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R.A Schwaller de Lubicz LA DOCTRINE

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R.A Schwaller de Lubicz

LA DOCTRINE

Editions Le Temple de l’Homme

R.A Schwaller de Lubicz

LA DOCTRINETrois conférences faites à

Suhalia à Noël 1926

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L’on trouve, dans le thème natal de René Adolphe Schwaller de Lubicz, des indices remarquables de l’esprit philosophique intense qui l’a invité à se déployer au coeur du miracle égyptien et à en faire profiter chacun dans ses ouvrages. René Adolphe Schwaller naquit une nuit de pleine lune, vers deux heures du matin le 30 décembre 1887 à Asnières, au lever d’Uranus et de Mars, lorsque Saturne culminait. Un Saturne lumineux, reçu par le Soleil, qui l’a conduit à se frayer un chemin dans les profondeurs obscures de la symbolique pharaonique : en effet, Saturne et le Soleil, deux astres que tout oppose dans l’essence, l’un obscur et l’autre lumineux, sont ici réunis par une réception mutuelle, chacun étant dans le signe de l’autre. Ainsi la fièvre de la découverte qu’il avait, l’appel du feu dans l’ombre octroyé par Uranus et Mars au levant s’est trouvé exploité dans un domaine historique méconnu où il allait apporter la lumière solaire : Le maître Aor était né. René Schwaller a bénéficié du bon état céleste de la lune : étant dans le signe du Cancer et dans la maison de Dieu, elle a pu céder aux limitations des considérations intellectuelles de l’esprit et lui faire prendre conscience de ce qu’il nomme l’intelligence du coeur, intelligence initiatique sensible. D’ailleurs, elle applique à Vénus comme si elle avait une fonction toute autre que la satisfaction des besoins communs à remplir. Avec Schwaller, l’on va essayer de

Le thème d’Aor par le temple de l’Homme

mesurer l’incommensurable, le moment présent. Et c’est cette lune, commençant à se diriger vers le couchant, qui défie le soleil, celui-ci montant : apparaît et darde la vérité, lui dit-elle. Dès son plus jeune âge il s’intéresse à la science et particulièrement à l’ingénierie chimique. La quête de l’esprit de la matière jalonnera toute son oeuvre, dans la pierre des temples mais aussi dans la symbolique sacrée des nombres qu’il sait vivants. Une conjonction, celle de Vénus et de Jupiter en Scorpion, lui permettra d’être inspiré par la beauté des principes de l’enseignement agissant des anciens sages. Vénus est ici comme une fleur qui fane incessamment au gré des révélations pour toujours mieux refleurir et Jupiter est son terreau spirituel. Loin d’être en mauvais état céleste, Vénus bénéficie aussi d’une réception mutuelle avec Mars, lui apportant par là même une grande force de feu. Mercure paraît être quelque peu isolé et sans grand secours du reste du thème : et c’est bien avec raison que l’on examinera alors sa déclinaison et que l’on remarquera alors qu’il est hors-limites, n’ayant de comptes à rendre à aucune autre planète. Il peut s’exprimer sans difficulté sur des sujets difficiles et c’est par son intermédiaire de messager des Dieux dans son rôle, que le Soleil var déteindre ses qualités au lever dans une subtile translation de lumière. Le génie est chez Schwaller de Lubicz une seconde nature. Quant aux transsaturniennes Neptune et Pluton, elles vont se coucher : l’on remarque ici son premier mariage symbolisé par Neptune, et le second, signifié par Pluton. C’est cette deuxième planète qui représente Isha Schwaller, avec qui il se remariera. Elle l’aidera dès 1922 dans ses activités en Suisse, en Égypte et à Grasse. La transsaturnienne Pluton en Gémeaux, domicile de mercure et significateur de la jeunesse la dépeint magnifiquement. En effet, elle étudia les principes pédagogiques de son temps, et la dilogie des Her-Bak relate justement le chemin initiatique d’un jeune égyptien, qui tout au long de sa formation montera vers le temple : « Sois heureux d’être encore petit, tu observes toutes choses vivantes avec un coeur nouveau ; apprends maintenant comment elles se transforment : c’est cela que tu dois faire ».

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Cette année-ci, je me suis enfin décidé à vous développer une vue d’ensemble de ce que je me résous à appeler la doctrine. J’ai choisi ce vilain mot, qui rappelle trop une prison d’idée, faute de mieux, pour grouper d’une façon précise un ensemble d’enseignements. Trop souvent, dans nos causeries, j’ai un peu au hasard de la vie, semé des notions de cette doctrine. Mais n’ayant pas voulu par pudeur appeler cela doctrine, je vous ai fourni l’occasion de ne pas assez vous pénétrer de l’importance de ces données, et de vous permettre de galvauder des pensées qui, reliées entre elles, constituent un savoir immense, mais jetées par bribes, donnent facilement l’impression d’affirmations gratuites ou de fantaisies spéculatives. C’est consciemment que j’emploie le mot galvauder, ne le trouvant pas trop dur. En effet, n’y a-t-il pas de la traitrise à semer par derrière moi des idées reçues en confidences, surtout en les semant sans lien, sans ordre, sans effective connaissance. On voit que vous êtes mes élèves. Quel maître suis-je alors si vous me traduisez par des notions mal apprises ? Ne me trahissez- vous pas en laissant tomber des mots que le premier intuitif peut happer, pour en conclure une science qui sera fausse sûrement, mais séduisante aussi probablement. Et ne croyez-vous pas qu’une simple

Introduction

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formule de cette divine science occulte vaut plus que de l’or, est plus importante en réalité que, par exemple, la connaissance d’une disposition de combat peut l’être pour un général. Et pourtant, vous appelleriez traître ce soldat qui livre cette disposition et n’aimez pas à être appelés traîtres en livrant ces formules qui, souvent, sont le fruit de dix années de méditations ? Vous n’avez qu’une excuse, et je vous l’accorde, c’est de ne pas toujours savoir l’importance d’une idée ainsi purifiée, de ne pas en connaître la portée dans l’ensemble de la Doctrine. Ceci est la raison pour laquelle je choisis ce mot brutal de « doctrine », afin que vous sachiez, une fois pour toutes, que l’enseignement que je vous donne est complet, même si vous n’en connaissez pas les détails. Or, je tiens pour la première fois, je l’affirme, à être le père de cette doctrine. Comprenez-moi bien : ce que je donne, je ne veux pas le garder, c’est absolu. Mais je n’entends pas avoir donné, avant d’avoir donné tout, et, surtout, vous, avoir reçu tout. Jusqu’à cet instant vous n’êtes que des élèves et ne devez vous servir de ce que vous apprendrez qu’avec cette restriction : voilà ce que je crois avoir compris, jusqu’à présent, de la doctrine d’Aor, mais sous tout réserve de mon imparfaite traduction. C’est dans votre propre intérêt que j’exige cela. Vous n’êtes forts ni les uns ni les autres. Vous êtes peut-être des maîtres dans les questions de la vie courante, des affaires, mais vous êtes encore ignorants de la vie réelle, cette vie qui ne passe pas, ignorants aussi du problème même de votre existence.

Or, je puis vous rendre forts, mais à deux conditions :- La première est votre travail personnel, votre propre recherche, votre effort logique et constant.- La deuxième est votre humilité. Ne faites pas comme ces collégiens devant le bachot, qui croient avoir la science infuse parce qu’ils savent compter jusqu’à dix.

Croyez-moi ! Dans la science divine ou connaissance, quand on arrive au bout, on n’est encore qu’un petit enfant, à genoux devant la nature. Et croyez aussi à cette antique vérité : donnes et tu recevras.

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C’est-à-dire que celui qui garde égoïstement le don de la connaissance ne recevra rien en sus. Ceci ne veut pas dire qu’il faut disperser ce qu’on apprend. Ceci veut dire qu’il faut être humble avant tout, et ne pas vouloir avancer pour acquérir, mais pour devenir plus vrai, plus simple et plus conscient. Devenir ainsi, c’est aussi donner, c’est rayonner la force et la connaissance et aider, en vérité, mieux que toutes les œuvres du monde, car d’un pareil centre sortent les inspirations, les impulsions de l’aide sage, efficace et pratique aussi. Et s’il n’y a pas de richesse infinie, il n’y a pas de don vrai possible, car tout don est restreint par une limite. Vous devez apprendre avant tout à vous enrichir personnellement au-delà de toute limite, pour pouvoir semer à pleines mains. Je parle de la richesse spirituelle. Quant à la doctrine dont je veux vous entretenir, et pour vous rendre plus vraies mes paroles autoritaires et possessives, voici d’où je tiens cette connaissance :

Avant tout, je l’ai héritée - héritée comme on hérite son sang. Ce qu’à travers beaucoup de nuits de recherches, à travers beaucoup de jours de luttes j’ai déterminé, n’est en fait, qu’une connaissance que j’ai déjà possédée dans une certaine vie passée. L’effort que j’ai fait n’était en vérité qu’un effort de dévoilement et non d’acquisition. Il n’y a d’ailleurs là aucun mérite, car la récompense va au delà de toute souffrance, au-delà de tout effort. Ceci constitue l’un des aspects de la question. Le second aspect est la révélation. Souvent vous avez employé ce mot sans en connaitre vraiment la portée. La révélation n’est pas une inspiration, un éblouissement subit. Elle constitue un véritable accouchement. Ainsi que chez la mère, le terme naturel indique le moment où l’évènement doit se produire, et se produit ensuite avec toute la douleur d’un effort exigé par la nécessité, mais qui est, par inertie, refusé par le corps. Ainsi se fait la venue au monde, c’est-à-dire la lumière de la « révélation ». La révélation, on la sent venir. On sait que le temps est venu où un obscur mais puissant désir va se réaliser, et on la sent venir par les incroyables obstacles que la vie, que toutes les forces occultes, savent alors mettre sur le chemin. Quand on l’a vécue, c’en est drôle

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que de regarder ces montagnes qui se sont dressées devant vous pour, surtout, vous détourner de l’événement qui voudrait se produire, que l’on désire, et dont on a peur en même temps. Alors, viennent les douleurs, c’est-à-dire les heures de renoncement, de brisure du Moi, d’abnégation de toutes ses envies, l’offrande même de sa vie pour atteindre cet instant où va naître ce fruit spirituel. Et, encore une chose dont vous pouvez à peine vous rendre compte, on est celui qui ainsi reçoit la révélation, et on est aussi, comme la mère, celui qui ignore le plus et la nature et l’aspect de la chose révélée. C’est venu en plus ou moins de temps, avec plus ou moins de souffrance, et on reste là devant la chose, ahuri que ce soit là, incompréhensif même de son sens. C’est la révélation ? Non, pas encore. Maintenant, il faut nourrir l’enfant, apprendre à le connaître, l’étudier sous tous les aspects, voir où et comment il est malade. On est si imparfait pour mettre au monde l’esprit que le produit risque d’être bien malingre. On a tant voulu quelque chose, on s’est tant révolté contre l’ordre spirituel, on a tant désiré être soi-même, que la révélation a beaucoup de chances d’apporter dans sa constitution des faiblesses organiques. Donc, il faut maintenant commencer un vrai travail qui est une véritable maternité.

Voilà, mes amis, ce que c’est une révélation ; ne croyez pas que ce soit autre chose. Il y a, en tout cela, pourtant, quelque chose qui est agréable, c’est cette espèce de soulagement immense que l’on éprouve d’être délivré d’un poids, lourd comme la vie. On est autre, c’est tout, mais c’est infiniment réconfortant. Eh bien, une partie de la doctrine est ainsi une révélation. C’est toute la partie que j’appelle d’initiation. Elle englobe toute la science des mesures. Ce que cela signifie, vous le comprendrez par la suite. Maintenant, ce mot se confond encore avec vos notions de mesures quantitatives, mais cela n’a rien de commun avec l’occulte, la divine connaissance des mesures.

Maintenant, attaquons la doctrine directement et pour vous la rendre plus claire, je vais la diviser en trois parties, trois instructions dont voici les thèmes :

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- Les problèmes tels qu’ils se posent et telle que je situe leur solution ;- Du but de la vie, avec son problème connexe de connaissance ;- De l’évolution et des moyens comprenant le schéma d’une mystique, basée sur les besoins et nécessités naturelles.

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PREMIÈRE CONFÉRENCE

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Il y a des problèmes de toutes sortes, mais entre tous il y en a qui exigent une solution au cours de la vie, parce qu’ils sont posés par l’existence même. Exister, soit être vivant, nous le subissons. Et cette existence n’est pas un problème. C’est même le seul fait dont nous ne doutions pas. La philosophie qui a voulu poser l’existence en problème est une erreur. Descartes fonde toute sa pensée sur cette affirmation  : «  Je pense, donc je suis  ». Mais, en définissant ainsi l’existence comme un problème et en donnant la réponse par cette affirmation : je pense, il a aussi défini toute l’erreur de la question, puisqu’il pense qu’il pense pour prouver par la pensée qu’il existe. C’est le terrible cercle vicieux du mental. Tant que l’on est obligé de se servir du mental, sous une forme quelconque, pour poser le problème, ceci indique déjà que ce problème est vécu par notre organisme pour qu’il puisse se formuler comme question mentale. Donc cette question est avant tout une preuve de mon existence. Mais la pensée n’en est pas une, puisque la question est posée, si non formulée, sans que la pensée intervienne. Pourtant, Descartes, en tant que puissant penseur, a touché là un problème réel, quoique l’ayant, à mon avis, mal exprimé.

Les problèmes

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En effet, il ne s’agit pas de savoir si je suis ou ne suis pas, mais il s’agit de savoir si ma forme existe et si l’ambiance que j’aperçois existe et comment elle existe. Autrement exprimé, le problème est celui posé par Kant et ensuite aussi par Nietzsche : Le monde est-il une représentation de notre pensée. Autrement dit : est-il un effet de notre existence et, si oui, quel effet ? Or, s’il n’est pas un effet de notre existence, c’est-à-dire une projection de nous-mêmes, il pourrait exister en lui-même et nous serions une projection du monde. Mais alors notre intelligence, notre libre-arbitre, n’existeraient pas et nous serions aveuglément soumis aux puissances du monde, des choses comme toutes les choses. Or, nous savons, c’est notre intelligence de le constater. Nous savons que nous sommes différents d’un minéral, d’une plante, d’un animal. Nous savons que nous avons des facultés plus complètes que ces choses et êtres. Alors la question exige, ou bien d’admettre que le monde est une projection de nous, une projection de volonté de puissance. Ou alors, se pose le problème nouveau de l’évolution, qui nous situe, en tant que projection du cosmos, suivant une échelle évolutive - échelle dont la philosophie ne peut que constater certains échelons, mais reste ignorante de la majorité des éléments et, notamment, ne peut pas répondre aux questions de la raison d’être initiale, ni aux questions quant au but. Vous voyez donc tout de suite qu’il faut ou bien admettre la philosophie d’un Kant, en définissant le monde comme une volonté et une représentation ou imagination et, avec Nietzsche, la doctrine d’une volonté de puissance. Ou bien il faut répondre au problème fondamental qui est celui de la raison d’être. Or, pour répondre à cette question, nous devons immédiatement entrer dans le domaine de l’hypothèse. Et, puisque nous n’avons aucun point d’appui pour la formuler, nous nous trouvons en pleine métaphysique, qui, à cause de cela, devient la science religieuse, ce qu’on appelle communément : une science de la foi. En effet, nous commençons par admettre l’existence d’un monde, dont nous sommes la projection, et nous admettons en même temps que nous existons comme projection. Donc, des deux termes initiaux, nous n’avons que des suppositions, ou, plus exactement, nous admettons l’hypothèse du monde et l’hypothèse de notre existence.

