l' avènement de la validation des acquis de formation en france et en europe
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L' avènement de la validation des acquis de formation en France et en Europe: Les fonctions dévolues au portefeuille (numérique) d'expériences et d'expériences. Enjeux pour l'Université et la Société. Daniel Dufourt - GREPH- Janvier 2011TRANSCRIPT
L’avènement de la validation des acquis de formationen France et en Europe :
Les fonctions dévolues au portefeuille de compétences et d’expériences,Enjeux pour l’Université et la société.
Daniel DufourtGREPH
Janvier 2011
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AVERTISSEMENT
Enseignant-chercheur au Groupe de recherche en
épistémologie politique et historique, rattaché à l’équipe d’accueil LEPS dans le
cadre du quadriennal 2007-2010, j’ai été amené à prendre part aux activités
de l’école doctorale EPIC. Les échanges nourris avec mes collègues des
sciences de l’éducation et la qualité de l’accueil de son directeur, André
Robert, m’ont incité à chercher à identifier les logiques sous-jacentes au
processus de Bologne, d’une part, et, d’autre part, à la politique européenne
de formation tout au long de la vie, laquelle revêt dans la « stratégie de
Lisbonne » un caractère essentiel.
Gilles Pollet, directeur de Sciences-Po Lyon, m’ayant fort
opportunément proposé de donner une dimension opérationnelle à ces
analyses et à en tirer des enseignements au bénéfice de la communauté
éducative de l’établissement, les résultats du travail entrepris sont présentés
sous forme d’un rapport et de deux annexes.
Pour finir, il me faut remercier encore l’UMR Education,
Culture et politiques et les organisateurs du récent colloque des 6 et 7
janvier 2011 qui ont su intégrer dans les projets scientifiques en discussion,
les questions relatives à la pédagogie numérique et à ses rétroactions sur les
conceptions et pratiques éducatives.
Daniel Dufourt
Professeur de Sciences économiques
à
l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon
3
Le portefeuilled’expériences et de compétences.
Instrument de repérage et de
mise en valeur des acquis de la formation
et des recherches accomplies à Sciences-Po Lyon
Rapport de Mission
Daniel Dufourt
Professeur de Sciences Economiques
Octobre 2010
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Avant Propos
Par arrêté en date du 15 avril 2010, le professeur Gilles Pollet, Directeur de
SciencesPo-Lyon a bien voulu me confier une mission visant « la réalisation d’un rapport
portant sur les applications possibles, au sein de l’IEP de Lyon, des outils destinés à favoriser
la transparence et la reconnaissance des compétences et des qualifications de nos étudiants et
diplômés (passeport formation et portfolio numérique notamment) »
Le rapport présenté ci-après s’inscrit dans le prolongement de deux types
d’interrogations : celles exprimées dans le rapport Hetzel quant à l’insertion professionnelle
des étudiants et celles évoquées par Patrick Chevalier quant au succès et enjeux du recours à
cette fin, dans l’enseignement supérieur, au portefeuille numérique d’expériences et de
compétences.
Le 24 octobre 2006, Patrick Hetzel, recteur de l’académie de Limoges présentait
en Sorbonne le résultat des travaux de la Commission du débat national Université-Emploi.
Le rapport remis aux pouvoirs publics précise dès la page 9 qu’«il s’agit de tout mettre en oeuvre
pour que la situation actuelle où bon nombre d’étudiants se retrouvent seuls face à la fois à l’université et au
monde du travail, seuls pour faire le pont entre ces deux mondes, se modifie. Il convient de proposer aux
étudiants un passage progressif de l’université vers le monde du travail en passant d’une vision où le diplôme
est considéré comme un couperet à une vision où le monde de l’emploi est progressivement intégré dans les
différents cursus. Ou pour le formuler encore autrement, plutôt que d’avoir une vision dichotomique où
l’étudiant acquiert d’abord un diplôme et va ensuite vers le monde du travail, notre commission préconise une
évolution paradigmatique où la question de l’insertion professionnelle serait prise en charge plus en amont
dans les cursus universitaires permettant ainsi une démarche moins brutale, nettement plus progressive vers
l’emploi. » Quelque temps auparavant, P. Chevalier1 présentait ainsi, à l’occasion d’un
séminaire de l’AMUE, les enjeux du portfolio numérique :
« - prise en compte du projet personnel dans l'activité pédagogique (l'existence de ce projet et la réflexionsur les acquisitions en lien avec lui sont moteurs au plan pédagogique) ;
- respect de la personne (elle détient les informations sur elle-même et peut décider de l'image qu'elleprésente à l'extérieur) ;
- globalité de l'approche compétences et connaissances (les diplômes sont complétés par les réalisations etl'expérience et l'activité sociale peut avoir un très grand intérêt pour l'activité académique ouprofessionnelle)
1 Directeur R & D, EifEL European Institute for E-Learning et professeur associé à l’Université Lille 1.
5
- continuité du développement personnel dans les différents secteurs, depuis l'école jusqu'à la fin d'activité(la formation tout au long de la vie, la validation des acquis de l'expérience deviennent davantage que desslogans)… » 2
Le rapport présenté ci-après s’inscrit dans le prolongement des préoccupations
exprimées dans le rapport HETZEL et des innovations de toute nature qu’introduit dans
les cursus universitaires la prise en compte des potentialités offertes par le portefeuille
numérique au regard de la future insertion professionnelle des étudiants. Dans toute la
mesure du possible, il s’est efforcé de tirer parti des expériences étrangères (en Europe et
dans le reste du monde) et du bilan synthétique des expériences françaises en cours.
Lyon, Le 28 octobre 2010
Daniel Dufourt
Professeur de sciences économiques
à l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon
2 Patrick CHEVALIER « Le portefolio numérique » Conférence de l'AMUE (Agence de Mutualisationdes Universités) : Mettre les TIC au service du LMD, 30 mars 2004. Production : Université LouisPasteur, Strasbourg : http://canalc2.u-strasbg.fr/video.asp?idvideo=2726
6
INTRODUCTION
Le portefeuille d’expériences et de compétences (PEC), est un dispositif développé
en juillet 2004 par un consortium d’Universités alors composé de Grenoble 1, Poitiers,
Toulouse 1, et Toulouse 33. Toutefois l’introduction officielle du portefeuille d’expériences et
de compétences dans l’enseignement supérieur en France s’effectue à l’occasion de la
présentation en Sorbonne du Rapport HETZEL4 le 24 octobre 2006.
Intitulé « De l’Université à l’Emploi. 2006-2009 : Premier bilan de mise en œuvre
des propositions et orientations », ce rapport 5 précise en rubrique « B.4. Accompagner vers
l’insertion professionnelle les étudiants diplômés » :Quelques universités ont envisagé d’autres actions plus spécifiques comme la
traduction des diplômes en compétences pour une meilleure lisibilité par les
entreprises ; la mise en place du dispositif « Portefeuille d’expériences et de
compétences » (PEC) qui est un outil numérique permettant à tous les étudiants
de s’engager dans une démarche de description de ses acquis (formation,
expériences personnelles et professionnelles) et de définition de ses
compétences. (…)
Passant d’initiatives annoncées à la mise en œuvre effective, trois
Universités -autonomes depuis le 1er janvier 2009- sont distinguées par les auteurs du Rapport
final AERES de la vague 3 : l’université Cergy- Pontoise, l’Université Montpellier 1 et
l’Université Jean Monnet de Saint-Etienne6.
Dans le cadre de l’appel à projets lancé en 2009 par le Haut commissariat à la
jeunesse, une expérimentation du PEC à l’échelle nationale a été proposée, impliquant cette
fois 13 Universités, dont deux Universités membres du PRES ULNF : Lille 1 et UVHC.
L’UVHC et Lille 1 se proposent d’expérimenter pour le PRES ULNF, le PEC sur une
centaine d’étudiants chacune7.
3http://www.pec.ups-tlse.fr/4 Commission du débat national Université-Emploi « De l’Université à l’Emploi » 2006-2009 : Premierbilan de mise en œuvre des propositions et orientations » disponible à http://www.generation-europe.eu/activities/paris-conference/rapport_hetzel.pdf5 destiné à rendre compte des travaux de la Commission du débat national Université Emploi.6http://media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/2010/21/8/autonomie_des_universites_-_retour_d_experience_149218.pdf. Les sites créés par ces Universités sont évoqués infra.7PRES Université Lille-Nord, France, Commission Formation Tout au Long de la Vie ANNEXE 2disponible à :http://www.univ-lille-nord-de-france.fr/telechargement/FTLV/Programme_FTLV_ULNF.pdf
7
Parallèlement, un nombre important d’Universités ont mis en place le PEC
le plus souvent sous la responsabilité du SCUIO : parmi les réalisations effectives ou en cours
se distinguent les projets et les réalisations respectives des Universités de Pau et des Pays de
l’Adour8, de Paris V9, de Versailles –Saint Quentin en Yvelines10 et l’UCO11.
Il y a lieu de remarquer dès maintenant que l’ampleur des moyens financiers
mis en œuvre est très variable en fonction des modes de financement retenus et de l’existence
ou non de partenaires. Ainsi le projet pilote Leonardo de Vinci impliquant le CNAM et 5
autres partenaires appartenant à 5 pays (DE, IT, F, SK, ES) intitulé « Juvenes Mobiles » de 38
mois (novembre 01- décembre 04) a été soumis avec un budget de 544.483 €. Ce projet visait
« la création d’un portefeuille électronique de compétences transversales d’accès à l’emploi»
qui permettra à 150 jeunes de mieux identifier leurs compétences et de les améliorer. Les
partenaires ont obtenu la coopération de 100 entreprises dans les 5 pays et pouvaient
escompter une subvention de l’UE de 408.362 €12.
De son côté le financement du projet national impliquant les 13 Universités
s’élève à 1,5 millions d’euros sur 3 ans dont 60.000 euros à chacune des Universités.
S’agissant du PRES Lille-Nord France le nombre d’étudiants concernés -
mises à part les 2 universités citées (100 étudiants chacune)- est de 50 étudiants par
établissements. Il ressort de cette estimation que le financement minimal pour un
établissement -lui-même fonction du nombre d’étudiants concernés et des modalités
pratiques de la mise en œuvre du PEC ( recours ou non à des outils open-source gratuits)-
peut être évalué à 20.000 € par an13, tout en soulignant qu’une mise en œuvre dans un cadre
de coopération inter-établissements (réseau des 6 IEP) est susceptible d’apporter des sources
de financement supplémentaires conséquentes et que des économies substantielles sont
possibles liées à l’expérience acquise sur des plateformes telles que Moodle 2.0 en les
8 http://www.univ-pau.fr/live/digitalAssets/91/91190_dossier_presse_rentree_mercredi_9_sept.pdf9 http://www.scuio.univ-paris5.fr/IMG/pdf/RAPPORT_2007-2008.pdf10 http://www.e-portfolio.uvsq.fr/11 http://www.uco.fr/divers/je20080307/docs/GauthierUCOePortfolioV1.pdf12 http://www.europe-education-formation.fr/docs/Leonardo/Compendium-GP-01.pdf13 « Le budget annuel sur 4 ans de ce projet s’élèverait pour chacune, et pour une mise en œuvre pour50 étudiants, à 20 000 euros correspondant à un mi-temps IGE + 10.000 euros correspondant auxheures passées à l’accompagnement ».
8
associant à Mahara14, plateforme de type CMS résultat d'une collaboration entre différents
établissements de formation et universités de Nouvelle- Zélande. Cette plateforme ePortfolio
« met divers outils (blogs, CV, fonctions de travail en réseau, Social Networking, etc.) à la
disposition de l'utilisateur en vue de concevoir et d'organiser une plateforme de
développement et de présentation. Mahara offre ainsi à l'utilisateur la possibilité de décider
quels contenus il permet de consulter librement à d'autres étudiants, à des enseignants ou à
des groupes entiers d'apprenants 15».
Certaines Universités françaises (UVSQ, Lille1, Paris V) ont fait le choix
de rejoindre la communauté francophone ELGG16 et de recourir à cette plateforme
eportfolio pour se connecter à Moodle. Dans un cadre plus international, l’Université
Technologique de Compiègne, les régions Centre et Poitou-Charentes ainsi que Rennes-
Métropole sont membres et partenaires du réseau « EIfEL et Europortfolio17 »
D’autres Universités ont préféré mettre l’accent, en amont du PEC, sur
l’élaboration d’un livret de compétences : c’est le cas de l’Université Paris‐Est Créteil
Val‐de‐Marne dont le SCUIO a été distingué en 2010 en se voyant décerner le Grand Prix
de la catégorie « rencontres entreprises ‐ diplômés » du trophée RUE 2010 – SYNERGIE
campus entreprises, et à Saint Etienne, de l’Université Jean Monnet18 qui est à ce jour la
seule Université française à avoir publié un « guide de compétences », disponible en ligne.
Afin de situer l’examen des expérimentations en cours dans une
perspective historique pertinente, et avant d’en dresser le bilan nous procéderons à l’analyse
des facteurs à l’origine des transformations économiques et sociales des sociétés dites
industrialisées qui ont conduit de l’accès à l’emploi par des qualifications sanctionnées par un
diplôme, à un régime d’employabilité fondée sur la mobilisation de compétences (1ère partie).
14 Il est en effet possible d’associer Mahara (http://mahara.org) qui est « an open source e-portfoliosystem », distinguée en 2008 par le New Zeland Open Source Award 2008, avec Moodle 2.0. Cf. :http://moodlemoot.org/mod/resource/view.php?id=325http://slides.liip.ch/img/documents/20090320_Penny_Leach_MoodleMoot-DE_Mahara.pdfL’INSA de Lyon dispose de l’expertise adéquate à cette fin.15 Source : Thomas Longeon – Thierry Jean-Baptiste –Pierre Bénech Le ePortfolio « Mahara » Ecoled’architecture de Nancy. http://longeon.fr/wp-content/uploads/2010/02/Analyse-TICE-Portfolio.pdf16 Cf. http://www.elgg.org/ et http://www.elgg.elgg.fr/ pour la communauté francophone17 Cf. http://www.eife-l.org/publications/eportfolio/index_html18 Université Jean Monnet SCUIO Guide de compétences. Les Licences. Plateforme InsertionProfessionnelle, juin 2010, 56 pages. Téléchargeable à l’adresse :http://portail.univ-st-etienne.fr/bienvenue/presentation/les-relations-universite-entreprises-224230.kjsp
9
Puis, nous situerons le rôle exact -aux côtés des politiques nationales-
joué par le processus de Bologne dans la mise en place d’une politique d’éducation et de
formation tout au long de la vie. Cette politique vise à garantir l’employabilité par une
politique de sécurisation des parcours professionnels s’appuyant sur un programme ambitieux
de certification des compétences et de transformation des Universités en lieux d’expertise de
validation des acquis de l’expérience et de l’apprentissage (« Learning outcomes »). Cette
nouvelle mission dévolue aux Universités s’inscrit dans un processus qui bouscule tout le
système de formation professionnelle et qui nécessite, au regard de la commission européenne
et des gouvernements des Etats membres, la mise en œuvre simultanée d’une harmonisation
des parcours de formation fondée sur des modalités diverses d’évaluation comparative des
performances (« benchmarking ») et d’institutionnalisation de la concurrence entre
universités autonomes (qualifiées d’universités entrepreneuriales dans les publications de
l’OCDE). En effet, la concurrence entre centres d’excellence notamment, semble au regard
des dispositifs d’évaluation mis en place (agences d’accréditation de la qualité etc..) la
meilleure garantie d’une incitation à la performance. C’est dans ce cadre général, dynamisé
par une politique ambitieuse de mobilité tant des enseignants que des étudiants que sont mis
en place le portefeuille européen des langues et le cadre de certification européen qui
suscitent parallèlement aux mesures nationales de sécurisation des parcours professionnels
l’apparition et le développement de portefeuilles numériques d’expériences et de
compétences (2ème partie).
Nous aborderons ensuite l’examen des expériences des Universités
françaises ayant mis en place le PEC afin d’en tirer des enseignements, qui précèderont les
préconisations que nous soumettons à la communauté éducative de SciencesPo-Lyon. Dans
l’hypothèse, en effet, où l’établissement considèrerait, à juste titre, que le temps est venu de
se doter d’ outils exigeants et performants comme les référentiels de compétences et le PEC,
il y a lieu de rappeler que ceux-ci ne sont pas destinés à remplacer l’évaluation académique
traditionnelle mais à créer un climat propice à l’émergence d’une prise de conscience par
tous que les apprenants peuvent devenir acteurs de leur propre formation en maîtrisant par
des voies diverses (dont les stages et les travaux de recherche) les applications, dans des
contextes variés, des connaissances acquises. (3ème partie).
10
Ière Partie - DE L’ACCÈS A L’EMPLOI PAR LE
DIPLÔME AU RÉGIME D’EMPLOYABILITÉ
PAR LES COMPÉTENCES.
Bien avant que le processus de Bologne ne s’empare de la question de
l’employabilité et se propose de relier le parcours de formation au projet professionnel, à la
faveur d’une logique de compétences19, économistes et sociologues avaient dès le début des
années 1990 rendu compte des transformations économiques et sociales conduisant les DRH
des entreprises à substituer la notion d’employabilité à celle de qualification.
Après avoir rappelé les principaux résultats des analyses alors proposées
(section1), nous montrerons comment l’émergence et le développement de thématiques
centrées sur les caractéristiques de l’économie de la connaissance, sur la redéfinition des
missions de l’Etat à la faveur de l’émergence du nouveau management public, et sur
l’avènement de l’Université entrepreneuriale, préparent l’introduction de référentiels de
compétences dans l’enseignement supérieur et suscitent le débat sur des formes nouvelles
d’adéquation du système de formation aux transformations de l’emploi dues aux NTIC et à la
tertiarisation de l’économie (section2).
SECTION 1 – SURMONTER LA VOLATILITÉ DES QUALIFICATIONS
Dès la prise de conscience, advenue après le 2nd choc pétrolier, de la crise du rapport
salarial qualifié de fordiste et caractérisé par une stabilité des types d’emploi dans des
industries aux structures productives rigides, économistes et sociologues ont remis en cause la
pérennité d’une relation d’emploi20 fondée sur l’accès à l’emploi en fonction d’une
correspondance supposée pérenne entre les caractéristiques du poste de travail et les
19 Official Bologna Seminar 6-7 November 2008 Employability: The Employers’ Perspective and itsImplications. Voir notamment la communication de Marie-Pierre MAIRESSE « L’employabilité: unnouvel enjeu pour les Universités ».20 Anne-Marie DAUNE-RICHARD, Madeleine LEMAIRE [1993] « Regards croisés sur lesemployabilités » Document LEST, 93/1, 12 pages.
11
qualifications21 requises pour l’exercer. Comme l’offre de qualifications semblait assurée par
l’obtention de diplômes appropriés, qualifications et diplômes fournissaient ainsi l’ossature
des grilles de salaires dans un contexte de forte croissance de la productivité apparente du
travail davantage associée à l’augmentation des quantités produites (allongement des séries)
qu’à l’innovation de produits et/ou de procédés.
En 1990, Bernard Gazier s’interroge sur l’employabilité et propose une radiographie
d’un concept en mutation. Dès 1994, Françoise Ropé et Lucie Tanguy publient un ouvrage
collectif « Savoirs et compétences. De l’usage de ces notions dans l’école et l’entreprise ».
Poursuivant la démarche entreprise ces auteurs parviennent dans un article ultérieur22 aux
conclusions suivantes :D'un côté, on souhaite passer d’un système d'enseignement centré sur les
savoirs au sein de filières scolaires à un système d'apprentissage centré sur l'élève,
acteur de son parcours scolaire au moment où, de l'autre, on passe d'une organisation
productive au sein de laquelle pouvait ou non se mener une carrière, à une organisation
valorisante créatrice de compétences pour l'individu salarié au cours de son parcours
professionnel; dans l'un et l'autre cas, on observe une recherche poussée
d'individualisation. En miroir, une configuration de notions se dessine en termes de 1)
contrat d'apprentissage et contrat de partenariat; 2) pédagogie par objectifs et
management par objectifs; 3) évaluation des savoirs dans une situation donnée et
évaluation des savoirs opérationnels, l'ensemble se modélisant au sein de l'institution
scolaire dans les objectifs de référence et les référentiels et dans les référentiels
d'activités au sein des entreprises.23»
Ainsi, les changements alors en cours dans le système des relations professionnelles
et dans le système de formation étaient bien identifiés. Mais les sources de ces changements
demeuraient assez obscures. En fait, les recherches ultérieures conduiront à mettre en avant
trois catégories de facteurs explicatifs des changements observés :
21 Entendues conventionnellement comme « ensemble de savoir-faire et de techniques reconnu dansune formation et sanctionné par un diplôme ».22 Françoise ROPÉ et Lucie TANGUY « La codification de la formation et du travail en termes decompétences en France », Revue des sciences de l'éducation, vol. 21, n° 4, 1995, p. 731-754.23 Ropé et Tanguy, article cité p. 748.
12
- l’interaction entre la diffusion des NTIC et l’introduction d’une flexibilité accrue de
l’appareil de production24 en réponse à une demande beaucoup plus versatile liée à
l’accélération des innovations de produits et de procédés25,
- l’impossibilité pratique à un niveau macroéconomique de déduire des
caractéristiques de l’évolution économique attendue la nature des postes de travail à pourvoir
et des qualifications qu’ils requièrent pour les occuper. Ce constat est manifeste dès la fin des
années 80 où les prévisions du Bureau d’Informations et de Prévisions Economiques (BIPE)
ou de la CEGOS26 et le recours massif à l’expertise de cabinets-conseils se substituent, en
matière d’anticipation des besoins en compétences à satisfaire27, au rôle éminent jusque là
dévolu au CGP et au CEREQ28 en matière de prévision de la structure des emplois et des
qualifications,
24 Au milieu des années 1980 les débats en matière d’organisation de la production s’organisentautour de l’automatisation flexible Cf. D.DUFOURT« Système d'observation de l'automation intégréede production ». Rapport final, Convention 85. P. 1218 E.C.T. avec le Ministère de la Recherche et dela Technologie, Programme AMES, juillet 1987, E.C.T., 123 pages.25 D’où l’apparition d’une profonde mutation, tant paradigmatique qu’organisationnelle dont lasource est l’invention de l’ingéniérie concourante. Cf. Christel DARTIGUES, État de l’art surl’Ingénierie Concourante, Rapport de Recherche RR 01-02 UFR d’Informatique, Université ClaudeBernard Lyon 1, 40 pages.26 La CEGOS (association loi de 1901 au départ) publie en 1984 un rapport cosigné par Cegos et YvesCannac : «La bataille de la compétence. L’éducation professionnelle permanente au cœur desstratégies de l’entreprise».27 S’agissant de la période actuelle, on observera qu’il revient au syndicat professionnel des SSIId’effectuer l’anticipation des compétences nécessaires pour pouvoir exercer les nouveaux métiers,ce que ne parviennent à faire, ni les pouvoirs publics, ni le système de formation trop éloigné desévolutions des structures d’activité, ni les entreprises clientes des SSII qui définissent les métiersmais sont incapables d’expliciter les compétences qui leurs sont associées. L’exemple del’informatique embarquée principale source actuelle et future de créations d’emplois dansl’ingéniérie informatique est éclairant. On se reportera utilement à l’étude réalisée par l’observatoireparitaire OPIIEC, structure lié à SYNTEC : « Étude sur l’offre de formation métiers de l’informatiqueembarquée » Synthèse de la mission, mai 2009, 32 pages.28 « Un peu plus tard, le Centre d'Études et de Recherches sur les Qualifications (CEREQ) propose lanotion d'"emploi-type étudié dans sa dynamique" (ETED) pour "anticiper la production descompétences" et reprend la classique distinction entre savoirs, savoir-faire et savoir-être qui se trouveainsi confirmée (Mandon, 1990). La gestion prévisionnelle des ressources humaines s'éloigne de lavisée quantitative et collective, pour entreprendre une approche qualitative et individuelle ». PatrickGILBERT « La notion de compétences et ses usages en gestion des ressources humaines » Actes duséminaire - Management et gestion des ressources humaines : stratégies, acteurs et pratiques, Août2005, publié par EDUSCOL, Les actes de la DGESCO, juin 2006, disponible à :http://media.eduscol.education.fr/file/Formation_continue_enseignants/35/3/GRH_actes_110353.pdf
13
- l’impact massif sur la polarisation salariale, (entendue comme la manifestation
d’une aggravation des écarts par rapport au salaire médian entre salaires les plus faibles et
salaires les plus élevés) des innovations technologiques et des délocalisations liées aux effets
de la mondialisation laisse à nu des sociétés qui découvrent avec les emplois précaires et
intérimaires et la fin des marchés internes du travail29, les attributs du nouveau rapport
salarial30 advenu dans une société tertiaire dans laquelle domine la relation de service31.
§1 – La sécurisation des parcours professionnels et l’avènement de lalogique des compétences.
A quels besoins répond la logique des compétences ? Les points de vue sont assez
dissemblables selon les acteurs et les disciplines mobilisées.
La sécurisation des parcours professionnels32 met sur le devant de la scène quatre
catégories d’acteurs : les travailleurs à la recherche d’un emploi ou d’une formation dans le
cadre d’une évolution professionnelle, les entreprises astreintes à une gestion prévisionnelle
des compétences, souvent très approximative en raison du défaut de coordination qui affecte
le fonctionnement du marché du travail, la puissance publique qui voit dans la sécurisation
des parcours professionnels la voie royale pour concilier flexibilité et sécurité, et enfin le
29 Marchés internes que la Gestion Prévisionnelle des Compétences conduira à liquider commel’observe fort justement Laurent Duclos :
« L’ironie veut que les grandes entreprises françaises –anticipant peut-être lafin d’un modèle d’intervention des pouvoirs publics permettant de fait l’externalisation de lagestion sociale des restructurations – se soient appuyées sur la GPEC pour liquider lereliquat de marché interne ».
