extraits de presse 2011-2013

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EXTRAITS DE PRESSE 2011-2013 CIE L’ORPHELINE EST UNE ÉPINE DANS LE PIED WWW.LESBANCSPUBLICS.COM

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Cie L'orphelin est une épine dans le pied / Théâtre / Marseille.

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extraits de presse2011-2013

cie l’orpheline est une épine dans le pied

www.lesbancspublics.com

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2jan 2011

cie l’orpheline est une épine dans le pied

de mon hublot utérin... lecture à Alger

ALGERIE NEWS - 26 JAN 2011

12 > C U L T U R E

ALGERIE NEWS Mercredi 26 janvier 2011

ENTRETIEN

En marge de la conférence animéeà la salle Atlas, organisée parl’Office national de la culture et del’information, le directeur duThéâtre régional de Béjaïa, OmarFetmouche, a bien voulu répondreà nos questions.

Comment cela se passe au théâtre régional deBéjaïa ?

On est toujours à cheval. On travaille d’ar-rache-pied. Tout le monde met son énergie etson savoir-faire pour donner plus de vie à cetteville, en général, et à cette structure, en parti-culier.

Et concernant la création théâtrale propre-ment dite ?

Actuellement, on travaille sur la régularitédes activités en ouvrant les portes aux associa-tions et coopératives pour perpétuer la tradi-tion. Un objectif qu’on s’est fixé depuis nosdébuts pour essayer d’aller vers la conquêtedu public. Le théâtre est une véritable écolepour l'éducation et l'enracinement des valeurssociétales. Il constitue un prélude à l'enseigne-ment des valeurs humaines. Aujourd’hui, lethéâtre en Algérie est sorti de l’ombre.D’ailleurs, il jouit relativement d'une marge deliberté comme en témoigne la croissancecontinue des productions nationales

Croyez-vous que le TRB, en tant qu’institu-tion et espace d’expression artistique, pourracontribuer à recréer une vie culturelle àBéjaïa ?

De notre côté, on travaille et on travailleratoujours dans ce sens. Cette mission incombeà diverses parties. Pour nous, le train a déjàdémarré. On fait de notre mieux. La chanced’avoir un grand théâtre qui n’a rien à envieraux grands théâtres au niveau national, quidispose d’espaces et de halls d’exposition,deux salles de spectacle et des terrasses où l’onpeut organiser des activités, des éléments quinous stimulent et qui nous encouragent à tra-vailler davantage. Je pense que nous avons lapossibilité de relever ce défi. Même s’il est dif-

ficile. De ce point de vue, nous voulons être unespace vivant. Nous ne voulons pas fermer lesportes de ce théâtre, nous attendons les propo-sitions des artistes. Mais je dois vous dire quenous avons déjà accueilli beaucoup d’associa-tions. Permettez-moi d’ajouter que les portesdu Théâtre régional de Béjaïa sont ouvertes àtous les amoureux du 4e art. Mais, Béjaïa n’estpas seulement le centre-ville ; on s’intéresseaussi aux proximités. Il faut socialiser le théâ-tre. C’est très important de le promouvoir au-delà des villes.

Qu’en est-il de la «fermeture» du café litté-raire ?

Fermeture, dites-vous ? Vous me surprenezencore une fois. A ma connaissance, je suis lepremier responsable du TR Béjaïa. Si décisionil y a, c’est moi qui la prends. La fermeture ducafé littéraire n’est qu’une rumeur, il n’y a riend’officiel ni d’officieux dans ce sens. Quelquesrendez-vous sont reportés pour des raisons desécurité. Autre chose n’est que spéculation !

Entretien réalisé par I. Ammour

C’ est avec un poème dédié aux grandsdramaturges qui ont marqué l’his-toire de notre théâtre que l’invité de

l’ONCI, M. Omar Fetmouche, dramaturge,metteur en scène et directeur du Théâtrerégional de Béjaïa, a choisi d’entamer sa confé-rence ayant pour thème «Le théâtre de jeu-nesse». «Le théâtre contemporain est pris encharge par les jeunes», a souligné le conféren-cier en citant les résultats préliminaires d'uneétude menée par ses soins durant la période2005-2010 et portant sur un échantillon de300 troupes de théâtre. «70% des comédiensdu théâtre professionnel sont issus du théâtrede jeunesse», a-t-il indiqué. M. Fetmouche arelevé que le ministère de la Culture «a ouverttoutes les portes aux jeunes comédiens», men-tionnant notamment l'obligation faite auxthéâtres régionaux de les programmer, ainsique l'opportunité qui leur est donnée de parti-

ciper aux compétitions officielles. «Nousremarquons également que le théâtre de jeu-nesse s'enrichit d'année en année avec des élé-ments universitaires», a noté l'intervenant,précisant qu'actuellement les jeunes compa-gnies comptent 62% d'universitaires, alorsqu'ils étaient 10% dans les années 1970 et 20%dans les années 1980. «Le théâtre de jeunesses'implante même dans les villages», a indiqué M. Fetmouche, faisant remarquer que les trou-pes, organisées sous forme de coopératives ousous l'égide d'associations culturelles, ontinvesti les différents créneaux, à raison de 28%pour le théâtre pour enfants, 36% pour lethéâtre traditionnel (reprise de pièces, traduc-tions, adaptations ou petites créations), 25%pour le théâtre contemporain et 11% pour lethéâtre expérimental. «Ce théâtre de jeunesse,qui peut donner beaucoup plus au 4e art algé-rien a, cependant, des contraintes, notamment

liées aux moyens financiers malgré l'octroi desubventions et, parfois, à l'insuffisance d'espa-ces adéquats pour les répétitions», a affirmél'auteur de l'étude, préconisant la créationd'une structure chargée de suivre le travail desassociations à travers un cahier des chargesafin de leur «impulser une plus grande dyna-mique».

«Nous avons remarqué, par ailleurs, quebeaucoup de jeunes s'impliquent dans l'écri-ture dans le domaine du théâtre de jeunesse etceci est une excellente chose», s'est réjoui M.Fetmouche qui a mis en exergue l'engouementdu public algérien pour le théâtre. Pourconclure, le conférencier a tenu à préciser quele théâtre pour enfants est une activité trèssensible. Il invite donc tous les acteurs à êtrevigilants car il y va de l’intérêt de l’enfant, quisera la relève de demain.

Idir Ammour

Omar Fetmouche

«Il faut socialiserle théâtre»

Agendaculturel

Méga-Expo Plus que cinq jours avant laclôture de l’expositionrétrospective d’Issiakhem auMAMA. Une méga-expositionregroupant une centained’œuvres du défunt, dontplusieurs inédites, durejusqu’au 31 janvier 2011 auMusée d’art moderne etcontemporain d’Alger. A ne pasrater !

Galerie RacimExposition des œuvresrécentes de l’artiste peintreZohra Sellal, jusqu’au 29janvier, à la galerie d’artMohammed-Racim.

TestamentLe livre-testament de FerhatAbbas « Demain, se lèvera lejour » édité par Alger-LivresEditions, disponible dans leslibrairies au prix de 700 DA. Alire absolument !

Conférence« Le fait colonial, nouvellesapproches, nouvellesquestions », conférenceanimée par Romain Bertrand,directeur de recherche à laFondation nationale dessciences politiques (France),demain 27 janvier à 14h30 auCentre culturel français d’Alger.

Histoire« Les Phéniciens d’Alger, lesroutes du commerce entre lamer Méditerranée et l’Afriquedu nord » est le titre d’uneexposition d’objets relatifs à lacivilisation phénicienne,jusqu’au 28 février 2011 auPalais de la culture Mufdi-Zakaria.

GnawiJoe Batoury et le groupeCaméléon en concert demain27 janvier à partir de 18h à lasalle El Mougar.

RockAlgier’s Symphonic Rock,concert animé par le groupealgérien Armonia, ce samedi 29janvier à 14h au Complexeculturel Laadi-Flici. Théâtre deVerdure. Alger.

Cinéma-Le dernier film d’Angelina Jolie«Salt» est en projection à lasalle Algeria de la rueDidouche- Mourad, à raison detrois séances quotidiennes(14h. 16h. 18h)

-Le film de Ken Loach «Looking for Eric » avec EricCantonna, à l’affiche à ElMouggar chaque jour à raisonde 2 projections quotidiennes: 14h et 17h.

-«The social network», bio picdu fondateur de Facebook,Mark Zukerberg, en projectionà la salle Cosmos jusqu’au 31janvier 2011.

