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© Gregorian Biblical Press 2014 - Tutti i diritti riservati Pontificia Universitas Gregoriana Estratto Roma 2014 - 95/4 Gregorianum AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I., Dialogue des libertés et Eucharistie du Fils éternel. La christologie filiale de Louis Bouyer

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    Pontificia Universitas Gregoriana

    Estratto

    Roma 2014 - 95/4

    Gregorianum

    JACEK ONISZCZUK, S.I., Caino come tipo antitetico di Cristo nella PrimaLettera di Giovanni

    AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I., Dialogue des libertés et Eucharistie du Fils éternel. La christologie filiale de Louis Bouyer

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    Pontificia Universitas Gregoriana

    Roma 2014 - 95/4

    Gregorianum

    LOUIS BOUYER (1913-2004)

    MICHAEL HEINTZ, An Encounter with the Word made Flesh. Louis Bouyeron Eucharistic Communion

    AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I., Dialogue des libertés et Euchari-stie du Fils éternel. La christologie filiale de Louis Bouyer

    JACQUES SERVAIS, S.I., La «Sagesse», nombre d’or de la théologie selon Louis Bouyer

    KEITH LEMNA, Louis Bouyer and Alfred North Whitehead. A Dialogue in Trinitarian Cosmology

    CYRUS P. OLSEN III, Myth and Culture in Louis Bouyer. On Louis Bouyer’s Theology of Participation

    CÉSAR CARBULLANCA, Soteriología y martirio del justo. La pasión deljusto y su sentido expiatorio

    MANUEL PALMA RAMÍREZ, «Donde el amor inventa su infinito». Huellasde la presencia metafísica en La voz a ti debida de Pedro Salinas

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    GREGORIANUM 95, 4 (2014) 699-724 Amaury BEGASSE DE DHAEM, S.I.

    Dialogue des libertés et eucharistie

    du Fils éternel

    La christologie filiale de Louis Bouyer

    Demandons- -

    ci de réponse: en quoi et comment le fait que le Fils de Dieu que la Parole de Dieu se

    soit faite chair, dans un individu de notre histoire, Jésus de Nazareth, peut-il tous nous concerner, à ce point que notre salut à tous en dépende, et soit rendu possible par cela seul que Jésus a fait parmi nous?1.

    nous a offerte dans Le Fils éternel. Les termes à travers lesquels il formule ce qui est pour lui «la question christologique»2, indiquent le chemin de sa

    3 Parole de Dieu» sous- , de son incarnation historique, en Israël et en Jésus, et de

    4 -

    universalité du destinataire. Si ce premier volume de sa trilogie trinitaire5 a pu -

    raire on saluera toutefois la validité pérenne de son attitude bienveillante et a foi, juive et chrétienne,

    1 L. BOUYER, Le Fils éternel. Théologie de la Parole de Dieu et christologie, Paris 1974,

    476. 2 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 476. 3 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 14. 4 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 7. 5 Suivront Le Père invisible. Approches du mystère de la divinité, Paris 1976 et Le

    Consolateur. Esprit Saint et vie de grâce, Paris 1980.

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    700 AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I.

    porte en elle»6 , sur le traitement des données positives de la Tradition ou

    axe majeur, rien perdu de sa fécondité. Nous ne nous attarderons donc pas sur tout ce qui pourrait y apparaitre daté, pour chercher à ressaisir ce qui pouvait demeurer inchoatif dans la formulation des Réflexions finales7 et ainsi

    8 , mais prend chair à la lumière de centré sur

    9. Notre relecture de sa christologie épousera donc les divers temps du déploiement cosmique, historique et

    sacramentum), suscitée par la Parole de

    qui le Verbe se fait chair et sang (res et sacramentum) pour que chair et sang renaissent enfants de Dieu (res tantum) en prenant part à la gloire filiale du Monogène (Jn 1,12-18).

    I. CHRISTOLOGIE DE LA MISÉRICORDE

    our notre auteur, exprime, dès la création, aussi bien le «principe et fondement» que la finalité sotériologique de la mission du Christ, Fils éternel du Père «riche en miséricorde» (Ep 2,4). Elle prévient, enserre et porte à son achèvement le dialogue des libertés, par-delà la faute. 1. Dialogue des libertés et péché

    Tout comme la liturgie eucharistique débute par la communication de la

    initiale), aussitôt traduite en termes de miséricorde (liturgie pénitentielle), de même la trajectoire de la Parole créatrice apparaît comme un don de Dieu (Gn 1 2) subitement redoublé en promesse et pardon, qui englobe et sur-monte, du moins en espérance, la faute originelle (Gn zon biblique et patristique de «la création du monde comme création des

    6 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 18. 7 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 469-513. 8 B. SESBOÜÉ, Les «trente glorieuses» de la christologie (1968-2000), Donner raison 34,

    Bruxelles 2012, 191. 9 L. BOUYER, Le mystère pascal. Méditation sur la liturgie des trois derniers jours de la

    Semaine Sainte, Lex Orandi 4, Paris 1945; Eucharistie. Théologie et spiritualité de la prière eucharistique ; Le Fils éternel (cf. nt. 1), 282-284.286; 352-356; 497.

