extrait de la publication… · du mÊme auteur poèmes (au sans pareil), 1914-1925. 14'...
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FRANCE
LA DOULCE
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DU MÊME AUTEUR
Poèmes (Au Sans Pareil), 1914-1925. 14' édition.TENDRES STOCKS (Nouvelle Revue Française), 1921.
21* édition.
OUVERT LA NUIT (Nouvelle Revue Française), 1922.135' édition.
Fermé LA NUIT (Nouvelle Revue Française), 1923.85' édition.
LEWIS ET Irène (B. Grasset), 1924. 116* édition.FLÈCHE D'ORIENT (N. R. F.), 1931. 75* édition.Rococo (B. Grasset), 1933, 36' édition.
CHRONIQUE DU XX' SIÈCLE
I. L'EUROPE GALANTE (Europe) (B. Grasset), 1925.118' édition.
II. BOUDDHA VIVANT (Asie) (B. Grasset), 1927. 124* éd.III. MAGIE Noire (Afrique) (B. Grasset), 1928. 120' éd.IV. CHAMPIONS DU MONDE (Amérique) (Br Grasset),
1930. 100e édition.
PORTRAITS DE VILLES
NEW-YORK (Flammarion). 1929, 273' édition.
LONDRES (Plon). 1931. 102' édition.
VOYAGES
RIEN QUE LA TERRE (B. Grasset), 1926. 100* édition.LE VOYAGE (Hachette), 1927. 20° édition.
HIVER CARA1BE, documentaire, 1929 (Flammarion).54' édition.
Paris-Tombouctou, documentaire (Flammarion),1928. 80' édition.
DIVERS
PAPIERS d'identité (B. Grasset), 1931. 40" édition.1900. (Editions de France). 100' édition.
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PAUL MORAND
FRANCE
LA DOULCE
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GALLIMARD
L'édition originale de cet ouvrage a été tirée à neufcents exemplaires et comprend cent vingt exem-plaires sur vélin pur fil Lafuma-Navarre dont vingthors commerce marqués de a à t et cent exemplairesnumérotés de 1 à 100 cinq cent trente exemplairessur alfa Navarre dont cinq cents numérotés de 101à- f)00 et trente exemplaires d'auteur hors commercenumérotés de i à xxx; deux cent cinquante exemplai-res sur alfa Navarre numérotés de 601 à 850, réservés
aux Sélections Lardanchet.
Tous droits de reproduction, de traduction et d'adap-tation réservés pour tous les pagsg compris la Russie.
Copyright by Librairie Gallimard, l'J3i.
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AVIS
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Il y a déjà, en littérature, les mémoires d'unâne, l'histoire d'un chat, les souvenirs d'un rat,
les lettres d'une poupée, les confidences d'unsofa. On trouvera ici les mésaventures d'une
traite. Je n'ai pas cru devoir f aire parler à la
première personne ce malheureux papier decommerce, tant son itinéraire misérable me
semblait, en soi, éloquent; cet itinéraire dé-crit la jungle financière de certains milieux
cinématographiques, qualifiés, on ne sait troppourquoi, de français.
« C'est curieux, dira-t-on, mais cela ne
peut être vrai. La f olie des chiffres, l'extrava-
gance des sentiments, la con f usion des natio-
nalités, le mépris pour nos mœurs, les tortures
infligées à notre langue et à notre culture,
tout ceci est imaginaire. » Or, non seulement
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je n'ai rien inventé, mais je me suis souventtenu en deçà du réel.
Si j'ai pu rendre ainsi un indirect hommageà nos rares producteurs et servir la-cause des
metteurs en scène français, amis d'une élite,dont le nom sonne net et dont la grâce trouve
en nous de récho, si j'ai pu montrer en liberté
quelques-uns des pirates, naturalisés ou non,qui se sont frayé un chemin, parmi l'obscuritéde l'Europe Centrale et du Levant, jusqu'aux
lumières des Champs-Elysées, je ne regretterai
rien, dussé-je être accusé de nationalisme malplacé.
J'insiste là-dessus. Dans un article qui a faitquelque bruit (écrit plusieurs mois avant queles démagogues eux-mêmes f issent appel à lavertu), je dénonçais certains crimes ignobleset trop souvent impunis; je ne m'attendais
pas alors, je l'avoue, à ce que tant de gens sesentissent visés et f issent les hauts cris. Ils ont
feint de se, méprendre et de croire que jetournais au puritain « Hé quoi! l'auteur
d'Europe galante voudrait, nouveau Savona-role, empêcher les amants d'embrasser leur
maîtresse! » Sans doute, après France-la-
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Doulce, vont-ils crier, avec une égale bonne
loi: « Quoi l'auteur de Rien que la terre veutmaintenant, nouvelle Jeanne d'Arc, bouter les
étrangers hors de France » Pour prévenir ces
malentendus, je déclare que la racaille quigrouille ici n'a aucun rapport avec les grandsnoms internationaux de l'art que nous avons
accueillis à leur passage. Je demande seule-
ment pour nos compatriotes une place, une
toute petite place dans le cinéma national. Endéfendant les Français, je revendique simple-
ment pour eux le droit des minorités.
s-
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Central 06-19? M. Jacobi? Ici, Amar.
