fascination de l'objet

2
Fascination de D EUX par deux, petits lutins aux capuches ron- des ou aux bonnets poin- tus, ~t l'oeil vif et au pied impa- tient, ils entament la montde vers le Paradis qu'on leur a promis... L'activitd ludique, psychologues et ~ducateurs sont d'accord sur ce point, n'est plus ~t consid~rer seu- lement comme un temps de loi- sir. Et mime si l'on peut jouer sans jouet, celui-ci est un instru- ment ~de d~veloppement sensori- moteur, affectif et intellectuel de l'enfant -- ceci s'appliquant tout particuli~rement aux jouets ,, d'~veil 55 destines aux jeunes enfants. ~, C'est bien pour que les enfants puissent tirer le maximum de pro- fit de leur visite que j'ai adopt~ des techniques nouvelles pour con- cevoir l'exposition ~ Le Jouet de Bois >5 organis~e par l'Union des Arts D~coratifs au Mus~e des Arts ! Decoratffs >,. En compagnie de Monica Burck- hardt, conservateur du D~parte- ment des Jouets et pr~sidente du 9 ' ~Jouet du groupe per- comlte >> manent d'Etude des March~s Publics, nous avons embo~t~ le pas aux ~ maternelles 55, un des 300 groupes d'enfants de 5 ~t 10 ans qui ont d~j~ visit~ l'exposition. D~s les premieres marches, l'at- tention est s~duite. L'escalier est anim~ par de grandes photos de bambins en tenue Absorba, l'air grave ou ~merveill~, jouant avec les cadeaux de la nature, le sable, la flaque d'eau, la coccinelle. ~ Pour itre fascin~ par l'0bjet, l'en- fant doit Itre plong~ dans un uni- vers ~ sa port~e. Au centre de la galerie de pierre et de ses onze vitrines off les jouets sont regrou- p~s par pays, nous avons mis les gros animaux, cheval, sauterelle, ours, ~l~phant, pour que les enfants puissent les toucher, les 188 I'objet caresser, les chevaucher. Les vitri- '' pl ' nes ont ete acees entre 20 et 40 cm du sol. C'est contraire aux normes des musdes mais il n'est pas normal que pour voir les objets qui lui sont destines, un enfant petit doive itre portd par ses parents Y. De meme,^ nous avons donn6 h voir et non pas h lire: 9 ! les panneaux ont ~t6 suppnmes au profit des objets, avec une 6ti- quette plac6e devant chacun d ' e u x 55. Historienne de formation mais forte de l'exp~rience de 10 exposi- tions, Monica Burckhardt sait que reusslr pour aupres de l'enfant il importe d'abandonner les ddmar- ches d'adulte. Une prdsentation chronologique, allant du vieux au nouveau, est bannie. L'enfant doit d'abord itre mis en prdsence de jouets actuels car son premier rdflexe est de chercher un objet qu'il a chez lui, qu'il a vu dans son entourage ou qu'il a possddd ~l un moment de sa vie. Contrairement fi ce qu'on pour- rait croire, les objets ~t jouer chan- gent assez peu avec le temps9 Mal- gr~ Goldorak et les jeux informa- tis~s, nounours et poup~es gardent la cote mime si leurs habits ont change. On assiste ~t un retour au classique parce que le jouet ,~ affectif >5est irremplaqable pour l'enfant. La transformation d'une peluche en porte-cassette (ours qui parle) n'est pas une garantie de Succes ! Bien conque, une exposition de jouets permet aussi de nouer un dialogue entre g~ndrations : com- ment jouaient ses parents, avec quels objets, fi quel ]ge sont les questions qu'on entend poser lors de visites familiales. Pour les dducateurs, l'arche de Nod, la ferme, le village, les mar- ch~s, les accessoires pour poupdes sont autant d'instruments pour les ,, leqons de chose ,5. Journal de ,, L'exposition actuelle comprend 1 500 pi~ces, puis~es dans notre fonds et compl~t~es par divers prlts. N'oubliez pas, precise Mme Burckhardt, que j'ai cr~ mon ddpartement en 1974 avec 120 jouets et que depuis nous en avons p . reum 8 000. Elle va circuler en fonction de la demande des muni- cipalit~s et des mus~es. Celle sur ,, Les H~ros >> a voyag~ de Romo- rantin fi Fos, en passant par Cahors et plusieurs villes du Midi 55. Les vitrines & th~me Populaires ou raffin~s, miniatures ou g~ants, centenaires ou contem- porains, franqais et ~trangers, les jouets sont exposes dans des vitrines-jeux de cubes imagin~es par l'architecte Bruno Courtade et regroup~s par th~mes. Villages, march~s et soldats occu- pent une salle dont les fleurons sont l'~choppe de la marchande de bottines et les bt%herons dans la for&, remontant fi 1850. Les animaux ' en ^ regnent maitres dans la salle voisine. Trainer une grenouille sur tricycle ou un Bonzo fi roulettes, tenir dans sa main les fauves d'un zoo, se faire ob~ir des lapins, poules, cochons, vaches et chevaux qui peuplent la ferme, autant de faqons s~curi- santes de lier connaissance avec les bites. Les animaux se retrouvent d'ail- leurs partout. Ici, le cheval por- teur ou ~ roulettes sert de tlte de file aux autres moyens de loco- motion, allant du triporteur au Concorde, en passant par le train, le voilier, la berline, l'autobus et le tracteur. Ailleurs, dans la salle consacr~e aux jouets qui s'animent ou n~ces- sitent de l'adresse, les poules pico- rantes -- provenant de 15 pays dif- f~rents -- et l'ours frappant la mime enclume que le bt%heron PEDIATRIE et de PUI2RICULTURE n ~ 3-1988

