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Université Paris 1 Delphine Master Sciences du Management STEENKISTE Spécialité Logistique LA SUPPLY CHAIN ET L’INTEGRATION DES CONTRAINTES ENVIRONNEMENTALES : UN ENJEU POUR AUJOURD’HUI ? Mémoire de fin d’études Année 2006 - 2007 Maître de mémoire: Madame Fulvia Allievi-Dorosz Présidente de la commission Logistique et Environnement de l’ASLOG Consultante Système d’Information et Supply Chain, ALMASYS CONSEIL

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Université Paris 1 Delphine

Master Sciences du Management STEENKISTE Spécialité Logistique

LA SUPPLY CHAIN ET L’INTEGRATION

DES CONTRAINTES ENVIRONNEMENTALES :

UN ENJEU POUR AUJOURD’HUI ?

Mémoire de fin d’études

Année 2006 - 2007

Maître de mémoire: Madame Fulvia Allievi-Dorosz

Présidente de la commission Logistique et Environnement de l’ASLOG Consultante Système d’Information et Supply Chain, ALMASYS CONSEIL

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

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SOMMAIRE

REMERCIEMENTS................................................................................................................... 3

INTRODUCTION....................................................................................................................... 4

1. LA CAUSE ENVIRONNEMENTALE ET LES CONTRAINTES INDUITES .................... 7 1.1. Une prise de conscience internationale progressive ............................................................. 7

1.1.1. Historique............................................................................................................................. 7 1.1.2. L’environnement, un enjeu partagé.................................................................................... 14

1.2. Un nouveau contexte réglementé ......................................................................................... 21 1.2.1. Au niveau international ...................................................................................................... 21 1.2.2. Au niveau national ............................................................................................................. 23

1.3. Une pression croissante ........................................................................................................ 26 1.3.1. Des partenaires ................................................................................................................... 26 1.3.2. Des exigences clients ......................................................................................................... 28

2. LA SUPPLY CHAIN ET L’INTÉGRATION DE L’ENVIRONNEMENT.......................... 30 2.1. La Supply Chain ................................................................................................................... 30

2.1.1. Rôle de la supply chain ...................................................................................................... 30 2.1.2. Intégrer les contraintes environnementales ........................................................................ 31

2.2. Enjeu pour les métiers traditionnels ................................................................................... 32 2.2.1. Emballage........................................................................................................................... 33 2.2.2. Transport ............................................................................................................................ 37 2.2.3. Entrepôts et plateformes..................................................................................................... 44

2.3. Enjeu pour l’approche globale............................................................................................. 47 2.3.1. Ecoconception .................................................................................................................... 47 2.3.2. Logistique inversée ............................................................................................................ 51

3. LA SUPPLY CHAIN ET L’ENVIRONNEMENT, LEVIERS DE PROGRES.................. 54 3.1. Prise en compte des contraintes environnementales par les fonctions transverses ......... 54

3.1.1. Les achats ........................................................................................................................... 54 3.1.2. Le marketing ...................................................................................................................... 60 3.1.3. La communication.............................................................................................................. 65

3.2. Un nouvel atout pour l’entreprise ....................................................................................... 72 3.2.1. L’environnement, une composante de la création de la valeur .......................................... 72 3.2.2. Mesure de la performance globale ..................................................................................... 74

3.3. La supply chain au service de l’entreprise citoyenne responsable.................................... 78 3.3.1. Accroissement de l’attractivité de l’entreprise ................................................................... 78 3.3.2. L’intégration des contraintes environnementales, un accélérateur de différenciation........ 80

CONCLUSION ........................................................................................................................ 83

BIBLIOGRAPHIE.................................................................................................................... 86

LEXIQUE................................................................................................................................. 90

ANNEXES............................................................................................................................... 92

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3

REMERCIEMENTS

Tout d’abord, je tiens à remercier madame Fulvia Allievi-Dorosz dont

l’implication et les conseils m’ont été très utiles dans la rédaction de ce mémoire. En

acceptant de partager ses compétences et son savoir-faire lors de nos différents

entretiens, elle m’a permis d’avancer dans ma réflexion.

Je tiens également à remercier monsieur Jean-Marc Lehu, directeur du Master,

ainsi que tous les enseignants et intervenants professionnels pour leurs connaissances

et leurs expériences qu’ils nous ont fait partager.

Enfin, je tiens à remercier toutes les personnes rencontrées lors des visites de

sites logistiques et dont les témoignages sur leurs métiers et leurs activités ont été très

enrichissants.

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INTRODUCTION

La réduction des ressources naturelles, l’augmentation des risques économiques et

industriels accélèrent la prise de conscience et l’activisme des citoyens, et par

conséquent des consommateurs et des actionnaires.

Par ailleurs, le développement de la mondialisation avec l’accroissement des

mouvements de biens, de services, de main d’œuvre, d’idées, de technologie et de

capital à l’échelle internationale a changé la donne pour les entreprises qui ont la

possibilité de se développer à moindre coût en délocalisant une partie de leurs

activités dans les pays dont la main d’œuvre est très bon marché et sans protection

sociale. De plus, certaines multinationales ne font pas de transferts de savoir mais

rapatrient les bénéfices.

Ces attitudes ont été régulièrement dénoncées par des groupements comme les

ONG afin de faire réagir les populations, et ternir l’image de marque des entreprises

ayant de telles pratiques. A l’origine, contre-pouvoirs des multinationales, les ONG

recouraient de manière générale à deux types de communication : les campagnes de

boycott ou dénonciation d’entreprises spécifiques, et la création de labels permettant

aux consommateurs d’identifier les produits manufacturés dans de bonnes conditions.

Parallèlement, l’accès à l’information et l’amplification de l’offre1 ont permis au

public d’adopter une posture critique par rapport à sa propre consommation. D’autres

facteurs complémentaires sont venus s’ajouter, telle la surexposition médiatique,

l’exploitation humaine pour baisser les prix de production, et la sensibilité exacerbée

du public aux risques alimentaires et écologiques2.

L’engagement par la consommation a réellement commencé dans les années

soixante à travers le consumérisme américain. Mais les consommateurs occidentaux

ont été peu réceptifs à ces actions de masse, lobbying et procès. La prise de

conscience collective a réellement vu le jour dans les années 1980, marquées par des

scandales financiers et écologiques faisant réaliser au public que les maux annoncés

1 Kevin Lane Keller, Strategic Brand Management : building, measuring and managing brand equity, Prentice Hall, 1997 2 Naomi Klein, No Logo, Arles, Actes Sud, 2000

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par le Club de Rome dès 1972, via le rapport Meadows3, pouvaient l’affecter à titre

individuel et que l’abondance de biens pouvait se révéler menacée à terme. Ce rapport

a mis en évidence que la croissance de la population et des niveaux de vie buterait à

terme sur la rareté des ressources naturelles que sont l’énergie, l’eau, les sols, et qu’il

devenait urgent de prendre en compte la préservation de l’environnement dans le

développement.

C’est dans un tel contexte que l’idée de consommation citoyenne a pris forme : le

consommateur citoyen cherche désormais à donner un sens à ses achats, de façon à

contrebalancer l’hédonisme irresponsable érigé par les marques. Il attend désormais

des garanties allant au-delà de la simple qualité du produit4. En prenant conscience

de l’influence de son comportement sur la politique de l’entreprise en matière

environnementale, son engagement peut se traduire par le boycott, l’attrait pour les

labels et la préférence pour des entreprises socialement et écologiquement

impliquées.

Tous ces facteurs conjugués ont fait réagir les entreprises qui ont dû intégrer dans

leur stratégie la volonté des citoyens de les voir se transformer d’agent économique

générateur de richesse en acteur social engagé. Cette alerte éthique a eu pour effet de

mobiliser également les investisseurs et les financiers.

Agir en entreprise citoyenne sous-tend que l’action n’est plus exclusivement au

service d’intérêts privés, mais qu’elle peut également être efficace au service du bien

commun, de l’intérêt collectif, donnant de nouvelles perspectives à un grand nombre

d’activités: la formation, le mécénat, la certification, la qualité, etc. 5.

Mais, si « les entreprises se convertissent à l’écologie 6 », elles « ne sont pas

soudainement devenues fans de l’environnement. En revanche, elles voient plusieurs

avantages à se comporter en meilleures citoyennes du monde. D’abord, elles se

réconcilient avec l’opinion publique – qui les montre du doigt – en mettant en place

des programmes visant à protéger l’environnement. Et ensuite, elles peuvent espérer

3 Titre français « halte à la croissance » : c’est la première étude importante qui souligne les dangers écologiques de la croissance économique et démographique que connaît alors le monde. 4 Cécile d’Elloy, Communication éthique, éthique de la communication, rapport de mission, Sciences Com’ 5 E. Laville, L’Entreprise Verte, Ed. Village Mondial, 2006 6 La Tribune, les dossiers International, Les entreprises se convertissent à l’écologie, 13 novembre 2006

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améliorer leur bilan ». Le projet d’entreprise va donc devoir allier performance et

déontologie, développement et contraintes environnementales, solidarité et

responsabilité.

Satisfaire les demandes et les besoins du client, répondre à ses attentes est une

préoccupation quotidienne, et si les entreprises ont eu longtemps une stratégie

orientée marketing, depuis plusieurs années elles mettent en place des projets

d’organisation de leur chaîne logistique globale ou supply chain. En effet, la

satisfaction des exigences client est devenu un objectif majeur car l’avantage

concurrentiel va vers les plus réactifs.

Face à ce défi, l’entreprise va devoir mettre en synergie toutes les parties

prenantes. Cela passera notamment par la prise en compte des risques industriels, de

la pollution, et de la gestion des déchets dans la gestion quotidienne de

l’approvisionnement, de la transformation et de la distribution. La supply chain est un

acteur essentiel et incontournable. Sa connaissance métier, sa relation avec le client

final, sa capacité à gérer tous les flux de l’entreprise sont autant d’atouts.

Aussi, cette adaptation, devenue nécessité, est-elle un tremplin pour l’entreprise ?

Autrement dit, dans ce contexte à la fois nouveau et changeant, l’intégration par la

supply chain des contraintes environnementales et réglementaires inhérentes est-elle

un enjeu pour aujourd’hui ?

Pour ce faire, nous étudierons dans une première partie le contexte actuel dans

lequel se trouvent aujourd’hui les entreprises, à savoir comment l’intégration de

l’environnement dans la politique de l’entreprise induit des obligations. Puis dans une

deuxième partie nous examinerons les premières réponses apportées par la supply

chain tant dans ses métiers traditionnels que dans l’approche globale. Enfin, nous

analyserons dans la dernière partie comment, en souhaitant devenir citoyennes et

responsables, les entreprises évoluent en utilisant la supply chain et l’environnement

comme leviers de progrès afin d’allier contraintes et synergie, transformant ainsi une

obligation en atout concurrentiel et donc en facteur de différentiation.

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1. LA CAUSE ENVIRONNEMENTALE ET LES CONTRAINTES INDUITES

1.1. Une prise de conscience internationale progressive

1.1.1. Historique

Depuis des décennies, l’Homme met à mal son environnement par son

développement économique. Jusqu’à récemment, les changements climatiques se sont

produits naturellement, sur des siècles ou des millénaires, à cause de la dérive des

continents, de divers cycles astronomiques, des variations de l’énergie solaire et de

l’activité volcanique.

Ce n’est que vers la moitié du 20ème siècle qu’il a constaté que ses activités

modifient la composition atmosphérique provoquant de ce fait un changement

climatique global, que la pollution atmosphérique a un impact sur sa santé et que les

ressources naturelles sont limitées et leurs destructions irréversibles, (Cf. Annexe 1).

De plus, les conséquences climatiques ne sont localisées ni dans l’espace ni dans le

temps, mais dans le monde entier.

L’Homme a donc pris conscience qu’il devait protéger l’environnement, milieu

dans lequel un organisme fonctionne, incluant l’air, l’eau, la terre, les ressources

naturelles, la flore, la faune, les êtres humains et leurs inter-relations (définition -

norme ISO 14001) car c’est la première fois qu’une telle nuisance possède ce

caractère universel.

A. Ressources naturelles et activités économiques

Afin de mieux saisir l’urgence de la situation, voici quelques chiffres clés de

février 2007, disponibles sur les sites internet des institutions internationales :

• Population mondiale : elle est estimée à 6 milliards aujourd’hui, et environ 10

milliards en 2050. Or, « 10 milliards d’êtres humains ne pourront pas vivre sur la

terre avec le même mode de vie que celui des quelques 750 millions d’habitants

actuels des pays industrialisés, faute d’eau, d’énergie, d’espaces en quantité et qualité

suffisantes ».7

7 Schéma national du développement durable

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• Ressources naturelles :

80% de la consommation de ressources naturelles est effectuée par

20% de la population mondiale8.

Entre 1990 et 2000, la surface des forêts a diminué de 94 millions

d’hectares, soit 1,7 fois la superficie de la France9.

• Réserves mondiales d’eau douce :

Si en 1950, ces ressources atteignaient 17 000 m3 par an et par

personne, elles s’élèveraient à 4 800 m3 par an et par personne en

2025. Par ailleurs, si aujourd’hui 1,5 milliards d’humains n’ont

pas accès à l’eau potable, ils seront 5 milliards en 202510.

70% de l’eau douce est consommée dans le monde par

l’agriculture, contre 20% par l’industrie et 10% pour l’usage

domestique11.

• Réserves énergétiques :

39 ans pour le pétrole12.

61 ans pour le gaz naturel13.

204 ans pour le charbon14.

55 ans pour l’uranium15.

• Santé :

En Somalie, la ration calorique s’élève à 1 550 par jour et par

personne, contre 3 600 dans les pays développés. En outre, 830

millions de personnes disposent d’une ration quotidienne

inférieure à 2 400 calories par jour16.

8 CNUCED 9 IFEN 10 PNUE 11 OCDE 12 Observatoire de l’énergie 13 Ibid 14 Ibid 15 Commission des Communautés européennes 16 FAO

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L’espérance de vie, en 2002, pour une personne en bonne santé à la

naissance est de 78 ans au Japon, alors qu’elle est de 43 ans en

Ouganda et 39 ans au Botswana17.

• Pollutions18 :

Des millions de tonnes de déchets toxiques sont produits par jour.

Chaque français produit plus d’un kilo de déchets ménagers par

jour.

L’Union européenne, le Japon et les Etats-Unis sont responsables

de plus de 40% des émissions de gaz carbonique.

Les Etats-Unis rejettent dans l’atmosphère 22,5% des émissions

totales de dioxyde de carbone.

• Commerce :

90% du commerce mondial des céréales est partagé par quatre

firmes multinationalistes19.

Les pays les plus riches représentent 20% de la population

mondiale et consomment 66% de l’énergie commerciale20.

Sur 100 euros générés par le commerce mondial, seuls trois

bénéficient aux pays en développement21.

Ainsi, si les réserves naturelles s’épuisent aussi vite, c’est aussi selon Ignacy

SACHS que « le problème, c’est la myopie du monde riche. Songez que de 1890 à

1990, la population mondiale a été multipliée par 4, la richesse par 14 et la

production industrielle par 40 »22.

En 1987, la Commission mondiale sur l’environnement et le développement, dans

le rapport Brundtland23, n’hésitait pas à parler de crise expliquée par le fait que « la

planète vit actuellement une période de croissance spectaculaire et de profonds

17 OMS – Organisation Mondiale de la Santé 18 PNUD 19 OCDE 20 OXFAM 21 ibid 22 Libération du 26 août 2002 23 Rapport publié en 1987 par la Commission mondiale sur l’environnement et le développement de l’ONU, présidée par Mme Gro Harlem Brundtland. Il définit la politique nécessaire pour parvenir à un développement durable

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changements. Notre monde de cinq milliards d’habitants doit faire place, dans un

cadre limité, à un autre monde humain. La population pourrait se stabiliser entre 8 et

14 milliards d’habitants au siècle prochain, selon les projections de l’ONU. Plus de

90% de cet accroissement se fera dans les pays les plus pauvres, dont 90% dans des

villes déjà pleines à craquer ».

Le rapport Brundtland précisait également que l’activité économique pourrait être

multipliée par 5 ou 10 d’ici 50 ans sachant que depuis un siècle la production

industrielle a été multipliée par 50 : les quatre cinquièmes de cette progression sont

intervenus après 1950. « Ces chiffres reflètent et annoncent des répercussions

importantes sur la biosphère à mesure que nous investirons dans les logements, les

transports, les exploitations agricoles, les entreprises. Une bonne part de cette

croissance économique arrache des matières premières aux forêts, aux sols, aux mers

et aux voies navigables ».

Par ailleurs, les nouvelles technologies sont un des principaux ressorts de la

croissance économique. Si celles-ci peuvent permettre de freiner l’exploitation de

ressources rares qui progresse actuellement de façon vertigineuse, elles comportent

néanmoins de graves risques dont l’apparition de nouvelles formes de pollution et

l’introduction de nouveaux types de vie susceptibles de modifier notre évolution.

« En attendant, les industries qui puisent le plus dans nos ressources naturelles et,

partant, les plus polluantes, sont celles qui progressent le plus dans les pays en

développement, là précisément où la croissance est une nécessité urgente et où les

moyens de limiter les effets nuisibles de la croissance sont les plus faibles ».

Aussi, en raison de ces changements – tous liés – l’économie mondiale et

l’écologie mondiale sont désormais profondément imbriquées. C’est ainsi que depuis

plusieurs années, un ensemble d’acteurs politiques, scientifiques, associatifs ont

décidé d’agir pour préserver l’environnement.

B. Prise de conscience internationale

Depuis 35 ans, différents sommets internationaux sur l’environnement ont été

organisés et des rapports publiés, provoquant des avancées considérables lors de

chacune de ces étapes, notamment le concept de développement durable.

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• 1972 – Stockholm : Première Conférence des Nations Unies sur

l’environnement au cours de laquelle il est reconnu que la protection de

l’environnement et la gestion efficace des ressources naturelles sont des questions

majeures qui affectent le bien être des populations et le développement économique

dans le monde entier.

• 1987 – Rapport Brundtland - Notre avenir à tous - élaboré par la Commission

mondiale sur l’environnement et le développement qui lance la notion de

développement durable.

• 1988 – L’Assemblée Générale des Nations Unies reconnaît l’évolution du

climat comme une préoccupation de l’humanité. Parallèlement, le Groupe d’Experts

Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC) est créé.

• 1989 – La Haye : Appel lancé par la France, les Pays-Bas et la Suède : « Les

conditions mêmes de la vie sur notre planète sont aujourd’hui menacées par les

atteintes graves dont l’atmosphère est l’objet ».

• 1992 – Sommet de la Terre, Rio de Janeiro : c’est le premier sommet organisé

sur l’environnement et le développement au cours duquel les plus grands défis à

relever comprenaient les finances, les taux de consommation et la croissance de la

population. Les nations développées ont exigé un environnement durable tandis que

les pays en voie de développement expliquaient qu’ils devaient pouvoir rattraper

socialement et économiquement le monde développé. Ce sommet s’est conclu par

l’adoption de différents textes ainsi que des conventions thématiques : la convention

de Rio énonçant des principes généraux : pollueur payeur, prévention, précaution,

etc., l’agenda 21 des propositions pour le 21ème siècle, la convention sur les

changements climatiques, la convention sur la diversité biologique. Le concept de

développement durable était réaffirmé.

• 1997 – Sommet de Kyoto : le protocole de Kyoto qui en est issu fixe des

objectifs de limitation et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, et un

moyen : les permis d’émission. Il est actuellement ratifié par 156 pays à l’exception

notable des états unis et de l’Australie.

• 2002 – Sommet de la Terre, Johannesburg : Ce sommet aussi appelé sommet

mondial sur le développement durable a permis de faire le bilan du sommet de Rio,

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de réitérer les engagements politiques des états et de renforcer le partenariat entre le

Nord et le Sud. Les thèmes prioritaires étaient l’eau, l’énergie, la productivité

agricole, la biodiversité et la santé.

• 2005 – Sommet du G8, Gleneagles : Tony Blair veut ramener les Etats-Unis

dans la lutte contre le changement climatique.

• 2006 – Rapport Stern : le réchauffement climatique pourrait coûter à

l’économie mondiale jusqu’à 7 500 milliards de dollars si les gouvernements ne

prennent pas des mesure radicales au cours des dix prochaines années. Le nombre de

réfugiés, victimes de la sécheresse ou d’inondations pourrait s’élever à 200 millions

de personnes.

• 2007 – 4ème rapport du GIEC, conférence internationale de Paris pour une

gouvernance écologique mondiale « Citoyens de la terre » dont l’ambition est de

mettre en place une action mondiale cohérente de la gestion de l'environnement.

C. Emergence du concept de développement durable

Le développement durable ou sustainable development en anglais, concept récent

évoqué pour la première fois en 1987 par Mme Gro Harlem Brundtland à New York

est défini comme étant « un mode de développement qui permet la satisfaction des

besoins actuels sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire les

leurs ».24

Pour les entreprises, le développement durable est une incitation, voire une

obligation sur certains aspects, qui consiste à intégrer à toutes les décisions

(stratégiques ou opérationnelles) des préoccupations liées au respect de

l’environnement et au respect d’obligations sociales et sociétales. Le développement

durable repose sur trois piliers :

24 Déjà Antoine de Saint-Exupéry avait écrit « Nous n’héritons pas la Terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants »

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13

Source : ministère de l'écologie et du développement durable

Figure 1 : Les trois piliers du développement durable

• Pilier social : La performance sociale et sociétale de l’entreprise concerne le

développement des compétences, la politique de sécurité et de santé au travail,

l’existence d’une mobilité interne et d’un système d’évaluation formelle ainsi que les

modalités du dialogue social.