Il précise d’ailleurs que :« Le sous-emploi chronique a non seulement encouragé le développement de
l’outsourcing en matière productive mais aussi les comportements de « chasseur-cueilleur»en matière de qualification (poaching). Les entreprises ont pu voir, en contrepartie, leurcapacité à orienter directement les «flux » de main-d’œuvre diminuer. Celles qui connaissentalors des difficultés de recrutement ou qui proposent des métiers peu valorisants sont ainsiconfrontées à de nouveaux enjeux d’arbitrage entre redéploiement d’un «marché interne» etsimple recours au marché externe du travail pour rester attractives. Il reste que la notion demarché interne débordait, dans les années 1970, les seuls enjeux de gestion des ressourceshumaines pour intéresser le modèle de l’entreprise (fordiste) en son ensemble ».
Laurent DUCLOS « Le droit de la bonne pratique. Enquête sur une norme de gestion prévisionnellede l’emploi et des compétences » Dossier Nouvelles Pratiques Juridiques, Cahiers Philosophiques, n°116, décembre 2008, p. 5130 Cf. OIRY Ewan, d’IRIBARNE Alain [2001] La notion de compétence : continuités et changements parrapport à la notion de qualification, Sociologie du Travail, Volume 43, n°1, pages 49-66.31 Cf le numéro spécial [ n°306, janv-fev. 2006] de la revue « Travail et Changement » de l’ANACTintitulé « Organiser la relation de service » dans lequel les auteurs évoquent la nécessité pour lessalariés de disposer certes de compétences techniques pour produire le service mais aussi decompétences organisationnelles nécessaires pour faire face aux demandes des clients et faire preuveainsi d’une compétence relationnelle.32Édith ARNOULT-BRILL La sécurisation des parcours professionnels, AVIS ET RAPPORTS DU CONSEILÉCONOMIQUE ET SOCIAL, n°12, 6 juin 2007, 190 pages.
14
système de formation avec notamment des structures privées comme les SSII appeler à
former dans des périodes d’intercontrats des personnes dont les compétences ne sont pas
disponibles sur le marché du travail et que le système de formation « classique » ne peut offrir
qu’au terme d’un temps de latence plus ou moins long.
La dimension cognitive des compétences est fortement soulignée dans les sciences
de l’éducation en réponse aux changements qui affectent le système de formation33.
En revanche, les entreprises mettent l’accent sur des savoirs expérientiels34, qui
mettent en jeu la capacité des travailleurs à être immédiatement performants dans leurs
activités tout en reconnaissant que l’adéquation entre savoirs procéduraux et situation de
travail nécessite une mise en relation adéquate entre ressources individuelles et ressources de
la firme ainsi qu’en témoigne le schéma ci-dessous dû à Didier Retour 35qui met l’accent sur
les éléments stratégiques d’une gestion dynamique tout autant que prévisionnelle des
compétences à savoir :
- identification des compétences effectivement mobilisées qui peuvent déborder
les compétences requises,
- prise de conscience des compétences détenues et non mobilisées,
- évaluation des compétences potentielles susceptibles d’être acquises dans le
cadre de l’évolution de la vie professionnelle.
La puissance publique voit dans les compétences le levier de l’ajustement des
demandeurs d’emploi aux besoins des entreprises et l’outil de la sécurisation des parcours
professionnels. Elle entend de ce fait, en anticipant sur les travaux issus du processus de
Bologne, déléguer au système de formation professionnelle la mission d’assurer l’entretien
des acquis d’apprentissage et de faire face aux besoins de la formation tout au long de la vie.
Les organismes de formation affrontent une difficulté à laquelle les entreprises seules
ne peuvent faire face et que l’université elle-même n’est pas préparée -en dépit des travaux
précurseurs des sciences de l’éducation sur la transposition didactique des savoirs36- à prendre
en compte centralement, à savoir comment transmettre, - et identifier en termes d’expériences
33 Voir les contributions majeures de Philippe PERRENOUD [2001] et [2004 a]. Cf. Annexe 1« Ressources ».34 LE BOTERF Guy.- De la compétence: essai sur un attracteur étrange.- Paris : Ed. d’organisation,1994.- 176 p.35 Didier RETOUR Les différents niveaux d’analyse de la gestion des compétences, Actes du séminaire- Management et gestion des ressources humaines : stratégies, acteurs et pratiques, Août 2005,publié par EDUSCOL, Les actes de la DGESCO, juin 2006 pp. 87-100.36 L’expression est due au sociologue Verret [1975].
15
cognitives-, ce qui conditionne et rend possible la mobilisation des savoirs adaptés face à des
situations intervenant dans des contextes variés.
Si l’on procède- non pas à une transposition didactique- mais à une projection dans
le champ d’une communauté éducative du schéma ci-dessous, nous découvrons les bases
mêmes d’une articulation nécessaire et pertinente entre l’évaluation académique classique
qui porte sur les savoirs acquis et sanctionnés par un diplôme, l’évaluation par les
compétences qui conduit à mettre en évidence les capacités à mobiliser les connaissances
acquises dans un contexte particulier (travail de recherche, d’enquête, stages et rapports de
stage), et la nécessité d’encourager et d’accompagner le travail réflexif nécessaire pour que
chaque étudiant(e) prenne conscience des compétences qu’il (elle) détient et qu’il (elle)
mobilise tant dans le cadre de ses études que dans la vie courante (vie associative dans
l’établissement, mandat exercé au niveau des conseils universitaires, initiatives diverses tant
en France à l’étranger pour initier un projet professionnel).
Représentation des quatre niveaux de compétences à considérerSource : Didier RETOUR [2006] Les différents niveaux d’analyse de la gestion des compétences, article cité, p.89.
16
Au cœur de cette articulation entre savoirs et compétences émergent deux notions
clefs : celle de référentiels et celle d’individualisation dans l’usage de ces référentiels.
§2 – L’introduction des compétences dans le système éducatif.
Parallèlement aux transformations économiques et sociales évoquées plus haut et
sans que l’on puisse discerner, antérieurement aux lancements des processus de Bologne et de
Bruges37 une relation de dépendance au regard des évolutions affectant tant l’organisation de
la production que le marché du travail et le système de formation professionnelle, ce qu’il est
convenu d’appeler « l’approche par les compétences »38 fait son entrée dans le système
éducatif.
A juste titre O. Rey39 observe que c’est
« à la fin des années 90 que le concept acquiert une visibilité internationale et une dimension
plus normative dans tous les pays (dont la France), à travers la multiplication de références aux compétences
comme élément central pour le pilotage des programmes ou des curriculums.
À ce titre, le projet DeSeCo (définition et sélection de compétences clés) de l’OCDE (1997-
2003) a joué un rôle important, en fixant et systématisant un cadre de discussion international de référence
pour les politiques publiques. Piloté par le bureau fédéral suisse des statistiques, le projet a réuni de façon
permanente ou ponctuelle divers experts pour dresser des « états de l’art » du concept, confronter les
définitions, établir des convergences et finalement lister une série de compétences clés pour le développement
des sociétés et des individus. Lesquelles compétences clés auraient bien évidemment vocation à constituer des
objectifs majeurs de l’éducation.
Cette entreprise est légitimée par le fait que les savoirs traditionnels de base (« basic skills » ou
apprentissages fondamentaux) sont importants mais pas suffisants pour répondre aux exigences et à la
complexité des demandes sociales actuelles, ce qui justifie l’identification de compétences clés associées à un
degré plus élevé de complexité et d’approche réflexive ».
37 Le processus de Bruges renvoie au dispositif mis en place suite à une réunion tenue dans cette villeen juin 2002 en Belgique, dont l’objectif consistait à renforcer la coopération entre les pays del’Union européenne dans le domaine de la formation professionnelle. Cf. Jean-Paul de Gaudemar,directeur de l’enseignement scolaire, Ouverture de la conférence-débat « « La formationprofessionnelle en Europe : regards croisés » Rencontres de la DESCO - 6 décembre 2002.38 Selon Romainville[2007], « cette expression floue engobe des pratiques assez diverses qui vont del’élaboration collective de référentiels de compétences jusqu’à la mise en place de dispositifspédagogiques visant à développer spécifiquement des compétences ».39 REY Olivier (2008). « De la transmission des savoirs à l'approche par compétences ». Dossierd'actualité de la VST, n° 34, avril. INSTITUT NATIONAL DE RECHERCHE PÉDAGOGIQUE Cellule de veillescientifique et technologique.En ligne : <http://www.inrp.fr/vst/LettreVST/34-avril-2008.php>.
17
Pour autant l’introduction effective des compétences dans le système éducatif a
été longue, difficile et reste controversée.
Longue, car l’approche par compétences s’inscrit en rupture avec la pédagogie
par objectifs, « méthode traditionnelle dominante dans le monde scolaire du XXe siècle, qui découpe les
savoirs à transmettre au sein des disciplines en autant d’objectifs à atteindre à chaque niveau de la scolarité »,
et exige un changement fondamental de paradigme en matière d’évaluation puisque la
compétence, acquise par apprentissage c’est-à-dire au terme d’un processus à la fois support
de l’acquisition et objet de l’évaluation, est fondamentalement contextualisée et finalisée. Il
faudra ainsi attendre la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’École du 23 avril
2005, pour que soit mis en place le socle commun de connaissances et de compétences et
juillet 2010 pour que soit mis en œuvre dans l’enseignement primaire et secondaire le livret
de compétences.
Difficile, puisque l’individualisation tant au niveau de la démarche réflexive que
l’apprenant est convié à mettre en œuvre qu’au niveau de l’enseignant en charge de
l’accompagnement de cette démarche réflexive, suppose la capacité à discerner dans la mise
en œuvre de compétences et de savoirs pertinents au regard d’une situation celles et ceux qui
pourront être réinvestis dans un autre contexte.
Controversée, enfin du fait de dissonances cognitives entre spécialistes anglo-
saxons des sciences de l’éducation et spécialistes continentaux. Ces dissonances cognitives
qui portent sur le statut épistémologique du concept de compétences, renvoient au cadre
d’analyse mobilisé : chez les anglo-saxons40 la mesure de la compétence est référée aux
performances qu’elle autorise dans l’exercice de l’activité qui les mobilise, alors que chez les
auteurs continentaux la réalité de la compétence se situe davantage au niveau d’une
conception piagétienne des relations entre structures de l’entendement et opérations
mentales41 engagées dans l’effectuation42.
40 Marcel CRAHAY [2006] propose de substituer le concept d’apprentissage à celui de compétences en raisonde la non pertinence des références utilitaristes qui subordonnent dans la littérature anglo-saxonne laconnaissance à l’action. Cf. Crahay Marcel (2006). « Dangers, incertitudes et incomplétude de la logique de lacompétence en éducation ». Revue française de pédagogie, n° 154, mars.41 Joël BRADMETZ [2001] « Une conception piagétienne de la construction d’une théorie de l’esprit et desfigures de l’intentionnalité » Archives de Psychologie, 2001, 69, 177-220 .42 Nous songeons ici au phénomène que REUCHLIN [1978] appelle vicariance des processus, à savoir le fait depouvoir atteindre une même performance par des stratégies différentes. Cf. REUCHLIN, M. (1978). Processusvicariants et différences individuelles. Journal de Psychologie Normale et Pathologique, 2, 133-145.
18
S’agissant de « la joyeuse entrée des compétences dans l’enseignement
supérieur » Marc Romainville [2007]43 s’interroge précisément sur la nature et la pertinence
des sources qui en ont précipité l’avènement. A ses yeux, il y aurait deux sources majeures,
l’une liée à des insatisfactions internes et l’autre à des demandes externes émanant de la
société du savoir et de l’économie de la connaissance. Nous traiterons de ces demandes
externes dans la section suivante et aborderons ici la question des insatisfactions internes.
Romainville évoque trois types d’insatisfaction ayant pu concourir à la
promotion de l’approche par compétences dans l’enseignement supérieur : la superficialité de
certains apprentissages, le manque d’intégration des savoirs et le déficit d’installation de
certaines compétences soit au niveau de savoirs disciplinaires soit au niveau de parcours de
formation.
SECTION 2 – ATTENTES SOCIETALES ET RECONFIGURATIONS
INSTITUTIONNELLES : DE LA SOCIETE DU SAVOIR AUX UNIVERSITES
ENTREPRENEURIALES.
Les processus de Bologne et de Bruges ont conduit à l’introduction de
référentiels de compétences et à la mise en œuvre du Portefeuille d’Expériences et de
Compétences dans l’enseignement supérieur et dans le dispositif d’orientation et d’insertion
professionnelle, à la faveur de l’adoption du décret du 8 avril 2002 portant application au
système français d'enseignement supérieur de la construction de l'Espace européen de
l'Enseignement supérieur et de la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et
responsabilités des universités.
En effet, en son article 2 alinéa 4 le susdit décret stipule la délivrance d' "une
annexe descriptive aux diplômes dite " supplément au diplôme " afin d'assurer, dans le cadre
de la mobilité internationale, la lisibilité des connaissances et aptitudes acquises" 44. De son
43 ROMAINVILLE Marc (2007) "La "joyeuse entrée" des compétences dans l’enseignementsupérieur". Revue de l’inspection générale, n° 4, pp. 48-54.44 A la conférence de Berlin des 18 et 19 septembre 2003 les ministres européens de l’enseignementsupérieur ont, en outre, fixé « l'objectif selon lequel à partir de 2005, chaque étudiant qui termineses études devrait recevoir automatiquement et sans frais le Supplément au diplôme. Ilsrecommandent aux institutions et aux employeurs de faire pleinement usage du Supplément audiplôme, afin de profiter de la transparence accrue et de la flexibilité améliorée des systèmes dediplômes d'enseignement supérieur pour stimuler l'employabilité et faciliter la reconnaissanceacadémique en vue de la poursuite des études. Le Supplément au diplôme devrait être délivré dansune langue répandue en Europe ".
19
côté, la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 a ajouté aux missions traditionnelles du service
public de l’enseignement supérieur celle de « l’orientation et de l’insertion professionnelle ».
Le législateur a entendu à cette fin que soit institué dans chaque Université un « Bureau
d’aide à l’insertion professionnelle des étudiants », chargé entre autres de diffuser aux
étudiants une offre de stages et d’emplois variée en lien avec les formations proposées par
l’université et d’assister les étudiants dans leur recherche de stage et d’un premier emploi.
Ces mesures s’enracinent dans une prospective des relations entre
l’enseignement supérieur, l’économie et la société dominée par des références aux
caractéristiques de l’économie de la connaissance, aux nouvelles fonctions dévolues à l’Etat
dans la société du savoir et dans la volonté de promouvoir dans un contexte d’autonomie et
de concurrence « l’Université entrepreneuriale ».
§1 – La valorisation des compétences dans l’économie de la
connaissance.
L’économie de la connaissance est une sous-discipline de l’économie, apparue
dans les années 90 à la conjonction de trois problématiques, qui ont trait respectivement au
rôle du capital humain dans la croissance endogène, aux propriétés sui generis de la
connaissance comme bien non-rival, sources d’externalités positives et inappropriable dès
lors qu’elle embrasse des savoirs tacites aux côtés des connaissances codifiables, et enfin aux
effets tant microéconomiques sur la stratégie des entreprises45 que macroéconomiques sur la
conception des politiques d’innovation46 de la croissance du capital intangible devenue telle
que dès 1990 le stock de capital intangible dépasse le stock de capital tangible (évaluation
aux prix de 1987)47
Un des problèmes majeurs mis en évidence par l’analyse des économies de la
connaissance est la contradiction entre le rôle désormais stratégique que jouent les actifs
immatériels ( savoirs codifiables ou non, connaissances brevetables ou non, compétences et
45 SESSI, L’immatériel, au coeur de la stratégie des entreprises, Le 4 pages n°217, mai 2006.http://www.industrie.gouv.fr/biblioth/docu/4pages/pdf/4p217.pdf46 LEVY Maurice, JOUYET Jean-Pierre [2006] L’économie de l’immatériel: la croissance de demain,MINEFI, Rapport de la commission sur l’économie de l’immatériel, 184 pages. Voir notamment lechapitre 1 de la 2ème partie du rapport, intitulé « L’économie de l’immatériel accélère l’obsolescencede nos institutions de la connaissance et de la création » pp. 39-63.47 Cf. J. Kendrick [1994] Total capital and economic growth, Atlantic Economic Journal, 22:1-18.
20
savoirs faire acquis et difficilement transmissibles etc..) et l’impossibilité de les évaluer
convenablement parce qu’il n’est possible de le faire qu’en bourse à travers le « goodwill »
c’est-à-dire l’écart entre la valeur boursière de la firme et celle de la somme des actifs qu’elle
contient au moment de son acquisition. Or la plupart des actifs immatériels insusceptibles
d’être évalués faute d’un marché sur lequel puissent s’échanger des droits de propriété sur ces
actifs, ne sont évaluables que par l’intermédiaire du « goodwill ».
L’introduction sur le marché du travail d’un e-portfolio a ainsi un enjeu qui
dépasse la seule sécurisation des parcours professionnels. Il s’agit aussi d’évaluer des
compétences à travers l’expérience professionnelle acquise, pour lesquelles il n’y a pas de
marché qui puisse en fournir une estimation directe ou indirecte :
« Alors que jusqu’à présent, les comptes de l’entreprise devaient
pouvoir informer des utilisateurs multiples et variés (ses gestionnaires, les
tiers, les autorités judiciaires et fiscales, ses créanciers et actionnaires), ils
doivent désormais prioritairement répondre aux besoins spécifiques des
détenteurs de capitaux. Or l’évaluation au coût historique intéresse peu ces
derniers, qui sont beaucoup plus sensibles à ce qu’un investissement matériel
ou immatériel est susceptible de rapporter (fair value). Plus directement d’
ailleurs, la comptabilité doit présenter tous les éléments qui seraient
susceptibles de faire monter le cours du titre, et tous ceux qui seraient
susceptibles de le faire baisser (d’où la prise en compte des risques dans les
évaluations par exemple). C’est dans cette dimension que l’évaluation des
actifs immatériels devient cruciale. La méthode de la juste valeur est censée
fournir une information qui intègre, par construction, les tendances de marché
et rejoint en cela les méthodes utilisées par les investisseurs.
En dernière analyse, on veut pouvoir évaluer les actifs incorporels de
l’entreprise parce que les ressources immatérielles engendrent désormais une
part considérable des richesses créées et que l’on veut pouvoir s’approprier
cette richesse à travers la liquidité du marché financier. Les décisions des
investisseurs que la comptabilité doit orienter sont celles de l’achat et revente
de titres, les fusions-acquisitions, les réactions des investisseurs face aux
introduction en bourse de start-ups ou de segments d’entreprises
scissionnées...Or si la majeure partie de la valeur créée provient désormais des
ressources immatérielles, c’est cela que l’on vend ou que l’on achète à travers
ces opérations et il faut pouvoir l’évaluer. L’impossibilité de le faire ne
révèlerait-elle pas toutefois un problème de légitimité ? » 48
§2 – Les missions de l’Etat stratège dans l’économie du savoir.
48 HALARY Isabelle, CERAS-LAME, Université de Reims, « Ressources immatérielles et finance demarché : le sens d’ une liaison » Jeudi 27 septembre 2007
21
Nous évoquerons en premier lieu le nouveau régime de production des
connaissances à l’origine des conceptions contemporaines des missions imparties à l’Etat
dans ce domaine, et, dans un second temps, les nouveaux modes de gouvernance impliqués
par ces nouvelles conceptions en ce qui concerne les relations entre enseignement et
recherche dans l’enseignement supérieur. Ce qui nous conduira à retrouver la place centrale
dévolue aux compétences.
2.1 – Evolution des modes de gouvernance de la science.
Deux constats peuvent être dressés quant aux raisons qui ont présidé à l’évolution de ces
modes de gouvernance :
a) les modalités de l’institutionnalisation des disciplines scientifiques et la
genèse de l’émergence d’une activité professionnelle consacrée à la recherche font apparaître
de grandes différences entre les pays, liées principalement à des formes d’organisation des
institutions scientifiques reposant sur des objectifs politiques et sociaux très différents.
Comme le disent respectivement Bertram SCHEFOLD (Université de Francfort) et Marion
FOURCADE-GOURINCHAS, il y a des «sociostyles » nationaux qui impriment des priorités et
des orientations différentes aux programmes scientifiques, très éloignées des nécessités
internes du développement de chaque discipline et donc à terme sources d’hybridations
spécifiques.
b) l’avènement de la production de masse, puis la montée de la stratégie de
différenciation à l’origine d’une très grande variété des produits et d’une exigence de
réactivité et de flexibilité des entreprises suscitent la mise en place de modes de gouvernance
de la science qui exercent par les modalités de pilotage qu’ils requièrent, des formes de
structuration spécifiques des relations entre science, technologie et société. Se succèdent ainsi
depuis 1945 l’ère des grandes agences gouvernementales en charge des orientations de la
recherche fondamentale et intervenant par le biais des subventions, puis celle des partenariats
publics-privés reposant sur une logique contractuelle intégrant des exigences de rentabilité et
instituant une concurrence-coopération entre acteurs le long du processus linéaire allant de la
recherche fondamentale à la recherche appliquée puis au développement industriel.
L’émergence des NBIC49 (nanotechnologie, biotechnologies, sciences de l’information et
sciences cognitives) et leur convergence postulée50 introduisent une rupture frontale par
49 Bernadette BENSAUDE-VINCENT Se libérer de la matière ? Fantasmes autour des nouvelles technologies, INRA Editions,Collection Sciences en questions.50 NSF Report Converging Technologies for Human Performance, Mihail C. Roco and William S. Bainbridge (eds.), June 2002
22
rapport à l’ordre ancien : l’ampleur des financements public nécessaires et en même temps
l’énormité des profits privés susceptibles d’être accaparés par les entreprises, les risques
industriels, sanitaires, sociaux (sans commune mesure avec les risques auxquels les
populations étaient exposées dans le passé) encourus au niveau des applications dans la vie
quotidienne de ces technosciences51 requièrent un mode de gouvernance totalement
différent.
C’est en impliquant les différentes communautés concernées (chercheurs,
usagers, experts gouvernementaux, industriels) dans la décision d’engager tel ou tel
programme que la légitimité de ceux-ci se construit tout en diluant les responsabilités. Il est
dès lors essentiel que les savoirs professionnels tant des sciences dures que des sciences
humaines et sociales produisent des discours de légitimation eux-mêmes socialement validés
au travers d’expertises procédurales52.
2.2. - Les compétences, au cœur des nouvelles articulations entre enseignements
et recherches universitaires, induites par les nouveaux modes de
gouvernance de la science.
A partir d’un triple constat, relatif à la crise
de l’Etat – Nation, à l’érosion de l’Etat-Providence53 et à la montée de l’idéologie et des
51 Cf par exemple: The Royal Society and the National Academy of Engineering, Nanosciences and nanotechnologies:opportunities and uncertainties, RS Policy document 19/04, July 2004, 127 pages.http://www.nanotec.org.uk/report/Nano%20report%202004%20fin.pdf52 European Commission Research “Converging Technologies- Shaping the Future of European Societies” by AlfredNordmann, Rapporteur, Report 2004, 68 pages.http://ec.europa.eu/research/conferences/2004/ntw/pdf/final_report_en.pdf
53 Analysée en ces termes: « Une autre conséquence des changements ci-dessus mentionnés est la réduction relative du rôlede l’État dans la régulation du marché qui va de pair avec une tendance à la baisse du financement public dans denombreux secteurs, y compris l’enseignement supérieur et la recherche.(…) Elle peut déjà être observée dans laprivatisation (totale ou partielle) croissante de secteurs qui relevaient traditionnellement des prérogatives de l’État, ycompris l’éducation. Dans l’enseignement supérieur et la recherche, ce phénomène se traduit par la participation croissanted’agents privés extérieurs (comme les entreprises) au financement, à la gestion, à l’exploitation et/ou à l’évaluation de laproduction de la recherche et de l’offre éducative et dans le déclin du soutien (financier) public au système d’enseignementsupérieur/recherche dans de nombreux pays européens (budget national/étudiant). Il est évidemment difficile dedéterminer si la participation d’agents privés a augmenté parce que la participation de l’État a diminué ou vice-versa. Detoute façon, les deux phénomènes coexistent et sont interdépendants. La tendance à une certaine dérégulation du marchéde l’enseignement supérieur et de la recherche se manifeste également par une concurrence accrue entre les institutionsd’enseignement supérieur/recherche et par une plus grande autonomie de gestion que l’État leur a concédée. Elle semanifeste aussi dans la tendance à la « marchandisation » de la connaissance, la recherche et l’enseignement étantconsidérés alors comme des « biens » privés qui peuvent être achetés et vendus par et pour des intérêts particuliers. » inDévelopper la prospective en vue de faire évoluer les relations entre l’enseignement supérieur et la recherche dans laperspective de l’Espace Européen de la Recherche (EER) par le professeur Etienne Bourgeois, Rapporteur. Commissioneuropéenne - Direction générale de la Recherche - Unité RTD-K2 – «Prospective scientifique et technologique, liens avecl’IPTS », Octobre2002. 83 pages. Luxembourg: Office des publications officielles des Communautés européennes, 2003.p.22. Rapport disponible à l’adresse :http://ec.europa.eu/research/social-sciences/pdf/higher-education-research-for-era_fr.pdf
23
pratiques néolibérales54, les experts du groupe STRATA-ETAN s’interrogent sur la capacité
de la nouvelle figure de l’Etat, l’Etat stratège, à concilier des exigences aussi contradictoires
que celles consistant « à former des professionnels compétents et « employables » avec ce qui est
considéré comme une autre mission essentielle de l’enseignement supérieur, à savoir éduquer des
citoyens critiques et actifs »55.