Venez me retrouver au sous-sol du Colisée, prèsde la volière, vous savez? C'est urgent. J'aipour vous quelque chose d'assez beau.
Amar, ancien prélat mitré de Mirditie,rendu, à la suite de diverses aventures, à la vie
civile, vivait à Paris de commissions, de raco-
lages, de démarchages; il surclassait les centmille autres Orientaux qui y font le même mé-
tier par beaucoup de majesté, le goût du mys-tère et un grand usage du monde officiel; aprèsdes années de couloir dans les ministères, Amar
connaissait l'administration française comme
personne, et il était l'ami de tous les huissiers.
T.ES JEUX DU COLISÉE
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Monsieur Jacobi, il faut absolument faireun film!
C'est pour ça que vous me dérangez?.Qu'apportez-vous?
Un sujet.Un sujet de film? On s'en fout.
Non. Par sujet, je voulais dire un grand
nom. Ce n'est qu'un nom, mais il est de taille.Apporter un grand nom au cinéma? Mais
c'est le cinéma, seul, qui fait les grands noms.Dites tout de même?
Chut! Approchez. Le roi d'Espagne!Hein?
C'est fait. Vous pensez bien que je ne
vous dérangerais pas pour rien. Je l'ai souscontrat.
Comment avez-vous pu vous procurer
ça?
C'est mon métier. Tenez, voici le papier,lisez vous-même Don Alfonso. Bourbon.
Elysées 46-40? Kalitrich? Ici Jacobi.Descendez donc tout de suite au sous-sol du
Colisée, près de la volière. C'est très urgent.
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M. Jacobi et M. Kalitrich, celui-ci tout es-soufflé, examinèrent le contrat.
Qu'est-ce que vous dites de ça?Avec la rapidité de coup d'œil d'un homme
dont la vie s'était passée à exploiter les idéesdes autres, Kalitrich conclut
C'est un coup de dix millions. si on réus-sit.
Mais j'ai réussi. Vous pouvez trouver surce nom-là, en Amérique, les capitaux que vousvoudrez. Toutes les banques vous prêteront,même le Crédit Lyonnais, répliqua Amar, en lefixant de ses yeux de risque, de vice et d'ex-périence, de ses yeux jaunes, troubles comme
l'ambre d'un chapelet oriental.Avez-vous assez de confiance en moi pour
me confier votre papier pendant un quartd'heure? demanda Kalitrich.
Certainement, répondit Amar. Cepen-dant, si vous voulez bien, je vous accompa-gnerai.
Le contrat est sans doute excellent, puis-qu'il est de vous, mais je voudrais faire véri-fier la signature. Au Meurice, à la Réception,j'ai un ami qui fut longtemps attaché au ser-
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vice de la Maison d'Espagne. Nous serons fixésen quelques instants. Au besoin, il téléphoneraà Fontainebleau.
Je vous attends, fit M. Jacobi.
Et alors?
Alors, Amar a été fait comme un rat!Et Kalitrich se laissa tomber dans un fau-
teuil de cuir rouge.
Quoi?Ce n'est pas le roi d'Espagne! Il y a des
tas de Bourbons, vous savez ça aussi bien quemoi. C'est un de ces vagues Don Alfonso qui
doivent de l'argent à tous les portiers de ca-sinos. C'est manqué. Je vous quitte.
Amar replia son contrat.Ce n'est pas une Majesté, peut-être, mais
c'est tout de même un nom royal dont vous
pourriez tirer quelque chose, je vous assure,si vous saviez vous en servir. Et ce n'est pasle seul. Mlle Sylviane, de la Comédie Fran-
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çaise, sur elle aussi j'ai une option. Elle estvierge, cinématographiquement parlant. Or,c'est la fille naturelle de Dubuffet, qui en cemoment fait son cabinet de concentration et
qui va être Président du Conseil d'ici deuxmois.
Et l'argent?Je ne vous apprendrai pas, monsieur Ka-
litrich, que ce n'est pas avec de l'argent qu'onfait des films, que c'est avec des traites. Mais,puisque vous voulez de l'argent, eh bien soit!je peux vous en trouver, moi, du tout frais. Ilne sera pas dit que je vous aurai dérangés pourrien, tous deux. Je connais un Français, un
très beau nom, noblesse bretonne, qui voit très
large, qui connaît la vie et qui veut justementmettre des capitaux dans un film.
Il connaît la vie et il veut mettre des ca-
pitaux dans un film! interrompit Jacobi, enriant.
Amar n'est jamais à bout de ressources.Comment faites-vous donc, Amar?
Je ne dors jamais. Ce Français-là non
plus d'ailleurs ne pouvait pas dormir. Je l'airencontré par hasard, ces jours-ci. Nous nous
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promenons ensemble la nuit. Il est encore
jeune, assez risqueur. C'est un ancien combat-tant, un officier. Il a beaucoup vécu à l'étran-ger il a dépensé deux fortunes; il me raconte
ses voyages, ses histoires de famille, et nous
arrivons ainsi à attraper le petit jour. Je vousl'amène.
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