joffre (2009) ille réflexions sur ses emplois dans l eunuque de térence et le livre xlii de...

20
ISSN: 1578-7486 Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34 ILLE: réflexions sur ses emplois dans l’Eunuque de Térence et le Livre XLII de Tite-Live MARIE-DOMINIQUE JOFFRE Université de Poitiers Résumé : L’examen des emplois de ille dans deux textes aussi différents que l’Eunuque de Térence et le livre LXII de Tite-Live a abouti aux conclusions suivantes : a) Comme tout déictique, ille permet d’introduire dans l’énoncé relief, contraste et rupture. C’est pourquoi il abonde dans le dialogue de la comédie qui doit être instantanément com- pris du spectateur, mais il est rare dans le récit historique qui se veut neutre, objectif, organisé et raisonné. b) Ille ne sert pas à localiser son référent dans l’espace et dans le temps ; il est le signifiant d’une rupture dans le déroulement de l’énoncé. C’est pour- quoi il constitue souvent des couples d’opposition avec les pronoms personnels ou avec les autres déictiques, tirant ses effets de sens de la signification du terme mis face à lui. c) La deixis, élément de la langue, ne décrit pas le monde tel qu’il est, mais elle traduit la manière dont le locuteur élabore son propos, acte énonciatif à travers lequel le réel devient abstrait, pour être conçu et organisé selon la liberté du locuteur. Mots clés : anaphore ; deixis ; cohérence / rupture ; énonciation ILLE: reflexiones sobre sus empleos en el Eunuco de Terencio y el libro XLII de Tito Livio Resumen: El examen de los empleos de ille en dos textos tan diferentes como el Eunuco de Terencio y el libro XLII de Tito Livio ha deparado las conclusiones siguientes: a) Como todo deíctico, ille permite introducir en el enunciado relieve, contraste y ruptura; por ello abunda en el diálogo de la comedia que debe ser comprendido instantánea- mente por el espectador, pero es raro en el relato histórico que pretende ser neutro, ob- jetivo, organizado y razonado. b) Ille no sirve a localizar su referente en el espacio y en el tiempo; es el significante de una ruptura en el desarrollo del enunciado; por ello constituye a menudo pares de opposición con los pronombres personales o con los otros deícticos, extrayendo sus acepciones de la significación del término contra- puesto. c) La deixis, elemento de la lengua, no describe el mundo tal cual es, sino que traduce la manera como el locutor elabora su propuesta, acto enunciativo por el cual lo real se hace abstracto, para ser concebido y organizado según la libertad del locutor. Palabras clave: anáfora; deixis, coherencia / ruptura; enunciación Fecha de recepción: 18/04/2009 Fecha de aceptación: 23/06/2009

Upload: enzo-diolaiti

Post on 17-Nov-2015

214 views

Category:

Documents


1 download

DESCRIPTION

Ille. Usos del pronombre en Terencio y Tito Livio. Lingüística.

TRANSCRIPT

  • ISSN: 1578-7486 Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34

    ILLE: rflexions sur ses emplois danslEunuque de Trence et le Livre XLII

    de Tite-Live

    MARIE-DOMINIQUE JOFFREUniversit de Poitiers

    Rsum : Lexamen des emplois de ille dans deux textes aussi diffrents que lEunuque deTrence et le livre LXII de Tite-Live a abouti aux conclusions suivantes : a) Commetout dictique, ille permet dintroduire dans lnonc relief, contraste et rupture. Cestpourquoi il abonde dans le dialogue de la comdie qui doit tre instantanment com-pris du spectateur, mais il est rare dans le rcit historique qui se veut neutre, objectif,organis et raisonn. b) Ille ne sert pas localiser son rfrent dans lespace et dans letemps ; il est le signifiant dune rupture dans le droulement de lnonc. Cest pour-quoi il constitue souvent des couples dopposition avec les pronoms personnels ouavec les autres dictiques, tirant ses effets de sens de la signification du terme mis face lui. c) La deixis, lment de la langue, ne dcrit pas le monde tel quil est, mais elletraduit la manire dont le locuteur labore son propos, acte nonciatif travers lequelle rel devient abstrait, pour tre conu et organis selon la libert du locuteur.

    Mots cls : anaphore ; deixis ; cohrence / rupture ; nonciation

    ILLE: reflexiones sobre sus empleos en el Eunuco de Terencioy el libro XLII de Tito Livio

    Resumen: El examen de los empleos de ille en dos textos tan diferentes como el Eunucode Terencio y el libro XLII de Tito Livio ha deparado las conclusiones siguientes: a)Como todo dectico, ille permite introducir en el enunciado relieve, contraste y ruptura;por ello abunda en el dilogo de la comedia que debe ser comprendido instantnea-mente por el espectador, pero es raro en el relato histrico que pretende ser neutro, ob-jetivo, organizado y razonado. b) Ille no sirve a localizar su referente en el espacio yen el tiempo; es el significante de una ruptura en el desarrollo del enunciado; por elloconstituye a menudo pares de opposicin con los pronombres personales o con losotros decticos, extrayendo sus acepciones de la significacin del trmino contra-puesto. c) La deixis, elemento de la lengua, no describe el mundo tal cual es, sino quetraduce la manera como el locutor elabora su propuesta, acto enunciativo por el cual loreal se hace abstracto, para ser concebido y organizado segn la libertad del locutor.

    Palabras clave: anfora; deixis, coherencia / ruptura; enunciacin

    Fecha de recepcin: 18/04/2009Fecha de aceptacin: 23/06/2009

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 15

  • Ce travail sest fix un but relativement modeste : examiner les emplois etles significations du pronom-adjectif dmonstratif ille dans deux corpus radi-calement diffrents, une comdie, lEunuque de Trence, et le livre XLII deTite-Live. De ce dernier texte je nai retenu que les parties strictement narra-tives. Jai en effet limin les discours, quils soient directs ou indirects, de fa-on bien faire ressortir le contraste entre un texte fondamentalement oral, lacomdie, et celui qui sen carte le plus (mme si, selon toute probabilit, il fai-sait lobjet dune recitatio), la narration historique. On cherchera alors voirselon quelles modalits ille soppose, tant du point de vue fonctionnel que dupoint de vue notionnel, dune part lanaphorique is (auquel on peut associerles dsinences verbales de 3 personne -t, -tur, -nt et -ntur, elles aussi ana-phoriques, et le relatif de liaison), dautre part aux deux autres dictiques, hicet iste.

    Les interprtations et les conclusions de cette enqute sappuieront au dpartsur les conceptions que proposent dans leurs travaux G. Serbat pour le latin etG. Kleiber pour le franais.

    1. APPROCHES THORIQUESPour G. Serbat1, un anaphorique comme is, capable de reprendre non seu-

    lement une unit lexicale ou une squence dnonc bien dlimite et nettementdfinie, mais aussi tout un ensemble notionnel aux contours plus difficilementperceptibles, est dabord un abstracteur syntaxique. Pourvu des marques ca-suelles nominales, ce cadre syntaxique, ce super-nom , totalement vide decontenu notionnel, peut occuper dans larchitecture syntaxique de la phrasetoutes les fonctions du nom, en vitant au locuteur de pesantes rptitions. Lesindices de genre et de nombre permettent, de leur ct, de reprer et didentifieraisment dans le droulement de lnonc, le terme ou la squence symbolisepar lanaphorique, autrement dit, son rfrent. Lorsque ce dernier reprend unenotion prcdemment voque, on parle danaphore ; si, au contraire, lana-phorique apparat avant son rfrent, crant ainsi une attente et mobilisant lat-tention du co-nonciateur, on parle de cataphore.

