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FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNESOBSERVÉS SUR BOUCHE ARTIFICIELLE

in�uence de l'inharmonicité du résonateuret étude des sons éoliens

Rapport de stage de Master 2

Soizic TERRIEN

Encadré par : Christophe VERGEZ (LMA, CNRS UPR7051)

Benoît FABRE (LAM, IJLRA, CNRS UMR7190)

Master Mécanique, Physique et Ingénierie

2eme année � spécialité Acoustique

Université de Provence � Aix-Marseille I

2010 - 2011

Page 2: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Table des matières

Introduction 3

1 Production du son dans une �ûte à bec et modélisation retenue de l'instrument 8

1.1 Mécanisme de production du son . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81.1.1 Boucle d'auto-oscillation et registres de l'instrument . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

1.2 Description du résonateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101.2.1 Corrections liées au rayonnement à l'extrémité passive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101.2.2 Corrections liées à l'extrémité active . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

1.3 Modélisation "minimale" d'un instrument de type �ûte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111.3.1 Discussion sur la modélisation du terme source (interaction jet-biseau) . . . . . . . . . . . 121.3.2 Modélisation du résonateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

2 Travaux préliminaires : développement d'outils adaptés 14

2.1 Dispositifs expérimentaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142.1.1 Bouche arti�cielle asservie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142.1.2 Mesure des fréquences de résonances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

2.2 Outils numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172.2.1 Intégration temporelle du modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172.2.2 Etude théorique du modèle - Analyse de bifurcations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

2.3 Comparaison des résultats obtenus avec les di�érentes approches numériques � Validation del'étude par analyse de bifurcations d'un modèle minimal de �ûte . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

2.4 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

3 Mise en évidence et analyse de l'origine de sons éoliens 25

3.1 Premières dé�nitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 253.2 Mise en évidence expérimentale de sons éoliens sur la �ûte à bec . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

3.2.1 Synchronisation sur di�érents modes acoustiques du résonateur . . . . . . . . . . . . . . . 263.2.2 Discrimination des sons éoliens et des registres de jeu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

3.3 Analyse des sons éoliens sur un modèle minimal de �ûte à bec . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273.3.1 Mise en évidence en simulation temporelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273.3.2 Caractéristiques de ces régimes d'oscillations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

3.4 Origine des sons éoliens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 333.5 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34

4 In�uence de l'inharmonicité du résonateur sur les régimes d'auto-oscillations 37

4.1 Etude expérimentale : mise en relation des régimes d'oscillations observés et de l'inharmonicitédu résonateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

4.2 In�uence de l'inharmonicité sur les régimes d'auto-oscillation d'un modèle minimal de �ûte à bec 394.2.1 Stabilité des régimes périodiques et caractéristiques de la bifurcation entre premier et

second registre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 394.2.2 Seuils d'oscillation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

4.3 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

Conclusion et Perspectives 46

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A Admittance du résonateur : expression des corrections de longueur 48

A.1 Corrections liées au rayonnement à l'extrémité passive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48A.2 Corrections liées à la fenêtre d'excitation au niveau de l'extrémité active . . . . . . . . . . . . . . 48

B Ecriture du modèle minimal de �ûte à bec dans le formalisme nécéssaire à DDE-Biftool 50

C Méthodes de continuation de branches de solutions 52

D Figures et Schémas 54

D.1 Représentation schématique d'un bec de �ûte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54D.2 Tablature des doigtés de la �ûte à bec alto . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

Bibliographie 56

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Introduction

La production d'une note par un instrument de musique résulte d'un couplage complexe entre l'instrument etle musicien, où obtenir le son recherché demande à l'instrumentiste une adaptation constante des paramètres quisont à sa disposition. Expérimentalement, il est alors di�cilement envisageable de demander à un instrumentistede �xer tous ces paramètres de contrôle. Pour les instruments à vent, l'utilisation d'une "bouche arti�cielle" (dis-positif dont le but est de "faire jouer" l'instrument sans avoir recours à un musicien � voir chapitre 2), permet des'a�ranchir de cette di�culté. En rendant possible le fait de régler précisément certains paramètres de contrôle(tels que la pression d'alimentation) et de les �xer aussi longtemps que le nécessite la mesure, elle autorise uneétude plus systématique du comportement de l'instrument.

Des études préliminaires sur une bouche arti�cielle adaptée à la �ûte à bec ([10], [14] et [21]) ont permis demettre en évidence des phénomènes encore méconnus sur cet instrument, qui suscitent de nombreuses questionsouvertes. Nous nous concentrons dans ce rapport sur deux de ces phénomènes.

Premier phénomène: pour certains doigtés, on observe des sons pour une pression d'alimentation inférieure àcelle utilisée habituellement, voire parfois inférieure au seuil d'oscillation de la note recherchée. C'est ce type desons que l'on observe dans les zones A et C de la �gure 1, alors que la note recherchée (un sol dièse 4) est situéedans la zone B 1. Ces régimes d'oscillations rappellent les "sons éoliens" observés sur certains tuyaux d'orgueou sur la �ûte traversière, et qui apparaissent pour de très faibles valeurs de la pression d'alimentation. S'ilspeuvent être entendus à l'orgue lors de l'extinction de la sou�erie, et sont parfois utilisés musicalement à la �ûtetraversière (chapitre 10 in [8]), leur existence sur la �ûte à bec n'a été mise en évidence que récemment [14], etleurs di�érences avec les régimes d'oscillations "habituels" demeurent assez mal connues.

Second phénomène: il semble exister, notamment au niveau des changements de registre (voir chapitre 1),une grande diversité de comportements en fonction du doigté utilisé. Lorsque l'on sou�e de plus en plus fortdans l'instrument, on observe pour certains doigtés une bifurcation vers une note plus aiguë (et, repartant decette nouvelle note, une bifurcation vers la note initiale lorsque l'on sou�e de moins en moins fort). C'est parexemple ce que l'on observe en t = t1 et t = t2 sur la �gure 2, représentant la fréquence de jeu d'une �ûte à becalto lors d'une rampe croissante puis décroissante de la pression d'alimentation, pour un doigté de sol grave1.Si l'on reproduit la même expérience sur d'autres doigtés, comme par exemple celui de si bémol, on observe unpassage vers un régime quasi-périodique, correspondant auditivement à une note "qui roule"1. C'est ce que l'onpeut voir dans la zone D de la �gure 3 : l'instrument présente simultanément deux fréquences de jeu f1 et f2.Ces régimes d'oscillations particuliers semblent apparaître pour les doigtés "de fourche" (voir chapitre 4), connuspour être particulièrement inharmoniques [19].

Quels outils mettre en place pour aborder les questions relatives à ces deux phénomènes?Si l'approche expérimentale, avec l'utilisation de la bouche arti�cielle, permet de contrôler très précisément desparamètres tels que la pression d'alimentation, et donc d'en étudier l'in�uence, cela devient plus complexe pourcertains paramètres de facture, qui sont intrinsèques à l'instrument. En complément de ces mesures, la modé-lisation physique de l'instrument est alors particulièrement intéressante, dans la mesure où tous les paramètrespeuvent être contrôlés précisément et indépendamment les uns des autres. Les simulations temporelles permettentalors une étude plus systématique de l'in�uence d'un paramètre donné (tel que l'inharmonicité du résonateurpar exemple).Cependant, accéder à des valeurs réalistes des paramètres d'un modèle physique peut s'avérer complexe. Dans cecadre, les résultats expérimentaux et ceux issus des méthodes d'intégration temporelle sont souvent di�cilementcomparables. Cette problématique est encore accentuée par la sensibilité de l'instrument et du modèle physique

1. Les sons correspondant aux spectrogrammes présentés dans cette introduction peuvent être écoutés à l'adresse suivante, a�n

d'illustrer les di�érents phénomènes : http://st.olympe-network.com

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Figure 1 � Spectrogramme d'un son de �ûte à bec jouée par une bouche arti�cielle (en haut) lors d'une rampecroissante puis décroissante de pression d'alimentation (en bas) - �ûte alto - doigté de sol dièse 4.

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Figure 2 � Spectrogramme d'un son de �ûte à bec jouée par une bouche arti�cielle (en haut) lors d'une rampecroissante puis décroissante de pression d'alimentation (en bas) - �ûte alto - doigté de sol 3.

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Figure 3 � Spectrogramme d'un son de �ûte à bec jouée par une bouche arti�cielle (en haut) lors d'une rampecroissante puis décroissante de pression d'alimentation (en bas) - �ûte alto - doigté de si bémol 3.

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aux conditions initiales, et par le fait que les mesures comme les simulations ne donnent une vision de l'instrumentqu'en "un point", c'est-à-dire pour un jeu de paramètres bien précis.La mise en oeuvre d'outils d'analyse de modèle, en donnant accès aux diagrammes de bifurcation peut permettrede dépasser cette di�culté. Ces diagrammes représentent idéalement l'ensemble des régimes stables et instablesdu système dynamique étudié, en fonction de la valeur d'un ou de plusieurs paramètres (dans le cas présent,c'est le plus souvent la pression d'alimentation). Ils permettent alors d'avoir une lecture globale de l'évolutiondes di�érents régimes possibles de l'instrument en fonction de la valeur du paramètre considéré.Mais si des études de ce type, e�ectuées pour des instruments à anche (notamment la clarinette) ont montré larichesse des informations accessibles [4], [5], il ne semble pas exister d'analyses comparables pour les instrumentsde la famille des �ûtes.

Le chapitre 1 est consacré à la description du fonctionnement des instruments de type �ûte à bec, et setermine sur un "modèle minimal" de production du son pour cette famille d'instruments. Avant d'aborder lesproblématiques liées aux sons éoliens (chapitre 3) et à l'in�uence de l'inharmonicité (chapitre 4), le chapitre 2 pré-sente des travaux préliminaires relatifs au développement ou à la validation d'outils expérimentaux, numériqueset théoriques.

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Chapitre 1

Production du son dans une �ûte à bec et

modélisation retenue de l'instrument

On trouve à l'intérieur de la famille des �ûtes des instruments très nombreux et très divers (voir �gure1.1), parmi lesquels on peut citer la �ûte traversière, les �ûtes à bec ou les tuyaux d'orgue à bouche. Si cesinstruments sont liés par leur mécanisme de production du son, ils n'en présentent pas moins des di�érencesimportantes. Ainsi, certains paramètres �xés par le facteur dans certains instruments sont �xés par le musiciendans d'autres. Si l'on prend l'exemple de l'orgue, chaque tuyau est dimensionné pour jouer une seule note, et lefacteur d'instrument �xe alors tous les paramètres tels que la longueur du résonateur (déterminant la fréquencede jeu) ou la pression d'alimentation. Dans le cas de la �ûte à bec, le facteur �xe toujours les paramètresgéométriques de l'excitateur (comme les dimensions du canal, la distance de la sortie du canal au biseau, ou laposition du biseau - voir �gure 1.2 pour le vocabulaire), mais le choix de la longueur du résonateur (c'est-à-direle nombre de trous fermés) ainsi que la pression d'alimentation (le fait de "sou�er fort" ou non) sont contrôléspar le musicien. En�n, dans le cas de la �ûte traversière, encore moins de paramètres sont �xés par le facteurd'instrument : le canal étant formé par les lèvres du musicien, celui-ci peut en modi�er la géométrie (ouverturedes lèvres, distance par rapport au biseau situé sur l'instrument...). Ainsi, si le mécanisme de production du sonest commun à tous les instruments de cette famille, le musicien a, selon l'instrument considéré, une in�uenceplus ou moins grande sur le son qu'il produit.

Figure 1.1 � Aperçu de la diversité des instruments à embouchure de �ûte � Tiré de [33].

1.1 Mécanisme de production du son

En physique des instruments de musique, il est classique de modéliser un instrument par un système excitateurcouplé à un résonateur [20]. Les instruments de la famille des �ûtes, comme tous les instruments à vent, sont des

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Figure 1.2 � Coupe d'une �ûte à bec, représentant les principaux éléments intervenant dans le mécanisme deproduction du son.

Figure 1.3 � Représentation schématique du comportement du jet. D'après Fabre, chap. 10 in [8].

instruments auto-oscillants (ou auto-entretenus), c'est-à-dire qu'ils donnent naissance à une vibration acoustiqueà partir d'une source d'énergie continue (injectée par l'instrumentiste). La production de l'onde acoustique estalors directement liée à la nature non linéaire de l'excitateur. Les instruments de type �ûte se distinguentcependant des autres instruments à vent par la nature de cet excitateur : là où il fait intervenir la vibration d'uncorps solide (anche ou lèvres) pour les cuivres ou les instruments à anche tels que la clarinette, le saxophone oule hautbois, il est constitué ici de l'interaction d'un jet d'air avec un biseau (voir �gure 1.2).

De façon plus précise, le mécanisme de production du son dans une �ûte peut être décrit de la façon suivante(chap. 10 in [8]) :

� La surpression Pbouche dans la bouche du musicien provoque un écoulement dans le canal.� A la sortie du canal, cet écoulement donne naissance à un jet naturellement instable, dont la vitesse est

liée à la pression d'alimentation par la loi de Bernoulli : Uj =√

2×Pboucheρ , où ρ est la masse volumique de

l'air.� Le jet, par l'instabilité des couches de cisaillement (i.e. des interfaces entre le jet, animé d'une vitesse Uj , etle �uide extérieur de vitesse nulle), se met à osciller légèrement de part et d'autre de ce biseau, provoquantune injection de débit alternativement à l'intérieur et à l'extérieur du résonateur. C'est ce qui constitue lasource aéroacoustique de pression, au caractère majoritairement dipolaire.

� Les ondes acoustiques ainsi générées se propagent dans le résonateur, et viennent perturber en retour lejet au niveau de la sortie du canal.

� La perturbation est ampli�ée et convectée le long du jet avec une vitesse liée à la vitesse du jet lui-même,entretenant ainsi l'oscillation du jet de part et d'autre du biseau (voir schéma 1.3).

La principale spéci�cité de cette famille d'instruments réside dans la présence d'un retard au niveau del'excitateur : étant donné que le champ acoustique perturbe le jet au niveau de la sortie du canal, il faut tenircompte du temps que cette pertubation met à atteindre le biseau. Le retard correspond alors à ce temps deconvection de la perturbation sur le jet, entre la sortie du canal et le biseau (voir schéma 1.3). Di�érents travaux,théoriques et expérimentaux, ont permis d'établir que la vitesse de convection cp des perturbations sur le jet estcomprise entre 0.3 et 0.5 fois la vitesse du jet lui-même [29], [27], [28].

1.1.1 Boucle d'auto-oscillation et registres de l'instrument

Dans une approche automaticienne, on peut décrire le fonctionnement général d'une �ûte par un systèmebouclé, représenté sur la �gure 1.4.

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Figure 1.4 � Système bouclé modélisant le mécanisme d'auto-oscillation dans une �ûte. D'après Fabre, chap.10 in [8].