-«Harry Potter et les reliquesde la mort» en projection à lafilmathèque Mohammed-Zinetde Riad El Feth, tous les jours à10h30 et à 13h.

Conférence de Omar Fetmouche à l’Atlas

«Le théâtre de jeunesse, unepépinière pour les professionnels»

13> C U L T U R E

ALGERIE NEWS Mercredi 26 janvier 2011

Re v i s i t é p a r l a c o m p a g n i e«l’Orpheline», le texte de Benfodilrévèle une composition très com-plexe, transcendant la métaphore

avec le fait réel. Il relate le phénomène de la«harga» (brûler dans le sens littéral), immi-gration clandestine, comme un acte de cou-rage et une expérience unique à laquelles’adonnent des milliers d’Algériens, desanonymes de l’Histoire actuelle qu’onréduit à de vulgaires chiffres, bravant lesdangers de la mer, comme le légendaireUlysse. Ce dernier avait, lui aussi, choisi dese considérer comme «Personne» en défiantla puissance de Poséidon. Posant ainsi uneimposante équation : «Je ‘‘harreg’’, donc jesuis… Personne», la lecture propose desliens de repère croisés entre mer et mère,mer et harrag, harrag et mère, mère etenfant, ou mère et enfant face au monde. Atravers ce texte, on s’introduit dans un uni-vers «Benfodil». Ce dernier excelle dans ladescription et nous confronte à la dimen-sion tragique que prend l’odyssée des har-raga au large d’une mer «ogresse» et dévo-rante, et à l’insoutenable souffrance d’unemère qui, telle Pénélope, espère le retour deson Ulysse ou, du moins, sa survie.Benfodil excelle également dans la provoca-tion pour interpeller une société «difficileet autiste», avec un langage cru et violent,qui traduit de manière assez agressive lesconditions d’un cruel destin, entre rêved’évasion de cette prison de toutes les frus-trations nommée Algérie, et le passage-sui-cide dans la Méditerranée. L’auteur met enlumière, dans ce même but, la relationmère-enfant dans une allégorie percutanteoù il décomplexe Œdipe de sa liaison«ombilicale» avec sa mère, abordant ainsisur l’éternel conflit intérieur, centré autourde la mère ; un exercice katébien dontl’écrivain ne nie pas l’influence. La figurede la mère génitrice, protectrice et posses-sive, «piégée» par son instinct qui tentemaladroitement de contrecarrer l’absurdedestin d’un fils emporté par son proprechoix, est transposée à celle d’une mer

cruelle et redoutable capable d’annihilerses enfants. S’expose alors un conflit à pro-portions diverses entre mère d’apparte-nance et mère d’accueil, un conflit identi-taire et d’intégration. Des dialogues entre la

mère et son enfant perdu au large, ou quiattend sa naissance à partir de son«hublot»… Tout se conjugue et se ralliedans le parfait crime de l’immolation dansune mer(e).

Interprétée par Nadjib Oudghiri, SamirEl Hakim, Elisabeth Moreau et ThomasGonzalez et mise en scène par JulieKretzschmar, la lecture de «De mon hublotutérin je te salue Humanité et je te dis bla-blabla…» s’est faite dans une tensiondense, chargée par des moments de souffleset marquée par la générosité du texte mar-qué par l’esprit ironique qui revient sou-vent dans les écrits de Benfodil.

Fatma Baroudi

Lecture théâtrale au CCF d’Alger

Harraga, ou la tragiqueOdyssée de Personne

Benfodil excelle dans la provocation pour interpellerune société «difficile et autiste», avec un langage cru etviolent, qui traduit de manière assez agressive lesconditions d’un cruel destin.

Pendant les années 70, la troupe théâ-trale ACT (Action culturelle des tra-vailleurs) de Kateb Yacine sillonnait

le pays, les moindres recoins, les villes et lesvillages, pour semer les grains de la culture.Le bon vieux temps que nous regrettonsaujourd’hui est révolu. L’Algérien moyend’aujourd’hui n’accède pas aisément à laculture. L’information qui lui parvient surles ondes de la radio nationale ou celle qu’illit dans la presse ne l’intéresse pas forcé-ment. Car, les événements culturels sontorganisés un peu tard ou géographique-ment loin ou trop loin.

Les événements culturels, même diffu-sés, demeurent inaccessibles à la massepopulaire. L’activité culturelle même riche,souffre d’un problème de centralisationdans les grandes villes. Le défi à releveraujourd’hui par les pouvoirs publics, c’estde parvenir à ancrer la culture dans leshabitudes du citoyen algérien, même celui

qui habite aux fins fonds des villages lesplus lointains et ce, en informant le plusgrand nombre de la tenue de telle ou telleactivité culturelle. La question de la com-munication dans le domaine culturel sepose sérieusement en Algérie. L’accès dupublic aux événements organisés à Algerdemeure restreint. Hanane habite Alger,elle est en classe terminale, elle affirme :«Non, il n’y a pas d’activités culturelles àAlger !». Hanane n’est pas au courant qu’ily a des activités dans les salle El Mouggar,Atlas, Ibn Zeydoun… Elle persiste et signequ’à Alger les espaces culturels n’existentpas ! Il est donc clair que l’informationdans le domaine culturel accuse un man-que considérable puisque nombre de per-sonnes comme Hanane ignore ce qui se faitdans leur propre région. En outre, on nel’ignore peut-être pas, l’habitude d’aller àdes soirées culturelles n’est pas très envogue chez les Algériens dits moyens,

notamment après les années 1990. Le rôleque doit jouer la communication dans ledomaine culturel est donc fortement néces-saire et ne doit pas se limiter uniquement àl’information mais aussi à la sensibilisationau fait culturel.

Des institutions comme l’Office natio-nal de la culture et de l’information, l’éta-blissement Arts et Culture, le Théâtrenational algérien et autres organisent régu-lièrement des concerts, des rencontres litté-raires, des pièces de théâtre. Le plan com.de ces établissements passent par l’ENTV, laRadio nationale et la presse écrite. On avoulu en savoir davantage sur le voletinformation concernant l’activité culturelledans les milieux universitaires, notammentdans les cités U. Nous avons donc priscontact avec la chargée de communicationde l’ONCI qui nous a affirmé que cet orga-nisme mobilise des bus au service des étu-diants, notamment lors des soirées poéti-

ques d’El Okadia. Mais, là encore, les diffé-rents organismes n’affichent pas dans lescités ni dans les universités pour inciter lesétudiants à se rendre aux différents événe-ments. Abdi, étudiant en sciences de l’in-formation, hébergé à la cité U de l’ITFCconcède : «A vrai dire, même si l’informa-tion nous parvient, notre petite bourse nenous permet pas de sortir. 3 000 DA tous lestrois mois, c’est très peu... Et puis voussavez, au moment où les activités culturel-les se déroulent, nous sommes au resto del’université à attendre des heures durantpour dîner !»

Par ailleurs, l’information concernantles événements culturels de proximitédemeure très limitée. Les affiches annon-çant les activités culturelles sont quasi-absentes ou, du moins, sont limitées géo-graphiquement et ne touchent qu’uneinfime minorité.

Hamida Mechai

La communication et l’information dans le domaine culturel

En déconnexion avec le large public

Le Centre culturel français d’Alger a accueilli lundi dernier la lecture du texte théâtral «De mon hublot utérin je tesalue humanité et je te dis blablabla…», de l’écrivain-journaliste Mustapha Benfodil. Un texte à multiples résonancesoù l’auteur remue avec loquacité la question des harraga.

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Edition du Mercredi 26 Janvier 2011

Culture

Héros homériques à la poursuite d’un idéal chimérique

LECTURE DE LA PIÈCE “DE MON HUBLOT UTERIN JE TE SALUE HUMANITÉ ET TE DIS

BLABLABLA…”

Par : Sara Kharfi

La compagnie l’Orpheline a proposé, avant-hier soir, au Centre culturel français d’Alger, une mise

en lecture du texte, “De mon hublot utérin je te salue humanité et te dis blablabla…”, de l’auteur

Mustapha Benfodil dont on connaissait, en Algérie, l’œuvre romanesque davantage que l’œuvre

théâtrale.

