ethique des affaires a madagascar
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UNIVERSITE D’ANTANANARIVO
FACULTE DE DROIT, D’ECONOMIE, DE GESTION ET DE SOCIOLOGIE
DEPARTEMENT DROIT OPTION DROIT DES AFFAIRES
Mémoire en vue de l’obtention du Diplôme d’Etudes Approfondies (DEA) en Droit des Affaires
Présenté par :
RAZAFINDRAINONY Vololomihanta Fernande
Encadreur pédagogique : Monsieur RAMAROLANTO-RATIARAY
Date de soutenance : 06 Mai 2010
Année Universitaire : 2008-2010
ETHIQUE DES AFFAIRES
A
MADAGASCAR
« Sans des valeurs et des obligations morales partagées par tous et profondément ancrées, ni la loi, ni un gouvernement démocratique ni même une économie de marché
ne pourront fonctionner correctement ».
Václav Havel 1936, écrivain, Défenseur des Droits de l’Homme et Président de Tchécoslovaquie et plus tard de la République Tchèque
« Mes vifs remerciements s’adressent à ceux qui ont contribué de près ou de loin
à l’élaboration de ce mémoire.
Qu’ils retrouvent ici l’expression de ma gratitude »
LISTE DES ACRONYMES AQUALMA Aquaculture de Mahajanga
AXIUS AXIUS Holding Société Anonyme
AMF Autorité des Marchés Financiers
BIANCO Bureau Indépendant Anti-Corruption
CNIL Commissions Nationales de l’Informatique et des Libertés
CECM Coalitions d’Entreprises citoyennes de Madagascar
CNaPS Caisse Nationale de Prévoyance Sociale
DOS EDBM
Déclaration d’opérations suspectes Economic Development Board of Madagascar
EGMONT
Institut Royal des Relations Internationales
FHORM
Fédération des Hôteliers Restaurateurs de Madagascar
GAFI Groupe d’action financière international
ONE Office Nationale pour l’Environnement
OCDE Organisation de Coopération et de Développement Economique
ONU Organisation des Nations Unies
SEC Securities Exchange Commission
SRF Service des Renseignements Financiers
SOMMAIRE
REMERCIEMENTS LISTE DES ACRONYMES SOMMAIRE RESUME
INTRODUCTION …………………………………………………………………………………………………..
1
TITRE PRELIMINAIRE – GENERALITES …………………………………..............................
3
TITRE I - ETHIQUE AU TRAVERS DES PRINCIPES DU DROIT DES AFFAIRES………………………………………………………………….......................................................
14
CHAPITRE I-ETHIQUE APPREHENDEE PAR LE DROIT DES AFFAIRES………………………………………………………………………………………………………………
15
Section 1 - Rapport complexe entre le droit et la morale…………………………........................ 16 Section 2 - Relation affirmée entre l’éthique et le droit des affaires…………......................
20
CHAPITRE 2 – ETHIQUE APPREHENDEE PAR LE JUGE ………………………… 45 Section 1 – Ethique perçue par le juge français……………………………………………………….. 45 Section 2 – Ethique perçue par le juge malgache………………………………..................................
48
CHAPITRE 3 – PORTEE DES APPROCHES ETHIQUES PAR LES PRINCIPES DU DROIT DES AFFAIRES…………………………………….................................
51
Section 1 – Renforcement des considérations éthiques du droit des affaires…………... 52 Section 2– Réalités des approches éthiques par les principes du droit des affaires…
80
TITRE II – ETHIQUE AU TRAVERS DE LA PRATIQUE DES AF FAIRES 90 CHAPITRE 1– ETHIQUE ET LES ENTREPRISES ………………………………………... 91 Section 1– Formalisation de l’éthique par la mise en place d’un code de conduite… 92 Section 2– Avènement de la responsabilité sociale de l’entreprise………………................. 100 Section 3– Portée de l’approche éthique par les entreprises……………………………………. 104 CHAPITRE 2– ETHIQUE ET LES POUVOIRS PUBLICS …………………………….. 111 Section 1– Bureau Indépendant Anti-Corruption…………………………………………………….. 111 Section 2– Services des Renseignements Financiers……………………………………………….. 113 CONCLUSION……………………………………………………………………………………………………….
116
BIBLIOGRAPHIE ……………………………………………………………….................................................... 120 ANNEXES…………………………………………………………………………………………………..................... 125 TABLE DES MATIERES ………………………………………………………...............................................
148
RESUME
Thème : Ethique des affaires à Madagascar
Auteur : RAZAFINDRAINONY Vololomihanta Fernande
Nombre de pages : 151 pages
Résumé :
La conquête des affaires par l’éthique reste problématique aussi bien dans les pays
développés que dans les pays en voie de développement. S’agissant principalement de
Madagascar, les avis sont également partagés. Cette étude a permis de mettre en
exergue que l’éthique imprègne le monde des affaires. A titre d’illustration, certaines
disciplines du droit des affaires présentent des dimensions éthiques. Etant ouvert aux
influences internationales, les perspectives d’appropriation par Madagascar des
concepts telles la gouvernance d’entreprise et l’alerte éthique semblent envisageables.
En effet, ces procédés ont apporté des changements concrets au niveau du droit des
sociétés et du droit du travail car ils s’inscrivent dans un souci de moralisation de ces
domaines. Dans cette optimisation de l’éthique, de nombreux acteurs jouent également
un rôle fondamental. Citons notamment l’intervention du juge investi d’une mission de
garant des libertés et du respect des valeurs morales. On distingue également la
participation active des entreprises dont le souci d’éthique se manifeste par l’avènement
des codes de conduite et la prise de conscience d’une nouvelle responsabilité sociale qui
pèse sur elles. L’éradication des fléaux tels la corruption et la lutte contre le
blanchiment d’argent marquent également la ferme volonté des pouvoirs publics à
instaurer un climat sein dans les affaires. Notons que de nombreux obstacles persistent
et des impératifs moraux peinent à s’appliquer dans les affaires. Ainsi, la présence et
l’effectivité de l’éthique dans les affaires nécessitent des efforts considérables. Une
législation contraignante ne suffit pas à assurer son respect. La volonté demeure
l’élément fondamental qui conditionne son succès.
Mots-clés : éthique, morale, droit, éthique des affaires, droit des affaires, code de
conduite, responsabilité sociale des entreprises
1
INTRODUCTIONINTRODUCTIONINTRODUCTIONINTRODUCTION
On reconnaît le champ de l’éthique limité à la sphère personnelle de l’individu. Son
objectif est d’orienter leurs actes vers une ligne de conduite morale. Force est de constater que
son domaine d’intervention s’est élargi dans plusieurs secteurs. A titre d’exemple, elle occupe
une place privilégiée dans les recherches scientifiques et au sein des professions médicales.
A priori, les affaires semblent ne pas se familiariser avec le concept d’éthique. « Les
affaires sont les affaires », « l’argent n’a pas d’odeur », « plaie d’argent n’est pas mortelle »,
autant d’adages célèbres qui illustrent l’amoralité des affaires. Ces prétextes sont également
défendus pour déculpabiliser certains actes ne répondant pas à l’impératif éthique.
Ce constat est relatif car l’éthique tend à s’imposer au sein des affaires. L’introduction
de l’éthique dans les affaires, qui a pris forme aux Etats-Unis, ne manqua pas de gagner les
frontières de nombreux pays. Cette attention révèle qu’elle constitue un sujet de réflexion à
l’échelle internationale.
Il est vrai que l’évocation même de l’éthique suscite un intérêt particulier vu la
moindre importance accordée à ce terme, voire même son ignorance de la part des principaux
concernés. D’une manière générale, cela signifierait que la conduite des affaires devrait se
dérouler selon un comportement respectueux des valeurs morales et par la prise de conscience
de chaque auteur économique de la responsabilité de ses actes.
Bien que cette conception semble ambigüe, les réalités socio-économiques révèlent
des faits que l’opinion publique ne peut plus tolérer. En effet, certains comportements
prennent parfois des proportions considérables dont les conséquences s’avèrent néfastes sur la
société.
Parmi les scandales récents, on peut citer celui de la multinationale NIKE dont les
méthodes de production avaient heurté sensiblement la moralité publique ; en effet, les sous-
traitants asiatiques avaient employé des enfants mineurs dans leurs usines.
De ce qui précède, l’éthique répond ainsi aux exigences non seulement des affaires,
mais également aux attentes de la société civile. Et chaque pays, selon leurs coutumes, prend
en compte ce besoin de transmission de valeurs morales.
S’agissant de Madagascar, la célèbre valeur traditionnelle malgache « Fihavanana »
est très présente dans le quotidien de sa population. Cette valeur exprime le respect envers
l’autre, l’entraide et la solidarité qui doivent animer chaque malgache dans ses actions.
2
Cependant, la croissance économique, l’ouverture de ses frontières, le courant de
mondialisation qui traverse le pays conduisent au déclin de cette structure traditionnelle. Le
changement subi par le pays a corollairement entraîné le changement de mentalité de certains
acteurs engagés dans le circuit économique.
A ce stade, une interrogation s’impose. L’éthique des affaires existe-elle à
Madagascar ? Si oui, de quelle manière se manifeste-elle ? Si non, quelles seraient les causes
de son absence ?
Afin de répondre à cette problématique, notre étude s’articulera autour de trois points :
Le premier point se propose de développer les généralités qui entourent le concept
d’éthique des affaires.
Les manifestations de l’éthique au travers des principes du droit des affaires fera
l’objet du second point. Il traitera en profondeur dans quelle mesure le droit des affaires et le
juge prennent en considération cet impératif éthique.
Il sera étayé dans le troisième point de cette étude de la manière dont les acteurs
économiques participent également à l’optimisation de l’éthique. En effet, les entreprises et le
pouvoir publics tiennent une place importante dans son effectivité.
3
TITRE PRELIMINAIRETITRE PRELIMINAIRETITRE PRELIMINAIRETITRE PRELIMINAIRE : GENERALITES: GENERALITES: GENERALITES: GENERALITES
Le recours à la notion d'éthique des affaires répond sans nul doute à une vraie
revendication dans une économie caractérisée par une évolution et une complexité
croissantes.
D’où les questions émergent quant à l’avènement de l’éthique des affaires. Vu le grand
intérêt qu’elle suscite, nous allons largement développer le concept d’éthique des affaires
ainsi que ses particularités afin de pouvoir juger sa légitimité au sein des affaires.
A- Concept d’éthique des affaires
Pour plus d’éclaircissement, il convient de dégager ses notions voisines. En effet,
l’éthique, la morale et la déontologie sont inhérentes à la bonne marche de la société et de
l’économie. Mais nous verrons que parmi ces trois expressions, c’est le terme éthique qui est
fréquemment utilisé. La possibilité d’une éthique des affaires appelle toutefois au départ à une
définition de la notion.
1- Notions voisines
Logiquement, quand on parle d’éthique, il s’accompagne d’autres expressions de la
même famille telles la morale ou la déontologie. Ces termes présentent effectivement une
uniformité de sens mais une distinction est néanmoins nécessaire afin d’éviter toute
confusion. Nous passerons ainsi en revue leurs définitions.
a- Ethique, morale et déontologie
Bien que ce qui nous intéresse soit l’éthique des affaires, il s’avère cependant essentiel
d’examiner l’éthique dans son sens général et d’appréhender la morale et la déontologie. En
raison de leur confusion fréquente, celles-ci méritent quelques précisions. Ces trois mots ont
en commun de faire référence à ce qu’il faut faire ou ne pas faire.
Le concept d’éthique vient du grec « ethos» qui signifie « mœurs, habitude,
comportement », il s’agit de «l’ensemble des principes qui sont à la base de la conduite de
chacun »1.
La morale qui vient du latin « mores » qui signifie « mœurs » peut être définie comme
« l’ensemble des règles de conduite socialement considérées comme bonnes »2.
1 Cf. VERDIER Pierre « Morale, éthique, déontologie et droit », Les Cahiers de l'Actif - N°276/27, p.18
4
La déontologie quant à elle se définit comme « un ensemble de règles dont se dote une
profession, ou une partie de la profession, au travers d’une organisation professionnelle, qui
devient l’instance d’élaboration, de mise en œuvre, de surveillance et d’application de ces
règles »3.
Cependant, on peut noter l’étroite relation qu’elles entretiennent entre elles, « la
morale, science du bien et du mal, permet de dégager une éthique qui est un art de diriger sa
conduite, qui s’exprime dans les principes guidant les aspects professionnels de ce
comportement : la déontologie » 4.
On distingue facilement la déontologie des deux autres notions par sa sphère
d’application. En effet, on reconnait à la déontologie un domaine restreint à une branche
d’activité ou à une profession. Par contre, l’éthique et la morale font l’objet de confusion
fréquente.
b- Confusion fréquente entre l’éthique et la morale
En effet, on peut difficilement circonscrire le champ d’application de l’éthique et de la
morale tant leurs sphères d’influence sont vastes. De plus, ils font l’objet de confusion
fréquente. Certains sont enclins à les confondre, d’autres s’opposent à leur assimilation.
Dans le langage commun, l’éthique est synonyme de morale, donc ces deux termes
utilisés de manière interchangeable.
Pour ceux qui militent en faveur de leur distinction « la morale a été associée aux
religions et l’éthique à la sphère laïque »5.
Les partisans allèguent également que la morale est imposée de l’extérieur et propre à
un groupe ou à une collectivité, alors que l’éthique correspond principalement à une démarche
volontaire et relève uniquement de l’individu. Ensuite, pour le philosophe André Comte
Sponville : "la morale commande et l'éthique recommande"6. Cette dernière affirmation
mérite de plus amples éclaircissements.
2 Cf. op.cit, p.18 3 Cf. MERCIER Samuel, «l’éthique dans les entreprises », fiches de lecture de la chaire DSO, 2000-
2001 4 Cf. op.cit 5 GAGNON Daniel, Séminaire de lecture rapide, « À propos des accommodements raisonnables, de la
laïcité et d'une morale moderne », article vu sur le site http://www.lecturerapide.info/2006/02/a_propos_des_accommodements_ra.html
6 OBIN Jean-Pierre, « Les enseignants entre morale, éthique et déontologie », article pour Education et
management, février 1994
5
La morale se compose de règles prédéfinies qu’on doit respecter, des comportements
et des attitudes qu’on doit obligatoirement adopter. En effet, elle se réfère aux notions
obsolètes du bien et du mal. On pourrait accuser le flou véhiculé par ces notions. Personne
n’est habilité à les définir de manière exacte. S’y référer semble d’ailleurs ne plus être en
mesure de répondre réellement aux problèmes qui se posent.
« L’éthique ne pose pas la question du Bien et du Mal qui est celle de la Morale (…).
La visée de l’éthique n’est pas le Bien, puisque justement la réflexion éthique s’engage, par
définition, quand on ne sait plus ce qui est bien, quand on a perdu les repères »7. Ainsi,
l’éthique se réfère plutôt à une analyse, à un discernement de ce qui est acceptable et de ce qui
ne l’est pas, de ce qui est bon ou mauvais. Ces valeurs relatives révèlent ainsi que l’éthique est
moins idéaliste mais relève particulièrement de la pratique. Elle est loin d’imposer une série
d’interdits comme la morale. Elle consiste en une appréciation critique de la moralité de nos
actions et d’une évaluation de ses conséquences sur soi et sur les autres.
Pour reprendre les mots du professeur Emmanuel D.Tehindrazanarivelo, « la morale
impose, l’éthique propose. La morale contraint la liberté, l’éthique, par contre l’interpelle »8 .
La distinction entre la morale et l’éthique se renforce encore plus quand on constate
l’effacement progressif du terme « morale » au profit du terme plus actuel d’« éthique ».
a- Préférence pour le terme éthique
Comme il a été développé précédemment, la morale évoque quelque chose de plus
rigoureux alors que l’éthique présente une connotation plus souple. « Faire la morale » est
une expression connue de tous qui véhicule une connotation de jugement et renvoie à une
série d’interdits et d’obligations.
La préférence au terme éthique est d’ailleurs palpable. On assiste au fil des années à
l’avènement d’activités qui sont conditionnées principalement par cette valeur. Son usage par
l’Etat, la médecine, les médias, la recherche scientifique et sa récupération par les affaires fait
ressortir l’intervention de l’éthique dans des domaines larges.
Cependant, en vue d’éviter les difficultés d’ordre terminologique, les termes
« éthique » et « morale » seront utilisés de manière identique, indépendamment de leur 7 BOUNON Laurence « Les rapports entre Ethique, Morale, Déontologie, Droit et Loi », article visible
sur le site http://www.usp-lamirandiere.com/morale_lb.htm 8 D.TEHINDRAZANARIVELO Emmanuel, « Quid et pourquoi l’éthique ? » Mada Business Journal,
novembre 2008, p.22
6
différence ou de leur ressemblance. P.LE TOURNEAU le confirme d’ailleurs, « Peu
importe : ils ont exactement la même signification ; tous deux désignent une considération
régulatrice des comportements »9. Ainsi, nous prendrons en considération leur
complémentarité et leur objectif commun : désigner ce qu’il faut faire ou ne pas faire. Etre
moral ou éthique, c’est reconnaitre l’autorité de valeurs morales, c’est-à-dire les respecter et
les appliquer dans l’accomplissement de nos actions.
C’est ce principe qui retiendra notre attention et il nous appartient de juger de sa
pertinence au sein des affaires. L’éthique et les affaires sont-elles complémentaires ou
contradictoires ?
Une telle interrogation doit passer préalablement par une définition de l’éthique des
affaires.
2- Essai de définition de l’éthique des affaires
Il n’existe pas de consensus quant à la définition de l’éthique des affaires. La notion en
elle-même est vague, elle varie selon les cultures et les individus rendant ainsi difficile une
définition claire et précise.
Nombreux sont les chercheurs et praticiens qui ont tenté de fournir une définition
universelle de l’éthique des affaires. Actuellement, une panoplie de définitions circule, le
terme est sujet à plusieurs interprétations de la part des auteurs. Cela contribue certes à
enrichir cette notion, mais parallèlement, à la rendre aussi de plus en plus complexe.
Toutefois, il faut mentionner que la majorité des définitions, aussi disparates soient-
elles, convergent sur une idée unique : la régulation des comportements par l’intégration de
principes moraux dans le monde des affaires.
Les Etats-Unis font figure de pionniers dans la promotion de l’éthique des affaires.
Aussi, on s’attachera à leur définition qui est la suivante : « Business ethics is rules,
standards, codes, or principles which provide guidelines for morally right behavior and
truthfulness in specific situations».10 Une sémantique nord-américaine développe cette notion
plus en détail en arguant ses composantes : « une éthique réactive ou défensive qui vise à
éliminer des attitudes discutables ou condamnables, et une éthique proactive qui tente de 9 Cf. LE TOURNEAU Philippe « Existe-il une morale en droit des affaires ? », la morale et le droit
des affaires, Montchrestien, 1996, p.7 10 Cf. Thèse de MORNEAU Catherine « l’éthique dans les entreprises multinationales: une étude
développementale des codes d’éthique », janvier 2006
7
créer de nouvelles attitudes plus conformes à ce qui est souhaitable dans le monde des
affaires »11.
Une approche européenne de l’éthique des affaires avance qu’elle apparait comme un
« instrument d’humanisation des relations et de correction des déséquilibres nuisibles à la
pérennité du système de l’économie de marché »12.
On constate ainsi que par éthique des affaires, deux observations s’imposent :
D’une part, elle désigne d’abord un certain nombre de règles qui gouvernent les
actions des acteurs économiques.
D’autre part, elle désigne des comportements qui guident leur conduite en vue de
distinguer la bonne et la mauvaise façon d’agir. Cette combinaison doit tenir compte de
l’intérêt collectif et dépasser leur propre intérêt personnel.
L’éthique des affaires exerce ainsi une influence sur les moyens employés et les fins
visées par les entreprises dans l’exercice de leur activité.
Cet objectif ambitieux invite principalement à une reconversion des comportements
des acteurs économiques. Ce qui rend l’éthique des affaires d’autant plus particulière.
B- Particularités de l’éthique des affaires
L’éthique appliquée aux affaires ouvre ainsi à tout homme d’affaires à une réflexion
critique quant à ses pratiques professionnelles, c’est-à-dire sur leur moralité ou tout au moins
leur convenance à l’égard des valeurs de la société.
En effet, faire des affaires rime avec les responsabilités qui en découlent. Il lui
appartient donc d’évaluer éthiquement les situations concrètes qui se présentent dans la vie
des affaires. Confronté à des choix dans la conduite de son entreprise, l’acteur économique se
doit de prendre le bon choix en toute liberté d’action.
Cette particularité se manifeste notamment au niveau de ses fondements et de ses
objectifs.
11 VERNA Gérard : « éthique réactive ou proactive : les victimes et les barbares », Revue éthique des
affaires, volume 1, n° 5, octobre 1996 12 Définition de PIRAVANO et SALAH reprise par DEKEUWER-DEFOSSEZ Françoise, « Droit
commercial : activités commerciales, commerçants, fonds de commerce, concurrence, consommation», édition
Montchrestien, 4ème édition, p.29, n°XXXXI
8
1- Fondements de l’éthique des affaires
L’éthique des affaires est un sujet qui se situe aux frontières de la philosophie. Il
résulte de différentes pensées philosophiques dont on retrouve deux courants qui s’opposent :
-la morale élaborée par Emmanuel Kant ou « la morale Kantienne »13 qui met l’accent
sur le devoir. Elle ne se réfère pas au résultat mais attache particulièrement d’importance à
l’intention. C’est par l’intention qu’on reconnait qu’un acte est éthique ou non.
-ensuite, celle élaborée par John Stuart Mill ou « l’utilitarisme »14. Selon lui, c’est le
but recherché qui rend une action bonne et non la conformité au devoir. Elle prend en
considération le résultat d’une action. Il s’agit d’évaluer ce qui est éthique en prenant en
compte ses conséquences et non son intention.