Selon la théorie des oscillateurs (critère de Barkhausen), l'émergence d'un régime stable d'auto-oscillationsdans une telle boucle n'est possible que si le module et la phase du gain en boucle ouverte du système étudiésont respectivement égaux à 1 et à un multiple de 2π. Dans le système considéré ici, les termes contribuant audéphasage sont :

� le retard dû à la convection des perturbations sur le jet� un déphasage de π

2 dû à la présence d'une dérivée dans le terme source (on pourra se reporter au chapitre10 de [8] pour plus de détails)

� la phase liée à la réponse acoustique du résonateur (dépendante de la fréquence de jeu)

Lorsque, pour un doigté donné (c'est-à-dire pour une longueur de résonateur donnée) l'instrumentiste sou�e deplus en plus fort, la vitesse du jet � et donc la vitesse de convection des perturbations sur le jet � augmente. Parconséquent, le retard lié à ce temps de convection diminue, et on observe alors une augmentation de la fréquence,nécessaire pour maintenir un déphasage total égal à 2nπ, avec n entier (ces glissements de fréquences en fonctionde la pression d'alimentation Pbouche sont par exemple parfaitement visibles sur la �gure 1 de l'introduction).Lorsque la vitesse de jet devient trop importante, il devient impossible de maintenir ce déphasage égal à 2nπ etl'instrument bascule sur un autre mode acoustique du résonateur (on parle de changement de registre), dont lafréquence est plus compatible avec la condition de phase. Il y a un changement brutal de la fréquence de jeu, eton peut alors parler de bifurcation (c'est ce phénomène que l'on voit sur la �gure 2 en introduction à t = t1). Lemusicien peut ainsi sélectionner le registre sur lequel il joue en sou�ant plus ou moins fort.

1.2 Description du résonateur

Comme nous l'avons vu au paragraphe précédent, le mécanisme excitateur dans les �ûtes est modélisé parune source dipolaire de pression. La réponse en débit du résonateur à une excitation en pression est représentéepar l'admittance d'entrée, grandeur inverse de l'impédance d'entrée, et dé�nie comme le rapport dans le domainefréquentiel du débit et de la pression acoustiques à l'entrée du résonateur :

Yin(ω) =U(ω, x = 0)

P (ω, x = 0)(1.1)

L'impédance et l'admittance d'entrée dépendent non seulement de la géomètrie du résonateur, mais égale-ment des conditions aux extrémités rayonnantes. Nous ne détaillons pas ici les modèles permettant de calculerl'admittance d'entrée d'un guide d'onde cylindrique avec trous latéraux (pour lesquels on pourra se reporter auchapitre 7 de [8]), mais nous donnons quelques éléments sur les corrections relatives aux extrémités passives etactives de ce guide, qui seront utiles dans la suite du rapport.

1.2.1 Corrections liées au rayonnement à l'extrémité passive

A�n de modéliser correctement le résonateur, il faut considérer l'impédance de rayonnement à l'extrémitépassive de l'instrument (voir �gure 1.2). Cela revient à prendre en compte d'une part la masse d'air qui estsituée hors de l'instrument mais qui est mise en mouvement lors de la propagation d'une onde acoustique dans lerésonateur, et d'autre part l'énergie dissipée par ce rayonnement (et qui nous permet d'entendre le son produitpar l'instrument). En approximation basses fréquences, l'impédance de rayonnement peut alors être représentéepar une correction de longueur (partie imaginaire) et par un terme de dissipation d'énergie (partie réelle). Onreprend ici l'expression donnée dans [8] pour l'impédance de rayonnement Zr :

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Figure 1.5 � Représentation équivalente 1D de l'extrémité active d'un instrument à embouchure de �ûte. Tiréde [34], d'après [8].

Zr = Zc ·[jk∆l +

1

2(kR)2

](1.2)

où Zc = ρcS est l'impédance caractéristique du tuyau, ρ la masse volumique de l'air, c la célérité du son dans l'air,

S la section du résonateur, R son rayon, ω la pulsation d'oscillation et k = ωc le nombre d'onde. Une expression

de la correction de longueur ∆l est proposée dans [34], et est reprise dans l'annexe A.

1.2.2 Corrections liées à l'extrémité active

Toujours sous des hypothèses basses fréquences, le résonateur peut être représenté par une description à unedimension. Dans ce cadre, la présence de la fenêtre d'excitation (c'est-à-dire l'ouverture située entre la sortie ducanal et le biseau - voir �gure 1.2) peut être modélisée par l'ajout d'un tuyau de section inférieure à celle durésonateur à l'extrémité de celui-ci (voir �gure 1.5). Ce second tuyau représente alors les corrections de longueurliées :

� à la constriction (la surface de la fenêtre d'excitation étant inférieure à la section du résonateur).� au rayonnement (de la même façon qu'à l'extrémité passive)� à l'épaisseur de la paroi du résonateur, qui constitue alors une "cheminée"

L'expression de chacune de ces corrections de longueur, ainsi que celle de l'impédance "totale" Zm de la fenêtred'excitation ne sont pas détaillées ici, elles sont développées dans [34] et sont reprises dans l'annexe A.

Au niveau de la source dipolaire de pression, située à l'intérieur du système constitué par les deux tuyaux(voir �gure 1.5), il y a alors une discontinuité de pression et une continuité du débit. Cette continuité du débitcorrespond à un dispositif de deux tuyaux en série, et donc à deux impédances en série (soit deux admittancesen parallèle).

L'admittance d'entrée Yin de l'instrument, regroupant toutes ces contributions, s'écrit alors :

1

Yin=

1

Yp+

1

Ym(1.3)

avec Yp l'admittance du résonateur à proprement parler, prenant en compte la correction de longueur liée aurayonnement à l'extrémité passive et Ym l'admittance correspondante à la fenêtre d'excitation. On retiendraalors que la réponse en vitesse acoustique du résonateur (équivalente, à la section S du résonateur près, à uneréponse en débit) à la source de pression ∆P est alors donnée par :

Vac(x = 0) = Yin ×∆P (1.4)

1.3 Modélisation "minimale" d'un instrument de type �ûte

Dans le but de réduire la complexité du système à analyser, nous adoptons pour la suite de l'étude unemodélisation "minimale" d'un instrument de type �ûte, basée sur la boucle d'auto-oscillation représentée par le

11

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schéma 1.4. Ce modèle comprend alors trois éléments, associés chacun à une équation, et est représenté par lesystème suivant [9] :

η = vac(t− τ) (a)∆p = α · tanh(η) (b)Vac = Yin ·∆P (c)

: système à retard (convection de la perturbation sur le jet): terme d'interaction du jet avec le biseau (partie non linéaire): résonateur, modélisé par son admittance d'entrée (partie linéaire)

(1.5)

où η est le déplacement transversal du jet au niveau du biseau, τ le retard dû à la convection de la perturbationsur le jet, ∆p la source de pression au niveau du biseau (créée par le dipôle représentant l'oscillation du jet),vac la vitesse acoustique dans le résonateur, α un coe�cient d'ampli�cation, et Yin l'admittance d'entrée durésonateur.

On peut noter que les équations (a) et (b) du système (1.5) sont écrites dans le domaine temporel alors quel'équation (c) est écrite dans le domaine fréquentiel.

1.3.1 Discussion sur la modélisation du terme source (interaction jet-biseau)

Les modélisations les plus récentes des sources aéroacoustiques [8] retiennent le mécanisme d'excitation sui-vant :

� l'oscillation du jet de part et d'autre du biseau engendre une injection de débit alternativement à l'intérieuret à l'extérieur du résonateur.

� on peut alors considérer deux sources de débit Qin et Qout, en opposition de phase, et situées de part etd'autre du biseau.

� en reprenant la modélisation 1D développée au paragraphe précédent, cette représentation implique unballotement de la masse d'air située entre les deux sources de débit.

� le produit de cette masse par son accélération représente la force qu'elle exerce sur le résonateur.

L'expression de la source dipolaire de pression (source de force) fait alors intervenir un terme de dérivée (dû àla prise en compte de l'accélération de la masse d'air en mouvement).

L'écriture de ce modèle sous forme de système dynamique (c'est-à-dire sous la forme x = f(x, µ) où x re-présente l'ensemble des variables du modèle et µ l'ensemble des paramètres) fait apparaître le retard dû à laconvection de la perturbation sur le jet à l'intérieur du terme dérivé. Cette propriété caractérise les systèmesneutres, qui constituent une classe de systèmes dynamiques beaucoup plus complexes d'un point de vue théoriqueque les systèmes à retard (voir par exemple [12]).

L'étude des systèmes dynamiques à retard présentant déjà des di�cultés spéci�ques, nous avons retenu, a�nd'éviter d'avoir un système neutre, un modèle simpli�é de source aéroacoustique donné par l'équation (b) dusystème (1.5), et déjà proposé dans [9].

Dans le modèle non simpli�é, la présence d'un terme de dérivée temporelle correspond à un facteur jω dansl'expression fréquentielle du gain en boucle ouverte, et nous avons pu véri�er lors d'études préliminaires l'impor-tance d'une dépendance en fréquence de ce gain en boucle ouverte. A�n de la conserver dans le modèle simpli�é,nous adoptons une valeur de α croissante "par paliers" en fonction de ω.

Si ce modèle peut paraître relativement éloigné de la réalité physique, son utilisation est justi�ée dans lecadre de l'analyse des régimes d'oscillations de l'instrument (voir chapitres 3 et 4), où il est particulièrementutile de disposer d'une formulation la plus simple possible modélisant une grande partie du fonctionnement del'instrument. S'il peut paraître simple, ce modèle est déjà relativement complexe du point de vue de l'analysedu fait de la présence d'un retard au niveau de l'excitateur. De plus, sa pertinence sera véri�ée a posteriori, encomparant les comportements prédits à ceux observés sur l'instrument.

1.3.2 Modélisation du résonateur

Dans le cadre d'une étude sur l'in�uence de l'inharmonicité du résonateur (voir chapitre 4), il paraît importantde pouvoir contrôler facilement les fréquences de résonance des di�érents pics de l'admittance d'entrée, et celaindépendamment les unes des autres. Une représentation du résonateur par décomposition modale, dans l'espritde ce qui a été e�ectué pour un modèle de clarinette par F. Silva [23], semble particulièrement appropriée. Un

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autre avantage de cette représentation est qu'elle permet de modi�er facilement le nombre de modes pris encompte. L'admittance d'entrée, Yin, s'écrit alors comme la somme de n modes :

Yin =∑n

jω · anω2n − ω2 + jω · ωnQn

(1.6)

où ωn est la pulsation de résonance du nieme mode, an son amplitude modale, et Qn son facteur de qualité.Cette décomposition modale constitue là encore une approximation, dans la mesure où elle décrit les pôles,

mais pas les zéros de l'admittance (i.e. elle représente bien les résonances, mais pas les anti-résonances). Deplus, il faudrait en théorie prendre en compte une in�nité de modes pour décrire un résonateur, là où nousn'en utilisons qu'un nombre �ni. Cependant, les zones de fonctionnement de l'instrument n'étant pas situées àproximité des anti-résonances, il apparaît que le comportement de l'instrument peut être décrit convenablementpar une telle représentation [24].

Une autre spéci�cité des instruments à embouchure de �ûte est l'existence d'un mode uniforme, c'est-à-dired'un mode du résonateur à fréquence nulle (on pourra se reporter à [8] pour la démonstration). L'existence dece mode uniforme est liée à l'ouverture du résonateur à ses deux extrémités (là où les instruments à anche ontune extrémité ouverte et une extrémité fermée). Si ce mode n'a sans doute pas de réelle signi�cation physique,ses contributions à fréquences non nulles ne sont pas négligeables, et il est important de le prendre en comptedans un modèle complet de résonateur [8].

Outre les di�cultés numériques liées à l'intégration de ce mode à fréquence nulle, le prendre en comptene paraît cependant pas indispensable dans un modèle aussi simpli�é que celui que nous utilisons. En e�et,nous ne prenons en compte qu'un nombre très limité de modes (au maximum deux dans le cadre de ce stage),rendant dans tous les cas le modèle de résonateur très éloigné de la réalité. D'autre part, dans le cas où l'onchercherait à se rapprocher, sur une bande de fréquence donnée, d'une représentation réaliste de l'admittancede l'instrument (par exemple en ajustant les coe�cients modaux de façon à avoir une fonction de transfert laplus proche possible d'une admittance mesurée sur la bande de fréquence considérée), les coe�cients des modesreprésentés prendraient alors en compte �au moins en partie� la contribution du mode uniforme sur la bande defréquence considérée.

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Chapitre 2

Travaux préliminaires : développement

d'outils adaptés

Avertissement : Le chapitre 2 est essentiellement technique, et regroupe un certain nombre d'informations sur les dif-

férents outils utilisés, ainsi que des travaux préliminaires qui nous ont permis de valider leur utilisation dans le contexte

de ce stage. Ce choix de rédaction permet de se focaliser dans les chapitres 3 et 4 sur les problématiques de physique

des instruments de musique étudiées.

Comme nous l'avons souligné dans l'introduction, nous nous intéressons dans ce rapport aux deux aspects quesont d'une part l'existence, dans la �ûte à bec, de régimes d'auto-oscillations à très basse pression d'alimentation,rappelant les "sons éoliens" connus sur l'orgue et la �ûte traversière, et d'autre part à l'in�uence de l'inharmo-nicité du résonateur sur les comportements de l'instrument. Dans le cadre de ces études, la confrontation derésultats expérimentaux, de résultats issus de méthodes d'intégration temporelle d'un modèle, et de diagrammesde bifurcation obtenus par l'analyse de ce même modèle apparaît particulièrement enrichissante. Ces di�érentsaspects de l'étude du comportement d'une �ûte à bec nécessitent la mise en place d'outils spéci�ques, que nousdécrivons et validons dans ce chapitre.

2.1 Dispositifs expérimentaux

2.1.1 Bouche arti�cielle asservie

Intérêt

Dans le cadre de mesures sur musicien, il peut être complexe de �xer, et même seulement d'estimer la valeurdes paramètres de contrôle de l'instrument (comme par exemple la pression d'alimentation, l'in�uence de la formedu conduit vocal...). L'utilisation de bouches arti�cielles permet alors de produire des auto-oscillations (c'est-à-dire de "faire jouer" l'instrument) sans avoir recours à un musicien, et ainsi de �xer les paramètres de contrôlede l'instrument pendant toute la durée de la mesure. En permettant d'étudier l'in�uence de la variation d'ununique paramètre (la pression d'alimentation) sur les régimes d'auto-oscillations, l'utilisation de ce dispositifexpérimental (présenté sur la �gure 2.1) amène une connaissance plus complète et plus précise des di�érentscomportements possibles de l'instrument, et cela même en dehors des plages de jeu habituellement utilisées dansun cadre musical.

Fonctionnement de l'asservissement en pression

La bouche arti�cielle asservie développée par D. Ferrand et C. Vergez [14] permet de contrôler de façon trèsprécise la pression d'alimentation de la �ûte (correspondant à la pression dans la bouche du musicien, c'est-à-dire au fait que l'instrumentiste sou�e "fort" ou non), grâce à une stratégie de contrôle en boucle fermée. Cetterégulation fait intervenir trois éléments principaux:

� un capteur mesurant en permanence la quantité que l'on souhaite réguler (ici la pression dans la bouche).� une électrovanne reliée à un réseau d'air comprimé, dont l'ouverture est fonction de son courant d'alimen-tation. Le débit d'air qu'elle laisse passer modi�e directement la valeur de la pression dans la bouche.

