faire l’expérience de dieu dans notre voie marianiste

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1 Faire l’expérience de dieu Dans notre voie marianiste Père Quentin Hakenewerth S.M. PRÉFACE Ce document contient des conférences données par le père Quentin Hakenewerth, S.M., [peu après avoir été] Supérieur général de la Société de Marie (Marianistes) à trois occasions différentes, deux à San Antonio, Texas, et une à Dayton, Ohio.

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Faire l’expérience de

dieu Dans notre voie

marianiste

Père Quentin Hakenewerth S.M.

PRÉFACECe document contient des conférences données par le père Quentin Hakenewerth, S.M.,[peuaprèsavoirété]SupérieurgénéraldelaSociétédeMarie(Marianistes)àtroisoccasionsdifférentes,deuxàSanAntonio,Texas,etuneàDayton,Ohio.

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LefilconducteurdesconférencesestaxésurlaSpiritualitéMarianiste,etspécialementsurl’expériencedeDieudansnotrevie.

Cedocumentseprésenteentroissections.Lespremierschapitres,de1à12,contiennentles conférences données aux religieux profès de la Société deMarie par le père QuentinHakenewerth,du29 juilletau4août1991,auCentreMarianistede retraitesNotre-DamedelPilar,àSanAntonio,Texas.Ladeuxièmesection,soitleschapitres13à16,contientlesconférencesdonnéesauBergamoCenter,àDayton,Ohio,du13au15mars1992,lorsdelafin de semaine de formation appelé «Formation à la SpiritualitéMarianiste pour laïcs etreligieuxmarianistes».

Latroisièmesectionregroupeleschapitres17à19,soitdesconférencesdonnéesparlepèreHakenewerthlorsdesavisiteàl’UniversitéSainte-MariedeSanAntonio,Texas,du25au27mars 1992, à la demande du Président de l’Université et du ForumMarianiste. Le ForumMarianiste regroupe des religieux Marianistes et des membres du personnel laïc del’UniversitéSainte-Marie.Leurproposestdefavoriserladiffusiondel’héritagemarianisteàl’intérieur de la communauté universitaire. Le père Hakenewerth a traité le thème deMissionetCultureauprèsdelaFacultédel’UniversitéetduCorpsdesemployés,parlantduDevoird’Évangéliser,etdurôledelaFamilleMarianistedansl’Églised’aujourd’hui.IlconclutsavisiteparuneconférenceauForumMarianistesurlaSpiritualitéMarianiste.

La publication de ce document a été rendue possible grâce à la généreuse assistancefinancière du Marianist Trust de l’Université Sainte-Marie, une fondation établie par lesMarianistes de l’Université Ste-Marie pour promouvoir le ministère éducationnel. Ontcollaboré à la transcription et à l’édition des conférences: le pèreQuentinHakenewerth,S.M., Melba Fisher, le père John A. Leies, S.M., seur Marcy Loehrlein, F.M.I, et le pèreRichardLoehrlein,S.M.LasaisiedestextesaétéfaiteparlepèreEugèneSwenney,S.M.

Untrèsgrandintérêtsemanifestechezleslaïcs,désireuxdemieuxconnaîtrelesélémentsde laSpiritualitéMarianisteetdegrandirdans lafoi–àJésusparMarie, laMèredeDieu.C’estnotresouhaitquecesconférencessoutiennentaussibien lesprofèsreligieuxque lesfidèleslaïcsdanslacompréhensionetlepartageducharismeetdesdonsdenotrehéritagemarianistecommun.

PREMIÈRESECTION

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Conférencesd’uneRetraitedonnéeaux

FrèresetPrêtresmarianistes

delaProvincedeSaint-Louis

CentreMarianistederetraites

Notre-DamedelPilarSanAntonio,Texas

29juilletau4août1991

INTRODUCTIONàlaPREMIÈRESECTION

CHAPITRES1à12

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Au cours de cette retraite, je vais partager avec vous quelques réflexions que je voudraissimplesetfondamentalesetjevoudraisqu’ellesvousaidentàexpérimenterd’unemanièreplusprofondelaprésencedeDieudansvotrevie.Autantquepossible,Jevaisfairelaretraiteavecvous,etaussijedemandelamêmegrâcepourmoi-même.Sijevoulaisdonneruntitreauthèmedecettesemaine,jedirais«l’expériencedeDieudansnotrevie».Ce titreestpeut-êtreplusuneprièrequ’unénoncé. Je souhaitevraimentquecette semaine soit un temps privilégié pour que vous et moi nous fassions une nouvelleexpériencedeDieudansnotrevie.La plus grande expérience que puisse faire quelqu’un c’est l’expérience de Dieu. Fairel’expériencedeDieuc’estfairel’expérienced’uneréalitéquinousdépasse,plusgrandequenous-mêmesetplusgrandequetoutcequenouspourrionsconnaître.C’estuneexpériencequinous remplitde joieetd’énergie.Dieunous communiquequelque chosede réel, uneréalitéquidevientpartiedenous-mêmes.Dieuvientànousdeplusieursmanières. Ilpeutvenirparlaconnaissance.Nouscommençonsàconnaîtrequelquechosequenousn’avionspas comprise auparavant, ouquelque chosequenousn’avionspas compriseen fait de lamanièrequenous lacomprenonsmaintenant.C’estunenouvelleconnaissancepournous.OuDieupeutvenirànoussouslaformedel’amour,d’undésirprofondpourquelquechosede bon, d’une affection nouvelle pour quelqu’un. Chacun des dons du Saint Esprit peutdevenirunesortederéalitépournous.Mondésirestquedanscetteretraite,quelquesoitcequejepourraispartageravecvous,ouquel que soit ce que nous pourrions partager les uns avec les autres nous aide à fairel’expériencedeDieuplusconsciemment,plusprofondément,plusfréquemment.

CHAPITRE1

Fairel’expériencedelaprésencedeDieu

On peut se poser la question suivante: Est-il réellement possible de faire l’expérience deDieu ? Jeme souviens d’une retraite que j’ai donnée àGalesville auWisconsin il y a unedizained’années.Unconfrèremarianisteadit:«Jesuisreligieuxdepuis40ansetjenecroispasavoirfaitl’expériencedeDieu.»Ehbien,aprèsunéchangeaveclui,iladécouvertque

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cen’étaitpaslecas.Mais,çaresteunebonnequestion:Est-ilpossibledefairel’expériencedeDieu?

Pournousenassurer,nouspouvonsemprunterlesmotsdeJésuslui-mêmedansl’évangiledeJean14,23. Ilditceci:«Siquelqu’unm’aime, ilgarderamaparole,monPère l’aimera.Alors, nous viendrons à lui et nous ferons chez lui notre demeure. » C’est ce que nouspouvonsexpérimenterdelafaçonlaplusintime.Dieuvientànousethabiteennous.Sicelaestvraietsinouslecroyons,alorsDieuneviendrapashabiterennoussansquecelaneseremarquepas.Dieuneveutpasêtreavecnouspour resterun inconnu.Dieuneveutpasêtreavecnoussansqueçaparaisse.Celan’auraitaucunsens.Etainsi,nouspouvonsdire:Ilestpossibledefairel’expériencedeDieu.

Je ne parle pas de sentimentalisme qui signifierait qu’on peut faire l’expérience de Dieuseulementauniveaudel’émotion.Jeneparlepasd’ungenredepsychologiequiconsisteraitendesexpériencesextraordinairescommedesvisionsoudeslocutionsintérieures.C’estlecasdequelquesprivilégiés.LepèreChaminadeditmêmequecelapeutarriver,maisqu’ilnefautpasnousyattendre.Àquoidevons-nousnousattendre?ÀuneexpérienceordinairedeDieu,uneexpérienceréellequenouspouvonsreconnaîtresinousfaisonslechoixdenousylivrer dans la foi. Il s’agit donc d’une présence de Dieu en nous, une présence que noussaisissonsconsciemmentpourenvivre.

Envivantcetteréalité,nousprenonsconsciencequequelquechoseseproduitennous.Celatouche l’aspectcontemplatifdenotrevie.Parcontemplation, jeneveuxpasdirepenseràDieud’unefaçonquineseraitpastrèsutile.Uncontemplatifestquelqu’unquiauncertainsens de Dieu, qui sait que Dieu est là, et le sait avec une profonde conviction. Lacontemplation est une expérience de la présence deDieu qui n’est pas facile d’exprimer.C’est plutôt ce que nous appellerions un «sens» de Dieu. Nous «sentons» que noussommesenprésencedeDieu.Parexemple,vousest-ildéjàarrivéd’entrerdansunepièceobscure et, après un brefmoment, de sentir que quelqu’un d’autre y est présent ? Vousprenezconscienced’unmouvement,d’unsonoud’uneproximitéquivousconvaincqu’ilyaquelqu’unàrencontrerencelieu.

Quiconque est appelé à suivre le Christ est appelé à une sorte d’expériencemystique deDieu.Mystiqueveutsimplementdireexpérience.UneexpériencedeschosesdeDieu.Uneexpériencemystiqueordinaire signifiequenousavonscesensdeDieu,deconvictionssurDieu ;quenous sentonsdesmouvementsdeDieuennousetquenous les reconnaissonscomme tels dansnotre vieordinaire. C’est cequi rendnotre vieordinaire exceptionnelle,différente,avecquelquechoseenplus.

Jeveux insister sur le faitquenousparlonsd’uneexpériencespirituelleordinaire.ChaqueMarianistequiaunevraievocation,unappelauthentiqueàdevenirmarianiste,aaussiunappel à faire l’expérience de Dieu de façon particulière. Nous le savons à cause d’uneaffirmationdenotreFondateur, lebienheureuxGuillaume-JosephChaminade,au2earticle

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desConstitutionsde1839,ouRègledeViedesmarianistes.IlydécritlanaturedelaSociétédeMarie et la naturedenotre vie:« La Société deMarie veut, autant queDieu l’aidera,joindrelezèleàl’abnégation,letravailàlaprière,et,enréunissantlesavantagesdelavieactiveàceuxdelaviecontemplative,atteindrelesfinsdel’uneetdel’autre.»Quelleestlafinoulebutdelaviecontemplative?Nousnesommespasappelésàêtredescontemplatifs,etcependant, sinoussommevraisavec notrevocation,nousatteindrons lebutde laviecontemplative.Quelestcebut?C’estderegarderDieu,desentirDieu,deconnaîtreDieudans notre vie, et d’expérimenter la présence de Dieu de telle façon qu’elle transformenotrevie.Lechangementpeutsefaireendouceur, lentementpeut-être,maisl’expériencedeDieu faitunedifférenceennous.SiDieune faitpasdedifférence,c’estquenousn’enavons pas réellement fait l’expérience. Le but que nous avons à atteindre dans la viecontemplative,c’estd’arriveràl’expériencetransformantedeDieu.QuandDieuestaccueilliencemondeetqu’ilréalisesonrègne,saprésencetransformelemonde.Ainsi,l’expériencedeDieuesttrèsimportantepournotrevie,sinousvoulonsvivrepleinement.C’estceàquoinoussommesappelés:àuneviepleineetabondante.

LepèreChaminadeparlaitsouventdecesdeuxaspectsdenotreviereligieuse: l’actifetlecontemplatif.Celaatoujoursété l’undespointsdifficilesdenotrevocation:pouvoirvivrelesdeuxpleinement.Nousnousdemandons:devrions-nousêtreactifsoucontemplatifs?Laréponse est: Nous avons à vivre de façon à atteindre les fins des deux aspects. Cela atoujoursétéenquelquesorteunproblèmedansnosdiscussionsthéoriques,maiscelapeuts’avéreruneprécieusegrâcedanslapratique.

Quelle est la conséquence de vivre de cette façon, de faire l’expérience de Dieu d’unemanièresimplemaisréelle?Celapeutproduiredeseffetsimportantsennous.Parexemple,ilyauneperceptionplusgrande,uneplusgrandeconnaissancedeDieu.Pasnécessairementune connaissance théologique ou une perception intellectuelle, mais nous en venons àconnaître Dieu.Nous connaissonsdeplus enplus de choses surDieu àmesurequenousvivonscetteexpérience.Enconséquence,nouscommençonsàcomprendredeschosessurnous-mêmes, comme l’importanced’être làoùnous sommes.Et alors,nous commençonségalement à comprendredes choses sur les autres, comme leur importancepourDieu etpourlemonde.

Unedeuxièmeconséquenceestdecommenceràpercevoirl’agirdeDieudansdesdomainesoù nous ne l’avions pas perçu auparavant. L’article 4 de notre Règle de Vie dit que noussommesappelésàêtre«deshommesdefoi».Sinousvivonsdelafoi,nouscommençonsconsciemmentàvoirl’actiondeDieudansnosviesetnotreentourage.Nouscommençonsàsentir sa présence et à percevoir les choses d’une façon nouvelle. Et alors, nous faisonsl’expérience d’un autre changement lorsque nous commençons à avoir un goût croissantpour les réalités spirituelles. Nous sommes touchés par elles. La vie spirituelle n’est plusennuyeuse pour ceux qui la goûtent. Savourer ces réalités nous apporte la joie. Vous nepouvezgoûterDieusansexpérimenterlaJoie,mêmedanslessituationslesplusdifficiles.

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Peu avant notreChapitreGénéral de 1991, j’ai vécuune expérienceque je veuxpartageravec vous. Je n’en ai pas parlé à beaucoup de personnes parce que c’est difficile àcomprendre autrement que comme une expérience de Dieu. Avant de partir pour leChapitre,j’étaisallérendrevisiteàmamèreauMissouri.UneniècedenosconfrèresPeteretFrancisDamesvitàSt-Paul,Missouri.ElleavaituneparentenomméeLindaPoepsel,37ans,mèredetroisfilles,quiétaitatteinteducancerdesos.Onditquelecancerdesosestextrêmementsouffrantetqueletraitementestpirequelamaladie.CettenièceaentenduparlerdupèreChaminadeparlesfrèresPeteretFrancis.Elleestalléerencontrersoncuréetlui a demandé si la paroisse pouvait demander unmiracle parce que, sansmiracle,Lindaallaitmourir. Le curé était d’accord. Je lui ai procuré 700 images de Chaminade avec laprière demandant une guérison par son intercession. Ces images ont été prises par 700personnes qui ont accepté de prier. Le curé a rappelé cette intention à chacune de seshomélies desmesses de fin de semaine, demandant à toute la paroisse de s’unir à cetteprière.Lesgenss’attendaientréellementàunegrandegrâce.Jecroisquesidespersonnesprientdecettefaçon-là,ellesvontfaireenquelquesortel’expériencedeDieu.

JesuispartipeuaprèspourleChapitre.Troisjoursplustard,quipouvaitcorrespondreau9ejourd’intercessionaupèreChaminade,laniècem’aappelépourmedire:«Jevousappellepourvousparlerde lagrâcequeLindaa reçue.» J’aipensé:«Merveilleux!Elledoitallerbeaucoupmieux».Ellemeditceci:«Mercredidernier,Lindaasouffertterriblementtoutelajournéeetelleaététrèsmaladelanuit.Aucoursdelanuit,Dieuluiaenquelquesortelaissé ce message: « Je regrette que tu aies à souffrir tellement, mais je veux que mesprêtres deviennent des saints. Tu souffres pour cela ». Cette expérience a changé sa vie.Alorsqu’il y aplusdemillepersonnesquiprientpour saguérison, Lindan’estpas si sûrequ’ondoiveprierpoursaguérisonpersonnelle.Cependant,elleestpleinedejoie.C’estcequejeveuxdirequandjeparledegoûterDieu.Sajoiesembleêtreunecontradiction.Unepersonnequisouffreàcepointnedevraitpasêtreheureuse.Mais,ellegoûtelatouchedeDieu. C’est une grâce ! C’est une expérience de Dieu qui est spéciale, parce qu’elle estparadoxale,maisvraimentréelle.Cegenredechosearrivesouventquandnousprionsaveccœur.Personnen’apriépourqueLindaobtiennecetteformedegrâce.Maiselleestpleinede reconnaissance pour cette grâce et elle pense que le père Chaminade est un grandintercesseur.

Un autre effet de la présence de Dieu dans notre vie est la charité.La charité granditimperceptiblementennous.Celaaussiestunequestiondefoi.Lacroissancedanslafoin’estpasquelquechosequeDieunous révèleouqu’ilnous impose.C’estplutôtquelquechoseque Dieu nous fait expérimenter parce que nous y croyons déjà. Dans sa 1ère lettre auxThessaloniciens(2,13)saintPaulécrit:«Voilàpourquoi,demoncôté,nousnecessonsderendre grâce à Dieu de ce qu’une fois reçue la parole de Dieu que nous vous faisonsentendre,vousl’avezaccueillienoncommeuneparolehumaine,maiscommecequ’elleestréellement,laparoledeDieu.Etcetteparoleresteactiveenvousquicroyez.»Ils’agitd’une

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force de vie.Quelque chose changeparce que c’est la nature de l’énergie de changer leschoses.Elletransforme.C’estcelal’expériencedeDieu.

Quedevons-nousfairepourexpérimenterDieudansnosvies?Troischoses.D’abord,nousdevonsledésirer.Undésiravecunefaimvéritable.Lafaimestlasensationdel’absencedequelque chose.Nous avons à désirerDieu avec faim, avecdes tiraillements qui nous fontsentir qu’il nous manque quelque chose d’important. Deuxièmement, nous devons prierpourcela.Quandnousvoulonsvraimentquelquechosedequelqu’un,nousn’enfaisonspasune mention passagère ou une vague allusion. Nous demandons à la personne avecattentionetsérieux.C’estdecettefaçonquenousdevonsdemanderàDieudenouslaisserfairel’expériencedesagrâceennous.

Il y a aussi un côtédisciplinairedans l’expériencedeDieu. C’est la troisième condition. Sinousvoulonsvraimentfairel’expériencedeDieu,nousdevonséliminerlesinterférencesquipeuvent faire obstacle. Dans notre spiritualité marianiste, cette discipline s’appelle lesilence.Ilyacinqsilences,carlesilenceestplusquel’absencedeparoles.Ladisciplinedusilence implique aussi notre esprit, notre imagination, notre langage corporel, nossentimentsetnosémotions:toutcequipeutnousempêcherdefairel’expériencedeDieu.

Nous savons par expérience que lorsque nous écoutons juste une personne, c’est faciled’entendre ce qu’elle dit. Cependant, quand nous sommes dans une foule, il est parfoisdifficile d’entendre ce que chacun dit. Parfois, nous ne pouvons pas distinguer qui est entraindeparleretcequiestdit,alorsqueseulàseul,çava.Voussavez,c’estlamêmechoseavec Dieu. Si nous écoutons seulement Dieu, si nous pouvons être seuls avec lui, nouspouvonsl’entendre.Nouspouvonsenfairel’expérience.SiDieudoitsefrayeruncheminàtraverslafoule,souventnousnepouvonspasdistinguersavoix.C’estpourquoinousavonsbesoindu silence. Si nousn’avonspas le souci d’écouterDieu, çane fait pas vraimentdedifférencequenouspratiquionslesilenceoupas.CommenotreRègledeVieleditàl’article4,16: « Le silence écarte les obstacles au recueillement ». Le silence élimine toutes lesinterférencesdenotrechemin. IlyauneautrepenséedenosanciennesConstitutionsquiest belle et puissante: « Dieu parle au cœur de ceux qui se taisent pour l’écouter.»Ordinairement,nouspensonsquesinousécoutons,alorsnousentendronsDieunousparler,alorsqueDieuparletoutletemps.CelaveutdirequeDieuvanousparlersinoussommescois et à l’écoute. Dieu nous dira quelque chose qui autrement n’aurait même pas étéexprimé.Notrefaim,notredemandeetnotresilencepoussentDieuànousparler.

Il y a deux caractéristiques que nous devons garder à l’esprit quand nous parlonsd’expériencescontemplativesoumystiquesdeDieu.SinousvoulonsfaireuneexpériencedeDieu comme une chose plutôt normale et fréquente dans nos vies, nous devons réaliserqu’une telle expérience s’éveille graduellement et plutôt lentement. Normalement, ellen’arrive pas comme un choc soudain. Si elle se présente graduellement à la conscience,comme la lumière de l’aube qui remplit lentement une pièce, ordinairement elle va

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s’installer. Souvent, Dieu nous prépare à sa façon. À un certain moment, nous pouvonsréaliserqu’unegrâcedeconversions’installe,maisDieuétaitautravaildepuislongtemps.

Ilyaplusieursannées,unfrère,surlepointdepartirfairesaretraitem’adit:«Priezpourmoi,parcequejesaisquejedoischangerquelquechose.»Ehbien,aucoursdesaretraite,ilafaitl’expérienced’unegrâceprofonde.Àsonretour,ilavaithâtedem’enparler.Iladit:«Vous savez, j’ai réellement expérimenté la grâce pendant cette retraite. Je ne puis merappelerdepuiscombiendetempscegenredechosem’estarrivé.Jedoisadmettrequejenepriaispas tellementaudébutde la retraite.Mais,quelques joursplus tard, j’étaisbientranquille dans ma chambre. (remarquez qu’il était en silence; il n’y avait aucuneinterférenceenaction).J’étaissimplementassis.Jemesouviensquec’étaitmardià16h.Jene priais même pas. Alors, tout d’un coup, j’ai réalisé que je devrais commencer à prierdavantage.Aumoins,jedevraisalleràl’oraisoncommunautaire.Etj’airéaliséquejebuvaistropdebière,quejeregardaistroplatélévisionetquejedevaiscouperunebonnepartiedetoutça.»Lavéritablegrâceestqu’ilapenséàfairetoutcelaavecunsourire.Ilnes’estpassentidéprimédepenserqu’ildevraitlaissertomberceschoses.Celal’excitait.Etill’afait.Ilpourrait semblerque tout ça s’estproduit soudainement. Jene lepensepas. Je croisquecette grâce s’en venait depuis quelque temps et qu’elle a culminé à un certain momentpendantlaretraitedecefrère.Ill’aidentifiéeclairement:mardià16h.Savieacommencéàchanger à partir de ce moment, mais il a fallu un certain temps pour que tous ceschangementsseproduisent.N’est-cepassouventlecaspournous?NousdevonsrencontrerDieuàuncertainmomentetdire:« Jene l’avaispasremarquéavant».Donnons-nous lachance de le faire. Sa grâce peut arriver n’importe quel jour et à n’importe quel endroitquandnoussommesouvertsàsaprésence.

Ladeuxièmechoseàserappelerestquecesexpériencessonttoujoursquelquepeuvoilées,ténébreuses,nébuleuses. La raison,c’estqu’unDieu infininousaimeet se rendprésentànotrevie.Notrevieestsilimitée!NotrenaturemêmelimitenotreexpériencedeDieu.Nousn’avonsévidemment pasprésentement lavisionquenousauronsun jour.L’Écriturenousditque,dansnotreétatprésent,personnenepeutvoirDieuetcontinueràvivre.Nousnepouvonspasrevenird’unevisionbéatifique.Iln’yapasmoyenderevenirenarrièreunefoisque nous avons cette pleine vision de Dieu qui nous transforme complètement. C’estpourquoinotrevisionterrestreseratoujours,enquelquesorte,obscure.Unefois,unfrèrem’adit:«Jecroisque j’aieuuneexpériencedeDieu,mais jen’ensuispascertain».Celal’inquiétait.Sinousvoulonsenêtreabsolumentcertains,nousavonsàattendrelonguementavantdesavoirquellevientdeDieu.Lafoiraccourcitceprocessus.Danslafoi,nousdisons:«Jen’aipasbesoindepreuves.Jepeuxcroire.Jecrois,Seigneur,ouijecrois!»

DanssalettreauxRomains,(5,2),saintPaulditquelagrandegrâcequenousavons,cellequinous convainc qu’un jour nous allons partager pleinement la gloire du Christ, nous estdonnée par la foi et par Jésus Christ. C’est la base de ce que nous aimerions faire. Nousallons en discuter quelques aspects concrets dans la perspective de faire plus pleinement

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l’expériencedeDieu.Jecroisquesinousdésironsréellementcettegrâceetquenousnousaidonslesunslesautres,nousseronsbénis,etnousferonsl’expériencedeDieud’unefaçonnouvelle.

CHAPITRE2

Fairel’expériencedel’appeldeDieu

J’aimeraisréfléchiravecvoussurunedecesgrâcesquenousavonstousreçuesd’unemanièreoud’uneautre. C’est la grâcequi nousdonne ce sentimentd’uneprésencedurabledeDieudansnotrevie.J’espèrequecesréflexionsnousaideronttousàfaireunefoisdeplus,etpeut-êtred’unenouvellefaçon,l’expériencedecettegrâcespéciale,quiestlagrâcedenotreappel,celledenotrevocation. Jecroisqu’onpeutconsidérercommeunfaitacquis,peu importecequ’aéténotrecheminement,qu’aucundenousn’esticiparpurhasard.Noussommesiciparcequenousavonsétéappelés..

Dans la Sainte Écriture on trouve quantité de récits émouvants de l’action de Dieu quand ilintervientdanslaviedepersonnes;illesappelleenquelquesorteàparticiperàsonœuvrederédemption.Presquetouslesgrandspersonnagesdel’Écritureontétéappelés,transformésetréorientésparcegenred’appeldeDieu.

Peut-êtrequec’estauchapitre11delaLettreauxHébreuxquel’ontrouveundesplusbeauxrésumés de personnes croyantes qui ont cru en leur appel.La Bible de Jérusalem a le dond’exprimercettefoi.Envoiciunexemple:«Parlafoi,Abrahamobéitàl’appeldepartirversunpays…nesachantoù ilallait.Par la foi, il vint séjournerdans laTerrepromisecommeenunpays étranger.» Nous savons que parce qu’il avait cru être appelé, un changement radicals’opéra dans la vie d’Abraham. Nous avons un autre exemple chez Noé. Il avait été«divinementavertidecequin’étaitpasencorevisible.»Noén’avaitaucunexempleantérieursurlequelsebaser.Ilnepouvaitquecroireàsonappel,etcedutêtrepourluiuneexpérienceprofondedeDieuquedeconformersavieàcetappel. L’auteurde laLettreauxHébreuxditque «Moïse, comme s’il voyait l’Invisible, tint ferme.» La fidélité à l’appel fut pour chacund’eux une expérience formidable. Ce chapitre 11 de la Lettre aux Hébreux regorge de telsexemples;peut-êtreaimeriez-vousprierenleurcompagniedetempsentemps.

LerécitdesaintLucnousrapportantl’annoncefaiteàMariemontrelechangementdramatiquequ’ellevécutdanslafidélitéàsavocation.Cen’estpasuniquementl’appelquichangeasavie;c’estsa fidélitéàconformersavieàcetappelqui luivalutuneexpérienceprofondedeDieupendantsavie.

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Pournous,Marianistes, il est importantde faire l’expériencedenotre appel, denous laisserimprégnerparlaréalitédenotrevocation.LepèreChaminadeaunephraseintéressantedansleManueldeDirectionpourlaformationdescandidatsàlaSociétédeMarie.AuvolumeIl(DirII p 26, 2.1) il dit ceci: «il serait quelquefois dangereux d’expliquer les belles voies de laperfection chrétienne et religieuse à ceux qui gémiraient encore sous la tyrannie de leurspassions,ouquin’auraientpasencoregoûtéledoninappréciabledeleurvocation.»S’ilsn’ontpasquelqueexpériencequeDieulesappelle,ilsnecomprendrontjamaisgrandchosedeleurviecommereligieux.Celaneleurdirajamaisriendefort.Conformernotrevieàl’appeldeDieuconstituelefondementmêmeetlesensprofonddenotreétatdevie.

Ilyadeuxansj’assistaisàuneconférencedonnéeparsoeurBriegeMcKenna;elles’adressaitàungrandgroupedeprêtresàRome.Ellenousracontaitcettehistoired’unprêtrevenulavoir.Ilétaitsurlepointd’abandonnersavocation.«Plusilmeparlait,plusj’avaisàl’espritcetteidée:TuasvraimentbesoindesentirlepardondeDieu.»Elleluidemandadonc:«Àquandremontevotre dernière confession ?». Il répondit «Il y a vingt-cinq ans.» Alors la sœur lui dit: «Ehbien,allezvousconfesser.Vous reviendrezalorsetnousparleronsdevotrevocation.»Deuxjoursplustard ilrevint. Ilparlaitdesavocation,maisnonpascommedequelquechosequ’ilétait sur le point d’abandonner. Il en parlait comme quelque chose de vrai qu’il avaitexpérimentédèslecommencement,aussilongtempsqu’ilpouvaitsesouvenir.

Ilnousfautfairel’expériencedecefaitqueDieunousappelleeffectivement.Rappelons-noussimplementnotreproprevocation.Ilestimportantdelefaire:unretoursurnotrepasséetsesfaitssaillants,outoutsimplementexpérimenterunefoisdeplusd’êtreappeléparDieu,seloncequeditl’Écriture,«GoûtezetvoyezcommeestbonleSeigneur»(Ps34,8).

Encequimeconcerne, j’étaisauPostulat(lapremièreétapedelaformationinitialepour lesreligieux).C’étaitàMaryhurstdansleMissourioùLeFrèreThéodoreHoeffkenétaitDirecteur.Comme bien des postulants, quelque temps avant l’entrée au Noviciat, je voulais être sûr.Après tout, être religieux allait devenir l’affaire de toute ma vie. J’allai donc voir le frèreHoeffken pour lui demander: «Comment puis-je être sûr que c’est ma vocation ?» Ilcommençaparmedemanderpourquoi,d’abord,j’étaisvenuici.Jeluidis:«Jen’avaisaucuneraisondedirenonquandonm’ademandépourquoijeneseraispasfrère.»Puisilpoursuivitavecunelonguelistedequestions.À lafin lefrèreHoeffkenmedit,«Écoute,tuesaussisûrqu’onpuisse l’être.»Et jeme retirai…pas toutà fait sûrencore. Jen’avais rien ressenti ausujetdemavocation;cen’étaitqu’uneidéedansmatête.

Plustard,auNoviciat(ladeuxièmeétapedelaformationinitialepourlesreligieux)nousavonsfaitundiscernementsurnotrevocation,uneétudeapprofondie.Pourlaplupartd’entrenous,l’étuderévélaàpeuprèscequenousavionsenvue.C’étaitunpeucommeécrireunromanenaccordant la fin avec ce qu’on avait planifié. Nous étions sincères, bien sûr, mais si, à unmomentouàunautreaucoursdel’étudenousn’étionspassouslamouvancedeDieu,cetteétudenenousauraitpasconvaincus.Laquestionseraitrevenueplustard.

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Quelque chose s’était produit en effet au cours de mes années de Postulat ; c’était uneexpériencedegrâce,bienquesur lecoup jenem’enrendispascompte.C’étaitpendantmadeuxièmeannéedePostulat ; jedécidaide retournerà lamaison. Jen’enparlaiàpersonne,parce que si je l’avais dit à quelqu’un ilm’aurait fallu répondre à une foule de questions. Ilaurait fallu expliquer pourquoi je voulais quitter, pourquoi je ne pensais plus que Dieum’appelait,etàbiend’autresquestionsencore.Jenevoulaispasaffrontertoutcela.Jedécidaidoncqu’à lafinde l’annéejeretourneraischezmoietquetoutsimplement jenereviendraispas. Voilà. Mais, au Postulat, nous avions des retraites mensuelles. Au cours d’une de cesretraites, au printemps, il pleuvait et nous ne pouvions pas sortir pour jouer. Le SaintSacrementétaitexposépendantl’après-midi.Puisquejen’avaisriend’autreàfaire,j’allaiàlachapelleetypassaiplusd’uneheure,là,devantleSaintSacrement.Jenesaispascequis’estproduit,maisausortirdelachapellejemesentaisbienàmaplaceàMaryhurst,enrouteverslavieMarianiste.Cen’étaitpluslamêmechose.Jemesentaisappelé,etdepuislorsilnemerevintjamaisplusàl’espritdequitter.

Cette expérience n’était pas le résultat d’une étude, et il n’y eut personne pourme dire derester.Cetteexpériencene s’étaitpas révéléeplus importantequeça,nonplus,aumomentmême,maiscequim’étaitarrivéàcemoment-làm’estsouventrevenuàl’espritparlasuite,commeunegrâceimportantedansmavie.Maintenant,jem’ensouviensetjelarevissouvent,avecuneprofondegratitude,parceque c’étaitundongratuitdeDieu, sans l’avoirmériténiespéré;simplementunemerveilleusegrâcedelamiséricordedeDieu.C’étaituneexpériencedeDieudanssabontéinfiniem’exprimantpouruneraisonquelconquesavolontédemevoirici.EtDieu,danssonimmensebonté,pouruneraisonquelconque,vousdésire,chacund’entrevous ici, comme Marianistes. Accepter l’appel de Dieu suppose toujours un acte de foi.Toujours.Dieunes’imposejamaisdetellefaçonàcequenousnepuissionspasmettredecôtéouignorersonappel.L’appeldeDieun’estpasnonplusuneévidencequenousnepouvonspaséviter.Accepterlefaitquenoussommesappelésreprésentetoujoursunactedefoi.

QuandnousremontonsauFondateur,nousconstatonsqu’unefoiforteensonappelestl’unedescaractéristiquesdesavie.IlavaitlafermeconvictionquequiconqueentredanslaSociété–honnêtementetsansfrauder–ilestappelé.Ilinsistesurcepointdansuneretraiteauxfrèresen 1821, la quatrième année d’existence de la Société de Marie. Au cours de ces retraitesdonnéespendantlesétésdespremièresannéesdenotrefondation,lepèreChaminadeprenaittoujours des points fondamentaux pour la formation desmembres. En 1821, il disait «Noussommes fermement persuadés que c’est Dieu lui-même qui a suscité l’établissement del’InstitutdeMarie…C’estdanscestempsdedésolationetlorsquelesgénérations…menacentd’être dévorées… par l’irréligion et l’impiété, que Dieu a fondé l’Institut de Marie.» Et ilcontinuaitendisantquequiconqueentredanscetInstitutalacertituded’êtrelàparl’appeldeDieu.LepèreChaminadeenétaitsiconvaincuqu’ilnepouvaitconcevoirquequelqu’unpuissevouloirquitter.

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Plustard,danssacélèbreLettrede1839auxprédicateursderetraitesdecetteannée-là,lepèreChaminadeécrivait, «…Nous, lesderniersde tous, quinousnous croyonsappelésparMarieelle-mêmepour la seconderde toutnotrepouvoir…» L’idéed’être«appelésparMarieelle-même» ne doit pas être considérée seulement commeun simple concept intellectuel. À unmoment donné de notre vie, il nous sera donné de l’apprendre par expérience pour nousconvaincredenotreappelfaceauxévènementsdelavie.

Réfléchissons un instant sur cette idée, chère aux Marianistes, que nous sommes tousmissionnaires.Ehbien,sichacundenousestmissionnaire,c’estparcequeDieuetMarienousontdonnéunemission.DanssaLettrede1839, lepèreChaminadea insistésurcepointquechacundenousesteneffetmissionnaire.«Àchacundenous,laTrèsSainteViergeaconfiéunmandatpourtravaillerausalutdenosfrèresetsœursdanslemonde.»Nouscommençonsàgoûter vraiment notre appel lorsque nous faisons agir notre foi dans la réalité présente.«Seigneur, je croisvraimentque tum’asconfiéunemission.»Parfois, l’expériencedenotreappelvientjusteàlasuited’untelactedefoi.

Réfléchissonsmaintenantunmomentsurl’effet,dansnotrevie,decetappeldeDieu.D’aprèsl’Écriture Sainte, il est évident que lorsque Dieu appelle quelqu’un, une nouvelle relations’établit entre Dieu et cette personne. Et si l’appelmodifie notre relation à Dieu, il modifieégalement notre relation avec tout lemonde et avec tout le reste. Il y a quelque chose delégèrementdifférentdansnotrevie,peut-êtremêmedetrèsdifférent.Dans l’ÉcritureSainte,Dieudonneparfoisunnomnouveauà lapersonneappelée.Nous savonsque cenomaunesignification.Ildécritlapersonneenquelquesorte,etsouventilrévèlequelquechoseausujetde la relation. Voyez les enfants à l’école; ils donnent un sobriquet à un autre élève ou auprofesseur; il leur suffit de quelques heures pour coller un sobriquet à quelqu’un. Et, par lasuite quand on arrive à mieux connaître cet individu, on se rend compte que le choix dusobriquetétaitjudicieux.PourcequiestdeDieu,lorsqu’ilnousappelleparnotrenom,quandilprononcenotrenom,ilrévèlenotrevocation.C’esttrèssignificatif.«TuesPierre,etsurcettepierre jebâtiraimonÉglise.» «Tun’espasAbram ; tu esAbraham,parcequedésormais tuseras le pèredemonpeuple, une grandenation.»Àux futurs parents d’un enfant,Dieudit,«C’estainsiquenousl’appellerons».Ainsi,ens’adressantàZacharie,Ildit:«Vousl’appellerezJeanàsanaissance.»

QuelnomDieuvousdonne-t-il?Quelqu’ilsoit,ilestcertainementtrèssignificatif.DansIsaïe,Dieu dit que la nation va changer, et donc qu’elle aura un nouveau nom. (Cf. Is 62, 1-4). LaSociétédeMarieserarénovéedanslemonde,etelleporteraunnomnouveau.Peut-êtrequelechangementserait-ilcommedanslecasdePierre–lagraphiepourraitresterlamêmemaisavec une signification nouvelle.«Alors on t’appellera d’un nom nouveau que la bouche deYahvédésignera.»(Is,62,2).Souvenez-vousdecequeDieuditdansl’Apocalypse(2,17),«…Auvainqueur[celuiquiconformesavieàsavocation]jedonneraidelamannecachéeetjeluidonneraiaussiuncailloublanc,uncaillouportantgravéunnomnouveauquenulneconnaît,hormisceluiquilereçoit.»

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Lasignificationdecenomnouveaun’estpastellementévidentedansnosmotsd’aujourd’hui.Maislanouveautéyestimpliquéedansunerelationnouvelle.Jecroisàceci:siDieut’achoisipourêtreMarianiste,tuesmembred’unefamillequiappartientàMarie,etilyalàunerelationnouvelleavecelle,avecDieuetavecsonpeuple.

Lasecondeconséquenced’avoirétéappeléestquenoussommesinvestisd’unemission.Dieune nous a pas appelés pour rien. Dieu ne nous appelle jamais pour que nous continuionscommeavant,sansrienfaire.Dieun’apasànousappelersiriennevachanger.UneidéesurlaquellenotreFondateurinsisteestquevraimentnousavonsunemission.Ilprécisequ’iln’estpasnécessairequenousensachions tous lesdétails.Cequi importeestquenousensoyonsconvaincusetquenousyconformionsnotrevie,etquenousnousoffrionspourcettemissioncommenotreobjectif.ParfoisDieuopèreparnousànotreinsu.Lorsquenousconsacronsnotrevieànotremission,leSaintEspritestlibred’agirparnous.Leseffetssefontsentirsouventplustard.

LorsduhuitièmecentenairedelamortdesaintFrançoisd’Assise,unestatuedeluifutérigéeàRome:Françoisaccompagnédequelques-unsdesesmoines.Lastatuefaitfaceàlabasiliquede Saint Jean de Latran. Elle fut placée là parce qu’au temps de saint François, le Pape yrésidait.Françoiss’yrenditavecquelques-unsdesesmoinespourdemanderl’approbationdel’Ordre Franciscain. Cette statue est très intéressante à voir. Ellem’a toujours fasciné, parceque François est là, debout, regardant quelque chose qu’aucun autre ne voit. Avec lui setrouventplusieursdesesmoines;l’unestàmoitiéendormi,unautresembles’ennuyeretuntroisièmedans lesnuages. La statue rappelleun songede saint François vers la finde savielorsqu’il était très découragé. Il en était rendu à un point tel qu’il regrettait d’avoir fondél’Ordre franciscain parcequebonnombrede sesmoines ne vivaient pas leur vocation selonl’appelqu’ilsavaientreçu.Ilsn’étaientpasaussifidèlesqu’ilsauraientdûl’être.Danssonrêve,François vit laBasiliqueduLatranen trainde s’écrouler. Et cesmoinesmédiocresétaient là,debout,essayantde la retenirpour l’empêcherde tomber.Et leSeigneur,dedireàFrançois«C’estmieuxpourtoid’être lààfairequelqueschose,quoiqu’imparfaitement,queden’êtrepaslàdutout.»

SainteThérèsed’Avilaelleaussi,avaitentendu lemêmemessagedansunmomentdegranddécouragement. C’est à croire que tous les Fondateurs, à un moment donné, se sententdécouragés, parcequ’ils voient la beautéde l’appel deDieuet ceque la fidélité à cet appelauraitpuproduire.LeChristdisaitàsainteThérèse:«Ilvautmieux,pourvosSœurs,defairedubiend’unefaçonmédiocrequedenerienfairedutout.»Chersfrères,chacundevousfaitpartie de notre mission comme d’un ensemble. Si vous êtes fidèles à cet appel, Dieu ferabeaucoup de bien par votre entremise pour accomplir cettemission. C’est un des effets del’appeldeDieu.

LatroisièmechosequiseproduitlorsqueDieunousappelleestqu’ilnousdonnetoutcedontnousavonsbesoinpourmeneràbienceàquoinousavonsétéappelésàêtreetàfaire.C’estunepromesseinhérenteànotrevocation.Dieuendevientlepourvoyeur.LaProvidencesefait

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active d’unemanière nouvelle si nous la laissonsœuvrer en lien avec notre appel. C’est ledébutdenotreexpériencedeDieu,entantqueDieuProvidence.C’estunedesplusgrandiosesréalitésdetoutevocation.LapromessedelaProvidencedivineétaitévidentechezlespremiersApôtresetdisciplesque Jésusavaitenvoyés.Commeonpeut le lirechezLuc (9,1-6)etchezMathieu(10,5-10), lorsqueJésusenvoyalesApôtresenmission,il leurdonnaautorité.Il leurdonnasaparole.Illeurdonnasonpouvoirettoutcedontilsavaientbesoinpourparticiperàsamission.Illeurdit:«Neprenezrienpourlaroute.»Qu’est-cequecelaveutdire?Quetoutcedontilsauraientbesoinleurseraitdonné.

Dans la narration de laDernière Cène chez Luc, lorsque Jésus parlait à ses disciples, il disaitceci:«Vousêtes,vous,ceuxquisontdemeurésconstammentavecmoidansmesépreuves;etmoi jedisposepourvousduRoyaume.» Il remettaittoutentre leursmains.Etensuite il leurrappela,«Quandjevousaienvoyéssansbourse,nibesace,nisandales,avez-vousmanquédequelquechose?»«Derien»dirent-ils(Luc22,35).Ilsn’avaientjamaismanquéderien.Celane veut pas dire qu’ils s’étaient toujours sentis en sécurité. Ça veut dire que dans leurexpérience ilsn’ont jamaismanquéde rien. LepèreChaminadeécrivait à l’undenos frères,«Desmiraclesseproduisentdansnosvies.Laraisonpour laquellevousn’enavez jamais faitl’expérienceestsimplementparcequevousn’ensentiezpaslebesoin.»

EnsaintMatthieu6,33,Jésusdit:«Cherchezd’abordleRoyaumedeDieu,ettoutlerestevoussera donné en plus». Dieu donne. Quelle chose merveilleuse que d’en faire l’expérience !Quelle expérience merveilleuse c’est d’avoir vraiment besoin d’aide sans voir commentl’obteniretqu’alorsl’aidearrive.Rappelez-vouscefaitdel’Écriturelorsdelamultiplicationdespains. Il y a beaucoup de faits semblables qu’il serait bon de méditer. Mère Thérèse deLamourousquiétaituneprochecollaboratricedupèreChaminadedanslesFraternitésmarialesdeBordeauxetquiplustarddeviendraitlaFondatricedesSœursdelaMiséricorde,avaitvécudesexpériencesconcrètesoùlanourritureavaitétémultipliée.Cenesontpasdesexpériencesdesécurité,maiscellesd’avoirétésecourues.Celaseproduitaprèsunbesoinressentidanslasouffrance.Dieupourvoitàtousnosbesoinsaucoursdenotrevie,maisnousdevonsycroireetvivredecettefoi.

Cesontlàdesaspectsdenotrevocation.Jesuggéreraisquenouspriionssérieusementsurtoutcelaetquenous laissionsréellementnotrevocationrefaireànouveausurface. Ilestpossibleque nous revivions notre appel à nouveau et cela d’une manière nouvelle. Certainsévènementsdenotrehistoirequinousreviendrontàl’espritillustrerontlavéritédesfaitsdontje viens juste de vous parler. Renouveler l’expérience de notre vocation serait une belle etgrandegrâceàdemanderdansnotreprière.Ellemetenlumièreundonprécieuxquinousaétéfait:notrevocation.Remerciez-enDieusincèrement.Quecelaserenouvelleetquecesoitbienvivantdansvotrevie.

Ces aspects de l’expérience et de la réponse à l’appel de Dieu peuvent s’appliquer à touteautre vocation, aux laïcs qui désirent vivre en communion avec nous comme associés ou

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collaborateursdansnosministèresetaussiàceuxquisouhaiteraientfairel’expériencedenotrespiritualité.

CHAPITRE3

Lalettreetl’esprit

Le premier chapitre a traité de l’expérience de Dieu dans notre vie. Dans le deuxièmechapitre,nousavonsparlédecetteexpérience,plusspécialementdupointdevuedenotrevocation, de l’appel de Dieu. Maintenant, je voudrais réfléchir un peu avec vous surl’expérienced’êtreconsacréàMarie.Nousutilisons, commepointdedépart, l’affirmationclassiquedupèreChaminadesurnotrevocationdanssafameuselettreauxprédicateursderetraitede1839.Nousdonnonscommetitreàcetentretien:Lalettreetl’esprit,parcequelepèreChaminadeexpliquelonguementladifférencequ’ilconsidèreessentiellepourvivrenotreappelmarianistedefaçonàenexpérimenterlaplénitude.

Jevoudraiscommencerparvousfaireunpetithistoriquepoursituercettelettre:En1838,lepèreChaminadeafinalementenvoyéàRomelesConstitutionsdesFillesdeMarieetdelaSociétédeMarie.Illesaenvoyéesensemble,endemandantl’approbationdesConstitutionsqui serait comme l’approbation finale de l’Institut. En fait, le Saint Père a répondu avecenthousiasme à la lettre de demande en encourageant l’Institut, mais il n’a rien dit despécifiqueausujetdesConstitutions.LepèreChaminadeécrivitalorsuneCirculaireenjuillet1839pourdireàtouslesmembresqueleSaintPèreavaitapprouvélaSociété.Letextedelalettredupapenedisaitpasexactementcela.IldisaitqueleSaintPèrenousbénissaitetnouslouangeait,etilencourageaittouslesmembresàpersévérer.

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Le paragraphe suivant de cette circulaire souligne ce que le père Chaminade désiraitcommuniquerplustardà l’occasiondesretraites. Ildit:«Vousverrez(dans laréponsedupape)surtoutquesondésir,quesavolontémême,estqu’onvous inculquel’espritdenosœuvrestoutesdecharité,envousassurantquevousrendrezà l’Églised’autresservices,sivous persévérez. » Le père Chaminade a pris la déclaration du pape comme uncommandement.Unmoisplustard,iladésignéquatreprêtrespourdirigerlesretraites.Ilsdevaient donner toutes les retraites, cette année là, à tous lesmembres de la Société deMarieetdesFillesdeMarie.Danssafameuselettredu24août1839,ilexpliqueauxprêtrescequ’ilsdevaientcommuniquer lorsdecesretraites. Ilaprissonorientationàpartirdeladéclarationdupapequidésiraitquesoitinculquéàtouslesmembresl’espritdel’Institut,etqu’ils soientencouragésàpersévérer,parcequeen faisantainsi, il rendraient sûrementàl’Égliseunprécieuxservice.

Cependant, cette lettren’avaitpasen faitde titre.On l’adésignéedediverses façons:Lalettresurlastabilité,lalettresurl’espritdel’Institut,etainsidesuite.Cequejetrouvesous-jacentàpresquetoutes lesexplicationsdanscette lettreest ladistinctionfaitepar lepèreChaminade entre la lettre et l’esprit. Il désirait que les membres des deux sociétésaccueillent l’esprit de l’Institut et soient encouragés et stimulés à le vivre. Il a d’abordrappelé ledécretpontifical de louangeet l’enthousiasmedupapepour lesdeuxSociétés.PuisilarecommandéquelesprédicateursprennentpourthèmedesretraitescettecitationparticulièredesaintPaulque lepèreChaminadeapar la suiteexpliquée:«La lettre tue,l’espritvivifie»(2Cor,4,6).Jecroisqu’ilestimportantdelirecetteexplicationparcequelescommentairesdecettecitationde l’Écriturepeuvent semblerd’unecertaine façonparfoiscompliqués.LepèreChaminadeaunebelleettrèsutileperceptiondecetteaffirmationdesaintPaul.Ilprendlethèmedelalettreetdel’espritpourl’appliquerauxélémentsdebasede laprofessionreligieuse.En l’appliquantauvœudepauvreté,auvœudechastetéetauvœud’obéissancequefontlesreligieux,nouspouvonsnousdemander:Qu’est-cequecelasignifie en faitvivre la lettre et l’esprit ?Dans les derniers deux tiers de sa lettre, le pèreChaminadeappliquecelaànotrevœuspécialdestabilité.Écoutonssonexplication.

Il dit que ceux qui vivent selon la lettre accomplissent la lettre,mais, en faisant ainsi, ilsappliquent leurs propres principes. Il donne un exemple concret en lien avec le vœu depauvreté. Ilditqu’unreligieuxpeutvivrecevœuselon la lettre,maiss’iln’entrepasdansl’espritdepauvreté,sapratiquemêmeduvœufinirapartuersavocation. Ildit :« Ils’estrenducomptedecequiestpermis,sanscraintedeforfaireauvœu,gravementdumoins.Etilenapréciséleslimites,desortequ’ilappliquesesprincipesàtoutcequiestàsonusage.»Envivantselonlalettre, ilobservalesrègles,maisilestmotivéparsonintérêtpropre,sesbesoinségoïstes et l’estimede soi. Samotivation vientde sesprincipespersonnelsplutôtqueduvéritablesensduvœudepauvreté.

LepèreChaminadedonnequelquesexemplesquiressemblentàcequenousexpérimentonsdenosjours!Parexemple,unreligieuxquiaunseulcostume,maisildoitêtredeladernière

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mode,dumeilleurtissu,etdoitêtre«accommodéauxprétendususagesdesaposition».Nous pouvons dire qu’il vit selon la lettre,mais qu’il estmotivé par ses propres intérêtsplutôtqued’êtrecentrésurleChrist.

Tousceuxquiviventselon l’espritagissentexactementde la façoncontraire. Ilsobserventlesmêmesrègles,maisqu’est-cequilesmotiventàagirainsi?Selonquelespritvivent-ils?Envivantleurvœudepauvreté,ilsessaientd’avoirunevieplussimple,plussemblableàdevéritablesdisciplesduJésusChrist,pluscommeJésusChristlui-même.Quandnousparlonsdevivreselonlalettreetl’esprit,nousnevoulonspasdirequedespersonnesobserventlalettreetn’observentpasl’esprit.Etqued’autresviventselonl’espritsansaccomplirlalettre.Cettefaçondepenserestunpiège.Chaquereligieuxsincèreessaied’observerlalettre.Enfait, essayer de vivre l’esprit sans être fidèle à la lettre est comme essayer de jouer aufootball sans règles. L’esprit doit s’exprimer dans quelque chose de concret. Enconséquence,nousavonsàpratiquerlalettresinousvoulonsvivrel’esprit.

Ladifférenceestdesavoirsinousobservonslalettrepourremplirlesbesoinsdenotreégo,ousinousvoulonsfaireunavecleChrist.Vivons-nouslalettreselonnospropresprincipesouselonl’espritduChrist?Construisons-nousnotrepropreégooudevenons-nousdeplusenpluscommeLui?Ilyaunegrandedifférencedansnotreréponse.Ceuxquiviventselonl’espritreçoiventplusdevie,leurvocationprendplusdesens.Ilsdeviennentdeplusenplusforts dans leur objectif marianiste. Ceux qui vivent seulement selon la lettre perdentéventuellementleurconvictiond’êtreréellementappelésparDieu.Leurvocationvamourir.Çaneveutpasdirequ’ilsvontmourir,ouqu’ilsvontnécessairementquitter laSociétédeMarie.Enfait,lepèreChaminade,dansunpassagedesalettre,mentionnequecesontdesmembresde laSociétéquisontmorts intérieurementtoutenvivant leurpropreégo.Leurvocationestmorte.Enconséquence, ilsnesontplusheureuxde leurvocationmarianiste,parce qu’elle n’est plus vivante en eux. Il est important de saisir cette distinction parcequ’ellenousdonneunbonpointderéférencepourexaminernotreproprevie.

LepèreChaminadedonneunefoulededétailssurlevœudepauvreté.Puis,ilécrit:«Dansvosenseignements,ilvousserafaciled’appliquerauxdeuxautresvœuxlamaximequenousavonsdéjàcitéeplusieursfois,etpuis,vousnemanquerezpasdemotifspuissantspoureninculquerledivinesprit.»Ensuite,ilabordelevœuspécialdestabilitéquiestunquatrièmevœu,spécialauxMarianistes.