Dans notre société actuelle, ces deux courants de pensée coexistent.
A titre d’illustration, le fait de recourir à la notion de bonnes mœurs. En effet, on
évalue la moralité d’une action par ses conséquences éventuelles sur les bonnes mœurs.
La morale élaborée par Kant trouve également application dans les codes
déontologiques spécifiques à certaines professions. Ils mettent en exergue les engagements
que doivent prendre les destinataires de ce code entre eux et à l’égard des autres.
Ce constat s’explique par la spécificité des objectifs que vise l’éthique des affaires.
13
Cf. « Ethique dans une organisation, Proposition d’analyse pour la qualité sociale et
environnementale en entreprise », document extrait de la thèse professionnelle réalisée et présentée en février
2004 par Marie Françoise Clamens dans le cadre de la préparation au Master Spécialisé en Management de
l’Innovation, de la Qualité et de l’Environnement (2002/2003), License « Creative Common Developing
Nation », p.8 14
Op.cit, p.9
9
2- Buts poursuivis par l’éthique des affaires
Selon Philippe LE TOURNEAU15, on peut regrouper le but de l’éthique des affaires
en deux catégories à savoir :
- la reconnaissance de la dignité de la personne humaine, qui est une notion
philosophique. Elle est l’affirmation de la spécificité de l’homme: l’homme est homme et
pour cette seule raison, il est doté d’une valeur absolue dont le respect s’impose à tous, y
compris à lui-même. La primauté de l’homme et de ses conditions constitue le principe
fondamental même de l’éthique. Dans les affaires, l’homme en question peut être perçu de
manière extensive. On distingue entre autres les salariés, les clients, les consommateurs mais
aussi les concurrents.
- la prise en compte du bien commun, l’éthique des affaires prône la conciliation des
intérêts en présence, c’est-à-dire nonobstant ses propres intérêts, l’acteur économique doit les
harmoniser avec ceux des partenaires à l’intérieur ou hors de l’entreprise. La prise en compte
du bien commun soutient ainsi que le profit engrangé par l’entreprise ne saurait être le but
principal d’une entreprise. De manière concrète, le chef d’entreprise devra tenir compte par
exemple de l’environnement et de la collectivité dans laquelle il évolue.
- Ajoutons toutefois une troisième subdivision qui constitue le rouage essentiel à la
réalisation et à la sauvegarde de ces principes précités, leur application concrète. En effet, il
ne suffit pas de citer ces objectifs, il faut également les mettre en pratique et s’assurer de leur
effectivité.
Cependant, le décalage entre la théorie et la pratique est flagrant. En effet, la volonté
des acteurs économiques reste déterminante pour que ces principes se concrétisent. D’ailleurs,
on a pu constater que l’éthique des affaires suscite en particulier l’intérêt des philosophes
mais pas de ceux qui sont qui sont au cœur de la question à savoir les hommes d’affaires.
Ainsi, force est de constater que l’éthique reste une notion controversée quant à sa
légitimité au sein des affaires.
15 Cf. LE TOURNEAU Philippe, op.cit., p.15-16
10
C- Légitimité de la place de l’éthique dans les affaires
Il fait l’objet de polémique, le monde des affaires est par essence gouverné par la
recherche de profit et la spéculation.
Un thème aussi épineux que l’éthique des affaires a engendré des controverses quant à
son appréciation.
On peut distinguer deux approches:
- La première soutient que l’éthique ne doit jouer aucun rôle dans les affaires et que le
seul rôle d’une entreprise est de réaliser des bénéfices dans le cadre de la loi. En bref,
l’éthique n’a pas sa place dans les affaires. Certains auteurs avancent même que le monde des
affaires est « amoral ». Cela signifie que les affaires ne prennent en considération ni le bien ni
le mal, c’est-à-dire l’absence complète de préoccupation éthique dans sa sphère d’application.
- La deuxième approche s’attarde sur son utilité. Une attitude éthique, non seulement
stimule les affaires, mais concoure également à son succès. L’émergence de l’éthique des
affaires, cette nouvelle morale, s’avère pertinente dans le milieu.
1- Non-conciliation de l’éthique avec les affaires
Parler d’éthique en affaires semble être une absurdité pour certains. Cette opinion
tenace est partagée par plusieurs auteurs dont André Comte Sponville et Milton Friedman, qui
s’accordent à dire que l’éthique ou la morale n’a pas sa raison d’être dans le monde des
affaires.
L’économiste américain Milton Friedmann, Prix Nobel d’Economie, est l’un des
fervents partisans à défendre l’écart qui oppose l’éthique au monde des affaires. Sa réflexion
repose sur cette affirmation très catégorique : « la seule et unique responsabilité de
l’entreprise est de faire du profit », le monde des affaires étant « amoral » car « œuvrant à
l’abri des exigences morales qui s’appliquent à toute activité sociale »16.
Il va même plus loin en disant qu’une entreprise ne peut avoir de responsabilités car
c’est une personne superficielle, donc ses responsabilités sont aussi superficielles. Autrement
dit, « seul l’être humain dispose d’un sens éthique, pas les entreprises »17.
16
MARCHILDON Allison, « Vers une culture de l’éthique en organisation », Ecole des Hautes Etudes
Commerciales, Mars 2002, p.21
17 NIELSEN Gordon, « L’éthique est-elle un facteur plus important pour une mutuelle que pour une
compagnie par actions ? », Alm Brand, Danemark, tenir compte du mouvement éthique, p.133
11
Cette opinion connait un écho en Europe avec André Comte-Sponville. Pour sa part, il
affirme qu’une entreprise n’a pas à être éthique car ça relèverait de la naïveté ou du cynisme.
Et pour renforcer son hypothèse, il avance trois arguments :
« - Ce serait la première fois que la vertu ferait gagner de l’argent
- Le devoir et l’intérêt peuvent aller dans la même direction, mais que dans ce cas
là, il n’y a aucun problème moral qui se pose
- Si on accomplit une action morale par intérêt, cette action n’aurait aucune
valeur morale, même si elle est conforme à la morale, car le propre de la morale c’est le
désintéressement »t18.
Cette vision repose exclusivement sur l’aspect financier. Elle écarte de leur champ
d’application toute considération des questions de société. Les questions éthiques leur sont
étrangères, les entreprises se limitent à respecter la loi et il incombe aux autorités étatiques de
légiférer.
Cette position est cependant à relativiser car certains affirment que ces deux impératifs
contradictoires sont conciliables.
2- Conciliation de l’éthique avec les affaires
Pour ses partisans, le recours à l’éthique répond à un vrai besoin. Il ne suffit plus de
réduire le monde des affaires à un simple échange de biens et de services mettant à l’écart
toute considération morale. Désormais, les entreprises doivent répondre à des obligations plus
larges que faire du profit.
Ce sont surtout les pays anglo-saxons qui se sont intéressés à l’utilité de l’éthique des
affaires. Ils confortent essentiellement sa pertinence selon une formule intitulée « trois P » qui
signifie « People-Planet-Profit »19. L’acteur économique doit tenir compte de ces trois
facteurs. Autrement dit, la recherche de profit doit s’accompagner d’une réflexion critique sur
le sens de ses agissements sur l’homme et l’environnement.
18« Le capitalisme est-il moral ? » par André COMTE SPONVILLE, Mardi 28 Mars 2000, article
visible sur le site http://www.forum-events.com/debats/synthese-andre-comte-sponville-29-18.html
19 Cf. « Ethique professionnelle ou morale de l’entreprise, un nouveau concept pour le monde du
travail ? » Frédéric BARONI. Dorian BOISDRON. Jean Yves BOURGES, Mathieu CHADELAT. Julien
GAIRE. Alex DI FABIO. Paul SCHELL, concours 2oo8, promotion de l’éthique professionnelle, Ecole
supérieure des sciences et technologie de l’ingénieur de Nancy, p.6
12
En premier lieu, il doit tenir compte du facteur humain, c’est-à-dire des conditions de
l’homme et de la population au sens général.
Ensuite, il ne doit pas perdre de vue l’impact éventuel de ses actions sur
l’environnement.
Enfin, la recherche du profit revient au troisième plan car la prééminence de ces
facteurs ne remet pas en cause l’objectif principal de l’entreprise.
La synergie de ces trois termes dans la conduite des affaires garantit non seulement
une moralisation du tissu économique mais concoure également à la rentabilité de l’entreprise.
« Ethics pays » comme le cite souvent l’école américaine « Business Ethics ». C’est
parce que « le marché est structuré par des rapports de confiance »20. Non seulement
l’éthique assure une meilleure cohésion au sein de l’entreprise, mais elle améliore également
l’image de marque de l’entreprise aux yeux des parties prenantes.
Ce courant de pensée prêche une éthique à visée utilitariste. La démarche éthique de
l’entreprise lui permet d’accumuler plus de profit et lui procure des avantages à long terme. Il
en résulte que l’entreprise ne perd rien en étant éthique.
Un autre courant de pensée, dont Philippe LE TOURNEAU, n’est pas en reste pour
défendre l’opportunité de l’éthique dans les affaires ; « l’émergence d’une morale spécifique
aux affaires est dans la logique de la morale et des affaires. (…) Cette émergence est ensuite
dans la logique des affaires sous deux aspects. Historiquement, les affaires ont été soumises à
une éthique rigoureuse (…) Empiriquement, car l’élaboration de règles et d’usages propres
au commerce est une aspiration profonde de ces milieux »21.
On comprend aisément la raison d’être d’une éthique ou morale dans le monde des
affaires. Les choix que doit prendre tout individu nécessitent l’encadrement de l’éthique. Les
acteurs économiques en tant qu’individu ne sont pas exclus de cette réflexion. Il est également
confronté dans sa prise de décision, à des questions d’ordre moral qu’il ne peut esquiver.
C’est grâce à ces repères qu’il peut décider la meilleure attitude à adopter face à des situations
qui peuvent se présenter dans la conduite des affaires.
L’éthique est ainsi subordonnée à toute décision économique, même si celle-ci n’est
pas explicitement précisée. Cependant, il importe de savoir la perception d’une éthique des
affaires par les acteurs économiques malgaches.
20 Cf. ZORGIBE Guillaume « l’éthique des affaires est-elle plus qu’une mode ? » Juillet 2004 21 LE TOURNEAU P., op.cit, p.11, n°8
13
3- Opinion des acteurs économiques malgaches
Concernant les principaux concernés, les avis sont également partagés. Les uns sont
contre l’avènement de valeurs morales dans ce milieu et cela à cause de la présence de
nombreux intérêts contradictoires. Certains d’ailleurs, plus radicaux, s’accordent même à dire
que l’éthique des affaires n’existe pas à Madagascar mais uniquement dans les pays
développés. On voit donc que la mentalité de Milton Friedman perdure jusqu’à ce jour alors
qu’elle date de 1970.
D’autres défendent la présence de l’éthique dans les affaires car elle constitue une
valeur sûre pour un environnement sain des affaires. Si on reprend les propres termes de
Monsieur André Pierrot, le Directeur Général de la Chambre de Commerce et d’Industrie de
Mahajanga, il s’agit d’« une fleur qui embellit la production ». L’éthique est ainsi considérée
comme la touche indispensable à la bonne marche des affaires.
Le plus surprenant réside également dans le fait que certains entendent ce concept
pour la première fois.
Ce constat révèle ainsi l’incertitude qui règne quant à la raison d’être d’une éthique
dans les affaires.
Certes, nous ne pouvons nier sa nécessité, mais également sa fragilité et sa complexité.
Selon Sarah Prospère, il s’agit d’une « notion difficile à appréhender et à conceptualiser »22.
Cette polémique au niveau de l’opportunité de l’éthique dans les affaires a pour conséquence
de créer une zone de gris quant à sa compréhension. Le malaise est toujours présent, pourtant
des valeurs morales incorporant le domaine des affaires seraient salutaires. Sa présence
continue est d’autant plus exigée quand on assiste à tous les dérèglements qui affectent le
déroulement normal des affaires.
Notre tâche sera de déterminer les domaines dans lesquels l’éthique est susceptible
d’intervenir. Elle intègre le monde des affaires principalement à deux niveaux. Sa
contribution est jugée pertinente aussi bien dans les principes du droit des affaires que dans la
pratique des affaires.
Comme le dit Ivan Tchotourian, « la pratique et la technique doivent plier plutôt que
sacrifier l’éthique »23. Dans cette optique, il est nécessaire d’insister sur ses applications
concrètes.
22 Cf. PROSPERE Sarah « Ethique des affaires : mythe ou réalité? », concours pour la promotion de
l’éthique professionnelle, 2006, p.3-4 23 Cf. TCHOTOURIAN Ivan « la morale en droit des affaires », 17 et 18 mars 2005, p.1
14
TITRE ITITRE ITITRE ITITRE I ::::
ETHIQUE AU TRAVERS DES ETHIQUE AU TRAVERS DES ETHIQUE AU TRAVERS DES ETHIQUE AU TRAVERS DES
PRINCIPES DU DROIT DES PRINCIPES DU DROIT DES PRINCIPES DU DROIT DES PRINCIPES DU DROIT DES
AFFAIRESAFFAIRESAFFAIRESAFFAIRES
15
Au premier abord, il parait incongru de mêler l’éthique à la vie des affaires car c’est
comme marier l’eau et le feu.
S’agissant du droit des affaires, certains auteurs le réduisent à une technique neutre et
dépourvue de connotation morale, cette affirmation est d’autant plus amplifiée par le message
négatif et douteux qu’arborent les « affaires ». Le terme « affairisme »24 est d’ailleurs
judicieusement employé pour caractériser l’aspect dévalorisant des affaires.
Mais loin d’être dramatique, faire du profit n’est pas mauvais en soi. Il devient
répréhensible uniquement lorsque seul domine la recherche du profit pouvant générer des
injustices ou des comportements blâmables.
Dans les développements qui vont suivre, nous verrons que les principes du droit des
affaires sont concernés par cette exigence morale. D’ailleurs, le législateur et le juge ne sont
pas absents dans cette quête de moralisation des affaires.
On peut voir le déroulement de ses effets dans le droit des affaires. Un auteur a
d’ailleurs avancé que malgré sa « dimension technique », le droit des affaires recèle également
une « dimension éthique »25.
La prise en compte de l’éthique par le juge est incontestable au regard de la
jurisprudence. Comme l’a signalé le Doyen Ripert, « les juges sont considérés comme
gardiens de la morale publique »26.
CHAPITRE 1 : ETHIQUE APPREHENDEE PAR LE DROIT DES A FFAIRES
Le droit et la morale exercent une influence l’une sur l’autre. D’où il s’avère
nécessaire de s’attacher en premier lieu à la relation complexe qu’ils entretiennent réellement.
Ce préliminaire est essentiel pour pouvoir affirmer, malgré l’ambiguïté qu’ils suscitent, que le
droit et la morale sont indissociables.
Ensuite dans un deuxième temps, nous allons voir que parallèlement, le droit des
affaires se trouve aussi imprégné de cette coloration morale.
24 DIENER Pascal, « Droit des affaires ou droit de l’affairisme », Droit des affaires, éthique et
déontologie, édition 1ère, l’hermès, p.35-36 25 Op.cit, p. 26 RIPERT, «la règle morale dans les obligations civiles », LGDJ, 1949, 4ème édition,
16
Section 1- Rapport complexe entre le droit et la morale
On ne peut se passer de règles de conduite lorsque se trouve en jeu le bon déroulement
de la vie en société. Ces règles peuvent être imposées par la morale ou par la loi elle-même.
Ces deux règles présentent la même particularité par le fait d’autoriser ou d’interdire certaines
actions. Mais il s’agit bien là de leur unique similitude car leur lien fait l’objet de polémique.
La complexité de leur relation se justifie par leur ambigüité. L’incertitude plane quant
à leur distinction et leur similarité. Leur appréhension s’en retrouve ainsi d’autant plus
délicate.
Pour ceux qui militent en faveur de leur distinction, André Comte Sponville affirme
que « la loi dit seulement ce qui est légal ou illégal. Pas du tout ce qui est moral ou immoral.
Aucune loi n'interdit le mensonge sauf en quelques circonstances; aucune loi n'interdit
l'égoïsme, le mépris, l'avarice, etc. C'est à chacun de juger par lui-même. »27 Cette
affirmation est renforcée par un certain nombre de critères.
Mais pour d’autres, cette distinction classique est relative car ; on constate leur
complémentarité et leur interaction permanente : le droit subit l’influence de la morale et la
morale influence sur le droit.
Cette affirmation est légitime car le droit et la morale exercent une influence sur le
comportement de l’individu mais chacun selon leur méthode propre. Ils se différencient
uniquement par l’intensité par laquelle ils régissent les comportements de l’individu.
Ainsi, leur rapport complexe révèle d’une part leur distinction et d’autre part, leur
complémentarité.
Paragraphe 1- Principe traditionnel : distinction du droit et de la morale
Cette opposition classique entre le droit et la morale est justifiée par un certain nombre
de critères qu’il convient de mettre en relief. Plusieurs critères de distinction peuvent être
avancés ; mais dans le cas présent, il convient de prendre en compte les critères de distinction
communément admis.
27 DUPOUEY Paul « Éthique .et formation, L'intervention sur la personne et autres problèmes »,
Avant-propos de Jacques Delors, Mars 1998
17
A- Principaux éléments de distinction
En effet, ces deux notions diffèrent principalement dans leur finalité et dans leur
sanction.
1- Au niveau de leur finalité
Le droit a pour finalité première d’organiser les règles d’une société en vue d’assurer
le bien-être et la pérennité de celle-ci.
L’objectif de la morale est de régir le rapport de l’individu envers lui-même, c’est-à-
dire son perfectionnement intérieur.
Le contraste entre le droit et la morale se manifeste également au niveau de leur
sanction.
2- Au niveau de leur sanction
En effet, la violation d’une règle de droit est caractérisée par l’intervention de la force
publique. Le concours externe de l’Etat oblige ceux qui ont enfreint la règle à réparer les
conséquences de leurs actes.
La violation d’une règle morale laisse place à la voix de la conscience. La sanction est
d’ordre intérieur. Sa détermination appartient discrétionnairement à l’auteur de l’acte.
D’autres éléments de distinction sont également proposés pour justifier l’écart qui
existe entre le droit et la morale.
B- Autres éléments de distinction
La distinction est d’autant plus marquante au niveau de leur création et de leur élément
d’appréciation.
1- Au niveau de leur création
La création des règles de droit est très encadrée et organisée. Que ce soit au niveau de
leur élaboration, du contrôle de leur validité, et même de leur modification, ces règles suivent
un dispositif bien précis et bien ordonné.
Concernant les règles morales, sa création est spontanée et sujette à évolution. Les
règles morales sont subjectives car elles sont le fruit de la conscience individuelle. C’est
l’individu lui-même qui s’impose des règles.
18
2- Au niveau de leur élément d’appréciation
La morale attache beaucoup d’importance à la perfection de l’homme. Elle apprécie
surtout l’intention de l’homme dans ses actions. La morale est ainsi une règle de
comportement particulièrement individuelle.
Le droit, par contre est moins exigeant. Les règles juridiques ne disent pas ce qu’il faut
faire mais se focalisent plutôt sur les conséquences d’une situation, c’est-à-dire sur le résultat.
Toutefois, cette distinction n’est pas absolue du fait de la complémentarité qui existe
entre ces deux notions.
Paragraphe 2- Atténuation du principe traditionnel: complémentarité entre le
droit et la morale
Cette distinction classique cède devant la réalité. En effet, on ne peut nier la proximité
qui existe entre le droit et la morale. Devant la réunion progressive de ces deux concepts, il
s’avère utile de s'interroger sur le fondement de cette relation et de son issue.
A- Fondement de la relation entre le droit et la morale
L’autonomie de ces deux notions laisse cependant transparaitre l’existence d’un lien
qui les unit.
Certaines règles de droit connaissent l’influence de la morale. A titre d’exemple,
l’obligation naturelle est basée sur des devoirs de conscience morale. Mais reprise par le droit,
celle-ci présente désormais des effets obligatoires en interdisant leur rupture brutale.
L’influence de la morale sur le droit est également palpable lorsque le droit sanctionne la
fraude ou la mauvaise foi.
D’où la question de l’issue de la relation que ces deux notions entretiennent.
B- Issue de la relation entre le droit et la morale
Selon les propos du Doyen RIPERT, faire appel à la morale peut servir à « renforcer,
atténuer ou affiner la règle juridique » 28. Cette affirmation nous permet d’avancer que la
28 RIPERT, «la règle morale dans les obligations civiles », LGDJ, 1949, 4ème édition, p.157
19
morale influe nécessairement sur le droit. Sa manifestation est d’autant plus radicale sur le
droit des obligations.
1- Influence de la morale dans l’élaboration du droit
On ne peut nier leur convergence naturelle ; le droit et la morale constituent un moyen
de régulation de la société et requièrent l’obéissance à des règles pour favoriser la cohésion
des individus. On s’accorde à dire que ces deux notions sont complémentaires tant le lien qui
les unit est évident. La seule différence qui les distingue profondément se situe au niveau de la
sanction.
Le droit des obligations semble être le domaine abritant un grand nombre de règles
juridiques empruntées à la morale.
2- Droit des obligations, domaine prisé par la morale
En effet, les sujets abordés par le droit des obligations laissent à la morale une place de
choix. La loi malgache en la matière n’est pas exempte de considérations morales dans ses
dispositions qui sont pour la plupart la transposition juridique de règles morales.29
A titre d’illustration, le respect des bonnes mœurs, la répression du dol, le principe de
bonne foi etc.
La question qui se pose est de savoir si le droit des affaires subit également l’influence
de la morale.