    G. Kleiber2 mne la rflexion sous un autre angle et dtaille le mcanismede lanaphore. Il ressort tout dabord de la lecture de ses tudes, que lanapho-re sollicite la participation conjointe et simultane des deux acteurs de lnon-ciation, le locuteur et linterlocuteur. Ce dernier doit en effet mmoriser le r-frent de lanaphorique et le maintenir prsent lesprit, immdiatementmobilisable. Pour G. Kleiber ce rfrent doit tre obligatoirement saillant dans la mmoire des co-nonciateurs, prt ainsi rendre instantanment intel-ligible la coquille smantiquement vide que constitue lanaphorique. Le mca-

    16 Marie-Dominique Joffre

    Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34 ISSN: 1578-7486

    1 SERBAT 1984.2 KLEIBER 1994, lanaphore, dun problme lautre , p. 25.

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 16

  • nisme danaphore repose donc imprativement sur une connivence qui doitncessairement stablir entre le locuteur et son auditoire.

    Une prcision mrite dtre ajoute. Le rfrent que les co-nonciateurs doi-vent retenir nest pas seulement, on la dj vu, un substantif, mais il correspondaussi trs souvent des squences dnonc ; celles-ci peuvent tre amples etcomplexes. Cest notamment selon cette deuxime modalit, que fonctionnelanaphorique lorsquil est employ comme adjectif, pithte dun substantif :par sa prsence il signale que le contenu smantique du substantif est enrichi,prcis par les lments parfois nombreux et divers qui composent son rfrent.En position dadjectif, par rapport au substantif quil dtermine, lanaphoriqueremplit, en quelque sorte, une fonction individualisante.

    Nous terminerons cette prsentation de lanaphore et de lanaphorique parune ultime remarque. Il arrive parfois, condition que non seulement le contex-te linguistique mais aussi la situation extralinguistique soient clairs, que le r-frent de lanaphorique nait pas t mentionn au pralable dans lnonc,mais que son existence et sa nature se dduisent de donnes concrtes, percep-tibles pour les acteurs de lnonciation. Le locuteur peut parfaitement utiliser di-rectement un anaphorique pour dsigner, cest--dire traduire sous une formelinguistique, fondamentalement abstraite, un objet concrtement peru. Cest parexemple ce qui se passe lorsque la courtisane Thas prcise lesclave Parm-non lidentit de celui chez qui elle se rend. Elle se contente dutiliser directe-ment le pronom hic (qui est, on le verra, la base, un anaphorique) dont elle d-signe dun geste le rfrent prsent en chair et en os sur la scne. A la questionquo ? de Parmnon la jeune femme rplique :

    Quid ? Hunc non uides ? Quoi ? Tu ne le vois pas ? (Eun. 463).

    Mais, comme latteste le choix du genre et du nombre (masculin, singulier)revtus par le dictique, cette utilisation nest pas aussi directe quon pourraitlimaginer ; elle ncessite une opration pralable, la conceptualisation du rel,son passage labstrait, sous la forme dune unit de discours, en loccurrenceun nom, sans doute ici homo, affect une classe prcise de genre et de nombre.Lanaphorique seul ne peut donc rfrer directement au rel, au concret ; pourtraduire un lment de la ralit extra-linguistique, il a besoin dun relais, un ou-til purement linguistique, oprateur de labstraction et de la conceptualisation,une des parties du discours. Comme le dit G. Kleiber, contrairement aux pro-noms des personnes 1 et 2, lanaphorique nest pas un dictique transpa-rent 3.

    ILLE: rflexions sur ses emplois dans lEunuque... 17

    ISSN: 1578-7486 Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34

    3 KLEIBER 1986, p. 5 ; ce sont des symboles indexicaux transparents [] La transparence desdictiques comme je, tu, ici, etc., par contraste lopacit de dictiques comme celui-ci/-l, ce chien, etc.rside dans lidentification univoque du rfrent : je cest toujours le locuteur, ici lendroit o se tient lediscours, etc.

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 17

  • 2. COMMENT DFINIR ALORS LES DICTIQUES ?A linstar des deux autres dictiques, hic et iste, ille est, avant tout, un ana-

    phorique. Mais contrairement is, ces trois dictiques livrent propos de leurrfrent une information notionnelle supplmentaire. De quel ordre est cette in-formation et comment la dfinir ? Que montre le dictique ? Faut-il retenirlide quil localise son rfrent en prenant comme points de repre les acteurset les coordonnes de lnonciation ?

    Ne vaudrait-il pas mieux essayer de sortir de ce cadre trop rigide et surtouttrop concret de la localisation ? Cette remise en question a dj constitu lepoint de dpart de mes travaux sur iste et ma conduite proposer une dfinitionbeaucoup abstraite du signifi et du rle de ce dictique4. On verra que lexamensystmatique des donnes du corpus choisi ici aboutira des conclusions dumme ordre.

    Une dernire question mrite dtre pose : o est situ le rfrent, autre-ment dit, quel niveau fonctionne le mcanisme de rfrence ? Il nous sembleraisonnable dadmettre que, dans la majorit des cas, le rfrent est dordre lin-guistique, quil est un lment constitutif de lnonc. La rfrence est dordreintra-textuel ou endophorique. Mais il arrive, et cela est plus rare, que ledictique dsigne directement un rfrent ancr dans la ralit extra-linguistique,perceptible de lensemble des co-nonciateurs (bien que nous ayons soulignplus haut que la rfrence passe obligatoirement par le passage labstrait de cerfrent au moyen dune unit de langue). Nous laisserons provisoirement dect cet pineux problme et admettrons, au moins dans un premier temps, quilexiste un mode de rfrence directe, extra-textuelle, exophorique.

    3. REMISE EN CAUSE DE LAPPROCHE HABITUELLEBien souvent (Orlandini, 1995 ; Pieroni, 2007), les 3 dictiques sont ratta-

    chs aux 3 personnes de lnonciation : hic est associ la premire, iste ladeuxime, ille la troisime. Outre que bien des emplois viennent contredire ai-sment cette tripartition (il suffit de citer : Ter., Eun. 974 Sed estne ille nosterParmeno, sinterroge le senex en voyant arriver son esclave), le raisonnementsenferme dans une contradiction : au mme titre que is, les dictiques relventtous de la personne 3, ils ne sont ni ego ni tu, mais simplement objets de paro-le. Comment concilier alors acteur et objet de lnonciation ? Comment surtoutexpliquer la tautologie qui rapporte ille, lui- mme signifiant dune personne 3, cette mme personne 3 ? Il nous semble donc ncessaire de sortir de ce genrede contradiction.

    18 Marie-Dominique Joffre

    Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34 ISSN: 1578-7486

    4 JOFFRE 2007-a et paratre : iste renvoie au contenu notionnel du rfrent, contenu labor parlun des co-nonciateurs et repris comme tel. Iste (au masculin singulier) signifie donc : cet homme telque je/tu le conois, le dcris.