C’estencourageantdevoirquelevœudestabiliténousanimerasinouslevivonsenpleinaccordavecsonesprit.Ilyaunefaçondevivrecevœuquinousaideraàdevenirdeplusenpluscomme leChrist souscertainsaspects, spécialementceluid’être filsou filledeMariepourlesalutdel’humanité.C’etpourquoijeveuxréfléchirunpeuavecvoussurnotrevœudestabilitéàlalumièredelalettreetdel’esprit.

Notre Fondateur commence par faire une présentation assez élaborée de notre vœu destabilité: Ce qui nous apparaît quand nous considérons la stabilité, et aussi ce en quoi

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consiste l’espritdecevœud’unefaçongénérale.J’ytrouveuneimagetrèspuissante.Uneimagequipeutseperdreunpeuparcequ’elleestimbriquéedansunephrasecompliquée.Voici ce que dit notre Fondateur: « Nous nous sommes empressés d’offrir à Marie nosfaibles services pour travailler à ses ordres et combattre à ses côtés. Nous nous sommesenrôléssoussabannière…NoussommesspécialementlesauxiliairesetlesinstrumentsdelaTrès Sainte Vierge dans la grandeœuvre de la réformation desmœurs, du soutien et del’accroissement de la foi. » Il présente ensuite l’image que je vais vous donner de façonsimplifiée. Le père Chaminade dit que la ViergeMarie fait de nous « les dépositaires del’industrieetdesinventionsdesacharitépresqu’infinie».Lagrâceaétédéposéedansnotrecœur, et cette grâce est la formemême de l’amour deMarie et de sa charité. C’est uneimagepuissante:Marierépandsonamourpourlesautresdansnotrecœur.SinoussommesappelésàêtreMarianistes,cettegrâcenousestdonnée.Elleestennous.Sinousvoulonsqu’ellesoitagissanteennous,alorslacharitédeMarieagiradansnotremonde.

Je vous ai dit que cette image peut paraître obscure dans la phrase écrite par le pèreChaminade:«Dépositairesdel’industrieetdesinventionsdesacharitépresqu’infinie,nousfaisonsprofessiondeservirlatrèssainteViergefidèlementjusqu’àlafindenosjours».Lesfruitssontlesrésultatsdesonamourvécudansnotremonde.Etc’estsonamour quiest déposé en notre cœur pour y être activé. La phrase parle aussi « des fruits de sonindustrie».LacharitédeMarieestinfinimentpluscréatricepourtrouverdesfaçonsd’êtreunemèrepournous,afindenousapporterunevieplusabondante.LepèreChaminadeauneimagedelaSociétédeMarie:c’estcelled’ungroupedepersonnesquis’unissent,nonpasparcequ’ellesontchoisidevivreensemble,maisparcequ’ellesontacceptédans leurcœurquecettecharitédeMariepuisseentrerenaction.Sinotrecharitéestactivée,ellealemêmerésultatquelacharitédeMarie.LepèreChaminadeditquecetamourrégénèrelaviedel’Espritdanslespersonnes.Nous,Marianistesactuels,nouscroyonsquecetteimagepeutêtreappliquéeàd’autrescommunautésquisontassociéesànous.

PournousMarianistes,laformationdanslafoiconsisteàactiverlacharitédeMarie,detellesortequ’elletouched’autrespersonnesetlesforme.QuandMarienousforme,ellefaitplusque nous parler. Elle nous enveloppe de son amourmaternel. Telle est la vision du pèreChaminade.Sinousvoulonsvivrecettevisionet lavivreselon l’esprit,notrevocationserarenforcée et elle croîtra. Voilà l’esprit auquel se réfère le père Chaminade quand il nousparleduvœudestabilité. Ilditqueparcevœu«nousnoussommesengagésà seconderMariedetoutesnosforcesjusqu’àlafindenotrevie…Nousfaisonsprofessiondelaservirfidèlementjusqu’àlafindenosjours,d’exécuterponctuellementtoutcequ’ellenousdira,heureuxdepourvoiruseràsonserviceunevieetdesforcesqui luisontdues.»C’estunedéclarationdenotreengagementetdenotre consécration,mais c’est réellementunvœuque nous faisons de servir ses projets et sa mission. Voilà l’esprit de notre vocationmarianiste.L’espritduvœuestquenousvoulonsactiversonamourdeplusenplusdansnoscœursjusqu’àlafindenosvies.Nousenfaisonsunepromessesolennelle.

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Voyonsmaintenant,quelleestlalettredecevœu.«Parlevœudestabilité,nousentendonsnous obliger en justice à coopérer de notre mieux jusqu’à la fin de notre vie à l’œuvreentreprise.Nouscroyonstellementquec’estcequ’ilyadeplusparfaitpournous,quenousnousinterdisonsformellementparnotrevœu,ledroitdechoisiretd’embrasserjamaisuneautreRègle.»Voilàlesensdelastabilitépournous.C’estréellementlevœudepersévérerdanslaSociétédeMarie,parcequ’enfaisantainsi,nouspersévéronsdansl’étatdevivrelacharitédeMariequiaétérépandueennoscœurs.

Vous pouvez constater que si nous vivons de la charité de Marie, il se produit uneidentificationavecJésusquiesttrèsforte,trèsintime.Aprèstout,quelleétaitlacharitéduChrist ? Sinous comparons l’amourdu cœurduChrist à l’amourdu cœurdeMarie,nouscommençonsàvoirquechacunestunietpratiquementidentifiéàl’autre.

LepèreChaminadedécritlereligieuxquivitselonl’espritdestabilitécommeunepersonnequiaimetellementMariequ’ilprometparvœuderesterdanssaSociété.Sapersévéranceestprincipalementmotivéeparsonamourpourelle. IlestconvaincuquefairepartiedelaSociétéestpourluileseulmoyenetleplusparfaitpourexprimersonamourpourelle,pourDieuetpourlesautres.

LepèreChaminadedonneaussiladescriptiondequelqu’unquinevivraitqueselonlalettreduvœu,sansl’esprit.Envivantdecettefaçon,savocationmourra.IlrestedanslaSociété,aumoins pour un certain temps,mais vivre seulement selon la lettre va finir par tuer savocation.En fait, ildésire resterdans laSociétéenappliquant sespropresprincipes,pouratteindre ses propres objectifs, pour sa propre commodité, peut-être pour sa proprecarrière.Iln’estpluscentrésurl’esprit.Iln’estplusenthousiasméparlefaitqu’ilestappeléàvivredelacharitédeMarie.Ilestcentrésurautrechose.

LepèreChaminadedit«qu’ilestfaciledevoirqueceluiquis’entientàlalettresedéplacemonstrueusement dans la belle famille deMarie… Son titre, sa qualité de serviteur et deministredeMarien’estrienàsesyeux.»Ilafaittrèspeuoupasdutoutl’expérienced’êtreserviteur de Marie. Finalement, ça ne signifie rien du tout pour lui. Le père Chaminadeajoute: « Sa profession n’est pas assez parfaite. Il lui faut quelque chose de plus… Voussavez lereste: iln’estplusenfantdeMariedanssoncœuret ilpérittôtoutard.»Cequisignifiequesavocationdemarianistemeurt.C’estpourquoiquelqu’undanscettesituationpeutquitterlaSociétésansaucunsentimentdeperdrequelquechose.

Àlalumièredecequiaétédit,notreFondateurnepouvaittoutsimplementpassefaireàl’idéequequelqu’unpuissequitterlaSociété,mêmesiensontemps,ilyaeubeaucoupdedéparts. Chaque fois qu’il parlait de leur départ, il était clair qu’il ne pouvait comprendrepourquoi.Pourlui,notrevocationéquivautàseplacerdefaçonpermanentedansl’étatdefils de Marie. En d’autres termes, si nous imitons Jésus, nous nous plaçons de façonpermanentedanssonétatdeFilsdeMarieenétantdanslaSociété.LepèreChaminadenepouvaitjamaisimaginerqueJésusenarriveraitàunmomentdesavieoùilnevoudraitplus

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êtrefilsdeMarie,ounevoudraitplusdemeurerdanscetétat.ÊtremembredelaSociété,c’estlalettre;êtredanslaSociétécommefilsetserviteur,c’estl’esprit.LepèreChaminadenepouvait imaginerque Jésus, quelquepart dans sonparcours, aurait pudire:Voilà. J’aiatteintmonbut;maintenantjevaismetournerversautrechose».

Siquelqu’uncomprendvraimentsavocationmarianistecommelepèreChaminadel’avueeta fait levœudevivrecettevocation, il luiserait impensabledequitter laSociété,àmoinsquecettepersonnesesoittrompéedèssonentrée.LaseulefaçonpourlepèreChaminaded’expliquerledépartdequelqu’unétaitquequelquepartdanssonparcours,cettepersonneavait changésonobjectifetavait commencéàvivre la lettre sans l’esprit. Ellevit la lettrepourunmotifautreque laraisonpour laquelleDieuetMarie l’ontappeléà laSociété.Enconséquence,lalettretueraitsavocationetalorscettepersonnequitterait.

Jecroisquecelanousdonneuneclépoursaisir laperceptionprofondedel’expériencedeMarieque le pèreChaminade faisait.Quandnous lisons ses rappels dumystèredesdonsdontnoussommesdépositaires,d’avoiràincarnerd’unecertainefaçonlacharitédeMarie,nous avons un aperçu de son expérience vive deMarie. La présence deMarie était trèsréellepourlui.DemêmequelacharitédeMarieensoncœur.C’étaituneexpériencequiletouchait profondément. Je crois qu’elle l’a poussé à développer le vœu de stabilité et àinsister sur son importance. Il écrit: « Le vœu comme tel n’ajoute rien à notre vocation.L’appelàlaSociétédeMarieimpliquedéjàtoutcela.Levœulerendsimplementexplicite».

L’histoire de la stabilité dans la Société de Marie est intéressante. Au début, le vœu destabilitéétait fait lorsde lapremièreprofessionreligieuse,commevœutemporaire.Par lasuite,quandRomeaapprouvénosConstitutions,nousavonseuàchangercelaparcequ’àcemoment,ilyavaitunerèglegénéraledansl’Églisequinepermettaitpasunquatrièmevœu.Iln’yavaitquelestroisvœuxtraditionnelsdepauvreté,dechastetéetd’obéissance.C’estainsi que dans notre tradition, nous avons presque perdu le quatrième vœu de stabilité.Maisparcequ’ilétaitadmisquelaprofessionperpétuelledesvœux,émisepourêtrevécuepourlerestedenotrevie,impliquaitaussil’idéedestabilité,nousavonseul’autorisationdelegarder.

Parlasuite,quandavecVaticanIIilnousaétédemandéderevenirànotrecharismeetderenouveler l’inspirationdenosorigines, laquestionduvœude stabilitéaétédenouveausoulevée.LeChapitreGénéralde1981aapportébeaucoupd’attentionàcevœu. Ilyaeuuneproposition,basée sur le renouvellementdenotre charisme,depermettrede faire levœudestabilitécommevœutemporaireaumomentdelapremièreprofession.Ilsemblaitclairquequelqu’unpouvaitpromettredepersévérerauservicedeMariependantunan,etdelevouloirvraiment.Ilpourraitaussiêtrefaitcommevœutemporairepourunan.Mais,aucoursdecetteannée,lereligieuxdoitréellementvivrel’esprit: ladispositionintérieured’appartenir entièrement à Marie. Cependant, en 1981, il y avait présents au Chapitreplusieursspécialistesendroitcanonquiontdit:Netouchezpasàcettequestion,sinonvousperdrez tout le vœude stabilité. Pour cette raison, nous ne l’avons pas ajouté à la Règle

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commevœu temporaire, et nous l’avons encore commevœu spécial émis à la professionperpétuelle.

En1982,uneannéeaprèsceChapitreGénéral,lesFillesdeMarieontétéplusaudacieusesface au Vatican. Leur Chapitre a écrit dans leur nouvelle Règle que le vœu de stabilitépouvait être fait commevœu temporaire, et Romea approuvé.Depuis 1982, les Filles deMariefontlevœutemporairedestabilité.

ÀnotreChapitreGénéralde1991,unepropositionaétéprésentéeparunprofèstemporairedelaprovincedeCincinnatiquiavaitattentivementétudiécettequestion.C’étaitunebellepropositionquisuggéraitdevoirlapossibilitéderéintroduirelevœudestabilitéaumomentde lapremièreprofession.Aumomentde ladiscussion, ilsembleque lesdéléguésétaientgénéralementenfaveur,maislepropositionn’apasreçulesdeux-tiersduvoterequis.Jenesais vraiment pas pourquoi, parce qu’il me semble que le vœu de stabilité soulignesimplementpournouslanaturemêmedenotredésirdefaireprofessiondanslaSociétédeMarie. Le père Verrier, qui a été la grande autorité du vœu de stabilité, a étudié cettequestion en profondeur et a écrit à son sujet en diverses occasions. LeDictionnaire de laRègledeVieMarianisteaunarticledupèreVerrieroùilécrit:«Onpeuttoutefoissouhaiterque,commechezlesFillesdeMarie,nosprofèstemporairessoientunjourautorisésàvouerexplicitement la stabilité marianiste». Il faudra les deux-tiers d’un vote majoritaire auChapitrepourchangercepointdelaRègle.Mêmesicettequestionn’apaspasséeen1991,ellereferadenouveausurfaceàcausedesaplacedanslecharismedenotrefondation.

Je crois que cette question est similaire à celle de la troisième catégorie des religieuxmarianistes,lesfrèresouvriers.NotretraditionfaisaitladistinctionentrelesmembresdelaSociétéquiétaientordonnésprêtres,ceuxquiétaientdeprofessionenseignanteetceuxquisupportaientnosœuvresparletravailmanuel.Cesderniersétaientappelésfrèresouvriers.CettetroisièmecatégorieaétéexcluedenotreRègledeViedepuis1967.MaisladiscussiondecestroiscatégoriesrefaitencoresurfaceàpresquechaqueChapitre.Toutcequitoucheau charisme de notre fondation reviendra de nouveau comme sujet de nos discussionscapitulaires.

UnautreexempledenotretraditionestceluidelastructuredestroisofficesquifaitpartieintégraledenospremièresConstitutions.Pendantunmoment,nousavonseuquatreoffices,ouquatreofficiersentroisoffices.Maintenant,noussommesrevenusauxtroisofficesparcequ’ils sont réellement tous les trois des éléments de notre fondation. Notre Société eststructuréeen troisofficesdont les responsabilités sont:promotionde lavie religieuseouspirituelle, l’éducation, et les besoins temporels de nos communautés. Jementionne toutcelacommefaitdenotrehistoire,parcequejepensequecelasoulignequelastabilitéestquelquechosedefondamentalpournous.Elleestl’unedenoscaractéristiques.Par-dessustout,elleestl’unedenosplusbellesgrâcesquenousavons,etl’unedespluspuissantes.

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QuesignifiepourchacundenousderendreactivelacharitédeMariedansnotreapostolat?Voilàunebonnequestionlaisséeànotreréflexionpendantnostempslibres.

NotreFondateurterminesalettrecirculaireencitantRomains11,29oùsaintPaulparledupeuplejuifcommedupeupleélu:«Ilssontlepeuplechoisi.Ilsontrejetél’Évangile.Maisilssontencorelepeuplechoisi,etaiméscommetels».C’estuneaffirmationpuissante.Ilssontencore aimés de Dieu puisqu’ils sont son peuple choisi. Pourquoi ? Parce que Dieu nereprend jamais ses dons ni ne révoque son choix et son appel. Le père Chaminade nousapplique à nous cettemême parole. Une fois que vous oumoi avons été appelés à êtreMarianistes,Dieunousaimepour toujourscommeMarianistes.Une foisque lacharitédeMarieaétérépandueennoscœursparcequenousavonsfaitlevœudelavivre,elleyreste.C’estànousdel’activer.RendonsgrâceàDieupourcela!

CHAPITRE4

LaConsécration:

Formésparl’Espritsousl’influencedeMarie

Pour nous, dans la Société de Marie, la consécration est un mot très connu dans notrevocabulaire. Ilya cependantdeuxaspectsde laconsécrationquiapparaissentdansnotreconversation.Lepremieraspectestquenousconsidéronscetteconsécrationcommeundondenous-mêmesàMarie,àsamissionetàtoutcequ’elleveutaccomplirdanscemonde.Dece point de vue, la consécration est une action que nous entreprenons. Elle est quelquechosequenousfaisonspourprogresserverslasainteté.

Mais j’aimerais réfléchir davantage sur le secondaspectde la consécrationqui est en faitplus fondamental: l’action de Dieu sur nous dans la consécration. Le mot consécrationdérivedumotquisignifieêtresaintavecquelqu’un,êtresacréavec lui.Celasignifiequesinous nous unissons à Dieu, la transformation sera toujours du côté de . Quand nousdevenons un avecDieu, il ne nous diminue d’aucune façon.Mais nous devenons plus. LaconsécrationveutdirenoussanctifierennousunissantàDieu.C’estl’actionsanctifiantede

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l’EspritSaint.Quandnousnousplaçonssousl’influencedel’EspritSaint,defaçonàcequ’ilpuisserépandreennousdenouvellesgrâcesounoustransformer,nousdevenonssaintsenquelquesorte.C’estcelaquenousappelonslaconsécration.

Laquestionquenousvoulonsconsidérermaintenantestcelle-ci:Qu’enest-ildanslaSociétédeMarie,ouqu’est-cequenoussommesappelésàfaire,pourenarriveràuneconsécration?NousverronsquenousdonnerdefaçondélibéréepourdevenirmembresdelaSociétédeMarieestensoiuneconsécration.

Silaconsécrationsignifiequel’actiondel’EspritSaintnousrendplussaints,plussemblablesà Dieu, alors il y a différentes façons de se consacrer. Le baptême est l’une des plusfondamentales.L’évangiledesaintLuc3,21décritlebaptêmedeJésusauJourdaincommececi:«AumomentoùJésus,baptiséluiaussi,setrouvaitenprière,leciels’ouvritetl’EspritSaint descendit sur lui… et on entendit du ciel une voix: Tu esmon Fils bien-aimé, tu astoutemafaveur».

DanstouslesécritsdesÉvangiles,lepointtournantdanslaviedeJésuspourpasserdesaviecachée à son ministère public, se situe à son baptême. Il s’est clairement ajouté uneintervention de l’Esprit Saint dans sa vie. Saint Luc dit qu’après son baptême, Jésus futconduitaudésertparl’EspritSaint.Àsonretourdudésert,remplidupouvoirdel’Esprit,ilacommencé son ministère public. Jésus le consacré (c’est ce que son nom signifie) étaittellement uni à Dieu que sa consécration, même comme être humain, était pleine etcomplète.

Marieafaitl’expériencedeplusieursévénementsdeconsécrationdanssaviequandl’EspritSaintaétéactifdefaçonnouvelleenellepouraugmentersasainteté:À l’Annonciation,àCanaetauCalvaire.À laPentecôte,Marieet lesapôtresétaientrassemblésquand l’EspritSaintestdescendusureuxd’unefaçontellequ’ilsfurent,defaçonspectaculaire,davantageunis à Dieu, plus saints, plus consacrés. Ce genre de consécration est une grâce qui estpermanente. Elle dure.Nous pouvons la rejeter ou l’ignorer,mais la grâce elle-même estpermanente.LesActesdesApôtresdécriventlaPentecôteendisant:«Ilsfurentremplisdel’Esprit Saint. » Certains signes se sont immédiatement manifestés. Les Apôtres ontcommencéàparlerendifférenteslangues,carl’Esprit leuravaitdonnéledondeslangues.L’undespremiersrésultatsvisiblesaétéqu’ilsn’avaientpluspeurdeproclamerqueJésusétaitmaintenantvivantetprésentaumilieud’eux.

Leprêtreestconsacréaumomentdesonordination.L’Églisenousditqueleprêtrereçoitlepouvoir de l’Esprit pour agir au nom du Christ ou en la personne du Christ, comme parexemplepardonnerlespéchés,célébrerl’Eucharistie,rendreDieuprésentàl’auteldefaçonsacramentelle. La consécration du prêtre l’unit à Dieu d’une telle façon qu’un pouvoirparticulierdel’EspritSaintestprésentenlui.

Pourtous leschrétiens, lebaptêmeest laconsécrationpremièreetfondamentale. Ilest lecommencement de notre vie avec le Christ de façon ontologique. Cela veut dire

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objectivement qu’il se passe quelque chose qui va changer radicalement la vie de lapersonnesilagrâceestaccueillieetvécue.

Il y a des moments de notre vie où le Saint Esprit nous est donné avec des grâces plusprofondes. Quand ces grâces sont acceptées et deviennent permanentes, nous sommesconsacrés. La grâce nous communique quelque chose de Dieu. Nous parlons de la viereligieuseelle-mêmecommed’unenouvelleconsécration.Celaveutdirequelorsquenous,commereligieux,nousfaisonslevœudevivrelapauvreté,lachastetéetl’obéissancepoursuivre le Christ, pour vivre autant que possible comme il l’a fait, alors le Saint Esprit estprésentennousd’unefaçonnouvelle.LepapeJeanPaulIIleditdansRedemptorisDonum,7: « Nous sommes établis en Jésus Christ comme sa possession exclusive. » Dans cetteexhortation, le pape présente la façon dont l’Église comprend la consécration religieuse.Quandnous faisonsdesvœuxetquenousysommes fidèles,nousnousplaçonsdansunesituationoù l’Esprit Saint agit ennousde telle façonquenousdevenons saints comme leChrist.

Saint Paul (Rom 8,22) dit: « La création tout entière gémit jusqu’à ce qu’elle soittransforméeenunenouvellecréation».Celasignifiequequelquechoseestentraindeseproduire.Quirendcelapossible?Danslafoi,nouscroyonsquecechangementestproduitpar l’action de l’Esprit Saint. C’est une forte affirmation de l’Église, basée clairement surl’Écriture,pourdonnersonsensàlaprofessionreligieuse.

Il y a un document écrit par la Sacrée Congrégation des religieux appelé Les élémentsessentielsde laviereligieuse.Lebutprincipaldecedocumentestsimplementdespécifierlesélémentsquiconstituent laviereligieuse.Aunuméro5,nous lisons:«Laconsécrationestlabasedelaviereligieuse.Eninsistantsurcepoint,l’Égliseplacelepremieraccentsurl’initiative de Dieu et sur la relation transformante en Dieu que cette vie entraîne. Laconsécration est une action divine ». Dans ce document, l’aspect missionnaire de laprofessionreligieuseestdéveloppécomesigne:«C’estunsignesocialextérieurdel’actionconsacrantedeDieutoutaulongdelavie».L’emphase,autantdanscedocumentquedansl’exhortationpapale,estquesilesreligieuxviventavecsincéritéleurengagementintérieur(l’essentielestl’intérieur)celadevientunpouvoirtransformant.LeSaintPèreditquesinousvivonsnotreconsécrationfidèlement,nousparticiponsàl’undesplusprofondsprocessusdetransformationaumonde.

Parlaconsécrationreligieuse,nousnousplaçonsdansunesituationquidonnelibrecoursàl’EspritSaintpournoustransformerparlagrâceetpardesdonsspéciaux.Beaucoupparminousontdescompétencesspirituellesparticulièresqui les rendent totalementdisponiblespourréaliserleplandeDieu.NostroisvœuxnousrendentaptesàêtrepleinementministresduChrist.

Qui entre dans la vie religieuse entre dans cette sorte de consécration que nous avonsdécrite.Dans la SociétédeMarie,qu’ya-t-il dedifférent,ouqu’est-cequ’il y ad’ajouté?

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Quelest lecaractèredonnéquiestaussiuneconsécration?CelatouchelecœurdenotrevocationcommeMarianistes. Ilyaaumoinstroisaspectsquenouspouvonsexaminer.LepremierestuneaffirmationtrèsnettedenotreRègle:«LaSociétédeMarieappartientàMarie».C’étaittrèsclairdansl’espritdupèreChaminade.Àunmoment,iladitqu’ilauraitété peut-être préférable d’appeler l’Institut: la Famille de Marie. Mais il ne l’a jamaisappeléeainsilui-même.LaSociétédeMarieluiappartient.L’article14denotreRègledit:«Nous faisons profession… Cette profession nous constitue membres d’une société quiappartientàMarie».Enconséquence,quientredanslaSociétéetenfaitpartieappartientàMarie. En fait, notre profession religieuse établit une nouvelle union avec Marie danslaquellel’EspritSaintconfirmequenousappartenonsintimementàMarie.

Lepapeditquedanstoutesociétéreligieuse, lestroisvœuxpermettentà l’EspritSaintdenous établir comme possession exclusive du Christ. Nous appartenons au Christ, noustravaillonspourlui.DanslaSociétédeMarie,nousspécifionsceladavantageendisantquenousentronsdansune relationparticulièreavecMarie.Cela se fait simplementparnotreentréedanslaSociétédeMarie.Manifestement,nousdevonsenêtreconscientsetlefairedélibérément.Autrement,ceseraitcommequelqu’unquisefaitbaptiseretnedeviendraitjamaisconscientdecequis’estpassé.Nousbaptisonsdesbébés,maisnousprésumonsqueles parents agiront pour cet enfant jusqu’à ce qu’il soit assez âgé pour faire un choixpersonnel,avecunengagementconscient.

Le deuxième aspect nécessite un engagement plus personnel de notre part. Selon notrefondation,noussommesappelésparMarieàêtremembresdesaproprefamille.Cetteidéeestdéveloppéedanslalettreclassiqued’août1839:«NousnouscroyonsappelésparMarieelle-même ». Le but de cet appel est exprimé à l’article 6 de notre Règle comme uneconsécration: «Nous nous consacrons à elle pour que l’Esprit Saint à qui elle apporte leconcoursde sonamourmaternel, nous forme toujoursdavantage à l’imagede son Fils. »L’appel deMarienousplace sous l’influencedu Saint Esprit d’une façonnouvelle, si nousfaisonsensortequecelaseproduise.

Le troisième aspect nécessite une action encore plus délibérée de notre part. NotreFondateur l’appelle l’Allianceavec Marie: une relation particulière avec Marie que nousentreprenonsdélibérémentavecellequandnousentronsdanslaSociétéetquenousnousimpliquons. Le père Chaminade dit: « Nous entrons en alliance avecMarie ». C’est unenouvelle relation qui est scellée par l’Esprit Saint. Au cours des premières retraites justeaprèslafondationdelaSociétéen1817,notrefondateuradonnéplusieursentretienssurlaquestion de l’Alliance. Il la voyait comme une réalité très fondamentale qui devait êtreacceptéeconsciemmentpar l’ensembledugroupeetvécuepareux.NousavonsplusieurscomptesrendusdecetteAlliancedansnospremiersdocuments,dontceuxdupèreLalanne,l’undespremiersmembresde laSociétédeMarie. Ilest intéressantdevoirque lesnotesqu’ilaprisescontiennentdesélémentstrèssimilaires.

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IlyaaussitroisélémentsquientrentdanscetteAlliance.Lepremierestquel’Allianceestunchoix délibéré qui va dans deux sens.Marie dit: « Je vais t’accueillir commemon enfantdanscettefamille.»Elleconsidèrechacuncommesonenfant,maisdanscettefamille,dansnotreSociétédeMarie,ellenouschoisitdélibérémentpourdesraisonsspéciales.Etnouslachoisissons en disant: « Oui, nous allons te prendre comme notre mère et noust’accueilleronscheznous».Notrechoixestunchoixtrèsdélibéréquiprendsonmodèlesurl’alliance de l’Ancien Testament quand Dieu dit: « Vous êtesmon peuple, etmoi je suisvotreDieu».Etcepeuplearépondu:«Oui,tuesnotreDieu,etnoussommestonpeuple».Notre Fondateur applique le même modèle pour notre relation à Marie. Le deuxièmeélément est l’engagement.D’accord, je vais donner tout ce que je suis et ce que j’ai à lamissiondeMarie. Jevaisdonner toutmon temps, tousmes talentset toutemonénergiepourtoutcequ’onmedemanderadefairepoursamission.C’estuneconsécrationtotale,un dévouement total. Il comprend tout. Il est vrai aussi que tout ce que Marie est oupossède nous devient accessible. Elle nous offre cela dans cette nouvelle relation. C’estpourquoinotreFondateurétait trèsconfiantquenouspourrions faire toutenpassantparson intercession. Ses mérites, son pouvoir, sa grâce, son intercession sont à notredisposition.MêmesicetteAllianceestdetouteévidenceunpartenariatinégal,parcequeducôtédeMarieelleesttellementplusgrandequedunôtre,elleresteunengagementtotaldesdeuxcôtés.

Letroisièmeélémentestuneassociationpersonnellequin’exclutrien.SiMariedoitseteniraupieddelacroix,nousseronslà.SielleestprésenteàlaPentecôte,nousseronslà.SielleannonceJésusaumonded’unefaçonoud’uneautre,nousl’aiderons,nousseronslàpourlefaire.C’estuneassociationétroite,danscesensquenousn’excluonsriendenotrepart,nielledesoncôté.

Cetteassociationaplusieursconséquencespratiques.Dansunecommunautéoù j’aivécu,nousavonsdit:«Quelleseraitl’unedesconséquencesconcrètessiMarievivaitdanscettemaison?»C’étaitunequestiontrèsintéressante,sibienquequelqu’unaaussitôtrépondu:«Ehbien,nousdevrionsd’abordépurernotrebibliothèque!»Àquelpointsaprésenceest-elleréellepournous?Elledoitarriverànousinfluencer.L’inviterions-nousàchaqueendroitoùnousallons?Regarderions-nouslesmêmesfilms?Écouterions-nouslamêmemusique?Travaillerions-nousdelamêmefaçon?

Voilàcequ’estnotreconsécration,et laraisonpourquoinotreAlliancenoustransformeetnous change. Tout ce que nous sommes, tout ce que avons et tout ce que nous faisonsappartientàMarie.Toutcequ’elleestetpossèdeestànotredisposition.

Notre consécration entraîne toute une série de conséquences pratiques pour notre agir.Nous avons le goût d’entreprendre plusieurs choses que nous n’aurions pas entreprisesautrement. Nous sommes prêts à faire bien des choses, de nous retrouver dans dessituationspénibles,mêmed’accomplirdestâchesquenousn’aurionspaspufaireseuls.Jesuiscertainquenouspourrionsraconterplusieursfaitspourparlerdel’influencedeMarie

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dans notre vie quand nous vivons réellement cette alliance. Dans ma propre vie, je n’aijamais délibérément confié quelque chose à Marie sans avoir expérimenté, commeconséquence,des résultats inattendus.Mais,c’estunpeucommemarchersur l’eau.C’esttoujoursunactedefoi.Voussavezquesivousmarchezsurl’eauunefois,cen’estpasplusfacileladeuxièmefois.Vousavezencoreàfairelemêmeactedefoipourl’entreprendreetlefaire.NotrecourageetnotreconfiancecroissentquandnouscroyonsquecequeMarieaàsadispositionledevientpournous.

J’aivuagirl’influencedeMarieen1982peuaprèsledébutdemonséjouràRome.LefrèreJoe Davis était à Nairobi pour travailler auprès des réfugiés éthiopiens. Parmi eux, cinqs’étaientrendusauKenyaoùilsétaientmalpris(bloqués)etdevaientensortir.LefrèreJoelesamissurunavionetleuradit:«QuandvousserezàRome,appelezlepèreQuentinetils’occuperadevous.»Aupointdedépart, jen’avaispasbesoindefaireconfianceàMariepourleurtrouverunendroitoùs’installerparcequenousavionsuneplacepoureux.Mais,ilsm’ontensuiteditquepuisqu’ilsétaientillégalemententrésenItalie,ilsdevaientpartir.Ilsavaientdes liensavec l’ambassadedeNorvègeoù ilsvoulaientserendre.Toutd’abord, ilsparlaienttrèspeul’anglaisetl’italien.Ilsparlaientseulementletagrinia.Noussommesallésàl’ambassadedeNorvègeoùonnousaditquelapremièrechoseàfaireétaitdeprésenterleur histoire en anglais. J’ai dû trouver quelqu’unqui connaît leur langueet pouvait aussiparlerassez l‘anglaispourécrire leurhistoire.Àcemoment-là, jeneparlaispasbeaucoupl’italien,mais jemesuismisau téléphone. Je savaisque les frèresdesÉcolesChrétiennesavaientuneécole enÉthiopie et que l’und’euxpourrait sansdoutem’aider. Ilsm’ontditqu’ilsavaientunvieuxfrèrequiparlaittrèsbienletagrinia,maisqu’ilétaitmortdepuisunan ! Ilsm’ontsuggéréd’appeler lessœursMissionnairesd’Afrique.Ellesm’ontditqu’ellesavaientunevieillesœurquipourraitaider,maiselleétaittrèsmaladeetsetrouvaitàMilan.Aprèsdeuxjoursetdemid’appels,j’avaisépuisémesressources.

Alors,jemesuisrappelélaViergeMarie.Aprèslerepasdusoir,jesuisalléàlachapelle,jemesuisagenouilléetjeluiaidit:«Regarde.Sic’esttontravail,jesuisprêtàfairemapart,maisjenesaispascequejepourraisfairedeplus.»Jen’aipasentendudevoixnireçudesignes,maisaprèsavoirterminémaprière,j’avaiscetteimpression:Situsaisêtrepatient,tu vas voirmon pouvoir. Celam’est resté dans la tête. Lematin suivant, àmon réveil, jen’avaisaucuneidéedesavoiroùjepourraisappeler.À11heures,quelqu’unseprésenteàl’entrée. C’était un prêtre copte qui dit: «J’ai appris que vous cherchez quelqu’un quiconnaîtletagriniaetl’anglais.Moi,jenepeuxpaslefaire,maisjeconnaisquelqu’unàRadioVaticanquifaitlaprogrammationencettelangue».Alors,jesuisretournéàlachapellepourremercier.Jemesuisaussidemandépourquoinousnelefaisonspasplussouvent.

J’avais encoremonmessage en tête:Si tu sais être patient, tu verrasmonpouvoir.Nousavonstravailléonzemoissurceproblème,mais l’ambassadeafiniparrépondrenon.Àcemoment-là, nous prenions encore soin des cinq réfugiés et nous étions revenus à la casedépart. Leur prochaine démarche fut de demander asile au Canada. Eh bien, ces cinq

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hommessonttousauCanadaoù ils travaillentetgagnent leurvie.Si tusaisêtrepatient…Pourquoi ne confions-nous pas nos besoins àMarie ? Évidemment, nous ne pouvons pasfaire usage de notre consécration comme si c’était magique. Et nous ne pouvons pasl’utiliserpourdesmotifségoïstes.Quelqu’unm’adit:«ChaquefoisquejevaisdanslavilledeRome,jedemandeàMariedemetrouverunstationnement.»Moijenemevoispasentrain de faire appel à notre Alliance pour une chose de ce genre. Mais, quand noustravaillons sur des projets importants afin de venir en aide aux gens, je crois que nouspouvonsconfiertoutcelaàMarieetvoiragirsonpouvoir.

UneAllianceréciproqueavecMarieprendformedansnotrevie.Alorsquenotredispositionintérieureestessentielle,nousavonsaussiàagir.LepouvoirdeMarievanousconduirebienau-delà denospropres limites.Notre Fondateur en était convaincu. Il en a beaucoup faitl’expérience au cours de sa vie.NotreAlliance fait de nous des personnes consacrées quiviventdelafoi,conscientsquel’EspritSaintestréellementàl’œuvrepournoustransformeretnousfairevivredeplusenplussouslepouvoirdivin.

Pour finir, unmot au sujet de notre consécration exprimée par la prière de trois heures.Notreprièretraditionnelledetroisheuresestbeaucoupplusqu’uneprière.Enfait,elleestunespiritualitécomplète.LessœursdelaMiséricordedelamèredeLamourousviventcettespiritualité.Aucœurdecelle-cisetrouvecetteprière.Pourelles,cen’estpasseulementuneprièrediteà troisheures.Elless’arrêtent, s’agenouillentet renouvellent leurengagement.Le père Chaminade a donné une grande importance à l’expérience du Calvaire. Quelquechosedenouveaus’estpasséàcemomententreJésus,Marie,etJean.Jésus(Jn19,27)adit:«Voicitonfils…voicitamère».SaintJeandécritcelaencettesimplephrase:«Àpartirdecemoment,ledisciplelapritchezlui».

Quandlediscipleafaitcela,ils’estplacédansunesituationnouvellequiadonnéàl’EspritSaintunenouvelleoccasiondelesanctifieravecDieu.

Je crois que c’est la raison pour laquelle notre Fondateur nous a demandé de dire cetteprière.Ellead’abordété introduitedans laCongrégationpar lamèredeLamourous.C’estuneexpérienceprofondededireàMarie:«Nousteprenonsdansnotrevie,tunousprendsdanstavie.Ensemble,nouspoursuivonsl’ensembleduprojetdesalutduChrist.»LepèreChaminadel’aexpliquéainsi:«C’estcommesiJésusdisaitàMarie:«Maintenant,tuvoistonfilspremier-né,samissionestaccomplie,ilretourneauPère.MaisJean,cefilsdetafoiet de ton amour n’a pas encore rempli samission. Alors, je te le confie. Il a encore unemissionàaccomplir».Etalors, ildità Jean:«Bienheureusecellequi t’adonnénaissancedanslafoiquandellem’aconçucorporellementdanssoncorps.Elleesttamèrecommeelleestmamère.Pasdelamêmefaçon,maisenfaitparlaloidelagénération.Prends-ensoin!»«Etàpartirdecemoment,lediscipleluiafaituneplacechezlui».

Vous avez probablement vu des images de la sculpture du Calvaire qui se trouve à notreAdministrationGénéraleàRome,àl’initiativedupèreSalaverri.C’estleseulCalvaire,parmi

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ceuxquej’aivus,quidécritlaconsécrationdansundialogueàtrois.Danscettescènedelacrucifixion, Jésus parle à Marie, Marie rejoint Jean et Jean touche Jésus pendant qu’ilaccepteMariepourmère.L’artisteditqu’elleasculptéplusieurscalvaires,maisquec’étaitlapremière foisqu’elle le représentaitdansundialogueà trois. La forcedeconsécrationduSaintEspritestpresquepalpabledanscedialogue.

Quelbeaumystèrenousavonsàvivredansnotremonde!L’actedeconsécrationdetroisheuresestunepartievitaledenotrehéritage.FaisonsusagedecetteprièrefidèlementpourintensifiernotreappartenanceàMarie.Ellecomportetellementd’avantagespournous,etelleestaussiuneformidablemissionquinousaétéconfiée.

CHAPITRE5

Revêtirl’hommenouveau

LaconformitéàJésus-Christoul’imitationdeJésus

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Audébutdelaretraite,j’aimentionnéquenotreobjectifseraitdefairepleinementetplusprofondément l’expérience de la présence de Dieu dans nos vies. Maintenant, j’aimeraisréfléchiravecvoussurundecestermesquenotreFondateurutilisaitcommeleprincipedebasedenotreviespirituelle -«Revêtir l’hommenouveau».Uneautremanièrede ledirec’est«LaconformitéavecleChrist»,uneexpressionquelepèreChaminadeatrèssouventutilisée.Nousvoulonsdevenirdeplusenplus comme leChrist,parcequ’enagissantainsinousdevenonsdeplusenplusunavecLui.

Sic’estcelanotreobjectif,nousnousdemandonsalors:«QuelestleprincipedebasequenousdevonssuivrepourvivrepluspleinementdelaviedeDieu.»NotreFondateurrésumetoutleprocessusendisantqueleprincipefondamentaldelathéologiemystiqueestceci:«Siquelqu’unveutveniràmasuite,qu’.ilrenonceàlui-même,qu’ilportesacroixetqu’ilmesuive»(Mt.16,24).Ouencore,selonlemotdesaintPaul:«Etvousdemême,considérezquevousêtesmortsaupéchéetvivantsenDieudansleChristJésus»(Rm6,11).Eneffet,toutelapratiquedelaperfectionconsiste,selonl’expressiondesaintPaul,àsedébarrasserduvieilhommepourserevêtirdel’hommenouveau.

Qu’est-ceque l’on veutdire sedébarrasserdu vieil homme?Psychologiquementparlant,nousnousdemandons:«Qu’est-ceque,enfait,nousavonsàchangerradicalement,sinousnous apprêtons à revêtir l’homme nouveau ? » Nous devons partir du vieil homme.Quoiqu’endiseMatthewFox,nousnepouvonspaséviterl’inclinationaupéchéetl’idéedeprivation. C’est avec le vieil hommeque nous devons commencer.Nous l’avons édifié ennous-mêmes depuis le début de notre vie. C’est simplement une image de soi que nousavons édifiée, sans Dieu, comme centre ou comme but à atteindre. Nous commençons àbâtiruneimagedenous-mêmesdèsledébutdenotrevie.DèsLapremièrefoisqu’unbébéaundébutd’expériencesensible,mêmeavantsanaissance, il commenceàseconstruiresapropre image de soi. C’est cela notre vie. C’est bien ce que nous sommespsychologiquement. La plupart du temps, ce processus de construction de notre propreimagede soiest inconscient jusqu’à cequenousayonsassezgrandipour réfléchir à cela.Ainsi, nous avons tous une image de nous-mêmes avant que nous en soyons conscients.Nous avons une image de ce que nous sommes: bonne oumauvaise. Chacun de nous acommeuneimagedecequenoussommes:laidsoubeaux.D’oùnousvient-elle?Nousladévelopponsnous-mêmes,et lesautresnousyaident.Quand les gensdisent: «Oh,quelbeaubébé!»-celanousaideàbâtiruneimaged’unêtreaimable.Silesgensdisent:«Quelvilainenfant!»nousnousformonsuneimagedesoiquenoussommesvilains.

C’est cela l’image de soi. Chacun de nous a une image de ce que nous sommes: unepersonne qui travaille dur ou une personne négligente. Nous avons une image de nous-mêmes commedequelqu’unqui est réellement béni deDieuou commequelqu’un à quiarriventtouteslesmalchances,oupeut-êtrepensons-nousêtrequelquepartentrelesdeux.Notreimagedesoiestbonneoumauvaiseselonlamanièredontnousladéveloppons.Nousavons tous une image de soi et c’est à partir d’elle que nous expérimentons qui nous

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sommes. Le point est que, quandnous construisons cette image sans aucune référence àDieu,elles’insurgecontre«cequenoussommescensésêtre»parcequenoussommesfaitsàl’imagedeDieu.LesperfectionsdeDieuformentl’imagedecequenouspouvonsdeveniren grandissant en perfection. Mais nous construisons notre propre image de manière àdéformercequenouspourrionsêtre,etalors,celadoitêtrecorrigé.Nousavonstousdesexpériences de cela. Parfois, nous avons à décider si nous voulons commencer à changernotreimageouquenousallonsêtresurladéfensiveetessayerdefairen’importequoiquicorrespondànotreimagepersonnelle?

Jevaisvousdonnerunexemplepersonnelalorsquejefaisais l’expérienced’unechosequientrait en contradiction avec l’image que je m’étais faite de moi. Quand je suis allé àMilwaukee, toutdesuiteaprèsmonséminaire,onm’ademandéd’enseigner le latindansuneclassedetroisième.Jemeconsidéraiscommebonprofesseur.Toutsepassatrèsbienjusqu’àceque,à la finde l’année, lesélèvessubirentuntestde latinstandardisé.Laplushautenotedelaclassesetrouvaitdansles20surcent.Qu’est-cequej’allaisfaireaveccela?Je pensais être excellent professeur. J’ai pensé que leurs notes si basses dépendaient duniveau des d’élèves ; pourtant, c’étaient des élèves brillants. J’ai même pensé blâmer lapauvreté de mon manuel d’enseignement. Mais, d’autres professeurs avaient utilisé lemêmemanueletilsonteudemeilleursrésultats.Finalement,j’aidûadmettre:«Jenesuispeut-êtrepassibonprofesseur…delatin»Vousvoyez,notreimagedesoi,c’estnotrevie.L’instinctleplusfortquenouspossédonsestdedéfendrenotrevie:lapréservationdesoi.En conséquence, la chose la plus difficile à changer, est notre propre image de soi. Parexemple, supposons que vous ayez une faible image de vous-même, c’est-à-dire, vouspensez que vous n’êtes pas très brillant. Par contre, vous faites quelque chose depassablementintelligent.Quelleestvotreréaction?Vouspourriezdire:«C’étaitparadon(hasard)»;ou«Celanem’arrivepassouvent»;ouencore«J’aicruentendrecelaailleurs».

Pourquoiest-cesidifficiledechangerl’imagedesoi?Parcequetoutchangementestundéfidanslavie.Sinouschangeons,mêmesic’estennégatif,quelquechosedoitdisparaître.Sinous nous apprêtons à détruire cette ancienne image de soi pour la remplacer par unenouvelle,quelquechosedefondamentalennousdoitmourir.

Au tempsoù j’étais Provincial, undes frères, un jour,m’ademandé s’il pouvait avoir unechirurgie plastique au visage. Je n’en croyais pas mes oreilles ! Je l’ai regardé et lui aidemandé pourquoi. Il m’a répondu que les gens avaient de la difficulté à le regarder.Pourtant,jen’avaisjamaisentendupersonnediredeluiqu’ilétaitlaid.Pourmoi,c’étaitunepersonnedebelleapparence.Jeluidis:«Jenetrouvepasdifficiledutoutàvousregarder.Est-cequequelqu’unvousadéjàditquec’étaitdifficiledevousregarder?»Ilmeréponditsimplement qu’il le savait, qu’il le sentait. J’ai alors compris pourquoi il le sentait, c’étaitparcequ’ilavaituneimagedequelqu’undelaid.Sivouspensezquevousêteslaidetquevous vous tenez en face d’un groupe de gens, vous allez vous convaincre que chaque

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personnedugroupeestentrainderegarderunepersonnelaide.Commentréagissez-vousàcela ?Même si quelqu’un vous dit que vous êtes une personne de belle apparence, celan’affectera pas votre image de vous-même; vous allez simplement penser que cettepersonneestsimplementpolie.

Chacun de nous a sa propre histoire concernant son image de soi. Dans ma/ propreéducation,mesparentsagissaientpratiquementcommetouslesautresparentsàtraverslemonde.Ilsdésiraientquejefusselepremierentout.Avez-vousdéjàrencontrédesparentsquiessaientd’enseignerà leursenfantsd’être lesderniers?Monécoleprimaireétaitunepetiteécoledecampagneoùj’aieulesmeilleuresnotesdansmaclasseJ’étaislenuméroun.Aveclesenfantsdemonâge,j’étaislemeilleurjoueuràlaballe.Etmonpèreavaitl’habitudedemedire:«Faisattention.Necommencejamaisunebagarre.Cen’estpasbon.Mais,siquelqu’und’autrecommenceavectoi,netelaissepasfaire.Tunepeuxpasadmettreêtrelesecond».J’aigrandienentendantcelatoutletemps.Jem’attendaisàcequequellequesoitl’organisationdontjeferaispartie,jedevaisêtrelemeilleur.C’étaitmonimage.(J’aiquelquepeuchangémonimagedepuislors!).Quandjesuisentréaupostulat,nousavonscommencéà lire les Écritures. Et j’ai commencé àm’arrêter sur quelques-unes des paroles quenouslisions. Jésusdisaitquelquechosecomme«Tout lemondechercheàêtre lepremier. Lesgrandsdecemondesepavanentau-dessusdesautres.Ilsveulentêtreappelésmaîtres.»Etjemesuisditenmoi-même:«Biensûr,etalors?Toutlemondeveutêtrelepremier.C’estcequ’onnousaenseigné.»Puis,àcemoment, j’airéaliséqueJésusaaussidit:«Sivousvoulezêtreleplusgrand,soyezleserviteurdetous.»Quandjemesuisdemandécequejedevaisfaireàlasuitedecetteparole,jemesuissouvenudelaréponsedePierreauChrist:«Non,non,vousêtesmonmaîtreet jesuisvotreserviteur,mais,bienentendujesuisvotreserviteurnuméroun.Vousn’allezpasmelaverlespieds.Vousêtesmonmaître.»JésusditàPierre:«Situnemelaissespastelaverlespieds,tun’aurasaucunepartavecmoi».AlorsPierredésirantencoreêtre lenuméroun,dit:«Passeulement lespieds, lave-moiaussi latête,toutemapersonne.Pourlesautres,lave-leurseulementlespieds,maispourmoilave-moitoutentier.Jeveuxtoujoursêtrelenuméroun.»

Il nous est difficile de mettre le Christ au centre, de revêtir l’homme nouveau. Je mesouviensque,lorsdemonnoviciat,notreMaîtredesnovicesm’adit:«Tuesvraimenttropimbu de ta perfection. » J’ai répondu: «Oui, ne sommes-nous pas supposés devenir dessaints,n’est-cepas?»Jedésiraisêtreunsaintcommechacunledésireaussi,j’allaisêtrelenuméroun.Maisc’esttoutuneaffaired’êtrelenuméroun;c’estunefaçonarduedevivre.Quand j’étais postulant, je pensais naturellement que je devrais atteindre la meilleuremoyenneaubâton.J’aitoujoursdétestécelaquandlefrèreAl.Kuntemeierarrivaitaubâton.S’il frappait un bon coup, je devenais triste. S’il manquait son coup, j’étais heureux.Remarquezàquellesorted’attitudecelamène.Noussommesheureuxquanddesgensfontdeserreurs.Nousnepouvonspasprofiterd’êtrecequenoussommesvraiment,parcenousnousdirigeonsversdessituationsoùnousnesommespasnuméroun.Notreimagedenous-mêmes vient en contradiction avec l’image dans laquelle nous sommes en fait. Si nous

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essayons réellement d’imiter le Christ, nous allons faire l’expérience de beaucoup de cescontradictions.

Qu’est-cequec’estquedesebâtirunefausseimagedesoi?SaintJeanmentionnedanssapremièrelettrequ’ilyatroischosesquiconcourentàbâtircettefausseimage.Lapremière,c’est le plaisir que nous cherchons pour nous-mêmes. Nous pensons que nous en avonsbesoin. Notre ego le veut. C’est un plaisir pour lui-même. La deuxième, ce sont lespossessions de toutes sortes que nous considérons comme importantes et sûres. Et latroisième c’est le statut social, le pouvoir, les titres. Tout ce que saint Jean appelle « lemonde ». « Le monde » signifie les cultures sans Dieu ; cela favorise une image de soiegocentrique.Mais une telle image de soi est sans cessemenacée parce que cela prendbeaucoupd’énergiepourlasoutenir.LeCréateurdetoutechoseestleseulpourenprendresoin.Nousavonsapprisdans lecatéchismedenotreenfancequeDieunouscréeetprendsoindenous.Dieuprendsoindecequ’il crée.Si jeme forgeune imagedemoioù jemedéclare lenuméroun,quid’autreprendrasoindemoi?Quid’autreessaierade travaillerpourmegarderlenumérounsinonmoiseul?Parexemple,quandj’enseigneetquejedoiveêtrelemeilleurprofesseurquelesélèvesn’ontjamaiseu,jepeuxtravaillerencorepluspourqu’ilspuissentreconnaîtremacapacitéplutôtquedelesameneràapprendre.Silepremiermotif d’un prédicateur est de voir à ce que les fidèles pensent de lui, sa prédication estfausse.Maintenirce«vieilhomme»est touteun travail ; celademandeunebonnedosed’énergie, et ce n’est pas très drôle. Cependant, si nous vivons à l’image deDieu qui estancréedansnotrenature,Dieunous soutient. Si nous vivonsdans leChrist, nousn’avonsjamais à défendre notre image. Nous n’avons pas à défendre ce que nous sommes. LeSeigneurenprendsoin.

Nousavonsparlédelavieilleimage.Quelleestlanouvelleimage?Lanouvelleimage,c’estcequenoussavonsduChristdontnousvoulonsfairenotrepropreimage.SileChristestunepersonnemiséricordieuse,nous voulons croîtredans cette image.Nousprenons l’attitudeduChristjusqu’àdire:«Oui,jesuisquelqu’undemiséricordieux».SileChristveutsouffrirpour quelqu’un seulement parce qu’il aime cette personne, nous désirons devenir ainsi.Cetteimageestpuissante.Nousn’avonspasàladéfendre.Celanevapassedésintégrerparelle-même. Ce sont seulement les images construites à partir de notre égo que nouscherchonsàmaintenir.

Changer notre ancienne image de soi vient plus par l’expérience que par l’étude. Vouspouvez lire lesÉcrituresetvoiràquoiressembleleChrist.Et,sivousavezmaintenantuneexpériencedeLui,celavavouschangerplusquen’importequelleautrechose.

UnbonexempledecelaestunedeshistoirestiréedulivredeAnthonyDeMello.ThesongoftheBird,P.142-143.Ledialoguesuivantsedérouleentrequelqu’underécemmentconvertiauChristetunaminoncroyant:

«Alors,tut’esconvertiauChrist?»«Oui.»

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«Tudoisalorssavoirbeaucoupdechoseàsonsujet.Dis-moi:dansquelpaysest-ilné?»«Jenesaispas.»

«Àquelâgeest-ilmort?»«Jenesaispas.»

«Combiend’homéliesa-t-ilprononcées?»«Jenesaispas.»

«TuconnaisdonctrèspeudechosestoiquitedisunepersonneconvertieauChrist.»

