opérateurs….

Les distributeurs : ils sont l’intermédiaire entre les propriétaires et les transporteurs. C’est le

cas des équipementiers et des opérateurs, lorsqu’ils distribuent les services de tiers.

Les transporteurs : ils transportent les données. Il s’agit des opérateurs téléphoniques

(Vodafone, Orange, Telefónica, TIM, T-Mobile, ...), ou des opérateurs Internet (Neuf

Télécom, Free, …).

Au sein de ce trio propriétaire/distributeur/transporteur, chaque rôle est incontournable : les

fournisseurs de contenus se trouvent en haut de la chaîne de distribution, les transporteurs ont accès au

client final, et les distributeurs se trouvent entre les deux. La « part la plus belle » des revenus

reviendra cependant à la marque qui possède le contenu. Si l’équipementier finlandais veut tirer des

ressources de la part des services Internet, il doit mener une politique de rachat dans le secteur des

services Internet. Au lancement de son portail OVI, l’ambition de Nokia est d’occuper à la fois la

place de propriétaire et de distributeur, et de cantonner les opérateurs au rôle de transporteur : « les

opérateurs doivent se contenter de tirer leurs recettes du transport des données, c’est la place qui leur

revient. »1. Les opérateurs, quant à eux, souhaitent également remonter la chaîne logistique et occuper

la place de transporteur, de distributeur, voir de propriétaire, à l’image d’Orange, qui a remporté en

France les droits du football français sur la période 2008-2012 aux côtés de Canal+.

1 Xavier Des Horts, Directeur commercial de Nokia

Lucie Louvet 10 IEP Rennes

Page 17: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Les racines de Nokia dans les services Internet mobiles :

Une gamme de produits tournés vers les services Internet mobiles1

Les nouveaux modèles lancés à l’occasion du Nokia World, qui s’est tenu à Amsterdam les 6 et 7

décembre, révèlent la volonté de Nokia d’étoffer sa gamme de terminaux axés sur le divertissement.

La gamme Nseries s’enrichit ainsi de 7 modèles. A noter également la sortie de deux téléphones

XpressMusic.

La gamme NSeries2 offre 28 modèles tournés la musique, les jeux, la vidéo, l'Internet mobile, la photographie et les cartes.

N95 : It’s what computers have become

“With speedy web access, up to 10 times faster than standard 3G, the Nokia 95 multimedia computer is your gateway to the net. Subscribe to your favourite pod cast. Bookmark the hottest new websites. Upload photos and purchase and download music. Navigate web pages easily with Nokia Web Browser with Mini Map. Organize your schedule, view common attachments, stay in touch with email and instant messaging. The Nokia N95 has 5 mega pixel camera, Carl Zeiss optics, advanced auto focus and a large 2.6 TFT display with a wide viewing angle. Add video stabilisation and VGA resolution up to 30 frames per second for DVD-like video. The-on device photo and video editor then lets you be as creative as you want to be.”

Prix nu : 429€

La gamme XpressMusic3 se compose de 4 terminaux entièrement dédiés à la musique.

Nokia 5310 XpressMusic

“The Nokia 5310 XpressMusic is pure pop. From its wafer-thin anodized aluminium design to its mighty sound, you will soon find yourself telling everyone about its funky bend of form and functions. The choice f this phone is clear for anyone serious about music. Fantastic sound reproductionThe dedicated audio chip hidden inside its ultra-slim, ultra light form will amaze you with its dazzling sound reproduction. You can experience its power from the moment you activate any of a selection of pre-loaded tunes with the press of its dedicated diamond cut music keys. And with its standard 3.5 mm headphone jack, you can choose the ear wear that suit your surroundings or choice of music. […]”

Prix nu : 229€_______________1Autres collections : Gamme Business ESeries (10 modèles), Gamme Entry, Gamme Connect, Gamme Live, Gamme Explore, Gamme Achieve, Gamme Fashion, Gamme Prisme (2 modèles), Gamme Premium. 2 Source : http://www.nseries.com/index.html 3 Source : « New products launched at Nokia World 2007 », Nokia, 2007

Lucie Louvet 11 IEP Rennes

Page 18: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Historique de la présence de Nokia dans les services Internet mobiles

La gamme de téléphones multimédia n’est pas la seule racine de Nokia dans les services Internet

mobiles. L’étude de l’historique de Nokia montre que la firme finlandaise prépare depuis 2003 son

tournant vers les services Internet mobiles. Historiquement, les jeux sont donc la 1ère brique de la

forteresse numérique Nokia.

(1) (2) (3) (4)

(5) (6) (7)

(8) (9) (10) (11)

Page 19: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Passé Présent Futur

A B C

Annexe : présentation du portail OVI

Annexe : présentation du portail OVI

Transition : OVI, futur portail de Nokia, se présente donc comme un relais de croissance vers les

services Internet mobiles. Même si les dirigeants de Nokia font semblant de ne pas avoir de stratégie

sur le long terme : « We don’t know what it is going to be, because people will decide it »1,

l’équipementier finlandais a de solides racines sur ce marché, de par sa gamme de produits

multimédia, et l’intérêt porté aux services depuis 2003. Une politique de signature lui permet certes

d’exister sur le marché des services Internet mobiles, mais, pour bien en vivre, il doit se positionner en

tant que propriétaire. La stratégie de rachat de contenu prend alors tout son sens. Dans quelle mesure

cette stratégie permet-elle à Nokia de verrouiller sa présence sur le marché des services Internet ?

1 « Nous ne savons pas ce que [OVI] va deveni,r, parce que nos clients le décideront » Anssi Vanjoki, Vice Président de Nokia, lors de la présentation d’OVI au Go and Play Event le 29/08/07

Période suivant les changements recommandés

- 2008 Lancement des services restants : N-Gage, Nokia Photo, Vidéo&TV, Contacts, et Internet.

- Lancement d’OVI.com

- Lancement d’OVI for PC

- Multiplication des accords avec les opérateurs et les fournisseurs de contenus

Durée

Période de transition

29 Août 2007 : annonce du lancement de la plateforme OVI (7) avec 3 services - N-Gage (4)- Nokia Maps (5)- Nokia Music Store (6)

Nov. 2007 : Club Nokia devient My Nokia

Nov. 2007 : Ouverture du premier Nokia Music Store au UK.

Janv. 2008 : Création de la division Services au sein de la structure de Nokia

Avril 2008 : Ouverture du Nokia Music Store en France

Période décrite dans le cas

1996 : Création du Club Nokia, autour du site club.nokia.fr, plateforme commerciale et relationnelle. (1)

1997 : lancement du jeux snake (2)

1999 : lancement du Nokia 7110, 1er terminal WAP (8)

2002 : lancement du Nokia 7650, 1er téléphone mobile avec appareil photo numérique intégré (9)

2003 : Lancement de la série N-Gage, 1er téléphone-console de jeux portable. Succès mitigé, avec la moitié des ventes prévues réalisées (10)

2003 : Lancement du Nokia 3650, 1er téléphone mobile avec caméra intégrée (11)

Sept 2003 : Nokia rachète Sega.com Inc

Sept 2005 : Lancement de MOSH (Mobilise and Share), site de partage entre utilisateurs. Succès, 6 millions d’utilisateurs en 2007 uniquement de bouche à oreille (3)

Fév 2007 : Lancement de Nokia Maps

Page 20: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

2.2 Une stratégie de rachat de contenus

Le modèle Merger & Acquisition :

Les constructeurs et les opérateurs ont fait le même raisonnement : pour exister sur le marché des

services Internet mobiles, la première étape consiste à signer avec les grandes marques Internet. La

stratégie de SFR est révélatrice à cet égard, puisque l’opérateur français s’est allié à plusieurs grandes

marques, telles Windows Live, Dailymotion, YouTube, eBay, Myspace et Google Maps en Juillet

2007, en plus des partenariats déjà signés avec Allocine, Pagesjaunes, Lequipe et Mappy, pour

proposer à ses clients l’offre « Best of web ». Pour tirer des revenus du marché des services Internet

mobiles, la deuxième étape consiste à acheter un actif stratégique dans ce secteur, avec de la valeur

ajoutée. La politique de rachat menée par Nokia dans les services Internet depuis 2003 va dans ce

sens. Deux types d’acquisition sont à distinguer : le rachat de sociétés pour acquérir des technologies

dans le domaine de l’environnement Internet, et le rachat de sociétés dans le but d’acquérir de

l’audience.

Sega.com Inc, San Francisco, Etats-Unis. Société spécialisée dans la distribution de jeux, et

les services de jeux en ligne, Sega.com est l’un des principaux fournisseurs de technologies

pour les jeux sur mobile et les jeux multi joueurs. Le groupe Nokia a acquis 100% des actions

de Sega.com le 16 septembre 2003. Les modalités de l’acquisition sont confidentielles. Les

actifs de Sega.com servent la stratégie de Nokia dans les jeux, avec la constitution de la

plateforme N-Gage. [Acquisition de technologies].

gate5 AG, Berlin, Allemagne. Société éditrice du logiciel de navigation GPS multi plateforme

« smart2go ». Le groupe Nokia a acquis 100% des actions de gate5 le 15 octobre 2006. Les

modalités de l’acquisition sont confidentielles. Nokia s’est appuyé sur le savoir-faire de gate5

AG pour constituer son propre logiciel de navigation « Maps ». [Acquisition de technologies].

