hbo: la révolution du petit écran
DESCRIPTION
Etude des stratégies de communication et de programmation de la chaîne américaine câblée HBO autour de leurs séries télévisées, des années 90 à nos jours. Discours de la chaîne, étude de campagnes de promotion, d'audiences et de la structure générique et scénaristique de certaines séries.TRANSCRIPT
Université Paul Valéry MONTPELIER 3.Mémoire de Master 1 Art du spectacle et musique, option Cinéma et audiovisuel.
La révolution du petit écran.
EL BAIDAOUI Vally
Mémoire dirigé par Mme Delphine Robic-Diaz, Maître de conférences en Études Cinématographiques.
2011-2012.
Table des matières
Introduction............................................................................................................................3A. Identité de la chaîne.........................................................................................................10
a. Maintenir la distinction................................................................................................11b. L'auto-promotion et la communication........................................................................19c. Programmation et fidélisation des clients....................................................................31
B. Les séries.........................................................................................................................39a. Des séries différentes...................................................................................................39b. Des œuvres d'art...........................................................................................................45c. Entre convention et innovation....................................................................................53
Conclusion............................................................................................................................61Filmographie........................................................................................................................64
Filmographie principale : ................................................................................................64Filmographie secondaire :................................................................................................66
Films :.........................................................................................................................66Séries diffusées sur HBO :..........................................................................................67Séries diffusées sur les autres chaînes :......................................................................67Publicités :...................................................................................................................69
Bibliographie........................................................................................................................70Revue de presse....................................................................................................................73
Variety :.......................................................................................................................73The New York Times :................................................................................................74The Hollywood Reporter :..........................................................................................74Autres périodiques : ...................................................................................................75
Webographie.........................................................................................................................77Promotions et partenariats :.............................................................................................77Informations sur une œuvre :...........................................................................................77Critiques et presse en ligne :............................................................................................78Audiences : .....................................................................................................................78Vidéos :............................................................................................................................79Autres : ...........................................................................................................................79
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Introduction
Les séries télévisées sont ancrées depuis longtemps dans la culture populaire
américaine. Les télévisions se sont installées dans les foyers avec le déplacement des quartiers
résidentiels vers les banlieues dans les années 50. A cette époque, elles étaient destinées aux
ménagères et les chaînes provenaient de l'industrie radiophonique. NBC (National
Broadcasting Compagny), CBS (Columbia Broadcasting System) et ABC (American
Broadcasting Compagny) étaient les trois chaînes nationales gratuites du pays. Leur but
commun était d'installer la télévision dans la vie quotidienne des américains en créant des
routines, avec des horaires mémorables. Les sitcoms sont alors mises en scène, en direct des
scènes de Broadway, comme des représentations de la vie familiale. De ce fait,
traditionnellement les décors sont des salons dans lesquels se trouve un canapé, comme le
reflet de la vie des téléspectateurs. Cela a participé à normaliser le fait de s'asseoir sur son
fauteuil sans rien faire d'autre que de regarder l'écran. Les programmes héritent tous des
médias déjà existants, ainsi le journal télévisé n'est qu'une simple lecture de la presse écrite,
les débats télévisés proviennent de la radio, et les sitcoms héritent du théâtre. Lorsque le
tournage des séries émigra à Hollywood, elles sont devenues le premier programme purement
télévisuel, s'installant petit à petit dans les habitudes des familles1. D'après Robert J.
Thompson, le temps des pionniers a lieu de 1951 à 1960. A partir des années 60, et jusque
dans les années 80, la télévision était ensuite dominée par ce qu'on nomme les Big Three, les
trois networks nationaux et gratuits américains. Les séries se sont énormément développées à
partir des années 80, devenant un programme majeur de la télévision. Robert J. Thompson
qualifie cette période de second âge d'or des séries télévisées. A cette période, les chaînes
câblées se multiplient, détruisant petit à petit la dominance des Big Three, et permettant
notamment à la Fox de se développer et de devenir le quatrième network américain. Enfin, de
1992 à aujourd'hui, nous observons un accroissement des séries de la Fox, de HBO ou de
Showtime2. Ce qui nous intéresse dans ce classement est cette dernière étape, dans laquelle
Thompson voit une amplification de l'innovation et de la créativité3.
Nous nous intéresserons ici à la chaîne HBO. Appartenant à la multinationale Time
1 Jean-Pierre Esquenazi, « La Série, genre dominant de la télévision », Les Séries télévisées. L'Avenir du cinéma ?, p. 12-17.
2 Alain Carrazé, Les séries télé: L'histoire, les succès, les coulisses, p. 3. 3 Idem ibidem.
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Warner Inc.4, Home Box Office est une chaîne câblée qui ne semble financée que par les
abonnements mensuels de ses téléspectateurs. En se lançant dans la diffusion de séries
originales au début des années 90, elle reçut un vive succès des critiques de presse et du
public. Pour certains, ces créations ont révolutionné le petit écran5. Les chaînes du câbles,
dont HBO est la plus importante, vont réussir à concurrencer les grands networks qui
commencent à lasser leur public. L'audience de ceux-ci chute, passant de 94% en 1975 à 67%
en 1990, alors que HBO ne produisait pas encore de séries6. Pourtant à cette période, des
programmes très populaires voient le jour sur les chaînes gratuites, essuyant de très grands
succès. En 1996, un épisode de Friends7 a réuni un chiffre record de 52,9 millions de
téléspectateurs8, tandis que la série Seinfeld9 a rassemblé 76,3 millions de personnes lors de
son season final de 199810 et que E.R.11 en a amené 42,7 millions en 199712. De son côté, HBO
peine à réaliser une audience de 10 millions de téléspectateurs.
La situation observée ici nous amène à nous demander comment HBO a-t-elle réussi à
renouveler une forme sérielle déjà installée et mise en place par les networks depuis 40 ans.
De plus, comment concurrence-t-elle les Big Four malgré ses téléspectateurs a priori peu
nombreux ? Pour répondre à ces questions, nous étudierons d'abord l'image de la chaîne
véhiculée par son discours, et les moyens utilisés pour amener son public à regarder ses
programmes. Nous suivrons donc son fonctionnement en tant que chaîne et marque, et
étudierons ses manœuvres pour correspondre aux valeurs de ses clients afin de situer HBO
dans le champ culturel et industriel de l'audiovisuel. Nous analyserons également des études
de cas de campagnes de promotion et de méthodes de programmation. Dans un second temps,
nous nous intéresserons aux particularités de leurs séries télévisées. Nous en explorerons
l'innovation et l'avant-gardisme, avant d'essayer d'en comprendre l'engouement médiatique.
Enfin, nous étudierons sa position dans l'héritage des formes sérielles télévisuelles. Nous nous
appuierons sur des articles de presse de magazines spécialisés, sur des écrits généraux français
4 http://www.timewarner.com/our-content/home-box-office/ , 04 mai 2012. 5 Op. cit., Jean-Pierre Esquenazi, « Production des séries », Les Séries télévisées. L'Avenir du cinéma ?, p. 56-
57.6 Ibid, p. 55.7 David Crane, Martha Kauffman, Friends, 1994-2004, NBC.8 http://www.audiencesusa.com/article-26125110.html , 03 mai 2012. 9 Larry David, Jerry Seinfeld, Seinfeld, 1990-1998, NBC.10 Bill Carter, « Rating for Seinfeld finale grazed Super Bowl country », The New York Times, 16 mai 1998. 11 Michael Crichton, E.R. (Urgences), 1994-2009, NBC. 12 http://www.audiencesusa.com/article-29894518.html , 03 mai 2012.
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et des ouvrages plus spécialisés, majoritairement américains. Mais avant toute chose, il est
important de comprendre l'évolution historique de la chaîne.
En 1965, un certain Charles Dolan racheta une petite entreprise : la Sterling
Communications, dont une filiale, la Sterling Information Services, possédait les droits
exclusifs pour fournir Lower Manhattan en services du câble. La Time Inc. fit alors un
investissement à haut risque en achetant 20% de la société à 1 250 000 dollars13. Le câble était
relativement bon marché à développer, il ne coûtait que 10 000 dollars par mile, mais dans
une ville comme New York, le nombre de tunnels, métros et canalisations ont multiplié le prix
par plus de dix. Ainsi en 1967, la Sterling avait déjà dépensé 2 millions de dollars pour ne
fournir que 400 foyers et la société perdait beaucoup d'argent14. Dolan eu alors une idée pour
rentabiliser son achat : la Green Channel, une chaîne payante du câble spécialisée en sport et
cinéma. Les films seraient loués aux studios d'Hollywood et les événements sportifs seraient
diffusés en direct. Le seul problème était que la Sterling n'avait pas les moyens financiers de
développer cette idée. Il fallait donc trouver une autre entreprise du câble qui accepterait que
la Green Channel soit diffusée sur son système. Les dirigeants de la Time Inc. ne croyaient
que très peu en ce projet : pourquoi les gens paieraient-ils la télévision alors qu'ils l'ont déjà
gratuitement ? Peu crédibles et n'éveillant pas les soupçons des chaînes de télévision gratuite,
Dolan accompagné de Jerry Levine et de Tony Thompson développèrent la Green Channel,
qu'ils avaient maintenant nommé « provisoirement » Home Box Office15. Les trois visionnaires
s'associèrent à un opérateur du câble, par lequel passerait leur signal. Ils purent ainsi installer
leur matériel dans la ville de Wilkes-Barre, récemment inondée par l'ouragan Agnès, l'idée
étant de diffuser leurs programmes jusqu'à New York par transmetteur, puis par câble dans
toute la ville. Ainsi, le 8 novembre 197216, loin d'être prêts, et en l'absence de presse locale, la
petite chaîne de Home Box Office débuta ses programmes par le film Sometimes a Great
Notion17. Les quelques 4000 abonnées dans les trois villes de Pennsylvanie équipées, furent
très prometteurs pour la chaîne. Quatre décisions majeures peuvent expliquer leur succès :
premièrement, ils décidèrent que leur abonnement serait mensuel et non en « pay-per-view »,
le paiement à la séance, qui aurait donné beaucoup trop de travail administratif. 13 George Mair, « A cash Cow is born ». Inside HBO : The Billion Dollar War between HBO, Hollywood and
the home video revolution, p. 3-9. 14 Idem ibidem.15 Idem ibidem.16 Idem ibidem.17 Paul Newman, Sometimes a Great Notion (Le Clan des Irréductibles), 1970.
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Deuxièmement, HBO s'associa avec son fournisseur, qui recevait une partie de l'abonnement.
De cette manière, les commerciaux du fournisseurs en porte-à-porte pouvaient inciter les
abonnés à s'inscrire à HBO, ou leur envoyer de la publicité. Ils décidèrent ensuite de ne pas
envoyer leur programme par courrier, mais de les transmettre électroniquement. Cette
décision fut déterminante concernant l'identité de la chaîne en la plaçant au sommet des
avancées technologiques, telle qu'elle l'est toujours aujourd'hui. Enfin, quatrièmement, le
mélange des programmes entre sport et films fut très judicieux. Les studios ne voulant pas
céder les droits de leurs films à cette petite chaîne, programmer le sport a permis d'agrandir
l'offre de programme et donc la demande18.
Ce qu'il faut savoir à propos des chaînes nationales, est qu'elles ne diffusent qu'entre
80 et 100 films par an, ce qui équivaut à 200 heures de programme. Une chaîne câblée comme
HBO a 8760 heures de grille de programme à remplir. Il va de soit que chaque film doit donc
être rediffusé plusieurs fois par semaine. De plus, la petite notoriété de HBO ne lui permettait
pas d'avoir accès à de grands films et le plus souvent, les abonnés étaient très mécontents :
« Too often, the customer meant to sign up to see The Great Santini19, Terms of Endearment20,
and Raiders of The Lost Ark21 when, in fact, all that was shown were The Attack of the Killer
Tomatoes22 and The Amazing Colossal Man23. »24. HBO subissait une pression importante : la
Time Warner attendait 40 000 abonnés pour décembre 1974, les studios hollywoodiens
refusaient toujours de lui louer des films et la FCC (Federal Communications Commission)
lui interdisait de diffuser des films de moins de 10 ans d'ancienneté et des matchs de sports de
moins de 5 ans25. L'exclusivité était donc impossible à HBO. Mais cette année-là, la chaîne ne
diffusait ses programmes que sur un territoire très restreint du Nord-Est des États-Unis.
Pourtant 67 millions d'américains avaient la télévision à domicile et 10 millions d'entre eux
étaient équipés du câble. Cependant, parmi eux, seulement 190 000 payaient un abonnement. 18 George Mair, « A new Industrie in the shadow of the moutain », Inside HBO : the Billion Dollar War
Between HBO, Hollywood and the home video revolution, p. 10-13. 19 Lewis John Carlino, The Great Santini, 1979.20 James L. Brooks, Terms of Endearment, 1983.21 Steven Spielberg, Raiders of The Lost Ark, 1981.22 John DeBello,The Attack of the Killer Tomatoes, 1978. 23 Bert I. Gordon, The Amazing Colossal Man, 1957. 24 Op. cit., George Mair, « A new Industrie in the shadow of the moutain », Inside HBO : the Billion Dollar
War Between HBO, Hollywood and the home video revolution, p. 10-13. Nous traduisons : « Trop souvent, le client pensait signer pour voir The Great Santini, Tendres Passions et Les Aventuriers de l'arche perdue, alors qu'en fait, tout ce qui était diffusé était L'Attaque des tomates tueuses et Le Fantastique Homme colosse. ».
25 Ibid, p.18-21.
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HBO n'était donc qu'une aiguille dans une botte de foin mais cette aiguille était suffisamment
prometteuse pour commencer à effrayer ses adversaires26. Levin eu alors l'idée folle
d'envoyer un satellite pour que HBO soit transmise sur tout le territoire américain. Le 30
septembre 1975, à 21 heures, elle diffusa alors par satellite le combat de boxe de Muhammed
Ali contre Joe Frazier, en direct de Manille aux Philippines : The Trilla from Manilla. Aucune
autre chaîne ne pouvait diffuser une image aussi nette depuis l'autre bout du monde. Cette
avancée technologique attira 30 000 abonnements par mois en plus et à la fin de l'année, il y
avait 287 199 abonnés à la chaîne soit une croissance de 500% en une année. Ce que John
Levin réalisa grâce au satellite, projeta sa chaîne loin devant ses concurrents et transforma une
industrie entière, même si ce projet était très risqué pour une société qui ne réalisait pas
encore de profit27. En 1977, la chaîne réalisait enfin des bénéfices et la Time Inc. en était
ravie28. En 1980, HBO était diffusée dans les cinquante états américains et avait 4 millions de
souscriptions et en 1981, elle est devenue officiellement l'entreprise de télévision payante la
plus rentable de l'histoire des États-Unis29. Mais le taux de désabonnement était encore très
élevé, à cause du trop grand nombre de rediffusions. Un reporter du Daily News de New York,
Jack Curry, observa en 1981, que durant les six premiers mois de l'année, en combinant les
trois chaînes majeures du câble, HBO, Showtime et The Movie Channel (TMC), un
téléspectateur pouvait voir 44 fois Rocky II30, 53 fois Superman31 et 41 fois Rencontre du
Troisième Type32. Pour parer à cette rediffusion excessive, HBO tentait de participer de plus en
plus au financement de matchs de sport, ou à la production cinématographique33. A partir de
1982, HBO augmenta la création de ses programmes originaux à 18 ou 19 programmes par an
et en investit de plus en plus dans le sport, et plus particulièrement dans les combats de boxe.
De plus, elle était devenue le plus gros acheteur de films du pays, obligeant les studios à
stopper leur boycott34. Selon George Mair, c'est à partir de 1983 que la chaîne tenta de se
distinguer des autres chaînes câblées et de se diversifier35.
En 1980, la cassette vidéo fait son apparition dans les foyers américains, attisant la
26 Ibid, p.14-17.27 Ibid, p. 22-26.28 Ibid, p. 31-35.29 Ibid, p. 42-45.30 Sylvester Stallone, Rocky II, 1979.31 Richard Donner, Superman, 1978.32 Steven Spielberg, Close Encounters of the third kind, 1977.33 Op. cit., George Mair, « The Infant becomes a giant », Inside HBO : the Billion Dollar War Between HBO,
Hollywood and the home video revolution, p. 42-45.34 Ibid, p. 51-54.35 Ibid, p. 31-35.
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peur des studios hollywoodiens. Grâce à cette nouvelle technologie, tout le monde pouvait
enregistrer les films qui passaient à la télévision. Les audiences chutèrent mais également la
fréquentation des cinémas. Certains experts voyaient la solution dans le pay-per-view
(paiement à la séance) mais HBO demeurait sceptique et hésitait encore36. A cette époque,
40% des personnes équipées de câble n'étaient toujours pas abonnées à une chaîne payante, et
une maison sur quatre qui souhaitait s'abonner ne le pouvait pas, manque d'équipement. En
tout, il restait à HBO, 47 millions de souscripteurs potentiels. Selon elle, le client se moquait
de la technologie, ce qu'il souhaitait avant tout, c'était un bon divertissement à un prix
raisonnable. Elle développa alors la production de créations originales, que les spectateurs ne
pourraient voir que sur la chaîne, et l'investissement de films hollywoodiens, pour acquérir les
droits de diffusions exclusifs. Par exemple, la veille de Noël 1985, en exclusivité à 11 heures
et demie, le cadeau des abonnés était le film S.O.S. Fantômes37, seulement deux mois après sa
sortie en cassette. Le contrat avec la Columbia stipulait que la chaîne de devait pas annoncer
le titre du film en avance pour que les téléspectateurs ne l'enregistrent pas sur cassette. Ils ont
donc découvert de quel film il s'agissait au moment de sa diffusion38. En juin et juillet 1987, la
chaîne fit deux énormes contrats : un avec The Coca-Cola Compagny, et l'autre avec les
studios de la Paramount. Le premier leur apporta le tournage de quinze films, réalisés
spécialement pour le câble, et diffusés sur HBO, et le deuxième, les droits de 85 films sur cinq
ans, pour la somme de 500 millions de dollars. Ainsi en 1987, HBO est devenue le plus gros
investisseur de cinéma du monde39 et la société la plus rentable de la Time Inc.40 A cette
époque, le nombre d'abonnés à HBO et Cinemax était de 19 millions. Ce dernier contrat avec
la Paramount laisse HBO dans une situation de monopôle dans l'industrie de la télévision
payante41.
Dans les années 80, HBO se spécialisa également dans la production de stand-up
show. Elle lança la carrière de nombreux humoristes : Roseanne Barr a fait ses débuts sur
HBO, avant d'obtenir son prime-time sur ABC, tout comme les frères Wayans, qui ont créé In
Living Color42 pour FOX, et Jerry Seinfeld, auteur de la très célèbre sitcom Seinfeld. 36 Idem ibidem.37 Ivan Reitman, Ghost busters, 1984.38 Op. cit., George Mair, « The VCR Monster », Inside HBO : the Billion Dollar War Between HBO,
Hollywood and the home video revolution, p. 145-154.39 Ibid, p. 159-166.40 Ibid, p. 10-13. 41 Ibid, p. 159-166.42 Keenen Ivory Wayan, In Linving Color, 1990-1994, Fox.
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Cependant, toujours à cause de la VHS, les spectacles cessèrent petit à petit d'intéresser les
abonnés, qui pouvaient regarder leurs humoristes favoris sur cassettes. La solution pour la
chaîne était alors de créer un programme original, comique et amenant des téléspectateurs
devant leur poste de télévision : la sitcom. Leur première, Dream On43 reçut ainsi un très
grand succès qui encouragea HBO à plus de productions44.
Les séries permettent de rendre le public fidèle, curieux de découvrir le prochain
épisode. Mais pour HBO, ce produit lui permet avant tout de gagner de l'argent pour
rentabiliser son investissement. Comme le postule Jean-Pierre Esquenazi, « tout produit
culturel a à la fois une valeur marchande et une valeur culturelle ». Et c'est précisément
l'association de ces deux valeurs qui le définit tel qu'il est. La création d'une série est un long
processus qui nécessite des échanges et des associations entre différents partenaires. Jean-
Pierre Esquenazi explique, en reprenant l'idée de Fisk, qu'en premier lieu les producteurs du
programme le vendent à des distributeurs. La marchandise a une valeur uniquement
matérielle. Ce programme devient alors à son tour producteur : il produit un public qui est à
son tour vendu à des annonceurs. Pour les téléspectateurs, il n'a ici qu'une valeur culturelle
même s'ils n'en ignorent pas la valeur marchande45. Ce parcours producteur-distributeur-
annonceur n'existe pas dans la production d'une série HBO. En effet, la chaîne câblée est
productrice de ses propres programmes, elle les diffuse elle-même et puisqu'il n'y a pas de
publicités sur cette chaîne, elle ne les vend pas aux annonceurs. HBO est apparemment une
entreprise qui maîtrise tous les maillons du processus de création d'une série. C'est peut-être
une des raisons pour lesquelles c'est aujourd'hui le network le plus rentable des États-Unis46.
43 David Krane, Martha Kauffman, Dream On, 1990-1996, HBO. 44 Lisa Williamson, « Challenging sitcom conventions », It's not TV. Watching HBO in the post-television era,
p. 114.45 Op. cit., Jean-Pierre Esquenazi, « Production des séries », Les Séries télévisées. L'Avenir du cinéma ?, p. 48. 46 Op. cit., Tony Kelso, « And now no word from our sponsor », It's not TV. Watching HBO in the post-
television era, p. 49.