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 18

  • ILLE: rflexions sur ses emplois dans lEunuque... 19

    ISSN: 1578-7486 Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34

    Dautre, part les grammaires considrent que, du point de vue smantique,ille soppose hic et indique que son rfrent est loign du locuteur, aussi biendans lnonc que dans lespace ou le temps. Cest de cette manire que lonpourrait justifier :

    dico, edico uobis nostrum esse illum erilem filium (Ter., And. 962). je vous le dis et redis, ce jeune homme est le fils de mon matre.

    Lesclave Parmnon rvle la servante Pythias que celui qui vient devioler une toute jeune fille nest autre que son jeune matre Chra qui, aprsavoir revtu le tenue dun eunuque, sest introduit frauduleusement dans lamaison de la courtisane Thas. Dans la mesure o cette rvlation se fait en lab-sence du coupable, on pourrait dire que ille dsigne un personnage loign dulieu de lnonciation.

    La mme analyse pourrait rendre compte de Eun. 974 o ille reprsente les-clave Parmnon que le senex Demea voit arriver, mais qui nest pas encore vrai-ment proche :

    Sed estne ille noster Parmeno ? Mais nest-ce pas l (l-bas ?) notre Parme-non ?

    En rfrence intra-textuelle, on a coutume de considrer que ille renvoie une squence dnonc loigne, tandis que hic reprend ce qui a t mentionnen dernier, ce qui est le plus proche. On rappellera, ce sujet, la charmante pi-gramme de Martial, 5,43 :

    Thais habet nigros, niueos Laecania dentes.Quae ratio est ? emptos haec habet, illa suos Thas a les dents noires, Laecania les dents blanches. Pourquoi ? pour celle-

    ci ce sont des dents achetes, pour celle-l, les siennes.

    Dans Eun. 638 sq., Phdria, amoureux momentanment conduit par lacourtisane Thas, aspire au moins la voir, dfaut de pouvoir la toucher :

    Si non tangendi copiast, / Eho ne uidendi quidem erit ? Si illud [= tangere][ non licet

    Saltem hoc licebit [= uidere] Si je nai pas le privilge de la toucher, naurai-je pas mme hlas celui de la

    voir ? Et si cela ne mest pas permis, au moins on me permettra ceci.

    Enfin de cette ide dloignement, on passe la valeur emphatique, lauda-tive. Cest ainsi que pourrait sexpliquer lemploi de Eun. 587 :

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 19

  • 20 Marie-Dominique Joffre

    Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34 ISSN: 1578-7486

    Egomet quoque id spectare coepi, et quia consimilem luserat / Iam olim ille lu-dum, impendio magis animus gaudebat mihi Je me mis moi aussi regarder et comme jadis celui-l dj avait jou sem-

    blable jeu, je mamusais tant et plus

    Lide de violer la toute jeune Pamphila a t inspire Chrea, travesti en eu-nuque, par une peinture reprsentant les amours de Jupiter et de Dana ; pour ar-river ses fins, le dieu se mtamorphosa en pluie. Le dictique qui reprsente ledieu est ille et lon interprte souvent ce genre demploi par la valeur emphatique.Cest parce quun dieu se lest autoris que le jeune homme se dcide commettreun acte totalement condamnable. Ille, dautre part, rfre un tre loign desmortels aussi bien dans lespace que dans le temps, puisque la peinture voquelpoque mythique o les dieux nhsitaient pas se mler aux hommes.

    Cependant ces critres dloignement et demphase ne permettent pas derendre compte, il sen faut de beaucoup, de la totalit des emplois de notre cor-pus. Ils sont inoprants la plupart de temps et bien souvent on peut se demanderpourquoi ille, quand is ou hic conviendrait :

    On peut signaler un exemple surprenant, en totale contradiction avec laconception traditionnelle que lon se fait de ille :

    Illud uide os ut sibi distorsit carnufex ! (Eun. 670). Regarde son visage, comme il le contrefait, le bourreau ! ?

    Ces propos adresss aux servantes sont tenus par Phdria qui sort de la mai-son de la courtisane Thas en tirant par le col le vritable eunuque. Contraire-ment toute vraisemblance, il le croit capable davoir viol la toute jeune ser-vante. On peut parler dans ce cas, plutt rare dailleurs, de rfrenceexophorique (ou extra-textuelle). Mais pourquoi ille alors que hic sembleraitmieux convenir la situation ? Leunuque est pratiquement coll Phdria et onimagine lentre en scne plutt risible de ce couple forc.

    Dans Eun.330 sq., le jeune Chra raconte Parmnon comment un f-cheux, un senex ami de son pre, lui a fait perdre, par une conversation intem-pestive et sans intrt, la trace dune jeune fille la beaut blouissante :

    Is dum hanc sequor, fit mihi obuiam pendant que je la suivais, il metombe dessus

    Le personnage emploie ici lanaphorique is mais aprs une brve interven-tion de lesclave (Incommmode hercle ! malchance, par Hercule ), il poursuiten dsignant le vieillard par ille :

    Immo enim uero infeliciter :Nam incommoda alia sunt dicenda, Parmeno.

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 20

  • ILLE: rflexions sur ses emplois dans lEunuque... 21

    ISSN: 1578-7486 Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34

    Illum liquet mihi deierare his mensibusSex septem prorsum non uidisse proxumis / nisi nunc

    Non, dis plutt infortune ! Car malchance cela doit se dire dautre chose, Par-mnon. Voil un homme que je peux bien jurer navoir rigoureusement pas vu deces six ou sept derniers mois, sauf juste aujourdhui

    Certes le personnage voqu est absent de la scne et cette rencontre, fataleau dessein amoureux du jeune homme, appartient au pass ; mais on peut sin-terroger sur les raisons qui justifient lutilisation de is dans un cas, de ille dansun autre.

    Il convient, avant de poursuivre lanalyse, de clarifier un point extrmementflou qui fausse souvent la rflexion. En effet, partir du moment o le rfrentextra-linguistique dun anaphorique ou dun dictique nest pas concrtementperceptible pour lensemble des co-nonciateurs (autrement dit, puisquil sagitdune comdie, qui nest pas physiquement prsent sur scne et ne peut pas tremontr dun geste), on ne doit plus parler, me semble-t-il de rfrence extra-tex-tuelle. La notion voque est devenue simple objet de discours, elle apparatdans lnonc sous la forme dune unit linguistique susceptible dtre reprisepar tout anaphorique ou dictique. On est bien dans le cadre dune rfrence in-tra-textuelle. Le cas est frquent dans le thtre car les rcits faits par les pro-tagonistes y sont nombreux, qui permettent dlargir lespace scnique et de di-later le temps. Les tres et les notions voqus ne sont plus que les constituantsdune narration qui relve des mmes rgles dnonciation que lhistoire oulpope : la situation dnonciation est gomme, le locuteur et ses interlocu-teurs se font discrets, disparaissant derrire leurs propos, projetant devant lesspectateurs un nouvel pisode, pure construction narrative. Il est probable quelacteur - narrateur mimait sa narration, incarnant successivement tous les pro-tagonistes, contrefaisant peut-tre sa voix. Les dictiques constituaient alors desoutils tout fait adapts pour indiquer clairement et instantanment aux spec-tateurs les glissements dun personnage lautre.

