greenpeace magazine 2010/04
DESCRIPTION
ÂTRANSCRIPT
AZB
8015
Zur
ich
Greenpeace Member4/2010
L’eau: polluée et gaspillage pages 4 – 15
Energie: les lacs de barrage, une mine d’or 4 Consommation: 4000 litres
par jour 7 Greenpeace: nouvelle campagne autour de l’eau 10
International: courant solaire en Afrique 20 Personnel: Jean Ziegler 24
2 greenpeace 4/10
Conférence mondiale sur le climat à Cancún: question d’argent
La 16e conférence mondiale sur le climat a eu lieu du 29 novembre au 10 décembre à Cancún (Mexique). Les débats ont principalement porté sur le soutien financier des pays en développement et émergents par les nations industrialisées en vue de l’adaptation au changement climatique et de l’usage de nouvelles technologies. Au cœur des échanges, le mode de financement qui permettra de réunir la somme nécessaire – environ 200 milliards de dollars par année selon les organisations environnementales et de développement. La réponse à cette question constitue un préalable indispensable à la mise sur pied, lors de la prochaine conférence mondiale sur le climat prévue en Afrique du Sud, d’un accord de protection du climat qui soit enfin contraignant et efficace pour toutes les nations.
Petits paysans brésiliens en lutte pour leur label bio
Un pesticide menace l’existence de 300 agriculteurs biologiques du Sud du Brésil. Leurs récoltes présentent des traces d’endosulfan, une substance très toxique qui transite des champs d’agriculture conventionnelle vers les plantations de soja biologique. Ce soja ne peut donc plus être commercialisé comme produit biologique. Les petits paysans exigent que le gouvernement brésilien interdise l’endosulfan avec effet immédiat. Gebana, une association suisse de commerce équitable, soutient ces paysans par une pétition d’ores et déjà signée par plusieurs milliers de personnes. Signez vous aussi: www.chega.org
«Les deux de Tokyo»: condamnation scandaleuse des protecteurs Greenpeace des baleines
En septembre, douze militants Greenpeace manifestent devant l’ambassade japonaise, à Berne. A partir de 6 heures du matin, un coup de gong sonne tous les quarts d’heure. «Militer n’est pas un crime!» dit la banderole en anglais et en japonais. Des activités similaires ont eu lieu dans une vingtaine d’autres pays. Les protecteurs de l’environnement protestent ainsi contre la condamnation de deux collègues japonais qui avaient révélé un scandale de corruption autour du programme de chasse baleinière financé par le gouvernement. Ceuxci ont été condamnés à un an de prison avec sursis.
Deux navires Greenpeace – une mission
Après la catastrophe pétrolière, deux navires Greenpeace ont rejoint le Golfe du Mexique cet été. Au large de la côte occidentale du Groenland, l’équipage de l’Esperanza a protesté contre les nouveaux forages pétroliers de la société britannique Cairn Energy. A bord de l’Arctic Sunrise, dans le Golfe du Mexique, plusieurs équipes successives de scientifiques indépendants ont étudié les conséquences de l’explosion de la plateforme Deepwater Horizon. Outre les résidus pétroliers décelés en eaux profondes, un autre constat inquiétant concerne les gouttelettes de Correxit dans les larves de plancton et de crabe bleu, organismes minuscules qui jouent un rôle crucial tout au début de la chaîne alimentaire. Le Correxit est une substance chimique controversée utilisée pour combattre le pétrole. Au moment de boucler ce numéro du magazine, les résultats définitifs ne sont pas encore disponibles.
Du courant «propre» issu de combustible sale
Pour la première fois, les responsables des centrales nucléaires de Gösgen et de Beznau ont admis publiquement, en septembre dernier, que leurs centrales «sûres et propres» utilisent des barres d’uranium provenant de l’usine de Mayak, qui est dans un état catastrophique. La région autour de cette usine russe de retraitement est considéré comme l’un des lieux les plus irradiés de la planète. En 1957, une cuve de plutonium explosait dans la fabrique d’armes nucléaires en service à l’époque. 248 villages étaient alors évacués. Il y a quatre ans seulement, l’Agence russe de l’énergie atomique Rosatom décidait un nouveau déplacement de population concernant cette foisci 7500 personnes. Selon l’organisation russe Greenworld, l’accident nucléaire aurait irradié un demimillion de personnes au total. La société Axpo affirme volontiers que les conditions de production de Mayak seraient aujourd’hui «conformes aux normes internationales». Elle fait probablement référence à la certification ISO qui ne dit cependant rien sur les substances radioactives déversées dans la rivière Tetcha.
Infos sur la vie de Greenpeace
En Bref
Greenpeace
Greenpeace/Baracchi
Votre avis nous intéresse!
Vous avez la possibilité de réagir ou de commenter les sujets traités dans le magazine: www.greenpeace.ch/magazine.
Pour les lettres de lecteur, le délai est le 20 janvier 2011, à [email protected] ou à l’adresse postale de la rédaction (cf. à droite).
Photo de couverture:Des militants Greenpeace pendant une action de protestation contre le groupe chimique britannique Albright & Wilson, dont le site de production du Nord-Ouest de l’Angleterre pollue la mer d’Irlande par les métaux lourds de ses eaux usées.© Greenpeace / Richard Smith
greenpeace 4/10 3
Sommaire Magazine greenpeace 2010, n° 4
L’avenir est global
4
7
8
10
11
14
16
19
20
24
Dossier spécial: eauProduction de courantLa Suisse, pile de l’Europe?Les centrales hydrauliques produisent du courant et le stockent. Ceci profite aux éoliennes, mais aussi au nucléaire.
Consommation4000 litres par personne et par jourAu total, chaque habitant de la planète consomme 4000 litres d’eau par jour. Le détail des chiffres.
PollutionLa production alimentaire est menacéeL’agriculture moderne est la principale responsable des problèmes.
GreenpeacePour une «production propre»Greenpeace lance une campagne internationale autour de l’eau.
Grands projetsDurcissement de la lutte autour de l’eauLa déviation des ressources en eau à travers le monde influe sur les êtres humains et l’environnement. Les conflits politiques sont à l’ordre du jour.
PrivatisationLe contrôle doit revenir aux citoyensFranklin Frederick, militant écologiste brésilien, s’engage pour que l’eau soit reconnue comme bien public.
ForêtsLes voix de la forêt équatorialeLes participantes d’un forum Greenpeace au Congo relatent leurs expériences avec les sociétés forestières.
Recherche de fonds en rueNoemi de Blas Telmo, dialogueuse en Suisse romandePortrait d’une jeune femme engagée.
AfriqueEnergie solairePremiers succès de la caravane climatique Greenpeace en Afrique.
PersonnelDe l’eau propre, un droit humainInterview de Jean Ziegler, rapporteur spécial de l’ONU.
Greenpeace
de Verena Mühlberger
Editorial
La Suisse officielle peine à endosser sa responsabilité au sein de la communauté internationale. C’est déplorable, car ce pays compte tant de personnes ouvertes au monde, comme vous qui soutenez Greenpeace. Depuis des années, vous contribuez à nos campagnes internationales, sur le plan idéel, financier et militant. Sans votre généreux soutien à des enjeux situés hors de nos frontières nationales, l’organisation Greenpeace n’existerait pas dans sa dimension internationale.
Pour nous, le grand écart entre l’axe local et global de la politique environnementale n’est pas toujours simple. Parfois, le poids relatif de la Suisse implique qu’elle ne peut contribuer que de manière indirecte aux grandes campagnes internationales, par exemple concernant la protection des océans. Mais il y a des problèmes environnementaux qui appellent notre participation active. L’un d’eux est au cœur de ce numéro: l’eau.
La Suisse fonde sa prospérité sur la force hydraulique et intervient à l’échelle internationale dans ce domaine, dit l’un des articles. Un autre texte présente le caractère modèle de la Suisse en termes d’approvisionnement en eau. L’accès à l’eau est cependant menacé pour un nombre croissant de personnes à travers le monde. Dans ce domaine, la Suisse aussi rencontre de nouvelles difficultés. L’eau pourrait ainsi venir à manquer un jour dans certaines régions.
L’eau n’est pas une thématique nouvelle pour Greenpeace, mais le problème prend aujourd’hui des dimensions dramatiques et requiert de nouvelles approches. Un groupe international de projet élabore actuellement une campagne globale autour de l’eau. La Suisse y prend une part active.
Ces prochaines années, Greenpeace est appelée à devenir une organisation réellement globale, dit Kumi Naidoo, le nouveau directeur de Greenpeace International. L’organisation doit donc s’impliquer là où les enjeux sont les plus urgents et où son action est la plus efficace. Et les pays du Sud doivent obtenir davantage d’attention, de ressources et de pouvoir au sein du réseau Greenpeace. Pour nous en Suisse, cette visée n’est pas nouvelle, car nous avons régulièrement soutenu les campagnes des bureaux Greenpeace du Sud, par exemple en Afrique ces deux dernières années.
Nous partageons la vision de Kumi Naidoo pour un monde Greenpeace plus juste, et nous approuvons la redistribution des ressources en faveur du Sud. Mais cette vision reste un défi: il s’agit de générer davantage de ressources en faveur des campagnes internationales et de s’impliquer de manière encore plus active dans les projets globaux. Pour vous, les personnes qui nous soutiennent, il y aura donc encore plus de possibilités de s’engager pour les enjeux environnementaux de la planète.
Verena Mühlberger est co-directrice de Greenpeace Suisse depuis le 1er septembre 2010.
Impressum Greenpeace Member 4/2010
Editeur/adresse de la rédaction Greenpeace SuisseHeinrichstrasse 147, case postale, 8031 Zurichtéléphone 044 447 41 41, téléfax 044 447 41 99
www.greenpeace.ch, CCP 80-6222-8
Responsable équipe de rédaction_Tanja KellerRédaction photo_Hina StrüverRédaction/production du texte_Heini Lüthy, ZurichTraduction en français_Nicole Viaud et Karin VogtMaquette_Sofie’s Kommunikationsdesign, Zurich
Impression_Zollikofer AG, Saint-GallPapier_Cyclus Offset 100% recycléTirage _122 000 ex. en allemand _22 500 ex. en françaisParution_Paraît quatre fois par an
Le magazine greenpeace est adressé à tous les adhérents Greenpeace (cotisation annuelle à partir de CHF 72.–). Il peut refléter des opinions qui divergent des positions officielles de Greenpeace.
4 greenpeace 4/10
MER DU NORD
DÉSERT NORD-AFRICAIN
ESPAGNE
S U I S S E
Texte Marcel Hänggi
Les centrales des barrages suisses produisent du courant en période chère. En période bon marché, elles pompent l’eau de la vallée dans les lacs de barrage pour la stocker en vue de la prochaine période chère. Une affaire juteuse pour les électriciens qui utilisent, pour le pompage, des centrales nucléaires et au charbon. Mais des centrales éoliennes et solaires feraient aussi l’affaire.
La Suisse fonde sa prospérité sur l’énergie hydraulique. Un des premiers pays à s’industrialiser après l’Angleterre, la Suisse voit les usines se multiplier le long des cours d’eau. Il s’agit alors d’une pro
duction d’énergie renouvelable et décentralisée: la première phase de l’industrie suisse pourrait presque être qualifiée d’écologique.
Mais le caractère de la force hydraulique a fondamentalement changé. Depuis que la société sait utiliser l’électricité, l’énergie produite à l’aide de l’eau peut être transportée sur de longues distances. Au début du 20e siècle, les premiers grands barrages hydroélectriques apparaissent dans les Alpes. Les lacs de retenue permettent de capter l’eau d’un large bassin versant. Les turbines de ces centrales ont l’avantage de pouvoir fonctionner dans les phases de forte demande de courant. Il est ainsi possible de compenser les variations de la demande entre le jour et la nuit, ou encore entre les saisons.