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Quelle solution faut-il choisir  ? Celle de Kant ou celle de la science métaphysique ou occulte ? Voici donc la nature du problème. Il y a deux aspects, suivant les lieux où nous voulons nous situer. Or, la vérité est unique. J’entends par vérité, ici, la réponse qui, puisqu’elle doit résoudre le problème initial, doit donner une solution telle que toutes les possibilités, du moins celles dont nous avons connaissance, y trouvent une explication. Souvent je me suis ainsi trouvé devant des difficultés apparemment insurmontables où, par exemple, mon sentiment me disait que la solution était dans telle direction et où ma raison m’obligeait à aller dans la direction opposée. Et, ainsi que l’exige souvent, toujours peut-être, toute étude sérieuse, c’est avec le livre de sagesse, acquis à la fin, qu’il faut remonter au commencement de l’étude. Ainsi, avec une connaissance acquise à la fin, je veux remonter à l’origine. Cette connaissance de la fin me dit qu’un problème n’a jamais, en vérité, deux aspects, deux solutions possibles. Sans quoi il n’est pas un problème réel. Et ceci découle de cette vérité fondamentale, que je situe à l’origine de toute l’étude et que je souligne tout spécialement : c’est-à-dire que n’importe ce que je puis éprouver sensoriellement ou émotivement, ou que je puis penser ou imaginer, quelle que soit cette chose, elle peut exister ! Attention ! Il est grave d’admettre ceci. Si je puis imaginer un Dieu à grande barbe blanche, c’est qu’il peut exister. Si je puis imaginer un homme à quatre jambes et à six bras, c’est qu’il peut exister. Si je puis imaginer le sublime en la plus abjecte chose, c’est que cela peut exister, de même qu’une vierge-mère, et ainsi de suite. Mais, si j’imagine un cercle carré – cela ne peut pas exister – car par aucun moyen je ne puis ni voir, ni penser, ni imaginer, etc.… un cercle carré. Ce qui est cercle n’est pas carré, ce qui est carré n’est pas cercle. De cette vérité, j’ai fait la méthode de mon étude : si un problème est réel, c’est-à-dire inévitable, et qu’il présente deux aspects, c’est que les deux aspects existent. C’est-à-dire qu’il y sûrement un point où ces deux aspects s’unissent en une nature unique. Il n’y a pas, en fait, plusieurs aspects, mais quelque chose en moi divise l’Unité de la nature et pose deux pôles d’une même vérité, d’une même énergie, d’une même solution. Et maintenant, pratiquons la méthode et remontons à l’origine de l’étude.

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Le monde est une projection de ma volonté ou moi, je suis une projection du monde. Il est impossible de poser le problème autrement, car je ne puis pas affirmer : je n’existe pas, sans infirmer cette affirmation. Si j’adopte l’une ou l’autre des solutions, elle a des conséquences souvent absolument opposées. Pourtant, il y a un point de départ unique. Il doit y avoir dans ma question quelque chose qui appartient à l’un et à l’autre des aspects du problème. En effet, le monde est une projection de ma volonté, ou alors moi ; ma volonté, mon existence, enfin moi, je suis une projection du monde. Moi, je suis le centre du problème. Alors, que je sois cause ou effet, cela est secondaire ; le problème du moi se pose, le moi en soi. Plus que cela, il devient même secondaire de considérer mon moi, puisque le problème est universel et concerne la chose en elle-même. Car toute chose devant elle-même est en moi. Considération qui, immédiatement, répond déjà à la question : comment puis-je parler, penser, etc.… de Moi, comment le moi existe-t-il en générale ? La réponse est : une chose devant elle-même est moi. Une pierre devant elle-même est moi pierre, et ainsi pour tout. Et si la pierre ne peut pas se poser devant elle-même, elle l’est sans le vouloir, ou sans pouvoir le vouloir. Tandis que nous, humains, nous pouvons vouloir, et nous pouvons nous poser devant nous-mêmes et ainsi concevoir Moi, de nous. Cette possibilité est notre conscience. Ainsi, la conscience la plus haute est celle du Moi ou, pour ne plus employer ce mot qui prête à confusion : la conscience de l’Ego. Cogito ergo sum, non : je suis, donc je puis penser. Mais je sais que je suis parce que j’ai conscience de mon Ego, et toute autre chose étant son Ego, même si cette chose n’a pas de conscience de son Ego. Tout ce qui est, est Ego. Plus que cela  : ce qui n’est pas est Ego, puisque Rien en soi, Rien devant soi-même est Moi ou Ego. Voici que le mot de la Genèse  « Que la lumière soit et la lumière fut » et « Au commencement était le Verbe et le Verbe était en Dieu et Dieu était le Verbe », devient lumineux aussi, puisqu’il suffit que Rien de l’origine soit devant soi-même, en soi-même, pour que Ego soit. C’est-à-dire qu’il y ait quelque chose. Ceci est absolument vrai, puisque je ne puis pas dire  : eh bien que Rien, qui est devant lui-même – Rien -, ne soit pas, sans que, immédiatement, j’affirme l’absence de rien,

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donc quelque chose - et qu’ainsi de toute façon : la notion de Rien affirme quelque chose. La grande dispute philosophique se trouve donc maintenant posée sous une toute autre lumière. Que le monde soit une projection de moi ou que je sois, moi, une projection du monde, de toute façon la variante du problème réside en moi ; et non moi en la variante. Il y a en l’Ego, deux fonctions possibles qui, elles, doivent permettre cette situation double de l’Ego envers le monde, ou du monde envers l’Ego. Nous regarderons cela plus tard. Car, pour l’instant, il est absolument établi que, de toute façon, l’Ego est. Il est ensuite tout à fait inutile de lui donner un nom, puisque tout peut être le nom de cet Ego. Et pour baragouiner en latin, moi aussi, je dis : Ego est, ergo sum. En répondant à cette grande question de l’existence, j’ai donc aussi répondu au premier grand problème qui se pose : celui de la raison d’être. Pourquoi suis-je ? : par la nécessité de la cause et l’inéluctable fin immanente à la cause ainsi que son logique accomplissement. En effet, la cause est nécessaire. Elle est imposée, même à Rien. Je suis, parce que je suis Moi, Ego. Et je suis Ego parce que Rien, devant lui-même est Ego. La cause est inévitable, que j’admette quelque chose ou ne l’admette pas, que j’affirme ou nie, que je comprenne ou non. La cause c’est : je suis. Et si vous définissez cette ultime cause par le mot Dieu, deus, Dieu dit : je suis, et le monde, Moi, tout est. Ceci est la fin inéluctable de la cause : Ego. Et cette fin est immanente à la cause et s’accomplit en une logique absolue. Au commencement, il n’y a rien, et rien est la cause. Et la cause par son inéluctable développement vers sa fin inéluctable produit l’égo cosmique c’est-à-dire total. Vous savez maintenant ce que j’entends par Ego, et vous avez ici la première réponse au problème fondamental. Cette réponse comporte dans son énoncé, une notion qu’il est impossible d’éviter, celle du logique développement. Qu’il y ait développement, cela semble évident, puisqu’il y a suite depuis la cause jusqu’à l’effet final. Mais que cette suite soit logique, ceci ne semble pas imposé. Et, puisqu’il est impossible d’admettre une conséquence sortant d’une cause, sans que cette conséquence s’ensuive d’après une loi définie (ceci par ce fait absolu que la cause est unique et universelle, produisant un effet unique et universel  : Cause égale Rien, Effet

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égale Ego), qu’il n’y a pas de variante possible en ce magister, ce développement devient la loi et cette loi est en elle me identique à elle-même. Il y a donc loi, une loi d’enchaînement. Quelle est sa nature  ? Ceci devient le second problème que j’appelle celui de la logique, ou de la conséquence naturelle. Donc, après le problème de la raison d’être, il y a le problème de la logique. La logique, ainsi que nous le savons déjà, présuppose un point de départ qui est la cause. D’autre part, nous savons aussi que la notion de la logique vient après la notion de l’existence du but ou effet, immanent à la cause - et la logique se situe entre ces deux états. Elle est donc conditionnée par le commencement et la fin. Ceci pris dans le sens des extrêmes ou dans le sens des parties : chaque fois qu’il y cause, il y a aussi effet - donc un développement de la cause à l’effet. La cause comporte en elle-même, son effet. Seulement celui-ci n’est pas encore exprimé. L’effet est ainsi une expression de la cause. Et cette expression devient ce que nous désignerons par la notion de fonction. Or, la fonction est action. Nous entrons donc, avec le problème de la logique, dans un nouveau monde où une foule de notions se révèlent. C’est en somme le monde, tel que nous le connaissons, avec sa multitude de phénomènes. Ici encore, nous devons pouvoir déterminer les notions simples. C’est-à-dire ces notions, au delà desquelles nous ne pouvons plus réduire, c’est-à-dire imaginer plus simple. Sans vous faire passer par toute l’analyse de toutes les fonctions (travail pénible et extrêmement long que celui qui veut pénétrer dans la connaissance doit faire, mais qui n’est pas immédiatement utile pour l’exposé de la doctrine), je veux, puisque vous connaissez maintenant la méthode de travail, tout de suite passer aux données fondamentales. Quel que soit le phénomène que nous observons, ou les effets desquels nous pouvons prendre connaissance, nous savons qu’il y toujours une cause. Cette cause, nous la désignons, dans sa fonction, par rapport à l’effet, par la notion que nous en avons, par le mot actif, soit agissant. La cause est cause métaphysique d’abord. Et dès qu’elle entre en voie de réalisation de l’effet qu’elle génère, elle devient cause active. Quelle que soit la forme d’action, il y a une activité qui est cause. Or, la notion d’activité est essentiellement

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liée à la représentation d’un mouvement de la cause vers l’effet. Que ce mouvement soit quantitatif ou qualitatif, ce ne doit pas nous soucier pour l’instant. Un fait est certain  : tout mouvement exige un déplacement de cause à effet. Déplacement ! Il est impossible de délier la notion de mouvement de cette notion de déplacement, donc d’espace. Et l’espace défini par le mouvement désigne la notion du temps. Temps, Mouvement, Espace, voici les éléments de la fonction, soit du développement de la cause à l’effet. A la question de la logique, nous pouvons donc répondre  : La logique découle de la fonction, laquelle est elle-même un accomplissement en temps et espace, donc en mouvement, d’un effet produit d’une cause active. Nous pouvons très bien comprendre l’activité, du moment que nous la subissons ou que nous constatons des états qui la subissent. A l’origine, donc en la cause absolue, il y a activité. Nous pouvons supposer que, si à ce moment, elle agit contre Rien, nous ne pouvons nullement la comprendre. Car agir est synonyme, dans notre intelligence et dans notre notion de la fonction, de subir. Nous pouvons formuler cela ainsi, puisque nous pouvons supposer que ce doit être ! Rien est la cause active et Rien subit cette action. Donc, Rien étant égal à Rien au commencement, cause active et ce qui la subit sont identiques. Eh bien, si vous le voulez, nous allons éliminer de ce mot commencement, l’idée de temps. Donc, au lieu de reculer cet événement à une date, que nous ne pouvons pas situer et qui d’ailleurs n’a pas besoin d’être située (puisque enfin les fonctions dont nous parlons ne sont ni situées, ni limitées, ni conditionnées, mais sont des fonctions absolues), j’en arrive ainsi à dire ceci : l’activité et ce qui la subit et que nous connaissons comme résistance, sont identiques ou de même nature. En plus, au lieu de dire Rien-Cause et Rien-Résistance sont égaux, Rien étant égal à Rien, X est égal à X, n’importe quoi est égal à soi-même. N’importe quoi est cause et résistance et les deux, étant de même nature. Cela revient à dire : l’Ego, qui est l’identité de soi-même, est une totalité qui résume cause-effet, action-résistance. Et, entre ces termes, aussi les fonctions ou la logique universelle. Ego signifie donc en tant que cause, fonction et but : Cause-action-fonction-logique-temps-espace-mouvement-fin. Le mot fin est lui-même un résumé de

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choses encore à déterminer. Or, cet enchaînement absolu et invariable constitue des termes, qui, par la logique de leur développement, fixent une sorte de constellation d’éléments - lesquels, si variation il y a, sont nécessairement toujours soumis à une loi qui les groupe. La logique découle de la fonction et de la logique découle à nouveau une constellation, des groupes, que nous allons, dans l’ensemble des lois qui les dispose, appeler l’harmonie. Et ceci devient le troisième grand problème, le problème de l’harmonie. Tout groupement exige des termes à grouper. Ces termes peuvent être des choses, c’est du moins ce qui nous semple le plus compréhensible. Mais je dis : avant les choses, il y a les causes. Ces choses sont même l’aspect de l’Ego, ou du complexe causal et final. Alors je ne puis pas déterminer les termes du groupement, en tant que choses, extrêmement variables. Et pour rester logique avec moi-même, je dois les résumer en un terme différent. Ce terme doit à nouveau être un centre, un terme commun. C’est ainsi que, sachant que n’importe quoi est perceptible, constatable par rapport à une autre chose, par les qualités qui lui sont propres, je constate que, quelle que soit la qualité spécifiée, la qualité proprement dite est le terme commun. Le rapport des qualités constitue l’origine ou cause des groupements. Or, c’est par ces groupements que je prends connaissance des déterminations ou définitions, autrement dit, des mesures. Au problème de l’harmonie, je réponds donc : L’Harmonie est un rapport de qualités déterminant les mesures ou définitions. Ainsi, voyez-vous, en allant de l’Universel au particulier, la notion - qui est évoquée par la définition de la réponse aux problèmes fondamentaux - donne à nouveau le problème suivant. Ceci ne peut durer indéfiniment, puisqu’une fin est prévue dès la cause. Le nouveau et quatrième grand problème est donc, vous le comprenez maintenant, le problème des mesures. Vous ne pouvez pas encore, aujourd’hui prévoir l’importance formidable de la réponse à ce problème. Je dirai même que c’est le problème capital, car il comporte la réponse au but de la vie. Ceci, vous l’entreverrez immédiation si vous considérez que les mesures, qui résultent de l’harmonie cosmique ou de l’Ego, sont la détermination de tous les termes de cette harmonie - et par celle-ci, la fonction et la logique absolue, elle-même effet de la cause