«Tuasraison;jesuishonteuxdesavoirpeudechoseàsonsujet.Maiscequejesaisc’estceci: Il y a trois ans j’étais ivrogne. J’avais des dettes.Ma famille tombait enmorceaux.Chaque soir, ma femme et mes enfants craignaient mon retour à la maison. Maismaintenant,j’aiarrêtédeboire,nousn’avonsplusdedettes,notremaisonestmaintenantjoyeuse;chaquesoir,mesenfantsonthâtedemerevoiràmonretouràlamaison.C’esttoutcelaqueleChristafaitpourmoi.C’estcequejesaisdemieuxsurleChrist!»

L’expérienceduChristnouschangevraiment,nousapportantquelquechosedeneuf.

LesBéatitudesrésumentceladelamanièresuivante:«Bienheureuxlesmiséricordieux, ilsobtiendrontmiséricorde. » (Mt 5,7). Ils connaissent lamiséricorde en la vivant. Le Christnous a dit que l’accomplissement parfait des commandements, c’est l’amour. Si nousaimons,nousconnaissonsquelquechoseausujetdel’amourdeDieudansnosexpériencesdevie.Sinouspardonnons,nousfaisonsl’expériencedupardonenquelquesorte.Toutceladevient éventuellement une partie de notre propre image. En réalité, ce qui se produitpsychologiquement c’est que notremoi n’est plus centré sur notre propremoi que nousavonsconstruitnous-mêmesmaisplutôtsurcequenoussommesdevenusen«laissantleChristdevenirlecentredenotrevie».RevenonsalorsàlaparoledeJésus:«Celuiquiveutêtremondiscipledoitrenonceràlui-même,prendresacroixetmesuivre»(Mt16,24).Uneimagedesoibaséesur leChristfaitdemoi l’hommenouveau.Nousacceptonscela.Notreobjectif, notre projet de vie est de devenir comme le Christ. Nous ne pouvons vivreharmonieusementavecnotre«ancienmoi»etnotre«nouveaumoi».Nousdevonsfaireunchoix.IlestillusoiredepenserquenouspouvonssuivreleChristdansnotrevieintérieuresansrenonceraumoiquenousavonsconstruitavecnotreegocommecentre.

Noussommestousappelésàrenoncerànotreprojetpersonnelcentrésurnous-mêmes,leprojetquinousaccaparesinousnesuivonspasleChrist.Nousdevonsavoirquelquechosedeplus.LespersonnesquineconnaissentpasleChristnepeuventl’avoirpourmodèle;ellesdoiventdoncbâtirleurpropremodèle.Ellessontvraimentfavoriséessiellesontunefamilleouunecommunautéquilesaidentàbâtiruneimagedesoiquiestvivableetquilesmèneverscequ’ellesdevraientvraimentdevenir.

Pratiquement, dans la vie, toutes les difficultés que nous appelons défauts ou vices sontessentiellementl’affairededévelopperoudedéfendreunefausseimagedesoi.Jésusadûcomposer avec cette réalité chez ses disciples. Dans le récit de saint Luc racontant la

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Dernière Cène, les apôtres se disputent à propos du pouvoir. Lequel d’entre eux estréellement le plus grand ? Lequel a le plus d’influence ? Lequel a le plus de pouvoir ? LaréponsedeJésusaétéquelepouvoirpersonnelnedevraitpasdutoutlesmotiver.Illeurditqu’ilsdoiventadopterl’attitudeduserviteur.Êtreserviteurnedépendpasdelapositionquevousavez.Êtreleserviteurdesautres,c’étaitl’imagequeleChristavaitdelui-même.C’estpourquoi,Ilestvenuetc’estcequ’ilétait.

Nousvoulonstousavoirunsentimentdesécurité.Maisoùletrouvons-nous?Notremoilecherchedans lepouvoir,dans lespossessions,dans lapositionsocialeetainsidesuite.LeChristatrouvélasécuritéenfaisanttellementconfianceàsonPèredesortequ’IlétaittoutàfaitenpaixdansleplanduPère.C’estainsiquedevraitêtrenotreattitude.

NotreFondateurnousalaisséuneméthodeaveclaquellenouspouvonsacquérircertainesvertus ou caractéristiques pour bâtir notre moi à l’image de Jésus. Nous appelons ceprocessus de toute la vie le Système des Vertus ou laMéthode des Vertus, ou encore laMéthode de Direction. Le but de ce processus ou de cette méthode est simplement dechangernotremoi,notrepropreimagedumoipourquenouspuissionsdevenirdeplusenplusl’imageduChrist.Parexemple,sileChristautilisédesmotsexprimantlabontéenversles autres, alors la vertu appelé Silence de la Parole nous dit que nous devons agir de lamêmefaçon.

RevêtirlesdispositionsduChristcommedécritesdanscesvertusdevientunbutconstant.Lavertu appeléeSilencedes Passions (Émotions) nous aide à nous comprendrenous-mêmesquand nous devenons malheureux ou que nous avons le sentiment d’être maltraités ounégligés. Nous essayons d’examiner nos réactions et de décider quelle devrait être notreréponse.NotremodèleesttoujoursleChrist:s’Ils’estdéfendului-même;alorsainsidevons-nousfaire.S’Ilne l’apasfait,alorsonne leferapasnonplus.PournotreFondateur,c’estcelalegrandprojetdenotrevie.Ildit:

«C’est la grandeaffaireà laquellenousavons consacrénotre vie, avec tout son tempsettoutessesforces,nousdégageantdetouteautreaffairepourêtreplusentièrementàcelle-là, pour nous en acquitter plus parfaitement.Appliquons-nous y donc sérieusement et detoutesnosfacultés.Mettons-ytoutl’intérêtdontnoussommescapablesetquenousavonsbiensenti,quemériteunechosesiimportante.(Direction1:647).»

Pour cette raison, nous proclamons que le Christ n’est pas seulement notre modèle, Ildevient réellement notre vie. Notre objectif est la conformité avec Lui, même jusqu’àl’uniformitéde sorteque les actionsdenotre vie, et grâce à nous, celles des autres nousconformentàlaRESSEMBLANCEduChrist.

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CHAPITRE6

LachastetéenvueduRoyaume

J’aimeraismaintenantréfléchiravecvoussurl’undesvœux,l’unedespromessesquenousavonsfaitesenréponselorsdenotreappelcommereligieuxmarianistes.C’estnotrevœudechasteté, notre promesse de vivre d’unemanière qui doitmanifester la relation d’amitiéspécialedeDieuavecleshommes.Jecroisquec’estunevertudontnousavonsgrandbesoinaujourd’hui.Nousvivonsdansuneculturequinecroitpasàlachastetéetquinelametpasen valeur telle que nous la définissons. Cependant, je pense que beaucoup de gens sontsurprisets’interrogentennousvoyantvivrelaviedechasteté.

LePèreChaminade disaitqu’undessignesvisiblesde l’influencedeMarie Immaculée,ensontemps,futque,malgrél’environnementdissoludecetemps-là,elleasuscitéungroupedejeunesgens,hommesetfemmes,quivivaientuneviepubliquedechasteté.Laculturedesontempsn’encourageaitpasunetellemanièredevivreEtlaculturedutempsprésentnesemblepasluiattribuerunegrandevaleur.

Sinousvoulonsêtrevraisfaceànotreappelcommereligieuxetsinousvoulonsvivreuneviede célibat qui soit prophétique, nous devons commencer par quelques définitions claires.L’une des difficultés aujourd’hui c’est l’ambiguïté qui l’entoure. Je ne pense pas que desgens,mêmedesreligieux,nient lecélibat,mais ilsenchangent lesens, ladéfinition.C’estunefaçonsubtiledeledétruireetd’unecertainefaçonc’estpirequel’infidélité.

Commençonsparlesdéfinitionssuivantlesquellesnousprononçonsnosvœuxdereligionetaveclesquellesl’Églisenousdemandedelesvivre.Ellessonttrèssimples.Cesontcellesquenous connaissons depuis longtemps. Notre Règle de Vie (art 19) dit: « Par ce vœu, nousnousengageonsdans le célibat consacrépoury vivre la vertude chastetédans toute sonétendue,en renonçantà lavieconjugaleetà la fondationd’une famille».Bon.Qu’est-ceque cela veut dire ? Le Droit Canon décrit clairement le célibat consacré comme «continencetotaledansunétatdechastetéparfaite».C’esttrèsdifficile,trèsexigeant,maistrèsbeau.

Uneautredéfinitionducélibatvientdel’Écritureelle-mêmedansuntextequiestcontestépar certains commentateursproclamantque leChristneparlepasducélibatdans ce cas,maisseulementdumariageetdudivorce.LeMagistèredel’Église,cependant,interprètecetextecommeuneinvitationduChristàceuxquiveulentvivrelecélibatenvueduRoyaume.C’estdansMatthieu19.Jésuscommenceparparlerdudivorce.PuisilditqueDieuacréélemariage indissoluble. Certains alors lequestionnent: «PourquoidoncMoïse a-t-il prescritdedonnerunactededivorcequandon répudie»? Jésus leurditquec’està causede la

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duretéde leur cœur.«Moïsevousapermisde répudier vos femmes,maisdès l’origine iln’enfutpasainsi».EtJésusajoute:«Quiconquerépudiesafemmeetenépouseuneautrecommetun adultère.»Alors, les disciples lui disent «Si telle est la conditionde l’hommeenverslafemme,iln’estpasexpédientdesemarier.»Ilnousenseignealorsquelquechosesur lemariage: «Tous ne comprennent pas ce langage,mais ceux-là à qui c’est donné.»Pourêtrefidèlesdans lemariage, lesépouxontbesoinde lagrâcedusacrement.Et Jésusenchaîne:«Ilya,eneffet,deseunuquesquisontnésainsiduseindeleurmère,ilyadeseunuquesqui lesontdevenuspar l’actiondeshommes,et ilyadeseunuquesquisesonteux-mêmes rendus tels à cause du Royaume des cieux. Qui peut comprendre, qu’ilcomprenne.»C’estuneinvitationàquiconquepeutl’accepter.

Par définition un eunuque est simplement quelqu’un qui n’est pas capable d’activitéssexuelles.Certainssontnésainsi;ilsn’ontpasdechoix.Certainslesontdevenusparl’actiond’autrespersonnes.C’étaitunepratiquecommuneautempsdeJésus,enparticulierdanslescours royales. Des hommes étaient rendus eunuques pour être sûr qu’ils allaient bien secomporter,parexemple l’eunuquequePhilippeabaptisé.On l’avait rendueunuquepourqu’ilserveàlacour.Iln’avaitpaseulechoixluinonplus.L’Écriturenousditqu’ilademandéà Philippe si ceux à qui on refusait une descendance pouvaient encore être considéréscommeproductifs. Les eunuquesdans leRoyaumedes cieuxportent des fruits. C’est unebonnenouvelle. Puis il y a ceux qui choisissent cette situationpour servir le Royaumedecette façon et le font d’une manière visible. Quand Jésus disait: «Comprenne qui peutcomprendre», il offrait une invitation à ceuxqui veulent sedonner auRoyaumede cettemanièreparticulière.Lecélibatestunedesmanièresdelefaireetceladevientunsigneclairpourlesautres.C’estcequel’Égliseenseigne.

Un résuméde l’enseignementde l’Égliseconcernant l’usagede l’activité sexuelleestaussibiensimple:concernantlemariage,iln’yapasd’activitésexuelleendehorsdumariage;ence qui concerne le célibat l’enseignement est ceci: pas d’activité sexuelle du tout. C’esttoujoursl’enseignementdel’Église.Maisdansnotreculture,cetenseignementn’estpasmisenvaleur,etl’enseigneraujourd’huidemandebeaucoupdecourage;c’estpresqu’unesortedemartyre.

C’estunenseignementclairetexigeant.Quelestsonbut?Regardonscequiarrivequandnousvivonsvraimentlecélibat.Ilfautregarderl’ÉglisecommeleCorpsduChrist,commelaprésencephysiqueduChristdanslemonde.Cecorpsabesoind’ungroupedemembresquivivent le célibat. L’intention première dans la relation que Dieu a choisie d’avoir avecchacun de nous individuellement, c’est de communiquer avec chacun d’unemanière trèsintime.C’estledésirdeDieu.Dieuprendlenomd’épouxdansl’Écriturecommeuneimagepour l’exprimer. Dans le premier chapitre d’Osée, Dieu demande à Osée de vivre cetteintimitépourmontrercommentIldésireintensémentêtreunavecnousetpournousd’êtreunavecLui.Jésusaussiemploiel’imagedel’époux:«Lescompagnonsdel’épouxpeuvent-ilsjeûnerpendantquel’épouxestaveceux»?Mc2,19.

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Queveutdirevivrecetteimageoucesymbole?LemariageconcrétiselarelationqueDieudésire avoir avec nous sur terre. Le célibat exprime une alliance d’amour avec Dieu, unamour d’époux avec Dieu, amour qui se veut éternel. Le mariage aussi est une allianced’amour.Lemarietlafemmesedonnentl’unàl’autreavectoutcequ’ilsont.Lemariageestuneallianced’amourdedeuxpersonnesenprésencedeDieu.Lesacrementdemariageestune garantie que Dieu est présent. Les époux s’aiment l’un l’autre en sa présence. Unepersonne qui vit le célibat entre dans une alliance d’amour avec Dieu directement, sanspartenairehumain.C’estcetterelationquiestappeléeàdurerpourtoujours.C’estcelaquidoitêtresymbolisédanslecélibat.

Dans l’Évangile de Luc (20, 27-37) Jésus, en discutant avec les Sadducéens, parle de cetamour.Ladiscussionneportaitpassurlecélibat.C’étaitausujetdelarésurrection,àsavoirsilemariagecontinueaprèslamort.S’iln’yapasdenouvelleviealorsilnepeutpasyavoirderelationquicontinue.Jésusfutalorsconfrontéauproblèmeinsolubledeseptfrèresquis’étaientmariéssuccessivementaveclamêmefemme.Lesdisciplesvoulaientsavoircequiallait arriver dans l’autre vie. Y aurait-il une lutte impitoyable pour cette femme ? Jésusrépondit:«Lesfilsdecemonde-ciprennentfemmeoumari.Maisceuxquiaurontétéjugésdignes d’avoir part à ce monde-là et à la résurrection d’entre les morts ne prennent nifemmenimari;aussibiennepeuvent-ilsplusmourir.»LeurrelationseratellementdirecteavecDieuqu’elledureraéternellement.Encesensilssontcommelesanges.EnfantsdelaRésurrection, ils sont enfants deDieu. Le point ici, c’est la relation directe queDieu veutéventuellementavoiravecchacunetqu’ilauraavecchacunauciel.Ainsi,lemariageestunealliance, un donmutuel ; il est total et inclut l’activité sexuelle. Il exclut toutes les autresrelations similaireset il estpermanent jusqu’à lamort.Unealliancedans le célibatestundonmutueldirectemententreDieuetnous.C’estcequenouscroyons.Nouscroyonsqu’ilest possible d’avoir cette relation avec Dieu maintenant. C’est ce qui fait du célibat untémoignage.

Le célibat est difficile à accepter. On ne peut pas reprocher à quelqu’un de ne pas êtrecapable de le comprendre car cela vient profondément de l’Esprit. Plusieurs pensentsincèrementqu’onnepeutpasavoirunetellerelationavecDieusurlaterre.Alors,lecélibatn’apasdesenspoureux.Maisnous,lesreligieux,nouscroyonsenundonmutuelentreDieuetnous.Nousprofessonsquecedonesttotal,qu’ilexcluttouteactivitésexuelleetquec’estun don pour toute la vie. Puisque l’Amour de Dieu transcende et sublime la sexualité, lecélibatsupposel’absencedetouteactivitésexuelle;ildevientunsacrificed’amour.Mêmelesgensmariésfontceladanscertainscas.S’ilssontfidèlesl’unàl’autre,ilsfontcesacrificeparrapportàd’autrespersonnestrèssouvent.Etc’estunsacrificed’amour.Lesépouxvousdirontcequecelasignifiepoureuxquandilsserendentcomptequeleurpartenairefaitcesacrificepoureux.Ce sacrificeestungrandacted’amour.Nous faisons lemêmesacrificepour Dieu. Et si nous sommes réellement en contact avec Dieu dans notre situation decélibataires, nous faisons l’expérience de la réalité de Dieu. Notre amour demeure bien

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humain tout en atteignantDieu enprofondeur à travers le sacrifice du célibat.Dieunousrépondparunamourencoreplusgrand.

OnrapportequelePapeJeanXXIIIaététémoindugrandnombredeprêtresquiontdésertéleurministèrepour choisir lemariageetque,quand il voyaitdenombreuxprêtres lutterpourêtrefidèlesàleurcélibat,ildisait:«Moncœuraimeraitpermettreauxprêtresdesemarier.Mais jenepeuxpasvolerauCorpsduChrist laprécieuse relationquesesprêtresviventdanslecélibat.»Cen’estpastantunargumentcontrelemariagedesprêtresqu’unemiseenvaleurde l’importanceaccordéeàungrandnombredeprêtresetdereligieuxquiviventlecélibat.Jésusabénilemariageetenafaitunsacrementmaisilachoisilui-mêmede vivre le célibatpour révéler sonamour intimeetprofondqui estdirectementpossibleavecSonPère.Parmi lesquelquesmoments lesplus touchantsde laviede Jésusonpeutnoter ses nuits seul sur la montagne. Que fait-il là ? Avec qui communique-t-il sur lamontagne? Ilestseulhumainementparlant.Maisd’après lesÉcritures ilestclairqu’ilestdans une présence intime avec Son Père. Et Jésus indique que ce pourrait être lamêmechosepourcertainsdansl’Église.Ilyadeseunuquesquiacceptentcetteformedeviepourl’amourduRoyaume.C’estcequenousvoulonsnousaussi. Jepensequechacundenousadmettra très honnêtement que nous ne pouvons pas vivre le célibat sans une grâcespéciale. Nous le savons en examinant notre propre vie. La grâce est indispensable,maiscettegrâcec’estànousdelademander.Unautrepointconcernela«valeurdesigne»ducélibat.Lesgensontgénéralementbesoindetémoinsquiprouventqu’unerelationdirecteavecDieuestpossibleetgratifiante,qu’ellenenous rendpas immaturesetmalheureux. Plusieurspersonnes croientque cen’estpaspossibledevivresansactivitésexuelle.Onpeutcomprendre leurattitude.Plusieursparminousonteuàlutteretcontinuentdelutterpourvivreleurcélibat.aislesmêmespersonnesquinecroientpasaucélibatmanquentd’unecertaineexpériencedeDieuquisublimelasexualitéetrendlesactivitéssexuellesnonnécessaires.Aupire,unetelle incrédulité devient un obstacle pour faire l’expérience de l’intimité de Dieu danscertaines situations. Nous voyons cette intimité dans le célibat vécu par le Christ. NouscroyonsqueleChristnousrendaussicapablesdecetteexpérience.MaisnousavonsbesoindelaprésenceduChristetdesonaide.Nousavonsaussibesoindelaprésenceetdel’aidedeMarie.Nousvoyonsicilelienétroitentrelecélibatetlaprière.Noussavonsquesinousvoulonsvivreuneviedecélibatnousdevonsêtredesgensdeprière.Pendant longtemps j’ai pensé que devenir une personne de prière voulait dire que nousdevionspriersouventpourdemanderdel’aide.Maisjepensequ’ilyaiciquelquechosedeplusprofond.ÀmoinsquenousnecommuniquionsavecDieuenprofondeuretàunniveauintime,nousn’avonsvraimentriendespécialàtémoigner.C’estpourquoinousdevonsprierdefaçonàêtreenintimeunionavecDieu.NotreviedeprièreaffirmequeDieuestréeletque nous pouvons être avec Lui. Nous pouvons communiquer avec Lui. La prière estnécessairenonseulementpourobtenirdesgrâcesmaisaussipourvivreunerelationvraieavecDieu, et le célibat nous dit que c’est possible. Le célibat vécu à partir d’une intimitéavecDieuestuntémoignagemaisilyaplus.C’estunencouragement.Ilmontreauxautresque l’intimitéavecDieuestpossibleetbonne.Lemondeabesoindecetémoignageetdecetencouragement.

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Pourqu’unsignesoitefficace,certainsélémentsdoiventêtreprésents.Lepremierélémentc’est qu’il doit être clair. Nous ne pouvons pas être ambigus dans notre conduite si nousvoulonsquenotrecélibatservedesigne.NousmontronsainsiqueDieuestprésentetquenouspouvonscomptersurlui.LesecondélémentestqueDieuestprésent.Notrecrédibilitécomme groupe dans l’Église aujourd’hui est en souffrance. Il y a tellement d’exemplespublicsd’infidélitésetdepersonnesqui,pouruntemps,ontprotestédeleurinnocencepourensuites’apercevoirquecen’étaitpasvrai.Pourquenotrecélibatsignifiequelquechose,lesgensdoiventpouvoirnousconnaîtreetnousfaireconfiance.C’estcelalemondedanslequelnousvivons.Ilyadel’infidélitéetnouslesavons.Nousdevonsnous-mêmesyfaireface.Ilexistebeaucoupd’ambiguïté.Dansledomainedel’homosexualité,parexemple,lachoselaplusdifficileàlaquellenousfaisonsfacec’estl’ambiguïté.J’ailuunarticlerécemmentdesœurJeannineGrammick.Elleesttrès impliquéedansdescasdereligieuxhomosexuelsetdereligieuseslesbiennes.Elleditque:«lesreligieuxn’acceptentplusladéfinitionducélibaten lien avec un acte physique». Elle a changé la définition. Elle l’a défini en termes derelationssignificativesetproductives.Maisséparerladéfinitionducélibatdel’actephysiquec’estcommesionséparaitlapauvretédel’argentoudesbiensmatériels.Unefoisquevousfaites cette séparation, la définitiondevientplutôt subjective. Il y a, bien sûr, toujoursunélémentsubjectifmaisiln’apaslemêmeimpactcommetémoignage.Lebutducélibatn’estpasdedétruirelabeautédelasexualitémaisplutôtdel’embellir.Eneffet, Chesterton a dit un jour: «C’est un très beau témoignage dans l’Église et il trèsétonnant, car quand la fidélité dans le mariage est très respectée, le célibat est trèsrespecté.Etlàoùlecélibatestvraimentvéculàaussilemariageestplusrespecté.»Ilssontcomplémentaires.IlsappartiennentaumêmeCorpsduChrist.C’estpourquoiils’agitd’unequestion de choix. Dans son enseignement Jésus est très clair: «Comprenne qui peutcomprendre».C’estunchoix.C’estuneinvitation.C’estquelquechosequinousestoffert.Le célibat est choisi pour indiquer la primauté de l’amour de Dieu dans notre vie. Unchangementdansladéfinitionn’enfaitplusunsigne.Je pense que le célibat montre aussi quelque chose d’autre. Si nous vivons le célibat enreligieux joyeux, je pense que celamanifeste la très grande bonté de Dieu. Cette fidélitéunilatéraledel’amourdeDieupournoussereflètedansunservicejoyeuxetgénéreux.C’estpourquoilecélibatestsouventliéauservice.Uncélibatégoïsteneditpasgrand-choseauxgens. Quelqu’un qui est généreux en servant et qui est heureux en le faisant assure untémoignagevrau,parcequ’enunsensunepersonneprivéederelationssexuellesnedevraitpasêtresiheureuse.Unservicejoyeuxesttoujoursuntémoignagefort.Lecélibatdonneeneffetàunepersonneuneplusgrandelibertépourleservicedesautres.Les personnes qui vivent le célibat doivent se préoccuper des choses du Royaume. Unconsacré qui occupe beaucoup de son temps libre à s’amuser ne donne pas un grandtémoignage.Sinotreamusementdevientdominantnousruinonsnotreproprecrédibilité.Ilyaquelquesannées,MèreTeresadeCalcuttaparlaitàungroupenombreuxdeprêtresàRome.Elledisait:«Vouslesprêtres,vousdevezêtredeshommestrèsoccupés.Vousdevezêtre tout le tempsoccupés,maispasàvosaffairespersonnelles.Vousdevezêtreoccupéscommeprêtres,occupésauxchosesdeDieu.Nousnevoulonspasquevoussoyezoccupésàautrechosequecela.Nossœursn’ontpasbesoindevouspourprendresoindespauvres.

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Nous nous en occupons. Mais nous avons besoin de vous parmi nous comme prêtresoccupéstoutletempsmaispasàvosaffairespersonnelles.Vousdevezêtreoccupéscommeprêtres.Vousdevriezêtredesprêtresàplein temps».Dans sapropre façonde faire,ellenousmetaudéfi.C’estunsigneencourageantpourlemondedevoirdesgensquiontplusdejoieàservirlesautresqu’àprendresoind’eux-mêmes.C’estcommecelaqueDieunousaime.Arrivonsaupointfinal.Nousavonsbesoindebeaucoupd’aidepourvivrelecélibat.Nouslesavons. Nous avons besoin de l’aide de Dieu et de notre SainteMère. Nous avons aussibesoindel’aidelesunsdesautres.Cequej’aiditdelapauvretés’appliqueaussiaucélibat.Lesdisciplesontditdelapauvreté:c’esttellementdifficile…Jésusleurdisait:«Envéritéjevous le dis, il seradifficile à un riched’entrer dans leRoyaumedesCieux.Oui, je vous lerépète,ilestplusfacileàunchameaudepasserparuntroud’aiguillequ’àunriched’entrerdans le Royaume des Cieux.». Ils dirent alors: «Qui donc peut être sauvé» ? Jésusrépondit:«Pourleshommesc’estimpossible,maispourDieutoutestpossible»(Mt19,24-26).NotreRègledeVie,nousdonnequatrecourtesdirectivesetàlalumièredecequenousavonsdit,jepensequevouspouvezvoirtoutelasagessequis’ycache.Article20:«L’unionàDieudanslaprière,laviefraternelle,lavigilanceetlamaîtrisedesoirendentpossibleunechasteté franche et joyeuse ». C’est notre objectif et ce sont nos quatre solides lignesdirectrices.Jeveuxterminerensoulignantceque jecroisêtreunfait,et j’ycrois trèssincèrement. Jecroisqu’ilyade la joieauciel,queDieuest réellementheureuxdenousvoir réalisersonplandesalut,parcequ’ungroupeparticulierd’hommesetdefemmesembrassentlecélibatety sont fidèlesendépitdesdifficultésqu’ils rencontrent. Si c’est celanotrevie, sinoussommes fidèles, en témoinsdignesde confiance il doit y avoir de la joiedans le cœurdeDieuetdesaSainteMère.

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CHAPITRE7

Guérisonetpardon

Laréflexionquejevoudraispartageravecvousdanscetteconférence,tourneautourdelaguérison et du pardon. Si on veut, cette conférence peut être considérée comme unepréparationausacrementdelaréconciliation.Ilyadeuxsortesdefardeauxdansnosviesdont on ne peut se débarrasser par soi-même. Il y en a vraiment plusieurs,mais je vaisréfléchirsurdeuxenparticulier.Lepremierfardeauest laculpabilité. Sinousnoussentonssincèrementcoupables, iln’yaaucune façon de se débarrasser de ce sentiment. Cela peut provenir de quelque chosequ’onavolontairementcauséouçapeutêtreuneculpabilitéqu’onappelleexistentielle-lerésultatd’unaccidentoudecirconstances. Laculpabilitéveutsimplementdireque jemesensresponsabledequelquedommage,blessureoumanquement.Jeressensquej’ensuislacauseetqu’iln’yaaucunmoyenderevenirenarrière.Enêtrelacauseneveutpasdirequej’aiagidélibérément.Ilyaunesortedeculpabilitéquelespsychologuesnomment«existentielle».Parexemple,sivousconduisezunevoitureetqu’unpetitgarçonsurgissedevantvotrevoiture,vousnepouvezpaslevoiretalorsvousleheurtez.Vousnepouviezpasprévenirl’accidentmaisvousvoussentezcoupable.Lesgensvousdiraientquecen’estpasvotrefautemaisvousvoussentirieztoutdemêmecoupable.Devons-nousvivre toutenotrevieaveccetteculpabilité? Commentsedébarrasserdecesentiment?Nousexpérimentonstouscesformesdeculpabilité.Une autre forme de culpabilité provient des fois où nous faisons délibérément quelquechosedeblessantsoitàdemiintentionnellementoupeut-êtreavecpleineintention.Parlasuite nous le regrettons mais nous continuons de nous sentir coupables. Cela est unevéritableculpabilitémoraleetnousnepouvonstoutsimplementpasnousendéfaire.Ladeuxièmesortedefardeauprovientdesblessuresvenantdesautres.Celaestaussitrèsvrai.Ilyadesblessuresphysiques;nouspouvonsgrandiràpartird’elles.Ilyadesblessurespsychiques. Par exemple, notre estime de soi est blessé parce qu’on nous ignorevolontairementouparcequ’onestcritiquéfaussementouinjustement.Celablesseetnoussavonsquenoussommesblessés.Parfoisnouspensonsquenousnenousserionspassentisblessés sinousavionsétéunepersonneassez forte. Mais cen’estpas le cas; celablessetoujours.Nousavonsbeaucoupdedifficultéànousdébarrasseraussidecesblessures.Alorsquefaire?Grâce à Dieu, il y a de bonnes nouvelles concernant la culpabilité et les blessures. Laculpabilité peut être enlevée par quelqu’un qui nous pardonne. Je vais vous donner unexempled’uneculpabilitéexistentielledontj’aisouffertmoi-mêmeàDayton,Ohio.Ceuxdevousquiétaientdanslesenvironsen1950sesouviendrontquenousavionsungrosprojet

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pourconstruireungarageetuncentredemécanique.Nousconstruisionscettebâtisseavecdesblocsdebétonquenousfaisionsnous-mêmes.J’aifaitpartiedel’équipedemalaxagependant un certain temps. Durant la deuxième année, j’étais supposé enseigner à lanouvelleéquipecommentfairedesblocsdebéton.PaulUbinger,quiestdécédéen1976,étaitundébutantetj’étaiscenséluimontrercommentmalaxerlebéton.Nousnettoyionstoujourslemalaxeuràbétonavecunebinetteouunbâtonpouréviterquenosmainssoientprises par les pales du malaxeur. Une fois que je nettoyais le malaxeur, j’ai accrochél’interrupteur etmis lemoteur enmarche aumêmemoment que Paulmettait sesmainsdedanspour lenettoyermanuellement. Lespalesdumalaxeur lui ontpresque coupé lesmains. J’ai senti une horrible culpabilité. Que pouvais-je faire ? Je ne pouvais pas medébarrassermoi-mêmedeceterriblesentiment.QuandPaulestrevenudechezlemédecin,unedespremièreschosesqu’ilafaitesaétédevenirmevoiretdemedire:«Jeneveuxpasque tu te sentes coupable. Je vais bienm’en remettre et c’était vraimentma faute. » Jesavais que ce n’était pas sa fauteà lui seul. J’avaisi démarré le moteur. J’ai dit: « Paul,j’apprécievraimentcequetufais.»Ilrépondit:«Jeneveuxpasquetupasseslerestedetavieentesentantcoupable.Enfait,s’ilyaquelquechoseàpardonner,c’estpardonné.»Jenepeuxpasvousdirecequecelam’afaitendedans.C’étaitunvraipardonetilnécessaire,mêmes’iln’yavaitpaseudefaute.Jesentaiscommesi jedevaisquelquechoseàPauletquejedevaisleluirendredequelquefaçon.Quandjeluiaiexprimécela,ilrépondit:«S’ilyaeuunedette,elleestannulée.»Encoreunefois,c’estcelaunvraipardon.Pasdedette.Quandnousnoussentonscoupables,nousressentonsquenousdevonsquelquechose.Silapersonnedit: «Non, il n’y a pas de dette » nous nous sentons pardonnés. Quandnoussommescoupables,quelqu’und’autrepeutenleverlaculpabilitéparlepardon.C’estcequeNotreSeigneuratentédenousmontrersisouvent.IlyadesendroitsdanslesÉcrituresausujetdupardonquienparlentcommed’unedetteàannuler.LaparaboledeMt18racontequ’unepersonnedevait10000talentsetquesonmaîtrel’enaacquitté.Lesgensenchargedesfinancessaventcequecelasignifiequanduncréancierleurditqueleurdetteesteffacée. C’estcelalepardon. ParfoisDieuestprêtàpardonneret ilnousattendmaisnousessayonstoujoursdenousdébarrassernous-mêmesdenotreculpabilité.Parexemple,nous disons: « Je ne l’ai pas fait par exprès » ou: « Ce n’est pas dema faute ». Il y aplusieursfaçonsd’essayerdenousdébarrasserdenotreculpabilitépersonnelle.C’est une tentation naturelle d’essayer de voir notre culpabilité de telle façon que nousn’ayonspasbesoindepardon.C’estlesujetd’uneautrepuissanteparabolerapportéeparLucauchapitre7.Quand Jésusétaità tableavecdespharisiens,une femmequiavaitétéunepécheressepubliqueentraetluilavalespieds,lesséchaavecsescheveuxetlesoignitd’huile.LespharisiensdisaientquesiJésusavaitsuquielleétait,ilnel’auraitpaslaisséeletoucher.D’oùvientcetteréaction?Celavientd’unementalitéquinecroitpasaupardon.Onnecroitpasquel’ondoivepardonnerniquelepardonsoitnécessaire.JésusréponditàSimonparuneparabolequiillustrequelepardonestnécessaireetqu’ilestapplicable;ilestpossible. Quand on vit de tellemanière qu’on n’ait pas besoin de pardon, on ne peut sedéfaire de la culpabilité. Jésus raconta à Simon l’histoire du créancier qui avait deuxdébiteurs. L’un devait 5 000 et l’autre 50. Il fit grâce aux deux car ni un ni l’autre nepouvaient rembourser. Alors lequel des deux serait le plus reconnaissant au créancier ?Simonrépondit:«Celuiàquionn’alepluspardonné».

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Le pardon libère en nous une grande capacité d’aimer. Une personne qui n’a jamais étépardonnéeaurabeaucoupdedifficultéàaimer.C’étaitprécisémentunedesattitudesquen’avaitpasSimon. Ils’auto-justifiaitmais ilétait incapabled’aimer. Iln’avaitpasbesoindepardonetl’amourdemeuraitmortdanssoncœur.Laquestiondupardonestextrêmementimportante pour nous. Nous sommes pardonnés. Mais nous devons recevoir ce pardonconcrètement. Quand la femme vint laver les pieds de Jésus, elle savait qu’elle avait étépardonnée;ellel’avaitaccueilli.Luilaversespiedsétaitpourellesafaçondeluimanifestersonamour.Parfois nous vivons avec beaucoup de regrets, même après avoir été pardonnés. Nouspouvonstoujoursentretenirduregretmêmeaprèsavoirchangédevieets’êtreconverti.Ilpeutyavoirunetendanceàvouloirretournerdanslepassépoureffacercequ’onafaitdemal.Dieunenousdemande jamaisdefairecela.Cequinousestdemandédefairequandnous sommes pardonnés n’est pas le retour en arrière pour revivre notre vie encore etencore,maisd’allerplusloinavecamour,gratitudeetjoie.Le livre de Joël est basé sur l’imagedupardon. Les deuxpremiers chapitres de Joël nousdécriventcommentlessauterellesetautresinsectesnuisiblessontvenusetontdécimélesrécoltes d’Israël pour punir les gens de leurs nombreux péchés. La destruction par lessauterellesfutunsignedeleurculpabilité.Laculpabiliténousronge.EtDieudit:«Sivousvousrepentez,toutcelavachanger.»Lechapitre2,25-27expliquecommentfonctionnelarepentance. Dieu dit qu’après qu’Israël se soit repenti et ait changé, que lui, Dieu,compenseraitpour lesannéesdévoréespar les sauterelleset les criquets. Ildit:« Jevaisrestaurercesannéespourtoiettuvivrasdorénavantavecgratitudeetamour.Maintenant,fais demêmepour les autres en les servant. Ne retournepas en arrière pour refaire leschoses. Jem’occuperaidecela.»C’estcelalevraipardon. Dieudit:«Ettusaurasquejesuisaumilieud’Israël,quejesuistonDieuetqu’iln’yenapasd’autre.Monpeupleneseraplusjamaisdéçu.»(Joël2,27)Quellegrandepromesse!Peuimportecequenousavonsfait,nousn’avonspasbesoinderetournerdanslepassépourréparer.Nousn’avonsqu’àaimeràpartirdecemomentà lamanièredelafemmedel’évangile.Cequimevientàl’espritestuneautrehistoireédifianteàproposdecequiestarrivéànotreécole à Covington au Kentucky. Le père Georges Cerniglia enseignait là-bas quand c’estarrivé.C’étaitl’hiveretleverglasvenaitdecommencer.Lesfrèresdécidèrentderenvoyerlesélèvesàlamaisoncarlesruesétaientdevenuesglacéesetdangereuses.Ilyavaitdeuxjumeauxdusecondairequiretournaientà lamaisonenmarchantsur letrottoir. Unautreélève s’en retournait en conduisant dans la rue où ilsmarchaient. Sa voiture dérapa, ilheurta les jumeaux et les tua tous les deux. Durant cette même soirée, le père de cesjumeauxvintà lamaisonde l’élève,sonnaà laporteetentra.Vouspouvezvous imaginercombiencetélèvesesentaitcoupable.Lepèreditsimplement:«Jesuisjustevenutedirequ’en cette soirée c’est pardonnée. » C’est cela le vrai pardon. C’est un geste vrai demiséricorde.Maintenant,jeveuxparlerdecequiarrivelorsquenousnoussentonsblessésparlesautres.Que faisons-nous avec cela ? La vengeance est notre réaction naturelle. Mais nous ne

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pouvonspasnousdébarrasservraimentd’uneblessureparlavengeance.Pasplusquenouspouvonssimplement«oublier».Enrevanche,nouspouvonsfairequelquechoseaveccela.NouspouvonsdirecequeLeChristaditsisouvent ;sinousvoulonsvraimentnoussentirlibres de toute culpabilité à l’intérieur, nous devons apprendre à pardonner aux autres.Quandnoussommesblessés,habituellementilyadelaculpabilitédelapartdequelqu’un.Sinoussommesblessés,cen’estpasseulementparcequ’onsel’imagine.Commentserons-nousguéris? LeChristnousditqu’unedes conditionsessentiellespourêtreguériestdepardonnerauxgensquinousontblessés.Jenesaispassinousréalisonscequeçasignifiepour nous de pardonner aux autres. Quand nous pardonnons à la personne qui nous ablessés, il y a deux choses qui se produisent. Enlever la culpabilité d’une autrepersonnecommenceaussiàguérirnotrepropreblessure.Pardonnerauxautresrelâcheennousunevéritablepuissancedeguérison.Notreblessureestreliéeàlaculpabilitéd’unautre.Enlevernotreculpabilitécommencelaguérisondelablessure.Laguérisonn’esthabituellementpasinstantanéemaissivouscommencezleprocessusetquevouslelaissezfairesoncours,vousserezguéris.Commentsaurons-nousquenoussommesguéris?Noussavonsquenoussommesguérissienrepensantàl’incidentquiacausélablessureestmaintenantdevenusourcedejoie.Noussommesguérisquandnouspouvonsdire:«Oui,Seigneur,celam’aréellementblesséetcefutdifficiledepasseràtravers.Maisjepeuxvoirquebeaucoupdebonenestressorti.Etjete remercieavec joie.»Alorsnous savonsquenous sommesguéris.Aussi longtempsquenousrevenonssuruneblessureetquenotreréponseest:«Cettepersonnemedoitquelquechose»notreguérisonn’estpasencorecomplètementachevée.C’estcelanotrebarème.Lechemin de la guérison passe par le pardon. Si nous ne faisons qu’offrir notre blessurecommeunmartyr,sanspardonner,nousnepouvonspasguérir.C’estunetrèsbonneexpériencepournousdesavoircombienilestdifficiledepardonnercarnous pouvons commencer à apprécier le pardon que Dieu nous donne. Parfois, nousprenonsplutôtàlalégèrequeJésusnousaitpardonnéetqu’ilsoitmortpournous.Sic’estdifficile pour nous de pardonner les choses qui nous ont blessées, des choses qui sonthabituellementmoinspiresqueceque leChristaeuàpardonner,alorsnouscomprenonsun petit peu ce que cela a pu signifier pour lui. Mais le Christ a pardonné parce que lamiséricordedeDieuétaitàl’œuvre.L’Églisereconnaîtlagrandeurdupardondansl’oraisondu4ièmedimanchedutempsordinaire:«Seigneur,taToute-puissance,tapuissanceinfinie,serévèle leplus lorsquetupardonnes…» Jepensequenouspouvonsdiresanshésitationquelaplusgrandechose,laplusdifficile,laplusénergiquequeleChristaitfaitefutdenouspardonner, de prendre sur lui nos blessures, nos péchés, nos culpabilités. Le vrai pardonsignifiequejeprendstadettesurmoi-même.Enréalité,Jésusaprisnotredette,desortequenousn’ayonsplusaucunedette. Celaestunetrèspuissantegrâce.Demanderpardonestuntrèsgrandactededénuement.Pardonner,mêmesicelanenousestpasdemandé,estungrandgestedemiséricordeetcelachangelaréalitédumondeplusquetouteautrechose. C’estundesmessagesquenotrepape(Jean-Paul II)essaiededonneraumondeàproposdelaguerreetdelajustice.Aucœurdecesréalités,toutestmiséricordeetpardon.Lisez attentivement ce qu’il dit au sujet de la paix, de la justice et de la guerre. Enconclusion, il dit: « Nous ne pourrons jamais accomplir la paix et la justice sauf si nouspouvonspratiquerlamiséricorde,lepardonetlacompassion».Lepardonfaçonnevraimentlecœurdelapersonne.C’estunepuissanteforceenaction.

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NotreDieunous faitmiséricorde à travers le pardonet la guérison. C’est unedes raisonspourquoinousavonspeut-êtreperduquelquechosedansnotreexpériencedelaconfession.Jepensequ’ilestfaciledecomprendrepourquoilesgensneprofitentplusdusacrementdelaréconciliationouleviventsipeusouvent.Quandilslevivent,ilsnefontpasl’expérienced’êtrepardonnés; ilsn’expérimententpasque lamiséricordedeDieu les toucheetqu’ilssontguéris.Cequel’Égliseessaiederameneraujourd’huiestl’expériencedelamiséricordedeDieudansnoscœurs.Cen’estpasdutoutquenoussoyonsobligésd’allernousconfesserparcequec’estlaloi.NousdevonsyallerpourexpérimenterlamiséricordedeDieu.Nousavonsbesoind’êtreguérisdenosblessures. Laconfessionest lesacrementfaitpourcela.Peut-êtrequedansnotrepropreapprochedusacrement,nousavonsbesoindenousplacernous-mêmes dans une attitude de désirer recevoir la miséricorde de Dieu. Les prêtresdoiventadministrerlesacrementdetellefaçonquenoustouchelagrandemiséricordieusedeDieu.

CHAPITRE8

ChacundenousauneMission

Une des choses dont nous parlons souvent entre nous et que nous disons aux autres estque, commemembres de la Société deMaire, nous sommesmissionnaires par vocation.Quelquesoit le lieuoùnoussommesou la tâcheparticulièrequinousestassignée,noussommestousmissionnaires.NotreFondateurnousa laisséunetrèsbelle imagedecequec’estd’êtremissionnaire.Danslesnotesd’undespremiersmaîtresdenovicesdelaSociété,nous y lisons que le père Chaminade décrivait le missionnaire comme quelqu'un envoyétravaillerlàoùleChristn’estpasencoreassezconnu,aiméouservi.Ladistanceparcouruegéographiquement peut être très courte. Notre Fondateur disait: «Parfois, quand nouspensons à des missionnaires, nous pensons à des personnes qui vont dans des paysétrangers,etquecesonteuxlesmissionnaires.MaislemissionnaireestaussiunepersonnequivaoùleChristn’estpasencoreaccepté,connu,aiméouservi.»Cetendroitpeutêtrelecœurmêmedevosproches,etquelquesfois,larouteverslecœurdevosprochespeutêtreplus longueque celle vers unpays étranger. Voilà notre conceptiondumissionnaire.DirequenoussommesappelésàêtreMarianistes,c’estdirequenousavonsunemission,unbut,quelquechoseàaccomplirauprèsdenosproches.

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L'objectif denotremissionest formulé à l’article 71denotreRègledeVie auChapitreV,CommunautéetMission.«Notreobjectifpremierest l'éducationde lafoi.» Cela impliqueque nous devons aider chaque personne avec qui nous traitons à grandir dans la foi, luiaidantàcroirequeJésusestvéritablementleSeigneuretqu’Ilagitparminous.Voilànotremission.Alors,peu importenotreengagement, ildoitcontribuerd'unecertainemanièreàcette mission. C’est ainsi que nous pouvons résumer notre mission en disant que notreobjectifpremierestl'éducationdelafoi.

Maintenant,concentrons-nousunpeuplussurlamissionpersonnelledechacunàl’intérieurdelaplusgrandemissiondelaSociété.Nousavonstousetchacununemissionpersonnelle;c’estlàuneconvictionprimordialequifaittouteladifférenceentreêtreounepasêtreici.Selon que vous faites votre part ou non, les choses sont différentes. Personne d’autren’accompliravotremissionpersonnelleàvotreplace.Votremissionpersonnelleesttoujourscompatibleavec lamissiongénérale,etelle contribueà cettemissiongénérale,enautantqu’elleestbienaccomplie.

Voyonsmaintenantdeplusprèslamissionpersonnellequechacundenousaàl'intérieurdelamission plus large de la Société. Chacun de nous a unemission personnelle qui lui estpropre.Ceciestuneconsidération importante,parcequedanscecas ilest indifférentquevoussoyezicioulà-bas.Cequifaitunedifférencec'estquevouscontribuiezpourvotrepartouquevousnelefassiezpas.Personned'autrenepeutremplirvotremissionpropre.Votremissionpropreesttoujourscompatibleaveclamissiongénérale,etsielleestbienremplie,ellecontribueàlamissiongénérale.

Nouspourrionsicinousservirdel’imagedesaintPauletdesonenseignementàproposduCorpsduChristetdesdonsparticuliersetlesmissionsdechacunàl’intérieurdececorps.On y trouve deux références précisément où Saint Paul parle du rôle que chacun doitaccompliroududonqu’ilaàexercer.Selonnotrespiritualitémarianiste,nouspouvonsdirequenousavonsàvivreuncertainmystèrede JésusoudenotreSainteMère.NousavonsnotrepropreexpérienceduChristoudeMariequenousdevonsauthentifierdansnosvies.

Danslapremièrecitation,SaintPaulnousditquenoussommesleCorpsduChristetilfaitlacomparaison avec le corps humain. Il dit: «Ensemble, vous formez le Corps du Christ;cependant, chacun est une partie différente de ce corps. Dans l’Église (et nous pourrionsdire,danslaSociétédeMarie)Dieudonnelapremièreplaceauxapôtres, ladeuxièmeauxprophètes, latroisièmeauxenseignants,etaprèseux,ceuxquiaccomplissentdesmiraclesetceuxquiontledondeguérir,lesaidants.»(1Cor12,28).DanslaBibledeJérusalem,ontrouveunenotequidécrit«lesaidants»commeétantceuxquiaidentmatériellementpourbien accomplir la tâche. Il inclut aussi dans la liste les bons leaders; ce sont lesadministrateursoulesguidesdansl’Église.C’estundondepouvoiradministrerdefaçonàceque lesgenssoientformésdans la foi,en lesaidantàcroireenJésus-Christ.Ensuite,saintPauldéclarequ’ilyaundonsuprêmequiestau-dessusdetouslesautres:c’estledondelacharité.Nousdevonstousprierpouravoircedon.Enréalité,nouspouvonsrecevoirtousces

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donsenlesdemandant,maisnousnepouvonscependantpasnouslesapproprierparnousmêmes.EnregardantlalistedesaintPaul,Ilsemblequ’iln’yapresquerienquinepeutpasêtreundon.

Dans le deuxième livredesChroniques, nouspouvons lire le récit de la reconstructionduTempleaprès leretourd’exildes Israélites. Ilyauntrèsbeaupassageàproposdugrand-prêtreYoyada.Ilachoisidespersonnesdouéescommetailleursdepierre,charpentiers,trèshabilesdansledutravailduferetdubronzepouraccomplirlatâchedefaçoncompétente(2Ch24).Yaurait-ilunefaçonmarianistedelaversonlinge?jen’ensuispascertain!Jenecherchepasàridiculiserouàblagueràproposdesdons,maisnousdevonssavoircequ'ilenestvraiment.

DanslalettreauxRomains,auchapitre12,onretrouveuneautreénumérationdecesdonsmaisdansunordredifférent.Cependant,ilnefautpastropprendreausérieuxlaquestiondel’ordre.Danslacitationpaulineprécédente,lesapôtresétaientnommésenpremierlieuetlesprophètesensecond.Unprophèteestquelqu’unquiannonceeffectivementlaParoledeDieuauxgenset ainsi il joueun rôle important. LepèreWilliamFerree, S.M., aditunjour:«UnseulprophèteparProvinceestbiensuffisant»Nosdonssontdifférentsselonlagrâcequinousaétédonnée.Sivousavezundon,ilvousaétédonnépourlebiendetoutelacommunauté.Aucundonnenousestdonnépoursonseulprofitpersonnel.Lorsquenousn’exerçonspasnotredon,c’estplusquedelanégligence;ilmanquequelquechoseaubiendel’ensemble.

Saint Paul poursuit dans Romains 12,6-8, «Si l’un de nous a le don de transmettre desmessagesreçusdeDieu,ildoitlefaireselonlafoi.Siunautrealedondeservir,qu’ilserve.Celuiquialedond’enseignerdoitenseigner.Celuiquialedond’encouragerlesautresdoitlesencourager.Queceluiquidonnesesbienslefasseavecuneentièregénérosité.Queceluiquidirigelefasseavecsoin.Queceluiquiaidelesmalheureuxlefasseavecjoie.»Toutcelanousrappellequetoutcequ’onaccomplitpeutcontribueràremplirnotremissiondans lamesureoùonlefaitdansl’espritaveclequelledonnousaétéconfié.Notretâchepeutnousparaîtrequelquefoistrèsordinaire.Cependant,cen’estpaslatâcheelle-mêmequicompte,mais c’est plutôt le don qu’on exerce dans la tâche. Comme moi, vous savez qu’il y aplusieurs façonsd’accomplir lamêmetâche;certainespersonnespeuventêtreexcellentescommepréposésàl’entretienoucommecharpentiers,etmalgrétout,voushésiteriezàleurdemander une faveur à cause de leur attitude ou de la qualité de leur présence dansl’accomplissementde la tâche.Nousévitonsdes foisdedemanderunserviceàquelqu’unparcequec’esttropardudel’endurer!

Commentconnaîtrenotredonounotreappelpersonnel?Toutd’abord,disonsquecen’estpassiimportantdesavoirexactementquelestnotredon.Lefaitdenepasêtrecertainnedoit pas nous empêcher d’agir. Cependant, il est bon à l’occasion de réfléchir sur cettequestionetderéaliserquenotredonfaitpartiedenotreexpériencedeDieudansleserviceet l’accomplissementdenotremissioncommune.Nousnepouvonspasêtresûrsdenotre

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missionpersonnellepardessignesévidentsextérieurs.Lacertitudevientdelafoi;elleexistelorsque j’accepte d’y croire. Pour des religieux consacrés, notre Règle peut nous donnerquelques indications, tel qu’à l’article 31: «L’obéissance religieuse nous demande dereconnaître l’autorité denos supérieurs.» C’est la première et principale indication.Nousécoutons nos supérieurs religieux avec une attention privilégiée.Même si ce n’est pas laseulesourcepourconnaîtrenotremission,elleestprimordiale.Celasignifiequelorsquenossupérieursreligieuxs’exprimentsurnotremission,ouquenoussommeséclairésparnotreRègle, ou encore, lors d’élections, consultations et nominations de notre ordre religieux,nousdevonsnousdemander sinous croyonsvraimentque c’est làun signedeDieupournous.Découvrirnotremissionesttoujoursunactedefoi.

UndeuxièmesignevenantdenotreRègledeVieestlesuivant:«Êtreattentifsauxfrères.»Nous devons écouter ce qu’ils disent, non seulement ce qu’ils disent spécifiquement àpropos de notre mission, mais aussi ce que nous pouvons glaner à travers différentesconversations.Peuaprèsmonordination, jedemandaisàunvieuxprêtre français, lepèreLaFond: «Comment pouvons-nous connaître notre appel particulier comme prêtre ?Comment savoir si vous devez être prédicateur, spécialiste de la confession ou de touteautrechose?»Ildit:«Écoutezsimplementvosfrèresetvouslesaurez.»C’estvrai. Ilyabeaucoupdeconnaissancesquiviennentdesautressionécoutedanslafoi.

Il y aune troisième indication:Qu’est-cequi nous animequandnousprions, quandnoussommes vraiment enprésencedeDieu ?Qu’est-cequimonteennous ? Si nous sommesavecDieu, nous serons portés,malgré nos hésitations et nos peurs, à annoncerDieu auxautres.Nous pouvonsnoussentirappelésà travaillerauprèsdespauvresouencore,allerversl’administration.Nousdevonsécouterdanslafoicequinousdonnevieetêtreattentifsàcesmouvementsdel’intérieur.