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A. Identité de la chaîne
HBO est une chaîne câblée payante : les abonnés payent entre 10 à 15 dollars par
mois47 pour visionner ses programmes alors que les autres chaînes sont gratuites. Il va de soit
que la chaîne doit se démener pour attirer un maximum de souscriptions. Pour cela, elle
surveille de très près son image de marque. Effectivement, HBO n'est pas une institution, mais
bien une marque, une entreprise dont le but premier est le profit. D'après François Jost, une
marque doit d'abord se constituer d'un nom, d'une charte graphique et d'un champ de
souveraineté qui s'ancrent dans le discours de la marque pour en construire son identité.48
Cette identité est ce qui va permettre aux téléspectateurs de s'identifier à la marque. Pour faire
passer son discours, une chaîne s'occupe d'abord de la programmation, mais par ses choix de
programmes, elle prend l'image d'une personne. Comme une vraie personne, à travers ses
actes et ses décisions, elle transmet ses valeurs. Cette transmission peut s'effectuer de trois
façons différentes : par son discours, par son auto-promotion et par la communication qu'elle
fait à travers les autres médias.49 François Jost réalise un schéma explicatif50 :
Dans ce chapitre, nous verrons premièrement comment se constitue l'ethos de HBO,
47 Cynthia Littleton, « A la Carte Blanche », Variety, 21-27 septembre 2009.48 François Jost, Qu'est-ce que la télévision ?, p. 32.49 Ibid, p. 32-34.50 Idem ibidem.
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Dessin 1: Schéma des différentes compositions de l'identité d'une chaîne.
Identité de la chaîne(la télévision)
La chaîne comme responsable de la programmation
La chaîne comme personne constituée par :
La communicationL'autopromotionL'ethos
pour ensuite analyser sa communication et son auto-promotion. Pour finir, nous nous
intéresserons à ses méthodes de programmation.
a. Maintenir la distinction
Aristote donne la définition de l'ethos comme étant « l'image que l'orateur donne de
lui-même à travers son discours »51. Guillaume Soulez, dans une conférence de l'université de
Paris II en 2001, tente d'appliquer cette notion aux images et aux signes médiatiques. En effet,
l'ethos d'une chaîne de télévision va permettre aux téléspectateurs d'avoir une idée quant à
l'identité de ses dirigeants. De plus, dans le cas de HBO par exemple, la chaîne cache ses
intentions commerciales : en manquant d'informations sur l'orateur, le téléspectateur ne peut
qu'avoir confiance en ce discours : « Le pouvoir persuasif de l’ethos s’appuie dès lors sur
l’idée qu’en situation publique, ce que montre l’orateur à travers son discours (et non pas le
discours qu’il tient sur lui-même) révèle d'avantage sa personnalité, son caractère moral,
voire ses intentions, que ce qu’il dit, pour reprendre une distinction bien connue. »52.
HBO doit constamment attirer les clients, et pour cela, elle doit répondre à la question
que se posent les téléspectateurs : pourquoi payent-ils ? Elle doit donc justifier en permanence
le prix de son abonnement par le contenu de ses programmes. Si le téléspectateur trouve la
même qualité de programme sur des chaînes gratuites, il se désabonne. La stratégie principale
de HBO est alors de se différencier des autres chaînes afin d'apporter au spectateur des
programmes qu'il ne peut obtenir nulle part ailleurs. La comparaison avec les networks est
alors permanente et nécessaire pour se démarquer. A la création de la chaîne, de 1972 à 1978,
le slogan était « Different and First »53. La volonté de faire la différence avec le reste de la
télévision était donc déjà très claire. A cette époque, grâce à ses programmes, qui se
composaient essentiellement de films et de sport, HBO apportait respectivement aux
téléspectateurs de la qualité (Different) et de l'exclusivité (First)54. En 1995, les séries font
51 Guillaume Soulez, « Ethos, énonciation média : sémiotique de l'ethos », Recherches en Communication n°18, p. 2.
52 Ibid, p. 3. 53 Nous traduisons : « Différent et premier ».54 Avi Santo, « Para-television and discourses of distinction ». It's not TV. Watching HBO in the post-television
era, p. 19-45.
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leur apparition petit à petit. Richard Ellenson inventa alors le slogan « It's not TV. It's
HBO. »55. Ce slogan choc, devenu très célèbre, synthétise en quelques mots le discours que
HBO souhaite communiquer au public : ce n'est pas de la télévision. Nous pouvons alors nous
demander ce qu'est donc HBO. Nous allons donc essayer de nous questionner sur les
différences entre cette chaîne câblée et les chaînes nationales afin de comprendre où se situe
HBO dans le domaine des médias américains. Ainsi, nous comprendrons et analyserons
l'image de marque que la chaîne souhaite faire passer à ses clients potentiels.
Premièrement, comme nous l'avons vu précédemment, d'un point de vue économique,
la différence majeure se fait remarquer par les téléspectateurs : la chaîne ne diffuse aucune
publicité. Selon elle, en plus d'apporter un certain confort au public, ce fonctionnement la
rend libre de ses programmes et l’empêche de se retrouver dans la même situation que
certains networks gratuits. Prenons un exemple : à la rentrée 2011 est sortie sur la Fox la série
Terra Nova56. Produite par Steven Spielberg à un coût exorbitant, 10 à 20 millions de dollars
pour les deux premiers épisodes, cette série, très attendue, faisait depuis longtemps languir les
téléspectateurs à l'aide d'une immense campagne de publicité dans tout le pays. Vue comme
un mélange de Jurassic Park57 et Lost58, elle se déroule au temps des dinosaures et les effets
spéciaux très alléchants justifiaient le coût de production. Ce fut une véritable déception
lorsqu'à la rentrée, les critiques et les téléspectateurs se sont aperçus qu'il s'agissait en réalité
d'une série familiale plate, banale et sans aucun mystère59 : « Tout cela est donc extrêmement
classique, un divertissement traditionnel et sans danger. »60. Ce non-danger de la part de la
Fox est dû, premièrement, au fait que c'est une chaîne traditionnelle, contenant des publicités,
où il est courant de ne pas prendre de risque et deuxièmement, au coût de production, presque
10 fois supérieur à la normale. Ce coût est très paradoxalement piégeur puisque, ce budget
attire les téléspectateurs, impressionnés et en attente de grand spectacle et de sensations fortes.
Cependant, en prenant de tels risques financiers, la chaîne se doit de rester le plus classique
possible sur son scénario et sa forme stylistique afin d'attirer un public familial et de pouvoir
rentabiliser ce programme grâce aux publicités. Cet exemple représente exactement ce que
HBO refuse de produire, et le revendique. Cependant, les revenus de la chaîne ne proviennent 55 Idem ibidem. Nous traduisons : « Ce n'est pas de la télé, c'est HBO. »56 Craig Silverstein, Kelly Marcel, Terra Nova, 2011, Fox.57 Steven Spielberg, Jurassic Park, 1993.58 J.J. Abrams, Jeffrey Lieber, Damon Lindelof, Lost, 2004-2010.59 http://fr.tv.yahoo.com/blogs/series/terra-nova-un-faux-pas-pour-spielberg-153852832.html , 03 février 2012.60 Idem ibidem.
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pas de la publicité mais des abonnements61. Nous pouvons en déduire que le système reste
fondamentalement le même : plus il y a de souscripteurs, plus les programmes seront
rentabilisés et plus le budget des séries de HBO sera élevé. Elle doit donc attirer un maximum
de téléspectateurs, et pour se démarquer, la chaîne mise sur les comparaisons permanentes
avec les autres chaînes. Pour commencer, elle revendique le fait d'être une commercial-free
channel62 et critique sans complexe les chaînes à publicité qu'elle considère comme non libres
de leurs choix et favorisant une télévision de masse plutôt que de qualité. En effet, en utilisant
le slogan « it's not tv », HBO entretient sa distinction et élève ses programmes au rang
d'oeuvre63. Comme le fait remarquer le journaliste Verne Gray, « This single statement
contains a critique of the entire system of American commercial television. »64. La première
stratégie commerciale, et assez agressive de la chaîne est donc de produire un programme de
qualité, meilleur et « de caractère ». Chris Albrecht, directeur des programmes de la chaîne,
qualifie leurs séries de « creator-dependant »65. Selon eux, la différence réside en cela : la
chaîne propose des programmes culturels. En regardant HBO, le téléspectateur se cultive, et
n'est donc plus sujet à la consommation de masse des autres chaînes. Il en a donc pour son
argent et ne sert plus d'unique « temps d'écoute » pour les annonceurs publicitaires66. HBO est
seul maître de ses programmes et ne se met pas au service des publicitaires. Chez HBO,
« populaire » n'est pas synonyme de « bon ». Leurs programmes sont tous originaux et ils les
mettent en opposition directe avec la situation dans laquelle se trouvent les networks67.
En dénonçant ce système, les dirigeants de la chaîne établissent une critique claire du
capitalisme résidant dans le domaine des médias américains. La prise d'opinion politique est
d'ailleurs un des fondements de l'identité de la chaîne. Déjà, dans les années 80, une série de
documentaires controverses ont fait polémique auprès du FCC : la Federal Communications
Commission. Un procès a eu lieu entre HBO et la FCC : la Cour d'Appel a déclaré que les
chaînes câblées, au même titre que les journaux, pouvaient bénéficier du Premier
61 John Carman, « Why HBO is king of the box. Soprano network isn't hooked on ratings, seeks challenging shows », The San Francisco Chronicle, 3 avril 2001.
62 Nous traduisons : chaîne sans publicité.63 François Jost, De quoi les séries américaines sont-elles le symptôme ?, p. 1.64 Verne Gray, « What's make HBO tick ? », Cable World, 4 novembre 2002. Nous traduisons : « Ce simple
communiqué contient une critique de tout le système de la télévision commerciale américaine ».65 Op.cit., John Carman, « Why HBO is King of the Box. Soprano Network isn't Hooked on Ratings, Seeks
Challenging Shows », San Francisco Chronicle, 3 avril 2001. Nous traduisons : « Dépendant des créateurs ».66 Avi Santo, « Para-television and discourses of distinction », It's not TV. Watching HBO in the post-television
era, p. 25.67 Idem Ibidem.
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Amendement, et ainsi faire appel au droit à la liberté de parole et de presse68. Cette étape
décisive dans l'histoire de HBO, définit le contenu des programmes créés. A partir de cette
date, dans chacun de ses programmes, elle va s'efforcer d'incorporer de la nudité, de la
violence, de la vulgarité ou des opinions politiques. Ce parti-pris va attirer tous les spectateurs
en quête de nouveauté, ceux qui ont l'impression de « se faire avoir » par les networks
gratuits, ou encore, ceux qui partagent les mêmes opinions que la chaîne. HBO s'est alors
fortement démarquée des autres réseaux en devenant une chaîne inédite, insoumise et rebelle :
une autre sorte de média, classée par la justice dans la catégorie des « câblées ». Ce n'est donc
pas une chaîne de télévision, dans le sens classique et juridique du terme. Suite au slogan,
« It's not TV. It's HBO. », Avi Santo définit le contenu de la chaîne : « The end result for HBO
is neither television in the traditional network era sens of the word […] nor not television,
but, as I will demonstrate, the production of para-television, which purposely relies in
mimicking and tweacking existing and recognizable TV forms »69. En insérant dans leur
discours leur croyance en leur différence et en leur qualité, ils amènent les abonnés à croire en
ce discours. HBO vend ainsi, aux téléspectateurs, un capital culturel qui les élève au dessus de
la « populace » qui ne fait que consommer la télévision. C'est la comparaison du fast-food
face au restaurant étoilé. La distinction par la qualité et l'exclusivité implique deux
conséquences : la qualité par rapport aux autres chaînes, permet le maintien des abonnements
tout au long de l'année et l'exclusivité permet d'attirer un maximum de souscriptions. Afin de
maintenir cette qualité tout en affirmant ses opinions, HBO a besoin de créer des programmes
originaux et ne peut se contenter de racheter des programmes aux autres chaînes. Nous
remarquons que l'image que HBO souhaite entretenir auprès de son audience est celle d'un
média différent, une télévision améliorée, apportant un programme culturel, original et de
qualité qu'aucune autre chaîne ne pourra leur donner. Pour maintenir cette image, la série
télévisée s'est avérée être le format télévisuel parfait pour exprimer cette originalité tout en
fidélisant le public à la chaîne. Chaque nouvelle série porte d'ailleurs le nom de HBO's
original serie70. Avec actuellement 41 séries en programmation71 sur ses chaînes, ce format est
maintenant non distinguable de la marque. Nous pouvons lire sur le site de la chaîne : « It's 68 Idem ibidem.69 Op. cit., Avi Santo, « Para-television and discourses of distinction », It's not TV. Watching HBO in the post-
television era, p. 23. Nous traduisons : « Le résultat final pour HBO n'est ni de la télévision dans le sens traditionnel du mot, ni de la non-télévision, mais, comme je vais le démontrer, de la production de para-télévision, qui repose volontairement sur une imitation et une amélioration des formes existantes et reconnaissables de la télévision. ».
70 Idem ibidem. Nous traduisons : « Série Originale de HBO ». 71 http://www.hbo.com/ , 07 février 2012.
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HBO. The most original and innovative shows are on HBO. It's unparalleled range of quality
of programming is why year after year, HBO continues to win more Emmy-awards than any
other network. »72. La comparaison avec les autres chaînes continue encore, comme pour
assurer sa légitimité. Cette stratégie attire, certes, des abonnements mais ne correspond qu'à
une niche spécifique de téléspectateurs : les milieux sociaux aisés, plutôt démocrates, avec un
fort taux de 18-40 ans73. Le reste de la population n'est donc pas susceptible de souscrire un
abonnement à HBO et les possibilités commerciales sont donc restreintes. Afin de remédier à
ce problème, dès le début des années 80, HBO crée la chaîne Cinemax qui diffuse des films
24 heures sur 24, du cinéma classique et des succès du box-office74. Cette chaîne répond
directement à la concurrence de la chaîne Showtime, elle aussi chaîne câblée, devenue
nationale depuis 197875. A partir de cette date, la marque ajouta bien d'autres chaînes à son
panel : 15 en plus, aux États-Unis et elle diffuse ses programmes dans 59 pays à travers le
monde en Amérique du Sud, en Asie, et en Europe76. En 1990, HBO2 est lancée, elle rediffuse
tous les programmes de HBO, et Cinemax 2, maintenant appelé MoreMax. HBO3 est lancée
en 1995 et sera renommée HBO Signature trois ans plus tard. De nouvelles niches sont
ensuite appréhendées : HBO Family, en 1996, qui diffuse des programmes familiaux, pour
enfants, loin de la violence ou de la vulgarité de la marque d'origine77. HBO Zone, en 1999, ne
diffuse que des films, 24 heures sur 24, destinés aux 18-35 ans (teen movies, films du box-
office, d'action et pornographiques la nuit)78. Cette chaîne est accompagnée la même année de
HBO Comedy, au programme plus léger et moins culturel que HBO, mais tout aussi réputé.
En 1998, HBO En Español diffuse, comme son nom l'indique, tous ses programmes en
espagnol79. Cette chaîne est suivie 2 ans plus tard par HBO Latino, par laquelle de nombreux
programmes originaux sont créés, comme la série de documentaires Celebrity Habla80 ou
72 http://www.hbo.com/#/explore-hbo/tv.html , 07 février 2012. Nous traduisons : « C'est HBO. Les programmes les plus innovants et originaux sont sur HBO. Son choix sans précédent et la qualité de ses programmes est la raison pour laquelle, année après année, HBO continue de gagner plus d'Emmy Awards qu'aucune autre chaîne. »,
73 Op. cit., Jean-Pierre Esquenazi, Les Séries télévisées : l'avenir du cinéma ?, p. 34.74 Op. cit., Marc Leverette, Brian L. Ott, Cara Louise Buckley, « Introduction », It's not TV. Watching HBO in
the post-television era, p. 5. 75 Op. cit., George Mair, « Going up on the bird », Inside HBO : The Billion Dollar War between HBO,
Hollywood and the home video revolution, p. 22-26.76 http://www.timewarner.com/our-content/home-box-office/ , 7 février 2012. 77 Op. cit., Marc Leverette, Brian L. Ott, Cara Louise Buckley, « Introduction », It's not TV. Watching HBO in
the post-television era, p. 5. 78 http://www.reelz.com/channel/18431/hbo-zone/ , 7 février 2012.79 Op. cit., Marc Leverette, Brian L. Ott, Cara Louise Buckley, « Introduction », It's not TV. Watching HBO in
the post-television era, p. 5. 80 Alberto Ferreras, Celebrity Habla, 2009, HBO.
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d'animation, El Perro y el Gato81. Ces deux dernières chaînes sont clairement dédiée aux 50,5
millions d'américains d'origines hispaniques82 et aux 28 millions d'hispanophones sur le
territoire américain83. Toutes ces nouvelles chaînes du bouquet HBO sont toutes destinées à
une niche spécifique qui ne correspondait pas au public de la chaîne. De plus, Cinemax a elle
aussi continué son ascension en ajoutant, dès 1996, Cinemax 3, renommée ActionMax en
1998 ; suivie de ThrillerMax la même année, puis Wmax, @Max, 5StarsMax et OuterMax,
toutes lancées en 200184. Toutes ses chaînes ne diffusent que des films. En agrandissant ce
qu'ils appellent le HBOMAX Pak85, ils sont certains de toucher tous les types de cinéphiles,
d'autant plus qu'aux États-Unis, les films ne sont plus diffusés depuis bien longtemps sur les
ondes traditionnelles, faute de rentabilité. En créant cet assortiment de chaînes, HBO est
devenue en 1990, la première chaîne à offrir un service multiple86 et réussit le coup de pouvoir
satisfaire tous les publics. La marque a donc élaboré un réseau parallèle, prêt à court-circuiter
et concurrencer le réseau ordinaire de télévision. On y trouve des chaînes de qualité,
contenant du sport en exclusivité, du cinéma pour tous les goût, des téléfilms, documentaires
et séries originaux, le tout dans deux langues. HBO est passé du stade de petite chaîne câblée
à celui de nouvel empire médiatique : une para-télévision.
La différence entre HBO et la télévision gratuite est maintenant claire. Cependant,
dans toute l'histoire de la chaîne, HBO n'a jamais cessé de s'associer ou collaborer avec
d'autres réseaux. Elle a même fourni certaines chaînes en programme. Cette hostilité envers
les réseaux n'est donc qu'une image marketing, une sorte de storytelling puisque concernant
les affaires, ils s'avèrent être indispensables à la croissance de l'entreprise. Nous remarquons
que le tabou de la chaîne télévisée comme étant une industrie n'est toujours pas levé. Une
chaîne ne peut être considérée comme une entreprise dont le but premier est le profit :
l'industrie et la culture sont encore incompatibles. HBO prend alors la décision de se ranger
du coté de la culture en apparence, tout en entretenant une industrie florissante en coulisse.
Cette politique culturelle n'est qu'une manière paradoxale d'instaurer une image de marque à
HBO, et de crédibiliser ses programmes et surtout sa présence en tant que chaîne payante face 81 Chrissie Hines, El Perro y el Gato, 2004, HBO. Op. cit., Marc Leverette, Brian L. Ott, Cara Louise Buckley,
« Introduction », It's not TV. Watching HBO in the post-television era, p. 5. 82 http://pewresearch.org/pubs/1940/hispanic-united-states-population-growth-2010-census , 7 février 2012.83 http://www.multilingualarchive.com/ma/enwiki/fr/Hispanophone#cite_note-mla-1 , 7 février 2012.84 Op. cit., Marc Leverette, Brian L. Ott, Cara Louise Buckley, « Introduction », It's not TV. Watching HBO in
the post-television era, p. 5.85 Idem Ibidem.86 Idem Ibidem.
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à toutes ses chaînes gratuites. D'après Melissa Davis, « l'identité de marque est la colonne
vertébrale d'une entreprise et contribue à définir son positionnement sur son marché (et sa
position vis-à-vis des concurrents) […] En résumé, la marque est la synthèse des valeurs
véhiculées par une entreprise ; elle représente ses aspiration et ses objectifs. »87. La chaîne
doit donc correspondre à son public : puisqu'elle aspire à une niche spécifique de personnes
cultivées, au milieu aisé, son identité sera donc proche de la culture.
Quand HBO prétend ne pas contenir de publicité, elle insinue que ses programmes ne
sont pas coupés par des spots publicitaires de 30 secondes. Cependant, beaucoup de séries de
la chaîne contiennent du placement de produit, situation paradoxale puisque ce sont ces
mêmes séries qui transmettent une forte critique de la consommation et du capitalisme. Ainsi,
lorsque Zack Enterlin, vice-président de la chaîne et responsable de la campagne publicitaire
pour True Blood88, annonce au magazine PR News « Le cœur de cible est un public de
spectateurs avertis, qui n'apprécieraient pas d'être pris pour des idiots par les annonceurs, ni
d'être manipulés par de grosses ficelles », cela peut paraître ironique89. Dans The Sopranos90,
nous entendons parler du jus d'orange Tropicana ou de la nouvelle Maserati du personnage de
Johnny Sack, qui précise peu subtilement qu'elle peut rouler à 176 miles par heures et que sa
couleur s'appelle « gris de Guinée »91. Mais c'est dans la série Sex and the city92 que le
placement de produit est le plus flagrant : Prada, Dolce & Gabbana, Manolo Blahnik, Dior,
Apple... Chaque épisode mentionne une marque. Pour les publicitaires, les emplacements
dans les séries HBO sont idéaux. L'un d'entre eux déclara en 2002, à propos du placement de
produit dans la série The Sopranos : « Il n'y a pas de message publicitaire comparable. Les
gens ne cessent de revoir les épisodes à la télévision. Ensuite, ils les achètent en DVD, et ils
les regardent encore. »93. Surtout que ce programme était suivi de très prés par 11 millions
d'américains94. Et comme le soulignent Dominique Pinsolle et Arnaud Rindel, le
téléchargement illégal permet aux marques d'être vues dans le monde entier gratuitement95.