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    DIALOGUE DES LIBERTÉS ET EUCHARISTIE DU FILS ÉTERNEL 701

    libertés»10

    -table faillibilité du partenai

    -ture» et «le fond même de la création», et qui considère la chute «inhérente à sa création comme création de libertés vraiment libres»11 pose toutefois question sur le sens de la création ex plenitudine Dei et sur la conception de la

    ident latin12 héritera à travers le Lombard13. Pour le Maitre des sentences en effet, le premier homme, paré de nombreux dons naturels et

    -t succomber à la tentation extérieure.

    --être cette vision latine

    traditionnelle entend-elle nous faire pressentir que le premier péché fut, à

    -il 14, voit

    dans la faute des origines un risque inhérent au jeu fragile des libertés créées,

    liberté, la Parole créatrice est dès le commencement miséricordieusement sanante. Si donc on émettra quelques réserves sur ses prémisses qui tendent à

    le rejoindra plus facilement dans ses conclusions, donnant avec Gesché à la notion de salut le sens large de «destinée»15, incluant mais ne se réduisant pas à la rédemption du péché.

    dans un premier temps les points de vue thomistes et scotistes16.

    10 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 498; cf. 21-22; 372; 496 évoquant Grégoire de

    Nysse. 11 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 498. 12 Cf. par exemple BONAVENTURE, Brev. II, 9-11; THOMAS D QUIN¸ ST I, q. 94-97. 13 PIERRE LOMBARD, Sent. II, d. XIX-XX; XXII-XXV, in Les Quatre Livres des Sentences.

    Deuxième Livre, Sagesses chrétiennes, Paris 2013, 231-248.258-303. 14 IRÉNÉE DE LYON, Adv. haer. IV, 40, 3, SC 100, Paris 1965, 981. 15 A. GESCHÉ, Dieu pour penser. V. La destinée, Paris 1995. 16 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 419-420; 440 et 473-476.

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    702 AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I.

    semble réduire au seul motif de la rédemption. Dans le premier article de sa

    par relever que son premier motif provient de la nature de Dieu qui est la bonté

    17, ce que Rahner -communication de Dieu. Ce premier

    a parte Dei avant de la considérer a parte hominis, ne nous parait pas justifier la critique de notre auteur18. Ensuite, le Docteur angélique se demande, dans le second

    nre humain. Après

    cinq motifs de convenance. La première série est ordonnée à la promotion de

    la charité pour culminer dans la divinisation (ad plenam participationem divinitati Factus est Deus homo, ut homo fieret Deus -communication divine y apparait à nouveau comme première finalité. La deuxième série est

    à travers la satisfaction19. Notons, ici comme ailleurs20, que Thomas a envi-sagé la divinisation avant la libération du péché. Enfin, dans un troisième

    -ture21 sera en principe négative, mais prudente: elle lui paraît seulement plus probable (magis assentiendum videtur), sans exclure la position contraire22. La séquence des affirmations de ces trois articles conduit à nuancer la position du Docteur commun, un peu hâtivement traitée par notre auteur23. On peut de même estimer excessif le jugement de Bouyer sur la position scotiste, qui heurterait de façon «extrêmement grave» aussi bien le donné

    24. Il la comprend comme signi-

    17 THOMAS D QUIN, ST III, q. 1, a. 1, resp: «pertinet autem ad rationem boni ut se aliis

    communicet». 18 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 419. 19 THOMAS D QUIN, ST III, q. 1, a. 2, resp. 20 THOMAS D QUIN, ST III, q. 3, a. 8, resp.; q. 22, a. 1, resp.; q. 32, a. 1, resp. 21 Thomas ne sera pas toujours fidèle à ce principe, comme en témoigne ST III, q. 3, a. 5-7.

    Sur ce point, on comprend davantage la sévérité de Bouyer (Le Fils éternel [cf. nt. 1], 420-

    L. BOUYER, Le Fils éternel, article 8»).

    22 THOMAS D QUIN, ST III, q. 1, a. 3, resp. 23 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 419. 24 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 440; cf. 473-476.

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    DIALOGUE DES LIBERTÉS ET EUCHARISTIE DU FILS ÉTERNEL 703

    -même sa propre fin

    e siècle, sur laquelle il se montre assez sévère25

    entendue aussi bien dans le sens de Ep 1,4-6 ou Col 1,15-16 que dans celui de -communication de la bonté divine, comme médiatrice de la divinisa-

    tion, honorant justement dans le Credo la distinction entre le «pour nous les hommes» (en tout état de cause) et «pour notre salut» (dans la mesure où

    difficilement être considéré comme simplement redondant. de notre auteur, sa conception de la création comme dialogue des libertés impliquant le risque du péché lui permet toutefois dans un second temps de réconcilier les deux écoles en honorant la part de vérité propre à chacune:

    -né de toute création. Et,

    e -même a son principe éternel

    26.

    Cette prise de position se fonde naturellement sur la relation entre éternité divine et temporalité humaine que Bouyer énonce par ailleurs:

    -à-dire que notre humanité est assumée à un moment défini du temps. Mais de sa part à lui, cassume»27 mps second

    autant divinisatrice que rédemptrice.