LaquatrièmeindicationestcellequenotreFondateurrecherchaitdanstoutdiscernement:uneoccasionprovidentielle,unepersonneprovidentielleouencore,unsigneprovidentiel.IlétaittrèsévidentquenotreFondateurs’étaitsentiappeléàfonder laSociétédeMarie, laFamille deMarie. Cela lui apparaissait très clair par plusieurs signes providentiels mêmeavantsonretourdeSaragosseenEspagne.LorsquelepèreLalanneparlaaupèreChaminadedesondésirdeseconsacreràceprojet,ildevenaitainsilapersonneprovidentielle.LepèreChaminade n’a jamais forcé la fondation de la Société de Marie. Avant de fonder lesMarianistes,ilavaitrecrutéplusieurspersonnespourlesFrèresdesÉcolesChrétiennes;c’estpresque lui qui les a rétablis puisqueaprès laRévolution française ils enétaient réduits àseulement13membres en France. Pendantun certain temps, le pèreChaminade fut leurmaître de novices. Malgré le fait qu’il voyait plusieurs jeunes hommes qu’il considéraitcommed’excellentsmembresfondateurspotentielsdelaSociétédeMariesedirigerversleséminairediocésain,ilnefitaucuneffortpourlesendissuader.Nouspouvonsretirerdecelala leçonque lorsquenousvoulons suivre la volontédeDieu,nousnedevonspas imposernotreprojetpersonnel,maisplutôtnoussoumettreàSavolonté.Nouspoussonsdoucement

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surlaporte,sanstoutefoislaforcerparcequenoussommesconvaincusquec’estlabonneroute à suivre.Nous poussons doucement,mais nous devons pousser.Nous devons nousoffriretresterouvertàcequeDieuveut.Parexemple,malgréque jepuissemecroireunexcellentprofesseurde latin,etque jepersisteàm’yconsacrer,Dieuapeut-êtred’autresprojetspourmoi.

En suivant cette méthode de discernement, nous finirons éventuellement là où nousdevrionsêtre,àaccomplircequenousdevrionsfaire.Sinoussommesainsidisposés,nousne nous trouverons jamais dans une situation où nous ne pourrions ne rien faire pouraccomplirnotremission.Ilnousarrivequelquefoisdeneregardernotretâchequ’ensurface.Nous oublions ou nous sous-estimons l’importance de notre présence ainsi que notreattitudeàl’égarddenotretâche.C’estlorsquenousabordonsnotretâcheavecuneattitudepositivequeleschoseschangentpourlemieux.Mêmesitoutlemonden’apastoujoursuneprésence positive, la présence de chacun apporte toujours un changement quelconque.Commeexemple,lorsquevousvousjoignezàuneconversationdéjàencours,ilsepeutquelesujetchange.Sivousentrezdansunesalleen fumant, lesgensouvrirontprobablementunefenêtre.Quelquechosechangera. Ilyadespersonnesquinefontqu’entrerdansunesalleetl’atmosphèrechange.C’estlaqualité,positiveounégative,deleurprésencequipeutfaireunedifférence.

DanslerécitdesnocesdeCanadesaintJean,qu’est-cequiestditàproposdenotreSainteMère ? «La mère de Jésus était là» (Jn 2,1). Elle était là présente. Dieu peut agir deplusieursfaçonsàtraversuneprésence.Dieunepeutpasagiràtraversvoussivousn’êtespas présents et entièrement consacrés. Votre présence est réellement importante. Nousdevonssouventréfléchiràcettevérité.

Notremissiondanslemonded’aujourd’huirevêtuneimportanceprimordiale.LePapeJean-PaulIIainsistésurceladepuissavisiteenHaïtien1982.C’estlorsdecettevisitequ’ilavaitpourlapremièrefoisparlédecetappelàunenouvelleévangélisationpourl’Église.Cequ’ilentendait par «évangélisation» était de présenter le Christ aux autres demanière qu’ilspuissentLeconnaître,croireenLuietLeservir.Nouspourrionsnommercela,laformationàlafoi.MaislePapeaaussidit:«Ilfautqueçasoitnouveau.»Troisaspectssontnécessairespour accomplir cette nouvelle évangélisation. Ce sont ces aspects qui déterminent notremissionaujourd’huidansl’Église.

Le premier aspect de cette nouveauté d’évangéliser implique une passion, un zèlerenouvelé, un désir ardent en nous de partager l’Évangile. Le Pape déclare: «Ce zèle nedécoulepasuniquementdesconnaissancesoudel’organisation.Ildécouled’unerencontrepersonnelleavecleChrist.Ildécouledelaprière.»Denosjours,l’évangélisationàaccompliraujourd’huidoitvenirdepersonnesquifontunerencontreprofondeetrégulièreavecDieudans la prière. C’est un appel à une forme d’union profonde avec Dieu dans la prière.Commerésultat,nousévangélisonsdoncàpartirdecequenousavonsvuetentendu.Notreexpériencede laprièredoitêtreunebasesolidedenotreévangélisation.PaulVIdansson

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exhortationsurl’Évangélisation,disait:«Dansnotrecultured’aujourd’hui,lestémoinssontplusnécessairesquelesmaîtres.Etplusloinildit:«Ets’ilssontdesmaîtres,c’estqu’ilssontdes témoins.» et ilpoursuivaitendisant:«Lesmaîtresdoiventaussiêtredes témoins.»D’une certaine manière, les gens doivent être en mesure de constater que ce que nousfaisonsetcequenousdisonsontuneffet,quecelapeutêtremisenpratiqueetmarquerunedifférence.

Le deuxième aspect de la nouveauté est que la catéchèse doit être accompagnée dukérygme. La catéchèse signifie que nous transmettons à d’autres le dépôt de la foi. Parexemple,nousenseignonslathéologie,oul’étiquedesaffaires;lekérygmec’estintroduirequelqu’unàlapersonneduChrist.Nousl’amenonsàvivreuneexpériencederencontreetde connaissance avec le Christ. À notre enseignement nous ajoutons une expérience duChrist.

Letroisièmeaspectdelanouvellefaçond’évangéliserconsistedansleretourdessignesoumiraclescommeilsseproduisaientautempsdesapôtres.LePapeditquenousavonsbesoindecelaencoreaujourd’hui,etparconséquent,quecelaseproduiraetquecelaseproduit.Touscessignesquisontdeseffetsdelagrâceoudelaprièreenactionserontremarqués,expérimentés ouperçus. C’est là, pour nous, évangélisateurs, un très granddéfi. Cela faitappelànotrefoiplusqu’àtouteautrechose.

Lorsqu’en1962jefusenvoyéàChicagopourétudier,lecorpsétudiantduSt.Michael’sHighSchoolétaitpassablementturbulent.Lesreligieuxmedemandèrentdeprêcheruneretraitefermée aux Seniors. J’étais quelque peu naïf, alors j’acceptai de le faire. Onm’envoya leFrère Joe Konitzer pourm’accompagner parce qu’il connaissait bien ces garçons et qu’ilmesuraitsixpiedsetdemi.Noussommespartispourlaretraiteetlesgarçonsn’étaientpassi mauvais, mais l’expérience leur paraissait étrange. Un senior appelé Sanchez était leleaderdelaclasse.Toutcequ’ilfaisait,lesautreslefaisaient.Ilavaituneprofondecicatricesur le côtéduvisagerésultantd’unebagarrederuelle.La retraitecommença levendrediaprès-midi.Parvenusausamedisoir,iln’yavaitqu’unoudeuxjeunesquis’étaientprésentéspourlaconfession.LeFrèreJoeetmoi,nousnesavionsquoifaire.JedemandaidoncàJoes’il ne voulait pas prier pour que Dieu nous envoie Sanchez. Samedi soir, j’annonçai auxjeunes que je serais à la chapelle pour recevoir tous ceux qui voudraient se confesser. Jesentais que la retraite s’arrêterait là si cela ne fonctionnait pas. Je n’ai rien faitd’extraordinaire,maisjemesouviensdem’êtrerenduàlachapelleendisantàDieuquej’yresterais jusqu’à ce que Sanchez s’y pointe. Je priai durant quelque 40minutes. Soudain,j’entendisquelqu’unentrerpar laporte arrière.C’était Sanchez. Ilmedit: «Jedésiremeconfesser.»Etilseconfessaeffectivement.Àlafin,ildit:«Voussavez,j’aihésitéavantdevenir.Noussommesbieniciàlaretraite.Jepeuxmeconfessermaintenantetjepourraibienaller jusqu’à demain après-midi. Mais vous ne pouvez pas vous imaginer dans quelenvironnement jem’en retourneraiaprès.» Je luidis:«Non jen’enai aucune idée.Maisactuellement tu es ici et tu devrais faire quelque chose de grand pour Dieu.» Il me

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dit:«Ouais.Maisquoiparexemple?»Jeluirépondis:«Ehbien,quelquechose,commederecevoir le pardon de Dieu et ensuite d’être le premier demain matin à recevoir laCommunion.»Ildit:«Ceseraitvraimentquelquechoseparcequelesgarsnem’ontjamaisvu aller communier.» À la fin de sa confession, je lui dis:«Va en paix.» Et il merépondit:«Écoutez, restezencoreundetemps ici.D’autresgarsvontvenir.»Cinqautresgarçons sont venus et un peu plus tard, quelques autres. Le lendemain matin lors de ladernièreEucharistie,Sanchezs’avançadans l’allée,mêmeavant le temps,pourrecevoir leChrist à la Communion. Quelques larmes aux yeux m’empêchèrent de le distinguerclairement.Probablementquepersonneneserappellecequej’aiditdurantlaretraite,maistous ont fait l’expérience de la grâce de Dieu. Même si des personnes peuvent savoircommentanimeruneretraite,ilmanqueunautreélément:cequenouspouvonstoujoursajouteràcequenousfaisons,c’estlaprière.

En1970àSanAntonio,unepetitefillede8ans,NancyEtlinger,semouraitd’uneleucémie.Sa famille connaissait très bien le frère Jim Schimelpfening et vint le voir pour luidire:«Nancyvamourirs’iln’yapasunmiracle.Voudriez-vousdoncdemanderàquelquesreligieuxd’icidevenirvendredisoiràl’hôpitaletdeprierpourobtenirunmiracle?»Jimestvenumevoir.Detoutemaviejen’avaisjamaispriépourobtenirunmiracle.Jemesouviensdemaréaction:«Maissiçaneseproduitpas?»Cependant,jenepouvaisquasimentpasdire«non»étantledirecteurdelacommunautédesFrères.Jedisdonc:«Biensûrquejevais y aller.» Jimdemandaà septautresde l’accompagner; troisontditoui et lesquatreautresontditnon.

Noussommesalorspartislescinqversl’hôpitaletnoussommesentrésdanslachambredeNancy.C’étaitévidentqu’elleagonisait.Sesbraset ses jambesétaient tellementamaigris,maiselleavaitungrandsouriresursonvisage.Aufait,elleétaitlaseuledanslachambrequisouriait.Enentrant,nousnoussommesmisàparlernerveusementdelamétéopuis,detoutetderien.Finalement,Nancydit:«Vousêtestousvenuspourprier,ehbien,qu’attendez-vouspourprier?»Ons’estmisalorsàprier.Elleditalors:«Attendezuneminute.»Elleestalléeà lachambrevoisineoùsetrouvaituneautrepetitefillede9ansquisemouraitelleaussideleucémie.Nancynousdit:«JedésirequeYolandeparticipeelleaussiàtoutcela.»YolandeentradoncetNancys’assitetluipritlamain.Nouscontinuionsàprieretenpriantardemment.Puislepapa:«Nancy,tusaisbienquequoiqu’ilarrivetun’asqu’àcroirequeDieu nous aime.» Elle répondit: «Bien sûr que Dieu nous aime. Tu n’as qu’à regarderautourdanslemondepourlevoir.Silesgensnevoientpasl’amourdeDieu,c’estqu’ilsneregardent pas.»Alors, nous avons encoreprié. Puis samère lui dit: «Nancy, demande àDieu de te guérir.» Elle ne priait pas ; elle était restée assise là en appréciant ce qui sepassait.Ellerépondit:«Dieusaittrèsbienquesijeguéris,jeretourneraiàlamaisonetnousaurons une joyeuse célébration. Et si je meurs, j’irai au Ciel, et je célébrerai là une plusgrandejoiepournoustous.»Aprèsavoirpriéencoreunpeu,noussommesretournéscheznous. Dans le corridor, en chemin vers l’ascenseur, je demandai à un des frères novicescommentilsesentait. Ilmerépondit:«Jemesenscommelemédecinquiaétéguéripar

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sonpatient.»C’étaitvendredisoir.Nancyestmortelemardisuivant.Noussommesallésausalonfunérairesanssavoirquoidireàlafamille.Jedisàlamère:«Nousavonsprié,maisjecrois que Dieu voit les choses différemment. Il semble que nos prières n’ont pas étéexaucées.» Elle répondit: «Oh oui, elles le furent; je me suis rendue à l’hôpital samedimatinetNancyétaitremplied’aiguilles,maiselleavait leplusradieuxdessouriressursonvisage.Ellemedit:«Tusaismaman,depuishiersoir l’EspritSaintaététellementprésentques’Ill’avaitétéplus,onauraitpuletoucher.»«Etcetteprésenceestdemeuréejusqu’àcequ’ellemeuremardi.NancyestmaintenantauprèsdeDieuet l’estdepuisvendredisoirdernier. Nous n’aurions voulu rien changer et je suis certaine que c’est ce qu’elle auraitvouluelleaussi.»Nousavionspriépouruneguérisonetnousavons finalement reçubienmieux.

Je dois admettre qu’enme rendant à l’hôpital pour prier, je ne croyais pas tellement aumiracle. Parce que c’est difficile de croire au miracle, il arrive quelquefois que nous nesentonspasdevoirycroire.Nouspensonspeut-êtrequenousvoulonstenterDieuouquenous sommes présomptueux. Mais je crois que prier pour obtenir un miracle doit êtrequelque chose à ajouter à ce que nous faisons déjà. Cela pourrait faire une grandedifférence.C’estuneréponseàcequeditlePapeàproposdelaNouvelleÉvangélisation.Ildit que les chrétiens doivent à nouveau être évangélisés. Plusieurs chrétiens ne font pasl’expérience assez profonde de Dieu comme Dieu le veut. Le Pape a clairement dit quel’Évangile doit être annoncé à nouveau, mais de manière à ce que le monde puissel’expérimenter de façon différente. Nosméthodes devront être jointes à desmiracles degrâces.Ilnousfaudrayajoutercettenouvelledimension.

ProMundiVita (PMV) est un centred’étude à Louvainqui analyse à partir de recherchessérieusescequisevitdansl’Église.LeCentrePMVpubliaenavril1990uneétudeintitulée:«Latransmissiondelafoidansunesociétésécularisée.»C’estuneétudequiparledenous.C’est avec grand intérêt que je l’ai lue. Leurs études sont réputées être objectives. Voiciquelquesunesdeleursconclusions.

Ilsdéfinissent la sécularisationcommesuit:unesociétéséculariséeenestunequi reposesurdesbasesnonreligieuses.Unesociétéstructuréesans lebesoindeschosesreligieusesn’estpascontrelareligion.C’estunesociétéindépendantedelareligionetdonclareligionn’exerce aucune influence sur elle. Alors, si telle est la définition de notre cultureaujourd’hui,lafoin’estdoncplustransmiseparnotrecultureambiante.

Comme conséquence, il doit y avoir de nouvelles conditions pour transmettre la foi. Unesociété constituée sans Dieu repose, soit, sur une idéologie quelconque, tel lemarxisme,soit, sur la promotion très poussée de l’affirmation de l’individu. L’individualisme devienttrès rapidement une valeur fondamentale.Nous sommes encouragées à choisir par nous-mêmesentrecequiestbienetcequiestmal,entrequoifaireetquoinepasfaire.C’estlàune maturité souhaitée chez l’humain, mais sans Dieu cela devient de l’égoïsme. Unedeuxième constatation de l’étude est celle que nous vivons dans une surabondance

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d’information, tellement que les individus restent indécis et sans certitudes; ils écoutenttous les experts avec leurs opinions divergentes et changeantes à tout moment. Il endécoulealorsunepositionindécisequantàlavie,unesorted’hésitationdes’engageretdeprendrefinalementdesdécisions.Untroisièmeélémentc’estlerôlequejouelatolérance.Latoléranceacceptetoutlemondesansaucunjugement.Noushésitonsalorsavantdedirequequelqu’unest correctounon.Nousdisons seulementque cettepersonneest commecela.Unrelativismepuissantsedéveloppefacilement.Voilànotresociétéd’aujourd’huidanslaquellenoussommesappelésàformerd’autresdanslafoi,àprésenterleChristdemanièreàcequelemondepuissecroireets’engager.

L’étude de Pro Mundi Vita présente ensuite quelques conséquences de ces états. Leurshypothèsescomprennententreautres:

1.l’information. Elle reste encore d’une importance capitale. Nous devons transmettrel’information afin que les gens soient informés. Cela est encourageant, puisque, dans laSociété de Marie, nous excellons dans ce sens. Nous savons comment renseigner. Latransmissionparlasocialisation,cequelemonderetientàtraverslaculture,achangé.Lesgens ont maintenant besoin d’une communauté où ils peuvent absorber la foi. C’est envivantdansunecommunautédefoiqu’ilsl’apprennent.C’estlaraisonpourlaquellejecroisquelescommunautésdebasesonttellementessentielles.Jecroisaussiquec’estpourcelaquenotreRègleditquelacommunautéensoiestuninstrumentélémentairepouraccomplirnotremission.Jenesuispascertainquetoutcelaaétévraimentsaisilorsdelarédactiondecetarticle.Sic’estdoncvraiquelemondeabesoind’unecommunautépourserevêtirdelavieduChrist,lacommunautéalors,commemoyen,devientplusimportantequejamais.

L’imposition de façon autoritaire provoque une réaction, à cause de la culture. Nousconstatons cela : si le Pape déclare quelque chose de totalement vrai, mais qu’il le ditcomme quelque chose qui nous ne devons pas discuter, nous savons qu’il y aura uneréactiontrèsforte.C’estquoilasolutionàunetellesituation?Nepasdirecomplètementlavérité?L’étudenoussuggèredegérerlesconditionsdudialogue.Parcontre,sinousdevonsévangéliser par dialogue, nous devons alors dans ce dialogue prendre des positions trèsnettessurcequiestvrai.Nousdevonsdireclairement:«Voilàmaposition.»Cen’estpasuneattitudecourante,maiselleestappréciéelorsqueutilisée.Lespersonnesnesesententpasàl’aiseaveccetteattitudeparcequelaculturen’estpasnonplusàl’aiseavecelle.

Lors d’une visite en Espagne il y a cinq ans, j’ai été impressionné. Il y avait une émissionquotidiennededébatoù l’onparlaitde sujetsdifférents.Pour ladiscussion,onchoisissaitdes personnes qui avaient des positions bien arrêtées sur des questions. J’ai suivi troisémissions: sur deux des trois, il y avait un membre de l’Opus Dei, un mouvement laïcinternational très fort. Je ne connais pas votre opinion à propos de l’Opus Dei,mais unechoseestcertainequantàleursmembres:ilssontclairssurleurspositions.C’estcegenredeclartédontnousavonsbesoinaujourd’hui.

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J’aidéjàmentionnéque l’ambiguïtéestunedesdifficultésquenousavonsdans certainesquestions que nous devons trancher. Nous avons connu dans notre Société, il n’y a pastellementlongtemps,untrèsbonexempledont,selonmoi,nousn’avonspassuffisammentparlé. Il yaquelquesannées,unprêtreavaitquitté laSociétédeMarieet laprêtrise. Il avécuouvertementsonhomosexualitéetacontractéleVIH.Ilaconnuuneconversionilyaneufansetaabandonnésapratiquehomosexuelleetavécuenseconformantaumagistèredel’Église.Ilyaquelquesannées,ilademandéàréintégrerlaSociétédeMarieetavoulureprendre sesactivitésdeprêtre. Il avoua clairement: «J’ai leVIH.» Il fut acceptépar saProvince et a prononcé des vœux temporaires dans la Société. Rome lui dit qu’il pourraitêtreréinstallécommeprêtredèsqu’ilauraprononcésesvœuxperpétuelsdanslaSociétédeMarie.Iln’apaspuserendreaussiloinqu’ilvoulait,ilestdécédél’andernier.

QuandilademandédereveniràlaSociété,lePèreJoséMariaSalaverri,leSupérieurgénéraldutemps,luiademandé:«Quelleestmaintenanttapositionparrapportàl’homosexualité?»Saréponsefut:«J’aicommisunegraveerreuretj’aiconnuuneconversion.J’aifinidevivrecommejevivaisetj’aimeraisreveniràlaSociétédeMarie.»LePèreSalaverriditalors:«Les autres religieux ne savent pas cela.» Il lui demanda donc s’il voulait bien dire celadevanttouslesreligieux.Ilrépondit:«Biensûr!»LePèreSalaverridit:«Jecroisquec’esttrèsimportantetjepenseaussiquec’estuntémoignagetrèsfort.»Lesfrèresn’étaientpastellement confortablesavec l’idéede l’entendredirepubliquementdevant les religieux sapositionsurl’homosexualité.Ilarédigéuntextetrèsbeauettrèstouchantsursaposition,sur son vécu, sur ses convictions et sur ses valeurs. Une copie de son texte fut remise àchaqueDirecteur lorsde la rencontredesDirecteursde la Province. L’ancienprêtre le lutdevant eux et déclara: «Je suis de retour avec vous, et voilà qui je suis.» À la fin de larencontre, on ramassa toutes les copies du texte et elles furent détruites. La plupart desMarianistes ne sont probablement pas au courant de ce témoignage. C’est, je crois, uneoccasiondedire:«Voilà,aunomdeJésus,cequejecrois.Voilàoùnousensommes.»Lemondeatantbesoindetelsexemples.Notreculturerésisteà l’autorité,maisellenepeutpasdénierdetelsexemplesdeclarté.J’aidurespectpourcetancienprêtre.Jesuisfierdeluipour ce qu’il a fait. Et je souhaite que nous laissions de telles grâces agir encore plusostensiblement. Cela fait tellement partie importante de notre mission personnelle etcommunautaire.

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CHAPITRE9

AvecDieudanslaprière

Siquelqu’unmedemandequelarticledelaRègledeVieserait laplusdifficileàmettreenpratique dans tout groupe communautaire, je dirais que c’est l’article 55. Assezcurieusement, c’est aussi cet article dont, selon notre Fondateur, la pratique est la plusimportante, si nous voulons être des religieux parfaits, ou comme on pourrait dire desreligieuxarrivésàmaturité.L’article55s’énonceainsi :«L’essentiel,c’est l’intérieur.Pourêtre fidèles à notre vocationmarianiste et progresser dans la vie de foi, nous consacronschaquejouruneheureàl’oraison.»

Cedoitêtrel‘articleleplusdifficileàmettreenpratiqueentantquegroupecommunautaire,parceque,justement,nouséprouvonsunetrèsgrandedifficultéàlemettreenpratiqueennousdonnant toutessortesdebonnes raisonspournepasconsacreruneheured’oraisonpar jour ; mais cet article est toujours là comme un rappel de quelque chose defondamentalementimportant.L’oraisonexerceunegrandeinfluencesurnotrevie.

Pour commencer, posons-nous la question: « Pourquoi est-ce que la prière, cette heurequotidiennedeméditationest-ellesiimportantepournous?»Oubiennouspourrionsnousdire: «Bon: puisqu’il est tellementdifficiledemettre cetteprièreenpratique, peut-êtrepourrionslaraccourcir,oumêmelasupprimer».Celaadéjàétésuggéré.Avantdefaireunechosepareille,nousdevons sérieusementnousposer laquestion: «Après tout,pourquoiest-cesiimportant?»

Nouspourrionsrépondretrèssimplementquelaprièrementaleestimportantepournous,parcequec’estleseulexercicequinousaideraàatteindrenotreobjectifounotrematuritéspirituelleen tantque religieux,dans lavocationà laquellenousnousavonsétéappelés..Parexemple,danslesConstitutionsde1839,l’article34dit:«Onposeenprincipequ’ilestimpossible à l’homme de s’élever à la perfection religieuse [nous dirions pleinematurité]sans l’oraison. » Voilà une affirmation puissante. Elle était dans nos premièresconstitutions, et on trouve cette même assertion dans toutes les éditions de nosconstitutionsdepuiscetemps.C’estaussiunerèglecommuneàtouslesordresreligieux.

Pourquoiest-cequenousnepouvonspasêtrepleinement religieuxcommenoussommesappelés à l’être, sans l’oraison quotidienne? Est-ce que la liturgie ne suffirait pas? Oud’autresexercicesreligieux?Sinousexaminonslanaturedel’oraison,nouscommençonsàdécouvrirquelquechose,mêmesurnous-mêmes.Nouspouvonsretournerdansunchapitreprécédent pour revoir ce que nous avons dit dans une conférence au sujet du «moi » -l’imagedecequenousvivonsou l’imagedans laquellenous sommesmoulés.Dans la foi,

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nousacceptonsquenoussommescréésàl’imagedeDieu.Celaveutdireenpratique,quedans notre vraie nature, se trouve une tendance qui détermine comment nous croissonspourdevenircequenouspouvonsêtre–uneimaged’unetrèsgrandematurité.Toutêtrehumain possède un patron à l’intérieur de lui qui, depuis son origine, détermine la façondontilvasedévelopper.Vousnepouvezpasdéterminerquelleseralacouleurdevosyeux.C’estdéjàdéterminé.D’oùvientcettedétermination?Dansvotrenature,c’estunpatronetvoussuivezcette imagedéterminée.Vouspouvezychangerquelquechosemais lepatrondebasedevotrecroissanceestdéjàétabli.Vousnepouvezpassemerunmelond’eauetespérerquecetteplantepoussetoutdroitcommeunarbre.Peut-êtrepouvez-vousleforceràlefaire,maisdesanature,c’estuneformedifférente.

Quandnousdisonsquenoussommescréésàl’imagedeDieu,qu’est-cequecelaveutdire?Celaveutdirequesinousvoulonsprogresserdanslesmeilleuresconditionspossibles,nousdevrionsprogresserpourdevenirdeplusenpluscommeDieu.SiDieuestmiséricordieux,nousauronsunetendanceennousàêtremiséricordieux.SiDieuestpleindecompassionousi Dieu aime vraiment toutes les créatures, nous avons cette image à l’intérieur de nous-mêmes. Si nous voulons suivre cette image dans les meilleures conditions, nous allonsprogresser en aimant tout lemonde. C’est pourquoi, la plupart des recommandations deJésussontsimplementdesrecommandationsquinousaiderontàcroîtreàl’imagedeDieu.Cetteimageestdansnotrenature.Alors,qu’est-cequelaprièrevientfairelà-dedans?NotreFondateurditque l’oraisonest l’exercice leplusappropriépournotrecroissanceà l’imagedeDieu.Ilaécritquelquechosed’étonnantàcesujet.Ildit,parexemple,que«l’oraisonestlasourcedetouteslesvertus.»Celaveutdirequesinousprionsdelamanièredontnotrespiritualiténousenseignedelefaire,nousnoustrouvonsdanslesmeilleuresconditionspourdéveloppernotrepersonnalitéselonl’imagedeDieu.

Nouscommençonsàvoirl’importancedel’oraison.Qu’est-cequisepassevraimentpendantl’oraison?D’abord, quand nous nous adonnons réellement à l’oraison nousmettons Dieucomme notre centre d.intérêt, notre objectif. L’oraison nous met personnellement etattentivementenrelationavecDieuouaveclaBienheureuseViergeMarieouavecquelquechosequinousmetenprésencedeDieu.QuandnousvenonsencontactavecDieudecettemanière,c’estuncontactparlequelgraduellementnousdevenonsunavecDieu.EtvousnepouvezpasdevenirunavecDieusanschangeretdevenirdeplusenpluscommeDieu.

Notre Fondateur dit que si vous êtes fidèles à l’oraison, vous ne pouvez pas demeurer lamêmepersonne, àmoinsque vousnepriiezpas réellement.Dansuneoraisonbien faite,c’estimpossibledenepaschanger.QuandnousnoustournonsversDieudanslaprière,Dieudevient le centredenotreêtre. Nousdonnons lapossibilité à l’Esprit Saintde réglernosactes etun changement va seproduire. Ce seraprogressif. C’est comme tout cequi croîtdansvotreproprepersonne.Vousnepouvezpasvoir leschosescroître,mêmesivous lesregardez.Maisvouspouvezvoirlacroissanceaprèsunepériodedetemps.Lamêmechoseestvraiepourlaprière.

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VoiciuneparoledenotreFondateuràproposdel’oraison:«Dieuparleàl’âmeetfaitmieuxque n’importe quel prédicateur. » Un prédicateur peut avoir quelque effet sur notre vie,mais l’oraison procurera un plus grand effet dans le même sens ; toutefois ce ne seraprobablement pas une expérience aussi spectaculaire. Nous lisons dans Hébreux 4,12: «VivanteeneffetestlaparoledeDieu,efficaceetplusincisivequ’unglaiveàdeuxtranchants.»

Uneautrechosequiseproduitlorsd’uneoraisonbienfaitec’estquenousnousmettonsàladisposition de l’Esprit Saint pour entrer à l’intérieur de nous-mêmes. Lesmouvements del’Espritne soufflentpasnécessairement surnous.Ce sont seulementdesmouvementsdenotre être intérieur. Ils peuvent prendre la forme d’une plus grande connaissance; ilspeuventprendre la formede la sagesseoud’unpeuplusde courageouencored’unpeuplus d’amour. Toutes ces choses sont caractéristiques de Dieu et leur image est en traind’essayerdetransformernotreêtre.Lesmouvementsde l’EspritSaintont réellement leurplace.Plusnousprenons consciencede cesmouvementset lesmettonsenpratiquedansnotre vie, plus nous sentons ces mouvements et les suivons, plus nous pratiquons laméditation. Si nous suivons ces mouvements, graduellement, ils deviennent une part denotreêtreprofond.Sinoussentonsunmouvementintérieur,parexemplelacompassionetquenouslemettonsenpratiqueceladevientunepartiedenous-mêmes.Aveclarépétition,celadevientunedimensiondenotrepersonnalité.

Le but de l’oraison peut se résumer en ceci: « C’est de devenir un avec Dieu » ; nouspouvonsledireend’autresmotsquisontaussivrais:«Lebutdelaprièreestdechanger–dedevenirdeplusenpluscommeDieu.»LepèreChaminadedisaitquelebutpremierdel’oraisonestdechanger.Quandj’ailucelapourlapremièrefois,j’aipensé:«Dansplusieursde mes méditations, ce n’est pas mon but » Mais même si nous faisons une bonneméditationavecleseulbutdeprierDieu,nousnepouvonslefairelongtempssanschanger.DanslapurelouangeàDieu,unchangementseproduira.

NotreRèglerendquelques-unesdecesidéesd’uneadmirablefaçonsinousnousdonnonsletempsdelescomprendre.L’article48commenceainsi:«Pourquedans l’attenteoùnoussommesdesonretour, Jésussoit lecentredenotrevie,nousconsacronschaque jourà laprièreunepartgénéreusedenotretemps.»Puis,l’articlenousdonnequelquesmanièresdeprierenvuedenousnourrirdontcelle-ci«…ainsiquel’oraisonquinourritennousl’espritde foi. » C’est pourquoi, notre Fondateur a tant insisté sur l’oraison disant que c’est unexercicedefoi.Toutcetexerciceestcausedecroissance.

Je citais tout audébut l’article55denotreRègle: « L’essentiel c’est l’intérieur. Pourêtrefidèlesànotrevocationmarianiste…»Dansladernièrephrasedecetarticle55,nouslisons:«…Dansl’oraison,nouslaissonsl’espritdeJésusfairecroîtreennouslafoi,l’espéranceetlacharitéetprendreainsipossessiondenotrevie.»Ceserontlesmouvementsquisurgirontà

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l’intérieur de nous-mêmes pendant la prière. Dans les Constitutions de 1839, et ailleurs,notrefondateurditquel’oraisonestlasourcecommuneetuniquedetouteslesvertus.Celasignifiequ’ilestpratiquementimpossiblededévelopperlesvertussinousnepratiquonspasl’oraison.Aumoinsceseraitnégligerunmoyenessentiel.

Laprièreproduitbeaucoupdechangementsennous.Sinousacceptonscela,alorslaprièredevientnotremoyendebasepourdevenirsemblablesàDieu,pourdévelopperennouslescaractéristiques de Jésus, Dieu fait homme. Si tout cela est vrai, l’oraison est aussi unpuissantmoyende changer lemonde. La prière est une sorte de force différente dans lemonde.

J’aiétéimpressionnéparlesanecdotessuivantesausujetdelaprièredelapartd’AnthonyDeMello,unauteurspirituelbienconnu.Celaseprésentedelamanièresuivante:

Ilyavaitunefoisunhommequi faisaitàpiedun longpèlerinageàunsanctuaire.Sursonchemin,ildevaits’arrêteràdifférentsendroitspourpasserlanuit.Unenuit,ils’estarrêtéàune maison et demanda s’il pouvait y rester pour la nuit. Le jeune couple qui résidaitl’accueillitavecbonté.Ilpassalanuit,etlematinsuivant,illeurditqu’ilallaitcontinuersoncheminjusqu’ausanctuaire. Ildemandaaucouples’ilpouvaitprierpourquelquechosedespécialpoureux. Ilsdirent:«Oui,noussommesmariésdepuisquelquesannéesdéjàmaisnous n’avons pas d’enfants. Alors, voudriez-vous prier pour que nous puissions avoir desenfants?» Ilacquiesça.Aussitôtqu’il futarrivéausanctuaire, ilparlaàDieuduformidablecouple,quececoupledésiraitavoirdesenfants,qu’il seraitbonde leurenvoyerquelquesenfants. Dieu lui répondit: « Les enfants ne sont pas dans leur destinée ». L’homme futdésappointémaisacceptalefait.Alors,ilarrêtadeprieràcetteintentionets’occupadesespropres projets. Cinq ans plus tard, alors qu’il faisait un autre pèlerinage au mêmesanctuaire,ils’arrêtaàlamêmemaison.Alorsqu’ilapprochaitdelamaison,ilvitdeuxpetitsenfants qui jouaient dans la cour d’en avant. Il ne dit rien. Il entra et félicita le couple; ilsemblaitbienquelesenfantsétaientlesleurs.Ilslestraitentcommelesleurs.Finalement,ildit: « Vous avez de beaux enfants ». Ils répondirent qu’ils remerciaient Dieu pour cesenfants.Ilneputattendred’arriverausanctuairepourdemanderàDieucequis’étaitpassé.Aussitôtqu’ilarrivaausanctuaire,iltombaàgenouxetdit:«Seigneur,vousvoussouvenezdececouple?Jevenaisprierpoureuxetvousm’avezditquelesenfantsn’étaientpasleurdestinée»Dieudit:«C’estvrai.Cecoupledoitêtresaint».Lessaintspeuventchangerleurdestinéeparlaprière.(AdaptationdeTheSongoftheBird).

Quandnousprionsselonlelettre,nousprions«correctement»,maishorsdenotrepropremoi.Nousutilisons latechniquecorrectemaisDieun’estpas lecentredenotreprière.Oubiennoussommeslecentre,oucesontnosintérêts,ouautrechose.LePèreChaminadeafaitunedéclaration intéressanteau sujetde laprière selon la lettre. Ildisait:« Il yaunecentainedemanièresdepriersansavoirDieucommecentre».Cequim’aaidéfinalementàcomprendrecettedéclaration fut saint Luc, au chapitre18.C’estunexempleparfaitde lalettreetdel’esprit.Lapersonnequiprieselonl’espritestquelqu’unquimetDieuaucentre,

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dontl’intérêtestd’abordDieuAuchapitre18desaintLuc,Jésusproposecetteparabole:«Deuxhommesmontèrentau templepourprier; l’unétaitPharisienet l’autrePublicain.LePharisien,deboutpriaitainsienlui-même:MonDieu,jeterendsgrâcedecequejenesuispas comme le reste des hommes, qui sont rapaces, injustes, adultères, ou bien encorecomme ce Publicain ; je jeûne deux fois la semaine, je donne la dîme de tout ce quej’acquiers.LePublicainsetenantàdistancen’osaitmêmepasleverlesyeuxauciel,maisilsefrappaitlapoitrineendisant:MonDieu,aiepitiédupécheurquejesuis.Jevousledis:cedernierdescenditchezluijustifié,l’autrenon.»(Lc18,9-14)LePharisienestreparticommeilétaitvenu,exceptépeut-êtremêmeconfortédanssonego.

Quandnotreegoestnotrepremiersouci,nousavonsl’habitudedel’affirmerdanslaprière.L’affirmationne lechangepas,et l’egoneveutpaschanger.Examinezquelques foisvotreego.Voyezcepourquoi il crie. Il veut l’affirmation; ilneveutpaschanger.Maintenant, sivousallezprierpourchanger,votreegovaprendretouteuneraclée.ÇafaitmalchaquefoisquevousvousdétournezdevotreegopourallerversleChrist.Maiscelaexplicitelalettreetl’esprit.Sisousallonsàlaprièreavecladispositiondevouloirchanger,nousn’avonspasàforcerleschoses.Toutcequenousavonsàfairec’estdedésirerchangeretlaisserlerestearriver.Celaarrivera.C’estcommepourtoutecroissance,c’estseulementplustardquel’ons’apercevraduchangement.

Qu’est-cequenousdevonsfairepourchanger?SinousvoulonsentendrelaparoledeDieu,tout ce quenous avons à faire c’est d’écouter jusqu’à cequ’on l’entende. C’est difficile àfaire,maissinouscontinuonsàécouter,éventuellementilarriveraqu’onentendequelquechose. Si vous sentez que vous n’avez jamais rien entendu, allez prier et écoutez toutsimplement.Vousallezentendrequelquechose!Ordinairement,quandnousentendonsunmotdel’EspritSaint,nousnesommespascertainspasquecelavientdeDieu.Ounousnelecroyons pas. Écoutez jusqu’à ce que vous entendiez quelque chose. C’est laméthode del’utilisation du Credo pour notreméditation. On nous a enseigné cetteméthode. Le pèreChaminadedisaitquenousdevrionsprierleCredolentement,jusqu’àcequequelquechosenous frappe, jusqu’à cequenousentendionsquelque chose.Quandnous le faisons, nousnousarrêtonslorsquenotreespritn’estplusému.C’estainsiqu’onprie.Nouspourrionsêtresurprisdecequenousentendonssinousprions leCredodecettemanière.Nouspouvonsprierdecettemanièreavecn’importequeltextedeprière.NouspouvonsprierlesÉcrituresde la mêmemanière. Le père Chaminade dit de prier le texte lentement jusqu’à ce quequelquechosenous frappe,etcelaarriverasinouspouvonsdemeurerattentifsetcentrersurDieu.Resterconcentrésestimportantparcequec’estcequientraînenosmouvementsdanslaprière.

Voiciunexemplequipourraitnousaideràmieuxcomprendrecequ’estlaconcentration.J’aidéjàentenducetteimagelorsd’uneconférencesurlaconcentration.L’orateurlaprésentaitdelamanièresuivante:

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Sijedéposesurleplancheruneplanchede16``etquejevousdemandedemarcherdessusd’unboutàl’autre,vousallezprobablementlefairesansaucunproblème.Maintenant,sijeplace cette planche de 16`` entre deux bâtiments de 10 étages et vous demande de latraverserd’unboutàl’autre,ilestpossiblequevousallezrépliquer:«Êtes-vousfou?Jevaistomberetmecasserlecou»Pourquoi?Qu’êtes-vousentraindepenser?Oùsetrouvevotreconcentration?Sivotreconcentrationestréellementsur laplanchevousnetomberezpas.Maisvotreconcentrationestvers lesolversoù justementvousnevoulezpastomber.Lesfunambulesdisentqueletrucdeleurexploitc’estdegarderlaconcentrationsurlefiletnonsurautrechose.

J’aireçuuneleçonétonnantesurlaconcentrationunefoisquandj’étaisenvoyageenavion.Il y avait un jeune assis à côté demoi; il avait 15-16 ans. Je l’ai remarqué car il avait unphysiquetrèsbienproportionnémêmes’ilétaitpetit.Jeluiaidemandé:«Es-tuunathlètedequelquediscipline?Ilrépondit:«Jesuistroppetitpourjoueraufootball,alorsj’aichoisilekaraté.»Enplaisantant,jeluidis:«Casses-tudesbriquesouquelquechosedugenre?»Ilrépondit:«Oui.»Jedisalors:«Veux-tumedirequetucassesdesbriquesavectesmains?»Ilrépliqua:«Oui,voussavez,ilyaunetechniquesimplepourfairecela.»Jerepris:«Jetecrois;maisquelleestcettetechnique?»Ilrépondit:«Bien,c’estlaconcentration.Voussavez,vousaussivouspourriezcasserunebrique.»Jeluidis:«Écoute,jesaisquejenepeuxpas casser une brique. » Il répondit: « Je devine pourquoi vous ne pourriez pas. Votreconcentration estmal orientée. »Alors, je lui dis: « Explique-moi cela. » Il dit: « Il suffitseulementdepenseràcasserunebriqueavecvotremain.Qu’êtes-vousentraind’imaginer?»Jeluidis:«J’imaginemamainentraindefrappercettebriqueetquejevaismecasserlamain.»Ilrépondit:«C’estpourquoivousn’arriverezjamaisàcasserunebrique.Vousdevezvoirvotremaindel’autrecôtédecettebrique.Vouspensezquecen’estpaspossible,alorsvousnepouvezjustementpasl’imaginer..»Jenesaispassicequ’iladitestvraiounon.Jen’aijamaiscasséunebriqueparcequejenepeuxarriveràcroirequemamainverraitl’autrecôtédelabrique.Lejeunemedit:«C’estletrucutilisépourcasserdesbuches,desbriquesou de faire quoi que ce soit. » Alors je me suis souvenu du père Chaminade qui disaitquelquepart:«Cen’estpasunequestiondesavoiressayez.C’estunequestiondelefairedelabonnemanière.»LepèreChaminadeparlaitalorsdelaprière.

Jemesouviensdem’êtreentretenuunefoisaveclepèreGeorgesMontagueausujetdela«présence ». Georges dit: «Être présent veut dire ne pas être ailleurs.» Si vous êtes avecDieu,alorsvousn’êtespasailleurs.Lechangementgrâceàlaprièrenevientpasseulementdelarépétitiondequelquechose,c’estaussilefaitdelaconcentration.LepèreChaminadedisaitquesinousvoulonsêtreconvaincusdequelquechose,ilfautfairedesexercicesdefoi.Cela ne veut pas dire de simplement répéter une phrasemais de la répéter pendant quenoussommescentréssurDieu.SinousrépétonsunephraseetquenoussommesréellementunisàDieu,l’énoncédevientrapidementuneconviction.Sentir,penser,imaginer.vouloir–avec le Christ – vivre à travers ses mystères et ses expériences avec Lui, tout celagraduellementdevientunepartiedecequenoussommes,

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Quels sont les problèmes que nous rencontrons? Un de ceux-là est notre ego dont nousavonsparléauparavant.C’estnotrepropreimagedesoiquineveutpaschanger.NotreegorésisteàtouteprièrequipourraitMEchanger.,Unsecondproblèmeestquecechangementgrâceàlaprièreesttrèsgradueletrequiertdelapatience.Celaveutdirequenousdevonsycroire et nous y attacher. L’article 58denotreRègle dit: « S’y adonner [à l’oraison] avecpersévérancefaitparvenirà la foiducœuretnousrapprochedenotre fin».Audébutdel’undesestraitéssurlaprière,lepèreChaminadedisait:«Ilfautuneespèced’intrépiditédans lescommencementspour soutenir l’exercicede laprésencedeDieudans l’oraison»Pourquoi? Parce que d’un côté, nous devons mettre de côté notre moi, notre ego, nospropresintérêts.Nousdevonsnousdépartirdetoutcela.D’unautrecôté,nousn’avonspasencorebeaucoupdeconnaissancedel’infiniebontédeDieupournousdanslaprière.Noussommes en quelque sorte àmi-chemin, entre les choses, et cela prend du courage pourrester en sa présence. Il y a beaucoup de problèmes réels quant il s’agit de la prière.Quelques-uns disent: « Je ne suis pas appelé à cela. » C’est leur conviction, leur imagepropre. Ou bien, ils disent: « Je n’ai pas ces dons. » C’est habituellement l’image de saproprepersonne,parcequelepèreChaminadedisaitquesinoussommesappelésàêtredesMarianistes,noussommesappelésàl’oraisonquotidienne.

Uneautreobjectionsérieuseest:«Nousavonstropdetravailàfaire.»Sivousfaitestoutesles chosesquivous sontassignéesenpremieretqu’alorsvousessayezdepriervousallezvousendormirtroisminutesaprès ledébutparcequevousêtesfatigués.C’esttrèsvraiettrèssain.Maisqu’est-cequ’onfaitpouryremédier?Quelques-unsdisent:«Vousvouslevezuneheureplustôtlematin.»Ordinairement,celanerèglevraimentpasleproblème.Maisnous devons faire quelque chose pour régler ce problème parce que nous n’avons pasbeaucoup de sympathie de la part de notre Règle sur ce point. Cette pratique a étéprésentéedanstouteslesversionsquiontétéécritesdenotreRègle.LaRègleactuelledit:«Une occupation, un emploi ou un loisir qui ferait habituellement obstacle à l’exercice del’oraisonestincompatibleaveclaviereligieusemarianiste.»(Règle4.4).L’énoncéquenousavonslaissédecôtédesConstitutionsde1839ajoutaitt:«…etlesujetenestretiréauplustôt».Cequecettephraseditenréalitéc’estquesinousnepouvonspasfaireoraisonparsuited’uneimpossibilitéphysique,parsuitedutravailoudelafatigue,nousdevonschangernotre travail parce que nous ne serons jamais le religieux que nous sommes appelés àdevenir. Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas faire beaucoup de bien. Le pèreChaminadedisait:«Nouspouvonsfairebeaucoupdebonneschosessanslaprièremaisceserabienpeuàcompareràcequipourraitseproduiresinousétionsfidèlesàlaprière.»

Les articles 4.5 et 4.6 de notre Règle précisent que nous avons besoin d’aide.Unde cesaidesc’estdeprierencommunauté.Lacommunautédoitcréeruneatmosphèrepourcela.Depuisqu’onalaissétomberlanécessitédeméditerensemble,chaquecommunautédécidemaintenant,selonlaRègle,desconditionspourlaprière.Peut-êtredevrions-nousexaminercedontnousavonsbesoincommecommunautépouraiderchacunàprier.

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Il y a quelques années, un prêtre indien a visité nos Provinces et nous a donné uneconférence sur la prière. Je me souviens de deux choses de cette conférence. Je lui aidemandé: « Qu’est-ce qu’une distraction? » Il a répondu: « Laissez-moi vous donner unexemple.Sijevousparleetquejevoisparlafenêtrequelqu’unquimarche,jesaisqu’ilyaquelqu’unlà,Maissijecontinueàvousparleretquejemeconcentresurvous,cen’estpasunedistraction.Mais si par la fenêtre, je vois quelqu’unquimarcheet que je suive cettepersonne avec attention même si je continue à vous parler, ça c’est une distraction. »Questiondeconcentration.L’autrechosequ’iladitec’.était:«Méditez-vousencommun?En Inde,nous le faisons.Cen’estpasdansnotre tradition jésuiteet cen’estpasnonplusdans notre Règle. Mais nous méditons en commun parce que quand nous méditons encommunetquenoussommesconscientsquenoussommestouscentréssurDieu,ilyauneprofondeunionquiseformeparminous.C’estunpartagesilencieuxquiestplusprofonddetoutcequel’onpeutexprimer.»Ilyaiciquelquechoseàretenir;peut-êtredevrions-nousfairecetteexpérience.

L’article4.6denotreRèglenousparledel’aidemutuellequelacommunautépeutapporteràchacunpourrendrel’oraisonplusfacileetpours’encouragerlesunslesautres.Toutcelacesontdeschosesquenousdevrionsexaminer.EllescontribueraientànousouvriràtoutessortesdegrâcespromisesparDieu.

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CHAPITRE10

Émondéspourproduireplusdefruits

J’aimerais réfléchir avec vous sur une expérience de notre vie spirituelle qui a uneimportancesingulière.Onpourraitmêmelaqualifierd’unexerciceparmilesplusimportantsque nous devons pratiquer pour vivre pleinement notre vocation. Le Père Chaminade enétaitbienconscientaucoursdespremièresannéesdelaSociétéetilyconsacrabeaucoupde temps au cours des retraites et de ses conférences à cette étape spéciale de la viespirituelle.NotreFondateurnesemblaitpasparticulièrementpréoccupéparlesconversionsinitiales. Ce qui le préoccupait davantage, c’était la seconde conversion, non du péché àl’étatdegrâce,maisdel’étatdegrâceàlasainteté.

NousavonssouvententenduparleraucoursdenotreformationreligieusedescitationsoùlePèreChaminadeparlaitdenotrevocationcommed’unappelàlasainteté.Ilparlaitdelaplushauteperfection,oude«laplushautesainteté». Ilexisteuneétape,danscettevoievers la saintetéquenousnepouvonspaspasser sous silence.C’est l’étapedupassagedel’étatde«bon»àceluide«fervent».Cettetransitionessentielle,notreFondateurl’appellele«travail»oul’expériencedelapurification.C’estenréalitélecœurmêmedesathéologieascétique.LapurificationestabsolumentnécessairesinousvoulonsdevenirceàquoinoussommesappelésentantqueMarianistes.

Dans notre système des Vertus, nous avons les vertus de préparation, les vertus depurificationetlesvertusdeconsommation.J’aimeraisparlerdelapartiecentraledel’étape,décisive,pourdevenirfervent,lefaitd’êtremusparuneardeurferventepourleschosesdeDieuetdeMariedansnotremonde. Les vertusdepréparation fontdebons religieux, lesvertus de purification font des religieux fervents et les vertus de consommation font dessaints. Ces termes peuvent vous paraître des jeux de mots, mais lorsqu’on les vit, ilsdeviennent une réalité passionnante. Ce que nous disons à leur sujet, c’est ce que Jésusvoulaitdireparcesmots:«êtreélaguéspourporterplusdefruits».

MaiscommeplusieursimagesdepurificationcheznotreFondateur,oudanslesÉcritures,etdanssapropreexpérience.LapremièresetrouvedansleDeutéronome,1,68.Lapurificationne s’applique pas aux méchants ou à ceux qui ne font rien pour aider les autres. Elles’appliqueauxgensdebienqueDieuveutintroduireàunautreniveaudeferveur.

Le livreduDeutéronomeracontecomment lepeupledeDieuaétéconduithorsd’Égypte.Les Juifs étaient alors libres. Après quelques années, ils savaient qu’ils n’étaient plusmenacésparl’Égypte,quelesÉgyptiensnepouvaientpluslesrendreesclaves.Àpartirdecemoment-là, leurs efforts étaient centrés sur ce qu’ils devaient faire pour suivre Dieu.

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Allaient-ils suivreDieu sans réserveou le suivre à leur façon ? Ledébut duDeutéronomerelate que le peuple de Dieu était parvenu auMont Horeb et qu’ils commençaient à s’yétablir. Ilsavaientétédesnomadesetmaintenant ilsvenaientdedécouvrirunbelendroitoùs’établir.Ilscommencèrentàs’installer.Ilssavaientfonderunvillagesansl’aidedespaysétrangers. Ils songeaient peut-être à s’y établir de façonpermanente. Ils commençaient às’établir d’unemanière confortable.Dieu leurdit (et à nous aussi) à l’Horeb: «Vous êtesdemeurésassez longtempsdanscettemontagne.Reprenezvotre routeetcontinuezvotrevoyage.AllezprendrepossessiondelaterrequeYawehajurédevousdonner».Deut1,6-8).Ilyad’autreschosesquivousattendent.

Noussavonsàquelpointilestpéniblededéménagerquandtoutvabien.C’estmoinsdurdelefairequandçavamoinsbien.Quandtoutvabienondit:«attendsunpeu.Jepeuxfairebeaucoupdebienici.Commentpuis-jesavoirquejepourrailefairequandjeseraiàl’autreendroit?»Onn’ensaitrien.Sic’estlavolontédeDieu,c’estalorspournousunequestionde confiance. La purification consiste toujours à transformer notre foi en une vraieconfiance en Dieu et de dépendre de lui. C’est pourquoi la purification fait de nous desreligieuxfermentsetzélés.

L’Écriture nous donne une autre image, celle que le Christ nous a donnée concernant lavigneetlesbranches.Nouspouvonscomprendrelanécessitédetaillerlesbranchesmortes.Il se peutmêmeque nous ayons des suggestions concernant certaines qui devraient êtreélaguées. Toute branche qui ne porte pas de fruit devrait être coupée. Mais même lesbranchesquiportentdufruit,Dieulestaillepourqu’ellesproduisentdavantage.Quandcelas’applique aux autres, on est facilement d’accord. Mais quand cela nous concerne, c’estdifficile à accepter parce que nous agissons bien. Nous avons bien. Nous avonsl’impressionqu’onnousélaguedanscequenousfaisonsdebien.Nousavons l’impressionqu’onnousretranchequelquechosedebienetnonqu’onnousamputedequelquechosedemal.Labranchedit:«regarde,jeproduisdéjà.Queveux-tudemoimaintenant?».MaisDieutaillepourquelabrancheproduiseencoredavantage.