Upload: lyhuong

Post on 03-Jan-2017

226 views

Category:

Documents


10 download

TRANSCRIPT

Page 1: Fascination de l'objet

Fasc ina t ion de D EUX par deux, petits

lutins aux capuches ron- des ou aux bonnets poin-

tus, ~t l'oeil vif et au pied impa- tient, ils entament la montde vers le Paradis qu 'on leur a promis...

L'activitd ludique, psychologues et ~ducateurs sont d'accord sur ce point, n'est plus ~t consid~rer seu- lement comme un temps de loi- sir. Et m i m e si l 'on peut jouer sans jouet, celui-ci est un instru- ment ~de d~veloppement sensori- moteur, affectif et intellectuel de l'enfant -- ceci s 'appliquant tout pa r t i cu l i~ rement aux jouets ,, d'~veil 55 destines aux jeunes enfants.

~, C'est bien pour que les enfants puissent tirer le maximum de pro- fit de leur visite que j'ai adopt~ des techniques nouvelles pour con- cevoir l 'exposition ~ Le Jouet de Bois >5 organis~e par l 'Union des Arts D~coratifs au Mus~e des Arts

! Decoratffs >,.

En compagnie de Monica Burck- hardt, conservateur du D~parte- ment des Jouets et pr~sidente du

�9 ' ~Jouet du groupe per- comlte >> manent d 'Etude des March~s Publics, nous avons embo~t~ le pas aux ~ maternelles 55, un des 300 groupes d'enfants de 5 ~t 10 ans qui ont d~j~ visit~ l'exposition.

D~s les premieres marches, l'at- tention est s~duite. L'escalier est anim~ par de grandes photos de bambins en tenue Absorba, l'air grave ou ~merveill~, jouant avec les cadeaux de la nature, le sable, la flaque d'eau, la coccinelle.

~ Pour itre fascin~ par l'0bjet, l'en- fant doit Itre plong~ dans un uni- vers ~ sa port~e. Au centre de la galerie de pierre et de ses onze vitrines off les jouets sont regrou- p~s par pays, nous avons mis les gros animaux, cheval, sauterelle, ours, ~l~phant, pour que les enfants puissent les toucher, les 1 8 8

I ' ob je t caresser, les chevaucher. Les vitri-

' ' pl ' nes ont ete acees entre 20 et 40 cm du sol. C'est contraire aux normes des musdes mais il n'est pas normal que pour voir les objets qui lui sont destines, un enfant petit doive i tre portd par ses parents Y. De meme,^ nous avons donn6 h voir et non pas h lire:

�9 !

les panneaux ont ~t6 suppnmes au profit des objets, avec une 6ti- quette plac6e devant chacun d'eux 55.