    II. CHRISTOLOGIE DE LA PAROLE: DE DIEU À L HOMME

    À la communication de Dieu et à la célébration initiale de sa miséricorde, débouchant sur la louange de sa gloire (Gloria) succède dans la liturgie

    4

    25 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 440-441; cf. 12; 469-470. 26 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 498. 27 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 486.

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    même, enracinée dans la miséricorde divine créatrice qui inclut et surmonte le péché, la christologie de Bouyer se déploie dans l

    28, le second concept étant, selon une suggestive intuition de notre auteur, inhérent au premier:

    notre langage, et finalement fait sienne toute notre condition humaine29.

    aussi bien à travers les «préparations»30 31

    1. Dieu dit: la geste créatrice

    tout le créé, au sommet (Gn 1) et au centre (Gn 2) duquel surgit le seul être de

    viendra «planter sa tente» (Jn 1,14) à «la plénitude du temps» (Ga 4,4). Le -

    32

    alpha et oméga :

    28 Nous trouvons ici un des axes majeurs de la christologie de Bouyer, qui sous-tend la

    ; ; -gence de la foi) et rend compte de son sous-titre: Théologie de la Parole de Dieu et christo-logie. Le moment unique

    tel «le fruit passant la promesse des fleurs» de ce processus où la Parole dont le concept implique

    «prend chair» en Israël, le «forme» et le «façonne», et dans une moin-dre mesure dans la sagesse profane (L. BOUYER, Le Fils éternel [cf. nt. 1], 13-14; 18; 37-39; 156; 352; acquiert une profondeur historique et cosmique (L. BOUYER, Le Fils éternel, retrouve la évidemment rien à voir avec la Process theology anglo-saxonne.

    29 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 18. Cf. 54: ensemble sous-jacents dès le début au problème Parole divine et parole humaine, présence de la Parole divine à la parole humaine, communication de la Parole divine dans et par la parole humaine»; 55.

    30 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 15-152. 31 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 153-348. 32 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 48.

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    DIALOGUE DES LIBERTÉS ET EUCHARISTIE DU FILS ÉTERNEL 705

    dans un mond33.

    2. Dieu murmure: rites, mythes et mémoire

    Entre Dieu qui crée par sa parole et Dieu qui se dit en Israël, il y Dieu qui

    sagesse. Ainsi, contre tout monophysisme ou nestorianisme larvé, ou pour parler comme Rahner contre toute «mythologie» toujours plus ou moins docétiste34, mais sans recours à quelque a priori transcendantal que ce soit, il

    -ci conjoint sans les opposer Dieu (celui de la

    philosophie et de la religion) et le mouvement (con)descendant de Dieu à la -chrétienne):

    Le principe premier de la christologie doit donc être de situer le Christ exactement

    35.

    Fidréciproque36, de cet apprivoisement mutuel rendu nécessaire par la blessure

    patriarches (Gn 12vaste de la création (Gn 1 2), de la traversée de la faute (Gn 3 -toire universelle (Gn 5 11) qui lui donnent sens:

    est dès le péché que le Fils de Dieu, qui est aussi sa Parole vivante, a commencé à converser avec les hommes. Mieux:

    Dem., 45)37.

    ; Os 11,1), du 9,8-17), est celui de

    (Ga 4,4) sera par antonomase «le Fils», «

    33 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 21. 34 K. RAHNER, «Problèmes actuels de christologie», in Écrits théologiques, I, Paris 1959,

    125, note 1. 35 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 13. 36 Cf. L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 351; 486. 37 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 367-368.

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    Jn 1,14.18). Mais il passe par la manière dont Dieu parle à travers les rites et les

    mythes qui en sont la conscience réflexe dans le langage38 tel le «mythe royal»39 40 , qui

    41 42

    ombres, qui suppose 3. Dieu se dit en Israël

    Dieu dit et le monde est; ; Dieu se dit en 43 et constitue ce «peuple fils de

    Dieu» (Sg 18,13). La Parole prend chair en Israël depuis la hanche blessée de Jacob (Gn

    -Messie, marqué par la figure de David, pour aboutir

    :

    que en qui se réaliserait définitivement et totalement le Règne de Dieu, dans toutes ses dimensions, par la victoire ultime

    44.

    Serviteur -

    messianisme»45 : descente de Dieu, déchirant les cieux pour venir en aide aux siens, selon le cri

    peut dire le dernier cri de la prophétie»46. Le chemin

    libère son peuple «à main forte et à bras étendu», pour emprunter la voie de plus seulement un scandale,

    comme pour la sagesse (Jb; Sg 2,10-20); elle devient source de grâce: «il va être perçu que davantage était nécessaire au salut du peuple: une souffrance

    38 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 71-76. 39 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 36-37; 98-101; 104. 40 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 97; 101-103; 140; 277. 41 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 71; 76-81. 42 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 80. 43 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 14; cf. 39; 51. 44 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 107. 45 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 123. 46 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 92.