NotreFondateurnousadonnéuneimagesignificativedanscelleduruisseau.Ildit«jeveuxvivrecommeleruisseau.Leruisseaus’écoulelibrement.Lorsqu’ilrencontreunobstacle,leruisseaun’essaiepasd’enleverl’obstacle.Ilcouledavantageenprofondeuretenlargeuretserenforce,desortequefinalementildébordesurl’obstacleetpoursuitsonchemin,maiscette fois, avec plus de profondeur et de largeur qu’auparavant. C’est une spiritualité quin’estpasfacileàsuivreparcequenousavonstendanceàenleverunobstaclequisetrouvesurnotrechemin.LePèreChaminadesuggèredefairetravailler l’obstaclepourpoursuivrecequinousrendplusprofondsetplusforts.

MèreTérésadeCalcuttafitunjouruneobservationintéressanteàunjournaliste.Celui-ciluiavaitdit:«Mère, lespauvressouffrentbeaucoupdanscemondeet ilmesembleque lespauvresontdavantagedecroixàporterquelesriches.Commentexpliquez-vouscela?»Ellerépondit: «C’est parce que les pauvres acceptent de porter la croix. Que faites-vous, les

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riches,quandarriveunecroix?Lapremièrechosequevousfaitesestdevousendéfaire.Etpouryparvenir,vousrecourezàtouslesmoyenspossibles».C’estnotresolutionnormale.Est-ce quenous voulons dire par là qu’il faut rechercher les croix ?Non. Jésus ne nous ajamaisdemandédelefaire.Iladitdelesporterquandellesseprésentent.Pourquoi?Parceque,danscecas,ellesvontnouspurifier.Ellesnousémondentpourquenousportionsplusde fruit. C’est difficile à faire,mais cela nous libère, et si nous acceptons ce que la croixprometellerendnotrevieplusproductivecommereligieux.

Lapurificationestà l’œuvredansnotrevécuordinaireetelleest inévitable.Parexemple,notreFondateurdéclarequesinoussommesvraimentouvertsà lavolontédeDieu,nousallonstousparvenirauxlimitesdenoscapacitésetdenosfaiblesses.Nousallonsressentirnoslimites,cartôtoutard,onnousdemanderaquelquechosequinousdépasse,quiestau-delà de nos forces.Que faire alors ? Sur quoi allons-nous nous appuyer si quelque chosedépasse nos limites ? C’est sur Dieu seul que l’on peut alors s’appuyer. C’est commemarcher sur l’eau. Sur qui allons-nous nous appuyer pour marcher sur l’eau ? Il n’existequ’uneréponse.Unexempleclassiquedeconfiancesetrouvedansl’évangiledeMarc(6,34-44),lorsqueJésusditàsesdisciples:«ilyaici5000personnesquiontfaim.Donnez-leuràmanger.» Ils répondent: «Nous ne pouvons pas les nourrir. Nous ne pouvons pas lesnourrir.Sinousfaisions200joursdetravailetquenoussoyonspayés,celanesuffiraitpas.»Quellefutlasolution?Jésusleurdit:«Qu’est-cequevousavez»?Ilsrépondirent:«Cinqpainsetdeuxpoissons».Cen’étaitrienencomparaisondecequ’illeurdemandaitdefaire.Il leur dit de commencer à distribuer ce qu’ils avaient et d’avoir confiance en lui. Lesdisciples durent donner tout ce qu’ils avaient et avoir confiance avec une foi qui rendraitpossiblecequ’ilsavaientàmultiplier.C’estuneexpériencepurificatricede laconfianceensoi-mêne.

Il nous est bond’avoir à dépasser nos limites, aumoins telles quenous les voyons.Nousconnaissonsnos limites.Nous savons cequenouspouvons faire.Nousnous fionsànous-mêmesetnousnefaisons jamais l’expériencede lapuissancedeDieuquiœuvreennous,au-delàdenoslimites.L’expériencedepurificationnousdonnesanscessel’impressionqu’ily a quelque chose qui cloche quelque part. C’est dans l’ordre des choses parce que nousperdons quelque chose en étant purifiés de quelque chose. La purification nous apparaîttoujourscommequelquechosequinedevraitpassepasserdecettemanière.CequenotreFondateurnoussuggère ici,c’estdediredélibérément«OK, ilya iciunobstacle, ilyaunproblème,ilyaiciquelquechosequinedevraitpassepasserdecettemanièrelà.Maisnousallonspasserà travers,avecunsentimentdedépendanceplusgrandedeDieu,etune foiplus profonde. Nous devons comprendre qu’une plus grande confiance en Dieu nous faitporter plus de fruit. Le Père Chaminade a donné beaucoup d’exemples de situations defaiblessesetdelimitations.Sonproposétaitqu’ellesnedevaientpasnousarrêterdefairecequenousfaisonspourDieuetnotreMèrebienaimée.Nousnedevonspasleslaisserlimiterlesfruitsquenousdevonsporterdansnotremission,sinoussommespurifiés.

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Lapurificationtoucheplusieursdomaines.Levœuquinouspurifieleplus,sinouslevivonspleinement est celui de l’obéissance. Nous en voyons les effets dans la vie de NotreSeigneur.Toutesavieaétéunevied’obéissanceau-delàdecequ’onpeutimaginer.Nouspouvonsnousenfaireuneidéedanscertainesdesesdéclarationsàcesujetdansl’évangiledesaintJean(6,34)alorsqu’ilessayaitdenousexpliquersavie.Ildit:«ManourritureestdefairelavolontédeCeluiquim’aenvoyé».Ici,ilneditpas«MonPère».Ildit«Celuiquim’aenvoyé». Jésus semblevouloirnousdire:«Je suisenmission. Je suis sousobéissance. Jedésireaccomplirsonœuvre.C’estmanourriture.Cen’estpasmonfardeau.C’estcequimenourrit.C’estcequejeveuxfaire».

Ailleurs,dansl’évangiledesaintJean(5,19-21),JésusditauxJuifs:«envéritéjevousledis.LeFilsnepeutrienfairedelui-mêmequ’ilnelevoitfaireaupère;cequefaitcelui-ci,leFilslefaitpareillement.CarlePèreaimeleFils,eluimontretoutcequ’ilfait».NousimitonsleChristen lui soumettant toutenotreconduitepourqu’il la transforme ;ason image. JésusimitecequefaitsonPère,etilajoute:«ToutcequefaitlePère,leFilslefaitégalement».Puis ildonneunexemple frappant:«Comme lePèreeneffet ressuscite lesmortset leurredonnevi,ainsileFilsdonnevieàquiilveut».Auchapitresuivant,ilditlamêmechoseetdéclare:«JesuisdescenduduCielpourfairenonmavolonté,maislavolontédeceluiquim’aenvoyé».(Jean6,38).

L’obéissance dans la vie religieuse consiste à faire la volonté de quelqu’un d’autre. On abeaucoupécritsurl’obéissanceetnousenavonssouventdiscuté.Nouspouvonsladécrirecomme très compliquée, comportant de subtiles distinctions, mais au fond, la définitioncentrale reste lamême. L’obéissance signifie que tu fais quelque chose qu’un autre veut.C’estincontournable.VouspouvezdéciderdefairecequeleProvincialvousdemande.C’estl’obéissance aumoins à une personne. C’est déjà un bon départ. Si vousmenez une vied’obéissance totale, vous faite alors constamment la volonté des autres. Dans noscommunautés religieuses,nousavonsbeaucoupd’estimepour ceuxqui agissent ainsi.Onaimevivreauprèsd’eux,etonaimetravailleraveceux.Nousneparlonspasdeceuxquinesontresponsablesderien.QuandJésusaditàsonPère:«Jeveuxfairetavolonté»iln’estjamaisrevenusursadécisionetn’apasdit:«Jeregrette,maisc’esttafaute».Sijefaiscequetuveux,j’enprendsl’entièreresponsabilité.C’estbienlàuneobéissanceforte.Mettrele blâmede ceque l’on fait par obéissance sur celui qui commande, cen’est pas la vraieobéissance.

Vous pouvez faire la volonté d’un autre de toutes sortes demanières. Il s’agit plus d’unehabitudequed’unacte.Sivousêtesdisposéàfairelavolontéd’unautre,vousavezl’espritd’obéissance.Vousdirezpeut-être:«Jenepuisfairetutcequelesautresmedemandent».Etc’estvrai!Ilfautuncertaindegrédeprudenceetdediscernement.D’ailleurs,jenecroispasqu’aucund’entrenoussoitobéissantàcepoint!

Cequicompte,c’estdechoisirlibrementnotreorientation.Nousnousdisons:«J’appartiensàlaSociétédeMarie.Jel’aime.C’estpourquoinotreorientationauneinfluencesurceque

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nousfaisonsetquinecorrespondpastoujoursànosgoûts.Queleffetacetteattitudesurnous?Ellenouspurifie.Ellenousémondepournousfaireproduireplusdefruits.Enfaisantlavolontéd’unautrenotremoiensouffrebeaucoupcarnousavonsl’impressiondeperdrequelque chose. Et, de fait, c’est ce qui se produit. L’obéissance est une grande source depurification en ce qu’elle nous délivre de notre volonté égoïste. Cette purification estd’autant plus à l’œuvre lorsque nous ne pouvons voir clairement que c’est pour nous lameilleurechoseàfaire.J’iraisjusqu’àcomparerlefaitdefairelavolontéd’unautreàcequeJésus adit au sujetde servir les autres. Il a dit: «tout ceque vous faitespour les autresdevraitêtre,d’unecertainemanièreleurvolontéetnonlavôtre».Sivousfaiteunactedecharitépour les autres, ils l’acceptentparceque c’est leur volonté. Il n’est pasnécessairequ’ilsexprimentleurvolontéavantquevouspassiezàl’action.S’ilestvraiquetoutcequenousfaisonspourlesautresestvraimentfaitpourJésus,jecroiségalementquechaquefoisquenousfaisonslavolontéd’unautre,paramour,nousobéissonsàDieu.

Jen’insisteraipaspourdirequecequejevaisdireestvalable,maiscelam’aétéd’ungrandsecours. Lorsque j’ai considéré sérieusement pour la première fois de faire le vœud’obéissance,jen’avaisguèrel’attitudedeceluiquiveutfairelavolontédesautres.Maisonnousdisait, au coursdenotre formation religieuse,que l’habitudenaîtde la répétitionetque l’attitudequienrésultesetransfèreauxautreschoses/domaines . Jemesuismisalorsàobéirà tous les feuxdesignalisation routière. J’aialors remarquéaprèsuncertaintempsqu’ilseformaitenmoiunecertainementalité.Jefaisaislavolontédequi?Jesavaisseulementquecertainespersonnesvoulaientquejerouleàl’intérieurdeslimitesdevitesse.Si la limite était de 55 et que je roulais à 60, je revenais à 55. Cette attitude s’esttransformée en habitude. Si j’obéis aux lois de la circulation pour les autres, je suis aussimieuxdisposéàfaired’autreschosespoureux.

Obéirestunebonnechoseetc’estquelquechosequinouspurifievraiment.Ilfautobserverde près ce qui se passe à l’intérieur de nous-mêmes. La purification n’est pas seulementnégative:ellenousmèneàuneplusgrandeconfianceetplusgrandedépendancedeDieu.C’est une réaction positive. Quand nous nous en remettons à Dieu, nous passons d’unedépendanceenquelque chosequenous connaissonset contrôlons,notremoiégoïste, ennousaxantsurquelquechosedontnousavonspeudepreuves.Nousavançonsen faisantconfianceenquelquechosequenousnepouvonspasprouver.

Dans l’histoiredenotreProvince,nousavons l’exempled’unerechercheencommunquiaabouti à un état de purification. Il était dans la ligne du processus de purification. Il y aenviron une douzaine d’années, nous étions en face de deux propositions soumises auChapitre provincial. L’une concernait l’ouverture d’une nouvelle œuvre en Inde ; l’autreconcernait l’ouverture d’une œuvre au Mexique. Nous en avons discuté lors de notrepremière réunion. Il fallaitdéciderpar laquellenousallionscommencer.Nousen sommesarrivés à une impasse. Nous avions deux bonne propositions,mais nous n’arrivions pas ànousentendresur laquelle il fallaitdonner lapréséance.Nousvoulions faire lavolontéde

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Dieuetnousétionsconvaincusqu’ilfallaitchoisirunedesdeux,parcequenousn’avionspaslesmoyens de prendre les deux. Nous avions l’impression qu’il n’y avait pasmoyen d’ensortiretquenous finirionsparne rien fairedu tout.On suggéraalorsde clore la réunionpourcejour-làetdedemanderàtoutlemondedeseretirerdanslaprièrepourrevenirlelendemain. Au début de la réunion, il n’y avait pas de solution en vue. Je pensais que lajournéeseraitbienlongue.Mais,aucoursdelarencontre,quelqu’undit:«Pourquoinepasprendreenmainslesdeuxprojets?Iln’estpasnécessairedenousattaquerauxdeuxprojetsen même temps ; prenons-en un, et, lorsque les conditions providentielles serontréalisables,nousentreprendronsl’autre».Nousavonsfaitl’optiondesuivrelesindicationsdelaProvidenceplusquenospropresintuitionsetconvictions.Enmêmetemps,nousétionsplusattentifsàlavolontédeDieu.Aujourd’hui,noussommesprésentsdanslesdeuxpaysetnosœuvresyprospèrent.Vousallezpeut-êtredire:«Est-cec’estunacted’obédience»?Oui, tous lesmembresduChapitre venaientd’accepterune idéequiprovenaitd’unautreplutôtquedesefieràleurpropreopinion.Celaseproduitlorsquenousfaisonsconfianceàquelquechosequisurpassecequenouspensonsraisonnablementfaireparnous-mêmes.

Je crois que la purificationest quelque chosequi requiert une considération approfondie.NotreRègledeVie,(Article2.26)déclareàcesujet:«Lapratiquedel’obéissanceconduitlereligieux à se confier à la Providence pour ce qui concerne son avenir et l’emploi de sestalents. Une ambition personnelle ou un attachement excessif à une tâche particulièrepeuvent être une grande tentation. La pratique du discernement et de la directionspirituelle, l’habitude de rendre compte et le dévouement à la mission de la Société,enseignent auMarianiste à s’en remettre au Seigneur commemaître de sa vie et de sadestinée». C’est cette attitude que nous recherchons. Elle est à notre portée et noussommes tousappelésà la rechercher. Je suggèreque l’on lise lentement le chapitrede laRègledeVieconcernantl’obéissanceetqu’onluidonnel’occasiondenousparleraucœur.Cela n’enlèvera pas les obstacles auxquels nous avons à faire face et ne rendra pas lessituations plus faciles.Mais nous donnerons à la grâce l’occasion d’agir d’unemanière àrendreproductiveslessituationsdifficiles.

Sinous jetonsuncoupd’œil sur lesdifficultésquenotreFondateura rencontréesdanssavie,nousnousdemandonscommentilapupoursuivresonœuvre.Ilavaitdebonnesraisonspour tout abandonner, mais il a poursuivi son travail parce qu’il acceptait entièrementl’œuvre de purifications dans sa vie. Il a souvent changé d’idée en ce qui concernait desprojetsconcrets.Ilestalléjusqu’àdemanderl’avisdupèreLalanneavecquiilavaitbiendumalàs’entendre.LepèreLalanneavaituntempéramentdifficile,mais lepèreChaminadel’aimait commesonpropre fils. Il l’amêmeobligéàquitter la SociétédeMariepourqu’ilpuisserembourserlesdettesqu’ilavaitcontractéesendehorsdel’obéissanceetl’amêmeassuréqu’illereprendraitdèsqu’ilauraittoutremboursé.LorsquelepèreLalanneretournaaubercail, lepèreChaminade[n’étaitpluslà,maisentretempsetbienavant]il luiaccordaencore sa confiance et il avait souvent recours à ses conseils lors de la rédaction desConstitutions de la Société deMarie. Je ne crois pas que le père Chaminade n’ait jamais

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songéàsedéfairedequiquecesoit.Certainsquittèrentd’eux-mêmes;ilnecherchajamaisàsedébarrasserdepersonne,mêmedeceuxquisemblaientêtredesobstaclesàsonprojet.ChaquefoisquejecommenceàcroirequeladémarchedupèreChaminaden’étaitpastrèsprudente, j’aià l’esprit l’imagedu ruisseau. [le ruisseau,arrêtéparunobstaclecontinueàs’alimenterenamont,élèvesonniveau,enrobe l’obstacle, lecontourneou lesurmonte] LepèreChaminade incarnait cette image.Certainespersonnesétaientpour lui desobstaclesréels.Chaminadeincarnaitcetteimage.Certainsétaientpourluidesobstacles.Maisfaceàeux,Chaminadegrandissaitenprofondeuretenlargeur, jusqu’àcequ’ilsoitpurifiéetsoitcapabledecoulersonchemin,encoreplusproductivementqu’avant.RemercionsDieupourlafaveurdel’obéissance,parcequ’ellepurifieetmetenjeudenouvellesgrâcespournousrendreplusproductifs.

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CHAPITRE11

Purifiernotrefoi

Dès le début de notre Règle de Vie (des religieux marianistes), il nous est dit que notrevocation religieuse est une vie de foi. L’article 4 nous rappelle que «nous cherchons àdevenirdeshommesdefoiquijugenttouteschosesàlalumièredelaRévélation.Lafoinousfait découvrir commentDieu est à l’œuvredans l’histoire dumondeet dans notre vie dechaque jour.» Jevoudraisréfléchiravecvoussurcetteviedefoi,pluspourvoircommentvaincrelesdifficultéspourvivrelafoiquepourparlerdelaviedefoielle-même.C’estunefaçondecontinueràpartagerlaréflexionsurlapurificationduchapitreprécédent.

Selon la vision du Père Chaminade, toutes les expériences de purifications ont pour butd’approfondirnotre foipourquenotreactedeviennedeplusenplusunedépendancedeDieuetuneconfianceenlui.Sinousprenonslafoiausérieux,notrevieseraguidée,nonpastellementparcequenousconnaissonsparl’étudeoularaison,maisplutôtparcequenouscroyons. La foi est réelle seulement lorsque nous acceptons des choses que nous nepouvonspasprouver.SaintPaulditquesinousconnaissonsquelquechose,cen’estplusdelafoi,c’estdelaconnaissance.Danslafoi,nousvivonsdedonnéesquenousnepouvonspasprouver.Pourquoilemondeabesoindepersonnesquicroient?Parcequecequin’estpascruparlafoietvécuouvertementneseréalisepas.LesgrandespromessesdeDieuneseréalisentpasàmoisquequelqu’unn’ycroie.

Qu’estcequiestà labasedenotrefoi?Quelestnotreactedefoi fondamental,nous lesMarianistes?Detouteévidence,notrefoiestenracinéedans leBaptêmeetdanstoute laRévélationetlesenseignementsdel’Église.Maisenplusdecela,nouscroyonsencertainesvues(visions,visions)liéesànotreviecommemembresdelaSociétédeMarie.L’uned’entreellesdontnousavonsdéjàparléestque«DieuestresponsabledelafondationdelaSociétédeMarie»commeledisaitlePèreChaminade.C’étaitl’unedessesfortesconvictionsdefoi.NouscroyonsaussiqueDieunousachoisisparmibeaucoupd’autrespourêtremembresdecette Société. Nous croyonsquenous sommesappelésparMarieelle-mêmeà la Sociétépour continuer samission. Ce sont là les éléments de base de notre foimarianiste. Ellesdeviennentdesréalitésquifaçonnentnotrevie.Ilyaencorebiend’autreschosesquenousne pouvons pas prouver, mais comme hommes (et femmes) de foi, nous vivons de cesfondements,etcelaentraînedesdécisionspouruneviebaséesurcela.

Quelquesunesde ces convictionsdeviennentplus clairesquandnous regardons certainessituationsinévitablesquenotreFondateurditqu’ellesserventàpurifiernotrefoi.Ilainsistésurbonnombredecessituations,parcequ’unedenostendances–ouplûtotLAtendeance

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– est deprendreune autredirection.Alors, nousne vivonspas selon la vieou les tâchesauxquelles nous avons été appelées par notre vocation religieuse. Ces situations sontcourantesdanslesensqu’ellessontvécuespartoutunchacun.Ellesviennentdel’extérieurdenous-mêmes,encontrasteaveclafaiblessequivientdel’intérieurdenous-mêmes.Ilyadescirconstancessurlesquellesnousn’avonsaucuncontrôle.

Lapremière,c’estl’opposition.LepèreChaminadeditquecelaarriveàtoutepersonnequis’engage dans l’œuvre de Dieu. Dans toute bonne œuvre que nous entreprenons, nousallons rencontrer de l’opposition.Notre Fondateur l’exprime conne suit: «Lesœuvres deDieu sontdestinéesàêtre contrariées».Donc, sinouspensonsquenousallonsvivreunecroisièrepaisible,quelquepartdansnotreparcoursnousseronstrèsdéçus.NotreFondateurnousditd’êtreprêts,spécialementàdel’oppositionvenantdepersonnessupposéesdevoirnousaider.Quenosennemissoientcontrenous,nouspouvonsaffrontercela.Maisquandceuxquidoiventnousaiders’opposentànousounouscréentdesdifficultés,c’estplusduràprendre. Notre première réaction est de nous débarrasser de ces personnes ou de nousrésigner.

JésusapromisunetelleoppositionàSesdisciples,presquecommeunecaractéristiquedeson Église: qu’ils seraient persécutés. Et la persécution dont parle Jésus ne vient pasnécessairement de l’extérieur. Les persécutions mêmes contre Jésus ne venaient pas del’extérieur.Celuiqui l’atrahiétaitundesestrèsprochesassociés, l’undesdouzeapôtres.Jésus nous avertit d’être prêts à quelque chose de semblable pour nous-mêmes. Parexemple,dans lepremierdiscoursapostoliquede l’ÉvangiledesaintMatthieu, Jésusavaitenvoyélesdouzeenmission,etquandilsrevinrent,ilsétaientravis.Ilsdisaient«Lepouvoirque tu nous a donné agit puissamment!Nous l’avons vu à l’œuvre!» Alors Jésus leur dit«Méfiezvousdeshommes:ilsvouslivrerontauxsanhédrinsetvousflagellerontdansleurssynagogues [«ils», ce ne sont pas des «étrangers», mais c’est l’église à laquelle ilsappartiennent]. Vous serez traduits devant des gouverneurs et des rois, à cause demoi,pour rendre témoignage en face d’eux et des païens. Mais lorsqu’on vous livrera, necherchezpasavec inquiétudecommentparlerouquedire:cequevousaurezàdirevousseradonnésurlemoment,carcen’estpasvousquiparlerez,maisl’EspritdevotrePèrequiparleraenvous.»(Mt10,17-20.).

l y a quand même une bonne nouvelle. Chaque fois que nous entrons dans une de cesdifficultés,nousavonstoujours,rattachéàcela,unesolution.Mais lasolution,encoreunefois, n’est pas de nous défaire de l’opposition. La solution, c’est de travailler sur cettedifficultédemanièreàcequel’oppositiondevienneelle-mêmeuninstrumentpourlebien.

En affrontant les contrariétés et les difficultés venant de ses collaborateurs, le pèreChaminade lui-même est notre exemple le plus éloquent. Ses propres frères religieuxmarianistesontconvoquéunChapitregénéral;ilsnel’ontpasinvitéetneluiontmêmepasdonné le possibilité de prendre part ; et ils ont alors élu une nouvelle Administrationgénérale. Le père Chaminade a été exclu de l’élection. Il avait, auparavant, accepté

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d’abandonnerlegénéralat,seloncertainesconditions,lapremièreétantqu’ilnommeraitlui-même son successeur. Cette condition n’a pas été respectée. Dans un sens, le pèreChaminade a vécu en dehors de la Société qu’il avait fondée durant les cinq dernièresannéesde savie, jusqu’àquelques joursavant samort. Il yeutalors réconciliationetdespersonnessesontrepentiesetontreconnuleurstorts.Maisunetelleoppositioncontreluiétaitunesouffrance immense.Cependant, iln’arienfaitpourarrêter lesactivitésoupourempêchercequelesfrèresfaisaient.Enmêmetemps,lui-mêmen’apasabandonné.C’estcequ’ilprêchaitàsesdisciplesmêmeauparavant:Nelaissezpasl’oppositionvousconvaincredechangerlecoursdevotrevieetdevotrevocation.Sicelaétait,lamissionpourlaquellevousavezétéappeléeneseraitpasremplie.

Dansunede ses retraites, lepèreChaminadeadonnécetexemple. Si Jésus s’était arrêtéface à l’opposition, Il n’aurait jamais été crucifié. Et si Jésus n’avait pas été crucifié, il n’yauraitpaseuderésurrection.Seulelafoipurifiéepeutsurvivredanslescontrariétés.Cequinousestdemandé:persévéreraumilieudel’oppositioncommedansunparcoursnormal.L’oppositionsembletoujoursfausse,commequelquechosequinedevraitpasêtre,mêmequand elle est inévitable. Probablement que chacun ici pense à des situations qui nousarrivent, passées, actuelle, peut-être, et certainement venir. La question est de savoircommentnous réagissons faceà cela ?Nous voudrions avoirmieuxagi.Mais l’oppositionn’estjamaisunebonnechoseetnotreréactionn’estordinairementpastrèsbonnenonplus.Qu’estcequenousfaisonsdansuncascommecelui-ci?

LaréponsequenotreFondateursuggéraitestinspiréedelaLettreauxHébreux,12,2.«NemanquezpasdefixervosyeuxsurJésus,lechefdenotrefoi,quilamèneàlaperfection.»Sinous voulons grandir aumilieu des oppositions, ce ne peut être que par la foi. Nous nepouvonspasdevenirmeilleurs par nous-mêmes face à de telles oppositions, parceque laraison ne trouve aucun sens ici. Les contrariétés ne sont pas raisonnables. L’auteur de laLettreauxHébreuxcontinue:«Jésus,au lieude la joiequi luiétaitproposée,enduraunecroixdontilméprisal’infamieetquiestassisdésormaisàladroitedutrôneduDieu.Songezàceluiquiaendurédelapartdespécheursunetellecontradiction,afindenepasdéfaillirparlassitudedevosâmes.Vousn’avezpasencorerésistéjusqu’ausangdanslaluttecontrelepéché.»Héb12,2-4.Celaestvraipourchacundenous,dumoinsjusqu’àaujourd’hui..

ChacundevousaàsuivrecetexempleduChristetlapromessedelagrâceseraaurendez-vous.Celapurifienotrefoi,parcequedansunesituationcommecelle-là, iln’yaquelafoipureet la confianceenDieu.Puissiez-vousvousyaccrocheret continuerà travaillerpourfairelebienquevouscroyezpouvoirfaire.

Une seconde situation classique pour la purification, selon notre Fondateur est lasuggestion.C’est-à-direlessuggestionsd’abandonner,[Laissertomber,fuir].Ilditquequandnoussommesdansunesituationoùnoussommesfatiguésetquenouspensonsquenousnepouvonspassupporterquelquechoseplus longtemps,souventdesamisbien intentionnésnoussuggèrentdelaissertomberd’abandonner.Ilsnousencouragentetnoussoutiennent

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danscettesuggestion.LapèreChaminademetspécialementengardecontrelessuggestionsvenantde«prêtres peuréfléchis….mal inspirés quineréfléchissentpas».Nouspouvonsparfoisnousétonnerdecesurquoinousnousappuyons.Lapremièrechoseàaccepterestlesageconseildel’ÉvangileetdenotreRègledeVie.Maisest-cequecelaveutdirequenousne changerons jamais d’idée ? Non, cela ne veut pas du tout dire cela. Cela veut direqu’avantde le faire,nousdevonsvoiren toute réalitésinousabandonnonsnotreappelàpartirdeJésusousilesdifficultésnenousconduisentpasprovidentiellementdansuneautredirection.

Nousavonsunbonexempled’unetellesuggestiondansl’Écriture.J’yreviens-chaquefoisàl’occasion en passant. Jeme réfère aumoment où Pierre suggère à Jésus d’abandonner.Vous vous rappelez la scène ? Ils montaient à Jérusalem et Jésus leu dit: «Je vais êtrecrucifié.»Pierrefinitparcomprendrecequ’ilvoulaitdire.«Pierre,letirantàlui,semitàlemorigéner en disant: «Dieu t’en préserve, Seigneur! Non, cela ne t’arrivera point!» (Mt16,21-22).Tuneméritespascela.Tun’aspasbesoindecela.Tuesinnocent.Actuellement,tufaistellementdebien.Jesuisundetesdisciples,etsituprendsunedirectiondifférente,je vais te suivre. Alors Jésus se tourna vers Pierre et dit «Passe derrière moi! Tu parlescommeSatan!» Ilest intéressantdevoirqu’aprèscela, ilscontinuent leursactivités,etsixjoursplustard,JésuspritPierre, JacquesetJeanet lesconduisitàunehautemontagneetleur révéla sa gloire.Dans cette gloire, il s’entretenait de saPassion avec Elie etMoîse. Ils’agitbiend’unescènetrèsimpressionnante.

Leproblèmec’estquelorsquecessuggestionsseproduisent,c’estàunmomentoùnouslesaccueillons parce qu’elles peuvent nous délivrer de notre souffrance.Notre Fondateur ditque ce n’est pas la question de savoir si nous devons souffrir,mais si nous voulons vivrel’appel du Christ. C’est-à-dire de croire que nous ne devons pas abandonner, parce quel’appeldeDieuesttoujoursuneréponsemeilleurequenotreproprechoix.Encoreunefois,cequinousfaitcontinueràallerdel’avantdansunesituationcommecelle-ciestlafoipure.Nousne sentonspasdevoir compter sur toutautre support.Heureusement, laplupartdecessituationssontpassagères.Et lorsquenouspassonsà-travers,nousdevenonsmeilleursetplusproductifsdanslebien.

Il arriva avant d’aller au Séminaire, alors que j’étais jeune frère, qu’il me fut demandéd’entreprendreunprojet.J’aivucequecelamedemandaitetj’aidit,«Non,jenevaispasfaire cela.» En fait, j’avais d’abord accepté et commencé à planifier ; puis je prévoyaisquantitédeproblèmes.Iln’yavaitpasbeaucoupdesoutiensurlesquelscompteretalorsjedis: «Je ne peux vraiment pas me soucier de faire cela.» Alors, le projet fut donné àquelqu’und’autre.Etcefrèrel’amenéàtermeavectouslesproblèmesentrevus.Plustard,je me dis: «Merci, Seigneur, que quelqu’un d’autre l’ait pris en charge. » J’ai apprisbeaucoupdechosesparcetteexpérienceetjecontinueàadmirercefrère.Cen’étaitqu’unepetite chose,mais notreMaître dit, «Qui est fidèle en peu de choses est fidèle aussi enbeaucoup.»(Luc,16,10).

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Il y a une troisième situation de purification qui vient de l’extérieur. Peut-être cettetroisièmesituationnevousestpasencorearrivée,maisjel’aivuearriveràd’autres.J’enfaismention,parcequenotreFondateurlaprésentecommelederniercasd’oppositionexterne.Ilenparleainsi:«LorsqueSatanestsurlepointdeperdresadernièrebataille,vouspouvezvousattendreàdegrandestentations.»Partentationsilveutdirequ’ilvousarrivequelquechosequevousnepouvezpasexpliquercommevenantdevousmêmeoudemesquineriesd’autrespersonnes.CelavientdeSatan.Ilarrivedestentationsquivousattaquentaucœurmêmedecequevouscroyezetvousvivez.

Je vais vous donner deux exemples. Le premier concerne un de nos propres confrères:l’autre,unancienprovincialdesFrèresdesÉcoles chrétiennes.Cedernierétait retraitéetvivaitàGlencoe,Missiouri.Sonprovincial,à l’époquem’ademandéd’aller levoiretde luiparler.Ilmedit:«C’estundespiliersdenotreprovince.Jepourraismêmediredeluiqu’ilestunsaint.Maisprésentement,ilestdansuntelétatqu’ilpensequ’ilnecroitmêmeplusen Dieu.» Donc, je suis allé le voir et je lui ai parlé. Il me dit qu’actuellement, quand ilregardeenarrièredanssavie,toutluiparaîtcommeungâchisénormeetpuisquepeut-êtreDieun’existemêmepas.Etquepeut-être,trèsprochainement,(ilsavaitqu’ilnevivraitpasencorebiendes années) il pourrait tout simplementmourir dans le vide. Il était tentédedésespoir.D’oùluivenait,d’abord,unetelletentation?Ellenevenaitcertainementpasdesamanièredevivre,nidecequ’ilavaitfait:Ilétaitquelqu’undetrèsinfluentetavaitfaitdegrandes choses pour les autres, Il n’y a pas à raisonner sur cela, parce que ce n’est pasraisonnable.Iln’yavaitaucuneraison.S’ilavaitquelquetentation,ellevenaitdeSatan.C’estla tentationdudésespoir, parcequ’elle attaque l’existencemêmedeDieudans votre vie.Vous ne pouvez pas aller plus loin à la frontière du néant. Alors le frère me demanda:«qu’est-cejefais?»Jenesaispascequevouspouvezfaire,sinonunechose.Vousavezfaitbeaucoupd’actesdefoidansvotrevie.Maintenantvousaurezàfairedesactesdefoidansunegrandeobscurité,desactesdeconfiance totaleenDieu.Toutceque jepourraisvoussuggérer,c’estquevousvousarrangerpourdireplusieursfoisparjour:«Seigneur,ouijecrois.»Ilasupportécettetentationpendantpresquedeuxans,etalorselledisparut.Quellebellefindevieilconnut!

J’aiaussirencontrélamêmechoseavecl’undenosprêtres.Ilétaitàlaveilledesonjubiléd’oretsepréparaitàprendresaretraite.Ilseretiraitpeuàpeudeplusieursactivités.Quandje luiaiparlé, ildisaitpresque lamêmechoseque leFrèredesÉcoleschrétiennesdont jeviensdeparler.Celam’avraimentsurprisparcequ’ilétait legenredepersonnequiaimaitde faire ce qu’il faisait. Il faisait un très beau travail et chacun recourait à lui. Il dit: «Jecommenceàavoirlesentimentquetoutcequej’aifaitestinutileoupireencore.Toutestdelacendre.EtoùestDieudanstoutcela?»Unefoisdeplus,d’oùviennentcespenséesetcessentiments?IlétaitunpeuplusjeunequeleFrèredesÉcoles,etalorsj’aipenséquejepouvaisluidirederegardertouteslesbelleschosesqu’ilavaitfaitesdanssavie.«Pensezàtoutesleconfessionsquevousavezentendues.»Ilrépondit:«jenesuismêmepassûrqu’ilsesoitpasséquelquechoseencesmoments-là.»Qu’est-cequ’onpeutrépondreàundoute

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pareil?Unefoisdeplus, laseulechosequejepouvais luidireétaitceci :«Laseulechoseque je pense vous pouvez faire est de faire des actes de foi dans des conditions danslesquellesvousn’avezjamaisfaitd’actesdefoiavant,etcertainementdansdesconditionsque vous n’aviez jamais prévues. Vous devezmaintenant faire un acte de foi sans aucunautresupportquelafoielle-même.Etrépétez-lesouvent. Ilmedit:«C’estmécanique.Jenepeuxpasprétendrefairecela.»J’airépondu:«Quelautrechoixvousavez?»Ilmedit:«l’autrechoix,c’est ledésespoir.Etc’estunchoixdifficile.C’estpresquedanscelaque jevis.»Cetteétatadurépourluipresque18mois,bienquecen’étaitpastoujoursdemêmeintensité.Maisilacontinuéàfairebeaucoupd’actesdefoi.Ilmeditplustard:«J’aifaitdesactesde foi,avec lesentimentqueçanevoulait riendire.MaisDieuestmiséricordieux.»Cethommevitencoreparminousetilexerceuntrèsbelapostolat.

Je pense que ce genre de tentation arrive à plusieurs d’entre nous d’une manière plusdouce.Qu’est-cequ’onaàfairealors,sinoncequenotreFondateursuggère:faitedesactesdefoidiamétralementopposésàlachoseàlaquellevouspensezouquevousexpérimentez.Sivousressentezceci:«Mavieentièrenevautrien,»l’actedefoiest:«MonDieujevousoffreunefoisdeplusmavieetjecroisquevousl’acceptezcommeuneoffrandevalable.Etje crois que, dans votre grand pouvoir et votre grande miséricorde, vous pouvez fairequelquechoseavecelle.»C’estunemarchedans la foiobscure.Nousne le sentonspas ;nousnelevoyonspas.Maiséventuellement,commedanslecasdecesdeuxhommesdontj’aiparlé,nouspassonsà-traversnostentationspurifiésetrenforcés.

Cettepurificationestlacontinuationd’unautremystèrequ’onlitdansl’ÉvangilequandunefoisdeplusontrouvePierreetJésusaucœurdumystèredusalut.«Simon,Simon,voiciqueSatanvousaréclamépourvouscriblercommelefroment;maismoij’aipriépourtoi,afinquetafoinedéfaillepas.Toidonc,quandtuserasrevenu,affermistesfrères.»(Lc,22,330.Nousdevonsnousaiderlesunslesautresquandnousvivonscesexpériencesetrenforcerlafoidechacun.Quandnousvivonscelanous-mêmes,noussavonsàquoicelaressemble.EtPierreréponditàJésus:«Seigneur, jesuisprêtàalleravectoietenprisonetà lamort.»Ouais.Pierren’étaitpasencorepassépar là,etqu’ileuttrahiJésus, il futdurementtenté.Nousnesavonsjustementpasjusqu’oùilestallédanslesprofondeursdesténèbres.Maisilen est sorti. Satan a criblé Pierre parce que Pierre était sur le point de faire de grandeschosescontrelui,Satan.Penserquenouspouvonséviterd’êtrecriblés,ouquecelanenousarriverajamais,estquelquepeuoptimiste.Celaarrive.Et laseuleréponsequenousavonsalorsàdonnercesontdesactesdefoiquidoiventfairefaceàcequenoussommesentraind’expérimenter. C’est cela seulement que Pierre pouvait faire. Après que Pierre eut reniéJésus,quepouvait-ilfaire?Toutdesuiteaprèsqu’ileutreniéleChrist,Jésusfutcrucifié,etPierrepassatroisjoursaveclesentimentfortqu’ilavaitreniél’hommequiétaitmaintenantmortetparti.QuellesortedefoiPierredevait-ilpratiquerpourpersévéreretdemeureravecles autres apôtres ? Rien d’autre que persévérer, ce qu’il fit ; et il passa à-travers. Et paraprès,ilrenforçalafoidesautresetilleurditdefairedemême.Lisezlapremièrelettrede

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Pierre à la lumière de cette expérience. Voyez ce qu’il dit au sujet de la foi. Cela est trèsrévélateur.

Qu’est-cequetoutcelasignifiepournous?Dupointdevuedelapurification,cesdifficultéspeuventêtreuneexpériencedeDieuàapprofondirsanscessedansnotreviedefoi.Noussommes appelés à être des hommes de foi qui jugent toute chose à la lumière de laRévélation. Toute l’expérience de purification est une expérience croissante de libérationdansl’EspritSaint.Chaquefoisquenoustraversonsuneexpériencedepurificationdansunespritdefoi,nousensortonspluslibresàl’intérieur.Noussommespluslibérésdenotrego.Nousavonsuneperceptioncroissanteetuneplusgrandeconsciencedeladistinctionentrenotre confiance égocentrique et notre confiance en Jésus-Christ, entre les exigences denotreégoetlesmotionsdel’EspritSaint.IlyaendéfinitiveuneconfiancecroissanteenDieuet une plus grande expérience de la grâce à l’œuvre dans notre vie. Comme le dit notreRègledeVie(Art4) :«La foinous faitdécouvrirqueDieuestà l’œuvredans l’histoiredumondeetdansnotreviedechaquejour.»

Finalement,c’estl’expérienced’uneplusgrandejoiespirituelle.Quelbeaucadeauc’estquede faire l’expérience de la joie spirituelle. C’est tellement différent des plaisirs que nouspouvonsobtenir parnous-mêmes. C’est un grandet beaudon, et c’est celui qui nous estpromisettellementattendupournousparnotreDieu.Jevaisconclureparcettecitationdenotre Fondateur, qu’on trouve à la fin de sa description de l’expérience de purification.«C’estl’EspritSaintquinousconformeàJésusetquinousfaitvivredelaviemêmedeJésus.»

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CHAPITRE12

Espritdelouangeetd’humilité

Danscetentretiendeconclusion,jevoudraisréfléchirsurl’unedesattitudesfondamentalesde note vie comme religieux: la gratitude. Quand le père Chaminade parle de l’humilitécommed’unevertudeconsommation,ils’agitdel’humilitéàsonniveauleplusélevéetleplusincomparable.Il ladéfinitcommesuit:«C’estl’attitudenécessairepourvivreuneviedeconstantegratitude».Sivouslisezcequ’iladitsurl’humilité,c’esttrèslogiqueparcequelagratitude,c’estsimplementreconnaîtredeschosesquenousavonsreçuessanslesavoirproduitesnous-mêmes.Etilajoute:«Sinousregardonsplusenprofondeur,c’esttout».

Quelle belle façon de définir le Marianiste comme une personne toujours pleine dereconnaissance.C’estainsiquesont lespersonnesaucœurnoble.Commetout lemonde,nousaimonscommuniqueraveclesgensreconnaissants.L’humilitéestuneviedelouangeconstanteparcequenousreconnaissonsd’oùvienttoutechose.Lagratitudenaîtdenotreregardtrèsattentifàl’originedecequenousavons.CeregardnousconduitàDieudansuneattituded’humilitéparceque l’humilitédevienttoutsimplementréalitéquandnousallonsau-delà de notre existence égocentrique. Quand nous avons à traiter avec une personnedont l’égo est toujours à l’avant-scène, nous disons que cette personne est orgueilleuse.Récemment,jeparlaisavecunedenoscollaboratricesquitravaillepourl’undenosfrères.Ellem’adit:«Quellejoiedetravailleraveccettepersonne.Quandvoustraitezaveclui,vousn’avezpasbesoindepasserparsonégopourarriveràtraiterd’unsujet».Quandl’égoesttrop visible, nous disons que cette personne est orgueilleuse. Récemment à Rome, j’aidemandéàunedenosaffiliées:«Pourquoin’allez-vouspasvoirlepèreXpourladirectionspirituelle ?» Ellem’a répondu: «Avez-vousdéjà étédans sonbureau ?» «Non»dis-je.Elledit:«Iladesphotosdelui-mêmepartoutsurlesmurs.»Mapremièreréactionaétédemedemanderqu’estcequecelaavaitàvoiravecladirectionspirituelle.Maissielledevaitpasser à travers toutes ces images de son égo avant d’en arriver en fait à la directionspirituelle, j’ai compris pourquoi elle ne voulait pas y aller. Les gens orgueilleux vousdonnentlasensationquevousleurdevezquelquechose.Unepersonnehumblenevousfaitjamaisvoirquevousluidevezquelquechose.

Commentdéveloppons-nouscetteattituded’humilité?NotreFondateura laisséentendreque nous devenons humbles quand nous regardons les choses telles qu’elles sontréellement.Nousavonsà faireainsipournotreproprevie.Pendantunecertainepériode,quandj’étaisprovincial,j’aicommencéparprendrel’attitude,dèsmonleverchaquematin,dequelqu’unpastrèsheureux.Jemeplaignaisintérieurementenenmedisant:«Pourquoidois-jemeleverpouravoiràfairefaceàtouscesproblèmes?Pourquoimoi?Pourquoicestâchesneseraient-ellespasmieuxpartagées?Puis,unmatin,BillWethington, l’épouxde

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notresecrétaire,aeuuninfarctus.Billétaitunhommemerveilleux.Sonattaquecardiaqueavaitétési sévèrequ’ilnepouvaitplusse lever. Ilnepouvaitplus rien faire. Ilnepouvaitmêmepasparleretilavaitdelapeineàrassemblersesidées.Etcelam’aébranlé,carjemesuisdit:«SiBillpouvaitsortirdesonlit,ilseraitheureuxd’affrontertousmesproblèmes.Ildirait: Apportez-les moi, un après l’autre. Et qu’est-ce qui m’aurait empêché d’avoir uninfarctus ?» Alors, j’ai arrêté de me plaindre et je suis devenu plus heureux et plusreconnaissant. Chaquematin, je me suis éveillé en remerciant Dieu de pouvoir marcher,parler, régler mes problèmes. Parfois, il nous arrive d’oublier cela. Nous ne pensons pasassezàlasourcedetoutesnoscapacités.

Il y avait à Rome deux religieuses âgées, des Sœurs de Notre-Dame de Sion qui m’ontracontéce fait.LeurcouventestprèsdusommetduJaniculesurunepenteabrupte,avecuneroutequiserpente.Maisilyaunescalierdepierrequidescendendirect.Jepensequ’ilpeut y avoir 80 marches pour la première section. L’une des religieuses descendait cesmarches avec sa compagne pour aller prendre l’autobus. C’était l’automne, des feuillesmortesrecouvraientlesmarchesetilpleuvaitunpeu.Sacompagneaglissésurlapremièremarche et est tombée. Elle a dit: «Quand elle est tombée, j’ai essayé de retenir macompagne, et je suis tombée avec elle moi aussi. Nous avons culbuté ces 80 marchesjusqu’au palier. Nous étions là, par terre, à nous regarder et ma compagne m’a dit:«Essayonsdenouslever».Nousl’avonsfaitetnousn’avionsriendecassé.Nousétionslà,deboutenpleinmilieudeRome,àlouerDieu,probablementpourlapremièrefoisdenotrevieparcequenouspouvionsnoustenirdebout.Combiendefoisnousarrive-t-ilderemercierDieudepouvoirêtre surnosdeux jambes?Nousdisonsplutôt souvent: «Je suis fatiguéd’êtredebout».

Etsinousregardionsceladeplusprès…Tout, n’importequoidecequenoussommesetquenouspuissionsfaire,sachonsquec’estuncadeau,quelquechosequinousestdonné.Parexemple,quandnousavonsàtraiterdesproblèmes,c’estparcequenousavonsassezdecapacitépourquelesgenspensentquenouspouvonslesgérer.Autrement,nousn’aurionspascetteresponsabilité.Tellementdechosesnesonttoutsimplementqu’unpurdon.Jesaisquechaquefoisque jesuisdansunavionquidécolle, jesuisdans l’admiration.Etchaquefois qu’il atterrit, je suis reconnaissant. Sur les vols italiens, à chaque atterrissage lespassagersapplaudissent.Si lepiloteabienatterri, lesapplaudissementssontplus forts. Jesuisreconnaissantparcequejeseraissurementincapabledecontrôlerunesituationdecegenre.Une fois, un homme assis près demoim’a dit: «Vous savez, je suis toujours trèsreconnaissantmaintenantquandnousarrivonsàdestination.Unjour,j’étaisdansunavionqui avait pris du retard. Le pilote a annoncéquenous arriverions en retard. Les gensontcommencéàseplaindre:«Jevaisratermacorrespondance!Pourquoinepaspartirplustôt?»Etlemécontentementgrandissait.C’estalorsquel’avionacommencéàvolerencercle.Etlepiloteaannoncé:«Nousvolonsencercleparcequenoussommesincapablesdesortirletraind’atterrissage.Noussommesencontactaveclatourdecontrôleetnousessayonsdelefaire».Etilaajouta:«Nevousenfaitespas!»Onacontinuéàtournerenrond,puisle

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pilote a dit: «Nous allons essayer de nous poser sans le train d’atterrissage. Écoutezattentivementlesinstructionspourlamarcheàsuivre».Ils’estfaitunsilencedemort.Pluspersonne ne se plaignait de quoi que ce soit. Tous étaient atterrés. Nous nous sommespréparés en suivant bien les instructions. Et, alors que nous descendions, le traind’atterrissageestsorti.Monvoisinajouta:«Nousavonsatterri,nousétionstousenretardetbeaucoupontmanquéleuravion».Maispersonnenes’estplaint:tousétaientremplisdereconnaissance.»

Nouspouvonsréellementvivreuneviedegratitudeparcequ’ilyatellementdechosesquinous invitent à la reconnaissance. Nous vivons une chose après l’autre comme un purcadeau. Jemesouviensd’un funambule françaisdegranderenommée internationale.Sonnomm’échappe…Ilestdevenucélèbrequandilafaitleparcoursentredeuxgratte-cieldeNew York, à 4h30 du matin. Un jour, il s’est exécuté en France devant un grandrassemblement de supérieurs religieux. Tout en marchant sur son fil, il leur a expliquécommentilfaisait.Arrivéaubout,ilestdescenduausolprèsdel’ancragedufil.Finalement,arrivéausolilafaitencoresixouseptpasenmaniantsonbalanciercommes’ilétaitsurlacorde.Ensuite,iladit:«n’est-cepasmerveilleuxquejepuissemarcherainsi?J’aifaittoutcelapourvousrappelerquelmerveilleuxdonqueDieunousadonnédepouvoirmarcher,parce que je vous assure que c’est un bien plus grandbienfait de pouvoirmarcher sur letrottoirquesurunecorderaide».Ilajouta:«Vouspouvezpenserquejesuisgrandparcequejepeuxmarchersurunecorderaide.C’estunebienplusgrandechosepourvousd’êtrecapabledemarchersurletrottoir.»

Leschosesordinairessontréellementlesplusgrandsmiraclesdumonde.Etnouslesvivonstoutes. Nous les avons toutes. Nous pouvons leur être très reconnaissants si nouschoisissonsdelefaire.CommeilestbondecommenceràappliquercelaànotrevieentantquereligieuxetmembresdelaSociétédeMarie.Rappelons-nouscequeJésusaditàproposduRoyaumedesCieuxen référenceà Jean-Baptistequi était la plus grandepersonne surterreàcemoment,selonNotreSeigneur.Ilaajouté:«MaisleplusgranddansleRoyaumedesCieuxestplusgrandqueJean».(Mt11,11)Quelquesfois,jepense:Sivouspensezêtrele plus vilain religieux dans la Société deMarie, remerciez Dieu d’être au moins dans laSociété de Marie. C’est un privilège. C’est un cadeau. Le reconnaître et en êtrereconnaissant,c’estl’humilité.

NotreFondateuraparlédel’humilitécommed’unevertudeconsommation.Unevertudeconsommation, c’est simplementuneattitudeduChristquenousvivons jusqu’à sa limite.Nous la vivons tellement à sa limite qu’elle touche tout dans notre vie. Dans le cas del’humilité,lagratitudetoucheratoutcequenousfaisons.Ceseranotrecaractéristique.Ellecomplète chaque aspect de notre vie, alors dans ce sens elle devient une vertu deconsommation. Ça veut dire qu’on va jusqu’à la limite avec le Christ en pratiquant cettevertuparticulière.

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En conclusion, j’ai deux références pour votre réflexion et votre méditation. Les deuxpersonnes citées auraient été les plus orgueilleuses aumonde si elles s’étaient appropriéleurs dons pour leur propre égo plutôt que de reconnaître d’où venaient réellement cesdons.Lapremièreréférenceestl’unedecellequenousavonsmentionnédansunentretienprécédent quand nous avons parlé de l’obéissance du Christ, parce qu’une personneréellementobéissantedevientunepersonnehumble.C’estunecitationsurl’humilitéetenmêmetempssurlagrandeur.Jésusditceci:(Jn5,19-20)«Envéritéjevousledis,leFilsnepeut faire de lui-même rien qu’il ne voit faire au Père. Ce que fait celui-ci, le Fils le faitpareillement. Car le Père aime le Fils et lui montre tout ce qu’il fait. Il lui montrera desœuvresplusgrandesencorequecelles-ci.Vousenserezstupéfaits».D’unepart,Jésusparledelavraiegrandeur.D’autrepart,illefaitavecgrandehumilitéetgratitude.ToutcelavientduPère.

La deuxième citation tirée duMagnificat est similaire. (Luc 1,46).Marie commence de lamême façon: «Mon âme exalte le Seigneur, exultemon esprit en Dieumon Sauveur ».Pourquoi?Parcequ’il«s’estpenchésursonhumbleservante,ilafaitdegrandeschoses».SonhumilitéetlagrandeurdeDieuvontensemble.Iln’yapasuneattitudeégoïstepourlesséparer.PluselleparledelagrandeurdeDieu,plusellevoitsapetitesse.Mais lesdeuxsefondentàtraverssonhumilité,etelles’extasiedevantlagrandeurdeDieu.

Voicilagrâcequenousvoulonsvivre.Quandnouslavivonsencommunauté,nousavonslacaractéristique d’un groupe de gens reconnaissants, avec qui il est facile de traiter,merveilleuxdetravailleretouvertsàlamanifestationdelagrandeurdeDieu.Jesuggèrequenouspermettionsàcettegrâcedes’installerennosâmespourdevenirpermanenteennous.