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absolue, dans le but de la fin absolue. La détermination ou mesure fondamentale constitue donc la donnée fondamentale et absolue de toute la connaissance. Je touche ici une question très grave. Mais je ne répondrai pas aujourd’hui, pour la simple raison qu’il s’agit là de l’un des termes de ce que j’appelle l’initiation. Il s’agit ici d’une connaissance de révélation purement. Je suis prêt à la donner à celui qui le désirera. C’est-à-dire aura suivi le chemin aussi complètement qu’il faut le suivre pour que, tous les termes de l’étude épuisés, il se trouve effectivement posé devant l’absolue nécessité de cette révélation ou clef totale. Je cite ceci à cette place, parce que le développement l’exige et aussi pour vous annoncer toute ma volonté, tout mon désir, de vous donner cette chose, qui n’est pas absolument nécessaire pour le développement de la doctrine et ne se situe que comme une fin de vie et non comme une fin de savoir. En attendant, je tiens à vous affirmer que cette connaissance est vraie, que cette mesure existe. Je vous a déjà parlé de beaucoup de choses et je vous ai montré l’Ego. Et, si je suis obligé de garder par devers moi la connaissance du secret de la mesure, cela n’empêche pas qu’en suivant très attentivement mon enseignement, vous aurez déjà une très claire connaissance des choses de ce monde. Pour revenir à la réponse que demande le problème de mesures, cette réponse est déjà contenue en ce qui précède car, enfin, la mesure est la définition précise d’une cause à sa fin. Toute chose a en soi sa mesure propre, de ce fait. Mais cette mesure devient d’autant plus complète que la chose résume effectivement l’Ego cosmique. Ce que nous appelons la forme, n’est pas autre chose que la cristallisation de l’harmonie de son Ego et sa mesure. Cela revient à dire que la détermination de la chose en elle-même est sa mesure, la mesure de son Ego - ce que nous appellerons, si vous voulez bien, sa conscience. La conscience n’est pas autre chose que la mesure de soi-même en soi-même. Ceci semble très abstrait tant que nous ne laissons pas intervenir le terme de comparaison. Ceci est le cas pour le minéral et encore pour la plante. Mais dès que nous entrons dans le règne animal supérieur, nous voyons se faire cette dualité, où l’être de plus en plus animé, l’est, ou apparait tel, parce qu’il est susceptible de se mesurer lui-même. Autrement dit : il devient conscient de lui-même, prend

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connaissance de son Moi, de son Ego. Ainsi, je puis dire que toute chose a sa mesure propre ou conscience. Mieux encore, toute chose n’est que conscience en soi, ou toute forme n’est que la détermination ou parution d’un état de conscience. Vous m’aurez, je pense, compris. Et vous aurez naturellement éliminé de vous-mêmes cette antique et fausse notion de conscience intellectuelle que l’on nomme aussi conscience, mais qui n’a rien à faire avec la conscience cosmique. Au problème de la mesure, je réponds donc en résumé ceci : la mesure est la définition précise et absolue d’une cause à sa fin propre, soit la forme primitive d’abord - le genre, l’espèce, l’individu ensuite - et le complexe individuel ou complexe d’organes pour l’individualité, soit : la conscience. Par cette réponse, j’ai déjà cité tout un ensemble de choses en les classant, ainsi que par l’observation nous pouvons le faire, mais en les classant par ordre de perfection ou conscience. Pour considérer cet ensemble de choses, nous sommes obligés de poser un nouveau problème, celui du devenir. Remarquez que ce problème n’a plus la même importance que les quatre précédents. Il n’est plus posé par une absolue logique, puisqu’en fait le devenir est contenu dans la réponse aux quatre grands problèmes. Il devient un problème complexe et accessoire à la connaissance, mais cesse d’être fondamental. Nous sommes donc arrivés, avec la résolution des quatre problèmes fondamentaux, à cette fin dont je vous disais qu’elle ne peut pas être reculée indéfiniment. Si nous résumons un instant ces questions, afin de voir plus clairement la suite, nous trouvons que la raison d’être est motivée par la nécessité de la cause et l’inéluctable fin, immanente à la cause. Cette fin, nous la voyons être dans la conscience, qui devient en tant que mesure de l’Ego, la conscience cosmique. Et sans vous perdre en des détails, si vous vous posez à vous-mêmes cette question « pourquoi vous êtes sur terre, d’où vous venez et où vous allez  », vous devez maintenant comprendre que vous êtes sur terre par la nécessité immanente de la cause qui est Rien, et vous devez réaliser ainsi l’Ego cosmique, le Moi absolu par la cristallisation de la conscience absolue. Or, que vous le veuillez ou non, c’est la même chose. Vous le ferez avec des souffrances d’autant plus lourdes que vous vous refuserez de l’admettre et d’agir consciemment dans ce but.

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Le problème du devenir ne répond pas à une question sur la fin. Cette question a déjà une réponse dans la raison d’être. Le devenir n’est plus qu’une considération de connaissance, quant à la formation des choses, sortie de la cause Rien. L’Ego est une totalité, mais il n’est pas une forme. La forme est contenue en lui. Elle est variable dès l’instant où elle est définie. Il y a donc un deuxième problème accessoire général. Celui des variations de la forme, jusqu’au moment où les causes de ces modifications cessent. Il s’agit de l’évolution. Donc, après les quatre grands problèmes, il y a deux problèmes accessoires dont nous voulons regarder maintenant le premier, celui du devenir. En effet, la cause produit quelque chose qui ensuite évolue, du moins je veux employer provisoirement ce mot. Pour que la cause absolue devienne quelque chose, qui donc, dans sa forme n’est plus absolue, mais représente un stade de devenir dans la possibilité totale, il faut que la cause dans son activité, par le principe de l’harmonie ou des groupements, donne le caractère de ce groupement ou la future forme. Alors, il faut considérer tous les groupements possibles. Ceci nous ne le pouvons pas, à moins d’étudier en détail toutes les pierres, toutes les plantes, tous les animaux et hommes. Déjà, l’étude globale de chacun des règnes représente un travail formidable. Que serait alors le détail  ? C’est ainsi que par l’analyse, toujours plus poussée, on en arrive à ne considérer que les combinaisons possibles. Et finalement, même seulement le principe qui préside à ces combinaisons - de même qu’en harmonie musicale, avec le principe des proportions de longueur des cordes vibrantes - on peut établir les bases de toute la musique, qui, quelle que soit sa forme ou expression, est soumise à ces lois fondamentales, même dans les plus affreuses cacophonies. Or, avec l’établissement des principes premiers, là où je vous ai dégagé la notion de l’Ego, à la place des principes philosophiques, nous allons mettre les nombres. Car tout est contenu dans le premier terme de cette philosophie. Ainsi, la cause sera le nombre un, l’effet le nombre trois, tandis que toute la relation sera le nombre deux. Ceux-ci sont les trois premiers nombres, qui sont l’origine de tout. Car tout, en considérant les facteurs et les fonctions, est contenu en eux. Les nombres ne représentent qu’une quantité très restreinte

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des possibilités fondamentales. Mais ces possibilités sont les lois fonctionnelles de tout. Ceci constitue une science qui est intimement liée à celle des mesures. Mais je ne l’expliquerai pas ici en dehors des principes de base. Ainsi, la cause est le nombre Un. Mais, telle que la cause originelle indivisible - et, comme le Rien actif trouve nécessairement en son propre Rien passif la résistance, donc, se divise – ainsi, l’Un originel se divise en Un qui est et un qui n’est pas. Je ne parle pas de faits, je parle de possibilités. Suivant le bon principe, donc de cette double notion, immanente à la supposée notion de l’Un irréductible, résulte la première notion de Deux - constituant une Unité nouvelle, mais, elle, divisible en deux Unités indivisibles, cause Unique. La division préside ainsi à tout devenir et, immédiatement après, naît la notion de l’addition, laquelle est exigée par la présence de deux nombres qui sont Un et Deux : d’où le nombre Trois. Faites bien attention : la Cause est Un indivisible ou Rien. De ce Rien se dégage une activité qui trouve en soi-même sa résistance et, ainsi, donne le nombre Deux, tel au commencement de la Genèse : «  Dieu divise les eaux du ciel et les eaux de la terre  ». Ainsi, naît le nombre Trois, par addition. Lequel nombre Trois est la première forme. Effectivement, le nombre Trois comprend tous les éléments qui sont nécessaires pour avoir une notion d’une première forme principielle, le triangle, par exemple, en géométrie plane. Je dis forme principielle, car il n’y a pas encore la troisième notion nécessaire à la forme spatiale. Cette troisième notion est la multiplication. Or, il n’est pas possible de multiplier Un avec Un, mais il est possible de multiplier Deux avec Deux. Ainsi, le deuxième nombre, engendré par division, appelle le premier la multiplication, laquelle est le nombre Quatre. Maintenant, toutes les fonctions sont déterminées, la division, l’addition et la multiplication, ainsi que tous les facteurs, causes ou effets, de ces fonctions, soit Un, Deux, Trois et Quatre. Il reste la soustraction qui devient possible encore, mais elle n’ajoute rien à l’ensemble sauf une fonction négative : elle ne peut donc intervenir que lorsque toutes les formes possibles sont générées. L’ensemble des possibilités est donné. Il n’y en a pas d’autres. Et, ce qui est aussi formidable, c’est qu’avec

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leur détermination sont aussi déterminés les éléments fondamentaux de toute forme et ceux-ci sont au nombre de quatre. J’adopte donc la science des Anciens à ce propos et je dis : il y a quatre éléments qui président à tout. Or, en regardant bien, nous trouvons que l’addition globale des quatre Eléments : un plus Deux plus Trois plus Quatre donnent le nombre Dix, qui à nouveau fixe toutes les possibilités numériques imaginables. Avec cette décade, ce triangle originel des quatre Eléments, des quatre fonctions, toutes les formes sont données, et toutes les formes que je puis concevoir sont contenues là-dedans. N’importe quoi peut être n’importe quand, Cause. Et cette Cause est un nombre. Et suivant le nombre, la décade devient différente. Un exemple comme image : à côté du triangle Un, Deux, Trois, Quatre, je suppose une Cause qui au lieu de Un, est Six. J’ai donc, par les fonctions de la genèse du Triangle, les nombres 6, 12, 18 et 144, un total de 180. Ce nombre Cent quatre-vingt vaut pour la totalité de la Cause Six, seulement Dix. Il a, en rapport avec sa cause particulière, la même valeur que Dix a pour Un, et pourtant Cent quatre-vingt n’est pas Dix multiplié par Six. Or, même ces combinaisons ne sont pas sans limite. Elles finissent par se répéter si on continue. Et alors, on arrive à découvrir qu’il y a de véritables familles de combinaisons, qui finalement, vont être les origines des familles des formes. Ainsi, voyez-vous, se construit une science cosmique sur des bases excessivement simples. Mais, parmi les nombres, il y en a qui reproduisent la nature de la Cause première. C’est-à-dire les nombres premiers qui eux, non plus ne résultent pas d’une multiplication, et non plus ne sont divisibles. Ainsi Un, Trois, Cinq, Sept, Onze, Treize, Dix-sept. Chacun de ces nombres doit donc jouer un rôle générateur dans l’ensemble des combinaisons. Il serait vraiment trop long, et mal à propos, d’insister encore là-dessus. Qu’il soit dit seulement, en passant, cette vérité que ces nombres premiers sont effectivement l’origine des temps. Autrement dit  : les bases pour le calcul de la Genèse et la détermination des époques du Monde. Mais je le répète : la science des nombres est essentiellement liée à la science des mesures. Elle est science de révélation. Ce qui importe de noter ici est ceci : les nombres constituent les principes déterminateurs des formes. Et ainsi le problème du devenir est clarifié par l’étude de la Cause, des

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nombres et de la forme : ce sont les trois données, très connues, du connaissable, du mystère du devenir. Nous possédons maintenant la forme, elle est le Temps, Espace et Mouvement suivant un nombre et une décade de nombres possibles. Que va-t-il advenir de cette forme ? C’est le problème de l’évolution. La première forme - c’est-à-dire la détermination finale dans les possibilités des combinaisons (car il faut se rendre compte que seulement la fin des combinaisons devient la première forme de l’évolution ou mettons transformation) - Eh bien, la première forme est aussi celle qui résulte du nombre le plus grand, le plus complexe. C’est le dernier nombre premier qui se manifeste comme première forme. Il contient donc en principe tous les autres nombres inférieurs, jusqu’au premier Un irréductible. C’est pourquoi, on peut dire  : il y a dans la matière première tout ce qu’il faut pour constituer le monde, et je vais, pour la bonne entente, adopter le mot des Anciens, c’est-à-dire le mot chaos. Le mot chaos est le commencement d’une transformation, autrement dit l’origine matérielle ou formelle, d’où sortent les multitudes d’autres formes, toujours plus simples et plus pures, jusqu’à la constitution de l’Unité irréductible définitivement clarifiée. Pourquoi ce passage dans le Chaos de la part de l’Unité absolue ? Pourquoi le devenir ? Je vous l’ai expliqué, c’est la nécessité de l’origine. Et pourquoi et en vertu de quelle force le chaos se purifie-t-il ? C’est toujours la même fonction de l’Ego. Je vous ai montré tout à l’heure que le but de l’Ego est d’acquérir la conscience, dont le suprême état est la conscience du Moi ou reconnaissance de la chose en elle-même par elle-même. Comment ceci s’accomplit en l’homme, déjà très avancé en général, nous le verrons dans les prochaines conférences. Mais il faut déjà se rendre compte ici que la fonction de la purification, qui n’est qu’une augmentation de conscience, ne peut se faire que par la soustraction d’éléments impropres à la fonction particulière d’un complexe. Maintenant seulement, entre donc en jeu la soustraction et ceci à travers un complexe de forces, dont le caractère est identique à celui des forces de l’origine mais dissemblable en tant que but. En effet, là où au commencement, le temps, le mouvement et l’espace entrent en fonction pour finir par déterminer une forme. A partir de ce moment,

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ils entrent en jeu pour libérer cette forme de ses emprises. Si vous voulez globalement considérer le devenir comme la cause active, vous comprendrez comment l’évolution, ou libération, globalement prise, devient la cause passive ou résistance immanente à l’activité initiale et aussi totale. L’évolution est motivée par le devenir. Mais il faut bien comprendre qu’il n’y a pas, quelle qu’en soit l’apparence, évolution de forme. Celle-ci est effectivement en le devenir ! Il n’y a qu’évolution de conscience. Or, l’étude pour savoir s’il y a évolution ou non, et, s’il y en a une, en quoi elle consiste ? et comment elle se fait ? Ceci fait partie de la suite de ces instructions. Je tiens simplement à répéter, pour terminer ce soir, qu’il y a effectivement quatre grands problèmes au delà desquels on ne peut pas aller, sans lesquels il n’y a pas de science à imaginer. A ces quatre grands problèmes viennent s’adjoindre deux problèmes accessoires, celui du Devenir et celui de l’Evolution, auquel dernier je n’ai pas encore répondu, mais dont les éléments de la réponse sont contenus dans la science des mesures et nombres, ou autrement dit, la définition de la conscience de l’Ego. La méthode dont je vous ai parlé au commencement, je l’ai fidèlement appliquée à toutes ces études. Et si vous vous en souvenez, vous saurez conclure ceci : Quand l’élément commun à toutes les possibilités est déterminé, sans souci du nom, ou de ce que je sais de lui, je puis dire qu’il est le centre vrai, il est la base certaine, il est la solution très véritable. Cherchez ce point vrai, et toujours nous serons d’accord. Car il n’y a qu’une vérité, comme il n’y a qu’un monde et une seule Genèse, et une seule Chose, d’où sortent, par adaptation, toutes les choses.