Elle est axée sur le respect des réglementations locales, l’établissement de

relations loyales avec les fournisseurs, avec des partenariats équilibrés, plus

généralement sur une « éthique de business » incluant le respect de tous les

engagements pris, et enfin sur la participation de l’entreprise à la vie et au

développement local.

• Pilier environnement : La performance environnementale concerne d’une

part le développement de produits écologiques incluant leur traçabilité tout au long du

cycle de vie, d’autre part le respect de l’environnement en ce qui concerne le

fonctionnement des unités industrielles.

• Pilier économie : La performance économique vise d’abord la recherche de

minimisation du coût global d’acquisition pour les clients. Mais il s’agit aussi d’en

satisfaire le plus grand nombre, de garantir la transparence des comptes et des

engagements, et plus largement de favoriser la croissance et le développement de

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l’activité. En d’autres termes, c’est aussi la « création de valeur » mais au profit de

tous.

1.1.2. L’environnement, un enjeu partagé

A. Déclinaison de directives européennes

Les différentes directives européennes sont progressivement transposées au

niveau national. Après les emballages ménagers, les piles et les pneus usagés, c’est au

tour des produits électriques et électroniques hors d’usage de faire l’objet de

récupération obligatoire et de recyclage.

La directive européenne 2002/69/CE du 27 janvier 2003 relative aux Déchets

d’Equipements Electriques et Electroniques (DEEE), entrée en vigueur mi-novembre

2006 impose aux distributeurs et aux fabricants de petit et gros électroménager, de

jouets, d’appareillage domestique, de produits bruns (TV, lecteurs DVD, etc.) et gris

(matériel informatique, etc.) de collecter, traiter et valoriser les DEEE afin d’éviter

que ces matériels particulièrement polluants ne finissent dans la nature.

Les objectifs sont donc de collecter et recycler 4kg de DEEE par an et par

habitant (contre 2kg aujourd’hui), et d’atteindre des taux de valorisation de 80% pour

le gros électroménager, 70% pour le petit électroménager, et 75% pour l’électronique

grand public.

Mais ces producteurs ayant refusé d’assumer la charge financière pour

l’élimination des produits antérieurs au mois d’août 2005, quelques 200 millions par

an au moins jusqu’en 2015 seront à la charge des consommateurs. Elle leur sera

répercutée via l’écoparticipation dont le but est de financer la nouvelle filière de

recyclage de ces déchets, et prélevée sur le prix d’achat des nouveaux appareils dans

les rayons des hypermarchés ou des magasins spécialisés.

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15

Source : Le Parisien, 14 novembre 2006

Figure 2 : La taxe ecoparticipation, et le parcours d’un électroménager en fin de vie

Agriculture biologique, produits issus du commerce équitable, développement

durable... Les français semblent s’intéresser de plus près à tout ce qui a trait à la

protection de l’environnement. Près de deux français sur trois (62 %) estiment que

celui qui peut vraiment agir pour préserver l’environnement, c’est d’abord lui-même,

révèle un sondage réalisé par l’institut LH2 les 27 et 28 octobre 2006 pour 20

Minutes et RMC.

Les actions des citoyens (citées à 62%) sont jugées comme très importantes

comparées aux actions des politiques (citées à 21 %) ou des entreprises (citées à 14

%). Beaucoup d’entre eux estiment donc que trier ses déchets, utiliser les transports

en commun ou chauffer plus modérément son logement n’est pas vain pour l’avenir

de la planète. « Cela montre que les campagnes de sensibilisation que nous menons

depuis deux ans portent leurs fruits », a déclaré la ministre de l’Ecologie, Nelly Olin.

Interrogés également sur des propositions à mettre en œuvre afin de limiter le

réchauffement et ses dangers, les sondés plébiscitent l’idée d’imposer le respect de

normes environnementales avant de délivrer un permis de construire (93 % de oui).

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L’application généralisée du principe pollueur payeur pour les entreprises fait

aussi la quasi-unanimité (91%).

Toutefois, il ne faut pas aller jusqu’à dire que les français ont la fibre écologique

car ils résistent dès lors qu’on menace de toucher à leur quotidien. A peine plus d’un

sondé sur deux (52 %) accepterait de « payer une redevance proportionnelle au poids

des déchets ménagers » et sans surprise, l’attachement à la voiture reste aussi un frein

à l’enthousiasme vert. Les personnes interrogées ne sont que 53 % à se déclarer

favorables à la possibilité de « faire payer plus cher les voitures qui polluent et moins

cher celles qui polluent peu ». « C’est un résultat qui n’est pas si mauvais quand on

connaît la réticence des Français sur ce sujet », estime-t-on dans l’entourage de

Nelly Olin.

Source : Institut LH2

Tableau 1 : Environnement, sondage réalisé les 27 et 28 octobre 2006

Par ailleurs, sur de plus en plus de sites internet – du site institutionnel au site

d’entreprise – des rubriques sont consacrées au thème du développement durable.

Ainsi, sur le site de l’ADEME (l’Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de

l’Energie), lien Espace Particuliers, le particulier en question peut Jouer, Comprendre,

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

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Agir, ou encore être renseigné quant aux Campagnes de Communication, Info

énergie, et Crédit d’impôts. Dans la sous rubrique Agir, des conseils sont donnés afin

d’aménager un cadre de vie agréable et respectueux de l’environnement comme par

exemple se chauffer sans gaspiller, gérer et trier ses déchets, utiliser les énergies

renouvelables…

L’ONG WWF, quant à elle, en proposant sur son site de calculer son « empreinte

écologique » permet à chacun d’évaluer les conséquences de son comportement

quotidien sur l’environnement et de comparer son score à celui de ses concitoyens.

Pour cela il suffit de répondre à quelques questions, telles que la taille de son

logement, son mode de chauffage, sa consommation d’eau, le nombre de

déplacements effectués en avion, en voiture, à pied, le pourcentage dans son chariot

de produits importés de l’étranger, etc. Le score final est donné en hectares, il

correspond à une estimation de la superficie qu’il faudrait à une famille pour vivre en

autarcie de façon durable à son rythme de consommation en tenant compte de ses

besoins de nourriture, chauffage, matériaux de construction, air pur, eau potable et

absorption de déchets.

Par ailleurs, les entreprises, chacune à leur manière, sensibilisent et font des

campagnes de communication en ce sens. Prenons l’exemple d’EDF : l’entreprise

s’est engagée dans la voie du développement durable en :

• Développant des énergies renouvelables : l’objectif européen est d’atteindre

21% d’énergies renouvelables (éolien, solaire, hydraulique) dans la consommation

d’électricité d’ici 2010, et EDF contribuera à cet objectif en investissant 3 milliards

d’euros dans l’éolien d’ici là.

• Se consacrant à la recherche sur les énergies, avec plus d’1 million d’euros

affectés en Recherche et Développement pour améliorer l’efficacité des appareils

existants, trouver et expérimenter des procédés innovants… car selon EDF « c’est

aujourd’hui que doit se relever le défi énergétique de demain ».

• Etant transparent sur l’origine de l’électricité consommée.

Afin de sensibiliser la population, l’entreprise a distribué un dépliant, « Nos petits

gestes d’aujourd’hui font notre confort de demain », et met à disposition sur son site

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internet des conseils pratiques pour consommer moins et améliorer son confort au

quotidien, notamment en estimant la consommation d’énergie, en évaluant le coût

d’utilisation lié aux appareils électriques, en choisissant et utilisant au mieux les

appareils électroménagers et de chauffage. En outre, l’entreprise propose

d’accompagner ses clients en les aidant à choisir la solution technique la mieux

adaptée à chaque situation.

Le consommateur apprend ainsi que pour une même durée d’utilisation, la

consommation d’une lampe halogène coûte 25 fois plus que celle d’une lampe basse

consommation, qu’en baissant de 1 degré la température du chauffage, on peut

économiser jusqu’à 7% d’énergie, ou encore que laver du linge à 30 ou 40 degrés au

lieu de 90 degrés permet de consommer 3 fois moins d’électricité, etc. EDF va plus

loin avec sa tournée éco citoyenne « Ensemble, économisons l’énergie ». Destinée à

toute la famille, elle propose un parcours découverte sur l’énergie, un café-conseil

pour adopter les gestes simples permettant de réaliser des économies d’énergie, des

jeux pédagogiques pour découvrir en s’amusant…

B. Le pacte écologique

Non seulement l’écologie a pris une part croissante dans l’esprit des français,

mais elle s’invite aussi aux présidentielles à travers le livre programme de Nicolas

Hulot, Pour un pacte écologique25. Ainsi, Le Nouvel Observateur écrit « Il l’avait

promis, il le fait ! Iconoclaste et pragmatique, l’homme qui veut sauver la Terre

commence par bousculer la présidentielle avec des propositions qui décoiffent. Son

rêve ? Mettre l’écologie au cœur de la campagne».26

Ainsi, Nicolas Hulot cherche à mobiliser un maximum de personnes, car « si nous

ne réagissons pas à la hauteur des enjeux – et quand je dis nous, je pense à

l’ensemble de la société, pas seulement aux responsables politiques, aux décideurs

économiques, aux acteurs sociaux ou aux intellectuels, mais aussi aux gens

« ordinaires », c’est l’implacable loi du temps et de la nature qui nous imposera son

diktat ».

25 Pour un pacte écologique, Nicolas Hulot, novembre 2006, Calmann-Lévy 26 Le Nouvel Observateur, du 9 au 15 Novembre 2006, La révolution Hulot

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Dans le pacte écologique, Nicolas Hulot propose 10 objectifs à atteindre :

1. Economie – vers une logique de durabilité.

2. Energie – organiser la baisse de consommation.

3. Agriculture – produire autrement.

4. Territoire – contenir l’extension périurbaine et localiser les activités humaines.

5. Transports –sortir du tout routier.

6. Fiscalité – établir le véritable prix des services rendus par la nature.

7. Biodiversité – faire entrer la nature dans l’aménagement du territoire.

8. Santé – prévenir avant de guérir.

9. Recherche – faire de l’environnement un moteur pour l’innovation.

10. Politique internationale – prendre l’initiative.

De nombreux experts et cinq présidentiables ont signé le pacte écologique. De par

sa notoriété et les nombreux forums organisés, Nicolas Hulot participe à

l’accélération du débat, des prises de position voire de décision sur les items liés à

l’environnement.

C. Le testament écologique du chef de l’Etat

En 2002, lors du sommet de Johannesburg, Jacques Chirac déclarait « La maison

brûle et on regarde ailleurs ». Aujourd’hui, il ajoute que si « la maison brûle

toujours » il a le sentiment que l’on commence à se dire « où sont les extincteurs ? ».

« Aujourd’hui, au moins, on cherche les extincteurs. C’est déjà un mieux. Mais ce

n’est pas assez. C’est pourquoi j’ai voulu cette Conférence Internationale de Paris ».

Cependant, bien que la prise de conscience soit croissante, une difficulté réside

dans le fait que le « système est fragmenté » ce qui induit inévitablement un manque

d’efficacité. En effet, au sujet de protection de l’environnement, il n’existe pas moins

de 500 accords internationaux et 18 institutions internationales.

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De plus, selon le chef de l’Etat27, le PNUE (Programme des Nations Unies pour

l’Environnement) a une capacité d’action très insuffisante. C’est la raison pour

laquelle il développe depuis plusieurs années l’idée d’avoir une ONUE, Organisation

des Nations Unies pour l’Environnement, qui soit capable d’une action coordonnée,

c'est-à-dire de concevoir une action mais surtout de la mettre en œuvre, autrement dit

dotée de pouvoirs pour faire appliquer ses décisions. Cette ONUE devrait être en

quelque sorte la conscience écologique du monde. Sur le principe de l’OMS, elle

disposerait à la fois d’une capacité d’analyse et d’action ainsi que de la possibilité de

faire appliquer ses décisions.

Dans le prolongement du sommet de Johannesburg, les 2 et 3 février 2007 à Paris,

Jacques Chirac a présidé la conférence28 pour une gouvernance écologique mondiale

qui a réuni des ministres, des scientifiques, des chefs d’entreprises, des ONG et des

personnalités venant de plus de soixante pays du monde entier.

Cette conférence sera suivie au printemps 2007 par la première réunion du groupe

pionnier des « amis de l’Organisation des Nations Unies pour l’Environnement » qui

rassemble déjà plus de 40 pays et qui se tiendra au Maroc.

Lors des différents sommets internationaux, des textes fondateurs engageant les

pays signataires sont ensuite déclinés en réglementations et directives. Il est à noter

que 70% de la législation française en matière d’environnement est d’origine

communautaire.

Chaque état signataire va devoir s’organiser afin de mettre en place et faire

respecter les nouvelles législations par tous les acteurs politiques, économiques et

sociaux, et donc en particulier par les entreprises.

L’environnement devient aussi une contrainte et par la même un enjeu stratégique

de développement.

27 Le Nouvel Observateur, du 1er au 7 Février 2007, Le testament écologique du chef de l’Etat – Chirac ce que je veux. Entretien exclusif pour le Nouvel Observateur, l’International Herald Tribune et le New York Times 28 http://www.ecologie.gouv.fr/conference/?-Programme-

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1.2. Un nouveau contexte réglementé

1.2.1. Au niveau international

Sous la pression des instances internationales, des ONG et des consommateurs,

les entreprises sont impliquées dans un changement de société induit par la volonté de

préserver l’environnement. Leur liberté d’entreprendre s’inscrit ainsi, aujourd’hui,

dans une régulation de droit et de fait, exercée par tous les partenaires de l’entreprise.

Plusieurs types d’instruments internationaux, de nature et de portée diverses, les

incitent à intégrer des critères éthiques dans leurs actions. Les méthodes de contrôle

externe sont insuffisantes et l’application de la réglementation non contraignante,

mais « Compte tenu de la nature transnationale de nombreux débats éthiques, depuis

les conditions de travail jusqu’à la pollution, il n’est pas étonnant que les

organisations internationales (plus que les Etats) voient dans la responsabilité

sociale (et environnementale) des entreprises un champ d’action promis à un bel

avenir »29.

A. Les principes directeurs et conventions de l’OCDE

Afin que les règles du jeu soient équitables entre tous les acteurs, les entreprises

demandent que des référentiels uniques soient élaborés en matière de responsabilité

sociale et environnementale. La commission européenne, quant à elle, juge essentiel

que les entreprises prennent comme référence première les instruments internationaux

tels que les Principes directeurs de l’OCDE, la Déclaration de l’OIT, etc., mais

nombreuses sont celles qui méconnaissent ces textes.

Les principes directeurs de l’OCDE visent à inciter les grandes entreprises à avoir

un comportement responsable, et énoncent des recommandations sur les droits de

l’Homme, la lutte contre la corruption, la protection des consommateurs. Il est à noter

qu’ils ne sont pas des substituts au droit applicable et n’ont pas de valeur juridique

contraignante. Actuellement, seuls les pays membres de l’OCDE, trois pays

d’Amérique latine (Argentine, Brésil, Chili), la République Slovaque, et récemment

Israël les ont adoptés. Mais la légitimité en est amoindrie sans la participation

d’autres Etats hors OCDE.

29 E. B. KAPSTEIN, « La croisade pour l’éthique d’entreprise », Politique Etrangère, n° 3, 2001, p. 600.

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

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Concernant la gouvernance des entreprises, les principes de l’OCDE préconisent

la protection des droits des actionnaires, notamment des actionnaires minoritaires et

étrangers, et soulignent que la réputation et le succès d’une société à long terme

dépendent également de facteurs éthiques et de la conscience des problèmes

environnementaux et sociaux.

Enfin, pour lutter contre la corruption, la convention de l’OCDE vise à mettre fin

à la corruption des agents publics étrangers dans le cadre des échanges commerciaux

internationaux.

B. Les conventions de l’Organisation Internationale du Travail

Il existe huit conventions sur les droits et principes fondamentaux des

travailleurs :

1. La convention sur le droit d’organisation et de négociation collective,

2. La convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,

3. La convention sur l’élimination du travail forcé ou obligatoire,

4. La convention sur les pires formes de travail des enfants,

5. La convention concernant la discrimination en matière d’emploi et de

profession,

6. La convention sur l’âge minimum requis pour occuper un emploi,

7. La convention sur l’égalité de rémunération entre hommes et femmes pour un

même poste,

8. La convention sur le travail forcé.

C. Le Pacte Mondial des Nations Unies

Le Pacte Mondial des Nations Unies30, initiative émanant du Programme des

Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), est une sorte de contrat volontaire, de

partenariat entre les entreprises et les Nations Unies pour que la dimension

30 Plus connu sous le nom de Global Compact : www.unglobalcompact.org

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environnementale soit mieux prise en compte par le monde des affaires. Le Pacte

Mondial encourage les entreprises à adhérer à différents principes dans le domaine

des droits de l’Homme, des droits sociaux et de l’environnement, en s’appuyant, pour

cela, sur la Déclaration Universelle des droits de l’Homme, les conventions de l’OIT

et la Déclaration de Rio en matière environnementale. « Le Pacte Mondial a toutefois

été critiqué par certaines ONG pour le caractère imprécis des principes énoncés (...)

et l’absence de contrôle vis-à-vis des entreprises qui s’en réclament »31.

1.2.2. Au niveau national

A. La loi sur les Nouvelles Régulations Economiques

La loi sur les Nouvelles Régulations Economiques (NRE) du 15 mai 2001 vise

directement la gestion de l’entreprise en demandant, aux sociétés cotées32 d’indiquer

dans leur rapport annuel la manière dont elles prennent en compte les conséquences

environnementales et sociales de leur activité. Le décret d’application33 de l’article

116 de cette loi précise le type d’informations environnementales et sociales devant

figurer dans les rapports aux actionnaires des entreprises cotées sur le premier

marché, à compter de 2003.

Le décret NRE vise, tout d’abord, le bilan environnemental de l’activité de

l’entreprise. Ainsi celle-ci doit évaluer l’impact de son activité en termes de

« consommation de ressources en eau, de matières premières et d’énergie avec, le

cas échéant, les mesures prises pour améliorer l’efficacité énergétique et le recours

aux énergies renouvelables, les conditions d’utilisation des sols, les rejets dans l'air,

l’eau et le sol affectant gravement l’environnement ainsi que les nuisances sonores ou

olfactives et les déchets et dont la liste sera déterminée par Arrêté des Ministres

chargés de l'Environnement et de l’Industrie ».

Cependant, seules les informations pertinentes et significatives « en fonction de la

nature de l’activité et de ses effets » seraient renseignées, ce qui laisse ainsi une

31 F. BENAROYA, « Echanges et éthique », DREE Dossiers, février 2002, p. 15. 32 Celles dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé. 33 Décret n° 2002-221 pris pour l’application de l’article L225-102-1 dans le Code de commerce et modifiant le décret n° 67-236 du 23 mars 1967 sur les sociétés commerciales, JO du 21 février 2002. Information : http://www.legifrance.gouv.fr.

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marge d’appréciation aux sociétés qui devront également donner des informations

relatives aux objectifs environnementaux assignés aux filiales à l’étranger.

Il est prévu également, dans le même rapport, que l’entreprise fasse un bilan

social, en l’obligeant à publier des informations sur :

• Sa politique de recrutement (en distinguant les contrats à durée déterminée et

ceux à durée indéterminée),

• Sa capacité à promouvoir auprès de ses sous-traitants et à faire respecter, par

ses filiales, les conventions de l’Organisation Internationale du Travail (OIT),

• Ses plans de réduction des effectifs et leurs motifs,

• Ses mesures de sauvegarde de l’emploi (efforts de reclassement, réembauches

et mesures d’accompagnement),

• Son organisation du temps et des conditions de travail (salariés à temps plein

et partiel, absentéisme et motifs, heures supplémentaires, hygiène et sécurité),

• Sa politique salariale (rémunérations, charges sociales, formation).

B. La loi sur l’épargne salariale

Cette loi stipule que « les organismes de placement collectif en valeurs mobilières

auxquelles sont affectés les fonds recueillis par les plans d’épargne d’entreprise,

interentreprises et les plans partenariaux d’épargne salariale volontaire sont tenus

de rendre compte annuellement de la mesure dans laquelle ils prennent compte des

considérations sociales, environnementales ou éthiques, tant dans la sélection, la

conservation et la liquidation des titres ».

Ces mesures s’apparentent à la loi anglaise « Trustee Act » de juillet 2000 qui

impose à tous les administrateurs de fonds de pension de communiquer, au sein d’une

« déclaration de principe », leur politique en matière de développement

d’investissement socialement responsable.

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C. Le nouveau code des marchés publics

La réforme du code français des marchés publics, adoptée en mars 2001, s’inspire

très fortement des réflexions menées à l’échelle européenne. En effet, en mai 2000, la

Commission a décidé de renforcer le dispositif réglementant la passation des marchés

publics par la mise à jour de la législation européenne existante. Le Code français des

marchés publics autorise, désormais, l’introduction des considérations sociales ou

environnementales dans les clauses d’un marché public (art. 14).

Ainsi, les cahiers des charges du maître d’ouvrage pourront comprendre des

dispositions visant à promouvoir l’emploi de personnes rencontrant des difficultés

particulières d’insertion, à lutter contre le chômage ou à protéger l’environnement.