Relativement optimistes quant à la possibilité effective de parvenir, sousconditions, à une telle conciliation56, les experts s’inquiètent en revanche quant auxconséquences du processus d’industrialisation de la recherche et évoquent deux stratégiesalternatives :« - il se pourrait que les universités ou d'autres institutions faisant de la recherche « fondamentale » adoptent une position défensive ets’efforcent de « protéger » la recherche fondamentale contre la pression exercée en faveur de plus de recherche appliquée. Le problème estque, dans ces conditions, les institutions sont confrontées à une diminution des fonds publics alloués pour la recherche fondamentale etqu’elles ne peuvent pas vraiment demander des fonds privés (sauf dans une optique de « patronage »).- L’option inverse consiste à suivre aveuglément la tendance et à renoncer à toute recherche fondamentale. Le problème dans cesconditions est que, bien que cette attitude puisse être payante dans un premier temps, elle pourrait déboucher sur un cul-de-sac au pointque la recherche appliquée, le développement et l’innovation ne puissent plus progresser s’ils ne sont pas alimentés par la recherchefondamentale, s’ils ne s’articulent pas avec elle et s’ils ne se s'appuient pas sur elle. Rapport Bourgeois cité pp.30-31»
Au final, ce sont bien sur des logiques d’apprentissage et d’acquisition decompétences-clé, à l’exemple de ce qu’exige l’activité de recherche, que les expertseuropéens fondent un consensus sur les modalités d’articulation entre enseignement supérieuret recherche universitaire :
« Au vu de la concurrence accrue entre institutions d'enseignement supérieur-recherche, la qualité de larecherche pourrait devenir un élément central incitant certaines institutions à promouvoir des unités spécifiques depréparation à la recherche, séparées des unités d'enseignements de premier cycle et de formation professionnelle. Il estdonc nécessaire de partir de l'idée de similarité des compétences-clé pour appliquer aussi à la formation des chercheurs lecadre utilisé dans la formation professionnelle, à savoir le stage avec multiples superviseurs dans le travail réel dulaboratoire. Mais les compétences spécifiques au métier de chercheur ont aussi changé : il doit être capable de travaillerdans des projets plus grands, plus collaboratifs et multi-partenaires, plus orientés vers la solution de problèmes, plusinterdisciplinaires et souvent en dehors du milieu académique d'origine. Le professionnel qui retourne à l'université pourmettre à jour ses connaissances scientifiques en relation avec son travail doit pouvoir aussi trouver un environnement derecherche adapté à ses besoins.» in Les messages-clés du rapport « Godelier-Bourgeois » Session 4: A NEW PARADIGMFOR RELATIONS BETWEEN HIGHER EDUCATION AND RESEARCH The Europe of Knowledge 2020: a vision for university-basedresearch and innovation Liège, Belgium, 25-28 April 2004, p.14
§3 – L’ « Université entrepreneuriale », creuset de la mise en oeuvredu « New Public Management » et du « benchmarking » descompétences.
54 « L’essor de l’économie de marché a été associé à l’idéologie et aux pratiques organisationnelles libérales qui ont pénétré plus ou moinsprofondément de nombreux secteurs de la société, y compris l’éducation et la recherche. Les pratiques de gestion commerciales (comme,par exemple, le développement de procédures de responsabilisation et de réglementations déterminant l'allocation de ressources ou leprocessus d'accréditation, l'importance croissante des pratiques et de la culture d'évaluation), les valeurs et le vocabulaire du monde desaffaires affectent les institutions d’enseignement supérieur/recherche. La progression de l’individualisation des parcours d’apprentissageque l’on observe dans l’enseignement supérieur (voir ci-dessous la partie 2, section 1.4) peut aussi être interprétée à la lumière de cettetendance. » Ibidem, p.22.55 Rapport Bourgeois cité page 28.56 « Il n'y a pas de contradiction insurmontable entre les compétences-clé requises dans la vie professionnelle et celles valorisées parl'idéal de Humboldt, bien au contraire. Qu'il s'agisse de la pensée critique, des capacités d'analyse et d'argumentation, de l'aptitude àtravailler de façon indépendante, à apprendre à apprendre, à résoudre des problèmes, à prendre des décisions, à planifier, coordonner etgérer, à travailler en groupe, ces compétences-clé pour la vie professionnelle sont aussi celles requises pour le travail de recherche ». TheEurope of Knowledge 2020: a vision for university-based research and innovation Liège, Belgium, 25-28 April 2004, p.14
24
A rebours du sens commun, mais en matière de Nouvelle Gestion Publique,
cette bévue ne surprendra plus personne, les gouvernements de l’Union Européenne se sont
entendus pour introduire les principes du nouveau management public dans les Universités,
avant de définir le modèle d’Université entrepreneuriale qu’ils souhaitaient faire prévaloir57.
Ceci s’explique par l’inféodation du processus de Bologne à la stratégie de Lisbonne (cf. infra
2ème partie) et sans doute, surtout, par la pression exercée au sein du système des Nations
Unies et dans le cadre d’institutions multilatérales par de puissants bailleurs de fonds en vue
d’une reconsidération des missions dévolues à l’Etat dans la société du savoir. Après avoir
rappelé quelles sont ces missions nous rendrons compte du modèle d’Université
entrepreneuriale qui établit, en parfaite cohérence avec les normes en vigueur dans le
management des organisations, un lien étroit entre compétences (de toutes les parties
prenantes et pas seulement de celles des shareholders) et performances.
3.1 –Nouvelles modalités d’intervention publique dans la société du savoir.
Dans son ouvrage « Construire les sociétés du savoir. Nouveaux défis pour
l’enseignement supérieur » la Banque Mondiale a parfaitement énoncé le cadre analytique
présidant à la mise en œuvre des réformes dans l’enseignement supérieur intervenues dans la
décennie 2000-2009 :« En raison, d’une part, des graves contraintes fiscales et budgétaires qui affectent la capacité des
pouvoirs publics à maintenir les niveaux antérieurs d’offre et de financement directs de l’enseignement
supérieur et, d’autre part, de l’émergence des forces du marché tant au niveau national qu’international, le but,
la portée et les modalités de l’intervention publique changent radicalement. Ainsi, au lieu de compter sur le
modèle traditionnel de contrôle de l’État pour imposer des réformes, un nombre croissant de pays choisissent
d’induire le changement en orientant et en encourageant les établissements d’enseignement supérieur publics
ou privés de manière non directive et souple. Cet objectif peut être atteint en suivant trois approches
complémentaires:
• la mise en place d’un cadre stratégique cohérent ;
• la création d’un environnement réglementaire propice ;
• l’instauration d’incitations financières appropriées. »58
57 Comme le rappelle Olivier Rey, Marginson et van der Wende [2007] auteurs d’un document de travail del’OCDE « la globalisation remet en cause la gouvernance traditionnelle dans le cadre des États-nations, àtravers deux processus à l’oeuvre : d’une part le « New Public Management » (qui a notamment partie liée avecun pilotage plus proche du marché, une diversification des financements et une professionnalisationd’établissements universitaires plus autonomes), d’autre part la croissance des communications trans-frontalières et des activités dans lesquelles les établissements traitent directement avec des partenairesextérieurs à leur cadre national » Olivier REY « Les petits mondes universitaires dans la globalisation »INRP,Dossier d’actualité n°29, septembre 2007.58 BANQUE MONDIALE [2003] «Construire les sociétés du savoir. Nouveaux défis pour l’enseignementsupérieur » RAPPORT DE LA BANQUE MONDIALE Les Presses de l’Université Laval, 295 pages.
25
Le schéma ci-dessous59, qui résume les forces à l’origine des changements et
les cibles sur lesquelles doivent porter les mesures incitatrices, constitue une parfaite
illustration de l’agenda des réformes à mettre en œuvre et de leur encadrement doctrinal :
3.2 – Le modèle de l’Université entrepreneuriale
Néanmoins, l’approche par les compétences est étrangement absente de ce
schéma alors que le thème de l’Université autonome et concurrentielle grâce aux compétences
qu’elle rassemble est au cœur de travaux publiés notamment dans les revues de l’OCDE 60 ou
59 Cf. Banque Mondiale [2003] op.cit.60 De nombreux articles sur le thème paraissent dans la revue de l’OCDE intitulée « Politiques etgestion de l'enseignement supérieur ». On se réfèrera notamment à Allan N. Gjerding et al. [2006]L'université entrepreneuriale : vingt pratiques distinctives, Politiques et gestion de l'enseignement
supérieur 2006/3 (n° 18) pages 95-124. Voir en annexe 1 « Ressources » d’autres référencessignificatives.
26
dans de nombreuses revues anglo-saxonnes appartenant aux sciences de l’éducation. Il
revenait à la Saïd Business School, école de management de l’Université d’Oxford (GB)
fondée en 1996 d’établir le modèle de l’université entrepreneuriale, à savoir celui d’une
« organisation entrepreneuriale » apte à faire face au changement de paradigme entraîné par
l’avènement de la société du savoir.
Les figures suivantes permettent de repérer l’accent mis sur les compétences
qui ne dépendent pas seulement des caractéristiques individuelles, mais aussi des ressources
qu’offre l’organisation. Ces ressources sont celles qui manifestent la capacité de l’organisation
à se prévaloir des normes d’excellence applicables aux établissements d’enseignement
supérieur, au terme d’un benchmarking réalisé par des agences d’évaluation ad hoc et de
procédures d’assurance qualité dont la légitimité procède des gouvernements qui les ont d’un
commun accord instituées.
27
L’Université Entrepreneuriale selon la Saïd Business School de l’Université
d’OxfordNational Council for Graduate Entrepreneurship (NCGE) LEADING THE
ENTREPRENEURIAL UNIVERSITY Meeting the entrepreneurial development needs of
higher education institutions October 2009, 44 pages
CONCLUSION
Le passage à l’approche en termes de compétences, quelles que soient par
ailleurs les appréciations61 qui puissent être portées sur ses modalités, est le fruit de la
61 Les commentaires critiques ne manquent pas en effet. Voir notamment :Jean-Louis DEROUET , Romuald NORMAND [2008] “French universites at a crossroads between crisisand radical reform. Towards a new academic regime?” Journal of Issues and Studies, Volume 40,2008.VINOKUR, Annie [2005] Mesure de la qualité des services d’enseignement et restructuration dessecteurs éducatifs. Cahiers de la recherche sur l’éducation et les savoirs, 2005, special edition No 1, p.88-108.VINOKUR, Annie [2010] Savoirs et pouvoirs : le "grand basculement"? in L'Enseignement Supérieurentre Nouvelle Gestion Publique et Dépression Economique. Economies et Sociétés, Cahiers del'ISMEA, Série "HS", Hors-Série, 43, n° 4.
28
conjonction de trois mouvements, au départ indépendants mais que les initiatives de l’Union
Européenne ont conduit à articuler dans un projet justement désigné comme la « stratégie » de
Lisbonne.
Ces trois mouvements, relatifs respectivement aux transformations du statut du
travail salarié dans un ordre productif devenu plus flexible et surtout sujet à la mobilité
transfrontières des facteurs de production, au statut de la connaissance dans la dynamique du
capitalisme contemporain et enfin aux conceptions nouvelles qui en résultent quant à la nature
des missions essentielles de l’Etat stratège, placent au centre de la problématique des divers
acteurs sociaux les exigences d’individualisation des parcours professionnels et des
rémunérations susceptibles de leur être associées, et la nécessité de préserver, sous peine de
délitement du lien social, une exigence de sécurisation de ces parcours qui met en cause
fondamentalement la nature et le rôle du système d’éducation et de formation requis à la fois
d’être le garant de l’évolution des compétences et d’en assurer la disponibilité et l’accès au
plus grand nombre.
C’est dans ce contexte que vont être progressivement affirmées d’abord, et
appliquées ensuite, l’autonomie des Universités et leur implication dans la vie économique
au travers de relations d’une nature nouvelle visant à assurer l’adaptation du système de
formation aux nécessités d’un développement économique62, dont les caractéristiques restent
souvent imprécises puisque référées à un régime de coproduction de la science et de l’ordre
social.
62 “At the same time, a role has been identified for HEIs in the upgrading of skills in the workforces required topower the new knowledge economies, presenting opportunities to engage far greater numbers of students intertiary education, and to support and resource the lifelong learning activity which can afford not only personalfulfilment but also the continuous updating of skills to meet rapidly changing requirements in the economy.Globally, universities are expected to meet a variety of challenges:– To contribute to the economic welfare of a region and/or country– To respond to academic competitive forces– To engage in the drive for prestige– To respond to increasing enrolments– To respond to globalisation of educationIn a February 2007 speech at London’s Brunel University, the then UK Prime Minister Tony Blair said ‘Collegesas sites of disinterested learning are one of the great parts of our civilisation. But we have grafted onto them avery modern phenomenon - that the knowledge that was once the preserve of an elite is now theindispensable requirement for economic advance. To that extent the democratisation of university entrance isa matter both of social justice and of economic efficiency.’COMMISSION OF THE EUROPEAN COMMUNITIES [2009] COMMISSION STAFF WORKING DOCUMENTaccompanying the COMMUNICATION FROM THE COMMISSION TO THE EUROPEAN PARLIAMENT, THECOUNCIL, THE EUROPEAN ECONOMIC AND SOCIAL COMMITTEE AND THE COMMITTEE OF THE REGIONS “Anew partnership for the modernisation of universities: the EU Forum for University Business Dialogue »Bruxelles SEC (2009) 425, p.6.
29
IIème Partie – DES COMPÉTENCES AU CADRE
EUROPÉEN DE CERTIFICATION :
L’Eportfolio instrument intégrateur de la politique
d’éducation et de formation tout au long de la vie.
L’objectif désormais clairement affiché de sécurisation des parcours
professionnels qui est la contrepartie de la mobilité géographique et de la flexibilité
professionnelle des salariés constitue un des piliers de la stratégie de Lisbonne. Pour
parvenir à cet objectif, la commission de l’UE va mettre l’accent sur une réforme des
systèmes de formation professionnelle dans le cadre de sa politique de formation tout au
long de la vie. La réforme engagée bouscule la relation entre école et emploi63 en
substituant, dans le cadre européen des certifications, aux aptitudes acquises l’exigence de
compétences à acquérir en recourant précisément à l’offre du système de formation
réformé. Nous montrerons successivement quel changement de paradigme accompagne la
mise en œuvre du cadre européen de certification (section 1), quelles adaptations des
systèmes nationaux de formation professionnelle sont requis via la VAE notamment (section
2) et comment ces adaptations rétroagissent sur les établissements d’enseignements
supérieurs appelés à devenir sous forme d’établissements autonomes et concurrentiels « à
terme de véritables universités de formation tout au long de la vie »64 (section 3)
SECTION 1 – DE L’EMPLOYABILITE A LA SECURISATION DES PARCOURS
PROFESSIONNELS
La mise en œuvre de référentiels dans l’enseignement supérieur et de manière
liée l’introduction en France, entre autres, à l’initiative des bureaux d’aide à l’insertion
professionnelle des étudiants, des portefeuille d’expériences et de compétences n’auraient pu
63 Cf. INSTITUT NATIONAL DE RECHERCHE PÉDAGOGIQUE Cellule de veille scientifique ettechnologique, « La relation école-emploi bousculée par l’orientation » par Laure Endrizzi Dossierd’actualité n° 47 – septembre 2009 26 pages.64 SGAE, Stratégie de Lisbonne pour la croissance et l’emploi. Programme national de réforme français2008-2010, octobre 2008, p.40
30
voir le jour sans l’élan donné, à l’initiative de la Commission, aux réformes des systèmes de
formation dans le cadre de la politique de formation tout au long de la vie, élément essentiel
de la stratégie de Lisbonne.
Mais, d’un autre côté, il est possible de conjecturer que cette politique a été
elle-même précipitée par la décision prise - en dehors des instances communautaires et sans
référence à elles - par les Ministres de l’enseignement supérieur de promouvoir
successivement, dans un premier temps un Espace européen de l’Enseignement Supérieur,
puis dans un second temps, un Espace européen de la Recherche.
La déclaration conjointe de la Sorbonne des quatre ministres français, allemand,
italien et anglais de l’enseignement supérieur du 25 mai 1998 mettait l’accent sur l’objectif
d’employabilité des étudiant(e)s, mais cette caractéristique qui désigne un état, suppose
évidemment sous peine d’incohérence grave, qu’elle ne puisse concerner que des personnes
déjà entrées sur le marché du travail65. En effet, l’employabilité est le résultat de la
certification par l’embauche d’une correspondance entre une expérience professionnelle et les
besoins de l’entreprise qui recrute. Indirectement, l’employeur valide l’intervention du système
de formation tout au long de la vie, par l’embauche d’un salarié qui a bénéficié du concours de
ce système dans la démarche qu’il a engagée pour retrouver un emploi.
Dès lors il est inconséquent de parler d’employabilité pour des candidats à une
première embauche. La différence est cruciale, en effet entre un jeune à la recherche d’un
premier emploi et un salarié bénéficiant d’une expérience professionnelle : dans le second cas
l’employeur s’intéresse au profil en termes de carrière professionnelle de la personne recrutée,
alors que dans le cas de l’embauche d’un salarié ne pouvant exhiber d’une expérience
professionnelle il appartient à l’entreprise de valoriser les compétences du salarié recruté à
l’aide d’une formation professionnelle délivrée sous sa responsabilité. C’est d’ailleurs la
raison pour laquelle dans la politique de formation tout au long de la vie les entreprises sont
considérées comme des acteurs à part entière du système de formation.
De surcroît lorsque l’on passe du niveau national au niveau européen, une
difficulté supplémentaire peut entraver le recrutement d’un salarié, lié au problème épineux de
65 La faculté d’être employable ne peut se prouver que si elle a été exercée. Ainsi l’employabilité a unsens au regard de chômeurs ayant exercé un emploi et à la recherche d’un nouvel emploi, mais n’ena aucun au regard de jeunes à la recherche d’un premier emploi. Le chômage des jeunes n’est pasainsi un défaut d’employabilité mais une pratique d’exclusion du marché du travail commel’observent P.Cahuc et F. Kramarz [2004].
31
la reconnaissance professionnelle66 des diplômes. En effet, « lorsque la profession n'est pas
soumise à une réglementation dans l'Etat d'accueil, l'appréciation du diplôme et du
niveau professionnel appartient à l'employeur. Le travailleur peut cependant avoir des
difficultés à faire reconnaître à sa juste valeur sa qualification professionnelle et à obtenir un
emploi à un niveau correspondant »67. D’où l’inéluctable rétroaction de la stratégie de
Lisbonne sur le processus de Bologne puisque :
1) Il n'existe pas, sauf exception, d'équivalence réglementaire entre diplômes
français et diplômes étrangers, même à l'intérieur de l'Union européenne.
2) La directive 2005/36 du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des
qualifications professionnelles n'a pas encore été transposée en France !( cf
note 67)
§1 – Du processus de Bologne à la stratégie de Lisbonne.
Lorsque Claude Allègre prend l’initiative de lancer en Sorbonne les 24 et 25 mai
1998 avec le soutien de quelques homologues européens ce que l’on appellera plus tard le
processus de Bologne, il entend recourir à une des modalités de la construction européenne
quelque peu négligée : la coopération intergouvernementale. Celle-ci présente un triple
avantage :
- n’engager que les pays qui sont disposés à s’inscrire dans un projet commun
indépendamment de toute contrainte institutionnelle liée aux modes de fonctionnement des
institutions existantes (l’Union Européenne et les prérogatives de la Commission, le Conseil de
l’Europe et ses équilibres géopolitiques complexes, etc..),
- s’affranchir précisément des obligations associées ordinairement au
fonctionnement des institutions européennes telles que la transposition en droit interne des
directives communautaires,
66 Distincte de la reconnaissance académique des diplômes, la reconnaissance professionnelle desdiplômes fait l’objet de la directive 2005/36 du 7 septembre 2005 de l’UE relative à lareconnaissance des qualifications professionnelles.67 Commission Nationale de la Certification Professionnelle. Transparence et Qualifications.http://www.cncp.gouv.fr/grand-public/transparenceQualification#ancre3b
32
- préserver la capacité à traduire la poursuite des objectifs communs sous des
formes adaptées à chaque pays en fonction de sa culture, et de son histoire tant politique
qu’institutionnelle.
Tirant parti du fait que les questions d’éducation et de formation ne sont pas de la
compétence de l’UE, les gouvernements des pays européens entament donc un processus
d’harmonisation suis generis des cursus universitaires, en l’absence des organes de l’UE,
puisque aux termes de l’article 149 TCE devenu article 165 du traité de Lisbonne, « le
Parlement européen et le Conseil, statuant conformément à la procédure législative ordinaire
et après consultation du Comité économique et social et du Comité des régions, adoptent des
actions d'encouragement, à l'exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et
réglementaires des États membres ».
Cette stratégie, dont l’ambition est d’harmoniser (en organisant la convergence
vers un standard commun sur la base des seules initiatives nationales des gouvernements
des pays signataires) les cycles de l’enseignement supérieur afin de favoriser la
reconnaissance réciproque des diplômes et surtout la mobilité étudiante68, bien que rappelée
encore en 2005, tourne court pour plusieurs raisons.
La première est liée à l’héritage historique : tant l’Unesco que le Conseil de
l’Europe ont mis en place des dispositifs69 et donné naissance à des lieux d’expertise qu’il est
peu opportun de négliger, d’autant plus que les Universités européennes se dotent d’instances
de représentation70 qui redoublent à l’égard des ministres engagés dans le processus de
Bologne la revendication d’autonomie que ceux-ci affichent à l’égard des instances de l’UE.
68 “We hereby commit ourselves to encouraging a common frame of reference, aimed at improving external recognitionand facilitating student mobility as well as employability”. Joint declaration on harmonisation of the architecture of theEuropean higher education system by the four Ministers in charge for France, Germany, Italy and the United Kingdom Paris,the Sorbonne, May 25 1998: http://www.bologna-berlin2003.de/pdf/Sorbonne_declaration.pdf69 Léa Maulet [2010] rappelle ainsi que « La Convention culturelle européenne, signée en 1954 par 14 Etats dans le cadre duConseil de l’Europe, aujourd’hui par 48, fixe le cadre des activités du Conseil Européen dans le domaine de l’EnseignementSupérieur et de la Recherche. La mobilité étudiante en Europe, qui est l’un des principaux objectifs de la Déclaration de laSorbonne, avait déjà été facilitée par la Convention européenne sur l’équivalence des périodes universitaires de 1957. CetteConvention, signée sous l’égide du Conseil de l’Europe, a installé le mécanisme de reconnaissance par l’université d’originedes périodes d’études effectuées à l’étranger. Cette avancée a rendu techniquement possible l’objectif de mobilité ».70 La déclaration de Bologne s’inspire ainsi des dispositions évoquées dans La Magna Charta Universitatum élaborée sousl’égide de la Conférence des recteurs européens en 1988. Fondée en 1959, la CRE bénéficiait du soutien de laCommission européenne, du Conseil de l’Europe, de l’UNESCO, de l’OCDE, de la Table ronde des industriels (ERT). Lesauteurs de cette Charte ont fusionné en mars 2001 avec la Confédération des Conférences des recteurs de l’UnionEuropéenne pour former l’European University Association. L’EUA a été associée de très près au processus de Bologne etpour cette raison, les textes fondateurs du processus portent clairement sa marque. Lors du Sommet de Prague de 2001,elle est incluse dans les groupes de pilotage du processus en tant qu’acteur consultatif. Cf. L. Maulet [2010] L'EspaceEuropéen de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche: Histoire d'un projet dénaturé, Mémoire de séminaire de 4ème
année, IEP de Lyon.
33
La seconde raison tient au fait que la commission de l’UE va user avec beaucoup
d’efficacité d’une sorte de soft power ce qui l’amènera d’abord à être invitée en tant
qu’observateur aux conférences ministérielles, puis ayant pris soin de financer quelques unes
des réunions ou des initiatives qui en résultent, elle sera appelée à faire partie du comité de
pilotage du processus de Bologne et enfin, à partir de 2005, elle bénéficiera du droit de vote,
illustrant ainsi sa capacité à reprendre en main un processus qui lui était étranger.
La troisième raison à trait à l’inscription du processus de Bologne, symbole
d’une coopération intergouvernementale non limitée en son principe aux frontières de l’UE,
dans la stratégie de Lisbonne71. Cette stratégie qui vise à faire advenir dans le cadre de l’UE
« l’économie de la connaissance la plus compétitive du monde » s’appuie sur une série de
mandats donnés par le Conseil 72 à la Commission visant la réalisation d’une « croissance
économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi
et d'une plus grande cohésion sociale ».