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    DIALOGUE DES LIBERTÉS ET EUCHARISTIE DU FILS ÉTERNEL 707

    de Dieu même en apparence»47

    laquelle les hommes relisent, selon la succession de genres autant littéraires que théologiques, la trajectoire de leur alliance avec Dieu:

    : la

    futur eschatologique du Règne reconquis par Dieu, le seul roi et le seul sage, que les apocalypses, à ce moment, commencent à envisager48.

    Dn 7 qui va de nous vers Dieu que celle de la littérature intertestamentaire où il vient de Dieu vers nous49

    deuxième:

    homme «céleste», non seulement par des dons exceptionne -

    50.

    Ces figures convergent vers le Nouveau Testament. La Bonne Nouvelle de Jésus est aussi bien celle du Règne de Diexpérience filiale»51 autobasileia)52, dont

    -Evangelium Christi Evangelium de Christo53. De façon sug-

    gestive, Bouyer discerne quatre perspectives dans la christologie du Nouveau Testament. La première, attestée dans les discours de Pierre dans les Actes et systématisée dans la 1Pt, est centrée sur une «païdologie» et une théologie de la croix interpr 53 et du Ps 11854. La seconde, celle de Paul, articulée «autour de la filiation et de sa communication»55, envisage le

    : celle du Fils de Dieu premier-né et celle du second Adam. La troisième est celle du messianisme «céleste» de Matthieu, celle du messianisme sacerdotal de la lettre aux Hébreux et celle de la christologie pneumatologique de Luc. La quatrième conjoint les deux évangiles que la critique contemporaine a eu au contraire

    47 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 92. 48 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 111. 49 Cf. L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 138. 50 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 135. 51 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 186. 52 Cf. L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 323. 53 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 197-216. 54 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 262. 55 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 265.

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    708 AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I.

    tendance à opposer: celle de Marc, centré sur la figure du Fils de Dieu (Mc 1,1; 56 et celle de Jean centré sur le Fils, identifié au Verbe fait chair du Prologue. Ces deux

    discours de Bouyer57.

    III. CHRISTOLOGIE DE L OFFRANDE: DE L HOMME À DIEU

    -ci

    lui58

    : le salut est le fruit du concours de sa volonté divine et de sa volonté humaine59

    qui comblera son désir et sa prière. Il offre ainsi le sacramentum

    :

    -ur en faire le pain de son offrande de Fils au

    Père: -

    vide de toute substan-ce»60

    sa pure consistance que dans le «oui» sans azymes de «non» de la 61. En elle se condense

    le consent loin du troupeau; la drachme qui se sait perdue dans la maison; le fils cadet qui se sait prodigue dans la distance et le fils aîné qui se sait prisonnier dans la proximité62: en Marie, la première sauvée, qui porte en sa sainteté le poids de

    56 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 326. 57 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 14. 58 IRÉNÉE DE LYON, Adv. haer. V, 18, 1; 19, 1, SC 153, Paris 1969, 239.249. 59 LATRAN (649), DH 500.510-511; CONSTANTINOPLE III, DH 558. 60 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 13. 61 Cf. IRÉNÉE DE LYON, Adv. haer. III, 21, 10; 22, 4; Dem., 31-33, in L. BOUYER, Le Fils

    éternel (cf. nt. 1), 368; THOMAS D QUIN, ST III, q. 30, a. 1, resp., in L. BOUYER, Le Fils éternel, 428.

    62 Cf. R. MEYNET, e Luc, Rhétorique sémitique 8, Paris 2011, 650.

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    DIALOGUE DES LIBERTÉS ET EUCHARISTIE DU FILS ÉTERNEL 709

    2,47) qui,

    : le vin du désir

    ne pâte à consacrer en y faisant «habiter corporel- 2,9), il a aussi besoin de

    -delà de toute attente. Or précisément rites, mythes et mémoire des diverses religions, qui reflètent

    IV. CHRISTOLOGIE DE L ANAPHORE: DU FILS AU PÈRE

    (christolo

    : celui

    ; -rial, qui signifie la libre, volontaire et aimante offrande de Jésus au Père en son mystère pascal. Elle se prolonge ensuite dans les intercessions, en vue du

    On sait combien la théologie latine, depuis le XIIe siècle au moins, dans la

    accordait à Jésus, dès le sein maternel, la plénitude de grâce et de dons, de vision et de science et toutes les perfectio

    seulement en sa conception, mais au moment du baptême et des tentations, au ion est

    Bouyer la lit dans l :

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    710 AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I.

    -à-dire la participation à la vie divine, comme notre «précurseur»:

    63.

    Mais fidèle à la tradition irénéenne64, notre auteur met en évidence dans le

    permet de nous faire entrer avec lui dans le partage de ce Royaume céleste qui est la vie de fils de Dieu»65. On y

    66. Cela se : «Tout, dans ces premiers chapitres,

    67. Le récit d

    :

    propos de Jésus lui-même et non à propos des chrétiens, entre filiation et don de

    68.

    pouvoir se répandre :

    69.

    Au baptême, «Esprit et filiation» se rencontrent. Jésus est conduit au désert 70 61

    (Lc 4,18- sprit de la filiation (Lc 10,21-22) et promet 11,13). Filiation et plénitude de

    : «En fidèle disciple de saint Paul, Luc reconnait e, définitive»71.