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Figure 2.1 � Montage expérimental : bouche arti�cielle et �ûte alto.

Figure 2.2 � Représentation schématique du fonctionnement de la bouche arti�cielle asservie. D'après [14].

� un algorithme de correction comparant la valeur de pression mesurée avec la consigne (la référence enpression, que l'on souhaite atteindre), et qui, via une carte de contrôle en temps réel, adapte la commandeen courant envoyée à l'électovanne, de façon à minimiser l'erreur entre ces deux grandeurs.

L'opération de correction, répétée toutes les 40µs, permet une grande précision (en supposant la convergence duprocessus itératif), que le but recherché soit de �xer la pression d'alimentation à une valeur donnée, ou bien desuivre une consigne lentement variable dans le temps. Le principe général de l'asservissement est résumé sur la�gure 2.2.

Instrumentation d'une �ûte et exploitation des mesures

Lors de travaux antérieurs [21], un bec de �ûte avait été adapté a�n de permettre la mesure simultanée dela pression d'alimentation (dans la bouche) et de la pression acoustique à l'intérieur du résonateur. La pressiondans la bouche est mesurée via un capillaire situé juste à côté de l'entrée du canal de la �ûte, et dont l'autreextrémité est reliée à un capteur de pression (voir �gure 2.3). La pression acoustique est mesurée juste sous lebiseau, avec un micro a�eurant la paroi du résonateur, de façon à perturber le moins possible la géométrie del'instrument. Un tel dispositif a été reproduit pour ce stage sur une �ûte alto Yamaha, a�n de disposer du mêmeinstrument pour les mesures sur bouche arti�cielle et sur banc d'impédance (voir paragraphe 2.1.2).

La confrontation de ces deux grandeurs que sont la pression dans la bouche et la pression acoustique dans lerésonateur permet d'avoir accès à des "diagrammes de bifurcation expérimentaux partiels" (car ne fournissantque les parties stables des branches de solutions), caractérisant l'évolution du comportement de l'instrument (parexemple en terme de fréquence et d'amplitude de l'auto-oscillation) avec la variation d'un seul des paramètresde contrôle (la pression dans la bouche).

Selon les cas, la détection de la fréquence de jeu à partir du signal Pbec de pression acoustique mesurée sousle biseau se fait par transformée de Fourier glissante, ou par calcul de la dérivée de la phase de la transformée

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Figure 2.3 � Bec instrumenté d'une �ûte alto - Un micro placé sous le biseau permet de mesurer la pressionacoustique dans l'instrument et un capillaire placé près de l'entrée du canal permet la mesure de la surpressionstatique dans la bouche (pression d'alimentation).

de Hilbert (qui correspond à la fréquence instantannée du signal). L'approche par transformée de Hilbert al'avantage d'être plus précise, puisqu'il n'y a pas d'e�et de "moyenne" comme c'est le cas sur chaque fenêtred'analyse dans le cas de l'approche par transformée de Fourier glissante. Cependant, l'analyse par transforméede Hilbert peut poser problème dans des cas particuliers comme les changements de registre (avec des sautsbrusques en fréquence et en amplitude) ou les régimes quasi-périodiques.

Comme nous le verrons dans les chapitres 3 et 4, le tracé de l'amplitude et de la fréquence des oscillations enfonction du retard τ de convection de la perturbation sur le jet peut être intéressant. Dans le cas des résultatsexpérimentaux, la valeur de ce retard est calculée à partir de la consigne en pression d'alimentation Pconsigne (lesignal mesuré de pression dans la bouche étant trop bruité) :

� la vitesse de jet est calculée par la relation de Bernoulli : Uj =√

2·Pconsigneρ

� on en déduit la vitesse de convection des perturbations sur le jet : cp = 0.5 · Uj� connaissant la distance W entre la sortie du canal et le biseau, on en déduit le retard de convection :τ = W

cp= W

0.5·UjCes outils d'analyse ont en partie été développés dans Matlab lors d'un précédent stage [21] et ont pu être

adaptés aux spéci�cités de chacune des études présentées aux chapitres 3 et 4.

2.1.2 Mesure des fréquences de résonances

En complément des mesures sur bouche arti�cielle, il est intéressant de pouvoir mesurer l'admittance d'entréede la �ûte étudiée.

Pour une étude sur l'in�uence de l'inharmonicité, connaître le caractère plus ou moins inharmonique desdi�érents doigtés étudiés apparaît essentiel a�n de mettre en rapport ce paramètre avec les comportements del'instrument observés sur la bouche arti�cielle. Par ailleurs, ces admittances d'entrées pourraient être utiliséesdans le cadre de la modélisation, dans un premier temps pour prendre en compte des valeurs réalistes d'inharmo-nicité, et à plus long terme pour inclure directement les admittances mesurées dans le modèle, en en faisant unedécompostion modale. Cela permettrait d'avoir dans le modèle une représentation plus réaliste du résonateur.

Comme nous le verrons au chapite 3, la connaissance des fréquences de résonances de l'instrument apporteégalement un éclairage important dans le cadre de l'étude des sons éoliens.

Technique de mesure

Le banc d'impédance developpé conjointement par le LAUM et le CTTM [22] permet la mesure de l'impé-dance d'entrée de di�érents instruments, en se basant sur le principe suivant : la source utilisée est une pastillepiézo-électrique située à la frontière entre une cavité arrière fermée et une cavité avant, sur laquelle on placel'instrument. Un premier microphone placé dans la cavité avant permet de mesurer la pression à l'entrée del'instrument, et un second microphone mesurant la pression dans la cavité arrière permet de déduire le débitdélivré par la source. Le rapport de ces deux grandeurs dé�nit alors l'impédance d'entrée de l'instrument. Ondétermine ainsi les fréquences auxquelles l'instrument peut accumuler de l'énergie.

Dans le cas d'un instrument à anche (fermé à l'extrémité active, et ouvert à l'extrémité passive), ce type

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de mesure e�ectué en plaçant la source au niveau de l'extrémité active donne directement accès à l'impédanced'entrée. En e�et, la con�guration est alors proche de celle observée en situation de jeu : la source de débit estsituée à l'entrée du résonateur, et l'extrémité active est fermée par le banc d'impédance.

Dans le cas de la �ûte, la situation est plus complexe : si l'on place la source (le banc d'impédance) àl'extrémité active du résonateur, on mesure les fréquences de résonance du résonateur dans le cas où il seraitfermé-ouvert, ce qui n'a pas de sens. Il est alors envisageable de placer la source au niveau de l'un des trousde note du résonateur (dans l'esprit de ce qui est e�ectué pour la �ûte traversière dans [36]), mais d'une partle raccord entre le banc de mesure et l'instrument peut devenir problématique et introduire un biais di�cile àévaluer, et d'autre part ce type de mesure de permet pas de déterminer l'admittance d'entrée [36]. La méthodeadoptée ici consiste alors à couper une �ûte au niveau de la sortie du canal, et à placer le banc d'impédance àce niveau, en laissant la fenêtre d'excitation ouverte. On mesure alors bien la réponse du résonateur ouvert à sesdeux extrémités, comme en situation de jeu.

Comme nous l'avons vu brièvement au chapitre 1, la source aéroacoustique qui excite le résonateur de l'ins-trument est en réalité située au niveau du biseau, et cette source "voit" alors deux admittances en parallèle (voir�gure 1.5). Par conséquent, cette mesure ne donne pas accès à l'admittance d'entrée de la �ûte à proprementparler, mais à une fonction de transfert ayant les mêmes fréquences de résonance.

Corrections de longueur

Lors de la découpe de la �ûte au niveau de la sortie du canal, une petite quantité de matière a dû être enlevée defaçon à avoir une interface lisse, et la longueur du résonateur a par conséquent été réduite, modi�ant légèrementses fréquences de résonance. De plus, les mesures d'impédances sont réalisées à température ambiante, alorsque l'air sou�é par la bouche arti�cielle peut avoir une température di�érente, qu'il s'avère di�cile de mesurerprécisément avec les capteurs disponibles. La célérité des ondes sonores dans l'air étant fonction de la température,les fréquences de résonance peuvent là encore être légèrement décalées. A�n de corriger ces biais, nous avonsmesuré (grâce au capteur de pression dans le bec présenté au paragraphe 2.1.1) la réponse du résonateur à uneimpulsion e�ectuée avec le doigt sur un des trous de notes. De la même façon qu'une corde écartée de sa positiond'équilibre et relâchée oscille sur ses fréquences de résonance, le spectre du signal obtenu laisse apparaître despics correspondant aux fréquences de résonances de l'instrument. Ce spectre étant bruité (voir �gure 2.4), iln'est généralement pas su�sant pour déterminer plus de deux fréquences de résonance du système. Cependant,l'émergence d'un unique pic permet de recaler les mesures e�ectuées avec le banc d'impédance, et de tenir ainsicompte des di�érents biais que nous venons d'évoquer. La �gure 2.5 donne une comparaison des fréquences derésonance (mesurées au banc d'impédance) avant et après ce type de correction. Plusieurs indicateurs montrentla pertinence de cette correction : en particulier, dans les spectrogrammes, l'enveloppe de la composante bruitée ades pics centrés autour des fréquences de résonance déterminées expérimentalement (voir, par exemple, la �gure3.1).

2.2 Outils numériques

2.2.1 Intégration temporelle du modèle

Si l'utilisation d'une bouche arti�cielle permet de �xer et de modi�er les paramètres de contrôle de l'ins-trument (c'est-à-dire ceux qui sont liés au musicien), ce n'est pas le cas pour les paramètres de facture. Ene�et, la modi�cation d'un seul de ces paramètres impliquant la modi�cation de la géométrie du résonateur, elleentraînerait la modi�cation d'autres caractéristiques. Il devient alors compliqué d'évaluer l'in�uence précise d'ununique paramètre.Prenons l'exemple de l'inharmonicité : s'il est possible de la faire varier expérimentalement (par exemple enne bouchant qu'une partie d'un trou de note), cela implique la modi�cation d'autres paramètres du résonateur(comme par exemple l'amplitude relative des di�érents pics de résonance).

L'intégration temporelle d'un modèle physique de l'instrument est alors particulièrement intéressante, puisquetous les paramètres (de contrôle comme de facture) peuvent être parfaitement et indépendamment contrôlés. Ildevient par exemple possible de faire varier l'inharmonicité du résonateur, sans pour autant modi�er la premièrefréquence de résonance. Une telle approche permet notamment l'exploration du comportement du modèle sur

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Figure 2.4 � Signal temporel mesuré sous le biseau (en haut) et module du spectre correspondant(en bas) de laréponse du résonateur d'une �ûte à bec alto à une "impulsion" sur un doigté de sol 3. Ce type de mesure laisseapparaître une ou plusieurs des fréquences de résonance du système, permettant ainsi de recaler les mesurese�ectuées au banc d'impédance.

Figure 2.5 � Fréquences de résonance d'une �ûte à bec alto sur un doigté de sol dièse 4. Données obtenues aprèsmesure au banc d'impédance (en pointillés), et données corrigées avec le spectre de la réponse du résonateur àun "impact" sur le même doigté (en trait continu).

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des plages de paramètres beaucoup plus larges (et précises) que ne l'autorise l'étude expérimentale.

En pratique, le modèle "minimal" présenté dans le paragraphe 1.3 est implémenté dans Matlab : via Simulinkd'une part, et via le solveur d'équations di�érentielles à retard du premier ordre DDE23 d'autre part. L'utilisationdu second solver s'est limitée à la validation des résultats donnés par les di�érentes approches numériques (voirparagraphe 2.3), et seul Simulink a été utilisé dans le cadre des deux études présentées aux chapitres 3 et 4. Ene�et, là où Simulink permet de faire varier le retard τ (et par conséquent la pression dans la bouche) au coursdu temps, il faut e�ectuer une simulation pour chaque valeur de τ dans DDE23.

2.2.2 Etude théorique du modèle - Analyse de bifurcations

Comme nous l'avons souligné dans l'introduction de ce rapport, la comparaison point à point entre résultatsexpérimentaux et simulations temporelles est souvent problématique, du fait de la di�culté à obtenir des valeursde paramètres réalistes à injecter dans le modèle, et de la sensibilité aux conditions initiales. Une connaissance etune comparaison globales du comportement de l'instrument supposeraient donc d'e�ectuer un très grand nombrede mesures et de simulations.

Par ailleurs, aucune de ces deux approches ne permet d'observer les régimes instables ou la coexistence deplusieurs régimes stables. Une partie de la dynamique du système étudié reste donc "invisible", alors qu'elle peutpermettre de comprendre certains phénomènes (d'hystérésis, par exemple), ou de nuancer certains écarts entremesures et simulations (ce qui est par exemple illustré dans [24]). Il faut en�n ajouter que dans chacune desdeux approches, on ne peut pas exclure l'in�uence de régimes transitoires lorsque l'on modi�e un paramètre aucours du temps.

L'analyse de la �ûte à bec sous l'angle des systèmes dynamiques non linéaires permet d'accéder à unevision plus globale du comportement de l'instrument, notamment par le tracé de diagrammes de bifurcation, quireprésentent (dans l'idéal) l'ensemble des branches de solutions stables et instables du système étudié, en fonctionde la valeur d'un ou de plusieurs de ses paramètres. Dans ce travail, nous nous concentrons plus particulièrementsur les solutions périodiques.

Si des études de cette nature e�ectuées pour un modèle de clarinette ont montré l'intérêt des informationsaccessibles [4] [5], il ne semble pas en exister de semblable pour les instruments de la famille des �ûtes. Ceux-cidi�èrent considérablement des premiers du fait de la présence d'un retard supplémentaire au niveau de l'excitateur(lié au temps de convection de la perturbation sur le jet). Ces systèmes à retard constituent des objets d'étudebien particuliers, pour lesquels les outils numériques existant utilisés pour l'étude de modèles d'instruments àanche (tels que Harmbal [2], Manlab [5] ou AUTO [25]) ne sont pas nécessairement adaptés. Nous nous sommesdonc intéressés dans le cadre de ce stage au logiciel DDE-Biftool [18], constitué d'un ensemble de routines Matlabadaptées à l'analyse de bifurcations pour des systèmes d'équations di�érentielles à retard. Nous nous attachonsdans la suite de cette section à décrire brièvement les méthodes qui y sont mises en oeuvre, à reformuler lemodèle minimal de �ûte dans le formalisme nécessaire à l'utilisation du logiciel, et en�n à valider les résultatsobtenus (diagrammes de bifurcation) par confrontation avec les solveurs décrits en 2.2.1.