87 Melissa Davis, Les Fondamentaux du branding, p. 12.88 Alan Ball, True Blood, 2008-En production, HBO. 89 http://www.monde-diplomatique.fr/2011/06/PINSOLLE/20687#nb7 , 30 avril 201290 David Chase, The Sopranos (Les Soprano), 1999-2007, HBO. 91 Op. cit., Tony Kelso, « And now no word from our sponsor », It's not TV. Watching HBO in the post-
television era, p. 52-53.92 Darren Satr, Sex and the city, 1998-2004, HBO. 93 Op. cit., Tony Kelso, « And now no word from our sponsor », It's not TV. Watching HBO in the post-television
era, p. 52-53.94 Idem ibidem.95 Idem ibidem.
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HBO souhaite rester très discrète sur les contrats avec les publicitaires. Elle ne souhaite
également aucune transaction directe, préférant abaisser les coûts de ses productions grâce
aux marques. Nous ne disposons d'aucune information quant à la nature juridique de ses
paiements mais nous pouvons supposer qu'il s'agisse de coproductions, ou de dons de matériel
ou de services. Sans transaction financière, il ne s'agit pas légalement de placement de
produit. La chaîne peut donc continuer à prétendre qu'il n'y a pas de publicité sur HBO et que
les marques ne sont là que pour renforcer le réalisme de leurs séries96.
En tant que chaîne sans spot publicitaire, la programmation de HBO ne contient aucun
talk-show de prime-time dans lequel des invités parlent de leurs derniers travaux. Afin de
contrer ce manque, la chaîne invite alors les célébrités à participer à leurs séries97. Il s'agit
d'une stratégie « gagnant-gagnant ». En effet, HBO bénéficie du prestige de ses invités, ce qui
rend l'épisode exceptionnel et crée le buzz. Les téléspectateurs seront alors plus nombreux,
ravis de voir l'événement. Les guest stars jouent le plus souvent leur propre rôle, pour
augmenter l'illusion que le téléspectateur regarde un talk-show. Pour les acteurs, une telle
apparition leur permet de promouvoir leur prochain film, album, livre ou autre. D'après Lisa
Williamson, « actors are offered a certain amount of credibility by appearing on such shows
as it demonstrates that they willing to stand outside the confines of network programming and
challenge conventions. »98. La série Entourage99 est celle qui réunit le plus grand nombre
d'invités prestigieux : Jessica Alba, Matt Damon, James Cameron, Martin Scorsese, Peter
Jackson, Gus Van Sant, Kanye West, Val Kilmer. L'épisode le plus impressionnant est le
dernier de la saison 7 dans lequel 14 stars ont été invitées100. Parmi elles, Eminem qui sortait
son album Recovery101 la même année et Christina Aguilera, pour son album Bionic102 et le
film Burlesque103.
96 http://feuilletons.blogs.liberation.fr/series/placement-produit/ , 30 avril 2012. 97 Op. cit., Lisa Williamson, « Challenging sitcom conventions », It's not TV. Watching HBO in the post-
television era, p. 119.98 Idem ibidem. Nous traduisons : « les acteurs bénéficient d'une certaine crédibilité en faisant des apparences
dans de telles séries, comme si cela accréditait leur volonté à rester en dehors des programmes de networks et à défier les conventions. ».
99 Doug Ellin, Entourage, 2004-211, HBO. 100 http://en.wikipedia.org/wiki/List_of_celebrities_appearing_on_Entourage , 30 avril 2012. 101 http://www.amazon.fr/s/ref=nb_sb_ss_i_0_10?__mk_fr_FR=%C5M%C5Z%D5%D1&url=search-alias
%3Dpopular&field-keywords=recovery+eminem&x=0&y=0&sprefix=recovery+e%2Cpopular%2C221, 30 avril 2012.
102 http://www.christinaaguilera.com/us/music , 30 avril 2012. 103 Steve Antin, Burlesque, 2010.
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Pour conclure, HBO s'est affirmée en tant que para-télévision, différente et libre de ses
choix. L'austérité, apparente seulement, envers les autres networks permet de masquer son
fonctionnement économique. En trouvant sa place dans l'industrie, elle est devenue un
important fournisseur de programmes. Et c'est naturellement qu'elle décide, à partir de 1995,
de développer ses créations et de faire des séries télévisées, une des raisons pour laquelle les
téléspectateurs s'abonnent. Nous allons maintenant nous intéresser à la communication et
l'auto-promotion que HBO développe afin d'attirer le plus grand nombre de téléspectateurs.
b. L'auto-promotion et la communication
Pour une chaîne de télévision, la série est le moyen idéal pour fidéliser son public.
Contrairement à un film ou à une émission, elle propose un rendez-vous hebdomadaire, voire
quotidien, que certains téléspectateurs ne rateraient pour rien au monde. Ils y retrouvent
toujours leurs personnages préférés, leur générique, les décors, et les péripéties dont le
suspense d'une semaine était insoutenable. Mais comme pour n'importe quelle chaîne, gratuite
ou payante, la longévité des séries ne dépend que du public. En effet, il en est le seul
décisionnaire. Si le public aime et regarde le programme, il reste à l'antenne, mais si
l'audience n'est pas présente, celui-ci est immédiatement annulé. HBO n'échappe donc pas à la
règle et tente, par tous les moyens possibles, d'attirer l’intérêt des téléspectateurs. Cependant,
pour elle, l’enjeu est certainement plus grand que pour les réseaux nationaux car elle ne vit
que des abonnements. Si un client, mécontent et déçu du programme, se désabonne, il n'est
plus susceptible de regarder à nouveau la chaîne. HBO ne pourra donc pas se « racheter », en
lui proposant une nouvelle série, par exemple, car le client est définitivement parti. Les
directeurs des programmes le savent pertinemment, et gardent en tête deux objectifs
prioritaires : le premier est d'attirer un maximum d'adhésion à la chaîne, et le second est, bien
sûr, de garder ces clients en les fidélisant et en leur proposant un service de qualité.
Tout d'abord, pour obtenir un maximum d'abonnement, Home Box Office fait
campagne. Elle diffuse des publicités sur toutes les chaînes gratuites des networks. Ces
publicités sont, à l'image de la marque : osées, drôles et impertinentes. Plusieurs éléments sont
promus : la qualité de la programmation en générale, la sortie en DVD des dernières saisons,
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ou encore, la qualité des séries proposées. En 2009, une publicité montre un terroriste qui se
prépare à faire un attentat-suicide. Il place la bombe sous son manteau, et au moment de
partir, il tombe sur un sketch de Chris Rock sur HBO. Il rit tellement qu'il en oublie de partir
et il explose chez lui104. Ce genre d'humour, sur des sujets à l'origine très graves, marque
l'identité provocatrice de la chaîne. Bien entendu, dans une Amérique post-11 septembre, les
amateurs de ce spot correspondent parfaitement aux clients potentiels de la chaîne : des
classes aisées, cultivées, démocrates, ouverts d'esprit et ayant beaucoup d'humour. La
publicité Yacht105, en 2011, propose une parodie des séries policières (une autre publicité
reprendra aussi la série hospitalière), en montrant deux policiers arrêtant un bandit sur son
yacht. Les acteurs prononcent leurs dialogues en discours indirect avec les didascalies, ce qui
peut donner des dialogues tels que ceux-ci : le bandit tire sur un policier d'arrière-plan et dit :
«- And I shoot that guy, but it would be insignificant to the spotline because he doesn't even
have a name. Un agent du FBI entre alors :
« - Here is the part where we fight over juridiction. » A son tour, la policière dit :
« - And I get mad »
A la fin de ce spot, on peut lire à l'écran : « Watch Something you haven't seen a million times
before »106. L'impertinence de la marque face aux séries des networks est d'autant plus osée
que la publicité est diffusée sur ces chaînes-là. HBO veut bien sûr attirer des clients en jouant
sur l'argument que leurs séries sont différentes et de qualité. Finalement, elle tente de faire
passer le discours de HBO aux téléspectateurs qui n'y ont pas accès. Une autre publicité107, en
2007, montre des personnes très tristes, pleurant dans la rue. A la fin du spot, nous lisons :
« It's okay. The Sopranos lives on DVD »108. Ces personnes étaient donc tristes que la saison
de The Sopranos soit terminée. En 2002, alors que le DVD s'installait dans les foyers,
remplaçant les cassettes VHS, la troisième saison de The Sopranos sortait en coffret, devenant
numéro un des ventes sur Amazon.com et Buy.com, devant les derniers blockbusters. Ce
classement, très étonnant à l'époque pour un DVD de télévision, attisa la curiosité du
département des ventes de vidéo de HBO, qui avait remarqué que la majorité des acheteurs
était âgée entre 25 et 40 ans, et avaient un capital culturel important. Ils correspondaient donc
au profil type du téléspectateur de HBO. De plus, 50% d'entre eux n'avait jamais vu la série, et 104 VEM, Terrorist, 2009, http://www.culturepub.fr/videos/hbo-chaine-de-television-terrorist-vost, 7 mars 2012. 105 Tom Kuntz, Yacht, 2011, http://www.culturepub.fr/videos/hbo-go-yacht, 7 mars 2012. 106 Nous traduisons : « Regardez quelque chose que vous n'avez pas déjà vu un million de fois ».107 Simon McQuoid, The Sopranos Lives, 2007, http://www.culturepub.fr/videos/hbo-the-sopranos-the-sopranos-
lives-on , 7 mars 2012. 108 Nous traduisons : « Ne vous inquiétez pas, les Sopranos sortent en DVD. ».
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étaient juste curieux, bien que le prix du coffret soit assez élevé : 99,98$109. Les responsables
des ventes de HBO ont alors déposé un bulletin d'adhésion pour la chaîne dans chaque boite,
permettant d'avoir une réduction sur l'abonnement110. Ainsi, les fans de la série pouvaient
devenir client de HBO, attirés par l'exclusivité de la saison suivante.
En plus des publicités télévisuelles, la chaîne réalise une grande campagne d'affichage
pour chacun de ses programmes. Mais la plupart du temps, elle tente des campagnes
originales, personnalisées, en fonction du sujet de la série. Prenons l'exemple de la série
Boardwalk Empire, sorti en septembre 2010, dont la promotion s'est déroulée du 16 août au 19
septembre. Cette série se déroule dans les années 1920, à Atlantic City, et traite de la
contrebande d'alcool pendant la Prohibition, sur un décor de casinos, de jeu, de plaisirs, de
politique et d'argent. Sarah Goodnow, la directrice des comptes à Civic Entertainment (la
société qui coordonna les associations entre HBO et les marques), déclare au New York
Times : « There were three themes we focused on, […] 1920s fashion; Atlantic City itself, and
Prohibition and era of speakeasies, rum-running and bootlegging. »111. La chaîne visa
principalement les hommes de plus de 25 ans, et s'associa pour cela, avec trois grandes
marques : l'hôtel-casino Caesars d'Atlantic City appartenant au groupe Harrah's, pour le jeu et
l'argent, Canadian Club, une marque de whisky, pour l'alcool, et la chaîne de magasin
Bloomingdale's pour la mode. En tout, HBO dépensa 10 millions de dollars dans cette
campagne, soit plus du double du budget du premier épisode, lui-même tout de même très
cher. Pour leur participation, les magasins Bloomingdale's, enseigne de prêt-à-porter chic et
très répandue dans le pays, ont décoré entièrement leur magasin principal de la 3ème avenue
de Manhattan sur le thème des années 20, avec des vitrines et même des acteurs habillés
comme à l'époque. Ils ont également reproduit une promenade en planche de 35 mètres de
long (« boardwalk » en anglais), comme celle de la série. De plus, les acteurs ont posé en
couverture du catalogue de la collection automne-hiver de l'enseigne. L'hôtel Caesars, quant à
lui, a organisé une avant-première, avec tapis rouge et présence de la presse et des acteurs,
comme s'il s'agissait d'un film hollywoodien. Et quatre établissements de la chaîne Harrah's
ont loué 1920 suites à 19,20 $ la nuit, du 16 au 30 septembre. De plus, 35 restaurants et bars
109 101,93 € en Septembre 2002. 110 Stuart Levine, « DVD Formata Perfect Fit for Fanatics », Variety. 4 au 10 novembre 2002. 111 Stuart Elliott, « A Big Splash for a Prohibition drama », The New York Times, 15 août 2010. Nous traduisons :
« Il y trois thèmes sur lesquels nous souhaitons nous concentrer, […] la mode des années 20, la ville d'Atlantic City, et la Prohibition à l'époque des distilleries clandestines, des passeurs et des revendeurs ».
21
de la ville adaptèrent leurs prix à ceux des années 20. La marque Canadian Club a redécoré
des bars en distilleries à Chicago, New York, Philadelphie et Los Angeles et pendant la
« Prohibition Happy Hour », un cocktail Canadian Club était offert aux clients. La marque a
aussi sponsorisé l'avant-première au Caesars. Chris Spadaccini, vice-president du département
publicité et promotion de HBO, déclara au New York Times : « We want the campaign to feel
big to reflect the scope and scale of the production. We want to position Boardwalk Empire as
an epic crime drama and make feel people it's a must-see television event. »112. Et
effectivement, lors du premier épisode, HBO réunit 4,8 millions de téléspectateurs, la
meilleure audience depuis 2004113. Lors de la promotion pour la saison 2, HBO équipa le
métro de New York en remplaçant les deux tiers de leurs trains par des modèles des années
20, entièrement décorés sur le thème de la campagne politique de Nucky Thompson, le
personnage principal de la série. Une distribution de tickets de transport gratuits fut également
organisée114. Le passage dans le métro d'une si grande ville n'est évidemment pas négligeable.
112 Idem ibidem. Nous traduisons : « Nous voulons que la campagne paraisse énorme, à l'image de l'étendue et de l'ampleur de la production. Nous voulons positionner Boardwalk Empire comme un drame épique et faire en sorte que les gens le voient comme un événement télévisuel à ne pas manquer. ».
113 « Boardwalk Empire campaign for HBO », Promo Magazine, 3 août 2011. 114 http://www.fastcocreate.com/1679200/nycs-mta-takes-the-23-train-to-yesteryear-for-hbos-boardwalk-empire-
campaign, 08 mars 2012.
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Illustration 1: Métro de New York redécoré pour la saison 2 de Boardwalk Empire.
Illustration 2: Façade du magasin Bloomingdales's de New York pour la saison 1 de Boardwalk Empire.
23
Illustration 3: Campagne d'affichage pour la saison 1 de Boardwalk Empire dans le métro de New York.
Illustration 4: Affiche de Boardwalk Empire. Le thème utilisé est le jeu d'argent à Atlantic City dans les années 20.
Illustration 5: Affiche de Boardwalk Empire. Le thème choisi ici est le plaisir, les femmes et le luxe pendant l'âge d'or d'Atlantic City.
Cependant, l'association de la chaîne avec d'autres marques peut s’avérer difficile, car
beaucoup d'entre elles ne souhaitent pas être rattachées à de la violence, telle qu'on en trouve
sur la chaîne. Dans le premier épisode de Boardwalk Empire, nous pouvons y voir des
meurtres, des fusillades, une femme enceinte battue, de la nudité, et de l'obscénité. Nous
pouvons nous demander alors pourquoi Bloomingdale's, Canadian Club ou encore Caesars
ont-ils accepté de s'associer à HBO. Selon Chris Spadaccini, la raison est simple : « With
HBO, they know what they’re getting into: a premium network with adult content. The
violence is not gratuitous; it’s part of the narrative. And it is Scorsese. »115. La chaîne a
maintenant atteint une notoriété telle que la violence de ses programmes freine de moins en
moins les marques. De plus, le fait d'avoir des réalisateurs ou des producteurs prestigieux leur
procure une qualité non négligeable lors des partenariats116. Pendant la campagne
promotionnelle pour la deuxième saison de la série True Blood, les dirigeants ont créé une
confusion volontaire entre le monde réel et l'univers de la série, en faisant croire que les
vampires existaient vraiment. Ils ont ainsi réalisé des publicités destinées aux vampires. Pour
cela, ils se sont associés à plusieurs marques : Gillette, Monster.com, Mini, Ecko, Harley-
Davidson et la société d'assurance Geico117. Ce co-branding permet le partenariat entre deux
marques dans le cadre d'opérations ponctuelles. Les panneaux publicitaires créés pour
l'occasion étaient affichés dans les rues des grandes villes, dans certains magazines comme le
US Weekly, le New York Times, le TV Guide et le New York Magazine, et sur certains sites
internet118. Cette campagne de grande envergure contient de nombreux avantages. Tout
d'abord, l'association de deux marques permet la création de valeurs partagées : les marques
associées à la chaîne paraissent ainsi créatives, originales, et de qualité, à l'image de HBO.
Kate Alini, directrice des communications marketing de Mini a déclaré « We're always
looking for ways to do something unique and unexpected and break through the clutter. […]
The show is thought-provoking and edgy. It's a really good fit »119. Pour la chaîne, la publicité
permet de toucher les consommateurs de toutes les marques en même temps. De plus, ce co-
115 Op. cit., Stuart Elliott, « A Big Splash for a Prohibition drama », The New York Times, 15 août 2010. Nous traduisons : « Avec HBO, ils savent dans quoi ils s'embarquent : un réseau de première qualité au contenu pour adulte. [...] La violence n'est pas gratuite ; elle fait partie de la narration. Et c'est Scorsese. ».
116 Idem ibidem.117 http://www.fastcompany.com/blog/alissa-walker/designerati/did-seasons-true-blood-campaign-achieve-
immortality-or-just-plain-suc, 30 avril 2012. 118 http://www.getthefive.com/articles/the-marketeer/hbo-partners-with-mini-geico-gillette-and-harley-d/ , 30
avril 2012. 119 http://www.usatoday.com/money/advertising/2009-05-25-fake-ads-true-blood_N.htm , 27 avril 2012. Nous
traduisons : « Nous cherchons toujours à faire quelques chose d'unique, d'inattendu, et à se démarquer. [...] La série suscite la réflexion, et est avant-gardiste. C'est une bonne association. ».
24
branding de niche120 permet aux marques associées de viser une catégorie de population
particulière. Ici, il s'agit du public de True Blood, jeune, urbain, et provenant des milieux
aisés, que des marques comme Monster.com, Harley-Davidson ou Geico souhaitent toucher
en priorité. D'après Dino Bernacchi, directeur de promotion de la marque Harley-Davidson,
« This is a very cool, sexy, powerful brand. It's youthful and powerful and has attitude and
strength. That's really a great partner for a brand like ours. »121. Cette stratégie est donc
positive pour les deux camps : HBO bénéficie des clients des marques et les marques
bénéficient de la catégorie de public de la série. Ainsi, pour les fans de True Blood, voir des
marques associées à leur série préférée permet d'accroître leur estime envers elles. D'après
Corinne Nardot, professeur d'économie et de gestion, un co-branding réussi mêle « créativité
et complémentarité »122. Un produit ne doit pas faire de l'ombre à l'autre sous peine que la
campagne soit un échec. Nous pouvons dire que l'originalité et la créativité de ses publicités
résident dans la présence de vampires. La complémentarité, quant à elle, a lieu dans la
diversité des marques utilisées. Aucune ne vend le même type de produit. Même Harley-
Davidson et Mini, qui semblent à première vue être des vendeurs de véhicules motorisés,
visent en réalité des clients très différents. Mini cible une clientèle jeune et féminine tandis
que les motos Harley-Davidson sont plutôt destinées aux hommes. Pour HBO, cette
campagne permet de refléter son humour, sa légèreté, sa capacité à ne jamais faire comme
tout le monde et à choquer. Pour Bill Carroll, directeur des programmes de Katz Television
Media Group, « for HBO, it's finding that balance between, “Oh my goodness, you're wasting
my time”, or “Oh my goodness, you've given me something intriguing” »123. Ces partenariats
font l'objet de contrats tenus confidentiels, mais nous pouvons supposer que cela réduit les
coûts de promotion de la chaîne puisque les frais sont partagés entre la marque et HBO. Mais
surtout, HBO n'est plus une « advertiser-free channel » comme aimait le préciser Chris
Albrecht. Certes, ses programmes ne dépendent pas des publicitaires, mais HBO s'associe
clairement avec des marques qui bénéficient de ses téléspectateurs.
120 http://www.marketing-professionnel.fr/parole-expert/co-branding-marques-strategies-coopetition.html , 27 avril 2012.
121 http://www.usatoday.com/money/advertising/2009-05-25-fake-ads-true-blood_N.htm , 27 avril 2012. Nous traduisons : « C'est une marque vraiment cool, sexy, et puissante. Elle est pleine de jeunesse et puissante et a de l'allure et de la force. C'est vraiment un super partenaire pour une marque comme la notre. ».
122 http://www.creg.ac-versailles.fr/spip.php?article57 , le 26 avril 2012. 123 R. Thomas Umstead, « HBO sinks its teeth into True Blood campaign », Multichannel News, 28 juillet 2008.
Nous traduisons : « pour HBO, le tout est de trouver l'équilibre entre “Oh mon Dieu, vous me faites perdre mon temps” et “Oh mon Dieu, vous m'intriguez” ».
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26
Illustration 6: Publicité Gillette et HBO pour la campagne True Blood.
Illustration 7: Publicité Mini et HBO pour la campagne True Blood.
Illustration 8: Publicité Geico et HBO pour la campagne True Blood.
27
Illustration 9: Publicité Ecko et HBO pour la campagne True Blood.
Illustration 10: Publicité Monster.com et HBO pour la campagne True Blood.
Illustration 11: Publicité Harely-Davidson et HBO pour la campagne True Blood.