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DEUXIÈMESECTION

Conférencesauxparticipantsd’uneFormation

SurlaSpiritualitéMarianiste

DonnéesauxLaïcsetauxReligieuxmarianistes

BERGAMOCENTER,DAYTON,OHIO

13-15mars1992

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INTRODUCTIONÀLADEUXIÈMESECTIONChapitres13à16

Notedel’Éditeur.Lesparticipantsàcetteconférenceétaientdesreligieuxmarianistesetdeslaïcsengagésdans/ouà la formationde la foi dans la spiritualitémarianiste. Cesquatre conférencessont axées sur les aspects particuliers de la spiritualité marianiste qui nous aident à fairel’expériencedeDieud’unefaçontellequecelanoustransforme.Ilyaunegrandevariétéetunegranderichessedanscegrouperassembléicipourcettefindesemaineetc’est làunedesgrandesrichessesdenotrespiritualitémarianiste. Ilsemblequ’onpuissedirequelquechoseàchacun.Mêmesilavariétédenotregroupeestrichederessources,celaprésenteunpetitproblème,aumoinspourmoi.J’aiunelégèreinquiétudeque,pourcertainsd’entrevous,ceque jevaisvousdirepeutparaître tropsimple,etquepour d’autres, cela peut paraître trop compliqué. Certains d’entre vous commencentseulement à entendre cette expression «spiritualitémarianiste», alors que d’autres danscetteassistanceontdéjàfaitl’effortdevivrecettespiritualitébienavant.Jesouhaitemêmequel’unoul’autred’entrevousfrappeauxportesdesVertusdeConsommation,tellesquedéveloppées dans The Grain of Wheat, (Le grain de blé) ou dans In His Likeness, (à saressemblance).Detoutefaçon,monattentesincèreestquevoussoyezattentifsàcequisepasseenvotrecœurmêmeetenvotreespritpendantces joursàvenir.Soyezattentifsauxmouvementsquiseproduirontàl’intérieurdevous-mêmes.Faitesattentionauxidéesquisurgissentdansvotre tête, parce que c’est de cette manière que l’Esprit Saint vous parle. C’est toutsimplementunmoyenparlequelchacundenouspeutrecevoirlemessageparticulierpourlequelDieuvousaconduitsicipourvousledonner.Jenepensepasquevoussoyieziciparhasard, et que si quelqu’un est venu ici pour un «party», j’espère que ce ne sera passeulement cela qui vous arrivera en cette fin de semaine. Je suis convaincu que le SaintEspritvaparleràchacundevous,ouqu’ilvavoustoucher intérieurement.Et j’espèrequevousallezvousenrendrecompte.Le thèmegénéral de cette finde semaineest la SpiritualitéMarianiste. Spiritualité estunmottrèsàlamodecestemps-ci,cequiveutdirequ’ilaplusieursdéfinitions.Alors,puisquejevaisl’utiliser,jeferaismieuxdedéfinirpourvouscequej’entendsparspiritualité.Jeparledequelquechosedetrèssimple.Pourmoi,laspiritualitéestcequiaidechacundenousàfaire l’expérience de Dieu de manière à ce que cela nous change. Cela implique deuxchoses:avant tout, sic’estunespiritualité,celavanousmettreencontactavecDieu ;Ensecondlieu,larencontrevaproduireunchangementenvous-mêmes.Ilyaplusieursfaçonsd’agiravecDieuquinenouschangentpasdutout.Cen’estpasdecegenredespiritualitédont nous parlons, aumoins pas en cette fin de semaine. J’espère que tout ce que nous

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allonspartageretcesurquoinousallonsréfléchirensemblevanousaideràentrerencoreplusprofondémentdanslaSpiritualitéMarianiste.

CHAPITRE13

Entrereninterractionavecnotrevieintérieure

Sinousdevonsfairel’expériencedeDieud’unemanièrequivanouschanger,quelquechosedoit se passer à l’intérieur de nous-mêmes. La stimulation peut venir de l’extérieur,maisl’expérience et le changement se passeront à l’intérieur. Ainsi, nous parlons d’une vieintérieure, ce qui a besoin d’être expliqué quelque peu. Tout ce qui vit a une énergieinterne.Toutcequiestvivantsemeutparsonpropremouvement.Dieuveutnousdonnerlavie, une énergie et du mouvement à l’intérieur de nous-mêmes. La vie se manifeste deplusieursmanières:lacroissance,lagénération,latransmissiond’uneautrevie.SiDieuveutnousdonner lavie, il vanousdonneruneviequenousn’avonspasdéjà,uneviequi seradifférenteetnouvelle.QuandnouslarecevonsdeDieu,celanenousarrêtepasounenousralentitpas:celanousfaitvivredavantage.Vous tous, vous avez plusieurs signes de vie en vous-mêmes. Nous appelons cela des«signesvitaux».Quelssont lessignesvitauxdevotrevie?Chacund’euxestunesortedemouvement. Quand quelqu’un prend votre pouls, il est rassuré quand que ça pulse. Siquelqu’uncontrôlevotrecœur, ilest rassuréquandçabat.Dans la respiration, il fautquequelque chose bouge. Si vous voulez voir à quel point vous êtes vivant, essayez toutsimplementde vous asseoir 20 secondes sansque riennebouge.Ne respirezplus ; et çabougequandmême.Nesouriezpaspour l’amourduciel:c’estunvraisignedevie.Etnebougez pas enme regardant ! Voyez, vous êtes pleins de vie. Et cela n’est qu’au niveausuperficiel.

Une expérience deDieu qui nous transforme est une expérience qui d’unemanière nousdonnequelquechosedeplusouquelquechosededifférent,enparticulier,desmouvementsintérieurs. Quelque chose nous fait agir, quelque chose qui ne le faisait pas auparavant.Sinon,direqueDieunousdonneunenouvellevien’auraitaucunsens.C’estceàquoinousfaisonsattentiondansnotrevieintérieure.

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Quand nous parlons de spiritualité, nous faisons ordinairement référence, à desmouvements intérieursquinousenrichissentetnouschangent.Sicelanenousdonnepasplusdevie,c’estquec’estunefaussespiritualitéoubienquenousn’avonspasbiencompris.Si cela ne nous fait pas agir, cela veut dire que nous n’en avons pas tout à fait bien faitl’expérience.QuandDieunousparle,qu’ilnousestprésentounoussaisitd’unemanièreoud’uneautre,ilveutnousdonnervie.

Nous pouvons apprendre beaucoup de choses sur la vie spirituelle en partant de la viephysique que nous avons. Comment développons-nous notre vie ? Comment la gardons-nousactive?Votreviedépenddecequevouspouvezmangeretassimilerpourqueceladevienneunepartiedevous-même.Sivousnepouvezpasfairecela,vousallezvitemourir.Eneffet,sivousvoulezfairemourirunêtrevivant,séparez-ladesasourced’alimentation.Elle va vite mourir. Mais faire entrer quelque chose en soi ne suffit pas. Nous devonsprendre lanourritureet l’assimiler.Vousdevez la fairedevenirunepartiedevous-même.Quandvousmangez,vousprenezlanourriture,vousl’assimilez,etaveccetteénergievousvivez,vousbougezetvousagissez.

LaviequinousestoffertedansnotreSpiritualitéMarianisteestainsi. Lavitalitéquenousallonsavoirspirituellementdépenddenotremanièredel’assimileretd’enfaireunepartiede nous-mêmes. Si nous sommes spirituellement vivants, nous allons bouger ; si noussommesmorts,nousnerépondronspasdutout.

Dans notre vie spirituelle, il y a en nous des choses qui devraient êtremortes. Peut-êtreserait-ilmieuxdedirequenousdevrionsêtremortsàcertaineschoses.Enfait,saintPaulditquesivousêtresvraimentchrétiens,sivousvivezvraimentenJésus-Christ,alorsvousserezmortsaupéchéetvivantsenJésus-Christ.Àquoicelaressemble-t-ilquandvousêtesmortaupéché?Celaveutdirequevousn’avezaucunmouvementverslepéché.Lorsquelepéchéseprésente à vous, vousne l’accueillezpas ; vousne l’assimilezpas.Vousne le cherchezmêmepas.Vousêtesmortaupéché.

Ça,c’estl’idéal.Laplupartd’entrenous,nousnesommespasencoretoutàfaitàcepointlà,maisc’ersverscelaquevousvoulezaller.D’autrepart, sivousn’êtespasportéaupéché,maisquechaquefoisvousavezlesentimentqueleChristpasseprèsdevous,ouqu’ilestlàd’unecertainemanière,etquevousrépondez:alors,vousêtesvivantauChrist.C’estcelaêtremortaupéchéetvivantenJésus-Christ.C’estfondamentalementceàquoinousfaisonsattentionlorsquenousparlonsdenotrevieintérieureouviespirituelle.

Dans notre recherche sur la spiritualité, il est important de connaître ce que c’est etcomment la vivre,maisplus importantencore, c’estnotre l’habiletéà saisir les signesquinous donnent vie. Si quelqu’un vous met à une diète soi-disant très forte et que vousdevenezdeplusenplus faible, il y a alorsquelque chosede faux.Vousn’assimilezpas lanourriture. Il en est de même pour la vie spirituelle. Si vous lisez quantité de livres de

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spiritualitéetquevousnesemblezpasêtreplusenthousiaste,peut-êtrequecenesontleslivresquivousmanquent:ilyaautrechosequevousdevriezrechercher.

Permettez-moi une brève digression pour situer notre spiritualité marianiste dans notreculture.Parcequecequejevousaidécritarriveaussidanslemondeculturel.Nousn’allonspas traiter avec une spiritualité qui existe en-dehors de notre expérience et qui n’est pasenracinéedansnotreculture.Uneculture,c’est toutsimplementunréseaudevaleursquisont incorporées à nos habitudes, nos usages et les pratiques sociales que nous vivonsensemble. Nos valeurs sont liées à cette culture. Si nous pratiquons ces coutumes, noustendonsàlesprendrecommedesvaleursetàlesassimiler.Ellesdeviennentunepartiedenous-mêmes. Si vousgrandissezdansunecertaineculture, chacun s’attendà cequevoussoyezcequecetteculturevousapréparéàdevenir.

Noussommesdansunecultureaujourd’huiquia,commetouteautreculture,uneinfluenceconsidérablesurnous-mêmes.Ellemarquenotrevieetnotrefaçondevivre.JementionnecequisuitpourquenoussoyonsconscientsquecesinfluencesnenousarrêtentpaslorsquenousdécidonsdevivrenotreSpiritualitéMarianiste.

Notreculturedemodernitéimpliquequeleschoseschangentconstammentetrapidement.Celapeutvouloirdireungrandprogrèsenpeudetemps.Denosjours,ledéveloppementetlechangementsontplusrapidesqu’ilsnel’ontétédanstouteautrepériodedel’histoire.Lecôtéobscurdelamodernitéesttoutsimplementque:lechangementesttellementrapideque souvent nous n’avons pas la possibilité de l’intégrer avec le reste de ce que noussommes.Etalorslesgenssonttropnourrisoupasasseznourrisdanscertainsdomaines,particulièrementdanslesdomainesdontnouaallonsparler.Onnepeutpasjustesaisirdesidéesquitouchentleplusprofonddenotreêtresansavoirunefaçondelesassimileroudelesintégrer.Autrement,celadiviseaulieudedéveloppernotrevieintérieure.

Un second caractère de notre culture c’est qu’elle est pluraliste. Le pluralisme signifie laprésencedepossibilitésjusquelàinconnues.Ilyaplusdechoixdevantnousaujourd’huiquedansaucunedesgénérationsprécédentes,etceschoixcontinuentauxaussiàchanger.C’estunerichesse.Lecôtéobscur,c’estquecespossibilitéschangenttropvite,avectoujoursdenouvellespossibilités;etilyaunetendanceàneprendreaucunengagementàlongtermeouànousengagerenriendepermanent.Nousavonsàêtre trèsattentifsàcetaspectdenotreculture.

La troisième caractéristiqueest quenous sommesdansune société séculière, cequi veutdire que plusieurs secteurs de notre société sont devenusmature et indépendants. Il y aplusieurs disciplines qui dans un sens peuvent entrer en compétition avec quelque chosecommelaspiritualité;ellespeuventexisterparelles-mêmes.Lapsychologieetlasociologieen sontdeuxexemples.Ellesproposentdenousdonneruncadrecompletdevie.C’est làunerichesse.Lecôtéobscurc’estqu’ilyaquantitédedisciplinesparfaitementdéveloppéesqui n’ont pas besoin de Dieu. Elles peuvent s’organiser elles-mêmes sans l’aide de Dieu.

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Conséquemment, sinousvoulonschoisirdevivrepleinementnotre relationàunDieuquinousdonneunenouvelle vie, nousdevons le fairebeaucoupplus intentionnellementquenouslefaisionsautrefois.

La quatrième caractéristique c’est que notre culture actuelle valorise l’individu à un hautdegré. Par exemple, si c’est valable demourir pour dix personnes, il est aussi valable demourirpouruneseuledansnotremonded’aujourd’hui.Chaqueindividuestimportantetasesdroits.Endéfinitive, c’est lavaleurque la culturenousdemanded’accepter. Lavaleurpersonnelleetl’accomplissementdesoisontdevraiesvaleurs.Lecôtéobscurc’estqu’onpeutperdrefacilementlavaleurdubiencommun.Lacultureactuellenevousencouragepasà sacrifier votre projet personnel au bénéfice du bien commun dans un projetcommunautaire.

C’est cela la culture dans laquelle nous vivons, et nous devons être conscients de sesrichesses.Chaquedomaineestporteurd’unerichesse;maischacunaaussiuncôtéobscur.Jepensequ’ilestimportantdenoussituerdansnotreculture,parcequ’ilestfaciledeparlerde spiritualité commede quelque chose en-dehors de la culture. En réalité, la spiritualitédoitêtreeninteractionaveclaculture.Cetteinteractionestdynamiqueetimportante.

Revenonsmaintenant,revenonsànotresujetprincipal,LaSpiritualitéMarianiste.Quelétaitle regard du Père Chaminade sur la personne humaine ? Dans sa conception de l’êtrehumain,quels sont lesélémentsqu’il distinguait ? Surquelleanthropologie s’appuyait-il ?Nousdevonsutilisersonvocabulairepourcomprendresesécrits,sachantqueleregarddupère Chaminade sur la personne est celui de saint Paul. L’anthropologie de saint Pauls’exprimeentermessimples:chaquepersonneestuneunité.Lesdistinctionsqu’ilfaitsontdes«parties»quinepeuventpasêtreséparées.Mêmequand ilparledu«corps»,de la«psyché»etde«l’esprit»celanepeutpasêtreséparé.Cependant,onpeutlesdistinguer.SaintPaulutiliseuneanthropologietripartite,unevueentroisdimensionsdel’êtrehumain.Il dit que chacun de nous a trois aspects qui nous sont tous nécessaires pour un êtrepleinementvivant.Ensemble, ilsformentuneseuleunité.Jepensequecelaestimportant,parceque tous ces trois aspects vont affecter l’expériencedenous-mêmes. Saint Paul ditquenoussommes«esprit,âmeetcorps».(1Thes5,23).Qu’est-cequenousdésignonsparchacundecesaspects?

Lecorpsest labasematérielleet lavéhiculephysiquedenotrevie.Sivousn’aviezpasdecorps, vous auriez beaucoup de mal à vous faire remarquer. Vous ne pouvez pas vousséparerdevotrecorps.Lecorpsn’estpasquelquechosequiestdécompté.Votreexpérienceagittoujoursàpartirducorpsetondoitenprendresoinpourcela.

La seconde dimension de l’être humain est la «psyché» ou l’âme. Qu’est-ce que c’est ?Vousavezmémoireetimagination.Vousaveclafacilitépourfairedeschoix.Vousfaitesdeschoixdansvotrecorps,maiscen’estpaslecorpsquifaitlechoix.Lecorpspeutinfluencervotre choix,mais il ne fait pas l’action de choisir. La psyché est toute la réalité de votre

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pensée,devotreimagination,devotremémoire,devossentiments.Vouspouvezvoirquechacunedecesfacultésdoittravaillerdanslecorps.Sivotrecorpsn’estpaslà,votrepsychénepeutpasfonctionner.

Qu’est-ce que nous voulons dire par l’esprit ? C’est un peu différent. La psychologiemoderneneferaitpasintervenirl’esprit,maissaintPaulditquec’estunlieuouunniveauennousenlequelnouspouvonsrencontrerDieu,oùnouspouvonsconsciemmenttraiteravecDieu. C’est ce que saint Paul appelle l’esprit. Il n’est pas séparé de l’une ou de l’autredimension.Cependant,nouspouvonsvivresansfaireagirtrèsfortcettedimension,ounouspouvonsdélibérémentchoisirdevivreàceniveau.Vivreauniveaudel’espritseulnenousmetpasendehorsdesdeuxautres,maisillesmodifie.

Nous croyons que chaque personne singulière possède ces trois dimensions ou aspects.Pourquoicetteconceptionest-elleimportante?Jepensequec’esttrèsimportant,parcequechacun de nous a une expérience de ce que nous sommes et il nous faut ces troisdimensionspourexpérimenterlaviecomplète.

Ilestimportantdeprendreconscienceetdeserendrecomptedel’aspectquiestdominantdansnotrevie.Si jevousdemandedevousdécrirevous-même,vouspourriezcommencerpasdire:«je suismaigrichon».Cela se rapporteaucorps.Est-cevraiment laplusgrandeimpressionquevousavezdevous-même?Sic’estlecas,celaveutdirequeêtremaigrichonestquelquechosedetrèsimportantpourvous.Vouspouvezaussimerépondreendisant:«Jesuisunétudianthorspair.Jefaisdelarecherche.Jesuisdocteurenphilosophie.»Ici,vousvousréférezàvotrepsychéouvotreâme.Maintenant,combienparmivouspourriezvous vous décrire ainsi: «Je suis quelqu’un qui parle avec Dieu chaque jour.» À quoiressembleraitunetellepersonne?

Chacun,(chacune),lemaigrichon,l’étudianthorspairetceluiquiprie,auneperceptiondelui-même – (d’elle-même). Quel est celui ou celle qui se sent le plus valable ? Chacun,chacuneauneimagedelui-même(d’elle-même)quiluidonneunsensdesavaleur.

Chacundevousaune imagede lui, à savoir s’il est laid,beauouquelquechoseentre lesdeux. Si vous pensez que vous êtes laid, chaque fois alors que vous parlerez à quelqu’unvous allez expérimenterque lapersonnevous voit comme laide. Si vouspensezque vousêtesbeau,alorsvousallezexpérimenterquelesgensvousvoientcommebeau.

Cependant,si lesréactionsdesgensneserapportentpasàvotre imagepersonnelle,c’estquevousavezunproblème.Nousparlonsdevotreexpériencedecequevousêtes.Et lespersonnes que nous rencontrons déterminent notre expérience à un haut degré. Je vousprometsquevotreexpériencederencontreavecDieuaurauneprofondeinfluencesurvotreexpérience de ce que vous êtes. Celui qui n’a jamais rencontré Dieu manque toutsimplementquelquechosede l’expériencedecequ’il (ouelle)est. Il leurmanqueencorequelquechosedansleurvie.

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Quefaites-vousquandvousrencontrezleChrist?Dites-vous:«Bon,jeveuxvousremercierde ne pas être comme n’importe qui d’autre» ? Est-ce que vous voulez simplementdéfendrevotreimageplutôtquevousvoulezfairel’expérienceduChristdansvotreesprit?Plusieurs personnes évitent tout simplement cette rencontre. Et vous, que faites-vous ?Autourdequelle dimensionorganisez vous votre vie ? Il y a trois parties denous-mêmesdanslesquellesnouspouvonsorganisernotrevie.Nouspouvonsl’organiserautourdenotrecorps;ilyadesgenspourlesquelschaquechoseestconsidéréeenrelationavecleurcorps.Nous pouvons organiser notre vie par rapport à notre psyché, ou une faculté de celle-ci,commenotreintelligenceentantqu’étudiant,notreimaginationentantqu’écrivain,etc.Cesonttoutesdebonneschoses,parcequenousnevoulonspasnégligeraucunepartiedeceque nous sommes. Mais nous pouvons aussi organiser notre vie par rapport à notrerencontreavecDieu.

Qu’est-cequecelavoudraitdireorganisernotrevieparrapportànotreesprit,cettepartiedenous-mêmeoùnousrencontronsDieu?Celadevientunpeudifficile,parcequeleChristnousditquesinousvoulonslesuivre,nousallonsdevoirorganisernotreviedifféremment.Si vous voulez être Sondisciple et Le suivre, vous allez devoir réorganiser l’expériencedevous-même.Vousaurezàvivreuneexpériencedevous-mêmequivachanger l’idéedecequevousêtes.Enfait,pourledired’unefaçonbrutaleàlamanièredeJésus:«Vousavezàrejeter votre ancienne organisation personnelle, votre vielle structure personnelle et mesuivre.»SaintPaulditcequecelaveutdire,«Vousdéfairedevotrevielleimagepersonnelleetenmettreuneautre toutenouvelle.»L’anciensoi-mêmeet lenouveaunesontpasenréalité deux choses séparées. Vous ne détruisez pas une chose pour en construire unenouvelle. Ce que vous faites, c’est de prendre votre être personnel pour lui donner unenouvelleexpérience.

QuandnousrencontronsvraimentleChrist,cetterencontreréorganisenotreexpériencedecequenoussommes.Nousdevonschangernotreêtrelui-même.Maisnousfinironsparêtrequelque chose bien au dessus de ce que nous attendions. Comment y arriverons-nous ?Jésusditquenousyparviendronsenperdanttout!

Fondamentalement, quand nous vivons la Spiritualité Marianiste, nous vivons uneréorganisation de notre image personnelle et nous expérimentons ce que nous sommesdansunenouveauvoie. Si vous venezdansune communautémarianiste sans changer, etquevouslaquittezsansavoirchangé,vousn’avezpasréellementexpérimentélaSpiritualitéMarianiste. LaSpiritualitéMarianisteauthentiquenousdonneunenouvelleexpériencedenous-mêmesdansleChrist.

DanslaSpiritualitéMarianiste,notreconnaissancedesoi-mêmedevraitdevenirplusgrande.Je dis bienGRANDE ! Et nous devrions être capables de parler de nousmême sans nousexcuser,sanshonteoufiertéégoïste.LeChristveutréellementquenotreconnaissancedesoisoitcomplète.Etenmêmetemps,quenotreconnaissancedesautresgrandisse.Comme

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notre nouvelle connaissance de soi vient de notre rencontre avecDieu, nous grandissonsaussidansnotreconnaissancedeDieu.

Cequejevousaidécrit,cesontdesorientationsdebase.Danslasuite,nousallonsexaminerquelques uns des aspects traditionnels qui constituent notre SpiritualitéMarianiste. NousallonsparlerduSystèmedesVertus comme lepèreChaminadenous l’a transmis, commemoyen d’être formés à la ressemblance du Christ. Nous allons réfléchir sur la prière, surMarie et son influence sur nous. Nous parlerons aussi comment nous pouvons prendreMariedansnotrevied’unemanièreànousdonnerunenouvelleexpériencedecequenoussommes.

CHAPITRE14

LesvertusquiformentleMarianiste

NotreobjectifétaitdevoircequisepassequandnousrencontronsDieu,desortequenotreexpériencedenousmêmechange ; cequi signifiequenotrevieaussi change.DansnotreSpiritualitéMarianiste,ilyaplusieursélémentsdifférentsquiaidentàprovoquercecontactou cette expérience de Dieu susceptible de nous changer. L’un des moyens que nousutilisons beaucoup est, dans le vocabulaire marianiste, un processus de vertus, fait d’unensembledevertus liées lesunesauxautres. LepèreWilliamFerree (1905-1985) l’undesspécialistesdenotrecharismemarianiste,apopularisé la référencedeceprocessuspar letermedeSystèmedesvertus.Denosjours,nousparlonsdeProcessusoudelaMéthodededirection.Peut-êtrequelaprochainegénérationparleraduProcessusdeCroissancedanslesvertusdeJésus.Enfait,c’est lamêmechose.Cedontnousparlonsestd’unparcourspourêtreencontactavecleChrist,lerencontrer,vivreavecLui,defaçontellequenousadoptonsgraduellement l’expérience que le Christ avait de lui-même.Nous pouvons dire que nousrevêtonssesvertus,sesattitudes,sesdispositions.

Qu’est-cequecelasignifiedanslaréalité?Sij’adoptevotreattitudefaceàquelquechose,par exemple face au pardon, et que je la fais mienne, alors quand je pardonne, je vaisexpérimentercequevousexpérimentezquandvouslefaites.Ainsiquandnousparlonsdesvertus,nousparlonsdequelquechosedetrèsprofonddansnotrepropreexpérience.Etjeveuxjusterappelerlepetitschémaquenousavonsdécritàlaprésentationprécédentepourdire comment nous sommes formés avec la vision du père Chaminade et de saint Paul:Corps, psyché, esprit. Pensez au centre autour duquel nous organisons notre propremoi,notreexpériencepersonnelledevie.LaSpiritualitéMarianistenouspermetdenouscentrersur Jésus Christ. Nous laissons derrière nous, en le reniant, notre vieuxmoi, notre vieille

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façond’organisernotrevie,notreanciennefaçondefairel’expériencedenous-mêmes.Aulieudecela,nouscentronsnotreexpériencesurleChrist.

Nous appelons cela un Système de vertus, ou un ensemble de vertus, [ou Méthode desVertus: voir R.V. 4.17] parce qu’elles forment un réseau. Cela signifie que vous pouvezregarder le Christ et en faire l’expérience de plusieurs façons différentes. Vous pouvezmettrel’accentsurdifférentesexpériencesduChrist,maisvotrefocusrevienttoujourssurlamêmepersonne.ChaquefacetteduChristfaçonnenotreproprepersonnalité,notreproprevie, d’une façonunpeudifférente.Notre Fondateur adit que cequi définit l’intérieurduMarianisteestprécisémentlapersonnequevousarrivezàdeveniràmesurequevousêtesfaçonnéspar ces vertus.Dès le commencementde saprésentationde ces vertus, le pèreChaminadeaditquecequicaractérisetoutgroupecesontlesqualitésquirésultentd’uneexpérience formatrice similairequelque chosequi façonne lemoi intérieurd’une certainefaçon commune. Il donne l’exemplede l’influencede vivredansunevilleparticulière. Parexemplequ’est-cequicaractériseunhabitantdeDayton?SivousvivezàDaytonpendantunanetquevousarrivezàêtreunetrèsbonnepersonne,çaveutdirequ’ilyaquelquechosede communàDaytonqui influence chaquepersonne. Si vousêtesde SanAntonioetquevous commencez à parler espagnol, c’est parce qu’il y a beaucoup de personnes qui leparlent.

LepèreChaminadeditquesivousdevenezMarianistedansvotreêtreintérieur,c’estparcequevotrepersonnalitéestfaçonnéeparcesvertus.IldisaitavecinsistancequelafaçondecommenceràdevenirMarianisteestdecommenceràvivrecesvertus.Ilpromettaitqueçafinirait par nous donner une caractéristique de famille. Après un certain temps, les gensdiront:IlyaenvousquelquechosequiestparticulierauxMarianistes.Ilvautmieuxnepastropledéfinirparcequel’identitémarianisteestplusprofondequelesdéfinitions,maiselleaquelquechosede spécial.NotreSystèmedesvertusestparfois comparéà cequi sertàdéfinirleJésuite.Qu’est-cequifaçonneleJésuite?OnditquecesontlesexercicesspirituelsdesaintIgnacequiformentleJésuite.Entermesimagés,nousdirions:«Ilspassentparlesexerciceset ilsensortentJésuites».Qu’est-cequi façonne leMarianiste?Nouspourrionsdire : Si nous donnons la possibilité à quelqu’un d’étudier les vertus et de les vivre, unepersonnalitémarianisteensortira.

Votrenouveaumoin’estpastellementdifférentpourvousfaireparaître«étrange».Maisvous devenez suffisamment différent pour être sympathique. Si vous adoptez toutes lesvertusdeJésus,vousdeviendrezaussiattrayantquelui.Nousavonstousfaitl’expériencedechosesfascinantesetattrayantesausujetdeJésus.

Voilàenquoiconsistentlesvertus,etvoilàpourquoiellessontsiimportantes.Toutgroupemarianiste authentique, qu’il soit laïc ou religieux, femmes ou hommes, ou mixte, estfaçonnéparcesvertusduChrist.Cen’estpasquelquechosequiestdéfinietétroitaupointdevouscontraindre.Maisilvouscaractérisevraiment.

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ÊtreforméparlesvertusduChristseréalisedel’intérieur.C’estcommedonneruneformeàunballon.Quandvouslegonflez,ilvaprendretelleoutelleforme.Illaprendnaturellementàpartir de son intérieur. Si vousessayezdedonnerune formeauballonen tirantdessusvousaurezbeaucoupdedifficulté.Commentformez-vousleMarianiste?Vousnelepoussezpas,vousnelebousculezpas.Vousdéposezquelquechoseenluiouenelleetvouslelaissezse développer. Et qu’est-ce que nous déposons à l’intérieur ? Un contact avec Jésus parlequel nous voulons adopter ses attitudes et sa force, en tout ce que nous faisons.Regardonsdeplusprèslesvertusafindemieuxlesconnaître.LepèreChaminaderésumaitensespropresmotsleprincipedecequ’ilappelaitunethéologiemystique,cequiveutdireune théologiede l’expériencedeDieu. Il dit à la finde l’unede ses lettres: « Leprincipefondamental de la théologiemystique est ceci: Si vous voulez devenirmondisciple, vousdevez laisser le vieil homme, prendre votre croix [ce qui suppose un sacrifice et de lasouffrance],etmesuivre»,prendremonchemin.Enfait,toutelapratiquedelaperfection–devenir mature dans le Christ- consiste à mourir au vieil homme et à revêtir l’hommenouveau.

Quand nous parlons demourir au vieil homme, nous parlons de ceci: Si nous organisonsnotrevieautourdenotrepsyché,noussommeslecentredenotreexistence.Celaveutdireque nous sommes responsables de notre propre être. Nous sommes la source de notrevaleur,nous sommes lamesuredenotreproprematurité.Alors, il n’y a riendevantnouspournousdonnerdesforces.C’estuneterribleresponsabilitéquenousavonsdecréernotrepropreégoetensuited’avoiràlemaintenir.NousadoptonslerôledeDieucommecréateurennousdisons:«Maintenant,c’estmoiquidécide».Nousdevenonsnotrepropremesurede notre propre bonté et nous disons: «Je vais agir à ma façon». Même quand noustraitons avec Dieu, il est possible d’organiser notre environnement à partir de soi-même.Ainsi, notre devoir ici est de nous brancher au niveau de notre esprit (âme) et de dire:«Seigneur,c’esttoiquiesSeigneur.Soislecentredemavie.»

Quandnousparlonsdevertu,nousparlonsd’uneforce,d’unecapacitédebienagir.LepèreChaminade en parle de cette façon pour dire que quand nous adoptons les attitudes duChrist,nousadoptonsvie,énergie,unesortedecapacité.Ildit:«Cen’estpastrèsimportantque certains discutent au sujet du terme «vertu». Nous l’avons fait nous aussi,particulièrementnous les religieuxmarianistes. Cedont lepèreChaminadeparlaitn’étaitpas réellementdesvertus.Ce sontdeshabitus.C’estquelquechosed’autre.Mais lepèreChaminadeinsistaitpourdire:«Ilimportepeuquecertainscontestentlenomde«vertus»,car ces dispositions sont des habitus. Quelque soit le nom qu’on leur donne, ce sont lesvertusde l’Institut [laSociétédeMarieetFillesdeMarie]». Ilvoulait regarderau-delàduvocabulaireetallerdel’avantaveccetteexpériencedevie.Nouspouvonsdonclesappelercomme nous voulons: Système des vertus, Méthode des vertus, Ensemble des vertus,MéthodededirectionProcessusde croissancepar les vertus…Cequi est importantestdesavoiravecquoietavecquinousfaisonsaffaire.

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Quandvousconsidérezlesvertus,vousfaitesfaceàunensembleimportantd’expériences.Sivouspensezquevousdeveztouteslesadopterd’unseulcoup,celapeutvouseffrayer.Laraisonpourlaquelleonlesprésentesiconcrètementestdepouvoirlessaisir.Jevaisjusteenprésenterunecommeexemple,parmid’autres,etvousmontercequeçaproduitennousetpournous.Lesvertussontréellementdespouvoirsoudescapacités,danscesensqu’ellesnousdonnentunenouvellepuissanced’êtreetd’agir.Ellesdoiventêtredéveloppées.Ellessont toutes des forces positives. Elles nous apportent la bonté. Il est important de nousrappeler que ces vertus touchent la totalité de l’expérience de ce que nous sommes. Jevoudraisparlerdelapremièredesvertus:lesilencedelaparole.

LepèreChaminadeestunbonpsychologue.Alors ilnousdit:Commençonspar laparole.Beaucoupdeceuxquiontétudiélesvertusdisentquelepointdedépartnefaitréellementpasdedifférence.LepèreChaminadeacommencéparlesilencedelaparoleparcequetoutlemondeparle. Il y a des gens parlent beaucoup. Si nous voulons réellement saisir notrepropreexpérience, commençonspar la regarderdeplusprèsavec Jésus.Évidemment, lesmots peuvent être quelque chosede très extérieur. Vouspouvez contrôler les paroles del’extérieur.Quanddesgensvousdisentquevousparleztrop,vouspouvezdire:«D’accord.Je vais arrêter de parler pendant une demi-heure». Eh bien, vous pouvez pratiquer cecontrôle et ne jamais changer votre attitude de verbiage. Vous voyez que nous voulonspratiquerlesvertusdefaçonàchangerl’imagedenotremoi.Nousvoulonsdesvertuspourneplusnouscentrersurnous-mêmesmaisadopterréellementlesdispositionsetlafaçondevivredeJésus.

Jésusnecontrôlaitpassesparolesdel’extérieur.Soncontrôlevenaitdel’intérieur,àcausedecequ’ilétaitetdecequ’il voulait. Sesparolesvenaientdesadisposition intérieuredes’exprimer.LepèreChaminadedit:«Parlezseulementquandceserapouraiderquelqu’un.Ouparlezseulementquandc’estunebonnechosedeparler.»[«neparlerquequandonleveut,etlevouloirquequandillefaut.»]C’esttrèsgénéral.Mais,unebonnepersonnediradebonnesparoles.Unepersonnequiestportéeàlacolèreetportéeàéclater,vafacilementdiredesmotsblessantsetaccusateurs.Ilestfaciledeparleraveccertainespersonnesparcequ’ilssonenclinsàlabonté,ellessontouvertsàl’écoutedesautres.Cen’estpasseulementl’usage des mots qui est important; c’est notre disposition. Vous pouvez dire les mêmesmots avec amour ou avec haine, avec compassion ou avec blâme. Vous pouvez dire:«Merci»avecgratitudeouavecsarcasme.

Vosmotsontuneffeténorme.Parfois,desmotsontungroseffet,mêmesivousneparlezpas.Parfois,quandvousêtesencolèrecontred’autres,vousneleurparlezpas.Àlaplace,vous les punissez par le silence, alors qu’une parole de guérison serait nécessaire. Lesparoles, vous le voyez, sont réellementdesexpressionsde cequevousêtes. L’objectifdupère Chaminade était celui-ci: « Comment pratiquons-nous la vertu du silence de sortequ’ellenousdonnedeplusenplusl’expériencedeparleraveclesdispositionsduChrist?»Notrefaçondefaireencelac’estlaméthode–lapratiquedecettevertu.

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Cesurquoiilestimportantd’insisterausujetdesvertus,c’estquelapratiquen’estpasjustela pratique extérieure d’une habitude. La question est d’arriver à savoir qui vous êtes etpourquoi vous agissez comme vous le faites. Si une personne aimable vous parle, vousentendrezdesparolesaimables.Siunepersonnerancunièrevousparle,voussentirezunevéritablepunition,quelquesoitcequelapersonnevousdit.Noussommescommeçanousaussi. Parfois, nous disons quelque chose et nous nous sentonsmal par la suite.D’autresfois,nousdisonsquelquechoseetnousnoussentonsbienaprès.Pourquoi?Cen’estpasseulement à cause de ce que nous disons. Cela dépend de notre disposition quand nousavonsparlé.Nosdispositionsfaçonnentnosmanièresd’êtrenotrepersonnalité.

La raison pour laquelle nous travaillons avec attention sur notre langage est précisémentpour devenir conscients de nos dispositions et de nos attitudes quand nous parlons.L’objectifduprocessusestdenousrendreplusconscientsdenous-même.Uneplusgrandeconnaissance de nous-mêmes dans le Christ est en même temps une plus grandeconnaissance du Christ. Nous en arrivons à saisir le sens de ce que le Christ voulait direquand il s’exprimait. Quand nous sommes en contact avec son expérience, alors nouspouvonsvivrelamêmeexpériencenous-mêmes.

Nos attitudes sont le reflet de notre image personnelle. Jeme demande si nous sommesréellementconscientsdufaitquecequenouspensonsdenous-mêmeetl’estimequenousavonsdenous-mêmevientdenotrefaçondeparler.Notrediscoursrévèlebeaucoupcequenoussommes.Nouscaractérisonsparfoislesgensparleurmanièredeparler:Ilparletrop.Ellenenous regarde jamaisdans les yeuxquandelleparle. Il neparlepasbeaucoup…Unjour,unepersonneestvenuemevoirparcequ’ellenes’entendaitpasaveclesautres.Elleadit:«Mesdeuxplusgrandesamiesmesonttrèschères,maisjenesaispaspourquoij’attiredesattitudesopposées.L’unn’arrêtepasdeparleretl’autren’arrivepasàlefaire.Pourquoi? Dispositions différentes. Par exemple, une personne essaie d’être drôle tout le temps,l’autre répète les mêmes choses tout le temps. Pourquoi ? Si je dois vous répéter unedouzainedefoiscequesaisquevousavezcomprislapremièrefois,jedevraismedemandercequisepasse.Laréponsen’estpasdanslesparolesmaisdansmonattitudequiserévèleparlesmotsquejedis.J’insistesurquelquechosedontjedevraisêtreconscient.Peut-êtrequej’ailatendanceàinterrompre.Pourquoi?Pourquoidois-jevouscouperlaparoleavantquevousayezfinideparler?Unexamenhonnêtenousenrévèleraplussurnous-mêmes.

Nousavonstouseucertainesdecesexpériences.Jemesouviens,audébutdesannées’60quand les «sensitivity sessions» ont commencé à être populaires. J’ai participé à l’uned’elles. Nous avons formé un groupe de discussion pendant que la facilitatrice nousobservait.Ils’agissaitdemontreràquelpointnousétionssensiblesouinsensiblespendantnotre échange. J’ai encore très clairement mes sensations en mémoire parce que j’étaissatisfaitdemoi-mêmeàlafindelasession.Jecroyaisquej’avaisbiencontribué.J’avaisditquelquechosedevalable. J’étaisassis lààprendreplaisirauxremarquesde la facilitatricequianalysaitchaquepersonnedugroupe.J’attendaislebonrapportquimeseraitdonné.Et

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quand elle est venue vers moi, tout ce qu’elle a dit est: Quentin, je pensais que tun’arriverais jamaisà te taire! Jen’encroyaispasmesoreilles. Jen’avaisabsolumentpasàl’idée que je pouvais être bavard.Mais en y pensant bien, j’ai appris beaucoup surmoi:Pourquoiavais-jebesoindediretoutçaaugroupe?»D’abord,jepensaisréellementqueceque j’avais à dire avait plus de valeurque ceque les autresdisaient. Celam’apprenddeschosessurmoi.Deplus, jemesuisvucommesupérieuràcegroupe. Jen’estimaispas lespersonnes autant que jem’estimaismoi-même. Au début de la session, jem’étais dit: Siquelqu’unpeut les fairedémarrer, je supposequec’estmoi.Qu’est-cequecela révèledemoi?Defaçonévidente,monattitudeenverslesautress’estmanifestéeparmesparoles.

Quandnouspratiquonslavertudusilencedelaparole,nousfaisonsréellementtroischoses.C’est laméthode que le Fondateur nous a donnée. Il y a trois étapes. La première, c’estd’avoiruneidéedecequevousvoulez.Quandvousparlez,quevoulez-vous?Vouspouvezdire: «j’aimerais parler pour que ce soit utile à chaque fois». C’est votre but. Ou vouspouvezdire:«quand jeparle, j’aimeraism’adresseràquelqu’un».Çaveutdirequevousdevezconnaîtrelesgensetêtreconscientdeleursbesoins.Vousdevezsavoircequiestbonpoureux.End’autresmots,vousavezàécouter.Ouvouspouvezdire:«J’aimeraisvraimentparlerdefaçonàcequeleSaintEspritpasseàtraversmesmots.»Parmicequevousdites,vous pouvez rendre très difficile le travail de Dieu.Mais vous devez commencer quelquepart.Vousdevezavoiruneidéedecequevousvoulez.

Deuxièmechose:Unefoisquevousavezuneidéedevotrebut,priez.Unissez-vousauChristpourcomprendresonattitudeenlienaveclaparole.LeChristaussiparlait.Etcequevousvoulez par la prière, c’est d’être suffisamment en lien avec le Seigneur pour apprendre àconnaître cequi sepassait en lui quand il parlait. Si vouspouvez saisir cela, alors ce serafacile de commencer à pratiquer. Ainsi, vous arrivez à la troisième étape. Pratiquez etvérifiezenvous-mêmedetempsentempspourvoircommentvousfaites:Quesepasse-t-il?Reprécisezcequevousdésirezréellement.Priezunpeuplusetparlezdenouveau.C’estun processus continuel et graduel de croissance. C’est comme apprendre à faire de labicyclette,àsiffler,ouàdanser.Vousnepouvezapprendreaucunedeceschosesseulementenlisantunmanuel.Vousavezàpratiquer.C’estunpeucommesuivreunediète.Vousnepouvez pas perdre du poids juste en lisant un livre de diète. Vous ne deviendrez pasvertueux juste en lisant un livre sur ce sujet. La lecture est un bon départ. Mais c’estseulementl’étapenuméroun.Aprèscela,vousdevezprieretpratiquer.

Ilya18vertus(dans laMéthodedesvertus).Les5premièressont lessilences:desmots,dessignes,del’esprit,del’imagination,despassions.Sinouspratiquonsl’undecessilencesparfaitement,noustoucheronsles17autresvertusd’unefaçonoud’uneautre.Ilssonttousinter reliés. Si çameprend10anspourpasserà travers lepremier, jen’auraipasà vivreencore 170 ans pour compléter les autres vertus ! En fait, notre Fondateur dit que toutevertuquifaitpartiedecequ’ilappelle«Lechemindeconsommation»peutnousremodelercomplètement.Chacunetouchenotreêtretoutentier.Alorslaquestionn’estpasdesavoir

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combiendetempsilnousfaudrapourlesacquérir.LaquestionestdesavoirsinousvoulonslesvivreavecleChrist.Sinousessayonsdelefaire,notreSeigneurnousremplitdevie.Decette façon, nous pouvons être remplis d’énergie et de force pour pratiquer toutes lesvertus.

Enlefaisant,nousnousédifionsdansleChristselonleplaninspiréànotreFondateurpourvivre l’Évangile. De cette façon nous pouvons construire une famille marianiste forméeentièrementdegensquisontvertueux,passeulementenétantbons,maisenétantforts!Votreprésenceserauneprésenceforte.Votreprésenceferaladifférence,sansavoiràvousforcer, parce que vos attitudes vont rayonner. Vous savez ceci que quand certainespersonnesentrentdansunendroit, l’atmosphèrechange.Pourquoi? Il yaquelquechosedansleursattitudes,leursvertus,quifontladifférence.Leurbontérayonne.Voilàpourquoinousvoulonsêtrevertueux.Nousvoulonsêtreapôtres.NousvoulonsêtreuneprésencequigénèrelaviedansleChrist.

Jevais vous résumer lesautresvertus,aunombrede18,parcequenousnepouvonspastoutes lestraiter ici.Chacuneest fascinanteparcequechacunerévéleraquelquechosedenouveausurvousqui vous fascinera. Ladémarchen’apas seulementpourbutdepointervosdéficiencesmaisvousaideraàréalisercequevouspouvezêtre.Ilvousestpossibled’enfairel’expérienceenvous-mêmes,etvousrendreàl’évidenceparexempledel’effetdevosparoles et de votre présence sur les autres.Quand vos efforts seront jumelés à la prière,vousserezencontactaveclepouvoirdeJésusquiagitenvousdefaçonspéciale.

Jedoismentionnerque ces vertus se regroupent en trois séries. Les cinq silences et troisautres vertus forment ce que nous appelons les vertus de préparation. Elles forment unebase solide pour développer une personnalité marianiste bonne et saine. Elles sont desdispositionsquideviennentdesforcespositivesdansnotremonde.

Àcôtédescinqsilences,ilyaaussiunevertudeconcentration.Celaveutsimplementdiredefaireconcrètementetavecpleineattentioncequevousavezàfaireaumomentprésent.Celademandeunegrandediscipline.Celademandeaussiunegrandefoietdelaconfiance.Quandvousfaitesquelquechose,vouslefaitescomplètementetvouslefaitesbien.

Ilyaaussiunevertud’engagementoudesolidarité.Commentdevenez-vousréellementunavecquelqu’und’autre?Ordinairement,enfaisant leurvolonté.Vouspouvezappelercelade l’obéissance si vous voulez, mais nous avons donné à l’obéissance des sens qui sontcentrés sur notre propre égo. Par exemple, l’obéissance est parfois définie comme unesoumission. C’est vrai dans un certains sens. Mais quand le père Chaminade parle del’obéissance préparatoire, il veut dire jusqu’à quel point nous sommes prêts à faire lavolontédes autrespour leurproprebien. Leur volontén’est pasnécessairement cequ’ilssouhaitent.C’estcequiestleurdésirleplusprofond.Etledésirleplusprofonddelaplupartdesgensest réellementbon.Parexemple,unepersonnepeutnepasdésireraller chez ledentiste,mais elle a un désir plus profond de faire traiter sa dent. Les gens se trompent

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parfoispoursavoircommentleurdésirleplusprofonddevraitêtreréalisé,maisilssaventcequ’ilsveulent.LeChristaétéobéissantauPère.Maisilaaussiétéobéissantàvousetmoiparcequ’iln’yavaitpasd’autre façonpour luidenous racheter sansnousêtreobéissant,sans adopter notre volonté pour la faire en lui-même. Il ne peut pas nous sauvermalgrénotre volonté. Sommes-nousprêts à faire cela avec les autres ? Si vous êtesprêts à cela,cousserezuneforcedanslaviedeceuxquevousrencontrerez.C’estladispositionquenousvoulonsacquériràtraverslavertupréparatoiredel’obéissance.

Le courageest l’autre vertudepréparation. LepèreChaminade l’appelait le Support desMortifications.Qu’est-cequeçaveutdire?Toutsimplementlecourage.Vousvoulezavoirassezdecouragepourfairefaceauxdifficultés,pourfairedeschosesdifficiles,desortequevous ne soyez pas empêchés de faire le bien juste parce que c’est difficile. C’est ladispositiondeJésus.Regardezlecrucifix,vousverrezvouscomprendrez.

En plus des vertus de base, il y a une série que le père Chaminade appelle les vertus depréparation. À ce niveau-là, vous n’avez pas beaucoup à faire; vous avez beaucoup àaccepter.Dieuvavouspurifier,maisvousdevezlelaisseragir.Cen’estpastantcequevousfaites,maisc’estcequeleSaintEspritfaitafindevousrendreplusgrandsquevousnel’avezjamaisimaginé.

Il y a une série finale: les vertus de consommation. Consommation signifie que nous enarrivonsaupointdevivreunedispositionàunteldegréquecelatouchetoutcequenoussommesetfaisons.Celanousconsume.Parexemple,sijedeviensreconnaissantetjevislagratitudeàunniveaudeconsommation, jesuisreconnaissantpourchaquechose.LepèreChaminade appelait cette vertu l’humilité. Il disait que vivre une vie de gratitude etd’humilité était ladispositiondebasepour chacun. Et alors, il définit l’humilité comme lacapacitédevoirlemonded’unefaçontellequevousreconnaissezchaquechosecommeunesourcepotentielledebontévenantdeDieu.

Jementionneceschosesseulementpourvous laissersavoircequivousattend.Vousavezété appelés à cette grandeur. Si vous êtesMarianistes, si Dieu veut réellement que voussoyezmembresdelaFamilleMarianiste,toutecettegammed’expériencessetrouvedevantvousouestdéjàvôtre.EtchaqueexpérienceestuneexpérienceplusgrandedeDieudansnotrevie.

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CHAPITRE15

Commentlaprièretransformenotrevieintérieure

Nous allons maintenant considérer la prière et voir comment elle affecte notre vieintérieure,particulièrementlaprièrecommelepèreChaminadeenaparléetaproposédelapratiquer.JeneveuxpasdirequelepèreChaminadenousaenseignéunefaçondeprieretquenousdevonsseulementprierdecettefaçonetpendanttoutenotrevie.Cequ’ilnousaenseignéenfaitestunefaçondeprierquinousassurequelaprièrevanouschanger.Sivous lisezcequ’ilaenseignésur laprière,vous remarquerezsa fréquente insistancepourdire que la prière doit toujours être une prière qui nous transforme. Elle nous change.D’abord, celamesurprenaitunpeu,parceque jepriedebiendes façons sans réellementchanger.LepèreChaminadeadmetquec’estpossible.Ilditqu’ilyadescentainesdefaçonsdepriersansvraimentchanger,parcequenotreobjectifestcentrésurnous-mêmesetnonsurDieu.Cegenredeprièren’estpascequenouscherchons.Plustarddansmavie,quandj’aicommencéàliresurlacontemplation,j’aidécouvertquelesgrandsmystiquesparlentdelacontemplationcommed’uneexpériencequidevientdeplusenplustransformante.

Quand nous parlons de la prièremarianiste, nous pouvons revenir à notre petit schéma.CettetransformationconsistevraimentàarrêterdevivreseulementàpartirdenospropresressourcespourenarriveràvivreavectouteslesressourcesdeDieu.Cettetransformationn’apasde finpuisquenous sommesen lienavecunDieu infini.Nousn’avonspasànousinquiéterd’enarriveràdeslimites.C’estpourquoilaconformitéavecleChristestunebellechose,etc’estpourquoicettecroissancepeutcontinuertoutaulongdenotrevie.

Lapremièrechoseàgarderàl’espritestquedanslaprièremarianiste,nousvoulonsprierdefaçon à ce que notre contact avec le Christ puisse nous changer. Cela peut consister à

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développercequiestdéjàlà,àvivreetàexpérimentercequenousavonsdéjà,plutôtqued’introduire quelque chose de l’extérieur. Quand nous avons reçu le baptême et que leChristaprisplaceennous,nousavonsdéjà reçu tout cedontnousavonsbesoin. Il resteseulementàlevivreetàledévelopper.

D’unecertainefaçon,votreprièrevavousnourrir.Lavraiequestionest:Qu’est-cequ’ellenourrit?Vouspouvezprierdefaçonànourrirvotrepropreégo.Ilyadesfaçonsdeprierenplaçant votre égo au centre. Il y a d’autres façons de prier qui vont développer votrenouvelleappartenanceauChrist.Laquestionimportanteausujetdevotreviedeprièreest:Qu’est-cequevousnourrissezenvous?

JecroisquelaprésentationdelaparaboledeJésusparsaintLucdesdeuxhommesquiserendent au temple pour prier est très éclairante à ce sujet. Les deux vont prier, maisremarquez ce que chacun affirme. C’est ce que Jésus dit d’une belle façon dans cetteparaboletrèssimpleracontéeparl’évangélisteLuc.(18,9-14)Deuxhommesserendentautemple pour prier. L’un est un pharisien, l’autre un publicain: collecteur d’impôt. Lepharisiensetientdeboutetdituneprièrepourlui-même.Remarquezcequ’ildit:MonDieu,jeterendsgrâces.Ils’adresseàDieu,maisenfait,saprières’adresseàlui-même.Qu’est-cequ’il affirme?Mon Dieu, je te rends grâce de ce que je ne suis pas comme le reste deshommesquisontrapaces,injustes,adultères;oubienencorecommecepublicain.Jejeûnedeuxfoislasemaine,jedonneladîmedetousmesrevenus…Alors,qu’est-cequ’ilaffirme?Ilfaituneaffirmationdelui-même.Vousvoyezquelepharisienn’abesoinderienvenantdeDieu. Iln’estpasvenu làpourêtrechangé. Ilnecherchaitpasunetransformation.Desoncôté, lepublicainsetenaitàdistance, iln’osaitmêmepas lever lesyeuxauciel,mais il sefrappaitlapoitrineendisant:MonDieu,prendspitiédupécheurquejesuis.Qu’est-cequelepublicainaffirmait?IlreconnaîtlamiséricordeDeDieu.Ilveutfairel’expérienceenlui-mêmedecettemiséricordedeDieu.Ilvoulaitêtrechangé.C’estcequenousvoyonsenconclusiondecetteparabole:Jevousledis,cedernierdescenditchez-luijustifié,l’autrenon.

Lepharisienest retourné chez lui tel qu’il était à sonarrivée.Mais lepublicain est rentréchezluiaprèsavoirfaitl’expériencedelamiséricordedeDieud’unefaçonnouvelle.Quelleprière puissante! Quelle belle parabole! Le pharisien a confirmé son égo, tandis que lepublicainaprogressépoursecentrersurDieu.

VoilàlechangementdenotrefaçondeprierquelepèreChaminadenousaenseigné.Quandvouspriez, faites-lepourêtre transformé.Si vouspriezaveccedésir, cela seproduira.Ceque vous voulez expérimenter ce n’est pas un plus de vous-même, vous voulez fairel’expériencedeDieuquisefaitunavecvous.Vousvoyez,lepublicainestrentréchezluienayantfaitl’expériencedelamiséricordedeDieu.Quelleseraalorssatendance?Quelleestsa disposition? Maintenant, très probablement, quand il rencontrera quelqu’un, il auratendanceàêtremiséricordieux.Voilàcommentlaprièrenousaffecte,sinousprionsdecettefaçon.