D. L’assurance-crédit à l’export

Ce n’est que depuis peu que les agences d’assurance-crédit à l’export prennent en

compte l’impact environnemental des projets qu’ils garantissent. Cette prise en

compte s’explique par le fait que le risque environnemental est désormais considéré

comme partie intégrante du risque financier pour les assureurs. Tous les assureurs

crédit n’avancent toutefois pas au même rythme dans ce domaine. On voit ainsi

encore des assureurs accorder leur garantie à des projets alors que d’autres opérateurs

ont pu refuser la leur au motif que ces projets étaient peu respectueux de certains

critères environnementaux.

En 1999, un groupe de travail sur les crédits à l’exportation et l’environnement a

été mis en place dans le cadre de l’OCDE. En décembre 2000, ce groupe a adopté une

déclaration par laquelle les Etats s’engagent à faire en sorte que les crédits à

l’exportation bénéficiant d’un soutien public soient assortis avec les objectifs de

développement durable. Par exemple, en France, les entreprises qui déposent un

dossier d’assurance-crédit auprès de la Compagnie d’assurance française du

commerce extérieur (Coface), doivent désormais, répondre à un « questionnaire

environnemental».

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E. La gestion des déchets

Les entreprises doivent maîtriser l’impact de leurs activités sur l’environnement,

en particulier gérer leurs déchets conformément à la réglementation. La politique de

gestion des déchets a été relancée (loi de 1992), complétant la loi de 1975 qui créait

les Plans Départementaux d’élimination des déchets ménagers et assimilés afin de

fixer des objectifs de recyclage, d’incinération, de compostage et de mise en décharge

à terme de 5 et 10 ans.

Face au retard dans l’adoption de ces plans et à la priorité accordée à

l’incinération, un texte a imposé une réorientation de leur contenu en vue d’un

rééquilibrage des filières de traitement, privilégiant la prévention, la réduction à la

source, le recyclage et le tri sélectif.

Un objectif quantitatif national est fixé : à terme 50% des déchets des collectivités

locales doivent être collectés en vue de leur réutilisation, recyclage, traitement

biologique ou épandage agricole. La France incite à développer la collecte sélective.

1.3. Une pression croissante

1.3.1. Des partenaires

Depuis plusieurs années, les entreprises ont à faire face à un environnement de

plus en plus complexe, avec les notions de « client roi », d’internationalisation et de

globalisation des marchés. Elles multiplient les alliances avec comme objectifs la

mise en commun de moyens commerciaux, de programmes de recherche et

développement, la constitution d’offres « packagées », des partenariats pour la

réalisation de projet, etc.

Ces entreprises mettent en place des relations durables et qualifiantes afin de

privilégier une croissance contractuelle plutôt qu’une croissance patrimoniale, et leur

organisation se transforme en un système ouvert, aux frontières mal définies et dont

les marchés sont perçus comme des courants porteurs.

Pour elles, engager une démarche de respect de l’environnement, de

développement durable signifie rechercher une performance non seulement

financière, mais aussi sociale et environnementale. Cette responsabilité sociale se

traduit par des pratiques fondées sur des valeurs éthiques de respect de :

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• Toutes les parties prenantes de l’activité de l’entreprise (employés,

fournisseurs, clients, actionnaires, concurrents, etc.),

• La communauté (collectivités locales, associations de consommateurs, ONG,

etc.),

• L’environnement.

Par ailleurs elles doivent veiller à entretenir leur compétitivité et leur capacité

d’adaptation, et faire face à différentes pressions qui sont autant d’incitations à

l’innovation et aux ruptures technologiques :

• Pression des marchés financiers,

• Pression des actionnaires,

• Pression des fournisseurs,

• Pression des clients,

• Pression d’associations internationales,

• Pression du législateur.

Les entreprises doivent se mettre en conformité avec la nouvelle réglementation

environnementale voire l’anticiper. C’est une obligation légale dont vont devoir tenir

compte les chefs d’entreprise dans le pilotage de leurs activités, et donc en particulier

dans le pilotage de leur supply chain. Cependant elles sont de plus en plus

nombreuses à adhérer à la cause écologique car elles ont compris qu’elles avaient tout

à y gagner. Le raisonnement qui tend à faire croire que la lutte contre les émissions de

CO2 induit des coûts supplémentaires à répercuter sur les prix est de plus en plus

faux.

Les entreprises prennent conscience qu’elles peuvent gagner de l’argent tout en

protégeant l’environnement, et que le « vert peut aussi être un argument de vente »34.

34 Les Echos, 29 Janvier 2007, Dossier « Le réchauffement climatique ne fait plus débat», L’entreprise verte

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En effet pour 95% des français, « jouer la carte de l’environnement, c’est

améliorer l’image de l’entreprise »35.

On constate également des collaborations entre entreprises et ONG, des business

school rivalisent d’initiatives comme l’INSEAD36 qui a créé avec Geonomia un

forum favorisant la rencontre des scientifiques du monde des affaires et des

responsables de société. Ce nouvel objectif de sauvegarder la planète donne

également naissance à de nouvelles activités, développe la recherche par la demande

d’innovation en matière d’énergies renouvelables, d’entreprises propres, de recyclage

des produits, etc.

Ainsi les entreprises qui s’engagent dans la cause environnementale prennent un

avantage compétitif et technologique en repensant leurs produits par la manière de les

produire et de les distribuer. De ce fait, la protection de l’environnement devient un

argument publicitaire, et pour le marché des affaires, le développement vert est de

l’or.

1.3.2. Des exigences clients

Les entreprises n’existent et ne se développent que par les achats effectués par des

particuliers, des collectivités ou d’autres entreprises. Les clients sont de plus en plus

avertis par les médias et les ONG des pratiques non responsables de gouvernements

et/ ou d’entreprises. Il peut s’agir de lutte contre le travail des enfants, de

délocalisation, d’accès aux médicaments pour tous, etc. Toujours plus citoyens, ils se

préoccupent également des causes éthiques, sociales et environnementales.

Pour exemple, le succès de l’agriculture biologique ou celui du commerce

équitable constitue les preuves tangibles que les clients sont aujourd’hui de plus en

plus attentifs au comportement des entreprises et aux modalités de fabrication des

produits qu’ils achètent.

Mieux informés, davantage formés et conscients des enjeux, ils deviennent un

moteur de plus en plus actif dans le choix des produits et services et veulent peser sur

les conditions qui ont permis leur production et commercialisation. Ils sont d’autant

35 Sondage réalise pour L’Usine Nouvelle, Les Echos, 29 Janvier 2007, ibid. 36 INSEAD : Institut européen des affaires - Fontainebleau

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plus attirés par des produits sains et par l’éthique du comportement que l’offre s’est

banalisée.

L’entreprise responsable gagne ainsi la confiance, et donc la fidélité de ses clients.

A l’écoute de ces exigences nouvelles, l’entreprise se prépare à des marchés

nouveaux, notamment les marchés spécifiques intégrant la durabilité et l’éthique, à

des clientèles ou des secteurs nouveaux, non occupés par la concurrence (comme le

marché des ONG). Elle attire les donneurs d’ordres soucieux de passer commande à

des entreprises vertueuses, ou d’engager des partenariats ou joint-venture de bonne

qualité. Enfin, elle sera en mesure de répondre aux appels d’offre qui commencent à

exiger la mise en œuvre de standards de type SA 8000 (social) ou ISO 14001

(environnement).

En résumé, nous avons vu dans cette première partie comment les états avaient

souhaité impulser une dynamique de protection de l’environnement par des textes

fondateurs déclinés ensuite par les législations inhérentes.

Le concept de développement durable a été conçu, discuté, adopté par la

communauté internationale sur la base des trois piliers environnementaux, sociaux et

économiques lors de différents sommets notamment celui de Johannesburg en 2002

auquel participaient de grandes entreprises.

Ce grand élan ne peut se faire qu’avec leur contribution active, à savoir la

déclinaison en leur sein des décisions prises en matière environnemental, social et

économique.

C’est ainsi que le concept de développement durable va se traduire en entreprise

par le concept de responsabilité sociale des entreprises (RSE), si possible dans chaque

activité et interactions avec les parties prenantes sur une base volontaire.

Parmi ces activités, la supply chain a un rôle primordial à jouer de part sa

transversalité et sa relation avec les clients.

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30

2. LA SUPPLY CHAIN ET L’INTÉGRATION DE L’ENVIRONNEMENT

2.1. La Supply Chain

2.1.1. Rôle de la supply chain

La supply chain (ou chaîne logistique) est l’ensemble des intervenants, allant des

producteurs de matières premières jusqu’au consommateur final, en passant par tous

les intermédiaires éventuels (transformateurs, grossistes, transporteurs,

distributeurs…). La supply chain peut être assimilée à un modèle d’activités, organisé

autour d’un réseau d’entreprises dont le but est de mettre un produit ou un service à la

disposition du client dans des conditions optimales en terme de qualité, de date, de

lieu… Ce réseau regroupe des organisations se trouvant à l’amont et à l’aval du

processus productif. Elles partagent un objectif commun, celui de s’engager dans un

processus de création de valeur représenté par le produit ou le service livré au

consommateur37

La maîtrise des fonctions logistiques apparaît donc critique pour l’entreprise dans

sa globalité et, si l’on se réfère à la chaîne de valeur de Porter, celui-ci identifie la

logistique comme une fonction primaire, lui donnant ainsi toute sa dimension

stratégique.

Ces dernières années, la logistique a acquis un rôle incontournable et ce, pour

plusieurs raisons. Tout d’abord, les évolutions économiques imposent une maîtrise

des fonctions logistiques pour dégager et conserver un avantage compétitif durable :

mondialisation, externalisation, délocalisation ainsi que développement des réseaux,

alliances et systèmes d’information imposent une complexification des flux.

Parallèlement, les exigences croissantes des clients et des consommateurs augmentent

considérablement les standards en matière de service, qualité, diversité,

personnalisation, nécessitant des compétences particulièrement développées dans le

domaine de la logistique.

La gestion globale de la chaîne d’approvisionnement ou Supply Chain

Management (SCM) regroupe toutes les fonctions exercées et actions menées par

37 L’encyclopédie du marketing, Jean-Marc Lehu, Edition d’organisation

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

31

l’ensemble de ces intervenants. Le SCM concerne toutes les étapes internes et

externes impliquant une identification, une coordination et une rationalisation des

flux (physiques, humains, monétaires et surtout d’information). Il a pour but

d’optimiser l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement.

Le SCM représente un formidable levier pour la stratégie, en permettant à la fois

de réduire les coûts (transport, stockage, production, service client, etc.) et en

stimulant les gains en matière de chiffre d’affaires et de parts de marché, grâce

notamment à une qualité de service accrue et mieux ciblée. Par conséquent, les

directions générales dépendent davantage des compétences logistiques pour créer de

la valeur.

2.1.2. Intégrer les contraintes environnementales

Pour être efficace, la logistique, dans sa forme récente de SCM, a pour mission

d’aider l’entreprise à concilier les caractéristiques et exigences de la demande avec

les contraintes imposées par l’offre et la chaîne d’approvisionnement. Cela sous-

entend une adaptation du modèle logistique au type de secteur d’activité considéré, et

notamment aux spécificités du marché.

De plus, pour être en conformité avec la réglementation, la supply chain va devoir

intégrer les contraintes environnementales tout en anticipant les risques industriels, en

interne entre les différentes fonctions de l’entreprise, et en externe avec les différents

partenaires. Cette approche amène à avoir une vision globale de la logistique –

dépassant les clivages fonctionnels et organisationnels traditionnels – et unique – car

spécifique à chaque entreprise. Une bonne logistique procure un avantage compétitif

durable, difficilement imitable par les concurrents (Dell et Zara par exemple, ne

semblent toujours pas menacés, malgré les efforts de leurs concurrents respectifs pour

les imiter).

Le développement même du terme SCM traduit deux phénomènes importants.

D’une part, le SCM met l’accent sur l’idée qu’il faut s’intéresser à l’ensemble de la

chaîne depuis le premier fournisseur jusqu’au client consommateur pour accroître la

performance logistique globale. Le SCM dépasse ainsi la vision de l’approche

fragmentaire de la logistique, cantonnée à la gestion des flux au niveau d’une

entreprise, qui constituait autrefois la perspective du logisticien. D’autre part, le terme

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32

« supply » met le client consommateur final au centre du débat. Il faut organiser la

gestion des flux pour « approvisionner » au mieux les clients. Cela signifie que même

si le flux n’est pas entièrement « tiré » entre le client final et les usines de production,

le SCM, via les nouvelles technologies de communication intégrées par les systèmes

APS (Advanced Planning & Scheduling Systems) a pour conséquences de tendre les

flux de l’aval vers l’amont, et non plus à pousser les flux de l’amont vers l’aval.

Pour résumer, par son rôle stratégique au sein de l’entreprise, la supply chain est

donc incontournable. Or, la prise de conscience croissante de l’impact de l’activité

humaine sur la planète oblige chacun à contribuer au respect de son environnement.

Les entreprises, au même titre que les particuliers, sont donc concernées par cette

nouvelle donne, et notamment les nouvelles réglementations qui les obligent à revoir

leur façon de concevoir, produire et vendre.

La supply chain, étant la chaîne de tous les intervenants des différents maillons

qui contribuent à un produit, sera affectée dans son entier par tous ces

bouleversements.

2.2. Enjeu pour les métiers traditionnels L’accroissement des transports et du commerce inter frontaliers, les nouvelles

méthodes de fabrication, les problèmes de congestion de trafic ont eu un impact

visible sur l’environnement, particulièrement dans un nombre réduit de zones

géographiques. La prise de conscience de l’environnement n’est plus limitée au seul

transport mais s’étend de la gestion des emballages, du stockage à la gestion des

déchets.

Il faut noter que la supply chain est largement concernée car elle agit directement

sur six types de pollution : pollution de l’air, pollution de l’eau, pollution sonore,

défiguration des paysages ruraux, encombrement du trafic accentué par les véhicules

utilitaires, décharge abusive, voire exportation des déchets non traités. L’enjeu

environnemental de la supply chain est d’intégrer ces changements, d’autant plus

rapidement que, de l’avis de la psychosociologue Danielle Rapoport, « les

consommateurs ont besoin de preuves de la responsabilisation des acteurs

économiques, et d’une assurance que le changement qu’ils vont faire ne va pas les

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33

pénaliser. Comme ils sont perdus dans ce qu’il convient de faire et ce qui est efficace,

et face à la course aux labels, ils ont besoin de constater que les règles sont

respectées par tout le monde ».

Ces enjeux concernent en premier lieu les activités traditionnelles que sont

l’emballage, le transport et l’entreposage car elles permettent de se mettre aux normes

rapidement, d’entraîner le reste de l’entreprise, et d’être visibles rapidement du grand

public.

2.2.1. Emballage

L’immense majorité des produits que le consommateur trouve dans les magasins

est emballé et/ou a été transporté dans des emballages. On distingue les emballages

dits :

• Primaire : colle au produit,

• Secondaire : souvent emballage de regroupement,

• Tertiaire : emballage de manutention.

Ces emballages et conditionnements sont soumis à certaines contraintes telles

que l’acheminement, la solidité, la praticité, la visibilité, la conservation, la sécurité.

Ils doivent en outre :

• Respecter les codes couleurs entre les pays,

• Comporter un certain nombre d’informations,

• Pouvoir être éliminé ou recyclé,

• Donner une image favorable de la marque.

L’emballage est le premier secteur industriel a bénéficié de la mise en place en

1992 d’une législation européenne en matière de protection de l’environnement.

Depuis, ce secteur multiplie les méthodologies, procédés, matériaux et outils pour

servir au mieux la cause environnementale. L’allègement des matériaux reste un

critère de performance écologique et économique incontournable pour tous les

emballages. On peut citer l’exemple de CGL Pack qui diminue de 50% la matière

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34

nécessaire à la réalisation de ses plateaux de présentation du Roquefort, tout en

valorisant l’attractivité et la praticité de cet emballage.

Les solutions mono matériaux continuent également à être privilégiées, et

proposent désormais des matériaux 100% recyclés de plus en plus performants.

L’avenir s’avère prometteur en ce qui concerne les matériaux biodégradables dont

certains sont déjà biocompostables, respectant par là même la norme EN 13432 qui

exige la biodégradabilité ultime de l’emballage sous certaines conditions de

température et de temps et sans que les résidus de biodégradabilité impactent la

qualité du compost.

Toutefois, tout emballage non dégradable sera si possible réutilisé, devenant dès

lors un outil privilégié dans certaines tâches logistiques de transport des produits

intermédiaires (palettes, bacs navettes repliables et emboîtables…).

Enfin, pour que l’écoconception rende l’emballage écoperformant depuis la

création jusqu’à la fin de vie, de nouveaux outils naissent, telles des plates-formes de

logiciels qui déroulent tous les logiciels nécessaires pour créer, encaisser, palettiser et

mettre en linéaire des emballages au « total look environnemental ».

Une telle mise en œuvre peut s’avérer efficace pour une entreprise, autrement dit,

l’emballage rentable est facteur de succès.38 Cela s’explique car d’une part la courbe

de vie des produits tend à se raccourcir, et d’autre part le prix du ticket d’entrée sur de

nouveaux marchés est élevé. Partant de ce constat, investir dans un nouvel emballage

ou une nouvelle machine est un acte stratégique pour une marque. Ainsi, la notion

d’emballage rentable ne résulte pas que d’un achat au moindre coût, mais au contraire

de l’optimisation des facteurs de création de valeur, aussi bien sur le plan humain, que

matériel, financier, ou de services.

Pour aller dans ce sens, le club Démèter Environnement et Logistique a lancé

depuis 2001 plusieurs projets clés dont un vise notamment à élaborer une charte des

bonnes pratiques en matière d’emballages secondaires et tertiaires. Ce club est

composé d’une vingtaine de membres issus de l’industrie (Coca Cola, Danone,

L’Oréal…), de la distribution (Carrefour, Casino, Monoprix) ainsi que des

prestataires logistiques (FM Logistic, Stef-TFE…). Il a su intéresser divers acteurs du

38 Le Journal de la Logistique, N°40, Novembre 2006

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

35

secteur public, comme l’ADEME, la Mairie de Paris, le ministère de l’Equipement et

des Transports…). Le groupe de réflexion dédié à l’emballage secondaire a travaillé à

partir d’une idée concrète, nous informe J. Darthout, consultant CPV Associés :

« Nous avons voulu proposer un outil capable de comparer plusieurs types

d’emballages secondaires, tant sur le plan économique qu’environnemental ».

Concernant l’emballage tertiaire, les Fromageries Bel, Carrefour et Stef-TFE ont

réuni leurs compétences afin de réfléchir à la notion d’emballage réutilisable, car

selon B. Bompas, directeur des grands comptes GMS chez Stef, « tous les acteurs de

la filière produits frais doivent travailler ensemble, même si les a priori sont fort

nombreux ». L’optimisation du taux de remplissage des camions pourrait ainsi passer

par une standardisation des palettes de produits frais, actuellement très hétérogènes.

L’emballage réutilisable est une des voies à explorer pour arriver dès 2007 à proposer

un « consensus utile pour les participants au groupe de travail, mais pourquoi pas

pour d’autres acteurs de la chaîne logistique ».

Ainsi, lors de l’édition d’octobre 2005 à Lyon du salon Europack, un large

déploiement du développement durable, résultant de la combinaison de la sécurité des

utilisateurs, de l’amélioration de la productivité des clients ainsi que du respect de

l’environnement a été constaté. Les résultats de l’étude commanditée à MV Conseil

sur le développement durable, « attitudes et attentes des consommateurs à l’égard de

l’emballage », révélèrent que l’emballage est considéré comme très important ou

plutôt important par 46% des consommateurs interrogés en mars 2005 : 12% d’entre

eux font systématiquement attention à l’emballage et 43% font très attention, cette

attention variant en fonction du type de produit.

Si le prix vient en premier des critères de choix d’un produit, la possibilité de le

voir au travers de l’emballage arrive en second et le matériau de l’emballage en

quatrième position. Par ailleurs, le papier carton a les faveurs des consommateurs,

suivi par le verre, puis le plastique. Le carton est perçu positivement grâce à ses

caractéristiques environnementales (recyclable, biodégradable) mais aussi comme

léger, maniable, facile à transporter et informatif. Le verre est quant à lui apprécié

pour ses qualités esthétiques.

En outre, 72% des personnes interrogées déclarèrent faire systématiquement le tri

des déchets, les emballages alimentaires venant en tête des emballages

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36

systématiquement triés (77%). Les consommateurs étaient également intéressés dans

le fait d’avoir des emballages biodégradables (97%), recyclables (90%), plus petits

(90%), plus légers (89%), réutilisables (82%) et sans suremballage (82%).

Les innovations proposées à Europack intègrent cette notion de développement

durable, certains exposants n’hésitant pas à souligner que leurs produits et matériels

répondent aux entreprises désireuses d’entrer dans la démarche ISO 14000, ou déjà

certifiées. Parmi les innovations respectueuses de l’environnement et montrées lors

du salon, on peut en citer deux, (cf. annexe 2).

• La CanLoq d’AMC2 industrie permet de substituer une boîte en carton collé

par une boîte en carton micro cannelures encliquetée et mécanisable, facilitant la mise

en œuvre grâce à un montage simple et rapide. L’intérêt du produit est multiple. Tout

d’abord, la formation de la boîte ne nécessite aucun collage. Ensuite, celle-ci, en

carton micro cannelures est plus résistante en compression. Par ailleurs, elle assure la

simplification du process et de sa maintenance, la palettisation directe étant possible.