Pour Boardwalk Empire, la violence joue un rôle très important dans la campagne de
HBO. En effet, la plupart du temps, l'élément qui permet de toucher un maximum de
personnes est le buzz. Le principe est que le consommateur lui-même contribue à diffuser
l'information et à faire la publicité du produit. Pour cela, les dirigeants ne comptent que sur
un seul élément marketing : le bouche-à-oreille (WOMM : Word-Of-Mouth Marketing)124.
Pour Mark Hughes, auteur du livre Buzzmarketing, « Buzz starts conversations ». Il répertorie
6 éléments qui permettent de lancer un buzz et de démarrer les conversations : le tabou,
l'inhabituel, le scandale, l'hilarant, le remarquable et les secrets125. Nous pouvons évidemment
remarquer que les séries de HBO sont composées d'un grand nombre de ces facteurs. La
violence contenue dans les épisodes de Boardwalk Empire, justifiée par la réalisation de
Martin Scorsese, attire la curiosité des téléspectateurs, avant ou après la diffusion.
Contrairement aux réseaux classiques, dans lesquels les programmes doivent attirer un
maximum de spectateurs le premier soir, les séries HBO sont un peu considérées comme du
bon vin par les directeurs de la chaîne : bien sûr la première diffusion doit apporter une bonne
audience, mais surtout, le bouche-à-oreille et les critiques doivent apporter de plus en plus de
téléspectateurs tout au long de la saison. Ainsi, dans le cas de la série True Blood, le tout
premier épisode a attiré la curiosité de 1,4 millions de personnes126, tandis que le dernier en a
attiré 2,45127. Plus marquant encore, le premier épisode de la deuxième saison a réuni 3,7
millions de téléspectateurs, réalisant une croissance de 157% depuis la première diffusion de
la série128. Le final de cette saison a même apporté 5,11 millions de spectateurs129. C'est
particulièrement ce genre de croissance que les dirigeants souhaitent atteindre grâce au buzz
et au bouche-à-oreille, et heureusement pour eux, les gens aiment discuter des dernières
trouvailles créatives de la télévision. Le buzz n'est pas nouveau, cependant, grâce à internet, et
maintenant aux réseaux sociaux, la capacité de parler d'un événement local et d'en faire une
discussion à l'échelle internationale, est de plus en plus facile, et évidemment gratuite pour la
marque. HBO facilite alors le processus en proposant certains services sur internet : un site
124 Shawn McIntosh, « Will Yingshuiji buzz help HBO Asia », It's not TV. Watching HBO in the post-television era, p.73.
125 Mark Hughes, Buzzmarketing. p.27. Nous traduisons : « le buzz lance les conversations ».126 Daniel Frankel, « 1,4 Million tunes into True Blood: HBO serie premiere has descent sunday bow », Variety.
9 septembre 2008. 127 Rick Kissel, « CBS stays hot in november », Variety. 25 novembre 2008.128 http://www.broadcastingcable.com/article/294649-Cable_Ratings_True_Blood_Delivers_For_HBO.php?
rssid=20065 ,09 Mars 2012.129 http://tvbythenumbers.zap2it.com/2009/09/15/cable-ratings-usc-vmas-icarly-and-true-bloodfinale/27176/ , 09
mars 2012.
28
pour chaque série, avec des informations sur les acteurs et les personnages, les descriptions
des épisodes, des interviews, des vidéos des coulisses, la vente des produits dérivés, et bien
entendu, des forums de discussion. C'est en mettant en place ces forums et en tolérant les sites
internet non-officiels et les lieux de discussion des fans que HBO accélère la mise en place du
buzz. Selon Shawn McIntosh, « Word of mouth is not primarily about simply transmetting
information, but about discursively creating and sharing meanings to create our social milieu
and our very identity. »130. Dans la campagne de publicité pour True Blood, des vidéos virales
et des trailers circulaient sur Youtube, Facebook, ou autres réseaux sociaux. Sur toute la toile,
HBO laissait entendre que les vampires existaient réellement, comme c'est le cas dans la série.
Ainsi, un site de rencontre pour humains et vampires a même été créé, appelé
LoveBitten.net131. En Nouvelle-Zélande, les panneaux publicitaires distribuaient des pieux en
bois, en cas d'attaque de vampire132. Une application Facebook, « immortalize yourself », a été
conçue pour insérer des photos de l'internaute dans un extrait de la série : les 8 millions de
fans de la page Facebook ont donc pu partager le lien avec tous leurs contacts133. De la même
manière, pour la troisième saison, une vidéo virale circulait sur le net : un employé du
département marketing de la chaîne présentait ses idées toujours plus farfelues pour la
campagne de promotion de la série, comme une piscine municipale remplie de sang, ou une
carte d'anniversaire qui projette du sang au visage de celui qui la reçoit. En plus d'être une
vidéo efficace, HBO fait ici preuve d'auto-dérision, mais en profite tout de même pour
préciser deux fois le jour et l'heure du prochain épisode, pour dire que les séries HBO sont
toujours originales et hors du commun et enfin, qu'elles sont faite pour une « mature
audience »134.
130 Op. cit., Shawn McIntosh, « Will Yingshuiji buzz help HBO Asia ? », It's not TV. Watching HBO in the post-television era. p.73. Nous traduisons : « la fonction du bouche-à-oreille n'est pas juste une transmission d'informations pure et simple, mais c'est créer de manière rationnelle et partager des éléments pour bâtir notre milieu social et notre propre identité. ».
131 http://www.fastcompany.com/magazine/135/spread-the-word.html , 10 mars 2010. 132 Idem ibidem.133 http://www.digitalbuzzblog.com/hbo-true-blood-immortalize-yourself-facebook-app/ , 10 mars 2012. 134 http://true-blood.net/2010/06/13/hbo-marketing-apologizes-for-enthusiasm/ , 10 mars 2012. Nous traduisons :
« public adulte »
29
La série fut très bien reçue par les téléspectateurs, comme nous l'avons vu, puisqu'avec
les deux rediffusions, le premier épisode a totalisé 7,1 millions de spectateurs en tout135. Mais
le programme fut également très bien reçu par la critique puisqu'il obtient la note moyenne
totale de 88 sur 100136. La plupart des séries HBO obtiennent une bonne critique des experts,
journalistes et universitaires. C'est bien sûr un point positif que HBO tente de conserver. En
effet, tous les articles positifs parus dans la presse sont en réalité de la publicité gratuite pour
eux et d'autant plus crédible qu'elle est faite par des experts. Le très prestigieux New York
Times ne tarit pas d'éloges sur leurs séries : en 1999, le journaliste Stephen Holden écrivit :
« The Sopranos sustains its hyper-realism with an eye and ear so perfectly attuned to
geographic details and cultural and social nuances that it just may be the greatest work of
American popular culture of the last quarter century. »137. Une critique comme celle-ci ou
encore la victoire d'un Emmys Award ou d'un Golden Globe apportent à coup sûr énormément
d'abonnés, curieux de cette qualité, mais surtout crédibilise tout le travail, la programmation et
la promotion de la chaîne. Ainsi en 2003, les Emmys ont rapporté 72 millions de dollars en
plus de leurs revenus habituels grâce à l'augmentation des inscriptions. Les Emmys
135 Op. cit., « Boardwalk Empire Campaign for HBO », Promo Magazine, 3 août 2011. 136 http://www.metacritic.com/tv/boardwalk-empire/season-1 , 8 mars 2012. 137 Christopher Anderson, « Producing an Aristocracy of culture in American television », The Essential HBO
Reader, p. 23. Nous traduisons : « The Sopranos maintient son hyper-réalisme grâce à des yeux et des oreilles si parfaitement sensibles aux détails géographiques et aux nuances culturelles et sociales, qu'il est probablement le meilleur résultat de la culture populaire américaine du dernier quart de siècle. »
30
Illustration 12: Panneaux publicitaire pour la saison 1 de True Blood en Nouvelle-Zélande.
permettent de créer le buzz. Le journaliste Bill Edelstein a questionné un employé de la
chaîne qui affirme : « The Emmy push is very important to them because it's about image
building and branding and that's their mantra. […] They spend an extraordinary amount of
money every year. »138. Tout est donc une question d'image de marque. La cérémonie des
Emmys leur procure une publicité gratuite. De plus cette communication n'est pas de « l'auto-
promotion », que beaucoup de téléspectateurs pourraient juger de non-objective. Il s'agit là de
l'avis, bien que parfois contesté, de membres de l'industrie audiovisuelle, neutres, experts en
la matière et donc crédibles.
Tout ce travail de communication et d'auto-promotion pour obtenir un maximum
d'abonnés est une méthode assez agressive mais plutôt efficace. HBO ne dévoile pas ses
résultats mais le magazine Variety estimait qu'en 2001, le nombre d'abonnés s'élevait à 28
millions139. Afin de compléter leur méthode et leur discours, il est cependant important de
faire en sorte que les clients soient satisfaits de leur prestation. Pour garder un maximum
d'abonnés, HBO mise donc sur la programmation et sur plusieurs avantages que leurs clients
peuvent obtenir grâce à leur abonnement.
c. Programmation et fidélisation des clients
D'après le magazine Variety, HBO réalise une très forte croissance depuis le
commencement de ses séries au début des années 1990. En 1994, elle possédait 19,2 millions
d'abonnés. Ce chiffre a augmenté de 50% entre 1995 et 2007. Aujourd'hui elle a atteint les 28
millions d'abonnés avec une croissance de 1 million de plus par an. En comptant les clients du
bouquet Cinemax, la chaîne cumule 37 millions de souscriptions140. De plus, elle possède
aujourd'hui 81 millions d'abonnés à travers le monde141. Mais un des plus grands problèmes
que rencontrent les dirigeants des chaînes câblées, est le phénomène du churning142 : certains
138 Bill Edelstein, « Emmy campaign pricey, cost of image building », Variety, 4 au 10 Novembre 2002. Nous traduisons : « L'impulsion qu'apportent les Emmys est très importante pour eux car il s'agit de la construction de leur image et de leur marque et c'est leur credo. […] Ils dépensent une quantité d'argent extraordinaire chaque année. »
139 John Dempsey, « It's lonely at the Top », Variety, 10 au 16 Septembre 2001. 140 Op. cit., John Carman, « Why HBO is king of the box. Sopranos network isn't hooked on ratings, seeks
challenging shows », The San Francisco Chronicle, 3 avril 2001. 141 http://www.monde-diplomatique.fr/2011/06/PINSOLLE/20687#nh7, 23 avril 2012. 142 Op. cit., George Mair, Inside HBO : The Billion Dollar War between HBO, Hollywood and the home video
revolution, p.11.
31
clients s'abonnent pour mettre ensuite fin à leur abonnement peu de temps après. Il y a
plusieurs raisons à ce procédé : financières d'abord, ils se considèrent satisfaits par la
télévision gratuite, par désintéressement pour les autres programmes de HBO ou encore, car
ils se sont abonnés à un concurrent. Par moment, le churning est même volontaire : ils
s'abonnent par exemple, de septembre à décembre, pendant la saison de leur série préférée. Le
nombre d'abonnés chaque année n'est donc pas significatif si le taux de churning n'est pas pris
en compte. En 1980, 42% des souscriptions étaient annulées en moins d'un an : sur les 12,1
millions de nouvelles souscriptions cette année-là, 5 millions se sont déconnectés143. L'année
d'après, en 1981, le taux de churning était monté à 48% : la chaîne devait trouver deux clients
dans l'espoir de n'en garder qu'un. 35% des personnes qui se déconnectaient le faisaient dans
les 90 jours, et 60%, au cours des six premiers mois144. Les principales raisons données étaient
que la chaîne ne valait pas le coût de l'abonnement, les films étaient rediffusés trop souvent et
les programmes étaient mauvais. Mais à cette époque, ce problème ne semblait pas inquiéter
les dirigeants de la chaîne qui ne prenaient aucune décision. Aujourd'hui, le churning est
toujours l’ennemi numéro un de n'importe quelle chaîne du câble mais HBO a pris plusieurs
mesures pour garder l’intérêt des spectateurs tout au long de l'année et les séries sont l'outil
idéal.
Les changements ont eu lieu dans différents domaines et tout premièrement dans la
programmation. Selon François Jost : « Le succès ou l'échec d'un programme dépend très
largement de la case horaire dans laquelle il est diffusé. Et ce pour deux raisons : il peut ne
pas “trouver” le public qu'il aurait été susceptible d’intéresser, ou l’intéresser moins que
l'émission proposée par une chaîne concurrente. »145. Dans les années 90, les séries n'étaient
pas courantes sur HBO : il a donc fallu « trouver » les spectateurs et les habituer à être
réguliers et fidèles à la chaîne afin de créer un public stable, une cible. En 1995, Jeff Bewkes
fut nommé à la tête de la chaîne. Son objectif premier était de créer un lien plus étroit dans la
relation entre la chaîne et les téléspectateurs et pour cela, la série était le moyen idéal146.
D'après Christopher Anderson :
143 Ibid, p.56.144 Ibid, p.57. 145 Op. cit., François Jost, Comprendre la télévision et ses programmes, p.52.146 Op. cit., Christopher Anderson, « Producing an Aristocracy of culture in American television », The Essential
HBO Reader, p. 32.
32
« […] the commercial networks recognized that the key to cultivating loyalty among
viewers depended upon a fixed, reliable schedule: the goal to integrate network
programming into the temporal rhythms of modern workweek and, on an even more
intimate level, with the temporal flow of everyday life in a family [...] »147.
A partir de 1997, la chaîne payante a tenté de diffuser ses séries (Oz148, The Larry
Sanders Show149 et Arli$$150) les soirs de semaine à 23 heures. Ils espéraient compléter le
programme de prime-time et faire en sorte que les spectateurs se transfèrent sur HBO après
avoir vu leur programme sur les grandes chaînes gratuites151. Aujourd'hui, la chaîne ose tenter
de concurrencer les autres réseaux pendant les périodes de prime-time : à l'image du succès du
network NBC qui avait instauré le Thursday lineup152 durant lequel toutes leurs séries étaient
diffusées à la suite le jeudi soir, HBO n'hésita pas à créer la séance du dimanche soir153. Chris
Albrecht, directeur des programmes à cette période, explique :
« We didn't really believe that we could compete on a weekly basis in the serie area,
which is the programming currency of the broadcast networks. We knew that we had to
become more valuable, so we made a conscious effort to explore the series area. […]
So we transformed ourselves into a regular-use network, a habitual-use network,
rather than an occasional-use network... that was a huge transformation but one that
was necessary. »154.
C'est la technique de programmation dite du checkboarding hebdomadaire : « la
147 Idem ibidem. Nous traduisons : « […] les réseaux commerciaux reconnaissaient que le secret pour entretenir la fidélité des téléspectateurs reposait sur un programme fixe et mémorisable : le but étant d'intégrer un programme de télévision dans le rythme d'une semaine de travail moderne et, sur un niveau encore plus intime, dans le quotidien d'une famille [...] ».
148 Tom Fontana, Oz, 1997-2003, HBO. 149 Dennis Klein, Gary Shandling, The Larry Sander's show, 1992-1998, HBO. 150 Ed Smart, Arli$$, 1996-2002, HBO. 151 Op. cit., Avi Santo, « Para-television and discourses of distinction », It's not TV. Watching HBO in the post-
television era, p. 27.152 Nous traduisons : « La séance du Jeudi ».153 Op. cit., Avi Santo, « Para-Television and discourses of distinction », It's not TV. Watching HBO in the post-
television era, p. 27.154 Op. cit., Christopher Anderson, « Producing an Aristocracy of culture in American television », The Essential
HBO Reader, p. 33. Nous traduisons : « Nous ne croyions pas vraiment que nous pouvions rivaliser avec une base hebdomadaire dans le domaine des séries, ce qui est le type de programmation le plus courant à la télévision. Nous savions que nous devions obtenir plus de valeur, donc nous avons fait des efforts réfléchis pour explorer le domaine des séries. […] Alors nous nous sommes transformés en une chaîne à usage régulier, une chaîne à usage habituel, plutôt qu'une chaîne à usage occasionnel...ce fut une énorme transformation mais elle était nécessaire. »
33
programmation de séries différentes chaque semaine dans la même case horaire »155. Cette
méthode permet à HBO de créer un public fidèle : il regardera la chaîne le dimanche soir par
habitude, pour voir des séries et non pour voir une série. Cette stratégie de faire venir
l'audience pour un soir en particulier, plutôt que pour un programme permet notamment de
garantir un succès à une toute nouvelle série en plaçant le pilote entre deux épisodes de séries
à succès : le hammocking156. Ce fut le cas en 2001 lorsque la chaîne diffusa le pilote de Six
Feet Under157 juste après sa série à succès Sex and The City158. Traditionnellement donc, sur
HBO, la soirée du dimanche commence à 21 heures par une sitcom (Sex and the City, Curb
Your Enthusiasm), suivie par un drame familial (The Sopranos, Six Feet Under), et finit par
une série plus explicite et controversée. Le tout est souvent suivi par une rediffusion du
premier épisode : ceux qui regardaient une chaîne concurrente peuvent retourner sur HBO
pour la deuxième partie de soirée. En fixant leurs séries le dimanche soir, à 21 heures, les
dirigeants du network ont su trouver leur public : les enfants étant couchés, la « télévision
disponible » à cette heure d'écoute est constituée essentiellement d'adultes et il n'y a pas
d'obligation de diffuser un programme fédérateur familial, un « less-objectionnable-
program »159. HBO est libre de diffuser leurs séries violentes, grossières et immorales160. Le
célèbre slogan « Sunday is... HBO »161 a permis à la chaîne de réaliser ses plus fortes
audiences pendant des années. A partir de 2004, la chaîne subit cependant une crise des
programmes et se fit battre par la diffusion de Desperate Housewives. ABC profita de cette
baisse d'audience pour diffuser sa série le dimanche soir, et ce fut un succès puisque le
premier épisode attira 21 millions de spectateurs162.
D'autres changements ont été effectués : les saisons ne durent que 12 épisodes. Les
avantages de cette modification sont de pouvoir éviter toute coupure pendant le déroulement
de la saison (due à un événement sportif ou politique) comme c'est souvent le cas sur les
autres chaînes : à force de ne plus voir leurs épisodes deux ou trois semaines d'affilées, les
spectateurs en perdent l'envie de connaître la suite. La plupart du temps, les chaînes perdent
ainsi beaucoup de téléspectateurs au cours de la diffusion d'une saison et il est rare que 155 Op. cit., François Jost, Comprendre la Télévision et ses programmes, p. 61. 156 Idem ibidem. François Jost traduit : « faire un hamac ».157 Alan Ball, Six Feet under (Six Pieds sous terre), 2001-2005, HBO. 158 John Dempsey, « It's lonely at the Top », Variety, 10 au 16 septembre 2011. 159 Nous traduisons : « programme le moins contestable ».160 Op. cit., François Jost, Comprendre la Télévision et ses programmes, p. 57-62. 161 Nous traduisons : « Dimanche c'est... HBO ».162 Denise Martin, « HBO has Rival as the sunday driver », Variety, 1 au 7 novembre 2004.
34
l'audience ne baisse pas de la première à la dernière diffusion. Cependant, cette réduction
d'épisodes a un inconvénient : la rentrée des séries étant en septembre, les saisons sont finies
en décembre. Que diffuser le reste de l'année ? En diffusant un épisode par dimanche, à raison
de 10 à 12 épisodes par saison, la série est terminée au bout de trois mois environ. Il n'était
pas question pour les dirigeants de se contenter de rediffusions pour le reste de l'année.
Chaque trimestre a donc ses séries en exclusivité et la rentrée n'a pas lieu qu'en septembre,
comme chez les autres networks, mais bien quatre fois par an. Par exemple, fin septembre
2011 et début octobre sont sortis respectivement la nouvelle saison de Boardwalk Empire163, et
la nouvelle comédie Enlightened164, qui se sont terminées en décembre 2011. Le 29 janvier et
le 19 février 2012, ont été diffusées la première saison de Luck165 et la troisième de Eastbound
and Down166. Le 1er avril a commencé la saison 2 de Game of Thrones167 qui se terminera en
juin. Et enfin, en juin, commencera normalement la saison 5 de True Blood168. qui se
terminera fin août ou début septembre. Avec ce type de programmation, le téléspectateur peut
regarder HBO tous les dimanches soir sans voir une seule rediffusion. Les dirigeants ont donc
répondu à une des critiques les plus répandues, qui est le trop grand nombre de rediffusion sur
la chaîne et la pauvreté des programmes. De plus, ils évitent que les abonnés mettent fin à leur
souscription une fois leur série préférée terminée car une nouvelle est toujours en diffusion
pour attirer leur curiosité. De plus, afin de trouver leur public, les séries sont programmées de
manière judicieuse : par exemple, la série True Blood était au début diffusée en septembre. Ne
trouvant pas son public, la saison 2 a été déplacée au mois de juin afin de trouver une cible
plus jeune, libre pendant l'été. Et ce fut un succès car l'audience a considérablement
augmentée.
Comme nous venons de l'expliquer, les séries sont diffusées le dimanche soir sur
HBO. Cependant, cela ne touche pas tous les abonnés à la chaîne : certains ne peuvent pas
regarder la télévision le dimanche soir, ou ont trouvé un meilleur programme ailleurs. Les
dirigeants ont alors eu l'idée de faire en sorte que les téléspectateurs puissent voir leurs
épisodes où ils veulent et quand ils le veulent, et cela grâce à la nouvelle technologie. Les
163 http://www.imdb.com/title/tt0979432/episodes?season=2 , 10 avril 2012. 164 http://www.imdb.com/title/tt1509004/episodes?season=1 , 10 avril 2012.165 David Milch, Luck, 2011, HBO. http://www.imdb.com/title/tt1578887/episodes?season=1, 10 avril 2012. 166 http://www.imdb.com/title/tt0866442/episodes?season=3 , 10 avril 2012. 167 David Benioff, D.B. Weiss, Game of Thrones (Le Trône de fer), 2011-En production, HBO.
http://www.imdb.com/title/tt0944947/episodes?season=2, 10 avril 2012. 168 http://www.imdb.com/title/tt0844441/episodes?season=5 , 10 avril 2012.