Cette pièce qui verra le jour en forme de spectacle théâtral, le 8 mars prochain, en France, s’intéresse à

l’épineuse et très actuelle question de l’émigration clandestine. “De mon hublot utérin je te salue

humanité et te dis blablabla…”, c’est l’histoire de Tariq Ibn Harrag ; c’est l’histoire du fœtus qui entrevoit

déjà le monde à partir de son hublot utérin, du ventre de sa maman ; c’est l’histoire d’une mère qui

supplie la mer de lui rendre son enfant avalé par

les flots. L’auteur par la voix des quatre comédiens : Elisabeth Moreau, Samir El Hakim et les excellents

Thomas Gonzalez et Nadjib Oudghiri, nous plonge dans les entrailles d’une mer, la Méditerranée, qui

avale des milliers de jeunes ; mais aussi dans les entrailles d’une mère qui aime son enfant bien avant sa

naissance et qui l’aimera toute sa vie parce que les génitrices sont programmées pour aimer leurs

enfants… même s’ils renoncent à tout ce qu’ils ont pour courir derrière une utopie. Après que la mer eut

arraché à la mère la chair de sa chair qui est sorti de ses entrailles, celle-ci va la supplier puis l’insulter,

puis la dénigrer, puis sombrer… tout comme son enfant.

L’auteur qui considère les harragas comme des Ulysse des temps modernes, propose un parallèle avec la

mythologie grecque et notamment l’Odyssée. Sous sa plume, les harragas deviennent des héros

homériques partis à la conquête d’un idéal chimérique. L’agréable surprise de ce texte est le côté

Katébien.

Une filiation qui n’est pas toujours décelable dans l’œuvre romanesque de Mustapha Benfodil, mais qui

est largement affichée dans ce texte, notamment avec la phrase : “Tu pleures et il pleut…”, qui se répète

tel refrain et qui nous fait penser à Nedjma de Kateb Yacine et précisément à “Mère, le mur est haut”. Ce

texte est une agréable surprise qui fait découvrir une autre facette de l’œuvre de l’auteur.

Copyright (c) LIBERTE 2010

www.liberte-algerie.com

jan 2011

cie l’orpheline est une épine dans le pied

de mon hublot utérin... lecture à Alger

LIBERTE - 26 JAN 2011

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«DE MON HUBLOT UTÉRIN, JE TE SALUE HUMANITÉ ET TE DISBLA-BLA-BLA...»Et si harraga m’était contéO. HIND - Mercredi 26 Janvier 2011 - Page : 19

Entre présent et passé antique, de la mythologie grecque aux Temps modernes, la pièce met la pendule à l’envers et

erre.

Cris et châtiment. Un titre qui siérait sans doute à cette pièce. Car, qu’a-t-elle fait une mère au Bon Dieu pour

voir son enfant arraché à la vie dans des conditions aussi cruelles? Et si el harrag m’était conté? Dans De

mon hublot utérin, je te salue humanité et te dis bla-bla-bla...le sort tragique des harraga est raconté avec

force et véhémence. Ecrit par le journaliste et auteur Mustapaha Benfodil, à l’automne 2009, le projet prend

racine dans l’écriture d’une fiction que l’auteur invente lors d’une résidence à bord d’un voilier naviguant en

Méditerranée. Sur une proposition du metteur en scène, Julie Kretzschmar, s’engage une collaboration entre

Mustapha Benfodil, le chorégraphe Thierry Thieû Niang et le comédien algérien Samir El Hakim (qui a déjà

joué dans le film Harragas de Merzak Allouache, Ndlr).

Ce travail à trois temps prend forme dans le cadre du Festival du théâtre arabe en région, organisé par La

Friche Belle de Mai, sous la houlette du metteur en scène Ziani Chérif Ayad. En attendant la mise en espace,

une mise en lecture a été donnée lundi dernier au Centre culturel français par Elisabeth Moreau, Samir El

Hakim, Thomas Gonzalez et Najib Oudghiri.

De mon hublot utérin, je te salue humanité et te dis bla-bla-bla...est une plongée dans les entrailles de la mer

Méditerranée, arrimée à la douleur de ces mères éplorées de chagrin et de culpabilité. Le silence dans la

salle du CCF contraste avec les balbutiements qui ouvrent le «spectacle». «Euh, euh, euh, qu’est-ce que j’ai

fait? Qu’est-ce que je n’ai pas fait?», est scandé sur un ton lent, répété comme une obsession. Un foetus

dans le ventre de sa mère nous parle. Cette pièce met en juxtaposition le destin de ces anonymes,

surnommés «personnes» qui finissent deux pieds sous la mer et celui de ce foetus qui écoute sa mère lui

raconter les belles aventures d’Ulysse, d’Ithaque, de Télémaque...le sort pathétique des harraga, leurs rêves

d’Italie et de jolies filles s’arrêtent au port de leur infâme destin qui s’acharne à les dériver contre leur gré.

Bienvenue dans l’escalade de l’errance d’une mère et celle de toute une jeunesse qui se cherche. Entre

humour assassine et description grotesque, cynisme, dérision, pointe de tendresse et cruauté, mais aussi

éclatement du sens, poésie et multilinguisme, on reconnaît là, la métalinguistique de Mustapha Benfodil dont

son écriture en est affublée. Une écriture fleurie, lyrique, nerveuse, incandescendante, plurielle, franche,

remuante jusqu’à la nausée. Entre présent et passé antique, de la mythologie aux Temps modernes, et son

corollaire, MSN et Facebook de Omar Timsah, De mon hublot utérin, je te salue humanité et te dis bla-bla-

bla...remet la pendule à l’envers pour reconstituer le puzzle d’une sombre destinée. De l’état embryon-noire à

celui d’un fantôme englouti par la mer glauque qui vous prend sans pitié. «C’est pas l’homme qui prend la

mer, C’est la mer qui prend l’homme» chantait Renaud.

Le foetus grandit. Il s’appellera Tarik. Comme l’un des principaux acteurs de la conquête islamique de la

péninsule ibérique. Ou encore comme le nom de ce fameux bateau qui porte aujourd’hui son nom. A la

différence que lui, sa conquête tournera court. Un pied de nez funeste à l’existence. Pris dans les vagues

périlleuses de la mer. Du liquide amniotique, Tarik redevient liquide, absorbé par les abysses. Désillusion de

la mère, rêve cajolé, fardeau affectif et projet avorté. Vague à l’âme. Du bleu de la mer qui divague.

Invocation des dieux du ciel et de la mer. La pirogue se métamorphose en linceul. La mère tempête, invoque

Calypso, la nymphe de la mer pour lui rendre son fils bien-aimé. Sera-t-elle entendue? «Nous mangent les

poissons et pas les vers» est une expression courante chez les harraga, qui dit leur désespoir, leur

désenchantement quand tout est perdu. D’une durée de quarante minutes, cette lecture nous a donné un

aperçu de ce que sera la pièce une fois montée et jouée les 8 et 9 mars prochain à Martigues, près de

Marseille. Puissante et vive, marquée de quelques blancs (coupures), la mise en lecture donnée lundi dernier

au CCF nous laissa comme un petit goût d’inachevé. Toutefois, le talent des comédiens à faire passer les

émotions est à saluer. La force du texte aussi, bien entendu.

Droits de reproduction et de diffusion réservés (c) L'Expression

jan 2011

cie l’orpheline est une épine dans le pied

de mon hublot utérin... lecture à Alger

L’EXPRESSION - 26 JAN 2011

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Pénélope cherche TélémaqueDans le cadre du festival dédié à la Médi-terranée Mare Nostrum, De mon hublot utérin, je te salue humanité et te dis bla-bla bla nous emmène dans un périple dans le temps, à travers les dialogues imagi-nés entre une mère et son fils séparés par l’exil. Une dramaturgie qui n’a pas peur de mettre à la surface les nœuds plus ou moins coulants.

« Mieux vaut mourir mangé par les poissons que rongé par les vers » : telle est la nouvelle devise de la jeunesse algérienne, celle des harragas, qui choisissent l’exil parfois au prix de leur vie1. C’est autour de cette nouvelle figure de la société algérienne que se tisse le drame écrit par Mustafa Benfodil et mis en scène par Julie Kretzschmar.

Après deux étapes de travail présentées à la Friche, la création, magnifiquement rythmée par la danse de Lucas Manganelli, atteint aujourd’hui un équilibre serein. Portée par trois comédiens, la parole de Tariq — le fils exilé, héros de la pièce — trouve son rythme, oscillant entre la clairvoyance cynique de Thomas Gonzalez et la violence rentrée de Sa-mir El Hakim, en passant par la présence toute poé-tique de Najib Oudghiri. Interprétée par Elisabeth Moreau, la mère, seule, face à la mer, face à nous et à son désespoir, s’octroie enfin une place de pre-mier choix. Par son élocution admirable et sa pré-sence flamboyante, l’actrice nous fait ainsi entendre les subtilités de ce texte si exigeant, tant par sa forme que par son propos. Si le récit tragique est ponctué de références mythologiques, celles-ci évitent l’écueil du vernis parfois trop classieux des écritures contem-poraines.