S’agissant du droit des affaires, à priori, il semble ne pas être concerné par ce
mouvement moral. Toutefois, au fil des développements qui vont suivre, nous verrons que des
valeurs fortes et la prise en compte du bien-être de l’individu au sens large ont rejoint le rang
des principes du droit des affaires.
Certains auteurs sont plus favorables à l’appellation de « morale des affaires ».
D’autres préfèrent utiliser le terme « éthique des affaires ». Peu importe les termes retenus,
leur présence est d’autant plus affirmée au sein du droit des affaires et se présente sous
diverses formes.
29Cf. Loi n°. 66-003 du 2 juillet 1966 relative à La Théorie Générale des Obligations
20
Section 2 – Relation affirmée entre l’éthique et le droit des affaires
Le droit des affaires malgache est-il amoral ? Pour répondre à cette question, jetons un
bref regard sur le droit des sociétés, le droit des entreprises en difficulté, le droit de la
concurrence…A travers ces quelques disciplines, on peut affirmer sans détour que
l’élaboration de ces différentes disciplines puise leur source dans l’éthique. Le facteur moral
figure parmi les facteurs qui contribuent à l’élaboration du droit. Cependant, même si
l’éthique ne règne pas en maitre dans le droit des affaires, elle en fait du moins partie
intégrante.
En effet, malgré la nature générale, parfois abstraite, sinon rigide de certaines
disciplines, nous pouvons constater que leurs dispositions ne sont pas vides de considérations
morales.
Dans le cadre de cette approche, notre étude s’est limitée à l’analyse de quelques
disciplines. Nous ne prétendons pas épuiser le sujet, notre réflexion tend seulement à affirmer
l’existence d’une atmosphère éthique aussi minime soit-elle qui entoure le droit des affaires
nonobstant l’ambiguïté qui plane au rapprochement de ces deux notions.
Aussi, nous allons traiter la manière dont les disciplines du droit des affaires prennent
en compte cette exigence morale. Son intervention s’effectue à trois niveaux.
D’abord, nous allons voir dans un premier temps les disciplines des affaires dont le
lien avec l’éthique est récent.
Ensuite, celles qui à première vue ne semblent pas aborder directement l’éthique mais
dont son influence se fait légèrement ressentir.
Enfin, nous allons voir en dernier lieu, les disciplines du droit des affaires qui sont
sensiblement marqués par l’éthique.
Ajoutons toutefois une dernière subdivision, le droit de l’environnement en tant que
discipline d’exception.
21
Sous-section 1 - Présence récente de l’éthique dans les disciplines du droit des
affaires
Dans cette sous-section, nous relaterons la présence récente de l’éthique dans les
branches des droits des affaires, soit le droit de la concurrence et le droit des procédures
collectives d’apurement du passif.
Paragraphe 1- Droit de la concurrence
Comme annoncé ci-dessus, nous développerons dans ce paragraphe le droit de la
concurrence. Cette branche du droit des affaires fera l’objet de justification et d’appréciation.
A- Justification de l’éthique au sein du droit de la concurrence
Cette discipline figure parmi les efforts de moralisation du monde des affaires. La
concurrence, comme son nom l’indique, signifie implicitement que les liens contractuels sont
tissés sur la base de la rivalité. Mais ces considérations ont changé depuis.
L’éthique de la concurrence selon Alain BIENAYMÉ consiste « à préserver les
intérêts légitimes des concurrents installés et potentiels, des clients, des fournisseurs et plus
généralement de tous les tiers intéressés par les conditions de disponibilité des biens sur les
marchés » 30. L’éthique recommande ainsi à tenir compte des intérêts de toutes les parties
prenantes.
Ces préoccupations ont débouché à l’élaboration de la loi sur la concurrence n° 2005-
020 du 17 octobre 2005. En effet, elle présente la particularité de mettre en jeu deux
impératifs complémentaires : la liberté de la concurrence et la loyauté de la concurrence. En
effet, une concurrence saine et loyale ne peut être assurée que par une règlementation de la
liberté de la concurrence. L’esprit qui domine la loi sur la concurrence prône trois objectifs à
savoir :
- l’assainissement de la concurrence par la répression des comportements portant
atteinte à la concurrence
- la promotion de la compétitivité. La loi n’a pas pour but de protéger les entreprises
faibles, ni de blâmer les entreprises de grande envergure. Elle consacre le traitement égalitaire
30
Alain BIENAYMÉ « dimension éthique de la concurrence », éthique et concurrence, parue le 28
novembre 2000,
22
entre les acteurs économiques. A titre d’illustration, l’état doit accorder les mêmes faveurs à
toutes les entreprises et non favoriser les unes au détriment des autres.
- le bien-être du consommateur. Cet argument est justifié dans la mesure où il est le
destinataire final des impacts de la concurrence.
De ce qui précède, nous pouvons affirmer qu’une concurrence saine n’est possible à
condition qu’un cadre juridique clair assigne des limites respectueuses des concurrents, des
consommateurs et de la concurrence elle-même.
Aussi, nous allons voir les manifestations de l’éthique à travers le droit de la
concurrence.
B- Appréciation de l’éthique par le droit de la concurrence
Pour assurer la mission de moralisation de la concurrence, la loi cherche à limiter les
comportements délictueux. En effet, on constate que la loi sur la concurrence affiche des
valeurs que les acteurs économiques doivent respecter, et le cas échéant, sanctionne les
pratiques portant atteinte à la concurrence.
Ainsi, on distingue notamment la promotion des valeurs morales et la protection du jeu
de la concurrence.
1- Promotion des valeurs
Dans le droit de la concurrence, nous pouvons classer trois types de valeurs qui sont :
la liberté, la loyauté et la transparence.
a- Liberté
La liberté de la concurrence est le corollaire du principe fondamental de la liberté de
commerce et d’industrie, c’est-à-dire la liberté d’exercer une activité économique et la liberté
de contracter.
Notons toutefois que la liberté consacrée par la loi sur la concurrence est d’une autre
variante, il s’agit d’une liberté règlementée. Un auteur renforce d’ailleurs que « la
règlementation de la concurrence est en elle-même un paradoxe (…) l’absence de normes
juridiques entraîne non pas une concurrence libre, mais la constitution d’ententes, de
23
coalitions et de monopoles qui, au contraire, paralysent la concurrence »31. Ainsi, une liberté
totale au sein de la concurrence aboutirait plutôt à une concurrence sauvage susceptible
d’abus où règnerait la loi du plus fort. D’où une liberté soumise à certaines restrictions
favorise une concurrence saine.
A titre d’illustration, la loi consacre en son article 2 la liberté d’accès à la profession
mais sous réserve des incompatibilités et des incapacités. La liberté des prix est également
consacrée mais l’alinéa 3 du même article prévoit en même temps une intervention possible
du gouvernement dans la fixation du prix en cas de situations particulières comme les temps
de crise ou les calamités.
b- Loyauté
La place de la loyauté dans la loi sur la concurrence fait transparaitre le vœu du
législateur à vouloir moraliser toutes formes de compétition. En effet, bien que les acteurs
économiques soient concurrents et par conséquent rivaux dans la conquête du marché, cela
n’écarte pas l’exigence d’un comportement loyal de leur part.
Cependant, la loyauté est un concept difficile à définir du fait de sa nature évolutive.
La concurrence se doit d’être honnête, d’où à contrario la loi réprime la concurrence déloyale.
A cet effet, la loi énumère plutôt les comportements déloyaux. Elle qualifie ainsi d’« actes de
concurrence déloyale » le dénigrement en son article 8, la publicité comparative en son article
9 et la publicité comparative en son article 10.
c- Transparence
La loi exige un climat de transparence qui doit régner dans la pratique des affaires.
Cette transparence dans les transactions est obligatoire à l’endroit des autres concurrents par
l’obligation de facturation imposé par l’article 12, le but étant d’endiguer les éventuels
comportements illicites. Cette obligation se reproduit aussi à l’égard des consommateurs. En
effet, l’esprit de la loi est de protéger ces derniers qui sont en situation de faiblesse afin qu’ils
puissent accéder à l’information. Elle fait peser sur le professionnel une obligation
d’information sur « les prix et les conditions et modalités particulières de vente » en son
article 11 alinéa 1 et une obligation de renseignement « sur son barème de prix et ses
31
DEKEUWER-DEFOSSEZ Françoise, « droit commercial sous-titre : activités commerciales,
commerçants, fonds de commerce, concurrence et consommation », Montchrestien, 4ème édition, 1995, p.486,
n°541
24
conditions de vente. (…) les conditions de règlement et, le cas échéant, de rabais et
ristournes ».
L’éthique se manifeste également par la volonté de réprimer toute pratique portant
atteinte à la concurrence.
2- Protection du jeu de la concurrence
Elle se manifeste par la répression des actes déloyaux et la mise en place d’un organe
bicéphale pour assurer son effectivité.
a- Répression des actes déloyaux
Désormais, le droit de la concurrence aspire à moraliser les relations économiques.
Bien que dans une situation de concurrence domine la conquête de la clientèle, il n’en
demeure pas moins que certaines actions doivent être réprimées du fait qu’elles portent
atteinte à la libre concurrence. Dans cette optique d’assainissement de la concurrence, la loi
sanctionne ainsi tout comportement répréhensible causant un préjudice aux intérêts du
consommateur et à ceux des concurrents.
On distingue notamment la répression des pratiques individuelles en ses articles 14 à
20 et des pratiques collectives en ses articles 21 à 27. Ces dispositions font clairement
transparaitre l’idée morale de protéger les victimes lésées par la concurrence.
Les pratiques individuelles sont des faits qui émanent d’un acteur économique pris
isolément. On distingue entre autres, les clauses de non-concurrence en son article 14, le refus
de vente en son article 17, la revente à perte en son article 19…
Concernant les pratiques collectives, la loi interdit formellement en ses articles 21 à 24
les ententes et les abus de position dominante et soumet les concentrations économiques et les
monopoles au contrôle du Conseil de la concurrence en ses articles 25 à 27. Bien qu’ils ne
soient pas en soi répréhensibles, ces comportements peuvent toutefois conduire à des abus de
la part des acteurs économiques. En condamnant ces abus, elle réalise une fonction
éminemment morale.
Le fait pour la loi de vouloir règlementer les rapports entre les concurrents répond à un
souci d’instaurer un comportement moral que ces dernières doivent respecter pour un climat
de concurrence sain.
25
Mais cette règlementation exige une autorité chargée de le faire et la loi sur la
concurrence s’est assuré de remettre cette fonction à deux entités.
b- Mise en place d’un système bicéphale
La particularité de la loi sur la concurrence repose également sur la mise en place de
deux organes disposant de pouvoirs propres pour assurer la protection de la concurrence :
d’une part, le Ministère chargé du commerce et d’autre part un Conseil de la concurrence. Ce
renforcement du contrôle des autorités traduit une aspiration morale de la part de la loi de
vouloir protéger la concurrence.
En effet, l’administration se voit investie de certains pouvoirs. Elle règle notamment
les pratiques individuelles et dispose de la faculté de prendre unilatéralement des sanctions
administratives selon l’article 60.
Le Conseil de la concurrence qui prend en charge la constatation des pratiques
collectives, présente des qualités d’indépendance, des pouvoirs d’investigation et de
sanctions.
Leur collaboration peut prendre la forme d’une simple faculté comme le prévoit
l’article 52 en son alinéa 3 de la loi qui précise que le président du Conseil de la concurrence
peut demander l’assistance des agents du Ministère. L’administration quant à elle, s’assure du
suivi des décisions prononcées par le Conseil.
Elle peut également être obligatoire ; le gouvernement doit inévitablement consulter le
Conseil de la concurrence sur tout projet de texte ayant un rapport direct ou indirect avec la
règlementation de la concurrence.
A part le droit de la concurrence, des considérations éthiques transparaissent
également au sein du droit des procédures collectives.
Paragraphe 2- Droit des procédures collectives d’apurement du passif
Nous développerons en premier lieu sa justification, et dans un deuxième lieu
l’appréciation de l’éthique par cette discipline.
26
A- Justification de l’éthique au sein du droit des procédures collectives
Jadis, la faillite était observée comme une sanction à l’égard du dirigeant qui avait
trahi la confiance de ses créanciers et qui n’a pu être en mesure de respecter ses engagements.
Mais actuellement, une autre vision de la faillite a vu le jour, elle n’est plus
considérée comme une situation pénalisante. Désormais, les lois élaborées en la matière
prennent en considération la sauvegarde de l’entreprise et le maintien des emplois.
B- Appréciation de l’éthique par le droit des procédures collectives
La loi n°2003-042 du 03 septembre 2004 sur les procédures collectives d’apurement
du passif s’inscrit dans ce nouveau dessein. Du fait de la spécificité de la situation de
l’entreprise, des illustrations de l’éthique sont visibles à travers les dispositions de la présente
loi. En effet, comme sa consœur française, elle n’est pas lacunaire de considérations morales.
Cette branche garantit en priorité le maintien des emplois et la continuité des activités
de l’entreprise. La protection des créanciers vient en second lieu.
1- Maintien des emplois et la continuité des activités de l’entreprise
On distingue des directives qui sont d’autant plus particulières dans le sens où elles
sont établies en vue du maintien des emplois et de la continuité des activités de l’entreprise.
Certaines d’entre elles portent même atteinte au droit commun.
a- Directives particulières
Ce qui rend cette procédure si spécifique, c’est non seulement sa nouvelle finalité mais
également les procédures employées pour atteindre cet objectif.
A titre d’exemple, la loi ne renvoie pas directement l’entreprise à la liquidation des
biens comme il a été fait précédemment.
Elle évoque d’abord la conciliation, et le cas échéant favorise le redressement
judiciaire. Ces deux mesures visent une possibilité de remise en marche de l’entreprise. C’est
quand ces deux mesures s’avèrent inopérantes et que la situation du débiteur est telle qu’il
n’arrive plus à payer ses créanciers et que son activité ne répond plus aux exigences de
rentabilité que vient la phase extrême de la liquidation des biens. Cette dernière phase de la
procédure a pour but la vente des actifs de la société. Cette mesure drastique permet le
27
paiement équitable des créanciers sociaux. On voit à travers ces procédés, la volonté de la loi
à maintenir en place l’activité de l’entreprise.
La loi permet également au débiteur de dresser des propositions susceptibles de
contribuer à la continuation de son entreprise. Toujours en vue de garantir le maintien des
emplois, elle offre également la possibilité à un tiers de se porter acquéreur de biens de
l’entreprise susceptibles d’exploitation autonome en son article 144. Ce dernier doit faire une
offre qui réponde à cette exigence. L’article 156 alinéa 3 dispose que « le cessionnaire rend
compte au commissaire à l'exécution du plan de l'application des dispositions prévues par le
plan de cession à l'issue de chaque exercice suivant celle-ci. Si le cessionnaire n'exécute pas
ses engagements, le tribunal peut, d'office, à la demande du procureur de la République, du
commissaire à l'exécution du plan, du représentant des créanciers ou d'un créancier,
prononcer la résolution du plan ». Le principe moral du respect des engagements prévaut
ainsi au sein de la procédure. Ce principe est garanti par une surveillance étroite du
cessionnaire et par une sanction rigoureuse en cas de violation de ses engagements.
La loi tient compte de l’éthique en interdisant cette faculté spéciale à une certaines
catégories de personnes selon l’alinéa 5 du même article. Il évoque notamment « les parents
ou alliés jusqu'au deuxième degré inclusivement de ces dirigeants ou du débiteur personne
physique ne sont admis, directement ou par personne interposée, à présenter une offre ». Cela
peut s’expliquer par le but d’éviter des pratiques choquantes qui peuvent résulter de
l’existence d’un lien de parenté.
La gestion de l’entreprise subit également les effets de la procédure. Le débiteur peut
se voir assisté du syndic dans le cadre du redressement judiciaire ou désinvesti de sa fonction
de dirigeant le cas échéant à la suite de la liquidation des biens.
Les règles de transparence des opérations apparaissent plus impératives dans cette
procédure. Par le bais de la publicité requise par la loi, le but est d’informer tous les
protagonistes de la procédure de l’évolution de la situation.
Il existe également des procédures qui constituent de véritables entorses au droit
commun.
28
b- Entorses au droit commun
Il convient d’exposer un bref aperçu de ces principes retenus par la présente loi en vue
du maintien des emplois.
A titre d’exemple, la loi exige la suspension des poursuites individuelles des
créanciers contre le débiteur en son article 71. Ce droit, pourtant légitime, ne trouve pas
application ici eu égard à la situation difficile dans laquelle se trouve le débiteur.
Le principe d’exigibilité des dettes non échues cède devant « le droit de ne pas payer
ses dettes »32. Ce droit inédit prend corps légalement à travers la déchéance et le maintien du
terme accordé par la loi.
Les dispositions relatives à la location gérance évoquées par la loi apparaissent
particulièrement attentatoires au droit commun. A titre d’exemple, la prise en charge des
dettes par le locataire-gérant seul. En effet, ce paiement pèse uniquement sur le locataire-
gérant excluant totalement le débiteur. A travers cela, un autre principe est battu en brèche : le
principe de solidarité de paiement des dettes entre le loueur et le locataire-gérant qui n’a pas
vocation à s’appliquer ici. La loi ajoute également au nom du maintien des emplois, que la
location gérance peut jouer même en présence de clause contraire.
Le cas du paiement anticipé d’un créancier par le débiteur tombe sous le coup d’une
inopposabilité de droit selon la loi. Même si par essence il est normal de payer un créancier,
cette mesure a également pour but de garantir l’égalité entre les créanciers afin d’éviter que
l’un des créanciers soit favorisé aux dépens des autres. D’ailleurs, la situation anormale de
l’entreprise explique la prise de ces mesures anormales.
Le fait pour le syndic, un tiers étranger, de décider de la continuation des contrats en
cours présente également une certaine originalité par rapport au droit commun. En principe,
seules les parties à un contrat décident de son sort.
On constate ainsi la ferveur éthique de la loi en voulant aider le débiteur qui se trouve
dans l’impasse.
La protection des droits des créanciers rentre également dans cette optique de
moralisation.
32 La phrase du doyen RIPERT reprise par C. SAINT-ALARY-HOUIN, « morale et faillite », La
morale et le droit des affaires, édition Montchrestien, 1996, p.164, n°16
29
2- Protection des créanciers
Leur protection se trouve renforcée particulièrement par le fait de se regrouper en une
masse.
L’article 34 dispose que « les deniers recueillis par le syndic, quelle qu'en soit la
provenance, sont versés immédiatement à un compte spécialement ouvert pour chaque
procédure collective auprès d'un établissement bancaire ou postal ou au Trésor ».Cette
mesure prise par la loi a pour but de protéger les sommes perçues par le syndic et permet de se
prémunir contre l’affectation de ces sommes à une destination autre que celle prévue pour le
paiement des créanciers.
Pour éviter que le débiteur cède à la tentation de faire fuir son patrimoine, le syndic
peur prendre des mesures conservatoires selon les articles 46 et 47.
On voit également que cette procédure privilégie des créanciers du fait de leur
condition précaire. La situation délicate dans laquelle se trouve l’entreprise a conduit la loi à
ériger par exemple, en tant que super privilège, le salaire des employés. Cette qualité garantit
un paiement rapide des salaires et en même temps l’effectivité du paiement. Le caractère
alimentaire du salaire justifie cette mesure et fait transparaitre de surcroit la prise en compte
de l’éthique.
La présence affirmée de l’éthique dans ces deux branches du droit des affaires étant
démontrée, on constate également que l’éthique occupe, de manière tacite, d’autres disciplines
du droit des affaires.
Sous-section 2 - Présence tacite de l’éthique dans les disciplines du droit des affaires
L’éthique est tacitement présente au sein du droit des investissements, du droit des
sociétés et du droit fiscal.
Paragraphe 1- Droit des investissements
Cette branche du droit des affaires s’inscrit dans les programmes économiques du pays
mais elle est également marquée par ses perspectives de création d’emploi.
30
A- Objectif express : promotion des investissements
Il se manifeste notamment par le statut favorable accordé à tous les investisseurs.
Cependant, une attention particulière est accordée au statut des zones franches.
1- Statut commun des investisseurs
La loi n° 2007-036 du 14 janvier 2008 sur les investissements à Madagascar constitue
le texte général de référence à vocation incitatif. Ce texte leur assure des avantages non
négligeables.
Elle garantit entre autres la liberté d’investissement en son article 2, l’égalité de
traitement en son article 3, le respect de ses droits de propriété en son article 4, la liberté de
transfert d’argent en son article 5, la liberté de recrutement et de licenciement des salariés
expatriés en son article 17 et l’acquisition à la propriété immobilière en son article 18.
La création de l’EDBM contribue également à inciter les investisseurs. Il a pour atout
majeur d’assister l’investisseur dans ses projets, ce qui présente l’avantage de faciliter et
d’accélérer les procédures inhérentes à l’approbation d’un projet d’investissement.
Cependant, le statut des zones franches fait l’objet d’un statut particulier.
2- Statut particulier des zones franches
Les investissements se concrétisent pour la plupart à Madagascar par l’installation de
zones franches. Leur implantation et leur développement font partie des facteurs essentiels
contribuant à l’essor industriel du pays.
Cette loi leur accorde notamment des allègements fiscaux comme le taux de TVA à
0% pour leurs exportations et importations, le remboursement de crédit de TVA par l’Etat, le
taux de TVA de 20% sur les ventes et les achats sur le territoire national et une exonération
d’impôt sur le revenu allant de deux à quinze ans selon la catégorie de l’entreprise.
Elles bénéficient également d’avantages au niveau de la législation sociale, elles
peuvent déroger à l’interdiction du travail de nuit des femmes et recourir librement aux heures
supplémentaires sans autorisation préalable pour les dix premières heures.
L’appel aux investissements contribue de manière tacite à la création d’emplois.