Reformulation du modèle

L'utilisation de DDE-Biftool nécessite une écriture spéci�que des systèmes à étudier sous la forme suivante[18] :

x(t) = f [x(t), x(t− τ1), . . . , x(t− τm), λ)] (2.1)

où x est le vecteur des inconnues du système, λ l'ensemble des paramètres du système, f une fonction non linéaire,et les τi sont des retards (positifs). Le modèle à un seul mode de résonance donné par le système d'équations (1.5),exprimé entièrement dans le domaine temporel, fait apparaître un terme de dérivée seconde. En introduisant unenouvelle variable, nous le reformulons donc de façon à l'écrire dans le formalisme nécessaire à sa résolution parDDE-Biftool (on se reportera à l'annexe B pour le calcul détaillé), et nous obtenons alors le système suivant :{

vac(t) = z(t)

z(t) = α · an · z(t− τ) · [1− tanh2(vac(t− τ)]− ω2n · vac(t)−

ωnQn

z(t) (2.2)

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Le paramètre de bifurcation "usuel" pour les instruments à vent étant la pression dans la bouche, c'est ici lavaleur du retard τ que l'on fera varier. En e�et, la modi�cation de cette pression se répercute sur la vitesse dejet Uj (par la relation de Bernoulli), et donc sur la vitesse de convection cp des perturbations sur le jet (commenous l'avons vu au chapitre 1), et par conséquent sur le retard τ = W

cp≈ W

0.5·Uj = W√2ρ·∆p

dû à cette convection.

A�n d'éviter les problèmes numériques liés aux faibles valeurs du retard τ , nous adimensionnons les variablest et τ par la première pulsation de resonance ω1, dans l'esprit de ce qui a été fait dans [24] :{

t = ω1 · tτ = ω1 · τ

(2.3)

et le système (2.2) s'écrit alors :vac(t) = z(t)

z(t) =α · anω1

· z(t− τ) · [1− tanh2(vac(t− τ))]− ω2n

ω21

· vac(t)−ωn

ω1 ·Qnz(t)

(2.4)

Un des principaux avantages de cette représentation est que l'ajout de modes au résonateur se fait facilement.Ainsi, le modèle à deux modes s'écrit sous la forme suivante :

vac1(t) = z1(t)vac2(t) = z2(t)

z1(t) =α · a1

ω1· [z1(t− τ) + z2(t− τ)] · [1− tanh2(vac1(t− τ) + vac2(t− τ))]− vac1(t)− 1

Q1z1(t)

z2(t) =α · a2

ω1· [z1(t− τ) + z2(t− τ)] · [1− tanh2(vac1(t− τ) + vac2(t− τ))]− (

ω2

ω1)2 · vac2(t)− ω2

ω1 ·Q2z2(t)

(2.5)où vacn et [an , ωn , Qn] sont respectivement la vitesse acoustique et les coe�cients modaux associés au mode n.

Détermination de solutions périodiques

Il existe globalement deux catégories de méthodes d'analyse de systèmes dynamiques non linéaires : lesméthodes fréquentielles et les méthodes temporelles. De nombreuses méthodes appartenant à l'une ou l'autre deces catégories sont utilisées dans des domaines très divers de la Physique. Au niveau de l'acoustique musicale,on peut par exemple citer la méthode fréquentielle de l'équilibrage harmonique, utilisée pour les instruments àanche [2], [4], [5] et [3]. Nous décrivons ici plus particulièrement le principe général des méthodes temporelles(utilisées dans DDE-Biftool).

Recherche d'orbites temporelles Les méthodes de recherche de solutions périodiques des systèmes dyna-miques fonctionnant dans le domaine temporel reposent sur la discrétisation en N points d'une unique période durégime permanent [17]. Les inconnues sont alors les valeurs du signal aux instants discrets [t0, t1, t2, . . . , tN−2, tN−1],et la période d'oscillation T (puisque nous sommes dans le cas de systèmes auto-oscillants). Les équations dusystème devant être véri�ées à chaque instant ti, on obtient un système sous-déterminé de N équations algé-briques, pour N + 1 inconnues. Il est "fermé" en tenant compte de la condition de périodicité : x(t0+T)=x(t0)(où x(t) est le vecteur d'inconnues à l'instant t).

Cependant, à partir d'une solution périodique xs(t) de ce système, on peut obtenir une in�nité d'autressolutions xs(t+ θ), simplement translatés d'un temps θ. Le fait d'ajouter une équation a�n de �xer l'origine desphases permet alors de particulariser la solution (on pourra se reporter à [17] pour une formulation mathématiquede cette équation de phase).

DDE-Biftool utilise une méthode de collocation orthogonale : sur chacun des N intervalles [ti; ti+ 1] (N étant�xé par l'utilisateur), la solution est approchée par un polynôme de degré d, également �xé par l'utilisateur (pourplus de détails, on pourra par exemple se reporter à [37] ou à [17]).

Continuation de branches de solutions périodiques

La méthode décrite ci-dessus permet de déterminer les solutions périodiques d'un système dynamique nonlinéaire pour un jeu de paramètres donné. Il peut être intéressant de connaître l'évolution des di�érentes solutions

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lorsqu'un ou plusieurs paramètres varient (pour les instruments de musique à vent, il est notamment intéressantd'observer l'évolution des comportements possibles de l'instrument lorsque la pression d'alimentation évolue).Les méthodes de continuation permettent alors de déterminer l'évolution d'une solution donnée lorsqu'un (ouplusieurs) des paramètres du système est modi�é [17].

Connaissant une solution x0 du système pour un jeu de paramètres λ0, ces méthodes se basent sur unepropriété des systèmes dynamiques selon laquelle, sous réserve de conditions de régularité su�santes du système,il existe un continuum de solutions du même type pour des jeux de paramètres λ1 voisins de λ0. Nous ne détaillonspas ici le principe des méthodes de continuation utilisées, dont une description est fournie en annexe C.

Une première illustration du type de résultats qu'elles permettent d'obtenir est donnée par la �gure 2.6:partant d'une solution du système en τ ≈ 2, la branche de solutions à laquelle appartient la solution initialementconnue (représentée en trait continu) a pu être calculée, donnant ainsi l'évolution de cette solution de départ enfonction du paramètre de bifurcation (qui est ici le retard τ , lié à la pression d'alimentation Pbouche).

Stabilité des solutions

Dans la théorie des bifurcations, la stabilité des solutions stationnaires est déterminée par la partie réelle desvaleurs propres du Jacobien : une solution stationnaire est stable (c'est-à-dire que le système revient vers cettesolution s'il en est légèrement écarté), dans le cas où toutes les valeurs propres ont une partie réelle négative. Aumoment où deux valeurs propres complexes conjuguées traversent l'axe imaginaire, il se produit une bifurcationde Hopf : la solution stationnaire devient instable, et il y a naissance d'une branche de solutions périodiques [38].

Une solution périodique est stable si le module de chacun de ses multiplicateurs de Floquet est contenu dans lecercle unité [38]. Le type de régime d'oscillation issu de la perte de stabilité d'une branche de solutions périodiquesdépend alors du comportement des multiplicateurs de Floquet en ce point (traversée du cercle unité de deuxmultiplicateurs complexes conjuguées, ou d'un multiplicateur réel par +1 ou -1). Si DDE-Biftool ne procède pasà la détection automatique de bifurcation, il est possible de calculer les valeurs propres du Jacobien en toutpoint (discret) des branches de solutions statiques, et de déterminer une approximation des multiplicateurs deFloquet en tout point d'une branche de solutions périodiques. Nous ne détaillons pas ici les méthodes numériquesutilisées, qui sont développées dans [37].

La stabilité des solutions le long d'une branche statique ou périodique peut ainsi être mise en évidence,comme c'est le cas par exemple sur la �gure 2.6, où les parties stables de la branche de solutions périodiques(tracée en trait continu) sont marquées par des croix. Dans ce cas, la branche est stable sur toute la portionreprésentée ici.

2.3 Comparaison des résultats obtenus avec les di�érentes approches numé-

riques � Validation de l'étude par analyse de bifurcations d'un modèle

minimal de �ûte

Remarque : Il convient de souligner avant de présenter les résultats que les grandeurs issues des di�érentes ap-proches numériques, et qui sont représentés dans la �n de ce chapitre, ainsi que dans les chapitres 3 et 4 ne sontpas réellement des "vitesses acoustiques" (bien que nous les quali�ions souvent ainsi dans la suite de ce rapport,par analogie avec les résultats expérimentaux), mais des amplitudes de cycles limites d'un oscillateur numérique.

A�n de valider l'approche par analyse de système dynamique non linéaire, nous avons comparé, pour le mo-dèle à un mode, les résultats issus de cette analyse (avec le logiciel DDE Biftool � formulation par le systèmed'équations 2.4) et les résultats issus de méthodes d'intégration temporelle (système 1.5).

Les �gures 2.6 et 2.7 présentent respectivement l'amplitude du cycle limite de la vitesse acoustique vac et lafréquence d'oscillation en fonction du retard adimensionné τ , pour une branche de solutions périodiques calculéeavec DDE-Biftool, et pour les solveurs Simulink et DDE23 en des points particuliers de la branche (i.e. pour unevaleur donnée du retard τ). Si les valeurs données par Simulink sont légèrement plus proches de la branche de so-lutions que celles obtenues avec DDE23, les résultats issus des trois méthodes sont très proches les uns des autres.

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Page 23: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 2.6 � Modèle minimal d'un instrument de type �ûte (systèmes d'équations (1.5) et (2.4)) : amplitude dela vitesse acoustique Vac en fonction du retard τ . Comparaison des résultats obtenus par l'analyse de bifurcationsavec le logiciel DDE Biftool (en trait continu : extrait d'une branche périodique) et par simulation temporelleavec Simulink (carrés) et le solveur Matlab DDE 23(o).

Figure 2.7 � Modèle minimal d'un instrument de type �ûte (systèmes d'équations (1.5) et (2.4)) : fréquenced'oscillation en fonction du retard τ . Comparaison des résultats obtenus par l'analyse de bifurcations avec lelogiciel DDE Biftool (en trait continu : extrait d'une branche périodique) et par simulation temporelle avecSimulink (carrés) et le solveur Matlab DDE 23(o).

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Page 24: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Nous continuons la comparaison des di�érents résultats en explorant, pour le même jeu de paramètres, uneplus large zone de retard τ , en utilisant un retard variable dans Simulink. Nous ne faisons pas ici la comparaisonavec le solveur DDE23, celui-ci ne pouvant utiliser que des retards �xes. La �gure 2.8 présente les di�érentesbranches de solutions périodiques déterminées avec DDE Biftool, et l'enveloppe du signal de la vitesse acoustiquevac pour un retard balayant la zone de τ correspondante. Les croix signalent les parties stables des branches : parexemple, la branche de solutions statiques (en vert) n'est stable que pour des valeurs du retard adimensionné τcomprises entre 2 et 3.8, domaine dans lequel aucune branche de solutions périodiques n'a été trouvée.

On peut noter que l'information de stabilité donnée par DDE-Biftool est cohérente avec les résultats ob-tenus dans la simulation temporelle avec Simulink. Par exemple, la solution donnée par Simulink lorsque lavaleur de τ varie de 10 à 8 ne quitte la branche cyan pour la branche bleu que lorsque le branche cyan devientinstable. On observe alors un "saut" en amplitude sur la solution donnée par Simulink (tracée en pointillés noirs).

Si les deux approches donnent ici des résultats très proches, il est important de souligner que le calcul desdi�érentes branches avec DDE-Biftool n'est pas automatique, et qu'il requiert une adaptation �ne des paramètresde résolution (tels que les bornes minimales et maximales encadrant la longueur du pas de τ , la précisiondemandée, le nombre d'intervalles de discrétisation d'une période, le degré du polynôme d'interpolation utilisédans la méthode de collocation orthogonale, ou la fréquence d'adaptation du maillage). Ces adaptations doiventêtre faites entre les di�érentes branches, mais également sur des parties de branches plus problématiques (dansles zones où plusieurs branches se croisent, par exemple). Par ailleurs, le processus de calcul des multiplicateursde Floquet (qui fournissent l'information sur la stabilité des solutions périodiques) est particulièrement coûteuxen temps de calcul. Obtenir plusieurs branches de solutions périodiques pour un jeu de paramètres donné peutdonc être long (de l'ordre de plusieurs jours) et demander di�érents essais avant de déterminer les paramètresde calcul qui donneront accès au résultat. D'autre part, la simulation temporelle avec Simulink demande là aussiun temps de calcul important. En e�et, a�n d'observer le régime permanent, il est nécessaire de faire varier leretard τ de façon quasi-statique. La fréquence d'échantillonnage utilisée pour obtenir un résultat acceptable peutpar ailleurs atteindre 1MHz dans certains cas.

2.4 Conclusion

A l'issue de cette confrontation, nous considérons que l'analyse des solutions périodiques du modèle minimalde �ûte par continuation numérique des cycles limites est validée. C'est un premier résultat de ce stage, car ànotre connaissance, c'est la première fois que cette approche est utilisée pour un instrument de la famille des�ûtes (présentant la particularité d'être un système dynamique à retard).

Dans les deux chapitres qui suivent, nous joignons ce type analyse aux expériences et aux simulations tem-porelles, plus classiques, a�n d'étudier deux problématiques de physique des instruments de musique.

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Page 25: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 2.8 � Plusieurs branches statiques et périodiques du modèle minimal d'un instrument de type �ûte(systèmes d'équations 1.5 et 2.4) : amplitude de la vitesse acoustique Vac en fonction du retard τ . Comparaisondu diagramme de bifurcation obtenu avec le logiciel DDE Biftool (en traits continus vert, cyan, bleu et rouge - lescroix représentent les solutions stables) et du résultat d'une simulation temporelle avec Simulink (en pointillésnoirs).

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Page 26: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Chapitre 3

Mise en évidence et analyse de l'origine de

sons éoliens

3.1 Premières dé�nitions

Comme nous l'avons vu dans l'introduction avec la �gure 1, l'utilisation d'une bouche arti�cielle asserviepermet de mettre en évidence des régimes d'auto-oscillations pour des plages de la pression d'alimentationPbouche inférieures à celle utilisée habituellement pour jouer la note recherchée, et à des fréquences di�érentes decelle attendue. Du fait des plages de pression d'alimentation sur lesquelles ils existent, ces sons n'apparaissentpas lors du jeu par un musicien, et leur existence sur la �ûte à bec n'a donc été suspectée que récemment [14].

Par analogie avec d'autres instruments de la même famille tels que l'orgue ou la �ûte traversière, ces sonspeuvent faire penser aux sons éoliens. Là où on les observe à l'extinction de la sou�erie dans certains tuyauxd'orgue (phénomène de "piaulement"), ils sont parfois utilisés comme mode de jeu à la �ûte traversière.

Le fonctionnement "normal" d'une �ûte à bec est basé sur le couplage entre le premier mode hydrodynamiquedu jet (c'est-à-dire que l'on observe entre la sortie du canal et le biseau 1/2 longueur d'onde hydrodynamique),et un mode acoustique du résonateur. Pour les sons éoliens, en revanche, le couplage se fait entre un mode durésonateur et un mode hydrodynamique supérieur du jet, avec 2n+1

2 longueur d'onde sur le jet. Comme cela estmis en évidence dans [10], ce type de sons se distingue des registres de jeu habituels par de faibles valeurs del'inverse du nombre de Strouhal, dé�ni par :

θ =Uj

W · f(3.1)

avec Uj la vitesse de jet, W la distance entre la sortie du canal et le biseau (voir �gure 1.2), et f la fréquence dejeu. En e�et, W étant �xé par le facteur dans la �ûte à bec, à fréquence égale, une faible valeur de θ traduit lefait que la vitesse de jet est plus faible pour les sons éoliens que pour les registres habituels.