35
avancées technologiques font partie de l'image de marque de HBO. A son commencement, en
1975, elle était devenue la première chaîne payante à émettre par satellite. En 1990, elle fut la
première chaîne à offrir un service multiple grâce aux nombreuses chaînes de son bouquet169.
Enfin en 1999, elle est devenue la première chaîne payante américaine à diffuser ses
programmes en haute définition. D'après Bill Nelson, président de la chaîne : « We have a
long history of firsts in technology : satellite, multiplexe and SVOD. […] Such a commitment
reinforces our tradition of giving our customers the best programming when they want it and
how they want it. This move further solidifies HBO's leadership in the premium category »170.
Les clients de HBO appartiennent généralement aux classes sociales élevées : s'ils ont les
moyens de se payer la toute nouvelle technologie, ils attendent la même chose de la chaîne
pour laquelle ils payent $10 ou $15 par mois. HBO a donc commencé par proposer la vidéo à
la demande au début des années 2000 : grâce à leur abonnement, les clients peuvent accéder
aux programmes de chez eux, à tout moment de la journée171. Grâce au système de calcul de la
société Nielsen, ils peuvent même connaître les audiences du SVOD (Subscritpion Video On
Demand)172. Erik Kessler, coprésident de HBO déclare au magazine Variety : « Homes with
HBO on Demand actually watch twice as much HBO as homes without on Demand. What
means is that as it provides greater access to programming, it increases overall usage, and
that leads to greater satisfaction with the overall subscription. »173. Cela permet donc aux
abonnés de regarder beaucoup plus la chaîne qu'à leur habitude. En augmentant la
consommation, HBO en augmente le besoin et ralentit le churning. De plus les clients ont
l'impression d'en avoir plus pour le même prix, ils sont satisfaits et HBO voit ses audiences
augmenter. Lors du premier épisode de True Blood le 13 septembre 2009, seulement 24% des
12,4 millions de téléspectateurs l'ont regardé le dimanche soir à 21 heures. 37% ont regardé
les rediffusions, 21% l'avait enregistré et 18% sont passés par le service de vidéo à la
demande. La même année, HBO préparait son nouveau système de vidéo à la demande : HBO 169 Op. cit., Cara Louise Buckley, Marc Leverette, Brian L. Ott, « Introduction », It's not TV. Watching HBO in
the post-television era, p. 4-5. 170 Kimberly Nordyke, « All HBO, Cinemax channels to be in HD », The Hollywood Reporter, 13 juin 2007.
Nous traduisons : « Nous avons un long passé de pionnier en matière de technologie : le satellite, l'offre multiplexe et la Vidéo à la Demande. […] Un tel engagement renforce notre coutume à donner à nos clients le meilleur programme, quand ils le veulent et de la manière qu'ils veulent. De plus, cette avancée consolide la dominance de HBO dans la catégorie des chaînes de haute qualité. »
171 Paul Bond, « Collins heads up AOL TW interactive video division », The Hollywood Reporter, 17 Août 2001.172 Traci Patterson, « Nielsen to measure HBO's SVOD services », CED Magazine, 12 décembre 2007.173 Op. cit., Cynthia Littleton, « A la Carte Blanche », Variety, 21 au 27 septembre 2009. Nous traduisons :
« Les foyers équipés de la vidéo à la demande de HBO regardent, en réalité, deux fois plus la chaîne que les foyers sans VOD. Ce qui signifie que cela apporte un meilleur accès aux programmes, accroît la consommation générale, et apporte une plus grande satisfaction aux abonnements. ».
36
Go. HBO Go permet aux abonnés de visionner les programmes sur ordinateurs, smartphones
et tablettes tactiles : les téléspectateurs ne sont plus obligés d'être chez eux pour regarder la
télévision174. De plus, ils ont accès à 1600 heures de programme, soit dix fois plus que sur le
service de SVOD175. 85% des utilisateurs de ce nouveau service avouent regarder plus de
programme grâce à HBO Go. Alison Moore, directrice des plate-formes digitales, explique :
« On the iPad, all you have to do is [swipe your finger] and you see everything else HBO has
done. That's a pretty powerful reason not to disconnect. »176. Le but premier des dirigeants est
donc, encore une fois, d'éviter le churning. Cette petite révolution n'est que très récente mais
fait entrer la chaîne dans le domaine d'internet, une manière comme une autre de contrer le
piratage illégal. Grâce à un identifiant et un mot de passe, les clients de HBO peuvent
regarder autant de programme qu'ils le souhaitent. « The big risk we have is, if we don't offer
this programming to [consumers] », avoue Peter Stern177, directeur de stratégie de la chaîne,
« the way they want it, they'll turn to piracy. »178. D'autre part, de nombreux bonus sont
disponibles, par exemple pour la série Game of Thrones, les fans ont accès à des cartes, ou des
arbres généalogiques. Cette utilisation du transmédia permet d'utiliser plusieurs supports pour
un seul programme. HBO tente ainsi d'augmenter la dépendance des fans en faisant en sorte
qu'ils puissent revoir les épisodes encore et encore, afin accroître leur envie de visionner
l'épisode suivant.
C'est à partir de 1999 que HBO a commencé à appréhender de nouvelles formes de
distribution179. Elle lança alors The Sopranos en cassettes VHS puis en DVD. Le succès fut
immédiat puisqu'en 2004, la chaîne avait gagné 300 millions de dollars180. Les trois premières
saisons de The Sopranos furent ainsi payées par la seule vente de DVD. Sex and the city,
quant à elle, en a vendu pour 250 millions de dollars. La série Band of brothers, au budget de
120 millions, fut rentabilisée grâce aux 186 millions de dollars rapportés par les DVD181. 174 Paul Sweeting, « VOD or DVD », Video Business, 6 avril 2009.175 http://www.fastcompany.com/most-innovative-companies/2012/hbo#profile , 17 avril 2009. 176 Idem ibidem. Nous traduisons : « Sur l'iPad, tout ce que vous avez à faire c'est [faire glisser votre doigt] et
vous avez accès à tout ce que HBO a fait. C'est une bonne raison pour ne pas se désabonner. ».177 Daniel Frankel, « Cable Players make push for online. Aggressive Initiatives bring shows to internet », Daily
Variety, 3 avril 2009.178 Nous traduisons : « Le grand risque que nous courons est que si nous n'offrons pas ce programme aux
clients, ils se tourneront vers le téléchargement illégal. ».179 Op. cit., Tony Kelso, « And now no word from our sponsor », It's not TV. Watching HBO in the post-
television era, p. 58.180 Gary Levin, « HBO met its match in itself; terrific year, hard to beat with no Sex and Sopranos », USA Today,
28 septembre 2004. 181 Idem ibidem.
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Malgré le succès de la marque HBO, cette nouvelle forme de distribution peut s'avérer
dangereuse pour la chaîne. En effet, comme le souligne Tony Kelso, cette dispersion de la
marque peut ébranler et dissiper sa recherche de l'exclusivité182. Si les séries HBO ne sont plus
uniquement visibles le dimanche soir à la télévision, les téléspectateurs n'ont plus besoin de
s'abonner, cela peut, à long terme devenir un encouragement au churning. En 2006, les
auteurs Epstein et al. ont même supposé « it is just a matter of time before channels such as
HBO become a relic of the past, replaced by new technologies of distribution like on-demand
program streaming, or on-line video file sharing »183. Afin de limiter cette dispersion de la
marque, les DVD sont vendus à un prix très élevé : $99,90 en moyenne pour un coffret. Cette
somme garantit à l'acheteur la qualité HBO. La chaîne peut également être sûre que ses
consommateurs possèdent un pouvoir d'achat important et soient des clients potentiels. En
vendant leurs séries au prix moyen des autres chaînes, ils ne maintiendraient plus leur
distinction. Avec la chute des prix, leurs saisons sont aujourd'hui vendues à une moyenne de
$40 mais restent au dessus des prix du marché. Fidèle à son avant-gardisme technologique,
HBO s'associa à Apple en 2008 pour vendre ses épisodes sur l'iTunes Store. Le lendemain de
leur diffusion, soit le lundi matin, tous les épisodes sont téléchargeables. HBO est la seule
chaîne autorisée par iTunes à vendre ses épisodes à plus de $1,99. Ainsi, certaines séries,
comme Deadwood, Rome184 ou The Sopranos peuvent valoir jusqu'à $2,99185. Cette méthode
de vente permet à la chaîne de réinstaurer l'exclusivité de ses programmes en habituant leurs
consommateurs à acquérir les épisodes beaucoup plus rapidement. De plus, les acheter sur
iTunes revient moins cher qu'un coffret de DVD. Aujourd'hui, HBO s'est donc imposée en
tant que distributeur. Elle est devenue une marque qui complète la chaîne de télévision.
Comme n'importe quelle marque, elle s'occupe donc d'attirer un grand nombre de
clients, de les satisfaire et de faire en sorte qu'ils se sentent proches des valeurs de la chaîne.
Cette stratégie porte ses fruits puisque HBO est l'entreprise la plus rentable de la Time Warner
Inc.186. Nous allons maintenant tenter de comprendre en quoi les séries de la chaîne sont
différentes de celles produites jusqu'à présent et sur quoi repose l'engouement médiatique. 182 Op. cit., Tony Kelso, « And now no word from our sponsor », It's not TV. Watching HBO in the post-
television era, p. 59.183 Idem ibidem. Nous traduisons : « Ce n'est qu'une question de temps avant que des chaînes comme HBO ne
deviennent des reliques du passé, remplacées par de nouvelles technologies de la distribution comme la vidéo à la demande ou le partage de fichier vidéo en ligne ».
184 Bruno Heller, William J. MacDonald, John Milius, Rome, 2005-2007, HBO. 185 « Update: Apple now selling HBO shows on iTunes Store », Dow Jones News Service, 13 mai 2008.186 Op. cit., John Dempsey, « It's lonely at the Top », Variety, 10 au 16 septembre 2001.
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B. Les séries
Depuis que la chaîne câblée a commencé à produire des séries au début des années
1990, tout le monde s'accorde à penser que HBO a révolutionné le petit écran en créant des
séries nouvelles. Encensées par la critique, recevant de nombreux prix, et permettant
d'augmenter considérablement les audiences de la chaîne, elles se veulent originales et
impertinentes à l'image de HBO. Nous pouvons alors nous demander en quoi ce programme
est différent et quelles en sont ses particularités. Il serait ensuite intéressant de nous demander
si le statut si spécifique de ce programme ne serait-il pas qu'une image promotionnelle que
HBO souhaite transmettre à son public. Enfin, nous étudierons l'héritage de la forme sérielle
sur les programmes de la chaîne.
a. Des séries différentes
Afin de maintenir la concurrence, HBO doit continuellement distinguer ses
programmes de ceux des autres chaînes. Les séries télévisées n'échappent donc pas à la règle.
La chaîne a donc innover dans certains domaines de sa production. Nous allons voir quelles
sont les particularités des séries HBO, mais avant de voir en quoi elles se différencient, nous
allons d'abord nous intéresser à leur définition selon Alain Carrazé :
« On parle de série quand une fiction se déroule en plusieurs parties, donc au minimum
deux. Le lien entre ces parties peut être de trois ordres : l'histoire, les personnages ou,
plus rarement, la simple thématique. Concrètement, il existe des séries quand l'histoire
est racontée sur plusieurs épisodes, quand les personnages reviennent au fil des épisodes,
ou quand chaque épisode raconte une nouvelle histoire, certes indépendante des autres
mais sur un même schéma (thriller, science-fiction, fantastique...). Tous ces cas entrent
donc dans le sens élargi que l'on donne au terme « série ». C'est un sens global et chaque
type de série a sa propre définition. »187.
Les particularités des réalisations de HBO résident premièrement dans les sujets
abordés. Les dirigeants de la chaîne s'accordent à vouloir montrer du « jamais-vu ». Toutes les
séries font preuve d'un grand réalisme dans le déroulement de l'histoire, comme dans la
187 Op. cit., Alain Carrazé, Les Séries Télé : l'Histoire, les Succès, les Coulisses, p.10.
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psychologie des personnages. Comme le souligne Ien Ang dans son étude des spectatrices de
Dallas, l'histoire n'est qu'un prétexte pour voir évoluer des personnages dans lesquelles elles
aiment se reconnaître. Leurs imperfections font d'eux des protagonistes réalistes, comme Sue
Helen, alcoolique et sujette à des problèmes de couple, qui semble être la préférée des
sondées188. Le premier succès de la chaîne en 1997, Oz, se déroule en prison et semble
montrer de manière presque documentaire, la vie carcérale. Elle aborde la violence, la
sexualité, le viol, et la drogue. Cependant, mise à part la vulgarité de langage et la violence de
certaines scènes, ce modèle n'est vraiment pas nouveau. Comme The Sopranos189, il s'agit
d'une série chorale, qui ne contient, non pas un héros mais plusieurs personnages qui se
partagent l'affiche. Ce genre fut inventé dans les années 80 avec la série novatrice Hill Street
Blues190, dans laquelle on montre le développement et les relations entre tous les personnages
d'un commissariat. Ce modèle fut repris notamment par E.R. ou NYPD Blues191. Oz et The
Sopranos reposent sur une forme déjà existante et appréciée du public, mais l'inventivité des
créateurs provient de la souplesse de leurs personnages et d'une morale presque inexistante.
En effet, n'importe quel vilain peut être un héros, et un gentil peut aussi faire preuve de
cruauté. C'est ce manque de manichéisme et ce repositionnement quasi pervers des
personnages qui donne à l'histoire un coté réaliste. « They [these series] are para-television.
In so doing, they have borrowed and modified the existing “cops and docs” workplace drama
genre that Tom Schatz identifies as central to network television, in an effort to offer potential
subscribers both familiarity and “originality”. »192. Leur originalité repose donc sur le thème
de la vie carcérale, jamais abordé à la télévision, ainsi que sur la psychologie des personnages.
Ces deux domaines se veulent réalistes car le microcosme de la vie carcérale est vu comme le
macrocosme de la société contemporaine. Tom Fontana, le créateur, avoue dans une interview
qu'il voulait une série à l'opposé de la « télévision réconfortante »193. En effet, d'après Jean-
Pierre Esquenazi, « le moyen le plus sûr de “faire vrai” dans le domaine audiovisuel a
toujours consisté à évacuer le plus clairement possible le spectacle et le spectaculaire. »194.
188 Op. cit., Jean-Pierre Esquenazi, Les Séries Télévisées, l'avenir du cinéma ?, p. 32.189 David Chase, The Sopranos (Les Sopranos), 1999-2007, HBO.190 Steven Bochco, Hill Street Blues (Capitaine Furillo), 1981-1987, NBC. 191 Steven Bochco, N.Y.P.D. Blues (New York Police Blues), 1993-2005, Fox.192 Op. cit., Avi Santo, « Para-television and discources of distinction », It's not TV. Watching HBO in the post-
television era, p. 29. Nous traduisons : « Ces séries sont de la para-télévision. Se faisant, elle ont emprunté et modifié le genre des séries chorales “flics et docus” que Tom Schatz identifie comme l'essence de la télévision gratuite, dans le but d'offrir à leur abonnés, de la familiarité ainsi que de “l'originalité”. ».
193 Manuel Mendoza, « Fontana's World not for the faint profile : The Wizard behind Oz is also preparing a show for UPN », The Dallas Morning News, 4 août 1999.
194 Op. cit., Jean-Pierre Esquenazi, Les Séries Télévisées, l'avenir du cinéma ?, p. 32.
40
C'est une des raisons pour lesquelles HBO s'efforce de s'attacher au genre du « docu-real »195,
que Caldwell, inventeur du terme, décrit comme « self-consciously showcase documentary
units as part of their narrative and plot/or documentary imaging as part of their mise-en-
scène. »196. En choisissant un sujet voulu « réaliste », des personnages complexes et des
intrigues pseudo-documentaires, les dirigeants de la chaîne espèrent se rapprocher de leur
public : ils s'attachent aux personnages, s'identifient à eux et en comprennent mieux les
enjeux. Cette recherche du réalisme rappelle le néo-réalisme italien, et concernant la série Six
Feet under, Jean-Pierre Esquenazi déclare : « Ne pouvant plus s'appuyer sur le champ-
contrechamp classique du soap-opera, Alan Ball fait du cinéma européen des années 60
(Antonioni, Bergman) et de son montage abrupt de personnages isolés les uns des autres la
référence visuelle de la série. »197. De plus, en proposant des thèmes jamais abordés, ils
attirent la curiosité des téléspectateurs, habitués au schéma classique de la télévision gratuite.
Ainsi, dans la série Sex and the city198, les créateurs abordent le thème osé de la
différenciation féminine entre l'amour et le sexe. Post-féministe, ce programme propose
quatre portraits de femmes lassées du modèle tant évoqué du prince charmant. Cette série se
veut être une forte critique de la consommation : les hommes sont des objets jetables, une
grande partie des scènes les plus importantes se déroulent autour d'une table de restaurant et
les personnages semblent passer leur temps à faire les boutiques, ne portant jamais la même
tenue d'un épisode à un autre. Un épisode entier est même consacré au nouvel ordinateur
Apple de Carrie Bradshaw, le personnage principal de la série199. Ils consomment, comme
pour s'affirmer dans la société américaine postmoderne. Les spectateurs observent comment
ils s'habillent, ce qu'ils mangent, quelle voiture ils conduisent, comment leur maison est
décorée, et définissent leur identité de cette façon200. Carrie et ses amies entretiennent une
forte relation avec la mode, au point de transformer l'actrice Sarah Jessica Parker en icône.
Mais la mode vient aussi de leur manière de vivre : avec de l'argent, de l'indépendance, et une
195 Op. cit., Avi Santo, « Para-television and discources of distinction », It's not TV : Watching HBO in the post-television era, p. 110. Nous traduisons par : « docu-réel ».
196 Idem ibidem. Nous traduisons : « des unités volontairement basées sur le modèle documentaire faisant partie de leur narration et leur intrigue/ ou une réalisation documentaire faisant partie de leur mise-en-scène. ».
197 Op. cit., Jean-Pierre Esquanazi, « L'inscription de la série dans l'histoire de la fiction populaire », Les Séries Télévisées. L'Avenir du cinéma ?, p. 100.
198 Darren Star, Sex and the city, 1998-2004, HBO.199 Op. cit., Avi Santo, « Para-television and discources of distinction », It's not TV. Watching HBO in the post-
television era, p. 28.200 Ibid, p. 211.
41
certaine liberté sexuelle. Ce programme est clairement adressé au public s’intéressant à la
mode, ou au risque de généraliser, aux femmes et aux hommes homosexuels201. Mais cette
consommation excessive est aussi un moyen de s'affirmer face aux hommes hétérosexuels202.
En effet, un des passe-temps favori des femmes, le shopping, est vu comme étant une activité
triviale, frivole, et vaniteuse en opposition aux activités sérieuses des hommes. Dans son
étude sur les femmes, Sigmund Freud identifie la vanité comme principal facteur de la
consommation de vêtements par celles-ci : « The vanity of women is a late compensation for...
original sexual inferiority... and has as its purpose concealment of genital deficiency »203.
C'est pourquoi Sex and the City utilise probablement la mode comme moyen de résistance
féministe, car comme le suggère Stephen Maddison, la stigmatisation des femmes et des
hommes homosexuels offre des « possibilities for resisting the security of hierarchical gender
authority and offer[s] profitable strategies for the acquisition of subjectivity. »204. Cette
partialité est très certainement une des raisons pour lesquelles la série reçut une très bonne
critique et un fort succès auprès du public avec en moyenne 6,5 millions de téléspectateurs par
épisode.
Au lieu de reprendre les conventions quelques peu rigides des situation comedies205
classiques, HBO décida de s'approprier le genre en utilisant les formes et le style d'univers
télévisuels déjà existant : le late-night talk show, format d'émission typiquement américain
mêlant interview et humour ; et la télé-réalité. De nombreux programmes de HBO sont basés
sur des pastiches ou des critiques des différentes formes présentes à la télévision206. Les règles
traditionnelles des sitcoms : lumière forte, caméras multiples, studio fixe sans quatrième mur
et rires pré-enregistrés, hérités du vaudeville, ne sont plus utilisés. A l'image de leur drames,
proches du documentaire, ces comédies se veulent réalistes. Avec des sitcoms comme The
Larry Sanders Show, Curb your enthusiasm207, ou The Comeback208, les plans séquences et les 201 Ibid.202 Ibid.203 Sigmund Freud, « Feminity », New Introductory lectures on psychanalysis. p. 54. Nous traduisons : « La
vanité des femmes est une compensation tardive d'une... véritable infériorité sexuelle... et a pour but de dissimuler une déficience sexuelle. ».
204 Op. cit., Cara Louise Buckley, Brian L. Ott, « Fashion(able/ing) Selves », It's not TV. Watching HBO in the post-television era, p. 212. Nous traduisons : « possibilités de résistance à la sécurité de l'autorité hiérarchique des genres et offre des stratégies payantes à l'acquisition d'une certaine partialité. ».
205 Nous traduisons : comédies de situation, dites sitcoms.206 Lisa Williamson, « Challenging sitcom conventions », It's not TV. Watching HBO in the post-television era,
p. 108.207 Larry David, Curb your enthusiasm (Larry et son nombril), 2000- En production, HBO. 208 Lisa Kudrow, Michael Patrick King, The Comeback (Mon Comeback), 2005, HBO.