Les lumières, la scénographie et la création sonore de Nicolas Gerber font de l’étroitesse de la petite salle des Salins un atout. Les allusions aux techniques de communication modernes qui ponctuent le texte, ainsi que la métaphore du voyage et du parcours font de ce récit à la construction étrange une œuvre admi-rablement mise en jeu sur le plateau.

Une œuvre où le temps n’existe plus, nous englou-tissant sans faire naufrage dans les méandres de l’in-conscient maternel. Une œuvre de chair et d’âme, moins cérébrale que ce à quoi la compagnie ratta-chée aux Bancs Publics nous avait accoutumés. Une œuvre sur l’intemporelle et universelle douleur de la mère, sur son amour imprescriptible.

Joanna Selvidès

De mon hublot utérin, je te salue humanité et te dis blablabla par la Cie L’Orpheline est une épine dans le pied : le 9 au Théâtre des Salins (19 quai Paul Doumer, Martigues). Rens. 04 42 49 02 00 / http://theatre-des-salins.fr

1. Harraga : mot originaire de l’arabe nord-africain « qui brûlent » (les papiers). Migrant clandestin qui prend la mer depuis l’Afrique du nord, la Mauritanie, le Sénégal avec des pateras (embarcations de fortune) pour rejoindre les côtes andalouses, Gibraltar, la Sicile, les îles Canaries, les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, l’île de Lampedusa ou encore Malte.

MaRS 2011

cie l’orpheline est une épine dans le pied

de mon hublot utérin... création

VENTILO - 3 MARS 2011

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6MaRS 2011

cie l’orpheline est une épine dans le pied

de mon hublot utérin... création

ZIBELINE N°39, DU16/03 AU 13/04/2011

Page 7: Extraits de Presse 2011-2013

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7MaI 2011

cie l’orpheline est une épine dans le pied

de mon hublot utérin... reprise

LA PROVENcE - 31 MAI 2011

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8MaI 2011

cie l’orpheline est une épine dans le pied

de mon hublot utérin... reprise

LA MARSEILLAISE - 31 MAI 2011

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Faire entendre le texte de théâtre d’un auteur issu d’une culture dévastée par la France est un acte politique en soi, et rare. C’est celui de Julie Kretzschmar pour Mustafa Benfoldil, journaliste algérien et auteur dramatique. C’est déjà ça, même si, à première vue, De mon Hublot utérin, je te salue humanité et te dis blablabla est un texte qui garde quelque chose de cadré, culturellement parlant, avec une référence dorsale à L’Odyssée d’Homère. Il y a une situation fictionnelle drama-tique - celle d’un homme qui traverse la médi-terranée pour l’Europe -, et deux personnages théâtraux - une mère et un fils qui échangent des monologues – qui rassure l’amateur du théâtre de texte. De mon Hublot utérin, je te salue humanité et te dis blablabla se présente à première vue bien comme une rhétorique de la dénonciation de cette tragédie des « harragas » (« ceux qui brûlent » et par extension, « ceux qui brûlent leurs papiers »). Un texte à message. Mais à l’intérieur de ça, Mus-tafa Benfodil injecte une écriture qui bouscule la langue, qui déborde – le texte en lecture fait quatre heures – et qui va ailleurs – et le titre plein d’ironie est annonciateur...Mustafa Benfodil donne d’abord une image de notre temps mondialisé. Il y a une façon de parler du fils, où ses rêves d’évasion, rêves justes, sont aussi des fantasmes d’aliénation - de voiture et de filles – qui traduit bien ce grouillement contradic-toire, ambivalent, du monde postmoderne. Inter-net par exemple, qui lui permet de donner forme à son désir de créer du lien, n’est qu’une drogue virtuelle.Ensuite, Mustafa Benfodil regarde le monde de-puis le point de vue qui ne peut pas être le nôtre - de gens dans un théâtre. C’est le point de vue de ceux pour qui le monde est à l’extérieur, hors représentation. Le point de vue de ceux qui en sont dépossédés jusqu’à perdre leur nom : Mus-tafa Benfoldil ne prénomme pas ses personnages. C’est une bonne distance pour nous faire voir les choses, celle de ceux qui n’ont plus rien à perdre ni à gagner, hors de tout théâtre. Le fils s’exprimant

en dernier lieu depuis sa noyade. C’est de là que nous sommes regardés, de ce point d’effacement paroxystique d’un regard.

C’est de cette question de distance que Julie Kretzschmar part. Au théâtre du Gypsis à Mar-seille qui est un ancien cinéma à balcon, elle ins-talle les spectateurs à grande distance de la scène, et en hauteur. Elle ne cherche pas à nous affecter - comment de toute manière ne pas compatir  ? Non, elle nous sépare de la scène. Cette sépara-tion provient de toute façon de l’aspect esthétisant, très plastique, de sa scénographie qui déréalise symboliquement l’espace.Il y a quelque chose de tranchant dans cet uni-vers esthétique, par rapport au pathos corporel de larmes, de sang et de souillures, convoqué par le texte. Quelques accessoires, comme de grosses chambres à air noires, des couvertures et un fau-teuil, redouble cette coupure entre scène et réalité textuelle, entre espace symbolique et pathos, mais en la déplaçant délicatement des corps vers les objets (objets de l’échouage, de l’errance). Comme la teneur plutôt brute des acteurs contraste avec l’extrême stylisation de la scénographie. D’un noir luisant souligné de lueurs bleutés et de néons très blancs, l’espace est en deux parties  : un fond de scène comme une boîte noire et un de-vant de scène comme un carré de jeu. Un premier espace plutôt attribué au fils, et l’autre à la mère – aussi à la mer, véritable troisième personnage ou figure. L’idée du personnage est en effet cas-sée pour celle de figure, par Julie Kretzschmar, le fils étant associé à quatre acteurs dont l’un muet, ombre passante et qui danse  - celui-ci incarne l’impossibilité de trouver une parole eu égard au paroxysme de la situation – c’est le corps du disparu. Les trois «  parlants  », c’est le corps de l’auteur qui témoigne depuis sa révolte - se par-tagent différents aspects de la parole du fils (un rêvant au départ  ; un se noyant  ; et un reconsti-tuant psychanalytiquement son histoire de vie), aspect sériés selon l’analyse dramaturgique de

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MARI-MAI cORBEL / BLOG cRITIqUE

DE MON HUBLOt UtérIN, JE tE sALUE HUMANIté Et tE DIs BLABLABLA.DE MUstAPHA BENFODILMIsE EN sCÈNE JULIE KrEtZsCHMArAvEC sAMIr EL HAKIM, tHOMAs GONZALEZ,LUCAs MANGANELLI (DANsEUr), ELIsABEtH MOrEAU, NAJIB OUDGHIr

Seul(e) danS mon corpS

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Julie Kretzschmar. La mère, elle, est jouée par une actrice avec une théâtralité soulignée, incarnation d’une «  mère Courage  » drama-tique (l’allusion est faite dans le texte, au personnage de Brecht) dont le pathos, légèrement exagéré, permet de s’en distancier. sous le bruissement tempétueux des mots, se profile un drame irri-tant, dépassant subtilement celui des harragas - ceux brûlant, donc. Ce serait quelque chose comme l’anéantissement de toute possibilité de quête de soi sinon en perdant toute communauté.