Sur la base d'arguments géométriques, on considère habituellement que les sons éoliens ne peuvent pas sedévelopper sur la �ûte à bec. Si on appelle h la hauteur du canal (on pourra se reporter à la �gure D.1 del'annexe D a�n de mieux visualiser à quoi correspondent ces grandeurs), le rapport W

h peut en e�et atteindre desvaleurs de 20 pour certains tuyaux d'orgue, là où il est de l'ordre de 4 pour les �ûtes à bec, ce qui rend di�cilel'apparition de modes hydrodynamiques d'ordres élevés (chapitre 8 in [8]).

En se basant sur des approches expérimentales, des méthodes d'intégration temporelles du modèle minimalde �ûte à bec présenté au chapitre 1 et l'analyse des bifurcations de ce même modèle, nous nous attachons dansce chapitre :

� à montrer l'existence de sons éoliens sur la �ûte à bec� à faire l'étude détaillée de leurs caractéristiques, en particulier leur évolution en amplitude et en fréquencelorsque la vitesse de jet augmente.

3.2 Mise en évidence expérimentale de sons éoliens sur la �ûte à bec

Ces régimes d'oscillation apparaissant pour de très faibles valeurs de la pression d'alimentation ont pu êtremis en évidence sur di�érentes notes, mais ils apparaissent cependant plus facilement pour certains doigtés

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Page 27: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 3.1 � Flûte alto, doigté de sol dièse 4. A gauche : admittance mesurée. A droite : évolution de la fréquencede jeu au cours du temps, lors d'une rampe croissante puis décroissante de pression d'alimentation réalisée à labouche arti�cielle.

particuliers, comme ceux dont le trou de registre est entièrement ouvert1. Nous présentons ici les résultats pources doigtés "favorables" à la naissance de ces régimes.

Si l'on regarde en détail la �gure 3.1, on observe que la note recherchée par le musicien lorsqu'il utilise cedoigté (un sol dièse de la 4eme octave) 1 n'apparaît qu'entre les instants t=15s et t=110s. Avant et après cesinstants, là où la pression d'alimentation est faible, on observe deux régimes d'oscillation di�érents. Nous tentonsde déterminer s'il s'agit de sons éoliens, et d'en étudier les caractéristiques.

3.2.1 Synchronisation sur di�érents modes acoustiques du résonateur

La comparaison, pour ce doigté, des fréquences de résonance mesurées au banc d'impédance avec le spectro-gramme de l'enregistrement e�ectué à la bouche arti�cielle pour une rampe croissante puis décroissante de lapression dans la bouche (voir �gure 3.1) permet de dire que ces di�érents sons (numérotés 1 et 2 sur la �gure 3.2qui est un "zoom" de la �gure 3.1) ne sont pas simplement des glissements de fréquence autour de la fréquence derésonance correspondante au registre "principal", mais correspondent bien à des synchronisations sur di�érentsmodes acoustiques du résonateur. Sur la �gure 3.1, on observe (en rampe croissante) une oscillation sur le secondmode acoustique (son 1 sur la �gure 3.2), puis sur le premier mode acoustique (son 2 sur la �gure 3.2), avant debifurquer de nouveau sur le second pour la note principale (à t=15s).

3.2.2 Discrimination des sons éoliens et des registres de jeu

A�n de déterminer si les deux régimes situés avant le seuil de la note "principale" (et qui sont numérotés surla �gure 3.2) sont bien des sons éoliens, nous tentons d'établir leurs di�érences par rapport au registre principal.

La représentation, sur la �gure 3.3, de l'amplitude d'oscillation (en pression) en fonction de l'inverse θ dunombre de Strouhal nous permet de séparer clairement le son 1 (en rouge pour la rampe de pression croissanteet en bleu pour la rampe décroissante) du registre principal (en cyan pour la rampe croissante et en violet pourla rampe décroissante). En plus de la di�érence de valeur de θ, on peut remarquer que l'évolution en amplitudele long de la branche suit une évolution di�érente de celle du registre principal : là où la seconde continue àcroître avec l'augmentation de Uj, la première semble former une courbe "en cloche". Cette forme particulière

1. on pourra se reporter à la �gure D.2 de l'annexe D pour une tablature des doigtés de la �ûte à bec alto.

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Figure 3.2 � Spectrogramme du signal de pression dans le bec pour une �ûte alto jouée à la bouche arti�cielle(rampe croissante puis décroissante de pression d'alimentation) sur un doigté de sol dièse 4 � Zoom de la �gure3.1. Les numérotations des di�érents régimes d'auto-oscillations correspondent à celles employées dans le texte.

d'évolution de l'amplitude avec la valeur de la vitesse de jet peut être mise en rapport avec les oscillations misesen évidence par Meissner lors de l'excitation d'un résonateur de Helmholtz par un jet d'air (voir �gure 3.17) [35].

Il n'y a en revanche pas de séparation en terme de zone de θ pour le son 2 (en noir pour la rampe croissanteet en vert pour la rampe décroissante). Ce son ayant une fréquence d'oscillation plus faible que le son 1 et que leregistre principal (comme on l'a vu au paragraphe précédent, il est synchronisé sur le premier mode acoustiquedu résonateur, là où les autres le sont sur le second), il a nécessairement, pour une valeur donnée de la vitessede jet Uj , une valeur de θ plus importante.

La représentation �donnée sur la �gure 3.4� de l'amplitude d'oscillation (toujours en pression) en fonctiondu retard adimensionné τ de convection de la perturbation sur le jet montre plus explicitement que le son 2est situé sur une branche di�érente de celle qui constitue le registre de jeu habituel. On peut également y voirplus précisément le phénomène d'hystérésis au niveau des bifurcations (i.e. des changements de regime d'auto-oscillations): les valeurs du retard τ pour lesquelles se produisent les bifurcations entre les di�érents régimes nesont pas les mêmes selon que l'on e�ectue une rampe croissante ou décroissante de la pression d'alimentation.

Le tracé de l'évolution de la fréquence de jeu en fonction de θ sur la �gure 3.5 appuie encore cette analyse :les fréquences de jeu observées sur la branche correspondante au son 2 (en cyan et en noir) n'apparaissent pascomme étant dans la continuité des fréquences d'oscillation sur le registre principal (en marron et en jaune), cequi suggère que ces deux sons ne correspondent pas à une même branche de solutions.

3.3 Analyse des sons éoliens sur un modèle minimal de �ûte à bec

Nous reprenons le modèle à un seul mode de résonance, donné par le système d'équations (2.2), et nousévaluons sa capacité à reproduire le phénomène de sons éoliens, d'une part pour tenter de comprendre l'originede ce phénomène et d'autre part pour comparer les caractéristiques des régimes d'oscillations obtenus avec lesrésultats expérimentaux.

3.3.1 Mise en évidence en simulation temporelle

Les simulations temporelles e�ectuées sur ce modèle avec Simulink font apparaître, comme les résultatsexpérimentaux, des régimes d'oscillations brefs et à faible pression d'alimentation avant l'apparition du registre

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Page 29: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 3.3 � Amplitude de la pression dans le bec Pbec d'une �ûte alto jouée à la bouche arti�cielle en fonctionde θ =

UjW ·fj avec fj la fréquence de jeu. Doigté de sol dièse 4.

Figure 3.4 � Amplitude de la pression dans le bec Pbec d'une �ûte alto jouée à la bouche arti�cielle en fonctiondu retard τ . Doigté de sol dièse 4.

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Figure 3.5 � Fréquence de jeu adimensionnée par la première fréquence de résonance f1 pour une �ûte altojouée à la bouche arti�cielle en fonction de θ =

UjW ·fj avec fj la fréquence de jeu. Doigté de sol dièse 4.

principal, qui reste quant à lui stable et montre une saturation en amplitude (voir �gure 3.6). Ainsi, sur lareprésentation en fonction du retard adimensionné τ = W√

2ρ·Pbouche

ω1, le registre principal n'apparaît que pour

des valeurs de τ inférieures à la valeur τ∗ représentée sur la �gure 3.6, et tous les autres régimes d'oscillations(apparaissant pour τ > τ∗) sont des sons qui semblent être de même nature que ceux observés expérimentalementà très faible pression d'alimentation. L'existence du registre principal sur une plage beaucoup plus large que lessons éoliens est plus visible sur la représentation en fonction de Pbouche, mais les régimes éoliens étant tous entrès faibles valeurs de Pbouche (inférieures à 20 Pa), ils ne sont presque pas visibles. La �gure 3.7, représentantun "zoom" de la �gure 3.6 sur les petites valeurs de Pbouche fait alors apparaître ces trois régimes éoliens, pourdes valeurs inférieures à la valeur P ∗b représentée sur cette �gure. Le régime d'oscillation s'installant pour desvaleurs de Pbouche supérieures à P

∗b est le registre principal.

3.3.2 Caractéristiques de ces régimes d'oscillations

La �gure 2.8, qui montre la superposition de trois branches de solutions périodiques calculées avec DDEBiftool, et l'enveloppe de la vitesse acoustique issue de la simulation temporelle, montre bien que l'on retrouveces régimes particuliers dans le cadre de l'analyse des bifurcations.

Le même type de calculs a été e�ectué pour un autre jeu de paramètres du modèle minimal, et est représentéen fonction du retard τ et de la pression d'alimentation Pbouche, sur la �gure 3.10. Cette représentation montrede façon plus évidente que ces régimes apparaissent, comme dans les résultats expérimentaux et de simulationstemporelles, pour de faibles valeurs de la pression d'alimentation, et persistent sur une plage beaucoup plus faibleque celle sur laquelle existe le registre principal.

Evolution en amplitude

Par ailleurs, on retrouve bien, comme expérimentalement et dans les travaux de Meissner [35], l'évolution"en cloche" de l'amplitude de ces regimes, là où l'amplitude du registre principal augmente jusqu'à atteindreune valeur de saturation (dépendante du gain en boucle ouverte du modèle, lié dans notre modèle aux valeursdu paramètre d'ampli�cation α et de l'amplitude modale a1).

Le tracé, sur la �gure 3.11, de cette même amplitude en fonction de θ (l'inverse du nombre de Strouhal,dé�ni par l'équation 3.1) montre que l'on retrouve bien une séparation entre sons éoliens et registre principal auniveau de la plage de θ sur laquelle ils existent. On peut signaler que dans ce cas particulier où le résonateur

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Page 31: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 3.6 � Amplitude du signal de vitesse acoustique Vac issud'une simulation temporelle pour un modèle minimal de �ûte àbec (systèmes d'équations 1.5) lors d'une rampe croissante de pres-sion d'alimentation. Représentation en fonction du retard τ =

W√2ρ·Pbouche

· ω1 (en haut) et de la pression d'alimentation Pbouche

(en bas).

Figure 3.7 � Même représentation que pourla �gure 3.6 - Zoom sur la zone de pressiond'alimentation Pbouche sur laquelle existentles sons éoliens.

ne comprend qu'un seul mode acoustique, les sons éoliens et le registre principal sont tous synchronisés sur cetunique resonance, et que l'on ne retrouve donc pas les problématiques soulignées au paragraphe 3.2.2 quant aurecouvrement des zones de θ observées pour les sons éoliens et les registres de jeu habituels.

Evolution en fréquence

Le tracé de l'évolution de la fréquence d'oscillation en fonction de θ le long des di�érentes branches estégalement intéressant. On remarque en e�et que là où les registres de jeu habituels présentent des glissementsde fréquence importants en dessous de la fréquence de résonance, les sons éoliens montrent également un fortglissement de fréquence au dessus, après avoir marqué un "plateau" au niveau de cette fréquence de résonance.Ces résultats, que l'on retrouve également au niveau de la simulation temporelle (voir �gures 3.8 et 3.9), peuventlà encore être rapprochés des résultats obtenus par Meissner [35], et qui sont reproduits sur la �gure 3.16.

Comme on peut le voir sur la �gure 3.5, ce type d'évolution de la fréquence est en revanche plus compliquéà mettre en évidence de façon expérimentale : comme le montrent les évolutions en amplitude des sons éolienssur les �gures 3.4 et 3.3, nous n'avons accès expérimentalement qu'à de petites parties de ces branches, ce quinous empêche donc de visualiser ces grands glissements de fréquence au dessus de la fréquence de résonance.

Détermination du mode hydrodynamique du jet

Comme nous l'avons vu dans le chapitre 1, une des deux conditions d'instabilité de la solution stationnaired'un système bouclé tel que celui représenté sur la �gure 1.4 (sur lequel est basé notre modèle minimal) est quela phase du gain en boucle ouverte soit égal à un multiple de 2π.Pour le modèle étudié ici, représenté par la système d'équations (1.5), le gain en boucle ouverte du systèmelinéarisé et écrit dans le domaine fréquentiel est le suivant :

GBO = αYin(ω)e−jωτ (3.2)

La phase de ce gain en boucle ouverte est alors donné par :

PBO = arg(Yin(ω))− ω · τ (3.3)

Et la condition de perte de stabilité de la solution stationnaire sur le déphasage s'écrit alors :

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Page 32: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 3.8 � Evolution de la fréquence du signal issud'une simulation temporelle pour un modèle minimal de�ûte à bec (système d'équations 1.5) lors d'une rampecroissante de pression d'alimentation, en fonction du re-tard τ .

Figure 3.9 � Evolution de la fréquence du signal issud'une simulation temporelle pour un modèle minimal de�ûte à bec (système d'équations 1.5) lors d'une rampecroissante de pression d'alimentation, en fonction de θ =UjW ·fj .

Figure 3.10 � Diagrammes de bifurcation d'un modèle minimal de �ûte (systèmes d'équations 1.5 et 2.4),représentant le 1er registre et 3 sons éoliens. Représentation en fonction du retard τ (à gauche) et de la pressiond'alimentation Pbouche (à droite).

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Page 33: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 3.11 � Diagramme de bifurcation d'un modèle minimal de �ûte (système d'équations 2.4) : amplitude

de la vitesse acoustique Vac en fonction de θ =UjW ·fj avec fj la fréquence d'oscillation. La �gure de droite est une

représentation agrandie de la zone comprise dans le cadre noir de la �gure de gauche, elle permet de voir plusparticulièrement l'évolution de l'amplitude pour les trois branches de sons éoliens.

Figure 3.12 � Analyse d'un modèle minimal de �ûte. Fréquence le long des branches périodiques de sons éoliensen fonction de l'inverse du nombre de strouhal : θ=

UjW.f .

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Page 34: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 3.13 � Mode hydrodynamique du jet pour les di�érentes branches de solutions périodiques d'un modèleminimal de �ûte à bec, calculé à partir de la formule 3.4. Représentation en fonction du retard τ adimensionnépar la pulsation de résonance ω1.

−ω · τ + arg(Yin(ω)) = 2n · π (3.4)

où ω est la pulsation d'oscillation, Yin l'admittance d'entrée du résonateur et n un entier : n = 0 correspond aufonctionnement standard de l'instrument (avec 1

2 longueur d'onde hydrodynamique sur le jet), n = 1 correspondau premier mode hydrodynamique supérieur (avec 1

2 longueur d'onde hydrodynamique sur le jet).