    4. LES DONNES DU CORPUSCe nest pas sans arrire pense que jai choisi deux textes appartenant des

    genres littraires radicalement diffrents, une pice de thtre, lEunuque de T-rence et un texte historique, le Livre XLII de Tite-Live. Les lois propres cesdeux uvres sont trs diffrentes et il est immdiatement apparu que les dic-tiques sont rares chez lhistorien, surtout si lon limine du corpus les discoursdirects ou rapports. Dans ce livre XLII, la narration proprement dite noffreque quatre exemples de ille ! Les occurrences sont en revanche abondantes dansla comdie faite de dialogues mais aussi, il est important de le rappeler, de r-cits. Mais, comme, dautre part, dans le thtre tout passe par les rpliquesdes personnages, que ces rpliques se veulent limage du sermo quotidianus

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 21

  • 22 Marie-Dominique Joffre

    Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34 ISSN: 1578-7486

    par essence spontan, souvent dsordonn car labor au fil de la conversation,chaque locuteur est dans lobligation de rendre son propos immdiatementcomprhensible et clair, de lui donner du relief et dattirer lattention du spec-tateur sur des faits importants. Les dictiques, ainsi que les mimiques et lagestuelle, contribuent rpondre aux exigences du genre et sont abondants, ycompris dans les rcits.

    Lhistorien en revanche na pas ces soucis. Il cherche livrer des vne-ments quil rapporte, une reprsentation organise, sinon logique, du moins mu-rement soupese et mdite. Son rcit est construit de faon linaire, en en-chanant les causes et leurs effets ; le lecteur- auditeur est guid par unagencement rationnel du propos qui suit la chronologie des faits et met en sc-ne les vnements et les protagonistes dune manire ordonne et simple, sansfaire inopinment ressurgir (ou simplement surgir) des lments qui en appellent la mmoire du lecteur et ncessitent notamment le recours ille.

    5. ILLE DANS LEUNUQUE DE TRENCECest donc avant tout partir des emplois relevs chez Trence que com-

    mencera cette tude.Il est apparu trs vite que ille tait employ pour opposer une autre, la no-

    tion laquelle il rfrait. Il forme alors, pour ainsi dire, couple, non seule-ment avec hic mais aussi avec dautres anaphoriques et trs souvent avec lespronoms personnels de la 1 et 2 personne.

    5.1. Les couples dopposition

    Ego / ille Tu / illeLe contraste se peroit aisment dans les lamentations de Phdria, lamant

    de Thais, lorsquil constate quil est momentanment cart par celle quilaime au profit du soldat Thrason :

    Ego excludor, ille recipitur ! qua gratia,Nisi illum plus amas quam me et istam nunc timesQuae aduectast, ne illum talem praeripiat tibi ? (Eun.159-61). Cest moi que lon met la porte, cest lui quon reoit. Pour quelle raison, si

    ce nest que tu laimes plus que moi et que celle que lon ta amene [la jeunePamphila], tu as peur maintenant quelle ne te chipe un tel amoureux ?

    Au vers 302-03, cest demble par ille que Chra voque le senex qui laretard alors quil suivait la jeune Pamphila. Le dictique permet de mieuxfaire ressortir le couple antagoniste ainsi form. Le narrateur va raconter un pi-

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 22

  • ILLE: rflexions sur ses emplois dans lEunuque... 23

    ISSN: 1578-7486 Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34

    sode dont il est un des acteurs ; il est en quelque sorte ddoubl, la fois nar-rateur et objet de la narration :

    Vt illum di deaeque senium perdant, qui me hodie remoratus est,Meque adeo qui restiterim, tum autem qui illum flocci fecerim !

    Que dieux et desses anantissent ce vieux qui ma aujourdhui retenu et moiaussi bien, qui me suis arrt et qui alors a accord quelque importance sapersonne .

    Le contraste est visible travers la rptition des illum et des me, chaquepronom tant plac en dbut de vers. Dautre part, le jeu avec dsinences ver-bales personnelles accentue leffet produit.

    Aux vers 568 sq., Chra avoue que cest bien lui qui a viol la jeune Pam-phila, et que cest linstigation de son esclave, Parmnon, quil sest substitu leunuque pour pntrer dans la maison de Thas et approcher de celle quil d-sire. Trence use des mmes procds stylistiques en jouant des oppositions etdes rptitions de pronoms. Leunuque est dabord dsign par is :

    Erat quidam eunuchus quem mercatus frater fuerat Thaidi / Neque is de-ductus etiam dum ad eam (569-70). il y avait un eunuque que mon frre avait achet pour Thas et qui ne lui

    avait pas encore t amen.

    Par la suite ille prend la place de is pour crer un contraste avec ego et sou-ligner la substitution des rles :

    Vt uestem cum illo mutem et pro illo iubeam me illoc ducier (572). ( Parmnon ma suggr ) de changer de vtement avec lui et de me faire

    conduire l-bas sa place.

    Auparavant le mme eunuque, toujours dsign par ille, entrait dans unjeu dopposition avec tu : ainsi aux vers 370-71, lorsque lesclave Parmnonvoque le premier la possibilit dune substitution :

    Capias tu illius uestem tu pourrais prendre son costume [] Pro illo te de-ducam je temmnerais sa place [] Te esse illum dicam Je dirais que toicest lui.

    Les exemples prsentant ce jeu entre tu et ille sont aussi frquents que lecouple ego/ ille. On peut citer en outre :

    Fundam tibi nunc nimis uellem dari, / Vt tu illos procul hinc ex occulto cae-deres (Eun.787).

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 23

  • 24 Marie-Dominique Joffre

    Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34 ISSN: 1578-7486

    Jaurais voulu quen ce moment on te donne une fronde, pour que dici, couvert, tu les mettes en pices dit le parasite Gnathon au miles, alors que ce-lui-ci se prpare donner lassaut la maison de la courtisane.

    Mais, on le sait, ille ne se borne pas ce type doppositions ; on le rencontreface aux autres dictiques et anaphoriques.

    Is, iste, hic / illeLe corpus offre des exemples varis :Ainsi au vers 593, Chra, pour rendre clair le rcit quil fait du viol de

    Pamphila, use de lopposition is / ille pour dsigner les diffrentes protago-nistes de la scne. Un contraste est ainsi cr entre les servantes et la toutejeune fille :

    .. arcessitur lauatum interea uirgo / iit, lauit, rediit ; deinde eam in lecto illaeconlocarunt

    on vient entre temps chercher la jeune fille pour le bain ; elle part, prend sonbain, revient : aprs cela elles (= les servantes) la placrent sur son lit

    Dans le rcit quil fait au senex Dma, Parmnon use de la mme opposi-tion pour distinguer Chra de leunuque :

    Is pro illo eunucho ad Thaidem hanc deductus est (Eun. 991). Il (= ton fils) a t amen ici chez Thas la place de cet eunuque

    Ille peut aussi se trouver face iste :Thr. Quid rides ? Gn. Istuc quod dixti modo / Et illud de Rhodio dictum cum

    in mentem uenit (Eun. 497-98).

    Il sagit dun change entre le miles Thrason et son parasite Gnathon. Dequoi ris-tu ? De ce que tu viens de dire et de ce que tu as racont propos duRhodien et qui me revient lesprit.

    Istuc rfre une plaisanterie boiteuse que Thrason, comme le souligneladverbe modo, vient de faire, alors que Illud dictum renvoie une anecdotequil a raconte un peu plus haut dans la scne.