31
B- Objectif tacite : création d’emplois
Selon A. POUSSON, « L’Etat doit toutefois créer les conditions économiques
favorables à la création d’emplois et poser les règles propres à favoriser le partage des
ressources, à défaut de pouvoir imposer le partage de travail. »33
Cette inquiétude reflète le devoir éthique que s’engage à accomplir l’Etat pour
endiguer le fléau mondial que représente le chômage. Ce devoir moral transparait à travers
l’élaboration d’un cadre juridique attractif pour les investisseurs en quête de nouveaux projets
et qui, corollairement, assureraient des emplois à un bon nombre de citoyens.
En effet, l’Etat opte pour la promotion des investissements certes, mais exige que ces
derniers contribuent à la création d’emplois.
Les usines de zones franches présentent certaines particularités qui permettent l’accès
facile de la plupart des citoyens au travail. Nous pouvons citer entre autres la place privilégiée
des femmes dans certains secteurs comme le textile et le niveau d’étude élevé qui n’est pas
exigé par les employeurs. Face à un tel enjeu, l’Etat a favorisé leur régime juridique en
élaborant la loi n° 2007-037 du 14 janvier 2008 sur les Zones et Entreprises Franches à
Madagascar.
Tout comme le droit des investissements, le droit des sociétés recèle également des
considérations éthiques.
Paragraphe 2 – Droit des sociétés
Elle se distingue par son aspect technique mais recèle également des dimensions
éthiques.
A- Aspects techniques du droit des sociétés
Les opérations relatives au fonctionnement des sociétés sont très complexes et
nécessitent de l’habilité et des connaissances techniques. La fusion, la scission,
l’augmentation du capital sont des rubriques complexes qui démontrent à priori que le droit
des sociétés ne recèle aucune ligne éthique.
33 POUSSON A., « Morale et droit du travail », La morale et le droit des affaires, édition
Montchrestien, 1996, p.59
32
Mais la réalité démontre une facette morale de ce droit complexe.
B- Aspects moraux du droit des sociétés
Il semble étonnant de rapprocher le droit des sociétés dont les mots d’ordre sont le
profit et la spéculation, avec l’éthique. De plus, on retient principalement son aspect technique
qui dispenserait de faire cette réflexion. Pourtant, la traditionnelle rigidité reconnue au droit
des sociétés est désormais tempérée. Nous pouvons discerner entre les lignes de cette
discipline quelques bribes de considérations éthiques plus ou moins évidentes.
La loi malgache n°2003-036 du 31 janvier 2004 sur les sociétés commerciales n’est
pas lacunaire de dispositions reflétant la prise en compte de l’éthique. Sa volonté de fixer des
normes règlementaires en vue d’endiguer les comportements répréhensibles part justement de
cette idée de morale. Ce droit fait prédominer trois valeurs morales à savoir la transparence,
l’égalité et la loyauté. A titre d’exemple, ces dernières interviennent de manière implicite au
niveau des actes sociétaires, des acteurs de la société et de la société elle-même.
Ainsi, l’aspect moral du droit des sociétés se manifeste par l’exigence de transparence,
la reconnaissance des droits des associés et de la responsabilité des dirigeants, et enfin par le
contrôle de la société.
1- Exigence de transparence
La transparence, une valeur morale chère au droit des affaires occupe une large place
au sein de la société. Une valeur classique qui n’a pas à faire les preuves de son utilité au sein
des affaires. Elle se manifeste par l’exigence de publicité liée à certains actes dont le défaut
entraine des sanctions voire même la nullité de ces actes. Son respect est nettement exigé dans
les sociétés de capitaux que dans les sociétés de personnes car « le problème de
communication ne se pose pas en principe : tous les associés ont accès à tous les documents
constitutifs de la société »34. Les sociétés de personnes constituent un cercle très fermé où la
communication est présente. Par contre, les sociétés de capitaux font souvent appel à des
apporteurs de capitaux extérieurs à la société et l’information à leur encontre fait souvent
défaut. D’où les efforts de la loi à cet effet.
Toujours dans ce mouvement de transparence, les dirigeants sont assujettis à une
obligation d’information qui se manifeste à trois niveaux.
34
RAMAROLANTO-RATIARAY, « Le droit des sociétés commerciales à Madagascar », revue de
droit et de jurisprudence de Madagascar, décembre 1999, n°1, p.13
33
D’abord au niveau de sa constitution, les dirigeants doivent communiquer des
informations quant à la structure et l’activité de la société. Elles se réalisent par le biais de son
immatriculation au registre de commerce et des sociétés et la rédaction des statuts avec des
mentions obligatoires sous peine de sanctions qui sont régis par les articles 278 et suivants.
Ensuite, au cours de la vie sociétaire comme la publication des comptes annuels, ou
encore les changements que peut subir la société comme la transformation ou la fusion qui
nécessitent certaines formalités selon l’article 281. Notons également les apports en numéraire
qui exigent l’accomplissement de certaines formalités. La présentation des rapports financiers
répond aussi à cet impératif de transparence, les dirigeants doivent renvoyer une image fidèle
et sincère de l’entreprise.
La fin de vie de la société est également encadrée par cette exigence de transparence.
Les formalités de publicité sont régies par les articles 282 et suivants.
La loi reconnait également aux associés un certain nombre de droits.
2- Reconnaissance des droits des associés
En effet, elle tient compte de leur situation. Par exemple, concernant les associés, la loi
interdit cette qualité à une certaine catégorie de personnes. L’article 4 interdit à toute
personne frappée d’incompatibilité, d’interdiction et d’incapacité l’exercice de cette qualité en
vue de protéger la société. L’article 5 l’interdit aux mineurs et aux incapables afin de les
protéger des risques liés à l’activité sociétaire. L’article 6 qui interdit à deux époux d’être
associés dans une même société tend à préserver le patrimoine de ces derniers au vu des
lourds investissements qu’elle comporte. Ces dispositions témoignent ainsi que l’éthique
prédomine le droit des sociétés.
L’éthique se manifeste également par le fait de la loi d’établir en son article 364 pour
les sociétés SARL le principe suivant : « Les associés ont un droit d'information permanent
sur les affaires sociales ». Parmi ces droits octroyés par la loi liés à la possession de titres
sociaux, on distingue le droit de communication en son article 365 et un droit au dividende
selon l’article 368.
La loi tient également compte de leur situation en exigeant que les assemblées doivent
se dérouler dans la transparence par la communication des documents de la société. Quoi de
plus moral de la part de la loi de se préoccuper de leur sort.
Rattaché à ces droits, il existe également des obligations qui incombent aux associés.
L’apport de la jurisprudence française en la matière est très riche en ce qu’elle révèle un
34
devoir de loyauté entre les associés. Il se manifeste notamment par la répression de l’abus de
majorité et l’abus de minorité. Une doctrine française reconnait également le « devoir de
loyauté externe des associés »35. Il impose un devoir de loyauté envers les tiers qui consiste à
ne pas porter atteinte aux intérêts de la société dans ses relations avec les tiers.
L’éthique se manifeste également par le fait que la loi reconnait également la
responsabilité des dirigeants.
3- Reconnaissance de la responsabilité des dirigeants
La reconnaissance de la responsabilité individuelle pénale ou civile des dirigeants
constitue le corollaire de l’obligation morale de réparer ses fautes. La loi renforce cette
responsabilité en frappant le dirigeant fautif d’interdiction d’exercice pendant des années. Les
dirigeants ne peuvent plus légitimer leurs actes sous couvert de représentants de la société en
son article 180. Justement, la loi intervient à juste titre en la matière concernant la légitimité
des actes conclus entre la société et ses dirigeants en ses articles 372 et 378 pour les SARL et
les articles 464, 475 et 480 pour les SA. Le bénéfice de l’action sociale intentée par la société
victime des délits commis par ses dirigeants renforce encore plus la fraction d’éthique qui
règne au sein du droit des sociétés.
Le contrôle de la société s’inspire également d’une idée morale.
4- Contrôle de la société
La loi exige la présence du commissaire aux comptes et un contrôle des actes
sociétaires
a- Présence du commissaire aux comptes
Selon J.-F. BARBIERI, le commissaire aux comptes est « un acteur d’une moralisation
du droit des sociétés »36 . Sa mission de contrôle permanant de la société relève en effet d’un
esprit éthique. Néanmoins, cette compétence de défenseur de la moralité au sein de la société
35
NORMAND Marie « le devoir de loyauté externe des associés », article visible sur le site
www.avocats-picovschi.com
36 J.-F. BARBIERI « Morale et droit des sociétés », La morale et le droit des affaires, édition
Montchrestien, 1996, p.113
35
exige également un comportement moral de sa part. A titre d’exemple, les dispositions de la
loi en vue de protéger la profession, qui prévoit les incompatibilités de la fonction avec
certaines qualités en ses articles 123, 124, 125, 126, 127. De même, dans l’exécution de sa
mission, la loi exige un comportement respectueux des règles d’éthique et déontologique
inhérentes à sa profession en son article 129.
Les actes sociétaires font également objet de contrôle.
b- Contrôle des actes sociétaires
Il s’agit particulièrement des actes que les dirigeants ou les associés passent avec la
société. En effet, ces actes sont réglementés de manière stricte par la loi pour éviter la
confusion de leurs intérêts propres avec ceux de la société. Il s’agit ici d’une manifestation
légale de la loyauté qui impose une gestion de l’entreprise dans l’intérêt exclusif de la société.
A titre d’exemple, certains actes doivent faire l’objet d’une autorisation expresse. Le cas des
conventions règlementées sont régis par les articles 372 et suivants pour les SARL, et pour les
SA par les articles 464 et suivants. D’autres actes se voient également interdits par la loi.
S’agissant des conventions interdites, l’article 378 régit les SARL et l’article 480 pour les SA.
D’autres disciplines du droit des affaires comme le droit fiscal laisse également
transparaitre de manière tacite des considérations éthiques.
Paragraphe 3- Droit fiscal
C’est la discipline à laquelle de sérieux doutes sont émis quant à la présence de
l’éthique. Il est généralement admis qu’il s’agit d’une discipline réaliste et indifférente à
l’égard d’une quelconque morale.
Cependant, ce n’est qu’une approche apparente. À travers un examen minutieux, on
peut y déceler des fragments d’éthique.
A- Immoralité apparente du droit fiscal
Elle se démarque notamment par la non-distinction opérée entre les activités illicites et
les activités licites. P-SERLOOTEN a d’ailleurs soutenu que « les actes illicites et immoraux
36
ont la même place que les actes conformes à la loi et à la morale »37, ce qui est révélateur de
son insensibilité. Pour preuve, la généralité volontaire des termes employés par le Code
Général des Impôts tels « les revenus provenant des activités industrielles et commerciales »,
« des prestations de services ». Ces termes, sujets à interprétation large, pourraient laisser
supposer que les revenus issus de ces activités, illicites ou non, peuvent faire l’objet
d’imposition. La jurisprudence française est abondante sur le sujet ; à titre d’exemple, les
bénéfices issus d’un trafic de stupéfiants38 et les revenus issus de l’exercice de la
prostitution39 sont imposables.
Ces illustrations renforcent encore plus le statut classique du droit fiscal. La
qualification des revenus par le droit fiscal est déterminée selon les situations existantes et
concrètes, indépendamment des qualifications juridiques ou sociales qui en découlent.
Il faut cependant apprécier cette prise de position du droit fiscal d’une autre
manière. Le même auteur a avancé que « c’est, en effet, dans l’hypothèse inverse que son
attitude aurait été critiquable »40. Le droit fiscal, a tacitement introduit une règle morale en
taxant le revenu de ces activités jugées immorales : l’égalité de traitement de tous devant
l’impôt.
Ainsi, la place de la morale au sein du droit fiscal est ainsi évidente.
B- Moralité évidente du droit fiscal
Elle est évidente dans la mesure où il exige un comportement moral de la part du
contribuable. On assiste également aux mesures prises par les autorités compétentes en vue
d’assainir le monde fiscal. D’autres aspects moraux du droit fiscal sont également relevés.
1- Comportement moral du contribuable exigé
Le Code Général des Impôts contient implicitement des dispositions teintées de
moralité. A titre d’illustration, il exige deux comportements de la part du contribuable. D’une
part, il exige sa sincérité. Cette conception morale se reflète à travers les obligations
37
P.-SERLOOTEN, « morale et fiscalité des affaires », actes du colloque « morale et droit des
affaires », édition Montchrestien, p.136 38
CE 28 juillet 1999, n°185525, Grillet 39
CAA Lyon, 1er décembre 2005, n°01-1895, Droit fisc, 2006, 419, concl. GIMENEZ 40
P.-SERLOOTEN, op.cit., p.138
37
déclaratives auxquelles ils sont assujettis selon l’article 01.01.17 du CGI. Ils doivent présenter
une image réelle et véridique de leur situation.
D’autre part, le droit fiscal prône un principe éthique qui est d’assumer ses
responsabilités. En matière fiscale, payer ses impôts relève d’« un devoir moral de
contribution aux charges publiques »41. Comme le scandent certains centres fiscaux de la
capitale, « Adidy masina ny mandoa hetra ». En effet, l’impôt constitue une participation du
contribuable à couvrir les charges publiques. A cet effet, le manquement à des obligations
comme l’absence de dépôt des déclarations de résultat dans les délais fixés, la non-déclaration
de distributions de bénéfices, la tenue d’une comptabilité incomplète, le défaut
d’enregistrement régulier de toutes les opérations etc. font l’objet de sanctions. Elles
consistent en des relances, des taxations d’office et des pénalités.
Une instruction du Ministère des Finances et du Budget a d’ailleurs renforcé cette
obligation de paiement en vue d’assurer l’égalité de traitement des contribuables42. Elle
précise qu’aucune remise ne peut être accordée pour quelque motif que ce soit. Elle a
cependant ajouté que « le Code Général des Impôts, au cas où la bonne foi est avérée ou en
cas de première infraction, prévoit des amendes réduites ». La prise en compte de la bonne
foi du contribuable révèle la dimension éthique qui anime le droit fiscal.
Un autre aspect moral du droit fiscal est également visible dans les mesures prises par
les autorités compétentes.
2- Mesures à visée morale prises par les autorités compétentes
La Direction des Grandes entreprises sise à Ambohidahy a installé un système
informatique de télé-déclaration nommé SIGTAS ou « Standard Integrated Government Taxe
and Assimilated System ». Il s’agit d’une nouvelle version de communication entre le
contribuable et cette entité. Grâce à ce système, le contribuable n’a plus besoin d’aller dans
les locaux de la Direction pour accomplir les formalités fiscales car tout se règle en ligne via
internet. De plus, un décret du Ministère des Finances et du budget a renforcé ce système en
41
Op.cit., p.147 42 Instruction n°459, MFB/SG/DGI portant application des dispositions légales en matière d’amendes et
pénalités fiscales, 5 mai 2008. Cette instruction retrace un tableau non exhaustif de différents types d’infractions
auxquels seront appliqués sans hésitation ni aucune interprétation les amendes et les pénalités. A titre d’exemple,
le défaut de déclaration est puni d’une amende de 200.000 Ariary.
38
instituant que désormais « tout paiement d’impôt, droit et taxes dans le cadre de l’application
de la télé-déclaration doit être fait par virement bancaire quelque soit le montant »43.
D’après un des Responsables de la Direction des Grandes Entreprises, ces méthodes
présentent un triple avantage. D’une part, elle garantit la sécurité et la célérité des
informations recueillies. Ensuite, elle limite le déplacement croissant des contribuables vers
les locaux en matière de déclaration et de paiement. Enfin, elle s’inscrit dans la lutte contre la
corruption vu que les entretiens individuels avec les contribuables favorisent la prolifération
des pots de vins.
Les conventions conclues entre Madagascar avec d’autres pays comme la France et
l’île Maurice s’inscrivent dans cette optique de moralisation. D’une part, elles permettent
d’éviter la double imposition. D’autre part, elles favorisent la lutte contre l’évasion et la
fraude fiscale. Dans le cadre de cette lutte, elles facilitent par exemple les échanges de
renseignements entre les pays contractants.
D’autres aspects moraux du droit fiscal sont également palpables.
3- Autres aspects moraux du droit fiscal
Le droit fiscal ne se résume pas uniquement à l’image d’un chasseur qui tire sur tout
ce qui bouge. A travers les dispositions du CGI, des considérations éthiques sont visibles. A
titre d’exemple, les réductions d’impôts à raison des personnes à charges prévues par l’article
01.02.43 s’agissant des revenus non salariaux, et l’article 01.03.19 pour les impôts sur les
revenus salariaux et assimilés.
L’attention du législateur à vouloir exonérer de TVA les produits tels les
médicaments, les articles pharmaceutiques et les matériels à usage médical n’est pas anodine.
Ce sont des produits qui se distinguent par leur urgence, leur nécessité et leur utilité pour la
population.
La connotation morale se fait également sentir sur le fait que le droit fiscal consacre un
chapitre spécifique dressant une liste d’exemptions de droits de timbres et d’enregistrement.
Sont exemptés par exemple, les missions religieuses et églises « lorsque les actes à leur profit
ont pour objet des biens destinés à usage culturel, scolaires ou d’œuvres sociales » selon
l’article 02.11.05 et les crédits sociaux et agricoles selon l’article 02.11.11.
43 Décret n°60, MF/SG/DG portant modification des dispositions de la décision n°33 MFB/SG/DGI du
08 Aout 2008 relatives au recouvrement par les services fiscaux n°917 MFB/SG/DFI du 6 Novembre 2008
39
De ce qui précède, on a pu constater qu’il fallait insister sur les dispositions du CGI
pour déceler une certaine éthique dans le droit fiscal, alors que dans certaines disciplines, la
présence de l’éthique est certaine.
Section 3 – Présence certaine de l’éthique dans les disciplines du droit des affaires
On distingue le droit du travail et le droit pénal des affaires comme intégrant
parfaitement l’éthique.
Paragraphe 1-Droit du travail
L’exemple le plus significatif concernant les interactions entre l’éthique et le droit des
affaires est sans nul doute le droit du travail. Sa préoccupation de la situation du travailleur
révèle ainsi sa volonté de protéger les plus faibles économiquement et socialement.
En effet, le travailleur représente le capital humain qui participe activement à la
pérennité de l’entreprise. Son succès est dû en majeure partie à la performance de chaque
employé. Pourtant, ce dernier est souvent victime d’injustices. Il apparait ainsi légitime
d’assurer sa protection. D’où son respect est une question d’éthique inévitable dans le monde
des affaires.
A l’instar des législations sociales des autres pays, la loi n°2004-044 du 28 juillet 2004
portant Code du Travail suivi par une collection de décrets et arrêtés, ont été élaborés en ce
sens. Les conventions internationales relatives à ce thème ratifiées par Madagascar ont
également favorisé à étoffer l’encadrement légal du travail dans la protection du travailleur.
L’esprit qui domine cette loi est le « principe du plus favorable au travailleur ». En
cas de conflit de dispositions, c’est-à-dire qu’en présence de dispositions extérieures et de
dispositions du Code du Travail, la plus favorable s’applique d’office à l’endroit du
travailleur.
Nonobstant ce principe, l’éthique au travers du code de travail se manifeste sous
plusieurs aspects. La loi renforce la protection du travailleur à trois niveaux à savoir :
- avant, c’est-à-dire lors du recrutement du travailleur
- pendant, c’est-à-dire durant la période dans laquelle le travailleur est en fonction
- après, c’est-à-dire lorsque le travailleur n’exerce plus sa fonction
40
Nous nous permettrons de regrouper la manifestation de l’éthique dans ces trois phases
en quelques lignes. Elle se manifeste par la prise en considération d’une certaine catégorie de
travailleur, par la garantie de leurs droits et enfin par leur protection complète.
A- Prise en considération d’une certaine catégorie de travailleur
Le législateur a pris le soin de légiférer en faveur notamment des enfants en
soumettant leur travail à des recommandations rigoureuses. La femme dont l’accès à la
profession lui était interdit jadis fait également l’objet d’une section particulière. Les
handicapés sont également protégés par le principe de non-discrimination en son article 5
alinéa 1.
Les droits du travailleur sont également largement reconnus.
B- Reconnaissance des droits du travailleur
La loi permet l’exercice de certains droits du travailleur dans la sphère de l’entreprise.
Elle lui reconnait outre le droit de grève en son article 228 et le droit de la défense. La liberté
de conscience et d’opinion s’exprime à travers le droit à tout salarié d’adhérer à un syndicat
des travailleurs. Tous ces droits sont d’ailleurs renforcés par la constitution malgache.
Cependant le travailleur ne dispose pas uniquement des droits, il est également soumis
à certaines obligations. La loi reconnait principalement l’exécution loyale du travail envers
l’employeur en son article 10 dont la jurisprudence se charge de développer la notion à défaut
de définition légale.
Ajouté à cela, nous pouvons également remarquer que la protection du travailleur est
complète.
C- Protection complète du travailleur
La loi assure le respect de sa vie privée et de sa dignité humaine en son article 5, la
protection de son salaire en ses articles 66 et suivants. Il impose la non discrimination en son
article 105 et limite la durée du travail en son article 75. Il lui octroie également un temps de
repos. Le droit au repos et au congé est une valeur fondamentale selon l’article 24 de la
Déclaration Universelle des Droits de l’Homme car du point de vue éthique, une durée de
labeur excessive est inadmissible. Le salarié est avant tout un être humain, il n’est pas réduit à
une simple machine de production.
41
La santé du travailleur fait également partie des préoccupations éthiques de la loi. Elle
impose à l’employeur la mise en place d’une médecine d’entreprise en son article 128, exige
la mise en place d’un environnement de travail respectueux des normes d’hygiène et de
sécurité et lui assure une retraite.
Son licenciement est d’ailleurs très encadré comme le confirme l’article 26 de la loi.