Ces objectifs requièrent la mise en œuvre d’une méthode adéquate. Précisément
les ingrédients de cette méthode vont fournir en termes de « soft power » d’immenses
pouvoir à la commission au travers de la « méthode ouverte de coordination » et de son
pendant « les plans nationaux de réforme »
Les extraits ci-dessous tirés de la page de présentation des objectifs de la
Stratégie de Lisbonne sur le site du Ministère de l’Industrie73 sont éloquents :
71 Cf. COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES [2003] Communication de la commission. Le rôle des universitésdans l'Europe de la Connaissance. Bruxelles, le 05.02.2003; COM(2003) 58 final, 25 pages.72 Voir notamment : CONSEIL DE L’UNION EUROPEENNE [2007] Résolution du conseil du 23 novembre 2007 concernant lamodernisation des universités pour favoriser la compétitivité européenne dans une économie mondiale fondée sur laconnaissance. (2007/C XXX/YY) ; 16096/1/07 REV 1; 9 pages. CONCLUSIONS DU CONSEIL et des représentants desgouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil le 26 novembre 2009, sur le renforcement du rôle del'éducation en vue d'assurer le bon fonctionnement du triangle de la connaissance (2009/C 302/03) Journal officiel del’Union européenne, 12.12.2009, C 302/3.73 http://www.industrie.gouv.fr/enjeux/europe/lisbonne.html
34
Étant donné que les politiques concernées relèvent presque exclusivement des compétences
attribuées aux États membres, une méthode ouverte de coordination (MOC)* incluant l'élaboration de plans
d'action nationaux (les plans nationaux de réforme - PNR)* a été mise en place.
*La méthode ouverte de coordination (MOC) :
La MOC est instituée dans des domaines qui relèvent de la compétence des États membres (politique
industrielle, innovation, emploi, protection sociale, formation, etc).
En vue de faire converger leurs politiques nationales pour réaliser certains objectifs communs les Etats
membres sont évalués par d'autres États membres et le rôle de la Commission est limité à de la surveillance.
Elle se base principalement sur:
- l'identification et la définition en commun d'objectifs à remplir (adoptés par le Conseil);
- des instruments de mesure définis en commun (statistiques, indicateurs, lignes directrices)
- le « benchmarking », c'est-à-dire la comparaison des performances des États membres et l'échange des
meilleures pratiques (surveillance effectuée par la Commission);
Dans le cadre de la stratégie de Lisbonne la MOC impose aux États membres d'élaborer des plans de réformes
nationaux (PNR) et les transmet à la Commission.
*Les plans nationaux de réforme (PNR) :
Conçus et mis en œuvre par chacun des 27 états membres selon un ensemble de lignes directrices intégrées
(LDI) réparties en trois parties (macroéconomie, microéconomie et emploi), ce programme décrit la façon dont
les Etats membres entendent atteindre les objectifs de Lisbonne.
Chaque année, les Etats membres adressent à la Commission un rapport de suivi distinguant clairement entre les
différents domaines d'action et faisant état des mesures prises au cours des douze mois antérieurs pour mettre en
œuvre les PNR.
§2 – Une clarification politique : la stratégie de Lisbonne et la priorité
à l’emploi.
Il est hautement significatif d’observer que si la réalisation d’une Europe fondée
sur la connaissance est devenue, depuis le Conseil européen de Lisbonne, en mars 2000, un
objectif central de l'Union européenne, dès novembre 2001 la Commission74 va recentrer son
action sur la mise en œuvre d’un espace européen de formation tout au long de la vie au motif
suivant: « l'éducation et la formation tout au long de la vie ont un rôle clé à jouer à travers la mise en
œuvre d'une stratégie coordonnée pour l'emploi, en particulier afin de promouvoir une main d’œuvre
74 COMMUNICATION DE LA COMMISSION « Réaliser un espace européen de l'éducation et de formationtout au long de la vie », Bruxelles, le 21.11.2001COM(2001) 678 final
35
qualifiée, formée et susceptible de s'adapter »75. Mais la réalisation de cet espace n’est pas
commandée par le seul respect d’impératifs économiques puisque : « L'éducation et la formation
tout au long de la vie tiennent compte de l'ensemble de l'offre et de la demande en matière d'éducation
et de formation. Elles prennent en compte les connaissances et les compétences acquises dans toutes
les sphères de la vie, qui s'avèrent donc utiles pour faire face à la société moderne. »76 Contournant le
processus de Bologne, la commission affirme notamment la nécessaire articulation entre
« espace européen de l’éducation et de la formation » et « espace européen de la recherche »77.
Toutefois la commission ne se borne pas à esquisser un nouveau programme, elle
en spécifie les modalités de mise en œuvre. Ayant constaté la réussite en matière de mobilité
étudiante du système de crédits ECTS, elle propose de mettre en place un dispositif analogue,
tenant compte des critiques des employeurs qui le trouvent trop orienté sur la charge de
travail. Dès novembre 2001 la Commission énonce le contenu du dispositif qu’elle appelle de
ses vœux en ces termes :« · La Commission propose l'instauration, avant la fin 2001, d'un régime de reconnaissance professionnelle
plus uniforme, transparent et flexible dans le domaine des professions réglementées. Les Etats membres
devraient, en collaboration avec la Commission, s'assurer que les citoyens ont accès à des informations
récentes et pertinentes concernant ces directives et les questions plus générales liées à la reconnaissance.
Les réseaux européens possédant des points de contact nationaux en matière de reconnaissance
professionnelle, tels que NARIC* les CNROP** devraient jouer un rôle central à cet égard.
· En collaboration avec les Etats membres et les établissements d'enseignement supérieur, la Commission
soutiendra activement le "processus de Bologne" dans le domaine de l'enseignement supérieur.
L'expérience acquise dans le cadre de ce processus servira de base afin de promouvoir une coopération
plus étroite dans d'autres domaines, notamment celui de l'enseignement et de la formation
professionnels.
· En collaboration avec les Etats membres, les établissements d'enseignement supérieur, les associations
professionnelles et les partenaires sociaux, la Commission soutiendra la création et la mise en oeuvre
volontaire de diplômes et certificats européens, ainsi que la définition des critères auxquels ces derniers
devront satisfaire. Ceci s'applique aux initiatives prises tant dans l'enseignement supérieur que par l es
entreprises/secteurs. »78
* NARIC: Centres nationaux d'information sur la reconnaissance académique.
** CNROP: Centres nationaux de ressources pour l'orientation professionnelle
75 COMMUNICATION DE LA COMMISSION « Réaliser un espace européen de l'éducation et de formationtout au long de la vie », Bruxelles, le 21.11.2001 COM(2001) 678 final p.876 Ibidem, p.877 « Afin d'atteindre l'objectif fixé par Lisbonne d'une société fondée sur la connaissance, des liensétroits seront établis entre l'espace européen de l'éducation et de la formation tout au long de la vieet l'espace européen de la recherche, notamment dans l'objectif d'accroître l'intérêt des jeunes pourles carrières scientifiques et technologiques. » Ibidem, p.1078 COMMUNICATION DE LA COMMISSION « Réaliser un espace européen de l'éducation et deformation tout au long de la vie », Bruxelles, le 21.11.2001COM(2001) 678 final, p.19
36
Il est vrai que ces initiatives sont précédées par la réunion du Conseil européen de
Stockholm au printemps 2001, au cours duquel le "Rapport sur les Objectifs Futurs Concrets
des Systèmes d’Éducation et de Formation" fut approuvé. Comme le rappellent Isabelle Le
Mouillour, Gabriele Fiez et Thomas Reglin « Les questions essentielles du rapport concernent
l’amélioration de la qualité de l’enseignement général et de l’enseignement et de la formation
professionnels dans l’UE, l’accès à l’apprentissage tout au long de la vie pour tous les citoyens et
l’ouverture des systèmes européens d’éducation et de formation à l’échelle mondiale. Dans le respect
des principes de subsidiarité et de proportionnalité, la méthode ouverte de coordination fut jugée
appropriée pour parvenir rapidement et efficacement à des améliorations dans les sphères de
l’enseignement général et de l’enseignement et de la formation professionnels. En outre, le Conseilinsista sur l’urgence des mesures à prendre en matière de promotion de la mobilité, en demandant le
développement d’un plan d’action qui répondrait à cette exigence. »79
§3 - Une clarification sémantique : des compétences aux acquis de
l’apprentissage et de la formation.
Comme l’avaient relevé Anne Marie DAUNE-RICHARD et Emmanuelle
LEMAIRE le premier paradigme relatif aux compétences conduisait à les considérer comme le
substrat d’une sorte de « qualification sociale ». En revenant dans le champ de l’enseignement
et de la formation professionnels le concept de compétences s’insère dans un autre référentiel
qui conduit à mettre l’accent sur les acquis de l’apprentissage.
Procédant à une relecture de la littérature académique relative respectivement
aux conceptions successives de la qualification et aux problématiques plus ou moins en rupture
qui leur ont succédé, caractérisées, on l’a vu, par l’expression « approche par les compétences,
Ewan Oiry [2005] entend montrer que 3 conceptions distinctes de la qualification ont vu le
jour se différenciant au regard de trois critères : la référence ou non au poste de travail, le fait
de procéder ou non d’un savoir réputé scientifique et donc objectif, le fait de faire l’objet ou
non de négociation(s) entre employeurs et syndicats80. Sur cette base, il considère que
79 Isabelle Le Mouillour, Gabriele Fiez et Thomas Reglin [2007] Etude sur la mise en oeuvre et ledéveloppement d’un système ECVET pour la formation professionnelle initiale, Effectuée par leForschungsinstitut Betriebliche Bildung f-bb et le Bundesinstitut für Berufsbildung BIBB pour laCommission européenne – DG EAC. Rapport final Octobre 2007, p. 16.80 OIRY E., Qualification et compétence : deux soeurs jumelles ?, Revue française de gestion 2005/5,n°158, p. 13-34.
37
l’approche par les compétences la plus récente qui rejoint la troisième conception (dans l’ordre
chronologique) de la qualification ne se situe pas en rupture avec elle mais dans la continuité
avec celle-ci puisqu’elle partage avec elle deux critères à savoir la rupture avec la référence au
poste de travail (rupture non essentielle à ses yeux) et le fait de faire l’objet de négociations. Il
s’agit là d’une des contributions majeures des sciences de gestion sur la question. Elle semble,
en apparence, coïncider avec les thèses soutenues par Alain d’Iribarne qui voit « dans la
logique de rupture, un jeu d’acteurs ˈsociétalementˈ construit, propre à la France. ». En fait, et
cela est essentiel tant au regard de cette deuxième partie, qu’au regard de la compréhension des
enjeux de l’approche par compétences dans l’enseignement supérieur, la différence
fondamentale tient à ce que la littérature sur les qualifications ne présuppose aucune relation
clairement explicitée entre la qualification et les caractéristiques de l’organisation dans le
cadre de laquelle le salarié exerce son activité alors que l’approche par compétences fonde sa
pertinence sur la nature des relations entre les compétences individuelles et les ressources de
l’organisation de toute nature, non réductibles à d’hypothétiques compétences collectives.
Ce débat est stratégique : il est au cœur des différences entre conceptions anglo-
saxonnes et continentales qui seront au centre de la problématique de la formation tout au long
de la vie et qui verra le triomphe du pragmatisme anglo-saxon avec l’adoption généralisée du
« vocational training ».
Ainsi l’extrait suivant de la brochure publiée par la Commission européenne sous
le titre « le cadre européen des certifications pour l’éducation et la formation tout au long
de la vie (CEC) » fournit une illustration saisissante du changement de paradigme et de ses
effets à venir :
« Par acquis de l'éducation et de la formation, le CEC entend ce qu’un apprenant
connait, comprend et peut faire a l’issue d’un processus d’éducation et de formation. Le CEC se
concentre donc sur les résultats de l’apprentissage plutôt que sur les parcours, par exemple la durée
des études. Les acquis de l'éducation et de la formation se repartissent en trois catégories: les savoirs,
les aptitudes et les compétences. Cela signifie que les certifications, dans différentes combinaisons,
regroupent un large éventail d’acquis de l'éducation et de la formation, notamment en termes de
savoirs théoriques, d’aptitudes pratiques et techniques et de compétences sociales pour lesquelles la
capacité à travailler avec les autres sera essentielle »81
Pour la Commission une des missions essentielles du cadre européen de
certification est de créer une culture de l'apprentissage ce qui exige de « déterminer d'une
81COMMISSION EUROPÉENNE DG Education et culture Le cadre européen des certifications pour l’éducation et laformation tout au long de la vie (cec) Luxembourg: Office des publications officielles des Communautéseuropéennes, 2008, page 3.
38
manière cohérente une méthode de valorisation de l'apprentissage formel, non formel et informel. Pour
que les citoyens aient la possibilité de développer et de combiner les connaissances acquises dans les
écoles, les universités et les organismes de formation, au travail, pendant leurs loisirs et leurs activités
familiales, il faut que toutes les formes d'apprentissage puissent être identifiées, évaluées et reconnues.
Une nouvelle approche globale est requise afin de relier entre eux différents contextes et différentes
formes d'apprentissage, ainsi que pour faciliter l'accès à des parcours individuels d'éducation et de
formation »82
Afin précisément d’homogénéiser la mise en œuvre de cette méthode et d’en
conforter la cohérence, il revint à la Commission de prendre l’initiative de deux instruments
appelés à jouer un rôle stratégique dans le dispositif mis en place à l’appui de la politique
d’éducation et de formation tout au long de la vie :
De nouveaux instruments au niveau européen pour soutenir la
valorisation de toutes les formes d'apprentissage 83
La Commission développera, d'ici à la fin de 2002, un système de
"portefeuille" qui permettra aux citoyens, à tous les stades de l'éducation et de la
formation, de rassembler et de présenter leurs qualifications et leurs compétences à
tous les stades de l'éducation et de la formation. Ce modèle se fondera sur
l'expérience déjà acquise, y compris sur le CV européen - qui consiste en un résumé
des qualifications et des compétences - requis par le Conseil européen de Lisbonne.
En collaboration avec les Etats membres, la Commission mettra au
point, d'ici à 2003, un système "modulaire" d'accumulation des qualifications, qui
permettra aux citoyens de combiner l'éducation et la formation acquises dans des
établissements ou des pays différents. Ce système sera développé à partir du système
européen de transfert d'unités de cours capitalisables (ECTS) et de l'Europass.
82 COMMUNICATION DE LA COMMISSION « Réaliser un espace européen de l'éducation et de formation tout aulong de la vie », Bruxelles, le 21.11.2001COM(2001) 678 final, p.1883 Ibidem, p.20
39
SECTION 2 – RETROACTION DU CADRE EUROPEEN DES
CERTIFICATIONS SUR L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR.
Dès 2001, la commission de l’UE formulait son intérêt pour la mise en œuvre
d’un cadre européen de qualification dans l’enseignement supérieur dans les termes suivants :
« Les efforts réalisés dans le contexte du processus de Bologne visent la
convergence des structures et de la durée des programmes d’études. Cependant, ceci ne crée
pas en soi les conditions pour une mobilité intra universitaire accrue. Un effort de grande
envergure devrait être consenti pour que les réformes fondamentales du processus de
Bologne soient en place dans tous les pays de l’UE en 2010: qualifications comparables
(cycle court, licence ou équivalent, master, doctorat); cursus modernisés et flexibles à tous les
niveaux et correspondant aux besoins du marché du travail; systèmes crédibles d’assurance
qualité. Ceci ne peut se faire que par des mesures incitatives ciblées mises en place par les
autorités nationales responsables afin d’assurer que les universités s’approprient les réformes
nécessaires – au lieu de se conformer seulement de manière superficielle aux nouveaux
standards comme c’est parfois le cas ». 84
En 2005, dans le contexte du processus de Bologne, les ministres ont adopté à
Bergen le cadre global des qualifications destiné à l'Espace européen de l'enseignement
supérieur et se sont engagés à élaborer des cadres nationaux compatibles avec ledit cadre d'ici
2010. Mais parallèlement, et de façon quasiment indépendante étant donné les différences de
savoirs-experts sollicités, un nouveau cadre européen des certifications (CEC) 85 pour
l’apprentissage tout au long de la vie, englobant tous les aspects éducatifs, a été développé à
l’intention de tous les États membres de l’UE dans le cadre de la stratégie de Lisbonne. Le
CEC a été adopté le 23 avril 2008 par le Conseil de l’Union européenne et le Parlement
européen. En tant que président du Groupe de coordination de Bologne sur les cadres des
qualifications, le Conseil de l'Europe s’était vu confier en 2007 la responsabilité de coordonner
l'échange d'expériences sur l'élaboration de cadres nationaux des qualifications.
84 COMMUNICATION DE LA COMMISSION « Réaliser un espace européen de l'éducation et deformation tout au long de la vie », Bruxelles, le 21.11.2001COM(2001) 678 final,85 Pour accroître les sources de confusion les experts emploient indifféremment les expressions de cadreeuropéen des qualifications et de cadre européen des certifications pour se référer au CEC !
40
Les acquis de l’éducation et de l’apprentissage (learning outcomes) formel et
informel jouent toutefois un rôle essentiel tant dans le cadre européen de qualifications de
l’enseignement supérieur que dans le cadre européen de certifications. C’est d’ailleurs l’une
des principales raisons pour lesquelles leur prise en compte entraîne obligatoirement
d’importantes restructurations des programmes tant dans l’espace européen de l’enseignement
supérieur que dans le cadre du système d’éducation et de formation tout au long de la vie.
Les acquis de l’éducation et de la formation (anciennement dénommés acquis de
l’éducation et de l’apprentissage) sont des descripteurs de ce qu’un apprenant est supposé
connaître, comprendre et capable de démontrer à la fin d’une période de formation. En réalité
ils représentent beaucoup plus que cela du fait du processus conjoint d’établissement d’un
cadre global et de cadres nationaux nécessaires à leur définition86.
86 Jean –Pierre Malarme [Comité Education et Formation, Belgique] exprime très bien l’évolution duconcept de learning outcomes au travers des processus de validation retenus :‘Validation is based on the assessment of the individual’s learning outcomes and may result in acertificate or diploma.’ Extraits de Common European Principles for Validation of non-formal andinformal Learning (2004) within the Copenhagen process. This is a very important idea. The conceptof learning outcomes was linked with the concept of validation, especially with the validation of non-formal and informal learning. In the Maastricht communiqué (2004) the term was linked on thecredit concept (ECVET) and the creation of a European Qualifications Framework: ‘ECVET will bebased on competences and learning outcomes.’‘The framework (EQF) will provide a common reference to facilitate the recognition andtransferability of qualifications covering both VET and general (secondary and higher) education,based mainly on competences and learning outcomes.’In the Bergen communiqué (Bologna process 2004), we discover a link with a new function: the ideaof formulating generic descriptors. ‘We adopt the overarching framework for qualifications in theEHEA, comprising three cycles (including, within national contexts, the possibility of intermediatequalifications), generic descriptors for each cycle based on learning outcomes and competences, andcredit ranges in the first and second cycles.’ This is an important stage in the Bologna process. Theterm learning outcomes is linked with the general descriptors and with the credits (for the two firstcycles).The Helsinki communiqué (Copenhagen process 2006) states that ‘developing and testing aEuropean Qualifications Framework (EQF) based on learning outcomes, providing greater parity andbetter links between the VET and HE sectors and taking account of international sectoralqualifications…’ We can find here again the link with the qualifications framework and the idea thatlearning outcomes can be a bridge between vocational education and training, higher education andsectoral training. In the beginning of June 2008 there was a conference in Brussels on theimplementation of the EQF and this idea was the central theme of several workshops. You may alsohave noticed that the term ‘competences’ has disappeared in this text. Learning has become anautonomous concept. From now on, it seems that competences are considered as one of theelements which allow to describe the learning outcomes.
41
§ 1 – Le cadre européen de qualifications dans l’enseignement
supérieur.
Les cadres de qualifications européens (EQF) sont des outils qui servent à décrire
et à exprimer clairement les différences entre les qualifications dans tous les cycles et à tous
les niveaux d’enseignement.
Deux EQF existent actuellement. L’un se concentre sur l’enseignement supérieur
(EQF-HE) et a été mis en place dans le cadre du processus de Bologne ; l’autre est axé sur
l’éducation dans son sens le plus large et a été lancé par la Commission européenne. Le
premier s’intitule A Framework for Qualifications of the European Higher Education Area
(cadre de certifications dans l’espace européen de l’enseignement supérieur). Le second
couvre tous les domaines, dont celui de l’enseignement supérieur, et s’intitule European
Qualifications Framework for Life Long Learning (EQF-LLL) (cadre de certifications pour
l’apprentissage tout au long de la vie).
Le cadre global de l'EEES (espace européen de l’enseignement supérieur)
comprend trois cycles, tous associés à des descripteurs génériques fondés sur les acquis et les
fourchettes de crédits ECTS. (Ces fourchettes sont uniquement indiquées pour les premier et
second cycles.) L’adoption du système européen de transfert et d’accumulation de crédits
(ECTS), développé dans le cadre du programme "Erasmus " a permis de créer un système de
conversion pour assurer le transfert vers le pays d’origine d’unités d’enseignement acquises à
l’étranger et importantes pour la certification.
Dans ses grandes lignes, le cadre de l'EEES améliore au plan international la
transparence, la reconnaissance des qualifications, et la mobilité des apprenants et des diplômés.
Il se définit comme une passerelle qui permet de transposer ou de comparer les cadres nationaux
de qualifications. Egalement nommés « descripteurs de Dublin », les descripteurs de cycle du
cadre de l'EEES sont génériques et concernent les connaissances et la compréhension,
l'utilisation des connaissances et de la compréhension, la faculté d'appréciation, les compétences
en communication, et les capacités d'apprentissage.
42
Selon le projet des universités européennes dit TUNING, l’EQF pour
l’enseignement supérieur adopté par les 46 pays participant au processus de Bologne a pour
but de :
- « permettre aux apprenants (citoyens, employeurs, etc ;) de toute l’Europe de
comprendre la gamme complète de certifications et les relations entre les diverses
certifications de l’enseignement supérieur, nationales, locales et régionales en
Europe,
- promouvoir l’accès, la flexibilité, la mobilité, la collaboration, la transparence et la
reconnaissance et l’intégration (liens), dans et entre, les systèmes d’enseignement
supérieurs européens,
- défendre la diversité quant au contenu et à la certification des programmes et par
voie de conséquence l’autonomie universitaire au niveau national, local, régional et
institutionnel, améliorer la compétitivité et l’efficacité de l’enseignement supérieur
européen » 87.
Le cadre européen se décline par cycles, et les cadres nationaux par niveaux. La
plupart du temps, le CNQ pour l'enseignement supérieur inclut plus de trois niveaux. Les
cadres nationaux intègrent des descripteurs de qualifications qui sont plus détaillés que les
descripteurs de cycle, et dont les définitions précises s'accordent plus spécifiquement aux
qualifications du pays.
§ 2 – Le cadre européen de certifications CEC ou EQF-LLL
Le « cadre européen des certifications » (CEC) pour l’apprentissage tout au long
de la vie, adopté en 2008, est un instrument de mise en correspondance des systèmes de
certifications des Etats membres qui vise à permettre aux employeurs et aux établissements
d’enseignement de toute l’Europe de comparer et mieux comprendre les qualifications de
chacun.
87 Université de DEUSTO (Espagne), Université de GROENINGEN (Pays Bas) avec le soutien de laCommission Européenne (Programmes Tempus et Socrates) Introduction à TUNING. Pour uneconvergence des structures éducatives en Europe. Contribution des Universités au Processus deBologne. p.98.
43
Le CEC s’articule autour de 8 niveaux de référence (allant d’un niveau de
qualification élémentaire au niveau le plus élevé), décrivant ce qu’un apprenant sait, comprend
et peut faire – quel que soit le système dans lequel la certification a été acquise. Ce nouveau
système s’écarte donc de l’approche traditionnelle qui met l’accent sur les moyens mis en
œuvre pour acquérir des connaissances (durée de l’apprentissage, type d’institution).
L’éducation supérieure est concernée par les niveaux 6 à 8 (Licence, Master et Doctorat).
Source : Le cadre européen des certifications pour l’éducation et la formation tout au long de la vie
Descripteurs définissant les niveaux du cadre européen des certifications (CEC ) 4 pages. Disponible à :
http://ec.europa.eu/education/pub/pdf/general/eqf/leaflet_fr.pdf
L’articulation entre le CEC et les Cadres nationaux de Qualifications peut être
visualisée de la façon suivante. La difficulté, évidemment, est qu’il existe désormais au niveau
européen 2 « méta-cadres » : le CEC et le cadre européen de qualifications dans
l’enseignement supérieur.
44
Le schéma suivant illustre quelle utilisation peut être faite du CECP, conçu comme un "
méta- cadre " : il permet la mise en relation, l'articulation entre différents cadres de
certification, nationaux ou sectoriels.