    - On relve enfin de nombreux couples hic / ille. Toutefois on ne peut pasrduire leur signification au contraste, /proximit/ pour hic, /loignement/ pourille, comme on la vu pour les vers 638 la page 19. Le contraste est souventdun autre ordre, comme on peut le constater travers lexemple suivant :

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 24

  • ILLE: rflexions sur ses emplois dans lEunuque... 25

    ISSN: 1578-7486 Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34

    Hic uero est qui si occeperit / Ludum iocumque dices fuisse illum alterum (Eun.200-01).

    Si celui-ci sy met ( frquenter des courtisanes) tu diras que lautrentait que jeu et plaisanterie constate Parmnon en opposant les deux frres,le jeune, Chrea (hic) et lan, Phdria (ille).

    Certes Chra est prsent sur scne tandis que son frre est parti la cam-pagne. Toutefois, comme on la dj signal, la prsence sur scne du rfrentnempche pas lemploi de ille, preuve que le signifi fondamental de ce d-monstratif nest pas lexpression de lloignement, que ce soit dans lespace oudans le temps. Dans cet exemple, lopposition hic / ille traduit seulement unediffrence, celle que lesclave tablit entre les deux frres et qui concerne leurstraits de caractre. De cette manire les propos sont clairs.

    Nombreux sont les exemples o ille fait pendant hic pour exprimerdautres effets de sens. Ainsi au vers 360, alors que le jeune Chra senquiertauprs de Parmnon de lidentit de la jeune fille quil a aperue en ville, le nomde Thas, qui vient de lacheter, est videmment voqu ; Chra, abandonnantpour un moment le fil de son expos, lche alors cette exclamation qui forme enquelque sorte une parenthse, mais qui en dit long sur ses proccupations :

    Numquamne etiam me illam uidisse ! Dire que je ne lai encore jamaisvue ! .

    Mais au vers suivant il revient celle quil dsire : At nihil ad nostramhanc ! Mais rien voir avec la ntre !

    Les deux femmes sont absentes ; ille signale seulement lintrusion dun nou-veau thme, alors que hic indique que lon revient au propos principal, la jeunefille dont Chra est fortement pris.

    Lorsquaux vers 657-58 les deux servantes de Thas sindignent du viol subipar la jeune fille et doutent quil ait pu tre commis par un eunuque, Pythiasconclut :

    Ego illum nescio qui fuerit, hoc quod fecit res ipsa indicat

    Moi jignore qui il tait ; ce quil a fait, la ralit le montre delle-mme.

    Ici encore lopposition hic/ ille tablit le contraste entre ce qui est annexe,lidentit du violeur, et ce qui est primordial, le viol lui-mme. La mme Pythiasavait dj marqu la mme diffrence en entrant en scne :

    Vbi ego illum scelerosum misera atque impium inueniam aut ubi quaeram ?Hocine tam audax facinus facere esse ausum ! (643-44). O vais-je le trouver, misre de moi, ce criminel, cet impie et o vais-je le

    chercher ? Avoir os commettre ce forfait si audacieux !

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 25

  • 26 Marie-Dominique Joffre

    Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34 ISSN: 1578-7486

    Le passage de hic ille peut tre, de manire plus gnrale, la marque dunediffrence que le locuteur tient signaler. Au vers 591 le contraste revt plusieursaspects. En effet Chra est en train de raconter son ami Antiphon comment ilest arriv ses fins et surtout pour quelles raisons il a os commettre lirrparableet dshonor la jeune Pamphila. Cest quil avait sous les yeux lexemple de Ju-piter dont les amours avec Dana dcoraient les murs de la chambre de la jeunefille. Pourquoi les mortels ne se permettraient-ils pas ce que Jupiter faisait cou-ramment ? Certes le passage de hoc illud souligne le passage du divin lhu-main, du virtuel de lart la ralit de la vie, mais aussi (et cela prouve encore unefois que ille nest pas par essence porteur dun signifi /loignement/) du passmythique au temps, certes dj rvolu, vcu par le locuteur. Surtout, et on re-viendra plus loin sur cette notion fondamentale nos yeux, ille est lindice dunerupture dans lnonciation elle-mme. On quitte en effet le rcit o le narrateur,protagoniste des vnements, est lobjet dune description travers laquelle,dans un discours rapport, on dcouvre ses penses et ses hsitations, pour reve-nir au niveau premier de lnonciation o le locuteur sexprime directement pourrapporter les faits et proclamer la ralisation de son exploit :

    Ego homunicio hoc non facerem ! Ego illud uero ita feci ac lubens !

    Moi, petit homme, je ne le ferais pas ! Mais je lai fait, comme lui et de boncur !

    Ces derniers exemples nous amnent penser que ille a pour rle fonda-mental de marquer un contraste avec le terme auquel il fait pendant. La signifi-cation plus prcise quil revt alors dpend de ce dernier et varie, comme on levoit, travers la diversit des exemples et des situations voques, en fonctiondu contexte. Les derniers emplois qui vont suivre confirment cette analyse etmontrent que ille peut crer un contraste avec toute notion, quelle que soit laforme linguistique quelle revt.

    - ille fait couple avec un relatif, ici un relatif de liaison ; lun comme lautresynthtise des ides dveloppes et dbattues auparavant par Chra, bien d-cid se jouer des courtisanes pour venger toute la gent masculine quelles ex-ploitent depuis si longtemps :

    Quod qui rescierint, culpent ; illud merito factum omnes putent (Eun. 387). Qui lapprendrait (que je mets en pril le patrimoine paternel en frquen-

    tant et payant des courtisanes) me condamnerait ; pour lautre chose (sintro-duire frauduleusement chez Thas et se servir seul) tout le monde estimeraitque cest bien fait

    On peut citer pour finir des cas o ille soppose un substantif :Hominem perditum / Miserumque ! Et illum sacrilegum ! (Eun. 418-19).

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 26

  • Le pitre et misrable individu ! Et lui, ce sacripant ! sexclame Parm-non qui, linsu du soldat et de son parasite flatteur, vient dassister leurconversation.

    Ille indique simplement que son rfrent est autre que celui du substantif ho-minem. Car si Parmnon tablit une diffrence entre les deux individus, il estdifficile de dire ici si le dictique permet lidentification sans quivoque de sonrfrent, ce qui permettrait de savoir, par dduction, qui est reprsent par lesubstantif homo, lui aussi au contenu notionnel bien vague. Rien nest sr dansces exclamations et les qualificatifs peuvent sappliquer aussi bien Thrasonqu Gnathon. Sans laide dun geste, ille nest daucun secours. Seule nestmarque que lexistence dun couple, constitu dlments qui dailleurs, com-me le prouve cet exemple, ne sont pas ncessairement trs diffrents ni mme, plus forte raison, antagonistes5.

    Neque praeterquam quas ipse amor molestias / Habet addas et illas quas habetrecte feras (Eun.77-8). Et najoute pas aux ennuis que lamour lui-mme comporte et, ceux quil

    comporte, supporte-les comme il convient.

    Dans ces conseils adresss Phdria par son esclave, le dictique est, commecela se doit, lanaphorique du substantif molestias. Mais dans cet exemple, com-me lindique la reprise de la mme relative, le contenu notionnel du substantif nechange pas. Toutefois ille produit un effet que ni lanaphorique is, ni aucunautre dictique ne pourrait produire ; il souligne dans cette sententia lopposition,non plus entre deux substantifs, mais entre les deux verbes addas et feras.