    63 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 306. 64 IRÉNÉE DE LYON, Adv. haer. III, 6, 1; 9, 3; 12, 5.7; 17, 1-3; 18, 3; SC 211, Paris 1974,

    67.109-113; 195-197; 213; 329-337; 351-353. 65 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 306. 66 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 308. 67 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 309. 68 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 310. 69 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 311. 70 Cf. L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 311. 71 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 307.

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    DIALOGUE DES LIBERTÉS ET EUCHARISTIE DU FILS ÉTERNEL 711

    excellence de la filiation et de la mission du Christ»72. Sur la croix, la dernière parole de Jésus est «Père, je remets mon Esprit entre tes mains» (Lc 23,46): en mettant une majuscule à «Esprit», Bouyer interprète ce verset à

    9,14 («le sang du Christ qui, par un Esprit éternel,

    filiation, soulignée par la théologie paulinienne et lucanienne73: «le Christ,

    it qui était descendu sur Jésus dès sa conception va se répandre sur nous tous»74. Connaissance et filiation

    lien entre connaissance et filiation, autre accent suggestif de la christologie de

    (Mt 11,25-27; Lc 10,21-22) et de la «prière sacerdotale» (Jn 17). On a pu voir dans la première une sorte de synthèse «synoptique» de la christologie johannique. Elle lie en effet la filiation divine à un acte de connaissance

    (avec Mc 75:

    Cette filiation unique de Jésus, définie par la réciprocité de connaissance, également unique, entre le Père et lui, allant avec une communication au Fils de

    e76.

    Le secret de la filiation réside en effet dans cet échange de connaissance:

    que le Père, de son côté, est seul à avoir du Fils, qui va être méditée par saint Jean comune transmission au Fils de tout ce qui appartient au Père77.

    En elle se trouve «le contenu»78 ou «la substance»79 Jésus, communiquée aux «tout-petits du Père»:

    72 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 313. 73 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 314. 74 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 314. 75 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 331. 76 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 215. 77 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 333. 78 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 321. 79 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 313.

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    712 AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I.

    contenu également de notre participation à la propre filiation du Fils80.

    Chez Jean, la relation entre filiation et connaissance, omniprésente Bouyer évoque Jn 7, 8, 14 et 17, auxquels on pourrait ajouter Jn 1,18 ,

    trinitaire que sur la participation économique à la gloire divine:

    La connaissance que le Fils a du Père entraine donc la possession de tout ce qui est

    le Fils, en nous communiquant sa connaissance du Père, nous fait part de tous ses

    la gloire divine81.

    2. Récit, consécration, anamnèse du Fils

    Au

    lequel celui-sacramentum à la res et sacramentumsont mémorial de la consécration de Jésus en son humanité et de son offrande pascale, signes de sa liberté transfigurée. La geste humaine de Jésus

    la «conscience du Christ»82 reçue du Père. Citant Balthasar, Bouyer note que «la forme de sa conscience

    83. Elle est donc filiale. Puis conscience du Christ comme «une conscience réflexe de sa propre identité»,

    :

    La conscience de Jésus, en tant que conscience humaine du Fils de Dieu, était avant tout conscience de Dieu. Jésus était «le Christ, le Fils du Dieu vivant» non

    comme le Père e, signifie 84.

    80 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 333. 81 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 335-336. 82 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 509. 83 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 509. 84 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 510.

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    DIALOGUE DES LIBERTÉS ET EUCHARISTIE DU FILS ÉTERNEL 713

    e siècle, qui, affirmant sa plénitude dès la vie embryonnaire, peine à reconnaître une vraie historicité à la conscience de Jésus, Bouyer nous livre une fine description de

    85, qui a appris des autres entre autres de sa mère sans que cela mette en péril sa dignité de Maître, contrairement à ce que pensaient les médiévaux86 -cent à parler encore de «vision béatifique» et de «science infuse» à côté de la «science expérimentale», selon les catégories médiévales87 sur lesquelles il se montre critique88. Nous ne le suivrions pas pleinement sur ce point, car nous croyons (avec Rahner) quseconde à condition de les réinterpréter en les articulant, sur des plans diffé-

    ais même bienheureuse (à la différence de Rahner), au sens de Mt 5,8. Ceci simplement pour traduire ce que notre auteur exprime avec bonheur:

    -jacente à toute la vie psychologique de Jésus, une nappe profonde de connaissance intuitive de Dieu et des choses de Dieu qui, si secrète en

    -même sans doute, à travers les jours de sa vie terrestre, dépassait pourtant, par sa pureté comme par sa profondeur, tout ce que nous en connaitrons jamais nous-mêmes, dans cdéjà de sa conscience claire, quoique déjà moins au centre de sa conscience la plus intime, il devait y avoir en lui quelque inexprimable richesse de mémoire

    ence humaine, intuitive pour une part ou plutôt sous un aspect, acquise sous un autre89.