Pour éviter les abus de la part des employeurs, la loi a mis en place des procédures strictes
tendant à garantir le respect des droits des salariés. A titre d’exemple, les salariés licenciés ont
droit à un préavis et une indemnité de licenciement. L’idée est de venir en aide au salarié qui
se trouve sans emploi et pour éviter que le licenciement ne soit pas pressenti comme un arrêt
brutal du travail.
La promotion du dialogue social à tous les niveaux fait également partie des domaines
du code du travail. Il privilégie la communication entre les principaux acteurs du monde du
travail : l'employeur, le travailleur et l'Etat. Un auteur l’a d’ailleurs confirmé quand il évoque
que « la procédure de règlement des différends collectifs de travail de la loi met l’importance
du Fihavanana »44. On constate ainsi que les valeurs morales coutumières trouvent leur place
au sein du droit.
La saisine par le travailleur des entités comme l’inspecteur du travail ou le tribunal de
travail est aussi encouragée par la loi pour qu’il puisse recouvrer efficacement ses droits.
La présence de l’éthique au sein du droit pénal des affaires est également évidente.
Paragraphe 2-Droit pénal des affaires
Beaucoup considèrent le droit pénal comme un intrus au sein des affaires. Beaucoup
s’accordent à dire qu’un système répressif rigoureux risque de freiner les initiatives. Pourtant,
la quête démesurée de profit peuvent aboutir à des dérives comportementales, la société est
d’ailleurs la victime médiate de ces infractions économiques. Remarquons aussi que le profil
de ces délinquants présente une particularité surprenante. Ces délinquants, « les criminels à
col blanc » comme aiment le répéter certains auteurs, sont avant tout des professionnels qui
usent de leur position, de leur intelligence et des artifices de toute sorte pour duper la
confiance des autres et réaliser leurs méfaits.
44
Mamy ANDRIAMITSIRIONY, « Le dynamisme du droit du travail : analyse comparative du droit
du travail français et du droit du travail malgache », Revue MCI, novembre-décembre 2004, n°14-15, p.8-9
42
Face à ces pratiques choquantes, Il est ainsi du devoir naturel et éthique du législateur
d’endiguer ces conduites antiéconomiques. Le droit pénal a pour but de rétablir la justice
bafouée par ces délinquants sans scrupules. La moralisation du monde des affaires par le droit
pénal intervient de deux manières.
D’abord, par la prise en compte de l’élément intentionnel dans l’évaluation de
l’infraction. La mauvaise foi de la part de leur auteur constitue de surcroit un élément
susceptible d’aggraver les sanctions auxquelles il s’expose. L’intention dont le champ
d’application était limité au domaine moral rentre désormais dans la sphère d’application du
droit.
Ensuite, il se distingue également à travers l’intérêt particulier qu’il veut protéger. Il
vise des intérêts ciblés uniquement à la sphère de l’entreprise. Le droit pénal des affaires
regroupe ainsi l’ensemble de règles qui régit chaque stade de la vie de l’entreprise aussi bien
dans son organisation interne que dans ses relations avec l’extérieur.
C’est pourquoi nous allons développer les infractions que le droit pénal des affaires
réprimande principalement au niveau du fonctionnement de l’entreprise et au niveau de ses
relations avec les tiers. L’avènement d’infractions spécifiques conduit à prendre conscience
de l’ampleur que représente le monde des affaires et de la nécessité de sa moralisation.
A- Répression des infractions relatives au fonctionnement de la société
Il s’agit du droit pénal des sociétés qui fait partie intégrante de la loi 2003-036 du 30
janvier 2004 sur les sociétés commerciales. La loi recouvre un grand nombre d’infractions
relatives à la constitution, la gérance, les modifications du capital, le contrôle et la liquidation
de la société. Le fait pour la loi d’intervenir au sein de la société à titre préventif et répressif
témoigne de la volonté du législateur à garantir le fonctionnement normal et corollairement
moral de la société.
Les infractions peuvent également toucher les relations de l’entreprise avec les tiers.
B- Répression des infractions relatives aux relations de la société avec les tiers
L’entreprise entretient des relations étroites avec les salariés et ses concurrents. En vue
d’éviter des éventuels abus, les textes relatifs à leur domaine déterminé encadrent de manière
très stricte ces relations. Le code du travail malgache regorge de dispositions pénales qui
visent à réprimer les infractions portant atteinte aux droits du travailleur. La loi sur la
43
concurrence ne fait pas défaut à cette démarche en consacrant un chapitre relatif à la
répression des infractions portant atteinte à la concurrence et aux droits des concurrents.
L’avènement d’infractions particulièrement immorales portant gravement atteinte à
l’éthique des affaires nécessite également leur répression.
C- Répression des infractions spécifiques
On ne peut que saluer l’adresse du législateur d’accueillir d’autres infractions
spécifiques au droit des affaires. En effet, ces infractions révèlent les proportions énormes que
peuvent présenter les activités d’une entreprise. On distingue entre autres les lois n° 2004-045
relative à la prévention et la répression des infractions en matière de chèques, n° 2004-030 du
9 septembre 2004 sur la lutte contre la corruption et n° 2004-020 du 19 août 2004 sur le
blanchiment, le dépistage, la confiscation et la coopération Internationale en matière de
produits du crime.
Ces attentions du législateur reflètent ainsi l’ampleur de la dimension morale qui
domine les disciplines précitées.
Cependant, une autre discipline s’inscrit dans ce mouvement éthique. Il convient
également d’aborder la présence de l’éthique dans le droit de l’environnement.
Section 4- Discipline d’exception : le droit de l’environnement
Une justification est de mise avant d’entamer ses manifestations.
Paragraphe 1-Justification de l’éthique au sein du droit de l’environnement
Le droit de l’environnement constitue une discipline d’exception pour deux raisons.
D’une part, il ne figure pas principalement dans les disciplines du droit des affaires. Pourtant
d’autre part, il entretient des relations étroites avec ce dernier. En effet, certaines activités des
entreprises ont des répercussions néfastes sur l’environnement. Ce constat a conduit à une
prise de conscience de la part du législateur. Son objectif est de concilier la protection de
44
l’environnement et la promotion de l’investissement. Le cadre règlementaire est d’ailleurs très
strict à ce sujet45.
A cet effet, les manifestations sont multiples.
Paragraphe 2- Manifestations de l’éthique au sein du droit de l’environnement
La protection de l’environnement est envisagée selon trois phases. D’abord, les textes
règlementaires imposent un certain nombre d’obligations aux investisseurs.
Ensuite, un contrôle permanent garantit le suivi de ses activités.
Enfin, des sanctions sont prévues en cas de manquements aux engagements de la part
des investisseurs.
A- Obligations des investisseurs
Ces obligations sont prévues à titre de prévention. Selon un Responsable de l’ONE
approché, elles sont au nombre de trois. D’abord, une étude d’impact environnemental du
projet est entamée avant tout démarrage des travaux. Le projet sera ainsi évalué selon des
critères qui doivent tenir compte du développement économique, des aspects sociaux et de la
protection de l’environnement.
A la suite de cette étude évaluée en sa faveur, l’investisseur doit obtenir au préalable
un permis environnemental délivré par le Ministère chargé de l’environnement.
Ensuite, il doit respecter un cahier de charges qui définit les obligations que doit
respecter l’investisseur dans le cadre de la protection de l’environnement.
Cependant, ces obligations sont dénuées d’effet sans un contrôle efficace.
B- Contrôle de l’activité
Il existe deux types de contrôle. Le contrôle de la société qui relève de sa propre
initiative ou « l’auto-surveillance »46. Ensuite, le contrôle par les autorités compétentes. A ce
45
Citons notamment l’article 37 de la Constitution qui le consacre en tant que principe fondamental, il y
a également la Charte de l’environnement suivie par la loi n°99-021 du 19 août 1999 sur la politique de gestion
et de contrôle des pollutions industrielles, le décret n°99-957 du 15 décembre 1999, modifié par le décret
n°2004-167 du 3 février 2004 relatif à la mise en compatibilité des investissements avec l’environnement. 46
RABARY Lova, « La pollution nationale malgache en matière de pollutions industrielles », revue
MCI, juin 2004, n°009, p.13
45
titre, l’ONE veille à l’application du cahier de charges. En vue d’une optimisation de la
protection de l’environnement, l’ONE projette également de publier dans le courant de
l’année une revue rapportant les résultats environnementaux des entreprises. Les résultats qui
seront relatés dans cette revue porteront tant sur les précautions prises par les entreprises que
sur les retombées négatives de leurs activités sur l’environnement. Cette revue est salutaire
dans la mesure où elle fera pression sur les investisseurs, et constituerait ainsi un facteur
d’engagement ces derniers. Désireux d’améliorer leur image, ils feront preuve de vigilance
dans la manière de conduire leurs activités.
Des sanctions sont prévues pour ceux qui auront outrepassé leurs engagements.
C- Sanctions prévues
Les sanctions prévues sont diverses. Elles peuvent consister en des mesures
administratives comme la fermeture de l’établissement et le retrait du permis
environnemental. Des sanctions pécuniaires sont également prévues. On aperçoit la rigueur
des sanctions étant donné l’enjeu considérable.
A travers l’inventaire de ces quelques disciplines du droit des affaires, la présence de
l’éthique dans ces domaines apparait d’autant plus confirmée. D’ailleurs, le juge n’est pas
absent dans la promotion de l’éthique.
CHAPITRE 2- ETHIQUE APPREHENDEE PAR LE JUGE
Le contrat est le mode de transaction le plus usité dans le monde des affaires. La
traditionnelle formule de Fouillé « qui dit contractuel, dit juste » n’a heureusement plus cours.
De nouveaux aménagements ont été adoptés par le législateur mais les nouveautés en la
matière sont pour la majorité l’œuvre de la jurisprudence.
Une comparaison est toutefois à faire au niveau de la jurisprudence française et de la
jurisprudence malgache dans la perception de l’éthique au sein des affaires.
Section 1- Ethique perçue par le juge français
La juge français fait primer les considérations morales dans sa prise de décision.
Preuve en est avec l’exigence de bonne foi qui doit primer dans les contrats. On assiste
également à ses déclinaisons.
46
Toutefois, des limites ont été opérées par la jurisprudence.
Paragraphe 1- Ethique au regard du juge français
Le respect de la bonne foi a été érigé en principe légal selon l’article 1134 alinéa 3 du
code civil qui dispose que « les conventions doivent être exécutées de bonne foi ».
Vu que le terme est très vague, le juge a pris soin de délimiter ses contours. La notion
de bonne foi se traduit par l’abus de droit. Ce principe classique du droit civil connait
également un écho dans le monde des affaires avec l’abus de minorité, l’abus de majorité,
l’abus de biens sociaux.
Selon DEMOGUE, la bonne foi signifie que « le contrat ne doit plus être apprécié
comme le siège d’intérêts antagonistes mais comme le creuset de l’intérêt commun des
contractants »47. Cette notion est d’ailleurs très extensible. Le juge a admis le devoir de
loyauté dans les contrats. La bonne foi a également retenti au sein du droit des sociétés qui
impose le devoir de loyauté de son dirigeant. Ce devoir de loyauté a été consacré par un arrêt
Vilgrain du 27 février 199648. En l’espèce, le dirigeant avait dissimulé à un associé les
négociations qu'il menait pour revendre les actions à un prix nettement supérieur au prix
d'acquisition. Depuis, de nombreux arrêts ont contribué à développer cette notion. En effet,
certains arrêts ont même développé les composants de ce devoir de loyauté : « Les normes de
comportement par lesquelles se traduisent cette obligation de loyauté sont de ne pas abuser
des biens de la société et de la gérer dans l'intérêt social, de ne pas la concurrencer et
d'informer les associés, les tiers et les autres dirigeants »49.
Elle a également admis l’obligation d’information étendue notamment aux
établissements bancaires. Elle consiste en un devoir de mise en garde du banquier qui se
décompose en trois obligations : « l’obligation de se renseigner sur les capacités de
remboursement de l’emprunteur, l’obligation de consentir un crédit adapté aux facultés
contributives de l’emprunteur et l’obligation d’alerter l’emprunteur sur les risques de
l’opération et de non-remboursement des prêts »50.
47 Dictionnaire juridique visible sur le site http://www.lexinter.net
48 Cour de Cassation, Chambre commerciale, Audience publique du 27 février 1996, N° de pourvoi : 94-11241, Publié au bulletin
49 Devoir de loyauté du dirigeant, article visible sur le site
http://lexinter.net/JF/devoir_de_loyaute_du_dirigeant.htm 50
FASQUELLE Daniel, Droit de l’entreprise, « essentiel pour comprendre le Droit », édition LAMY,
2007-2008, p.1114
47
L’ardeur du juge à protéger les contractants est également palpable avec l’avènement
du devoir d’estoppel issu du commerce international. Ce concept accueilli favorablement par
le juge français suscite un intérêt car selon M. BOVAL, c’est « la tendance à une
moralisation dans l'exercice des droits subjectifs »51. Il consiste à ne pas se contredire au
détriment d’autrui car par ses comportements ou ses paroles, il a conquis la confiance
d’autrui. Un arrêt rendu par la chambre commerciale en date du 8 mars 2005 a intégré ce
concept pour légitimer sa décision. En l’espèce, une société avait ouvert auprès d’une banque
un compte courant divisé en deux sous-comptes mais lié par une clause d’unité de compte. Or,
la banque s’est conduite comme si les deux comptes étaient différents et après coup a
demandé le solde du compte après fusion des deux sous-comptes. Le juge a considéré qu’ « en
dépit de la signature d’une convention d’unité de compte, la banque, qui, en faisant
fonctionner les comptes litigieux comme des comptes indépendants, avait adopté un
comportement incompatible avec l’application de la convention litigieuse, dont elle a
revendiqué ensuite le bénéfice, avait manqué à son obligation de bonne foi »52.
Le juge semble sans limites pour protéger les contractants. Le problème réside dans le
fait que ces derniers se croient immunisés contre toute attaque car persuadés que le juge les
protègera toujours. De plus, cette attitude pousse les contractants à ne plus se protéger par ses
propres moyens.
Conscient de ces faits, le juge a néanmoins posé des limites.
Paragraphe 2- Limites fixées par le juge français
Les limites ont été palpables à travers un arrêt rendu par la première Chambre civile
de la Cour de cassation le 3 mai 200053. En l’espèce, des enchères publiques avaient mis en
vente des photographies de « Baldus » pour 1000 francs chacune dont un individu s’est porté
acquéreur. Ensuite, ce dernier l’a revendu au même prix. Or, le vendeur a appris quelques
temps après, que ces photographies valaient bien plus que leur prix de vente initial. Le
vendeur fait prévaloir l’obligation d’information de contracter qui pèse sur l’acheteur qui
51
Rapport de M. BOVAL, Conseiller rapporteur, Communiqué, Arrêt n° 573 du 27 février 2009, Avis
de l'avocat général 52
Cour de Cassation, Chambre commerciale, Audience publique du 8 mars 2005, Cassation, N° de
pourvoi : 02-15783, Publié au bulletin, 53
Arrêt « Baldus », Civ. 3eme, 3 mai 2000
48
n’ignorait pas la valeur réelle de ces photographies. Mais le juge a tranché d’une autre
manière en arguant le fait qu’ « aucune obligation d’information ne pèse sur l’acheteur ».
Cette décision est très sévère dans la mesure où il n’y avait aucun doute que l’acheteur était de
mauvaise foi. Cet arrêt marque peut-être la tendance du juge à limiter ses exploits de ces
dernières années dans la protection extrême des parties au contrat.
Les considérations éthiques transparaissent également en matière de preuve. En droit
commercial, la preuve peut être faite par tous moyens. Mais le juge a posé des limites. Un
arrêt du 7 octobre 200454 renforce cette hypothèse. En l’espèce, une conversation
téléphonique privée et enregistrée à l’insu de son auteur a été rapportée comme preuve dans
un procès. Mais le juge a considéré cette preuve comme irrecevable "Sauf disposition expresse
contraire du code de commerce, les règles du code de procédure civile s'appliquent au
contentieux des pratiques anticoncurrentielles relevant de l'Autorité de la concurrence ; ainsi,
l'enregistrement d'une communication téléphonique réalisé à l'insu de l'auteur des propos
tenus constitue un procédé déloyal rendant irrecevable sa production à titre de preuve »55.
Ainsi, les preuves, bien qu’elles attestent parfaitement la culpabilité, ne doivent pas porter
atteinte aux libertés fondamentales.
Le juge malgache tient également compte des impératifs moraux. Mais sa perception
de l’éthique est légèrement différente.
Section 1- Ethique perçue par le juge malgache
A travers cet arrêt rendu par la Cour Suprême en date du 2 Aout 200256, les
considérations éthiques apparaissent. En l’espèce, un employé qui avait démissionné, a
assigné son employeur pour licenciement abusif. L’employeur a avancé qu’il ne s’agit pas
d’un licenciement abusif mais d’une démission volontaire de l’employé. Le juge a tranché en
faveur de l’employé au motif que l’employeur a affecté son travailleur à un poste qui n’était
pas adapté à sa condition physique et que ce comportement a conduit ce dernier à
démissionner.
54
Référence de l’arrêt : BICC n°612 du 1er févr. 2005 et Com. 3 juin 2008, BICC n°890 du 1er
novembre 2008) 55
Référence : Assemblée plénière 7 janvier 2011, pourvoi n°09-14316 09-14667, - Rapport de M.
Bargue ; Conseiller rapporteur- Avis de Mme Petit, Premier Avocat Général, BICC n°735 du 1er février 2011 et
Legifrance, sur le site du Dictionnaire de droit privé de Serge Braudo 56
Arrêt visible dans la revue MCI, Novembre-Décembre 2004, N° 14-15, p.27
49
Mais comparé à son homologue français, dans certains arrêts malgaches, on a pu
constater la tendance des juges à appliquer les règles légales en vigueur et les règles du
contrat passé entre les acteurs économiques.
Paragraphe 1- Ethique : application stricte des règles légales
La volonté d’appliquer les dispositions d’ordre public constitue le principal objectif
moral du juge. Ces considérations éthiques transparaissent notamment dans l’application des
règles du code du travail.
Citons en référence un arrêt de la Cour Suprême de Madagascar en date du 02 Août
200257. En l’espèce, un employeur avait convenu avec son employé, qu’en cas de résiliation
de contrat, elle se fera sans indemnisation ni préavis. C’est à bon droit que le juge a tranché en
faveur de l’employé. Selon l’article 75 du code du travail, toute convention ou transaction
passée entre les contractants, ne signifie pas que le travailleur renonce à ses droits acquis
prévus par le code du travail.
L’apport considérable des normes internationales de travail est palpable au niveau de
la jurisprudence malgache.
A titre d’exemple, un arrêt rendu par la Cour suprême de Madagascar en 200358. En
l’espèce, il s’agissait de la convention collective d’une compagnie aérienne qui avait fixé
l’âge de la retraite pour le personnel de bord féminin à 45 ans et pour le personnel de bord
masculin à 50 ans. Des employées ainsi mises à la retraite avaient saisi le juge en vue de faire
annuler cette clause figurant dans la convention collective. La Cour d’appel avait rejeté leurs
prétentions. Les employées avaient alors saisi la Cour suprême qui trancha en leur faveur. Elle
a appliqué directement les dispositions de la Convention n° 111 de l’OIT en tant que règles
incorporées dans notre droit national, pour considérer comme discriminatoire l’article de la
convention collective d’une compagnie aérienne prévoyant une mise à la retraite plus précoce
pour le personnel de bord féminin. Les propos du juge sont très clairs à ce sujet : « (…)le
recours à une limite d’âge ou à une restriction fondée sur le sexe ne pourrait être justifié que
si l’employeur peut prouver que le sexe constitue une exigence professionnelle justifiée par la
nature de l’emploi, pour des raisons de sécurité et, en particulier, dans des emplois
comportant des dangers, la preuve des effets de l’âge en considération du sexe sur la sécurité
57
Op.cit. Revue MCI, p. 29 58
Cour Suprême de Madagascar, Dugain et autres c. Compagnie Air Madagascar, arrêt n°231 du 5 septembre 2003
50
devant être rapportée(…)». Cette décision constitue un apport considérable au sein de la
jurisprudence. D’abord, elle renforce le principe interdisant toute forme de discrimination en
considération du sexe. Ensuite, elle a également le mérite d’avoir soulevé l’exception selon
laquelle la discrimination peut être fondée : la discrimination est admise à condition que
l’employeur apporte la preuve qu’elle est nécessaire eu égard à la nature et aux risques
dangereux liés à l’emploi. La référence à ces normes internationales s’avère prometteuse dans
la mesure où elles concourent à renforcer l’armement juridique que le travailleur pourra
utiliser selon le cas d’espèce pour parer aux éventuels abus de son employeur.
Cet engouement de juge laisse subsister des questionnements. Citons un arrêt rendu
par la Cour Suprême en date du 18 mars 200459 dont les faits sont les suivants : un employeur
n’a pas respecté les règles d’ordre public relatives au licenciement d’un de ses salariés, au
motif que ce dernier a commis une faute lourde dans l’exercice de ses fonctions. Le juge a
déclaré « sans qu’il soit besoin d’apprécier les faits reprochés au travailleur, l’inobservation
des règles de forme suffit à elle seule à conférer au licenciement un caractère abusif ». Cet
arrêt met en évidence l’égalité de traitement entre le travailleur de bonne foi et celui de
mauvaise foi ainsi que la force obligatoire des dispositions d’ordre légales. Du point de vue
juridique, c’est à bon droit que le juge a tranché de cette manière. Mais éthiquement parlant,
l’employeur est victime d’injustice.
S’engager sur le chemin de l’éthique est une pente glissante pour le juge. Il est difficile
de concilier les deux intérêts en présence, de satisfaire un intérêt au détriment d’un autre.