    5.2. Ille, marque dune rupture, dun changement

    Le dictique peut enfin tre utilis simplement pour signaler lapparitiondune nouvelle notion qui vient en quelque sorte rompre, renouveler le contenudu propos. Ille est notamment utilis pour indiquer larrive sur scne dun nou-veau personnage :

    Abi tu, cistellam, Pythias, domo effer cum monumento (Eun. 753-54).

    Va, Pythias, apporte de la maison la cassette avec les pices de recon-naissance ordonne Thas sa servante. Mais, voyant arriver le miles, Pithias

    ILLE: rflexions sur ses emplois dans lEunuque... 27

    ISSN: 1578-7486 Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34

    5 Cest, notre avis, de cette manire que sexplique le couple haec /illa dans lpigramme de Mar-tial cite p. 19. Illa marque un contraste avec haec. Haec, selon nous, ne signifie pas la proximit du r-frent et ne fournit aucune indication permettant de lidentifier. On est donc dans lincapacit de savoirqui, de Thas ou de Laecania, a de fausses dents. Tout laisse penser que Martial prend plaisir ne pasguider le lecteur vers la solution de lnigme.

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 27

  • 28 Marie-Dominique Joffre

    Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34 ISSN: 1578-7486

    ne rpond pas directement aux ordres, elle enchane : Viden tu illum, Thais Levois-tu, Thais ?

    Cest avec cette fonction quille est utilis au vers 670 (cf. p 20 Illud uide osut ). Phdria sort de la maison de Thas en tranant leunuque et, sadressantaux servantes, leur signale, par le truchement du dictique, quil amne sur lascne quelque chose de nouveau. Ce type demploi est frquent et lon citerapour finir :

    Sed estne ille noster Parmeno ? (Eun. 974).

    Mais nest-ce pas notre esclave Parmnon qui vient l ? sinterroge lesenex pour attirer lattention des spectateurs sur lentre en scne du personna-ge.

    La comdie offre trs souvent des passages o un personnage fait le rcitdvnements qui se sont produits hors de la scne. Ces moments sont de vri-tables numros de virtuose qui permettent lacteur concern de faire montre detoutes les facettes de son talent. Ce sont de vritables pices de thtre o le so-liste tient tous les rles, celui du narrateur et ceux des acteurs. Dans ce type depassage ille est notamment utilis pour dsigner celui qui va prendre la parole.Il est, dans ce cas, au nominatif et constitue lindice dun changement de pro-tagoniste que le comdien soulignait peut-tre en modifiant sa voix. On relveainsi un exemple dans le rcit que fait la servante Dorias du banquet plutt hou-leux qui se tient dans la maison du soldat Thrason. Ce dernier, jaloux deshommes qui entourent Thas, demande un jeune esclave de lui amener Pam-phila. Ce qui entrane immdiatement, de la part de Thas, un refus net, annon-c par illa :

    Illa : minime gentium ! Elle : pas le moins du monde ! (Eun. 625)

    Ailleurs, cest Gnathon, spectateur complaisant du miles Thrason, qui, an-ticipant sur la suite du rcit et impatient de connatre la rponse dun autre pro-tagoniste, pose la question :

    Papae ! / Iugularas hominem . Quid ille ? (Eun. 417).

    Oh ! Oh ! Il tait jugul lindividu. Et lui alors ? [que rpondit-il ?] de-mande Gnathon Thrason.

    Ce procd ne relve pas exclusivement de la langue parle et nest rservni la comdie ni mme au roman (cf. Apul., Met. 1,1,7,1 At ille , inquit, dans le rcit dAristomne qui met en scne un certain Socrate), mais il estaussi en usage dans la prose soutenue (cf. Cic., De orat. 1,45, pour marquer lechangement de locuteur, la rponse de Crassus Scaevola : Tum ille : non sum,inquit, nescius, Scaevola Alors lui : Je nignore pas, Scaevola, ) etdans les vers piques (Verg., Aen. 2,287 sq dans lpisode de apparition

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 28

  • ILLE: rflexions sur ses emplois dans lEunuque... 29

    ISSN: 1578-7486 Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34

    dHector Ene ; aprs les lamentations et les questions dEne, Hector sap-prte rpondre et le pote signale sa prise de parole douloureuse : Ille nihil, [] sed [ ] inquit).

    5.3. Synthse

    Il ressort de cet examen que le rle fondamental de ille est de marquer unerupture, lapparition ou la rapparition dune notion qui vient perturber lorga-nisation et le droulement de lnonc. Le co-nonciateur est alors invit re-chercher dans sa mmoire les concepts quil a enregistrs ou, dans le cas de lacataphore, se prparer mmoriser une nouvelle notion. Ce signifi fonda-mental est extrmement abstrait, il concerne lacte nonciatif lui-mme puisquilinforme sur la manire dont se construit le discours. Est-on encore en droitdtablir une distinction entre rfrence extra-textuelle et rfrence intra-tex-tuelle puisque ille caractrise avant tout la faon dont son rfrent sinsredans lnonc pour linflchir ? Problme que nous diffrons pour le moment,car il ne peut tre rsolu quune fois le signifi de chaque dictique tabli.

    De lide de rupture on passe ensuite aisment celle dopposition et lon avu que ille, loin de se limiter hic, faisait couple avec toute sorte de termes etde structures, commencer par les pronoms personnels. L se trouve peut-tre la gense de son passage, dans les langues romanes, au statut de pronompersonnel de la 3 personne.

    Dautre part, le contraste proximit / loignement nest toutefois pasla seule valeur smantique que revt la paire quil forme avec hic. On a vu quedautres effets de sens se dgageaient de cette opposition ; cest que la valeur deille dpend de celle du terme auquel il fait pendant et, comme nous lavons djdit, tant que nous naurons pas fait le mme travail pour hic, les conclusionsauxquelles nous aboutissons maintenant ne sont que provisoires et sujettes modifications.

    Enfin ce signifi minemment vague, abstrait, en quelque sorte passe-par-tout explique sans doute que ce dictique verra ses emplois se multiplier.Puisque ce qui est frquent devient banal, ille perdra son originalit et son in-tensit et, lpoque pr-romane, aprs stre vid de sa signification propre,devenu simple anaphorique, finira par supplanter is.

    La grande frquence de ille dans la comdie de Trence est due en premierlieu aux exigences du genre dramatique. Pour tre clair et instantanment com-prhensible, le dialogue du thtre est la recherche deffets et les diffrentsdictiques dont dispose le latin, introduisent de la varit dans les dialogues, encrant contraste et relief. Contrairement lanaphorique is, les trois dictiques,hic, iste, ille, phontiquement plus toffs, rendent peut-tre encore plus audiblele texte, tout en apportant les nuances qui leur sont propres. Pour sa part, ille, si-gnifiant dune rupture, accompagne, pour les rythmer, les mouvements de lapense et des rpliques des personnages. Car, conformes en cela au sermo

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 29

  • 30 Marie-Dominique Joffre

    Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34 ISSN: 1578-7486

    quoditianus, les dialogues de la comdie ne se droulent pas selon un schmaordonn et logique, mais sont souvent perturbs, contrecarrs par lintrusiondvnements ou dides inattendues voire saugrenues.