Les lacs de barrage, une mine d’or La force de l’eau est devenue une technique
de grande envergure: aujourd’hui, les plus grandes installations énergétiques du monde sont des centrales hydrauliques. Cependant, le caractère renouvelable de cette énergie s’est en partie perdu: les centrales de pompageturbinage renforcent la capacité des lacs de retenue à produire l’énergie en fonction de la demande. La nuit, quand la consommation de courant est inférieure à l’offre, le courant superflu sert à faire remonter l’eau dans les lacs de retenue, pour la faire repasser dans les turbines plus tard. L’eau produit du courant, mais permet aussi de le stocker. Le courant permettant le pompage peut provenir de sources variées: production nucléaire, au charbon, éolienne ou solaire.
Graphique: Sonntagszeitung, adaptation: Sofie. Sources: Fondation de la Greina, Eawag
Eau: production de courant
www.iosphera.com
1 Centrales solaires et éoliennes, par ex. en Espagne, Afrique du Nord et en mer du Nord
2 Centrales nucléaires en Suisse et à l’étranger
3 Centrales au charbon à l’étranger
4 Lacs de barrage
5 L’eau des lacs de barrage actionne les turbines et produit du courant en période chère
6 L’eau de la vallée est pompée dans les lacs de barrage pour stockage
7 Centrales à turbines qui peuvent aussi faire office de pompes
1
1
7
6
4
6
2
3
2
5
greenpeace 4/10 5Keystone/Desair/Leuenberger
La construction de centrales de pompageturbinage a connu une première phase de haute conjoncture dans les années 1970, parallèlement à la construction des centrales nucléaires. Les opposants au nucléaire luttaient alors contre ces «filiales des centrales nucléaires», avec succès dans plusieurs cas, comme pour Curciusa ou la Greina.
Depuis 1999, le pompageturbinage vit une nouvelle période d’expansion. La libéralisation du marché de l’électricité a donné lieu à de fortes variations des prix du courant. La nuit ou en fin de semaine, le courant s’achète bon marché pour se revendre plusieurs fois le prix d’achat en journée. C’est ainsi que le pompageturbinage devient une mine d’or. La Suisse prévoit de tripler ses capacités. Aux fins fonds du pays de Glaris, l’expansion de la centrale de LinthLimmern est en cours, avec la création d’un nouveau barrage sur le lac
de Muttsee. La société Forces motrices d’Oberhasli (KWO) a déposé en septembre dernier une demande d’autorisation pour l’agrandissement de la centrale de pompageturbinage sur le Grimsel (la surélévation prévue du barrage dépend, selon la société, de l’octroi de l’autorisation). D’autres projets sont en planification près de Poschiavo, au Tessin, et en Valais.
Comment fonctionne ce système d’ensemble? Les centrales nucléaires et au charbon produisent jour et nuit la même quantité de courant. Cette énergie non modulable s’appelle énergie en ruban. Les centrales au fil de l’eau produisent elles aussi de l’énergie en ruban, car elles ne peuvent pas doser la quantité d’eau qui coule le long de la rivière. L’énergie en ruban couvre la charge de base, donc
la partie de la demande qui reste constante jour et nuit. La partie variable de la consommation est couverte par les centrales modulables: les centrales hydrauliques à accumulation et les centrales à gaz.
L’énergie éolienne et solaire s’accumule également
Le courant issu des éoliennes, dont la production varie très fortement, ne s’accorde pas facilement à ce modèle d’approvisionnement de courant. C’est du moins le point de vue des entreprises du secteur de l’électricité. Pourtant, les énergies éolienne et solaire ne sont pas si différentes de l’énergie en ruban. Comme cette dernière, l’énergie du vent et du soleil ne se module pas à la demande, et est en recherche de modes d’accumulation.
C’est là que le pompageturbinage déploie ses avantages. Son degré d’efficacité d’environ 80% (perte d’un cinquième de l’énergie) est la forme la plus efficace d’accumulation de grands volumes d’énergie, dit le professeur Göran Andersson, de l’ETH Zurich. Et l’eau peut rester stockée longtemps, permettant ainsi de compenser les variations saisonnières. Pour intégrer la production énergétique renouvelable au réseau européen, il faut avant tout introduire une gestion des charges, explique Andersson. Les appareils qui permettent une telle gestion sans perte de confort, par exemple les réfrigérateurs, devraient fonctionner selon le mode suivant: consommer leur énergie lorsque l’offre est la plus forte, et se débrancher du réseau lorsqu’il y a pénurie.
Les grandes organisations écologistes suisses ne se fient pas à l’argument selon lequel le pompageturbinage serait favorable aux renouvelables. Elles estiment au contraire que ce procédé constitue une tentative de gagner de l’argent à travers le courant «sale», nucléaire et au charbon, produit en Europe, tout en profitant de la bonne renommée de la force hydraulique. Elles pensent qu’il n’est pas nécessaire de créer de nouvelles capacités de pompageturbinage pour assurer l’approvisionnement de la Suisse, et que la contribution possible de la Suisse est trop faible pour une intégration éventuelle de l’énergie éolienne au système européen. Un texte d’orientation commun à sept organisations environnementales, dont Greenpeace, af firme: les nouvelles centrales de pompageturbinage «instaurent un approvisionnement de courant et une régulation du réseau axés sur les grandes techniques, contredisant diamétralement les exigences d’un approvisionnement décentralisé.» Au lieu de favoriser le pompageturbinage, il faudrait au contraire veiller à ce que «la régulation du réseau se fasse prioritairement dans les installations décentralisées et par la régulation de la demande.»
Mais tous les spécialistes qui s’inscrivent dans une perspective écologiste ne sont pas de cet avis. Ruedi Rechsteiner, ancien Conseiller national (PS), siège au conseil d’administration de IWB (Services industriels de Bâle), une société actionnaire des Forces motrices d’Oberhasli. Rechsteiner approuve l’expansion du pompageturbinage pour autant que le nombre de lacs de retenue ne soit pas augmenté. Il admet que le pompageturbinage opère aujourd’hui avec du courant issu de centrales nucléaires et au charbon. Mais selon lui, deux tiers des nouvelles capacités auraient été de nature renouvelable en 2009, et cette proportion pourrait passer à 90% dans quelques années. Il concède cependant: «Si les grands groupes d’électricité misaient véritablement sur les énergies renouvelables en arrêtant leurs investissements dans le domaine du charbon et du nucléaire, il est vrai qu’ils seraient nettement plus crédibles.»
Marcel Hänggi est journaliste et auteur de livres, spécialisé notamment dans les thématiques envi-ronnementales.
WWW
Davantage d’infos sur: www.greenpeace.ch/magazine
Augmenter les capacités: la société Forces motri-ces d’Oberhasli veut développer la capacité d’ac-cumulation de sa centrale sur le Grimsel. Photo: la réserve naturelle de la région de lac du Grimsel, avec le Totensee et le col du Grimsel.
Régler le réseau par les installations décentralisées et par la
régulation de la demande, et non par le pompageturbinage.
6 greenpeace 4/10
«Nous parlons de l’avenir»Gianni Biasiutti, directeur des Forces motrices d’Oberhasli (KWO), explique la nécessité, selon lui, de développer les capacités de sto ckage.
Vous dites qu’il faut davantage de pompage-turbinage dans la perspective d’un approvisionnement basé sur le courant renouvelable. Mais l’électricité stockée au Grimsel est issue du nucléaire et du charbon.
Oui, mais si nous parlons d’expansion, c’est dans une perspective d’avenir. On ne parle pas des prochaines années, mais des prochaines décennies. Et la réponse est que le développement des renouvelables exigera des capacités de stockage nettement plus élevées. Il faut se préparer à cette situation. Pour construire un hôpital, on n’attend pas non plus que les gens tombent malades.
Les Forces motrices bernoises (BKW), qui possèdent la moitié du capital de votre société KWO, continuent d’investir dans les centrales au charbon et veulent construire une nouvelle centrale nucléaire.
Tous nos actionnaires investissent dans les renouvelables. Les Services industriels de Bâle (IWB), la Centrale électrique de la ville de Zurich et EWB (Energie Wasser Bern) sont à la pointe dans ce domaine, et ces entités possèdent l’autre moitié de nos actions.
Sur votre site Internet, on lit le slogan «H2O au lieu de CO2». Vous suggérez que votre courant serait exempt de CO2. N’est-ce pas tromper les gens?
C’est votre point de vue. Mais la force hydraulique est vraiment exempte de CO2. Toutefois le courant que nous stockons sans le produire nousmême ne relève pas de l’énergie hydraulique.
«Le pompage-turbinage est le moteur des nouvelles cen-trales nucléaires»Jürg Buri est secrétaire général de la Fondation suisse de l’énergie (SES). Il explique pourquoi il pense que l’expansion du pompage turbinage est inutile.
Le site Internet de la SES dit que la Fondation s’oppose «aujourd’hui» au pompage-turbinage. Que faudrait-il pour vous convaincre d’adhérer à cette technique?
Nous n’avons rien contre le fait de compenser les fluctuations de la production renouvelable par des centrales de pompageturbinage. Mais ces énergies renouvelables n’existent pas en Suisse. Grâce à la flexibilité des centrales de pompageturbinage, le développement des renouvelables n’exigera pas de nouvelles centrales de ce type.
Mais la Suisse pourrait ainsi contribuer à l’approvisionnement de l’Europe.Les milieux qui le disent sont les mêmes qui évoquent volontiers une
pénurie à venir. Si nous nous inscrivons dans une perspective européenne, il n’y aura pas de pénurie. Le pompageturbinage est le moteur des nouvelles centrales nucléaires ou des nouvelles centrales au charbon à l’étranger. C’est ce que veulent les groupes du secteur de l’électricité. L’argument des renouvelables ne serait pertinent que si l’industrie de l’électricité poursuivait véritablement une stratégie de promotion des renouvelables.
Quelles seraient les alternatives?Un réseau efficace d’installations décentralisées, axées sur les renou
velables, et une gestion intelligente des charges. Ceci pourrait contribuer à compenser les variations à l’échelle européenne et à réduire le problème du stockage. Je répète que la régulation d’un parc de centrales renouvelables par le biais du pompageturbinage est tout à fait envisageable de notre point de vue.
Länger/Greenpeace
zvg zvg
Il arrive que le lac de retenue soit trop plein; on remédie à ce pro-blème par un lâcher d’eau. Photo: le lac de barrage de la vallée de Verzasca.
WWW
Davantage d’infos sur: www.greenpeace.ch/energies
greenpeace 4/10 7
Eau: consommation
8 greenpeace 4/10
Substances chimiques: un travailleur répand des pesticides dans un champ de fraises en Californie.
Sécheresse: bétail brésilien. L’élevage bovin est une des causes principales de déboisement en Amazonie.
Texte Verena Ahne
Pour obtenir son pain quotidien aux conditions les plus avantageuses, l’humanité recourt souvent à des méthodes de pillage. L’une des pires pratiques est la pollution des eaux par l’agriculture moderne. Sur le long terme, la production alimentaire est menacée dans le monde entier.
Dans un pays alpin comme le nôtre, nous avons de l’eau à profusion. La bonne eau douce coule des montagnes, jaillit du sol et se renouvelle en permanence par la pluie et la neige. L’eau potable est disponible chaque fois que nous en avons besoin, que ce soit pour boire, cuisiner ou prendre un bain. Nous nous baignons même dans des lacs d’eau potable.
Quel luxe! Beaucoup de pays ont certes suffisamment d’eau, mais cette eau est souvent salée, polluée, chargée de substances chimiques, d’eaux usées ou de germes. Et nombreuses sont les régions qui n’ont pas assez d’eau. Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), 1 milliard de personnes n’ont pas accès à une eau potable de bonne qualité et 2,5 milliards n’ont pas un accès suffisant à l’eau potable. Cette situation concerne donc plus de la moitié de l’humanité. Chaque jour, plusieurs milliers d’enfants meurent en raison du manque d’eau potable.