DEUXIÈME CONFÉRENCE

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Hier, nous avons terminé sur l’idée du Chaos, la dernière substance formée. J’ai dit qu’elle était de ce fait la première substance de l’évolution. Et nous avons vu aussi qu’elle ne peut entrer en évolution que par la soustraction des éléments impurs contenus dans ce chaos. Entendons-nous bien. Rien n’est impur en soi. Mais tout peut être impur par rapport à un groupement, c’est-à-dire que la partie gênante dans une harmonie est impure pour elle. Comment se passe cette purification et que signifie-t-elle ? En le chaos ou dernier nombre sont contenues toutes choses ou tous les nombres. Ce chaos est devenu ce qu’il est par la logique des fonctions causales. Il a donc en lui la force fonctionnelle de l’origine. Ce qui veut dire que les mêmes raisons qui l’ont fait naître étant en lui, vont aussi en lui le faire agir dans le sens purificateur. Mais là où nous avions affaire jusqu’à ce moment à des puissances abstraites, nous avons affaire maintenant à de la matière, qui incarne pour ainsi dire ces puissances. Ces puissances sont liées dans la forme, laquelle forme est un complexe numérique ou harmonie des nombres. Le chaos, mettons le nombre Dix, a en lui toutes les nombres qui sont en dix. Ce nombre Dix est composé une fois de dix fois un, ensuite de cinq fois deux, etc…, d’une série de possibilités donc chacune représente

Le but de la vie avec son problème de connaissance

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un groupement possible, autrement dit une forme possible après la purification du chaos. Or, quel que soit le nombre origine, dont la décade (ou les quatrièmes éléments) constitue le dernier nombre ou chaos, sa fonction reste celle de l’unité par rapport à dix. Voici : nous allons maintenant entrer dans une question assez abstraite. Et nous allons un peu quitter le nombre dix, pour, à travers l’expérience, y revenir. En étudiant les phénomènes, je suis arrivé à des observations toujours confirmées. C’est qu’ils étaient toujours formés de sept facteurs. Ainsi la lumière a sept couleurs, la gamme musicale a sept sons, le spectre des vibrations a sept groupes dans lesquels, entre autres, se trouvent la chaleur, la lumière, etc.… aussi distincts les uns des autres depuis les oscillations électriques jusqu’aux rayons X, que les couleurs entre elles. Et ainsi de suite, et après analyse, j’ai trouvé que tout phénomène est composé de sept facteurs. En décomposant ces sept facteurs, j’ai trouvé mieux encore ! Pour les nouveaux venus, je veux donner l’exemple devenu classique pour les anciens : Le choc d’une baguette sur cette table donne un son. En analysant ce phénomène, je trouve qu’il y a :

I – a) la baguette en mouvement, b) le heurt de la baguette contre la résistance table, c) la vibration de cette baguette sur la table.

II – Il y a : a) la vibration des corps choqués, b) l’air qui reçoit cette vibration, c) la vibration transmise par cet air dans un rayon déterminé.

III – Ensuite, il y a : a) la vibration atmosphérique, b) le tympan, résistance de mon oreille, c) la vibration transmise par le tympan.

En analysant ce phénomène superficiellement ainsi dans ces fonctions simples, nous arrivons à distinguer nettement trois groupes qui, liés ensemble, produisent l’effet que nous allons percevoir comme

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son. Chaque groupe a trois fonctions, ce qui fait neuf en tout. En regardant de plus près, nous constatons ensuite que la fonction c) de I se confond avec la fonction a) de II, et celle c) de II avec a) de III. Ainsi, il reste en tout sept termes que j’appelle les facteurs du phénomène. Ainsi ce phénomène, comme les autres, est fait de sept facteurs dont l’étude me révèle l’existence de neuf fonctions, pour déterminer un phénomène, en ce cas le son. On peut très facilement pousser cette analyse plus loin et trouver, par exemple, que la vibration, en tant que phénomène, est elle-même septuple de fonction, et ainsi de suite. On aurait finalement quarante-neuf facteurs, dont sept principaux, chacun avec sept sous-facteurs. Tout phénomène est ainsi constitué, c’est une loi absolue de la matière, la loi de la genèse des choses. Ainsi en sept jours Dieu crée le ciel et la terre, et tout ce qui y vit, avec la puissance des neuf hiérarchies célestes. Beaucoup de choses découlent de ces constatations. Toutes les choses viennent de cette loi de la genèse. Nous allons constater les faits principaux. D’abord, nous voyons encore une fois que l’existence d’une cause quelconque - qui dans le devenir est puissance en soi, mais dans la matière est toujours matière en activité - trouve une résistance qui est de même nature. Ici, la baguette est active parce qu’en mouvement - et sa résistance est une matière (la table) en moindre mouvement, de ce fait en résistance. Ainsi, ce que je disais hier pour le principe se confirme aujourd’hui pour le fait :

1) La résistance est immanente à la nature de l’activité de la cause. 2) Dès qu’il y a une cause active, il y a aussi phénomène, puisque cette cause active trouvera nécessairement sa résistance.

Il s’ensuite autre chose encore. C’est que le phénomène proprement dit est tout le lien, toute la fonction logique, entre la cause active et l’effet qui résulte de la résistance à celle-ci. Le phénomène est donc la mesure, ou conscience, ou pour nous expliquer, la connaissance de la chose en soi-même : le Moi ou Ego. La résistance est l’activité « moins » de l’activité en cause. Donc elle mesure cette activité, laquelle mesure est le phénomène.

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Je vous prie de toujours considérer avec moi ces choses dans leur sens universel, car cela évitera des erreurs ou des pertes de temps. En effet, que le phénomène soit particulier ou cosmique, cela est secondaire. La fonction reste la même, ainsi que le principe de la cause et de l’effet. Et finalement : si un phénomène est l’Ego, tous les phénomènes sont l’Ego et la totalité des phénomènes est l’Ego. Donc il n’y a pas de différence principielle à faire entre le chaos et la cause originelle, puisqu’il sort d’elle par nécessité. Quel grand chemin nous avons déjà parcouru ! Revenons maintenant à notre décade. Elle est un nombre triangulaire qui ne peut pas être composé autrement qu’ainsi :

II I

I I II I I I

Or, comme tel, ce triangle est fait de neuf unités qui entourent une unité centrale, le deuxième nombre du troisième nombre. En mystique, on dirait le christ. Ce sont les neuf fonctions de notre phénomène Un. Si nous les transcrivons dans le schéma de la genèse, nous verrons que ces neuf fonctions donnent pratiquement sept facteurs. Remarquez qu’avec le triangle, cela aussi est démontrable, mais cela fait partie de l’étude des nombres, la science des mesures, et ne fait pas partie de ces instructions-ci. Si maintenant, nous mettons en parallèle de ce schéma et des sept facteurs, un phénomène très connu où les sept facteurs sont tangibles, nous allons apprendre encore quelque chose d’admirable.

C V R 1 3 2 VC V R 4 6 5 VC V R 7 9 8

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Nous allons prendre pour cela l’image la plus frappante, le spectre lumineux avec ses couleurs : Rouge, orangé, jaune, vert, bleu, indigo, violet. Et si nous les classons dans l’ordre des facteurs, nous aurons : rouge 1, jaune 2, orangé 3 et 4, bleu 5, vert 6 et 7, indigo 9, et violet 8. Ceci est l’ordre du devenir, tandis que l’ordre d’apparence sera connu par le phénomène  : rouge 1, orangé 2, jaune 3, vert 4, bleu 5, indigo 6 et violet 7.

Dans le spectre des couleurs, nous distinguons : 1) des couleurs simples ou élémentaires, 2) des couleurs mélangées, et en plus, 3) des couleurs complémentaires entre elles deux par deux.

Ainsi, rouge, jaune, bleu sont simples. Orangé, vert, violet sont composés et rouge-vert, orangé-bleu, jaune-violet sont complémentaires. Il semble que j’oublie l’indigo, mais je ne l’oublie pas, vous le comprendrez tout de suite. Voyons maintenant comment correspondent ces caractères avec le schéma de la genèse. D’abord les simples : rouge 1, jaune 2, bleu 5, et les mélangés : orangé 3 et 4, vert 6 et 7, violet 8. Or, le violet correspondant à la troisième résistance doit être situé là par la logique, et pourtant se trouve à une place où il n’y a pas de mélange. De même l’indigo se trouve à une place où il doit y avoir un mélange. Or, veuillez constater ceci : Violet ne nous est compréhensible que comme un mélange de rouge et de bleu. Mais jamais ce mélange n’a donné de violet. Jamais on n’a pu obtenir autre chose qu’un rouge plus ou moins pourpre, ou un bleu plus ou moins rouge. Dans la psychologie des couleurs, on parle du rouge chaud et du bleu froid. Et ces deux extrêmes n’ont jamais pu, et ne peuvent pas non plus, donner autre chose qu’une couleur neutre tendant vers le froid ou le chaud. Tandis que le violet est franchement nature. De ceci, découle et se comprend la situation du violet qui, figurant dans les mélanges apparents, n’en est pas un en fait. Pas plus que la résistance extrême dans les phénomènes du monde ne peut être autre chose que la négation de toute activité, composée de tout, et tout de même unique en soi. Ainsi le violet, lumière obscure, couleur froide, extrême du

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spectre, négation des couleurs, affirmation du tout. Et maintenant, regardons l’indigo. Il est situé à une place où, apparemment, on pourrait supposer un mélange, une continuité de fonction. Or, c’est l’instant où le tympan transmet le son à l’oreille. Sans doute, le phénomène continue, mais sur des bases toutes différentes de la transmission du son extérieur. C’est autre chose qui commence, qui n’a rien de commun avec ce que nous appelons sons. Le nerf auditif entre en jeu avec toute la mécanique de l’oreille. De même, l’indigo joue en couleur un jeu bizarre. Il n’est ni bleu ni violet, et néanmoins semble sorti du bleu. En effet, le bleu est bleu-clair. Et rien ne peut le rendre sombre, ni mélange, ni atténuation de lumière. Donc l’indigo, tout en étant de la nature du bleu, n’est pas du bleu, mais autre chose  : un bleu-sombre, dont la suite, la conséquence nous échappe directement. C’est ainsi que dans les complémentaires, l’indigo est complémentaire à l’orangé. Nous le remplaçons par le bleu en apparence. Passons maintenant aux complémentaires : Rouge-vert, soit 1 et 6 et 7 (complexe), Orangé-indigo ou bleu, soit 3 et 4 (complexe) et 9, Jaune-violet, soit 2 et 8 (complexe incompréhensible, dernière résistance ou lumière obscure). Ainsi la première cause (rouge) a son complément en le deuxième effet (troisième cause), la première résistance (jaune) l’a en la troisième et dernière résistance, le premier effet (orangé) l’a en le dernier (troisième) effet. Ainsi, dans les fonctions, chaque troisième terme ou dernier terme du même genre dans un ensemble Ego, est complémentaire au premier. Un est complémentaire à Trois. Si maintenant, vous voulez vous reporter à l’enseignement d’hier, vous vous souviendrez que la cause Un devient la réalisation par sa propre négation. Et ainsi détermine Un et Deux, soit Trois, comme premier nombre de la manifestation, ou chose, la cause Dieu manifestée. Si, à ce moment, je vous ai dit  : Un irréductible est complémentaire avec la trinité de la cause manifestée, vous ne l’auriez pas cru ou pas compris. Or, vous admettrez dès lors que, puisque complémentaire veut dire : ce qui unit, se nie mutuellement, se complète jusqu’à la cessation d’être, comme rouge et vert, etc... Alors la cause et sa manifestation se complémentent jusqu’à la

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négation de l’un et l’autre, jusqu’à l’affirmation du principe, telle que l’est la lumière blanche pour les couleurs. Je dis donc : du moment qu’il y a quelque chose, ce quelque chose est actif et trouve en soi-même sa résistance dans sa moindre activité. Dès l’instant où ceci se produit, apparait le phénomène qui est neuftuple fonction et septuple apparence de facteurs. Et ces sept facteurs se complémentent de un à trois jusqu’à négation nouvelle et définitive des facteurs, pour affirmer une totalité principielle qui est l’Ego, ou Moi apparent momentané d’un Ego jusqu’au Moi total. Ceci est le principe duquel sortent toutes les applications, dans les nombres contenus en le Chaos. Ce Chaos jouant le rôle d’une unité primordiale complexe, qui, ainsi, par successive complémentation, se purifie afin de donner l’être total ou Ego cosmique. Les phases de cette purification sont, pour les familles générales, les règnes, et pour les espèces, etc.., les groupes de nombres. Voilà  : dès cet instant, j’ai répondu au problème resté en suspens hier : le problème de l’évolution. L’évolution est nécessaire, immanente dans le principe originel qui détermine le devenir. Elle détermine l’Ego des éléments qui vont devenir l’Ego des organes, lesquels vont donner l’Ego des organiques, ou intelligence. Puisque nous savons maintenant qu’il y a matière première en le Chaos, et qu’il y a évolution, voyons comment elle se fait : Avant tout, donc, le Chaos se divise. Ainsi, toute chose qui n’est pas homogène, toujours, abandonnée à elle-même se divise. Elle se divise en deux états, dont l’un est affirmatif par rapport à l’autre qui est négatif. Cette affirmation l’est pour n’importe quoi. Mais dans sa totalité, elle est affirmative ou de la forme ou de l’absolue cause. L’affirmation de la forme est aussi la volonté de la continuation de la forme. Cette affirmation est donc pour la créature, son ciel, son idéal, son suprême désir. Les deux états divisés constituent donc entre eux les suprêmes extrêmes complémentaires, dont l’un est l’unité et l’autre la trinité. Il résulte ainsi ce que les Anciens nommaient les quatre éléments. Et lors de la séparation du Chaos, l’une des parties est un élément (mettons comme dans la Genèse l’esprit de Dieu, puisque Un est aussi la cause de tout, l’absolu irréductible), et l’autre partie est trois éléments (mettons : les eaux de la Genèse, qui contiennent l’air, l’eau