Mustafa Benfodil croise deux fils conducteurs. L’un archaïque, c’est l’Odyssée d’Homère – le calvaire du fils en Méditerranée étant asso-cié aux différentes étapes d’Ulysse ou les imprécations de la mère s’adressant à la mer comme à une divinité. L’autre, moderne, est psychanalytique – le fils faisant le récit de son existence depuis sa conception, évoquant un père déserteur. Mais ce second fil hérite du premier : Dans le monde moderne désenchanté, il y a l’utopie de la pensée et du logos nous guidant pour échapper à la fatalité, pour nous y retrouver - l’idée de quête de soi, celle de la rupture avec la répétition de schémas ataviques, est imprégnée du mythe odysséen. Mais Mustafa Benfodil fait entendre que le monde grec est mort – la grande bleue reste muette devant les imprécations de la mère (em-poisonnée par les pollutions ?) et le fils s’égare. Grinçant, il suggère que ce poème fondateur de la culture occidentale est une comédie – d’où l’ironie du titre, de mon hublot utérin (.... ) et blablabla... Il ne s’est glissé dans le cadre dramatique conventionnel que pour le mettre à terre, et le supplanter par une autre vision. Où le monde psychanalytique se trouve dépassé. C’est ce qu’implicitement Ju-lie Kretzschmar met en scène. Que veut dire en effet une quête de soi, dans le monde tel qu’il est pour les milliards d’individus qui s’y trouvent ? Quelle métamorphose attendre ? sinon - et c’est ça le cri de Mustafa Benfodil - celle de ces « évadés » brûlant leur identité sociale, et qui retrouvent leur identité intime de façon tragique – croi-sant sans témoin Cyclope, sirène et autres Circé. si le fils disparaît aux yeux du monde, Mustafa Benfodil fait bien entendre que, jusqu’au bout, ce dernier ne disparaît pas à ses propres yeux. Pour ce fils, il n’y a plus ni regard, ni scène, sinon internes - et justement. C’est cela qu’écrit Mustafa Benfodil, le contact avec son propre corps, cette conscience des humeurs, secrétions, des états émotionnels, des mal au cœur, de la douleur, de la terreur, d’où, paradoxe, déployer une parole vraie sur ce monde - pour non pas le retrouver mais constater sa perte. C’est ça qui nous regarde. L’odyssée aujourd’hui ne chante aucune possibilité de refaire surface socialement. seulement la re-conquête de la vie primordiale, pleine d’ombre. C’est ça, la tragédie aujourd’hui. Un effacement pour soi. Une luisante noirceur, reflet de notre impuissance, de notre propre noyade symbolique.

Mari-Mai Corbel.

Comme post-chrétienne, de quête d’un graal.

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paroles contemporaines. Les textes mis en lecture et espace par Julie Ktretzschmar et thomas Gonzalez procèdent pour le premier (La cicatrice d’Alain Kamal Martial) d’une descente bataillienne aux enfers de la psyché, et pour le second, d’un constat (La préface du nègre qui est une nouvelle tirée du Mino-taure 104, de Kamel Daoud) d’impasse de l’Histoire qui mortifie toute possibilité d’histoires.

Les deux textes ont en commun de nommer la sensation d’être voué à la répétition, à tourner en rond, à ressasser voire bé-gayer. sous le coup d’un trauma qui n’en finit pas de hanter et comme sans dépassement possible. L’avenir est un blanc in-forme et terrorisant qui fait du passé une terre rassurante aussi atroce ait-il été.

C’est Kamel Daoud qui nomme l’impossibilité d’écrire une his-toire et le désoeuvrement des hommes après l’Histoire, tant l’Histoire est devenue un objet de culte qui bloque tout mou-vement vers l’avenir. Un homme né après l’Independance algé-rienne est employé comme nègre d’un ancien combattant qui veut laisser à sa postérité le récit de ses faits d’héroïsme, qui avec l’âge ont pris des proportions mythologiques. Un faussé sépare le « nègre » de ce vieux guerrier, celui de savoir lire et écrire, et même, de savoir raconter, faussé culpabilisant pour le premier puisque sans le second et sa guerre de libération, il n’aurait pas pu être éduqué comme il l’a été. réciproquement, le soldat se méfie de l’écrivain, car pendant la guerre, les Fran-çais avaient infiltré les réseaux du FLN où se trouvaient des combattants qui avaient été dans les écoles françaises. Il y a eu des purges internes où tout intellectuel était visé. Décervelée, la révolution a abouti à un vide, celui d’une Algérie figée. C’est ce que Kamel Daoud fait entendre. L’écrivain ne peut plus ra-conter d’histoire, dit-il, parce que l’Histoire a pris toute la place et que les histoires intimes manquent de grandeur. Mais le ré-cit, mené de main de maître, et emmené avec une jolie liberté par Gurshad shaheman, est en clin d’oeil : à la fin, le faux livre écrit par le nègre à partir des récits délirants du vieux est brûlé, laissant la place à d’autres bribes de récits. Les autres nou-velles du Minotaure 504 sont les récits que le nègre avait écrit à la place de celui de l’ancien combattant. Il y a là une structure qui rappelle de façon lointaine les Mille et Une Nuits, c’est-à-dire un emboîtement de récit, une manière de troubler les fron-tières entre le réel et la fiction, entre le narrateur et le lecteur. Mais il y a aussi une bifurcation, qui sort le livre du conte (tout

en étant ressourcé dans la structure du conte), et qui l’amène vers une parole contemporaine individualisée où l’intime liée à la voix se singularise. Le moteur dramatique de ce texte étant pour beaucoup le conflit entre l’individuel et le collectif (et le mythologique).

Avec Alain Kamal Martial, nous plongeons dans le magma inté-rieur infernal où la guerre prend forme. La cicatrice n’est pas un récit mais plus un poème symbolique. Et Bataillien, au sens où l’érotisme et la guerre sont montrées comme liés dans un fantasme de réaction à la vie. Le viol devient à la fois un vol de la vie (du feu sacré des mères) et un acte d’éradication des sources de vie. C’est une rythmique, pour un anti-mythe, un rituel d’exorcisme du mythe, du mythe comme machine à fabri-quer du collectif, du mythe qui arme les bras. La voix ou le sujet qui parle est pris dans un tourbillon sanglant, d’appel au sang, au meurtre, à la vengeance des mères éventrées par l’éven-tration de d’autres mères (et à travers ce geste, au meurtre de la source de vie) et en même temps cherche à s’extraire cette force centripète. La mise en espace accompagne ce mouve-ment de fond de l’écriture, cette obstination à s’échapper mal-gré les puissances collectives. Une vidéo montre un homme qui marche dans une lande, de dos, tandis que les murs de la salle sont couverts de mots du texte, d’écriture. Comme une logo-machie qui encercle le sujet et dont il cherche à s’extraire. Ce n’est pas un récit donc. c’est un poème complexe qui évoque un père boucher (nourrir les groupes humains carnivores supposent déjà ce premier massacre, cette première rupture d’avoir le cosmos et le monde, et le texte insiste sur la machette qui sectionne les articulations des os), des machettes, le monde occidental qui se repaît de spectacles de massacres (c’est une phrase mais c’est nommé et cela résonne) ; enfin le monde des mères violées par les miliciens, qui sont asséchées par les mili-ciens qui leur boivent le lait. texte magnifique, travaillé par la structure de la boucle, de la répétition, du ressassement et par une force de dépassement, par un désir de prendre la tangente. Le travail musical d’Aurélien renoux qui improvise à la guitare électrique est travaillé de même, sans qu’il y ait résolution entre la boucle et la progression. Cela crisse, cela frotte, cela se cherche, et c’est déjà un mouvement d’échappée. Manuel vallade, quant à lui, soutient avec la puissance d’acteur qui est la sienne cette langue pleine de chair, indécente même, en ce qu’elle éclaire comme le fantasme sexuel noir (de viol collectif, de jaillissement interrompu de sperme) s’articule à l’attirance

LA PréFACE DU NÈGrE / CICAtrICEs – 10 Et 11 NOvEMBrE 2012 – MArsEILLE / BANCs PUBLICs

au creuX du TourBIllon SanGlanT,l’InQuIeTanT deSoeuVremenTJULIE KrEtZsCHMAr tHOMAs GONZALEZ / LA CICAtrICE LA PréFACE DU NÈGrE / ALAIN KAMAL MAr-tIAL KAMEL DAOUD /MIsE EN LECtUrEAvEC MANUEL vALLADE Et GUrsHAD sHAHEMAN & AUréLIEN ArNOUx

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la plus terrifiante pour l’acte de meurtre collectif. L’arme sym-bolique cependant du meurtre est ici cependant la même pour les moutons ou les boeufs du boucher que pour les hommes : une machette, instrument de castration littérale. Au plus pro-fond de la psyché, se jouxte l’énergie sexuelle et l’angoisse de castration qui pour devenir supportable peut aussi se retour-ner en désir de castrer : mieux vaut castrer le premier que de l’être : tuer que de l’être, et c’est toute l’ivresse démentielle de la guerre qui vient de là.