    6. ILLE DANS LA NARRATION HISTORIQUENous avons dj signal que, dans les passages purement narratifs du livre

    XLII de Tite-live, seules 4 occurrences de ille avaient t releves. Cest que lercit historique est ordonn et se veut clair ; il suit souvent lordre chronolo-gique des vnements, en faisant enchaner les causes et leurs effets. Peu de rup-tures, de reprises dlments voqus puis mis dans lombre. Lorsquil y ana-phore, le rfrent est exprim proximit du pronom, sans quapparaisse entreeux aucune une autre notion. Enfin, lorsque lanaphore est rpte, lanapho-rique remplit chaque fois la mme fonction grammaticale. Ce phnomnesobserve couramment pour la fonction sujet grammaticale, ceci prs que cesont pratiquement toujours les dsinences personnelles verbales de 3 personne,trs rarement is, qui oprent lanaphore. Si un nouveau concept, appel treexprim sous la forme dun sujet grammatical intervient, il est alors explicite-ment dsign. Quelques exemples suffiront :

    Et in Liguribus in agro Statellati pugnatum ad oppidum Carystum. Eo se ma-gnus exercitus Ligurum contulerat (Liu. 42,7,2). Chez les Ligures aussi, sur le territoire de Statellae, on livra bataille prs de la

    ville de Carystus. L staient rassembls une grande arme Ligure.

    Bien que les Ligures aient t mentionns dans la 1 phrase, ils sont nou-veau explicitement nomms dans la seconde. En revanche, tant que le sujetgrammatical reste le mme, les dsinences personnelles oprent lanaphore :

    Consul qua ferocia animi usus erat in Liguribus, eandem ad non parendum se-natui habuit. Legionibus extemplo Pisas in hibernacula missis, iratus patribus, in-festus praetori Romam redit ; senatuque extemplo [ ] uocato, multis uerbis in-uectus in praetorem qui [ ] (Liu. 42,9,1). Le consul, en refusant dobir au Snat, montra le mme emportement que

    celui dont il avait fait preuve lgard des Ligures. Aprs avoir aussitt envoyses lgions dans leurs quartiers dhiver Pise, il rentra Rome, irrit contre les s-nateurs et furieux contre le prteur. Aprs avoir convoqu le Snat, il pronona undiscours long et violent contre le prteur qui

    Cest ainsi que la narration historique est claire et linaire. On comprendpourquoi les occurrences de ille sont rares. Leur apparition correspond des im-pratifs nonciatifs et stylistiques, au souci de crer un contraste, de provoquer

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 30

  • ILLE: rflexions sur ses emplois dans lEunuque... 31

    ISSN: 1578-7486 Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34

    une rupture. Leur justification reste identique celle que lon a note danslEunuque.

    En 42,8,3, Tite-live dcrit la faon dont se solda la victoire des Romains surles Ligures. Il adopte pour commencer le point de vue des Ligures :

    Sperauerunt tamen atrocius quam superiores imperatores consulem inse saeuiturum. At ille arma omnibus ademit, oppidum diruit, ipsos bonaque eorumuendidit.

    Ils avaient espr pourtant que le consul ne les traiteraient pas plus durementque les prcdents gnraux. Mais celui-ci leur enleva tous leurs armes, dtrui-sit leur ville, les fit vendre, eux et leurs biens.

    Il y a bien une rupture entre les deux phrases, comme le prouve la prsencede at. Lhistorien change en effet de point de vue, quittant celui des Ligurespour revenir celui de Romains ; mais surtout le contraste est total entre les es-poirs des vaincus et lintransigeante cruaut du consul victorieux. Sur le plangrammatical, la 2 phrase prsente un nouveau sujet, le consul. Ce dernier estbien mentionn dans la phrase qui prcde, mais il nen est pas le sujet gram-matical. Ille qui le reprsente a pour fonction de marquer cette rupture gram-maticale. De plus, accol at, il souligne le trs fort antagonisme entre leconsul et les Ligures. La structure syntaxique se fait lcho du contenu notion-nel du passage.

    Il est tout fait remarquable que, sur les 4 occurrences de ille, deux se ren-contrent au tout dbut du chapitre VIII, un moment o Tite-Live dnonce lesagissements inhumains dun lu du peuple romain. Juste avant le passage quelon vient dexaminer, on note un autre emploi :

    Post hanc pugnam ex diuersa in unum collecti Ligures, cum maiorem multopartem ciuium amissam quam superesse cernerent nec enim plus decem miliahominum erant dediderunt sese, nihil quidem illi pacti ; sperauerunt enim (Liu. XLII,8,1).

    Aprs cette bataille, les Ligures qui staient enfuis dans toutes les directionsse regrouprent : voyant que, parmi leurs concitoyens, ceux qui taient tombstaient beaucoup plus nombreux que ceux qui survivaient ils ntaient pas plusde dix mille, en effet ils se rendirent, sans conclure, il est vrai, de convention ;ils avaient en effet espr

    Au premier abord, lemploi du dictique semble totalement superflu. Le par-ticipe pacti, accord au masculin pluriel renvoie sans aucune quivoque au su-jet grammatical Ligures. Illi appuy par quidem signale quil introduit une in-formation qui, conformment la chronologie des vnements, aurait due trementionne avant le verbe principal dediderunt sese : on ngocie dabord lesclauses dun contrat pour ensuite agir. Avant de se rendre, les Ligures auraient

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 31

  • 32 Marie-Dominique Joffre

    Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34 ISSN: 1578-7486

    pu en discuter les conditions. Le droulement du rcit est donc malmen par uneinformation qui semble rajoute au dernier moment, et laquelle le dictiqueapporte du relief. Et si Tite-live met tant de soin attirer lattention de ses lec-teurs sur la lgret des Ligures, cest que les consquences en seront, commeon la vu, dramatiques. Ici encore la dixis permet dagencer le propos enfonction dune intension bien calcule de lauteur.

    Plus loin, au chapitre 31, en emploi cataphorique, ille rpond un id lui aus-si cataphorique. Dans ce chapitre consacr au tirage au sort des provinces,Tite-Live numre avec force dtails et prcisions le nombre des soldats allous.La Macdoine jouit dun traitement particulier puisque son proconsul devra fai-re la guerre au roi Perse. Lhistorien mentionne deux faits remarquables, le pre-mier est signal par id :

    id praecipui prouinciae Macedoniae datum quod (42,31,2). on accorda une chose importante la Macdoine

    Le second est annonc par illud :Illud quoque praecipuum datum sorti Macedoniae ut centuriones militesque ue-

    teres scriberet, quos uellet consul (42,31,4). Une autre mesure importante fut accorde au consul qui obtiendrait la Ma-

    cdoine : il pourrait enrler des vtrans, centurions et soldats, autant quil vou-drait

    Le dictique soppose lanaphorique en prsentant comme diffrente, ori-ginale et nouvelle, par consquent en rupture avec ce qui prcde, la drogationsupplmentaire voque : il ne sagit plus du nombre des soldats enrler, maisde leur ge, puisquil sera possible dengager des vtrans.

    Enfin en 42,65,9, ille fait couple avec hic :Hoc illo bello nouum genus teli inuentum est Ce genre de projectile fut in-

    vent pendant cette guerre.