Enfin, elle supprime les caisses américaines de suremballage. Cette innovation

s’inscrit donc dans une perspective de développement durable avec la réduction des

consommables (carton, colle…), la diminution de la consommation énergétique, la

diminution de l’écotaxe pour un emballage en carton recyclé et recyclable. Ce

système est breveté, la marque CanLoq déposée, et nominé à des trophées de 2005 et

2006.

• L’ODL 1000 de Cartonajes Font est un conteneur en carton ondulé possédant

intérieurement une poche fabriquée avec un matériel polymérique. Sa présentation

pliée avec les deux bandes de carton placées en position de montage fait qu’avec une

simple pression latérale, le conteneur se monte très facilement. La présentation en

palette de 10 unités réduit considérablement l’espace qu’occupent dans l’entrepôt les

traditionnels IBC. Toutes les possibilités de remplissage et de vidange sont

envisageables, la fabrication se faisant sur mesure et pouvant accepter différentes

valves. L’ODL 1000 est fabriqué en carton et en matière plastique. Il est totalement

recyclable. Utilisé une seule fois, il ne nécessite aucun lavage et ne génère pas de

résidus de lavage. Il a déjà reçu le prix Liderpack 2005 à l’innovation, accordé par le

Gouvernement de Catalogne. Produit écologique, facile à monter et capable de

contenir toute sorte de substance, il permet grâce au carton ondulé, la

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37

personnalisation du conteneur aux couleurs de l’entreprise ou tout autre type

d’impression.

2.2.2. Transport

Enjeu cité par Carrefour, Darty, Auchan dans le domaine de la distribution, FM

Logistic, UPS pour les prestataires, ou encore Danone, Lafarge… le transport est

incontestablement le plus gros chantier de la logistique. Comme le rappelle l’ancien

Ministre de l’Equipement, des Transports et de l’Aménagement du territoire, Gilles

de Robien, il influe sur deux des trois piliers du développement durable :

l’environnement puisqu’il participe à l’augmentation du niveau des gaz à effet de

serre dans l’atmosphère, mais également l’aspect sociétal puisque la pollution

urbaine, industrielle et agricole engendre des répercussions sur la santé publique.

Trois axes de travail ont été définis :

• Le premier consiste à travailler sur l’équipement, donc sur la nature des

véhicules utilisés, comme le font par exemple les distributeurs Carrefour ou

Monoprix qui testent les véhicules au GNV (Gaz Naturel pour Véhicules), mais

également FM Logistic ou UPS qui travaillent sur une politique de renouvellement

régulier de leur parc de camions ou d’avions, partant du principe qu’un véhicule neuf

ou bien entretenu est moins polluant.

• Le deuxième axe réside dans le travail sur les distances et le taux de

remplissage des véhicules. Dans ce cas, les entreprises sont souvent amenées à

remettre à plat leur organisation logistique par un arbitrage entre la diminution du

nombre d’entrepôts et le chargement des camions, tout en recherchant des

opportunités pour charger leurs véhicules sur le trajet du retour. Une autre solution

consiste également à regrouper les industriels au sein de « parcs industriels

fournisseurs » (ou PIF) pour réduire les kilomètres imputables au transport amont.

• Enfin, des réflexions sont menées sur des solutions alternatives au transport

routier, en valorisant des modes de transport moins polluants, comme le transport

fluvial ou ferroviaire, qui offrent un meilleur rendement énergétique.

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

38

Dans ce domaine, on peut citer le témoignage du transporteur Transports Auto

Brunier qui s’est fixé trois objectifs dans son projet d’entreprise, à savoir :

• Le transport propre grâce à l’utilisation de Gaz Naturel Véhicules pour la

traction routière de chargement et de déchargement, et l’utilisation du combiné rail-

route pour la traction longue distance,

• Le transport multimodal car le transport combiné rail-route additionne les

avantages de la route (service, souplesse, proximité, service porte à porte) à ceux du

rail (puissance, fiabilité, économie, sécurité, environnement),

• Le transport communicant qui implique une communication avec les clients

(via l’EDI et Internet en B2B), une traçabilité des informations en temps réel du client

sur toutes les opérations grâce à des terminaux embarqués à bord des véhicules, un

suivi des caisses mobiles, et une optimisation des flux de l’ensemble des clients.

L’entreprise s’est donc lancée dans une politique de développement durable via le

transport combiné rail-route, schématisé ci-dessous:

Source : http://www.tab-transports.com

Figure 3 : Transport combiné rail route

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

39

J-C Brunier explique, dans un entretien à Logistique & Management39, les raisons

pour lesquelles le transport combiné rail-route respecte les trois composantes

environnement, social, économique :

• Environnement : le transport combiné rail-route rejette 100 fois moins de CO2

que le transport routier,

• Social : les conducteurs TAB ne font que des opérations de chargement et

déchargement. Ils passent la nuit dans le train, et ne font donc pas les temps de

conduite fastidieux sur la longue distance,

• Economique, à travers une alternative équilibrée à la route au niveau des

résultats.

D’autres actions parallèles ont été menées, comme la maximisation du taux de

remplissage des camions, la mise en place d’un logiciel afin d’optimiser les tournées

dans le cas de distribution, la formation des conducteurs à la conduite économique et

le renouvellement du parc des véhicules moteurs anciens par des véhicules aux

nouvelles normes. Les résultats observés sont, selon le PDG, « remarquables puisque

pour le transport combiné rail-route qui s’applique à la longue distance, un voyage

économise 1 tonne de CO2. TAB économise ainsi environ 40 000 tonnes de CO2 par

an. Pour ce qui est de la conduite économique et du renouvellement du parc, on

observe des économies de carburant de l’ordre de 10% ».

Concernant le transport combiné rail-route, l’Europe vient de prouver qu’elle

avançait sur ce thème. En effet, la France et le Luxembourg ont inauguré le 29 mars

2007 l’autoroute ferroviaire Luxembourg – Perpignan, la plus longue d’Europe avec

ces 1000 km.

Elle permettra de transporter 30 000 camions par an à partir du 2 juillet 2007, date

de l’ouverture de l’exploitation commerciale.

Le transport est un des postes de pollution et de coûts les plus importants de la

logistique. C’est donc un enjeu économique et environnemental car en raisonnant en

terme de valeur des services de transports produits par les entreprises françaises,

39 Logistique & Management, Vol. 13 N°1, 2005, Pour les Transports Auto Brunier, l’utilisation du transport combiné est très encourageante et rend l’entreprise plus compétitive

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

40

c’est-à-dire en chiffre d’affaires, le transport routier assure encore plus de 95% du

chiffre d’affaires des trois modes route, fer et voie d’eau ; le chemin de fer est à

moins de 5% et la voie d’eau à moins de 0,5%40.

Source : Logistique, Y Pimor, coll. Dunod

Figure 4: Les différents modes de transport terrestre

Pourtant, s’il a des qualités incontestables qui expliquent qu’il soit autant utilisé

des chargeurs, ce mode de transport présente aussi des inconvénients, qu’il faut tout

de même relativiser41 :

• La mise en œuvre de nouvelles normes en matière de pollution a permis de

diviser les émissions de gaz polluants par des coefficients souvent supérieurs à dix,

• Si les poids lourds participent à la congestion des routes et des autoroutes, leur

contribution demeure modérée comparée à celle des voitures particulières,

• Si les accidents faisant intervenir des poids lourds ont un indice de gravité 2,5

fois plus important que les accidents dans lesquels il n’y a pas de poids lourds

impliqués, le pourcentage des accidents faisant intervenir un poids lourd est plus

faible que leur part dans la circulation. 40 Maurice Bernadet, laboratoire d’économie des transports, Predit 3 (Programme National de Recherche et d'Innovation dans les Transports Terrestres) 41 Predit 3

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41

Mais les critiques concernant le transport routier demeurent fondées, d’autant plus

que ce mode de transport provoque également d’autres nuisances, comme le bruit,

l’émission de gaz à effet de serre, le développement d’infrastructures défigurant le

paysage, etc. On comprend donc pourquoi, dans une perspective de développement

durable, au niveau national comme à celui de l’Union européenne, la maîtrise de la

demande de transport et le rééquilibrage modal sont désormais des priorités.

Ainsi, au niveau national a été mis en place, depuis 1990, un Programme

pluriannuel de Recherche, d’Expérimentation et de Soutien à l’Innovation dans les

Transports terrestres (le Predit). Il est initié et conduit d’une part par les

ministères des Transports, de l’Equipement, du Tourisme et de la Mer ; de la

Recherche ; de l’Ecologie et du Développement Durable et de l’Economie, des

Finances et de l’Industrie, d’autre part par l’agence de l’Environnement et de la

Maîtrise de l’Energie, ainsi que l’agence française de l’innovation (OSEO-ANVAR).

En mars 2002 a été lancé le Predit 3 qui a poursuivi sur quatre ans les objectifs

des précédents programmes en mettant l’accent sur les transports de marchandises, la

sécurité routière, les problèmes environnementaux, notamment l’effet de serre. Il était

composé de 11 Groupes Opérationnels dont le groupe « Logistique et Transport de

Marchandises » qui a abouti aux orientations suivantes :

• Comprendre dans un premier temps comment les appareils de production et de

distribution génèrent des échanges qui se traduisent par des flux de transport, et

pourquoi ces flux se répartissent entre les différents modes de transport terrestre en

privilégiant le mode routier. Cette réflexion permettra aux pouvoirs publics d’agir sur

la génération des transports et la répartition modale. Dès lors, il deviendra possible de

s’intéresser à l’économie des infrastructures et à la maîtrise des nuisances,

• Quel que soit le mode utilisé, les transports « consomment » des

infrastructures et, pour faire face à l’augmentation des trafics, la tendance est d’en

construire toujours plus. Pour éviter ces investissements superflus, la recherche peut

trouver des solutions susceptibles d’utiliser plus efficacement les infrastructures

existantes,

• Maîtriser les nuisances générées par les transports de marchandises, ce qui

passe par deux types d’actions : puisque les transports routiers occupent une place

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42

dominante, il faut améliorer la compatibilité environnementale des poids lourds, mais

il faut aussi réfléchir à la manière de développer les modes de transport alternatifs au

mode routier,

• Améliorer les prestations réalisées par les opérateurs de transport. Différentes

orientations s’inscrivent dans cette préoccupation : celle de la qualité de service

offerte aux clients, celle des performances économiques et sociales et celle de la

sécurité.

Plusieurs pistes de réflexion et axes de travail ont donc été menés sur la

dominance du transport routier et ont contribué à certaines innovations. Ainsi, afin

d’optimiser ces coûts, l’ADEME et le groupe AFT-IFTIM ont mis en ligne un outil

interactif et pédagogique, Energeco.org, pour aider à la maîtrise des consommations

de carburant dans le transport routier de marchandises.

A l’origine de ce site se trouve le projet BEET (Benchmarking Energy Efficiency

in Transport), auquel l’AFT-IFTIM prit part via son Département Etudes et

Recherches, en partenariat avec NEA Transport Research and Training (Pays-Bas) et

avec la collaboration de Renault Trucks. Ce projet a pour finalité de faire prendre

conscience, aux transporteurs routiers de marchandises, des réductions possibles de

consommation de carburant grâce à la mise en œuvre de moyens adéquats, en

particulier par un suivi régulier des performances des conducteurs en matière de

consommation et des formations spécifiques.

Ainsi, le projet BEET a notamment permis :

• De faire un état des lieux des pratiques et techniques utilisées aujourd’hui

pour réduire la consommation de carburant dans les entreprises de transport de

marchandises,

• De constituer une base de données de références des consommations, agrégée

à partir des relevés réalisés par un certain nombre d’entreprises témoins. Par la suite,

cette base de données permettra aux transporteurs d’établir des comparaisons entre

leurs propres performances et celles d’un échantillon d’entreprises ayant un profil

comparable,

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43

• De présenter les résultats d’opérations pilotes afin de mettre en évidence que

des formations spécifiques dédiées induisent des gains de consommation significatifs,

et d’assurer une large diffusion des résultats.

Le site Energeco.org permet aux transporteurs d’associer maîtrise de l’énergie,

protection de l’environnement et optimisation des coûts. C’est donc un outil

d’information qui permet d’identifier des moyens d’action afin d’optimiser les

consommations de carburant et qui constitue à la fois :

• Un inventaire d’actions pour agir sur la consommation individuelle : diverses

actions organisationnelles qui relèvent de la politique de l’entreprise y sont

répertoriées (actions relatives aux conducteurs, à l’exploitation et à la gestion de

flotte, à l’intégration des données de trafic, ainsi qu’un descriptif de tous les

paramètres qui influent sur la consommation de carburant),

• Une observation de l’impact de formations spécifiques à la conduite

économique et à la conduite rationnelle qui permettent des gains de consommation de

carburant (mesures dans le cadre du projet BEET). Selon l’avis des partenaires

transporteurs ayant participé au projet, il s’agit là de gains qui se situent au-delà de ce

que l’on pouvait raisonnablement espérer, et très supérieurs à ce qui était escompté,

• Un outil de benchmarking à disposition des utilisateurs du site leur permettant

de ce fait d’apprécier leurs propres performances de consommation de carburant en

les comparant avec celles de leurs collègues. Le but est de donner à l’ensemble des

acteurs du transport routier de marchandises une base de référence des

consommations.

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44

Source : Stratégie logistique, A.K. Samii, Coll. Dunod

Tableau 2 : Comparaison des modes de transport

2.2.3. Entrepôts et plateformes

Fait incontestable et incontesté, les contraintes environnementales ne peuvent plus

être ignorées des professionnels de l’immobilier logistique, comme l’appuie Ranald

Hahn, directeur général de Prologis pour l’Europe du sud : « plus une seule

construction d’entrepôt logistique ne se fait aujourd’hui sans prendre en compte

certains aspects du développement durable (…). Un entrepôt bien construit doit

pouvoir durer 40 ans. Il faut qu’il soit adaptable pour 4 à 10 locataires successifs.

Nous devons donc anticiper les besoins futurs notamment en terme de voies ferrées,

de fibres optique, etc. ». Economies d’énergie, choix des matériaux, multimodalité,

etc. amènent certains à parler d’entrepôt écologique.

Cette notion prend en compte plusieurs principes d’actions déterminantes dont

l’insertion de projets sur les sites sélectionnés en valorisant d’une part le dialogue

avec les différents partenaires, les responsables locaux et les clients investisseurs,

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d’autre part le choix de matériaux de construction avec par exemple l’utilisation du

bois (structurellement performant et offrant une réduction des coûts de construction).

Certains vont plus loin, comme le groupe GSE, en mettant en place une gestion des

eaux pluviales pour les collecter, les utiliser puis les faire absorber au maximum par

les terrains. L’ensemble de ces données intervient dans la conception, la réalisation et

l’exploitation du nouveau concept « Optima » pour les parcs logistiques intégrant le

développement durable.

Le constat par certaines entreprises d’une corrélation entre l’image donnée au

public et la cotation boursière tend également à accroître la demande, car un entrepôt

écologique constitue une véritable vitrine pour l’utilisateur comme pour le

propriétaire. De plus, les professionnels prévoient qu’à terme l’Europe imposera des

contraintes écologiques encore plus sévères qu’aujourd’hui. Or, la durée de vie d’un

entrepôt étant relativement longue, il est préférable d’anticiper.

Des réflexions sont donc à mener dès aujourd’hui afin de déterminer à quoi

ressemblera l’entrepôt de demain. N. Gellé, directeur associé du cabinet de consulting

Valtech Axelboss, explique « que pour se projeter dans le futur, il faut déjà lire les

tendances actuelles. Et celles-ci traduisent une augmentation des flux d’importation,

corrélées par une désindustrialisation de l’Europe ».

L’entrepôt de demain s’intégrera également mieux au paysage en intégrant l’éco-

construction, l’écogestion, le confort, la santé et la sécurité. Les bâtiments pourraient

être construits sur de grandes parcelles de terrain permettant un paysage de qualité. Le

développement durable passe également par la disparition des friches industrielles

trop difficiles à recycler. La toiture végétale pourrait également émerger. P. Gallois,

directeur associé du cabinet d’architecte SAGL milite « pour ces toits de verdure qui

cumulent l’intégration esthétique du site dans l’espace, un confort thermique et

acoustique ainsi que la récupération des eaux pluviales ». Pour pousser l’intégration

du développement durable, les grandes surfaces de façade « qui permettent de donner

une image verte » vont se généraliser.

Afin de tester les nouvelles normes environnementales HQE (Haute Qualité

Environnementale), LR Services a ouvert en septembre 2005 une plate-forme

logistique à Beauvais, dans l’Oise, pour le spécialiste de la restauration rapide Mac

Donald’s.

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D’une superficie de 9 200m², cette nouvelle implantation doit désengorger le nord

de la France et la partie septentrionale de la banlieue parisienne aujourd’hui saturés.

Construite sur un terrain de plus de 4 hectares, la plate-forme aura coûté 12 millions

d’euros et employait à son lancement 43 personnes. Les trois entrepôts de LR

Services (Logistique Restauration) assurent un stockage en tri température, frais, sec

et surgelé pour une capacité totale de 5 260 places palettes. Selon le directeur du site

P. Ouensanga, 27 camions assurent des rotations six jours durant à destination de 167

restaurants, LR Services optimisant au maximum les tournées.

Après réception de la quasi totalité des lots des fournisseurs (160 marques), le site

trie puis envoie ses camions en tournée. Chaque semi remorque part à plein et dessert

plusieurs restaurants.

Pour rentabiliser leur retour, une reverse logistique a été mise en place. Ainsi,

chaque enseigne collecte ses emballages utilisés, les confie aux camions en tournée

qui les ramènent à la mini centrale de déchet intégrée au site. Par ailleurs, cette plate-

forme se situe à la pointe de la recherche environnementale comme le détaille L.

Serveau, responsable qualité et environnement chez LR Services : « le site est pilote

pour l’application de la démarche haute qualité environnementale. Il s’agit du

premier test pour les normes HQE appliquées aux sites industriels ».

Tout a été conçu pour économiser l’énergie et optimiser de l’espace : le parking

pour les semi-remorques est situé en frontal des portes à quai et équipé de pompe

électrique pour le biberonnage ; à l’intérieur des entrepôts, les bureaux sont disposés

au dessus de l’entrepôt sec pour une meilleure rétention de chaleur ; les gaz à

ammoniac et dioxyde de carbone remplacent ceux à effet de serre ; des bandes

blanches ont été tracées sur le sol le long des espaces de stockage pour détecter toute

éventuelle contamination par rongeur ou rampant.

Le surcoût pour la mise en application de ces normes est évalué à 5% de

l’investissement total.

La prise en compte des nouvelles normes et règlements dans les métiers

traditionnels permettent de répondre en partie aux enjeux d’aujourd’hui. En effet les

entreprises doivent voir leur supply chain comme un ensemble cohérent et non plus

seulement par activité. La mise en place de process et de procédures va les aider à

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avoir une vision de la chaîne logistique dans sa globalité afin d’optimiser sa

performance, notamment environnementale.

Pour cela, l’enjeu de la supply chain est d’intégrer les aspects environnementaux

dès la conception du produit et de prendre en compte les conséquences

environnementales de sa fin de vie.

2.3. Enjeu pour l’approche globale

2.3.1. Ecoconception

On l’a constaté précédemment, tout l’enjeu n’est pas de produire moins mais de

produire mieux. C’est là tout le sens de l’écoconception car la phase de conception

d’un produit est l’étape où les leviers sont les plus importants pour faire évoluer le

profil environnemental d’un produit. L’entreprise va devoir trouver l’équilibre entre

d’une part les impératifs des réglementations des produits et des normes, comme les

Ecolabels, d’autre part les exigences et les besoins des clients.

Déjà en 1995, le deuxième rapport du Club de Rome, intitulé « Facteur 43 »,

appelle à une « révolution de l’efficacité environnementale » et avance l’idée que

nous pouvons, en vingt-cinq ans, parvenir à créer deux fois plus de richesses en

exploitant deux fois moins de ressources. A l’instar de l’amélioration du travail

humain au cours de l’ère industrielle, l’enjeu est d’améliorer l’optimisation des

matières premières en travaillant sur la conception des produits, leurs modes de

fabrication et leur fin de vie. Le rapport table également sur l’apparition des nouvelles

technologies et de nouveaux produits éco efficaces. Il donne, pour exemple, le cas des

documents électroniques et des nouvelles technologies de l’information, dont l’impact

est considérable sur la manière dont l’économie affecte l’environnement42 : les

habitudes des internautes devraient réduire la consommation de papier de presque

trois millions de tonnes par an dans les prochaines années. Désormais, conclut le

rapport, le design doit se concentrer sur l’efficacité dans l’utilisation des matières

premières et de l’énergie, de la production à l’usage effectif puis à la fin de vie du

produit.

42 Time magazine, hors-série « How to Save the Planet”, Mai 2000

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Un produit issu de l’écoconception doit être parfaitement adapté à son usage, la

forme suivant la fonction ; il doit avant tout être fiable et utile, facile à entretenir,

voire à réparer, et conçu pour durer.

Cette approche avant tout fonctionnelle et minimaliste est par exemple centrale

dans le design des produits de la marque enseigne japonaise Muji, créée en 1980

comme marque de distributeur par la chaîne de magasins japonais Seiyu à Tokyo. Le

point de vue fondateur de Muji est simple : notre société de consommation et la

multiplication des objets qu’elle engendre font progressivement disparaître la valeur

réelle et fonctionnelle des choses, « masquée par un design trop sophistiqué ou un

emballage inutile ».