Loudeye Corporation, Bristol, Angleterre. Le groupe Nokia a acquis 100% des actions du

fournisseur de solutions B2B de musique en ligne, le 16 octobre 2006, pour 60 millions de

dollars (il s’agit du rachat des activités internationales, les actifs américains ayant été vendus à

Muze pour 11 millions de dollars). Le réseau de distribution de Loudeye a permis la

constitution du magasin électronique Nokia Music Store. [Acquisition d’audience].

Page 21: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Twango, Etats-Unis. Créée en 2004, cette plateforme permet le partage et l’organisation de

photos, de vidéos et autres contenus personnels. Le groupe Nokia a acquis substantiellement

toutes les immobilisations de Twango le 25 juillet 2007, pour un montant d'environ 100

millions de dollars1. La structure de Twango a servi à la création de « Share on Ovi », site en

ligne de gestion de contenu de Nokia. [Acquisition d’audience].

L’acquisition la plus importante en terme de valeur n’est pas finalisée à ce jour :

Navteq, Chicago, Etats-Unis. Ce fournisseur de cartographie numérique est en cours

d’acquisition depuis octobre 2007, pour 5,7 milliards d’euros. L’achat sera finalisé le 18 août

2008, date du rendu de la décision de la commission européenne. Les cartes de Navteq

alimentent en contenu le service Nokia « Maps ». [Acquisition de technologie, et d’audience].

La croissance externe est l’arme de Nokia sur le champ de bataille des services Internet mobiles. Cette

stratégie agressive ne pèse pas, à première vue, sur les comptes du groupe, qui garde un ratio

dettes/fonds propres équilibré bien qu’en hausse pour s’établir à 53,9% au 31 décembre 2007:

En millions d’euros

2007 2006 2005

total liability 20 261 10 557 9 938

total assets 37 599 22 617 22 452

ratio tot liab/tot assets 53,90% 46,68% 44,26%

current liabilities 18 976 10 161 9 670

current assets 29 294 18 586 18 951

ratio curr liab/cur ass 64,78% 54,67% 51,03%

non-current liabilities 1 285 396 268

non-current assets 8 305 4 031 3 501

ratio non-curr liab/non-curr ass 15,47% 9,82% 7,65%

operating income 7985 5488 4639

interest expense 43 22 18

interest coverage ratio 185,69 249,45 257,72

1 source WSJ

Page 22: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

operating income 7985 5488 4639

interest expense 43 22 18

interest coverage ratio 185,69 249,45 257,72

interest expense 43 22 18

tot liab 20 261 10 557 9 938

Average cost of borrowed capital 0,21% 0,21% 0,18%

Source : Nokia Financial Report 2007

La lecture des rapports financiers de Nokia souligne une certaine flexibilité du périmètre d’activité du

groupe, qui pourrait expliquer avec, de 2005 à 2007, des achats d’actifs qui sont contrebalancés par la

vente d’actifs :

Nextrom Holding. 3,2 millions d’actions revendues le 18 mars 2005. Les modalités de cette

vente sont confidentielles.

Professional Mobile Radio business, Munich, Allemagne. Les activités de Nokia

Professional Mobile Radio ont été revendues à EADS le 5 Septembre 2005. Les modalités de

cette vente sont confidentielles.

3G chipset development, Genève, Suisse. 100 % des actifs revendus le5 novembre 2007. Les

modalités de cette vente sont confidentielles.

Identity Systems, Etats-Unis. 100% des actifs vendus à Informatica pour 85 millions de

dollars. Opérations finalisé en mai 2008. Les modalités de cette vente sont confidentielles.

Il semble que le groupe Nokia « voyage léger », et qu’il se sépare de sociétés ou prises de participation

pour acquérir les actifs nécessaires à la poursuite de sa croissance externe. Cette stratégie financière

est un des éléments qui permettent à Nokia de conserver un équilibre financier même en période

d’acquisitions. Porter sur le long terme une stratégie tournée vers les services Internet coûte cher, et

demande des investissements immatériels importants. Ce constat mériterait d’être approfondi, et

constitue une limite de cette monographie.

Annexe 3: Résultats financiers 2007

Page 23: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Hardware

Software

Le cas de Navteq, fournisseur de cartographie numérique

Cette acquisition est non seulement la plus significative en terme de valeur, mais aussi la plus

pertinente. En terme de valeur, le rachat de Navteq est évalué à 5,7 milliards d’euros, soit 5,4 milliards

d’euros après absorption de la trésorerie excédentaire. En Juin 2007, la trésorerie de Nokia et les

liquidités placées à court terme s’élevaient à 8,7 milliards d’euros. L’acquisition sera financée à 50%

par du cash, et à 50% par de l’endettement, ce qui se ressentira dans les résultats du groupe en 2008 et

2009. Nokia valorise Navteq 54 euros (78 dollars) par action, soit une prime de 34% par rapport à son

cours constaté le mois précédent, (84% par rapport au cours constaté il y a 3 mois). La valeur du

cartographe américain monte alors à 24,2 fois son EBITDA1, et 8,4 fois son chiffre d’affaires. Il s’agit

du plus gros rachat du groupe depuis 1992, date à laquelle il se recentrait sur les activités de téléphonie

mobile.

Annexe 4 : Evolution du cours de Navteq

Sur le plan stratégique, il s’agit pour Nokia de remonter la chaîne de valeur, en rachetant l’un de ses

fournisseurs. Cette « croissance par intégration en amont »2 se révèle pertinente au regard des bonnes

performances du secteur de la cartographie numérique, et de ses fortes perspectives de croissance.

Conséquence de ce rachat : la mise sur le marché d’une offre intégrée « 100% Nokia » dans la

géolocalisation, alors que la position des équipementiers se réduit traditionnellement au hardware.

Contenu : Cartes (Navteq, en cours d’acquisition par Nokia)

Logiciel : Nokia Maps (gate5 AG, racheté par Nokia

le 15/10/2006)

Système d’exploitation : S60, (Symbian, société britannique

possédée à 47,9% par Nokia)

Terminaux : 27 téléphones Nokia compatibles avec Nokia Maps

Si cette opération de croissance externe peut être perçue comme une stratégie agressive, on peut

imaginer au contraire que ce rachat suive une logique défensive, sachant que des rumeurs couraient en

Juin 2007 sur l’intérêt de Google pour Navteq3 : « Ce rachat lui permet de sécuriser son

approvisionnement en cartographie numérique, plutôt que de le voir passer chez un concurrent »4.

1 « Earnings before Interest, Taxes, Depreciation, and Amortization », indicateur américain proche de l’EBE français, qui intègre le coût de la fiscalité en plus2 Kotler et Dubois, Marketing Management, Publi Union, 10e édition, 2000, p.1083 « Navteq is Google-icious », Geodatablog, Christophe Charpentier, 07/06/074 Thomas Husson, analyste chez Jupiter Research

Page 24: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

NOKIA

Navteq

TOMTOM

Tele Atlas

Téléphonie mobile

Nokia MapsOrangeVodafoneVerizon, … Marché très prometteur

ConstructeursAutomobiles (1 ère monte et option)

Groupe PeugeotGroupe FiatRenaultNissanBMWFord, … Marché en croissance, très dépendant de l’évolution des ventes d’automobiles

Marques Internet

Google MapsYahooAOLMicrosoft, … Marché en croissance

PND2

GarminTomTomMagellanMichelin NavmanPioneer et LG Marché en forte croissance

PDA3

DellHP Marché non significatif

Plus précisément, avec le rachat de Navteq, Nokia s’empare de l’un des deux fournisseurs présents sur

le marché de la cartographie numérique. Navteq (chiffre d’affaires 2006 : 582 millions de dollars)

occupe une position dominante, avec pour seul concurrent la société néerlandaise Tele Atlas (chiffre

d’affaires 2006 : 264 millions de dollars). Ce duopole, préservé depuis une vingtaine d’année,

s’explique par l’importante base de données (69 pays sur 6 continents en 2008) possédée par Navteq

(60% de parts de marché) et Tele Atlas (40% de parts de marché). Les données cartographiques les

plus précises (limitations de vitesse, emplacement de stations services,…) étant recueillies « à la

main », en sillonnant les routes, la difficulté de constituer une nouvelle base de données représente une

forte barrière à l’entrée de ce marché. Navteq apparaît alors comme un véritable actif stratégique,

source d’avantage compétitif, qui permet à Nokia de fournir certains de ses concurrents. Grâce à cette

acquisition, Nokia se positionne au côté de Tele Atlas sur l’ensemble du marché de la cartographie

numérique.

L’entrée de Nokia sur le marché de la cartographie numérique1 :

1 La lettre de la technologie, « Navteq, une opportunité », René Choulet, 06/09/062 Personal Navigation Devices3 Personal Digital Assistants

Page 25: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Le modèle des 5 forces de Porter1

La stratégie de rachat de contenu de Nokia lui permet de sécuriser sur le long terme sa position en

amont sur le marché des services Internet mobiles et de diminuer les forces qui pèsent sur la firme :

- en diminuant le pouvoir de négociation des fournisseurs et en sécurisant l’approvisionnement

dans les services où il possède son propre contenu ;

- en fournissant du contenu à certains des concurrents du secteur, et probablement à certains

nouveaux entrants ;

- en se positionnant sur le marché des produits de remplacement pour certains services, comme

la géolocalisation.