    Hoc genus souligne la cohsion textuelle puisque, conformment la ma-jorit de ses emplois, il rfre une notion mentionne trs peu de temps au-paravant dans la phrase prcdente, les cestrosphendones qui causent des ra-vages dans larme (Maxime cestrosphendonis uulnerabantur Ils taientsurtout blesss par les cestrophendones ). Pour prciser de quelle guerre il estquestion, le narrateur na pas vraiment le choix, puisque hic est dj utilis.Comme il sagit de la guerre qui est elle-mme le thme du rcit, elle est vi-demment saillante dans la mmoire des lecteurs. Mais dans la mesure o ellena pas fait lobjet dune mention explicite dans la phrase qui prcde, elle nepeut pas tre voque par is. Seul ille peut donc tre utilis pour renvoyer ce

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 32

  • ILLE: rflexions sur ses emplois dans lEunuque... 33

    ISSN: 1578-7486 Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34

    rfrent diffus, en indiquant quil rintroduit dans lnonc une notion mmo-rise depuis dj un certain temps. Telle est la seule raison de son emploi.Que le contenu de la phrase corresponde non plus un pisode historique,mais une remarque de Tite-Live destine ses lecteurs et clairement ancredans le nunc de lnonciation, na aucune incidence sur le choix du dictique.Lide dloignement dans le temps, qui semble se dgager du circonstant tem-porel illo bello, nest quune impression suggre par la nature et le contenummes de luvre de Tite-Live. La motivation de lemploi du dictique relvedimpratifs discursifs ; le dictique est la trace de la manire dont le locuteur achoisi de construire son rcit, choix opr au moment de llaboration du dis-cours, choix relevant de lacte nonciatif lui-mme. Cest en effet linnovationtechnique, aux consquences dramatique sur les ennemis, que lhistorien atenu, par le truchement de hic, mettre au premier plan de ses propos.

    Lexamen de ces rares exemples liviens montre que les emplois de illesexpliquent de la mme manire que ceux de lEunuque. On retrouve labase le signifi de rupture. Leur frquence dpend des exigences nonciatives etstylistiques propres chaque genre littraire.

    CONCLUSIONUne fois encore, on constate que le signifi dun dictique, en loccurrence

    ille, est minemment vague et surtout abstrait et quil livre une indication sur lamanire dont lnonc est labor et construit. La dixis permet au locuteur dejalonner son propos dindices pour guider lauditeur et lui permettre de suivre lefils de son discours. Car la participation du co-nonciateur est indispensable.Cest lui de retrouver, saillante dans sa mmoire, la notion insre danslnonc par le dictique.

    Plus fondamentalement encore, le choix dun dictique relve de la libertdu locuteur. Avec les diffrents dictiques, ce dernier dispose de moyens pourfaire varier la faon dont peut tre apprhende la notion mentionne ou vo-que. Car en disant le monde, le locuteur en propose une reprsentation abstraiteet totalement subjective, organise comme il lentend, en fonction des outilsdont il dispose. Les dictiques ne servent pas montrer le rel tel quil est ob-jectivement, mais tel quil est dit, transpos et organis dans la symbolique dulangage, selon le bon vouloir du sujet parlant.

    [email protected]

    INDICATIONS BIBLIOGRAPHIQUESBERTOCCHI, A., The role of antecedents of Latin anaphoras, Latin vulgaire- latin tar-

    dif II. Actes du II colloque international sur le latin vulgaire et tardif (Bologne, 29aot, - 2 septembre 1988), Niemeyer, Tubingen, 1989, pp. 441-461.

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 33

  • 34 Marie-Dominique Joffre

    Revista de Estudios Latinos (RELat) 9, 2009, 15-34 ISSN: 1578-7486

    Occurrences of is as a grammaticalization of the speaker , Papers of grammar IV,G. Calboli ed., CLUEB, Bologna, 1994, 1-27.

    BODELOT, C., Espaces fonctionnels de la subordination compltive en latin, B.E.C., Pee-ters, Louvain, 2000 plus particulirement p. 123 sq.

    BOLKESTEIN, A. M., Discourse organization and anaphora in Latin, Textual para-meters in older languages, S. C. Herring, L. Scholer ed., Benjamins, Amsterdam,Philadelphia, 2000, pp. 107-138-

    CALBOLI, G., Les pronoms dmonstratifs latins et la formation de larticle roman , Re-vue de philologie, 64, 1990, pp. 71-88.

    DIESSEL, H., Demonstratives. Form, Function and grammaticalization, Benjamins,Amsterdam, Philadelphia, 1997.

    JOFFRE, M. D., Sens et emploi de iste la fin de lpoque rpublicaine , R.E.L., 74,1997, pp. 145-154.

    Comment slabore le sens dune forme ? Lexemple de iste dans lAsinaria dePlaute , Mlanges offerts C. Moussy, Bibliothque dtudes classiques, Peeters,Louvain, 1998, pp. 131-137.

    (a) Iste, un moyen de capter lattention de lauditoire , Parole, Media, Pouvoirdans lOccident romain, Hommages offerts au professeur G. Achard, C.E.R.O.R.,Universit Jean-Moulin-Lyon III, De Boccard, Paris, 2007, pp. 11-22.

    (b) Ipse, anaphore et deixis , Ordre et cohrence en latin (communications pr-sentes au 13 colloque de linguistique latine), Bibliothque de la Facult de Phi-losophie et Lettres de lUniversit de Lige, fasc.CCXCIII, Droz, Genve, 2007, pp.97-110.

    A paratre : Cicron, Laelius, Pro Caelio : Iste, une autre approche de la deixis ,dans les Actes du XIV colloque international de linguistique latine, Erfurt, juillet2007.

    KLEIBER, G., Dictiques, embrayeurs, etc. , comment les dfinir ? , I.G.,3 0, 1986,pp. 3-22.

    Anaphore dixis : o en sommes-nous ?, I.G., 1991, pp. 51, 3-18. Anaphore et pronoms, Duculot, Louvain-la-Neuve, 1994, plus particulirement

    lintroduction et le chapitre : lanaphore, dun problme lautre , pp. 21-41.MOREL, M. A., Danon-Boileau L. dit., La deixis, (Colloque en Sorbonne, 8-9 juin

    1990), 1992, P.U.F., Paris. ORLANDINI, A., Pour une analyse des pronoms personnels latins : une analyse de is,

    I.G. 34, 1987, pp. 9-14 Hic et iste chez Plaute : une analyse smantico-pragmatique, Subordination and

    other topics in Latin (Actes du colloque international de linguistique latine, Bo-logne, 1985) G. Calboli ed., Benjamins, Amsterdam-Philadelphia, 1989, pp. 463-482.

    La naissance de larticle dans les langues romanes , Lalies, 11, Presses delE.N.S., Paris, 1990, pp. 15-27.

    Il riferimento del nome, Clueb, Bologne, 1995.PIERONI, S., Dimonstrativi e ego fissile , Morfosintassi latina . Punti di vista (N. La

    Fauci, S. Pieroni ed.), Edizioni ETS, Pise, 2007, pp. 9-25.PINKSTER, H., Lateinische syntax und semantik, Francke Verlag, Tbingen, 1987.SERBAT, G., Is, un super-nom , Opera disiecta, L. Nadjo dit., B.I.G., Peeters, Lou-

    vain, 2001, pp. 575-581 (cf. Latomus T. XLIII, fasc.3, 1984, pp. 554-559).

    03_Marie.qxp 18/5/10 08:24 P gina 34