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mises au point ne sont pas rares, et la caméra est tenue à l'épaule209. HBO imite en réalité les
codes du docu-soap, très en vogue à l'époque sur la télévision gratuite américaine : ce type de
programme de télé-réalité filme des « personnes réelles », dans le monde réel, à la manière
d'un documentaire mais avec une structure dramatique propre au soap-opera. Bien que les
événements présents dans les docu-soap soient fictifs, ce genre de programme est souvent
présenté par les chaînes comme un document sociologique, sans jamais en révéler la nature
fictionnelle. En proposant un pastiche du docu-soap, HBO réalise une forte critique de la
télévision américaine, et en dénonce les travers et les mensonges. Brett Mills nomme ces
sitcoms les « comedy-vérité » : « the visual characteristics of vérité have been adopted for
comedic purpose »210 . Le modèle classique de la sitcom est, d'après Lisa Williamson, un
genre « transparent », qui ne masque pas ses codes : la scène, les rires, son public, le
quatrième mur, tout est fait pour faire rire le téléspectateur qui n'en attend rien d'autre. Les
« comedy-vérité » de HBO mêlent sérieux et humour, en enlevant tous les codes signalant
l'élément comique. Grâce à son caractère documentaire, le drôle provient de la « réalité », et
n'est clairement plus adressé à un public familial, mais à une niche démographique bien plus
restreinte. La notion d'expérience collective, provoquée par les rires du public, est
abandonnée, amenant à un plaisir plus personnel du spectateur211. Marc Leverette, à propos de
la série Lucky Louie, s'étonna : « [It] was at once an anti-sitcom and a hyper-sitcom,
challenging and reifying the generic conventions of the form. »212. Ainsi, il suffit de regarder
une sitcom de HBO pour prendre du recul sur la télévision gratuite en général et pour y
distinguer les ficelles. La chaîne maintient sa distinction en évitant les productions classiques
pour créer des programmes que les téléspectateurs sont prêts à payer. Cependant, jusqu'à
présent, les drames et les sitcoms de HBO n'ont pas grand chose en commun. Il leur faut un
élément qui permette aux téléspectateurs de tout de suite identifier la touche HBO. Cet
élément devait être différent des autres chaînes et même à l'opposé total de leur
fonctionnement.
Les dirigeants de la chaîne ont opté pour une philosophie que Marc Leverette appelle :
209 Ibid, p. 109.210 Ibid, p. 111. Nous traduisons : « les caractéristiques de la vérité sont utilisés à des fins humoristiques. »211 Idem ibidem.212 Marc Leverette, « Cocksucker, motherfucker, tits », It's not TV. Watching HBO in the post-television era, p.
124. Nous traduisons : « [C']était à la fois une anti-sitcom et une hyper-sitcom, défiant et dépersonnalisant les conventions génériques de la forme. ».
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« cocksucker, motherfucker, tits philosophy »213. L'auteur fait référence à l'humoriste George
Carlin, qui, dans les années 70, avait déclaré dans un stand-up très célèbre qu'il y avait sept
mots interdits à la télévision : « shit, piss, fuck, cunt, cocksucker, motherfucker, tits »214. Cette
phrase avait fait scandale, à tel point que l'affaire avait dû être réglée par la Cour Suprême. En
effet, même quarante ans après, il est toujours interdit de diffuser de la violence, de la nudité
ou de prononcer des obscénités à la télévision américaine. Mais bien heureusement pour la
chaîne, HBO ne fait pas partie des networks gratuits américains et la loi ne s'applique donc
pas à elle. Elle en profite alors pour constamment placer des obscénités dans ses séries, une
manière pour elle de faire un pied-de-nez aux autres chaînes. Comme Marc Leverette le
souligne, le contenu explicite permet à la chaîne de se positionner en dehors de la normalité
télévisuelle215. Cependant, l'obscénité fait partie, dans l'esprit de la plupart des personnes, d'un
mouvement de sous-culture, or HBO souhaite élever sa clientèle en un certain élitisme. Nous
pouvons alors nous demander quels sont les avantages, pour l'abonné, à appartenir à cette élite
grossière. Selon John Jervis, le plaisir réside dans la transgression des règles de bonne
conduite : « [the transgressive is] reflexive, questionning both in its role and that of the
culture that has defined it in its otherness. »216. Le philosophe Michel Foucault affirme que
l'acte de transgression est captivant pour celui qui le fait car il franchit la limite de sa propre
subjectivité217 . Le spectateur de HBO ressent alors une certaine jouissance à pousser les
frontières de sa raison, sa morale : il atteint le tabou. « Yet we find intense pleasure in these
transgressive moments –as its [HBO's] millions of subscribers would attest. Perhaps we buy
into HBO in order to “hoodwink ourselves... We want to get across without taking the final
step” (Bataille, 1986: 141). »218. Avant de commencer la production de séries, la chaîne était
spécialisée dans les matchs de boxe, sport violent, et dans le programme « late-nite »,
pornographique. Et c'est donc sans retenue qu'elle inséra cette violence et cette nudité dans ses
programmes. Mais contrairement à ses films érotiques, la nudité présente dans ses séries
semble plus justifiée et moins gratuite, bien que ce point soit facilement contestable. Pour la
213 Ibid, p. 127. Nous traduisons : « La philosophie enculé, fils de pute, nichons ».214 Ibid, p. 127. Nous traduisons : « merde, pisse, putain, salope, enculé, fils de pute, nichons ».215 Ibid, p. 125.216 Ibid, p. 125. Nous traduisons : « le transgressif est réfléchi, remettant en question son rôle et ce que la
culture a défini comme étant son altérité » .217 Michel Foucault, « A Preface to transgression », Language, couter-memory, practice : Selected essays and
interviews, p. 29-52.218 Op. cit., Marc Leverette, « Cocksucker, motherfucker, tits », It's not TV. Watching HBO in the post-television
era, p. 126. Nous traduisons : « Ainsi nous ressentons un plaisir intense en ces moments de transgression –comme peuvent nous l'attester ses millions d'abonnés. Sans doute nous payons HBO au lieu de “nous aveugler... Nous voulons traverser la frontière sans pour autant faire le dernier pas.” (Bataille, 1986 : 141). ».
44
chaîne, qui tente par tous les moyens de réaliser des programmes réalistes, l'obscénité se veut
être le reflet de la vie réelle.
Pour conclure, HBO repose sur le modèle de ce que Caldwell appelle « boutique-
television », une chaîne proposant des programmes faits pour un certain type de public
uniquement et non pour une audience très large et familiale. « Boutique programming
constructs for itself an air of selectivity, refinement, uniqueness, and privilege. »219. Nous
pouvons donc dire que HBO semblent proposer des séries différentes de celles proposées par
les networks. Mais nous allons voir que cette distinction est là encore ficelée par un important
travail de communication.
b. Des œuvres d'art
Comme nous venons de le voir, les séries HBO n'appliquent pas les mêmes règles
esthétiques et stylistiques que le reste de la télévision américaine. Le téléspectateur obtient
certes, un programme différent, mais qu'en est-il de la qualité ? Par quoi peut-on juger un
programme bon ou mauvais ? Car ce qui intéresse beaucoup les dirigeants de la chaîne est
d'assurer un service premium. Comme nous l'avons vu précédemment, ils se doivent de
réaliser des séries de caractère. Il serait alors intéressant de découvrir par quels moyens ils
atteignent cette qualité tant recherchée. Pour cela, nous étudierons le cas de la mini-série
Band of brothers.
En Septembre 2001, juste après le succès du film Pearl Harbor, HBO diffusa sa
nouvelle mini-série Band of brothers220. Ce format est un programme ne contenant qu'une
saison, ici de 10 épisodes. Contrairement aux séries habituelles, pouvant être renouvelées en
fonction de l'audience, les mini-séries n'ont pas de seconde saison221. Band of brothers est un
programme de 705 minutes, soit plus de 11 heures, diffusées en 9 semaines222. Bien que ce
format ait toujours été utilisé à la télévision, il représente un certain risque, car il se situe à mi-
chemin entre la série et le film. Chris Albrecht, président de la chaîne déclara au magazine 219 Ibid, p. 141. Nous traduisons : « La programmation boutique se construit sur un air de sélectivité, de
singularité et de privilège ».220 Steven Spielberg, Tom Hanks, Band of brothers (Frères d'armes), 2001, HBO. 221 Thomas Schatz, « Band of brothers », The Essential HBO Reader, p. 126.222 http://www.imdb.com/title/tt0185906/episodes?season=1 , 23 avril 2012.
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Variety : « I think one of the nice things about a miniseries is you can tackle things that can't
be done by a film, and you can have different types of talent aboard since you aren't asking
them for years of their time like you would with a series. »223. De plus, vu le nombre restreint
d'épisodes, ce format permet de créer le buzz et de rassembler un maximum de téléspectateurs
devant l’événement. Le budget que la chaîne ne cache pas, bien au contraire, est pharaonique :
120 millions de dollars, soit 12 millions par épisode. A cette époque, il s'agissait du projet le
plus cher jamais produit à la télévision et HBO comptait bien créer un buzz autour de ce
sujet224. Au fil des années, les budgets des séries se sont vite envolés aux États-Unis, passant
d'une moyenne d'un million de dollars par épisode en 1990, à 3 millions en 2007225. En se
lançant dans les séries télévisées en 1995, Jeff Bewkes, président de la chaîne, augmenta le
budget annuel de 50 millions de dollars à 300 millions. Ensuite, il changea le format de la
série pour passer à 12 ou 15 épisodes par saison au lieu des 24 traditionnels. Cependant le
budget reste le même226. Cette stratégie permet de doubler les moyens financiers par épisode
pour effectuer une compétition plus rude avec les grands networks, bien installés sur le
marché des séries télévisées depuis presque un demi-siècle. De plus, les épisodes sont tournés
deux fois moins vite, laissant le temps aux créateurs et scénaristes de développer la qualité de
leurs projets227. Chris Albrecht déclara sur le sujet : « It's much harder to do 13 good episodes
of something, […] than to do 22 bad episodes of something »228. Ainsi, The Sopranos était une
des séries les plus coûteuses en 2001 avec 3 millions de dollars par épisode229. De 2004 à
2006, Deadwood coûtait 4,5 millions de dollars alors que la même année, Lost n'en coûtait
que 2,5 millions230. Certains records furent aussi réalisés comme The Pacific231 qui bénéficiait
de 200 millions de dollars pour 10 épisodes en 2010232. Michael Lombardo, président des
programmes de la chaîne se justifie : « there are projects that demand a large budget and we 223 Justin Kroll, « Is mini Market turning macro ? », Variey, 10 au 16 mai 2010. Nous traduisons : « Je pense
qu'un des avantages de la mini-série est que vous pouvez vous attaquer à des choses que vous ne pouvez pas faire dans un film, et vous pouvez vous offrir de nombreux talents puisque vous ne leur demandez pas de vous consacrer plusieurs années de leur vie, comme pour une série. ».
224 Op. cit., Thomas Schatz, « Band of brothers », The Essential HBO Reader, p. 125.225 David Buxton, « L'Emergence de la série feuilletonnante », Les Séries télévisées. Forme, idéologie et mode
de production, p. 71. 226 Op. cit., Jean-Pierre Esquenazi, Les séries télévisées. L'Avenir du cinéma ?, p. 56.227 Idem ibidem.228 Op. cit., John Carman, « Why HBO is king of the box. Sopranos network isn't hooked on ratings, seeks
challenging shows, The San Francisco Chronicle, 3 avril 2001. Nous traduisons : « Il est beaucoup plus difficile de faire 13 bons épisodes de quelque chose […] que de faire 22 mauvais épisodes de quelque chose. ».
229 Op. cit., John Dempsey, « It's lonely at the Top. », Variety, 10 au 16 septembre 2001.230 Op. cit., http://www.monde-diplomatique.fr/2011/06/PINSOLLE/20687#nh7, 12 avril 2012.231 Steven Spielberg, Tom Hanks, The Pacific, 2010.232 Op. cit., Justin Kroll, « Is mini Market turning macro ? », Variety, 10 au 16 mai 2010.
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are out to deliver the best product to our customer. »233. Le message est clair : cette somme est
pour HBO et ses téléspectateurs, un gage de qualité. Grâce à cet apport financier, ils peuvent
embaucher les meilleurs techniciens, réalisateurs et acteurs. De plus, le budget utilisé pour
Band of brothers est plus de l'ordre de celui d'une production de film hollywoodien que d'un
simple programme télévisuel. La prise de risque financière est donc très importante pour
HBO. En effet, le fait de proposer aux téléspectateurs des programmes différents est un risque
en soit et la chaîne le fait savoir. HBO dépend de ses abonnés et non de ses sponsors : elle
peut donc prendre des risques sans offenser ses publicitaires. Elle peut aussi construire des
scénarios au déroulement plus lent que la plupart des autres séries, car les épisodes ne sont pas
coupés par la publicité234. Mais cette liberté apparente masque leur obligation à prendre des
risques235. Et prendre des risques, à la télévision, c'est montrer ce qu'on n'a jamais montré
auparavant car des millions de clients de HBO payent leur abonnement pour voir quelque
chose de différent. Un employé déclara un jour au journal The Economist, « We don't care
how many people watch our shows. […] We just want people to decide at the end of the month
that it's worth renewing their subscription. »236. HBO attend la satisfaction de son public et
non la quantité. Pour calculer son audience, elle préfère apparemment additionner celles de
tous ses programmes du mois. Si la qualité est une prise de risque, la chaîne en a besoin.
Avec un budget si élevé, HBO a également besoin de valeurs sûres. C'est pourquoi,
elle prend soin d'inclure des réalisateurs et des producteurs très célèbres à ses projets. Dans le
cas de Band of brothers, les producteurs exécutifs ne sont autres que Steven Spielberg et Tom
Hanks, associés à DreamWorks237. Évidemment leur nom ont été maintes fois cités pendant la
promotion du programme, pour jouer sur le prestige de la production et sur le succès du film
Saving Private Ryan238. Mais ce n'est pas la première fois que des producteurs, non habitués à
la télévision, travaillent pour HBO. Ainsi, Boardwalk Empire est produit par Martin Scorsese,
Entourage, par Mark Walhberg, Luck par Michael Mann et Dustin Hoffman et Tales from the
233 Idem ibidem. Nous traduisons : « Certains projets nécessitent un gros budget et nous sommes prêts à apporter le meilleur produit à nos clients. ».
234 Op. cit., Tony Kelso, « And now no word from our sponsor », It's not TV. Watching HBO in the post-television era, p. 49-51.
235 Idem ibidem.236 Idem ibidem. Nous traduisons : « Peu importe combien de personnes regarde nos programmes. [...] Nous
voulons juste que ces personnes décident de renouveler leur abonnement à la fin du mois ».237 Op. cit., Thomas Schatz, « Band of brothers », The Essential HBO Reader, p. 126. 238 Steven Spielberg, Saving Private Ryan (Il faut sauver le soldat Ryan), 1998.
47
Crypt239 par Robert Zemeckis. Pour les téléspectateurs, ces noms ne sont autres que des faire-
valoirs de la qualité des programmes. Et puisque ce sont eux qui financent les séries par leurs
abonnements, ils attendent en retour un programme de valeur. HBO a également embauché les
créateurs les plus en vogue du moment : Tom Fontana pour Oz, créateur de St. Elsewhere240,
Darren Star pour Sex and the city, créateur de Melrose Place241 et Beverly Hill 90210242, ou
encore Alan Ball pour Six Feet under et True Blood, oscarisé pour le scénario du film
American Beauty243. Avec de tels producteurs pour Band of brothers, les dirigeants de HBO ne
semblaient pas si téméraires. D'autant plus qu'en 2001, le succès sourit à la chaîne : Sex and
the city, The Sopranos, Six Feet under, ainsi que le programme From the Earth to the Moon,
également produit par Tom Hanks furent récompensés par des Emmy Awards et acclamés par
la critique244.
Le projet de Band of brothers semblait donc justifié. Car, contrairement aux
programmes des networks, qui n'ont pas « d'auteur », HBO fait savoir avec force les noms de
ses créateurs245. Habituellement, tous les programmes d'une chaîne doivent appliquer une
seule et unique esthétique, de manière à homogénéiser le tout et ainsi permettre au
téléspectateur de reconnaître immédiatement la chaîne. Le fonctionnement de HBO est très
différent, elle célèbre ses auteurs avec le « David Chase's The Sopranos », « Alan Ball's Six
Feet Under » ou encore « David Milch's Deadwood246 »247. D'ailleurs HBO encourage l'édition
de biographies dans le but de rendre leurs auteurs célèbres248. La chaîne fait également savoir
que ses auteurs sont libres de leurs choix. Les créateurs peuvent utiliser les studios ou les
décors qu'ils souhaitent, ainsi, Tom Fontana, créateur de la série Oz, acheta un bâtiment entier
pour y abriter ses décors et son administration249. Dans leur ouvrage de 2001, Rogers, Epstein
239 William Gaines, Tales from the Crypt, 1989-1996, HBO. 240 Joshua Brand, John Falsey, Tom Fontana, St. Elsewhere (Hôpital St. Elsewhere), 1982-1988, NBC.241 Darren Star, Melrose Place, 1992-1999, Fox.242 Darren Star, Beverly Hills 90210, 1990-2000, Fox.243 Sam Mendes, American Beauty, 1999. Op. cit., Jean-Pierre Esquenazi, « Production des séries », Les séries
télévisées. L'Avenir du cinéma ?, p. 56-57.244 Op. cit., Thomas Schatz, « Band of brothers », The Essential HBO Reader, p. 127.245 Op. cit., Marc Leverette, « Cocksucker, motherfucker, tits », It's not TV. Watching HBO in the post-television
era , p. 141.246 David Milch, Deadwood, 2004-2006, HBO.247 Op. cit., Marc Leverette, « Cocksucker, motherfucker, tits », It's not TV. Watching HBO in the post-television
era , p. 141. Nous traduisons : « Les Sopranos de David Chase », « Six Feet Under de Alan Ball » et « Deadwood de David Milch ».
248 Op. cit., Christopher Anderson, « Drama overview », The Essential HBO reader, p. 37.249 Op. cit., Jean-Pierre Esquenazi, « Production des séries », Les Séries télévisées. L'Avenir du cinéma ?, p. 56-
57.
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et Reeves écrivent à propos de The Sopranos : « HBO has cultivated and enabled the quality
of the program by giving Chase the creative freedom that only premium cable can offer »250.
Mais cette communication est encore un moyen de se distinguer du reste de la télévision.
Chaque série possède une réalisation particulière, différente et reconnaissable. En leur
attribuant un auteur, un artiste, les séries télévisées deviennent des œuvres d'art. Selon Pierre
Bourdieu, la vision d'un créateur unique « is the ultimate basis of belief in the value of a work
of art »251. Caldwell définit ce phénomène comme étant des « subtle orchestrations of
televisual form that create the defining illusion of a personal touch »252. D'après Christopher
Anderson, « In the case of HBO dramas, the aesthetic disposition brings to television the
cultivated expectation that watching certain television series requires and rewards the
temperament, knowledge, and protocols normally considered appropriate for encounters with
museum-worthy works of art. »253. Dans la hiérarchie des œuvres, la télévision est considérée
comme un divertissement. HBO permet la légitimation des séries télévisées comme un
domaine culturel noble254. Et comme, selon Pierre Bourdieu, la culture est un champ de
distinction des classes sociales : regarder des séries HBO reviendrait à affirmer son
appartenance à un milieu, au capital économique et social élevé. Toujours d'après Pierre
Bourdieu :
« Du fait de leur appropriation suppose des dispositions et des compétences qui ne sont
pas universellement distribuées […], les œuvres culturelles font l'objet d'une
appropriation exclusive, matérielle ou symbolique, et, fonctionnant comme capital
culturel (objectivé ou incorporé), assurent un profit de distinction […] et un profit de
légitimité, profit par excellence, consistant dans le fait de se sentir justifié d'exister. »255.
En maintenant sa distinction avec le reste de la télévision, HBO a permis à son public 250 Op. cit., Avi Santo, « Para-Television and discourses of distinction », It's not TV. Watching HBO in the post-
television era, p. 32. Nous traduisons : « HBO a cultivé et facilité la qualité de son programme en donnant à Chase la liberté créative que seul le câble premium pouvait offrir. ».
251 Op. cit., Christopher Anderson, « Drama overview », The Essential HBO Reader, p. 37. Nous traduisons : « est la base de la croyance en la valeur de l’œuvre d'art ».
252 Op. cit., Marc Leverette, « Cocksucker, motherfucker, tits », It's not TV. Watching HBO in the post-television era , p. 141. Nous traduisons : « de subtiles orchestrations de la forme télévisuelle qui créent l'illusion d'une touche personnelle ».
253 Op. cit., Christopher Anderson, « Producing an Aristocracy of culture in american television » The essential HBO Reader, p. 23. Nous traduisons : « Dans le cas des drames HBO, la tendance esthétique apporte à la télévision l'exigence que regarder certaines séries requiert et demande le tempérament, la connaissance et les protocoles normalement appropriés aux admirations des œuvres d'art dignes des musées. ».
254 Pierre Bourdieu, « La Construction sociale des goûts », La Distinction. Critique Sociale du jugement, p. 267.255 Idem ibidem.
49
de se distinguer du reste des téléspectateurs en affirmant leur position sociale. Regarder HBO
est donc devenu un moyen d'ascension sociale.