Une cause importante de la pollution de l’eau est l’agriculture, qui dévore des surfaces toujours plus grandes. Sans scrupule, on assèche les zones humides et les marais, on transforme en pâturages
et en terrains agricoles la forêt épaisse, la brousse qui abrite tant d’espèces et le fragile milieu de la savane. Plus d’un tiers de la surface terrestre couverte de végétation est d’ores et déjà exploitée par l’agriculture: 33 millions de km2 sont piétinés par les sabots des bêtes; 15 millions sont occupés pour la production de fourrage, d’aliments et d’agrocarburants.
Or, seuls les écosystèmes intacts sont en mesure de remplir leur fonction de filtre d’air et d’eau. Ils accumulent l’humidité et l’eau de pluie pour alimenter les eaux souterraines. Par contre,
les sols sans couverture végétale s’assèchent plus rapidement, devenant moins perméables aux précipitations. L’érosion par l’eau et le vent dégrade alors le sol emportant les engrais, les substances toxiques et le lisier.
Depuis que l’industrie chimique facilite la vie agricole, les substances chimiques se multiplient à outrance. Les monocultures de coton, de blé et de soja sur des surfaces gigantesques appauvrissent les terres en leur arrachant les substances nutritives. Le Rapport sur l’agriculture mondiale de 2008 évoque le manque d’azote, de phosphore et de potassium sur une surface allant jusqu’à 80% des champs. Par le passé, on remédiait à ce problème par la rotation des cultures et les jachères. Aujourd’hui on préfère répandre des engrais chimiques.
Sans eau, pas de painDe lourdes machines tassent en outre la terre.
Par un labourage profond, elles détruisent le précieux humus, cette couche supérieure vivante des sols, constituée au fil des millénaires. Presque tous les sols exploités sur une base industrielle sont aujourd’hui largement privés d’humus. C’est un problème notamment pour le climat. De fait, l’humus absorbe de grandes quantités de CO2 et stocke également l’azote, contrairement aux sols pauvres en humus. Ces sols ne retiennent donc pas cet engrais, et l’azote se retrouve finalement dans l’eau sous la forme de nitrate. Par ailleurs, dans les
pays du Sud, on fertilise souvent les champs par l’épandage de matières fécales, facilitant ainsi la transmission de germes de maladies dangereuses.
Pesticides, surengraissage, irrigation…
Les monocultures étant plus vulnérables aux parasites, des milliers de pesticides ont été développés: herbicides contre les mauvaises herbes, fongicides et autres poisons. Ces «apports diffus» polluent les eaux tant superficielles que souterraines, même dans les pays qui traitent scrupuleusement leurs eaux usées dans des stations d’épuration.
Le surengraissage, d’origine naturelle ou chimique, fait exploser les populations d’algues dans les eaux. La floraison des algues consomme
GrebliunasCruppe/EVE/Greenpeace
Plus d’un tiers de la surface terrestre couverte de végétation est
déjà exploitée par l’agriculture.
Eau: pollution
greenpeace 4/10 9
Pillage: en Indonésie, des militants Greenpeace et des bénévoles locaux construisent une digue pour empêcher l’assèchement des tourbières adjacentes et leur défrichage par le feu au profit d’une so-ciété d’huile de palme.
l’oxygène qui manquera fatalement aux autres organismes. Les restes de ceuxci aboutissent au fond des eaux, où ils sont éliminés par des bactéries, moyennant une nouvelle consommation d’oxygène. Il se forme des zones mortes qui étouffent toute vie, ver, mollusque, homard ou crin marin.
Couvrant une surface totale de la taille de la GrandeBretagne, les zones mortes sont déjà au nombre de 400 dans les océans, par exemple en mer Baltique, au large de la côte orientale d’Amérique du Nord et tout autour du Japon. Certaines de ces zones se rétablissent en cas d’apport d’eau riche en oxygène. Là où ce n’est pas possible, en mer intérieure ou dans les lacs, les zones mortes persistent. La seule issue à ce problème est la réduction des engrais et le rétablissement de la capacité de filtrage des berges, rivages et rives, des zones alluviales et des mangroves.
Un autre problème concerne l’irrigation en tant que telle. C’est cette technique qui a permis la production agricole dans les zones sèches. Mais la pratique correcte de l’irrigation est un art: si l’eau reste trop longtemps sur les champs, les substances minérales des sols, et surtout les sels, transitent vers la surface pour y former une croûte dure qui ne permet plus la culture. Or 10% des surfaces arables sont d’ores et déjà considérées comme salinisées.
La destruction du grenier à blé
L’exemple le plus dramatique de salinisation – dont les causes sont cependant différentes – est la mer d’Aral. Des masses croissantes d’eau ne parviennent plus dans cette mer, mais sont utilisées en amont pour la production agricole. En conséquence, la mer d’Aral s’assèche. L’ancien «grenier à blé», l’ancien «eldorado du coton» de l’Union
soviétique perd ainsi une grande partie de ses champs. Des «tempêtes blanches» portent le sel et les substances chimiques agraires sur de longues distances, nuisant à la santé des êtres humains.
La pratique du prélèvement excessif d’eau ne frappe pas seulement les affluents de la mer d’Aral. 70% de la consommation mondiale d’eau sert à l’arrosage des champs. Cette proportion est même encore plus élevée dans les zones sèches comme en région méditerranéenne. Environ 40% de la production alimentaire mondiale concerne des surfaces irriguées de manière artificielle. L’élevage bovin est à lui seul responsable de 8% de la consommation d’eau. Et la production d’un kilo de viande de bœuf nécessite environ 15 000 litres d’eau. C’est pourquoi de grands fleuves comme le Jourdain dépérissent avant d’arriver à la mer. De
plus, lorsque les cours d’eau naturels ne couvrent pas les besoins de l’agriculture et de l’élevage, la nappe phréatique est attaquée à son tour. Beaucoup de régions, notamment l’Espagne, fournisseur européen de fruits et de légumes, ou la Californie, ont déjà tellement abaissé le niveau de leur nappe aquifère que l’eau de mer commence à s’y infiltrer. En outre, l’appel d’eau qui se crée véhicule les toxines vers les eaux souterraines.
Quelle solution? L’agriculture doit revenir à des structures de production plus petites, plus naturelles et plus écologiques. C’est aussi le constat du Rapport sur l’agriculture mondiale, qui cite l’exemple positif de la Suisse et de son concept d’agriculture multifonctionnelle. Il s’agit de revitaliser les sols, par un traitement plus respectueux, une rotation intelligente des cultures, des plantations plus riches en espèces, la création d’humus et une réduction drastique des engrais. Il faut avant tout préserver ou recréer des écosystèmes naturels les plus larges possibles, qui font office de réservoirs d’eau et d’espèces.
Car sans eau de bonne qualité, pas de pain.
Verena Ahne est journaliste scientifique indé-pendante en Autriche.
WWW
Davantage d’infos sur: www.greenpeace.org/switzerland/fr/campagnes/agriculture
Les lacs suisses: petit succès de grande portée
Il y a trente ans, les rivières et les lacs suisses étaient dans un état préoccupant. L’azote et les phosphates issus des engrais, mais aussi des produits de lessive polluaient les eaux, avec d’autres substances chimiques. Certains lacs étaient dans un état de mort imminente.
Diverses mesures ont nettement amélioré la qualité de l’eau: la construction accélérée de stations d’épuration, l’interdiction des produits de lessive contenant des phosphates, mais aussi l’aération artificielle des lacs. En 1991, une loi plus stricte de protection des eaux entre en vigueur, réglant notamment l’apport d’engrais sur les champs à proximité des eaux.
«Ces dernières décennies, la qualité des eaux des lacs et des rivières s’est fortement améliorée, grâce à un grand effort de traitement des eaux
usées», constate l’Office fédéral de l’environnement. Un grand succès pour notre pays, un petit succès à l’échelle mondiale, qui n’a été possible que dans un petit pays riche.
Mais une nouvelle menace se dessine à l’horizon. Ces dernières années, les eaux suisses présentent une pollution croissante par des traces de substances organiques. Ces résidus proviennent par exemple de médicaments ou de produits cosmétiques consommés par la population. Les substances restent actives dans l’eau, provoquant par exemple la féminisation de poissons mâles à travers les traces d’hormones. Le Conseil fédéral prévoit de doter de filtres les plus grandes stations d’épuration, afin de retenir les substances en question. Le coût est estimé à au moins un milliard de francs.
Greenpeace/Rante
10 greenpeace 4/10
Texte Matthias Wüthrich
La pollution des eaux est l’un des plus graves problèmes de la planète. Greenpeace lance aujourd’hui une campagne globale pour la propreté de l’eau.
Après la pluie, c’est la crue; et la crue fait surgir les substances toxiques. Le Pasig est un fleuve pollué qui traverse Manille, la capitale des Philippines. Ses hautes eaux meurtrières charrient aussi des tonnes de déchets issus de décharges, et des résidus toxiques emportés dans les usines inondées. L’approvisionnement en eau s’en trouve pratiquement bloqué. L’eau potable est donc le besoin le plus pressent pour la population sinistrée. Les militants de Greenpeace se transforment en secouristes et distribuent de l’eau propre, des désinfectants et des médicaments. Plus tard, nous patrouillons avec notre véhicule nommé «Toxic Patrol» et identifions les pollutions indiquées par la population aux abords des usines. Nous prélevons des échantillons d’eau et de terre et établissons une carte géographique des pollutions.
L’an dernier, je travaillais en Asie sur mandat de la campagne Chimie de Greenpeace International. Surpris par les inondations catastrophiques, je comprends que l’eau est tout simplement essentielle. Pendant ce temps, la pollution des eaux progresse à travers le monde. L’état des rivières s’est globalement dégradé, et plus de la moitié des aquifères sont gravement contaminés. La situation est particulièrement préoccupante pour les eaux des régions fortement peuplées, en Asie centrale et du SudEst, en Inde, dans l’Est de la Chine, dans certaines régions d’Amérique du Nord et – s’agissant
de la biodiversité – dans toute l’Europe, disent les études scientifiques récentes.
L’impact négatif de la crise chimique m’est également apparu lors de mes recherches en Chine. Dans ce pays, 70% des rivières, lacs et réservoirs sont pollués, et 20% des sources d’eau potable ne suffisent pas aux exigences nationales de qualité de l’eau. Le taux de cancer a progressé de 20% ces dernières années, et même de 465% pour certains types de cancer. Dans les régions polluées par les industries, des villages et des villes entières enregistrent des taux de cancer nettement plus élevés. Des sources indépendantes dénombrent déjà plus de 450 «villages cancéreux». D’autres sources s’appuient sur le Ministère chinois de l’environnement et font état de plus de 51 000 actions de protestation contre la pollution environnementale pour 2006, portant souvent sur l’état des eaux. Les données sur la situation actuelle ne sont pas publiées, car la Chine veut éviter le débat sur ce problème délicat.
Polluants persistants: pas de solution en vue
La pollution croissante des eaux est surtout due à une agriculture inefficace et à une industrie incontrôlée. De façon délibérée ou non, les polluants industriels aboutissent dans les eaux. La problématique des pesticides et des métaux lourds est bien connue, mais de nouvelles substances comme les résidus de médicaments s’y ajoutent aujourd’hui. Nombre de polluants industriels sont pratiquement impossibles à éliminer par les mécanismes naturels. Par le biais de la chaîne alimentaire, ces «polluants persistants» s’accumulent dans l’environnement et dans le corps humain. Ils peuvent
Campagne Greenpeace pour une «production propre»
endommager le système nerveux, modifier le patrimoine génétique ou entraver la procréation, car même en faible concentration, ils développent des effets endocriniens. Dès que ces toxines industrielles sont déversées dans l’environnement par les tuyaux d’eaux usées ou les stations d’épuration, il est techniquement difficile, voire impossible de les isoler et de les éliminer, en dehors du fait qu’une telle opération serait presque impossible à financer.