Le cadre peut ainsi :
- permettre les comparaisons entre les systèmes nationaux, leur connaissance réciproque,
et, à partir de là, favoriser leur convergence (" ce qui réduira les obstacles à la mobilité des
personnes, des compétences, des entreprises ")
- permettre les comparaisons à l'intérieur d'un pays, entre les différents cadres de
certification (par exemple, pour la France, on peut traduire ainsi : comparer CQP et diplômes)
- fournir un modèle pour les évolutions des certifications d'un pays ou d'un secteur
Pierre Narbonne, à qui le schéma ci-dessus est emprunté propose une analyse
pertinente des atouts et travers du CEC :
« Il apparaît très nettement qu'une des fonctions essentielles du CECP est de constituer un guide de
réforme des systèmes nationaux : en cela, le CECP semble plus s'adresser aux institutions (au sens
large) qu'aux citoyens européens
45
A noter aussi l'importance attachée aux certifications sectorielles (dont il est souhaité qu'elles se
rapprochent des certifications nationales)
Dans ce chantier fondamental, par les conséquences qu'il peut avoir sur la reconnaissance des
qualifications et sur les relations sociales dans l'Europe , mais aussi à l'intérieur de chaque
pays, certains des acteurs concernés paraissent très marginalisés, en particulier les salariés. Le
fait qu'un sujet de cette importance pour les équilibres sociaux ait été principalement discuté
entre experts et consultants est particulièrement inquiétant, d'autant que, dans ce huis -clos,
les concepts anglo-saxons en la matière semblent s'être imposés »88
Selon l’étude effectuée par l’Agence exécutive «Éducation, audiovisuel et
culture» (EACEA P9 Eurydice) « actuellement, environ un tiers des pays signataires de
Bologne ont officiellement adopté un cadre national de qualifications. Parmi eux, cinq pays
(Allemagne, Communauté flamande de Belgique, Irlande, Pays-Bas et Royaume-Uni) sont
considérés comme ayant entièrement mis en place le processus, y compris l’autocertification
de sa compatibilité avec le cadre européen des qualifications (CEC). Sept pays (Communauté
française de Belgique, Danemark, Estonie, France, Islande, Malte et Suède) ont bien
progressé et utilisent actuellement le CNC pour remodeler leurs programmes d’études. En
Bosnie-et-Herzégovine, au Monténégro et en Serbie, le CNC a été adopté formellement et le
processus de mise en œuvre vient de commencer ».89
88 NARBONNE Pierre, « Le cadre européen des certifications professionnelles pour l’apprentissage tout au longde la vie » Institut FSU disponible à http://institut.fsu.fr/chantiers/gouv/narbonne.htm89COMMISSION EUROPEENNE Agence exécutive «Éducation, audiovisuel et culture» (EACEA P9 Eurydice)[2009] L'enseignement supérieur en Europe 2009: les avancées du processus de Bologne. p.42 Le graphique setrouve à la page 41.http://eacea.ec.europa.eu/about/eurydice/documents/099FR_HE2009.pdf
46
§3 – la mise en œuvre du CEC : la galaxie EUROPASS
Le cadre européen des certifications professionnelles (EQF ou CEC) facilite la
comparaison des qualifications à travers différents systèmes d’enseignement et de formation
en spécifiant les niveaux de référence qui décrivent les acquis d’apprentissage réalisables
dans divers cursus d’enseignement et de formation. Ceux-ci sont définis par l’intermédiaire
de descripteurs tels que savoirs, aptitudes et compétences.
Chaque pays a donc la responsabilité d’élaborer au sein de ce cadre un référentiel
emploi appelé à servir de cadre national de qualification : en France le référentiel mis en
place dans le cadre du RNCP, est un document descriptif du contenu et du mode de
réalisation des activités et des tâches , des conditions d'exercice, des buts, objectifs ou
finalités visés par une certification.
Il peut constituer le descriptif de l'emploi type, dans la mesure où il regroupe
l'analyse d'un ensemble de situations professionnelles suffisamment proches pouvant
47
constituer une entité, un emploi ou un métier générique d'un ou plusieurs secteurs
professionnels. Dans certains cas il peut constituer le descriptif d'un ensemble de fonctions.
Une fois ces tâches accomplies il reste à construire le support individualisé qui
enregistrera l’application à telle personne dans telle situation du dispositif mis en place. C’est
dans ce contexte qu’Europass a été adopté par le Parlement Européen et le Conseil de
l’Europe en 2005.
Ce dispositif innovant rassemble dans un cadre cohérent 5 instruments européens
normalisés : le CV Europass, le Passeport de Langues Europass, l’Europass Mobilité, le
Supplément au Diplôme Europass et le Supplément au Certificat Europass.
Ces documents ont la même approche, par compétences, et le même objectif :
rendre facilement compréhensible par le plus grand nombre – en particulier les employeurs
ou les institutions – l’ensemble des compétences d’une personne, qu’elles aient été acquises
dans le cadre d’études, de formations, d’expériences professionnelles mais aussi d’activités
personnelles.
L’agence Europe-Education-Formation France90, Centre national Europass et Point
national de contact Europass-Mobilité, assure la mise en œuvre du dispositif Europass-
Mobilité ainsi que son suivi, son évaluation et sa promotion au plan national. Chargée
d’informer et de coordonner les Points régionaux de contact Europass-Mobilité91, elle met à
leur disposition des outils communs favorisant synergies et économies d'échelle.
90 Agence Europe-Education-Formation France 25, quai des Chartrons 33080 BORDEAUX [email protected]
91 Points régionaux de contact Europass en Rhône-Alpes
48
§4 – La rétroaction sur l’enseignement supérieur et le système de
formation professionnel.
Parmi les conséquences les plus marquantes de la mise en œuvre du CEC onretiendra la mise en place de la Validation des acquis de l’expérience, du supplément audiplôme, la création d’un cadre national des certifications (RNCP), la réforme de la FP en2004 (suite à l’Accord des partenaires sociaux de 2003) avec notamment la création du DIF,enfin la mise en place d’un lieu de concertation entre tous les acteurs : le Conseil national dela formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV) créé par la loi sur laformation professionnelle et le dialogue social du 4 mai 2004 et le décret du 24 février 2005Cf. http://www.cnfptlv.gouv.fr/
4.1. La VAE
La validation des acquis professionnels, instituée par la loi n°92-678 du 20
juillet 1992 qui complétait d'autres dispositions propres à l'enseignement supérieur et fixées
par des décrets de 1985, figure à l'article L 335-5 du Code de l'éducation. Avant la loi de
modernisation sociale, un diplôme ne pouvait être obtenu par la seule validation des acquis
professionnels. Or, il existe deux modes d'attribution de diplôme : l'un par l'État et l'autre au
nom de l'État par des établissements habilités à cet effet. Dans l'enseignement supérieur, le
diplôme est délivré au nom de l'État par le président de l'université ou le directeur de l'école
qui a été habilité pour le faire pour un diplôme donné. La loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002,
dite de modernisation sociale et le décret n° 2002-590 du 24 avril 2002, visent d'une part à
instituer le droit pour tous, d’une part à demander la validation des acquis de son expérience
et à en étendre le principe à tous les titres et diplômes, d'autre part à aménager certains
aspects de la procédure.
La VAE est un droit inscrit dans le code du travail, qui permet de faire valider
les acquis de son expérience en vue d'obtenir un diplôme, un titre à finalité professionnelle
ou un certificat de qualification figurant dans le Répertoire National des Certifications
Professionnelles. Toutes les activités, y compris bénévoles, sont prises en compte et la durée
minimale de l'expérience exigée est ramenée à trois ans, au lieu de cinq précédemment.
La VAE permet d'acquérir tout ou partie d'un diplôme ou d'un titre. Elle permet
également d'accéder à un cursus de formation sans justifier du niveau d'études normalement
requis. Tous les publics ont accès à la VAE : salariés, indépendants, bénévoles, demandeurs
d'emploi... dans la mesure ou ils peuvent justifier d'une expérience d'au moins trois années,
49
consécutives ou non, en rapport avec la qualification demandée. La formation, initiale ou
continue, et les stages en milieu professionnel ne sont pas comptabilisés.
La validation des acquis est prononcée par un jury spécifique, particulier pour
chaque diplôme, au vu d'un dossier réalisé par le candidat et à l'issue d'un entretien
complémentaire. Les candidats peuvent bénéficier, s'ils le souhaitent, d'un accompagnement
proposé par les dispositifs universitaires de formation continue. Il s'agit d'une aide apportée
aux personnes pour leur permettre de mieux entrer dans la démarche, de déterminer plus
sûrement le diplôme adapté à leur parcours et à leur expérience professionnelle, et d'identifier
les points forts de leur expérience, avant l'entretien avec le jury qui reste souverain en matière
de validation.
4.2. Le Droit individuel de formation
Le Droit individuel de formation (DIF) est un dispositif conclu par les
partenaires sociaux et repris par deux lois de mai 200492 et d'Octobre 2009. Il institue un
capital individuel d'heures, déterminant des droits à formation dont le salarié peut disposer à
son initiative, mais avec l'accord de son employeur. En cas de désaccord prolongé, le texte de
loi définit une procédure permettant au salarié de demander au Fongécif d'intervenir. En cas
92 Fruit de la négociation collective, la loi du 4 mai 2004 rénove en profondeur le paysage de la formationprofessionnelle continue en France. La formation professionnelle tout au long de la vie constitue désormaisune obligation nationale. Elle a pour objet de favoriser l’insertion ou la réinsertion professionnelle destravailleurs, de permettre leur maintien dans l’emploi, de favoriser le développement de leurs compétences etl’accès aux différents niveaux de la qualification professionnelle, de contribuer au développement économiqueet culturel et à leur promotion sociale.
50
de départ de l'entreprise ouvrant droit à indemnisation par les Assedic, le DIF est "portable"
au Pôle Emploi ou chez le nouvel employeur pendant 2 ans. Tous les salariés en CDI du
secteur privé, disposant d'une ancienneté d'au moins un an dans leur entreprise, bénéficient
chaque année d'un Droit Individuel à la Formation d'une durée de vingt heures. Les
salariés de la fonction publique territoriale bénéficient également du DIF depuis le décret
d'octobre 2007 (cf : loi de modernisation). Pour les salariés à temps partiel, ce droit est
calculé au prorata. Chaque année le salarié en CDI à temps complet acquiert donc 20 heures
de DIF, qu'il peut cumuler jusqu'à 120 heures. Au-delà, s'il n'utilise pas tout ou partie de ce
capital acquis, celui-ci restera plafonné à 120 heures. Chaque année l'employeur doit
communiquer les droits acquis au titre du DIF.
SECTION 3 – LE ROLE DES UNIVERSITES DANS LA POLITIQUE
EUROPÉENNE D’EDUCATION ET DE FORMATION TOUT AU LONG DE LA
VIE.
En France, la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne dans le domaine de
la formation tout au long de la vie est explicitée dans le Programme National de Réforme
2008-2010. L’accent est mis sur la sécurisation des parcours professionnels et sur la
conception française de la « flexicurité » exposée en ces termes :
« L’approche en matière de flexicurité suppose un équilibre entre (i) une
adaptation des règles du contrat de travail qui permet des conditions de travail plus
flexibles, (ii) une protection sociale moderne, (iii) un accès à la formation
professionnelle tout au long de la vie et (iv) un accompagnement efficace par les
services de l’emploi des travailleurs dans les phases de transition au cours de leur
carrière professionnelle. L’approche française en matière de flexicurité repose sur
la notion de parcours professionnels et sur les dispositions propres à securiser ces
parcours »93
§1 – La place de la formation continue dans la politique
française de flexisécurité.
Le PNR 2008-2010 insiste sur le rôle des Universités dans l’intégration des
salariés au dispositif de formation tout au long de la vie :
93 SGAE, Stratégie de Lisbonne pour la croissance et l’emploi. Programme national de réformefrançais 2008-2010, octobre 2008.
51
Les universités, par leur capacité à former et à délivrer des diplômes
reconnus, ont donc un rôle important à jouer dans la formation professionnelle.
Plusieurs dispositifs permettent de mieux intégrer les salariés à la formation
professionnelle par l’aménagement des cursus, par le développement de
l’enseignement à distance, par la poursuite du développement de la
professionnalisation dans les universités (notamment sur la base de conventions et
d’accords cadre avec les entreprises) avec le développement des contrats de
professionnalisation, la mise en place de formations qualifiantes, diplômantes ou
non, en adéquation avec les besoins des entreprises et des salariés et par le
développement des modules de formation de 20 heures ou multiples de 20 heures
afin de faciliter l’accès de la formation dans le cadre du DIF.
La mise en place du système LMD (« licence, master, doctorat») de même
que le développement de la validation des acquis de l’expérience ont été conçus
dans le cadre d’une démarche intégrant l’activité de formation continue afin que
l’université devienne à terme une véritable « université de la formation tout au long
de la vie ».
Ceci se traduit pour les universités par les objectifs suivants à atteindre d’ici
2010 :
- augmenter le nombre d’inscrits en formation continue : de 333 000 stagiaires en
2005, passer à 400 000 en 2010 ;
- augmenter la part des demandeurs d’emploi au sein des stagiaires de la formation
continue de 10 % en 2005 à 12 % en 2010 en favorisant notamment l’accueil des
seniors et des jeunes chômeurs.
Par ailleurs, deux diplômes en matière de maîtrise de l’économie numérique
et des langues étrangères (Brevet Informatique et Internet (B2i adultes) et diplôme
de compétences en langue (DCL)) ont fait l’objet d’expérimentations sur l’année
2007/2008 et seront mis en oeuvre de manière effective à compter de 2009.94
Le Conseil économique, social et environnemental s’inquiète pour sa part au-
delà des objectifs affichés, sur un possible effet de cloisonnement de l’insertion
professionnelle des jeunes lié à des préoccupations privilégiant la consolidation de l’emploi
de catégories déjà moins exposées au risque de chômage, en raison des tranches d’âge
auxquelles elles appartiennent. Il suggère par la voix de son rapporteur d’importantes
mesures de rééquilibrage, plus en accord avec l’esprit de la politique de l’Union européenne :
94 SGAE, Stratégie de Lisbonne pour la croissance et l’emploi. Programme national de réforme français 2008-2010, octobre 2008.
52
«Le CESE de France a pour sa part, dans les douze derniers mois, complété
ses travaux antérieurs sur cette thématique en soulignant la nécessité de
décloisonner l’insertion pour mieux accompagner les jeunes vers l’emploi.
Cela suppose notamment de :
- favoriser l’enseignement sous forme de modules et permettre la
reconnaissance des acquis à tous les niveaux, pour lutter contre l’échec
scolaire ;
- développer l’apprentissage du niveau V au niveau I (enseignement
supérieur) et créer des doctorats professionnels ;
- rendre plus juste le système de formation professionnelle par un « droit à la
formation différée » pour les jeunes sortis du système scolaire sans
qualification et sans diplôme ;
- développer l’approche compétence et rapprocher l’école de l’entreprise, afin
de permettre aux jeunes sans diplôme d’être recrutés sur des compétences
requises pour un emploi puis acquises au poste de travail ;
- diminuer le nombre de jeunes suivis par les conseillers des structures
d’insertion ;
- identifier un référent entreprise dans chaque établissement ou université
pour créer un lien avec les entreprises sur le territoire de l’établissement et
faire évoluer les filières de formation ;
- permettre dans le cadre du nouvel opérateur l’accès au droit commun à tous
les jeunes en difficulté afin qu’ils soient recensés en tant que demandeurs
d’emploi, même s’ils n’entrent pas dans la catégorie «d’employables » au
sens des statistiques d’Eurostat ;
- favoriser un double tutorat au sein de l’entreprise pour accompagner le jeune
dans son insertion professionnelle et prévenir les ruptures de contrat ;
- améliorer la gouvernance des politiques d’insertion et mieux évaluer les
politiques d’insertion des jeunes »95
§2 Genèse des portefeuilles d’expériences et de compétences
Du fait de sa date de rédaction le rapport ne tient pas compte de
l’expérimentation nationale lancée par le Haut Commissariat à la jeunesse en 2009 et visant à
95 CONTRIBUTION DU CONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL À LA PRÉPARATIONDU RAPPORT DE SUIVI 2009 DU PROGRAMME NATIONAL DE RÉFORME FRANÇAIS 2008-2010Communication du Conseil économique, social et environnemental présentée au nom du Bureau parM. Gabriel Paillasson au nom de la délégation pour l'Union européenne, Lundi 12 octobre 2009, Aviset rapports 2009, n°25, p. 52.
53
doter 11 Universités pilotes de 1,5 million d’euros sur 3 ans pour la mise en œuvre de
portefeuilles numériques de compétences et d’expérience. En revanche la création de bureau
d’aide à l’insertion professionnelle dans les Universités s’inscrit pleinement dans le PNR et
illustre les modalités d’application de la politique de formation tout au long de la vie puisque
ces nouveaux organes auront à traiter de questions très différentes en amont et en aval de
l’insertion :
«en amont de l’insertion, cela recouvre notamment les méthodologies de
consolidation du projet professionnel, d’élaboration de CV, d’entraînement aux entretiens
d’embauche, de connaissance du marché du travail, de diffusion des offres d’emploi. En
aval de l’insertion, et pour un retour sur la validation et l’identification des formations,
cette préoccupation exige la réalisation d’enquêtes d’insertion professionnelle pour les
différentes filières, de diffusion et d’accès à ces informations. »96
Quant au Rapport de suivi du PNR 2008-2010, il observe qu’ « un livret de
compétences élargi au-delà de l’éducation nationale sera expérimenté, afin de valoriser les
compétences et potentialités des jeunes sans les limiter aux seuls résultats académiques (aptitudes
acquises par l’engagement dans des activités associatives, sportives et culturelles…). L’outil sera mis
en place début 2010 dans une première série d’établissements et académies volontaires, qui
travailleront en partenariat avec tous les acteurs concernés (y compris les mouvements d’éducation
populaire »97. De fait, le Livret personnel de compétences sera publié au JO du 1er juillet
2010.98 Il concerne l'attestation des connaissances et compétences du socle commun en CE1
et CM2.
CONCLUSION
Si la politique de l’Union Européenne a connu une inflexion significative la
conduisant à préférer la démarche consistant à mettre en valeur les acquis de l’apprentissage
96 CONTRIBUTION À LA MISE EN ŒUVRE DE BUREAUX D’AIDE À L’INSERTION PROFESSIONNELLE DANS LESUNIVERSITÉS Rapport à Madame la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche piloté parThomas Chaudron, président du centre des jeunes dirigeants (CJD) et Jean-Michel Uhaldeborde, ancienprésident de l’université de Pau et des Pays de l’Adour. 8 octobre 2008.97SGAE, Stratégie de Lisbonne pour la croissance et l’emploi. Rapport de suivi pour 2009 Programmenational de réforme 2008-2010, France, p.45
98 http://media.education.gouv.fr/file/27/02/7/livret_personnel_competences_149027.pdf
54
et de la formation à celle fondée sur l’approche par compétences, il n’est pas certain que la
politique française ait, quant à elle, intégré ce changement de paradigme. Si l’on penche pour
une interprétation optimiste, on ne verra dans cette absence de réactivité que l’effet d’un
retard circonstanciel. En réalité, une vision plus pessimiste semble devoir l’emporter puisque
très peu d’Universités françaises (en tout et pour tout, 2 en juillet 2010) ont obtenu les
accréditations de l’Union Européenne liées à l’octroi des labels « ECTS » et « supplément au
diplôme » (cf. Infra 3ème partie).
En revanche, s’agissant du système de crédits d’apprentissage E.C.V.E.T. un
projet majeur a vu le jour à l’initiative de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris.
En effet, la Commission ayant décidé de financer plusieurs projets pilotes dont l'objectif était
de tester la faisabilité d'ECVET, l'une des dix propositions a avoir été retenue par l’UE est
celle intitulée « Be-TWIN, Testing a joint ECVET - ECTS Implementation », soumise par la
CCIP et ses 13 partenaires européens représentant le monde de l'enseignement supérieur et
professionnel.
Selon l’Agence Education Formation France « Be-TWIN, lancé en mars 2009 pour
une durée de 3 ans, incarne une volonté commune d'expérimenter ECVET et de réfléchir à ses liens et
à sa compatibilité avec le système ECTS. Pour répondre à cet ambitieux challenge, Be-TWIN prévoit
tout d'abord de mettre en place une méthodologie articulant les deux systèmes de crédits. La
principale difficulté de l'articulation entre ECTS et ECVET réside dans le fait qu'ils fonctionnent sur
deux bases méthodologiques différentes. Le premier attribue des crédits au parcours de formation et à
ses contenus (cours, activités pédagogiques, mémoires, stages) selon la charge de travail de l'étudiant
pour atteindre les résultats attendus.
Le second, basé sur l'approche par compétences, affecte des crédits aux acquis de
l'apprentissage, sans prendre en compte la manière dont ceux-ci ont été acquis, ni le temps investi.
Malgré ces différences, ECTS et ECVET poursuivent les mêmes objectifs d'accumulation et de
transfert de crédits, de mobilité et de transparence entre les systèmes nationaux au sein de l'espace
européen de l'éducation.
L'innovation de Be-TWIN est ainsi de mettre en relation les deux systèmes encroisant
les activités de formation avec les acquis de l'apprentissage. Cette matrice devrait permettre de
présenter l'offre de formation de manière plus transparente et lisible. À terme, c'est le moyen de
faciliter la reconnaissance des acquis d'apprentissage et la mobilité, qu'elle soit géographique ou
verticale. Le fruit de ces travaux, menés à bien depuis un an et demi, sera publié sous la forme d'un
guide méthodologique en juin 2010 »99.
99 «ECVET et ECTS : deux systèmes de reconnaissance des acquis » SOLEO, (édition en ligne : soleoweb.2e2f.fr)n°23, 19/08/2010.
55
IIIème Partie – LE PORTEFEUILLE NUMÉRIQUE
D’EXPÉRIENCES ET DE COMPÉTENCES.
BILAN ET PRÉCONISATIONS
Nous nous proposons dans cette dernière partie de dresser, en premier lieu, d’une
part, un rapide bilan des expériences effectuées à l’échelle européenne de mise en œuvre d’un
passeport numérique de formation dans le cadre de la vie professionnelle, avant de procéder à
l’examen des expériences d’introduction dans l’enseignement supérieur du portefeuille
d’expériences et de compétences. Puis, nous ferons, en second lieu, un ensemble de
propositions, appuyées sur les enseignements les plus significatifs des expériences
précédentes, visant à promouvoir sur la base d’un projet collaboratif l’introduction du PEC à
SciencesPo-Lyon.
SECTION 1 – LE PORTEFEUILLE NUMERIQUE DANS LE MONDE DU
TRAVAIL ET A L’UNIVERSITE : BILAN DES EXPERIENCES
Le portefeuille numérique s’est d’abord imposé, dans certains pays européens
notamment, comme un instrument privilégié de la sécurisation des parcours professionnels
dans le cadre de la politique impulsée par l’UE de formation tout au long de la vie. Après
avoir rappelé les principaux jalons qui ont scandé la diffusion de cet instrument en Europe,
nous évoquerons la mise en œuvre du e-portfolio dans l’enseignement supérieur tant en
France, que dans le monde, et les principaux enseignements que l’on peut retirer des
expériences réalisées.
§1- Le passeport-formation dans le monde du travail :
l’avènement du e-portfolio
A – LE CADRE NORMATIF EUROPEEN
56
Nous avons déjà fait allusion au fait que le processus de Copenhague100 a permis
la création de plusieurs outils européens destinés à favoriser la transparence et la
reconnaissance des compétences et des qualifications, et ainsi à faciliter la mobilité des
apprenants et des travailleurs.
Précisément, parmi ces outils le portfolio « Europass » 101 est entré en vigueur en
2004. Il comprend plusieurs documents normalisés au plan européen qui permettent aux
citoyens de décrire leurs qualifications et compétences et de rendre ces informations simples
d’accès pour une entreprise ou un centre de formation établi en Europe. Le portfolio facilite
ainsi la mobilité des personnes, jeunes et adultes, qu’elle soit « géographique et
professionnelle, nationale ou européenne ».
Au-delà de ce portefeuille de documents normalisés, le cadre européen des
certifications professionnelles102, adopté en avril 2008 (CEC), doit permettre aux Etats
membres d’établir une correspondance avec leurs niveaux de certification nationaux. Il
devrait ainsi faciliter la lecture et la compréhension des certifications entre différents pays.
100 Suite à l'initiative ‘Bruges’ des directeurs généraux de la formation professionnelle (octobre 2001), lesministres de l'éducation de 31 pays européens (États membres, ex-pays candidats et pays EEE) ont adopté ladéclaration de Copenhague sur le renforcement de la coopération dans le domaine de l'enseignement et laformation professionnels (EFP) en Europe, le 30 novembre 2002.
Lors de la conférence de Copenhague, du 29 novembre 2002, Madame Viviane Reding, membre de laCommission, déclarait : « … la coopération en matière d'éducation et de formation à l'échelle européenne aacquis un rôle décisif dans la création de la future société européenne... Des stratégies en faveur de l'éducationet la formation tout au long de la vie, ainsi que de la mobilité, sont essentielles pour favoriser l'employabilité, lacitoyenneté active, l'insertion sociale et l'épanouissement personnel. La mise en place d'une Europe de laconnaissance et la garantie d'un marché européen du travail ouvert à tous constituent un défi majeur pour lessystèmes d'enseignement et de formation professionnels en Europe et pour tous les acteurs concernés. Il en vade même pour la nécessité d'une adaptation permanente de ces systèmes aux éléments nouveaux et auxdemandes changeantes de la société. Une coopération renforcée en matière d'enseignement et de formationprofessionnels contribuera à atteindre les objectifs fixés par le Conseil européen de Lisbonne … consistant àfaire des systèmes d’enseignement et de formation en Europe une référence de qualité mondiale d'ici2010. »
101 L’un des axes de la déclaration de Copenhague est d’ »instaurer un cadre unique pour latransparence des qualifications et des compétences en Europe ». C’est dans cet objectif que laCommission européenne a présenté une proposition le 7 janvier 2004. Elle souhaite rassemblerplusieurs instruments existants visant à promouvoir l'apprentissage tout au long de la vie "dans uncadre cohérent, identifié par le label unique 'Europass', accessible depuis l'internet". Cetteproposition intègre dans l'Europass cinq documents existants : le CV européen, le Portfolio européendes langues, le Mobilipass (nouvelle appellation de l'Europass-Formation), le supplément aucertificat et le supplément au diplôme.102 Ce cadre de référence est compatible avec le cadre des certifications de l’espace européen del’enseignement supérieur selon des modalités précisées dans la fiche reproduite en annexe « whydoes the EU need a European Qualifications Framework ? ».