D’où l’objectif de l’enseigne : retrouver cette valeur des choses en se souciant

avant tout de créer un produit « conforme à son essence : délicieux s’il s’agit d’un

produit alimentaire ; pratique et durable s’il s’agit d’un objet utilitaire ; confortable et

solide s’il s’agit d’un vêtement… ».

Pour ce faire, l’enseigne s’est fixé trois principes de base : la mise en valeur des

matériaux employés, l’optimisation des procédés de production, et la simplification

de l’emballage. En choisissant attentivement les matières, en supprimant les

décorations ou emballages superflus (y compris le nom Muji qui signifie « non-

marque » et ne figure sur aucun produit), en privilégiant les couleurs naturelles, en

concentrant ses efforts sur l’utilisation efficace des ressources et la réduction des

déchets, en favorisant le recyclage et la réutilisation, Muji souhaite proposer des

produits simples et utiles, à des prix raisonnables, accessibles à tous. Avec de tels

produits, Muji veut « permettre aux gens de faire des choix importants pour

l’environnement et la qualité de vie (…), à partir d’une vision claire des modes de vie

souhaitables pour le futur ». Le succès est au rendez-vous : la marque s’est

progressivement détachée de sa maison mère, et possède ses propres magasins depuis

1983, elle est cotée en bourse depuis 1995. Malgré sa croissance, Muji reste fidèle à

sa philosophie, élargissant simplement le choix des produits proposés.

Muji applique donc le principe de l’écodesign, à savoir la limitation des

« externalités négatives » et l’encouragement des « externalités positives » de l’objet

à tous les stades de son existence, aussi bien à court qu’à long terme :

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• En se posant la question de sa raison d’être : un objet dont la fonction est

inutile ou nuisible ne mérite pas d’être produit,

• En envisageant toutes les conséquences de son processus de production

(matières premières recyclées ou renouvelables, faible consommation d’énergie,

d’eau, etc.),

• En considérant les impacts de son achat puis de son utilisation (réduction de

l’emballage, optimisation du transport du lieu de production au lieu de vente puis au

lieu de consommation, utilisation d’énergie renouvelable pour le fonctionnement,

utilité sociale, etc.),

• En prolongeant sa durée de vie (durabilité, réparabilité, etc.),

• En anticipant sa fin de vie (récupération, recyclabilité, biodégradabilité).

Grâce à des produits écodesign, les entreprises ont une opportunité : celle de

répondre aux besoins basiques de leurs clients (des objets utiles, solides, fiables et

durables), mais aussi aux nouveaux besoins. Car, selon l’écodesigner McDonough43,

« la société humaine aspire à une intégration de ses besoins matériels, spirituels et

écologiques. Or les technologies, modes de production et objets actuels tendent à

traiter ces considérations de manière séparée plutôt que de les connecter entre elles

(…). Le défi pour l’humanité est de parvenir à développer un design qui lui permette

de vivre sur cette planète : il n’est pour ainsi dire pas une étape du design, de la

production voire de la construction qui ne doive être repensée pour cela. Nos modes

de pensée linéaires et nos visions à court terme, justifiant l’utilisation de moyens qui

sont ignorants, indifférents ou arrogants quant aux lois de la nature, ne peuvent pas

permettre d’imaginer l’avenir des relations entre l’humanité et la nature. Nous

devons donc utiliser les connaissances les plus modernes et la sagesse ancienne dans

nos efforts pour exploiter les ressources naturelles tout en prenant durablement soin

de la nature ».

C’est dans cet esprit que W. McDonough, chargé avec M. Braungart de préparer

un texte pour synthétiser les principes de l’écoconception et orienter les efforts des

43 « The Hannover Principles – Design for Sustainability », texte préparé pour l’Exposition Universelle de Hanovre de 2000 par William McDonough et Michael Braungart, 1992

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designers et architectes qui participaient à l’exposition universelle de Hanovre de

2000 sur le thème Humanité – Nature – Technologie, choisit de consulter très

largement des designers du monde entier mais aussi des associations

environnementales et des philosophes de toutes traditions. Le texte définitif des

principes de Hanovre, paru en 1992, soit huit ans avant l’Expo 2000, tenait en neuf

règles que McDonough et Braungart proposèrent comme fondements à la démarche

écoconception :

1. Reconnaître à l’humanité et à la nature le droit de coexister,

2. Accepter l’interdépendance de l’homme et de la nature,

3. Respecter les relations entre l’esprit et la matière,

4. Accepter de répondre à des conséquences du design sur les hommes et la

nature,

5. Créer des objets fiables et sûrs, dont la valeur s’inscrit dans la durée,

6. Eliminer le concept même de déchet,

7. Utiliser le plus possible les sources d’énergie naturelle,

8. Accepter les limites du design,

9. Rechercher le progrès continu en partageant les connaissances.

Ainsi donc, l’écoconception, respectueuse de l’environnement, se fonde sur un

raisonnement en termes de cycle de vie du produit. On l’a vu, les enjeux poursuivis

sont d’éliminer des gaspillages des ressources naturelles et de l’énergie d’une part, et

d’éviter les traitements coûteux en fin de vie des produits d’autre part. Toutes les

nuisances environnementales des produits et de leurs emballages sont prises en

compte, depuis l’extraction des matières premières jusqu’au traitement en fin de vie

(Bralla, 1996).

L’objectif consiste donc en une réduction des impacts environnementaux à la

source dans la mesure où plus de 80% des nuisances d’un produit tout au long de son

cycle de vie sont déterminées au cours de la phase de conception. En fin de phase de

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conception, plus de 90% des coûts sont engagés, contre seulement 10% des dépenses

réelles cumulées (Barth, 1993). C’est pourquoi il est capital d’agir dès la phase de

conception des produits, c’est-à-dire le plus en amont possible du processus, pour

intégrer la dimension environnementale de façon pertinente pour l’entreprise.

L’écoconception est donc une véritable source permettant de protéger

l’environnement grâce à des produits adaptés et se révèle également être un véritable

frein à l’imitation de part sa complexité (Dosz, 1994). En effet, pour ce faire,

l’entreprise internalise la protection de l’environnement dans le cycle de vie du

produit ; la communication sur l’avantage lié à la protection de l’environnement a

pour effet de renforcer la perception du client et les barrières à l’imitation puisque la

combinaison des ressources gagnantes se trouve alors encore complexifiée (Reynaud

et Rollet, 2001).

L’ecoconception prenant en compte tout le cycle du produit va permettre de

répondre à l’enjeu de la logistique inversée qu’il s’agisse du recyclage, récupération

et autres formes de retours de produit du client vers le producteur.

2.3.2. Logistique inversée

Les décharges sont pleines de produits inutilisables et obsolètes dont on ne sait

que faire et qui représentent une source importante de pollution à différents niveaux.

De plus, la diminution de la capacité des sites d’enfouissement fait de l’élimination

une solution de plus en plus problématique et coûteuse pour les organisations. Ces

produits sont certes inutilisables en l’état, mais certains composants peuvent être

valorisés ou recyclés d’une manière ou d’une autre.

La logistique inversée (ou reverse logistics) est un axe majeur sur lequel il faut

travailler afin de gérer au mieux la fin de vie des produits. The Council of Supply

Chain Management Professionals la définit de la manière suivante : partant du point

de consommation jusqu’au point d’origine, la logistique inversée est un processus

efficient de planification, de mise en œuvre et de contrôle des flux de matières

premières, d’encours, de produits finis, et de l’information relative à ces flux, dont le

but est de capter la valeur des matières en les remettant à disposition dans une supply

chain de retour. Ainsi, le flux ne « descend » pas la supply chain mais la « remonte »

depuis le consommateur vers le producteur : retours, envoi en réparations, invendus,

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etc. Mais c’est aussi plus que cela car l’expression logistique inversée recouvre aussi

les déchets dont on doit se débarrasser le plus écologiquement possible sans qu’ils

reviennent au producteur.

Après avoir amélioré leur logistique ascendante normale, les entreprises

consacrent depuis quelques années beaucoup d’efforts à la logistique inversée, avec

des résultats très encourageants.

La logistique inversée concerne deux types d’activités différentes mais ayant la

caractéristique de ne pas être des flux de produits allant du producteur au

consommateur :

• Le recyclage dans l’économie de l’ensemble des déchets résultant de la

consommation ou de la production :

Emballages de toutes sortes (palettes, cartons, bouteilles, etc.),

Déchets de production, eaux usées, huiles usées, etc.,

Produits en fin de vie, soit jetables, soit usés (automobiles, micro-

ordinateurs, appareils ménagers, etc.) qu’ils soient repris ou non

par le vendeur,

Ordures ménagères, bien que leurs traitements ne soient pas

considérés comme étant du ressort de la logistique.

• Le traitement des flux de produits remontant plus ou moins directement un ou

plusieurs maillons de la chaîne logistique :

Produits refusés par le consommateur en VPC ou e-commerce,

Invendus (journaux, livres, restants de promotion, produits périmés

ou en limites de péremption, etc.),

Produits défaillants à échanger ou à réparer,

Produits défectueux rappelés par le producteur.

La logistique inversée est un vecteur en pleine expansion pour le recyclage des

déchets. Mais comme le note F. Allievi-Dorosz44, « la meilleure manière de recycler

est encore celle de produire moins de déchets !! ».

44 Logistique & Management, Vol. 13 – N°1, 2005 Le développement de bonnes pratiques logistiques dans le respect de l’environnement

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

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Par ailleurs, suite aux nouvelles directives européennes, toute entreprise devient

responsable des produits qu’elle fabrique jusqu’à leur recyclage et/ou destruction.

Pour cela la gestion des retours du consommateur au producteur doit être structurée.

Cette activité, contraignante au départ devient vite un avantage concurrentiel car elle

oblige à revoir l’organisation et les outils notamment du système d’information. De

plus en mettant en relief la notion de service rendu, l’entreprise va créer des relations

nouvelles avec ses fournisseurs et ses clients.

C’est ainsi que la contrainte réglementaire va devenir un argument marketing

auprès des consommateurs dont l’engouement pour le service après vente et les

produits recyclés est de plus en plus fort. Enfin sur le plan économique, le recyclage

des composants, en particulier des métaux, est source de revenu.

En devenant citoyenne et responsable, l’entreprise intègre les contraintes

réglementaires environnementales et fait évoluer sa stratégie dans le cadre d’une

démarche d’amélioration continue qui peut déboucher sur une certification ISO

14001. L’enjeu pour l’entreprise est maintenant de capitaliser sur les progrès faits

dans les métiers traditionnels et dans l’approche globale pour faire progresser son

organisation, notamment des fonctions support, ceci pour un meilleur service à ses

clients, donc à la collectivité.

Nous allons donc étudier dans cette troisième partie, comment la prise en compte

des contraintes environnementales par la supply chain va irriguer l’entreprise

notamment les fonctions support, puis l’entreprise dans sa globalité.

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3. LA SUPPLY CHAIN ET L’ENVIRONNEMENT, LEVIERS DE PROGRES

3.1. Prise en compte des contraintes environnementales par les fonctions transverses La fonction supply chain étant par définition une fonction transverse, la mise en

œuvre d’une démarche environnementale va impacter l’ensemble des autres fonctions

de l’entreprise donc particulièrement les achats, le marketing et la communication.

3.1.1. Les achats

La fonction achat a pour mission première de sélectionner les fournisseurs et de

négocier avec eux les conditions d’achat. Initialement créée afin de répondre à des

objectifs purement économiques, elle est le plus souvent non formée aux

problématiques sociales ou environnementales complexes qu’il faut désormais

intégrer.

L’enjeu pour la fonction achat va être d’intégrer la composante environnementale

dans les contrats. Elle va devoir faire adhérer les prescripteurs avec l’aide des

responsables de la supply chain, en leur demandant en particulier d’intégrer dans les

cahiers des charges à destination des fournisseurs les critères environnementaux

relatifs à leur métier. C’est par la formation de binôme acheteur-prescripteur voire

acheteur-prescripteur-fournisseur que le progrès pourra s’établir.

En faisant cette démarche, l’entreprise déclinera sa stratégie dans l’opérationnel et

prolongera sa mise en conformité avec la législation. Elle sera ainsi moins exposée

aux plaintes de consommateurs ou aux articles de médias, voire à des attaques

d’ONG. Par ailleurs, l’intégration de ces critères est une preuve que l’entreprise est

engagée dans une démarche de qualité environnementale.

Elle pourra ainsi s’appuyer sur un réseau de fournisseurs compétents qui vont

progresser avec elle et qu’elle pourra évaluer périodiquement sur les items partagés.

Cependant, l’intégration des contraintes environnementales aux pratiques d’achat

restant complexe, un réseau européen d’acheteurs responsables a vu le jour, The

European Green Purchasing Network. Ce réseau a pour but de rassembler, au niveau

européen, des acheteurs du secteur public et privé, ainsi que des fournisseurs et

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distributeurs soucieux de faire progresser les achats « verts ». Pour ce faire, il s’agit

de les aider à intégrer des critères environnementaux dans les cahiers des charges,

dans des domaines variés tels que les technologies de l’information, les fournitures de

bureau, les transports, le tourisme, l’eau, le packaging, les produits de nettoyage, etc.

Cette stratégie est née du double constat que les montants investis par les entreprises

pour acheter des biens et services représentent une part importante de leurs coûts de

fonctionnement, et que les collectivités gèrent également d’importants volumes

d’achats représentant en moyenne 12% du PNB des différents pays d’Europe.

Une stratégie d’achats responsables sera autant bénéfique sur le plan écologique

qu’économique. En effet :

• Les améliorations apportées, par exemple, via l’achat de matériel moins

gourmand en ressources ou énergie, permettent de réaliser des économies

significatives,

• Les achats verts améliorent la qualité et la fiabilité des achats,

• Ils stimulent également l’innovation, notamment dans le développement de

nouveaux produits et services,

• Enfin, ils constituent un indicateur important de l’engagement managérial

d’une entreprise dans la démarche de progrès continu que suppose déjà la certification

environnementale ISO 14001 ou EMAS.

Aujourd’hui, le champ de l’intégration de l’environnement s’est élargi. Si

historiquement, un produit responsable devait essentiellement avoir été fabriqué dans

des conditions compatibles avec le développement durable, aujourd’hui, les impacts

d’un produit tout au long de son cycle de vie sont intégrés. Ainsi sont désormais pris

en considération la provenance, la nature et les qualités écologiques éventuelles du

produit considéré.

L’enseigne française Nature & Découvertes a développé en 2000 une charte

partenariale dont les enjeux sont multiples et importants : il s’agit à la fois de

sensibiliser les fournisseurs à l’environnement, de s’assurer qu’ils respectent les

exigences de base et contribuent ainsi aux engagements pris par l’enseigne, et de leur

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donner envie de s’améliorer en leur demandant de répondre progressivement à toutes

les exigences.

Cette charte porte sur six points différents :

1. Les matériaux utilisés,

2. Les emballages,

3. Le recyclage,

4. La durabilité et la fiabilité des produits,

5. Le contrôle du respect des exigences environnementales sur les sites,

6. La politique environnement du fournisseur.

Dans un premier temps, cette charte a été communiquée à deux cents

fournisseurs : plus d’un tiers d’entre eux (représentant 61% des produits) l’avaient

signée en 2003, devenant de ce fait des fournisseurs partenaires. Nature &

Découvertes s’engage, en retour, à leur passer davantage de commandes, à les

impliquer dans ses choix stratégiques (comme le lancement de nouvelles gammes), et

à leur apporter l’accompagnement dont ils peuvent avoir besoin. L’enseigne s’engage

même, le cas échéant, à assumer une partie des coûts de la modification d’un produit

rendue nécessaire pour des raisons écologiques.

Dans un autre secteur, Philips Electronics, le troisième fabricant mondial de

matériel électronique grand public, a annoncé en 2003 sa volonté d’imposer à ses

50 000 fournisseurs une performance sociale et environnementale minimale. La

« Déclaration du fournisseur sur le développement durable » de Philips stipule que

ces derniers devront interdire le travail des enfants, le travail forcé et la

discrimination, protéger le droit des travailleurs à se rassembler et à négocier

collectivement, et obtenir la certification environnement ISO 14001. C’est

l’externalisation croissante des activités de fabrication qui a contraint l’entreprise à

étendre les normes éthiques, sociales et environnementales à ses fournisseurs.

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Pour instaurer un dialogue avec ses fournisseurs sur ce sujet partout dans le

monde, Philips a mis en place un outil d’autoévaluation de la performance et une

méthodologie d’audit à leur attention. Et le groupe a annoncé que le respect de ses

critères serait strictement pris en compte à l’avenir dans le choix de ses fournisseurs.

Les entreprises s’engagent, entraînant ainsi des Etats par le biais de marchés

publics. En effet, avec 16% du PIB45, la commande publique européenne constitue un

puissant levier pour favoriser la prise en compte du développement durable par les

entreprises. « Longtemps préoccupée par les possibles distorsions de concurrence, la

commission européenne n’a pas, par le passé, favorisé les « achats verts ». Mais en

2004, elle a pris conscience qu’elle pouvait utiliser ce levier pour accélérer

l’innovation en matière de technologies propres et elle a introduit dans la directive

sur les marchés publics la liberté d’imposer des critères environnementaux et

sociaux46 ».

Les Pays-Bas ont choisi de ne pas attendre : alors que leurs achats s’élèvent à 30

milliards d’euros par an, 23% d’entre eux incluent déjà des critères sociaux ou

environnementaux. Mais les élus ont trouvé ce taux insuffisant et le Parlement a voté

une loi en 2005 fixant l’objectif à 100% d’achats responsables d’ici 2010 pour les

commandes du gouvernement central et à 50% pour les autres acteurs publics.

Tout achat doit être « durable » sauf si l’on peut justifier que cela s’avère

impossible. Ainsi, « tout doit passer sous la houlette de l’écologie : de l’achat des

ordinateurs, en privilégiant des appareils qui consomment peu d’énergie, à la

construction de bâtiments à haut rendement énergétique, des meubles de bureau en

bois provenant de forêts gérées de manière durable au papier recyclable, des voitures

électriques à l’alimentation biologique des cantines publiques »47.

Les exemples d’entreprises (ou éventuellement de pays) ayant fait des efforts dans

ce domaine pourraient être nombreux. Toutefois, il convient de s’interroger sur la

question des responsabilités en cascade : une entreprise engagée dans une politique

socialement responsable sélectionnera ses fournisseurs selon des critères sociaux et

environnementaux.

45 Source : Les Echos, 30 Mai 2006, Dossier « Le développement durable s’inscrit dans le paysage », Pays-Bas : les députés votent pour des achats 100% écolo 46 Ibid. 47 Ibid.

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Mais qu’en est-il des propres sous-traitants de ces fournisseurs ? Et comment aller

vérifier leurs méthodes de travail puisqu’ils restent, a priori, inconnus de l’entreprise

cliente ? Par ailleurs, on constate que de plus en plus la sélection des fournisseurs se

fait désormais en fonction de leur capacité à intégrer la notion de développement

durable. Cette intégration étant d’autant plus facile à mettre en œuvre par les grosses

structures, qu’adviendra-t-il des petites entreprises pour qui cette intégration sera plus

coûteuse et non rentable sur le court terme ?

Un autre point à prendre en considération a trait à l’impact économique des

différentes alternatives d’achats pour un produit donné, via les règlements payés aux

fournisseurs, le nombre et la qualité des emplois ainsi créés, l’impact sur l’économie

locale, etc. Un exemple parlant est celui des achats de caoutchouc du groupe

Michelin, également répartis entre le caoutchouc naturel issu de la culture de l’hévéa

et le caoutchouc synthétique issu de l’industrie.

Dans son premier rapport de développement durable, paru en 2003, le groupe fait

ainsi apparaître que l’impact en termes d’emploi de ces deux options est radicalement

différent, puisque le caoutchouc naturel représente dans le monde un million

d’emplois dans l’agriculture, essentiellement dans les pays du Sud, tandis que le

caoutchouc synthétique fait vivre « seulement » trente mille personnes dans

l’industrie, essentiellement dans les pays occidentaux.

Il est bien évident que de telles considérations doivent être prises en considération

afin d’enrichir la réflexion de l’entreprise sur sa politique d’achats et sa responsabilité

vis à des vis des fournisseurs situés dans les pays en voie de développement.

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

59

Source : Management industriel et logistique, G Baclin, Ed Economica

Figure 5: Processus d'achat et de développement durable

L’exemple du groupe Carrefour est à ce titre significatif : le groupe a développé

une structure « supra entreprise » pour mener sa politique, il s’agit du club Démèter

Environnement et Logistique. En partant du principe qu’une action développement

durable impacte tous les maillons de la chaîne logistique, le distributeur a regroupé de

nombreux acteurs (près de 70 fournisseurs importants, collectivités territoriales,

établissements publics et des ONG) afin de définir ensemble les enjeux principaux sur

ses maillons amont et aval, et envisager les solutions possibles. Par ailleurs, de

nouveaux axes de travail ont été définis avec l’ADEME fin 2004 car la collaboration

a pour vocation d’être gagnante-gagnante pour les acteurs.

D’un côté, l’industriel profite de l’expertise dans les domaines de prédilections de

l’Agence, notamment concernant la prévention des déchets et des pollutions, la lutte

contre le réchauffement climatique et la maîtrise de l’énergie. A l’inverse, Carrefour

offre à l’ADEME des problématiques terrain où tester des solutions, des technologies

nouvelles dont elle pourra ensuite mesurer les effets et qui pourront servir de vitrine

pour les éventuels autres candidats. Le but final de cette collaboration est inscrit en

toutes lettres dans l’accord cadre signé entre les deux parties : « l’action conjointe du

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distributeur et de l’agence permettra de sensibiliser les collaborateurs, fournisseurs,

prestataires et clients de Carrefour aux thématiques environnementales ».