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Laméthodedeprièreestsimple,maiselleestaussitrèsexigeante,parcequ’elledemandedequitternotrevieilhomme.Vousnevoulezplusprotégerlevieilhomme.Vousnedéfendezpas l’image de vous-même. Votre égo prend une raclée. Si vous voulez vraiment fairel’expériencedeDieu,voilàcequidoitsepasser.

IlyatroiscaractéristiquesdelasortedeprièrequenotreFondateurnousaenseignée.Cestrois caractéristiques sont aussi un chemin de croissance pour notre nouvel être. Lapremièrecaractéristiqueest celle-ci: Laprièreest toujoursunexercicede foi.Par cela, jeveuxdirequedanslaprière,nousacceptonstoujoursquelquechosequenousnepouvonspasprouver.C’estcequ’estlafoi.Nousaccueillonsquelquechosecommeétantréelle.Nousla prenons dans notre vie sans aucune garantie, sans aucune preuve. Nous croyonssimplement qu’elle est réelle. Il existe aussi une foi naturelle. Beaucoup de gens ont desconvictionsnaturellesetilsviventàpartird’elles.Colombavaitsaconvictionsurlaformedelaterreetde l’endroitoùsetrouvait l’Inde. Ilsetrompait,mais ilavaitsaconviction, il l’asuivie,etiladécouvertunenouvelleterre.

Galiléeavaitsaconvictionsurlemouvementdelaterreetill’agardée.Avait-ildespreuves?Apparemment,iln’avaitpasassezdepreuvespourêtreenmesuredeconvaincrelesautres.J’ai vu un film sur Galilée. Il présentait un très long procès théologique sur sesenseignements. À la fin, la cour a affirmé avec solennité qu’ils avaient considéré toutel’affaire. Puis, ils ont proclamé solennellement que la terre ne bouge pas. Aprèsl’ajournementdelacour,Galiléeestrestélàendisant:«Etpourtant,elletourne!»

Vousavezvospropresconvictions.Jésusavaitsesconvictions.Quandvousvousagenouillezdevantuncrucifix, laissez-levousparlerdelaconvictionqueJésusdevaitavoirpourcroireque s’ilprenait sur luinospéchéset s’il acceptaitd’être lui-mêmevictimepoureux,nousserionssauvés.C’estuneconvictionénorme.Essayezvous-mêmedefairecela.Seriez-vousconsentants à être la victime pour la faute d’un autre? C’et ce que Jésus a fait. C’est laRédemption.Elledemandeunénormeactedefoi.Mettez-vousenprésencedeDieudanslaprière;vousdevezcroirequelquechosechaquefoisquevouspriez.C’esttoujoursunactedefoi. Vous croyez quelque chose à propos de Dieu. Même si rien ne semble se produire,pouvez-vous quand même croire assez en Dieu pour rester là avec lui en sachant quequelquechoseseréalise?

Qu’est-cequevouscroyez?Croyez-vouscequeJésusditsurlaprière?Prenezl’Évangileetregardez certaines choses qu’il dit sur la prière. Par exemple, il dit: «Tout ce que vousdemanderez,vousl’obtiendrez».Pouvez-vousréellementprierencroyantcela?Ouquandvous allez prier vous dites-vous: Bon, je vais prendre une chance. Ce n’est pas ce que leChristadit.Cequevouscroyezvaarriver.Cequevouscroyezfaitunegrossedifférence.

Je n’oublierai jamais l’expérience que j’ai vécue ici en 1980 à ce centre de retraite deBergamo. La classe du père Jim Heft y faisait une retraite sur la prière. Les participantsétaient des étudiants universitaires. Et pour retrouver un brin de jeunesse, j’ai décidé de

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passercettefindesemaineaveceux.Àunmoment,nousavonseuungroupedediscussionsurlaprière.Alorsquecesuniversitairescommençaientàparlerdelaprière,j’aisentiqu’iln’y avaitpasbeaucoupde foi qui s’exprimait.Aucunne semblait réellement croireque laprièrepouvaitfairequelquechose.Ilyavaitdescommentairesdecegenre:Bien…siçamepermet deme sentirmieux, je devrais prier. Finalement, l’ambiance devenait pesante. Jepensais:Toutçanesembleallernullepart.Puis,quelqu’unaditàunefille:Toi,tupries.Jesaisquetupries.Qu’est-cequetucrois?Ellearépondu:«Jecroisqueçamarche».Etunautre a dit: «Comment peux-tu prouver cela» ? Elle a répondu: «je ne peux pas leprouver».L’autreréplique:«Maisalors,pourquoipries-tu»?Elledit:«Parcequejecroisqueçamarche».Alorstoutel’ambianceacommencéàchanger.Ellecroyait.Elledisait:«Çamarche» ! C’est tout. Jésus a dit: «Si vous demandez quelque chose, vous le recevrez».Vous ne pouvez pas le prouver. La question est de savoir si vous allez continuer de prierparcequevousycroyez.

Mettez-vousenprésencedeJésusetcroyezcequ’ildit.C’estdanscettedirectionquenousvoulonsaller.Faitesdel’ensembledevotrevieunequestiondefoi.SivousêtesMarianiste,vous êtes appelés à vivre les vertus du Christ pour le bien du monde. Cela a du sensseulementsivouslecroyez.Lesvertusdepurificationsontdesexpériencesquevousavezàvivredanslafoi.Ellessontenlienaveclesdifficultésquelavienousimpose.Qu’arrive-t-ilordinairementquandnousavonsàfairefaceàungrosproblème?Laplupartd’entrenousessaient de faire l’une de deux choses: Nous essayons de nous en débarrasser ou de lecontourner.MaislepèreChaminadeditquesivousvoulezvivrel’expériencedepurificationavecleChrist,vousnedevezpasfairecela.Nedépensezaucuneénergieàessayerd’enleverl’obstacle.Comportez-vouscommeleruisseau.L’eaucoule,etsiellerencontreunobstaclesursonparcours, le ruisseaune faitpasd’effortpour l’enlever. Ildevientsimplementplusgonfléenniveauetpluslargeenétenduejusqu’àcequ’ildébordel’obstaclepourcontinuersoncours,maisalors, il abeaucoupplusde forceetdepouvoir.C’est l’obstaclequia faitgonflerleruisseauetlafaits’étendre.C’estdecettefaçonquenoussommespurifiés.

Maiscelaprenddelafoi.Vousnevoulezpasdetouscesproblèmesquivousassaillent.Vousneméritezpastoutecettemisère.Maisvouspartagez l’expériencedeJésussur lacroix. Iln’a pas essayé d’enlever la croix, il a grandi plus en largeur et en profondeur dans laconfianceàsonPèrejusqu’àcequ’il lasurmonteetenfasseuneexpériencedesalutpournoustous.Lapurificationesttoujoursunactedefoi.

Une deuxième caractéristique de la prière marianiste est: Priez jusqu’à ce que ça vousremued’unefaçonoud’uneautre.Priezjusqu’àcequ’ilyaitunmouvementenvous.Soyezattentifsàcesmouvements.Ilspeuventêtretrèsmodestes.Çapeutêtreundésir.Çapeutêtrequelquechosequevousauriezlegoûtdefaire.Çapeutêtresimplementuneconvictionqui vouspousseàdire:oui, je crois cela.Maispriez jusqu’à cequequelquechosearrive.SoyezpluscentréssurcequeDieuaccomplitenvousquecequevousditesàDieu.C’estleconseildeJésus.Iladitquevotreprièreneserapasmesuréeparlaquantitédevosparoles.

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Samesuresera: jusqu’àquelpointêtes-vousprêtàvous laisser toucher?Çapeutêtreunmouvementmodeste,maisilvouschangera.Suivezsimplementcemouvement.

Permettez-moi de vous donner un exemple de ce que veut dire être touché. L’une deschoses qui peuvent se produire dans notre vie est l’expérience de sentir un appel. NotreFondateur était convaincu que Marie elle-même a appelé chaque Marianiste à devenirreligieux.Marievousappelleetnelefaitpaspourrien.Sivousressentezcetteexpérience,sivousêtestouchésparcetteexpérienced’êtreappelé,quelquechosed’importantchangeradans votre vie. Çapeut êtreunepetite chose,mais c’est comme le levaindans lapâte. Ilchangetout.

Pouvez-vousprierdanscesens?Pouvez-vousvousmettreenprésencedeDieuetdeMariepourrépondreavecfoi?Pratiquezvotrefoijusqu’àcequequelquechosesepasseenvouset il se produira quelque chose dans votre vie. Si le mouvement est positif, vousl’accueillerez et il vous remplira; ou encore vous vous sentirez bien en l’accueillant. Parexemple, vous êtes heureux d’être appelé, ou encore vous gardez la conviction d’êtreappelé. D’autre part, vous pouvez avoir un mouvement négatif dans la prière. Rien nesembleseproduire,alorsvousêtesportésàarrêterdeprier.Celaestaussiunmouvement,maisiln’estpasdanslabonnedirection.Cependant,sivousêtesattentifs,ilyatoujoursunmouvementquiseproduira.

Notre Fondateur a dit: « Priez avec foi et priez jusqu’à ce que vous soyez touchés ». Etquandvousremarquerezunmouvementenvous,uneidée,ungoût,undésirquelqu’ilsoit,suivez-leparcequec’estunegrâcequivousestdonnée.

Une troisième caractéristique de la prière est: Si c’est une vraie prière, il reste quelquechoseenvousaprèsavoirprié.C’estlapartieimportante.C’estcommecequesaintJeandelaCroixdisaitausujetdesvisions.Sivousavezunevision,cen’estpasdelavisiondontvousdevez vous souvenir. Ce qui est vraiment important, c’est ce qui reste en vous après lavision.Siquelquechoseachangéenvous,c’estçaquevousavezàretenir.Encoreunefois,ilsepeutquecesoitquelquechosedemodeste,maisleseffetsdelaprièresontcumulatifs.Ilsmodifientgraduellementvotrevieetladirigent.

Quelquetempsaprèsavoirprié,arrêtez-vouspourvousdemander:Qu’est-cequiestrestéenmoi?Qu’est-cequimevientàl’esprit?Sic’estungoûtouuneconvictionouundésir,celareviendra. Se le rappeler va le confirmer et le faire grandir en vous. Il est utile de réviservotreprièreàcertainsmoments.Faitesunretourpourvoircequiresteraenvous.Quoiqu’ilensoit,lagrâceestagissanteenvousetc’estcequiestentraindevouschanger.

CommeMarianistes,nousavonsuneméthodetrèssimpledeprière.Vouspouvezprierdedifférentesfaçons,maisavecledésirdegardercestroisélémentsdansvotreprière:

1-Foi:Croyezjusqu’àcequevoussoyeztouchés.

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2-Persévérance:Conservezcemouvementjusqu’àcequ’ildemeure.

3-Révision:Faitesunexamendevotreprièredetempsentemps.

C’est laméthode.Vousn’avezpasàprierdecette façon tout le temps,maisvouspouvezutiliserplusieursméthodesdeprièreaveccestroiséléments.C’estnotrevoiemarianiste.

Jecroisquevouspouvezvoircommentcelapeutsecombineraveccequenousavonsditsurlesvertus.Vouspouvezprieret croîtredans lesvertusaveccetteméthodeassez facileettrèsefficace.

Vouspouvezvousdemandercommentnouspouvonsutilisercetteméthodemarianistedeprièreenpriantpourlesautres.Voicicequenousavonsàfairepourtoucherlesautresparlaprière:NousnousmettonsenprésencedeDieuetnousdemandonssincèrementcequenousdésironspourcespersonnes.PuisnousdisonsàDieu:Jedésireêtretonmédiateurouton instrumentde la façonque tuchoisiras.C’est lavéritablecléde l’efficacité.Celanousplaceenpleindans l’expériencedemédiateurde grâce.Nousn’essayonspasde régler lemondeextérieur,maisnotredispositionintérieures’ouvrepourqueDieupuisseytravailler.C’estencoreunequestiondefoi,maisnouscroyonsqu’unetelleprièredemédiationauneffet considérable.Quand vous priez pour quelqu’unoupour quelque chose, vous voulezêtre un médiateur ou un instrument, ce qui veut dire que vous pouvez avoir à porterquelques-unsdesfardeauxquel’autredoitporter.

CHAPITRE16

CommentMarieembellitnotrevie

Jevoudraisprésentercesréflexionssousformed’unequestion:QuandMarieprendplacedansnotrevie,quelledifférencecelafait-ildanscequenoussommes,etdanscequenousexpérimentons en nous ? C’est manifestement un aspect très central et fondamental denotreviemarianiste.L’unedesfortesconvictionsdupèreChaminadeétaitquelaprésencedeMariepeutchangernotrevieradicalement.

Je crois que nous pouvons commencer nos réflexions à partir de notre expérience de laprésencedecertainespersonnesdansnotrevie.Ilyadeschangementsquisefontennousseulementparcequ’unecertainepersonneestentréedansnotrevie.Quandunepersonneesttrèsprésente,pastantphysiquementquedansnotreesprit,noussavonsqu’elleauneinfluencesurnous.Nousnepouvonspasêtreaffectésparquelqu’unquin’estpasprésentennousd’unemanièreoud’uneautre.

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Chacundenouspeutavoiràl’espritunepersonnequiafaitunegrandedifférencedanssavie.Habituellement,lechangementn’estpastantàcausedecequecettepersonneafaitouaccompli,maisplutôtàcausedecequis’estpasséennousquandnousavons laissécettepersonnenousdevenirréellementprésenteàsoi-même.Jecroisquenoussavonsqu’ilyades façonsde laisserdespersonnesentrerdansnotrevie,comme ilyenadenepas leurpermettre de le faire. Comment accueillons-nous certaines personnes et comment engardons-nousd’autresàdistance?C’estunequestionimportanteparcequelaprésencedequelqu’unnousaffecteaupointquenousl’acceptonsoularejetons.

ToutcelaestenrapportsignifiantaveclaprésencedeMariedansnotrevie.Dupointdevuedeladoctrine,expliquercommentMarieestnotremèren’affectepasprofondémentensoinotre vie. Nous voulons parler ici du changement qui peut se produire quand on faitl’expériencedeMariedansnotrevie.

Pensezauxamis intimesquevousavezet commentvous les laissezvous influencer.Vousn’ouvrezpasseulementvotreêtreàeux,vous les laissezproduireuneffet survous.Vouspouvezmêmeprendrecertainesdeleurshabitudesoudeleurfaçondepenser.End’autresmots,vousne leurrésistezpasbeaucoup.Quandvousdites: J’aimeuntelouuntel,c’estcommesivousdisiez:jepermetsàunteletàunteldemetoucherprofondément.Quanddespersonnesentrentdansnotreviedecettefaçonprofonde,vousdevenezsemblablesàellesd’unecertainefaçon.Etsi larelationestmutuelle, ilsdeviendrontaussisemblablesàvousd’unecertainefaçon.

Maintenant,pensezaussiàdespersonnesquevousavezexcluesdevotrevie.Quandellescommencentàparler,vousavezdesréflexionstoutesprêtes.Etvouspouvezprendreplaisiràdiredeschosesquipeuvent lesrendreinconfortables.Vousn’essayezpasdelesblesser.Vousvoulezseulementqu’ellesrestentàlapériphériedevotrevieintime.Pourvous,ellessontuneprésencenégativeetvousnedésirezpasqu’ellesentrentdansvotreintimité.

ToutcelapeutsevérifierdansvotrevieavecMarie.Dequelle façonêtes-vousenrelationavecelle?Sivousrépondez:jenesaispas,jen’yaijamaispensé;vousavezdéjàuneidéede votre relation avec elle.Marie ne s’introduit pas de force dans notre vie ou dans nosexpériences.Lesquestionsessentiellesdeviennentalors:Voulez-vousréellementaccueillirMariedansvotrevie?Marieveut-ellevousaccueillirdansSAvie?Noussommesconvaincusqu’elle veut sans aucun doute nous accueillir dans sa vie. La réponse à l’autre questiondépend de nous. Si nous voulons réellement Marie dans notre vie, nous devons nousdemander:Quedevons-nousfairepourêtreouvertsaucadeaudesaprésencedansnosvies?

Le père Chaminade rattache notre relation àMarie à deux événements de l’Évangile. LepremiersepasseàCana(Jn2)quandMarienousdemandesimplementdefairecequeJésusnousditdefaire.L’autre,quiaplusd’implicationsdirectessurl’accueildeMariedansnotrevie,estlascèneavecsaintJeanaupieddelacroix.(Jn19,26-27)AlorsqueJésusestsurle

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pointdemourir,samèresetenaitprèsdelui.«EtJésusvoyantsamèreetledisciplequ’ilaimaitsetenirprèsd’elle,ilditàsamère:Femme,voicitonfils.Puisilditaudisciple:Voicitamère».Eticisetrouvelaphraseimportante:«Àpartirdecetteheure,ledisciplelapritchezlui».Quelquestraductionsdisent:«Etàpartirdecetteheure,ledisciplelapritdanssamaison ». Dans ce mystère, Jean prit Marie dans sa vie de la façon que nous, commeMarianistes,voulonslefaire.Nousvoulonsquecemystèreseréalisedansnotreproprevie.

À la résidence de l’Administration Générale, le père José M. Salaverri, alors qu’il étaitsupérieurgénéralacommandéàuneartisteunesculpturedelascèneduCalvaire.C’estlaseulereprésentationdelascèneduCalvairequej’aivueoùilyauntripleéchange:MarieetJeans’accueillentl’unetl’autre,etlesdeuxreçoiventcecadeaudeJésus.PensezàcequisepassepourJeanaprèsqu’ileûtacceptéMariechezlui.Quevousarriverait-ilsivouspreniezMariechezvous?Sivous lapreniezréellementdansvotrevie?Pascommeuneidée,passeulementcommeunedoctrine,maiscommeuneprésencevéritable.Jepensequevotreviechangerait, doucement peut-être, et même de façon puissante. Mais elle changeraitsûrement.

CommeMarianistes,nousn’avonspasbeaucoupdedévotionsextérieuresàMarie.Jecroisquenotrevraiedévotionest laPrièrede troisheures. J’espèrequevousdites cetteprièrechaque jour. Je le faisparcequ’ellem’estdevenuetrèssignifiante.C’estunbonrappeldeprendreMariedansnotrevie.Aupremierabord,çanesemblepasunegrandechose.MaissinousaccueillonsvraimentMariedansnotrevie,notreprisedeconscienceparrapportàbiendeschosespeutcommenceràchanger.NouspouvonsnousrendrecomptedeplusenplusdecequenouscroyonsausujetdeMarie.Jecroisquecemystèrenousaideànouscentrersurl’essentielenMarie,parexemplesursonrôledanslesalut.C’estlerôledesaprésencequi nous conduit à la vie éternelle. Saprésenceest par-dessus tout dedonner la vie. Ellen’entrepasdansnotreviepourdétruirequoiquecesoit,saufcequinuitànotrevie.

Jenecroispasquevouspuissiezvivresansdevenirmissionnaires.LegranddésirdeMarieestquechaquepersonneenarriveàconnaîtreleChristenprofondeur.LepèreChaminadenousditque si nouspouvions regarderdans le cœurdeMarie,nouspourrions y voir sonprofond désir que chacun connaisse son Fils. C’est l’expérience la plus féconde quequelqu’un puisse avoir. Et aussi, quand nous parlons d’être missionnaires de Marie ouministresdeMarie,c’estpourvivrelemêmemystère,etpourprovoquerlemêmerésultat.

CommentMarie affecte-t-elle l’imageque vous avez de vous-même ?QuandMarie entredansnotrevie,qu’est-cequecelafaitàl’expériencedenotremoi?Monexpérienceestquedans lamesure où je l’accueille vraiment dansma vie, dans lamêmemesure je reçois laconfirmation de tout ce que ce à quoi j’ai été appelé. C’est la plus grande expérienced’affirmationetdeconfirmation.

Je vais vous partager une expérience que j’ai eue l’an passé. J’ai eu l’occasion d’aller àMedjugorjeavecmonfrèreetmabelle-sœur.C’estestunendroitoùbeaucouppensentque

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Marieestapparueetsemanifesteencore.Jenesuispasallélàavecdesattentesspéciales,ni pour chercher quelque chose d’extraordinaire. Mais quand je suis revenu, il y a deuxchoses qui avaient changé très profondément dans ma vie. L’une est la pratique de laconfession,lesacrementdelaréconciliation.Depuiscetemps,cesacrementestdevenuunenouvelleexpériencedelamiséricordedeDieu.Maintenant,jemeconfesseplussouventquejenelefaisaisauparavant.Ladeuxièmeexpérienceestcelledel’Eucharistie,quiadéployéune nouvelle profondeur de sens pourmoi lors de sa célébration. Pendant que j’étais là,j’étais très conscientde laprésencedeMarieparceque tout l’endroitenestmarqué. Lesgensl’acceptentouyrésistent.C’estpourquoic’estuncertainendroitdecontradiction.Unsoir, nous avons fait la montée de la colline de l’apparition où il y avait environ 2000personnesenprière.Ilyaeuunemanifestation:unelumièrequim’aremplid’unejoiequejenepeuxdécrire.Maisquandnousdescendionsde lamontagne,un jeunehomme justederrièremoiaditàsonami:«Ouais!Etalors?Nousavonsvuune lumière.Puisaprès?»Nous avions tous vu lamême chose,mais jeme suis senti privilégié d’avoir reçuquelquechosequ’ilsn’ontpasaccueilli.Etc’estcelaquifaitladifférence.

EntantqueMarianistes,Marienousestoffertecommeunegrâcespéciale.Marienousestprobablement offerte plus directement qu’à plusieurs personnes. Elle nous est offerte sidirectementqu’elleestlecentredenotreappel.

Comment l’accueillons-nousdansnotrevie?LepèreChaminadedécritnotreconsécrationounotreengagementpartroiséléments.Vouspouvezvérifiersurvous-mêmepourvoirsivous les intégrez. Si vous êtes sincères,Marie va vous toucher plus que vous ne pouvezl’imaginer. Lepremierélémentest le choix.LepèreChaminadedisait avec insistancequeMarienousachoisis.Ellea librementchoisid’êtrenotremère.Elleadit«oui»pourêtrenotremèretoutcommeelleadit«oui»pourêtrelamèreduChrist.Sonouiétaitvraimentréel,unvraichoix.End’autrestermes,Mariedit:«Jeveuxêtretamère».CommeJ’aimecela!Denotrecôtéchoisissons-nousd’êtresonfilsousafille?Choisissons-nousréellementd’entrerdanscetterelationavecelle?Lechoixestlapremièrefaçondel’inviter.Voussavezcequecelasignifiepourvousquandquelqu’unvousdit:«jeveuxréellementêtreavectoi.Jet’aichoisi».

Quel est le deuxième élément ? Le père Chaminade dit que c’est l’engagement.QuandMariedit:«jesuistamère,c’estpourtoujours».Ellenechangerajamaiscela,peuimportece que nous fassions. Si nous jetons un regard sur notre passé, beaucoup parmi nousconstaterontquenousavonsétéplusieursfoisdansdessituationsoùMarieauraitététrèsjustifiée de nous dire: «Je ne veux plus être partie prenante de tout cela»! Mais sonengagementestperpétuel.Sonouiestpourtoujours.C’estlàquenouscommençonsàavoiruneindicationdenotregrâcespécialedelastabilité.Quesignifienotrestabilité?Elleveutdire:«ouipourtoujours».NousdisonsàMarie:«Oui,jet’aichoisieetjetedisquec’estpourtoujours».

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LetroisièmeélémentestcequelepèreChaminadeappellelacommunion.CelasignifiequeMariemetànotredispositiontoutcequ’ellea.Nousavonstoutencommunionavecelle.Etsinousvoulonsvivrecettecommunionavecelledansuneexpériencemutuelle,nousfaisonsla même chose. Nous mettons tout ce que nous sommes et ce que nous avons à sadisposition.C’estunecommuniondebiens.Maisqu’avons-nousàoffriràMarie?Toutcequenoussommesettoutcequenousavons.Qu’a-t-elleànousoffrir?Toutcequ’ellea.

Votrefaçondefairel’expériencedevotrechoixdevied’engagementetdecommunionesttrèspersonnelle.Maisjesaisceci:entrerdanscettesortederelationavecMarieetlavivreréellement est l’une des expériences les plus valorisantes et d’affirmation de votre êtrepersonneletdevotrepropreexistence.C’estclairementuneexpériencedefoi.QuandnousvivonscetterelationàMarie,nousapportonsauxautreslesmêmeseffetsqueMarienousapporte. Notre présence devient une présence radiante de bonté. Nous apportons aumonde tout ce qui résulte de notre choix et de notre engagement à son égard,particulièrementdanslacommunion,suiteaupartagemutueldetoutcequenoussommesetdecequenousavonsàdonner.

Une conséquence pratique que notre Fondateur en tirait est qu’il était certain que nouspourrions demander à Marie n’importe quoi et que nous l’obtiendrions, même « desmiracles».JesuispersonnellementconvaincuquenotreFondateuravécuunbonnombred’expériencesquiétaientdesmiracles,selonnotredéfinitionordinairedecemot.Ilamêmedit:«Sivousavezbesoindemiracles,ilsseproduiront».Lesmiraclespeuventfairepartiede notre choix d’engagement et de communion comme fruits de notre consécration àMarie.

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TROISIÈMESECTION

ConférencesàlaFacultéetaupersonnel

del’UniversitéSainte-Marie

etàlaFamilleMarianistedeSanAntonio

LeForumMarianistedel’UniversitéSanAntonio.

UniversitéSte-Marie,SanAntonio,Texas

25-27mars1992

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INTRODUCTIONÀLATROISIÈMESECTION

Chapitres17à19

Le Père Quentin Hakenewerth S.M. a reçu, du Président et du Forum marianiste del’UniversitéSainte-Marie,une invitationàs’adresserauxgroupessuivantsà l’Universitédu25au27mars1992:

1. LaFacultéetlePersonneldel’UniversitéSainte-Marie,sur:MissionetCulture.2. LaFamilledeMariedeSanAntonio,sur:Ledevoird’Évangélisationetlerôledela

FamilleMarianistedansl’Églised’aujourd’hu.3. LeForumMarianistedel’UniversitéSte-Marie,surLaSpiritualitéMarianiste.

CHAPITRE17

MissionetCulture

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Je suis bien content d’être de retour à l’Université Sainte-Marie. J’ai beaucoup d’heureuxsouvenirsdemonséjourici.Etc’estformidabledereveniretdevoirlesdéveloppementsquiont été réalisés et, en particulier, de déambuler dans ce bâtiment, votre nouveau Centreuniversitaire.Jemesenstoutsimplementhonoréderevenirdanscebeaubâtiment.JesuiscertainqueceCentrereprésentebeaucoupdechosessurceCampus.Jesuisprofondémentému et je vous remercie vivement dem’avoir invité à prendre la parole devant vous cetaprès-midi.

LetitredemaprésentationestMissionetCulture. jevoudraisd’aborddirequelquesmotssurcetitre.Ilauneorigineintéressante.IlvientdenotreChapitregénéralde1991.Touslescinq ans, des délégués de tous les secteurs de la Société de Marie se rassemblent pourévalueroùnousensommes,oùnousallonset,enparticulier,cequenoussentonsquenousdevons faire dans le monde d’aujourd’hui. Ce qui est intéressant au sujet des Chapitresgénéraux–quandonlessuitàtraverslesannées–c’estquechaquefois,ilensortuncertainnombredemisesaupointetcertainsthèmesauxquelsnoussommesconfrontés.Celavientpluscommeunbesoin ressentiquecommeunegrandeétudeàmener.En juillet1991, lebesoin ressenti a été exprimé dans cesmots:Mission et Culture. Lamission, c’est le butauquelnoustendons,letravailàfaire,unrôleàremplir,unserviceenparticulieràréaliserpour lebiendesautres.Lamission,c’estcequidonneunsensetunbutàchacund’entrenous dans le travail que nous faisons. Elle donne un sens à notre vie et nous donne lesentimentd’êtreutiles.

Pourquelqueraisonquecesoit,lesdéléguésauChapitrede1991avaientlesentimentquenotremissioncommeSociétédeMarie,n’apassembléêtreclairementdéfiniecesdernièresannéescommepeut-êtredansdesépoquesantérieures.Commeconséquence,nousavionslesentimentquenousdevionspeut-êtrerecentrernotreactionetmettreunaccentplusfortsurnotremission.Concernantlamission,lesquestionssuivantesontétéposées:«Pourquoidevrions-nousrecentrer?»«Qu’est-cequisepasseaujourd’hui?»«Pourquoiuneremiseau point est-elle nécessaire ? » La question a été ainsi soulevée en partie parce que lenombre de religieux avait diminué et que chaque fois que le nombre diminue, les gensdemandent: « Pourquoi ? » Vous vous posez la même question ici à l’université, si vosinscriptionscommencentàbaisseretquevouscommencezàenchercher lescauses.Celanousamèneàrepenseràuncertainnombredechosesencequinousconcerneetpourquoinossommesici.

Ainsi,lorsdenotreChapitregénéral,estnéeuneintuitionoù,àl’évidence,ilfallaitquedeschangementsdansnotrepropremissionsoientopérésoubienqu’onchangelamanièredel’envisageretqu’onl’envisageenrapportaveclaculture.

Nousn’avonspasétudiélacultureentantquetelle,maislaquestionasoulevébeaucoupderéflexions sur le sujet depuis le Chapitre général. Quand nous parlons de culture, nousvoulonsparlerdesmodèlessociaux,deshabitudesquenousavonscommecorpssocialquiporteavecellescertainesvaleurs.Noshabitudessocialestransmettentnosvaleursmorales.

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Lespersonnesquientrentdanscetteculturesontforméesseloncesvaleurs.Nosréflexionsontdesrapportsavecdeschangementsprofondsquionteulieuetsontencoursdansnotreculture.Ceschangementsnesontpassuffisammentlentspourquenoussoyonsenmesurede les traiteravecuncertain calme.Alors,quand il yaunchangementdans la culture, lamission d’un groupe ou d’une institution animée par cette culture est aussi affectée. LesdéléguésauChapitregénéralonteul’intuitionqueleschangementsdanslacultureontététellementsignificatifsquenotremissionavaitbesoinenquelquesorted’unemiseaupoint.

Pourillustrerleschangementsdeculturedecetteépoque,jevousdonneunexempledeceque j’aiexpérimentésurceCampusen1970. J’étaisDirecteurduScolasticatcomposédesfrères étudiants sur le Campus. Ils étaient alors environ 60. Notre but, dans cettecommunauté était de transmettre aux jeunes frères nos valeurs marianistes et notretradition marianiste. Leur tâche était de se nourrir de ces valeurs et de devenir desMarianistes dans leurmanière de penser, leurmanière de vivre, dans leurs valeurs.Nousavons fait ce que nous avions toujours fait pour communiquer ces valeurs, mais noussentions que ces valeurs n’entraient pas dans lesmœurs. En d’autresmots, ce que nousavions fait jusqu’alors avait cessé d’être efficace. Jeme souviens que nous nous sommesfréquemment questionnés à savoir pourquoi notre approchen’apportait plus les résultatsdésirés.

Un après-midi, trois des jeunes religieux sont venusme rencontrer etme dirent: «Nousaimerionsparleravecvoussurunsujetquinouspréoccupe.Nousl’appelons,le«syndromedesseizepruneaux».Danslebureaudusous-directeur,ilyavaitunepeintureoùl’onvoyaitunhommelesmainsenformedecoupesipleinesdepruneauxqu’ellesnepouvaientpasencontenirundeplus.Sionlescomptait,ilétaitfaciledevoirqu’ilyenavaitexactementseize.Alors,ilsmedirent:«DepuisquenoussommesauScolasticaticiàSainte-Marie,vousnousavezenseignébeaucoupdechosesetvousnousavez inculquébeaucoupdevaleurs.Nouspouvonsentenirseize.Nouspouvonsenabsorberseize.Maismaintenant,c’estcommesinousenrecevionsvingt-quatre,vingt-huitoutrente-six.» Je leuraidemandépourquoi, ilsme disaient tout cela. Au début, ils étaient imprécis,mais pendant notre conversation, letoutdevinttoutàfaitclair.Auparavant,cequenousdonnionsànosjeunesfrèresvenaientd’abord des religieux en charge de leur formation. Nous étions la principale sourced’information.Maismaintenant, dans les années 1970, nous avons commencé à aller aucinéma,àregarderlatélévision,àparleràplusdepersonnesetnoussommesexposésauxmédiasàunplushautdegré.Ilsdécrivaientcelacomme«unesurcharged’informations».Etilsdirent:«Écoutez,père,quandvoussurchargezunordinateur, ilvavousdireassezet ilbloque.Quandvousnous surchargez, vousvousattendezà cequenous continuions.» Ilsrecevaientplusd’informationsquecequenousrecevionsdansletempsdenotrejeunesse.Nousavonsalorsétémisaudéfidegérerlasituationpourfaireensortequenouspuissionscontinuer à communiquer les bases des valeurs marianistes sans ignorer les autresinfluences.Vousnepouvezmettredecôtélesinfluencesdelaculturequivousentoure.

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C’est simplementunexemplequinousmontreque les changementsdans la culturenousaffectent profondément. Parfois nous ne savons pas trop comment réagir devant ceschangements. Nous devons alors nous prendre en main et travailler ensemble à fairequelquesajustements.Nousavons réaliséque lesmassmédiaontcommencéàavoirunebienplusgrandeinfluencesurlaformationdenosjeunesfrèresquenousenavions.Cefuttoutàfaitnouveaupournous,parcequandlaplupartdenousavonsfaitnotrenoviciat,nousn’avionsmêmepasaccèsauxjournaux.Nousn’avionspaslatélévision.Jen’aimêmepasluune revuepopulairependant toutemonannéedenoviciat. Cequenous apprenionsétaituniquementlesélémentspournousformerdanslatraditionmarianiste.

Nouspouvonsappliquercettesituationàchaqueétablissementmarianisteaujourd’huidanslespaysdéveloppés.Noustrouvonslamêmechosedanslespaysenvoiededéveloppementoù le peuple commence à participer très rapidement aux technologies et à révolutioninformatique.

Ici,àl’UniversitéSainte-Marie,-etjenepensepasquel’universitésoittoutàfaitséparéedelaSociétédeMariequantànotremission–vousavez,vousaussiàfairefaceàcegenrededéfi. Dans votremission vous avez deux éléments de base qui doivent allermain dans lamain.Lepremier,c’estlecôtéprofessionnel,lecôtéacadémique:laconnaissanceobjective,lescompétencesdans lacommunication,dans l’informationàpartager,dans lesméthodesd’enseignement. C’est la matière de l’excellence professionnelle, C’est une capacitéobjective académique dont vous avez besoin pour être une bonne université. CommeSupérieur général de la Société deMarrie, je ne puis rien vous apporter dans ce champd’action. Je puis apprendre de vous, et je puis en reconnaître l‘excellence. Je reconnaisl’excellenceprofessionnellequel’universitéSainte-Mariefournitetjepuisenprofiter.C’estundeséléments.

Voiciunsecondélémenttoutaussi important.Peut-êtrea-t-ilmêmeuneffetplusprofondsurlesétudiantsdel’université.C’estlacroissancedanslesqualitésmoralesdelapersonneetdans le sensde leur vie. Celane vientpas seulementde l’excellenceacadémique.Celavientdelarelationquigénèrelavie,lesens,lebut.C’estunequalitédeviequidépenddespersonnesenrelation.

Vos propres documents annoncent ces deux dimensions aux étudiants qui entrent àl’universitéSainte-Marie.CettebrochureintituléGreatConnectionspubliéeparlebureaudel’admission présente ces deux éléments. C’est ce que vous promettez. Je vais en lire unepartie;c’esttrèsimpressionnant:

‘L’Université Sainte-Marie vous accueille les bras ouverts dans la ville colorée de San‘Antonio et offre une éducation qui changera votre vie. Nous sommes la seule université‘dans le sud-ouestquiassocie les valeursmarianistesetun sensde la familleàde solides‘programmesacadémiques.ÀSainte-Marienousenseignonsavechonnêteté.Nous‘mettonsunlienentrelesaffairesetl’éthique,entrelabiotechnologieetlasensibilité,‘entreledroit

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etlacompassion.Cesconnexionsquevousfaitesicisontdurables.Elles‘commencentavecvous.

La seule réserve que j’ai avec cette déclaration, c’est peut-être la dernière phrase: Ellescommencent avec vous. Je pense que ces combinaisons commencent avec vous qui êtesrassemblés ici aujourd’hui, pas avec les étudiants. Elles commencent avec vous, lesadministrateurs,lesprofesseursettoutlepersonnel.Siellesnecommencentpasavecvous,elles ne se rendront jamais jusqu’aux étudiants. C’est une déclaration puissante que vousfaites.Quandlesétudiantslisentcelaetlecroient–etc’estcedontlesétudiantsontbesoindans la culture d’aujourd’hui – ils vont très probablement s’inscrire à l’Université Sainte-Marie.

Vosdocumentsvontattirerlesétudiantsmaiscenesonteuxquivontlesfairepersévérerici.Cequi lesferapersévérer ici,c’ests’ilstrouventquecequiestpromisdans labrochureetestvécusurleCampus.Etquandilsviendront,unequestionimportanteàseposerestcelle-ci:Est-ce bien cela qu’ils trouvent ici ? Si c’est oui, alors vous avez une grandemission àaccomplir ici. Iln’yaucundoutedansmonespritàcesujet.Mais ilspeuventveniretêtredéçus parce que cette sorte de documents peut être seulement le fruit de techniciens.Toutefois,sicesdocumentsdécriventbienvotreréalité,vousavezquelquechosedegrandquis’accomplitàSainte-Marie.

Votreuniversité,commetouteautreinstitutiondoitcontinuellementanalysersiouiounonvousêtesfidèlesàvotremission.

Jevaispartageravecvousuneexpérienceque j’aivécue iciàSanAntoniovers1974dansunedemespremièresannéescommePrésidentduConseild’administrationdel’UniversitéSainte-Marie. L’université faisait alors affaire avec la Banque nationale Frost, ici à SanAntonio, et Monsieur Corky Sledge se trouvait le président de la banque. Il avait invitéquelques-unsdesmembresduConseilàdîneravecluiàlabanque,demêmequequelquesvice-présidents de la banque. Pendant le repas, un des fiduciaires me demanda: « PèreQuentin,sivousvoulezfairel’expériencedesavoircequec’estqued’êtretraitécommeunevraiepersonne,vousn’avezqu’àvenirdéambulerdanslaBanquenationaleFrostn’importequanddans la semaine». Je luiaidemandé:«Quevoulez-vousdire?» Ilmerépondit:«Bien…jeprometsquejustelefaitdemarcherdanslabanque,vousaurezlesentimentquevousavezététraitéavecunréelrespect».Etjeluiaidit:«Jen’aiaucuneaffaireàtraiterici.»Ilmedit:«Celanefaitaucunedifférence.Essayezseulement».Celaaprocurétouteunediscussionentrenousetaexcitémacuriosité.Jeluiaidit:«Qu’est-cequevousessayezdefairedansvotrebanque?»J’étaisimpressionnéparlefaitquetouslesvice-présidentsetleprésident semblaient tous parler de lamême chose. Ils dirent: « Nous essayons de fairedeuxchosesici.Quandlesgensentrent, ilsviennentparaffaire;alorsonessayedetraiterl’affaired’unemanièreprofessionnelle.Maisnousvoulonsaussileurlaissersavoirqu’ilssontimportantspournousentantqu’individusetnousvoulonsqu’ilssentent,quandilssortentd’ici, qu’ils sont de vraies personnes, des personnes dynamiques. » Quelqu’un a alors

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demandé:«Dequellemanièrevousyprenez-vouspourfaireuneentrevueaveclesgens?»MonsieurSledgerépondit:«Quandquelqu’unfaitunedemandepourunemploi,nousnefaisonspasd’aborduneentrevue.Nousdisonssimplementà lapersonnedepasserautantdetempsdanslabanquequ’ilenfautpourcomprendrel’espritquirègneici.Etquandellepenseavoirdécelécetesprit,ellevientmerencontrerouundesvice-présidentsetalorsonprocède à une entrevue. Nous lui disons d’observer n’importe qui dans la banque. Nousvoulonsbiendiren’importequi,aussibienlesconcierges,lescaissiers,lesvice-présidents,etqu’elle voit comment tout se déroule ici. Nous nous efforçons de faire un bon travailprofessionnelicimaisnousvoulonsaussiquetousceuxquiviennentànotrebanquesententqu’ons’occuped’eux.S’ilsn’ontpascomprisl’esprit,nousleurdisons:«Nouspensonsquecen’estpasvotreplaceici.»,maiss’ilscomprennentl’espritquinousanime,nousexploronsalorsleurpotentielpouraccomplirletravailprofessionnel.»

C’estunehistoireimpressionnante.Quelqu’undenotreConseild’administrationditalors:«Corky,viendriez-vousà l’universitéSainte-Marieparlerànotre facultéàcepropos?»Et ilrépondit:«Oui, jevoudraisbien,mais jetrouveunpeuétrangevotrequestionparcequec’estàl’universitéSainte-Mariequej’aiappriscela.»Jefusétonné!Ilavaitapprisànepasêtre seulement professionnel. Il est devenu une personne ayant acquis des valeursnécessaires à la culture de notre temps. La qualité morale d’une personne est trèsimportanteàSainte-Marieparcequelacompétenceprofessionnellenesuffitpasàrépondreauxbesoinsdespersonnesdanslasituationculturelled'aujourd'hui.

Quelles sont les caractéristiques de notre culture ? Voici quatre caractéristiques surlesquellesjem’arrêteraibrièvement.Voussavezquedansnotreculture,ilyaunecontraintetrès lourde concernant la valeur personnelle de l'individu, et c’est bon qu’il en soit ainsi.Mais cette contrainte est si forteque cequi est important, c'est de faire les chosesàmafaçon, de décider pour moi-même et ainsi de suite. La conséquence de cela c’est ledéveloppement d’un individualisme qui a un bon côtémais a aussi un côté obscur. Danscettesortedeculture,beaucoupdegensperdentdevuelaraisondesacrifierdesactivitéspersonnellesou leurspropres intérêtsaubiencommun.Celadonneà réfléchir.Même lesnouveauxdéveloppementsdansl’âgetechnologiqueposentprécisémentlamêmequestion..

Vousêtesfamiliers,j’ensuissûr,aveclelivredeRobertBellahTheGoodSociety.Onytrouvecettedéclarationparticulière:

‘Laproductivitédansunecompagniedehautetechnologiereposesurlaqualitédesa‘forcede travail, dans la compétence et la responsabilité des individus et aussi d’une ‘manièrecritique, dans la confiance qu’ils ont envers les autres pour faire avancer la ‘créativité etl’innovation.Cesentreprisesn'ontpasbesoindemains,c’est-à-direde‘travaildanslevieuxsens de la performancemanuelle et routinière. Et pas non plus ‘seulement des cerveauxmaisdespersonnes,despersonnesquiontconfiancedansles‘autresetquiontvraimentduplaisir à travailler ensemble. Une compagnie où les gens ‘travaillent bien ensemble vasouventmieuxperformerqu’unecompagnieaveclemême‘capitaletlemêmeéquipement

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physiquemaisoùlestravailleursnesontpas‘responsablesetoùnerègnepaslaconfianceentreeuxoubienquineveulentpas‘prendrederisques.

Dans nosmots, nous pourrions dire qu’il est important, non seulement d’être compétentmais aussi d’être vertueux, précisément parce que nous vivons dans une société trèsindividualiste.

Ladeuxièmecaractéristiquedelacultured’aujourd’hui,c’estquenoustravaillonsdansunesociété sécularisée dans le sens que nous sommes dans une société où les disciplinesindividuellesontmûriaupointd’avoirleurpropreautonomie.Celaproduitaussiunesociétéqui ne sent pas le besoin de Dieu. Elle n’exclut pas nécessairement Dieu. Dieu peut êtreinvitécommen’importequi.Maisnotreculturenesentpas lanécessitéde laprésencedeDieucommepointcentral.Celadoitêtretraitéd’unecertainefaçon,parcequelesétudiantsquiviennenticiontbesoindeDieudansdessituationsimportantes.

Troisièmement,noustravaillonsdansunesociétéouexisteunesurcharged’informations.Ilyauneabondanteinformationquichangerapidementetquivientencompétitionavectoutcequevouspourriezdirecommeéducateurs.L'expériencedesétudiantsàquivousavezàfaireetcellede leurscompagnonsd’étudevont les influencerplusquecequevousdites.C’estpourquoilaqualitémoraledevotrevieesttrèsimportante.

Finalement, nous sommes dans une société pluraliste – une société avec beaucoupd’occasions,beaucoupdenouvellespossibilitésqui s’ouvrentchaque jourdevantnous.Enfacedetoutescesoccasionsactuellesetdesnouvellesquiseprésententconstamment,lesjeunesadultessententsouventqu’ilsn’ontpasdebasepourdesengagementsàlongtermeoudeschoixàlongterme.Ilsontbesoind’êtretémoinsdetelsengagementsquelquepart.Oùlestrouveront-ils?S’ilslesdétectentchezvous,ilspeuventdéciderdelesintégrerdansleurproprevie.

Concrètement, jepenseque vous-mêmesavez à vivre ces grandes connectionsdontnousavons parlé, les grandes connections que vous avez promis d’offrir. Vous devez êtrevraimentunefamillequevoientlesétudiantsetdontilspeuventfairepartie

QuelestlerôledelaSociétédeMariedanstoutcela?Vousavezbienvuquej’enviendraisàcela tôt ou tard Je veux juste dire un mot à ce sujet parce que je suis ici en tant queSupérieurgénéraldelaSociétédeMarie.LerôledelaSociétédanstoutcelaestd’offrirunetraditionvivantequiestvraimentunebonnenouvellepourlepeuple,spécialementpourlesétudiantsdans lacultured’aujourd’hui.Cettetraditionestdestinéeàêtreuneprésenceetunecompétence,cequiestunbesoinpourtoutepersonneenvuedefournirunedirectionàsavie.

JevoudraisvousentretenirpendantjustequelquesminutescommeSupérieurgénéraldelaSociété deMarie, vous tous qui êtes partenaires dans cette entreprise qu’est l’UniversitéSainte-Marie. Comme je l’ai mentionné au début, dans le domaine de la compétence

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professionnellenousdépendonsdevousetnousapprenonsdevous.Nousnesentonspasque nous avons quelque chose de spécial à vous offrir dans ce domaine. Mais dans ledomainedelaformation,danscedomaineouvotreprésenceauneinfluencesurlesautres,c’esticiquenouspensonsavoirlaresponsabilitéd’offrirtroischoses.

D’abord, nous offrons ce que nous pourrions appeler une vision, une orientation quis’appuiesurunelonguetraditiondevaleursquidonnentunsensàlavie.C’estunetraditionincarnéedans la traditionmarianiste et qu’onpeut remarquer dans le style de vie de sesmembres. Une vision qui s’acquiert par le dialogue plus que par l’étude. Une vision quis’acquiert par vous-mêmes plutôt que par les travaux scolaires. Je crois aussi que latransmission de cette vision est tout à fait ce que veut développer le Forummarianiste.SelonmacompréhensiondecequevousfaitesdansleForummarianiste,jesuisemballéenvoyant les bonnes choses qui se passent ici. Le Forum est un lieu de dialogue et derecherche,mais c’est aussi unemanière de vivre cette vision. Si cela devient une force àl’université,ledialogueissuduForumdoitêtrediffuséàtoutelacommunautéuniversitaire.LeForumn‘estpasquelquechosequelesMarianistesfontpourvous,maisc’estplutôtunearèneoùvouscherchezensembleendialogueàclarifieretàincarnerlavision.

Deuxièmement,jepenseque,commeSociétédeMarie,nousavonsledevoirdevousoffrirce que nous appelons les communautés de foi, c’est-à-dire la possibilité de former desgroupesdanslesquelsvouscontinuezàcroîtredanslesqualitésmoralesoudanslesvertusqui font de vous des gens de bien. Nous utilisions le mot vertus dans notre traditionmarianiste,maisnousvoulonssimplementparlerdesdispositionsquifontdevousdesgensde bien et qui changent les autres personnes quand vous êtes en leur présence ou aveclesquellesvousfaitesaffaire.NousappelonscesgroupesCommunautésdefoiparcequelepartagequiressortdecescommunautésc’estcequenouscroyons.

C’estenvivantdanslaréalitédelafoiquegraduellementnousenvenonsàvivredesmêmesqualitésmoralesqueJésusChristavécuescommehomme.Danslapratique,qu’est-cequecela signifie ? Par exemple, si Jésus-Christ était unepersonnepleinede compassion, vousdésirezvivredelamêmemanièreetdevenirunepersonnepleinedecompassion.Et ici, jevous lanceauautredéfi. Je saisqu’il existede cesgroupes ici, et je saisqu’ils sontactifs.Multipliez-les. Aidez-les à croître. Faites en sorte que beaucoup de personnes s’engagentdanscettesortedepartagequilesaideàacquérircesqualitésmoralesdebasedansleurvie.

La troisième chose que la Société de Marie offre, c’est une Communauté de religieuxmarianistes qui essaient d’incarner et de faire avancer la tradition vivante comprise danscettevision,c’est-à-direlesvertus,etlabienveillancequiestexpriméeparleurvie.Quelquesoit le poste qu’ils occupent sur le Campus, ils portent cette responsabilité spéciale. IlspeuventêtreemployésaussibiendanslasalleducourrierquedanslebureauduPrésident.Ils sontappelésàvivrecette traditionvivante,desortequ'ils sontà ladispositionde tousceuxquisontencontactavec l'université.Jeréalisequ’ici je lanceundéfiàmesconfrèresd’entrerendialogueavecvouspourexpliquercettevision,pouraideràformerdesgroupes

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defoi,pourêtreprésentsavecvousdanslacroissancedanslesvertus,enétantvraimentlabonnenouvellepourquiquecesoitquientreàl’UniversitéSainte-Marie.

La Société de Marie cherche et fait des efforts avec vous, mais cela ne se fait pas àl'aveugletteousansespoir.Nouscroyonsànotretraditionetnousavonsconfianceenelle.Même si les cultures changent, même s’il existe toujours de nouveaux défis, même sidifférentes périodes ont tendance à surclasser et à masquer cette tradition un moment,notretraditioncontinue.Monimpressionestquevousêtesprésentementdansunepériodequimène à la revitalisation de cette tradition ici à l’Université Sainte-Marie. Et cela, c’estexcitant!Enfait,vousavezégalementdetrèsbellesdéclarationsdanscetteversionélargiedeGreatConnections. Jecroisqu'ellesaisitetprésentemagnifiquementetprécisémentcequevousêtesentraindefaire.Jecite:

‘À Sainte-Marie, vous pouvez être certains que toutes les personnes en charge de votre‘éducation, toutes les personnes – les professeurs, les administrateurs, les membres du‘personnel–mettentenpratiquecetespritdeserviceà lamodemarianiste.Celane ‘veutpas dire que chacun ici est unMarianiste oumêmeunCatholique,mais ‘simplement quechacun à Sainte-Marie comprend et met en pratique la manière ‘marianiste de faire leschoses.

LaGreatConnections parle aussi de lamission: «Lamissionmarianiste, tout simplement,c’est de former des communautés de foi qui travaillent comme une force puissante etunifiéepourlebien.»Quellebelledéfinition!«Àl’universitéSainte-Marie,vousressentezcette force chaque jour. » Très bien !Alors, si les gens lisent cela, viennent ici et en fontl’expérience,vousnepouvezpasleurrendreunplusgrandservice.

J’aimeraistermineravecunecitationdel’ouvragedeKahillGilbran:TheProphet,parcequeje crois qu’il dit très bien ce que vous êtes appelés à accomplir, et qu’en fait vousaccomplissez ici à l’Université Sainte-Marie. Ce qu’il dit c’est que la qualité morale del’administration, de la faculté et des membres du personnel donnent une nouvelledimensionàtoutletravailquevousfaites.Ilditceladelamanièresuivante:

‘Le travail est l’amour rendu visible. Et si vous ne pouvez travailler avec amour mais‘seulementavecdégoût,ilvautmieuxabandonnervotretravailetvousasseoiràla‘portedutempleetrecevoirl’aumônedeceuxquiœuvrentdanslajoie.Carsivous‘faiteslepainavecindifférence,vousfaitesunpainamerquin’apaisequ’àmoitiéla‘faimdel’homme.

Vousavezunemissiontrèsimportanteici,etvousavezlacapacitédelamettreenpratiquedans la culture d’aujourd’hui. Je pense que vous l’avez bien présentée dans GreatConnections.

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Chapitre18

Ledevoird’évangéliser

etlerôledelaFamilleMarianisted’aujourd’hui

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Jen’aipasbesoindevousdirequejesuistrèsheureuxd’êtreavecvousaujourd’hui.Jesuisravid’êtreavecvousparcequevousformezungroupecommunautaireavecquinousavonsun solide lien commun. Nous avons une tâche et une mission communes qui sontextrêmement importantes aujourd’hui. C’est peut être plus important maintenant quejamaisauparavant.C’estcesurquoij’aimeraisréfléchiravecvousaucoursdecetentretienquejevaisintituler:Ledevoird’évangéliseretlerôledelaFamilleMarianistedansl’Égliseaujourd’hui.