Dans le cadre de l'analyse des bifurcations, l'admittance du résonateur est une donnée du modèle, et nousen avons donné l'expression au chapitre 1. Connaissant par ailleurs la fréquence d'oscillation et la valeur duretard τ en tout point de chacune des branches de solutions périodiques, nous pouvons déduire la valeur de n,directement liée au mode hydrodynamique du jet.

La �gure 3.13 représente, toujours dans le cas du modèle à un mode de résonance, et avec le même codecouleur que les �gures 3.10 et 3.12, la valeur de n pour chacune des branches. On voit alors très clairement quetoutes les branches de solutions présentant une évolution en amplitude "en cloche" et qui existent pour de faiblesvaleurs de la pression d'alimentation Pbouche sont synchronisées sur des modes hydrodynamiques supérieurs àcelui du registre principal. Si tous ces modes éoliens oscillent sur le même mode acoustique du résonateur, ilsdi�èrent donc les uns des autres par ce mode hydrodynamique.

L'analyse de bifurcations du modèle comprenant un résonateur à deux modes �e�ectuée lors de ce stage�donne des résultats semblables : on observe alors chacune des di�érentes combinaisons entre mode hydrodyna-mique du jet (n) et mode acoustique du résonateur.

3.4 Origine des sons éoliens

Les résultats présentés au paragraphe précédent laissent penser qu'il peut donc exister, même pour un modèletrès simple et à un seul mode de résonance, une in�nité de sons éoliens, qui seraient synchronisés sur di�érentsmodes hydrodynamiques du jet (c'est-à-dire tels que n = 1, n = 2, n = 3 ...).

Cette analyse est confortée par l'observation des valeurs propres du Jacobien le long de la branche de solu-tions stationnaires. Comme le suggère la �gure 3.14, à partir du moment où l'ampli�cation en boucle ouverte

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Page 35: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

est su�sante, il existe une in�nité de valeurs propres traversant l'axe imaginaire. Chacune de ces valeurs proprescorrespond à un point de Hopf et donc à la naissance d'une branche de son éolien; chaque branche correspondantà son tour à une valeur de n, c'est-à-dire à un mode hydrodynamique du jet particulier.

Si l'on aborde le problème du point de vue de la condition de phase, donnée par l'équation (3.4), les di�érentspoints d'instabilité de la solution stationnaire peuvent être déterminés à partir du tracé du gain et de la phaseen boucle ouverte du système schématisé par la �gure 1.4.

La �gure 3.15 représente le module et la phase du gain en boucle ouverte (dé�nis par les équations (3.2) et(3.3)) de ce système pour deux valeurs de la vitesse de jet Uj (et donc deux valeurs du retard τ) (le moduleétant indépendant de la vitesse de jet Uj , il n'y a qu'une seule courbe représentée). Les points d'intersections dela phase de ce gain en boucle ouverte avec des valeurs de phase égales à n · 2π (tracées en pointillé sur la �gure3.15) donnent alors les points pour lesquels la naissance d'une auto-oscillation est possible.

La variation de la valeur du retard τ , liée à la variation de la pression d'alimentation Pbouche, entraîne unerotation plus ou moins importante de la phase du gain en boucle ouverte autour de son origine. On retrouvealors la même analyse que précédemment : même dans un modèle à un seul mode acoustique, le terme de retardva entraîner une in�nité d'instabilités, correspondant à l'intersection de la courbe de phase avec les di�érentsmultiples de 2π.

Pour un résonateur à pmodes acoustiques, on a alors en théorie (et en supposant une ampli�cation su�sante),p in�nités de régimes éoliens, correspondant aux di�érentes synchronisations possibles entre chacun des modesacoustiques p et une in�nité de modes hydrodynamiques n.

3.5 Conclusion

Partant de l'observation d'un comportement particulier de la �ûte à bec (voir �gure 3.2), la confrontation dedonnées expérimentales sur bouche arti�cielle et sur banc d'impédance avec des résultats issus de méthodes d'in-tégration temporelle et d'analyse de bifurcations d'un modèle minimal de l'instrument, a permis de comprendrele comportement observé : il s'agit de sons éoliens. Plus précisément, l'utilisation de ces di�érents outils a permisd'une part de mettre en avant les évolutions particulières de ces régimes en terme d'amplitude et de fréquence,et d'autre part d'analyser leur origine.

La particularité des instruments de la famille des �ûtes, résidant dans la présence d'un terme de retardsupplémentaire dû au temps de convection de la perturbation sur le jet, génère, pour chaque mode acoustiquedu résonateur, une in�nité potentielle de régimes éoliens synchronisés sur di�érents modes hydrodynamiques dujet.

En pratique, ces sons restent di�cilement observables en dehors du laboratoire car plus le rang n du modehydrodynamique est élevé, plus la plage de pression d'alimentation Pbouche sur laquelle ils existent est étroite. Ilfaut cependant mentionner que le modèle utilisé ici, s'il reproduit et permet d'expliquer le phénomène, a tendanceà le surestimer. Nous pouvons trouver à cela deux raisons principales :

� le développement de perturbations sur les couches de cisaillement du jet sur une distance supérieure àune longueur d'onde hydrodynamique provoque des phénomènes d'enroulement qui ne peuvent pas êtrefacilement décrits par un modèle linéaire de jet (chapitre 10 in [8]).

� la structure de l'écoulement au voisinage du biseau est alors di�érente de celle observée en mode de fonction-nement classique, ce qui in�ue sur l'interaction jet-biseau, et par conséquent sur les sources aéroacoustiques.

Le type de modèle "minimal" utilisé lors de cette étude surestime alors les sources lors d'un fonctionnement detype "sons éoliens". Un modèle en allées de tourbillon (chapitre 10 in [8]) serait sans doute plus adapté si uneétude quantitative devait être menée à l'avenir.

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Page 36: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 3.14 � Partie réelle des valeurs propres du jacobien le long de la branche de solutions statiques pourun modèle minimal de �ûte à bec, calculées avec le logiciel DDE Biftool. A gauche : paramètre d'ampli�cationα=50 ; à droite : α=1000.

Figure 3.15 � Module et phase du gain en boucle ouverte (donné par l'équation 3.2 du système modélisantun instrument de type �ûte, linéarisé autour du seuil d'oscillation. Représentation pour deux vitesse de jet :Uj=1m/s (en noir) et Uj=10m/s (en bleu).

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Page 37: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 3.16 � Evolution de la fréquence d'un son obtenupour un résonateur de Helmoltz excité avec un jet d'air.Tiré de [35].

Figure 3.17 � Evolution de l'amplitude d'un d'un sonobtenu pour un résonateur de Helmoltz excité avec unjet d'air. Tiré de [35].

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Page 38: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Chapitre 4

In�uence de l'inharmonicité du résonateur sur

les régimes d'auto-oscillations

Dans le cas idéal d'un résonateur parfaitement harmonique, les fréquences de résonance sont par dé�nitiondes multiples entiers de la fréquence f1 du premier pic de résonance. Expérimentalement, ces pics sont légèrement"décalés" les uns par rapport aux autres : soit la nieme fréquence de résonance est supérieure à n× f1, on parledans ce cas d'inharmonicité positive, soit elle est inférieure à n× f1, et on parle d'inharmonicité négative.

D'un point de vue musical, une forte inharmonicité peut constituer une contrainte importante pour l'instru-mentiste : les partiels d'un son périodique ne concordant pas avec les fréquences de résonance supérieures, lecontenu spectral, et donc le timbre de l'instrument sont appauvris. De plus, le contrôle de la justesse entre lesdi�érents registres peut devenir problématique [19].

Du point de vue du facteur d'instrument, les diverses sources de ce phénomène sont autant de contraintesqui l'obligent à chercher des compromis entre inharmonicité, justesse, et facilité de jeu.

L'inharmonicité apparaît comme l'e�et conjugué de la dispersion induite par les e�ets visco-thermiques (avecla présence de couches limites au niveau des parois du résonateur, décrites par exemple dans [8]), de la perce del'instrument, et des perturbations localisées telles que les trous latéraux.

On ne s'intéresse pas ici aux causes, nombreuses, de l'inharmonicité d'un résonateur, mais à ses conséquencessur le comportement d'une �ûte à bec. En e�et, comme nous l'avons évoqué dans l'introduction, des étudespréliminaires [21] montrent que des régimes particuliers (régimes quasi-périodiques notamment) apparaissentpour des doigtés de fourche, c'est-à-dire des con�gurations dans lesquelles le premier trou ouvert de la �ûteest suivi d'un ou de plusieurs trous fermés (voir �gure D.2 en annexe D). Ces doigtés sont connus pour êtreparticulièrement inharmoniques [19]. D'autres doigtés conduisent en revanche à des transitoires entre registressans passer par des régimes quasi-périodiques.

Peut-on imputer ces di�érences de comportement �aux conséquences musicales importantes� à la seule in-harmonicité?Pour répondre à cette question, nous étudions dans ce chapitre l'in�uence de l'inharmonicité sur les caractéris-tiques des di�érents régimes d'auto-oscillations de l'instrument (leur nature, leur stabilité, mais également leurseuil d'apparition).

Nous utilisons pour cette étude les outils présentés au chapitre 2, en ajoutant un second mode de résonancedans le modèle minimal (alors décrit par le sysème d'équation (2.5)), a�n d'étudier l'impact de la modi�cationdu rapport entre ses deux fréquences de résonance.

4.1 Etude expérimentale : mise en relation des régimes d'oscillations obser-

vés et de l'inharmonicité du résonateur

La �gure 4.1 présente d'une part le spectrogramme du signal de pression mesuré dans le résonateur lors d'unerampe croissante puis décroissante de pression d'alimentation Pbouche e�ectuée sur la bouche arti�cielle asserviepour un doigté de sol 3, et d'autre part les fréquences de résonances de la �ûte à bec pour ce même doigté,mesurées au banc d'impédance.

Les mêmes types de résultats sont présentés sur la �gure 4.2 pour le doigté de fourche d'un si bémol 3.

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Page 39: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 4.1 � A gauche : Evolution de la fréquence de jeu d'une �ûte alto lors d'une rampe croissante puisdécroissante de pression d'alimentation sur un doigté de sol 3 (mesure à la bouche arti�cielle). A droite : Fonctionde transfert ayant les mêmes fréquences de résonance que la �ûte pour un doigté de sol 3 (mesure au bancd'impédance).

Figure 4.2 � A gauche : Evolution de la fréquence de jeu d'une �ûte alto lors d'une rampe croissante puisdécroissante de pression d'alimentation sur le doigté de fourche de si bémol 3 (mesure à la bouche arti�cielle).A droite : Fonction de transfert ayant les mêmes fréquences de résonance que la �ûte pour un doigté de fourchede si bémol 3 (mesure au banc d'impédance).

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Page 40: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 4.3 � Diagramme de Bode de la fonction de transfert injectée dans le modèle minimal.

Pour le doigté de sol (�gure 4.1), on observe, après l'installation du premier registre, une bifurcation vers lesecond registre à t = t1 (c'est-à-dire un passage à l'octave supérieure), puis un retour sur le premier registre àt = t2. Les di�érents registres sont ici clairement identi�ables, et on voit en particulier que l'énergie à la premièrefréquence de résonance chute au moment de la bifurcation sur le second registre. Par ailleurs, la mesure desfréquences de résonance nous montre que le résonateur présente pour ce doigté une inharmonicité positive assezpeu marquée : f2 − 2 · f1 ≈ 10Hz.

Pour le doigté de si bémol en revanche, le passage d'un registre à un autre est moins clair. On remarque enparticulier dans la zone D de la �gure 4.2 qu'il y a simultanément de l'énergie sur la première et la troisièmefréquence de résonance (à 448Hz et 1150Hz). Le rapport de ces deux fréquences n'étant pas rationnel (f3f1 = 2.56),cela marque la présence d'un régime quasi-périodique, ce qui est con�rmé par la perception que l'on a de ce son:auditivement, cela se traduit par des "roulements", parfois utilisés comme mode de jeu en musique contemporaine(et qui sont alors appelés "multiphoniques") 1. En parallèle, on remarque qu'en comparaison du premier doigtéétudié, le résonateur présente ici une inharmonicité plus marquée : f2 − 2 · f1 ≈ 30Hz.

Ces premières observations laissent penser qu'il existe bien un lien entre l'inharmonicité du résonateur et descomportements particuliers comme par exemple les régimes quasi-périodiques. Cependant, il est di�cile d'étudierl'impact précis de ce paramètre, puisque tous les autres paramètres ne sont pas identiques entre les di�érentsdoigtés. C'est en revanche l'intérêt de l'utilisation d'un modèle, que nous étudions par la suite.

4.2 In�uence de l'inharmonicité sur les régimes d'auto-oscillation d'un mo-

dèle minimal de �ûte à bec

Pour une première étude, nous utilisons le modèle ne comprenant que deux modes de résonance décrit par lesystème d'équations (2.5) (voir �gure 4.3 pour la fonction de transfert injectée dans le modèle), et nous étudionsl'impact de la modi�cation du rapport de leur fréquence de résonance sur les di�érents régimes d'oscillations.

4.2.1 Stabilité des régimes périodiques et caractéristiques de la bifurcation entre premieret second registre

Cas de deux modes parfaitement harmoniques

La �gure 4.4 présente le diagramme de bifurcation du système étudié dans le cas où la fréquence de résonancef2 du second mode acoustique est égale à exactement 2 fois la fréquence de résonance f1 du premier. Parmi lestrois branches de solutions périodiques calculées avec DDE-Biftool, on retrouve une branche de sons éoliens; maisnous nous intéressons ici aux caractéristiques du premier et du second registre d'oscillation (respectivement enbleu et en rouge).

1. Les sons correspondant aux di�érents spectrogrammes présentés peuvent être écoutés à l'adresse suivante, a�n d'illustrer les

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Page 41: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 4.4 � Diagramme de bifurcation d'un modèle minimal de �ûte (système d'équations 2.4) - Représentationdes deux premiers registres et d'un son éolien pour deux modes parfaitement harmoniques (f2 = 2 · f1).

Les parties stables de ces branches étant marquées par des croix sur la �gure 4.4, on remarque dans unpremier temps qu'il existe bien une perte de stabilité du premier registre lorsque la pression d'alimentationPbouche augmente (et donc que le retard τ diminue). A l'inverse, le second registre, instable au départ, se stabiliselorsque Pbouche augmente.

Dans cette con�guration, le système présente une bifurcation du premier registre vers le second lorsque lapression d'alimentation est croissante. Cela se rappocherait alors du comportement observé expérimentalementpour un doigté de sol grave (relativement peu inharmonique, avec f2− 2 · f1 ≈ 10Hz), que nous avons étudié auparagraphe précédent (voir �gure 4.1).

Cependant, si l'on regarde plus précisément les valeurs du retard τ auxquelles interviennent la perte de sta-bilité du premier registre et l'apparition de la stabilité du second registre, on remarque qu'il existe une petiteplage de valeurs de τ pour lesquelles aucune des branches n'est stable.

L'étude de la valeur des multiplicateurs de Floquet sur la branche correspondant au premier registre peutapporter des informations sur le type de bifurcation qui survient au moment de la perte de stabilité du premierregistre. Ici, la perte de stabilité est caractérisée par la traversée d'un multiplicateur de Floquet du cercle unitépar la valeur +1. D'après [38], il pourrait alors exister, dans la zone où aucune des branches périodiques n'eststable, des régimes d'intermittence, c'est-à-dire une solution périodique entrecoupée de "bou�ées turbulentes".