1- Pouvoir de négociation des fournisseurs nul (0 sur 5) moyen (3 sur 5).

Le pouvoir de négociation des fournisseurs est nul dans la géolocalisation, le partage de contenus, et

les jeux, où Nokia est propriétaire de son offre.

Pour les autres services, il me semble que le pouvoir des fournisseurs est équivalent au pouvoir de

Nokia. D’un côté, Nokia possède une « super arme »: ses 300 millions de terminaux multimédias en

circulation, formidable outil de distribution de contenus pour les fournisseurs. De l’autre côté, Nokia a

absolument besoin de signer avec les grandes marques fournisseurs de contenus pour s’assurer une

visibilité sur le marché des services Internet.

2- Pouvoir de négociation des clients relativement fort (4 sur 5)

1 M. Porter, L’avantage concurrentiel , InterÉditions, 1986

5- Concurrents du secteur : Forte rivalité

(5/5)

2- Clients (B to B)Pouvoir de négociation

relativement fort (4/5)

1- Fournisseurs : Pouvoir de négociation nulle (0/5) ou moyen (3/5)

3- Produits de remplacement : Menace relativement forte (4/5)

4- Nouveaux entrants : Menace relativement forte (4/5)

Page 26: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Il s’agit des opérateurs. Ce sont eux qui maîtrisent aujourd'hui l’extrémité basse de la chaîne de

distribution, c'est-à-dire la relation client, la facturation et la tarification de l'accès et de la

consommation de données sur le mobile. Le contre pouvoir de Nokia : le contrôle du processus

industriel de fabrication des terminaux. Le contenu de cette négociation est approfondi plus loin.

3- Menace des produits de remplacement relativement forte (4 sur 5)

Il existe des produits de remplacement offrant un à un les services regroupés dans OVI : Navigateurs

GPS, baladeurs mp3, et consoles de jeux portables, qui offrent une qualité de service égale ou

supérieur, pour un prix unitaire inférieur, mais un prix cumulé supérieur.

4- Menace des nouveaux entrants relativement forte (4 sur 5)

Il est relativement facile d’entrer sur le marché, de signer avec les grandes marques Internet et

d’exister sur le marché des contenus.

5- Forte rivalité entre les concurrents du secteur (5 sur 5)

Fabricants de terminaux, opérateurs mobiles, marques traditionnelles du web, les concurrents du

secteur sont nombreux, pour un marché en forte croissance. La marque Nokia reste cependant la plus

forte (5e position au classement Interbrand 2007 réalisé par Businessweek, Samsung arrive à la 21e

place, Apple 33e), et le groupe finlandais se distingue de ses concurrents par la pluralité des services

proposés.

Page 27: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

L’influence des gouvernements dans le jeu stratégique

Un grain de sable européen pourrait toutefois gripper la belle mécanique finlandaise. Ainsi, la

Commission européenne s’est saisie du projet d’acquisition de Navteq par Nokia le 28 mars 2008,

craignant d’éventuelles atteintes à la concurrence verticale au sein de l’Espace Economique Européen

: « L'enquête approfondie de la Commission visera notamment à déterminer si l'opération entraînerait

une hausse des coûts des cartes routières numériques pour les autres sociétés qui fournissent des

services de navigation sur combiné mobile ou limiterait leur accès à ces cartes, portant ainsi préjudice

aux consommateurs». Neelie Kroes, membre de la Commission européenne en charge de la

concurrence, rendra son avis le 18 Août prochain.

La Commission européenne peut interdire une concentration pour deux raisons :

1. Si elle conduit à la suppression d’un acteur indépendant par un concurrent.

Ici, ce n’est pas le cas puisque Navteq n’était pas concurrent de Nokia.

2. Si elle crée ou renforce une position dominante sur un marché donné.

Ici, le rachat de Navteq, l’un des deux seuls fournisseurs de cartes numériques couvrant

l’Europe et l’Amérique du Nord, par Nokia, leader de la téléphonie mobile avec 40% de parts

de marchés, pourrait effectivement créer une position dominante de Nokia sur le marché des

logiciels de navigation pour téléphones mobiles.

Trois options possibles :

1. La Commission européenne interdit le projet d’acquisition (1 cas sur 400 en 2007)1

2. La Commission européenne approuve le projet d’acquisition (385 cas sur 400 en 2007)

3. La Commission européenne soumet le projet d’acquisition à des conditions spécifiques (15 cas

sur 400 en 2007)

Les statistiques de la Commission mettent en avant la faible probabilité que le projet d’acquisition de

Nokia par Navteq soit interdit. Toutefois, si c’était le cas, c’est un pilier important de la forteresse

numérique de Nokia qui s’écroulerait. La pression concurrentielle sur le marché des services Internet

mobiles s’accentuerait pour l’équipementier, et il conviendrait de nuancer le caractère « verrouillé »

de la position de Nokia en amont de ce marché. Interrogé sur les clients de Navteq, le Directeur

commercial de Nokia, Xavier des Horts, refusa de se prononcer: « Navteq : aucun commentaire. Nokia

ne l'a pas encore acheté - enquête approfondie de la Commission Européenne ».

1 « Le contrôle des concentrations », Europa, Neelie Kroes, 26/02/2008

Page 28: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Annexe 5: Enquête de la Commission européenne

Transition : Le rachat de contenu permet à Nokia de s’avancer « petit bout par petit bout »1 sur le

marché des services Internet. En d’autre termes, la firme avance ses pions service après service :

d’abord les jeux (Sega.com), puis la musique (Loudeye), suivie du partage de contenus (Twango), et à

venir, les cartes (Navteq), et peut-être la TV mobile.

Ces rachats allègent le poids des 5 forces (Porter) qui pèsent sur l’équipementier finlandais : la

pression exercée par les fournisseurs devient nulle, et, pour les achats stratégiques, tels Navteq, Nokia

se positionne comme un fournisseur potentiel de ses concurrents et des nouveaux entrants. Il devient

également un des fournisseurs potentiels sur le marché de remplacement des navigateurs GPS.

Reste que, avancer des pions un à un et sécuriser sa position en amont (fourniture de contenus) ne

suffit pas pour « verrouiller » une position sur un marché. La question de la position de Nokia en aval

du marché (distribution des contenus) est à examiner également : qu’en est-il des négociations menées

avec les opérateurs (distributeurs) sur la distribution d’OVI, et quel est le poids de la stratégie de

rachat de contenus de Nokia au cours de ces négociations ?

Car c’est là que le bât blesse : si les opérateurs acceptent que Nokia inclut ponctuellement quelques

services dans le menu utilisateur de quelques téléphones, il n’en est pas de même lorsqu’il s’agit

d’inclure OVI, futur portail fédérateur de l’ensemble des services Nokia, dans l’ensemble des

terminaux. Et comme les opérateurs détiennent la clé de l’accès au client final, si Nokia se fait claquer

la porte au nez, ce sont les perspectives de son tournant vers les services Internet qui se réduisent.

1 Bouygues Télécom

Page 29: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

2.3 La négociation avec les opérateurs

Les relations traditionnelles avec les opérateurs

Les relations opérateurs/équipementiers ont toujours été délicates, puisqu’ils ont les mêmes

clients, mais avec des intérêts divergents. Un équipementier veut attirer le client vers sa marque, et

faire en sorte que le client renouvelle rapidement son mobile et qu’il revienne alors vers sa marque. Un

opérateur paie pour que le client achète un mobile et qu’il utilise ses réseaux, et a intérêt à pousser

l’usage du terminal et freiner son renouvellement.

Traditionnellement, les équipementiers contrôlent l’ensemble de la fabrication industrielle des

terminaux, et les vendent à des opérateurs (Vodafone, Telefónica, Orange, SFR, Bouygues, etc. qui les

commercialisent). Ils les vendent également à des distributeurs (E. Leclerc, Auchan, Carrefour, etc.), à

des détaillants (The Phone House, Phone pratique, etc.) et à des traders, qui assurent la

commercialisation auprès de détaillants plus petits1.

Les mobiles, pensés à l’échelle mondiale par les équipementiers, sont ensuite personnalisés selon la

demande des opérateurs. Plus ces derniers achètent de terminaux, plus les équipementiers sont prêts à

adapter le mobile à leurs besoins. La personnalisation est extérieure (apparition du logo de l’opérateur

sur le boîtier du terminal) et intérieure (le software qui pilote le téléphone varie d’un client à l’autre, et

détermine la gamme de services liée au forfait). Il faut savoir que les opérateurs paient très cher leurs

terminaux : ils les achètent auprès du constructeur, et les subventionnent également auprès du

consommateur2. En retour, ils attendent que leurs propres services soient facilement accessibles et mis

en valeur au moment où le client allume son téléphone pour la première fois. Les opérateurs négocient

donc avec l’équipementier, qui est le seul à pouvoir agir sur le processus industriel, pour que les

terminaux vendus avec leur forfait téléphonique contiennent leurs propres services.