    Mais nous devons reconnaitre que le passage du catholique qui traite de la connaissance du Christ a suivi Bouyer dans sa

    arle plus de visio ni beatifica ni immediata, mais seulement de cognitio intima et immediata, qui est plus neutre90. Jésus en son mystère pascal

    52 -portance de sa prédication, paraissent plus importantes encore»91. La croix exprime son ascensio ad Patrem: -

    85 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 510. 86 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 511. Sur la position médiévale, cf. THOMAS

    D QUIN, ST III, q. 12, a. 3. 87 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 511. Cf. THOMAS D QUIN, ST III, q. 9-12. 88 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 423-424. 511. 89 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 511-512. 90 Catechismus catholicae Ecclesiae, Città del Vaticano 1997, n° 473. 91 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 132-133.

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    714 AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I.

    92. À son tour, la Résurrection est manifestation de sa filiation divine: avait toujours été, ce dont il avait multiplié les indices, mais qui restait latent

    dorénavan 93. La révélation de Jésus est donc achevée dans le mystère pascal: primitive a été pratiquement unanime sur ce point:

    94. La liberté transfigurée

    Déjà présente chez Irénée95 -tivement à Constantinople st pas

    96

    dont la nature se caractérise par le libre-arbitre, soit le partenaire actif du salut qui le concerne. Cela seul rend ce salut assimilable par la liberté humaine, comme Bouyer le note avec justesse, ce qui aide à répondre à la question christologique et sotériologique de départ:

    de Dieu, dès son accomplissement, soit acte de Dieu fait homme, et comme tel assimilable par

    97.

    On voit donc comment seule une juste considération de la liberté du Christ permet une interprétation non mécaniciste de la théorie dite «physique» de la

    98. 3. Intercession

    La -

    sère la dimension sacerdotale de la christologie de : «Dans la Prima Petri

    92 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 507-508. 93 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 254. 94 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 223. 95 Cf. L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 367. 96 Cf. L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 358; 367; 390; 412; 478. 97 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 411-412. 98 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 410.

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    DIALOGUE DES LIBERTÉS ET EUCHARISTIE DU FILS ÉTERNEL 715

    Père, où il entraine après lui ceux qui croient en lu99.

    ercession sacerdotale universelle du Christ monté au ciel, appelant la miséricorde du Père sur tous les hommes en

    :

    La représentation elle-même de sa nature humaine portée au ciel, est une intercession pour nous: de sorte que Dieu, qui a exalté de telle manière la nature humaine en Christ, ait à user de miséricorde envers ceux pour lesquels le Fils de Dieu a assumé la nature humaine100.

    V. CHRISTOLOGIE DE LA COMMUNION: DU PÈRE AUX FILS

    Nous touchons avec ce dernier point à la res tantum -rio-

    -logique qui fut à la base de la christologie patristique. En Ga 3,28 («Un dans

    manière, dans le Christ»101. Bouyer invite à repenser avec les pères grecs

    Christ, en sa dimension cosmique, historique et existentielle.

    Pour en rendre compte, notre auteur développe quatre thèmes importants. Humanité éternelle

    -selon la ressem-

    source: étrange, de Boulgakoff, que Soloviev avait formulée avant lui: si le Verbe

    nité il y avait en lui

    99 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 341. 100 THOMAS D QUIN, ST III, q. 57, a. 6, resp. 101 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 278; 477.

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    716 AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I.

    102

    comme de -

    homme»103

    lut toute la réalisation du grand

    en réconciliant tous les hommes dans le Christ crucifié et ressuscité»104. Humanité singulière et universelle

    Inspiré des commentaires pauliniens et johanniques de Cyrille

    que la personne qui assume est la personne divine, à laquelle toute humanité

    :

    personne définie par ses limitations, mais la personne divine

    a valeur univer-selle des actes que le Christ accomplit dans sa chair: la croix et la résurrection.

    105.

    Dans le Christ, les «lim -:

    tous, par sa personnalité dans les limites de son individualité particulière, limites spatiales et temporelles, se trouve, du fait de sa personnalité divine, ouvert à tout

    106.

    On trouve en lui non pas quelque impensable humanité générale, qui ne serait celle

    102 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 467. 103 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 486. 104 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 283. 105 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 396-397. 106 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 479.

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    DIALOGUE DES LIBERTÉS ET EUCHARISTIE DU FILS ÉTERNEL 717

    dans une contre-distinction qui le ferait autre que chacun de nous, mais dans une

    nous, il nous inclut tous et toutes les possibilités de notre humanité, dans une réalisation de celle-ci qui 107.

    Récapitulation

    La troisième thème, paulinien et irénéen108, est celui de la récapitulation.

    109, lequel échoue dans sa médiation salvifique puisque, loin de résister après la chute des anges rebelles, il succombe à son tour110. La seconde est réalisée par le Christ, qui opère la «reprise par la base» et

    111. Seul ce concept de récapitulation, homo-

    ousios de Chalcédoine, certes analogique par rapport au premier, mais à honorer pleinement:

    À travers toute la patristique, cette solidarité avec le Christ, ou plutôt cette

    le Christ, tout comme il est homoousios avec le Père dans sa divinité, est homoousios avec nous dans son humanité112.