D’où la référence à la loi semble le moyen le plus équitable pour trancher un litige.
Cette perception de l’éthique est également visible au niveau des relations
contractuelles.
Paragraphe 2- Ethique : application stricte des règles contractuelles
Le juge veille également à l’application du contrat car les contractants sont investis
d’une obligation morale et légale d’exécuter ses obligations. Pour illustrer nos propos, citons
notamment deux arrêts rendus par le tribunal de commerce en 200960.
S’agissant du premier arrêt : une société X a assigné la société Y pour des factures
impayées. Pour sa défense, la société Y affirme qu’elle a l’intention de payer mais suite à des
59
Bulletin des arrêts de la Cour Suprême N°59
60 Cf. N° 14-C du 13 Février 2009 et N° 32-C du 26 Février 2009
51
difficultés financières, elle sollicite un délai pour payer ses dettes. Le juge a tranché en faveur
de la société X au motif de l’existence d’une lettre d’engagement de la part de la société Y. Il
lui a refusé l’octroi de délai car le fait de ne pas respecter son engagement est constitutif de
mauvaise foi de sa part.
Le deuxième arrêt relate les faits suivants. Un tiers a contracté avec le chef du
personnel de la société X. N’ayant pas reçu les paiements prévus, le tiers assigne la société X
pour demander le paiement de sa créance. La société X avance des arguments pertinents :
« -seuls les gérants de société ont le pouvoir d’engager la responsabilité de la société
-que le tiers savait que le chef du personnel n’avait pas la qualité d’engager la société
et qu’il ne peut s’en prendre qu’à lui-même.
-que la société ignorait l’existence de la créance et qu’elle portait sur un produit qui
ne rentrait pas dans l’activité normale de l’entreprise.
-que le chef du personnel ne travaille plus au sein de la société et que ce dernier a
utilisé frauduleusement l’en-tête de la société pour passer ce contrat. »
Mais le juge a rétorqué en affirmant « Que la société X est mal venue pour écarter sa
responsabilité en invoquant le défaut de qualité de son ancien chef de personnel ».
Ces deux décisions du juge partent du principe éthique qu’il faut assumer ses
responsabilités peu importe les circonstances. Elles sont sans doute sévères certes, mais ces
deux décisions reflètent le pouvoir discrétionnaire dont dispose le juge.
De ce qui précède, le droit des affaires et le juge tiennent compte des considérations
éthiques. Il s’avère intéressant d’étudier dans le développement suivant la portée de ces
approches.
CHAPITRE 3 - PORTEE DE L’APPROCHE ETHIQUE PAR LES P RINCIPES
DU DROIT DES AFFAIRES
L’éthique n’a pas seulement atteint le droit des affaires au niveau national, de
nombreux pays industrialisés comme les Etats-Unis et la France ont également développé des
mécanismes à vocation éthique pour assainir le monde des affaires. Les avancées en la
matière se situent notamment au niveau du droit des sociétés avec la gouvernance
d’entreprise, et du droit du travail avec l’alerte éthique.
Leur trait commun est la prise en compte des parties prenantes souvent oubliées alors
qu’elles sont les principales affectées par ce qui touche la vie des affaires.
52
Cependant, l’application des approches éthiques par les principes du droit des affaires
offre une toute autre réalité.
Section 1- Renforcement des considérations éthiques du droit des affaires
La gouvernance d’entreprise et l’alerte éthique se sont implantées dans les pays anglo-
saxons avant de gagner des pays comme la France et l’Angleterre. Elles contribuent à
renforcer le droit des sociétés et le droit du travail.
Ces mécanismes appellent certes à une application universelle. N’éludons pas la
possibilité que le droit des affaires malgache soit ouvert à ces influences internationales.
Néanmoins, il ne faut pas écarter les séquelles, aussi bien positives que négatives que
cette évolution apporterait sur le droit des affaires malgache. En effet, ces mécanismes ont eu
des retombées considérables dans les pays développés. Il faut prendre conscience des enjeux,
de l'intérêt de ces évolutions mais aussi des difficultés juridiques et techniques de leur mise en
œuvre à Madagascar.
Sous-section 1 – Renforcement des considérations éthiques du droit des sociétés : la
gouvernance d’entreprise
La gouvernance d’entreprise a sensiblement chamboulé le droit des sociétés. Afin
d’obtenir plus de détails, nous allons développer ses contours à savoir sa notion et ses
principes directeurs.
Paragraphe 1- Notion de gouvernance d’entreprise
La globalisation et la complexité du monde des affaires ont conduit les acteurs
économiques des pays développés à mettre en place de nouvelles techniques qui répondraient
aux exigences de célérité et de rendement des transactions. Ce fut l’avènement du marché
boursier.
Pourtant, toute médaille a son revers, on pourrait accuser l’accroissement et la
complexité des opérations boursières, car entre les mains d’hommes d’affaires habiles et sans
scrupules, le marché boursier devient, au fil du temps, le lieu où règnent manipulations et
escroqueries de toute sorte. On assista ainsi à de nombreux scandales financiers qui ont
bouleversé certains pays comme les Etats-Unis avec l’affaire d’Enron en 2001, « (…) La
53
faillite d'Enron a en effet provoqué la perte de plusieurs milliers d'emplois et 1 milliard de
dollars du fonds de pension, investi en actions, est parti en fumée(…) ».61
Ces dérives comportementales ont causé une crise de confiance entravant l’économie
et le fonctionnement des sociétés cotées. En effet, elles ont révélé les fissures que présente un
système défaillant en matière de contrôle interne, de déontologie, d’indépendance et d’éthique
de la part des dirigeants et des auditeurs.
En vue de rétablir cette confiance, et en réaction à cette série de scandales, certains
pays ont décidé de bâtir un édifice réglementaire plus solide, d’où la naissance de la
gouvernance d’entreprise.
Cette initiative offre une autre vision des différents pouvoirs au sein de l’entreprise.
Selon une définition du Code OCDE 1999, la Gouvernance d'entreprise « désigne l'ensemble
de relations entre la direction d'une entreprise, son conseil d'administration, ses actionnaires
et les autres parties prenantes. La gouvernance d'entreprise fournit également le cadre au
sein duquel sont fixés les objectifs de l'entreprise et définit les moyens de les atteindre et de
surveiller les performances. En anglais, se dit Corporate governance »62. Ce concept a pour
conséquence, comme son nom l’indique, de gouverner la conduite des dirigeants par une
limitation et un contrôle de leurs pouvoirs et de faire participer les parties prenantes. Ainsi,
l’intérêt des dirigeants s’aligne à celui des actionnaires.
La gouvernance d’entreprise s’inscrit dans la promotion de l’éthique des affaires car
elle vise à équilibrer les pouvoirs au sein de l’entreprise. A cet effet, les règles de droit des
sociétés classiques cèdent la place à de nouvelles règles sur la comptabilité et deviennent plus
exigeantes en matière de transparence financière.
Ainsi, il sera développé dans le prochain paragraphe les nouveaux principes qui
entourent la gouvernance d’entreprise.
61
« Eclairage Enron : un cas d'école » Par Roger SCHINDELHOLZ, chroniqueur au Quotidien jurassien
62 Définition de la gouvernance d’entreprise sur le site http://www.dictionnaire-environnement.com
54
Paragraphe 2-Principes directeurs de la gouvernance d’entreprise
« Un sénateur démocrate, M. P. Sarbanes, et un représentant républicain, M. M.
Oxley, ont rédigé une proposition de loi dont le but est de modifier de manière substantielle
les règles du gouvernement d’entreprise aux Etats-Unis »63
C’est ainsi qu’est apparu le «Public Accounting Reform and Investor Protection Act of
2002» ou communément appelée « sarbanes-oxley Act » qui demeure d’ailleurs, la plus
importante réforme en matière de marché financier. En effet, elle porte particulièrement sur le
fonctionnement et le contrôle des organes de direction et une amélioration de l’accès et de la
qualité de l’information financière.
Le succès que ce texte rencontra fut immédiat vu qu’il a été adopté à la quasi-
unanimité par le Congrès. Cette loi a également le mérite une fois de plus d’intervenir dans la
gestion des sociétés mais cette fois de manière plus rigoureuse dans le but de rééquilibrer les
pouvoirs en faveur des actionnaires qui sont pour la plupart des investisseurs étrangers. En
tant qu’apporteurs de capitaux bénéfiques pour la société, l’éthique intègre la gouvernance
d’entreprise en vue de leur assurer une protection juridique.
Cette loi a ainsi bouleversé le droit des sociétés en lui offrant des règles qui le
réforment, voire même le revigorent.
Cependant, ces manifestations s’avèrent plus rigoureuses aux Etats-Unis, alors qu’en
France, ces principes sont plus laxistes.
A- Principes rigoureux des Etats-Unis
La rigueur est surtout constatée au niveau des critères de transparence et
d’indépendance.
L’extraterritorialité rentre également dans cette optique.
1- Transparence
Le principe-phare que véhicule le gouvernement d’entreprise est la transparence. Une
vertu morale qui est conjuguée aux affaires depuis longtemps et qui se reflète dans ce milieu
par une amélioration de l’information financière accordée aux actionnaires.
63 N. RONTCHEVSKY, Chronique, RTD Com. Octobre/Décembre 2002 p. 701 et s.
55
Les illustrations en la matière concernent la transparence au niveau des documents
comptables et au niveau du contrôle interne de la société.
a- Au niveau des documents comptables
Les rapports financiers ne se limitent pas seulement à une présentation adéquate.
L’une des innovations les plus importantes de la loi Sarbanes-Oxley est l’obligation faite au
directeur général et au directeur financier de certifier les comptes de la société cotée et leurs
rapports périodiques64. Aussitôt certifiés, ils seront présentés à la commission américaine des
opérations en bourse ou la SEC qui est l’autorité américaine des marchés boursiers. Cette
certification personnelle des comptes engage la responsabilité pénale des dirigeants. Cette
rigueur est justifiée par le fait que ces derniers attestent la véracité des documents comptables
de la société, c’est-à-dire que les informations relatives au fonctionnement de société doivent
présenter un degré élevé de fiabilité et de sincérité.
A ce titre, la loi impose aux sociétés deux certifications ; la certification traditionnelle
qui consiste à donner une image fidèle de l’entreprise et une certification détaillée car il s’agit
d’une certification du rapport annuel de la société dont il est dirigeant ou dont il contrôle la
comptabilité65. La loi a également apporté des recommandations quant au contenu des
rapports financiers, les dirigeants doivent y retracer les opérations même celles qui ne figurent
pas en principe au bilan.
Cette nouvelle certification figure parmi les modifications les plus marquantes de la loi
Sarbanes-Oxley car elle exprime la rigueur quant à la publication des informations financières
de la société. En effet, elle présente l’avantage d’améliorer la protection et l’accès des
actionnaires à des informations régulières et complètes susceptibles de les renseigner sur l’état
de la société. Les comptes financiers de la société étant les moyens permettant de vérifier les
transactions qu’elle effectue au regard des détenteurs de titres, leur authenticité s’avère d’une
importance indéniable car elle retrace l’usage fidèle de la société.
Le contrôle interne de la société se trouve également renforcé.
64
Section 302 Sarbanes Oxley Act of 2002
65 HUG Jonathan et BORRISOVA Miroslava, « Leçons juridiques de la loi Sarbanes-Oxley du 30 juillet
2002 », exposé de DEA Droit des Affaires, p.5-6
56
b- Au niveau du contrôle interne de la société
La loi oblige les entreprises à réaliser des contrôles internes dont l’efficacité doit
pouvoir être prouvée, c’est-à-dire que le dirigeant doit attester l’efficacité de son contrôle
interne66. On assiste également à une évaluation des contrôles internes effectués par
l’entreprise par la commission. En effet, la loi invite la commission à édicter des règles qui
obligeraient les sociétés à présenter auprès de cette dernière un rapport également certifié par
les dirigeants attestant l’efficacité de ces contrôles.
Les pouvoirs de la commission se trouvent d’autant plus confortés car d’une part, la
loi permet à celle-ci de surveiller en permanence l’état de santé de la société garantissant dans
un même temps un suivi des activités des actionnaires ; et d’autre part, elle garantit la
transparence des informations financières à l’égard des actionnaires.
Nonobstant la transparence, le principe d’indépendance connait également une
certaine rigueur.
2- Indépendance
Parallèlement à la certification des comptes, on distingue également l’instauration au
sein des conseils d’administration de ces sociétés, des comités des comptes (ou d’audit)67.
Cette notion d’indépendance se manifeste par l’exigence que chaque membre de ce comité
soit extérieur à la société, c’est-à-dire des administrateurs ne disposant pas d’actions de la dite
société, ne devant recevoir aucun revenu en provenance de la société ou de ses filiales. En
d’autres termes, l’administrateur ne doit avoir aucun lien direct ou indirect avec la société.
L’exigence de cette qualité écarte toute influence sur la prise de décision et évite par
conséquent tout conflit d’intérêt dans la gestion de la société, c’est ainsi qu’ils n’ont droit
qu’aux indemnités liées à leurs fonctions. Cette qualité d’indépendance consacrée par la loi
tend à accorder aux administrateurs un rôle plus actif pour prévenir tout risque de dérives de
la part des dirigeants. Autre avantage de ce comité, il évite la concentration du pouvoir de
direction entre les mains du seul président du conseil d’administration.
66
Section 404 Sarbanes Oxley Act of 2002 67
Section 301 Sarbanes Oxley Act of 2002
57
L’extraterritorialité, un principe original issu de la loi Sarbanes-Oxley, est également
réputée pour sa rigueur.
3- Extraterritorialité
Cela signifie que son champ d’application est large, elle s’adresse aux sociétés cotées
sur le marché boursier américain, que la société soit américaine ou non. Comme un bon
nombre de ces dernières sont cotées au New York Stock Exchange, la plus grande des bourses
mondiales, elles sont de fait soumises à cette loi. C’est pour cela qu’on parle
d'extraterritorialité car la loi s’applique au-delà des frontières des Etats-Unis. La volonté de la
loi est de promouvoir l’éthique au-delà de ses frontières.
Cette application territoriale de la loi Sarbanes-Oxley a soulevé de nombreuses
critiques au sein de nombreux pays comme « en Europe et au Canada, qui ont également mis
en place des lois de sécurité financière, et qui contestent certaines dispositions de la loi
américaine, touchant notamment à la protection de la vie privée. Ces dispositions seraient en
effet incompatibles avec certaines lois européennes »68. Ces critiques sont justifiés dans la
mesure où certaines des dispositions de la loi Sarbanes-Oxley s’avèrent très contraignantes,
alors que les lois internes peuvent s’avérer plus souples.
La liste des changements apportée par la loi n’est pas exhaustive69, cette ébauche de la
loi permet seulement d’affirmer sa pertinence. En effet, elle a pour but de fournir aux
actionnaires une information complète, accessible et véridique combinée avec un encadrement
rigoureux des dirigeants.
La loi a également renforcé cette protection des détenteurs de titres en tenant compte
d’une part, de réparer le dommage subi par l’actionnaire victime, et d’autre part, en
sanctionnant lourdement l’auteur de la fraude. On assiste par exemple à la création de
nouvelles infractions, à des peines plus rigoureuses afin de dissuader tout comportement
68 BLIN Ludovic, « Les implications de la loi Sarbanes-Oxley : Transformer des obligations légales en
avantage concurrentiel », publié sur le site http://www.decisio.info le 28/01/2004 69 La loi évoque également l’interdiction faite à la société de consentir des prêts personnels à ses
dirigeants (similaire avec les conventions interdites dans une société anonyme), ou encore l’interdiction faite à
ces derniers d’exercer une influence sur tout comptable mêlé à la tenue des comptes financiers de la société…
58
frauduleux70. Cette lourde pénalisation tend toujours vers le même objectif, la protection des
actionnaires en instaurant un climat de confiance.
La cause éthique engagée par la gouvernance d’entreprise s’avère efficace. La France
a également intégré ce concept, sa mise en œuvre fera l’objet du prochain développement.
A- Principes laxistes de la France
Parallèlement, la gouvernance d’entreprise a également retenti en France, elle a repris
cette conception anglo-saxonne qui consacre la primauté des actionnaires sur l’ensemble des
différents acteurs. Tout comme les Etats-Unis, les mécanismes de contrôle, l’organisation du
conseil d’administration, la règlementation en matière de transparence et de rémunération des
dirigeants sont érigés suivant cet objectif commun. La gouvernance d’entreprise n’est pas une
notion nouvelle pour la France, elle a déjà fait l’objet de plusieurs rapports ou de documents
de référence qui constituent les fondements de la pratique. De plus, elle confirme la
préoccupation constante du droit français à un réaménagement du droit des sociétés.
Pour parer aux éventuelles fraudes et malversations des dirigeants, on a pu constater
au renforcement du dispositif législatif. La version française de la loi américaine a été
introduite par la loi Nouvelles Régulations Economiques de 2001 complétée par la loi sur la
Sécurité Financière n° 2003-706 du 1er août 2003. Ces textes forment la base juridique de la
gouvernance d’entreprise en France.
On remarque la similitude de cette loi avec celle des Etats-Unis vu les quelques
dispositions empruntées à la loi Sarbanes-Oxley.
Cependant, l’impact de la loi américaine en France présente une portée limité.
1- Emprunt à la loi Sarbanes-Oxley
Parmi les principales dispositions de la loi Sarbanes-Oxley entérinées par l’arsenal
législatif français, on distingue la mise en place d’autorités de contrôle comme AMF qui est le
corollaire de la SEC des Etats-Unis. La loi exige également la présence d’administrateurs
indépendants pour instaurer un équilibre des pouvoirs au sein des organes et l’obligation de
70 A titre d’exemple, le crime pour falsification de comptes ou pour entrave à toute enquête officielle.
Concernant les peines, elles peuvent passer de cinq à vingt-cinq ans de prison et atteindre une somme de 2,5
millions de dollars à 25 millions de dollars
59
certification des comptes et la publication d’un rapport interne. Le fait pour les dirigeants de
contracter des emprunts auprès de la société est interdit.
Nonobstant cette similitude, on distingue également d’autres dispositions originales
telles la transparence des rémunérations des dirigeants.
Toutefois, la portée de la loi américaine en France est limitée.
2- Portée limitée de la loi Sarbanes-Oxley
On constate ainsi que la contrainte imposée par la loi n’a pas atteint le même niveau
que celui des Etats-Unis.
A titre d’exemple, la loi n’impose pas la création d’un comité d’audit au sein de la
société, elle ne fixe pas un quota minimal d’administrateurs indépendants au sein du conseil.
La loi française n’a pas non plus suivi son homologue américain dans la création de
nouveaux délits boursiers. En effet, elle ne possède pas de disposition spécifique en la matière
et maintient les infractions traditionnelles découlant du Code monétaire et financier, du Code
pénal et du Code de commerce. De plus, les sanctions pécuniaires sont limitées à un montant
moins considérable71.
La critique qu’on pourrait émettre face à une telle limitation serait son effet inverse ;
les auteurs des pratiques répréhensibles préfèreraient de loin payer la sanction pécuniaire
prévue par la loi ; car à coté des bénéfices qui pourraient résulter de leurs pratiques, le
montant de la sanction est moins onéreux.
Enfin, concernant la nomination du commissaire aux comptes, la loi française laisse
cette faculté au conseil d’administration alors que la loi américaine prévoit sa nomination par
le comité des comptes, le comité indépendant annexé au conseil d’administration. Le critère
d’indépendance reconnue très largement par la loi américaine ne trouve pas le même écho
dans la loi française.
On remarque au final que la loi française s’est appuyée sur la loi Sarbanes-Oxley
concernant les principes de gouvernance d’entreprise, mais n’a pas repris ses dispositions
dans son intégralité, elle prit le soin de sélectionner celles qui, selon elle, paraissent plus
favorables.
71 Les infractions traditionnelles précitées sont celles prévues par le Code Monétaire et Financier
comme le délit d’initié, le délit de manipulation des cours et le montant de la sanction pécuniaire ne doit pas
dépasser la somme de 1,5 millions d’euros.
60
A la lumière de ces pratiques américaines et européennes, il parait utile d’envisager
l’appréhension de ce concept à Madagascar.
Paragraphe 3-Perspectives d’application des principes de la gouvernance
d’entreprise à Madagascar
L’expression « bonne gouvernance » est fréquemment utilisée dans le jargon
malgache mais on le rencontre principalement dans le domaine politique. Cette notion
appliquée au sein d’une entreprise peut être assurée par une juste répartition des fonctions
propres à chaque entité et par l’importance accordée à la transparence.
Cependant, il ne faut pas éluder les enjeux multiples que présente la gouvernance
d’entreprise. Comme nous l’avons souligné précédemment, les changements qu’elle a
apportés ont sensiblement chamboulé la perception du fonctionnement interne d’une société.
Les sociétés concernées doivent modifier son organisation et son corps de règles pour
s’adapter aux nombreuses évolutions en la matière.
Il est sans nul doute intéressant d’examiner dans quelle mesure ces principes de
gouvernance d’entreprise peuvent s’avérer pertinents à Madagascar. Pour que ces principes
puissent trouver application, il faudrait en premier lieu qu’un texte relatif à ces principes
existe. A cet effet, comparons la loi Sarbanes-Oxley avec le texte législatif en la matière à
savoir la loi 203-036 sur les sociétés commerciales.
Ensuite, comme ces principes s’adressent à des sociétés cotées, il faudrait envisager la
création d’un marché boursier.
A- Comparaison des principes de gouvernance d’entreprise avec la loi 2003-036
sur les sociétés commerciales
La loi relative aux sociétés commerciales n’est pas lacunaire des dispositions relatives
aux sociétés cotées. La loi parle de sociétés anonymes faisant appel public à l’épargne72.