3.1.2. Le marketing

La viabilité du concept environnemental - développement durable sera pérenne

seulement si les consommateurs comprennent et soutiennent cette démarche, c’est-à-

dire préfèrent des produits responsables à leur concurrent. Le marketing a donc un

rôle crucial à jouer, en mettant en avant la valeur ajoutée des produits mis sur le

marché afin que le produit « rencontre » son public.

Pourtant, marketing et communication sont accusés de stimuler inutilement la

surconsommation, attirant de ce fait les critiques des militants antimondialistes.

Naomi Klein, dans son livre No logo – La tyrannie des marques48, dénonce

l’omniprésence des marques mondialisées à la fois dans nos sociétés et dans nos vies,

mais aussi dans nos têtes. Ainsi, l’auteur voit dans ces marques le symbole des abus

du capitalisme libéral, tout en sachant qu’une marque connue est facteur d’exposition

et de vulnérabilité de l’entreprise. Il considère que les entreprises vendent plus qu’un

simple produit, toujours imitable et souvent imité, elles vendent également un

imaginaire, une philosophie, un style de vie, une façon d’être, etc. Ainsi, ce que

cherchent les marques se trouve au-delà de l’acte d’achat : c’est un accès à tous les

aspects de notre vie quotidienne (vêtements, cinéma, culture, etc.).

L’enjeu du marketing va être d’apporter des atouts à l’entreprise en se mettant au

service du développement durable. En effet, marketing et communication étant

souvent perçus comme les moteurs de nos modes de consommation, ils sont

certainement les meilleurs outils pour faire changer nos habitudes d’achats et faire

progresser un marché en redéfinissant ses critères de qualité. Mais pour cela, le

service marketing doit inciter les gens, non pas à consommer moins, mais à

consommer mieux.

Ce changement va de pair avec une remise en cause des traditionnels « P » du

marketing, à savoir :

• Le Produit car son utilité intrinsèque est remise en cause du fait de la

consommation de ressources naturelles qu’il occasionne, des conditions sociales de sa 48 Editions Acte Sud, Arles, 2001

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61

production, des valeurs et modèle culturel qu’il véhicule, voire pour son impact

environnemental en fin de vie,

• Le Prix qui est aussi sujet à débat avec le développement du commerce

équitable et des achats responsables. En effet il donne souvent une information fausse

sur le coût global du produit en ce sens qu’il n’intègre pas le coût social ou

environnemental. Il est souvent jugé trop cher alors qu’il ne permet pas toujours au

producteur de vivre de son travail. De ce fait le consommateur a l’impression dans

certains cas de payer avant tout la publicité nécessaire pour le faire connaître,

• La Publicité et la promotion, incitation à la consommation qui s’exerce de

manière peu responsable, cherchant avant tout à créer un besoin,

• Le Packaging, contesté pour son utilité intrinsèque mais aussi pour

l’accumulation des déchets qu’il entraîne.

Dès lors, un dilemme fondamental émerge entre le double objectif du marketing

(faire vendre, stimuler la consommation pour générer du profit) et la double ambition

du développement durable qui a pour but d’une part de faire de la rentabilité

économique non pas une fin en soi mais un moyen de développement au service des

personnes, et d’autre part de remédier aux déséquilibres générés par nos modes de

consommation (utilisation effrénée des ressources, génération de déchets, inégalités

riches / pauvres).

La politique marketing d’entreprises est aujourd’hui placée sur le devant de la

scène, certaines se faisant même interpeller par les pouvoirs publics, les ONG ou les

associations de consommateur. Après les attaques historiques contre les pratiques de

l’industrie du tabac, ces pratiques se retrouvent dans d’autres secteurs d’activité. Il est

donc probable qu’au fur et à mesure que l’attention se portera sur les impacts de nos

modes de vie et de consommation, ce mouvement ira en s’amplifiant.

Dans ce contexte, les entreprises ne pourront pas toujours adopter une position

défensive consistant à dire qu’elles ne sont pas responsables du comportement des

consommateurs, et que ceux-ci sont libres de leur choix. En effet, pour que la

responsabilité du consommateur puisse s’exercer en connaissance de cause, il faut

avant tout que les entreprises se comportent de manière responsable, dans la nature

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des produits qu’elles développent, mais aussi dans la façon dont elles informent les

consommateurs sur l’impact de leurs produits, dans les outils de promotion qu’elles

mettent en place, dans les publicités qu’elles diffusent, etc.

C’est dans cet esprit que l’enjeu pour les entreprises est de prendre en compte

dans leur marketing les aspects liés au développement durable et les impacts sur les

modes de consommation, à l’instar de l’association internationale des producteurs de

détergents qui a lancé il y a quelques années une campagne internationale baptisée

« Wash right » (Dosez juste) incitant les consommateurs à mieux doser leur lessive et

à laver à basse température pour économiser de l’énergie.

Aussi, pour Elisabeth Laville49 il devient urgent de réinventer, dans un nombre

croissant de secteurs, le marketing et de le rendre plus responsable en le fondant sur

les « P » du développement durable, à savoir les Personnes, la Planète, les Profits et le

Progrès de l’humanité. Le marketing a donc un rôle unique à jouer dans cette

transition vers une consommation durable en offrant de meilleurs produits ou services

contribuant à une meilleure qualité de vie, mais aussi en développant de nouveaux

comportements de consommation, en éduquant les consommateurs pour les informer,

les sensibiliser, et les aider à faire leur choix en parfaite connaissance de cause. Il doit

par conséquent proposer, en coopération avec la supply chain :

• Des produits responsables qui ont une valeur ajoutée en termes de qualité et de

services rendu, mais aussi en termes sociaux ou environnementaux,

• Un prix juste pour tous, du producteur au consommateur, comme le proposent

les acteurs du commerce équitable, tel Max Havelaar, mais aussi des enseignes

comme Carrefour qui s’attache, au sein de ses filières qualité Carrefour, à rémunérer

justement les efforts demandés aux agriculteurs en matière de qualité,

• Une communication transparente et pédagogique.

Par conséquent, « bien compris et pratiqué, le marketing responsable est donc une

spirale vertueuse qui permet d’innover et de se différencier de la concurrence pour

échapper au tourbillon de la baisse des prix, de proposer à ses clients du sens et des

49 E. Laville – L’Entreprise Verte – Ed. Village Mondial

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valeurs communes, à une époque où tout le monde ne parle que marketing dans la

relation »50.

Lorsque Howard Schultz a créé l’enseigne Starbucks dans les années 80, c’était

avec l’ambition d’être « plus qu’une entreprise qui vend du bon café et prend votre

argent » : il voulait faire de ses cafés un « troisième lieu d’échange », après la famille

et le travail. Depuis, le succès de l’entreprise s’est bâti sur l’excellente qualité des

produits, sur la qualité de service et la culture du café, mais aussi sur l’attention

permanente portée aux employés depuis les débuts.

Sensibilisé à ce sujet par les expériences professionnelles malheureuses de son

père, Schultz a voulu développer une entreprise « respectueuse de ses employés,

révolutionnant les ressources humaines dans le commerce de détail ». Pour ce faire, il

a élargi les droits de couverture sociale de ses employés aux contrats à temps partiel

et aux concubins non mariés, a inventé les plans et stock-options et multiplié les

initiatives de dialogue entre la direction et les salariés.

Le résultat engendré est un taux de turnover extrêmement faible pour le secteur

(55% contre 200 à 400% pour cette industrie), en dépit de salaires relativement bas.

Décidé à « construire une entreprise ayant une âme », Schultz a rapidement étendu

ses préoccupations aux fournisseurs de l’entreprise en développant dès 1995 un code

de conduite ambitieux dans les pays producteurs de cafés, ce qui lui vaut d’apparaître

aujourd’hui comme un pionnier du commerce équitable à grande échelle.

En partenariat avec des ONG et des entreprises, une politique environnementale et

humanitaire a également été développée avec des cafés bios (Green Mountain) ou

cultivés selon les règles du développement durable (Shade Grown Mexico),

l’enseigne intégrant par ailleurs l’écologie à sa politique de distribution (avec

l’ouverture du premier supermarché écologique de Sainsbury à Greenwich) comme à

sa communication (utilisation pour ses brochures du papier produit à partir de déchets

agricoles).

L’engagement de Starbucks lui a valu l’adhésion du public, « à la limite du culte »

selon les spécialistes du secteur. Ainsi, depuis son introduction en Bourse en 1992,

Starbucks connaît une croissance assez forte (25 à 30% par an) et compte aujourd’hui

50 Ibid. p. 277

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près de quatre mille cafés dans 25 pays. En outre, Howard Schultz a reçu plusieurs

récompenses honorifiques dont le prix Corporate Citizenship du Citizen’s Fund en

2000, la marque étant régulièrement en tête des classements par la presse.

Cet exemple prouve qu’un marketing responsable, qu’il s’exprime dans les

produits, les packagings, les choix de distribution, la politique de prix ou dans la

publicité, est un facteur de différenciation, d’innovation et de fidélisation, réconciliant

les valeurs éthiques et la valeur économique. D’autres facteurs clés de succès d’un

marketing responsable peuvent être cités, tels :

• L’inscription de l’engagement dans la raison d’être de la marque et des

produits afin d’éviter tout opportunisme ou coup de publicité : la marque doit donc

servir la cause autant qu’elle s’en sert,

• L’engagement doit s’exprimer par une accumulation de détails révélateurs,

dans les produits et sur les packagings, dans la communication, dans les programmes

de fidélisation ou de promotion,

• Le marketing responsable n’est que la partie émergée de l’iceberg, en ce sens

qu’il nécessite un engagement profond et durable de toute l’entreprise : il ne s’agit

pas uniquement d’augmenter les ventes, mais de construire la crédibilité et la

réputation de la marque à long terme, en impliquant les clients, mais aussi les

employés, les fournisseurs et d’autres partenaires,

• L’engagement du marketing responsable doit être servi par une approche

responsable de la communication,

C’est donc dans cette nouvelle optique « qu’il faut former les équipes à la

problématique environnementale, non seulement parce que tout le monde s’y

intéresse, mais aussi parce que les entreprises qui ne le feront pas seront demain

montrées du doigt comme les fumeurs » selon la psychosociologue Danielle Rapoport,

dirigeante de DRC Conseils. Et de conclure « Mettez de l’éthique dans votre

marketing, mais ne faites pas du marketing de l’éthique ».

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

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3.1.3. La communication

La communication responsable, qui va de pair avec un marketing responsable, se

retrouve aujourd’hui au cœur des stratégies des entreprises, et ce, pour plusieurs

raisons. En premier lieu car, comme on l’a vu, la prise en compte de l’environnement

est une révolution culturelle qui suppose de changer de paradigme, de repenser la

vision du monde et les valeurs qui fondent le capitalisme moderne. Pour qu’un tel

changement dans les esprits et les pratiques ait lieu, il faut être à même de pouvoir en

parler : c’est pourquoi tout naturellement les entreprises s’engageant dans cette voie

éprouvent le besoin de prendre la parole sur ce qu’est la protection de

l’environnement, le développement durable, leur compréhension de ce qu’il implique

pour leur activité et leurs premiers pas dans cette direction, (Cf. annexe 3).

La communication reste le seul moyen dont disposent les entreprises pour

s’engager publiquement et par conséquent gagner le soutien de leurs différents

publics internes et externes. De ce fait, elle a un effet de stimulation et

d’entraînement, car en prenant la parole sur sa responsabilité sociale ou

environnementale, l’entreprise s’engage à poser des actes à la hauteur de ses mots,

(Cf. annexe 4).

Désormais, la communication doit pouvoir être considérée comme un acte

responsable de l’entreprise. Ainsi, Luciano Benetton51, PDG fondateur de la marque

italienne de vêtements, confirme que « nous avons un outil unique pour communiquer

dans le monde entier, puisque nous sommes implantés dans cent vingts pays, et il

serait cynique de gaspiller cela pour faire l’autopromotion de nos produits. Nous

avons choisi de parier sur l’intelligence de nos clients en consacrant nos espaces

publicitaires à des questions de société plutôt qu’à des messages répétitifs sur nos

produits ».

L’objectif de la communication devient désormais commun à celui du marketing,

autrement dit faire consommer mieux et aborder d’autres problématiques sociales ou

environnementales sur lesquelles l’entreprise souhaite prendre la parole. De plus, la

communication contribue à créer la notoriété de la marque et de son offre, tant au

niveau interne qu’institutionnel, en faisant partager un projet d’entreprise et en faisant

connaître les valeurs communes. 51 La lettre d’Utopies, spécial « Communication responsable », 1999

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Cette incursion de la responsabilité sociale et environnementale dans la publicité

est parfois jugée choquante, et les marques qui s’y sont risquées ont, dans certains

cas, été accusées d’utiliser à des fins commerciales les causes sociales ou

environnementales qu’elles entendaient défendre ou promouvoir. Mais le nombre de

publicité réclame, cherchant à tout prix à faire acheter le produit, quitte à l’entourer

de vertus imaginaires ou à le faire paraître indispensable à ceux qui n’en ont aucun

besoin réel, peut être jugé tout aussi choquant.

Pour le sociologue et philosophe Gilles Lipovetsky, l’attitude de ceux qui

s’indignent de cette « articulation entre éthique et business » relève d’une frilosité

dépassée : « Je trouve, au contraire, que c’est un progrès par rapport à des publicités

qui étaient abêtissantes et aliénantes. Je suis ulcéré par ces restes de moralisme qui,

en disant que Benetton exploite les bons sentiments à des fins de profit, mettent des

barrières à tout ce qui est expérimentation. Ce type de publicité ose et amène les gens

à s’interroger sur ce qu’est la pub. Ces publicités ne font plus rêver, elles sont un

genre de message totalement en accord avec notre société » déclarait-il au quotidien

Libération en octobre 1993.

La communication responsable peut revêtir différentes formes :

• Respecter l’éthique et chercher à limiter les impacts négatifs de la publicité,

• Constituer avant tout un discours sur la responsabilité sociale (soit l’entreprise

est engagée dans cette voie, soit elle décrit les efforts menés dans ce sens),

• Porter des actions positives, en termes de responsabilité sociale ou

environnementale.

A. Réduire les impacts négatifs de la publicité

La communication faisant partie de l’activité normale des entreprises, la

communication doit donc être pratiquée de manière plus responsable, au même titre

que les achats ou la fabrication des produits. Pour ce faire, il faut commencer par en

réduire les impacts négatifs. Le ministère de l’Ecologie et du Développement durable

estime que les prospectus, publicités ou journaux gratuits s’entassent dans les boîtes

aux lettres à raison de 40 kilos par an et par foyer. En outre, ces supports nécessitent

beaucoup d’encre et de papier traité. Par ailleurs, l’entreprise peut minimiser la

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pollution visuelle (affichage) ou sonore (radio, télévision) liée à ses communications.

David Ogilvy, l’un des pionniers de la publicité, déconseillait à ses clients d’utiliser

pour leur communication l’affichage en bordure de route, en soulignant le fait qu’un

automobiliste n’a jamais le temps de lire plus de six mots sous peine d’avoir un

accident, et en insistant sur le fait que six mots suffisent pour un slogan mais ne

laissent jamais le temps de donner une information véritablement intéressante.

Aujourd’hui encore, nombre d’associations militent pour une limitation des

panneaux publicitaires routiers, argumentant que l’affichage extérieur est une forme

de pollution visuelle qui distraie l’attention des automobilistes et aggrave les risques

d’accidents.

B. Communiquer sur les engagements sociaux et environnementaux de

l’entreprise

Cette deuxième approche, plus classique, consiste à faire porter le message sur la

stratégie et les actions menées par l’entreprise en matière de responsabilité sociale et

environnementale. Si cette approche est la plus fréquente, elle est également souvent

critiquée comme emblématique d’une « récupération » superficielle du

développement durable à des fins commerciales.

Des associations internationales, travaillant sur ces thèmes, comme Corpwatch

(qui s’est donné pour mission de dénoncer les pratiques non responsables des

entreprises multinationales), ont même créé un terme pour désigner cette présumée

récupération : greenwashing. Ce terme renvoie explicitement au blanchiment

(d’argent) pour évoquer le verdissement (d’image), autrement dit la volonté supposée

de l’entreprise de racheter littéralement ses fautes écologiques à coup

d’investissements et de discours publicitaires sur sa conscience et ses pratiques

environnementales.

Ainsi, Séverine Millet, de l’alliance pour la planète déplore qu’en donnant une

image « verte » à des entreprises et des produits qui ne le sont pas, ce « blanchiment

écologique » minimise la nécessité de changer nos consommations. Ecologie et

publicité ne font pas bon ménage, car la publicité pousse à consommer. Or, la

consommation va souvent à l’encontre de la protection de l’environnement et

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l’écologie n’est pas destinée à vendre des produits et des services52. L’alliance

dénonce ainsi sur son site des publicités utilisant sans scrupule des arguments

écologiques pour faire vendre53, (Cf. Annexe 5).

Pour une entreprise qui déploie des efforts sincères, difficiles et souvent coûteux

(en argent, en temps et en énergie) pour rendre ses pratiques plus responsables,

l’enjeu de la communication va être d’en faire un point important d’attractivité pour

ses clients et de différenciation sur son marché, lui procurant ainsi un avantage

commercial indéniable. C’est le cas par exemple de The Body Shop ou Nature &

Découvertes qui communiquent sur leur engagement responsable au point d’être

littéralement incorporé à leur offre produit.

La responsabilité sociale est donc une nouvelle opportunité pour la

communication en permettant de concevoir des messages qui ont du sens, parlent

vrai et reconnectent le public à une réalité positive où il ne s’agit plus tant de

consommer que de consommer mieux.

Mais l’entreprise qui choisit de communiquer sur ses pratiques responsables doit

s’assurer de mettre en cohérence les pratiques et les discours, en évitant notamment

d’afficher des engagements dont l’ambition serait contradictoire avec les actions

effectivement menées sur le terrain. En outre, elle a différents outils à sa disposition :

• La promesse d’amélioration : il s’agit d’un engagement pris publiquement,

le plus souvent en commençant par reconnaître ses dysfonctionnements ou ses

impacts problématiques. Ainsi de grands groupes multinationaux comme Shell ont

découvert qu’il y a toujours moins de conséquences néfastes à reconnaître les

difficultés et sa propre impuissance à les surmonter dans l’immédiat, plutôt qu’à nier

des problèmes dont tout le monde connaît l’existence. Au tout début de sa démarche

de développement durable, le groupe a publié une annonce de presse institutionnelle

avec le slogan « Protéger les espèces menacées ou en devenir une : entre les profits

et les principes, avons-nous le choix ? ».

• Le dialogue : instaurer un dialogue ouvert et transparent sur les succès de

l’entreprise, mais aussi sur les problèmes rencontrés dans le cheminement vers le

52 Libération, 11 Décembre 2006 53 http://www.lalliance.fr/xmedia/atelier_BVP/publicites.html

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développement durable est également une voie vers la communication responsable.

Accepter de parler de ses problèmes en parfaite transparence et en toute humilité est

l’occasion de recueillir des conseils et d’impliquer les parties concernées dans une

solution allant dans l’intérêt de tous. En outre, le dialogue permanent (dont la

faisabilité est liée à l’ère Internet) permet souvent d’anticiper et de désamorcer les

conflits potentiels. Dans le cadre de sa démarche de développement durable, le

groupe Shell a mis en œuvre une stratégie similaire avec sa campagne « Tell Shell »

(Dites à Shell) au cours de laquelle elle a sollicité un retour d’informations sur la

perception de ses activités par les différentes parties prenantes. L’objectif n’était pas

de répondre point par point à chaque critique, mais simplement d’en prendre acte et

de mettre en place des points de progrès notamment par une démarche d’innovation.

• Le compte rendu : il est possible de rendre compte des actions responsables

menées par l’entreprise, souvent pour faire suite à des engagements pris

précédemment ou encore pour rendre visible un engagement non communiqué.

L’enjeu est de pouvoir rendre des comptes sur son engagement pour l’avenir, et de

donner ainsi une visibilité et une cohérence vis-à-vis de l’extérieur et de l’intérieur.

Cela permet également la valorisation en externe des efforts fournis, développe en

interne la fierté d’appartenance à l’entreprise et mobilise l’ensemble des salariés voire

des partenaires. Pour exemple de cette action, on peut citer la campagne menée par la

SNCF autour de sa démarche de service, en impliquant à la fois ses équipes et ses

clients : fin 1997 plus de quinze mille cheminots volontaires se transformèrent en

« enquêteurs », dans le cadre d’un projet initié par la direction pour, selon l’ancien

président Louis Gallois « mettre toute l’entreprise en mouvement, avec un objectif

majeur : satisfaire les clients, tous les clients, et en conquérir de nouveaux ». Les

résultats de cette première enquête furent restitués de manière transparente aux clients

et une seconde vague d’engagements furent pris en avril 1998 avec la mise en place

de procédures de dédommagements lorsque les engagements n’étaient pas respectés.

Ce résultat montre donc une démarche de progrès continu, avec une forte implication

des équipes (plus efficace que des sessions de formation) et une réelle politique de

transparence vis-à-vis des clients (plus efficace qu’une campagne de publicité grands

médias).