Nous sommes tousassezâgéspouravoir vécuunesériedechangementsmajeursdans lemonde et dans l’Église. Les changements provoquent de nouvelles perspectives.Aujourd’hui,nousnevoyonspas leschosesde lamêmefaçonqu’ilyatrenteouquaranteans.L’undeceschangementsest lefaitquenoussommesicicesoirànousparlerentantquepartenairesplutôtquecommeungroupequiaideraitunautregroupe.

Permettez-moidecommencerparunbrefrappel.Laplupartd’entrenoussesouviennentdutemps ou le plus fort mouvement d’Église s’appelait l’Action Catholique. La définition del’Action Catholique était: Le laïcat aide la hiérarchie à accomplir sa mission. C’était laperspectivedel’Églisedanslesannées1930à50.AveclavenueduconcileVaticanII,ilyadéjàeuunchangementdeperspective.DanslesdocumentsdeVaticanIIsetrouventdeuxdéclarationstrèssignifiantesquiontchangénotrefaçondetravaillerenÉglise.

Defaçonsurprenante,lepremierchangementdeperspectiveestqueleslaïcs,lesreligieuxetleclergésonttousappelésàlasainteté.Enfait,c’étaittoujoursvrai,maisonn’enparlaitpasde cette façon.Nousavionspresque l’idéeque lesprêtreset les religieux seraientoudevraientêtreplussaintsqueleslaïcs.CettefaçondepenserétaitunedistorsiondusensduCorpsmystiqueduChrist,parceque leChristnedistinguepas la saintetéparnotrestatutdansl’Église.LeconcileVaticanIIaproclaméquenoussommestouségalementappelésàlasainteté.Enfait,noussommestousappelésàunegrandesainteté.Noustous.

LadeuxièmedéclarationdeVaticanIIconcernelamissiondel’Église.MaintenantnousavonsàcomprendrequesinousformonsensembleleCorpsduChrist,ilnousfautreconnaîtrequenoussommestousresponsablesdel’Église,passeulementlahiérarchie,passeulementlesreligieux,pasjusteleslaïcs,maisnoustous.

DepuisVaticanIIilyaeubeaucoupplusdechangementsetdedéveloppementsquisesontproduits.J’aimeraisenpointerquelquesunspournousaideràvivrenotreappelunpeuplusen profondeur et plus effectivement. Je vais situer mes remarques dans la perspectived’évangélisationparcequecemotesttrèsutilisémaintenantdansl’Église.Jevaisessayerdevous montrer pourquoi l’Église perçoit l’évangélisation comme extrêmement importantedanslaculturedenotretemps.

Qu’est-ceque l’évangélisation?Mêmecetermeaeuuneévolutionaucoursdesquarantedernièresannées.Jusqu’àVaticanII,l’évangélisationsignifiaitordinairementlaproclamationdumessage de l’Évangile aux gens qui ne l’avaient jamais entendu. Quand nous parlions

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d’évangélisation,nousparlionsdesmissionnairesquiétaientenvoyésàdesendroitsoù leChrist n’avait pas été proclamé. Avec les changements radicaux et rapides qui se sontproduitsdansnosculturesaucoursdesdernièresdécades, l’Églisea commencéà réaliserque cette tâche d’annoncer et de faire connaître la Bonne Nouvelle aux gens était plusurgente qu’auparavant. La population mondiale explose. Alors, même si nous travaillonsaussi fortqu’auparavant, ilyadeplusenplusdegensquin’ont jamaisentenduparlerdeJésusChrist.

LepapePaulVIacommencéàélargirnotredéfinitiondel’évangélisationIll’aexprimédansunpuissantdocumentécriten1975: EvangeliiNuntiandi,L’évangélisationdanslemondemoderne:«Évangéliserestlagrâceetlavocationpropredel’Église,sonidentitéprofonde.Elleexistepourévangéliser,c’est-à-direpourprêcheretenseigner,êtrelecanaldudondelagrâce,réconcilierlespécheursavecDieu,perpétuerlesacrificeduChrist».(#14)

Évangéliserestbeaucoupplusqueseulementprésenter laBonneNouvelleauxgens.C’estenterdansuncanaldegrâce.C’estderendreréellelaréconciliationduChristetsaguérison.C’estactualiserlesacrificeduChristenlevivantetpasseulementenenfaisantlerappel.

LepapePaulVIaaussiélargilebutdel’évangélisation.Iladitqu’elledevaits’adressernonseulementauxindividus,maisaussiauxcultures.Unecultureestl’ensembledeshabitudessocialesquiportentlesvaleursetlamoralité.Quandnousgrandissonsdansuneculture,ceshabitudesetcesvaleursnoussontcommuniquées.Noussommesformésparcesvaleurs.Denosjours,nousvivonsdansdesculturesquinouscommuniquentdesvaleursquinesontpastoutes bonnes, et elles ne sont pas toujours conformes à celles que Jésus nous a laisséesdanslaBonneNouvelle.Enconséquence,nousavonsàfairequelquechosepourimprégnercesculturesdel’Évangile.

LepapeJean-PaulIIainsistésurl’urgencedel’évangélisationenespérantquelesrésultatschangeraientautant lesgensquelesstructuresdessociétés. Ilaconsidéré l’évangélisationcommeunmoyendeconstruireunesociéténouvellequiseraitplusjusteetplusfraternelle.Il aaussiparléde l’évangélisationcommed’unmoyendepromouvoir la justiceet lapaix.Lors de sa visite en Haïti en 1983, il a utilisé pour la première fois l’expression nouvelleévangélisationquenousappelonsaussitroisièmeévangélisation.

Comme conséquence de cette évolution, nous avons aujourd’hui trois sortesd’évangélisation. La première est la proclamation de l’Évangile à ceux qui ne l’ont jamaisentendu.Letermetechniqueadgentesestutilisépourdécrireceprocessusd’évangélisationauxpaïensquin’ontjamaisentenduparlerdel’Évangile.C’estpourcettetâchequ’onenvoiedes missionnaires. En janvier 1992, j’ai été surpris quand j’ai assisté à une rencontre dudépartementd’évangélisationduVatican.Onamentionnéque38%duterritoirecouvertparl’Égliseabesoindecegenred’évangélisationadgentes.Celaveutdireque38%duterritoiregéographique de l’Église est composé de gens qui n’ont pas encore entendu l’Évangile.J’étais stupéfait. Je pensais que cette réalité de missionnaires devant partir pour de

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nouveaux territoires était presque terminée. En fait, j’ai découvert qu’elle était encroissance.LaFamilleMarianistefaittrèspeudecettesorted’évangélisation.Enfait,àmaconnaissance,elles’estréaliséeàKoutoenCôted’Ivoire.

Ladeuxièmesorted’évangélisationest lesoinpastoraldespersonnesetdesendroitsdéjàorganisésoù lesfidèlessont impliquéesdansdesparoissesoudescommunautés.Unefoisque les gens ont entendu parler du Christ, ils ont besoin d’une présence pastorale etsacramentelle pour suivre le Christ et grandir dans la foi .En général, c’est à quois’impliquentlaplupartd’entrenous.

Et maintenant, il y a la nouvelle évangélisation, une troisième catégorie qui nous metréellement au défi. Si nous la prenons au sérieux, nous ferons tous nous-mêmes uneexpériencedeconversionenessayantd’aiderd’autrespersonnes.Qu’est-cequelanouvelleévangélisation?Cetteformed’évangélisationconsisteàproclamerlemessageévangéliqued’une façonnouvelleàdespersonnesqui l’ontdéjàentenduetqui s’en sont lasséoun’ycroient simplement plus. Ils ont perdu la signification de l’Évangile qu’ils ont entenduautrefois. Le pape Jean-Paul II affirme que nous savons tous que l’Europe, l’Amérique duNord et bien d’autres endroits ont désespérément besoin de ce troisième typed’évangélisation.

Ilyquelquesannéesj’aiassistéàuneretraitedeprêtesàRome.MèreTeresas’estadresséeauxprêtresprésents.Quandelleparle,elleditdeschosesquivontdroitànotrecœuretànotrevie.Ellenousadit:Ceuxd’entrevousquitravaillezaveclesriches,nelesabandonnezpas.Évangélisez-les.Nedevenezpascommeeux.Donnez-leurJésusChrist.Etelleaajoutéensuite quelque chose de surprenant: Si vous travaillez à l’évangélisation, vous avez untravail qui est beaucoup plus ingrat que notre travail. Les pauvres sont les gens les plusreconnaissants du monde, les riches ne le sont pas. Mais on a besoin de vous pourl’évangélisation.N’abandonnezpasvotreposte.Etnequittezpaslaprêtrise.

Ce troisièmegenred’évangélisationest unnouvel appel. Les gensontbesoind’ entendrel’Évangile de la façon que Jésus le présenterait aujourd’hui. Qu’est-ce que cela signifieactuellement ?Nous croyons que chaque fois que nous ouvrons la bouche pour partagerl’Évangile, nous participons à la prédication du Christ. Si nous sommes publiquementchrétiens et publiquement Marianistes, alors les gens s’attendent à ce que nousconnaissionslemessageduChrist.Ilspeuventinterpréterdanscetteperspectivetoutcequenousdisons.NousnevoulonspasêtredesMarianistescamouflésouuneFamilleMarianistecamouflée.Noussommesappelésaujourd’huiàproclamerl’Évangiled’unefaçonnouvelleetavecunzèlenouveau.

Alors,oùsesituelaFamilleMarianistedanstouscela?Auseindel’Église,noussommesungroupeorganisé.Nousavonsuneidentitépropreetnousavonsunemissionensemble.Nousne sommesplus un grand groupe,mais nous sommesun groupequi a reçu un charisme,c’est-à-direunegrâcepourvivred’unefaçontellequenoustransmettronsl’Évangile.Notre

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méthodeparticulièreestdetransmettrel’ÉvangileenprésencedeMarie.C’estl’essencedenotre charisme. La SociétédeMarie (en1992) comprend1750membres.Cen’estpasungroupeimportantdanslemondecommedansl’Église.LesFillesdemariesontenviron340.Etparmileslaïcsquicollaborentavecnous,ilyenaenviron8000quiontconsacréleurvieselon la voiemarianiste. Si nous comptons tous ceux qui sont rassemblés dans la FamilleMarianiste, cela fait environ 10 000 (dixmille) personnes engagées à vivre et à travaillerensemblepourévangéliser.Vouspouvezcomprendrepourquoiquelqu’uncommemoi,entantqueSupérieurgénéralpeutavoirunegrandeappréciationdeslaïcs.Sivousn’étiezpasiciavecnous,enfaitnousserionstrèsmodestes,etnotreinfluenceseraitbeaucoupmoinssignifiante.

En considérant l’ensembledenoseffectifs, demandons-nous:Quel estnotre rôle ?Notrerôle est de vivre aussi profondément que possible le charisme qui nous a été donné.D’abord le vivre, ensuite le partager aussi largement que possible. Présenter la BonneNouvelle du Christ et de Marie aujourd’hui d’une façon telle que leur présence puissechanger les vies. Nous en avons la conviction parce que plusieurs parmi nous ont faitl’expériencedelatransformationdeleurvieaprèsavoirrencontréleChristetMarieetlesavoirprisdansleurvie.

Ilyaquelquesannées,envisitantnotreécoleàBuenosAires,j’airencontréunefamillequiadit:«Nosenfantsontétéàcetteécolependant15ans.EtnousavonstoujoursétéprochesdesMarianistes.Maisilyaquatreans,toutenotrefamilleaététransforméeparcequenousavonsrencontréMarie».Etj’aidit:«Pouvez-vousm’endireunpeuplussurcesujet?»Ilsontrépondu:«Enfait,c’esttrèssimpleàdire.Nousavonsparticipéàunrassemblementetnousl’avonsapprécié.Onnousadit: Ilyaungroupedontvouspouvezfairepartie.Nousavonsdemandé:Quefaitcegroupe?Cegroupeserassembleetessaiedevivrel’Évangileplusenprofondeur.Pournousaidermutuellementàfairecela,nousformonsunefamillequiestcentréeautourdelaprésencedeMarie.»Lamèreajouta:«Noussommesentrésdansce groupeet nous avonsdécouvertMarie.Nous avions entenduparler deMarie pendanttoutenotrevie,maislà,nousavonsfaitsaconnaissanced’unefaçonnouvelle.Celaachangélaviedechaquemembredenotrefamille».C’étaitunmagnifiquetémoignage.C’estça latroisièmeévangélisation.

Est-ce que cela arrive à tout lemonde ? Je pense que ça dépend de leur rencontre avecMarie.Est-elleréelleoupas?Quelqu’undoitlesprésenteràMarie.Cen’estpascompliqué,mais leplus souvent, c’est cequenousdevons faire.Voicinotre rôle: travaillerensembleafin de pouvoir avoir un puissant impact sur les autres. Auparavant, nous les religieuxmarianistes,nousétionsnombreuxetnousavonsplusréellementpenséà faire leschosesparnous-mêmes.Siquelqu’unpouvaitnousaider,tantmieux!Maisleschosesontchangémaintenant.UnexempleestcettecollaborationcetteinterdépendancequiexisteàSantiagoau Chili dans une école que l’évêque avait demandé à Société de Marie de prendre encharge.Nousn’étionspascapablesdelefaireparcequenousavionsseulement30religieux

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auChili.Maisilyalàunmouvementlaïcd’environ600personnes,membresduMouvementMarianiste. Ils ont offert d’administrer l’école conjointement avec les Marianistes.Présentement,lemouvementlaïcaprisladirectiondel’école.Jecroisqu’ilyaunéducateurreligieuxquitravaillelààtempspartielainsiqu’uneoudeuxFillesdeMariequiaidentaussi.Unprêtremarianistecollaborepourlaliturgieetlessacrements.Lesautressontenmajoritédeslaïcsmarianistes.C’estvraimentuneécolemarianiste,maisavecunedifférence:Ici,cesontleslaïcsquiontlapremièreresponsabilité.

LaRégionmarianistede laColombieaouvertunemissionà l’intérieurdupays.LeConseilRégional l’a faitparcequ’ilpensaitpouvoircomptersur les laïcsmarianistespoursoutenircetteœuvreettravaillerensemble.Nouscommençonsmaintenantàallerdel’avantcommepartenaireségauxdansnotremissioncommune.

JepensequesivousjetezunregardsurnotreHSCentralCatholicousurl’UniversitéSainte-Marieousurtouteautredenosœuvres,vouspourrezdirequelacollaborationexistedéjàdepuisassezlongtemps.L’aspectimportantsurlequelnousavonsàréfléchirestquel’espritet l’énergie qui découlent de ce charisme doivent se poursuivre dans tous nos effortscommuns.Notre défi est de s’assurer que ceux qui viennent collaborer à notre travail neperdentpascetespritvivant.

QuelssontcertainsdecesmoyensquelaProvidencedivinenousadonnéspourconserverlecharisme marianiste dans nos œuvres ? Quels moyens avons-nous pour réaliser notremission?Toutendépendantde la foi sous le regarddeDieu, ils sontsimples. Lepremieroutilquenousavonsestlaformationdepetitsgroupes.Lespetitsgroupesoucommunautéssont nosmoyens spéciaux pour apporter la présence du Christ en la rendant réelle et enrendantleChristaccessibleàd’autrespersonnes.LeChristestautravaildansunevariétédegroupesmarianistes.

Pourquoicelaest-ilvrai?Pensezàladynamiqued’ungroupe,àcequiconstitueungroupeaupremierabord.Ungroupeouune communauté se formepardes relationsquiensuiteproduisentuneambiancefavorableàlavieafindepermettreàlafoidesedévelopper.Ungroupequiest seulementorientésur la tâchevaproduiredeschoses,mais ilnegénérerapasnécessairementcequifavoriselacroissancedanslafoi.Parexemple,vousneproduisezpasl’amour.Vouslesuscitez.Vousneproduisezpaslacompassion,vouslasuscitez.Vousneproduisezpaslamiséricordeetlepardon,vouslesgénérez.

Maintenant, appliquons ce conceptà l’évangélisation.Nepensezpasà l’évangélisationentermesdeproduction.VotrebutestdegénérerlavieduChristchezlesautres.Unexemplede lamentalité de production serait de dire: Nous avons à évangéliser, alors nous allonsvousengageretvousaurezàprêcherà200personnes.Etnousvoulonsqu’aumoins15%sejoignent à l’Église. Par contre, quand vous formez les personnes en communauté pourqu’ellespuissent faire l’expériencede l’amourduChristdans leurs relations, c’est ça c’estl’évangélisation.C’estcelaquigénèrelavie.Qu’afaitleChristquandilestvenu?Ilaformé

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une communauté. Son Église est réellement une communauté, une famille. Elle est sonCorps.

Ainsinotrebutestdeformerdescommunautésmarianistespargroupespartoutoùnouslepouvons.Nousgénéronsl’amourduChristparcesmoyensparcequelemondeabesoindeson amour. Vous seriez surpris de savoir combien de gens cherchent désespérément àappartenir à une communauté afin de faire l’expérience d’un peu de compassion etd’amour. Former les autres par notre charisme marianiste à travers des groupes ou descommunautéspeutêtrenotrepremiermoyend’évangéliser.

La première chose dans tout groupe marianiste est la reconnaissance de la présence deJésus.Sivousformezungroupeetquel’expériencedominantedecegroupeestlaprésenceduChrist,votregroupeseradifférent. Jevous lepromets.Celava faireunedifférenceau-delàdugroupe lui-même.Vousne serezpas capablesd’empêcher leChristde travailleràtraversvotregroupeparcequeleChristirradieetgénèrelavie.Sil’expérienceduChristestréelle,toutepersonnequiseraencontactaveclegroupeseratouchéeparelle.

Partoutdanslemondedesjeunescherchentdesendroitsoùilspourraientfairel’expériencedeDieu.Unjourj’étaisàl’aéroportdeCopenhague,J’étaisassislàavecmoncolromainenattendant le prochain vol. Comme vous le savez les pays scandinaves se sont pasparticulièrement catholiques. Il y avait une jeune universitaire d’environ 22 ans qui étaitassiselàaussi.Ellen’arrêtaitpasdemeregarderetfinalementellem’adit:«Jesupposequevous êtes une sorte d’ecclésiastique». J’ai répondu «oui, en effet». Elle a dit: «Croyez-vousréellementencequevousfaites»?J’aidit«oui,j’ycrois».Elleajouta:«Pourquoi»?Etj’aidit:«parcequecelachangemavie».Elleadit:«voussavez,j’airéellementcherché.Jecherchedésespérémentetj’aitoutessayé:lesdroguesettoutlereste.Etjen’arrivepasàtrouverunsensàlavie.Jesuisblasée.Ilyaunvidedansmavie.Jepensesouventàmettrefinàtoutçaparcequemevien’apasdebut.Commentpouvez-vousmeprouverquecequevous croyezest réel»? J’ai répondu:«Jenepeuxpasvous leprouver,mais jepeuxvousfairedécouvrirleChristsivousvoulezcroireenlui».Ellearépondu:«Ouais,maissicen’estpas vrai»? J’ai dit: «Et si c’était vrai ?» Elle ajouta : «Bon… je suppose que vous allezcontinuervotrecheminetmoij’iraidemoncôté.Jenesuispascertainequejeveuxcroire».Alors,j’aidit:«tuparsdetoncôtéetmoidumien.Jesuisvraimentdésolédevoirquetupartes toute triste alors que moi je ne le suis pas». C’est peut-être là la différence.Maintenant,cettejeunepersonnecherchequelquechose,maisellen’apasd’endroitoùletrouver.J’auraisespéréluidire:«Écoute.Veux-turéellementtrouverunsensàtavie?Vaàtelleadresse.Ungroupedejeunesserencontrelàchaquesemaineetilsprient.C’esttout.Ilsprient.»Notrejeunesseabesoindequelquechosecommecela.Elleabesoind’endroitspourfairel’expérienceduChrist.Elleabesoind’êtremiseencontactavecunecommunautéquigénèrelaprésenceduChristetsapromessedevie.

IlyaquelquescommunautésàRomequiattirentlajeunesseparmilliers.Etquefont-ils?Ilsprient.Taizéadesrencontresmondialespourlaprière.Quefont-ils?Ilsinvitentlesjeunesà

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prier. Leur rencontre s’est tenue à Rome il y a quelques années. Ils étaient 20 000 (vingtmille)jeunesàpriersixheuresparjour.Ilsétaientpartoutenville.Ilscirculaientenautobusen priant. Ils sont venus à Rome pour une semaine parce qu’ils cherchaient à fairel’expérienceduChrist.Ilsréalisentcelaàtraversleurscommunautésetleursgroupes.

Maintenant, revenons à notre troisième façon d’évangéliser. Nous les Marianistes, nousavonsunespiritualitébaséesurnotresystèmedesvertus.Dansnotretraditionmarianiste,lepèreChaminadenousadonnéunprocessuspourgrandirdanslesvertusetlesdispositionsdeJésus.Pourquoi?Quefont-ellespournous?Vivrecesvertusfaçonnenotrevieintérieureetnousrendmeilleurs.Lesvertusfontdenousdesgensquinonseulementexpérimententet vivent la présence du Christ et de sonmessage,mais vivent d’une telle façon que lesautres peuvent toucher cette présence, en faire l’expérience et être transformés. Lescommunautés marianistes et leurs groupes sont forts et effectifs dans la mesure où lesvertusduChristlesfaçonnent.

Nous avons besoin de croître par la pratique des vertus et d’aider les autres à fairel’expérience duChrist dans ses vertus. Si vous ne pouvez pas faire autre chose, donnez àquelqu’ununlivresurlesvertus.C’estuneformed’évangélisationparcequec’estuneautreoccasionpourl’EspritSaintd’agirsurlespersonnes.C’estétonnantdevoircequiprovoquedes changements dans notre vie. Vous pouvez aussi simplement noter vos propresexpériencespourdirecommentvousaveztrouvéleChristetMarieetensuitepartageraveclesautres.

Quelsseraientd’autresmoyensquenouspouvonsutiliserpourévangéliser?Nousavonslaliturgie.Nousavonsbeaucoupdepossibilitéspourprieretpartagerdans lafoi. Invitezdespersonnes. Si c’est leurdésir, elles viendront. Il y abeaucoupdepersonnesqui attendentuneinvitationdecegenre.VouspouvezlesinviteràvivreuneexpériencequileurpermettraderencontrerDieu.

Je crois qu’unappel spécial deDieuaujourd’hui est de formerunpartenariat étroit entrenous comme Marianistes, laïcs et religieux. Nous avons à être des partenaires égauxaujourd’huiparcequec’estunbesoindans l’Égliseetc’estunbesoinpournous tous.NosChapitregénérauxde1986et1991sesontexpriméstrèsspécifiquementsurcesujet.Mais,c’est en 1991 que la Société de Marie a dit de façon officielle que nous avons à êtrepartenaires avec les laïcs marianistes, et ne pas simplement considérer notre relationcommecelleentreemployésetemployeurs.Nousl’avonsexprimédansnotredocumentduChapitre:Missionetculture:Nosrelationsavecleslaïcsmarianistesconstituentunélémentfondamental de notre identité et de notre mission: ce n’est pas seulement une activitéapostolique parmi d’autres, c’est une disposition qui doit caractériser toutes nos activitésapostoliques.(#5)

Ici, jemets réellement au défi nos frères et nos prêtres parce que c’est un document denotreChapitre:Comme lesmembres laïcsde laFamilleMarianistesonthabituellementen

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contactplusdirectavec les réalitésdumondeetdesdiversesculturesdans lesquellesnoustravaillons,ilsreprésententunegrâcespécialedanslacultured’aujourd’hui.Leurfoietleurexpériencenousaidentàanalyseretàcomprendrecettecultureet,aveceux,noussommesdavantagecapablesd’évangéliser.(#5)

Ainsi, ce n’est pas seulement dans les communautés et les groupes,mais aussi dans nosœuvresquenoussommesappelésàréalisercepartenariat.Ici,notremodèleestenquelquesorte commenotre relation àDieu. Le père Chaminade dit: «Notre salut est l’œuvre deDieu et la nôtre ». Ce n’est pas un partenariat égal parce que selon le père Chaminade,chaquepartiedoitdonner100%.C’estlafaçond’évangéliserlemonde.

Enconclusion,jeveuxdirequejesuisconvaincu,etjecroisquevousl’êtesaussi,queJésusChristveutsauverchaquepersonneaujourd’hui.Ilveutêtreprésentàchacuneetdésireêtreconnuparelle.Etilveutdéversersurtoutessagrâcespéciale.Dieuappellediversgroupesetcommunautéspuisqu’ilveutêtreprésentetactifparmisonpeuple.LaFamilleMarianisteestl’une de ces communautés dans l’Église. Nous avons unemagnifique vocation et un défistimulant. Je priepourqueMarienotremèrenous inspire et nous guidepour réaliser degrandes choses ensemble en son nom, et ainsi accomplir sa mission dans le monded’aujourd’hui.

CHAPITRE19

LaSpiritualitéMarianisteC’est vraiment un grand plaisir d’être capable de parler à des gens pour lesquels je n’aibesoin d’aucune introduction. Cela me donne un sentiment d’appartenance. Je suiségalementvraimentencouragéetravid’avoirétéapprochépourparleravecvouscetaprès-mididelaSpiritualitéMarianiste.Iln’yapasbeaucoupdegroupesquidemandentcesujetparticulier.Toutefois,c’estquelquechosequiestvraimentspécialpournousetpourcetteuniversitéàcemoment-ci.

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CommejemepréparaispourcetteprésentationsurlaSpiritualitéMarianiste,quelqu’unm’adonnéunecoupuredepressedumagazineTheFuturistquiparlaitprécisémentdechosesausujet desquelles je désiraism’entretenir pendant cette présentation. The Futuristcouvrel’économieetlesaffaireset,bienqu’ilseconcentresurlesaffairesetl’économie,cetarticlese référait également à une sorte de spiritualité. Je voudrais commencer avec quelquescitations tirées de cet article parce qu’elles ont un lien direct avec ce dont nous voulonsparler.Celatraitedelaréalitédutravailàl’intérieurdelacultureetdumondeprésents.Lesous-titredecetarticleest:L’intégritéestrentable.(IntegrityPaysOff.).

Àlafindesannées1980,Qualitéétaitlemotclé.Celasignifiaitledegrédeperfectiondesbiens qu’une compagnie pouvait fournir à ses consommateurs. Toutefois la qualitécommenceraàêtre remplacéeousupplantéeparunautre facteur,quelquechosedeplusélémentairequelaqualitéetde laquelle laqualitédériveetceciest l’intégrité. L’intégritén’est pas une mesure de performance économique ou quantitative, mais une façon detraiterlesaffairesens’appuyantsurdesvaleursdebaseetuneattitudecorrespondante.

Ensuite l’auteuradmetqu’il yaura toujoursdesgensquiabandonneront l’éthiquedans lebutdefairedesprofitsrapides.Etpuisildit:

‘Si nous voulons savoir quelles compagnies survivront pendant les 25 prochaines ‘années,alorsnous regardons lescompagniesqui considèrent lesbesoinsde leurs ‘employés, leursclients,lasociétéengénéral;descompagniesquiincarnentl’intérêtet‘l’affection,leserviceet lesoin, l’honneuret lajustice. L’intégritépeutcoûtercherpour‘unecourtepériodedetemps,maisellerapportebeaucoupàlongterme.

J’ai trouvé intéressantque -plaçantcette idéedans levocabulairemarianiste–pour fairefonctionner une affaire qui durera et dont les consommateurs seront fidèles, vous devezégalementpratiquer certaines vertus, vivrequelque spiritualité. Jene croispasquenousparlonsde survie,mais je croisquenousparlonsdebonnequalitédans le servicequi estrendu.Etainsi,sinousappliquonscetteidéegénéraleàl’UniversitéSainteMarie,cen’estpasseulementl’excellencedevotreproduitacadémiquequiestimportantmaislesvaleurs,attitudeset labontémoraledevous-mêmesen rendant ce service. Après tout,qu’est-cequelaspiritualité?

Madéfinition est simple: la spiritualité est une approche particulière ou un ensemble deprincipes et de valeurs qui nous guident alors que nous vivons au-delà des dimensionsphysiquesetmatériellesdenosvies.Laspiritualitéestladirection,l’approche,lesméthodesquinousaidentànouséleverau-delàdecequenoussommes. Etcequ’il yaau-delàdenous,cenesontpasseulementd’autrespersonnes;au-delàdenoussetrouvel’expériencede Dieu. La psychologie traite de la personne entière.Mais elle traite seulement avec lapersonneet lesrelationsqu’elleétablitavecd’autrespersonnes.Laspiritualitétraitede lapersonneentièredanslaprésencedeDieu,enrelationavecDieu.

Qu’est-ceque la SpiritualitéMarianiste ? C’est l’approcheparticulière de vivre notre vieavec Dieu, une approche que le père Chaminade a laissée à ses partisans, disciples,collaborateurs, et qui est incorporée dans ses institutions. Ces institutions, commel’UniversitéSainte-MariesontvraimentMarianistesquandlaspiritualité,qu’ilnousalaissée,estvécueparlesgensquifontcetteinstitution.IlestimportantdesavoirquelquechoseausujetdelaSpiritualitéMarianiste.

Celaestimpossibledetraiterdetoutelaspiritualitéenuneheure,ainsidoncj’aichoisitroisélémentsdelaSpiritualitéMarianistepournotreréflexion.Vousdevezgarderàl’espritque

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ce n’est pas une image complète, mais cela vous donnera trois éléments de base pourréfléchir,etilssonttousintégréslesunsauxautres.

Lepremierélémentenestunquiestcommunàtoutespiritualitéettoutereligionparcequec’estunélémentdefoi.Notrespiritualitéestunespiritualitéquiestbaséesurquelquechoseque nous croyonsmais ne pouvons pas prouver. C’est basé sur une conviction à laquellenous adhérons profondément et vivons par elle mais que nous ne pouvons pasrationnellementdémontrer.Lafoiestimportanteparcequ’elleperçoitdeschosesqueceuxqui n’ont pas la foi ne voient pas. La foi rend réelles des choses que les incroyantsn’expérimententpas.PensezuninstantàcequecelasignifiedecroireenJésusChrist,pasentantqu’uneidéemaisentantqu’unepersonne,uneprésence.SinouscroyonsauChristetvivonsenaccordavecnotrecroyance,nouspouvonsexpérimenterJésusChristdansnosmanièreshumaineslimitéesetaussidanslesfaçonsaveclesquellesl’EspritSaintpeutnousgratifier.Quelqu’unquinecroitpasnevitpascetteréalitéparceque,pourluiouelle,celan’existepasdanssonexpérience.Lafoinenousrendpasétroitd’esprit.Lafoinousouvreàquelquechosequiestbeaucoupplusquecequenousétionsquandnousnevivionspasparlafoi.C’estbienau-delàdecequenoussommesnous-mêmes.Lafoinenousconduitpasàrenieraucunedesautresréalitésquenousconnaissonsouvivons.Lafoidonneàcesautresréalitésunenouvelledimension.

Parexemple,unecroyanceélémentairede laSpiritualitéMarianisteestqueDieuestavecnous,queJésusestaumilieudenouspourchangernotrevie,pournousremplirdebonté,mêmepour faire desmiracles de grâce parmi nous.Nous croyons cela.Nous ne pouvonsreconnaître laprésencedeJésussans la foi.Etnousnepouvonspasexpérimenter JésusàmoinsdecroireenLui.

Jemesouviensd’unescènedufilmdeZefirelliJésusdeNazareth.Aprèslarésurrection,lefilmdécritlesapôtresayant,àpartirdecemoment,àcroireouànepascroirequeleChristétait vivantdenouveauaprès sa crucifixionet samort. Cen’étaitpas commesi leChristimposaitsaprésencesureuxaprèslarésurrection.Ilyaunescèneoùlesapôtresdiscutentsi la résurrectionpouvait vraimentexister. Thomasétait là faisant valoir sonopinion trèsfermement.Lacaméraseposesurlesapôtres,l’unaprèsl’autre,pourfinalements’arrêtersurPierre.LesautresregardenttousPierre,etdemandent:«Crois-tuvraimentquecelaestpossible?» Pierre dit:«Oui!» Et ils disent: «Mais comment ?» Et Pierre dit: «Parcequ’ILl’adit.»Cen’estpasunepreuve.C’estuneconviction.

Noustenonsfermement,dansnotreSpiritualitéMarianiste,àlacroyancequeDieuestavecnous,quel’EspritSaintestparminous,quel’EspritSaintestsurcecampus.Jemesouviensd’uneréunionquenousavonseueiciautrefois,aucoursdelaquellequelqu’unademandé:«Qu’est-cequiferaitdecetteréunion,uneréunionvraimentchrétienne?»Etj’aidit:«Jepense que c’est en reconnaissant le fait que le Christ est réellement ici. Et si nousreconnaissons le Christ et vivons en sa présence, cela changerait vraiment beaucoup ladynamiquedecetteréunion.»Plustard,undesmembresadit:«Voussavez,nousavonsvécudanscetteprésencetoutletemps,maisjen’yavaisjamaispensé.»Etj’aidit:«Vousn’yavezpasréellementcru.»Lesgenspeuventprotester:«Non!Nousyavonscru!»Bien,vousyavezcrucommeàungénérateurposédansuncoinquine fonctionnepas.Par lui-même ilneproduitpasd’électricité. Il doit fonctionnerpourproduirede l’énergie. La foic’estcommecela. Nouspouvonsavoir ledon,nouspouvonsavoir lagrâce,nouspouvonsavoirl’appeletl’opportunité,maisc’estactifseulementsil’ons’ensert,quandtoutcelaestenaction.

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La foiestélémentairepournous. Il yabeaucoupd’enseignementsdans lesÉvangilesquiinterpellent notre foi. Réfléchissez aux premiers enseignements de Jésus, comme Sonenseignementsur laprière.Vous l’avezentenduplusieursfois,maisc’estrenversant.Dansl’ÉvangiledeMathieu,7,7nouslisonsqueJésusnousadit:«Demandezetvousrecevrez.»Non, cen’estpasunedéclarationbanale« Cherchez, et vous trouverez. Frappez, et l’onvousouvrira.» Dans l’Évangile de saintMarc, nous lisons: «C’est pourquoi je vousdis:Tout ce que vous demanderez en priant, croyez que vous l’avez reçu, et vous le verrezs’accomplir.» (Marc 11:24). Ce n’est pas une blague de croire que vous avez déjà reçuvotreréponse.Quandvouspriez,croyezqueDieutravailledéjààrépondreàvotreprièreetvous verrez les résultats. Un exemple que Jésus nous donne semble ridicule,mais Il estsérieux.Jésusdit:«Donc,sivousditesàcettemontagne:Ôte-toidelàetjette-toidanslamer,etsivousnedoutezpointdansvotrecœur,celas’accomplira(Marc11:23).SaintJeanaplusieursdéclarationstoutaussirenversantesfaitesparJésus.Nouslisonsdansl’Évangilede saint Jean que Jésus dit à Ses disciples à un moment donné, «Tout ce que vousdemanderez enmonnom, Je le ferai (Jean14,13). Jésus leur rappelle: «Jusqu’àprésentvousn’avezriendemandéenmonnom.Demandez,etvousrecevrez»(Jean16,24).

Actuellement,surcecampus,vousavezdenombreusesréunionsetvousrésolvezbeaucoupdeproblèmes.Jeneveuxpasquevouscroyezquevouspouvezrésoudrelesproblèmesparlaprièreseulementsanstravailassidu.ToutefoisjediraisquesivouscroyezcequeJésusaditausujetdelaprière,vousrésoudrezcertainsproblèmesparlaprièreseulement.Peut-être que la prière changera votre ouverture à voir les solutions, ou elle développera unenouvelleénergieenvouspourréagiraveclaréalité.Vousnepourrezjamaisprouverquelaprièrearéglévotreproblème.Vousserezcapablederessentirlefaitquelaprièreaaidéladynamique. Il est possible également que vous ressentissiez que la prière a réellementrésoluleproblème.Sivouscommencezàpartagervosexpériencesàcesujet,voustrouverezprobablementdesexemplesdansvotreproprevie.

Quandj’étaisprésidentduConseildeGestiondecetteuniversité,nousavonsfaitfaceàunproblèmeinsoluble.Leschosessemblaientsidésespéréesqu’unjourjemesuisagenouilléetj’aidit:«Seigneur,jenebougeplusd’icitantquejen’aipasunaperçudelasolution».C’était vraimentdudésespoir, etoùpouvais-jealler? LeConseil avait considéréplusieurslignes de conduite, mais nous n’avions toujours pas de solution. J’ai donc décidé dem’agenouiller en prière jusqu’à ce que quelque chose arrive. Cette pensée effleura monesprit:«Jevaisdevoirpasserlanuitici.»J’étaislàdepuisunpeuplusd’uneheurequandune idée germa dans mon esprit. Ce n’était pas une idée si brillante à première vue.Toutefoiscette idée fit soncheminenmoi,età la finnousavons trouvéunesolution. Jecroisquelaprièreafaitcela.Lepointestquenousdevonsnousentraideràpratiquerunetellefoi.UnepartiedenotreSpiritualitéMarianisteestdecroireetpratiquercequeJésusnousaenseigné.

Ilyaunautreélémentausujetduqueljevoudraisparler,quelquechosequenousappelonsVertus.C’estuntermequenotreFondateur,lepèreChaminade,autilisé.Pourlui,lesvertussignifiaient ces dispositions qui nous rendent bons, qui nous façonnent pour devenir debonnespersonnes.Qu’est-cequinousrendbons?C’estdecelaquenousparlonsici.Dansnotre spiritualiténousproposonsuncertainnombrededispositionsélémentairesqui fontque les gens sont capables d’être bons, de diriger, d’enseigner et rendre service àl’université.Nousneparlonspasdedispositionsdontvouspourriezavoirbesoinpourvous-mêmes seulement en-dehors du travail. Nous parlons au sujet de choses dont vous avez

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besoinpendantquevous faitesdecetteuniversitécequ’elleest. Celanous ramène auxprémisses avec lesquelles nous avons commencé. C’est l’intégrité qui est nécessaire. Cesvertustransformentlesgensenpersonnesquitransmettentdesvaleursquivontau-delàdel’excellence académique, qui donnent à l’excellence académique une nouvelle valeur.Normalement,sivousavezdebonnespersonnesquipossèdentdeshabiletés,vouspouvezdéveloppercesmêmespersonnesenbonsprofessionnels.VivredecesvertusdeJésusfaitréellementunedifférencedansnosvies.

Parceque lacertitudeque leChristvitennousestplusqueseulementunedoctrinepournous,nousregardons leChristetdisons:«Lesdispositionsquenousdésironsviennentdel’expériencequenousvivonsdecequeleChristauraitressentisiIldirigeaitcetteuniversitéou s’Il enseignait ici.» Et si nous allons un peu plus loin, nous disons: «Qui est le réelenseignantdanscetteuniversité?»Sil’influenceduChristestici,oùest-Il?SiSaprésenceest ressentie, elle vient à travers vous. Vous tous avez besoin de ses dispositions pourremplirvotremission.

Nousavonscequenousappelonslesvertusélémentaires,debase,ouVertusPréparatoires.Ellesnouspréparentàressentir laviedeDieupleinement. Parexemple,nousappelons lapremièrevertuleSilencedesParoles.Nousledéfinissonsd’unemanièredescriptive.Nousne voulons pas dire de rester muets. Nous voulons dire que lorsque nous parlons, nousparlonsaveclesdispositionsduChrist.Nousvoulonsparleravecl’intérêtqueleChristauraitenparlantauxétudiants,àlafaculté,auxparents,etautrespersonnesenrelationaveccetteuniversité.Nosparolesonttoujoursuncertaineffetetpeuventavoiruneinfluencepositiveounégative.Mêmequandnousneparlonspas,notremessagepassésoussilencepeutavoiruneinfluence.Parexemple,quandnoussommesencolèrecontrequelqu’un,quelquesfoisnousnecommuniquonsplusautant,maintenantainsiunedistance.LeSilencedesParolesimplique que nous écoutons réellement les autres et nous-mêmes, et choisissons nosparolessoigneusement.Nousparlonsquandc’estappropriédelefaireetrestonssilencieuxquand nos paroles pourraient être destructives. Voilà une discipline qui peut amenerbeaucoup de changements dans la communauté universitaire.Notre communication non-verbaleporteaussi desmessagesà travers le langage corporel etnos gestes. Cequi estessentielpournousestd’êtreconscientdenotrecommunicationnon-verbaleetd’essayerdel’utiliseraveclesdispositionsdeJésus.

Quelques-uns d’entre vous utilisent le livret,À SaRessemblance (InHis Likeness), que j’aiécrit il yaquelquesannées.Ce livretestuneprésentationdesvertus,desdispositionsdeJésus,etdelafaçondelesacquériràtraverscertainespratiquesquenotreFondateurnousalaissées.Saconvictionétaitquesinous travaillionscontinuellementàacquérirpleinementcesvertus,nouscontinuerionsàgrandirenbonté,devenantdeplusenpluscommeleChrist.Celaamèneraitunebontépratiquequiferaittouteunedifférencedansnotretravailetdansl’atmosphèrequenouscréerionsainsi.

J’ai dit plus tôt que, si vous avez une université marianiste, vous devriez rencontrer cesvertus quelque part. Plus ces vertus sont visibles et si plus de personnes les vivent celarendra l’universitédavantagemarianiste. Hier, j’ai rencontréquelqu’unsur le campusquiestenquelque sortenouveau ici. Ilm’adit:«J’ai fréquentéd’autres campusauparavant.Quand je suis arrivé sur ce campus-ci, j’ai immédiatement remarquéqu’il y avait quelquechosededifférenticietj’aiaimécela.Toutefois,jenepouvaispasréellementdéfinircequec’était. Maintenant j’entends lesmots«espritde famille»,et je sais cequecela signifie,parce que je l’ai expérimenté. Je peux identifier cela immédiatement.» Eh bien, cette

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attitudecontribueenpartieàfairedecetendroituncampusmarianiste.VivrelesvertusdeJésusestquelquechosequenousvoulonsencourageret cultiverparcequecelaaurauneinfluencesurquiconquevientici.

Enadoptantcesvertus,voustravaillezàdevenirsaints,cequiestessentielàlamissionquevousessayezderemplir. Quandvoustravaillezàcesvertus,vousvousrefaçonnezàpartirde l’intérieur. Le frère John Tottenm’a enseigné il y a longtemps que si vous aidiez unepersonneàdevenirmeilleure,cettepersonneferadenombreusesbonnesactions. Sivousessayezdechangerseulementlafaçond’agiretnonlapersonneelle-mêmeceladeviendratrès difficile. C’est comme essayer de façonner un ballon en tirant dessus de l’extérieur.Vouspouvezfairecela,maisc’estbienplusfaciledesoufflerl’airàl’intérieuretlaisserleballon prendre sa propre forme. Quand nous façonnons les gens de l’intérieur à traversl’expériencede la viedans ces vertus, ils commencent à acquérir ces vertusduChrist, dudedans.

Laformequenousvoulons,oulamodalitéquenousvoulons,estdevivredetellemanièreque nous ressentirons ce que le Christ aurait ressenti à notre place. La Discipline ou leSilencedesParoles,voilàunevertu;ilyena17autres.Mêmesicelaprendtouteuneviepour les obtenir, c’est bon. Vous voulez une croissance constante, et puisque vous avezaffaireavecunDieuinfini,vousn’avezpasàvoussoucierdenejamaisatteindreleslimitesdelabontédeDieu.

Vous trouverez une autre présentation populaire de ces vertus dansLe Grain de Blé.Toutefois,ÀSaRessemblance-InHis Likeness- est plusprèsde laprésentationdenotreFondateur de ces vertus. Chaque livre est divisé en trois parties. Les vertus élémentairessont données dans la première section. Elles sont appelées Vertus de préparation. C’estainsi que notre Fondateur les appelait, parce qu’il disait qu’elles nous préparaientréellementàdevenircequenousétionsappelésàêtreentantquemissionnairesdansnotreculture. Nous pouvons aussi les appeler vertus de fondation. Il y en a plusieurs et ellestraitent des attitudes primaires qui nous permettent d’être vraiment à l’écoute et decommuniquer la vérité de ce que nous sommes. Ces vertus nous appellent à travaillerensembleavecd’autrespourétablirlebiencommunetvaincrelesdifficultésd’unemanièresignificative et ne pas abandonner à cause des difficultés. Ces attitudes fondamentalesformentunefondationsolidepouruneviedebontéetdeservice.

La seconde partie est une section appelée Vertus de Purification. Dans toutes lesspiritualités classiques, il y a une expérience de purification. Cela signifie que toutes leschosesauxquellesvoustenez,attitudes,habitudes,façonsdepenseretderéagir,etc.,quivous limitentouvousentravent, sontpurifiées,enlevées,pourque legrandpouvoirde lagrâceenvouspuissesedévelopperetfonctionner.

Les expériences de la purification sont très concrètes. Elles vous sont imposées ouproviennentdevotreproprenature.Vousnelescherchezpas.Vousdevezsimplementleurêtreouverts.Quandellesseprésententàvous,ellesvousconduisentdeplusenplusàvouslaisserguiderparlavéritédel’Évangileetparl’actiondel’EspritSaint.

Unedespremièresexpériencesdepurificationestd’accepter sespropres limites. Si vousn’avez jamaisexpérimenté les limitationsou faiblessesenvous-même,necommencezpasparcettesectionmaintenantparcequecelan’aurapasdesens.Toutefoisjecroisquenoussommes tous conscients de nos limites. Comment procédons-nous pour aller au-delà decelles-ci?Nousretournonsauxbasesdenotrefaçondepratiquernotrefoi. Nousdevons

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croirequ’ilyaquelquechoseau-delàdenospropreslimitesdanscequenouscroyons.C’estcomme saintPierrequimarchait sur les eaux. Pourmarcher sur les eauxquand Jésus l’aappelé, il devait croire qu’il y avait un pouvoir qui fonctionnerait au delà de ses limitesquand il est sorti du bateau.Ma tentation serait demettrema chaussure en premier surl’eaupourvoir,etsielleflotte,jepourraisentrerdanslelac.Pierreamarchésurl’eauaussilongtempsqu’ilaeuconfiancedanslepouvoirdeJésusplusquedanssesproprespouvoirslimités.

Lapremière foisque l’onm’ademandédeprêcherune retraiteauxFrèresMarianistesenespagnol,c’étaitmedemanderd’allerau-delàdemeslimites.Jepouvaislefaireseulementsijecroyaisquelagrâcetravailleraitau-delàdemeslimites.Àlafindemapremièreretraiteen espagnol, un des frères m’a dit: «Je veux vous remercier pour cette retraite. J’airéellement écouté Dieu durant cette retraite, parce que, vous savez, l’espagnol n’est pasvotrepointfort.»Cequenousdisonsestquenouspouvonsallerau-delàdenoslimitessinousapprenonsàavoirconfianceenquelquechosedeplusgrandquenous-mêmes.Purifiésdeladépendanceennotrepropreforce,nousgrandissonsdansnotreconfianceenl’EspritSaint.

Cesexpériencessontdesexpériencesdepurification.Ilyad’autressortesd’expériencesdepurificationetlesvertusdepurificationnousguiderontàtraverstoutcela.Chacunedecesexpériences nous amène à une foi plus profonde et une confiance renforcée en Dieu.Chacuneestunenouvelleexpériencede l’Esprit Saint travaillanteffectivementdansnotrevie.

Le groupe final des vertus comprend l’étape où nous développons une disposition quidevientsiuniverselleetsiconstantequecelatoucheabsolumenttoutdansnosvies. EllessontappeléesVertusdeConsommation.LapremièrementionnéeparnotreFondateurestappelée lagratitude. Ilautilisé letermehumilité,pourdécrire labasedelagratitude. Lapersonnehumbleestreconnaissantepourtout.Commedanstouteslesvertus,leChristestnotremodèle. LeChristapusincèrement remercierDieupour tout,mêmepouravoirétéélevéencroix.Ildevaityavoirquelquechosedebienlà,queJésusareconnuetapudire,«Oui,Père,jeteremercie.»Sivousavezrencontréunepersonnequiestreconnaissantedenature,voussavezcombienunetellepersonneestrayonnante.Ilyaégalementtroisautresdispositionsquisontdevenuesdesvertusdeconsommation,maisnousnepourronspaslesdécrireparaumanquedetemps.

IlyauntroisièmeélémentdanslaSpiritualitéMarianistequejeveuxtoucherbrièvement.Nous sommes desMarianistes et ainsi vous n’êtes pas surpris queMarie soit une réalitéprofondeetcentralepournous. LaparticularitédanslaprésencedeMariequinousattiretant est sa présence transformante. Nous croyons fermement que si nous vivons en saprésence,ellenous transformera. Saprésence façonneranotrepersonnalité.QuandnousparlonsdeMarieentantquemère,entantquenotremère,c’estexactementcequenousdisons. Elle est présente d’une façon qui nous transforme et elle exerce une influencefondamentaleetfortedansnotrecroissance.

Si Marie est une femme d’espérance, nous prendrons graduellement une attituded’espérance.SiMarieestunefemmevoulantapporterlavie,nousprendronscetteattitude.Nousvoudronsvoir laviesurterre,nousvoudronsapporter lavieauxpersonnesquinousentourentetaveclesquellesnousagissons. NotreFondateuradit:«VousnepouvezpasvivredanslaprésencedeMarietrèslongtempssansprendrelescaractéristiques,lesqualitésde son Fils.» Si elle est une présence miséricordieuse et compatissante, nous

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développerons une tendance vers lamiséricorde et la compassion. Si elle est assez fortepour se tenir au pied de la croix et participer de façon compatissante à la plus grandeatrocitédetouslestemps,alorsnousacquerronscemêmecouragecompatissant.Etquanddessituationsdifficilesseproduiront,nousseronscapablesdenoustenirlàavecellejusqu’àcequ’unevienouvellesoitnée.

Nousvoulonsvivredeplusenplusdans laprésencedeMarieparcequec’est lapersonnequeDieua leplusassociéeà Lui-mêmedans sesmystèreshumains. Sinous croyonsqueDieuestvenuracheterlemonde,pourlerefaire,pournousameneràunebontédeplusenplus grande, et si Marie est si profondément associée avec sa rédemption, alors nouscroyons également que nous pouvons ressentir et expérimenter quelques-uns de cesmystèresenvivantensaprésence.

Je crois qu’à l’Université Sainte-Marie, vous en tant que Forum Marianiste vous êtescertainementappelésàapportervieàcesvertusenvous-mêmes,aupointqu’ellesserontressentiesparlesgensquiviennenticipourêtreformés,êtreéduquésetpourêtreremplisdesignificationetengagement.

Il y a trois éléments dans notre Spiritualité Marianiste. Vous avez remarqué qu’ils sontentrelacés. Ils ne sont pas trois expériences séparées et distinctes. Chacune dépend del’autre. Jevousencourageàvivrecesélémentsdenotrespiritualitéparcequ’ilsvontvousinfluenceretvoustransformerendebonnespersonnes.Vousdeviendrezalorsunesourcedebonnesactionsetdebonnes influencespour lesautres. Etquandvousapporteznotrespiritualité au centre de votre vie, vous devenez un cadeau magnifique pour d’autrespersonnes.

TABLEDESMATIERES

Faire l ’expérience de dieu __________________________________________________________1

PRÉFACE _______________________________________________________________1

INTRODUCTIONàlaPREMIÈRESECTION _____________________________________3

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CHAPITRE1Fairel’expériencedelaprésencedeDieu___________________________4

CHAPITRE2Fairel’expériencedel’appeldeDieu_____________________________10

CHAPITRE3Lalettreetl’esprit ____________________________________________16

CHAPITRE4LaConsécration:Formésparl’Espritsousl’influencedeMarie________23

CHAPITRE5Revêtirl’hommenouveauLaconformitéàJésus-Christoul’imitationdeJésus______________________________________________________________________30

CHAPITRE6LachastetéenvueduRoyaume_________________________________37

CHAPITRE7Guérisonetpardon ___________________________________________44

CHAPITRE8ChacundenousauneMission___________________________________48

CHAPITRE9AvecDieudanslaprière _______________________________________59

CHAPITRE10Émondéspourproduireplusdefruits____________________________67

CHAPITRE11Purifiernotrefoi_____________________________________________74

CHAPITRE12Espritdelouangeetd’humilité_________________________________81

DEUXIÈMESECTION_____________________________________________________85

Conférencesauxparticipantsd’uneFormationSurlaSpiritualitéMarianisteDonnéesauxLaïcsetauxReligieuxmarianistes__________________________________________85

INTRODUCTIONÀLADEUXIÈMESECTION ___________________________________86

CHAPITRE13Entrereninterractionavecnotrevieintérieure____________________87

CHAPITRE14LesvertusquiformentleMarianiste ____________________________93

CHAPITRE15Commentlaprièretransformenotrevieintérieure_______________ 101

CHAPITRE16CommentMarieembellitnotrevie____________________________ 106

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TROISIÈMESECTIONConférencesàlaFacultéetaupersonneldel’UniversitéSainte-MarieetàlaFamilleMarianistedeSanAntonio _________________________________ 111

LeForumMarianistedel’UniversitéSanAntonio.___________________________ 111

INTRODUCTIONÀLATROISIÈMESECTION_________________________________ 112

CHAPITRE17MissionetCulture _________________________________________ 112

Chapitre18Ledevoird’évangéliseretlerôledelaFamilleMarianisted’aujourd’hui121

CHAPITRE19LaSpiritualitéMarianiste ___________________________________ 129