Afin de faciliter l’étude, une comparaison sera opérée entre les principes de
gouvernance d’entreprise et le texte précité afin de pouvoir dégager les similitudes et les
différences.
Elles se situent notamment au niveau des sociétés concernées, des organes internes, de
la présentation des rapports financiers, du contrôle interne et des sanctions.
72 Articles 850 à 875 de la Loi sur Les Sociétés Commerciales
61
1- Au niveau des sociétés concernées
Selon l’article 77 de la loi n°2003-036 du 30 janvier 2004, « sont réputées faire
publiquement appel à l’épargne :
- les sociétés dont les titres sont inscrits à la bourse des valeurs, à dater de
l’inscription de ces titres, c’est-à-dire des titres cotés en bourse ;
- les sociétés qui, pour offrir au public des titres, quels qu’ils soient, ont recours soit à
des établissements de crédit ou agences de change, soit à des procédés de publicité
quelconque, soit au démarchage », c’est-à-dire le placement des titres dans le public qui
requière des intermédiaires ou des mesures de publicité.
Il s’agit d’une société qui se distingue par son mode de financement ; les fondateurs
qui ont besoin de capitaux propres font appel à l’épargne privée pour investir dans leur
société.
Les sociétés pouvant faire appel public à l'épargne sont principalement les sociétés de
capitaux : les sociétés anonymes à conseil d’administration et les sociétés en commandite par
actions. Tandis que les sociétés en nom collectif, les sociétés à responsabilité limitée, les
sociétés en commandite simple ainsi que les sociétés civiles, ne peuvent pas faire appel public
à l'épargne.
L’appel public à l’épargne permet d’augmenter le capital de la société grâce à la
participation de nouveaux investisseurs. En effet, leur arrivée justifie la mise en place d’un
régime propre qui leur est favorable. La loi ajoute aussi que les règles de fonctionnement de
ce type de société est régi à la fois par les règles de la société anonyme et par des règles qui
leur sont propres.
Une comparaison au niveau des organes internes est également à opérer.
2- Au niveau des organes internes
Concernant les dispositions propres aux sociétés faisant appel public à l’épargne, la loi
en son article 853 impose que ces sociétés soient dotées d’un conseil d’administration. C’est
la seule institution que la loi juge obligatoire dans la société, elle n’évoque nullement la
création d’un comité indépendant comme l’exige les principes de la gouvernance
d’entreprise ; toutefois, cela signifie que sa création est possible.
La présence de plusieurs comités indépendants est pratique courante au sein de
nombreuses sociétés étrangères dont le nombre est variable. Cependant, la pratique révèle que
62
les sociétés ne disposent pas d’un comité d’audit qui leur est propre, ces dernières font plutôt
appel aux compétences d’un comité d’audit extérieur.
Les règles afférentes au fonctionnement des sociétés anonymes régissent également
ces sociétés. A défaut d’invoquer la création d’un comité indépendant, elle privilégie au sein
du conseil d’administration des administrateurs qui ne sont pas actionnaires de la société.
Cette qualité d’indépendance par rapport à la société est d’autant plus renforcée quand la loi
interdit toute autre forme de rémunération que celle prévue par la loi comme l’interdiction de
souscrire un emprunt à la société qui est également prévue par la loi américaine.
La présentation des rapports financiers fait également l’objet d’une comparaison.
3- Au niveau de la présentation des rapports financiers
La loi malgache en son article 868 à 875 prône également la transparence dans ses
dispositions en matière de règles de publicité. Ces dernières imposent deux types de
publication ; une publication annuelle et une publication à la fin du premier semestre.
Notons toutefois que la loi malgache n’a pas suivi la voie de la loi américaine et
française en matière de présentation des rapports financiers. La loi n’évoque nullement la
certification personnelle de ces rapports par les dirigeants, l’article 131privilégie la
certification classique du commissaire aux comptes sur la sincérité des documents.
De plus, ces rapports ne sont présentés qu’au commissaire aux comptes, la loi ne
prévoyant pas sa présentation à une autorité spécifique de même que la création de cette
autorité ne figure pas dans la loi.
Voyons ensuite ce qu’il en est au niveau du contrôle interne.
4- Au niveau du contrôle interne
La loi n’a pas non plus repris l’exigence d’un contrôle interne prévu par la loi
américaine. Elle n’impose pas que les dirigeants certifient personnellement l’efficacité de ce
contrôle interne.
Et enfin, une observation au niveau des sanctions fera l’objet du prochain
développement.
63
5- Au niveau des sanctions
En matière de sanction, la loi malgache a prévu une sanction pécuniaire et une peine
d’emprisonnement. Seulement, elle prévoit également la possibilité que l’une des peines
seulement soit appliquée ; on est bien loin du système de répression rigoureux des Etats-Unis.
L’existence d’un texte législatif sur les sociétés cotées n’est pas remise en cause.
Cependant, certaines dispositions de la loi ne reproduisent pas les principes de la gouvernance
d’entreprise.
De plus, l’application de ces principes exige l’existence d’un marché boursier.
B- Condition essentielle à l’application de la gouvernance d’entreprise : existence
d’un marché boursier
La loi évoque les sociétés faisant appel public à l’épargne certes, mais pour éviter
toute confusion, notons qu’une société peut très bien faire appel public à l'épargne et ne pas
être cotée alors qu'une société cotée fait toujours appel public à l'épargne. Or les principes de
gouvernement d’entreprise s’adressent particulièrement aux sociétés cotées en bourse. A cet
effet, il serait loisible d’envisager l’existence d’un tel marché à Madagascar.
Un effort qui relève de l’initiative privée, a conduit au lancement d’un marché libre
nommé « Madabourse ». Cependant, rien ne vaut l’existence d’un marché règlementé. Allant
plus loin, il serait également intéressant d’imaginer l’application de tels principes dans des
sociétés non cotées en bourse.
1- Existence d’un marché libre : le cas de Madabourse
Madabourse73 est un marché libre de transactions des titres initié par des opérateurs
économiques mais dont l’accès est strictement réservé à ceux qui adhèrent à la convention.
L’avantage de ce marché est que les échanges se font sans aucune contrainte et aucune
intervention de l’autorité étatique. De plus, il ne présente pas encore l’ampleur qui caractérise
un vrai marché boursier.
Or, la gouvernance d’entreprise s’adresse à un marché boursier bien structuré et
surtout règlementé par l’Etat. Mais à défaut de règlementation stricte qui régit cette activité,
ces principes ne semblent pas s’appliquer à ce marché libre.
73
www.madabourse.com
64
D’où des études ont été menées en vue de la mise en place d’un marché boursier à
Madagascar.
2- Vision d’un marché boursier règlementé à Madagascar
Jusqu’à ce jour ce type de marché n’a pas encore franchi les frontières de
Madagascar. Mais une étude réalisée par la CREAM a montré que l’instauration de ce marché
était possible à condition qu’il y ait un réel engagement de la part de toutes les parties
prenantes. Un marché boursier à Madagascar constituerait une innovation marquante au sein
des affaires, sa mise en place nécessite cependant toute la logistique nécessaire, c’est-à-dire
une formation adéquate relative au concept, des moyens financiers importants, mais surtout
son instauration relève de la volonté de toutes les entités concernées.
L’étude a fait remarquer au passage que « Le marché financier se développe plus dans
les pays anglophones où une économie libérale est en place depuis longtemps »74.
De ce qui précède, des suggestions sont proposées pour une application effective des
principes de gouvernance d’entreprise.
C- Suggestions
Avançons une remarque qui mérite réflexion. A défaut d’existence d’un marché
boursier règlementé à Madagascar, l’application de ces principes au sein des sociétés non
cotées est envisageable.
En effet, l’idéal serait d’élargir la sphère d’application de la gouvernance d’entreprise
à toute forme de société. « Le code Buysse », initié par la Belgique, s’est inspiré des principes
de la gouvernance d’entreprise. Il contient des recommandations spécifiques de bonne
gouvernance adressées aux entreprises non cotées en bourse.
De plus, la pertinence de ces principes est d’autant plus justifiée. Les sociétés non
cotées peuvent en tirer profit puisqu’ils garantissent le renforcement de la transparence et
l’indépendance. Leur mise en œuvre est cependant laissée à la discrétion de la plume des
législateurs. En effet, on ne peut qu’espérer une réforme en la matière car la gouvernance
d’entreprise garantirait une meilleure transparence et un contrôle efficace des sociétés.
74
RAMAROLAHY Christian, RAKOTOARISOA Maholy, « Analyse du système et introduction au
marché financier », CREAM, n°11, décembre 2007, p.1
65
D’ailleurs, les législations passées en revue sur ce thème encouragent leur utilité et leur
faisabilité.
L’adhésion des sociétés malgaches à ces principes est également souhaitable. Il ne
suffit pas seulement que le texte existe car une réelle volonté de changement de leur part est
nécessaire. D’ailleurs, les sociétés sont confrontées à des questions éthiques quant à la gestion
interne de la société et l’application de la gouvernance d’entreprise constituerait la meilleure
attitude à adopter face à ces questions.
Cependant, n’éludons pas les contraintes rigoureuses qui accompagnent les principes
de gouvernance d’entreprise. Les nouvelles mesures de certification des comptes financiers,
les contrôles systématiques de la société et la création de comités indépendants peuvent
s’avérer très coûteuse pour toute forme de société.
Sa mise en œuvre à Madagascar implique certes des investissements importants,
l’esprit de la loi américaine est de privilégier la transparence financière mais le prix à payer
s’avère faramineux. Il ne faut pas occulter les moyens financiers pour y parvenir car ils sont
d’une importance considérable.
Mais la confiance et la transparence deux ingrédients indispensables en vue d’assainir
le monde des affaires pour le rendre plus éthique valent la peine qu’on réfléchisse là-dessus.
Remarquons au passage que la loi Sarbanes-Oxley n’a pas seulement apporté des
changements au droit des sociétés, ses effets réfléchissent également au niveau du droit du
travail avec l’instauration de l’alerte éthique.
Sous-section 2- Renforcement des considérations éthiques du droit du travail :
l’alerte éthique
L’alerte éthique figure également au premier rang des révolutions provoquées par la
loi Sarbanes-Oxley. Ce corollaire de la gouvernance d’entreprise est, une fois de plus,
caractérisée par le souci de réintégrer la réflexion éthique au sein du marché boursier.
Aussi, nous allons voir dans un premier temps sa notion avant d’entamer dans un
deuxième temps ses principes.
66
Paragraphe 1- Notion d’alerte éthique
On peut noter différentes appellations de cette notion : alerte éthique, alerte
professionnelle, signalement, donner l’alerte. Cependant, elles partent d’une même idée, celle
de permettre aux salariés de dévoiler toute irrégularité contraire aux dispositions légales ou
règlementaires. « L'alerte éthique ou whistleblowing peut se définir comme un dispositif qui
tend à inviter les salariés d'une entreprise à dénoncer auprès des instances supérieures les
pratiques internes qu'ils jugent contraires à l'éthique ou au règlement ou encore à la loi
entrée en vigueur »75. Ce dispositif de prévention est très courant dans les pays développés.
La mise en place de l’alerte éthique ou couramment appelé « Whistleblowing » aux
Etats-Unis qui veut dire littéralement « souffler dans le sifflet », s’aligne parfaitement avec la
prise en considération des parties prenantes dans la gestion d’une société. En effet, ce système
projette l’image d’une société qui tient compte de la place prépondérante qu’occupe un
salarié. Il consiste à faire participer activement ce dernier au bon fonctionnement de la
société, c’est-à-dire inviter les salariés d’une entreprise à rapporter auprès des instances
supérieures les malversations dont ils auraient eu connaissance.
Ce dispositif se rapproche de la dénonciation car il s’agit d’un système qui permet aux
salariés de rapporter tout fait pouvant troubler la gestion de l’entreprise. Cependant, l’alerte
éthique va au-delà de la simple dénonciation car c’est un mécanisme bien structuré ; elle
garantit la sincérité, l’anonymat et la confidentialité des informations recueillies et de surcroit
assure la protection de ces informateurs.
Désormais, elle intègre le milieu de l’entreprise, c’est pourquoi nous allons voir sa
mise en œuvre dans la gestion des ressources humaines.
Paragraphe 2- Principes de l’alerte éthique
Le degré d’application de l’alerte éthique varie d’un pays à un autre. Bien que le souci
croissant de transparence et de meilleure gouvernance d’entreprise soit l’objectif commun, sa
mise en place aux Etats-Unis ne connait pas le même écho en France.
75 Pierre ROCAMORA , « La corruption privée : un risque majeur pour les entreprises », Université
Paul Cezanne, Aix Marseille 3 - Master 2 délinquance économique et financière, 2007
67
D’ailleurs, il serait intéressant d’analyser l’application de ce dispositif à Madagascar,
c’est-à-dire par le biais de l’arsenal législatif existant relatif à ce concept et la pertinence de ce
système nonobstant les problèmes inhérents à sa mise en place.
A- Principes laxistes de l’alerte éthique aux Etats-Unis
Les Etats-Unis disposent d’une atmosphère juridique favorable à la dénonciation. La
loi Sarbanes-Oxley n’est pas le seul texte aux Etats-Unis qui traite ce thème. Depuis des
années, ce concept a déjà fait l’objet de plusieurs textes qui font de la dénonciation une
véritable obligation dans le secteur public. Les récents scandales financiers ont conduit les
Etats-Unis, par le biais de la loi Sarbanes-Oxley, à généraliser cette pratique dans le secteur
privé.
Nous pouvons d’ailleurs relever que les Etats-Unis prennent cet objectif très au
sérieux. Dans le but de favoriser les mécanismes de recours des salariés, ces textes assurent
d’une part leur protection et d’autre part leur dédommagement76.
On comprend aisément l’esprit des législations américaines, il n’est pas facile pour un
employé de faire un tel acte car il lui faut du courage et de la détermination, de plus il met sa
carrière en jeu. D’où la loi veut récompenser le « héros », qui a empêché la commission du
délit. Cela représente en quelque sorte une contrepartie du risque encouru par l’employé.
La loi Sarbanes-Oxley en son article 301(4), impose aux sociétés américaines de
mettre en place des procédures d’alerte internes encourageant les salariés de rapporter
anonymement tout fait ayant trait aux questions de comptabilité, de contrôles comptables
internes ou d’audit. Du fait du principe d’extraterritorialité prévu par la loi, cette obligation
est également étendue aux sociétés étrangères cotées aux États-Unis, c’est-à-dire que les
sociétés étrangères qui ont émis des titres cotés sur une bourse américaine et les sociétés
filiales de groupes cotés aux Etats-Unis y sont soumises. Notons que cette obligation peut
aller à l’encontre du contexte culturel de certains pays étrangers et s’avérer également très
coûteuse.
L’obligation de dénonciation va plus loin dans la loi Sarbanes-Oxley, les employés se
doivent de révéler toute fraude ou malversation concernant la manipulation de la comptabilité.
Tout comme ses prédécesseurs, la protection de l’employé dénonciateur fait partie des
76 Le dédommagement se traduit par des dommages et intérêts suite aux représailles de l’employeur ou
un pourcentage des montants économisés si le tribunal donne raison au dénonciateur.
68
priorités du texte. En effet, la loi sanctionne lourdement tout individu empêchant le salarié
d’exécuter son obligation.
La loi Sarbanes-Oxley révèle ainsi l’état d’esprit qui fait la particularité des Etats-
Unis, une mentalité postmoderne et hors du commun qui peut parfois rompre avec les
traditions culturelles de certains pays.
Le cas de la France en est l’illustre exemple, elle n’a pas accueilli à bras ouvert ce
concept d’alerte éthique. Elle a émis quelques réserves quant à l’instauration d’un tel système
au sein de ses entreprises.
B- Principes restrictifs de l’alerte éthique en France
L’alerte éthique n’est pas un mécanisme nouveau pour la France, elle dispose
également de textes relatifs à la dénonciation.
Cependant, la procédure d’alerte éthique prônée par la loi Sarbanes-Oxley a suscité en
premier lieu la forte réticence de la France. C’est après avoir pris du recul qu’elle l’a admis
nonobstant certaines exigences.
1- Réticence profonde à l’alerte éthique
La CNIL n’hésite pas à afficher son hostilité et ses réserves à la mise en œuvre de ce
dispositif au sein des sociétés77. Pour elle, ce mode de collecte et de traitement de données est
contraire aux droits fondamentaux des salariés et incompatible avec la législation sur la
protection de la vie privée.
La jurisprudence, pour sa part, ne tarda pas à suivre cette voie. En effet, une
ordonnance de référé rendue le 15 septembre 2005 ordonna le retrait d’un affichage de deux
notes de services qui portaient sur une procédure d’alerte. En l’espèce, il s’agissait de notes de
service d’une usine nommée « Ethics hotline » qui permettait de dénoncer de manière
anonyme par le biais d’un numéro vert, outre les malversations comptables, tout manquement
de la part des salariés. Le tribunal a jugé qu’«une telle note contient en germe le risque
imminent pour les salariés d’être ainsi dénoncés anonymement, de voir déclencher à leur
encontre une enquête interne et de faire l’objet d’éventuelles sanctions, sans avoir pu
77 Pour preuve, deux délibérations 2005-110 et 2005-111 du 26 mai 2005 émises par la CNIL ont refusé
l’autorisation de mise en place d’un dispositif d’intégrité professionnelle sein de l’entreprise Donald’s France et
la mise en œuvre d’une ligne éthique au sein de la Compagnie Européennes d’accumulateurs.
69
bénéficier des droits élémentaires de la défense »78. Il a également ajouté « les risques de
dénonciation calomnieuse » que ce dispositif pourrait engendrer et qu’il est « disproportionné
par rapport aux objectifs de la loi américaine ». A l’avocate d’ajouter : « puisque le site, qui
comprend environ 340 salariés, "n'emploie quasiment que des ouvriers, qui en matière
de malversations financières sont mal placés pour avoir des informations »79.
On peut noter cependant le caractère excessif de ces répliques. Cette approche réduit
l’alerte éthique à une simple dénonciation calomnieuse et laisse entrevoir à travers ce concept
la notion de trahison ou de déloyauté. Il est vrai que c’est un dispositif délicat ; pourtant, il ne
faut pas occulter les objectifs principaux de l’alerte éthique. Il faut rappeler que l’esprit de la
loi Sarbanes Oxley est de prévenir les malversations financières et comptables en posant le
principe de la transparence.
D’abord, l’alerte éthique est l’émanation de la liberté d’expression des salariés, un
droit qui leur est fondamental ; ensuite, elle prévient les délits en révélant les abus, elle permet
de donner l’alarme avant qu’il ne soit trop tard.
Même si le juge a précisé l’impossibilité des ouvriers à connaitre de telles
infractions, ce dispositif permet de redonner ainsi aux salariés souvent négligés et
silencieux, un rôle clé au sein de l’entreprise. Son rôle en tant que mode de prévention
des délits doit être pris en considération.
Cette prise de conscience a sans nul doute amené la CNIL à reconsidérer l’alerte
éthique.
2- L’agrément de l’alerte éthique sous certaines conditions
Pour Guillaume Eliet, avocat et membre du Cercle Ethique des Affaires, « les
différences culturelles avec les Etats-Unis ne sont pas un obstacle irrémédiable à
l'importation du whistleblowing. Un système d'alerte à la française ne devrait pas être conçu
comme une police interne aux entreprises, explique-t-il, mais comme un moyen de protéger la
liberté d'expression du salarié, tout en améliorant la prévention des risques pour
78 TGI Libourne 15 septembre 2005, CE BSN Glasspack syndicat CGT c/ Syndicat BSN Glasspack,
Revue de jurisprudence sociale, 2005, n°4 79
« L' "alerte éthique" était "disproportionnée », sur le site "http://lci.tf1.fr/france/2005-09/alerte-
ethique-etait-disproportionnee-4860552.html, mis à jour le 16 septembre 2005
70
l'entreprise.»80 En collaboration avec la SEC, la France admet finalement l’alerte éthique
mais sous réserves « des conditions acceptables» selon Françoise de BRY:
- « la limitation de la dénonciation au domaine comptable et bancaire, au contrôle
de comptes et à la lutte contre la corruption
- l’application du principe de non-anonymat
- la mise en place d’un comité spécifique en charge de recueillir et traiter les
informations de manière confidentielle
- la garantie du droit de rectification ou de suppression du dénonciateur
- La mise en place de l’alerte subordonnée à l’autorisation de la CNIL » 81
Cependant, la CNIL maintient sa position en insistant sur le caractère facultatif de la
procédure d’alerte. De plus, l’absence de règlementation spécifique en la matière laisse ainsi
sa mise en œuvre à la discrétion de la société d’où son application varie d’une entreprise à une
autre.
D’ailleurs, « le Cercle d'Ethique des Affaires préfère plaider en faveur d'un système
d'alerte éthique qui puise d'abord son existence hors de la loi, dans une vraie démarche de
confiance au sein de l'entreprise, une démarche par lequel le salarié gagne un canal
d'expression et l'entreprise gagne son progrès économique et ... éthique.»82 A cette fin, sa
mise en place réside dans la contribution de toutes les entités concernées pour assurer et pour
exécuter les obligations qui en résultent. Les entités en question sont les salariés bien
évidemment mais aussi les dirigeants, le responsable des ressources humaines, le responsable
juridique, le représentant du personnel....une atmosphère de confiance doit ainsi dominer entre
ces entités pour que la procédure trouve son application au sein de l’entreprise.
Cependant, la réalité montre que la pratique des entreprises ouvre à des possibilités
d’abus de leur part. L’instauration de l’alerte éthique est primordiale mais son application
doit être également effective d’où la nécessité de protéger les donneurs d’alerte.