Greenpeace a donc décidé de lancer une campagne internationale en faveur de l’eau propre. C’est dans ce cadre que j’ai passé dix mois aux Philippines, en Thaïlande et en Chine, où j’ai vu de mes propres yeux des pollutions simplement inimaginables. L’objectif de la campagne Greenpeace est d’arrêter la pollution industrielle des eaux et d’inciter les pires industries à une «production propre». Les substances chimiques nuisibles doivent être intégralement remplacées par des produits inoffensifs. Le problème ne peut pas se résoudre par des mesures dites «de fin de cycle» («end of pipe»), comme les dispositifs d’épuration intervenant à la sortie des tuyaux d’eaux usées. Il n’existe pas d’élimination propre des polluants industriels persistants. L’exemple des décharges de déchets chimiques suisses est parlant: menaçant les eaux, ces décharges doivent aujourd’hui être assainies, avec des coûts de plusieurs centaines de millions de francs à la clé.
Mais la Suisse estelle concernée par la pollution des eaux des pays en développement? Beaucoup de grands groupes et de grossistes ont délocalisé leur production nocive dans les pays pauvres, parfois en soustraitance. Tandis que les produits finis sont exportés en Suisse, la pollution issue de la production reste dans le pays fournisseur. Si l’on tient compte de ce type de pollution, «l’empreinte toxique» de la Suisse est démultipliée.
Les consommateurs doivent donc exiger des multinationales la garantie d’une production réellement propre, tout au long de la chaîne de production. Soutenez notre campagne pour une eau propre!
Matthias Wüthrich est responsable de la cam-pagne Toxiques chez Greenpeace Suisse. Il par-ticipe à l’élaboration de la campagne internatio-nale Greenpeace pour une eau propre. En 2009, il a travaillé dix mois en Asie pour le compte de Greenpeace International.
WWW
Plus d’infos en anglais sur: www.greenpeace.org/water
A gauche: l’eau polluée tue: des militantes et militants Greenpeace de Manille (Philippines) protestent contre l’insuffisance de la protection des eaux par une action symbolisant la mort col-lective. A droite: Matthias Wüthrich lors d’une distribution d’eau potable.
GreenpeaceDomingo/Greenpeace
Eau: International
greenpeace 4/10 11
De faibles ressources âprement disputées
Eau: politique
Texte Stefan Hartmann
L’eau potable devient un bien toujours plus rare et précieux. Elle est également utilisée comme moyen de pression politique. Une situation qui conduit de plus en plus souvent à des tensions entre les Etats.
Des conséquences par-delà les frontières: Dans l’Anatolie du SudEst, en Turquie, le barrage d’Ilisu est actuellement en construction. Il créera un énorme lac de 135 kilomètres de long, couvrant une surface de 313 kilomètres carrés. Ce réservoir, qui n’est situé qu’à 65 kilomètres de la frontière avec l’Irak et la Syrie, est d’ores et déjà source de conflits.
D’une part, ce lac artificiel va petit à petit submerger des villages – 60 000 personnes doivent être déplacées – et environ 200 sites culturels d’importance. L’Allemagne, l’Autriche et la Suisse ont renoncé à apporter leur garantie contre les risques à l’exportation, les exigences en matière de protection de l’environnement et du patrimoine culturel n’étant pas remplies. La Turquie persiste néanmoins dans sa volonté de construire ce barrage.
Par ailleurs, l’agriculture traditionnelle en Irak et en Syrie est menacée par ce projet, car elle est tributaire des alluvions. Lors d’années à faible pluviosité, le barrage d’Ilisu compromettrait également le ravitaillement en eau potable de ces deux pays. On peut même envisager un scénario extrême, à savoir que la Turquie ferme le robinet à la Syrie et à l’Irak, si ces deux pays se montrent réticents à coopérer sur le plan politique ou militaire.
Une lutte pour la répartition inégale: Depuis soixante ans, Israël, la Syrie et la Jordanie se battent pour l’eau du Jourdain. Ce fleuve joue en effet un rôle crucial pour l’approvisionnement de plus de treize millions d’habitants dans cette zone. Ses sources se trouvent sur le territoire de plusieurs Etats: au Liban, en Israël, sur les hauteurs du Golan syrien et à l’ouest de la Jordanie. Les Israéliens
ont pris le contrôle de ces deux derniers territoires en 1967, et les gisements d’eau qu’ils recèlent constituent l’une des raisons majeures qui pousse Israël à poursuivre son occupation.
Le conflit qui oppose Israéliens et Palestiniens à propos de l’eau est particulièrement complexe: l’ouest de la Jordanie, région montagneuse, a, certes, d’abondantes réserves dans la nappe phréatique, mais les communes palestiniennes n’y ont quasiment pas accès. Actuellement, Israël prélève de grandes quantités d’eau pour les implantations dans les Territoires occupés et pour les activités agricoles dans la vallée du Jourdain ainsi que dans le désert du Néguev. Bref, la question de l’eau constitue l’un des enjeux déterminants dans le conflit entre les deux communautés.
L’effondrement d’un système efficace: Une grave crise de l’eau se fait jour également en Asie. A l’époque soviétique, le Turkménistan, le Kazakhstan, l’Ouzbékistan, le Kirghizistan et le Tadjikistan faisaient partie d’un système suprarégional d’approvisionnement en eau et en énergie: dans les républiques du Tadjikistan et du Kirghizistan, l’eau de la fonte des neiges provenant des hautes chaînes de montagnes était captée et acheminée en été vers les steppes des Etats de l’Ouzbékistan, du Kazakhstan et du Turkménistan, afin d’assurer l’irrigation des immenses plantations de coton et de céréales. En échange, l’Ouzbékistan et le Kazakhstan fournissaient du gaz, du pétrole et du charbon au Kirghizistan et au Tadjikistan. La fin de l’Union soviétique a marqué l’effondrement de ce système de répartition dirigiste. Aujourd’hui, il règne une lutte sans merci pour la répartition des ressources hydriques, car les Etats concernés n’arrivent pas à se mettre d’accord. Des projets visant à acheminer sur plus de 2000 kilomètres de l’eau provenant de Sibérie existent depuis des décennies. Actuellement, ils font de nouveau l’objet d’examens plus approfondis.
Partout, des projets ont été réalisés ou sont prévus pour utiliser ou rediriger différemment
l’eau à grande échelle. L’un de ces premiers projets pharaoniques fut le barrage d’Assouan, en Egypte. Construit sur le Nil dans les années 1970, cet ouvrage de presque quatre kilomètres de long a permis de créer l’un des plus grands lacs artificiels du monde. Comme dans le cas d’Ilisu, de nombreuses personnes ont dû être déplacées et plusieurs monuments ont disparu sous les eaux.
Récemment, la querelle concernant l’eau du Nil s’est envenimée. Les Etats situés en amont du fleuve, notamment l’Ethiopie, le Rwanda, l’Ouganda ou la Tanzanie, se plaignent de discrimination. Des contrats datant de 1929 et 1959 – dont le premier fut encore signé par les Anglais – accordent en effet à l’Egypte et au Soudan des droits excessivement généreux.
En Ethiopie, la troisième tranche du projet hydroélectrique Gilgel Gibe, sur le fleuve Omo, est en construction. Ce barrage de 243 mètres de haut sera, une fois achevé, le plus élevé du continent africain, et sa centrale hydroélectrique, dont la puissance équivaudra à celle de deux centrales nucléaires, sera la plus grande du monde après Assouan. Ses adversaires redoutent que les conséquences de sa construction ne menacent les ressources vitales d’un demimillion de personnes en Ethiopie et au Kenya.
En Chine, il est prévu d’aménager des conduites sur plus de 1300 kilomètres afin d’acheminer jusqu’à Pékin de l’eau provenant du centre du pays. Toujours en Chine, le barrage des TroisGorges, qui retient les eaux du Yangtsé, le fleuve Bleu, sur une longueur de plus de 600 kilomètres, est déjà en service. Cet ouvrage a nécessité le déplacement de deux millions de personnes.
Stefan Hartmann est journaliste au Presseladen, à Zurich.
WWW
Davantage d’infos sur: www.greenpeace.ch/magazine
Bettmann/Corbin
A gauche: un soldat israélien en poste au-dessus du Jourdain et du pont Allenby, qui a été détruit; un pont provisoire constitue le seul pas-sage à la frontière entre la Jordanie et les Territoires occupés. A droite: le Jourdain et son embouchure dans la mer Morte vus d’avion.
Marden/National Geographic/Getty Images
12 greenpeace 4/10
Greenpeace/Newman
Prospection pétrolière
Auckland, Nouvelle-Zélande
25/07/2010. Ces militants Greenpeace montrent à quoi ressemblent des gens se baignant dans une mer polluée. Ils sortent de l’eau maculés de «pétrole» sur la plage de Muriwai à Auckland. Le message est clair: il faut absolument empêcher tout nouveau forage pétrolier au large des côtes de NouvelleZélande!
Nobili/Greenpeace
Alesi/Greenpeace
Perawongmetha/Greenpeace
Maïs transgénique
Frioul Vénétie Julienne, Italie
30/07/2010. Des militants Greenpeace protestent contre la culture illé gale d’organismes génétiquement modifiés en brandissant des affiches «NO GMOs». Des investigations de Greenpeace ont révélé qu’une variété de maïs transgénique de Monsanto, le MON810, était cultivée dans les champs de la province italienne de Pordenone. Revêtus de tenues spéciales afin de se protéger d’une éventuelle contamination, les militants ont coupé les épis, afin d’empêcher toute dissémination du pollen.
Centrales nucléaires
Venise, Italie
28/07/2010. Sur la plage du Lido, des militants Greenpeace ont formé à l’aide de parasols une gigantesque banderole d’une surface de 1500 m2. Ils protestent ainsi contre le projet du Premier ministre italien, Silvio Berlusconi, qui veut construire une nouvelle centrale nucléaire.
Avenir énergétique
Bangkok, Thaïlande
17/09/2010. Dans le cadre de sa campagne «Turn the Tide», le Rainbow Warrior a fait escale à Bangkok où il a été accueilli par un spectacle de marionnettes traditionnel. Greenpeace profite des deux mois et demi que dure ce tour en Asie du SudEst pour promouvoir un avenir vert et pacifique, et demande notamment aux Etats émergents d’investir dans le développement durable.
Océans + Génie génétique
Actif Atome + Energie
greenpeace 4/10 13
Perawongmetha/Greenpeace Sarwono/Greenpeace
Rezac/GreenpeaceLucero/Greenpeace
Transports
Bangkok, Thaïlande
19/09/2010. Lors de la Journée sans voitures organisée dans la capitale thaïlandaise, le Rainbow Warrior, qui poursuit son périple en Asie du SudEst, a jeté l’ancre dans le port de Khlong Toei. Des membres de l’équipage ont invité les habitants à visiter le bateau. Au moyen de cette action, Greenpeace veut encourager le gouvernement thaïlandais à prendre enfin des mesures en faveur de la protection de la nature.
Déforestation
Jambi, Indonésie
05/08/2010. Dans cette zone de la forêt tropicale de BukitTigapuluh où les arbres ont été abattus, des militants Greenpeace protestent contre la déforestation massive pratiquée par la société Asia Pulp & Paper (APP). Cette dernière, qui appartient au grand groupe Sinar Mas, est responsable de la destruction de l’espace vital du tigre de Sumatra et de l’orangoutang, deux espèces sérieusement menacées d’extinction.