DDE-Biftool ne permettant ni l'étude de ce type de bifurcation, ni celle des régimes qui en sont issus, nousnous tournons vers la simulation temporelle avec Simulink. Cependant, si l'on retrouve bien le passage du premierregistre sur le second, nous n'avons pas pu observer de régimes particuliers à la transition. Cette di�érence decomportement peut être due à des erreurs numériques trop importantes dans Simulink (malgré l'utilisationd'une fréquence d'échantillonnage élevée), ou encore à une mauvaise estimation de la valeur des multiplicateursde Floquet, DDE Biftool n'en fournissant qu'une approximation.

Il faut ajouter à cela que cette situation n'est pas observable expérimentalement sur la �ûte, dans la mesureoù il y a systématiquement présence d'inharmonicité, même relativement faible (de l'ordre de 10Hz), dans lesdoigtés que nous avons étudié.

di�érents phénomènes : http://st.olympe-network.com

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Page 42: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 4.5 � Diagramme de bifurcation obtenu avec DDE Biftool d'un modèle minimal de �ûte à 2 modes derésonance (système d'équations (2.5)) - Représentation des deux premiers registres et d'un son éolien pour deuxmodes fortement inharmoniques (f2 = 2 · f1 + 20Hz).

Cas de deux modes fortement inharmoniques

Expérimentalement, le doigté de fourche correspondant à une forte inharmonicité (f2 − 2 · f1 ≈ 30Hz) occa-sionne l'apparition d'un régime quasi-périodique (voir �gure 4.2). Tous les autres paramètres restant inchangéspar rapport au cas étudié au paragraphe précédent, nous avons alors étudié le cas d'un résonateur à deux modesavec une inharmonicité positive assez marquée (décalage de 20Hz entre les deux pics); le diagramme de bifurcationcorrespondant est représenté sur la �gure 4.5.

Par rapport au cas parfaitement harmonique, il ne semble pas exister de di�érences signi�catives au niveau del'apparition de chacun des registres, bien que le seuil de stabilisation du second registre soit légèrement diminuéen τ (donc augmenté en Pbouche). En revanche, lorsque la pression d'alimentation augmente, on n'observe pas,contrairement au cas précédent, de perte de stabilité du premier registre. En simulation temporelle on retrouvebien cette caractéristique : il est possible d'accéder au second registre en utilisant des conditions initiales adap-tées, mais on n'y accède en revanche jamais lorsque l'on part d'un point de la branche correspondant au premierregistre et que l'on augmente la pression d'alimentation. Le calcul d'autres diagrammes de bifurcation avec DDEBiftool pour le même modèle, avec des valeurs d'inharmonicité �positive ou négative� encore plus marquées(jusqu'à f2 − 2 · f1 = −50 Hz) montre le même type de comportement, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de perte destabilité du premier registre.

Ce résultat peut à première vue paraître contradictoire avec les observations expérimentales sur un doigtéde si bémol fortement inharmonique (voir �gure 4.2) pour lequel on observe un régime quasi-périodique. Ce-pendant, on remarque sur cette �gure 4.2 que les deux fréquences apparaissant dans le régime quasi-périodiquesont la première (f1) et la troisième (f3) fréquence de résonance du résonateur. Le fait que le modèle étudié icine comporte que deux modes pourrait alors être une cause de la di�érence entre les comportements observésexpérimentalement et ceux issus du modèle. A�n de véri�er cette hypothèse, il faudrait ajouter un troisièmemode de résonance à la modélisation, ce qui n'a pu être e�ectué dans le cadre de ce stage.

Par ailleurs, ce même résultat peut être mis en relation avec le discours d'un facteur de �ûte. Nous avons puau cours de ce stage rencontrer le facteur Philippe Bolton, qui a pu nous faire part de son expérience quand àl'in�uence de l'inharmonicité. Contrairement à ce que l'on pouvait attendre, une forte inharmonicité n'est pasforcément pour lui source de di�cultés. En e�et, il observe dans ce cas un premier registre stable beaucoup plus

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Page 43: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Figure 4.6 � Diagramme de bifurcation obtenu avec DDE Biftool d'un modèle minimal de �ûte à 2 modes derésonance (système d'équations (2.5)) - Représentation des deux premiers registres et d'un son éolien pour deuxmodes faiblement inharmoniques (f2 = 2 · f1 − 3Hz ).

longtemps que dans le cas d'un résonateur faiblement inharmonique. Musicalement, cela permet au musiciende jouer plus fort sur cette note sans risquer de passer sur un autre registre, lui donnant ainsi une plus grandeliberté d'interprétation. Il est alors apparu au cours de cette discussion, qu'une faible inharmonicité était pourlui parfois plus problématique quand à la stabilité du premier registre.

Outre le fait que cette discussion nous a permis de mieux appréhender les résultats présentés ci-dessus, ellenous a également orienté vers une étude plus particulière des conséquences de faibles valeurs d'inharmonicité.

Cas de deux modes faiblement inharmoniques

Toujours en gardant constants les autres paramètres du modèle, nous avons alors tracé sur la �gure 4.6 lediagramme de bifurcations du modèle minimal de �ûte à bec, dans le cas où les deux fréquences de résonancesont très légèrement inharmoniques (ici, f1=440Hz et f2=877Hz, soit f2 − 2 · f1 = -3 Hz).

Si l'on retrouve bien ici, comme dans le cas parfaitement harmonique, une perte de stabilité du premierregistre (en bleu) et une apparition de la stabilité du second (en rouge) lorsque la pression d'alimentation Pboucheaugmente, les valeurs de τ pour lesquelles elles interviennent sont modi�ées. En particulier, la perte de stabilitédu premier registre intervient pour une pression d'alimentation beaucoup plus élevée que dans le cas harmo-nique. On observe alors une zone de "bi-stabilité" ou les deux registres sont stables en même temps. Ce résultatpeut être mis en rapport avec les phénomènes d'hystérésis observés expérimentalement au niveau du change-ment de registre pour certains doigtés (comme cela est mis en évidence, par exemple, dans [10]). En e�et, sil'on e�ectue une rampe de pression croissante, le système va dans un premier temps osciller sur le premier re-gistre, et suivre cette branche jusqu'à ce qu'elle devienne instable. En ce point, le système va alors osciller surle second registre (présence d'une bifurcation). Lorsque qu'en repartant de cette solution, on e�ectue une rampedécroissante de pression d'alimentation, le système va suivre la branche correspondante au second registre surlaquelle il se trouve initialement, et ne va bifurquer vers le premier registre que lorsque le second devient instable.

Ce scénario a pu être mis en évidence en simulation temporelle pour le jeu de paramètres étudié ici. L'ampli-tude de l'oscillation de la vitesse acoustique Vac issue de Simulink est superposée au diagramme de bifurcation

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Figure 4.7 � Comparaison du résultat issu d'une simulation temporelle avec Simulink (rampe croissante deτ en vert et rampe croissante de τ en cyan) avec le diagramme de bifurcation obtenu avec DDE Biftool d'unmodèle minimal de �ûte à 2 modes de résonance (système d'équations (2.5)) � Mise en évidence du phénomèned'hystérésis au niveau de la zone de bi-stabilité.

sur la �gure 4.7. Outre le fait que les amplitudes d'oscillations sont sensiblement les mêmes que celles déterminéespar DDE Biftool, on retrouve bien le phénomène d'hystérésis au niveau du changement de registre. Une premièresimulation pour laquelle une rampe décroissante du retard adimensionné τ (donc une rampe croissante de lapression d'alimentation Pbouche) a été e�ectuée en partant d'une valeur τ = 0.8 et en allant jusqu'à τ = 0.35montre que l'on reste sur la branche correspondant au premier registre (celle-ci étant décrite comme stable parDDE-Biftool dans cette zone de τ). Une seconde simulation a ensuite été e�ectuée (en cyan sur la �gure 4.7) ensens inverse (i.e. en faisant une rampe croissante du retard τ de 0.35 à 0.8, ce qui correspond à une rampe dé-croissante de la pression d'alimentation Pbouche). En choisissant des conditions initiales de façon à commencer surle second registre (branche rouge sur la �gure 4.7), on observe alors que l'on reste sur cette branche tant qu'elleest dé�nie comme stable par DDE Biftool. Au moment où elle devient instable (à τ = 0.7), on observe alors,dans Simulink, une bifurcation vers le premier registre, qui constitue alors la seule branche stable de solutionspériodiques.

4.2.2 Seuils d'oscillation

Au regard des résultats présentés au paragraphe précédent, il aurait été particulièrement intéressant depouvoir connaître de façon plus détaillée les évolutions des seuils de perte de stabilité et d'apparition de stabilitépour les registres 1 et 2 en fonction de l'inharmonicité.

Cependant, la continuation de ce type de point n'étant pas prise en charge par DDE Biftool, il aurait fallue�ectuer un grand nombre de simulations en modi�ant à chaque fois très légèrement l'inharmonicité entre lesdeux modes. Le calcul du diagramme de bifurcation pour un jeu de paramètres étant coûteux en temps, ce typed'étude n'a pas pu être réalisé dans le cadre de ce stage.

Il peut cependant être intéressant de regarder l'évolution des seuils d'oscillations des registres 1 et 2 enfonction de l'inharmonicité, bien que dans la con�guration choisie ici, ils soient tous les deux instables au niveaude la naissance de la branche. Ce type de calcul fait intervenir une méthode de continuation un peu particulière :on ne fait plus la continuation d'une branche de solutions, mais la continuation d'un point particulier. Cettecontinuation de points de Hopf est possible dans DDE Biftool : connaissant un point de Hopf d'une branche

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Figure 4.8 � Seuils d'oscillation des registres 1 (en bleu) et 2 (en rouge) en fonction de l'inharmonicité entre lesdeux modes du modèle étudié, calculés avec DDE-Biftool par continuation de points de Hopf pour un modèleminimal de �ûte à 2 modes de résonance (système d'équations (2.5)). Les valeurs de seuils sont données enfonction du retard adimensionné τ (à gauche) et de la pression d'alimentation Pbouche (à droite).

statique (i.e. connaissant la valeur du retard τ �donc la valeur de la pression d'alimentation Pbouche� pour laquelleapparaît une branche de solutions périodiques, il est possible de suivre ce point en fonction d'un autre paramètredu système. On parle aussi de continuation de bifurcation.

Ainsi, dans notre cas, nous avons pu regarder l'évolution des seuils d'apparition des di�érents registres enfonction du rapport des deux fréquences de résonance. Les résultats sont représentés sur les �gures 4.8, en fonctiondu retard τ adimensionné par la première pulsation de résonance ω1 et en fonction de la pression d'alimentationPbouche.

On remarque dans un premier temps qu'il n'y a pas, en terme d'in�uence sur les seuils, de symétrie entreinharmonicité positive et inharmonicité négative. D'autre part, les décalages observés ne vont pas toujours "dansle même sens" entre les di�érents registres : dans le cas d'une forte inharmonicité négative (ω2

ω1=1.6), le seuil

d'oscillation du premier registre est décalé vers de plus faibles valeurs de la pression d'alimentation, alors que leseuil du second est décalé vers de plus grandes valeurs de cette pression.

Si ces résultats ne permettent pas de déduire comment évoluent les zones de stabilité (et donc de jeu) desdi�érents registres en fonction de l'inharmonicité, ils montrent en revanche que celle-ci peut avoir une fortein�uence sur les seuils, et donc sur la dynamique du système. Ainsi, pour ce modèle simpli�é à deux modesde résonance, une inharmonicité négative tend dans un premier temps à rapprocher les seuils d'oscillation (enpression d'alimentation Pbouche) des registres 1 et 2, ce qui peut laisser penser que l'on aura dans ce cas une plusgrande zone de recouvrement entre les deux branches de solutions correspondantes. En revanche, lorsque cetteinharmonicité négative devient trop importante (ω2

ω1< 1.6), les seuils des deux registres s'éloignent à nouveau.

A l'inverse, une inharmonicité postitive (toujours dans le cas particulier de ce modèle minimal à deux modes)tend à éloigner les seuils d'oscillations des di�érents registres, diminuant ainsi la zone de recouvrement des deuxbranches de solutions correspondantes. L'in�uence de l'inharmonicité sur la stabilité des solutions mise en avantdans les trois cas étudiés précédemment peut laisser penser à une évolution aussi marquée sur ces zones destabilité que sur les valeurs des seuils.

4.3 Conclusion

Au travers de cette étude, nous avons pu mettre en évidence qu'il existe, même dans un modèle très simple de�ûte à bec, une in�uence de l'inharmonicité à la fois sur les seuils et la stabilité des di�érents régimes périodiquesde l'instrument, et sur les bifurcations entre ces di�érents registres.

Certains phénomènes observés expérimentalement (présence d'un hystérésis au niveau du changement deregistre) ont pu être retrouvés au niveau de l'analyse du modèle et de la simulation temporelle.

En revanche, certains comportements observés expérimentalement (tels que les régimes quasi-périodiques)n'ont pas pu être mis en évidence au niveau du modèle, et inversement, certains phénomènes prédits par le

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modèle (tels que les régimes d'intermittence) ne correspondent pas aux observations expérimentales. Cependant,ce modèle étant extrêmement simpli�é, l'ajout, par exemple, d'autres modes de résonance pourrait permettrede se rapprocher du comportement d'un instrument réel, et ainsi de mieux comprendre l'origine de certainsrégimes particuliers, tels que la quasi-périodicité. On peut en�n ajouter que malgré ces di�érences, une certainecohérence existe entre les résultats issus du modèle minimal et le discours du facteur de �ûte quand à l'in�uencede l'inharmonicité sur son travail.

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Conclusion et Perspectives

Conclusion

Si le travail présenté dans ce document a pour objet l'étude des deux problématiques de physique des ins-truments de musique que sont les sons éoliens (chapitre 3) et l'in�uence de l'inharmonicité sur les régimesd'oscillation (chapitre 4), il nous semble intéressant d'en dresser un bilan en insistant sur les apports de laméthodologie retenue.

Nous nous sommes en e�et appuyés sur trois approches complémentaires : approche expérimentale d'abordavec l'utilisation d'une bouche arti�cielle asservie, et approches numériques ensuite, qu'il s'agisse d'intégrationtemporelle ou de continuation numérique (chapitre 2).

Après 5 mois de recherche, on peut conclure que, même si nous sommes loin d'avoir épuisé le sujet, lesrésultats qui ont été obtenus n'auraient pour la plupart pas été accessibles sans cette approche croisée avec desoutils de nature di�érente. De plus la rencontre au cours de ce stage avec le facteur de �ûtes à bec PhilippeBolton a montré que l'utilisation de ces outils assez sophistiqués n'interdisait pas, bien au contraire, d'aborderdes questions en prise directe avec la facture instrumentale. Les passerelles sont nombreuses :

� poser la question d'une augmentation de la dynamique de jeu pour une note donnée, c'est aborder celle dela stabilité des branches périodiques sur des domaines de vitesse de jet plus étendus.

� se préoccuper de la qualité de la transition entre registres, c'est analyser le type de bifurcations quand unrégime périodique perd sa stabilité.