    Le concept de récapitulation permet en outre de dépasser les limites du

    christologique et sotériologique de départ: l a fait nous concerne

    solidarité naturelle qui existe entre nous tous»113. Schekinah et plérôme: le c

    Le quatrième thème transversal est celui de la SchekinahSchekinah, de la

    107 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 479. 108 Cf. L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 367. 109 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 498. 110 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 496-498: -il écouté sa vocation

    divine, il eût, en sauvant le monde de sa sujétion devenue équivoque à un cosmos spirituel divisé contre lui-même, supplanté les esprits déchus et restitué le cosmos à la louange

    -même, en effet, apparait comme un premier rédempteur, mais un rédempteur défaillant, du cosmos».

    111 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 155. 112 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 478. 113 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 479.

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    718 AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I.

    présence de Dieu sous la tente114

    arnation préfigurant le Verbe fait chair. Suivant Phythian-Adams, Bouyer note que la parole éskènôsen («a planté sa tente»), en Jn 1,14,

    de Schekinah: le Temple permanent de la présence divine parmi nous, comme le dira le

    -à-Jésus»115. De là on peut affirmer que «nous avons contemplé sa gloire» (Jn réfère directement à

    nation en tant que telle, et non seulement à la transfiguration ou à la

    donne pourtant que dans le Corps :

    de Dieu communiquée, il ne trouve son propre accomplissement que dans - Ephésiens

    [1,23]»116. Le «mystère» dont parle Paul vise donc le Christus totus. Bouyer entrelace les deux métaphores filiale et sponsale:

    de la christologie paulinienne comme le mystère filial de la plénitude de vue du Christ au sein du Père se révélant dans le mystère sponsal de la vie eschatologique

    -même arrivant à ne plus vivre autrement que comme la propre en tous»117.

    -

    118 ou «abstraite»119, mais cette actualité permanente du mystère chrétien:

    Car ce culte se révèle transmetteur à toute

    e que saint Paul appellera le «mystère -à-dire le Christ dans 120.

    114 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 58-59: -à-dire tout justement

    la présence comme sous une tente (schâkan en hébreu) du Dieu qui se fait librement le

    ; Schekinah en Mt 18,20: «Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu

    ; 308: Schekinah alliance est maintenant établie comme en permanence sur le peuple de Dieu renouvelé dont le principe est la résurrection du Christ»; 310.

    115 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 328. 116 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 156. 117 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 287. 118 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 9. 119 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 10. 120 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 158.

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    DIALOGUE DES LIBERTÉS ET EUCHARISTIE DU FILS ÉTERNEL 719

    2. Dimension cosmique, historique et existentielle

    Notre auteur aura soin de souligner la portée cosmique, historique et

    comme on va le voir, les légitimes requêtes contemporaines: celle de Teilhard de Chardin, celle de la

    Rahner. Christologie cosmique

    création»121 : «Que pourrait être pour nous, en effet, un

    où nous vivons et duquel nous émergeons, ni à la vie que nous y avons vécue?»122. À plusieurs reprises, il se mde Teilhard de Chardin123. À propos du «milieu divin» où le Christ apparaît,

    prétendant le réduire à cette humanité»124

    fondement de toute culture:

    : une action où il éprouve le sentiment

    de sa propre existence125.

    126, le salut dont il est le premier destina-taire doit donc revêtir une dimension cosmique, qui intègre et ordonne le meilleur des aspirations contemporaines:

    On peut voir dans cette récapitulation cosmique et hyper-cosmique accomplie dans le Christ, incluant, rectifiant et complétant les perspectives évolutionnistes de

    anisme moderne, évoqué par la science physique et biologique, le principe à partir duquel pourrait se développer le seul humanisme vraiment intégral qui ait

    -à-dire un humanisme à la fois intégralement cosmique et pleinement christique127.

    121 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 13. 122 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 12. 123 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 360; 367; 467; 495-497; 507. 124 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 13. 125 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 74-75. 126 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 367. 127 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 497.

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    720 AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I.

    que K. Rahner appelle une vision mythique du Christ repoussée à juste

    , à savoir toute forme de crypto-docétisme. Conscient de ce risque, Bouyer affirme:

    et surgir, tel sera notre propos128.

    Selon une jus pour les nations, il faut

    :

    Encore faudra-t-il que cette analyse préliminaire [celle de la Parole adressée à

    129.

    Christologie existentielle

    Bouyer fait également sienne un aspect du «tournant anthropologique» de la christologie rahnérienne:

    dans le Christ soit assimilable à 130. Dans la ligne de

    : de 131. :

    Cette parole est donc action, et plus précisément intervention de celui qui parle dans la vie même d

    seulement active, mais créatrice au plus haut point, créatrice e recréatrice de celui auquel il parle132.

    128 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 14. 129 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 14. 130 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 466. 131 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 13. 132 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 49.