Pollution atmosphérique
Hadera, Israël
15/07/2010. «Le charbon tue», peuton lire sur cette banderole hissée par des militants Greenpeace au sommet d’une grue dans le port d’Hadera, lors de l’arrivée d’une cargaison de charbon en provenance d’Ukraine. Ils voulaient ainsi attirer l’attention sur des projets de centrale au charbon à Ashkelon.
Déchets toxiques
Mexico City, Mexique
17/08/2010. Des militants Greenpeace simulent leur propre mort afin d’attirer l’attention sur la décharge de l’usine de traitement des déchets Ecoltec. Cette société – une filiale du cimentier suisse Holcim – déverse en effet des résidus hautement polluants dans la nature.
Chimie + Transports Climat + Forêts
14 greenpeace 4/10
Interview Stefan Hartmann
Franklin Frederick, militant écologiste brésilien, s’engage pour que l’eau reste ou devienne un bien public. Il s’oppose clairement à toute privatisation.
Dans beaucoup de pays émergents, l’eau est aujourd’hui vendue en bouteille. N’est-ce pas utile, dans la mesure où il n’y a pas d’eau potable dans le pays en question?
L’eau en bouteille est devenue un symbole du statut social dans beaucoup de pays du TiersMonde. Mais tous ne peuvent pas en payer le prix, loin de là. Et la bouteille signale aussi le fait que l’eau du robinet du système public serait de moins bonne qualité. Conséquence, les sociétés publiques qui gèrent la distribution d’eau négligent l’entretien du réseau et n’investissent plus dans ce domaine.
Mais l’eau doit avoir un prix, sinon c’est le gas-pillage!
Les couches les plus pauvres doivent avoir accès à l’eau. Fin juillet 2010, ce droit humain a enfin été reconnu par l’assemblée générale des Nations Unies, après des décennies d’efforts de la
part des pays du Sud. C’est un grand pas en avant pour la société civile. Nous aurions évidemment apprécié que la déclaration dise en outre: «L’eau est un bien commun».
Lors de ce vote de l’assemblée générale de l’ONU, 41 Etats se sont abstenus dont beaucoup de pays industrialisés. Pourquoi rechignent-ils à reconnaî-tre le droit humain à l’eau?
Ces pays ne veulent pas que l’eau soit un bien public appartenant à tous, car ils ont leurs propres objectifs géopolitiques. Et ils comptent de grandes entreprises comme les multinationales françaises Veolia ou Suez, dont les objectifs ne se recoupent pas forcément avec les intérêts des populations du Sud.
Quelles sont les expériences en termes de privati-sation de la distribution d’eau?
Il n’existe pas de contrôle transparent. Si les prix de l’eau du robinet augmentent, personne ne sait pourquoi, que ce soit à Manille, Cochabamba ou Londres. Et il n’y a presque plus d’investissement dans l’infrastructure. Pas même à Londres,
qui compte parmi les premières cités à avoir privatisé sa distribution d’eau. D’ailleurs, pourquoi les sociétés privées devraientelles investir? Quand le système sera en déroute, les pouvoirs publics paieront l’addition, comme dans le cas des banques!
Mais quel changement, si l’eau devient un bien public?
Cela voudrait dire que le contrôle revient aux citoyens, tant sur l’accès à l’eau que sur les prix ou les investissements. Les processus doivent respecter la transparence, comme dans le cas du système suisse, le meilleur du monde, à mon avis.
Même si l’eau est un bien public, il faut financer les investissements. Qui paiera, dans ce cas?
Nous ne disons pas que tout doit être gratuit. Nous demandons une quantité de 40 litres d’eau par personne et par jour qui soit gratuite pour les pauvres. C’est la quantité nécessaire à un être humain pour boire, cuisiner et se laver. Dès aujourd’hui, les pauvres d’Afrique du Sud ont droit à 25 litres d’eau gratuite par jour. Une fois dépassée cette limite, la consommation est payante.
Pour l’instant, on ne parle pas beaucoup de pri-vatisation. Y a-t-il réellement des velléités dans ce sens?
Vous vous trompez: pour les banques, l’eau est un domaine important. Divers fonds permettent de gagner de l’argent par des placements financiers dans le secteur de l’eau. L’eau douce est une matière première idéale, car elle est essentielle à la vie humaine. La consommation est en hausse, elle croît plus rapidement que la population mondiale. L’eau comme marchandise suscite des convoitises, c’est pourquoi nous voulons la soustraire au marché et la placer sous contrôle public.
Y a-t-il des cas où la privatisation est suivie d’une renationalisation?
Oui, notamment en France, le pays qui connaît les plus anciennes privatisations, remontant au 19e siècle. La ville de Paris veut ainsi retourner à un système public, après les mauvaises
«Le contrôle de l’eau revient aux citoyens»
L’eau dans son cadre naturel, gratuite et publique-ment accessible: Franklin Frederick devant les chu-tes du Tabuleiro, dans le parc national de la Serra do Espinhaço.
Eau: politique
zvg
greenpeace 4/10 15
Comment le Brésil gère-t-il ses réserves quasiment inépuisables en eau?
Nous avons tellement d’eau que nous n’en prenons pas grand soin. Avoir de l’eau, ce n’est pas forcément avoir de l’eau propre. Le traitement des eaux usées est souvent déficient dans les villes, polluant ainsi l’eau fraîche. Par conséquent, les villes importent de l’eau propre des environs, ce qui donne lieu à des conflits avec les paysans, qui ont aussi besoin de cette eau. Peter Brabeck, de Nestlé, dit que la solution est l’eau en bouteille, mais la population pauvre ne peut pas l’acheter. Et les innombrables bouteilles en PET jetées à la rue produisent régulièrement des inondations, car les déchets bouchent les canalisations et les conduits d’écoulement.
Nestlé veut devenir le sponsor de la Coupe du monde de football 2014 et créer une marque d’eau spécifique à cet événement. Qu’en pensez-vous?
Cette eau conditionnée en bouteille devrait provenir des sources minérales de São Lourenço, petite ville de l’Etat fédéral de Minas Gerais, entre São Paulo et Rio. Ce choix est choquant. En 2000, Nestlé construisait une usine de conditionnement à São Lourenço, au milieu du parc thermal, pour sa marque «Pure Life». Elle a entouré sa fabrique d’un mur et prélevé de l’eau de source à 150 m de profondeur. Mais grâce à la résistance de la population, Nestlé a dû arrêter la production. Aujourd’hui, elle tente à nouveau de s’approprier cette source en se présentant comme sponsor principal de la Coupe du monde. Cela veut dire que dans quatre ou cinq ans, la source sera épuisée.
Du point de vue de la société civile, quelle est l’alternative à la privatisation? Il est vrai que la construction des infrastructures est très chère…
Il faut construire des partenariats avec des sociétés publiques modèles, comme elles existent en Suisse. Beaucoup d’entreprises ont été fondées sous la forme de coopératives il y a plus de 100 ans. C’est ce genre de structures qu’il faut mettre sur pied dans le Sud. Pourquoi ne pas créer des partenariats avec des sociétés du Sud, des partenariats entre entités publiques? Ce qui manque le plus au Sud, ce n’est souvent pas l’argent, mais le soutien et le savoirfaire! La Suisse devrait exporter son succès.
Depuis le milieu des années 1990, nous connais-sons le «Public-Private Partnership». Pourquoi ce modèle n’a-t-il pas tenu ses promesses?
Le mot évoque un partenariat qui n’existe pas en réalité. Ce terme sert à éviter le terme de privatisation qui n’a pas bonne presse. Pour faire court, on pourrait dire que les pouvoirs publics investissent dans les infrastructures, pour ensuite laisser la place aux sociétés privées qui achètent une licence et engrangent les profits.
Stefan Hartmann est journaliste au Presseladen à Zurich.
WWW
Plus d’infos en anglais sur: www.greenpeace.org
L’eau en bouteille, payante: la «Pure Life» de Nestlé.
Rank/Bloomberg via Getty Images
«Il nous faut des partenariats avec les sociétés publiques modèles
de l’eau, comme elles existent en Suisse.»
Franklin Frederick: militant pour l’eau comme bien public
Franklin Frederick (45 ans) a des racines indiennes et hollandaises. Après des études de littérature et de psychologie à l’université de Rio de Janeiro, il travaille pour la société publique Copasa, active dans le domaine de l’eau. Il organise plusieurs conférences sur l’eau, la santé et l’environnement. Depuis 1997, il s’engage dans le mouvement citoyen pour la protection de l’eau comme bien public. Consultant auprès de la Conférence épiscopale du Brésil (CNBB), il a participé à l’élaboration de la déclaration œcuménique «L’eau comme bien public». Cette
déclaration a été ratifiée par les Eglises suisses et brésiliennes en 2005. En 2009, il a reçu le prix «NordSud contre l’oubli» à Lucerne, doté de 20 000 francs. Depuis 2009, il vit en Suisse. Il s’engage pour divers projets et travaille depuis peu comme consultant auprès de la Société pour les peuples menacés.
Franklin Frederick doit aussi sa notoriété au «Nestlégate», l’espionnage des activités de l’association altermondialiste Attac au canton de Vaud. Cette infiltration a été révélée en 2008.
expériences de 2010. Et de nombreuses autres villes à travers le monde ont repris l’ancien régime public. Parfois à la suite de révoltes sanglantes, comme à Cochabamba, en Bolivie.
Quelle est la situation en matière de privatisation dans votre pays, le Brésil?
Le Brésil connaît une merveilleuse tradition de contrôle public de l’eau. Dans l’Etat fédéral du Parana, la société publique de distribution d’eau, Sanepar, a été privatisée. En 2002, le groupe français Veolia a acquis une partie de son capital et donc le contrôle de cette société. Deux ans plus tard, l’Etat constatait déjà qu’aucun investissement n’était plus effectué dans la desserte des quartiers pauvres. Ce n’est pas une clientèle intéressante! En 2004, le gouverneur a donc annulé la privatisation.
Le Brésil dispose de 13% des réserves mondiales en eau douce. La distribution d’eau des grandes villes n’est donc certainement pas le seul objet de convoitise pour les grands groupes de l’eau.
Dans la zone frontalière entre l’Uruguay, l’Argentine et le Brésil, il y a l’énorme aquifère d’eau douce fossile de Guarani. Shell, CocaCola, Nestlé, Danone et d’autres veulent s’assurer une part de cette eau propre. Ce genre d’appropriation de territoire par des sociétés privées prend de l’ampleur, car les ressources en eau diminuent et gagnent donc en valeur.
Mais l’eau n’est-elle pas un bien public garanti par la loi brésilienne?
En théorie, oui. Toutes les ressources souterraines appartiennent à l’Etat. Mais le Brésil est un énorme pays, le contrôle par les autorités est faible. Ce qui se passe dans l’arrièrepays est largement ignoré sur la côte. Et les régions reculées n’ont pas de syndicats, les gens ne sont pratiquement pas organisés.
16 greenpeace 4/10
Si nous l’abandonnons et que nous acceptons d’abattre les arbres avec les compagnies forestières qui sont sur place, comment allonsnous vivre à l’avenir?
Est-il possible de préserver la forêt? Il va nous falloir gérer autrement la question
et trouver de nouvelles solutions, si nous voulons survivre. Le problème est que l’Etat a classé de nombreuses forêts comme zones protégées, et que les compagnies forestières se partagent le reste. Nous avons besoin d’autres possibilités de revenus.»
Focus: le code forestier
Publié en 2002, ce code définit les droits et les devoirs mutuels des exploitants forestiers et des communautés locales. Cependant, le code forestier n’est toujours pas arrivé et appliqué dans les zones d’exploitation forestière de l’intérieur du pays. Greenpeace contribue à sa diffusion en organisant des ateliers de réflexion et d’échange d’information à l’intention des populations locales. Une traduction en lingala, réalisée par plusieurs ONG dont Greenpeace, a ainsi été proposée aux responsables locaux.