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et la terre). Ces symboles sont pris dans leur signification absolue de principe fluide, aqueux et solide. Mais encore ils sont contenus en la partie qui est Trois. Or, nous savons maintenant que cette partie Trois est l’Unité réalisée, le Nombre de la forme, la cause matérielle des choses, comme Un est la Cause spirituelle, ou éternelle ou absolue. Par rapport à Un, Trois est lourd. Du moins appelons-nous lourd cet état qui est l’autre tendance, elle, opposée à la nature de Un. Nous pourrions appeler Un : lourd, et Trois : sans poids, ce serait la même chose. Mais alors notre mentalité serait entièrement différente de ce qu’elle est. Peut être dirions-nous à la place de « raisonnable » le mot «  mystique  ». Car il faut rester logique avec soi-même. Et si nous convenons d’appeler le Trois lourd, alors tout ce qui en découle est pesant. C’est la matière. Ce que signifie le poids ? Nous en toucherons un mot un peu plus loin. Donc, Trois qui est lourd ou en bas, et Un qui n’a pas de poids en haut : ainsi se manifeste la séparation. Or ce Un, en haut, est la cause. Son plus grand désir est de trouver son complément, ce qui le plus lourd, en bas. Mais celui-ci est séparé et lié aux deux autres nombres. Donc le désir de complémentation de Un, séparé du Chaos, va tendre à chercher des compléments provisoires répondant plus ou moins à son appel (moins d’abord, plus ensuite), jusqu’au total de ce qui se complémente le mieux à sa nature, et qui, séparé encore, est en bas. Veuillez, je vous prie, accepter cette explication imagée de l’évolution, telle que je vous la donne. Je m’efforce de ne pas donner de nom défini, donc restrictif, aux termes de cette explication. Mais je vous certifie que l’on peut y appliquer n’importe quel nom, si on est logique dans la dénomination suivante : c’est le phénomène exact, absolument vrai de l’évolution. Pour revenir à cette complémentation de Un avec toutes les parties lourdes autour de lui, elle se fait. Et ainsi produit toujours à nouveau des unités triples, lesquelles étant lourdes, vont en bas, s’ajouter à la totalité lourde déjà séparée. Ainsi se fait la quantité, qui n’est qu’une addition de parties de même nature. Ceci dure jusqu’à ce que tout le Chaos soit épuisé. Donc jusqu’au moment où il n’y a plus rien entre Un et Trois. C’est-à-dire que la masse totale de Trois remplisse tout le Chaos et que Un entre en contact avec le produit de sa

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séparation. Alors Un cherche en Trois le terme pur de son complément. J’entends que parmi Un, Deux et Trois constituant le poids lourd de la séparation, l’Un absolu va séparer, pour sa complémentation, le nombre Trois - telle la lumière rouge va chercher la lumière verte, la provoquer, jusqu’à ce qu’en toute pureté elle réponde au désir de sa nature. Or, j’ai appelé Trois, l’ensemble de trois éléments séparés de Un. Et parmi ces trois éléments, le nombre Trois correspond à la terre, le nombre Deux à l’eau, et le nombre Un à l’air, tandis que Un absolu correspond au feu. Celui-ci est inépuisable, puisqu’il ne représente aucune quantité pesante.

I = Cause éternelle = I =

I I = I I I =

Alors le feu va se conjoindre à Trois et former la terre ignée, en se séparant de l’eau. C’est ce qu’on appelle la dessication, et qui répond en la Genèse à la séparation des eaux de la terre sèche. Le nombre Deux, ou eau, refuse d’une façon formelle cette complémentation avec Un, ou le feu. Et ceci doit vous sembler maintenant tout naturel, si vous vous souvenez qu’il correspond dans le spectre à la couleur jaune. Le jaune n’est pas complémentaire au rouge, parce que deux est le dédoublement de Un, ou Un vis-à-vis de soi-même, le rouge vis-à-vis de soi-même. C’est pourquoi le jaune est la couleur le plus vive. C’est pourquoi en mystique le nombre Deux correspond au Christ. C’est pourquoi l’eau est l’aspect contraire ou incarné du feu. Et le feu ne peut à aucun moment se lier à l’eau. Mais le feu maintenant est lié à la terre, Un à Trois. Il a pris corps en la terre, en animant celle-ci. Il y a donc à partir de ce moment : la terre, Un en Trois, sèche et de nature feu. Autrement dit la Cause absolue incarnée ou devenue forme, c’est-à-dire terre, et contre elle l’eau, la cause dédoublée en elle-même. La seule chose qui reste est l’air, Un du triangle Trois. Or, ce Un est de la nature du Un absolu, et de ce fait, est parente avec Deux, l’eau, et Trois, la terre. Il est le lien entre les deux opposés

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eau et terre. A travers lui, Un ou la terre, va se faire une possibilité d’union. C’est ainsi qu’à travers l’air atmosphérique, la terre va se lier à l’eau et produire la chose vivante qui est  : la conjonction des éléments complets eau et terre, la conjonction des opposés de la nature. Et cette conjonction est vie. La vie est la conjonction des deux aspects incarnés ou formés de la cause absolue. Elle constitue une interpénétration des deux éléments opposés jusqu’à assimilation de l’un par l’autre. Les Anciens, grands respectables maîtres de la Sagesse, ont essayé de rendre compte de cette conjonction par un symbole graphique. Ainsi, ils ont donné à l’eau le symbole d’un triangle ayant la pointe en bas pour bien montrer que c’est le feu, également un triangle tendant en bas, vers le poids, vers la matière, tandis que le triangle feu a la pointe en haut. Ils ont joint ces deux extrêmes en un nouveau triangle qui est l’Hexagramme, ou conjonction du feu par la terre, avec l’eau. Donnant ainsi l’état le plus parfait qui soit, puisqu’il est la reconstitution des natures de la cause absolue, séparée en oui et non, en affirmation et négation. L’hexagramme est ainsi le symbole suprême de la fonction de vie absolue, ayant atteint le terme final et absolu de toute conjonction. Comment cela se fait ? Ceci est la science secrète de l’alchimie, ou génération de la perfection, ou pierre philosophale, en partant de la matière première. Il est toutefois possible de se rendre compte, sans être initié à cette science qui fait partie du Temple, de la fonction de cette conjonction. Je vous prie d’avoir les oreilles et l’entendement : toute la nature n’est que cette conjonction. En effet, à coté de l’eau et de la terre absolue, il y a beaucoup de sortes d’eaux et de terres. Toutes, en se conjoignant, donnent un hexagramme ou fruit. Mais parmi toutes, il y en a un qui est plus propre à l’œuvre absolu ou Grand Œuvre. Je vous cite presque textuellement, en ces paroles, un passage du grand-maître philosophe et alchimiste, Basile Valentin. Or, chacun de ces fruits est un terme de l’évolution totale. Et globalement pris, le premier s’appelle métal, le deuxième végétal, le troisième animal et le quatrième humain.

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Ainsi, l’évolution se fait par : a) la séparation du chaos, b) l’affirmation et négation, soit purification des éléments, c) la conjonction des complémentaires, d) l’assimilation ou transmutation des éléments conjoints, e) … ce que nous allons voir un peu plus tard.

Tout ceci s’appelle la vie, et nous pouvons maintenant affirmer que : La vie en fonction a pour but de réaliser les mesures, ou la conscience, depuis le minéral jusqu’à l’homme et… au-delà de l’homme jusqu’à la conscience parfaite, absolue, détachée de toute forme. Comment ce dernier stade peut s’accomplir, nous le verrons dans la troisième conférence. Pour l’instant, nous avons encore beaucoup de choses à voir avant ce moment. Si nous mettons, pour entendre ce qui a été dit, des œillères, nous verrons les minéraux, les plantes, etc.… chaque chose en particulier. Nous pouvons nous permettre de restreindre ainsi, pour en regarder l’évolution dans la vie d’une seule chose, mais pas avant d’avoir regardé l’ensemble du monde. Ainsi, les choses qui vivent ici se nourrissent du feu du soleil, par la terre et l’eau de cette terre. Mais cette terre elle-même est une parcelle d’un ensemble, mettons une plante d’un monde plus grand. Je dis une plante, mais c’est faux, car notre terre est un homme formé sur la terre cosmique. Mon dieu, que tout cela est vaste, et si petit aussi, puisque c’est contenu en ces trois mondes, Un, Deux et Trois. Je vous ai dit que les nombres constituaient entre eux des groupements ou harmonies. Ainsi, les choses entre elles constituent des harmonies. Et il y en a qui sont principielles, elles donnent le son, la lumière, etc… Non qu’elles soient dépourvues de substance, mais elles résultent d’états, mettons vibratoires, ou plus exactement, énergétiques. Avant de toucher à ces choses, voyons encore rapidement les autres harmonies, plus primitives, qui sont celles des formes, ou groupements de corps matériel. Jetez sur une table un nombre de billes, et celles-ci, sûrement, constitueront une constellation ou groupement particulier. Ces groupements ont un caractère très déterminé, répondant par un nombre, etc.… à un aspect de toutes les possibilités de la nature. Ainsi les artistes modernes n’ont rien inventé.

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La cause originelle, il y a longtemps, a jeté ses constellations dans l’univers, et de cette manière, a divisé le monde en douze tranches ou lieux qui répondent à toutes les possibilités. On les appelle zodiaque ou zoodiaque parce qu’ils répondent à des natures vivantes, mais non intelligentes, des types vivants, des caractères. Et ainsi sont, pour ainsi dire, animales de nature, et non seulement minérales ou matérielles tels que les corps célestes qui les constituent. Prenez un nombre quelconque, il entre nécessairement dans un groupe qui est défini. Les constellations possibles d’un nombre de corps quelconques entrent ainsi nécessairement dans une forme fondamentale, car les groupes de nombres sont les origines des formes. Or, ces possibilités sont donc également définies. De la science des nombres, il ressort que ces constellations sont nécessairement au nombre de douze, ni plus ni moins. Et de ces douze, six sont complémentaires de nature aux six autres, comme oui et non, comme l’eau et la terre-feu. Il n’y a pas de hasard, car il y a une loi qui préside à tout et tout sort d’une chose unique, d’une loi unique, d’un état unique, de l’absolu, de l’éternel. Mais les constellations ne sont pas éternelles. Elles vivent de cette vie première qui tient liée la matière en sa forme. Leurs formes varient, mais en variant restent dans le principe de leur harmonie. Les corps, qui entre eux-mêmes varient en constellations, sont eux-mêmes des constellations de parties moindres et leurs mouvements suivent les mêmes grandes lois de la formation. Et ainsi de suite, un grain de poussière est une constellation de parties corporelles, lesquelles sont faites, suivant les mêmes lois, d’atomes. Le monde est une image du tout ! La loi est absolue, simple et éternelle en l’absolu. Lorsque quoi que ce soit est, cela se divise en deux parties, dont l’une est en haut et l’autre en bas. Et lorsqu’il ne s’agit pas de matière, mais d’énergie, on dit, au lieu d’en haut, positif, et au lieu d’en bas, négatif. Et ces deux extrêmes se cherchent et se meuvent pour se trouver.Et, entre ces deux extrêmes, il y a l’eau, c’est-à-dire le point neutre, séparé de l’un et de l’autre. Pour se trouver, les deux extrêmes compléments déterminent sept centres ou facteurs, chacun pour soi sept, ce qui fait quatorze dont les deux septièmes se joignent dans le centre neutre, qui ainsi lie les deux extrêmes, car en lui se trouvent le positif et le négatif. Mettons à la place de sept lieux ou facteurs, les sept couleurs

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ou facteurs des phénomènes, ou  planètes autour du soleil neutre. Chaque couleur est ainsi un cercle, dont la partie positive est visible, la partie négative invisible. Du centre neutre et rouge de cette sphère à la périphérie violette, l’actif trait d’union positif cherche le passif trait d’union négatif, à travers toutes les couleurs, va et vient jusqu’à la complémentation. C’est une sphère qui se dilate et se contracte. C’est le monde qui respire et ainsi appelle le mouvement tourbillonnaire et spiralique, imprimant aux parties des mouvements rotatoires et fixant sept corps ou planètes. Quelques-uns parmi vous savent ce que je veux dire. Mais laissons cela, que cela serve de note en passant. Pour revenir au fait, l’atome n’est pas un soleil électron avec des planètes ions. Ceci existe, mais n’est déjà plus atome, mais effectivement molécule - comme le système planétaire est une molécule du monde, dans lequel il y a aussi des nébuleux atomes. Lorsque la molécule est constituée, elle comprend un centre neutre forme, ou soleil ou électron, avec une série déterminée de planètes ions. Le nombre de ces planètes, leur masse et vitesse de rotation sont absolument déterminés pour un système qu’en chimie, on appelle un élément. La rotation détermine un axe, lequel en sa partie positive (droite-gauche) est appelé nord, et en sa partie négative est appelé sud. La position relative d’une molécule envers une autre dans leur aspect nord et sud détermine une attraction mécanique nord à sud et une répulsion sud à sud et nord à nord. Ceci est le phénomène magnétique qui, lorsqu’il y a alternance, produit le phénomène électrique. Ceci encore soit dit en passant. Car là réside la source d’une science des phénomènes atomistiques et énergétiques dont la science ordinaire n’a pas notion. Ce qui est important à retenir, c’est que les formes sont un résultat du groupement déterminé par des puissances d’ordre magnétique-électrique des molécules - elles mêmes déjà effet d’un phénomène atomique. L’atome, la molécule, les corps, sont des images du cosmos, car tout est sorti de la même origine suivant le même principe. Ainsi, les formes fondamentales sont devenues par la nécessité de ces groupements, lesquels ne peuvent pas être autrement. La première forme est celle qui est comme toujours, sur trois axes, c’est le cube. La deuxième forme primitive est le prisme hexaédrique

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à quatre axes. De ces deux principes sortent toutes les formes. Je ne puis pas ici entrer dans une étude de la cristallographie. Il suffit de noter que les cristaux constituent effectivement le champ le plus fructueux pour démontrer, dans la forme, les principes éternels. Ayant maintenant passé rapidement par les indications essentielles de la formation de la matière, il est encore urgent que je revienne sur une autre étude. Celle des données fondamentales qui résultent du jeu de vie de la matière, c’est-à-dire des éléments de mesure de toute philosophie expérimentale. Lorsque je vous ai parlé hier de l’Ego, je vous ai dit qu’il était cause-active-fonction, - soit temps, mouvement et espace et fin. Cette fin, je vous l’ai dite être complexe. Or, maintenant que nous avons, en opposition de la cause absolue, initiale-active, trouvé la matière, nous avons aussi le terme extrême, que nous allons, avec la science, appeler d’un mot, mettons générique, soit la masse. Aux deux extrêmes du monde, nous avons d’une part une cause X, et d’autre part la masse. Remarquez que ceci est, comme tout ce que je vous ai dit, original, c’est-à-dire que la science est encore loin d’avoir clarifié la question dans cet esprit. Donc, nous allons déterminer la masse par rapport à la cause qui est, en tant qu’opposition absolue à la masse ou chose, une absence de masse ou Rien. Ce rapport est le volume de la masse, soit la notion de l’espace. Entre deux points extrêmes d’une ligne, nous allons, au milieu de cette ligne, tracer un point qui signifie la mesure universelle de la masse, l’espace. Cet espace est donc à nouveau en relation avec la cause d’une part et d’autre part avec la masse. De son rapport avec la cause, nous allons voir naître en tout premier lieu la notion du temps. Car le temps est la première mesure essentiellement nécessaire pour connaître l’espace. Le temps n’a pas de rapport phénoménal avec la cause. Mais il en a un avec l’espace et de ce rapport naît la mesure du mouvement. Ainsi, le cycle supérieur de l’Ego est terminé. Il comprend la cause originelle, le temps, le mouvement et l’espace.