� s'intéresser à la justesse de l'instrument et à la variation de la fréquence de jeu en fonction de la dynamique,c'est se focaliser sur l'évolution de la fréquence de la branche périodique en fonction de la vitesse de jet.

D'autres problématiques, comme la relation entre la géométrie et le timbre des instruments n'ont pas été abordéesdans ce stage mais se prêteraient bien à une étude similaire.

Perspectives

En ce sens, la poursuite et le développement d'une collaboration avec ce facteur d'instrument nous semblesouhaitable. Elle est d'ailleurs prévue dans le cadre d'une possible thèse : elle serait l'occasion d'étudier desinstruments modi�és par le facteur pour tester l'in�uence de di�érents paramètres de facture. L'analyse desrésultats expérimentaux pourrait, comme lors de ce stage, être éclairée par les diagrammes de bifurcation desmodèles correspondants.

Cela suggère deux directions pour faire évoluer la modélisation, a�n d'espérer une comparaison quantitativeentre résultats numériques et expérimentaux :

� inclure un modèle de résonateur plus réaliste, ce qui semble réalisable en considérant plus de modes. Celaest envisageable, au prix d'un temps de calcul accru, et d'une continuation numérique sans doute plusdélicate (d'après l'expérience que nous avons eue en passant déjà de 1 à 2 modes).

� ra�ner le modèle d'excitateur, en tenant compte de la nature majoritairement dipolaire de la source aéro-acoustique. Cela modi�e la nature du système dynamique qui devient un système neutre, pour lequel desoutils numériques spéci�ques devront être considérés (des travaux ont cependant déjà montré qu'il estpossible d'adapter le logiciel DDE-Biftool à cette classe de systèmes [30]).

Une autre direction de recherche intéressante est de prendre en compte l'in�uence du musicien dans lefonctionnement de l'instrument. Des résultats préliminaires [21] ont en e�et montré qu'une bouche arti�cielle neparvenait pas à reproduire certaines caractéristiques du jeu avec musicien. Cela suggère que la forme du conduitvocal du musicien, ou encore la dynamique de variation des paramètres qu'il contrôle peuvent avoir une in�uencedéterminante. L'étude des di�érentes stratégies mises en oeuvre par les musiciens experts pour tirer le meilleur

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parti de leur instrument pourrait ainsi trouver des applications relatives à l'enseignement de la pratique de la�ûte, ou au contrôle de la synthèse sonore temps réel.

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Annexe A

Admittance du résonateur : expression des

corrections de longueur

Nous donnons ici les expressions des di�érentes corrections de longueur à prendre en compte dans la modé-lisation du résonateur d'une �ûte à bec, qui ont été rapidement listées au chapitre 1. On pourra, pour plus dedétails, se reporter à [34].

A.1 Corrections liées au rayonnement à l'extrémité passive

Comme nous l'avons vu dans le chapitre 1, l'impédance de rayonnement à l'extrémité passive d'une �ûtes'écrit :

Zr = Zc ·[jω

c∆l +

1

2(kR)2

](A.1)

avec Zc = ρcS l'impédance caractéristique du tuyau, R son rayon, ω la pulsation d'oscillation, c la célérité des

ondes acoustiques dans l'air et ρ la masse volumique de l'air.La valeur de la correction de longueur ∆l est souvent dé�nie pour deux cas idéaux [8] :

� ∆l∞ = 0.8216R pour un tuyau dont l'extrémité est sur un écran in�ni (le rayonnement ne se fait alors quedans 1

2 espace)� ∆l0 = 0.6133R pour un tuyau d'épaisseur in�niment petite

Pour des cas "réels" intermédiaires, une formule d'interpolation entre ces deux cas idéaux est alors proposée :

∆l = ∆l∞ +R

Rext(∆l0 −∆l∞) + 0.057

R

Rext

(1−

(R

Rext

)5)·R (A.2)

avec Rext le rayon extérieur du tuyau au niveau de l'extrémité rayonnante.

A.2 Corrections liées à la fenêtre d'excitation au niveau de l'extrémité active

Nous appelons fenêtre d'excitation l'ouverture située entre la sortie du canal et le biseau (voir �gure 1.2).Comme nous l'avons vu dans le chapite 1, trois éléments dont à prendre en compte dans la correction de longueurliée à la fenêtre d'excitation. Nous donnons ici l'expression des contributions de chacun de ces éléments.Une première correction de longueur δc est liée à la constriction (i.e. au fait que la surface de la fenête d'excitationest inférieure à la section du résonateur) :

δc =4

πWln

(1

2tan

(πW

4H

)+

1

2cotan

(πW

4H

))(A.3)

où H est la largeur de la fenêtre d'excitation et W sa longueur (distance canal-biseau).Une seconde correction de longueur δe est liée à l'épaisseur de la paroi du résonateur (ce qui correspond aux"oreilles" sur les tuyaux d'orgue � voir par exemple [34]) :

δe =SfS· tan (k.Le)

k(A.4)

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Page 50: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

où Sf est la surface de la fenêtre d'excitation, S la section du résonateur, k = ωc le nombre d'onde, et Le

l'épaisseur de la paroi du résonateur.Le dernier élément intervenant dans la correction de longueur liée à la fenêtre d'excitation est un terme derayonnement δr, dé�ni par :

δr =SfS

tan

[k ·(

0.82√

H2

π

)]k

(A.5)

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Page 51: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Annexe B

Ecriture du modèle minimal de �ûte à bec

dans le formalisme nécéssaire à DDE-Biftool

A�n d'être implémentable dans le logiciel DDE-Biftool, le modèle doit pouvoir s'écrire sous une forme parti-culière, dans la mesure où l'on doit exprimer la dérivée de chacune des variables du problème comme une fonctionde la variable elle-même et/ou de toutes les autres variables, à l'instant courant ou à des instants antérieurs.Si l'on considère par exemple un système à deux variables x1 et x2, on doit pouvoir écrire le modèle sous la formesuivante : {

x1(t) = f(x1(t), x1(t− τ1), . . . , x1(t− τn), x2(t), x2(t− τ1), . . . , x2(t− τn))x2(t) = f(x2(t), x2(t− τ1), . . . , x2(t− τn), x1(t), x1(t− τ1), . . . , x1(t− τn))

(B.1)

où τ1, τ2, . . ., τn sont des retards �xes.Nous devons donc écrire sous cette forme le système d'équations 1.5, a�n de pouvoir l'implémenter dans DDE-Biftool.Dans un premier temps, nous nous plaçons dans le cas très simple d'un résonateur avec un seul mode. Nouspouvons alors écrire l'admittance sous la forme suivante :

Yin =jω · a1

ω21 − ω2 + jω ω1

Q1

(B.2)

où a1, ω1 et Q1 sont respectivement l'amplitude modale, la pulsation de résonance et le facteur de qualité del'unique mode du résonateur, et où ω est la pulsation.

En reportant cette expression dans l'équation (c) du système 1.5, on obtient :

Vac ·[ω2

1 − ω2 + jωω1

Q1

]= jω · a1 ·∆P (B.3)

En écrivant cette équation dans le domaine temporel :

vac(t) + ω21 · vac(t) +

ω1

Q1· vac(t) = a1 · ∆p(t) (B.4)

D'après l'équation (b) du système 1.5 :∆p(t) = α · tanh [η(t)] (B.5)

En dérivant cette expression par rapport au temps t, on a alors :

∆p(t) = α · η(t) ·{

1− tanh2[η(t)]}

(B.6)

Et en injectant cette expression dans l'équation B.4, on obtient :

vac(t) +ω1

Q1· vac(t) + ω2

1 · vac(t) = a1η(t)α ·{

1− tanh2[η(t)]}

(B.7)

Comme décrit dans le chapitre 2, on pose alors les variables adimensionnées suivantes :{t = ω1 · tτ = ω1 · τ

⇔{t = t/ω1

τ = τ /ω1 (B.8)

50

Page 52: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

On pose alors : y(t) = vac(tω1

) = vac(t). En remplaçant les variables dimensionnées par ces nouvelles variablesdans l'équation B.7, on obtient :

d2y(t)

d( tω1

)2+ω1

Q1· d(y(t)

d( tω1

)2+ ω2

1 · y(t) = α · a1d[y(t− τ ]

d( tω1

)·{

1− tanh2[y(t− τ)]}

(B.9)

On admet dans la suite que la notation y correspond à la dérivée de la variable y par rapport à la variable detemps adimensionnée t, et non plus par rapport à la variable t comme auparavant. On a alors (après avoir divisétous les termes par ω2

1) :

y(t) +1

Q1· y(t) + y(t) =

α · a1

ω1· y(t− τ) · [1− tanh2(y(t− τ))] (B.10)

A�n de faire disparaître le terme de dérivée seconde, qui ne peut pas être injecté dans DDE Biftool, on pose unenouvelle variable :

y(t) = z(t) (B.11)

En exprimant l'équation B.10 en fonction de cette nouvelle variable, on obtient :

z(t) =α · anω1

· z(t− τ) · [1− tanh2(y(t− τ))]− ω2n

ω21

· y(t)− ωnω1 ·Qn

z(t) (B.12)

Finalement, le modèle simpli�é de �ûte, donné par le système d'équations 1.5 peut se réécrire de la façon suivante :{y(t) = z(t)

z = −α · z(t− τ) · [1− tanh2(y(t− τ)]− ω2n · y +

ωnQn

z(t) (B.13)

ce qui permet son implémentation dans le logiciel DDE Biftool de recherche de branches de solutions périodiquespour des systèmes d'équations di�érentielles à retard.

Dans le cas d'un résonateur à n modes, l'admittance devient :

Yin =∑n

jω · anω2n − ω2 + jω ωn

Qn

(B.14)

et la même démarche mène alors à un système de 2n équations, de la forme suivante :vaci(t) = zi(t)

zi(t) =α · aiω1·

{1− tanh2

[∑n

vacn(t− τ)

]}·∑n

[zn(t− τ)

]−(ωiω1

)2

· vaci(t)−ωi

ω1 ·Qizi(t)

(B.15)

51

Page 53: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Annexe C

Méthodes de continuation de branches de

solutions

Les méthodes de recherche de solutions périodiques décritent au chapitre 2 permettent de déterminer lessolutions d'un système dynamique non linéaire pour un jeu de paramètres donné. Il peut être intéressant deconnaître l'évolution des di�érentes solutions lorsqu'un ou plusieurs paramètres varient (pour les instrumentsde musique à vent, il est notamment intéressant d'observer l'évolution des comportements possibles de l'instru-ment lorsque la pression d'alimentation évolue). Les méthodes de continuation permettent alors de déterminerl'évolution d'une solution donnée lorsqu'un (ou plusieurs) des paramètres du système est modi�é [17].Considérons un système dynamique décrit par un ensemble d'équations di�érentielles de la forme :

dy(t)

dt= h(y(t), y(t− τ1), y(t− τ2), . . . , y(t− τm), λ) (C.1)

où λ est l'ensemble des paramètres, y une des variables représentant l'état du système, et τi (avec i = 1 . . .m)des retards �nis.Si une solution statique ou périodique y0 existe et est connue pour un jeu de paramètres λ0, on peut montrer,sous réserve de régularité su�sante de h en (y0,λ0), qu'il existe un continuum de solutions du même type pourdes jeux de paramètres λ1 proches de λ0 (pour les démonstrations et plus de détails, on peut se reporter à [16]et [17]).

C'est sur cette propriété des systèmes dynamiques que s'appuient les méthodes de continuation : la solutioninitialement connue sert de "point de départ" pour déterminer les solutions "voisines". De proche en proche, celapermet de déterminer des branches de solutions en fonction de la valeur d'un ou de plusieurs des paramètres dusystème.

Là encore, il existe plusieurs méthodes numériques de continuation de solutions. On peut par exemple citerla Méthode Asymptotique Numérique (MAN) [16] (utilisée de façon combinée à la méthode de l'équilibrageharmonique dans le logiciel Manlab pour la recherche de diagrammes de bifurcation d'un modèle de clarinette[4], [5]), et les Méthodes Prédicteur-Correcteur (MPC).

Méthode Prédicteur-Correcteur (MPC) Cette méthode de continuation permet de déterminer une branchede solutions statiques ou périodiques en la discrétisant : les solutions sont calculées en un nombre �ni de points,et la branche est ensuite déterminée en procédant par interpolation entre ces di�érents points. En partant d'unesolution connue y0, calculée pour un jeu de paramètres λ0, on cherche à déterminer une solution pour le jeu deparamètres λ0+∆λ. Une première approximation est calculée par une méthode de prédiction �en général celledu prédicteur tangent� c'est-à-dire que l'on considère que la valeur de la solution y pour un jeu de paramètresλ0+∆λ est égal à :

yλ0+∆λ = y0 + ∆λ.dy

∣∣∣∣(λ0,y0)

(C.2)

Cette première approximation est ensuite corrigée itérativement par un algorithme de correction (comme parexemple celui de Newton-Raphson).

Cette méthode peut poser problème lorsque la tangente à la courbe représentant y en fonction de λ devientquasi-verticale. En e�et, dans ce cas la valeur de la dérivée dy

dλ devient in�nie. Pour éviter ce type de divergence,

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on peut choisir d'utiliser un paramètre de chemin s (assimilable par exemple à une abscisse curviligne), lié à λ,mais qui s'adapte à la forme de la courbe, et diverge alors plus di�cilement. C'est en général la pseudo-longueurd'arc de Keller qui est choisie comme paramètre de chemin [16].

Par un ensemble de deux processus itératifs (l'un pour le calcul des di�érents points et l'autre pour lacorrection de la solution calculée en chaque point), cette méthode permet donc de tracer une branche de solutionsen ne connaissant initialement qu'un seul point de celle-ci.

Spéci�tés de la Méthode Asymptotique Numérique On peut citer principalement trois di�érences im-portantes entre la MAN et les méthodes prédicteur-correcteur :

� là où les MPC donnent des branches "discrétisées", pour lesquelles les solutions ne sont calculées qu'enun nombre �ni de points, la MAN décrit des portions continues de branches par décomposition en sériesentières

� dans les méthodes MPC, le pas entre deux calculs est déterminé à l'avance, ce qui peut poser problèmedans le cas où un pas relativement grand est utilisé au niveau d'une zone de forte variation de la branche� la prédiction pouvant alors être très éloignée de la solution recherchée. Dans la MAN, la zone de validitéd'un développement en série entière est déterminée a posteriori, ce qui permet d'optimiser la longueur despas et le nombre de pas utiles pour calculer une branche de solutions.

� la MAN s'apparentant à un prédicteur d'ordre élevé [16], elle ne nécessite généralement pas la mise enplace d'algorithmes de correction.

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Page 55: FLÛTE À BEC : ANALYSE DE DEUX PHÉNOMÈNES OBSERVÉS

Annexe D

Figures et Schémas

D.1 Représentation schématique d'un bec de �ûte

Figure D.1 � Représentation schématique d'un bec de �ûte � Représentation des grandeurs utilisées dans leparagraphe 3.1 et dans l'annexe A

D.2 Tablature des doigtés de la �ûte à bec alto

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Figure D.2 � Tablature des doigtés de la �ûte à bec alto - Tiré de [39].

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