L’impossible héritage. La question contemporaine, Derrida l’a beaucoup dit, a à voir avec l’héritage. Que l’on soit algérien ou français, pâle ou sombre, hériter de l’histoire, le faut-il et comment faire dans tous les cas ? si l’on le rejette pour ouvrir différemment une voie dans l’avenir, il y a cette complication que l’on devient des gens sans histoires, sans récits – c’est la question qui traverse La préface du nègre. Le travail de Julie Kretzschmar et de thomas Gonzalez (fondé sur une installation plastique et non l’idée d’une scénographie) est axé sur l’écri-ture, sur sa mise en perspective – la création d’une chambre d’échos. Un réseau de câbles / tuyaux couvre le plafond rame-nant des images de chantier, des métaphores sur la circulation du sens, comme de façon ambivalente la sensation d’un horizon bouché. (d’un ciel même d’où tombe un goutte à goutte pour la première lecture, celle de La Cicatrice. Aucune résolution, aucune tournure didactique. C’est un travail qui nous passe des questions pour nous toucher là où c’est le plus souvent flou en chacun. Ce point où l’horreur de la guerre se dispute à l’envie de cette interruption de la vie normale que rené Char a nommé dans Les Feuillets d’Hypnos et Bataille commenté (L’érotisme). Interruption de la vie normale euphorisante qui entraîne la suspension des histoires de vie singulières et leur affectation à la mythologie collective. La mise en perspective de ces deux textes fait d’un côté apparaître le tourbillon sanglant qui fait le fond de nos rêves inconscients et de l’autre, la névrose ou l’empêchement à agir pour le monde ou pour soi – dans la mise en espace, la salle a été désorientée par un déplacement des gradins et un enfumage blanchâtre. Les deux vont de pair. Les deux viennent d’un héritage impossible à assumer. sans tes-tament, comment continuer l’histoire ? Question qui n’est pas nouvelle depuis le xIxème siècle où les horreurs, s’enchaînant, ont peu à peu fait taire… L’expérience ne se transmet plus (la mémoire pourrit ou hante)…

MArI-MAI COrBEL

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cicatricesla préface du nègreMARI-MAI cORBEL / BLOG cRITIqUE

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ZMARSEILLE L’HEBDO 1ER NOVEMBRE

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16 novkara’ une épopée comorienneMARSEILLE L’HEBDO / 7 NOVEMBRE 2012

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17janv représentations les 13 et 14 juin 2013

kara’une épopée comorienne

LA GAZETTE DES cOMORES

Le 4 janvier dernier, l’historien et anthropologue Damir Ben Ali a donné une conférence en région parisienne devant une trentaine de personnes qui ont bravé le froid et accepté un chan-gement de lieu à la dernière minute. Les organisateurs de cette conférence lui avaient demandé d’aborder un de ses thèmes de prédilection : le grand-mariage de Ngazidja qui est toujours un sujet de grands débats dans la diaspora.

DAMIR BEN ALI HISTORIEN cHERcHEUR

Le doyen des historiens comoriens a fait une synthèse sur cette tradition indébou-lonnable de la Grande-comore, en allant au-delà du mariage lui-même, puisqu’il a finalement parlé aussi des traditions, du anda na mila de la société de la Grande-comore.

chiffres à l’appui, à la fin de sa conférence, il a montré que le coût de ce mariage

est encore trop élevé. Mais, devant les membres de la diaspora comorienne, dont la majorité approuve cette idée, il n’a pas hésité à pointer du doigt les comoriens de l’extérieur qui, selon lui, contribuent lar-gement aux surenchères, qui sortent trop souvent du cadre stricte de la tradition. La plupart des participants ont reconnu cette affirmation dans leurs interventions.

Il a également appris à l’assistance qu’il avait toujours refusé d’accomplir le anda, mais qu’il avait fini par le faire avec sa femme, après 20 ans de mariage, comme beaucoup de gens de sa génération.

La conférence s’est poursuivie par un débat animé par Ibrahim Barwane et Nakidine Mattoire. Les comoriens présents se sont montrés très prolixes en questions et anecdotes sur le grand-mariage. La majorité est restée opposée au grand-ma-riage, présenté dans une sorte de carica-ture comme étant la cause des inégalités sociales, des faiblesses de l’économie et même de la corruption dans tout le pays. Ils ont dénoncé le fait que le titre de mdrumdzima octroie une sorte d’immunité aux notables.

comme à chaque fois qu’on parle du anda dans la diaspora, le débat s’est poursuivi sur internet où s’affrontent depuis des années les partisans du grand-mariage

et les anti-anda. certains pensent même organiser bientôt un autre débat sur le même sujet.Damir Ben Ali était en France depuis le mois de novembre pour une résidence d’artiste avec l’écrivain Salim Hatubou qui avoue « son profond respect et son admira-tion » pour l’historien. Installés à Marseille pendant 15 jours, les deux personnalités ont collaboré sur « une épopée como-rienne», une création théâtrale qui a pour sujet principal le conflit entre les sultans Msafumu et Said Ali et qui met en avant un personnage central Kari wa Djae ou Kara-djae, oublié de l’histoire. Ils ont dégagé les matériaux historiques et l’écrivain devrait s’occuper de l’écriture scénique.

Il s’agit d’un projet proposé à « Marseille capitale européenne de la culture 2013 » par l’écrivain comorien. Le texte sera mis en scène par Julie Kretzschmar et joué en juin 2013 en plein air à Marseille avant une tournée, selon Salim Hatubou. Pendant la résidence, Damir Ben Ali et Salim Hatubou avaient d’ailleurs donné une conférence sur le thème « Histoire et oralité aux comores » au théâtre Bancs Publics à Marseille.

Mahmoud Ibrahime

EntrE histoirE, oralité Et anda na milaPublié le 30/01/2013 à 10:15 par mouvementorange

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AL WATWAN - 16 AVRIL 2013

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19avrkara’ une épopée comorienneLA PROVENcE - 16 AVRIL 2013

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Salim Hatubou est écrivain et conteur franco-co-morien né à Hahaya (Grande-Comores) et grandi à Marseille, ville où il réside toujours. Auteur engagé et prolifique, il a publié une quarantaine d’œuvres dont des Romans et Contes, Romans jeunesse, Al-bums pour enfants, Poésies et essais. Son œuvre est récompensée par plusieurs prix et distinctions dont le Prix Diamant en Belgique pour «Comores-Zanzibar », le Prix Insulaire Découverte à Ouessant pour Ali de Zanzibar, le Prix Kalam de bronze décerné par le Ministère de la Culture aux Comores et le Prix des lecteurs à Mayotte pour Hamouro.COMORESplus : Vous êtes l’un des écrivains les plus en vue aux Comores.

comment devient-on écrivain quand on a grandi dans les quartiers Nord de Marseille ?

Salim Hatubou : Mon histoire personnelle a beaucoup contribué à ce que je suis devenu : ma mère a grandi à Zanzibar. quand il y a eu la Révolution Okello dans les années 60 avec la stigmatisation et la persécution des comoriens, elle a fait partie de ces hommes et femmes qui ont préféré rentrer aux comores, refusant de renier son identité comorienne. Elle a ramené des centaines de livres. J’ai donc vécu au milieu des livres et cette maman nous allaitait avec les mots. Elle disait que le livre est une fenêtre ouverte sur le monde. Riama, ma mère, qui était anglophone aimait la magie des mots et elle m’a transmis cet amour. Seulement plus je lisais, plus je me rendais compte qu’on ne parlait pas des comores. Alors, j’ai voulu donner à lire et à entendre mon archipel et ma culture. quand, enfant, j’ai débarqué dans les quartiers Nord de Marseille, j’avais déjà cette passion pour la lec-ture et l’écriture. c’était ma bouée !

cP : Vous êtes un écrivain prolifique et êtes l’auteur de plusieurs romans, essais, pièces de théâtre, mais l’on re-marque que vous avez une prédilection pour les contes, pourquoi ?

S.H : Je viens de parler du rôle fondamental qu’a joué ma mère pour la lecture et l’écriture. Sa mère était une conteuse talentueuse. Pendant les vacances, j’allais

rendre visite à cette grand-mère maternelle à Milép-vani, son petit village. J’assistais à ses veillées. Elle était formidable, elle avait ce don de conter des heures durant et à emporter les uns et les autres dans son monde. Je m’endormais contre elle en écoutant sa voix me bercer à travers chifchif, Mna Madi, les Dimku… D’ailleurs, mon premier livre sorti il y a vingt ans s’inti-tule tout naturellement « contes de ma grand-mère ». Vous voyez, ces deux femmes m’ont forgé : ma mère m’a transmis l’amour pour l’écrit et ma grand-mère celui de l’oralité.

cP : On sait que la littérature comorienne d’expression française est assez récente. A quel niveau votre œuvre a-t-elle contribué à la vulgarisation de celle-ci ?