C T Mt E Masse

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La masse par rapport à l’espace ou inversement, détermine en physique la notion de force, en tant que mouvement de masse, en un temps et un chemin ou espace. C’est la première relation ou mesure inférieure. La force, par rapport à la masse, détermine l’énergie, en tant que force absorbée ou arrêtée. Ainsi, le cycle inférieur des mesures est terminé également et nous avons la ligne :

C T Mt E F E Masse

Cycle supérieur et  : espace, force, énergie, masse. Ce sont là ce que la physique appelle les grandeurs irréductibles. Car, ainsi que pour les éléments chimiques, il n’y a pas moyen de réduire ces notions à des idées plus simples ou des notions composantes. En plus, chacune de ces grandeurs est définie par l’autre, et toujours ensemble, constituent la vie physique ou apparente. Notez qu’il y sept grandeurs irréductibles comme il y a sept couleurs. Nous pouvons construire avec ces grandeurs irréductibles le même schéma qu’avec les couleurs, et nous aurons :

C T

Mt F E En

Où la cause, le mouvement et l’espace sont actifs, le temps, la force et l’énergie sont passifs, tandis que la mouvement et l’espace sont doubles ou mélangés ainsi que la masse, mais celle-ci, en tant que cause nouvelle d’une nouvelle fonction, au-delà de la masse. Il est, je crois, inutile d’insister sur le fait que cette seule analyse schématique démontre la nature de ces puissances d’une façon tellement claire, que des données toutes nouvelles pour la science peuvent en résulter. Puisque, par analogie, ces grandeurs irréductibles deviennent observable comme des phénomènes physiques. De tout cela, je résume ainsi ceci : que les lois qui président fondamentalement à toute manifestation vitale formelle sont :

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1) celle des sept puissances ou grandeurs irréductibles, 2) celle des quatre directions (nord, sud, est, ouest), 3) celle des deux tendances : positive, négative.

Ceci ne vous semblera pas nouveau, quoique beaucoup plus tangible, parce que cela n’est qu’une répétition des principes que vous connaissez déjà. Les noms changent avec l’application, les nombres et les principes sont identiques. Il résulte maintenant de tout cela une nouvelle fonction, du moins allons-nous trouver pour une fonction cosmique un nouveau sens, dans l’application à la vie. Les deux tendances cherchent une neutralité par complémentation. Cette recherche détermine un mouvement dans un temps et espace, d’où découlent les sept facteurs de la formation. L’ensemble de cette fonction, ou vie, consiste à déterminer des complémentations suivant les nombres Un et Trois, et les groupements de nombres, ce que nous allons appeler les affinités. Elles jouent d’abord chez les molécules, ensuite dans les groupements de molécules ou premières unités organisées, soit des cellules. Là où ce jeu, dans un monde minéral, détermine des corps cristallins et amorphes - soit de neutralités circulaires (excusez ce mot, il veut dire que les atomes sont liés entre eux en circuit, donc non en axes) lors des groupements métalloïdiques - ils constituent déjà des formations qu’en chimie on appelle stériques, où en espace, bientôt, maintenant, par l’intensification de la vie, ces éléments vont constituer des cellules. Elles ne sont pas plus vivantes que les groupes chimiques. Mais une fonction plus complète peut s’accomplir en elles. Ceci veut dire que par purification progressive (vous savez maintenant que ceci veut dire élimination des nombres impropres, soit complémentation de plus en plus complète), les éléments se groupent d’une façon plus absolue, jusqu’à constituer des Ego de plus en plus déterminés, jouant un rôle d’unité nouvelle. Là où la fonction est d’abord principielle, elle devient formelle. Là où d’abord, dans le groupement chimique, une molécule se déplace suivant une ligne de forces magnétiques pour aller se situer dans son harmonie, une fois groupés, ces ensembles vont devenir des lignes de forces substantielles, pour affirmer le mouvement par affinité, que va faire un nouvel élément formé. Ainsi la karyokinèse n’est qu’une

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image visible de ce qui se passe dans un groupement chimique chromogène des complexes dits organiques. Ceci est tellement vrai que dès l’évolution de la chimie organique, on a adopté, pour signifier les adjonctions de molécules nouvelles à un complexe fondamental, le mot de copulation. On a voulu exprimer ainsi l’effective liaison d’affinités d’une molécule active vis-à-vis d’une sorte de mère passive, dont va naître un tout nouveau corps chimique. C’est souvent une énorme difficulté que de trouver le secret, c’est-à-dire les conditions favorables d’où naissent de pareilles copulations. On appelle ceci la synthèse chimique. Si Berthelot était resté alchimiste, il ne se serait pas fourvoyé après avoir touché à cette question. Tandis que la raison logique sans le secours de la métaphysique des lois absolues, de la science des nombres, ne peut que se perdre dans ce problème. L’évolution végétale, première formulation de cellule, prépare la formation définitive, celle de l’organe. Car dans l’évolution formelle, l’organe est la fin, parce que l’organe est le groupement définitif des cellules croissantes en un groupement final d’une possibilité de nombres. L’organe est un Ego matériel complet, répondant donc à une harmonie prévue - et de ce fait entrant dans l’harmonie cosmique, répondant ainsi à la mesure déterminée d’une puissance incarnée. Le nombre des organes est limité, comme de juste, avec les harmonies cosmiques. Il y a sept organes fondamentaux, dont deux doubles, et un «  origine  » d’une nouvelle vie, comme le schéma classique l’indique pour les couleurs et grandeurs irréductibles. De ces sept organes, quatre appartiennent aux quatre directions de la vie, et deux de ceux-ci fixent les deux tendances. Ceci est la base de la médecine occulte. Je suis obligé de passer à la vitesse d’un train express, sur toutes ces questions, mais chacune a fait l’objet d’études très approfondies par moi et Isha – qui s’est chargée plus spécialement de cette dernière question. Ce n’est nullement fantaisiste, si je dis par exemple que les poumons sont l’incarnation de l’espace. Ainsi chaque organe est la mesure, c’est-à-dire la conscience d’une puissance cosmique, incarnée pour réaliser l’Ego complet. Ce travail de formation se fait à travers le règne animal. En lui aussi se déterminent, matériellement, les lignes de forces magnétiques-électriques (ceci pour nous entendre avec des

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mots connus). Lesquelles lignes sont la cristallisation, pour ainsi dire, des mouvements d’affinités, des fonctions, des organes. C’est l’origine du système nerveux, qui commence avec la formation définitive des organes. Alors commence quelque chose de merveilleux. Le rapport entre les nombres, qui sont harmonies abstraites à l’origine, vont maintenant devenir des liens visibles, tangibles, matériels. L’affinité d’un organe à un autre pour la vie, ce que nous allons voir tout de suite, devient un nerf. Toute l’harmonie cosmique va, cristallisée, constituer ce mystérieux homme nerveux où les fluides vitaux, mettons le Prana, vont circuler selon des lois numériques admirables. Et ainsi naît l’homme, l’humain, chez lequel l’organe a une vie personnelle avec un interéchange d’expression qui va déterminer cette mesure finale que j’appelle la conscience de la conscience, ou perception du moi par lui-même, l’Ego conscient. Or, cette vie est unique. C’est-à-dire qu’une fois constituée, elle n’a pas d’autre but que d’être, et pour continuer, il lui faut être entretenue. Cet entretien est nécessaire pour des raisons que nous allons voir tout à l’heure. En attendant, pour entretenir la vie, il suffit qu’un corps de l’un des règnes originels de cette forme soit donné à cet organisme pour que chaque organe immédiatement s’en saisisse, dans l’ordre établi par sa naissance, et le transforme suivant l’harmonie qui a présidé à sa propre formation. C’est ce que nous appelons la nutrition et l’assimilation, qui est, dans son ensemble, la transmutation de substances inférieures en substances supérieures de la nature de la force transmuante. L’organisme complet transmue complètement toute substance sortie du chaos. Car il contient toute la vie inférieure, étant le dernier terme de l’évolution de la matière, étant arrivé au stade de l’Ego conscient, au stade de la vie immatérielle, ou mieux dit : surmatérielle. L’Ego, conscient maintenant, a pour seul but de se connaître lui-même, soit tous les aspects de l’harmonie qu’il réalise. Il se sert pour cela de tout le système nerveux qui n’est que le moyen terme ou rapport des nombres qui constituent son organisme. D’abord, cet ensemble sensible, c’est-à-dire réactible, entre en contact avec l’ambiance. Ainsi se forme déjà chez l’animal, le système sensoriel. Remarquez qu’en cette phrase, je résume un phénomène fantastiquement complexe,

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mais encore une fois, je ne peux pas tout développer en trois soirées. Que l’enchaînement logique qui soutient tout cela (vous devez le sentir sinon le voir) suffise pour fixer la doctrine. Le contact sensoriel détermine ce phénomène de séparation nouvelle, qui est connaissance, de ce qui est extérieur à l’Ego et de ce qui lui est propre. Ce phénomène de constatation est l’intelligence du mental. La relation du mental à la forme, ou phénomène proprement dit, détermine l’émotion. Ceci constitue l’homme inférieur, correspondant en cela aux grandeurs irréductibles du cycle inférieur, par exemple  : sens physique égale masse, émotion égale énergie, mental égale force. L’intelligence ou mental a deux possibilités  : l’une est concrétisante, c’est-à-dire formatrice, l’autre est abstractive. C’est la séparation immanente à toute division de l’origine. L’intelligence abstractive correspond à la notion de l’espace dans les grandeurs irréductibles. Cette puissance abstractive est en relation directe avec la notion non compréhensible, mais admissible, imposée même, du Rien, c’est-à-dire de la cause absolue. De cette relation naît ce qui correspond au mouvement, c’est-à-dire la volonté. La volonté par rapport à la cause provoque ce qui correspond au temps, soit le désir. Ainsi l’homme est composé de sept Ego, conscients plus ou moins encore : l’homme physique, l’homme émotif, le mental, l’abstractif, le volitif et l’homme de désir, - ensuite, de la conscience du Rien ou du confondement absolu. Ces sept hommes en un homme sont comme les facteurs du phénomène et entrent encore une fois dans le schéma classique, avec les mêmes natures triples, doubles, causales, de résistance et de complémentation. L’homme complet, un Ego conscient, devient du bas en haut conscient, mais son extériorisation se fait du haut en bas. La science qui enseigne le moyen d’acquérir en un temps abrégé cette conscience, est appelée Yoga. Elle existe, ainsi que vous pouvez vous en rendre compte par la logique de ce simple exposé. Le but de ce Yoga, qui est en résumé le but de la vie, est ainsi que vous allez le comprendre maintenant, de donner à l’Ego, la conscience absolue - ce qui est en fait le problème de la connaissance, soit d’atteindre le confondement absolu avec la cause ultime. Ainsi la vie n’est pas autre chose que l’évolution de la matière chaotique jusqu’à la conscience qui est organe. Et l’évolution de cette conscience

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n’est pas autre chose que l’acquisition pour l’Ego de la connaissance de soi-même. Combien l’inscription du Temple de Delphes devient plus claire ! Sans doute, tout de l’évolution et de sa fonction n’est pas dit ici, mais ce sera le sujet de la conférence de demain. Et si vous le voulez bien, nous allons ce soir rester sur la méditation de ce mot grandiose de profondeur : Homme, connais-toi toi-même.

TROISIÈME CONFÉRENCE

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L’homme, ou Ego complet dans sa forme, entre, avec l’acquisition de la connaissance de lui-même, dans l’évolution de la conscience. Ceci est le but suprême de la vie, donc le but suprême de la Cause originelle et sa raison de passer dans la forme. Plusieurs questions découlent de ce fait. D’abord, il y a :

1) La connaissance est-elle nécessaire à l’Ego homme pour atteindre son but suprême ? 2) Quel est le rapport de l’intelligence avec la conscience ?

Je veux essayer de répondre à ces deux questions, avant d’aller plus loin. L’homme, étant complet en lui-même, n’a pas besoin d’entrer en contact avec l’extérieur. Autrement dit, il n’a pas besoin de faire une comparaison intelligente entre son Ego et des Egos moindres que lui, autour de lui. Puisque la connaissance est une conséquence de cette comparaison, on peut dire que la connaissance n’est pas nécessaire. Mais la possibilité de cette connaissance est donnée, et ceci constitue un facteur important dans ce raisonnement. J’ai dit tout à l’heure que le but de la vie était la conscience et que la conscience de l’Ego est connaissance, donc on devrait conclure maintenant que ce but est

Les problème moral et l’union

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inutile puisque la connaissance est inutile ? Il y a là, voyez-vous, une imperfection des mots employés et irremplaçables sans périphrases. En effet, la connaissance est un état en soi, une cristallisation formelle des forces, lesquelles sont d’abord organes et ensuite : humain total. Le seul état d’être humain est déjà la conscience totale. Elle ne peut que devenir plus parfaite, c’est-à-dire plus vive, mais non plus complète. Cette conscience est le but, mais n’exige en soi nullement une autre conscience, qui sera alors conscience de la conscience ou connaissance d’ l’Ego. Ce résultat - la conscience d’être humain ou perfection paradisiaque – est absolu, donc éternel. Cet homme parfait n’a pas besoin d’autres expériences, car en fait expérience veut toujours aussi dire doute – redouter – donc comparaison ou intelligence. Donc, l’homme parfait, but de la nature, se trouve devant la possibilité de rester ce qu’il est et d’autre part devant la possibilité de comparer. Ce choix lui est accordé par la logique, soit la fonction, soit le devenir qui résume en lui les puissances de la cause originelle. C’est là le sens des paroles de la Genèse : « Et Dieu dit : Je vous défends de manger du fruit de cet arbre, etc. ». En effet, Adam peut vouloir et aussi peut ne pas vouloir connaître. Mais l’autre possibilité est là. C’est-à-dire que cet humain Ego est devenu lui-même une cause absolue, la cause absolue incarnée. Il est comme tel, ainsi que sa cause originelle, actif, agissant, devant toute la nature, qui est, elle, formée des Egos encore imparfaits, non encore devenus hommes. Cette nature est, pour lui homme, comme le chaos devant l’activité causale du Feu. Ce qui est à l’origine une nécessité, est pour l’homme, origine réalisée, une tentation de se diviser. Cette division est de même nature, mais appelle de nouvelles formes puisqu’elle s’accomplie dans le milieu de la forme finale. Je dis qu’il y a tentation, parce qu’il y deux possibilités. Qu’est-ce qui va déterminer le choix  ? Et bien, c’est la possibilité de la nature, nécessairement. Une activité quelconque ne peut pas prévaloir devant l’activité totale de l’Ego humain. Seule la possibilité totale, égale à son activité, peut le tenter jusqu’à le faire succomber, soit comparer. Et dès l’instant où il dit : Moi, et Elle, la nature : dès cet instant, il s’est séparé d’elle. Dès cet instant, il compare. Dès cet instant, il a connaissance de l’intelligence, cette fausse conscience, l’image de la vraie. Elle est l’expression de ce fait que l’Ego homme