Le New York Times a contribué à confirmer ce statut d’œuvre d'art grâce à ses critiques
très positives dès le lancement de The Sopranos en 1999256. Un buzz HBO se crée alors dans
le milieu intellectuel américain. De nombreux universitaires ont consacré une partie de leurs
ouvrages aux séries, comme Joanne Hollows et Rachel Moseley, Kim Akass, Janet McCabe,
et Imelda Welehan sur le féminisme de Sex and the city ou encore David Lavery, sur The
Sopranos257. Maurice Yacowar remarque que certains restaurants d'affaire voyaient leur
fréquentation baisser le dimanche soir car les personnes restaient à domicile pour regarder
The Sopranos. Sex and the city a même fait la couverture du Times, chose très rare pour une
sitcom258. En plus des écritures de presse ou universitaires, HBO bat des records de
nominations aux Emmy Awards. Bien que nous ne saurions dire s'il s'agit là encore d'un
phénomène de mode ou de buzz, le magazine USA Today a remarqué que la chaîne avait reçu
plus de Emmys en 2004 que les quatre networks gratuits combinés259. En 2010, comme
souvent, la chaîne câblée dominait la cérémonie avec 101 nominations260. La plupart des
séries de la chaîne ont au moins été nommées dans une catégorie. The Sopranos, par exemple,
a gagné 21 Emmys pour 112 nominations261. Concernant Band of brothers, le programme
reçut 6 Emmy Awards, un Golden Globe et un Peabody Award262. Ce phénomène culturel
permet, d'après Dominique Pinsolle et Arnaud Rindel, « d'accroître la “valeur d'usage” de
ces productions télévisuelles en leur faisant pénétrer le marché culturel parallèle dont font
depuis longtemps l'objet les œuvres cinématographiques et littéraires. »263. Ainsi, les Cahiers
du cinéma ont consacré des articles à The Sopranos ou Six Feet Under264. Le Times a qualifié
le travail de HBO de l'année 2001 de « mini “âge d'or” télévisuel »265. Disséquer les
programmes et les analyser est devenu chose commune et a permis d'élever certaines séries 256 Notons tout de même que le magazine New York Times appartient à la société Times Inc, branche de la
société-mère de HBO, la Time Warner Inc. 257 Op. cit., Tony Kelso, « And now no word from our sponsor », It's not TV. Watching HBO in the post-
television era, p. 49.258 Idem ibidem.259 Idem ibidem.260 Stuart Levine, Michael Schneider, « Kudos congruity. B'cast catches cable in top Emmy noms », Variety, 12
au 18 juillet 2010. 261 http://www.imdb.com/title/tt0141842/awards , 23 avril 2012.262 Op. cit., Thomas Schatz, « Band of brothers », The Essential HBO Reader, p. 127.263 Op. cit., http://www.monde-diplomatique.fr/2011/06/PINSOLLE/20687#nb7, 01 mai 2012. 264 http://www.cahiersducinema.com/No621-mars-2007.html , 01 mai 2012. 265 Op. cit., http://www.monde-diplomatique.fr/2011/06/PINSOLLE/20687#nb7, 01 mai 2012.
50
HBO au rang de « séries cultes ». Un produit télévisuel a normalement un temps de vie très
limité, appartenant plus à un effet de mode qu'à un événement culturel mais aujourd'hui
encore, il n'est pas rare que des personnes regardent Sex and the city, même 8 ans après l'arrêt
de sa production. Grâce à leur avant-gardisme, les séries HBO sont toujours d'actualité.
L'esthétique des docu-soap a même été reprise par les networks traditionnels, comme pour la
série The Office, encore en production. Puisqu'elles suscitent l’intérêt des téléspectateurs et
des intellectuels, les dirigeants ont ensuite pensé à enrichir l'univers de leurs séries en vendant
des produits dérivés. Mais comment créer, chez le téléspectateur, le besoin d'acheter des
produits liés à un programme télévisuel ? Ils ont ainsi utilisé le cross-média : l'utilisation de
différents médias pour enrichir un contenu initial. Ils ont pu créer le buzz autour de la
campagne de promotion de la saison 2 de True Blood. En faisant croire en l'existence des
vampires, ils ont amener tous les curieux à faire des recherches sur internet, non pas pour
confirmer l'information, mais pour examiner l'étendu de l’événement. De nombreuses
publicités parodiques ont été réalisées par la chaîne à l'intention des vampires : la publicité
d'un motel pour vampire266, d'un site de rencontre internet267 ou encore une campagne très
sérieuse de lutte contre la discrimination qu'ils subiraient268. Ces spots publicitaires étaient
diffusés sur la chaîne et amenaient les téléspectateurs à en voir plus sur internet. HBO a payé
un lien commercial Google pour que, lorsque les internautes recherchent par exemple
« vampire insurance » (en référence à la publicité des assurances Geico), un lien pour voir un
preview de la nouvelle saison apparaisse immédiatement, ainsi qu'un lien vers le site True
Blood de HBO. Là, le monde des vampire prenait vie, avec des dizaines d'articles, de vidéos
et de publicités à leur intention. De plus, un lien menait à la boutique en ligne de HBO. Une
boisson TruBlood beverage a été commercialisée, au parfum orange, pour rappeler la célèbre
boisson de la série269. La stratégie de la chaîne est de faire vivre la série en dehors des
périodes de diffusion, pour ne pas être oubliée du public. Les impatients peuvent lire les
bandes dessinées True Blood, acheter des tee-shirts de la ville de Bon Temps, des bar le
Merlotte's, ou le Fangtasia, des tasses, des porte-clés, des posters, les cd de la musique
originale, des verres... Chaque type de public y trouve son compte : un livre de cuisine de The
Sopranos, une coque pour iPhone Eastbound & Down270, ou encore un jeu de rôle Game of
266 http://www.youtube.com/watch?NR=1&feature=endscreen&v=K9NfudxhlCY , 01 mai 2012. 267 http://www.youtube.com/watch?v=XmSjI6bTip0 , 01 mai 2012. 268 http://www.youtube.com/watch?v=GlFUedKO_l4&feature=related , 01 mai 2012. 269 http://trubeverage.com/ , 01 mai 2012. 270 Ben Best, Danny McBride, Jody Hill, Eastbound & Down (Kenny Powers), 2009-En production, HBO.
51
Thrones. Zack Enterlin, directeur de promotion de True Blood, affirme :
« There's a core audience for us to engage with – a broad group of genre fans, wether its
vampire, gamers, horror, fantasy or comic book fans – that are passionate, really engaged
and very active online. […] There are thousands of sites and blogs dedicated to those
genres, so it became a real great fit and place to cultivate this audience and hopefully
create some evangelists for the show. »271
Le but des dirigeants est donc d’amener le téléspectateur à un niveau supérieur de
l'appréciation du programme. Le merchandising permet de créer des fans, des aficionados, et
même des fanatiques. HBO a ainsi créé une certaine forme de « sériephilie ».
Nous avons vu que HBO réussit à persuader son public de la valeur de leurs
programmes. Leurs séries sont donc différentes, et de qualité. Mais la qualité est un élément
271 Op. cit., R. Thomas Umstead, « HBO sinks its teeth into True Blood campaign », Multichannel News, 28 juillet 2008. Nous traduisons : « Il y a une audience très solide, engagée avec nous – un grand groupe de fan de genre, que ce soit des fans de vampires, de jeux vidéos, de l'horreur, de l'heroic fantasy ou des comic books – ils sont passionnés, très engagés et très actifs sur internet. Il y a des centaines de site et de blogs dédiés à ces genres, donc c'est un endroit parfait pour conserver notre public et espérer créer des fanatiques de la série. »
52
Illustration 14: Jeu de carte Game of Thrones.
Illustration 15: Coque iPhone Eastbound & Down.
Illustration 13: Affiche pour la boisson Tru:Blood Beverage.
très subjectif, et d'après Pierre Bourdieu, « The work of art is an object which exists as such
only virtue of the (collective) belief which knows and acknowledges it as a work of art. »272.
Nous pouvons donc conclure que les séries de HBO sont de qualité car nous croyons qu'elles
le sont.
c. Entre convention et innovation
Nous avons vu que les séries produites par HBO semblent être différentes et de
qualité. Mais la plupart du temps, ces caractéristiques attribuées aux programmes sont
directement communiquées par la chaîne elle-même. Cependant, les directeurs, comme Chris
Albrecht, gardent toujours la syndication en tête afin de rentabiliser leur programmes. Un
paradoxe se pose alors : leurs séries doivent se différencier de celles des networks,
suffisamment pour que le téléspectateur reconnaisse la « touche » HBO, mais doivent tout de
même conserver certains éléments traditionnels afin de ne pas le perturber, et de convenir à la
programmation des réseaux nationaux. Il serait alors intéressant de savoir où se situent
réellement leurs séries sur le plan de l'innovation artistique par rapport aux autres chaînes.
Car, afin de créer ce rendez-vous hebdomadaire ou quotidien, les chaînes ont un certain
nombre d'obligations à respecter pour ne pas déstabiliser son public : les épisodes doivent être
de la même durée ; la cadence narrative de chaque épisode doit être identique ; les décors ne
peuvent être changés et les chaînes doivent créer des rituels : générique, phrases cultes etc...
Et bien sûr, la formule originale de la série doit rester inchangée. Ainsi HBO fait toujours en
sorte que ses programmes contiennent les caractéristiques essentielles qui font d'eux des séries
télévisées. C'est pourquoi, pour reprendre une phrase de Jean-Pierre Esquenazi, les chaînes
doivent toujours rechercher « l'équilibre entre convention et innovation »273.
Premièrement, nous allons nous intéresser à la classification des séries HBO dans le
paysage générique télévisuel. Les genres ont été définis grâce à la littérature depuis des
siècles. Selon Caweldi, il s'agit « d'une combinaison ou d'une synthèse d'un certain nombre
272 Op. cit., Christopher Anderson, « Producing an Aristocracy of culture in american television », The Essential HBO Reader, p. 23. Nous traduisons : « L’œuvre d'art est un objet qui n'existe qu'à l'unique condition de la conviction (collective) qui le reconnaît et l'admet comme étant une œuvre d'art. »
273 Op. cit., Jean-Pierre Esquenazi, « Production des séries », Les séries télévisées. L'Avenir du cinéma ?, p. 51.
53
de conventions culturelles spécifiques et d'une forme narrative plus générale »274. Ces genres
ont ensuite été naturellement adaptés au cinéma. Chacun d'eux dispose de ses propres
caractéristiques identificatrices. Grâce à ces codes, le spectateur sait, dès le début d'un film, à
quel genre celui-ci appartient. Par exemple, la structure du récit policier reste toujours la
même. Le schéma dramatique se déroule ainsi : une ville et l'ordre social sont dérangés par un
crime soudain, puis les gardiens de l'ordre mènent une enquête pour retrouver le criminel.
Deux récits coexistent, celui du crime et celui de l'enquête. De la même manière, trois types
de personnages sont indispensables : le criminel, l'enquêteur et les représentants de la société
dans laquelle se déroule le crime275. Les différentes catégories narratives et les fictions
populaires ont énormément influencé la fiction télévisuelle. D'après Jean-Pierre Esquenazi,
« elles [les séries] vont naturellement s'emparer des différentes conventions génériques, et les
adapter au contexte industriel et culturel télévisuel. »276 Mais, au cours de l'histoire, les séries
ont su modifier ces conventions pour les adapter aux contraintes formelles, sociales et
politiques de la télévision. Une série n'est pas un récit, c'est en réalité un ensemble de récits.
Chacun d'entre eux doit suivre un modèle stable, qui reproduit les caractéristiques d'un genre,
dans un milieu approprié à la situation. Ce modèle constitue la formule : « non pas scénario,
mais machine à fabriquer des scénarios, non pas ensemble de personnages mais réserve de
modèles de personnages, non pas mise en scène mais définition d'un cadre de mise en
scène. »277. L'exemple de CSI278 est intéressant : trois séries ont été créées, dans trois lieux
différents avec des personnages différents, mais la structure narrative reste la même, la
formule est inchangée279. Nous pouvons également affirmer qu'établir une formule revient à
fixer certains éléments d'un genre et à en garder d'autres variables. Par exemple, toujours dans
CSI, les héros et leur profession sont clairement définis et restent identiques d'un épisode à
l'autre, mais certains objets changent : les meurtriers et les crimes ne sont jamais les mêmes. Il
est alors logique que « l'établissement d'une formule suppose donc un rapport bien identifié à
un genre. »280. Chaque créateur doit établir une formule pour éventuellement voir son projet se
réaliser. HBO n'échappe pas à la règle puisque lorsqu'une formule n'est pas clairement définie,
274 Ibid, p. 90.275 Ibid, p. 89.276 Idem ibidem.277 Ibid, p. 90.278 Ann Donahue, Anthony E. Zuicker, CSI : Crime Scene Investigation (Les Experts), 2000-En production,
CBS.279 Op. cit., Jean-Pierre Esquenazi, « L'inscription de la série dans l'histoire de la fiction populaire. », Les Séries
Télévisées. L'Avenir du cinéma ?, p. 92.280 Ibid, p. 93.
54
la cohérence entre les épisodes est perdue et le public ne reste pas fidèle au programme. Et
comme chacune des séries de la chaîne câblée est définie par sa formule, elles s'inscrivent
inévitablement dans un genre. Ainsi, Sex and the city et Six Feet under appartiennent au genre
du mélodrame.
La chaîne est obligée de respecter les codes du genre auquel appartiennent ses séries.
Néanmoins, l'innovation de HBO réside dans la transformation de certains codes pour les
adapter au contexte social et à la société contemporaine. Deux types de mélodrames sont
observés : le mélodrame de la fille, dans lequel une jeune fille est jetée hors du foyer familial
dans le but de trouver l'homme avec lequel elle fondera à son tour une famille heureuse ; et le
mélodrame de la mère qui met en scène une mère de famille qui tente par tous les moyens de
garder son foyer heureux. Mais ces modèles sont aujourd'hui vivement critiqués, tant ils ne
semblent plus adaptés à la société actuelle et du fait de la représentation idéologique de la
famille idéale, fondée sur l'inégalité des sexes281. Sex and the city et Six Feet under
représentent alors le mélodrame dans une société incompatible à celui-ci. Les codes du genre
sont alors clairement abattus dès les cinq premières minutes du premier épisode. Dans le pilot
de Sex and the city, le téléspectateur voit à l'écran « Once upon a time... » puis la voix off
raconte l'histoire d'une jeune femme qui rencontre un prince de la finance à New York, jusqu'à
ce qu'il l'abandonne lâchement. L'histoire de la jeune fille innocente, hors du foyer familial est
alors un échec. La voix off dit alors : « Bienvenue à l'age de la non-innocence ! »282. Le récit
mélodramatique se déroule dans une société où l'amour a disparu : les quatre jeunes femmes
de la série tentent de trouver leur place dans un monde où l'amour et le sexe sont deux
éléments séparés. Bien que l'homme soit un personnage peu développé dans les mélodrames,
il est cependant la condition de l'existence même de celui-ci : la jeune femme doit trouver son
prince et la mère au foyer doit garder sa famille unie, grâce à l'apport financier d'un mari qui
travaille. Ainsi, dans le premier épisode de la série Six Feet under, les codes du mélodrame
sont détruits lorsque le père de famille meurt brutalement dans un accident de voiture. La
mère doit alors reconstruire sa famille sans père subvenant à leurs besoins. En plus d'un choc
émotionnel, il s'agit aussi d'un choc financier, puisque la famille doit alors reprendre
l'entreprise familiale.
281 Ibid, p. 95.282 Idem ibidem.
55
Les codes de certains genres ont alors été revisités par HBO, mais comment la chaîne
peut développer de telles séries, sans déconcerter son public ? Jean-Pierre Esquenazi tente de
répondre à cette question : « elles s'appuient sur l'expérience emmagasinée par la télévision
et son histoire culturelle. »283. Par exemple, Sex and the city est construite comme une
émission « omnibus » : la présentatrice est Carrie Bradshaw, elle s'adresse souvent
directement au téléspectateur, et parle constamment en voix off. Ses trois amies représentent
trois opinions différentes sur le sujet, comme lors d'un débat télévisé, et chacune illustre ses
propos par un « reportage » narrant leurs histoires respectives. Ainsi, la série est un « talk-
show », et chaque « émission » aborde un thème différent. Notons également que l'absence de
publicité sur HBO l'empêche de produire ce type d'émission, consacrées la plupart du temps à
des promotions diverses. Sex and the city permet alors d'aborder toutes les questions
concernant l'amour et la sexualité dans notre société, tout en gardant une certaine nostalgie du
mélodrame, souvent regretté. Dans Six Feet under, le créateur Alan Ball assume la destruction
des fondements du mélodrame tout en restant proche des préoccupations du genre. Bien que la
mère tente de reconstruire un foyer, les valeurs patriarcales du mélodrame ont disparu. Et bien
qu’œuvrant dans le but de rassembler les membres de sa famille, le happy-end
mélodramatique reste impossible.
HBO équilibre donc ses programmes entre conventions et innovations, entre
familiarité et nouveauté. Mais cette redéfinition des genres n'est pas nouvelle, et HBO n'est
pas le promoteur des séries de qualité, tel que nous le connaissons. En effet, les années 80 ont
vu un changement du paysage sériel télévisuel avec des séries comme Hill Street Blues, St
Elsewhere, Miami Vice284, Cagney and Lacey285. Dans les années 90 ensuite, se sont
développées NYPD Blues, E.R., X-Files286 et bien sûr Twin Peaks287 réalisé par David Lynch.
Paul Schrader relève même que le film noir a subi de grandes mutations grâce aux séries
Dragnet288, M-Squad289, Highway Patrol290 ou Lineup291. Les créateurs de HBO ne s'éloignent
283 Ibid, p. 98.284 Anthony Yerkovitch, Miami Vice (Deux flics à Miami), 1984-1990, NBC.285 Op. cit., Christopher Anderson, « Producing an Aristocracy of culture in american télévision », The Essential
HBO Reader, p. 26.286 Chris Carter, The X Files, 1993-2002, Fox.287 Mark Frost, David Lynch, Twin Peaks, 1990-1991, ABC. 288 Jack Webb, Dragnet 1967, 1967-1970, NBC.289 M-Squad, 1957-1960, NBC.290 Lee Berg, Don Brinkley, Highway Patrol, 1955-1959, NBC. 291 Paul Schrader, « Notes on film noir », Film genre reader III, p. 240.
56
d'ailleurs jamais beaucoup de l'héritage sériel car ils ont tous été formés par les grands
networks, CBS, NBC et ABC. La chaîne a d'ailleurs l'habitude de fournir les autres chaînes en
programmes, comme la Fox. En octobre 1990, la chaîne câblée crée HBOIP (HBO's
Independant Production) dans le but de créer des séries télévisées pour les networks et les
chaînes câblées. Leur stratégie était de se spécialiser dans la création de sitcoms et de se
promouvoir en tant que comedy-boutique. HBO était déjà très célèbre pour ses stand-up
comedies, et a fait découvrir aux téléspectateurs des humoristes aujourd'hui très célèbres292.
Ce sujet est donc une récurrence pour la chaîne qui peut bénéficier d'une certaine crédibilité.
Son premier client est la Fox, jeune chaîne créée en 1986 par Rupert Murdoch, qui souhaite se
différencier des Big Three déjà existants, en ciblant un public plus jeune. Dès 1991, le réseau
était capable de fournir des programmes de prime-times et était donc dans le besoin urgent de
nouvelles séries. Cette année-là, HBO lui fournit alors ROC293, et Down The Shore294, suivis
de The Ben Stiller Show295 en 1992, présenté par l'acteur à l'époque très peu connu, et qui
reçut un Emmy Award pour la « Remarquable performance individuelle pour l'écriture d'un
programme de variété ou musical »296. HBO produit également pour la FOX la sitcom
Martin297, qui met en scène l'humoriste et acteur Martin Lawrence, également très peu célèbre
en 1992, et Everybody Loves Raymond298 pour CBS. HBO connaît donc très bien les codes de
la télévision gratuite, elle sait s'adapter aux publicitaires et fournir un programme familiale.
Bien que HBO réalise de gros bénéfices grâce aux abonnements, il est évidemment
impossible qu'elle rentabilise ses séries en moyenne deux fois plus chères que celles des
autres networks. La chaîne profite alors de la renommée de ses programmes pour les vendre
sur un marché secondaire. Ce qu'il est important de connaître dans le fonctionnement des
réseaux américains, est le système de syndication. La loi sur les droits audiovisuels créée en
1971 est une étape fondamentale dans l'histoire des médias américains. Elle permet aux
producteurs de vendre leurs droits aux réseaux, uniquement pour un petit nombre de diffusion.
292 Op. cit., Avi Santo, « Para-Television and discourses of distinction », It's not TV. Watching HBO in the post-television era, p. 22-23.
293 Stan Daniels, ROC, 1991-1994, Fox.294 Alan Kirschenbaum, Down The Shore, 1992-1993, Fox.295 Judd Apatow, Jeff Kahn, Ben Stiller, The Ben Stiller Show, 1992-1993, Fox. 296 http://www.emmys.com/award_history_search?
person=ben+stiller&program=&start_year=1949&end_year=2011&network=All&web_category=All&winner=All, 12 février 2012.
297 Chuck Vinson, Martin : The Parents are coming, 1992-1997, Fox.298 Philip Rosenthal, Everybody Loves Raymond, 1996-2005, CBS.