S.H : Une des meilleures façons de faire perdurer une littérature, de lui donner une consistance, est d’avoir une littérature jeunesse, car on dit souvent qu’un en-fant qui lit est un adulte qui lira. Je suis aussi auteur jeunesse et c’est une autre manière de «vulgariser» notre littérature. Il faut que nos enfants découvrent

notre culture, notre Histoire, nos richesses... à travers la littérature.

cP : ces derniers temps, de nombreux jeunes comoriens affichent un amour pour l’écriture, quel conseil pourriez-vous leur donner en tant qu’écrivain chevronné ?

S.H : Les mêmes conseils que je donne dans les ateliers d’écriture que j’anime : travaillez, travaillez et travaillez. Une phrase, un paragraphe se travaille encore et encore. On n’écrit pas un livre d’un premier, d’un deuxième ou d’un troisième jet. Il ne faut pas hésiter à mettre à la poubelle un texte qu’on juge mauvais et le recommen-cer. Privilégiez la beauté et la profondeur du texte. Tenez compte des conseils qu’on vous donne et soyez exi-geants avec vous mêmes. Et surtout, après avoir publié un livre, ne vous prenez pas pour le centre du monde ! Soyez humble !

cP : Vous avez animé des ateliers d’écriture et participez à plusieurs activités culturelles aux comores, comment jugez-vous le rapport de la communauté comorienne et la culture en général ?

S.H : que cela soit aux comores ou en France ou dans d’autres pays, ceux qui participent à mes ateliers ou les activités que je mène, manifestent un grand intérêt à l’écriture, à l’oralité… à la culture de façon générale. Et si Dieu me prête vie, je continuerai à aller vers les autres pour ces partages. Ma grand-mère disait «Si tu as un conte et moi un conte, nous avons chacun un conte. Si moi je te raconte mon conte et que toi tu me racontes ton conte, nous avons trois histoires ». La troisième histoire est celle de la rencontre. Voilà pourquoi c’est important de partager. Toujours donner sans rien attendre en retour, sinon on risque d’être déçu. Et je suis toujours heureux de voir que les comoriens, en tout cas ceux que je ren-contre, ont un profond désir de partager notre culture.

cP : Dites nous comment la littérature peut-elle contri-buer au développement d’un pays comme les comores ?

S.H : A cette question, je répondrai surtout par une seule

phrase « Un peuple qui lit est un peuple qui avance » et un peuple qui n’avance pas, qui n’est pas ouvert au monde, comment peut-il se développer ? Au-delà de l’enrichissement de l’esprit, la culture –et j’intègre la littérature dedans bien entendu- génère de la richesse financière et contribue incontestablement au dévelop-pement économique d’un pays. Oui, la culture est un facteur apte à créer des milliers d’emplois et peut aussi être une réelle industrie, mais il faut que les autorités comprennent bien cela et qu’elles impulsent une dyna-mique qui va dans ce sens.

cP : comment jugez-vous l’action des autorités pu-bliques pour la culture aux comores et quel rapport l’écrivain que vous êtes, entretient avec celles-ci ?

S.H : On nous parle d’unité nationale, mais nom de dieu, la base qui cimente nos quatre îles est la culture. Elle me parait, à mes yeux, l’arme efficace pour lutter contre les séparatismes de tous bords et nous permettra de faire de notre archipel une Nation dans chaque esprit et non une espèce de patchwork insulaire. Toutes les constitutions et tous les sommets du monde ne suffiront pas pour as-seoir véritablement notre unité nationale. Tant que nous ne mettrons pas notre culture, cet héritage commun, au cœur de l’éducation de nos enfants, nous continuerons à bricoler. Voilà pourquoi je regrette aujourd’hui qu’il n’y ait pas une véritable politique culturelle avec des réelles ambitions nationales, voire internationales. Nous avons une culture très riche, nous avons des artistes formi-dables, nous avons une population, plus particulière-ment la jeunesse, prédisposée à porter encore loin cette culture… il nous faut impulser une dynamique, disais-je tout à l’heure, et cela doit être porté sur le plan politique. ces derniers temps, des choses formidables naissent comme le festival du cinéma, le festival de l’Art contem-porain, un terrain a donné aux artistes pour construire un centre culturel, en septembre prochain des escales lit-téraires avec des écrivains de tous horizons… Tout cela initié par des comoriens de la société civile mais sou-tenu par notre Ministère de l’Education Nationale et de la culture, ainsi que d’autres institutions comme le ScAc. La numérisation de nos archives au cNDRS, notre Mé-moire donc, est amorcée et cela grâce à Yakina Djailani à qui je rends un très grand hommage et lui témoigne mon soutien. Donc, les choses commencent à bouger dans le bon sens. quant à mon rapport avec les autorités en tant qu’écrivain, je m’exprime, je pointe les choses… Nous y arriverons, j’en suis sûr.

cP : que dites-vous du fait qu’il y a peu ou presque pas d’auteurs nationaux dans le programme scolaire des comores.

S.H : Là encore c’est un réel problème. Et cela doit décou-ler, justement, de cette politique culturelle et éducative qui doit être pensée et mise en place. Nous devons nous approprier notre propre Histoire. comment voulez-vous que nos enfants sachent où ils vont s’ils ne savent pas d’où ils viennent ? ce n’est pas seulement les auteurs nationaux qu’on doit mettre dans les programmes sco-laires, mais toute l’Histoire de notre pays. Nous devons repartir à la reconquête de notre Histoire, que quand on demande par exemple à un enfant «Bwantamu c’est qui ? cela veut dire quoi ntibe ? », qu’il ne te réponde pas «

L’eCriVaiN saLiM HatUBOU repONd aUx QUestiONs de COMOresplus

COMORESplusexpression libre

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Bwantam est un gâteau et ntibe de la viande bouillie !» mais qu’il sache que c’est aussi un guerrier comorien et que ntibe est un titre au temps des sultans, l’équiva-lent de gouverneur aujourd’hui. Il faut absolument qu’on développe la littérature jeunesse dans notre littérature comorienne d’expression française pour que les écoles primaires et les collèges aient accès à notre littérature.

cP : Selon vous, qu’est ce qu’il faut faire pour promouvoir la littérature aux comores ?

S.H : Nous devons installer la lecture au cœur des écoles primaires, familiariser nos enfants avec le livre et ce dès qu’ils sont tout petits. D’abord donner goût à la lecture de façon générale. Nous devons mettre en place des projets autour de la lecture, de l’écriture, de l’oralité… Oui l’ora-lité parce qu’on a tendance à oublier la littérature orale qui est le fondement même de toute littérature parce que les hommes parlent et racontent avant d’écrire et de lire. Je regrette profondément que notre pays soit démuni de véritables infrastructures culturelles notamment de vraies bibliothèques puisque nous parlons de littérature.

cP : Dans le cadre de Marseille capitale européenne de la culture 2013, vous allez présenter la voix du guerrier comorien Kara’, une pièce de théâtre coécrit avec M. Da-mir Ben Ali. Racontez-nous de quoi il s’agit, comment ça s’est passé la collaboration avec M. Damir et comment vous appréhendez cette présentation ?

S.H : Il s’agit d’un projet que je porte depuis 2007 et qui a abouti à un texte que j’ai co-signé avec Damir Ben Ali, un homme formidable à qui les comores doivent beaucoup et que je considère comme mon père spirituel. ce texte raconte comment un guerrier appelé Kari Wa Djae ou Kara, suite à l’assassinat de sa sœur, va quitter Msafumu qui refuse de rendre justice pour aider Said Ali à devenir sultan ntibe de Ngazidja et comment il va s’opposer à ce même Said Ali quand celui-ci signe le Traité de Protec-torat avec la France. Mais attention, attention mille fois, il s’agit d’une histoire et non de l’Histoire. A partir d’un fait historique, nous avons écrit une fiction. ce texte est mis en scène par Julie Kretzschmar avec comme acteurs François Moïse Bamba (dans le rôle de Kara), Soumette Ahmed (dans le rôle de Msafumu et de Said Ali) et Ma-rion Bottolier qui incarne la princesse Anziza, avec des chants de deba par des jeunes filles à grande majorité mahoraise. Bien que l’histoire ne parle que de l’épisode Msafumu-Said Ali, elle évoque aussi le destin de notre archipel. ce texte sera joué les 13 et 14 juin dans le cadre de Marseille capitale de la culture 2013 et il est porté par une équipe internationale, par exemple Fran-çois Moïse Bamba est un acteur-conteur qui nous vient de Burkina Faso. cela me réjouit parce que les comores représentent un carrefour de cultures et nous avons sou-vent tendance à oublier de ramener notre Boutre Komoro vers nos origines africaines, là où tout a commencé.

cP : Vous êtes un auteur engagé et vous avez, par exemple, abordé l’épineuse question de Mayotte dans l’un de vos livres, Hamouro. Ne craignez-vous pas une sorte d’ostracisme dans certains milieux culturels, no-

tamment français, comme l’écrivain Soeuf Elbadaoui ?