57
Les Etats membres sont invités à mettre en relation leurs systèmes de certification avec le
CEC à compter de 2010.
Complémentaire au CEC et fondé lui aussi sur la notion « d’acquis
d’apprentissage», le système européen de transfert de crédits d’apprentissage pour
l’enseignement et la formation professionnels (ECVET) devait être officiellement adopté au
début de l’année 2009. Selon la revue Soléo, publication de l’Agence Education Formation
France, ECVET « cherche à développer un vocabulaire commun pour améliorer la
transparence, le transfert et la reconnaissance des résultats d'apprentissage, en facilitant
ainsi le renforcement d'une confiance mutuelle entre les acteurs de la formation et des
certifications professionnelles en Europe ».
ECVET devrait être mise en place de façon progressive à compter de 2012, en
prenant appui sur des expérimentations.
Le communiqué de Bordeaux sur la coopération européenne renforcée en
matière d’enseignement et de formation professionnels évoque, dans sa 3ème partie
intitulée « Conserver le cap et donner un nouvel élan » à la rubrique Renforcer les liens entre
l’enseignement et la formation professionnels (EFP) et le marché du travail, la nécessité de
« développer le rôle de l'enseignement supérieur dans l'enseignement et la formation
professionnels et dans l'amélioration de l'insertion sur le marché du travail » et précise
qu’ «il conviendra notamment d'encourager le développement de la formation professionnelle
continue des adultes au sein des institutions d’enseignement supérieur, en prenant en
considération la « Charte des universités européennes sur la formation tout au long de la
vie»103.
B – EXPERIMENTATIONS
Au niveau européen le projet Europass+ 104 entend soutenir les objectifs
stratégiques de la politique européenne en matière de formation professionnelle, ceci afin de
103 Communiqué des ministres européens de l’éducation et de la formation professionnels, des partenairessociaux européens et de la Commission européenne réunis à Bordeaux le 26 novembre 2008 pour revoir lespriorités et les stratégies du processus de Copenhague, p.11L’Association Européenne de l’Université (EUA) a publié la Charte en juillet 2008. Elle esttéléchargeable à :http://www.eua.be/typo3conf/ext/bzb_securelink/pushFile.php?cuid=2122&file=fileadmin/user_upload/files/Publications/EUA_Charte_Fr_LY.pdf104 http://www.europassplus.de/europassplus/p/documents/Flyer/fbb_flyer_europassFR_web.pdf
58
rendre visibles les résultats des apprentissages quel que soit l’endroit ou la manière qui a
permis de les acquérir. Au sein du partenariat du projet Europass+, un outil d’aide en ligne a
été développé pour accompagner les jeunes européens à renseigner de manière significative
dans le CV Europass tout ce qu’ils ont appris de manière informelle et non formelle. L’outil
est disponible à l’adresse www.europassplus.info
Comme l’explicite Thomas REGLING dans le Cahier IMPULS n°35 intitulé
« Europass+. Favoriser la visibilité des talents des jeunes européens », publié par la
Nationale Agentur Bildung für Europa auprès du Bundesinstitut für Berufsbildung et édité en
français en janvier 2009 par le MEDEF Franche-Comté :« L’un des principaux objectifs du projet Europass+ était d’aider en particulier les
jeunes à utiliser le CV Europass pour documenter leurs compétences acquises de manière non
formelle et informelle. Il vise à rendre les acquis visibles. C’est ainsi que des experts internationaux
avaient pour tâche de développer un outil performant, mais gérable, applicable au niveau
transnational, pour aider les utilisateurs à compléter la seconde partie du CV Europass, consacré à la
description des qualifications et des compétences acquises de manière non formelle et informelle.
Les jeunes utilisateurs de l’Europass reçoivent un guide qui :
- leur explique le concept de l’apprentissage informel,
-leur permet de fournir des informations complètes sur leur niveau de développement de compétences,
notamment en ce qui concerne leurs capacités et leurs compétences sociales organisationnelles, sans
que cela leur demande un effort surhumain. »105
S’agissant des expériences de mise en œuvre du passeport numérique dans le
monde du travail en Europe, comme l’analyse détaillée en a été faite par Serge Ravet
(EIFEL), nous nous bornerons à présenter dans un encadré les différents contextes, en termes
de politiques publiques, de mise en œuvre d’un e-portfolio.
Après avoir défini le portefeuille numérique ou e-portfolio comme « toutdispositif facilitant l’apprentissage réflexif en permettant à une personne (ou uneorganisation) de collecter, d’organiser et de publier une sélection des traces de sesapprentissages pour faire reconnaître, voire valoriser, ses acquis et planifier sesapprentissages futurs106 » Serge Ravet offre énumère une série d’exemples prouvant que «les politiques publiques en faveur du ePortfolio se déclinent au niveau local (ville, district),régional et national. L’exemple le plus remarquable est certainement le Pays de Galles qui,
105 Thomas REGLIN [2009] L’Europass dans le contexte de la politique éducative européenne, IMPULS n°35,p.18106 SERGE RAVET (EIFEL) Le ePortfolio en Europe Synthèse et état de l’art. Région Aquitaine et ConsortiumEIFEL, Propositions. Stratégies et Projets « Eportfolio pour tous », Synthèse, septembre 2008
59
dès 2004, proposait un ePortfolio à ses 3 millions de citoyens (plus de 200,000 utilisateurs àce jour. »107
ENCADRÉ
POLITIQUES PUBLIQUES ET E-PORTFOLIO
EN EUROPELes politiques publiques en faveur du ePortfolio se déclinent au niveau local (ville, district),
régional et national. L’exemple le plus remarquable est certainement le Pays de Galles qui, dès 2004, proposait unePortfolio à ses 3 millions de citoyens (plus de 200,000 utilisateurs à ce jour)http://www.careerswales.com/adults/
.Plus récemment aux Pays Bas, dans un rapport publié en juin 2008, intitulé Towards a Future that Works (Versun futur qui marche), le Comité pour la Participation au Marché du Travail a formulé une série derecommandations pour améliorer le fonctionnement du marché du travail en faisant la proposition d’unePortfolio pour chaque salarié.
Entre ces deux dates clés (2004-2008), de nombreuses initiatives politiques ont été prises, enparticulier dans le domaine de la formation initiale. Ainsi, une loi relative aux professions de l'éducationaux Pays-Bas prévoyait l'évaluation continue et l'auto-évaluation du développement professionnel des enseignants. Pouraccompagner ce processus l'Association Néerlandaise de la Qualité encourage les personnels enseignant à collecterles preuves de leur développement professionnel sur un ePortfolio en ligne.(www.lerarenweb.nl/portfolio)
Au Royaume Uni, plusieurs politiques éducatives convergent vers le ePortfolio depuis leDearing Report (1997) qui recommandait que les institutions d’enseignement supérieur encouragent leursétudiants d’enregistrer, de réfléchir et de bâtir sur leurs réussites de façon plus systématique. L’agenda pourl’élargissement de la participation (The Widening Participation agenda,DfES, 2003) visait à étendre laparticipation après 16 ans (post 16) par la promotion de la reconnaissance des apprentissages formels etinformels. Puis, en 2005, le ministère de l’éducation Britannique (DfES) publiait un rapport HarnessingTechnologies (S’emparer des Technologies”) dans lequel il proposait un certain nombre de priorités et dedispositifs concourants à un portfolio numérique, simplifiant pour les apprenants la collection de leurs réussitestout au long de leur apprentissage tout au long de la vie.
Dès 2005 la Norvège proposait une vision du ePortfolio qui ferait de chaque apprenant, nonpas un simple consommateur de connaissances, mais un producteur actif de connaissances qui seraient partagées,grâce au ePortfolio avec ses pairs.
En 2007, l’Autriche mettait en place un consortium d’écoles, universités et ministères afin dedéfinir une politique nationale pour le eportfolio.
Au niveau européen, l’initiative Europass, coordonnée par le CEDEFOP, bien que limitée à 5documents (CV, portfolio langue, mobilité, supplément au diplôme et supplément au certificat) a permisl’avancée de certaines idées nées au sein du mouvement ePortfolio comme l’interopérabilité.
Source : SYNTHÈSE EPORTFOLIO Septembre 2008
107 Serge RAVET [2008] article cité.
60
C- INITIATIVES FRANÇAISES
En France, l’accord national interprofessionnel (ANI) du 5 décembre 2003 qui
a instauré le passeport formation108 a été complété par un avenant du 20 juillet 2005. Il a pour
but de recenser les diplômes et les titres obtenus au cours du cursus de formation initiale le
tout rédigé par son titulaire, mais pas uniquement109. Outre le cursus scolaire, il met
également en avant les expériences professionnelles acquises lors des périodes de stage ou de
formation en entreprise. Ce document retrace le parcours scolaire et professionnel de
l’individu, il permet de faire valoir ses compétences dans un unique livret. Il met en avant les
emplois tenus dans une même entreprise et les connaissances, les compétences et les aptitudes
professionnelles mises en œuvre dans le cadre de ces emplois.
L’accord national interprofessionnel sur le développement de la formation
tout au long de la vie professionnelle, la professionnalisation et la sécurisation des
parcours professionnels du 7 janvier 2009, stipule que :« Chaque salarié doit pouvoir être acteur de son évolution professionnelle et chaque entreprise doit
pouvoir mettre en œuvre les moyens adaptés à ses besoins en matière de développement ou
d'adaptation à son environnement économique et à sa politique de ressources humaines. La formation
professionnelle doit notamment concourir à l'objectif pour chaque salarié de disposer et d’actualiser
un socle de connaissances et de compétences favorisant son évolution professionnelle et de progresser
d'au moins un niveau de qualification au cours de sa vie professionnelle. Dans cet esprit, les
signataires du présent accord souhaitent apporter des réponses :
- simples et lisibles tant pour les jeunes, les salariés, les demandeurs d'emploi que pour les
entreprises,
- permettant une réactivité accrue des acteurs afin de répondre de façon adaptée aux défis structurels
et conjoncturels, tant à court terme qu’à moyen terme,
- fondées sur une gouvernance claire supposant le respect des compétences de chacun et sur une
évaluation systématique des politiques et des dispositifs. »
et précise en son titre I que « Les entretiens professionnels et/ou le passeport formation doivent
notamment permettre à chaque salarié d’être en mesure d’élaborer et de mettre en œuvre un projet
professionnel qui tienne compte des besoins en qualification et/ou en compétences de son entreprise,
108 Le texte de l’accord est disponible en ligne à : http://www4.centre-inffo.fr/v2/cpnfp/NT327642.phtml. Le passeport formation fait l’objet du chapitre 2 du Livre 1 del’accord.
109 Eléments visés au chapitre 2 de l’ANI du 5 décembre 2003.
61
ou plus généralement de ceux du monde économique, mais aussi de sa propre ambition de développer
ses connaissances, ses compétences et aptitudes professionnelles. »110
Suite à L’ANI du 5 octobre 2009 et à la loi du 24 novembre 2009 relative à la
formation professionnelle est instauré un Fonds Paritaire de Sécurisation des Parcours
Professionnels (FPSPP), dans le cadre duquel le passeport formation qui reste toujours à
l’initiative des personnes, devient un instrument privilégié de sécurisation des parcours
professionnel.
La Région Lorraine s’est engagée depuis deux ans dans le projet Lorfolio.
Lorfolio a l’ambition de devenir le e-portfolio (portefeuille numérique de compétences)
territorial accessible à tous les actifs lorrains. Lorfolio permettra :
˫ d’attester de ses connaissances et de ses compétences et de les valoriser,
˫ de faciliter la réflexion sur les questions liées aux compétences
professionnelles
en vue d’une évolution de carrière ou d’une recherche d’emploi,
˫ de créer un fil rouge entre l’ensemble des acteurs de l’emploi et de la formation
(les enseignants et formateurs, les conseillers en orientation, les conseillers en emploi, les
employeurs, etc.) au service de la personne.
Actuellement en phase d’expérimentation au sein de dispositifs de différents
partenaires de la Région Lorraine, Lorfolio sera mise en service en 2010. Ce projet est l’un
des projets soutenus dans le cadre de l’appel à projets mis en œuvre par le haut commissaire à
la jeunesse.
Le Conservatoire national des arts et métiers est aujourd’hui la seule
institution universitaire publique à avoir accumulé une importante expertise sur la question du
e-portfolio et testé un outil transnational dans des pays (la France et l’Allemagne), des
contextes et auprès de publics très différents. A la demande de la Commission nationale 36 de
l’Afnor, le CNAM a transmis très récemment une note de présentation des enjeux du e-
portfolio en Europe et l’intérêt de positionner les ministères et institutions françaises dans ces
débats.
110 Le texte de l’accord est disponible à : http://www.centre-inffo.fr/IMG/pdf_ANI_7_janvier.pdf. Les extraitscités figurent à la page 1 de l’accord.
62
D – LA RECONNAISSANCE DES ACQUIS DE L’EXPERIENCE
PROFESSIONNELLE
La loi du 2 février 2007 relative à la modernisation de la fonction publique
organise pour les concours d’accès à la fonction publique des épreuves d’évaluation des
acquis de l’expérience permettant de prendre en compte les expériences professionnelles des
candidats.111 Le dossier type de reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle
(r.a.e.p.) du concours d'accès aux instituts régionaux d'administration généralistes (3ème
concours) est disponible en ligne à : www.fonction-publique.gouv.fr/IMG/Dossier_RAEP_3e.doc
Serge Ravet, dans la publication précédemment citée, recense des exemples de
dispositifs de reconnaissance et de validation des compétences pratiqués en Europe et se
fondant sur le ePortfolio :
« Ainsi, au Royaume Uni, près de 500 000 personnes obtiennent une
qualification professionnelle (NVQ, SVQ en Ecosse) chaque année sur la base de la
construction d’un portfolio, et de façon croissante, avec un ePortfolio. (…) En Allemagne, le
ministère fédéral de l’éducation et de la recherche (BMBF) a soutenu le développement d’un
modèle de référence pour l’identification, la documentation, l’évaluation et la
reconnaissance des savoirs, savoir-faire et compétences acquis de façon informelle ou non-
formelle. Ce modèle s’appelle ProfilPASS et a été expérimenté dès 2005 avec tec00
candidats dans 30 territoires pour des publics aussi divers que des élèves en situation
d’échec scolaire que des entrepreneurs. A ce jour, 24 organisations proposent ProfilPASS —
qui reste un document papier, malgré une réflexion entamée dès 2005 pour évoluer vers un
ePortfolio (...) Aux Pays Bas dans un rapport publié en juin 2008, intitulé Towards a Future
that Works (Vers un futur qui marche), le Comité pour la participation au marché du travail
a posé les principes selon lesquels Chaque salarié aura droit à un ePortfolio, c.-à-d. un
inventaire électronique de ses compétences, diplômes, expériences, et validation de ses
acquis (VAE) ».
111 Pour des exemples de dossiers RAEP (« reconnaissance des acquis de l’expérience », voir :http://concours-fonction-publique.publidia.fr/infos-concours/pratique/la-reconnaissance-des-acquis-de-l-experience-professionnelle-raep-dans-les-concours/259
63
§2- L’avènement du e-portfolio dans le cadre de
l’enseignement supérieur.
A – QUELQUES EXEMPLES D’EXPERIENCES ETRANGERES HORS
EUROPE
Au Canada, et notamment au Québec une intense expérimentation est
poursuivie, dont on se bornera à citer quelques exemples tirés de la brochure « Un atout pour
le citoyen apprenant. Le portfolio numérique », publication publiée en mars 2006 par la
Société de formation à distance des commissions scolaires du Québec.
Nova Scotia Community College
Ce collège se définit comme un « portfolio college »; les portfolios
numériques sont intégrés dans les différents programmes et services de
l’établissement.
Université de WaterlooCette université a plusieurs projets pilotes concernant ce qu’on appelle des «
portfolios de compétences » et qui servent à soutenir l’apprentissage, à
démontrer l’expertise de l’institution et à documenter les apprentissages lors
des stages dans la communauté.
Université de MontréalDepuis janvier 2005, un groupe d’intérêt, créé par le Centre d’études et de
formation en enseignement supérieur (CEFES), se rencontre pour réfléchir
sur le portfolio en milieu universitaire et accompagner les unités qui
souhaitent adopter le portfolio en tant qu’outil d’apprentissage et
d’évaluation.
Université McGill
La Faculté de médecine gériatrique de cette université utilise depuis plus de
trois ans des portfolios numériques pour faciliter le suivi des progrès des
étudiants lors de leurs stages. Ainsi, pour chacune des compétences qu’il
cherche à maîtriser, un étudiant peut consulter l’évaluation de ses pairs
(Team Member Evaluation), de son superviseur (Tutor Evaluation) et faire
son autoévaluation (Student Evaluation). Ce système est en train de s’étendre
à d’autres facultés de l’université, et sa version française est en cours de
production.
64
Au Royaume- Uni, un consortium créé en 1998, le Managed Environments for
Portfolio-based Reflective Learning explore les types d’usage des portfolios numériques.
L’une des activités du consortium est le projet EPICS qui regroupe cinq universités afin
qu’elles explorent ensemble le design du portfolio numérique, son développement, sa mise en
place et qu’elles puissent évaluer différentes approches pratiques pour l’implantation d’une
infrastructure régionale. Un autre projet est celui de l’Université de Nottingham qui, en
collaboration avec sa municipalité, a mis au service de l’ensemble de la communauté le
portfolio de l’université, qu’on nomme désormais le City of Nottingham Passport.
On trouvera par ailleurs sur le blogg de Ray Tolley112 des analyses à jour et
détaillées sur l’état du développement des usages du portefeuille numérique dans
l’enseignement supérieur en Grande Bretagne.
Aux Etat-Unis, Helen C. BARETT113, spécialiste américaine internationalement
reconnue des configurations pédagogiques, institutionnelles et technologiques ayant conduit
aux différentes solutions de mise en oeuvre du portefeuille numérique, fournit sur son site
http://electronicportfolios.com les exemples suivants :
eFolio Minnesota
eFolio Minnesota provides all Minnesota residents and students with the opportunity to create e-
portfolios for lifelong learning.
Gallery of Teaching and Learning, Carnegie Foundation for the Advancement of Teaching
The gallery features examples of electronic course and teaching portfolios that reflect the scholarship
of teaching and learning.
LaGuardia Community College
LaGuardia Community College uses e-portfolios to help its students share their cultural background
with each other and faculty, as well as to develop their identities as members of disciplines,
professions, and the academic community in general.
The University of Denver Portfolio Community System
DUPC is a fully developed Web-based application that provides the university community with a
searchable database of electronic portfolios for students, faculty, staff, and alumni, as well as
resources such as an assessment rubric library. It was created through a joint effort involving DU
students, faculty members, and staff.
112 http://www.efoliointheuk.blogspot.com/113 Voir notamment sa conférence « The ePortfolio- a revolutionary tool for education and training? “produite par l’Université Louis Pasteur, Strasbourg Conférence : ePortfolio 2003 video disponible àhttp://canalc2.u-strasbg.fr/video.asp?idvideo=2238
65
Virginia Tech Electronic Portfolios
VTeP is an online, personal information management system designed to give students, faculty, and
staff an efficient way to collect, integrate, and share a wide variety of academic, career, and personal
information.
Parmi ces exemples, le plus intéressant est celui de l’Université « Virginia Tech»114 . En effet
cette université propose à ses étudiant(e)s, le choix entre 4 types de portfolios dont les
objectifs sont rappelés dans l’encadré ci-dessous :
ENCADRE : Les portefeuilles électroniques à Virginia Tech
ePortfolios for Learning
A strong benefit of ePortfolios is their ability to incorporate reflection into the
learning process, and use of ePortfolios can provide designated moments of
reflection throughout a course or program. Read more and view galleries...
ePortfolios for Assessment
ePortfolios can be used to collect, organize, and document materials to perform
course-based and programmatic assessment. Read more and view galleries...
ePortfolios for Professional Development
ePortfolios can be used to facilitate personal and professional development.
Current research shows that employers and corporate professionals have
become increasingly interested in ePortfolios. Read more and view galleries...
Co-Curricular Engagement Portfolios
ePortfolios are also being created by the Center for Student Engagement and
Community Partnerships to showcase the different engagement activities
performed by students, faculty, and all members of the Virginia Tech
community
114 Créée en 1872 sous l’appellation “Agricultural and Mechanical College”, Virginia Tech estaujourd’hui la plus grande Université de Virginie (USA).
66
Ailleurs, on peut citer les projets de portfolio numérique des Universités
suivantes : Queensland University of Technology en Australie, National University of
Singapour et Zayed University des Émirats arabes unis.
Il y a lieu de signaler 3 sites d’information :
Le site de l’Electronic Portfolio Consortium, or ePortConsortium,
http://www.eportconsortium.org/ qui regroupe 900 institutions appartenant à 72 pays,
Le site d’information canadien
http://www.ibritt.com/resources/stu_eportfolios.htm,
Le site américain EDUCAUSE 115Learning Initiative (ELI):
http://www.educause.edu/ELI/Archives/EPortfolios/5524
B - LE RESSORT DES APPRENTISSAGES DES USAGES DE L’E-PORTFOLIO
EN EUROPE: LE PORTFOLIO EUROPEEN DES LANGUES.
Historiquement c’est à l’initiative du Conseil de l’Europe et, initialement, à
destination des publics scolaires et adultes qu’est mis en place : « le Cadre européen commun
de référence pour les langues » (cf. Conseil de l’Europe/Les Editions Didier, Paris 2005).
L’adaptation au cadre de l’enseignement supérieur s’effectue dans le cadre de
la Confédération Européenne des Centres de Langues de l'Enseignement Supérieur.116
Le Portfolio européen des langues (PEL) a été développé et expérimenté par la
Division des politiques linguistiques du Conseil de l'Europe, Strasbourg, de 1998 à 2000. Il a
été lancé à un niveau pan-européen pendant l'Année européenne des langues comme un
instrument puissant pour la promotion du plurilinguisme et du pluriculturalisme.
Le PEL de la Confédération Européenne des Centres de Langues de
l'Enseignement Supérieur a été spécialement conçu pour les universités européennes. Il se
conforme au format spécifié pour les portfolios de langues par le Conseil de l’Europe. Conçu
à l’origine en français et en anglais, le PEL est à présent traduit dans de nombreuses autres
langues. Le PEL répond aux besoins des étudiants de tous les niveaux de compétence
linguistique, allant du niveau débutant (A1) au niveau avancé (C2). Le PEL s’adresse aux
115 “EDUCAUSE is a nonprofit association whose mission is to advance higher education bypromoting the intelligent use of information technology”.116 Fondée à Strasbourg en 1991, CercleS est une confédération d'associations indépendantes présentes dans22 pays européens. La confédération regroupe quelque 290 centres de langues, départements, instituts,facultés ou établissements de l'enseignement supérieur qui ont comme mission principale la formation enlangues. http://www.cercles.org/
67
étudiants spécialistes ou non-spécialistes en langue qui apprennent une ou plusieurs langues
étrangères. Les apprenants autodidactes peuvent également s’en servir.
Le PEL de la Confédération Européenne des Centres de Langues de
l'Enseignement Supérieur est mis à disposition des intéressé(e)s via les associations
nationales membres. L’association nationale française est RANACLES - Rassemblement
National des Centres de Langues de l'Enseignement Supérieur.117 Elle regroupe 46
Universités et centres associés. Au sein du PRES de Lyon, seul l’INSA en fait partie !
Plusieurs pays européens, avec l’accréditation du Conseil de l’Europe, ont mis
en place le portfolio européen des langues.
Parmi les nombreuses réalisations nous avons retenu le projet « WebCEF » .
Ce projet a duré 3 ans, d’octobre 2006 à septembre 2009. Il a été financé par le programme
Socrates-Minerva de la Commission Européenne (Direction générale de l'éducation et de la
culture) avec le soutien de l'agence exécutive ‘Éducation, audiovisuel et culture’ (EACEA).
WebCEF est le fruit d'une collaboration européenne entre 7 établissements
d'enseignement supérieur et une PME. Les partenaires de ce projet ont une longue expérience
de collaborations dans les domaines de l'enseignement des langues assisté par ordinateur et de
l'évaluation. Le projet WebCEF vise à exploiter les innovations du Web 2.0 dans
l'apprentissage des langues.
WebCEF permet l'évaluation de la compétence orale en langue étrangère
dans un environnement interactif sur le web. Avec WebCEF, tous ceux qui apprennent ou qui
enseignent une langue étrangère pourront évaluer leurs propres échantillons audios ou vidéos
en collaboration avec des collègues à travers l’Europe. Les évaluations s’appuient sur les
descripteurs du Cadre Européen Commun de Référence (CECR).
A titre d’information ,consulter les actes du Séminaire de la CECLES:
The role of the Common European Framework of Reference for languages (CEFR) and the
European Language Portfolio (ELP) in higher education Padua, 17-19 September 2009, Universita
degli studi di Padova..118
117 http://www.ranacles.org/118 Voir notamment les communications de: David Little [2009] The Common European Framework ofReference for Languages, the European Language Portfolio and the need for a new assessment culture. The roleof the CEFR and the ELP in higher education, Padua, 17–19 September 2009 Sous les auspices du Secrétariatgeneral du Conseil de l’Europe. http://claweb.cla.unipd.it/cmsconv/dmdocuments/Little.pdf Patricia W. Cummins , Virginia Commonwealth University [2009] Global Language Portfolio TransatlanticApplication of ELP The role of the CEFR and the ELP in higher education, Padua, 17–19 September 2009.http://claweb.cla.unipd.it/cmsconv/dmdocuments/CUMMINS.pdf
68
En dehors des deux portfolios119 les plus connus accrédités par le Conseil de
l’Europe, l’American Association of Teachers of French a élaboré sur le modèle du
Portefeuille européen des langues, le Global Language Portfolio (GLP)120
C – LES PREMICES DES EXPERIMENTATIONS EN MATIERE D’E-
PORTFOLIOS DANS LE SYSTEME D’EDUCATION ET DE FORMATION EN
FRANCE
Préalables : la formation des maîtres puis l’introduction du livret de compétences dans
l’enseignement secondaire.