L’opérateur contrôle la distribution des services sur les terminaux. Il détient la clé de l’accès au client

final, sauf sur le marché des téléphones nus, où le terminal et le forfait sont vendus séparément. Ce

marché est toutefois minime et ne suffirait pas à développer ses services. Si Nokia essayait de

contourner les opérateurs, il passerait à côté de son outil de distribution traditionnel, et aurait à

développer sa propre tarification de consommation de données, en marge de la tarification des

opérateurs qui regroupe le transport des données et les appels voix.

1 « Mythes et réalités du Supply Chain Management : état des lieux », Petit déjeuner organisé par les étudiants du Mastère Spécialisé Management International Logistique de l'ESSEC, elogisticien.com, 28/03/20012 Ils paient jusqu’à 110€ pour un terminal de 250€. Cette pratique est interdite dans d’autres pays de l’UE comme en Belgique.

Page 30: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

L’état des négociations avec les opérateurs sur le marché européen

L’annonce de la création de la marque OVI a suscité une levée de bouclier chez les

opérateurs. C’est le cas d’Orange, qui dans un premier temps a refusé catégoriquement de distribuer le

portail de l’équipementier finlandais aux côtés de son propre portail. Pourtant, Nokia a signé plusieurs

accords à ce jour concernant la distribution de son futur portail OVI avec des opérateurs européens :

Espagne - Telefónica - 1er opérateur mobile en Espagne - Accord signé 10/07

RU - Vodafone - 1er opérateur mobile mondial - Accord signé 11/07

Italie - TIM - 1er opérateur Italien - Accord signé 12/07

Allemagne - T-Mobile - Filiale mobile de Deutsche Telecom - Accord signé le 02/05/08

Les accords passés avec Telefónica, Vodafone et TIM seraient similaires : intégration native des

portail OVI, portail opérateurs et portails tiers, et coopération pour la facturation. De ces trois

opérateurs, Vodafone, est le seul à posséder une offre de services structurée autour d’un portail appelé

Vodafone Live!.

France - Orange - 1er opérateur français - Accord signé 02/08 – Il semblerait que l'accord

prévoit que Nokia s'efface derrière la marque Orange1.

1 La Tribune, « Orange et Nokia s’allient dans a bataille des services mobiles », 13/02/2008

Page 31: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Les accords signés à ce jour montrent clairement que Nokia se tourne vers les grands opérateurs de

téléphonie mobile, qui possèdent déjà une offre de services Internet mobiles. Ces opérateurs sont

fortement implantés à l’international, à l’image de Vodafone, premier opérateur mondial, et peuvent

être le moyen pour Nokia de lancer son portail OVI à grande échelle.

Annexe 6 : Implantation de Vodafone dans le monde

Le point central des négociations

Sur quoi portent ces négociations, et comment la stratégie de rachat de contenu de Nokia

influe sur ces négociations ? Les négociations entre Nokia et les opérateurs portent sur la distribution

des services Nokia par les opérateurs, et plus précisément sur la visibilité du portail OVI. Un terminal

mobile étant moins ergonomique qu’un PC, la visibilité des services est primordiale pour déclencher

l’usage. Pour qu’un portail de services Internet soit utilisé, il doit d’une part être impérativement

accessible en quelques cliques à partir du menu utilisateur. D’autre part, il doit être présent sur le

menu utilisateur à la sortie de l’usine, puisqu’il est très difficile pour de modifier l’interface utilisateur

après la fabrication du téléphone. Le point clé de la négociation porte donc sur la futur visibilité d’OVI

sur l’interface utilisateur , regroupant les services actuels « Maps », « Music », « N-Gage », et

« Web » au côté de « Gallery », portail français développé par Bouygues Telecom, Orange et SFR :

Portail opérateur

Services regroupés dans le futur portail

Page 32: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Etude des issues possibles à la négociation

Observons à présent les issues possibles de ces négociations en terme de visibilité du

portail et de partage des revenus. L’influence de la stratégie de rachat de contenu dans les

négociations est également examinée.

Issue 0 : Refus de la distribution du portail OVI.

Cette issue altère les relations entre l’équipementier finlandais et les opérateurs, pouvant aller jusqu’à

un point de rupture entre les acteurs.

Pour accéder au portail OVI sur un terminal, les consommateurs devront alors se connecter à Internet

depuis leur terminal 3G/3G+, et se diriger vers le portail OVI.com avant de choisir le service qu’ils

souhaitent utiliser. Cette solution est envisageable sur un PC, mais pas sur un terminal, appareil moins

ergonomique. Le portail OVI peut être rajouté sur le menu par l’utilisateur lui-même après l’achat,

mais, cette manœuvre est également moins évidente que sur un PC. Le portail OVI est fortement

pénalisé à la faveur du portail de l’opérateur, qui tire les revenus de distributeur, de transporteur, et de

propriétaire pour les services qu’il possède.

Issue peu réaliste sur les marchés où Nokia est leader/fortement présent, puisqu’elle induit de fortes

pertes de parts de marché pour les opérateurs et pour l’équipementier.

Issue possible sur les marchés où l’assise de Nokia est fragile, et où il peut être contourné (Etats-Unis,

Amérique Latine).

La stratégie de rachat ne joue pas dans la négociation..

Issue 1 : Accord de distribution de quelques services du portail OVI sous marque blanche1, en

complémentarité des services opérateurs, mais refus de la visibilité de la marque.

Cette issue peut intéresser les opérateurs qui souhaitent compléter leur offre, sans menacer l’utilisation

de ses propres services.

L’offre Nokia perd cependant un avantage compétitif : celle de la simplicité, et de l’accès à différents

services à travers un portail unique. L’opérateur tire des revenus en tant que distributeur, transporteur,

et propriétaire lorsqu’il possède du contenu.

Nokia tire des revenus en tant que propriétaire de contenu. Lors des négociations, Nokia peut

mettre en avant parmi ses services ceux où il a le plus de savoir-faire, souvent grâce à un rachat,

comme la géolocalisation ou les jeux.

Issue 2 : Accord de distribution de l’ensemble du portail OVI sous marque blanche.

Cette issue peut intéresser un opérateur qui aujourd’hui n’aurait pas d’offre sur le marché des services

Internet mobiles. Nokia perd la visibilité de sa marque OVI. L’offre Nokia conserve sa cohérence et

1 Mise à disposition du contenu sans citer la marque d'origine. Ici, la distribution d’OVi se ferait sous marque opérateur.

Page 33: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

son avantage compétitif de simplicité. L’opérateur tire des revenus de son rôle de distributeur et de

transporteur.

Nokia tire des revenus en tant que propriétaire de contenu. Issue peu réaliste, puisque très peu

d’opérateurs n’ont à ce jour aucune offre en terme de service mobiles.

Issue 3 : Accord de distribution de l’ensemble du portail OVI et accord de visibilité qui assure la

distribution du portail sous marque OVI, sans portail tiers.

Cette issue peut intéresser un opérateur qui aujourd’hui n’aurait pas d’offre sur le marché des services

Internet mobiles. C’est peu probable, dans le cas où l’opérateur perdrait entièrement la main sur le

marché des services. Il conserve néanmoins les revenus tirés du transport des données. L’offre Nokia

garde toute sa cohérence.

Nokia jouit de la visibilité de sa marque OVI, et tire des revenus en tant que propriétaire et

distributeur. Issue envisageable néanmoins sur le marché des téléphones nus1.

Issue 4 : Accord de distribution de l’ensemble du portail OVI et accord de visibilité qui assure la

distribution du portail sous marque OVI, aux côtés du portail opérateur et des portails tiers.

Chaque acteur garde la notoriété de sa marque et tire les revenus de l’utilisation de son portail. Les

différents portails sont en concurrence directe, et le client a plus de choix. L’opérateur perd

l’exclusivité de son portail. En échange, il peut négocier avec l’équipementier des exclusivités sur des

modèles de terminaux.

Les impacts des différentes issues peuvent être mesurées en terme d’impacts négatifs (-) ou positif (+)

sur les différents acteurs.

Issue 0 Issue 1 Issue 2 Issue 3 Issue 4

Opérateur + ++ + -- +

Equipementier -- - + ++ +

Client - - - - +

Total + : 1

- : 3

+ : 2

- : 2

+ : 2

- : 1

+ : 2

- : 3

+ : 3

- : 0

Idéalement, l’issue de négociation qui devrait arranger le + les acteurs est effectivement la n°4. C’est

effectivement la solution qui reflète le contenu des accords signés entre Nokia et Vodafone,

Telefónica, et TIM.

1 Marché des téléphones vendu par l’équipementier directement au client sans forfait opérateur. Le distributeur est alors un acteur tiers. Le distributeur le plus connu en France est The Phone House.

Page 34: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Quel est l’impact de la stratégie de rachat dans les négociations ?

La stratégie de rachat joue pour beaucoup dans la négociation, en particulier quand les acteurs

se mettent d’accord sur le choix de quelques services Nokia distribués par l’opérateur (issue n°1).

Dans les autres cas, la stratégie de rachat assure à Nokia des revenus tirés de l’utilisation de ses

services, même sous marque blanche.