S.H : Hamouro n’évoque pas uniquement la question de Mayotte mais celle de la balkanisation générale de notre archipel. ce roman a eu le Prix des Lecteurs de Mayotte et cela me fait un grand plaisir. Je regrette seulement que quand ce livre est sorti, la presse comorienne et des journalistes de la diaspora de l’époque l’ont passé sous silence. Je ne sais pas pourquoi, tiens, alors que les Kwasa-Kwasa, dont j’en parle d’ailleurs, existaient toujours et que les gens continuaient à mourir. qui avait fait écho de ce roman à l’époque ? Personne. quant à la crainte de l’ostracisme, voilà vingt ans que je publie des livres et j’ai abordé plusieurs sujets de société, du mariage forcé au séparatisme, en passant par la discri-mination à l’embauche en France, les filles-mères, les enfants des rues à Moroni… et ce sans aucune conces-sion ni compromis ni autocensure. cependant, je refuse d’avoir un sujet obsessionnel et j’ai toujours assumé mes livres, de la première ligne à la dernière. Je n’en fais pas, pour autant, ni un étendard du chevalier blanc contre les injustices comme si j’étais le seul à le faire, ni un linceul de victimisation personnelle. J’écris. J’écrie. Je crie. Je travaille beaucoup sur la question de la Mémoire parce qu’un pays qui n’entretient pas sa Mémoire est un pays perdu, cela est aussi valable pour les hommes. Pour ceux qui l’oublient souvent, comme dit Ali soilihi, notre Mon-gozi regretté, «l’Histoire est seule Juge ! ». Il ne sert donc à rien aujourd’hui d’indexer tel ou tel sur ce qu’il fait ou ne fait pas.

cP : En tant qu’enfant de la diaspora, quel regard portez-vous sur la communauté comorienne en France, notam-ment la nouvelle génération ?

S.H : J’aimerais, en tant qu’acteur de cette communauté, être optimiste, vous dire que tout va pour le mieux mais je suis mitigé. Il y a une vingtaine d’années, avec des amis comme l’artiste Soly Mohamed Mbaé, Ibrahim M’ze ou Ben Amir Saadi, des hommes incontournables de la communauté comorienne à Marseille, nous tirions déjà la sonnette d’alarme. Nous disions que nos repères, notre identité, nos valeurs qui sont le ciment de notre être et ce même en exil, foutaient le camp. Nous appelions au recentrage de notre communauté, sans pour autant nous ghettoïser. On nous répondait alors « il n’y a pas de pro-blème dans la communauté ! Tout va pour le mieux ! ». Et aujourd’hui terrible est la chute. Il faut qu’on s’assoit, qu’on se regarde dans les yeux et qu’on se dise « il y a un problème !» -quelle communauté n’en a pas d’ailleurs ?- et arrêter de penser que nous sommes imperméables des maux de la société dans laquelle grandissent nos enfants. Guéant nous a stigmatisés, nous avons mani-festé, nous avons exigé des excuses. Et après, qu’avons-nous fait ? La révolte épidermique n’est pas la solution, il faut un travail en profondeur, sur le terrain. Toutefois, dans la communauté beaucoup de choses formidables se font : la nouvelle génération bouge dans tous les sens, dans le bon sens j’entends, que ça soit dans la culture, en politique, dans l’économie… On n’en parle pas assez et c’est dommage. Un jeune des cités abattu pour des histoires louches, qu’il soit comorien ou non, ça fait

plus sensation pour les médias qu’une centaine de ces jeunes qui réalisent des choses extraordinaires au même moment. quitte à me contredire, je dirais que je suis opti-miste pour notre communauté, pour notre diaspora.

cP : que recommanderiez-vous pour une meilleure in-sertion des enfants de la diaspora ?

S.H : L’école, rien que l’école ! Les études sont un outil extraordinaire pour une meilleure insertion. Les parents ne doivent pas ni démissionner ni baisser les bras. Un message à certains pères qui abdiquent : soyez présents pour vos enfants qui ont besoin de vous pour réussir. Les mamans sont formidables mais elles ne peuvent pas tout faire. Nous devons tous prendre nos responsabili-tés. Mais surtout, surtout, pour mieux s’ancrer en France ou ailleurs, nos enfants doivent savoir d’où ils viennent, en être fiers car la honte des origines est l’origine de la Honte. Ils ne doivent pas attendre qu’on leur ouvre les portes, ils doivent les ouvrir, même à coup d’épaules. Ils doivent marcher sans baisser la tête et je cite un grand artiste comorien, mon ami Salim Ali Amir : «Mwana m’komori tsodo dji fahari ! Dji reme yifuba wambé yiho wa puha ! ». Etre profondément comorien n’empêche nullement d’être pleinement Français.

cP : Le mot de la fin ?

S.H : Je fais un rêve qu’un jour nos enfants de Ma-yotte, nos enfants de Mohéli, nos enfants d’Anjouan, nos enfants de la Grande-comores, nos enfants de la diaspora se donneront la main, non pas pour faire une ronde et tourner en rond, mais pour avancer et faire briller notre archipel des îles de la lune. Pour cela, nos enfants doivent circuler d’une île à une autre, qu’il y ait des séjours et des échanges, qu’ils se connaissent. Et nous aurons étouffé ce séparatisme insulaire qui nous empêche de vivre sereinement. Je ne serai peut être pas vivant pour voir cela mais je sais que ça arrivera un jour et je pourrai dormir. Enfin.

cP : Merci M. Hatubou

S.M : Merci à cOMORESplus pour ce que vous faites, vous restez à l’ombre pour nous permettre de regarder le monde sous la lumière. c’est très salutaire. Merci encore.

Propos recueillis par :

ABDOU ELWAHAB MSA BAcAR et SAID YASSINE Said Ahmed

cOMORESplus

juIn 2013

cie l’orpheline est une épine dans le pied

kara’ une epopée comoriennecOMORESPLUS - 3 JUIN 2013

COMORESplusexpression libre

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22 juin cie l’orpheline est une épine dans le pied

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LA PROVENcE - 9 JUIN 2013

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23juIn 2013

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kara’ une epopée comorienneZIBELINE - 10 JUIN 2013

Au Parc du Grand Séminaire, Julie Kretzschmar tire un trait d’union entre Comores d’ici et de là-bas

La Comore s’écritDans le cadre de la 1ère édition du festival Arts Comores accueilli essentiellement dans le Parc du Grand Séminaire, Julie Kretzschmar une fois encore fera office de trait d’union entre Comores d’ici et Comores de là-bas, entre passé et présent, en adaptant librement un texte à multiples facettes, fruit d’un travail littéraire dirigé de Marseille par Salim Hatubou associé à l’anthropologue et universitaire Damir Ben Ali. Oralité, souffle épique, histoire, mémoire et métaphore se croisent pour dire la geste sanglante de Kara’, guerrier qui fait chuter le dernier sultan de la Comore libre et ouvre ainsi la voie au protectorat français. Récits collectés et danse traditionnelle (le deba de Mayotte hérité du soufisme) se glisseront dans les interstices du poème comme se mêleront acteurs professionnels et amateurs pour faire vivre haut et en couleurs une épopée de l’avant et du maintenant.Entrée libre sur réservation, navettes RTM à partir du Centre Ville.

MARIE-JO DHO

Les 13 juin et 14 juinParc du Grand Séminaire04 91 64 60 00http://lesbancspublics.com

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24 juin cie l’orpheline est une épine dans le pied

kara’ une epopée comorienne

MARSEILLE L’HEBDO - 12 JUIN 2013

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25juIn 2013

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kara’ une epopée comorienneMARSEILLE L’HEBDO - 12 JUIN 2013

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26 juin cie l’orpheline est une épine dans le pied

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LA MARSEILLAISE - 12 JUIN 2013

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27juin cie l’orpheline est une épine dans le pied

kara’ une epopée comorienne

AMINA - AOûT 2013

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28août 2013

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kara’ une epopée comorienneAMINA - AOûT 2013