Un premier référentiel officiel de compétences apparaît en 2004 ; il a pour objet
la description des Compétences Informatique et Internet ainsi que la description des
conditions de délivrance du Certificat Informatique et Internet niveau 2 enseignant
[C2i2e].
Plus récemment encore, en décembre 2006, le cahier des charges de la formation
en IUFM décrit dans un référentiel métier un ensemble de compétences professionnelles des
maîtres. Pour accompagner cette démarche évaluative, les IUFM de Lyon et de Grenoble
ont conçu un portfolio numérique : « Au delà des compétences professionnelles décrites
dans le référentiel métier, le portfolio numérique contribue à développer, pour l'ensemble de
la communauté (enseignant en formation, formateurs et institution), des compétences
évaluatives d'une part, mais aussi des compétences reflexives, informatives, et sociales. »121
Le livret individuel de compétences a été annoncé dans la circulaire de rentrée
(BO n° 3 du 18 janvier 2007) et présenté comme un des éléments du livret scolaire
électronique de l’élève qui sera progressivement mis en place pour chaque élève.
119Dutch e-portfolio, ALTE-EAQUALS e-portfolio120 http://glp.elenes.com/alltext.html121 JULLIEN Jean-Michel, QUENTIN Isabelle, VIGNOLLET Laurence, FERRARIS Christine, MARTELChristian [2007] Scénario pédagogique et portfolio numérique, deux outils conceptuelscomplémentaires pour le développement des compétences des enseignants . Journées scientifiquesres@tice, Rabbat 2007, p.2
69
Le BO n° 22 du 27 juin 2007 décrit plus en détail ce qu’il devra comporter.
Une expérimentation est actuellement conduite dans plusieurs académies. Des grilles de
référence sont proposées pour permettre aux enseignants concernés de concevoir les
évaluations nécessaires pour renseigner le livret.
Etapes de la mise en œuvre dans l’enseignement supérieur :
1) Le supplément au diplôme
La Commission Nationale de la Certification Professionnelle122 a pris l’initiative
dans le cadre de la politique de transparence des qualifications de l’Union européenne de
susciter une mise en cohérence des deux dispositifs, nationaux et européens que sont
respectivement « La fiche Répertoire Nationale des Certifications Professionnelles
(RNCP) »123 et l’annexe descriptive dite « supplément au diplôme »124 (SD). Elle a permis de
mettre en évidence les proximités existant entre la « fiche RNCP » et l’annexe descriptive
dite « « supplément au diplôme » dans le contexte européen EUROPASS. Toutefois, ainsi
que l’atteste l’encadré ci-dessous le supplément au diplôme constitue une bien meilleure
anticipation du Portefeuille de compétences et d’expériences (PEC).
Dans un article publié le 5 juillet 2010 sur le site EducPros.fr, Céline Manceau
établit le constat suivant :
122 La CNCP a reçu pour mission par la loi du 17 janvier 2002, de constituer un Répertoire Nationaldes Certifications Professionnelles ayant pour fonction d’informer le public sur les contenus desdiplômes, titres à finalité professionnelle et certificats de qualification des branches.
123 Créée par la loi de la modernisation sociale (décret 26.4.2002)
124 « Une description du système national d'enseignement supérieur au sein duquel la personnementionnée sur le titre de qualification original a obtenu son diplôme doit être jointe au supplémentau diplôme. La description est fournie par les centres nationaux d'information sur la reconnaissanceacadémique des diplômes (NARIC); elle est disponible sur le site Internet: www.enic-naric.net »SOURCE/ : https://www.sup.adc.education.fr/lmdsuivi/lice/t/supdip2-l.htm
70
« Pour la première fois en France, le label européen Supplément au
diplôme, décerné par la Commission européenne, vient d’être attribué à
deux universités : Bordeaux 3 et Reims. Le jury a examiné, au total, sept
dossiers transmis par l’agence Europe Education Formation, après une
pré-sélection.
Des critères stricts, une démarche qualité
Les critères pour obtenir le label Supplément au diplôme sont assez stricts
car la Commission européenne entend faire de ce label un gage de
reconnaissance de la qualité des cursus à l’échelle internationale. « Il
s’agit d’un outil précieux pour le développement des partenariats
internationaux et pour l'attractivité de l'établissement auprès des étudiants
et des enseignants étrangers », souligne-t-on à l’agence Europe Education
Formation.
En contrepartie, les deux universités sélectionnées ont pris l’engagement
de mettre en œuvre une démarche de qualité et de mutualisation entre
différents services (relations internationales, scolarité, informatique,
direction...), de décrire les formations en termes de "learning outcomes" et
de présenter un catalogue de cours en anglais sur leur site Internet.
Pas de label ECTS en France
La Commission européenne délivre également le label ECTS auquel les
établissements d’enseignement français ont pu aussi prétendre pour la
première fois cette année. Mais sur les quatre candidatures qu’elle a
reçues, la Commission n’en a retenu aucune.
L’appel d’offres d’attribution des labels ECTS et Supplément au diplôme,
soutenu par la CPU, sera reconduit en 2011. »
71
ENCADRE
Le supplément au diplôme (SD). Description
SOURCE : ANNEXE III Proposition de DÉCISION DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEILinstaurant un cadre unique pour la
transparence des qualifications et des compétences (Europass)
1.1. Le supplément au diplôme (SD) est un document joint à un diplôme del'enseignement supérieur et destiné à permettre aux tiers - surtout à ceuxd'un autre pays - de comprendre plus facilement ce que le diplôme signifiedu point de vue des connaissances et compétences acquises par son titulaire.A cet effet, le SD décrit la nature, le niveau, le contexte, le contenu et lestatut des études accomplies avec succès par la personne titulaire dudiplôme original auquel le SD est annexé. Il s'agit donc d'un documentpersonnel concernant son titulaire spécifique.
1.2. Le SD ne remplace pas le diplôme original et ne donne pas droit à unereconnaissance officielle du diplôme original par les autorités académiquesd'autres pays. En revanche, il facilite une appréciation correcte du diplômeoriginal, et peut ainsi aider à obtenir la reconnaissance par les autoritéscompétentes ou le personnel chargé des admissions dans un établissementd'enseignement.
1.3. Le SD est délivré par les autorités nationales compétentes selon unmodèle élaboré par un groupe de travail conjoint de la Commissioneuropéenne, du Conseil de l'Europe et de l'UNESCO, qui l'a testé etparachevé. Le modèle de supplément au diplôme est disponible dans les 11langues officielles de l'Union européenne. C'est un outil flexible, nonnormatif, conçu dans un but pratique et qui peut être adapté aux besoinslocaux.
1.4. Le SD comporte huit parties identifiant le titulaire du diplôme (1) et lediplôme lui-même (2), donnant des informations sur le niveau dequalification (3), le contenu et les résultats obtenus (4), la fonction de laqualification (5), permettant de donner des informations complémentaires(6), certifiant le supplément (7) et, enfin, donnant des informations sur lesystème national d'enseignement supérieur (8). Toutes les informationsrequises dans les huit parties doivent être fournies. Lorsqu'une informationfait défaut, une explication doit être donnée. Les établissements doiventappliquer au supplément au diplôme les mêmes procéduresd'authentification que pour le diplôme lui-même.
1.5. Conformément à l'article 11, sous (e) de la décision à laquelle laprésente annexe est jointe, lors de la gestion du supplément au diplôme,en particulier sous sa forme électronique, les autorités compétentesdevraient prendre des mesures appropriées pour veiller à ce que lesdispositions communautaires et nationales pertinentes en matière detraitement des données personnelles et de protection de la vie privée soientpleinement respectées.
72
2) Déclinaison des diplômes LMD en compétences
Dans la publication du Séminaire de l’AMUE consacré à cette question, Michel
FEUTRIE, Secrétaire général de la Commission nationale de certification professionnelle
(CNCP) souligne avec force le « changement essentiel » introduit par ces nouvelles
exigences : « Le changement essentiel concerne la rupture entre formation et certification. C’est
notamment un des effets de la mise en œuvre de la validation des acquis professionnels (VAE). En
effet, la possibilité d’accéder à une certification sans passer par la formation introduit une rupture
fondamentale. La procédure d’enregistrement ne s’intéresse plus au parcours de formation mais à la
liaison qui existe entre un référentiel d’activités et un référentiel de certification. Le référentiel
d’activités décrit un ensemble de fonctions et de métiers en termes de capacités et de compétences ; le
référentiel de certifications indique comment vérifier que ces capacités existent pour l’exercice de
l’activité. L’examen des contenus de ces formations est donc totalement absent de l’analyse du
dossier »125.
3) la professionnalisation du doctorat
Présenté sous forme de programme inscrit dans les mesures visant à assurer la
professionnalisation du doctorat, le nouveau chapitre de la thèse de doctorat consacré à la
valorisation des compétences est présenté ainsi sur le site du Ministère de l’Enseignement
Supérieur :
« L'objectif de ce programme est de préparer le doctorant à la démarche de
recherche d'emploi en le conduisant à identifier les compétences multiples mises en œuvre au
cours des trois années de thèse et à les valoriser dans des situations professionnelles
diversifiées. Ce travail, encadré par un tuteur généralement issu d'un cabinet de recrutement,
donne lieu à l'élaboration d'un document de quelques pages, véritable bilan de
compétences ».
L’association Bernard Grégory (A.B.G ; http://www.abg.asso.fr) qui a
notamment pour mission de favoriser l'insertion des jeunes docteurs en entreprise est le maître
125 Agence de Mutualisation des Universités et Etablissements (AMUE) [2004] Séminaire "Ladéclinaison des diplômes LMD en compétences et la présentation de l’annexe descriptive" mardi 6juillet 2004 compte-rendu – 41 pages
73
d’œuvre du programme « Valorisation des compétences. Un nouveau chapitre de la thèse ».
Pour l’association Bernard Grégory « le Nouveau Chapitre de la Thèse conduit les doctorants
à regarder leur thèse non plus uniquement comme un sujet scientifique mais comme une
expérience personnelle et professionnelle, comme un véritable projet dont ils ont dû gérer
tous les tenants et aboutissants et qui leur a permis de développer de nombreuses
compétences. »
Dans l’appel d’offres 2011 de ce programme l’association précise que :« Cet exercice n’a aucun caractère académique et n’entre en compte ni dans
l’évaluation de la thèse, ni dans l’obtention du diplôme.
Il consiste à identifier et à mettre en valeur des compétences qui ont été
nécessaires au bon déroulement du doctorat. Il inclut une analyse critique de son
déroulement dans une optique de projet, une identification et une mise en valeur des
acquis professionnels et compétences développées pendant le doctorat, illustrés par
des exemples puisés dans sa préparation (cf. annexe 2 : « Recommandations pour
l’analyse et la rédaction »).
L’analyse débouche, d’une part, sur une synthèse écrite de 8 à 10 pages, le
nouveau chapitre, aisément compréhensible par des non-spécialistes du domaine de
recherche du doctorant, et exploitable par le jeune docteur pour se valoriser durant sa
recherche d'emploi, d’autre part, sur une présentation orale de 20 min environ dans
un cadre défini en concertation avec l’école doctorale et en présence de
professionnels.
Ce travail s'effectue avec l'accompagnement d'un « mentor », consultant en
ressources humaines, extérieur au système de recherche, doté d’une pratique du
recrutement en entreprise, et au fait du contexte de l'insertion professionnelle des
docteurs. Il aide le doctorant à identifier et à valoriser les acquis de son doctorat et à
élaborer le nouveau chapitre.
Cet exercice mobilise le doctorant l’équivalent de 7 à 10 jours de travail
essentiellement personnel, répartis sur environ 3 mois (entre mi -février et mi-juin). »
La mise en œuvre de ce programme représente un effort financier conséquent du
Ministère de l’Enseignement Supérieur qui en est le maître d’ouvrage : prise en charge d’un
coût estimé entre 750 et 1100€ TTC par doctorant selon le niveau d’individualisation de
l’encadrement, le nombre total de doctorants encadrés et l’implication du mentor dans
l’organisation. L’école doctorale ou l’organisateur local recevront pour leur part une
contribution gérée par l’ABG en fin d’exercice (en 2010, la contribution a été de 300 € net
par doctorant ayant achevé l’exercice dans la limite de 5.000 € par école doctorale
impliquée).
74
4) l’appel à projets lancé en 2009 par le Haut commissariat à la jeunesse,
Comme nous l’avons vu dans l’introduction, dans le cadre de cette initiative des pouvoirs
publics, une expérimentation du PEC à l’échelle nationale a été proposée, impliquant 13
Universités.
D – BILAN DES EXPERIENCES FRANÇAISES
Le bilan proposé ici ne portera pas sur les contenus et les usages du PEC. En
effet, le caractère tardif de sa mise en œuvre dans l’enseignement supérieur en France rendrait
une telle tentative vaine et peu probante. En revanche, il est possible de procéder à un examen
synthétique de certaines caractéristiques techniques de la mise en œuvre du PEC, portant sur
les acteurs impliqués, sur les sources de financement, sur l’ampleur des publics concernés et
sur les technologies (dénommées communément solutions e-portfolios).
S’agissant des acteurs, il apparaît que ceux-ci sont de types très différents ce
qui justifie l’ampleur des financements et la logique de partenariat. Il y a d’abord les
établissements d’enseignement supérieur qui décident de la mise en œuvre des PEC et qui
sont en quelque sorte les maîtres d’œuvre des projets. Au sein des Universités on observe
qu’en règle générale les services mobilisés sont les SCUIO qui travaillent, en interne, en
partenariat avec les services de formation continue et les centres de ressources
informatiques. Il y a ensuite les enseignants, considérés ici dans leur statut professionnel, qui
auront à participer à la création de référentiels, à accompagner l’expérimentation notamment
sous forme de tutorat des apprenants, constitués aussi bien des étudiant(e)s en formation
initiale, que des candidats en VAE ou des salariés faisant usage de leur DIF. La troisième
catégorie d’acteurs est précisément celle des bénéficiaires des dispositifs mis en place : leur
concours est stratégique puisqu’il leur appartient de constituer –et eux seuls ont qualité pour
le faire- avec les ressources mises à leur disposition leur livret d’expériences et de
compétences. Il y a ensuite les partenaires extérieurs qui regroupent les bailleurs de fonds
privés et publics, les établissements d’enseignement supérieurs partenaires, les prestataires
de services externes (assurance qualité, sécurité informatique) et enfin les collectivités
75
territoriales et les administrations tant nationales qu’européennes dès lors que leurs concours
sont sollicités sous une forme ou sous une autre.
S’agissant des sources de financement deux cas de figure
existent correspondant à des stratégies différentes de mobilisation des ressources: la
constitution en réseaux des collèges et universités d’Etat aux Etats-Unis à l’exemple du
Consortium du Connecticut, qui rassemble 14 institutions postsecondaires de l’État autour
d’un même système portfolio soutenu financièrement par les pouvoirs publics ; des
partenariats publics- privés particulièrement explicites dans l’énoncé du § 173 de la célèbre
E-Strategy du Department of Education and Skills du Royaume –Uni : « We are already
reviewing the current relationships with ICT industry partners to bring about a step change
in our relationship with industry. We want the industry – both infrastructure and digital
content organisations – to be more than just suppliers .We want them to have avoice in our
future plans at all levels. We are planning a high-level contact group to enable the
Department to explain its requirements, and to enable the industry to influence future
thinking on the role of technology. Industry members will be represented on this contact
group as well as engaged in the work on learner support, learning activities and content,
workforce development and infrastructure. We will also develop new arrangements for
communicating with the industry as a whole, building on the work of the ICT Industry
Club.”126
Les expériences françaises se répartissent à parts égales entre ces deux schémas,
en observant toutefois que l’accès à des sources de financement non-publics dans le cadre de
partenariats publics-privés passe le plus souvent par la soumission à des appels d’offre de
l’Union Européenne dans le cadre desquels la présence d’institutions privées semble être un
atout significatif pour décrocher le soutien financier des instances communautaires.
S’agissant des effectifs concernés, ceux-ci sont modestes et ciblés sur une
année particulière : entre 50 et 100 étudiants par an sur une durée de 4 ans pour le PRES
Lille-Nord France, au niveau de la dernière année de licence. Seules les Universités médicales
telles l’Université Toulouse 3 «Paul Sabatier » appliquent au même niveau d’études le
dispositif à des promotions entières qui peuvent concerner jusqu’à 1350 étudiant(e)s : le coût
d’accompagnement pédagogique est alors sensiblement plus élevé du fait du nombre
126 United Kingdom, Department for Education and Skills. Harnessing Technology. TransformingLearning and Children’s Services. Crown Copyright 2005. Téléchargeable à:http://www.dfes.gov.uk/publications/e-strategy
76
d’enseignants mobilisés (jusqu’à 75) pour l’accompagnement individualisé et l’encadrement
des séances d’apprentissage (demi-groupe de 18 étudiants)127. En prenant le choix de
l’élaboration d’un guide de compétences l’Université Jean Monnet fait exception puisque le
guide concerne l’ensemble des étudiants de L3 des différentes filières des Lettres et Sciences
humaines de l’Université.
S’agissant, enfin des solutions techniques, très peu d’Universités se sont
tournées vers WebCT plateforme d’apprentissage en ligne, qui a récemment intégré un volet
portfolio numérique dans son système. Les universités semblent se partager entre les solutions
Open Source, ELGG, Mahara et Sakkai. Le Choix entre ces différentes solutions est
dépendant de deux facteurs : les systèmes mis en place antérieurement en matière d’espace
numérique de travail et le plus ou moins grand degré d’intégration, via le PEC, des usages
relevant de la formation initiale, de la formation continue et de l’insertion professionnelle,
sans parler des activités associatives.
SECTION 2 – PRECONISATIONS
Il y a lieu de partir d’un constat préalable : qu’il s’agisse de l’orientation et de
l’insertion professionnelle des étudiants, de la validation des acquis de l’expérience et de
l’exercice du droit à la formation, de la professionnalisation des diplômes eux-mêmes avec
les stages entre autres, et enfin des obligations liées au systèmes d’assurance-qualité et aux
politiques d’accréditation, de certification et de transparence des qualifications, d’énormes
changements convergents sont en cours, liés au processus de Bologne et à la politique
d’éducation et de formation tout au long de la vie de l’Union Européenne.
Ces changements, comme le remarque D. Fillatre, se situent sur 3 plans distincts
puisqu’ils relèvent d’une triple dimension :
« - cognitive : le référentiel invite à penser autrement le métier d’enseignant-chercheur
127 Cf. Sur la plateforme du PEC de l’université Toulouse, à la rubrique le PEC dans mon Université,la page « Le PEC dans la démarche de projet personnel et professionnel » http://www.pec.ups-tlse.fr/
77
- pédagogique : il s’agit de placer l’étudiant au cœur du processus de formation. C’est ce
qui appelle l’introduction d’un savoir nouveau, de pédagogies innovantes.
- organisationnelle : il faut introduire des expérimentations, et associer aux formations
universitaires des partenaires sociaux et économiques. »128
Ces changements obéissent à deux logiques qui constituent pour les
établissements d’enseignement supérieur la source de nombreux défis à relever. La première
logique est celle de l’individualisation des parcours tant académiques que professionnels en
termes de compétences à acquérir et à valider; la seconde est celle de l’harmonisation et de la
mise en cohérence de dispositifs, de pratiques et de logiques identitaires marqués par
l’histoire dont l’hétérogénéité n’est pas un handicap si le cadre de cohérence global est lui-
même pertinent, praticable et attractif.
Notre conviction est que la conciliation des deux logiques évoquées nécessite un
support opérationnel fiable et légitime au regard des attentes tant des apprenants que des
salariés : ce support doit être l’émanation des intéressés et cependant s’inscrire dans un cadre
juridique assorti de nombreuses garanties. Ce support est le portefeuille d’expériences et de
compétences (PEC) destiné à évoluer avec ceux qui les produisent tout au long de la vie.
§1 – Partenariats et financements
La question du partenariat est stratégique à maints égards : en termes de
compétences en réseaux, en termes de capacité de collecte des financements, en termes de
standards pour le e-portfolio. En même temps les coûts de coordination sont élevés au point
de pouvoir parfois compenser les économies liées à la mutualisation des ressources.
Deux catégories de configurations partenariales sont envisageables : entre
établissements d’enseignements supérieurs d’une part, dans le cas de partenariats public-
privé, notamment entre l’établissement et l’association des anciens élèves, d’autre part.
1ère catégorie de configuration partenariale : entre établissements
d’enseignements supérieurs.
128 D. Fillatre [2010] in compte rendu des Journée d’études : Référentiels de formation de licence en lettreset sciences humaines. Paris, Maison des Universités, 14 janvier 2010.
78
C’est la solution choisie par le PRES Lille Nord. Mais cette solution est
intervenue dans un contexte spécifique : l’appel à projet du Haut Commissariat à la Jeunesse.
De surcroît le PRES de Lyon (Université Jean Monnet mise à part) est très en retard en
matière de e-portfolio. Il suffit de rappeler que seul l’INSA de Lyon met en œuvre le
portefeuille européen des langues.
Au sein du PRES de Lyon un partenariat avec l’Université Jean Monnet
serait concevable. Mais il supposerait que celle-ci dispose d’une plateforme pédagogique
semblable à celle de Sciencespo-lyon. Cette solution est à creuser, bien qu’il semble sans
doute prématuré d’envisager que l’université Jean Monnet se lance immédiatement dans un
nouveau projet alors qu’elle vient d’achever celui relatif au guide de compétences.
Indépendamment du PRES de Lyon, un partenariat serait possible dans le cadre
du réseau des 6 IEP et de sa Fondation. L’inconvénient de cette solution est qu’elle diffère
la mise en œuvre effective du PEC en raison de la nécessité d’harmoniser au préalable les
espaces numériques de travail et les plateformes pédagogiques lorsqu’ils existent. L’avantage
est de pouvoir conférer un objectif majeur à la Fondation qui pourrait collecter des
financements auprès des collectivités territoriales (les Régions jouant ainsi le rôle des Etats
aux Etats-Unis) puisque les concours des 3 fonctions publiques font déjà, et feront de plus en
plus, appel à des référentiels de compétences.
2ème catégorie de configuration partenariale : le partenariat public-privé
Il y a peu d’exemples en France, en matière de PEC, de recours à cette solution.
Si les 6 IEP disposaient des compétences élargies, voire même à l’échelle du seul IEP de
Lyon, une solution serait la constitution d’une filiale de droit privé à laquelle serait déléguée
des missions relatives à la formation tout au long de la vie dont on a vu à quel point le PEC
constitue un instrument intégrateur puisqu’il intéresse directement la formation initiale et
l’insertion professionnelle, la formation continue, la VAE et le DIF, les étudiants ou salariés
préparant des concours des fonctions publiques (CEPAG et IEP-en-ligne) sans parler
d’autres fonctions (culturelles, sociales) liées aux usages possibles de cet outil.
Sur le site de Lyon, un partenariat avec l’EM-Lyon serait tout à fait
envisageable avec l’avantage de pouvoir établir une relation directe avec la Chambre de
Commerce. Le risque évident serait de noyer les profils et compétences SciencesPo dans un
ensemble de profils professionnels plus nombreux et plus ciblés relevant des différentes
formations dispensées à l’EM.
79
La solution la plus séduisante et sans doute la plus efficace dans l’immédiat est
celle d’un partenariat entre IEP et association des anciens. Ce partenariat peut s’envisager à
deux niveaux : celui du réseau des IEP et de la Fédération (si elle existe encore : mais on
observe que l’association des diplômés de SciencesPo- Grenoble a développé le site internet
des associations de Diplômés des IEP d’Aix-en-Provence et Grenoble http://iep-
grenoble.fr/aae), celui d’un partenariat limité SciencesPo-Lyon et l’association des
anciens diplômés de SciencesPo-Lyon.
Dans cette dernière hypothèse, des avantages essentiels retiennent l’attention :
construire un puissant instrument de liaison entre l’établissement et les milieux professionnels
tout en contribuant à redynamiser l’association des anciens ( à travers l’entregent de sa
section parisienne), substituer ou en tout cas développer en parallèle à l’annuaire des anciens
un site dédié aux portefeuilles numériques. En d’autres termes, la complémentarité serait
fondé sur le partage des expertises et des financements : il reviendrait à l’association des
anciens de gérer (sous l’angle de la maintenance de la plateforme et des financements liés à
son fonctionnement) la plateforme des portefeuilles de développement personnel ( une
fois celle-ci installée avec le concours des compétences de SciencesPo – Lyon), tandis qu’en
lien direct avec sa plateforme pédagogique, à l’instar de Virginia Tech, SciencesPo-Lyon
conserverait les 2 types de portefeuilles qui sont des portefeuilles d’apprentissage et
d’évaluation qui resteraient sous sa seule responsabilité pendant la durée des études des
personnes concernées ce qui permet de transférer les responsabilités en termes de
confidentialité de la mise en ligne de portefeuilles de développement personnel à
l’association des anciens dont c’est sans doute d’ailleurs une des vocations premières.