Posséder du contenu dans les services Internet est donc une sécurité pour l’équipementier finlandais,

qui lui permet d’accepter des accords au rabais en terme de visibilité par rapport à ses ambitions

initiales. L’important pour Nokia aujourd’hui semble donc d’être présent sur le marché Internet, sans

forcément y être visible tout de suite.

Toutefois, cette variable est nécessaire, mais pas suffisante. Il ressort en effet de cette étude,

notamment de l’issue 0, l’influence palpable d’une deuxième variable : la position de leader sur le

marché de la téléphonie mobile de l’équipementier finlandais. Ainsi, sur les marchés où Nokia est

leader en terme de parts de marché (Europe, Asie Pacifique), et fournisseur de terminaux

incontournable, Nokia a le pouvoir de négocier la distribution d’OVI et d’être entendu. En revanche,

sur les marchés où sa position est plus fragile, et notamment aux Etats-Unis, il me semble que Nokia

n’est pas en position de force aujourd’hui pour affronter les opérateurs et leur imposer la distribution

d’OVI.

Page 35: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

3. DIAGNOSTIC, PRONOSTIC ET LIMITES

3.1. Diagnostic final

* Mon hypothèse de départ (Nokia verrouille son tournant vers les services Internet sur le long terme

en contrôlant les contenus) est validée. La stratégie de rachat de contenus de Nokia lui permet de

sécuriser sa présence en amont (fournisseurs) et en aval (distributeurs) du marché des services

Internet.

* La variable de l’achat de contenus est suffisante pour sécuriser sa présence en amont du marché

des services Internet (fournisseurs), et diminuer la pression des 5 forces (Porter) qui pèsent sur

Nokia :

- en sécurisant son propre approvisionnement ;

- avec le rachat d’actifs stratégiques, comme Navteq, en se posant comme fournisseur potentiel de

ses concurrents et des potentiels nouveaux entrants ;

- en se posant également comme fournisseur potentiel sur le marché des produits de remplacement

de certains services, comme la géolocalisation.

* La variable de l’achat de contenu joue également pour sécuriser la présence de Nokia en aval du

marché (distributeurs). Nokia ne peut contourner les opérateurs, qui détiennent la clé de l’accès au

consommateur final. En revanche, au cours des négociations avec les opérateurs, la stratégie de rachat

de contenus est une sécurité pour la firme d’Espoo, puisqu’elle lui permet d’accepter des accords « au

rabais » par rapport à ses ambitions initiales. Ainsi, même si elle se voit contrainte de distribuer

certains de ses services sous marque blanche, c’est elle, en tant que propriétaire, qui en tirera le plus

de revenus. Il me semble qu’au cours de la distribution de sa forteresse numérique, le principal pour

Nokia est d’être présent, quitte à ne pas être visible dans un premier temps.

* Pour finir, il me semble nécessaire de rappeler que la position incontournable de l’équipementier

finlandais sur le marché de la téléphonie mobile est un atout certain pour se lancer dans les services

Internet mobiles. Cette variable joue effectivement un rôle de premier plan en Europe et en Asie

Pacifique, puisqu’elle empêche les opérateurs de rompre avec l’équipementier au cours des

négociations. A contrario, la position plus fragile de Nokia sur d’autres marchés (11% de parts de

marché aux Etats-Unis, derrière l’américain Motorola et les sud-coréens Samsung et LG avec

respectivement 33%, 18% et 15% de parts de marché) n’écarte pas ce risque de rupture avec les

opérateurs. Par conséquent, il me semble prématuré aujourd’hui pour Nokia de négocier la distribution

de ses services Internet sur le marché américain, et primordial que l’équipementier cherche d’abord à y

renforcer sa visibilité.

Page 36: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

3.2 Pronostic

La possible poursuite de la stratégie de rachat de contenus de Nokia

L’environnement Internet étant un des axes forts de croissance de Nokia, et la santé financière de

la firme semblant viable sur le long terme, il est fort possible que l’équipementier finlandais

poursuive sa stratégie de croissance externe. Plusieurs possibilités s’offrent à lui : tout d’abord,

racheter des petites sociétés dans l’objectif d’acquérir un savoir-faire, des compétences, des

technologies. Ce type de rachat est indispensable à Nokia pour se familiariser avec la culture de

l’univers Internet. Un autre axe possible de développement est le rachat, ou la prise de participation,

de sociétés de contenu dans l’objectif d’acquérir de l’audience :

- une maison de disque ? Cette éventualité mérite d’être examinée, après les rumeurs de rachat

de la maison de disque EMI par l’opérateur China mobile en Juillet 2007. Toutefois, il semble

que l’intérêt de Nokia dans le domaine musical soit d’offrir le plus grand nombre de titres, qui

proviennent de l’ensemble des maisons de disques, plutôt que de prendre une participation

dans une maison de disque particulière, dans un secteur en crise. Pour constituer son offre

musicale, Nokia semble donc plutôt poursuivre une stratégie de signature d’accords avec

l’ensemble des maisons de disques. A l’heure d’aujourd’hui, Nokia a déjà signé un accord

avec deux maisons de disques : Universal Music et Sony Music.

- Une société de partage de contenu ou de communauté ? Cette option me semble être la plus

probable. Il y a d’ailleurs eu en ce sens des rumeurs de prise de participation de Nokia sur

Facebook en janvier 2008 (22/01/08), au côté de Microsoft. Une prise de participation semble

plus probable qu’un rachat, au vu de la valorisation boursière de ce type de société.

Le futur des négociations entre Nokia et les opérateurs

Les relations entre l’équipementier finlandais et les opérateurs risquent de se tendre à partir du

moment où OVI génèrera des revenus. Aujourd’hui OVI représente « l’épaisseur d’un trait de

crayon »1 dans les comptes des opérateurs. Par conséquent, il est préférable pour eux de signer un

accord portant sur un futur portail, en prenant finalement peu de risques, plutôt que de tendre les

relations avec un équipementier qui pèse lourd sur le marché. En effet, OVI est une marque qui

n’existe pas encore, et qui reste à créer auprès des consommateurs. Par conséquent, Nokia doit

travailler à créer ou conserver une position dominante en téléphonie mobiles sur les marchés où elle

lance ses services Internet mobiles, afin que les opérateurs ne puissent la contourner à la faveur des

équipementiers concurrents. Si la position de Nokia semble inébranlable aujourd’hui sur le marché des

terminaux mobiles, il ne faut pas oublier que les dix dernières années montrent « que les

1 Thomas Husson, analyste chez Jupiter Research,

Page 37: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

équipementiers passent, mais que les opérateurs restent. »1 En d’autres termes, le monde des

équipementiers voit ses modes évoluer au cours du temps, alors que le monde des opérateurs est

beaucoup plus stable. Cette différence se ressent en terme de parts de marchés : alors que les parts de

marché des opérateurs sont stables dans le temps, les parts de marché des équipementiers évoluent

plus vites. La position de Nokia pourrait donc être affaiblie à terme, notamment par les asiatiques

Samsung, Sony Ericsson et LG (respectivement 13,4% , 8,8% et 6,8% de parts de marché) qui ont les

capacités d’augmenter leurs volumes de production dans les années à venir.

3.3 Limites

J’ai essayé dans mon travail de faire une analyse aussi complète que possible des enjeux posés

par le tournant de Nokia vers les services Internet. Néanmoins, je regrette de ne pas avoir pu m’arrêter

d’avantage sur la stratégie financière de Nokia. Il aurait été passionnant d’approfondir cette mécanique

de haut vol, sûrement impulsée par l’actuel PDG Olli Pekka Kallasvuo, ancien directeur administratif

et financier du groupe. Ce sujet se trouvait être à la limite de ma problématique, et aurait pu presque

constituer un second sujet de mémoire à lui tout seul.

Ceci étant dit, je souhaite ajouter un mot sur la collecte d’informations. Jusqu’à la sortie du portail

OVI fin 2008, les négociations opérateur/équipementier resteront le point clé de la prise de position

des acteurs sur le marché des services Internet. Le sujet étant « vraiment touchy »2, chacun restera très

discret sur ses positions. Les informations communiquées par la presse à ce sujet sont également à

prendre avec précaution, à l’image de la fuite de La Tribune le 13/02/2008 révélant la distribution des

services de Nokia par l’opérateur Orange sous marque opérateur qui, a été contredit à la fois par

Xavier des Horts, Directeur commercial de Nokia : « N'écoutez pas La Tribune, c'est un mauvais

journal !» et par un cadre de Bouygues Télécom : « Ce n'est pas fait, l'accord est signé mais les enjeux

ne sont pas encore tous à jour ». Il m’a été difficile dans ces conditions de « distinguer le bon grain de

l’ivraie ».