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    DIALOGUE DES LIBERTÉS ET EUCHARISTIE DU FILS ÉTERNEL 721

    De sorte qtrouve son achèvement: «On peut dire que la création ultime de la Parole,

    suscite»133. 3. Le Fils éternel

    Notre auteur synthétise sa proposition christologique dans un passage

    scripturaire, de la Tradition patristique, des requêtes de la christologie contemporaine, il y articule avec finesse, autour de la figure du Fils éternel

    versalité eschato-logique, dialogue des libertés et «théologie de la filiation»:

    son existencemodèle de toute humanité accomplie. Dans le Fils, dans ce Logos où Dieu se dit à lui-notre Père en étant le

    parfaite de la Vierge Mère,

    quelle devaient concourir toutes les autres

    ensemble134.

    VI. CONCLUSION: UNE CHRISTOLOGIE EUCHARISTIQUE

    le Christ, loin

    135.

    La christologie contemporaine a cherché à relever à frais nouveaux ce défi

    133 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 66. 134 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 484. 135 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 156.

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    722 AMAURY BEGASSE DE DHAEM, S.I.

    Par-delà son apparent caractère statique136, celle-ci suit une structure dyna-

    en Jésus non une concurrence toujours plus ou moins postulée par les dérives aussi bien monophysites que nestoriennes , mais une promotion

    en tant

    créature , K. unie, -

    par corrections successives, se requièrent mutuellement137. Bouyer entend à son tour honorer la question, ainsi formulée par Tillich: «est-ce en dépit de la plénitude de son humanité que le Christ doit être

    ?»138. Sans technicité particulière,

    dans une moindre mesure la philosophie , sa christologie le la problématique, en «quête de ce

    théandrisme véritable»139. Son enracinement biblique, sa profondeur théo-logique, sa prise en compte équilibrée des dimensions descendantes et ascen-

    risto-logique, en font la valeur, en dépit des quelques limites mentionnées. Sa touche propre nous semble venir de sa perspective eucharistique. Sur

    Schekinah u Père:

    Il est dans cette situation filiale que non seulement sa prière, mais toute son

    -même aux hommes. À

    136 Cf. L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 399-400. 137 K. RAHNER, «Problèmes actuels de christologie» (cf. nt. 34), 155-161. 138 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 467; cf. 492: «On voit bien en quel sens il est

    parfaitement possible de dire avec Tillich que le Christ est Dieu, le Fils unique de Dieu, en

    139 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 360.

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    DIALOGUE DES LIBERTÉS ET EUCHARISTIE DU FILS ÉTERNEL 723

    commencer par les «pauvres», les «petits», les pécheurs, où il ne se contente pas 140.

    avant la création du monde,

    : «Il les

    remonter vers le Père dans le Saint-Esprit»141. Le christocentrisme trinitaire de Bouyer142 christologie143. Ce point de vue eucharistique permet en outre à la réflexion

    spirituelle de :

    orbite propre de la vie divine: ce qui est exactement ce que nous avons appelé la perspective eucharistique144.

    exitus-reditus : La Parole divine, ainsi, est en Dieu, de la part de Dieu, ce qui éveille en nous cette connaissance de Dieu telle la connaissance que Dieu, de toute éternité, a eue de nous: épousailles de la nature humaine, créée, avec la nature divine, incréée145.

    :

    en Jésus- -réponse à la Parole de Dieu, la berakah faite filiale146.

    Alors Dieu qui avait parlé «à bien des reprises et de bien des manières» (He de son alliance, a pu livrer son Unique, son Verbe, son Fils en qui nous sommes fils et parce que fils, pleinement hommes:

    :

    histoire: 147.

    140 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 222. 141 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 497. 142 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 7-8. 143 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 10-13. 144 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 355. 145 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 51. Cf. THOMAS D QUIN, ST III, q. 30, a. 1,

    resp.: «spirituale matrimonium inter Filium Dei et humanam naturam». 146 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 509. 147 L. BOUYER, Le Fils éternel (cf. nt. 1), 513.

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    Pontificia Università Gregoriana Amaury BEGASSE DE DHAEM, S.I. Piazza della Pilotta 4 00187 Roma (Italia) E-mail: [email protected]

    RÉSUMÉ -

    christologie filiale de Louis Bouyer (1913-2004) affronte la problématique de

    la miséricorde cherchant à réconcilier t

    -el, sa christologie trinitaire «en perspective

    eucharistique» articule avec finesse Trinité immanente et économique, christologie et

    universalité eschatologique. Mots clé: Christologie; sotériologie; Bouyer; Parole; Eucharistie.

    ABSTRACT Beginning with Scripture, the Fathers, the mystery of Israel, and contemporary questions regarding the future of the cosmos, the theology of history, and the meaning of man, the Sonship Christology of Louis Bouyer (1913-2004) confronts the problematic of Chalcedon «in search of a genuine theandrism». With a view toward a theology of creation as the dialogue of freedoms that could go wrong and of a Christology of mercy which attempts to reconcile Thomists and Scotists, the author considers the path of the Word, who becomes incarnate in history even to the point of assuming personally the face of the man who, anointed by the Spirit, offers himself as Son to the Father. With special attention to the figure of the eternal Son, who is also the eternal Man, his Trinitarian Christology «in a eucharistic perspective» articulates with finesse themes such as the immanent and economic Trinity, Christology and soteriology, the descending and ascending dimension, the singularity of the incarnation and the universality of the last things. Keywords: Christology, soteriology, Bouyer, the Word, Eucharist.