En d’autres termes, les étudiant(e)s feraient l’apprentissage de l’élaboration et
des usages du PEC à l’IEP, mais l’outil qui accompagnera l’évolution de leur carrière
professionnelle sera géré par l’association des anciens.
Quelles sources de financement seraient accessibles dans le cadre de ce
partenariat : des ressources spécifiques dédiées au projet au titre du quadriennal 2011-
2014129, des ressources du programme Leonardo de l’UE via l’agence nationale éducation et
129 « Lors du séminaire des 24 et 25 septembre 2009 organisé à Toulouse sur le PEC, et auquelparticipaient Lille 1, UVHC et Lille 3, le délégué interministériel à l’orientation (Bernard Saint-Girons)a déclaré que si cette expérimentation s’avère positive, le PEC pourrait devenir l’un des outilsnationaux de l’orientation active et son usage devrait alors être généralisé, et faire partie deschapitres de la dotation des établissements dans le cadre de leurs contrats quadriennaux » Extraitsdu Programme Formation Tout au Long de la Vie, Université Lille-Nord, France. Commission animéepar Olivier Sénéchal, page 2
80
formation130 (http://www.2e2f.fr/leonardo-apports.php ) et probablement des ressources en
provenance de la Région Rhône-Alpes ( avec toutefois la nécessité d’expliquer pourquoi le
projet ne serait pas commun aux 2 IEP de région).
§2 – Référentiels et Publics cibles
La mise en œuvre du PEC soulève des questions d’ordonnancement des tâches
assez délicates. Aussi convient-il de définir en amont un cahier des charges dont l’essentiel
porte sur les publics cibles et les référentiels à construire.
La seule Université qui ait eu l’idée de placer au cœur de sa démarche la
question de référentiels non au regard des savoirs académiques acquis mais au regard des
compétences susceptibles d’intéresser les employeurs potentiels est l’Université Jean Monnet
à travers la constitution de son guide de compétences. Force est de constater cependant que
les partenaires professionnels privilégiés (APEC et MEDEF-Loire), en raison de leur
éloignement du terrain (les savoirs professionnels de ces entités sont beaucoup plus distanciés
du terrain que ceux de leurs adhérents qui sont les syndicats professionnels comme SYNTEC
pour le MEDEF et les partenaires sociaux pour l’APEC131, ne sont guère parvenus à mettre en
valeur (à quelques exceptions près, cependant) les compétences susceptibles d’être mobilisées
sur le terrain par les étudiants des filières concernées. C’est pourquoi l’une des tâches les plus
importantes consiste à identifier en partenariat avec les acteurs concernés les tâches qu’ont su
prendre en charge et la manière dont ils l’ont fait les étudiants ou les salariés dans le cadre de
stages, de V.A.E. ou d’exercice du D.I.F.
A priori, l’introduction du portefeuille de compétences devrait partir de
promotions relevant des parcours de professionnalisation tant en master que dans les années 4
et 5 du diplôme. Cette option est évidemment celle qui, en principe, devrait rencontrer
l’assentiment de tous. A l’instant t, elle est évidemment immédiatement praticable. Mais, elle
130 Voir le n°18 du magazine de l’Agence éducation et formation :http://soleoweb.2e2f.fr/dossier.php?dossier=13 , ainsi que le texte intégral de l’ "appel général depropositions EFTLV pour 2008-2010: mise à jour 2010 — priorités stratégiques" ainsi que le "guide duprogramme EFTLV 2010" à l’adresse internet de l'agence : http://www.europe-education-formation.fr/
131 L’APEC est une association composée à parité de membres du MEDEF et des cinq centralessyndicales représentant les cadres salariés du secteur privé : CFE-CGC, CFDT Cadres, UCI-FO, UGICA-CFTC, et UGICT-CGT.
81
ne saurait faire oublier le fait que très vite les candidat(e)s à l’entrée directe en première
année sortiront de l’enseignement secondaire muni de livret de compétences et ayant déjà
acquis des notions relatives à cet outil. Il convient donc d’opter en faveur d’un dispositif qui
n’oublie aucun des publics cibles : étudiants en stage en cours de scolarité, salariés en
formation continue ou en procédure de VAE, étudiants inscrits en parcours de
professionnalisation en années 4 et 5 de leur scolarité à l’IEP, étudiants et salariés inscrits soit
au CPAG soit à IEPEL. Tout cela représente des publics conséquents alors que les référentiels
ne sont pas établis. C’est pourquoi il est proposé de retenir des effectifs limités mais
représentatifs de chacune de ces catégories sur la base, dans un premier temps d’un
volontariat. Ainsi il serait conforme aux expériences effectuées en France de prévoir un
effectif d’une cinquantaine d’étudiants répartis entre les formations professionnelles du
diplômes (une vingtaine), les stages (une dizaine en 3ème année) et la formation continue,
IEPEL (une vingtaine).
Les référentiels académiques devraient être construits par discipline et de
manière non exhaustive à partir de l’expérience des enseignants faisant figurer sur la
plateforme pédagogique des éléments de contenu de leurs enseignements.
Il est suggéré d’être attentif à la progression des contenus sur toute la durée du
diplôme et de restreindre, dans la phase expérimentale, le nombre de disciplines concernées
afin de respecter l’exigence du volontariat. L’idéal serait de retenir 2 disciplines de tronc
commun avec le cas échéant les CDM associées.
Au final l’objectif essentiel est celui d’une déclinaison des enseignements (CF en
priorité) en termes d’objectifs pédagogiques, de compétences et de pré-requis pour :
* faciliter les réorientations
* faciliter l’acquisition de compléments de formation pour les étudiants
En amont de l’expérimentation effective du PEC dans les parcours de
professionnalisation, le dispositif utilisé par l’Université Toulouse 3 (membre du consortium
formé par les Universités Grenoble 1, Poitiers, Toulouse 1 et Toulouse 3) visant à faire du
PEC le support privilégié du projet personnel et professionnel de l’étudiant (PPE) pourrait
être transposé aux étudiant(e)s des 2 premières années du diplôme à savoir :
Chaque étudiant, dans le cadre du PPE, est suivi par un enseignant référent:
Cet enseignant référent a la responsabilité d'un demi-groupe TD de 18 étudiants.
Le référent assure le suivi individualisé de chaque étudiant lors de trois entretiens :
un entretien d'accueil
un entretien de fin de premier semestre : bilan orientation
82
un entretien à la fin du second semestre : positionnement parcours de formation .
Le financement à la charge de l’IEP à prévoir pour l’ensemble de ce dispositif serait de
30.000 euros annuels sur 4 ans répartis ainsi : 10.000 euros pour l’équivalent d’un quart
de temps IGE et 20.000 euros pour les heures passées à l’accompagnement.
§3 – Harmonisation des fiches RNCP, supplément au diplôme, VAE.
Le consortium Europortfolio132 propose une définition du portfolio numérique
susceptible de montrer le caractère intégrateur de cet outil et d’illustrer les raisons pour
lesquelles il peut constituer un support essentiel à l’harmonisation des instruments évoqués
ci-dessus :
« Un eportfolio est une collection d’informations numériques décrivant et illustrantl’apprentissage ou la carrière d’une personne, son expérience et ses réussites.Un eportfolio est un espace privé et son propriétaire a le contrôle complet de qui y a accès,comment et quand.Le contenu des eportfolios et les services associés peuvent être partagés avec d’autres pour :• accompagner les validations des acquis de l’expérience ;• compléter ou remplacer des examens ;• réfléchir sur son apprentissage ou sa carrière;• accompagner le développement professionnel continu, la planification de l’apprentissageou la recherche du travail. »
Comme le rappellent les auteurs de la brochure canadienne « Le portfolionumérique. Un atout pour le citoyen apprenant » :
« Cette définition met en lumière cinq caractéristiques du portfolio numérique, à savoir :• qu’il regroupe des informations numériques, c’est-à-dire produites à partir d’outilsmultimédias, comme des photos numériques, des documents électroniques, des vidéos ou desenregistrements sonores;• que son contenu permet d’illustrer les apprentissages d’une personne, son cheminementprofessionnel, ses expériences et ses réussites;• qu’il est un espace privé, en ce sens qu’il appartient à son propriétaire, qui est souvent unindividu, mais qui peut aussi être un organisme, une institution ou une communauté;• que l’accès à son contenu est géré par son propriétaire;• que ses contenus peuvent être partagés. »
Dans le cadre de Sciencespo-Lyon les e-portfolios élaborés dans des contextespersonnels de formation différents pour leurs auteurs constitueraient les matériaux à partirdesquels l’harmonisation prendrait un sens, et ne seraient pas ainsi limités à un usage lié à uneprocédure de rationalisation administrative.
132 EIFEL, Europortfolio : www.eife-l.org/publications/eportfolio
83
Il s’agirait de procéder à une harmonisation des documents sur la base dessuggestions faites par la Commission Nationale de la Certification Professionnelle etrappelées dans l’extrait suivant de la Note « Articulation supplément au diplôme et ficheRNCP ».
Rubriques Fiche RNCP Rubriques annexe descriptive
dite « supplément au diplôme »
Cadre 1 : Intitulé 2-1 : Intitulé du diplôme
Cadre 2 : Autorité responsable de la certification 2-3 : Nom et statut de l’établissement ayant
délivré le diplôme
Cadre 3 : Qualité du(es) signataire(s) de la certification
Cadre 4 : Niveau de la certification et/ou domaine
d’activité
3-1 : Niveau du diplôme
Cadre 5 : Résumé du référentiel d’emploi, de métiers ou de
fonctions visées et éléments de compétences acquis et
attestés
4- 2 : Exigence du programme (compétences
acquises pendant la période d’études)
Cadre 6 : Secteurs d’activité et/ou types d’emplois accessibles
par le détenteur de ce diplôme, ce titre ou ce certificat
5-2 : Statut professionnel appliqué si
profession réglementée
Cadre 7 : Modalités d’accès à la certification 2-2 : Principaux domaines d’étude couvert(s)
par le diplôme
3-3 : Conditions d’accès
3-2 : Durée officielle du programme d’étude
4-1 : Organisation des études
2-5 : Langue(s) utilisée(s) pour
l’enseignement / les examens
Cadres 8/9 : Liens avec les autres certifications/
Accords européens ou internationaux
5-1 : Accès à un niveau supérieur
Cadre 10 : Base légale Non prévue au SD (car mentionnée sur le
diplôme)
Cadre 11 : Pour plus d’information (dont stats et lieux
de formation
6-2 : Autres sources d’information
2-4 : Nom et statut de l’établissement ayant
dispensé les cours
Rubriques non prévues dans la fiche RNCP car
concernant l’étudiant et son parcours spécifique
1 : Identité de l’étudiant
4-3 : Précisions sur le programme
6-1 : Renseignements complémentaires
7 : Signataire du supplément
8 : Descriptif du système de formation français
Rubrique non prévue ni sur la fiche ni sur le SD 4-4 : Système de notation de l’établissement
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§4 – Solutions techniques
Les études comparatives relatives aux plateformes e-portfolios et aux outils
techniques ainsi qu’aux standards ne manquent pas. Parmi les plus connues et les plus à jour
nous citerons celle de Helen C. BARRETT intitulée My "Online Portfolio Adventure" dans
laquelle l’auteur relate les résultats de l’expérience consistant à produire son portefeuille
numérique à l’aide de 33 outils différents133 et l’ouvrage de Darren Cambridge134
« Eportfolios for Lifelong Learning and Assessment » publié en 2010 chez Jossey-Bass. Les
principaux problèmes évoqués concernent les niveaux d’ouverture du système, de
centralisation des données, de mobilité de données ; l’accessibilité, l’archivage et
l’entreposage ; la fiabilité et la sécurité ; la portabilité des données et l’interopérabilité des
systèmes135, l’intégration avec les systèmes existants.
Compte tenu du fait que la plateforme pédagogique de Sciencespo-Lyon est une
plateforme Moodle il y a lieu de rechercher l’intégration à Moodle de la plateforme e-porfolio
Mahara. Cette intégration est d’ores et déjà disponible sous le nom de Mahoodle136, et a été
testée par Derrin Kent qui a présenté l’usage de Mahara avec Moodle pour la formation
professionnelle, le National Vocational Qualification (NVQ) en Angleterre et est
expérimentée depuis 2009 à l’IUT Montaigne de Bordeaux 3.
§ 5 – Calendrier
Il serait sage, surtout si le projet pouvait être intégré dans la quadriennal 2011-
2014, de prévoir un calendrier sur 4 ans :
133 Dr. Helen C. Barrett My "Online Portfolio Adventure" (Versions of my online portfolios developedusing different systems or online publishing tools): (a work in process, begun in 2004, last updatedApril 17, 2010 - 33 tools to date.134 Darren Cambridge is assistant professor of Internet studies and information literacy in NewCentury College and affiliated faculty in the Higher Education Program at George Mason University.Previously he was a director at the American Association for Higher Education, a fellow with theEDUCAUSE National Learning Infrastructure Initiative, and assistant director of the Computer Writingand Research Lab at the University of Texas at Austin.135 Voir notamment Campus Technology “Standards to Take ePortfolios Outside the Institution andinto the Future” A conversation with Phil Ice about ePortfolio standards disponible à:http://campustechnology.com/Articles/2009/03/11/Standards-to-Take-ePortfolios-Outside-the-Institution-and-into-the-Future.aspx?sc_lang=en&p=1136 Cf le dossier téléchargeable à l’adresse :http://wiki.mahara.org/@api/deki/files/196/=Mahoodle.pdf
85
Année 2011 : intégration de Mahara à Moodle. Formation des enseignants
volontaires pour assurer la formation et l’encadrement des publics cibles. Etablissements de
référentiels provisoires pour les masters professionnels et parcours professionnels du diplôme
en années 4 et 5.
Année 2012 : expérimentation avec étudiants de la junior entreprise de
Sciences Po-Lyon de la mise en place d’un portefeuille de développement professionnel.
Début de mise en place d’une plateforme Mahara gérée par l’association des anciens et
transferts de la gestion des portefeuilles des étudiants de la junior entreprise à l’association.
En parallèle lancement du PEC au niveau d’étudiants effectuant un stage long en 3ème année
et au niveau d’un groupe test (portefeuille d’apprentissage) en 4ème année intégrant des
référentiels sur CF.
Année 2013 : expérimentation des portefeuilles d’apprentissage en 2ème année et
de portefeuilles d’évaluation en 4ème année. Elaboration de référentiels au niveau des langues
et des CF de tronc commun sur les 4 premières années du diplôme et des enseignements
essentiels intervenant dans certaines préparations aux concours des fonctions publiques.
Année 2014 : extension des PEC à la VAE, au DIF et harmonisation fiches
RNCP et supplément au diplôme. Intégration dans la base de portefeuilles de doctorants,
dont le chapitre de la thèse sur la valorisation des compétences a été soutenu par le dispositif
pris en charge par l’association Bernard Grégory. Evaluation par experts indépendants de
l’ensemble du processus sur les années 2011-2014.
§5 – Le volontariat
Engager une expérience sur la base du volontariat, c’est affirmer que la dite
expérience requiert l’expression formelle de l’adhésion de ceux qui y participent. C’est aussi
affirmer la nécessité de la constitution d’un bilan au terme de l’expérience qui soit
l’expression fidèle des jugements de toutes les parties prenantes à l’expérience. C’est enfin
vouloir assurer la transparence, par des examens à intervalles réguliers, des conditions de
déroulement du processus notamment en ce qui concerne les aspects financiers. Le principe
du volontariat suppose que toutes les parties prenantes assument la responsabilité pleine et
entière des tâches qui leur incombent : cela vaut aussi, bien sur, pour toutes les catégories de
publics cibles, dont les apprenants.
86
CONCLUSION
Le partenariat entre un établissement d’enseignement supérieur et l’association
des anciens élèves revêt, dans la perspective d’une institutionnalisation des certifications des
apprentissages et des acquis de l’éducation et de la formation tout au long de la vie, une
importance cruciale pour chacune des structures. Pour l’établissement d’enseignement
supérieur ce partenariat consacre une saine division des tâches, les portefeuilles
d’apprentissage et d’évaluation lui étant dévolu, tandis que la responsabilité d’assurer la
disponibilité et la mise à jour du portefeuille de développement personnel échoit à
l’association des anciens élèves. Sans l’association des anciens qui trouve là une raison
fondamentale d’être un intermédiaire privilégié entre les nouveaux diplômés et les milieux
professionnels, les portefeuilles de développement personnels risqueraient d’être laissés en
jachère. A l’inverse, privé du concours de l’établissement d’enseignement supérieur qui a
exercé à leur endroit la fonction de certification des acquis, les anciens au für et à mesure de
l’évolution de leur parcours professionnel, seraient privés de l’expertise nécessaire pour
procéder à l’actualisation de leur compétences en lien avec le cadre normatif national et
européen.
De surcroît ce partage des rôles contribue à une meilleure allocation des
ressources disponibles au niveau de chacune des structures : la publication de l’annuaire des
anciens sera constamment possible à un niveau de fiabilité et d’actualisation des données bien
supérieurs à ce qui est possible aujourd’hui ; l’établissement lui trouvera au près d’anciens
engagés dans la vie active des partenaires mieux informés et par conséquent plus efficaces
pour la recherche de stage et l’insertion professionnelle des futurs diplômés137.
137 Tout ceci s’inscrit de manière évidente dans la continuité de certaines préconisations du rapportHETZEL [2006], notamment celles figurant aux rubriques C10 à C14 du rapport (pp. 40-41).
87
CONCLUSION
Le portefeuille numérique d’expériences et de compétences s’inscrit dans une
démarche de formation tout au long de la vie et anticipe sur l’usage du passeport-formation
prévu dans les accords nationaux interprofessionnels.
Son implantation dans l’enseignement supérieur et les perfectionnements
majeurs dont il a fait l’objet, conduisant à la publication aux Etats-Unis en 2006 du
« Handbook of Research on ePortfolios »138 témoignent d’un intérêt exceptionnel pour cet
instrument, support d’une intégration de services multiples.
En France, sa diffusion reste limitée du fait des connotations liées aux termes
employabilité, compétences et individualisation et aux pratiques plus ou moins contestables
qu’ils peuvent recouvrir dans le cadre de politiques néolibérales « avancées ». Mais l’histoire
du monde ouvrier est là pour nous rappeler que les outils se prêtent à des usages très éloignés
des conceptions initiales de leurs créateurs : ainsi en va-t-il du fameux « livret ouvrier » du
XIXème siècle. Jean Pierre Le CROM dans le remarquable article139 qu’il lui a consacré
relate comment de mesure de police et d’instrument de discipline contractuelle dans le cadre
de la législation de 1803, le livret ouvrier devient dans la législation de 1890 le support d’un
droit protecteur supplantant son caractère initial d’instrument d’un droit répressif.140
Au-delà de cet éclairage historique, les transformations économiques et sociales
de nos sociétés appellent de nouveaux dispositifs d’insertion professionnelle et de
sécurisation des parcours professionnels. Notre conviction est que SciencesPo-Lyon, sans
trahir ses valeurs ni sacrifier son identité, se doit de participer à cette œuvre commune.
138 Ali JAFARI, Catherine KAUFMAN [2006] Handbook of Research on ePortfolios, Idea GroupReference, Hershey (USA), 608 pages.139 Jean-Pierre LE CROM [2005] « Le livret ouvrier au XIXe siècle entre assujettissement etreconnaissance de soi » in Du droit du travail aux droits de l'humanité. Etudes offertes à Philippe-JeanHesse, Yvon Le Gall - Dominique Gaurier - Pierre-Yannick Legal (Ed.) (2005) pp.91-100.140 Le CROM cite le témoignage suivant d’un membre de la commission d’enquête de 1868 « Le livret, ainsimodifié, ainsi débarrassé de ce qui le rend aujourd’hui impopulaire, me semble destiné à ne plus être qu’uneinstitution utile et protectrice pour la classe ouvrière. Il facilitera l’admission dans les ateliers et lefonctionnement des bureaux de placement. Il continuera à être un sauf-conduit en voyage et, en constatant leshabitudes de travail et la profession du porteur, il lui fera obtenir le crédit dont il a souvent besoin pour sonlogement et sa pension. Il sera un titre pour sa participation aux associations de secours mutuels, auxformations de syndicats, pour l’inscription sur les listes électorales. Il facilitera les secours et les recherches encas d’accidents ou de décès. Il sera surtout utile à ces nombreux ouvriers qui, sans instruction et sansprotection, sont conduits par les circonstances loin de leur famille et de leur pays natal, et dont les ouvriersparisiens ont peut-être le tort d’oublier trop souvent l’existence et le nombre. Enfin le livret sera le titre d’orgueildu bon ouvrier, de même que les états de service font la gloire du soldat ».
88
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION……………………………………………………………………………..4Ière Partie - DE L’ACCES A L’EMPLOI PAR LE DIPLOME AU REGIMED’EMPLOYABILITE PAR LES COMPETENCES……………………………….….……..8
SECTION 1 – Surmonter la volatilité des qualifications……………………………………..8§1 – La sécurisation des parcours professionnels et l’avènement de la logique descompétences..............................................................................................................................11§2 – L’introduction des compétences dans le système éducatif…………………………...…14
SECTION 2 – Attentes sociétales et reconfigurations institutionnelles: de la société du savoiraux universités entrepreneuriales………………………………………..................................16§1 – La valorisation des compétences dans l’économie de la connaissance............................17§2 – Les missions de l’Etat stratège dans l’économie du savoir……………………………..172.1 – Evolution des modes de gouvernance de la science………………………………........192.2. - Les compétences, au cœur des nouvelles articulations entre enseignements et recherchesuniversitaires, induites par les nouveaux modes de gouvernance de lascience…………………………………...................................................................................20§3 – L’ « Université entrepreneuriale », creuset de la mise en oeuvre du « New PublicManagement » et du « benchmarking » des compétences. …………………………………..213.1– Nouvelles modalités d’intervention publique dans la société du savoir………………...223.2 – Le modèle de l’Université entrepreneuriale……………………………………………23
IIème Partie – DES COMPÉTENCES AU CADRE EUROPÉEN DE CERTIFICATION :L’EPORTFOLIO INSTRUMENT INTEGRATEUR DE LA POLITIQUE D’EDUCATIONET DE FORMATION TOUT AU LONG DE LA VIE……………………………………..27
SECTION 1 – De l’employabilité a la sécurisation des parcoursprofessionnels…………….......................................................................................................28§1 – Du processus de Bologne à la stratégie de Lisbonne…………………………………....29§2 - Une clarification politique : la stratégie de Lisbonne et la priorité àl’emploi…………………………………………………………………………………..…...32§3 - Une clarification sémantique : des compétences aux acquis de l’apprentissage et de laformation………………………………………………………………………………...……34
SECTION 2 – Rétroaction du Cadre Européen des Certifications sur L’Enseignementsupérieur………………………………………………………………………………..……37§ 1 – Le cadre européen de qualifications dans l’enseignement supérieur (EQF) …………...39§ 2 – Le cadre européen de certifications CEC ou EQF-LLL…………………….………....40§3 – La mise en œuvre du CEC : la galaxie EUROPASS……………………….….………44§4 – La rétroaction sur l’enseignement supérieur et le système de formation professionnel………..464.1. La VAE……………………………………………………….………………………….464.2. Le Droit individuel de formation………………………………………………………...47
SECTION 3 – Le rôle des Universités dans la politique européenne d’éducation et deformation tout au long de la vie………………………………………………………………48§1 La formation continue dans la politique de flexisécurité………………………………….48§2 L’avènement des référentiels de compétences et des portefeuilles numériquesd’expériences et de compétences……………………………………………………………..50
89
IIIème Partie – LE PORTEFEUILLE NUMERIQUE D’EXPERIENCE ET DECOMPETENCES. BILAN ET PRECONISATIONS……………………………………….53
SECTION 1 – Le Portefeuille numérique dans le monde du travail et à l’Université : bilan desexpériences……………………………………………………………………...……………53
§1- Le passeport-formation dans le monde du travail : l’avènement du e-portfolio…………53A – LE CADRE NORMATIF EUROPEEN………………………………….……………..53B – EXPERIMENTATIONS…………………………………………..……….…………….55C- INITIATIVES FRANÇAISES………………………………………..………………......58D – LA RECONNAISSANCE DES ACQUIS DE L’EXPERIENCEPROFESSIONNELLE……………………………………………………………………….60
§2- L’avènement du e-portfolio dans le cadre de l’enseignement supérieur………………..61
A – QUELQUES EXEMPLES D’EXPERIENCES ETRANGERES HORS EUROPE…....61
B - LE PORTFOLIO EUROPEEN DES LANGUES : PRINCIPAL RESSORT DESAPPRENTISSAGES DES USAGES DE L’E-PORTFOLIO EN EUROPE…………….….64C – LES PREMICES DES EXPERIMENTATIONS EN MATIERE D’E-PORTFOLIOSDANS LE SYSTEME D’EDUCATION ET DE FORMATION EN FRANCE (FICHESRNCP ET SUPPLEMENT AU DIPLOME)……………………........................................... 66D – BILAN DES EXPERIENCES FRANÇAISES……………………………...……..…….72
SECTION 2 – Préconisations………………………….………………………...…………...74
§1 - Partenariat et financement……………………………………………………………….75§2 - Référentiels et publics cibles…………………………………………………………… 78§3 - Harmonisation des fiches RNCP, supplément au diplôme, LMD, VAE………………………80§4 - Solutions techniques……………………………………………………………………..82§5 – Calendrier……………………………………………………………………………….82§6 – Volontariat…………………………………………………………………...………….83
CONCLUSION GENERALE………………………………………...……………………..85