1 Fabien Fontaine, ARCEP2 Bouygues Télécom

Page 38: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

SOURCES

Articles de presse

Le Figaro

« Orange et Nokia s’allient dans la bataille des services mobiles », Delphine Cuny, 13/02/08

Challenges

« Avec l’iphone, Apple invente un nouveau modèle », Gilles Fontaine, 26/09/07

« Nokia déclare la guerre à l’ « Applemania », Gilles Fontaine, 04/10/07

« Nokia s’empare d’une carte maîtresse », G.M. , 11/10/07

Le Monde

« Google étend son empire aux téléphones portables », Cécile Ducourtieux, 07/11/07

« Téléphonie mobile : Nokia ne partage pas », Cécile Ducourtieux, 16/12/07

« Nokia et Sony s’associent pour proposer une offre de musique illimitée » 22/04/08

Le Point

« Nokia et Telefonica vont collaborer dans les services Internet » 09/10/07

« Nokia mise sur les réseaux communautaires sur téléphone mobile », 24/10/07

« Revers pour les services de musique et de jeux en ligne de Nokia », 02/11/07

«Nokia et Universal au diapason », Charlotte Pons, 05/12/07

Forbes

“The Next Billion; The company covers the globe, but its phones are a flop in the US, and it’s

weakling on the Web. There’s a plan to change all that.” Bruce Upbin, 12/11/07

« China mobile Corp expected to buy EMI», Susan Wang, 30/07/07

«China mobiles say it is not involved in Terra firma bid for EMI», Leonora Wallet, 30/07/07

The Financial Times

“Nokia set to strike note with iTunes rival”, Maija Palmer, 28/08/07

“Nokia’s Ovi opens doors to the Internet”, Maija Palmer, 29/08/07

« Nokia sees opportunity in OVI-Vodafone deal », Maija Palmer, 08/11/07

Sites spécialisés

Nokia Press Release

« Vodafone and Nokia agree to launch integrated Vodafone services on Nokia handsets » 07/11/07

Page 39: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Le journal du Net

« La (r)évolution de la convergence Internet/Mobile », Thomas Husson, 16/02/07

« La révolution mobile de Nokia », Emilie Leveque, 19/03/08

« Les acteurs historiques du Web traditionnel débarquent sur le mobile », Emilie Leveque, 23/01/08

Que choisir

« Téléphonie Mobile en France. Analyse critique de l’étude de l’AFOM », 10/07/07

Seeking Alpha

Nokia Q4 2007 Earning Call Transcript, 04/02/07

Nokia Q3 2007 Earning Call Transcript, 18/10/07

Nokia Q2 2007 Earning Call Transcript, 02/08/07

Nokia Q1 2007 Earning Call Transcript, 19/04/07

Europa

« Concentrations: la Commission ouvre une enquête approfondie sur le projet d'acquisition de Navteq

par Nokia », Commission Européenne, 28/03/08

« Le contrôle des concentrations », Neelie Kroes, 26/02/08

« The control of concentrations between undertakings (the EC Merger Regulation) », Commission

européenne, 20/01/04

La lettre de la technologie

« Navteq, une opportunité », René Choulet, 06/09/06

Webcast

Go and Pay Event 29/08/07 : http://www.nokia.com/A4486939

Nokia World 4/12/07 : http://www.nokia.com/link?cid=PLAIN_TEXT_765807

Autres sites

Businessmobile.com

Servicesmobiles.fr

Zonebourse.com

Magazines spécialisés

Pda et smartphones magazine : toute sles nouveautés 2008 n°35

Mobiles achat Pour bien choisir n° 60

Page 40: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Livres

E. Shannon, W. Weaver, The mathematical theory of communication, University of Illinois Press, 5th

printing, 1972

K. Poupée, La téléphonie mobile, Que-Sais-Je n°3661, 2003

Kotler et Dubois, Marketing Management, Publi Union, 10e édition, 2000

M. Porter, L’avantage concurrentiel , InterÉditions, 1986

Etudes

Xerfi

Xerfi700, Nokia, Mai 2007Jupiter Research

Jupiter Research, Etude “European Mobile Forecast, 2006-2011. Identifying Main Trends in the

Mobile Services Market”, Lead Analyst : Thomas Husson, Contributing Analysts : Ian Fogg, Mark

Mulligan, Galina Naydenova, 16/11/06

Page 41: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXES

Table des annexes :

Annexe 1 : Présentation de la marque OVI …………………………………………………………...36

Annexe 2 : Les offres concurrentes sur le marché des services Internet mobiles …………………….39

Annexe 3 : Résultats Financiers 2007 ………………………………………………………………....40

Annexe 4 : Evolution du cours de Navteq…………….……………………………………………… 42

Annexe 5 : Enquête de la Commission européenne……………………….…………………………..43

Annexe 6 : Implantation de Vodafone dans le monde ……………………………………………….. 44

Annexe 7 : Bouygues Télécom, extrait d’entretien …………………..……………………………... 45

Annexe 8 : Nokia, extrait d’entretien …………………………………………………………..……. 46

Annexe 9 : ARCEP, extrait d’entretien………………………..……………………………………... 47

Annexe 10: Jupiter Research, extrait d’entretien ……………………………………………………...48

Page 42: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXE 1 : PRESENTATION DE LA MARQUE OVI

“ Ovi – Open the door to your world ”

Page 43: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXE 1 (SUITE)

Page 44: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXE 1 (SUITE)

Compte-rendu de la présentation d’OVI par Nokia auprès de Bouygues Télécom :

*un portail accessible par mobile / PC sur Internet.

* OVI ouvert aux non équipés Nokia (autres terminaux mobiles) – même si l’expérience client sera toujours supérieure sur les terminaux Nokia (intégration native)

* Quelques partenaires de contenus déjà signés : Yahoo, Youtube, Google, digg, linked in, facebook, iLike… + partenaires de contenu « locaux » à venir

* Démo du portail : nombreux services en ligne, gestionnaire de services, partage de contenu, sauvegarde / stockage de contenus en ligne (musique, photos, vidéos, répertoire…) – transfert mobile / PC – PC / PC et PC vers mobiles grâce à un gestionnaire de contacts.

* Mise en avant / accès au portail OVI : pas encore finalisé dans les produits Nokia. L’idée est d’introduire l’accès aux côtés du portail opérateur et notamment avec les possibilités offertes en customisation.

* Message passé à Nokia sur la nécessité d’accéder au portail OVI au travers du portail Bouygues Telecom (i-mode), notamment pour préserver la mise en avant des contenus et services locaux plus pertinents pour les clients et développer au mieux la consommation de services MMM.

* Illustration de services actuels et futurs qui seront intégrés dans OVI : service de Navigation Nokia Maps (pas encore intégré dans OVI) ; services de cartographie gratuits et (une partie) des services de navigation payants

* Nokia Maps, Nokia Games, N-Gage et Nokia Music Store vont être progressivement intégrés / fédérés dans OVI (finalisation de la stratégie en cours)

* Billing des services : une prochaine réunion dédiée sera montée avec les équipes contenus- : parmi les scénarios étudiés par Nokia, paiement cb en ligne à partir du mobile, utilisation du billing opérateur ou codes d’accès (prépayé) délivrés dans les coffrets opérateur par exemple ; plusieurs niveaux de prix correspondants à des usages occasionnels ou réguliers (abonnements).

* Terminaux cibles pour OVI en 2008 : 40 terminaux dont 14 GPS (verticale importante, forte différenciation Nokia). OVI accessible sur les plateformes S60 mais aussi S40.

* Evolution des jeux-vidéo chez Nokia : NGage (EA, Gameloft, vivendi Games…)

* Lancement commerciaux : Musique Q1 2008 / Jeux Q4 2007.

* Nokia Music Store : contenus Universal, EMI, Sony/BMG. Travail sur dual delivery mobile / PC et catalogue de contenus locaux (variété Française). Une gamme de produits adaptés : 5310 / N81…(son HQ, carte mémoire, casque BT stéréo, ergonomie d’usage, de synchronisation avec PC et d’accès au Music Store à partir du mobile…

Page 45: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXE 2 : LES OFFRES CONCURRENTES SUR LE MARCHÉ DES SERVICES INTERNET MOBILES

Vodafone Live ! Orange Bouygues SFR Nokia Yahoo! Go Google MSNCommunication (E-mail, chat)Information (sport, horoscope, météo, bourse, actualités,..)JeuxPhotosMusiqueVidéo TV mobileLocalisation géographiqueCommerce mobile

Services d'utilité publiquePersonnalisationMoteur de recherche

Stratégie PartenariatPartenariat +Acquisition Partenariat Partenariat Acquisition Partenariat Acquisition

Croissance interne

Sources : Site Internet de Vodafone Live !, Orange, Bouygues Télécom , SFR, Nokia, Yahoo !Go, Google, MSN. « Les acteurs historiques du Web traditionnel débarquent sur le mobile », Le Journal du Net,Emilie Leveque, 23/01/08

Page 46: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXE 3 : RESULTATS FINANCIERS 2007

Page 47: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXE 3 (SUITE)

Page 48: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXE 4 : EVOLUTION DU COURS DE NAVTEQ

Evolution du cours de Navteq depuis 2005 :

Page 49: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXE 5 : ENQUETE DE LA COMMISSION EUROPEENNE

IP/08/478

Bruxelles, le 28 mars 2008

Concentrations: la Commission ouvre une enquête approfondie sur le projet d'acquisition de Navteq par Nokia

La Commission européenne a ouvert une enquête approfondie, en vertu du règlement CE sur les concentrations, sur le projet d'acquisition de Navteq, société américaine, par la société finlandaise Nokia. Cette dernière fabrique des combinés téléphoniques mobiles, tandis que Navteq est l'un des deux producteurs de cartes routières numériques, élément essentiel des services de navigation pouvant être distribués par combiné mobile. L'enquête de marché initiale réalisée par la Commission fait craindre que le projet de concentration ne pose de graves problèmes de concurrence verticale. La décision d'ouvrir une enquête approfondie ne préjuge pas l'issue finale de l'enquête. La Commission a jusqu'au 18 août 2008 pour décider si le projet d'opération entraverait significativement une concurrence effective dans l'Espace économique européen (EEE) ou une partie substantielle de celui-ci.