Texte et photos Greenpeace
Au printemps 2010, Greenpeace a organisé un forum de plusieurs jours à Oshwé, dans la province du Bandundu, en République démocratique du Congo. L’objectif était de créer, pour les populations locales et d’autres acteurs tels que les autorités forestières, un forum de discussion sur l’avenir de leurs forêts. Les besoins des populations locales étaient au centre du débat.
Dans le cadre de ce forum, divers participants ont été interviewés. Nous leur avons demandé quelle valeur avait pour eux, personnellement, la forêt. La société d’exploitation forestière Sodefor, qui appartient au holding Nordsüdtimber – dont le siège se trouve au Liechtenstein –, opère dans cette région.
Christine Etea«Nous sommes entre le marteau et l’enclume»Christine Etea est «agente de développement» à Oshwé. Lors du forum organisé par Greenpeace, elle a suivi attentivement toutes les discussions. Quand on lui demande si son activité profession-nelle est un bon boulot, elle répond du tac au tac: «Comment peut-on faire du bon boulot quand on n’a pas d’argent?», faisant allusion au problème des salaires qui ne sont versés qu’irrégulièrement aux fonctionnaires. De plus, le Service du dévelop-pement n’existe pas depuis longtemps à Oshwé, deux ans à peine.
«Avant, il y avait du gibier à environ un kilomètre, mais aujourd’hui, il faut faire de 30 à 50 kilomètres pour en trouver. Alors, si on veut de la viande, il faut aller au marché. Une portion y coûte 50 francs congolais, mais la qualité est tellement mauvaise qu’on ne peut pas en donner aux enfants. Personne ne peut plus manger de viande.
Autrefois, les habitants du village allaient à la chasse. Ils partageaient leur prise avec les vieillards qui n’avaient pas d’enfants pour s’occuper d’eux. Mais tout cela a bien changé. Aujourd’hui, on ne vit plus qu’à la grâce de Dieu. De nombreux enfants sont malades. Ils ont des hémorragies, souffrent de fièvre jaune, et surtout, de tuberculose.»
Les compagnies forestières présentes dans la région ne contribuent-elles pas à son développement?
Dans les zones forestières nationalisées, qui sont protégées, on ne peut pas chasser, car l’Etat nous l’interdit. Il n’y a que dans les forêts privées qu’on peut encore le faire.
Y a-t-il d’autres activités économiques sur place? Oui, il y en a, mais pas beaucoup. Il y a bien
l’agriculture, mais personne pour acheter les produits cultivés par les paysans.
Existe-t-il un espoir pour la région? Nous sommes entre le marteau et l’enclume:
nous vivons de la forêt, elle nous a toujours protégés.
Déforestation: les populations locales témoignent
Forêts anciennes
Christine Etea
greenpeace 4/10 17
Pélagie Balonge«Les sociétés forestières ne nous font que des promes-ses vides»Pélagie Balonge vient de Nonge Turi, à 96 kilomè-tres d’Oshwé. Elle partage son temps entre son métier d’enseignante et ses activités d’agricultrice. Lors du forum, elle représentait sa communauté locale.
«J’ai fait des études. Mais ici, il n’y a pas d’université et, de toute façon, nous n’aurions pas les moyens d’y aller. L’aîné de mes frères est devenu infirmier, et moi, institutrice. Mes journées à l’école commencent à 7 h 20 le matin et se terminent à 12 h 35. Nous disposons quand même d’une école avec des bancs. Quand ils sont cassés, nous les réparons nousmêmes. Il y a des villages auxquels les compagnies forestières avaient promis des écoles, mais elles n’ont finalement rien fait. Elles ne font que des promesses vides. Notre avenir? Nous n’avons pas les moyens de nous défendre, parce que nous sommes enclavés. Nous avons besoin de quelqu’un de l’extérieur pour nous aider.
La forêt, c’est toute notre vie. Elle nous offre des tas de possibilités: nous pouvons ramasser et cueillir beaucoup de choses comestibles, des fruits, des petits animaux et des insectes que nous pouvons manger. Les enfants fabriquent euxmêmes leurs jouets en bois, y compris des petits camions. Avec le caoutchouc des hévéas, ils confectionnent des ballons. La forêt recèle aussi des dangers, bien entendu. Les braconniers, par exemple, constituent un problème pour nous, les femmes.
Nous devons toujours être accompagnées de jeunes hommes, sinon, comment ferionsnous pour nous défendre? Et quand nous avons peur, nous chantons pour nous donner du courage.»
«Le forum de Greenpeace m’a beaucoup intéressée. Les forêts que nous devons céder à l’Etat et le plan d’utilisation des sols sont, à mon avis, des thèmes importants, et j’en parlerai aussi à mes élèves. Je leur expliquerai comment nos forêts sont détruites par l’industrie forestière et les artisans (NDLR: une branche forestière moins industrialisée, mais aussi peu respectueuse des besoins des populations locales). Ils abattent des arbres alors qu’ils n’ont pas les moyens de les transporter, ils les laissent tout simplement sur place. C’est révoltant de voir cela.»
Focus: la valeur d’un arbre
Cette question posée à de nombreux participants au forum d’Oshwé a toujours trouvé la même réponse. Dans cette région, avec l’industrie du bois comme seul acteur économique, la valeur du bois est pourtant ignorée de tous. Les informations récoltées par Greenpeace lors de diverses missions sur le terrain permettent d’estimer à quelques dollars tout au plus les sommes engagées par les compagnies forestières pour des arbres qui se vendent plusieurs milliers de dollars sur le marché de Kinshasa.
Espérance Mémé«Pour gagner un peu d’argent, nous allons à la chasse» Espérance Mémé est originaire de Kwao, chef-lieu d’un des quatre districts du territoire d’Oshwé. Cultivatrice, elle vit dans un village situé au cœur d’une concession de la Sodefor. Elle y cultive du riz, du maïs, des courges et des arachides ainsi que des haricots et du manioc. Espérance a cinq enfants, âgés de 18 à 25 ans.
«Actuellement, il n’y a pas de chantier forestier dans le village, mais les concessions existent toujours. Nous ne sommes plus d’accord avec cette situation. La Sodefor ne veut ni payer la redevance, ni signer un cahier des charges.
Elle ne nous donne que du sel, du savon et, de temps à autre, des petites sommes qui n’apportent rien à la communauté locale. Et elle n’offre pas non plus de places de travail. Notre économie ne fonctionne pas – nous aurions pourtant des surplus dans l’agriculture, par exemple, du riz et des courges, mais ils pourrissent parce que nous n’avons pas d’embarcations pour les transporter. Les moyens de transport sont inexistants ici. C’est pour cela que nous chassons. Nous vendons la viande à des acheteurs qui la revendent à Kikwit ou à Kinshasa. Nous le faisons pour gagner un peu d’argent et nous procurer ce qu’il nous faut pour subsister ainsi que des médicaments, et payer la scolarité des enfants. La viande se vend bien, mais depuis dix ans, il y a moins de gibier. Avant, on pouvait chasser à deux kilomè
Pélagie Balonge Ecoliers de MadjokoGreenpeace/Davison
18 greenpeace 4/10Greenpeace/Davison
tres du village, tandis que maintenant, les chasseurs doivent faire 12, 15, même 20 kilomètres, pour trouver du gibier.»
Focus: les titres forestiers
Plusieurs compagnies forestières se partagent les titres forestiers approuvés par le gouvernement congolais sur le territoire d’Oshwé, couvert aux trois quarts par la forêt équatoriale et dont la superficie totale est supérieure à celle de la Belgique. Ainsi, 1 279 523 hectares seront tôt ou tard voués à l’exploitation forestière. Le territoire d’Oshwé se caractérise également par la présence du parc naturel de la Salonga.
Thérèse Ngokanga «Il nous faut d’autres activités économiques»
Thérèse Ngokanga est professeure de français et de latin dans une école secondaire d’Oshwé. Elle dirige une association de femmes qui a créé un jardin potager pour ravitailler cette ville. Elles veulent ainsi offrir un choix plus varié de légumes. En même temps, elle est en train de réaliser, avec le soutien d’une section locale du WWF, un étang modèle où l’on pratique la rizipisciculture – qui combine la culture du riz et l’élevage du poisson. Thérèse Ngokanga a, elle aussi, activement parti-cipé au forum de Greenpeace.
«J’apprends aux mamans à créer un jardin potager. L’étang qui se trouve derrière ma maison est le premier de cette sorte. Nous y cultivons du riz et y élevons des alevins. Nous sommes 21 femmes à nous en occuper. C’est important que ce soient des femmes, parce que la femme est aussi la maîtresse de maison, celle qui fait la cuisine. En plus, nous leur enseignons les principes de la
nutrition. Nous espérons qu’elles retransmettront leur savoir et qu’ainsi, nous toucherons plus de monde. Les jeunes, ici, sont désœuvrés, ils n’ont pas de travail. Nous devons faire un effort pour les encadrer.
Chez nous, tout le monde aura du poisson à manger. Cela nous évitera de tuer des animaux sauvages. Bien sûr, il faudra encore être patient, car ce n’est pas facile, pour des gens qui ont toujours été habitués à manger de la viande, de changer leurs habitudes. Mais nous avons déjà fait de bonnes expériences avec nos jardins potagers. Les gens raffolent de nos légumes. Nous avons réalisé qu’il y avait là un marché potentiel. Nos amis commencent déjà à nous imiter. Ce serait vraiment bien si cette initiative se développait, car nos forêts sont en train de se vider à cause du braconnage. Actuellement, nous constatons un tassement et les gens reprennent leurs activités de chasse. Ils n’ont pas d’autre possibilité s’ils veulent payer les études de leurs enfants ou les envoyer à l’hôpital quand ils sont malades. Il nous faut d’autres activités économiques. Après, nous n’aurons plus besoin d’aller à la chasse.
La population locale sait que la forêt est très importante pour elle, car c’est notre unique ressource. Les gens s’inquiètent de l’attitude des compagnies forestières. Tout ce qu’elles font, c’est au détriment des communautés locales.»
WWW
Vous pourrez entendre d’autres témoignages en direct de la forêt tropicale, enregistrés lors du forum organisé par Greenpeace à Oshwé, et lire des informations complémentaires à ce sujet sur: www.greenpeace.ch/voixforet
Espérance Mémé (à gauche) et Thérèse Ngokanga
Chasseur de la région de Bandundu
greenpeace 4/10 19
Texte Nadia Boehlen
Depuis mars 2010, Greenpeace a engagé des dialogueurs en Suisse romande. Parmi eux, Noemi, 35 ans, qui chaque jour fait de la prospection dans la rue afin de recruter de nouveaux adhérents pour Greenpeace. Eduquée dans le respect de la nature, elle a développé son intérêt pour les questions environnementales dans le cadre de sa formation et à travers son engagement pour Greenpeace.
Grâce au jardin potager de ses parents, Noemi a, depuis son enfance, noué un contact direct avec la nature et avec la terre, au sens propre. Ce rapport à la terre lui a permis de développer une sensibilité pour l’alimentation et de s’intéresser à l’usage de pesticides en agriculture, son premier centre d’intérêt écologique. Diplômée de la Haute école de santé de Genève, filière nutrition et diététique, Noemi a eu l’occasion de pousser plus loin ses connaissances environnementales à travers sa formation, et notamment à travers ses travaux consacrés aux aliments irradiés et aux OGM dans l’alimentation. Depuis qu’elle travaille chez Greenpeace, elle s’est aussi intéressée à la destruction des grandes forêts primaires. Elle se sent donc très concernée face à la consommation actuelle d’huile de palme, dont on connaît l’impact sur l’environnement, et plus particulièrement sur la déforestation tropicale.
Comment en es-tu venue à travailler comme dialo-gueuse pour Greenpeace?