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s’est posé, telle la cause originelle, devant lui-même, appelant un dédoublement de se propre nature pour créer à son tour. Or, puisque le monde est total, ce nouveau monde intelligent ne peut être qu’un monde contenu. De là toute la tragédie du mental en l’humanité, fictive conscience, dont la conscience réelle, illusion d’un monde fini en un monde infini, recherche de la totalité hors de soi, quand soi même, l’homme est cette totalité. Cette limitation du monde mental est sa principale caractéristique envers le monde réel. Il est contenu, et ne peut produire que des images de la vraie conscience. La vraie conscience, elle, se réalisant en l’organe, être complet en lui-même, type formel d’une puissance, l’instant, soit : obscur appel d’imitation, fait aussi chercher par cette intelligence des organes et complexes organiques. Et c’est ainsi que les réalisations mécaniques sont la plus haute expression du pouvoir mental. Ainsi, l’homme paradisiaque, ou complet, précède l’homme que nous sommes. C’est-à-dire qu’à l’origine, l’humain est une perfection. Il est la conscience totale, et la divine cause originelle incarnée. Du fait de regarder la nature autour de lui, il se sépare d’elle, crée l’intelligence ou mental, et dans cette passive puissance, égale en force à sa propre activité, il se cherche lui-même. Puis, étant ce qu’il regarde, il ne peut se voir en ce qu’il regarde. Il ne peut voir que ce qu’il n’est pas. Il en peut trouver que ce qui lui est, en tant qu’intelligence observatrice, le complément, la matière observée - et ainsi de suite. C’est là, le jeu puissant du mental qui nous donne connaissance finalement, des complémentaires, des fonctions, des lois cosmiques. C’est un fourvoiement cosmique, voilà tout. Je dis cela, et sais aussi que de ce fait, je nie tout l’enseignement que je vous donne. Car il est vrai dans le sens de la connaissance finale, mais il est inutile à l’humain Ego parfait. Car Tu es Moi, Moi qui suis Toi, la nature est Moi, Moi je suis la nature, tout, la Cause-Dieu est Moi, Moi je suis la Cause. Voulez-vous que je vous lise la prière sacerdotale du Christ ? Mais ce sont des choses qu’il faut méditer vous-mêmes. En arrivant à ce point, je suis arrivé à l’instant où naturellement, est situé l’autre aspect du mental. En naissant, en imposant sa lignée à l’homme, ce mental même a aussi démontré sa fin, sa négation. Il est limité, englobé, contenu, et de ce fait périssable. C’est-à-dire

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que l’on peut en atteindre la limite, et cette limite est définie dans la notion qu’il nous impose : Si division il y a, il y a aussi unité. En cette unité cesse l’intelligence qui n’est que division. Et cette cessation d’intelligence est le commencement de la vraie, absolue conscience, celle du confondement, celle de l’Eternité. Tout ceci, je le pose comme préface, et image aussi de tout le monde et de ses possibilités, telles que notre intelligence nous les montre, telles que la sagesse nous l’impose. Et cette sagesse n’est pas autre chose que l’impartiale constatation du monde. Autrement dit l’application de cette formule que je vous donnais au commencement de ces conférences : Tout ce que je suis, tout ce que je puis percevoir, tout ce que je puis penser ou imaginer, peut exister. Et je dois le regarder, et, impartialement, déterminer le point central, neutre, non périssable. C’est une méthode de connaître la vraie, la seule, et vous comprendrez aussi maintenant, ce qu’est la mystique, c’est-à-dire la vraie voie vers le confondement. Or, l’humain, Ego parfait, est la perfection de la création, c’est-à-dire du devenir. Il est unique, unique pour chaque individu. Et il y a autant d’Egos aussi parfaits qu’il y a de mondes. Et il y a autant de mondes qu’il y a de groupes de nombres. Ne nous occupons que de l’un parmi tous, l’un parmi nous, le Moi, n’importe, de l’Ego humain, complet en lui-même. L’un de ces Egos a suivi la voie régulière, celle de rester dans sa perfection consciente. L’autre a voulu voir, connaître, assimiler. Devant le premier, nous n’avons qu’à nous incliner, c’est un maître, maître de la création. L’autre, nous devons le regarder puisqu’il est l’exemple pour nous tous, qui, ici, cherchons la vérité, après l’avoir perdue. Cet Adam déchu est un être organisé, vivant, portant en cette vie toutes les fonctionnelles du devenir. Dès sa chute, qui est son intelligence dans le sens de savoir, il n’est plus seul. Car il est devant la nature toute entière, laquelle – au lieu d’agir en lui, c’est-à-dire, au lieu de la maintenir affirmatif en tant qu’activité totale – devient littéralement son ennemie. Il doit la vaincre à chaque pas. Il doit neutraliser chaque passivité afin d’arriver, peut être, à l’union complète, lavant ainsi sa faute originelle.

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L’Ego conscient ne peut suivre qu’une voie, celle de la nature. Même si sa voie particulière est caractérisée par une tendance spéciale. Rien en cette conscience ne vient contredire l’évolution exacte. Rien ne vient gêner l’accomplissement de la loi cosmique. Mais l’homme intelligent, lui, est sans cesse posé en critique envers la nature. Il acquiert ainsi un savoir mental, grâce auquel en toute chose, suivant le principe de la division, il constate l’aspect lumière et l’aspect ombre. C’est sa souffrance. Et c’est aussi le chemin de son accomplissement à travers une sorte de connaissance mentale, ce savoir, illusoire image de la connaissance. Son pouvoir de distinguer, donc son pouvoir de choisir, devient son libre arbitre. Le libre arbitre n’existe que dans l’intelligence qui se sert de la volonté comme d’un désir, et ne connaît le désir que dans ses besoins. Ce libre arbitre est toujours seulement négatif, c’est-à-dire soustractif. Quoique l’homme fasse par son libre arbitre, il le fait en canalisant la nature, en lui posant des barrières ou même en l’excluant complètement. Naturellement, ceci ne peut durer qu’un temps, n’est pas éternel. Car la nature accomplit son cycle et la petite barrière, imposée par l’homme, n’est pas une puissance susceptible de l’arrêter. Ainsi le vent, la lumière,  la chaleur, le froid, l’eau et la terre, toujours à nouveau, effacent l’effort de l’homme, l’œuvre par laquelle il veut dompter la matière. Si les lois cosmiques n’entrent pas en jeu, rien ne peut diriger la nature. Elles sont les seules forces vraies, les forces magiques. Depuis des millénaires, les hommes voient ainsi se détruire leurs villes, leurs civilisations, toutes leurs œuvres. Et comme les ouvriers de Babel, toujours à nouveau ils veulent construire cette tour qui va relier la nature, le chaos du monde à leur Ego, le ciel. Néanmoins, ceci finit dans l’embrouillement des langues, dans l’incompréhension mutuelle des mots, des sens exprimés, des doctrines, des notions du but. Il n’y a qu’un but. Ceci seul peut sauver les ouvriers de Babel de leur ville, leurs chaos – de leur tombe, en vérité. Pourtant, nous sommes héritiers de cet Adam déchu. Nous sommes ouvriers de la tour de Babel. Donc regardons quels sont les moyens à notre disposition pour nous sauver de ce désastre. Notre vie est l’expression de nos tendances. Et ainsi nous créons un rythme qui devient le motif guide de notre existence future. Et

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finalement, nous façonne de telle sorte que, toute notre vie occulte s’adaptant à cette façon, nous fait naitre et mourir dans une nature déterminée. Dans « Adam, l’homme rouge », je développe brièvement la doctrine de la sexualité et je ne veux ici que noter les questions fondamentales. L’Ego parfait est un être androgyne, tandis que l’Adam déchu, qui est un être sans cesse en contact, c’est-à-dire en lutte avec la nature, devient de ce fait actif, un être agissant. Ceci crée dans son être mental une disposition qui le rend, ou bien actif, ou bien passif - c’est-à-dire, suivant le oui ou le non de la cause dualisée, incarnée à nouveau dans son être agissant, cette fois-ci comme personnalité, c’est-à-dire en Moi vis-à-vis du Non-Moi. Cette position détermine en lui la fonction sexuelle par l’atrophie de la nature active. Tel que l’homme est, il est toujours androgyne. Il a en lui, non seulement les tendances des deux sexes, mais aussi les organes. Chez l’homme, on peut considérer ces organes extériorisés par l’activité. Chez la femme, on peut les considérer intériorisés par sa fonction passive. Homme et femme sont, à l’origine, un seul être androgyne. Leur séparation se fait avec l’éveil mental, qui lui, est la conséquence de la position du Moi ou Ego, devant les choses de la nature : il n’est pas bon que l’homme soit seul… Ceci est déjà, en tant que seule réflexion de l’Ego, l’origine de l’intelligence, donc de la constitution de l’état passif par rapport à la pensée qui observe. Cet état passif, ou autre soi-même, le complément absolu à soi-même, c’est Eve. Ainsi, devenus par l’application du principe divisant de l’origine, chacun des deux compléments humains représente une nature essentiellement opposée à l’autre. Les deux êtres du couple humain n’ont de commun que leur origine, matérielle et principielle. La fonction choisie par chacun, devient la cause de leur suivante formation. C’est ainsi que, sans ironie, je puis dire que les sexes sont la déformation professionnelle de l’être androgyne, Ego parfait de l’origine. Avec un corps adapté, formé et déformé par la fonction sexuelle, la mentalité s’est transformée, ainsi que les facultés se sont développées, pour ainsi dire, en spécialisation. La meilleure image que je puisse donner, pour expliquer d’une façon générale les deux natures, est encore le schéma classique :

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Type Homme

Physique-Emotif -Mental-Intuitif-Volition-Désir-Néant

Type Femme

Le type homme tient de la lignée : physique-mental-volonté-néant.Le type femme tient de la lignée : émotif-intuitif-désir.

Ces caractères, plus ou moins purs, c’est-à-dire matérialisés, sont les bases des caractères homme et femme. Le type femme est contenu dans la totalité du type homme, il complète la totalité, et ceci en contradiction (division !) avec la fonction formelle, où la femme devient le contenant de l’homme contenu. En ceci devient encore une confirmation de l’état androgyne, répondant toujours à cette nature de l’immanence de la dualité en l’Unité, que de voir toujours la tendance intérieure complémentaire à la fonction intérieure. Je ne confonds pas cette tendance intérieure avec le psychisme. Celui-ci est toujours la tendance occulte, celle innée par le principe originel, et somme toute, imbibant chaque cellule comme chaque nerf, comme toute chose. Maintenant, pour compléter le tableau des éléments principaux, nécessaires à ce que je veux encore vous dire, voyons ce qu’on appelle la morale. Il faudrait plus justement dire le sens moral, car en fait il s’agit là d’une capacité, plus que d’une nature. Pour l’Ego cosmique, il n’y a ni Bien ni Mal, pas plus que pour la Cause et pas plus que pour la Fin. Le « Bien et Mal » appartient au moyen terme, et dans le cas de l’homme, il n’intervient qu’avec l’intelligence, donc avec le libre arbitre, donc avec la séparation des sexes. Fonctionnellement, le «  Bien et Mal  » est lié au sexe. Principiellement, il est affirmé par la dualisation de l’Unité. Bien et Mal. Ce sont les deux possibilités causale et finale, l’une : affirmation de la matière, donc du devenir ; l’autre : affirmation de la cause. La cause étant Rien, seule son affirmation est susceptible aussi d’une négation, c’est-à-dire, la négation de la matière ou du phénomène. En effet, l’affirmation du phénomène ne peut nier la cause. Car se serait absurde, puisqu’on ne peut nier Rien, sans encore une fois

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affirmer quelque chose. Ceci est la base même de la science mystique ou blanche, qui accepte, avec l’affirmation, aussi la négation. Or, en l’homme les deux possibilités sont données. Et cela peut sembler paradoxal, mais seule la mystique de la voie blanche peut nier la matière, tandis que la voie noire ne peut qu’affirmer la matière. Elle cherchera la continuité de la forme, tandis que la mystique s’en détachera. Ces deux possibilités, innées en l’homme, sont ainsi au fond, la cause de toute la tragédie humaine. Il y a nécessairement lutte entre ces deux tendances. Puisque la vérité exige la présence et la critique, soit l’intelligence, soit l’acceptation des choses. Alors se pose sans cesse le problème du Bien et du Mal. Ce qui est la continuelle décision à prendre en sachant ce qui est Bien ou Mal. La religion s’est toujours posée en guide à ce point de vue. Même cet aspect en elle a primé de loin l’autre, le vrai côté, celui de la culture de la connaissance des lois cosmiques, seul vrai guide. Quelles que soient leurs interprétations de la morale, j’estime qu’elle est la totalité de quelques impulsions innées, ce que j’appelle les quatre sens de défense morale. Ces sens sont à nouveau l’expression des principes fondamentaux, répondant aux quatre éléments constitutifs de toute chose.

Ici, ces éléments deviennent vitaux. Ces quatre sens sont : le sens de la pudeur, le sens du beau, le sens du sacré et le sens de la vie. Si nous mettons en parallèle avec les éléments : Feu, Air, Eau et Terre, nous pouvons dire : - le sens de la vie correspond au Feu, - le sens du sacré à l’Eau, - le sens du beau à l’Air, - le sens de la pudeur à la Terre.

Le Feu et l’Eau, le sens de la vie et celui du sacré, sont essentiels et non composés. Le sens du beau, comme celui de la pudeur, sont, ainsi que l’Air et la Terre, secondaires. Et pour ne parler que de la pudeur, elle est dans cet esprit le Feu incarné, soit le sens de la vie matérialisé par l’Eau.