Nokia fournit des services de navigation et fabrique des combinés téléphoniques mobiles, secteur dans lequel elle occupe la première place sur le marché mondial. La société américaine Navteq est l'un des deux seuls producteurs de cartes routières numériques offrant une couverture complète de l'Europe et de l'Amérique du nord (l'autre étant la société néerlandaise Tele Atlas).

A l'issue d'un examen préliminaire, la Commission craint que le rachat de Navteq par Nokia ne pose de graves problèmes de compatibilité avec le marché commun : eu égard au duopole existant sur le marché des cartes routières numériques et à la forte position détenue par Nokia sur le marché des combinés mobiles, cette opération pourrait en effet restreindre sensiblement la concurrence dans l'EEE. L'enquête approfondie de la Commission visera notamment à déterminer si l'opération entraînerait une hausse des coûts des cartes routières numériques pour les autres sociétés qui fournissent des services de navigation sur combiné mobile ou limiterait leur accès à ces cartes, portant ainsi préjudice aux consommateurs. L'opération en cause pose des problèmes analogues à ceux qu'avait entraînés une autre concentration verticale, le projet d'acquisition de Tele Atlas par TomTom, société néerlandaise qui produit des appareils de navigation mobiles et commercialise des logiciels de navigation pour téléphones mobiles. Ce projet est actuellement examiné par la Commission (voir IP/07/1800).

On trouvera de plus amples renseignements sur cette affaire sur le site suivant:

http://ec.europa.eu/comm/competition/mergers/cases/index/m98.html#m_4942

Page 50: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXE 6 : IMPLANTATION DE VODAFONE DANS LE MONDE

Présence de Vodafone en Europe (Source : Wikipedia) :

Présence de Vodafone en Asie-Pacifique :

Présence de Vodafone en Amérique :

Minority-ownedUSA

No Ownership

Anguilla Antigua & Barbuda Argentina Aruba

Barbados Bermuda Bonaire BrazilCayman Islands Chile Colombia Curaçao

Dominica Ecuador El Salvador French West Indies

Grenada Guatemala Guyana HaitiHonduras Jamaica Mexico Nicaragua

Paraguay Peru St Kitts & Nevis St Lucia

St Vincent & the Grenadines

Trinidad and Tobago Turk & Caicos Uruguay

ANNEXE 7 : BOUYGUES TELECOM, EXTRAIT D’ENTRETIEN

Majority-ownedAlbania

Czech RepublicGermanyGreece

HungaryIrelandItalyMalta

NetherlandsNorthern Cyprus

PortugalRomania

SpainTurkey

UK

Minority-ownedFrancePoland

No OwnershipAustria BelgiumBulgaria CroatiaCyprus DenmarkEstonia Finland

Guernsey IcelandJersey Latvia

Lithuania LuxembourgNorway SerbiaSlovenia Sweden

Switzerland

Majority-ownedAustralia

IndiaNew Zealand

Minority-ownedChinaFiji

India

No OwnershipAfghanistan Hong KongIndonesia JapanMalaysia SamoaSingapore Sri Lanka

Page 51: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

Entretien mené avec le service marketing de Bouygues Télécom :

« Le plus important semble de posséder des contenus. C’est l’objet d’acquisitions comme Navteq, Gate5, Loudeye, Twango. A long terme, ce n’est pas ce qui va permettre à Nokia de se différencier de ses concurrents ?

Tous les constructeurs ont fait le même raisonnement : la première étape pour exister sur les services Internet, c’est de s’acoquiner avec les grandes marques Internet. Ils ont tous adopté une stratégie de signature effrénée. Une fois dépassé ça, il s’agit pour les constructeurs de se créer une identité, dans l’objectif de se développer des revenus. L’économie des contenus à ce d’agréable que les revenus dégagés sont complètement déconnecté de la valeur réelle du service. Une fois le portefeuille de marque étoffé dans les contenus, il faut prendre le pied dans les contenus pour s’assurer des revenus. Le cas échéant, la part la plus belle reviendra toujours à la marque qui possède le contenu. Nokia est dans cette logique là. Il se créé un avantage concurrentiel puisqu’ en rachetant un éditeur très pertinent comme Navteq, il assèche tous ses concurrents. Il s’assure en même temps des revenus.

Dans les négociations avec les opérateurs pour installer le portail OVI dans le menu, comment qualifiez vous la force de négociation des opérateurs ?

Le constructeur est dans une position incontournable dans la détermination de l’offre de services.[…] Ils sont les seuls à pouvoir agir industriellement au moment de la définition du mobile.

Ok, donc je relativise le pouvoir de négociation d’un opérateur comme Bouygues Télécom.

Oui. Exemple : Nokia a 30% de part de marché en France. Si Bouygues Télécom n’ a pas la même vision que Nokia dans les services, il ne peut pourtant pas arriver à un désaccord frontal et s’en passer.

L’accord signé entre Orange et Nokia : alliance pour distribuer les services Nokia sous signature d’orange, qu’en pensez-vous ?

Ce n’est pas encore claire. C’est beaucoup plus partagé, plus complexe que ce qui apparaît dans la presse. Les opérateurs et les constructeurs ont une offre concurrente là-dessus. Deal possible : visibilité partagée : icône Nokia + icône OrangeL’opérateur est mieux placé que le constructeur pour le billing.Le constructeur peut offrir un billing de CB en ligne. Pas pratique.L’opérateur paie pour ses mobiles : demande par conséquent une place privilégiée pour son portail.Pour un mobile de 250€ HT, l’opérateur va mettre 100-110€ derrière. Avec quels mots décrivez-vous l’intensité des relations entre opérateurs et constructeur ?

La tribune/ analystes : Prise de position sur un marché très prometteur. On peut parler de « Champ de bataille ». Nokia a besoin des opérateurs pour distribuer ses services. Dans le même temps, les opérateurs ont besoin de la marque Nokia pour aller chercher des clients. Les asiatiques, dont NTT DoCoMo ont une vision plus intelligente : avant de se battre pour un marché ils le créent. Aujourd’hui les opérateurs/constructeurs se battent pour un marché qui n’existe pas encore. Il est possible que l’on arrive à un résultat qui ne convienne pas du tout au client. Ex du WAP 1.0.

Internet mobile, aujourd’hui , ce n’est rien du toutDes mobiles qui fonctionnent en UMTS sont anecdotiques : quelques % des clients. […] »

Page 52: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXE 8 : NOKIA, EXTRAIT D’ENTRETIEN

Entretien mené avec Xavier des Horts, Directeur Commercial de Nokia :

« Au sein de la direction, quelle est la personne qui a impulsé le tournant vers les services ? Personne. Nokia est très collégial. Le board est très collégial. Ce qui peut pêcher un peu dans les relations presse, c’est qu’il n’y a pas chez Nokia des leaders charismatiques à la Steeve Jobs.

N-Gage, N-Music, Nokia Maps : Quel est le service qui peut éventuellement rapporter le plus de recettes ?On ne m’a pas communiqué là-dessus.

Vous avez l’air d’être confiant dans le pouvoir de négociation de Nokia ?Oui, je le suis. Petite anecdote : une semaine après le lancement d’OVI, Orange avait déclaré ne pas vouloir en entendre parler. Ils sont finalement rentré dans le rang il y a quelques jours, et vont continuer à vendre du Nokia avec des services Nokia à l’intérieur.

Sous signature Orange quand même.Ne lisez pas la tribune, c’est un très mauvais journal. Le music store de Nokia sera là, il ne sera pas caché.