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C. Concevoir une communication qui soit une action positive en termes

de responsabilité sociale et environnementale

Ce type de communication, qui constitue un acte responsable de l’entreprise, n’est

plus fondé sur la volonté de réduire les impacts négatifs de la communication, mais

sur celle d’utiliser le « porte-voix » que représente la publicité pour faire passer des

messages intrinsèquement utiles et souvent pédagogiques, visant à partager tout le

savoir accumulé par l’entreprise. Ce type de communication peut être vu sous trois

angles :

• Dénoncer les mythes, en alertant l’opinion publique par rapport aux enjeux

que l’entreprise juge importants pour son marché et son éthique, en dénonçant les

mythes qui peuvent fonder une partie de l’offre concurrente, l’entreprise veut

dénoncer des messages trompeurs de concurrents. C’est ainsi que The Body Shop a

révolutionné l’industrie cosmétique en dénonçant l’hypocrisie des promesses

antirides et en repositionnant son discours sur l’entretien et la santé de la peau, la

naturalité des produits et la nécessité du commerce équitable pour les ingrédients

naturels, le refus de la tyrannie de la jeunesse ou des tests sur les animaux, etc. De

même, Apple a historiquement fait face à IBM au début des années 1980 avec l’idée

que l’informatique n’est pas faite pour les informaticiens mais pour développer la

créativité de chacun, y compris celle des enfants handicapés. En dénonçant les

mythes, l’entreprise a pour objectif d’informer et de sensibiliser le public, tout en lui

exposant de manière simple et pédagogique les problèmes autant que les solutions

alternatives (le plus souvent développées par l’entreprise). C’est ensuite au

consommateur de faire son choix en connaissance de cause, et en fonction de ses

propres valeurs.

• Responsabiliser le consommateur, ce qui va permettre à l’entreprise d’avoir

un engagement réciproque avec ses clients afin de rendre ses actes plus

compréhensibles et donc plus efficaces. Ceci peut être illustré par la campagne des

hypermarchés Leclerc visant à supprimer les sacs plastiques de caisse pour les

remplacer par un sac plus résistant, vendu 15 centimes et remplacé indéfiniment. On

peut également citer la marque de maquillage MAC qui incite ses clients, avec le

slogan « au nom de la protection de l’environnement qui nous tient à cœur, comme à

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vous » à lui rapporter pour recyclage ses contenants en plastique après usage, avec de

plus un rouge à lèvre gratuit après six produits ramenés.

• Informer, grâce à la conception d’outils de communication ayant pour but

d’apprendre aux consommateurs à distinguer les produits et leurs qualités pour

pouvoir juger, comparer, et donc mieux acheter. L’on retrouve cette information avec

la Fnac qui en a fait son point fort et la source de sa crédibilité avec les « dossiers

tests », où le laboratoire indépendant de l’enseigne note et compare les différents

produits proposés sur toute une série de critères pertinents pour le client. Une

enseigne, Nature & Découvertes, a poussé l’information encore plus loin en

inscrivant la pédagogie dans son nom et sa mission. La quasi-intégralité du budget de

communication de l’enseigne française est consacrée, depuis ses débuts, à des actions

de pédagogie générale sur la nature, proposées le plus souvent gratuitement (ou

contre une participation symbolique) à ses clients : sorties terrain en famille pour

observer les oiseaux ou apprendre à connaître les champignons (souvent co-animés

par des associations spécialisées), ateliers pour les enfants, conférences sur des

thèmes naturalistes, etc. Dans ce cas, la communication est en quelque sorte un

produit gratuit de la marque, dont l’offre est constituée de produits (payants)

permettant de découvrir la nature et de s’en rapprocher. L’intérêt d’une telle approche

est que, dans tous les cas, l’entreprise contribue à élever le niveau de connaissances et

d’exigences de ses clients, ce qui est une façon de s’obliger à progresser encore pour

mieux les satisfaire.

Ainsi, l’une des caractéristiques premières de la communication éthique est que le

message de l’entreprise (le fond) doit déterminer la forme et le média employés pour

le dire. L’entreprise doit appliquer quelques règles, éminemment responsables, telles

que :

• Ne pas parler pour ne rien dire et avoir à l’esprit que l’impact d’une

communication engagée est fonction de son contenu, plus que de sa forme. Si la

forme peut faire rêver, le contenu obéit au principe de réalité et ne peut donc

s’appuyer que sur les engagements concrets pris par l’entreprise, les résultats obtenus

et l’action qu’elle mène au quotidien,

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• Utiliser des supports moins classiques mais tout aussi intéressants, comme

The Body Shop qui affiche sur ses sacs de caisse et camions de livraison quelques

« maximes » qui résument sa philosophie ou des conseils écologiques pratiques au

quotidien,

• Profiter du nom de l’entreprise s’il est explicite : les noms de The Body Shop,

Nature & Découvertes, The United Colors of Benetton rendent suffisamment compte

de la vocation des marques concernées pour permettre à celles-ci, dans leurs

publicités, d’aborder des sujets plus riches et plus différenciateurs que la simple

description de leurs activités,

• Préserver l’humilité du ton en se souvenant que la communication responsable

attire parfois la suspicion mais aussi que les entreprises visiblement engagées sont les

plus surveillées, par l’opinion publique et les ONG, mais aussi par les concurrents ou

les journalistes en quête d’un scoop.

3.2. Un nouvel atout pour l’entreprise

3.2.1. L’environnement, une composante de la création de la valeur

Même si elle a autrefois fait ses preuves pour satisfaire les besoins primaires,

l’approche strictement productiviste (développer les revenus par une seule efficience

de la production) est désormais insuffisante face à la demande croissante d’une

économie responsable, concernée par la manière dont les ressources sont utilisées au

service du bien-être des populations d’aujourd’hui et de demain.

C’est dans ce contexte que la dimension économique ne peut plus seulement se

réduire à sa seule facette financière, et à la valeur sur le marché des transactions

passées par l’entreprise et comptabilisées dans ses livres. Elle doit désormais prendre

en compte le goodwill qui représente l’écart entre cette valeur réelle et la valeur

financière mesurable (actif net, valeur de rendement…). Le goodwill comprend

traditionnellement le capital marque, la position stratégique, les alliances, le capital de

connaissance. On estime qu’en moyenne 35% de la valeur réelle d’une entreprise

provient d’éléments difficilement mesurables pour les responsables financiers54.

54 Low & Siesfield, 1998

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

73

Les marchés de capitaux prenant de plus en plus en considération des éléments

nouveaux comme la réputation, la responsabilité vis-à-vis des actionnaires,

l’engagement éthique, social, sociétal, etc., il est évident qu’une bonne performance

sur les marchés financiers représente un indicateur de succès de l’entreprise. Une

assise financière permet une rémunération compétitive pour les actionnaires et attire

des nouveaux capitaux destinés à financer la croissance, gagner la confiance des

clients, motiver les salariés et attirer les talents et les expériences des futurs employés.

Par le respect des réglementations internationales et par son comportement

éthique, l’entreprise va attirer les investisseurs. En effet, à performance financière

comparable, une entreprise qui se développe en intégrant les contraintes

environnementales diminue ses risques d’accidents industriels, environnementaux et

sociaux et surtout augmente son capital d’excellence et son image. Il est à noter que

les revues financières donnent une place de plus en plus importantes aux valeurs

« vertes ».

Source : Mettre en pratique le développement durable, O Dubigeon, Coll. Village Mondial

Figure 6 : Evolution de la valeur d'une entreprise

En complément, suite à une enquête réalisée par la SOFRES en 2002 sur le thème

du développement durable55 auprès d’un panel de 600 leaders d’opinion européens

55http://www.tns-sofres.com/etudes/corporate/070602_dvptdurable.pdf Enquête réalisée par la Sofres auprès d’un panel de 600 leaders d’opinion européens. Réalisation du 28 mars au 14 avril 2002. Pays

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

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(ou euroleaders : cadres dirigeants de grandes entreprises, experts financiers,

journalistes économiques et financiers, enseignants en gestion, finance et

management en grandes écoles et universités), l’analyse montre que 58% des

euroleaders interrogés pensent que l’émergence des thèmes du développement

durable et de l’investissement socialement responsable traduit une évolution profonde

des mentalités. 30% des euroleaders estiment que la sensibilité aux thèmes du

développement durable a déjà eu une influence importante sur les comportements des

grandes entreprises (11% sur celui des investisseurs financiers et 32% sur celui des

décideurs politiques), alors que 51% croient plutôt à une influence importante à

l’avenir pour les grandes entreprises et les décideurs politiques (et 46% pour les

investisseurs financiers).

Par ailleurs 66% des sondés pensent que l’intérêt porté aux enjeux de

développement durable et d’investissement socialement responsable aura une

influence forte sur l’attention portée par les décideurs publics et privés à la

préservation de l’environnement et des ressources naturelles, et 50% croient que cela

aura une influence forte sur l’attention portée par les entreprises aux conséquences

sociales de leurs décisions. A l’inverse, le tiers-monde apparaît oublié : une très forte

majorité des répondants ne voit pas d’impact important sur l’attitude des entreprises

comme des Etats à son égard (58% pour les Etats, 75% pour les entreprises).

Enfin, un des leviers importants agissant sur le comportement socialement

responsable des entreprises est celui du financement, lui-même corrélé à la

performance globale de l’entreprise.

3.2.2. Mesure de la performance globale

Si l’on veut changer la façon dont fonctionne l’entreprise, il ne suffit pas de

redéfinir ses objectifs, sa mission et sa raison d’être ; il faut en premier lieu changer la

manière dont on évalue sa performance et dont on mesure son succès. Cette idée

provient de la réflexion menée par différentes instances et groupes de travail au

niveau international pour redéfinir la notion de progrès des nations à partir de la

perspective globale du développement durable.

couverts : Allemagne, Espagne, France, Italie, Royaume-Uni, Benelux (100 interviews par pays ou zone).

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75

L’idée que le PNB ou le PIB, indicateurs purement économiques, ne suffisent pas

pour apprécier le niveau de développement d’un pays, et que l’on ne peut pas

considérer l’augmentation des dépenses et de la consommation comme un indice

unique de progrès, est de plus en plus répandue.

On l’a vu, l’idée fondatrice du développement durable est qu’il est possible de

créer simultanément de la valeur sur les trois pôles que sont la société,

l’environnement et l’économie. D’où cette notion, lancée par John Elkington

fondateur du cabinet anglais SustainAbility, du triple bottom line pour évaluer la

performance de l’entreprise sur le résultat financier mais aussi sur son bilan social et

environnemental :

• Social : conséquences sociales de l’activité de l’entreprise pour l’ensemble de

ses parties prenantes que sont les employés (conditions de travail, niveau de

rémunération, non discrimination, etc.), les fournisseurs, les clients (sécurité et

impacts psychologiques des produits), les communautés locales (nuisances, respect

des cultures) et la société en général.

• Environnemental : compatibilité entre l’activité de l’entreprise et le maintien

des écosystèmes. Il comprend une analyse des impacts de l’entreprise et de ses

produits en terme de consommation de ressources, production de déchets, émissions

polluantes, etc.

• Economique : performance financière « classique » qui impacte la valeur

boursière de l’entreprise mais aussi sa capacité à contribuer au développement

économique de la zone d’implantation de l’entreprise et à celui des parties prenantes,

respect des principes de saine concurrence (absence de corruption, d’entente, de

position dominante, etc.)

En effet, la mesure de la performance de l’entreprise est essentielle, comme le

rappelle Ben Cohen, fondateur de Ben & Jerry’s : « si vous êtes au régime, vous vous

pesez régulièrement, et c’est le progrès que vous mesurez qui vous stimule à

continuer ou au contraire à modifier votre régime pour mincir davantage et faire de

votre régime un succès. Dans une entreprise, la seule façon de mesurer le succès est

de compter l’argent qu’il vous reste à la fin de l’année. Et comme c’est la seule chose

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que l’on mesure, c’est le seul objectif que les membres d’une entreprise se motivent à

atteindre (…). C’est pourquoi nous nous sommes dit, chez Ben & Jerry’s : si la

source du problème se trouve dans la façon dont nous mesurons notre succès, c’est là

qu’il faut agir. Nous avons alors imaginé d’avoir un double bilan de notre activité en

intégrant à notre rapport annuel, à côté du rapport financier qui mesure la valeur

économique créée à la fin de l’année, un rapport social et environnemental qui

mesure notre valeur ajoutée pour la communauté56 ».

La poursuite du triple bottom line n’est pas exempte de difficultés car l’objectif

est la prise en compte des trois dimensions de la performance, donc un équilibre

dynamique difficile à atteindre, car comme le souligne Bill Mc Donough : « le tout

écologique n’est pas plus la panacée que le tout économique. Le but est donc de

résoudre l’équation que forment ces trois dimensions de manière équilibrée, en étant

100% économique, 100 écologique et 100% équitable57 ».

Pouvoir mesurer les progrès accomplis dans une démarche de prise en compte de

l’environnement s’avère important, mais pas toujours évident. Tout d’abord, il faut

choisir les indicateurs pertinents et obtenir un consensus. En 2001, l’Observatoire des

Stratégies Industrielles du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie a

confié une étude58 au Centre d’études et de recherches sur le développement durable

(Cer2d) pour déterminer une méthodologie d’élaboration d’indicateurs. Les résultats

ont été publiés en octobre 2003.

Cette étude a mis en avant la difficulté d’établir des indicateurs, notamment du

fait de la complexité des aspects environnementaux et sociaux et de la difficulté à les

quantifier. Elle a permis de définir des objectifs macro-économiques à décliner

ensuite en indicateurs micro-économiques de développement durable pour les

entreprises, comme le montre le schéma ci-dessous :

56 Anita Roddick, Business as unusual, Thorsons Publishers, Janvier 2001 57 Intervention lors de la deuxième conférence Utopies, janvier 1999 58 Analyse comparative d’indicateurs de développement durable, ministère de l’économie des finances et de l’industrie, octobre 2003, http://www.industrie.gouv.fr/pdf/devdurable1.pdf

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Source : ministère de l’économie des finances et de l’industrie, octobre 2003

Figure 7 : De la définition aux indicateurs de développement durable

Certains organismes se sont également penchés sur le sujet en tentant de

conseiller les entreprises sur leur choix d’indicateurs. Le but est de développer des

standards qui faciliteront la lecture des performances des entreprises par une

harmonisation des indicateurs.

En effet, une fois établis ces indicateurs faciliteront dans un premier temps le

travail des sociétés de notation extra financières (société chargée de noter les

entreprises sur leurs performances sociétales et environnementales, comme le français

Vigeo) sur la sélection des entreprises cotées à intégrer dans les portefeuilles de

valeurs, grâce à une analyse de leurs performances sur différents domaines. Ainsi, le

référentiel de Vigeo intègre six domaines : l’environnement, le droit humain, les

ressources humaines, les relations clients-fournisseurs, la gouvernance d’entreprise et

l’engagement sociétal.

Dans un second temps, ces indicateurs permettront aux entreprises d’apprécier

leur niveau de développement durable par rapport aux entreprises du même secteur

d’activité et de travailler sur les points faibles le cas échéant. Les entreprises pourront

dès lors envisager les gains escomptables des actions d’amélioration à envisager.

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78

Enfin, ils permettront de développer des outils de mise en place de Sustainable

Supply Chain plus efficaces.

Ces indicateurs peuvent être classés en trois catégories comme les indicateurs de

management intégré, à savoir les indicateurs de situation, d’efficacité et de retour sur

investissement. Ils permettront de piloter l’entreprise dans sa composante

environnementale, en particulier ils permettront de mesurer les progrès et les mises en

conformité effectués par les différents acteurs de l’entreprise. En effet l’enjeu des

responsables de la supply chain est de faire adhérer l’ensemble des parties prenantes

d’abord au sein de l’entreprise mais aussi avec l’extérieur.

3.3. La supply chain au service de l’entreprise citoyenne responsable

3.3.1. Accroissement de l’attractivité de l’entreprise

En s’adaptant aux changements réglementaires permanents, la supply chain fait

preuve de réactivité et d’efficacité. Elle entraîne dans son sillage les fonctions support

avec lesquelles elle est en relation quotidiennement.

L’enjeu pour l’entreprise est de se définir une stratégie globale d’entreprise

citoyenne et responsable, et se comporter en acteur économique socialement

responsable. En effet, en intégrant les contraintes environnementales, elle obtient non

seulement un impact d’image positif, mais aussi un surcroît de légitimité. Elle

développe sa différenciation, sa capacité d’innovation, son capital de réputation,

puisqu’elle démontre sa capacité à répondre aux attentes de la société. Se faisant, elle

associe le client et le consommateur à une boucle vertueuse. Il est intéressant de noter

que 45% des entreprises du CAC 40 estiment que le développement de règles

d’éthique améliore l’image de l’entreprise59.

En effet au sein de l’entreprise, les responsables s’engagent à respecter les

salariés, à les informer dans un climat de transparence et de confiance, et à

développer une politique sociale. En retour, ce climat de travail accroît les profits au

travers d’une meilleure productivité, d’une meilleure innovation, d’une qualité et

d’une fiabilité supérieures, et d’un engagement plus fort car selon F. Rousseau, PDG

d’Eurogroup « l’adhésion des employés aux valeurs de l’entreprise provoque de la 59 Etude « Gouvernement des entreprises : le management de la pérennité », KPMG, 2000, p. 21

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valeur », ou encore, selon F. Riboud, PDG de Danone, « la culture de notre groupe

puise ses racines dans la conviction que la performance économique et l’attention

aux personnes sont intimement liées ».

L’alignement interne entre les politiques, la vision et le personnel, ainsi que le

développement du bien-être et de l’épanouissement des collaborateurs, ouvrent des

opportunités pour apprendre et constituent une ressource stratégique de plus en plus

discriminante, surtout en situation de tension du marché du travail. Selon une étude

conduite par McKinsey60, seulement 3% des entreprises pensent posséder les talents

suffisants pour réussir à atteindre leurs objectifs dans les cinq prochaines années. Les

candidats à haut potentiel deviennent désireux de rejoindre une entreprise

responsable, et les collaborateurs développent leur fierté d’appartenance et leur

motivation.

En créant du sens et du respect, en encourageant ses employés à se développer et

à réaliser leur potentiel en direction d’une qualité globale, en améliorant ses pratiques

performantes dans l’intérêt de tous, en incitant les managers à dépasser la dimension

contraignante des réglementations (sécurité, qualité des produits, environnements,

etc.), en diminuant le turnover et l’absentéisme de son personnel, et en s’ouvrant à de

nouvelles compétences, l’entreprise accroîtra sa productivité.

Mais celle qui choisit de s’engager dans une telle démarche doit repérer les

risques liés à une modification le cas échéant significative du fonctionnement de son

entreprise pour en percevoir plus vite les avantages. La remise en cause d’un certain

nombre de méthodes de travail peut être génératrice de tensions au sein du personnel,

ces tensions seront évitées par une implication forte et un accompagnement régulier

de la direction relayée par les ressources humaines. Ce risque sera aisément évité par

le dialogue ou par l’organisation de groupes de projets. Pour cela l’engagement de la

direction doit être fort, la pédagogie et la formation correspondant à ce type de

situation adaptées et le timing de mise en place maîtrisé.

En complément, le Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail

(CHSCT), obligatoire dans toutes les entreprises de plus de 500 salariés permet de

diminuer les risques d’incidents et d’accidents grâce à l’amélioration et à la

surveillance d’une part de la santé et de la sécurité, et d’autre part des conditions de 60 The War of Talent, publiée en 1998

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travail. Par ailleurs, en appliquant le principe de précaution et en intégrant des

scénarii d’urgence à des plans de crise à travers toute l’entreprise, celle-ci se dote

d’outils de prévention.

L’entreprise se doit d’être en conformité avec les normes et réglementations

européennes. Concernant la prévention des risques technologiques et naturels et la

réparation des dommages, la loi du 30 juillet 2003 complète les dispositifs législatifs

précédents comme les directives Seveso (1982) et Seveso II (1996).

Enfin, en étant en conformité avec les réglementations, l’entreprise diminue les

risques juridiques très négatifs en terme d’image et très coûteux. On peut citer les

catastrophes industrielles comme Seveso, l’Erika, AZF.

Ainsi l’entreprise développe une gestion proactive des risques sociaux,

écologiques, d’image ou financiers, élargis à l’ensemble de ses parties prenantes, face

à des réglementations de plus en plus complexes et dures, envers lesquelles le

dirigeant est désormais tenu pour responsable. De ce fait, les assurances préfèrent

couvrir les entreprises plus responsables et présentant un risque moindre, tout comme

les banques qui préfèrent prêter aux entreprises qui ne risquent pas de leur faire porter

le préjudice généré par des actions en justice ou des coûts consécutifs à des problèmes

sociaux ou causés par l’environnement.

3.3.2. L’intégration des contraintes environnementales, un accélérateur de différenciation

Nous avons vu que l’entreprise est soumise à une réglementation qu’elle peut

juger contraignante voire excessive mais qu’elle est obligée de respecter.

En allant plus loin que les réglementations existantes, lesquelles évoluent de plus

en plus vite, l’entreprise se positionne et anticipe de nouvelles règles du jeu sociales

et environnementales, de plus en plus exigeantes dans la passation des marchés privés

comme publics. Grâce à sa crédibilité acquise au travers d’une mise en pratique d’une

éthique de responsabilité, elle influence également l’élaboration des lois actuelles, en

participant aux groupes de travail chargés de les préparer.

Pour s’adapter, l’entreprise doit générer une organisation plus performante, et

donc plus pérenne. La prise en compte des contraintes environnementales permet

d’établir un nouveau dialogue avec les différentes parties prenantes, et de mettre en

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

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place avec eux une démarche d’amélioration continue dans le but de trouver le

meilleur équilibre possible entre l’efficacité économique, l’équité sociale et la

responsabilité environnementale. L’entreprise élargit sa capacité d’innovation, de

créativité, et de vision globale dont la nouveauté et l’ingéniosité contrebalanceront le

coût initial.