J’ai simplement répondu à une annonce, mais je me suis rendue compte que l’annonce correspondait à l’orientation environnementale des travaux effectués pendant mes études. L’annonce pour le travail de dialogueur a été comme une réponse à une recherche personnelle qui cherchait à joindre ma formation et ma sensibilité pour les questions environnementales dans une action utile. En fin de compte, la possibilité d’être dans l’action est la raison qui m’a décidée à travailler pour Greenpeace.
Qu’est ce qui te paraît le plus difficile dans ce mé-tier?
Les gens se sentent désabusés. Ils se sentent impuissants et manquent de confiance dans les gouvernements. Même s’ils pensent que les ONG font de leur mieux, ils estiment que ça ne suffit pas. Du coup, ils jugent parfois inutile de s’engager, ce qui rend notre travail plus difficile.
Qu’est-ce qui, au contraire, te paraît le plus valo-risant et le plus intéressant?
Le travail de dialogueur donne l’opportunité de parler avec toutes sortes de personnes et, du coup, de toucher toutes les couches de la population, de la ménagère à l’homme d’affaires, en
passant par le syndicaliste. De plus, tous les jours nous travaillons concrètement pour une cause qui en vaut la peine.
Quels sont les arguments qui fonctionnent le mieux auprès des personnes abordées?
Un argument que j’avance souvent est qu’on ne peut plus se permettre le luxe de se demander si notre action va fonctionner: les problèmes environnementaux sont devenus tellement urgents que nous avons le devoir d’agir, de nous engager. Un autre argument auquel j’ai recours est que cha
Noemi de Blas Telmo, dialogueuse en Suisse romande, retrace les motivations de son engagement pour Greenpeace
cun a le choix de prendre sa propre responsabilité ou pas, mais chaque personne est de toute façon concernée par l’état de notre planète. Finalement, c’est ma conviction qui parle, elle est le fondement de mes arguments.
Utilises-tu des techniques de démarchage particu-lières?
Je n’ai pas vraiment recours à des techniques de démarchage, mais j’essaie de faire de mon mieux en m’appuyant sur la spontanéité, la fraîcheur et l’authenticité.
Quels sont les éléments les plus utiles de la formation donnée aux dialogueurs chez Greenpeace, à ton avis?
Les jeux de rôles, où nous devons jouer tour à tour le rôle de passant ou de dialogueur sont très utiles pour se mettre en situation, surtout pour qui n’a jamais fait ce travail auparavant. La présentation des départements de campagnes, des campagnes en cours et des succès obtenus par Greenpeace, autant en Suisse qu’au niveau international, sont d’autres éléments importants de notre formation.
Nadia Boehlen est porte-parole de Greenpeace Suisse
Noemi de Blas TelmoGreenpeace/Ruet
Engagement
«La possibilité d’être dans l’action est la raison qui m’a décidée
à travailler pour Greenpeace.»
20 greenpeace 4/10
International
Texte Kuno Roth Photo Greenpeace
Il y a un an, nous avions évoqué le soutien apporté par la Suisse au travail de pionnier accompli en Afrique en matière de climat et d’énergie solaire. Aujourd’hui, bien que modestes, les premiers fruits de ces efforts se font sentir.
Au Cameroun, à l’issue de la première caravane climatique qui a sillonné le pays, 1485 fours solaires permettant d’économiser le bois ont été construits et sont utilisés. Par ailleurs, un millier de familles environ stérilisent leur eau au moyen de l’énergie solaire et 29 jeunes ont obtenu un diplôme pour le développement durable dans les villages. De plus, 47 instructeurs qui retransmettront leurs connaissances aux communautés ont été formés; une société spécialisée dans l’énergie solaire a été créée et des centaines d’appareils solaires sont en service.
Derrière ces chiffres se cache beaucoup de sueur, d’énergie dépensée lors de nos visites dans les villages, dans l’apprentissage, la planification et la réalisation de nos projets, mais surtout, lors d’interminables palabres. Ce n’était pas, en l’occurrence, une caravane climatique qui se contentait de passer et d’apporter du bonheur made in Switzerland.
Bien au contraire. Lors de nos précédentes visites dans les communautés villageoises, nous avions étudié leurs besoins, discuté de solutions possibles et formé deux personnes dans chaque village, chargées d’aider – elles s’acquittent toujours de cette tâche – à réaliser ce qui avait été décidé, à savoir «l’habilitation durable des communautés villageoises», ainsi qu’on l’appelle dans le jargon officiel. Le taux de participants qui ont mis en œuvre ce qu’ils avaient appris a été, en moyenne, de 70%.
Cette caravane climatique est soutenue par l’Organisation indigène des femmes d’Afrique (AIWO), qui est déjà ou souhaite être active dans les villages visités, afin de garantir un suivi ultérieur. Le rôle de Greenpeace Suisse se limite au coaching, à un coup de pouce financier d’un montant de 200 000 francs, ainsi qu’à la formation de personnes chargées de retransmettre leurs connaissances. Parmi les élèves, il y avait aussi trois Congolais. Ils veulent maintenant transposer
le principe en République démocratique du Congo et, grâce à leur formation, et à un soutien externe, mettre en place une caravane pilote dans des villages de la forêt tropicale congolaise.
Changement de décor: au Kenya, dans le village de Kogelo, la grandmère du président américain Barack Obama, Mama Sarah, raconte d’un air malicieux qu’elle est devenue «le commutateur de son village». Sa centrale solaire est très demandée pour recharger les téléphones mobiles, grâce auxquels elle a d’ailleurs parlé à son petitfils.
A Kogelo, il y a eu aussi des problèmes: un maître d’école avait tellement bricolé l’installation qu’elle a fini par tomber en panne. Le malheur a pu être réparé à l’occasion de la deuxième formation au centre des jeunes (www.solafrica.ch): dans ce cadre, une petite entreprise de cinq personnes qui produit des lampes solaires portables fabriquées selon les principes du commerce équitable a été créée. Il s’agit, d’une part, de remplacer les lampes à pétrole au Kenya, d’autre part, de permettre aux élèves des écoles d’étudier en s’éclairant avec des lampes solaires dans d’autres parties du monde également. Une vingtaine d’entre elles sont en vente à la boutique de Greenpeace (voir encadré cicontre).
En Afrique du Sud, enfin, un nouveau projet réalisé dans le cadre de celui de la retransmission télévisée publique sur des écrans géants alimentés par le courant solaire se dessine. Greenpeace Afrique a, avec l’aide de la Suisse, formé des jeunes du village de Jericho et installé avec eux une centrale solaire qui fournit du courant pour les transmissions sur écran géant. Dans la perspective de la Conférence climatique qui aura lieu en 2011 à Johannesburg, une caravane climatique basée, entre autres, sur l’utilisation des lampes solaires
provenant du Kenya pourrait aussi être lancée en Afrique du Sud. Son slogan serait le suivant: «La crise climatique a besoin de solutions concrètes – l’énergie solaire en est une – en particulier pour l’Afrique».
Certes, comparé aux besoins existentiels de l’Afrique et aux mesures urgentes qui devraient être prises pour protéger le climat à vaste échelle, ce n’est pas grandchose. Mais c’est concret et exemplaire. Et, pour tous ceux qui en bénéficient, c’est beaucoup plus qu’une goutte d’eau dans l’océan.
Kuno Roth est responsable du Greenpeace Youth Support Center et des projets Greenpeace pour l’Afrique.
WWW
Les lampes solaires portables produites selon les principes du commerce équitable sont en vente sur le site en allemand www.green-peace-schenken.ch. Le prix spécial Solidarité solaire de ces lampes est de CHF 99.–, dont CHF 30.– de subvention qui permettront à une famille au Kenya d’acheter une lampe à un prix plus avantageux.
Informations: www.greenpeace.org/africaSur la caravane climatique:[email protected]éos accessibles au public sur le site: youtube.com Entrée: Greenpeace, Solaire, Afrique
Pour l’Afrique,l’ère solairecommence
La caravane climatique parcourt le Cameroun: le courant solaire pour éclairer, une solution lumineuse pour tous.
greenpeace 4/10 21
Destruction de la forêt tropicale humide avec le soutien de grandes banques
La destruction des forêts tropicales est étroitement liée à nos habitudes de consommation. Beaucoup de gens en sont conscients. En revanche, bon nombre d’investisseurs ignorent le fait que des banques suisses y participent, par le biais de placements de fonds auprès de certains destructeurs notoires de la forêt.Informations complémentaires sur: www.greenpeace.org/switzerland/destruction-tropicale
Eau minérale: combien d’énergie grise contientelle
La mise en bouteille et le transport de l’eau minérale requièrent de l’énergie. Combien en fautil jusqu’à ce qu’une bouteille soit sur votre table et que signifie le terme «énergie grise».Vous l’apprendrez sur: www.greenpeace.org/switzerland/eau-minerale
Le chasseur de baleines devenu leur protecteur: histoire de quelqu’un qui a réfléchi
Quand il était jeune, Cornelius Cransbergen chassait la baleine. Aujourd’hui, il est membre de Greenpeace et en colère contre le Japon et la Norvège qui continuent de pratiquer la pêche à la baleine. Découvrez comment le pêcheur hollandais s’est converti…Vous en saurez plus sur: www.greenpeace.org/switzerland/chasseur-protecteur
Purnomo/GreenpeaceImage SourceGreenpeace/Davison
Local
Visite d’écoles en Romandie
Le programme des visites d’écoles de Greenpeace arrive enfin en Suisse romande.
Pour que ce programme fonctionne vraiment, nous avons besoin de votre soutien. Nous cherchons des personnes capables de transposer la vision et le travail de Greenpeace dans les écoles de Suisse romande. Nous vous offrons un accompagnement et une introduction dans notre concept pédagogique.
Nous recherchons également des salles de classe où nous pourrons faire nos premières expériences. Nous vous remercions donc de nous faire connaître des enseignants ou des écoles intéressées par notre programme et prêtes à accueillir Greenpeace.
WWW
Contact: [email protected]
Vignette solaire
Achetez du courant solaire pour votre natel, votre notebook ou votre e-bike
La vignette solaire est une invention due à des bénévoles du ProjetSolaireJeunesse de Greenpeace, du projet Legair monté par des élèves du lycée de Köniz et de la firme Megasol, fondée avec le soutien du ProjetSolaireJeunesse il y a une douzaine d’années.
En achetant une vignette solaire, vous nous confiez un mandat: celui de produire pour vous du courant solaire et de l’injecter dans le réseau. Pendant une année, vous pourrez vous procurer ce courant à partir de n’importe quelle prise électrique. Une vignette solaire couvre les besoins annuels moyens nécessaires pour recharger un natel (5 kWh, prix: 8 francs), un ordinateur portable ou un vélo électrique (50 kWh, prix: 50 francs).
Le courant solaire que vous achetez est produit par des centrales photovoltaïques spécialement construites à cet effet, par exemple, la centrale solaire de 54 kWp à Schwitz, qui est entrée en service en automne 2009. Elle a été montée par des écoliers de Frauenfeld. Autrement dit, le courant
solaire ne vous est pas livré par un quelconque géant de l’énergie, mais par des jeunes.
WWW
Vous pouvez passer commande sur le site:www.solarvignette.ch
WWW Sur www.greenpeace.ch, vous pouvez lire la suite de ces articles en exclusivité.
22 greenpeace 4/10
Nom d’un pesticidequi devrait être interdità l’échelle mondiale
Non-métalNotedemusique
Unité mo-nétaire del’Algérie
Garnituredubifteck
Un ancienpays dela CE
EpousedeZeus
Assaison-nementindien
Quelle énergiefournit le plusd’électricitéen Suisse ?
Forêt
Villed’Ecosse
Acteurde FranceTubed’éclairage
Chantépar McSolaar
Cinéasteaméricain
Grande fêteofficielle
Le piquantd’uneconver-sation
Chiffreromainvalantcinq cents
Cinéastede France
Déjà dit
Marquesd’estime
En ma-tière de
Passe àWroclaw23e lettregrecque
Préfixe
Symboledu nickel
Vieillecolère
Préposition
Quelle grandemultinationale porteun intérêt particulierà l’eau commeressource naturelle ?