Je n’y crois pas à cette vision du gagnant-gagnant. Les opérateurs veulent faire du service, les constructeurs veulent faire du service. Il n’y a pas de la place pour tout le monde. Sur le N95 8G SFR, il y a 3 systèmes de navigation différents : Google Maps, Nokia Maps, SFR navigation. Le client final a le choix. Les trois sont présents sur l’intégration native. C’est comme sur Internet, vous avez le choix de mettre vos photos sur Youtube, Flickr, .. C’est l’esprit d’ouverture de Nokia. […]

Dans la convergence Internet mobile, vos deux grands concurrents sont Google, Microsoft.Microsoft a développé son OS, qui s’appelle Windows Mobile, qui a un peu de mal à percer sur le marché. Nous ne l‘utilisons pas. Sony Ericsson vient d’annoncer qu’ils allaient l’utiliser pour certains de leurs mobiles. Nous avons notre propre système qui s’appelle Symbian, qui a 60% de parts de marché. Qui fonctionne très bien, et que nous avons réussi à licencier à d’autre constructeurs. On a des milliers de développeurs qui développent des applications pour ce modèle. […]

Très bien, qu’en est-il de Google ?Le palm est en train de disparaître du marché. Google a fait un effet d’annonce avec son Androïd. Ils en ont montré un ou deux vague maquette au mobile world congres. Nous travaillons très bien avec eux. On a annoncé cette semaine que notre solution de search, à la fois dans le mobile et dans Internet allait être amélioré en rajoutant le … search de Google. Là aussi, c’est un bon partenaire, et on est ouvert. Pourquoi Nokia va aller réinventer du search alors que Google le fait très bien ? […]

Dans les accès Internet tout bouge très vite, la visibilité est très courte. Quelle est votre vision de Nokia d’ici deux trois ans ? La vision du groupe, c’est de devenir un acteur majeur dans le monde de la musique. Peut être pas autant qu’un I-tunes, mais on peut gagner notre pari, du fait de notre marque, et du fait de nos 300 millions de notre terminaux compatibles. On peut se permettre des solutions innovantes comme « Comes with music ». Dans les jeux on y croit aussi très fort. Ca va prendre 1 an, 2 ans, mais on va vraiment arriver à faire quelque chose avec ses services. On a aussi d’autres projets, comme la vidéo. Nokia est une entreprise qui se réinvente. »

Page 53: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXE 9 : ARCEP, EXTRAIT D’ENTRETIEN

Entretien mené avec Fabien Fontaine, Adjoint unité « Marchés Mobiles » de l’ARCEP :

« Comment évaluez-vous la force de frappe des opérateurs sur le marché européen, plus particulièrement sur le RU, la France, l’Espagne, l’Allemagne ? Il faut voir les enjeux sous-jacents. Pour les opérateurs, les revenus issus de services traditionnels sont en train de s’éroder (illimité en téléphonie fixe, également en téléphonie fixe). A eux de contrer cet effritement du prix. Enjeux : créer une chaîne de valeur des services en mobilité. C’est un gâteau qui aiguise les appétits. Nokia estime qu’il est également légitime à bénéficier de ces activités. Nokia est complètement hors jeux : c’est l’opérateur qui se greffe sur son terminal en programmant les terminaux à sa guise. C’est très difficile d’évaluer les rapports de force entre l’équipementier et les opérateurs de téléphonie. Certes Nokia est le 1er en part de marché en téléphonie mobile, mais il y a quand mm une très forte contestation de cette position par les chinois et les coréens, qui ont une capacité à faire beaucoup de volume dans les années qui viennent. La position actuelle n’est pas verrouillée et incontestable. Le seul schéma dans lequel l’équipementier est incontestable c’est dans un cas comme l’iPhone : l’équipementier est incontournable, au vu de l’intérêt qu’il exerce sur le public.. […]

Vous parlez des opérateurs comme un tout. Pensez-vous que des petits opérateurs comme Bouygues Télécom pourrait être intéressé par OVI ? Bouygues a son propre portail i-mode. Tout dépend du montant que Nokia est prêt à mettre sur la table pour avoir accès au client de Bouygues. Ca ne vas pas de soi du tout : une confusion qui eut naître dans l’esprit du client. : les opérateurs maîtrisent l’accès au client final.

M. Boerries, le Vice Président de la division mobile de Yahoo!, affirme qu’avec les accords signés avec les opérateurs, Yahoo! a 600 millions d’utilisateurs potentiels aujourd’hui. Comment évaluez-vous la force de frappe de Yahoo!, ainsi que celle des deux autres marques Internet Microsoft et Google ?J’aurai tendance à dire que ces acteurs sont tous dans le mm bateau. Ce sont les opérateurs qui mènent la danse : sur mes réseaux, je veux uniquement mon portail propriétaire. Le seul moyen de les contourner serait qu’un éditeur de service (Google, Yahoo) puisse accéder directement au client final avec son propre accès réseau. C’est ce que Google essaie de faire avec le Google phone : il contourne le droit de regard des opérateurs sur ces services en proposant un terminal qui fonctionne sur Wifi.

Dans quelle mesure la possession des contenus fait la différence? Oui, pourquoi pas, mais la question est : est-ce que c’est son cœur de métier ?

La Commission européenne rendra d’ailleurs une décision demain de repousser ou non le rachat de Navteq par Nokia. La commission européenne peut-elle aller jusqu’à un refus pur et simple de valider cette acquisition ?Elle peut interdire une opération de concentration pour 2 raisons :

- créer ou renforce une position dominante sur un marché donné (marché des cartes ? de la téléphonie mobile ? )

- conduit à la suppression d’un acteur indépendant par un concurrent. Ici ce n’est pas le cas parce que Navteq n’était pas concurrent de Nokia.

Deux acquisitions sont en cour d’examen : Navteq par Nokia et Tele Atlas par TomTom. Il s’agit d’une bonne concentration du marché, puisque Tele Atlas était concurrent de TomTom. Quand un petit concurrent est agressif sur un marché, les autres vont avoir envie de le racheter, pour faire disparaître cette source de concurrence. La commission peut bloquer cette opération de concentration sous prétexte qu’elle fait disparaître une bonne source de stimulation du marché. Nokia pourrait en profiter pour limiter l’accès de ses concurrents équipementiers à ses cartes, ou leur fournir à des prix plus élevés. »

Page 54: L’édification de la forteresse numérique de Nokia

ANNEXE 10 : JUPITER RESEARCH, EXTRAIT D’ENTRETIEN

Entretien mené avec Thomas Husson, Analyste chez Jupiter Research :

« Les revenus de Nokia en 2006 s’élèvent à 4,306 milliards d’euros. Navteq a été racheté 5,4 milliards d’euros après absorption de la trésorerie excédentaire de la société américaine. Ces chiffres démontrent la capacité de Nokia à grossir par croissance externe. A votre avis, quel est le prochain achat de Nokia ?

Un des axes de croissance fort de Nokia, c’est l’environnement internet. C’est un axe de développement fort, avec des rachats de petites sociétés (je ne parle pas de Navteq). Ils procèdent par croissance externe dans ce domaine là pour intégrer une culture qu’il n’ont pas, et évoluer dans un « environnement 2.0 » comme ils aiment à se présenter. On peut en effet imaginer qu’il y aura d’autres acquisitions dans ce domaine là, pour racheter des technologies intéressantes, des compétences, des savoir-faire. Après, est-ce qu’ils vont vouloir acheter de l’audience, et prendre des prises de participation sur des réseaux social, comme sur Facebook ?

Il y a eu des rumeurs de rachat de maisons de disques, comme EMI par China mobile. Ces rumeurs m’ont beaucoup surprises, que pensez-vous du rachat d’une maison de disque par Nokia ? Il y a plusieurs opérateurs (coréens/japonais) qui ont pris des participations dans des maisons de disques/ médias. […]L’intérêt des studios/maisons de disques, c’est d’être distribués et d’avoir une audience la plus grosse possible. Du point de vue du consommateur, l’intérêt est d’avoir accès à un artiste. Qu’il soit Sony, BMG, Universal, ça ne l’intéresse pas. De ce point de vue là ça serait un peu restrictif. Nokia est plutôt dans l’optique de signer des partenariats avec l’ensemble des labels que de prendre une participation capitalistique dans un secteur qui est en crise.

Ca pourrait être plus pertinent pour eux de prendre une participation dans une société qui propose des services de communauté, de jeux, ou de carte ? C’est également en rapport avec leur stratégie Internet, qu’ils sont en train de développer et de mettre en place, et qui va prendre un certain temps avant que toutes les briques soient bien coordonnées. Après, il peut y avoir un rachat stratégique d’ampleur, avec un investissement significatif, comme Navteq, ou racheter des sociétés plus petites et plus spécialisées, qui possèdent une certaine technologie. Ca se passe tous les jours avec des marques comme Yahoo !, ou Samsung,. A l’échelle de Nokia cette acquisition n’est pas forcement significative.

Yahoo, Google et MSN ont également procédé à quelques rachats de sociétés. Nokia a-t-il un certain avantage par rapport à ces entreprises là ? J’ai l’impression que Google possède le contenu relatif aux services qu’il propose, ce qui n’est pas le cas de Yahoo ! par exemple ? C’est un moment un peu charnière puisque les frontières sont un floues le long de la chaîne de valeur, avec des logiques à la fois de concurrence et de partenariats, défensives et agressives. […]Yahoo est plus dans une logiques partenariale, et s’est toujours présenté contre la logique de devenir opérateur, ou MVNO. Ils sont dans une logique d’audience. Comme Google, leurs revenus dépendent de la publicité, donc plus leurs services sont embarqués dans un grand nombre de terminaux, avec une bonne ergonomie et un bon usage, plus c’est dans leur intérêt. […] L’approche de Google est perçue par les différents acteurs comme étant un peu plus frontale et en rachat, un peu plus agressive.

Et Microsoft, vous le placez comment ? Ils sont également dans la logique OS, avec Windows mobile, et sur la partie avec le rachat de Screentonic et aQuantive. Ils ont une logique plus orientée vers le B to B. Yahoo et Google sont plus grand public. Windows, si l’on exclu la partie Live MSN, ils ont une approche B to B, partenariat, royalties, et un positionnement un peu plus en amont dans la chaîne de valeur. […] »