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Nous trouvons entre l’homme et la femme à nouveau une différence énorme quant à ces sens moraux. La femme ne connaît, si elle a un sens moral, que le sens esthétique et celui de la vie. Tandis que l’homme est plus sensible à l’influence du sens de la pudeur et du sacré. En vérité, un homme parfait et une femme parfaite devraient se compléter absolument pour la formation d’un être unique et parfait. Ceci les hommes le savent, du moins le sentent. Ils suivent cette impulsion et c’est l’origine de ce qu’on appelle amour en général. Or, je fais une distinction énorme entre l’amour qui peut exister entre homme et femme et l’amour vrai. L’amour entre homme et femme est, en dernier compte, toujours sexuel. Parce que le sexe est l’expression type de toutes les différenciations entre ces deux êtres. Et même si le sexe ne joue pas de rôle direct, il devient de ce fait la cause fondamentale de l’attraction ou répulsion entre l’homme et la femme. Quant à l’amour vrai, il n’est qu’abandon. Mais non abandon à un être aimé, c’est là l’erreur de l’interprétation catholique. Mais il est l’amour pour Rien, l’amour christique, l’amour, l’abandon au près de toute chose, à la cause initiale et incompréhensible. Encore une note est nécessaire pour compléter toute l’instruction. C’est l’explication de cette puissance grâce à laquelle l’homme peut se libérer. En parlant du mental, j’ai dit qu’il était, de par sa nature, limité. Mais il est aussi l’expression visible de tout cet instant séparateur en l’homme, donc de toutes les conséquences : le libre arbitre et le sexe. Cette limitation du mental n’est pas ordinairement visible, puisqu’emprisonnés en lui dans toute notre vie, il nous semble même que tout ce que nous pouvons connaître sort de lui. Donc, il est aussi vaste que le monde que nous concevons. Mais je dis que le monde que nous concevons n’est pas le vrai monde : c’est précisément le monde mental. Grace à lui, nous pouvons pressentir le monde qui contient, mais le mental ne peut pas le saisir. Ainsi, nous naviguons entre une prescience et un savoir. Et c’est pour clarifier cette question qu’après tout, je vous ai fait ces conférences. Or, le mental étant limité, notre vie étant dirigée par lui (mais nous-mêmes reconnaissant cette limitation), c’est là que nous pouvons trouver la clef de la libération.

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Si nous brisons cette limitation, c’est-à-dire si nous allons à ses limites d’abord, avec le profond désir de les dépasser, alors nous appelons l’autre conscience qui est celle de l’Ego. Aller à la limite et au delà, de quoi ? De tout, car tout ce que nous pensons et concevons appartient à cette limite. C’est ce que j’appelle cultiver le sens de l’excès. Or, tout excès est par principe, contraire à cette vie-ci. Mais la conscience de l’Ego elle aussi est contraire à cette vie-ci. Ce principe ne peut pas être admis par quiconque tient à cette vie terrestre. Il devient la qualité mystique par excellence. Et c’est ainsi qu’il a été le signe de tous les mystiques et de tous les hommes qui ont dépassé la tourbe humaine en « Bien » ou en « Mal » pour cette humanité. Il est inutile, il me semble, d’analyser ici les caractéristiques d’excès d’un César, d’un Saint François d’Assise, d’une Marie-Madeleine, d’une Sainte Thérèse, d’un Kant, d’un Nietzsche, d’un Goethe, etc, etc… Il n’est pas utile non plus d’analyser ceci en une Messaline, un Néron, un Sardanapale, une Cléopâtre, un Sade, un Soleilland, un Haarmann, etc, etc… L’excessif mène facilement à la pathologie physique, car peu d’êtres sont susceptibles de maîtriser cette puissance qui, alors, devient véritablement l’illumination et le génie. Je dis  : que l’on fasse quoi que ce soit, mais qu’on le pousse absolument à l’excès, cela mène à la lumière, à l’abnégation de soi-même, au confondement conscient. C’est par cela que je suis absolument opposé à toute bourgeoisisme, car celui-ci veut le moyen normal, la vie tempérée. Or, cette vie-là ne mène qu’à la conservation d’un état actuel, que je constate absolument come anti-réel, faux quant à la loi cosmique, mortel pour l’Esprit.

En ayant dit la loi de l’excès, j’ai aussi complété le tableau des lois de l’Evolution, soit : a) La séparation, b) La purification, c) La conjonction, d) L’assimilation, e) L’excès.

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Or, ce qui est excès en morale, répond à ce que en alchimie, on appelle fermentation, semblable à ce qu’en chimie, on appelle catalyse. Par ce dernier terme, nous allons mieux comprendre le phénomène. De plus en plus, on a constaté en chimie, que cette mystérieuse catalyse joue un rôle prépondérant dans les réactions. Elle consiste en l’action inexpliquée de la présence d’un corps apparemment étranger au milieu ou au phénomène appelé. Pour ma part, je sais que ce corps n’est jamais étranger effectivement. Mais ainsi que le révèle l’atomistique occulte, il intervient toujours comme l’excès d’affinité dans la composition. L’excès intervient dans les phénomènes matériels exactement comme en morale, ou mieux dit, comme en conscience. Il et l’instant grâce auquel la possibilité actuelle est dépassée. C’est aussi le moment grâce auquel le passage est possible d’un état à un état supérieur. Je n’ai pas inventé le sens de l’excès, comme d’ailleurs, je n’ai rien inventé de tout ce que je vous ai dit. J’ai constaté, et en constatant j’ai trouvé la confirmation des lois cosmiques. C’est tout. J’ai peut être osé ce que le monde n’ose pas, tout en sachant, et je veux ce que j’ose. Savoir, oser, vouloir : la formule de l’initiation égyptienne. Mais c’est toute la formule de l’initiation, laquelle n’est que la découverte de ce que nous avons perdu par le geste, ou péché originel, de notre dédoublement. L’homme dans sa fonction provoque, la femme dans sa passivité reçoit. Et la fonction organique de l’homme, qui donne ou agit, est l’accomplissement de la loi d’affirmation. Tandis que la fonction ou gestation de la femme qui a reçu est l’accomplissement de la loi de négation. Mais l’Ego est un accomplissement de la loi totale, de négation d’abord, d’affirmation ensuite et de négation nouvelle. Absorber, assimiler, rejeter : ce sont les termes essentiels de notre vie.

Absorber, c’est nier ce qui est. Assimiler, c’est affirmer soi-même.

Rejeter, c’est nier la forme.

Voici le cycle qui fait l’Ego. Voici aussi le cycle qui fait notre existence corporelle. La femme – qui est matière, qui est le produit de la dualisation, du mental, du sexe, de l’erreur originelle – réalise

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ce cycle deux fois : une fois pour elle-même en son corps et une fois pour l’affirmation de la matière, pour sa continuité, en sa matrice. Tant que tout cela durera, le monde matériel durera, mais jamais la conscience de l’Ego ne se fera. Or, le but de notre existence est d’atteindre cette conscience, de Deux devenir Un à nouveau, autant dans le mental que dans le mariage. Ne plus séparer Moi et Toi, ne plus séparer mon Moi de l’Ego cosmique, voilà notre but. Devenir la conscience unique, le confondement  : voici le rachat de la faute originelle. Le mariage est le fait absolu pour cela, car il témoigne de notre plus grande séparation. Lui et Elle ? Non ! Cela ! qui n’est plus ni lui ni elle. Or, le mariage n’est que coït, c’est-à-dire continuelle affirmation de la séparation, toujours plus grand séparation. C’est pourquoi, le mariage doit être Union. Mais l’homme est ce qu’il est. Il est intelligent, il est sexué et il a libre arbitre. En plus, il subit ses fonctions physiques. S’abstraire de tout cela ne change pas sa fonction organique. Et pourtant l’Ego conscient est une fonction semblable mais totale sans séparation. La chasteté est le but naturel pour la conscience totale. Elle n’est pas un moyen car elle est violence et négation de l’être, négation même de la conscience humaine. L’Ego cosmique est en éternel coït créateur en lui-même, par lui-même. Il est oui et non, oui et non en unification sans cesse, c’est le coït divin. L’homme et la femme ne doivent se servir que pour se nier mutuellement en leur sexualité. Aussi bizarre ou impossible que cela semble, aussi juste cela est. Alors je dis ceci : l’homme qui a trouvé son Eve, celle qui lui est de même nature, femme autant qu’il est homme, complément parfait - qu’il l’épouse. Ceci veut dire qu’il doit former un lien avec elle, en toute conscience. A partir de ce moment, ce couple est un être, isolé de tout, ceci au terme spirituel comme dans la pratique. Entre eux, il n’y a plus de morale. Il n’y a plus de loi autre que celle de l’Union à travers la recherche de leur négation. Tout leur libre arbitre, qui est puissance de négation et de destruction, ils peuvent, doivent l’appliquer envers eux-mêmes, pour cesser d’être homme et femme. Il n’y a plus alors ni perversité répréhensible, ni excès condamnable. Que leur amour soit purement sexuel. Mais qu’au-dessus de tout, toujours, il y ait le désir plus fort que tout, de se trouver, de s’unir, de ne plus jamais se

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quitter. Que leur désir et envie l’un de l’autre soient tels que la mort encore les unisse dans un besoin de conjonction. Afin qu’au delà du physique, ils s’unissent encore, toujours plus abstraitement, jusqu’en ce monde du confondement où tout est conscience. Que l’homme voit en la femme la matière entière, que la femme voit en l’homme l’esprit entier. Que l’un serve à l’autre à délier toutes les attaches à la terre, qui sont les désirs qui appellent l’âme en un nouveau corps. Et tout leur est permis pour cela – car devant l’Union, il n’y a plus ni jugement, ni Bien, ni Mal, ni peu, ni beaucoup – l’Union doit être tout. Et ceci afin que s’accomplisse la parole d’Hermès : que la femme soit la terre l’homme, et l’homme le ciel de la femme pour la pierre philosophale, qui est l’Union absolue. Mais l’être humain est un esclave de mon mental. Il se détruit par lui, il se lasse par cela. Là, en toute conscience (ce qui demande une maîtrise formidable), les époux doivent appliquer l’érotique, qui est la science du désir. Heurter le sens moral, c’est un choc érotique. L’érotique exige la conscience du moral et de l’immoral. Je devrais presque dire, la conscience du Bien et Mal. Or, ceci est la fin, non le commencement dans la voie de la surévolution. Aussi, rien n’étant parfait, pour commencer, faut-il employer les moyens suivants à la portée de la conscience déjà éveillée. Et ces moyens sont donnés par :

1) l’excès,2) la négation volontaire.

Ceci peut provoquer tous les vices, je sais. Mais un vice n’est funeste que s’il emporte la conscience, s’il nie la direction qui doit mener vers l’Union. C’est pourquoi, tout en donnant ici, pour compléter mon enseignement, aussi ces choses, j’ajoute ceci : ce serait une profonde erreur que de vouloir suivre le chemin de l’Union sans avoir avant tout clarifié, avoir pénétré toute la connaissance des lois cosmiques. L’union exige deux choses principalement :

1) L’homme conscient qui instruit la femme, la transmue en sa mentalité, lui enseigne toute la voie à suivre et aussi lui donne les moyens de le faire. Ceci est un travail herculéen, n’en doutez pas.

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2) La femme, dont la nature mystique réponde à l’époux, et qui soit avant tout capable de renoncer à sa forme, qui puisse accepter de tomber en ce renoncement, comme dans une joie extatique, au plus bas de l’échelle morale – dans le but d’atteindre l’Union avec Lui, l’époux absolu, incarné en son homme.

Aussi difficile que soit le premier point, encore plus difficile est-ce de trouver cette femme. Je le sais. Mais est-ce que l’Union n’est pas aussi la chose la plus haute qui soit  ? Ne vaut-elle pas la peine que l’homme se cultive en ce but, pour avoir l’espoir de trouver cette femme ? S’il est prêt, je dis sûrement aussi, il trouvera son Eve. Car elle est là, à l’attendre, celle qui n’est que passivité, comme la terre qui attend son animation. Et l’homme est l’âme de la femme. Voici encore ce que j’entends par âme. Entre la cause et la fin, il y a l’Ego conscient : c’est le tout en fonction. Ceci est l’âme. Veuillez dire : il y a Corps, Ame et Esprit, et nous nous entendrons. Or, la femme n’est pas Ego, c’est pourquoi elle l’affirme tant. Elle est corps et ce qui attend. Elle n’a pas d’âme, si ce n’est l’Ego de l’homme. Je n’ai pas parlé ici de la réincarnation, car elle est une conséquence logique, sinon évidente, de toute évolution. C’est pourquoi, je ne l’affirme pas et ne puis dire que ceci  : Moi, j’en suis sûr, tâchez de devenir conscients aussi pour en être sûrs aussi. Et bien, la femme ne se désincarne que jusqu’à l’émotif ou astral. Là, elle attend, tandis que suivant son état évolutif, l’homme peut se désincarner jusqu’au confondement. Comprenez cela suivant votre entendement. La femme attend là son époux qui seul, peut l’emmener définitivement. Or, elle aussi peut le perdre pour toujours, si elle laisse éteindre la flamme de sa lampe : l’appel mystique en elle, par son abandon à la jouissance purement. Voici, mes amis, ce que j’avais à vous dire de la doctrine. Elle est bâtie sur une pierre cubique, sur une pierre comme les paroles du Christ. Je ne vous la donne pas comme un évangile. Non, je ne suis que l’interprète d’une vérité dont je n’ai pu, en ce court temps, que vous développer une infime part, quoique cette part représente un canevas complet.

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Si, comme conclusion, lors de l’Union, je suis arrivé à vous montrer la solution de tout le problème de la vie, et la difficulté de cette solution, je n’ai, pour vous faire plaisir, pu faire autrement que de dire ce que je sais être vrai. Or, n’est-ce pas mon but ici que de vous aider à réaliser cette chose ? Je puis vous guider, mais je ne puis pas faire l’effort pour vous. Je n’ai pu le faire que pour moi-même. A vous maintenant, de choisir ce que vous voulez, à vous de faire l’effort. Il sera d’autant moindre que je pourrai vous éviter des erreurs inutiles. Pourquoi ai-je fait Suhalia  ? N’est-ce pas pour créer un centre où les hommes, désireux d’aller ce chemin, puissent trouver l’isolement nécessaire ? J’entends par isolement, l’exclusion du monde banal qui réduit au lieu d’élever. Cet isolement pourrait être un paradis sur terre pour ceux qui n’ont pas peur de laisser leur illusion pour suivre le chemin de la vérité. Et Isha, mon disciple, elle, n’a fait ce qu’elle a fait que pour préparer des femmes dans cet esprit, afin que tout ici soit complet pour, autant que possible, réaliser la doctrine que je prêche. Voilà  : votre vie dépend de vous et non de moi. J’ai, il me semble, fait ce que je devais faire, en vous exposant le tracé du chemin, la doctrine. A vous de faire ce que bon vous semblera. Je suis prêt à donner à ceux qui seront arrivés au bout du chemin le mot qui éclaircit le mystère, qui, tout en étant écrit ici, restera caché à qui n’aura pas fait l’effort.

TABLE DES MATIERES

Introduction.................................................................................

PREMIÈRE CONFÉRENCE

Les problèmes...............................................................................

DEUXIÈME CONFÉRENCE

Le but de la vie et son problème de connaissance.........................

TROISIÈME CONFÉRENCE

Le problème moral et l’Union......................................................

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