Historienne de formation mais forte de l'exp~rience de 10 exposi- tions, Monica Burckhardt sait que

r e u s s l r pour aupres de l'enfant il importe d 'abandonner les ddmar- ches d'adulte. Une prdsentation chronologique, allant du vieux au nouveau, est bannie. L'enfant doit d 'abord i tre mis en prdsence de jouets actuels car son premier rdflexe est de chercher un objet qu'il a chez lui, qu'il a vu dans son entourage ou qu'il a possddd ~l un momen t de sa vie.

Contrairement fi ce qu 'on pour- rait croire, les objets ~t jouer chan- gent assez peu avec le temps�9 Mal- gr~ Goldorak et les jeux informa- tis~s, nounours et poup~es gardent la cote m i m e si leurs habits ont change. O n assiste ~t un retour au classique parce que le jouet ,~ affectif >5 est irremplaqable pour l'enfant. La transformation d'une peluche en porte-cassette (ours qui parle) n'est pas une garantie de S u c c e s !

Bien conque, une exposition de jouets permet aussi de nouer un dialogue entre g~ndrations : com- ment jouaient ses parents, avec quels objets, fi quel ]ge sont les questions qu 'on entend poser lors de visites familiales.

Pour les dducateurs, l'arche de Nod, la ferme, le village, les mar- ch~s, les accessoires pour poupdes sont autant d'instruments pour les ,, leqons de chose ,5.

Journal de

,, L'exposition actuelle comprend 1 500 pi~ces, puis~es dans notre fonds et compl~t~es par divers prlts. N'oubliez pas, precise Mme Burckhardt, que j'ai c r ~ mon ddpartement en 1974 avec 120 jouets et que depuis nous en avons

p .

reum 8 000. Elle va circuler en fonction de la demande des muni- cipalit~s et des mus~es. Celle sur ,, Les H~ros >> a voyag~ de Romo- rantin fi Fos, en passant par Cahors et plusieurs villes du Midi 55.

Les v i t r i n e s & t h ~ m e

Populaires ou raffin~s, miniatures ou g~ants, centenaires ou contem- porains, franqais et ~trangers, les jouets sont exposes dans des vitrines-jeux de cubes imagin~es par l'architecte Bruno Courtade et regroup~s par th~mes.

Villages, march~s et soldats occu- pent une salle dont les fleurons sont l '~choppe de la marchande de bottines et les bt%herons dans la for&, remontant fi 1850.

Les animaux ' en ^ regnent maitres dans la salle voisine. Trainer une grenouille sur tricycle ou un Bonzo fi roulettes, tenir dans sa main les fauves d 'un zoo, se faire ob~ir des lapins, poules, cochons, vaches et chevaux qui peuplent la ferme, autant de faqons s~curi- santes de lier connaissance avec les bites.

Les animaux se retrouvent d'ail- leurs partout. Ici, le cheval por- teur ou ~ roulettes sert de t l te de file aux autres moyens de loco- motion, allant du tr iporteur au Concorde, en passant par le train, le voilier, la berline, l 'autobus et le tracteur.

Ailleurs, dans la salle consacr~e aux jouets qui s 'animent ou n~ces- sitent de l'adresse, les poules pico- rantes -- provenant de 15 pays dif- f~rents -- et l 'ours frappant la m i m e enclume que le bt%heron PEDIATRIE et de PUI2RICULTURE n ~ 3-1988

Page 2: Fascination de l'objet

FLASH-INFORMATIONS

- - jacquemarts de diff&entes dpo- ques voisinent avec des toupies d'Inde, du Mexique, du Japon et de chez nous; des matriochkas, russes pour la plupart ; d 'un ,, Juif lisant ~ venu de Pologne ; des per- sonnages de tous genres transfor- m& en quilles.

Dans la galerie de pierre consa- cr& aux artistes et artisans, fi la chasse de CarlosI er en bois ddcoup~, oeuvre de Caran d'Ache (1910) et fi la fameuse arche de Nod de Helld (1911) rdpondent le Cirque Humpty Dumpty de Schoenhut (vers 1920 et les ani- maux bien ronds du Danois Bojer- sen (1937-1950). Sans porter ombrage, pour autant, aux jouets na'ifs et polychromes de Pierre Petit ni aux voitures laqu&s de

! �9

Vilac ou aux creanons d'Arout- cheff inspir&s par Tintin -- rou- tes oeuvres d'artistes frangais con- temporains.