57
Ils peuvent également vendre leurs séries en un bloc et non épisode par épisode. Dès que la
série s'est maintenue assez longtemps (90 épisodes au moins), elle est libre en totalité pour les
rediffusions : c'est la syndication. L'avantage est qu'avant que la chaîne n'atteigne les 90
épisodes, elle garde l'exclusivité de la diffusion, mais qu'à la syndication, elle puisse continuer
la production de la série grâce aux revenus engendrés par la vente299. Il va sans dire que HBO
profite amplement de ce système, au même titre que les autres chaînes. Les producteurs de
série ont donc la possibilité de gagner beaucoup plus d'argent. Puisque les réseaux cherchent
toujours à renouveler leurs programmes, les producteurs indépendants peuvent proposer leurs
idées. HBO propose alors son programme Tales from The Crypt à la FOX, mais vend la série
sous un autre nom : HBO's Tales from The Crypt. La chaîne se permet alors une publicité
gratuite sur un grand réseau et ainsi attirer encore plus de souscriptions. Mais les dirigeants de
la chaîne ne peuvent revendre leurs épisodes violents et vulgaires à des chaînes familiales.
HBO auto-censure alors ses propres séries, ne vendant que les versions retournées
spécialement pour la syndication. Nous pouvons relever que, lors du tournage de leur
première sitcom, Dream On, HBO tournait déjà deux versions de chaque épisode : une pour
une diffusion sur HBO, et une autre sans nudité ni vulgarité, en gardant la syndication à
l'esprit. Ainsi, elle pouvait revendre les épisodes aux autres chaînes. Ce type de tournage est
resté et c'est ainsi que Sex and the City, a été tourné. De plus, elle s'est également chargée de
couper chaque épisode pour y insérer des coupures publicitaires. En 2005, HBO vendit les
épisodes de The Sopranos à la chaîne A&E à un coût record de 2,5 millions de dollars par
épisode300. Cette syndication permet très facilement de rentabiliser ce programme dont le
budget était de 3 millions de dollars par épisode. En 2004, Sex and the city a rapporté 350
millions de dollars en vendant ses épisodes à TBS301. HBO sait parfaitement que ce qui plaît à
ses abonnés ne plaît pas toujours aux restes des téléspectateurs. La sitcom Arli$$ par exemple,
n'a pas bénéficié d'une importante syndication: elle n'attirait que très peu de téléspectateurs de
Friends ou Will & Grace302, les deux sitcoms les plus regardées de l'époque. Lorsqu'une série
n'obtient pas le succès prévu sur HBO, la chaîne peut alors tenter de revendre les épisodes, sur
son territoire ou à l'étranger. La série sur la Seconde Guerre Mondiale, Band of brothers, qui
fut diffusée le 9 septembre 2001, soit 72 heures avant les attentats du 11 septembre, ne reçut
299 Op. cit., Jean-Pierre Esquenazi, Les Séries télévisées. L'Avenir du cinéma ?, p. 18. 300 Andrew Hampp, « Can A&E collect on Sopranos? By limiting ads, net hopes to create a ratings champ that
will pay off long-term », Advertising Age, 8 janvier 2007.301 Op. cit., http://www.monde-diplomatique.fr/2011/06/PINSOLLE/20687#nb7, 03 mai 2012. 302 David Kohan, Max Mutchnik, Will & Grace, 1998-2006, NBC.
58
pas le franc succès attendu par les dirigeants. Sur toutes les chaînes, les américains pouvaient
voir une véritable « nouvelle guerre » se préparer sous leurs yeux et le programme
« distrayant » de HBO devint alors vite anachronique. Mais vu les circonstances, Band of
brothers ne fut pas un échec total. La syndication fut concluante et la chaîne britannique
BBC2 racheta les épisodes, à 1 million de dollars par épisode303. Très présente au MIPTV de
Cannes (le Marché International des Contenus Audiovisuels et Numériques), HBO a vendu en
2008 l'exclusivité de ses séries au bouquet français Orange Cinéma Série pour une somme
inconnue304. Orange Cinémax a donc pu diffuser True Blood, Generation Kill305, John
Adams306 et In Treatment307. La chaîne anglaise câblée BskyB a acheté en 2010 le catalogue
entier des séries HBO308. Puisque la chaîne diffuse ses séries dans 59 pays à travers le monde
grâce à la répartition de son bouquet international, elle peut ensuite vendre ses séries aux
chaînes locales de tous ces pays.
Les différences avec les autres networks ne résident donc qu'en quelques points : la
vulgarité, la violence, la nudité et l'absence de publicités. La modification de certains codes
génériques ne dérange absolument pas les autres chaînes, habituées à des programmes
« classiques » et familiaux. Marc Leverette releva la phrase de Bianco : « Take away the
jittery camera work –and the breasts, profanity and violence that mark it as a pay-cable
product– and you could be watching Hunter309. »310.
Pour conclure, la majorité des abonnés de HBO ont déjà été éduqués par la télévision
gratuite. La chaîne doit donc proposer des programmes à la fois familiaux et innovants. Ien
Ang a introduit l'hypothèse que les producteurs basent leurs séries sur un plaisir populaire et
ce plaisir, pour être retrouvé d'une série à une autre, ne peut être totalement nouveau ou
303 Andrew Wallenstein, « Syndicated Band plays on : HBO shopping mini to cable outlets. », The Hollywood Reporter, 24 octobre 2003.
304 http://www.orangeinfo.fr/1816-hbo-l%E2%80%99accord-avec-orange-est-parti-pour-durer.html , 03 mai 2012.
305 Ed Burns, David Simon, Generation Kill, 2008, HBO. 306 Tom Hooper, John Adams, 2008, HBO. 307 Hagai Levi, In Treatment (En Analyse), 2008, HBO. 308 James Robinson, « BskyB buy complete HBO TV catalogue », The Guardian, 29 juillet 2010.309 Frank Lupo, Hunter (Rick Hunter), 1984-1991, NBC. 310 Op. cit., Mark Leverette, « Cocksucker, motherfucker, tits », It's not TV, Watching HBO in the post-television
era , p. 140. Nous traduisons : « Enlever le travail nerveux de la caméra –et les seins, le blasphème et la violence qui le définit comme un produit un câble– et vous pourriez être en train de regarder Hunter. ».
59
expérimental. Horace Newcomb, professeur à l'Université de Géorgie et directeur des
Peabody Awards, affirme d'ailleurs que le succès de The Sopranos repose précisément sur le
degré de familiarité avec les séries déjà existantes, couplé avec les modifications du genre
apportées par HBO311. En effet, la chaîne ne peut réaliser de grandes innovations sans prendre
en compte la satisfaction du public.
311 Op. cit., Avi Santo, « Para-Television and discourses of distinction », It's not TV, Watching HBO in the post-television era, p. 28.
60
Conclusion
Grâce à sa connaissance des autres networks, la chaîne HBO a su renouveler
suffisamment d'éléments pour distinguer ses programmes des autres, tout en conservant
l'essence même de la série télévisée. Mais les innovations les plus flagrantes sont de l'ordre
économique et marketing. Les stratégies de communications agressives de HBO ont permis
d'ancrer l'image d'institution culturelle et artistique de la chaîne dans la culture populaire
américaine. Cette prouesse a contribué à l'installation de la réputation de la qualité de ses
programmes et est en grande partie à l'origine de son succès. De plus, grâce à sa méthode de
production marginale, elle a pu s'imposer comme producteur dans le monde très fermé des
réseaux américains. Mais contrairement à ce qu'elle affirme, les networks et elle œuvrent dans
un même but : rassembler le plus possible de téléspectateurs. Car une fois le processus de
création terminé, la série est diffusée. Grâce à des outils comme l'entreprise Nielsen, la chaîne
peut savoir avec précision combien de téléspectateurs, et appartenant à quelle tranche d'âge,
ont regardé le programme. Mais HBO reste très secrète sur la question, ne dévoilant jamais
ses audiences. Chris Albrecht, président de la chaîne, va même jusqu'à insinuer que les
dirigeants basent leurs décisions sur des intuitions, sans jamais observer les études de marché
ou les audiences312. Il est cependant très difficile de croire que la société dépense son milliard
de dollars de profit annuel313 sur des pressentiments. De même, il est difficile de croire que
pour décider de la continuité ou de l'arrêt d'une série, la chaîne ne regarde aucun chiffre
d'audience. En effet, nous pouvons remarquer que la plupart des séries stoppées ces dernières
années, voyaient une forte chute du nombre de téléspectateurs. Prenons la série Luck, se
déroulant dans le milieu des courses hippiques : elle a officiellement était annulée car trois
chevaux ont été blessés ou tués sur le tournage. L'association protectrice des animaux PETA a
demandé qu'une enquête soit faite sur le tournage. Nous ne pouvons imaginer qu'une société
de l'envergure de HBO se sente tellement menacée par PETA, qu'elle finisse par annuler un
programme pouvant lui faire gagner des millions de dollars. Lorsque nous nous intéressons
aux audiences, nous remarquons que le premier épisode n'avait réuni que 1,1 million de
téléspectateurs. Celui-ci n'a visiblement pas trouvé son public puisque le reste de la saison ne
dépassait pas les 500 000 personnes par soir. Ainsi, le deuxième épisode a subi une baisse
312 Op. cit., Christopher Anderson, « Drama overview », The Essential HBO Reader, p. 33-34.313 Idem ibidem.
61
significative de 64%314. Rappelons tout de même que des séries comme The Sopranos étaient
visionnées par 11 millions de téléspectateurs en moyenne, tout support confondu. De la même
manière, l'épisode pilote de Game of Thrones a réuni une audience relativement moyenne de
2,2 millions de téléspectateurs315 mais le dernier en a rassemblé 3 millions316, soit une hausse
de 36%. Cette série fut immédiatement renouvelée pour une saison 2. Grâce à ces deux
exemples, nous pouvons en conclure que les dirigeants de la chaîne observent, certainement
de très près, les résultats chiffrés. Contrairement à ce qu'ils semblent affirmer, ils ne décident
pas de la tenue des série en se basant sur leur potentiel culturel ou sur l'appréciation du public
puisque la série Luck a obtenu une note de 75 sur 100317 par les critiques de la presse contre
79318 pour Game of thrones. Ainsi HBO, comme n'importe quelle autre chaîne ou entreprise,
ne prend pas ses décisions à la légère et semble en premier lieu s'assurer de la viabilité
financière de ses projets.
Comme nous avons pu le constater, un fossé s'est installé entre l'image de HBO et la
réalité de l'entreprise. Mais les téléspectateurs se prêtent volontiers au jeu et la considèrent
comme une institution artistique à part entière. Ses séries télévisées n'ont pas transformé la
forme sérielle mais juste enrichie. Mêlant réalisme et pastiches, elles sont en fait très
clairement inspirées des programmes télévisuels déjà existants. En ne s'enfermant pas dans les
exigences des annonceurs, HBO s'est plus que tout mise à l'écoute de son public. Mais sa
réputation s'est surtout faite grâce aux universitaires eux-mêmes. A la fin des années 90, Alain
Carrazé et Martin Winckler constataient qu'il était encore impossible en France de dire qu'on
aimait les séries télévisées319. Au États-Unis, HBO est surtout regardée par les classes aisées,
au niveau scolaire et culturel élevé. C'est donc ce public qui a contribué à l’élévation du
programme jusqu'à le qualifier de « huitième art »320. D'un point de vu économique, son
innovation a été de savoir faire face à l’oligopole des networks américains et de s'imposer, en
moins d'une décennie, sur le marché des séries télévisées. Elle a su trouver des alternatives
314 http://www.actucine.com/series/audiences-series-us-alcatraz-dr-house-et-luck-coulent-56399.html, 22 avril
2012. 315 http://www.actucine.com/series/audiences-series-us-games-of-thrones-fait-un-score-en-demi-teinte-
43167.html , 22 avril 2012.316 Idem ibidem.317 http://www.metacritic.com/tv/luck , 22 avril 2012. 318 http://www.metacritic.com/tv/game-of-thrones , 22 avril 2012.319 Op. cit., http://www.monde-diplomatique.fr/2011/06/PINSOLLE/20687, 06 mai 2012. 320 Idem ibidem.
62
aux moyens financiers apportés par les publicitaires. Ainsi, sa présence sur les marchés
secondaires lui garantissent une stabilité économique. Grâce à l'entretient de cette distinction,
elle a ouvert une nouvelle voie dans laquelle se sont engouffrées de nombreuses chaînes
câblées. Showtime et FX lui ont emboîté le pas, créant des séries comme Dexter321 ou The
Shield322. Plus récemment, c'est la chaîne AMC qui reçut de très bonne critiques pour Mad
Men323 et Breaking Bad324. Il y a quelques années, le président de HBO, Chris Albrecht fut
renvoyé suite à ses problèmes juridiques. Il fut immédiatement embauché par la chaîne câblée
Starz, qui souhaitait développer des séries télévisées. En très peu de temps, il appliqua la
« méthode HBO » : de gros budgets, des acteurs réputés, des saisons courtes, une promotion
de grande ampleur325... C'est ainsi qu'ont été créé Magic City326, Boss327 ou Spartacus328, très
appréciées par la critique. Nous pouvons alors constater que la créativité artistique des séries
HBO repose en grande partie sur leur mode de production, de communication et de promotion
très particulier. Malgré leur volonté d'être considérées comme des produits culturels avant
tout, les séries sont entièrement dépendantes de leur valeur économique. Mark Leverette
conclue alors en affirmant : « all culture is made in an industrial complex »329.
321 James Manos Jr., Dexter, 2006-En production, Showtime. 322 Shawn Ryan, The Shield, 2002-2008, FX. 323 Matthew Weiner, Mad Men, 2007-En production, AMC.324 Vince Gilligan, Breaking Bad, 2008-En production, AMC.325 http://www.deadline.com/tag/chris-albrecht-starz/ , 06 mai 2012. 326 Mitch Glazer, Magic City, 2012-En production, Starz.327 Fahrad Safina, Boss, 2011-En production, Starz.328 Steven S. DeKnight, Spartacus : Gods of the arena, 2011-En production, Starz.329 Op. cit., Mark Leverette, « Cocksucker, motherfucker, tits », It's not TV, Watching HBO in the post-television
era, p. 144. Nous traduisons : « Toute culture est faite dans un complexe industriel ».
63
Filmographie 330
Filmographie principale :
1997-2003 : Oz.
Créateur : Tom Fontana
Casting : Ernie Hudson, J.K. Simmons et Lee Tergesen.
Producteurs : The Levinson/Fontana Compagny, Rysher Entertainment.
Diffuseur : HBO
Durée : 6 saisons soit 56 épisodes.
Format : 60 minutes, un épisode de 100 minutes (serie final).
Genre : Drame, Thriller.
1998-2004 : Sex and the city.
Créateur : Darren Star
Casting : Sarah Jessica Parker, Kim Cattrall et Kristin Davis.
Producteurs : Home Box Office, Darren Star Production, Sex and the city Production.
Diffuseur : HBO
Durée : 6 saisons soit 94 épisodes.
Format : 30 minutes.
Genre : Sitcom, Romance.
1999-2007 : The Sopranos (Les Sopranos).
Créateur : David Chase
Casting : James Gandolfini, Lorraine Bracco, Edie Falco
Producteurs : Home Box Office, Brillstein Entertainment Partners et The Park Entertainment.
Diffuseur : HBO.
Durée : 6 saisons soit 86 épisodes.
Format : 58 minutes330 La filmographie est séparée en deux catégories. La filmographie principale apporte des informations
complémentaires aux séries que nous avons étudiées précédemment. Elles sont classées chronologiquement, par date de première diffusion, puis par durée de diffusion. La filmographie secondaire répertorie les œuvres mentionnées dans notre développement. Elle est elle-même constituée de films, de séries diffusées sur HBO ou non, et de publicités télévisées.
64
Genre : Drame, crime.
2001 : Band of brothers (Frères d'armes).
Créateur : Steven Spielberg, Tom Hanks
Casting : Scott Grimes, Damian Lewis, Ron Livingston.
Producteurs : DreamWorks Television, Home Box Office, Playtone et BBC.
Diffuseur : HBO.
Durée : 705 minutes soit 10 épisodes.
Format : 70 minutes.
Genre : Drame, Guerre.
2001-2005 : Six Feet under (Six Pieds sous terre).
Créateur : Alan Ball
Casting : Peter Krause, Michael C. Hall, Frances Conroy
Producteurs : Home Box Office, The Greenblatt Janolli Studio, Actual Size Production.
Diffuseur : HBO
Durée : 5 saisons soit 63 épisodes.
Format : 55 minutes
Genre : Drame
2004-2011 : Entourage.
Créateur : Doug Ellin
Casting : Kevin Conolly, Adrian Grenier, Kevin Dillon
Producteurs : Home Box Office, Leverage Management
Diffuseur : HBO.
Durée : 8 saisons soit 96 épisodes.
Format : 30 minutes.
Genre : Sitcom.
2008- En production : True Blood.
Créateur : Alan Ball
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Casting : Anna Paquin, Stephen Moyer, Sam Trammell
Producteurs : Home Box Office, Your Face Goes Here Entertainment
Diffuseur : HBO
Durée : 5 saisons soit 52 épisodes.
Format : 60 minutes.
Genre : Drame, Thriller, Romance.
2011 : Luck.
Créateur : David Milch
Casting : Dustin Hoffman, Dennis Farina, John Ortiz
Producteurs : David Milch, Michael Mann et Carolyn Strauss.
Diffuseur : HBO
Durée : 1 saison de 9 épisodes
Format : 52 minutes
Genre : Drame, sport.
2011- En production : Game of Thrones (Le Trône de fer).
Créateur : David Benioff, D.B. Weiss
Casting : Peter Dinklage, Lena Headey, Michelle Failey
Producteurs : Home Box Office, Television 360, Grok ! Studio, Generator Entertainment,
Bighead Littlehead, Embassy Films
Diffuseur : HBO
Durée : 2 saisons
Format : 60 minutes
Genre : Drame, Fantasy
Filmographie secondaire :
Films :1957 : The Amazing Colossal Man, Bert I. Gordon.
1970 : Sometimes a Great Notion, Paul Newman.
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1978 : The Attack of the Killer Tomatoe, John DeBello.
1979 : The Great Santini, Lewis John Carlino.
1981 : Raiders of The Lost Ark,Steven Spielberg.
1983 : Terms of Endearment, James L. Brooks.
1984 : Ghost busters, Ivan Reitman.
1998 : Saving Private Ryan, Steven Spielberg.
1999 : American Beauty, Sam Mendes.
2010 : Burlesque, Steve Antin.
Séries diffusées sur HBO :
1989-1996 : Tales from the Crypt, William Gaines.
1990-1996 : Dream On, David Krane, Martha Kauffman.
1992-1998 : The Larry Sander's show, Dennis Klein, Gary Shandling.
1996-2002 : Arli$$, Ed Smart.
2004 : El Perro y el Gato, Chrissie Hines.
2000- En production : Curb your enthusiasm (Larry et son nombril), Larry David.
2004-2006 : Deadwood, David Milch.
2005 : The Comeback (Mon Comeback), Lisa Kudrow, Michael Patrick King.
2005-2007 : Rome, Bruno Heller, William J. MacDonald, John Milius.
2008 : Generation Kill, Ed Burns, David Simon.
2008 : In Treatment (En Analyse), Hagai Levi.
2008 : John Adams, Tom Hooper.
2009 : Celebrity Habla, Alberto Ferreras.
2009-En production : Eastbound & Down (Kenny Powers), Ben Best, Danny McBride, Jody
Hill.
2010 : The Pacific, Steven Spielberg, Tom Hanks.
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Séries diffusées sur les autres chaînes :
ABC :
- 1990-1991 : Twin Peaks, Mark Frost, David Lynch.
AMC :
- 2007-En production : Mad Men, Matthew Weiner.
- 2008-En production : Breaking Bad, Vince Gilligan.
CBS :
- 1996-2005 : Everybody Loves Raymond, Philip Rosenthal.
- 2000-En production : CSI : Crime Scene Investigation (Les Experts), Ann Donahue,
Anthony E. Zuicker.
Fox :
- 1990-2000 : Beverly Hills 90210, Darren Star.
- 1990-1994 : In Linving Color, Keenen Ivory Wayan.
- 1991-1994 : ROC, Stan Daniels.
- 1992-1993 : Down The Shore, Alan Kirschenbaum.
- 1992-1993 : The Ben Stiller Show, Judd Apatow, Jeff Kahn, Ben Stiller.
- 1992-1997 : Martin : The Parents are coming, Chuck Vinson.
- 1992-1999 : Melrose Place, Darren Star.
- 1993-2002 : The X Files, Chris Carter.
- 1993-2005 : N.Y.P.D. Blues (New York Police Blues), Steven Bochco.
NBC :
- 1955-1959 : Highway Patrol, Lee Berg, Don Brinkley.
-1957-1960 : M-Squad.
- 1967-1970 : Dragnet 1967, Jack Webb.
- 1981-1987 : Hill Street Blues (Capitaine Furillo), Steven Bochco.
- 1982-1988 : St. Elsewhere (Hôpital St. Elsewhere), Joshua Brand, John Falsey, Tom
Fontana.
- 1984-1990 : Miami Vice (Deux flics à Miami), Anthony Yerkovitch.
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- 1984-1991 : Hunter (Rick Hunter), Frank Lupo.
- 1990-1998 : Seinfeld, Larry David, Jerry Seinfeld.
- 1994-2004 : Friends, David Crane, Martha Kauffman.
- 1994-2009 : E.R. (Urgences), Michael Crichton.
- 1998-2006 : Will & Grace, David Kohan, Max Mutchnik.
Showtime :
- 2006-En production : Dexter, James Manos Jr.
Starz :
- 2011-En production : Boss, Fahrad Safina.
- 2011-En production : Spartacus : Gods of the arena, Steven S. DeKnight.
- 2012-En production : Magic City, Mitch Glazer.
Publicités :
2007 : The Sopranos Lives, Simon McQuoid,
2009 : Terrorist, VEM.
2011 : Yacht,Tom Kuntz.
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