En s’engageant dans une telle stratégie, l’entreprise gagne en efficacité grâce aux

économies réalisées et à l’innovation déployée : une production responsable, éco et

socio-efficace fournira un cadre pour une amélioration continue, optimisera les flux

de matières et de compétences, diminuera les coûts, améliorera la productivité des

ressources, accroîtra l’efficacité, et au final, la performance financière.

En parallèle elle va se doter de normes (gamme ISO), de labels et de référentiels

pour les produits (éco labels, marque NF-environnement…) ainsi que d’outils de

reporting. Cette démarche va leur permettre de disposer d’un système qualité

performant. Un label de qualité globale va s’imposer désormais à tous les

distributeurs et industriels, sauf à être évincé du marché car les consommateurs

interpelleront de plus en plus souvent, de plus en plus fort les entreprises sur la

sécurité des produits, sur leur qualité mais aussi sur leur origine.

Par la responsabilité sociale, l’entreprise a l’opportunité d’avoir une démarche

intégrée : qualité, environnement, sécurité, et de modifier les modes de gouvernance

en trouvant un compromis entre les intérêts de l’entreprise et ceux des salariés voire

des consommateurs. Cela va lui procurer des avantages tant en interne qu’en externe.

Sur le plan interne, afin de se mettre aux normes elle va devoir se remettre en

question, en se faisant aider éventuellement par des audits. L’intégration de la

responsabilité sociale et environnementale dans le processus de prise de décision va

la doter d’une gestion de l’innovation, des risques, de la sécurité, des déchets. Toute

cette évolution ne peut se faire qu’avec le soutien des ressources humaines qui vont

devoir accompagner le personnel par un plan de formation adéquat. L’enjeu est de

créer une émulation en interne, source d’innovation et de challenge.

L’entreprise Lenovo est une entreprise technologique internationale innovante,

née de l'acquisition par le groupe Lenovo de la division micro-informatique (PCD :

Personal Computing Division) d’IBM. C’est un des acteurs principaux sur le marché

des PC. Cette entreprise se retrouve à la première place (notation 8/10) de la 3ème

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

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édition du guide pour « une high-tech responsable » de mars 2007 publié sur le site

internet de Greenpeace, alors qu’elle était à la dernière place lors de la publication de

la 1ère édition en août 2006 (notation 1,3/10). Lenovo, via sa responsabilité sociale

d’entreprise s’est engagée en faveur du principe de précaution et de responsabilité

individuelle du producteur : en étant responsable du produit qu’elle commercialise,

elle devient de fait responsable du produit en fin de vie. Pour cela, Lenovo a mis en

place des services de reprise et de recyclage dans tous les pays où sont

commercialisés ses produits.

Cette première place attribuée par une ONG comme Greenpeace récompense les

efforts de l’entreprise et de ses salariés, (Cf. Annexe 6). C’est un argument fort donné

aux consommateurs, et Lenovo l’indique avec fierté sur la page d’accueil de son site

internet. Ces progrès n’ont pu être accomplis que par la synergie créée dans le groupe

autour de l’engagement environnemental partagé par les dirigeants de l’entreprise et

ses parties prenantes que sont ses collaborateurs, ses fournisseurs et ses partenaires.

Lenovo s’est engagé dans une politique d’intégration des contraintes

environnementales par la prise en compte des risques avérés et hypothétiques, ce qui

lui a permis de réorganiser sa supply chain, le tout dans l’esprit du nouveau contexte

réglementaire issu des différents sommets internationaux.

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CONCLUSION

Le développement industriel est à l’origine de progrès considérables pour

l’humanité. Il était basé sur des critères de croissance essentiellement économique, et

l’un des outils de mesure était le produit intérieur brut et le produit national brut. Puis

le terme social est apparu avec l’apparition d’associations et de syndicats.

Suite à la prise de conscience dans les années 1970 que la prospérité, basée sur

l’utilisation intensive des ressources naturelles, provoquait non seulement leur

épuisement mais était aussi cause de pollution, destruction des écosystèmes,

diminution de la biodiversité, les politiques alertés par les scientifiques ont décidé

d’agir afin de prendre en compte l’aspect environnement dans le développement

économique et social.

C’est ainsi qu’à partir des années 1970, l’environnement apparaît comme un

patrimoine mondial à préserver pour les générations futures : des textes fondateurs

accompagnés de législations internationales furent alors élaborés.

L’enjeu pour l’entreprise est de s’adapter à ce nouveau contexte, en particulier en

se mettant en conformité réglementaire. La dynamique de responsabilité sociétale des

entreprises a contribué à la prise de conscience des entreprises qui pour certaines,

expertes dans leur domaine, se retrouvaient considérées comme entreprises

pollueuses, voire dénoncées par des ONG.

Les entreprises ont donc dû réagir, en repensant leur raison d’être et leur valeur

ajoutée, en examinant les impacts de leurs pratiques quotidiennes sur l’environnement

Intégrer la composante environnement implique nécessairement une réflexion sur

la consommation, la production des produits et leurs distributions. Dans son rapport

annuel, l’ONG environnementale américaine Worldwatch61 dénonce ainsi depuis

2001 les ravages sociaux et environnementaux de la surconsommation et de notre

économie fondée sur le principe du « tout à volonté ».

La prise en compte des contraintes environnementales est non seulement une

obligation légale mais est également pour l’entreprise un enjeu d’ordre économique,

61 www.worldwatch.org

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

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stratégique, social et éthique. L’un des leviers prioritaires pour y répondre est de

reconsidérer la chaîne logistique.

Si une vision de l’optimisation de la performance de la chaîne logistique, prise

comme un ensemble cohérent et global et non « maillon par maillon », permet

l’optimisation de sa performance, le raisonnement est le même en ce qui concerne la

performance environnementale. En effet, pour réduire l’impact environnemental de la

fabrication d’un produit, il s’avère peu efficace de rechercher à mettre en place des

actions ponctuelles et non coordonnées les unes par rapport aux autres à chaque

maillon, que ce soit au sein de l’entrepôt ou dans le cadre des opérations de transport.

Seule une collaboration effective de l’ensemble des acteurs de la chaîne logistique

peut permettre d’intégrer l’ensemble des contraintes et de minimiser l’impact

environnemental global de la fabrication d’un produit. L’Observatoire sur la

Responsabilité Sociale de l’Entreprise résume parfaitement ce dilemme en reprenant

l’image de la chaîne logistique : « il suffit qu’un maillon de la chaîne

d’approvisionnement soit faible sur le plan RSE, pour que l’efficacité des efforts en

matière de responsabilité soit compromise et que le produit soit la cible de

critiques ».

L’obligation faite aux entreprises de prendre en compte l’environnement a créé

pour tous les acteurs, économiques, politiques, des contraintes d’ordre réglementaire,

industriel, écologique. Ces contraintes environnementales ont obligé les responsables

de supply chain à se concerter, à innover dans les domaines du transport, de

l’emballage, de l’entreposage, de la gestion des déchets, du recyclage des produits, de

la préservation de l’eau notamment par la récupération de l’eau de pluie. Pour ce faire

elles ont travaillé en réseau avec leurs partenaires, sur des engagements réciproques.

L’intégration des contraintes environnementales au niveau de la supply chain

répond à un enjeu de développement stratégique, et d’avantages concurrentiels mais

est aussi un enjeu managérial pour l’entreprise qui doit gérer le changement en

accompagnant et en formant son personnel.

La remise en question des pratiques, la mise en place d’indicateurs

environnementaux pertinents, le développement de la gestion des risques se

transforment en atouts. En effet de part sa transversalité, la supply chain en s’adaptant

aux contraintes environnementales a fait progresser ses partenaires, tant internes

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

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qu’externes, devenant ainsi un vecteur de croissance, car en intégrant les contraintes,

elle en a reporté sur ses fournisseurs voire ses clients via les cahiers des charges et les

contrats.

Le client, quant à lui de plus en plus réceptif et informé par les différents médias

en particulier internet, « vote » par son comportement d’achat. C’est ainsi que la

façon de fabriquer un produit, de le distribuer, de le recycler est devenue un

argumentaire de vente. La supply chain, en entraînant dans son challenge les

directions de la communication, des ressources humaines ainsi que la direction de

l’entreprise dans une stratégie de comportement éthique participe à l’amélioration de

l’organisation interne.

Mais si l’intégration des contraintes environnementales a permis à la supply chain

d’innover et d’être vecteur de croissance et de développement, entraînant dans son

sillage toute l’entreprise, il n’en reste pas moins que le système de management

environnemental peut être coûteux pour les petites et moyennes entreprises. C’est en

travaillant en réseau et en partageant les expériences que celles-ci pourront bénéficier

de la dynamique.

Nous avons également vu que l’entreprise en devenant entreprise citoyenne doit

veiller à ce que ses actes correspondent à ses engagements. L’enjeu va donc être

d’être transparent.

Enfin la démarche environnementale, étant par essence globale et transversale, n’a

de sens que mise en œuvre dans tous les pays du monde (certains problèmes comme

le réchauffement climatique ne pouvant être résolus qu’internationalement), dans tous

les secteurs d’activités capables d’y contribuer (tous les secteurs ont un impact

significatif sur la planète et les hommes), et au sein d’une entreprise donnée, dans

toutes les pratiques qui fondent l’activité quotidienne. La plupart des services étant

impactés doivent, chacun de leur façon, contribuer à un comportement plus

responsable.

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BIBLIOGRAPHIE

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DUBIGEON Olivier, Mettre en pratique le développement durable – Quels processus pour l’entreprise responsable ? Ed. Village Mondial, 2002, 315p.

LAVILLE Elisabeth, L’entreprise verte – Le développement durable change l’entreprise pour changer le monde, 2ème édition, Ed. Village Mondial, 2006, 406p.

PIMOR Yves, Logistique – Production, Distribution, Soutien, 3ème édition, Ed. Dunod, 2001, 720p.

SAMII Alexandre, Stratégie Logistique – Supply Chain Management, 3ème édition, Ed. Dunod, 2004, 390p.

STEPHANY Didier, Développement durable et performance de l’entreprise – Bâtir l’entreprise DD, Ed. Liaisons, 2003, 265p.

2) Revues spécialisées

Cahiers statistiques de l’OCDE, Mars 2006, N°10, Mesurer le développement durable par Candice Stevens

Le Journal de la Logistique, N°29, Octobre 2005, Europack livre une bonne moisson d’innovations

Le Journal de la Logistique, N°30, Novembre 2005, Mac Donald’s : la marque jaune se met au vert

Le Journal de la Logistique, N°33, Mars 2006, Stratégie logistique ou logistique stratégique ?

Le Journal de la Logistique, N°34, Avril 2006, L’immobilier logistique se développe durablement et Entrepôts du futur : la ligne verte

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Le Journal de la Logistique, N°40, Novembre 2006, La logistique « s’emballe »

Logistiques Magazine, N°195, Mars 2005, Dossier Environnement, Environnement, le pari vertueux

Logistique & Management, Vol. 13 N°1, 2005,

- Le développement d’une logistique en accord avec le développement durable, Julien Schmidt

- Le développement de bonnes pratiques logistiques dans le respect de l’environnement, Fulvia Allievi-Dorosz

- Développement durable, Supply Chain Mangement et stratégie : les cas de l’éco-conception, Sandrine Gherra - Pour les Transports Auto Brunier, l’utilisation du transport combiné est très encourageant et rend l’entreprise plus compétitive, entretien avec Jean-Claude Brunier, PDG de TAB

3) Articles de presse

Le Figaro, 28 décembre 2006,

- Chaque français peut mesurer son « empreinte écologique » - Les entreprises, l’argent et la contrainte verte - Bilans carbone, conseillers environnementaux…de vrais efforts pour une meilleure image

Le Parisien, 14 novembre 2006,

- La nouvelle taxe « écolo » va faire grimper les prix - Les pollueurs paieront un peu plus

Le Nouvel Observateur, du 9 au 15 Novembre 2006, La révolution Hulot

Le Nouvel Observateur, du 1er au 7 février 2007, Les scientifiques déclenchent l’alerte climatique

Libération, 1er Décembre 2006, Rebonds, Réponse à la lettre ouverte de Dominique Voynet, candidate verte à la présidentielle, Tu as choisi la politique, j’ai pris une autre voie par Nicolas Hulot

Libération, 11 Décembre 2006, Sus aux pseudo-pubs écolos

Les Echos, 30 Mai 2006, Dossier « Le développement durable s’inscrit dans le paysage »,

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- Pays-Bas : les députés votent pour des achats 100% écolo - Le lobbying reste la boîte noire des entreprises

Les Echos, Dossier du 29 janvier 2007, Dossier « Le réchauffement climatique ne fait plus débat »,

- La publicité jugée à l’aune de son impact environnemental - L’entreprise verte - L’urgence d’une consommation responsable - « Générer le désir » : l’avis de la psychosociologue Danielle Rapoport

4) Webographie

ADEME

http://www2.ademe.fr/servlet/getDoc?id=11433&m=3&cid=96 et http://www2.ademe.fr/servlet/KBaseShow?sort=-1&cid=96&m=3&catid=14288

L’alliance pour la planète

http://www.lalliance.fr et http://www.lalliance.fr/xmedia/atelier_BVP/publicites.html

AMC2

http://monsite.wanadoo.fr/amc2.industrie/

Club Démèter Environnement et Logistique

http://www.club-demeter.fr/

CREDOC : La consommation « engagée » : mode passagère ou nouvelles tendances de consommation ? N°170 décembre 2002

http://www.credoc.fr/pdf/etu/4p170sessi.pdf

EDF, conseils pratiques

http://particuliers.edf.fr/141054i/EDF-Particuliers/conseils-pratiques.html

Energeco : site consacré à la maîtrise des consommations de carburant dans le transport routier de marchandises

http://www.energeco.org

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La supply chain et l’intégration des contraintes environnementales : Un enjeu pour aujourd’hui ?

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Greenpeace : guide pour une high-tech responsable

http://www.greenpeace.org/france/news/guide-pour-une-high-tech-responsable-avril-2007

Lenovo

http://www.lenovo.com/fr/fr/

Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie

http://www.industrie.gouv.fr/index_portail.php

Ministère de l’écologie et du développement durable

http://www.ecologie.gouv.fr/-Developpement-durable-.html

Nature & Découvertes

http://www.natureetdecouvertes.com/pages/cor014/frameset_fo_cor014.asp

GSE, projet optima

http://www.gse.fr/html/index.php?module=Infos_PN_Menu&idm=208

Novethic : « le média en ligne du développement durable »

http://www.novethic.fr/novethic/site/index.jsp

Philips :

http://www.philips.com/assets/Downloadablefile//12-Supporting-suppliers-to-become-more-sustainable-15386.pdf

TNS-Sofres : étude sur le développement durable :

http://www.tns-sofres.com/etudes/corporate/070602_dvptdurable.pdf

Transports Auto Brunier

http://www.tab-transports.com/accueil.html

Vigeo bétonne sa méthode

http://management.journaldunet.com/0311/031113vigeo.shtml

WWF : empreinte écologique

http://www.wwf.fr/s_informer/calculer_votre_empreinte_ecologique

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LEXIQUE

ADEME : Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie

AFT-IFTIM : Association pour le développement de la formation transport et techniques d’implémentation et de manutention

APS : Advanced Planning and Scheduling

BEET : Benchmarking Emergy Efficiency in Transport

CREDOC : Centre de Recherche pour l’Etude et l’Observation des Conditions de vie

DEEE : Déchets d’Equipement Electriques et Electroniques

GIEC - Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat - organisation mise en place en 1988, à la demande du G7 (groupe des 7 pays les plus riches : USA, Japon, Allemagne, France, Grande Bretagne, Canada, Italie), par l’Organisation Météorologique Mondiale et par le PNUE. Son rôle est d'expertiser l’information scientifique, technique et socio-économique qui concerne le risque de changement climatique provoqué par l’homme.

HQE : Haute Qualité Environnementale

NRE : Nouvelles Régulations Economiques

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economiques qui regroupe 30 pays membres et dont le siège est à Paris. Elle est active dans tous les domaines relatifs à l’économie et au social (politique de développement, commerce, transports, fiscalité, marché, énergie, environnement).

OIT : Organisation Internationale du Travail

OMS : Organisation Mondiale de la Santé

ONG : Organisation Non Gouvernementale

ONUE : Organisation des Nations Unies pour l’Environnement

PNUD : Organisation des Nations Unies pour le Développement

PNUE : Programme des Nations Unies pour l’Environnement

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PREDIT - Programme pluriannuel de Recherche, d'Expérimentation et de Soutien à l'Innovation dans les Transports terrestres : il est initié et conduit par Quatre ministères : le MTETM (Ministère des Transports, de l'Equipement, du Tourisme et de la Mer) le Ministère de la Recherche le Ministère de l'Ecologie et du Développement durable le Ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie

Et deux agences : l'ADEME (Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie) l'OSEO-ANVAR (Agence française de l'innovation).

RSE : Responsabilité Sociale des Entreprises

SCM : Supply Chain Management

SESSI : Service des Etudes et des Statistiques Industrielles

UICN : Union Mondiale pour la Nature

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ANNEXES ANNEXE 1 – Effet de serre et réchauffement climatique

Source : Changement climatique et santé humaine – résumé, bibliothèque OMS Figure 5: L'effet de serre

Source : Changement climatique et santé humaine – résumé, bibliothèque OMS Figure 6: Relevé de température dans le monde depuis 1860,

et projection jusqu'à 2010

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ANNEXE 2 – Innovations d’emballage

1- CanLoq

2- ODL 1000 IBC traditionnel

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ANNEXE 3 – Publicités dans magazines d’avril 2007

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ANNEXE 4 – Exemple d’une charte d’engagement

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ANNEXE 5 – Analyses et critiques de publicités62

L’objectif de l’Alliance pour la Planète est d’expliquer comment décrypter des

publicités qui usent et abusent de l’argument écologique. Leur objectif se veut aussi

vertueux, c’est-à-dire expliquer à ce secteur et aussi au BVP (Bureau de Vérification

de la Publicité) comment appliquer leurs propres règles. Sur leur page d’accueil, on

obtient la liste des publicités mises à l’index en cliquant sur l’image ci-dessous.

Cette photo est une publicité de TOTAL, concernant l'énergie éolienne.

Total veut nous faire croire que son activité en ce domaine est importante. Or,

l'entreprise n’a mis en service en France, en tout, que cinq éoliennes, en 2003 sur le

site de la raffinerie des Flandres,

près de Dunkerque. Et c'est tout !

(www.total.com)

Ce visuel nous trompe sur la

réalité des actions que l’annonceur

conduit en faveur de

l’environnement et du

développement durable. Il

contrevient donc à l'article 2-1 de la

recommandation écologique et à

l’article 1-1.1 de la

recommandation développement

durable.

Sur le site, on peut découvrir les

analyses et critiques de publicités

récentes…et les plus exemplaires. 62 Source : http://www.lalliance.fr/xmedia/atelier_BVP/publicites.html

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ANNEXE 6 – Société LENOVO63

Quelles sont les actions engagées par Lenovo ?

Lenovo, via la RSE, s’engage dans la qualité et la sûreté de ces produits, et

s’assure également que cet engagement est respecté sur toute la chaîne de production,

par ses employés, sur tous les sites et par tous ses fournisseurs.

Par ailleurs, la compagnie poursuit une démarche volontaire et globale vers un

système de management de la santé et la sécurité au travail, afin de fournir à ses

employés des conditions de travail optimales.

63 Source : http://www.lenovo.com/fr/fr/

Zoom : Lenovo reconnu par Greenpeace pour son leadership en matière d’environnement

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Sa politique de précaution a nécessité de répertorier tous les risques hypothétiques

et d’utiliser les meilleures techniques disponibles, par conséquent à prendre des

mesures contre les pollutions sans attendre les certitudes scientifiques sur les

dommages causés à l’environnement.

C’est ainsi que l’écoconception de ses matériels par l’intégration en amont d’un

maximum de risques et des contraintes environnementales l’a conduit dans une

démarche de progrès dans tous les cycles de vie, notamment dans la gestion des

déchets et du recyclage. Des contrats ont été passés avec des fournisseurs comme la

société SCRELEC pour les batteries et produits contenant des batteries, la société

écoemballages pour les emballages.

Ces sociétés et leurs sous traitants ont été sélectionnés sur leurs savoir-faire en

matière de collecte, de tri, de valorisation des produits usagers, de traitement des

déchets, et sur le respect des procédures notamment en terme de traçabilité.

Enfin, Lenovo fournit sur son site les éléments nécessaires, aux particuliers et aux

entreprises, pour la collecte des déchets d’emballage et des équipements électriques

ou électroniques.

En conclusion, Lenovo fabricant chinois de PC, qui a acheté la division

« Electroniques de grande consommation » d’IBM en 2005, est la première entreprise

à mettre en place des services de reprise et de recyclage dans tous les pays où sont

commercialisés ses produits. « C’est en Chine qu’échoue une grande partie des

déchets électroniques mondiaux. Voir une entreprise chinoise assumer ses

responsabilités, au moins en matière de gestion des déchets issus de sa propre

marque, constitue un signe très encourageant, commente Yannick Vicaire,

responsable de la campagne Toxiques de Greenpeace France. Le prochain défi pour

Lenovo consiste à commercialiser une gamme de produits plus respectueuse de la

santé et de l’environnement. »