Symbole del’aluminium
ArroseBerne
Situé
Deuxfoistrois
Ville dela Hesse,sur leMain
D’uneseulecouleur
Tonneau
Articleespagnol
Unitéarithmé-tique etlogique
Econo-misteallemanddu XIXe s.
Mémoirevive
Câblede bouée
Iled’Inde
Mesurede l’in-telligence
Sot
Etat de lacôte ouestde l’Inde
Forme leshommespolitiquesen France
Magnésium
Attacheles gerbes
Où a eulieu cetteannée laConfé-renceinter-nationalesur leclimat
Canta-tricecélèbre
Cavalierévoluantdans lemanège
Poème
Café
Foot-balleurfrançais,années 50
Céréalecultivéeen zonetropicale
Régiondéserti-que du sudd’Israël
Entouragesociald’un êtrehumain
Lamede charrue
Gradeau judo
Degré decouleur
Symbole del’oxygène
Préfixe
Villesur leDanube
Nom del’actueldirecteurdeGreen-peaceInter-national
Ordinateur
Peintreflamand
Troncdespalmiers
Etang
Cinéasteaméricain
Politiqueallemand †Reinelégendaire
Produitdutravail
Connu àl'avance
Nourrisson
Qui pré-sente degrandesdifficultés
Philosophefrançaise,d’originejuive †
On y faitdes étu-des supé-rieures
Pantoufle
7e lettregrecque
Gâteauimbibéde rhum
Tonned’équivalentcharbon
Héroïnedescontesp. enfants
Choisipar Dieu
À la mode
Premierprésidentallemand(1919-1925)
On appelle l’énergiequi sert à couvrir lesbesoins continus enélectricité, l’énergie de...
Incor-recte,erronée
Ondulation
Nymphedeslégendesgermaniques
Jus nour-rissantde laviande
7
8
9 12 11
10
3
5
2
6 1 4
1103
013
´Vous trouverez de plus amples informations sur les conditions du concours sur: www.greenpeace.ch/magazine
Mots fléchés écolos Vous trouverez la solution à la fin du mois de janvier sur: www.greenpeace.ch/magazine
Votre opinion
Dialogueurs directs
Nos collaborateurssont dans la rue pour vous
Depuis quelque temps, Greenpeace envoie ses propres collaborateurs dans la rue pour prospecter de nouveaux adhérents – un mandat qui, auparavant, était confié à une agence externe. Nous nous sommes décidés à nous en charger nousmêmes, afin de pouvoir informer le public de manière encore plus compétente et plus détaillée de notre travail. Nos propres «dialogueurs», comme nous les appelons, doivent aussi servir d’antennes de contact, disponibles en permanence pour nos adhérents.Vous avez changé d’adresse? Vous aimeriez commander notre bulletin électronique? Vous avez une question ou une suggestion? Nos collaborateurs se réjouiront que vous les abordiez et vous aideront à tout moment avec professionnalisme et amabilité.
Conseil de lecture
Glaciers, passé-présent du Rhône au Mont-Blancde H. Dumoulin, A. Zryd, N. Crispini
Cet ouvrage est constitué de 120 comparaisons de glaciers passéprésent, commentées par un glaciologue. Agrémenté de 230 photographies, gravures et peintures accompagnées de textes historiques et littéraires, il vous fera voyager dans le temps et mieux comprendre notre fascination pour les glaciers. Une référence en la matière.
Greenpeace vous offre le livre présenté à la rubrique «Conseil de lecture» ci-contre.
Envoyez la bonne réponse d’ici au 20 janvier 2011 à [email protected] ou à l’adresse postale de la rédaction.
Greenpeace/Ex-Press/Grasser
greenpeace 4/10 23
Texte Muriel Bonnardin
Le nouveau Rainbow Warrior III innove en proposant de nouvelles normes en matière d’écologie et apporte à Greenpeace des avantages décisifs pour ses campagnes. Il est actuellement en construction. Toutefois, sur les 30 millions requis pour sa construction, il manque aujourd’hui encore 18 millions. Apportez votre contribution au Rainbow Warrior III et écrivez l’histoire avec nous. Vous pouvez nous soutenir de différentes manières.
A partir de 5 francs: faites un don en ligne
Sur notre site web, nous vous donnons le prix de certaines pièces du bateau. Une ancre, par exemple, coûte 12 000 francs; un zodiac, 100 000; une voile, 220 000 francs. Vous pouvez faire un don ciblé pour une pièce particulière – à partir de 5 francs. Comme le dit le proverbe, «Les petits ruisseaux font les grandes rivières» et de nombreux petits dons peuvent constituer au total une belle somme. Encouragez vos amis et connaissances à participer, afin qu’un plus grand nombre de dons – petits ou grands – soient faits. Vous pouvez vérifier l’état actuel des dons et regarder un film impressionnant sur l’histoire du Rainbow Warrior sur le site www.greenpeace.ch/rw3.
A partir de 2500 francs: dons liés à des projets
Chaque don compte. Des sommes plus importantes nous aident toutefois à assurer plus rapidement le financement de nos projets. Dans le cas du Rainbow Warrior III, vous pouvez verser des dons liés à des projets à partir de 2500 francs.* En guise de reconnaissance pour des dons plus élevés – supérieurs à 10 000 francs –, vous aurez la possibilité de faire personnellement la connaissance des responsables de projet. A partir de 50 000 francs, vous pourrez participer au voyage inaugural, et à partir de 100 000 francs, il vous sera possible de baptiser une partie du bateau à votre nom.Nous sommes parfaitement conscients que des montants de cet ordre sont quelque chose de tout
à fait exceptionnel – et donc, nous nous tenons à votre entière disposition pour un entretien personnel avec vous. Les personnes intéressées peuvent s’adresser directement à Muriel Bonnardin Wethmar: tél. 044 447 41 64 [email protected].
*Conformément au règlement concernant les dons, Greenpeace n’accepte des dons liés à des projets qu’à partir de 10 000 francs. Mais comme nous avons urgemment besoin de moyens financiers pour la construction du Rainbow Warrior III, cette limite a été levée jusqu’au 31 décembre 2010.
Muriel Bonnardin est responsable de la recher-che de fonds auprès des grands donateurs chez Greenpeace Suisse.
Adhérents / Informations internes
Ecrivez une page d’histoire avec nous!
iPhoneApp: animation en 3D du Rainbow Warrior III avec guide des poissons
Avec le nouvel iPhoneApp de Greenpeace, vous saurez à tout moment quel poisson vous pouvez acheter et lesquels vous devez définitivement rayer dans vos menus. De plus, vous pourrez afficher un modèle en trois dimensions du nouveau Rainbow Warrior III. Attention: pour cela, vous avez besoin du logo du Rainbow Warrior, reproduit ici.
Décharger l’installation App sur:www.greenpeace.ch/app
Dykstra & Partners
Jean Ziegler: «Soumettre l’eau potable à la loi du profit est une catastrophe»
Personnel
Texte Nicolas de Roten Photo Keystone/Trezzini
Actuel membre du Comité consultatif du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, Jean Ziegler connaît bien la problématique de l’eau dans le monde. Il s’engage avec vigueur en faveur du droit humain à l’eau potable.
Jean Ziegler, vous avez publié, début 2010, un nou-veau livre intitulé La Haine de l’Occident. Croyez-vous toujours que l’Occident ne pense qu’à sou-mettre le reste du monde à sa domination?
Nous vivons sous un ordre cannibale du monde. Les oligarchies du capital financier mondialisé dominent la planète. Cet ordre procure de fabuleuses richesses, un pouvoir politique, idéologique, militaire, économique indécent à une mince classe dirigeante mondialisée et une misère effroyable à une multitude.
En 2009, 36 millions de personnes sont mortes de faim ou de maladies dues aux carences en micronutriments. Toutes les cinq secondes, un enfant de moins de dix ans meurt de faim. La faim est la principale cause de mort sur notre planète. Le World Food Report de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture), qui donne le chiffre des victimes, dit également que l’agriculture mondiale, dans l’état actuel de son développement, pourrait nourrir sans problèmes 12 milliards d’êtres humains. Nous ne sommes pourtant que 6,8 milliards sur terre. Il n’existe aucune fatalité. Un enfant qui meurt de faim est assassiné.
En juillet dernier, l’Assemblée générale des Nations Unies a reconnu l’accès à une eau potable propre et de qualité comme un droit de l’homme. N’est-ce pas là le signe d’une évolution positive?
Cette résolution va dans la bonne direction. Mais elle ne comporte malheureusement aucun mécanisme de sanction.
Or aujourd’hui sur la planète, un homme sur
trois est réduit à boire de l’eau polluée et 9000 enfants de moins de dix ans meurent chaque jour de l’ingestion d’une eau impropre à la consommation. La diarrhée tue 2,2 millions de personnes chaque année, surtout des enfants et des nourrissons – elle n’est d’ailleurs qu’une des nombreuses maladies transmises par l’eau de mauvaise qualité. Selon l’OMS (Organisation mondiale de la Santé), dans les pays en développement, jusqu’à 80% des maladies et plus d’un tiers des décès sont imputables à la consommation d’une eau contaminée.
Certains Etats ont tout de même tenté d’empêcher la votation. Comment l’expliquez-vous?
Le vrai combat a lieu dans deux arènes différentes: d’une part au sein du Conseil des droits de
l’homme, d’autre part au sein de l’OMC (Organisation mondiale du commerce).
Une majorité des 47 Etats membres du Conseil reconnaissent l’existence du droit humain à l’eau potable. Pour faire face à l’opposition de certains Etats industriels puissants du Nord, un nouveau mandat a été créé: celui d’un Rapporteur spécial sur le droit à l’eau. A l’OMC, par contre, qui est totalement dominée par les intérêts des sociétés transcontinentales privées, la situation est sombre. L’OMC ne reconnaît en effet pas l’eau comme un bien public. Elle la considère comme un bien privé.
L’acceptation d’une telle résolution irrite donc bon nombre de sociétés privées…
Peter Brabeck, président de Nestlé, résume ainsi l’argument des multinationales: «L’eau est de plus en plus rare. Pour la préserver, il faut donc
lui imposer un prix». En clair: il faut privatiser l’eau. Or soumettre l’eau potable à la loi du profit est une catastrophe pour des centaines de millions d’êtres humains.
Dans mon livre, je décris les révoltes de l’eau à Cochabamba, El Alto, Manille, Lima où des sociétés multinationales ont contrôlé l’approvisionnement en eau potable à des prix que les pauvres ne pouvaient tout simplement plus payer. Résultat: les pauvres étaient renvoyés aux rigoles boueuses, aux fleuves pollués. Le choléra, la mort par diarrhée sanglante en étaient les conséquences.
Comment imposer aux maîtres du monde le respect du droit humain à l’eau? Il faut rendre justiciable par une convention internationale le droit humain à l’eau potable.
L’accès universel à une eau potable propre et de qualité: pour Jean Ziegler, réalité ou utopie?
La mobilisation de l’opinion publique démocratique dans les pays industrialisés et notre solidarité active avec les mouvements sociaux luttant pour le droit humain à une eau potable propre et de qualité dans les pays du Sud constituent l’espoir de ceux qui sont livrés sans défense aux trusts multinationaux de l’eau potable.
Jean Ziegler, rapporteur spécial des Nations Unies pour le droit à l’alimentation (2000 – 2008) et membre du Comité consultatif du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, est l’auteur de nombreux ouvrages, dont La Haine de l’Occi-dent (Ed. Le Livre de Poche, 2010)
Nicolas de Roten est porte-parole de Greenpeace Suisse.
«Il faut rendre justiciable par une convention internationale le
droit humain à l’eau potable.»