En marge de l'exposition, une salle . . . . . bj a e t e r e s e r v e e a u x poupees, o et

de transfert privil4gi~. Du X V I I I e

si~cle ~t nos jours, elles sont lfi avec leur t&e expressive en porce- laine ou en vinyle, leurs atours en soie ou en cretonne, leurs acces- soires raffin& ou dans le vent, leurs maisons de conte de f&s ou de confort moderne, faisant nai-

l tre le meme^ emervefllement chez les petits et chez les grands.

Un catalogue -- non e x h a u s t i f -

de jeux et jouets fran~ais a &~ publid par le Centre de Documen- tation du Jouet, sous la direction de Monica Burckhardt. Les items sont class& par rubrique et corn- portent une br~ve description, le nom du fabricant, l'~ge de l'en- fant utilisateur et le prix grand public. On peut se le procurer au Mus& des Arts D&oratifs, moyennan t 20F pour frais d'envoi. []

P.O.

D e s c inq Par t i es du M o n d e

D E tous temps et sous tou- tes les latitudes les adultes ont fa~onnd des jouets

pour les enfants. Le bois et la terre, le papier et la pierre, le chif- fon et le fer blanc, la paille et

! / �9 f f �9

l'os ont ere taffies, model&, pems, sculpt&, peints, transform& en objets ludiques.

L'exposition ,, Jouets traditionnels des enfants du monde ,, pr&ent& au Mus& de l 'Homme montre la predominance des poup&s et des ammaux, l'universalit~ des hochets et des jouets ~ roues, ainsi que des sources d'inspiration comme la guerre, la vie quoti- dienne -- objets m~nagers en Tha','- lande, avions en Afghanistan!

Pour a p p r e n d r e

Une salle s'adresse plus sp&iale- ment aux adultes. On y trouve les "' ' " "' dernleres en creations matlere d'&eil, d'exploration sensorielle et de ' " " ' c r e a t l v l t e .

Une belle collection de hochets, des objets fi manipuler en caout- chouc, en bois, en plastique pour les petits. Sans oublier les ,, lucio- les ,,, ces capteurs de lumi~re aux formes rassurantes et famili~res pour les enfants qui ont peur du noir.., ce qui n'est pas l'apanage des bdb&.

Pour les plus grands, des jeux d'adresse, d'esprit et de hasard, des casse-t&e en bois dont deux g&nts. Cette catdgorie d'objets &happe aux atteintes du temps, t~moin le grand coffret ~ jeux datant de 1890.

Des jouets divers ex&ut& d'apr}s des ouvrages ou des plans pour- ront inciter l'en~ant ~i tailler, col- ler et peindre le bois : le jeu abou- tira alors au jouet. Journal de pI~DIATRIE el de PUIFRICULTURE n ~ 3-1988

Bien des fois, le bois fournit la . . . . pi mat~ere premiere : stolet au

Maroc, salle de bains au Japon, berceau sculpt~ en Inde, phoque eskimo et gazelle du d&ert. Le bestiaire est d'une richesse inoui'e : tatou, tapir et iguane de Colom- bie, baleine du Groenland, cha-

meau du Tchad, dl@hant du Viet- nam, colombe qui bas des ailes au Japon, chevaux en terre crue du Cameroun, en papier mflch~ au Vietnam, articul& au Mexique.

L'ours en pierre polie et la ,, pou- p& ,, en bois servaient-ils d~jfi d'objets transitionnels aux enfants qui vivaient ~ Dolni Vestonice (Tch&oslovaquie) il y a 2 500 ans ? Les billes ndolithiques &aient-elles le jeu des petits Mauritaniens d'il y a 5 000 ans ? Les enfants d'Ha- nor tirent-ils autant de plaisir de leurs jouets en plastique actuels que ceux du ddbut du si~cle qui se voyaient offrir pour la F&e des Enfants des joujoux crd& avec des morceaux de touques ~l p&role ? Et les petits Mexicains tra~nent-ils avec autant de joie les camions 1977 que ceux du x v 0 si~cle qui se contentaient d'un &range animal roulant sur des roues pleines ? Nul ne le saura jamais.

P. O s u s k y

189