80 CORI Nicolas « Généralisé aux Etats-Unis, le «whistleblowing», système d'alerte permettant de
signaler des actes frauduleux, pourrait être adapté en France », sur le site http://www.liberation.fr/, publié le
10/03/2005, 81 DE BRY Françoise, « Salariés : héros ou délateurs », lettre du management responsable, 2006, n°6,
p.9 82Cercle éthique des affaires, « Pour un Whistleblowing à la française », « QUALITIQUE », Mensuel
international du management intégré, mai 2005, page 29/30
71
Finalement, la loi Sarbanes-Oxley n’est pas en contradiction avec la législation
française. Elle qui au départ était plutôt méfiante à la mise en place de cette procédure l’a
désormais accueilli. Selon Alexandra MAUDUIT, « Ce n’est donc pas un principe totalement
révolutionnaire et inconnu mais plutôt une extension de l’obligation de dénonciation à la
sphère de l’entreprise »83. Néanmoins, son champ d’application limité révèle néanmoins la
permanence des réticences culturelles par rapport à ce concept.
Il s’avère donc que tout dépend des pratiques culturelles et légales du pays et de
l’appropriation de l’alerte éthique par celui-ci. En effet, certains affichent leur mépris à
l’égard des autorités étatiques et par conséquent renforce encore plus leur méfiance envers
leurs informateurs. Pourtant, il serait judicieux d’évoluer positivement les mentalités par
rapport à l’alerte éthique et de favoriser en ce sens la protection des salariés dénonciateurs.
D’où la question suivante est de savoir si l’alerte éthique est transposable à
Madagascar. Il serait intéressant d’analyser l’approche de Madagascar par rapport à
l’opportunité de cette procédure.
Paragraphe 3- Perspectives d’application des principes de l’alerte éthique à
Madagascar
L’intérêt de ce dispositif est son apport considérable ; il favorise la responsabilisation
et limite les abus éventuels. De plus, les pouvoirs des salariés se trouvent décuplés. Ses
conséquences se répercutent largement sur la gestion des ressources humaines car l’alerte
éthique influe sur le dialogue entre le salarié et son employeur. Il faut cependant prendre
conscience des atouts d'un tel dispositif à Madagascar mais également ne pas écarter les
difficultés juridiques et techniques de mise en œuvre.
D’où nous nous pencherons en premier lieu sur les textes en présence. L’existence
d’un texte relatif à cette procédure est opportune. Ensuite, il est utile d’étayer les conditions
nécessaires à la mise en œuvre de cette procédure.
83
MAUDUIT Alexandra, « éthique professionnelle : alerte éthique et entreprise : un mariage forcé », concours promotion de l’éthique professionnelle, 2oo6, p.4
72
A- Comparaison des principes de l’alerte éthique avec la législation malgache
relative à la dénonciation
Le système juridique malgache ne dispose pas d’un texte spécifique relatif à l’alerte
éthique, le terme est méconnu dans le jargon juridique malgache. Cependant, une obligation
similaire à l’alerte éthique existe sous la forme de dénonciation.
On constate des textes épars couvrant les différents aspects de la dénonciation en tant
qu’obligation légale. On distingue notamment celle prévue par le Code pénal, par la loi sur le
blanchiment d’argent, par la loi sur les sociétés commerciales et le Code du travail.
1- Dénonciation prévue par le code pénal
Le Code Pénal prévoit une obligation légale de dénonciation ou de révélation de délits
irréguliers. En effet, il fait de la dénonciation une véritable obligation et garantit une
protection légale contre des poursuites pénales à tous ceux qui l’exerce84. Elle prévoit
également une sanction lourde en cas de manquement. Ici également, le citoyen est perçu de
manière large incluant par conséquent la possibilité de dénonciation par le salarié. Mais son
champ d’application reste limité aux relations entre l’Etat et le citoyen écartant ainsi
l’entreprise.
Un dispositif de dénonciation est prévu pour encourager la lutte contre le blanchiment
d’argent.
2- Déclaration d’opérations suspectes prévue par la loi sur le blanchiment
d’argent
Le système qui se rapproche particulièrement de l’alerte éthique est « la déclaration
d’opérations suspectes » prévue par la loi n° 2004-020 du 19 aout 2004 sur le blanchiment, le
dépistage, la confiscation et la coopération internationale en matière de produits du crime. Ce
texte est élaboré en vue de combattre le blanchiment d’argent qui entrave le bon
fonctionnement des affaires.
L’article 19 de la présente loi impose à toute personne physique ou morale de déclarer
aux services financiers tout fond suspect paraissant venir de crime ou délit. L’article 20
désigne les supports utilisés pour faire une déclaration. On peut saluer la commodité de ces
84 Op.cit. article 247 alinéa 1
73
supports qui facilitent la déclaration. L’article 22 exige que l’auteur de la dénonciation reste
anonyme dans le rapport. L’article 23 garantit la protection des dénonciateurs de bonne foi.
Cette protection est d’autant plus renforcée par la présomption de bonne foi qui met à la
charge de la victime du dommage de rapporter la preuve contraire. S’il s’avère que la
déclaration est de bonne foi mais non fondée, la réparation revient à l’Etat.
L’exigence de transparence se renforce encore plus quand la loi en son article 27
interdit l’invocation du secret bancaire en présence d’informations portant sur des faits de
blanchiment. En effet, la gravité des faits exige pour son éradication une transparence totale
quitte à enfreindre un principe d’ordre public.
A travers ce constat, on perçoit que les similitudes avec l’alerte éthique sont
évidentes. A titre d’exemple, le fait pour la loi de mentionner « toute personne physique ou
morale », cette disposition interprétée de manière extensive inclut logiquement le salarié.
Mais son champ d’application reste limité. La déclaration de soupçons prévue par la
loi malgache est uniquement rattachée au fait de blanchiment d’argent ; alors que l’alerte
éthique permet de révéler tous les faits illicites portant non seulement sur des atteintes à la
dignité de la personne mais également toute infraction financière englobant aussi le
blanchiment s’argent.
Un système d’alerte est également prévu par la loi sur les sociétés commerciales.
1- Alerte prévue par la loi sur les sociétés commerciales
La loi malgache sur les sociétés commerciales évoque aussi une procédure analogue à
l’alerte éthique. Cette procédure d’alerte consacrée par la loi prévoit la procédure d’alerte par
le commissaire aux comptes85et par les associés86. Une différence est à faire cependant quant
à leur mise en œuvre.
Concernant le commissaire aux comptes, la loi encourage ce dernier à révéler tout fait
délictueux aux autorités sans que sa responsabilité soit engagée. Au contraire, son abstention
est passible de sanctions rigoureuses prévues par la loi87.
« Tout actionnaire peut, deux fois par exercice, poser des questions au Président du
Conseil d’Administration, au Président Directeur Général ou à l’Administrateur Général,
selon le cas, sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation ». Par cet 85 Loi n° 2003-036 du 30 janvier 2004 relative aux sociétés commerciales, article 171 86 Op.cit., article 177 87 Articles 134 et 726 sur l’obligation du commissaire aux comptes, article 938 sur les sanctions
74
article, les actionnaires ne se voient pas imposer cette obligation, elle reste une simple faculté
entre leurs mains. Et d’ailleurs, elle n’est pas assortie de sanction.
Cette distinction par rapport au commissaire aux comptes pourrait s’expliquer par la
spécificité de sa fonction. En effet, la comptabilité constitue une source éventuelle de fraude
et de manipulation de la part des dirigeants, d’où le contrôle et la vérification permanente par
le commissaire aux comptes et par conséquent son obligation de révéler tout fait illicite.
Notons toutefois que la loi ne fait pas mention de la possibilité d’alerte par les salariés
alors qu’ils font partie intégrante de la société. Cette omission justifie la référence au Code du
travail.009
1
2- Dénonciation prévue par le Code du travail
Le Code du travail prévoit la dénonciation possible des salariés qui auraient subi des
faits portant atteinte à sa dignité humaine. Celui-ci ne prévoit aucune sanction envers le
salarié et lui assure une protection légale. Cette protection leur garantit que toute sanction ou
licenciement suite à la dénonciation seraient nuls de plein droit88. Mais comme il a été révélé
précédemment, le champ d’action de l’alerte éthique est plus vaste. Elle ne se limite pas
seulement aux faits portant atteinte à la personne même du salarié mais se rattache à tout fait
portant préjudice à la société.
Un inspecteur du travail approché a d’ailleurs confirmé cette hypothèse. Les plaintes
portant sur l’atteinte à leur intégrité physique comme le harcèlement sexuel ou moral sont
nombreuses. Des plaintes concernant les manipulations du salaire des employés ou des
fausses déclarations faites auprès de la CNAPS leur ont également été communiquées. Mais
s’agissant de ces derniers cas, il se déclare incompétent et renvoie les salariés victimes à
déposer leurs plaintes auprès des autorités compétentes. Leur compétence se limite
uniquement à ce qui touche les relations de travail.
On voit ainsi que la dénonciation fait partie des mœurs de l’entreprise malgache mais
les changements seraient d’autant plus radicaux avec la mise en place de l’alerte éthique en
tant que tel.
Aussi, il s’avère utile d’évaluer la faisabilité de cette procédure à Madagascar en
analysant les mesures nécessaires pour que ce dispositif ait vocation à s’appliquer. 88 Article 5 de la loi n°2003-044 du 28 juillet 2004 portant Code du Travail, J.O. n°2956 du 21 février
2005
75
B- Conditions relatives à l’application de l’alerte éthique
Le terme en lui-même est méconnu pour certaines entreprises malgaches mais le
concept n’est pas nouveau, l’alerte éthique constitue seulement un renforcement de ce qui
existe déjà : la liberté d’expression des salariés.
A défaut de texte spécifique à Madagascar, l’inspiration à l’égard des textes français et
américains pour bâtir des soubassements juridiques du concept est de mise.
Il faudrait insister sur la conception large des faits qui peuvent faire l’objet de
dénonciation, sur la qualité de salarié et sur les supports utilisés pour diffuser l’information.
1- Au niveau des faits susceptibles d’être dénoncés
L’alerte éthique fait jouer des salariés qui révèlent des infractions financières, c’est-à-
dire tout fait ayant trait à la gestion de la société. Concernant les faits relevés, ces derniers ne
les affectent pas personnellement mais présentent des répercussions préjudiciables sur le bon
fonctionnement de la société. Pourtant, le Code du travail malgache ne fait référence qu’aux
faits portant atteinte à l’intégrité physique et morale du salarié.
Au nom de la liberté d’expression, il parait possible de révéler tout type de
comportement, c’est-à-dire aussi bien des faits portant atteinte à la gestion de l’entreprise que
des faits entravant la santé ou la sécurité du travailleur.
Cette conception large des faits est justifiée par l’idée de prévenir des risques graves
que peut courir l’entreprise et par le but de protéger l’intérêt général.
D’ailleurs, les Etats-Unis et la France sont favorables à cette interprétation extensive
des faits pouvant être révélés. Si on reprend les termes du groupe français d’études « Cercle
éthique des affaires », sont actuellement visés « irrégularités ou mauvais comportements
professionnels que les salariés constatent dans l'entreprise et dont ils estiment qu'ils font
courir à l'entreprise un risque sérieux sur les plans financier, juridique, technique, sanitaire,
sécuritaire ou quant à sa réputation »89.
Ajouté à cela, l’instauration d’un dispositif unique prévu pour la révélation de
n’importe quel fait, qu’il atteigne directement le salarié ou non, assure une meilleure
centralisation des informations et renvoie un aspect plus pratique.
La qualification du salarié connait également des modifications.
89 DE BRY op.cit.
76
2- Au niveau de la qualification du salarié
Les protagonistes de la dénonciation sont en principe les salariés. Des études entamées
récemment donnent une interprétation large à la qualification du salarié.
Est considéré comme salarié : les personnes employées par l’entreprise quelque soit
leur statut d’emploi, ce qui inclut par conséquent le stagiaire, le prestataire de services90,
certaines entreprises invitent même les clients à le faire91. Le cas de l’EDF en France par
exemple reconnait : « Ce droit d'interpellation de l'entreprise est ouvert à toute partie
prenante : salariés, clients, partenaires et fournisseurs, riverains d'ouvrages, citoyens, élus,
associations, organismes et collectivités, témoins ou victimes de dysfonctionnements éthiques
ou de manquements aux valeurs »92.
La bonne foi de ces derniers est également recommandée pour éviter toute dérive de
l’utilisation de cette procédure de leur part ; « la Cour de cassation a posé le principe que le
fait pour un salarié de porter à la connaissance d’un tiers des faits anormaux concernant
l’entreprise, susceptibles ou non de qualification pénale, n’est pas en soi fautif à condition
que ces accusations ne soient pas mensongères et que le salarié ait agi de bonne foi, sans
vouloir volontairement porter atteinte à son employeur »93. La procédure s’inscrit dans un
objectif éthique, aussi recommande-t-elle également un comportement respectueux de la
bonne foi de la part des salariés et des dirigeants pour que son utilisation ne fasse pas l’objet
d’abus.
Les supports utilisés pour appliquer ce concept d’alerte éthique méritent également des
éclaircissements.
90 « Chartes d’éthique, alerte professionnelle et droit du travail français : état des lieux et
perspectives », rapport au ministre délégué à l’Emploi, au Travail et à l’Insertion professionnelle des jeunes, la
documentation française, janvier 2007 91 A ce titre, l’entreprise française EDF invite quiconque même le client à dénoncer des faits entravant
la bonne marche de la société. 92
Alerte éthique sur le site de l’EDF http://fr.edf.com/presentation/demarche-ethique-821.html
93 François Fayol, secrétaire général de la CFDT Cadres « Droit d’alerte et whistleblowing, Donner du
sens et négocier », Cadres-CFDT, n°414. Avril 2005
77
3- Au niveau des supports utilisés
Les supports utilisés varient d’une entreprise à une autre.
Si on prend l’exemple de la Société AGILITY, une Société étrangère leader en matière
de fournitures de services de logistique, elle offre plusieures possibilités aux salariés :
• « En informant leur supérieur hiérarchique ou leur responsable s'ils se sentent à l'aise de le faire
• En envoyant un e-mail dans la boîte aux lettres électronique personnelle d'un membre de l'équipe du département Ethique ou à l'adresse [email protected]
• En complétant un rapport sur notre site Web sécurisé accessible via notre intranet employés
• En appelant la ligne d'alerte d'Agility, un numéro d'appel gratuit permettant aux employés répartis dans 35 pays ou ceux où nous sommes présents pour établir des rapports anonymes par l'intermédiaire d'opérateurs tiers multilingues. Le numéro pour les Etats-Unis est accessible 24h/24, 7 jours sur 7 dans plus de 10 langues » 94
La diversité de ces supports a pour but de faciliter l’accès des salariés à la procédure.
Au sein d’une entreprise malgache, la tendance porte plutôt sur les systèmes de « boite
à idées » qui ne portent pas nécessairement sur des dénonciations de faits délictueux. Il serait
intéressant d’exploiter ce système pour en faire un véritable contre-pouvoir envers les
dirigeants.
L’approche des médias pour alerter des faits graves constitue également un support de
dialogue non négligeable. En effet, cette voie est jugée meilleure pour mieux se faire
entendre. Mais encore faut-il qu’elle soit suivie d’effet.
La latitude des autorités malgaches constitue souvent un obstacle et pourtant une
protection des donneurs d’alerte serait indispensable.
4- Au niveau de la protection des donneurs d’alerte
La crainte de représailles de la part de l’employeur reste un problème universel
jusqu’à ce jour. L’application effective de l’alerte éthique exige une protection des salariés
dénonciateurs ; « Sherron Watkins, employée d’Enron avait fait l’objet de représailles après
avoir averti son PDG des irrégularités comptables qu’elle avait constatées. S’étant imposée
naturellement aux Etats-Unis comme une réponse efficace à la prévention des malversations
94 « Pratiquer le commerce de façon intègre » sur le site :
http://www.agilitylogistics.com/FR/Pages/Agility_Code_of_Ethics.aspx
78
commises dans l’entreprise, la perspective de l’introduction en France du whistleblowing a
suscité des réactions épidermiques sur lesquelles nous ne reviendrons pas »95.
Cependant, ce souci de protection du donneur d’alerte a néanmoins atteint la sphère
européenne. La disparité des législations existantes a récemment fait l’objet d’un rapport
élaboré en 200996 recommandant ainsi une législation spécifique protectrice des donneurs
d’alerte dans les pays de l’Europe. Celui-ci offre une liste de recommandations pour leur
assurer une protection complète et efficace. Par exemple, la législation doit évoquer les faits
susceptibles d’être révélé, l’intégration de cette procédure aussi bien dans le secteur privé que
public, la protection du salarié de bonne foi, l’utilisation des voies externes comme les
médias, l’extension de la protection aux personnes extérieures à la société…La liste est
longue et la pertinence de ces recommandations n’est plus à justifier.
Mais une protection à outrance peut aboutir à des abus, l’éthique tend uniquement à
protéger les donneurs d’alerte de bonne foi. Les seuls destinataires de cette mesure spéciale
s’adressent à ceux qui croyaient à la certitude de ses informations, même si par la suite ces
suspicions n’étaient pas fondées. A contrario, cela signifie qu’il faut supprimer le bénéfice de
la protection spéciale au donneur d’alerte de mauvaise foi, c’est-à-dire celui qui a émis de
fausses accusations.
Cette protection des dénonciateurs connait également un écho à Madagascar avec la
loi n°2004-030 du 9 septembre 2004 sur la lutte contre la corruption. L’article 32 prévoit la
protection de l’identité des personnes en cause conforté par l’article 33 qui stipule que « le
témoin d’une affaire de corruption ne peut être contraint de révéler le nom l’adresse d’un
dénonciateur ou d’un informateur du Bureau Indépendant Anti-Corruption, ni de répondre à
des questions permettant d’identifier le nom et l’adresse d’un dénonciateur ou d’un
informateur(…) ». Cette protection est également renforcée par l’article 34 qui « interdit
d’exercer toute forme de représailles contre un dénonciateur ou un témoin ».Etendre cette
protection à la sphère de l’alerte éthique s’avère pertinent. Mais comme l’a souligné Honoré
RAKOTOMANANA , « On peut se demander si ces seules mesures sont suffisantes pour les
95 « A propos de l'alerte éthique française inspirée du "whistleblowing" américain », par Coraline
Damien, Régulation bancaire et financière, Université Paris Ouest, Naterrre La Défense, article visible sur le
site :http://m2bde.u-paris10.fr/content/propos-de-lalerte-%C3%A9thique-fran%C3%A7aise-inspir%C3%A9e-
du-whistleblowing-am%C3%A9ricain-par-coraline-damien, 18/02/2008 — boujeka
96 « La protection des donneurs d’alerte », rapport de la commission juridique et des droits de l’homme,
14 septembre 2009, rapporteur : M. Pieter OMTZIGT
79
protéger et les inciter, dans certains cas à risque, à faire des dépositions publiques »97. En
effet, les moyens tant matériels que financiers limitent son effectivité.
La rémunération des donneurs d’alerte est également abordée dans les législations
étrangères notamment les Etats-Unis ; dans ce pays, « les révélateurs de fraudes boursières
(« whistle blowers ») auront désormais la possibilité de toucher de 10 à 30% du montant des
amendes prononcées par la SEC »98. Cette situation laisse néanmoins perplexe. Il est
judicieux de vouloir récompenser ceux qui ont bravé les obstacles et qui ont pu révéler à
temps les faits répréhensibles. L’idéal serait pourtant de ne pas les récompenser au motif que
l’éthique part d’un sentiment désintéressé. Pourtant, l’argent conditionne dans la plupart des
cas l’exécution d’un acte. Cependant, le motif éthique qui anime cette démarche justifie cette
mesure.
La mise en place de l’alerte éthique à Madagascar exige au préalable quelques
suggestions.
C- Suggestions
De ce qui précède, les sociétés malgaches peuvent donc facilement s’approprier le
concept. La diversité des législations en la matière révèle que la dénonciation fait partie des
mœurs de la société malgache. Cependant, la dénonciation visée par chacune des législations
est variée empêchant ainsi une cohérence en matière de dénonciation. Les textes épars relatifs
à la dénonciation permettent difficilement d’avoir une vue d’ensemble des problèmes.
Apparemment, une consignation de ces textes parait préférable. Toutefois, une
pléthore de textes sur le sujet garantit la spécificité de la situation traitée par la dénonciation.
Un dispositif aussi complexe que l’alerte éthique exige corollairement son efficacité. Il
faut qu’il soit opérationnel et contrôlé de manière permanente par un organe interne ou
97
« Lutte contre la corruption : extraits de l’exposé-commentaire portant sur la protection des témoins
et des dénonciateurs présenté par Honoré RAKOTOMANANA lors du séminaire sur la lutte contre la corruption
qui s’est tenue les 22 et 23 novembre 2004 », revue MCI, février 2005, n°15, p.13
98 « Les révélateurs de fraudes diversement récompensés », L'Agefi, sur le site :
http://www.transparency.ch/fr/aktuelles/meldungen/2010_08_27_41993998_Les_revelateurs_de_fraudes_divers
ement_recompenses.php, 23 août 2010
80
externe, que les informations divulguées soient vérifiées au niveau de leur sincérité et de leur
gravité.
L’enjeu de l’alerte éthique est la prévention des risques. Pour plus d’efficacité, il
faudrait encadrer son fonctionnement en opérant un contrôle rigoureux. En effet, les abus
peuvent venir aussi bien des dirigeants que des salariés. Une vérification des dénonciations
qui leur seront soumises s’imposent. Il faut également renforcer la protection juridique des
dénonciateurs pour endiguer tout risque de représailles à leur encontre.
Ce système serait d’autant plus appliqué si on insiste largement sur son utilité au sein
de l’entreprise et l’avantage qu’elle apporte. D’où l’importance d’une sensibilisation, au
mieux d’une mobilisation, pour encourager la mise en place d’un tel système au sein d’une
entreprise.
Il reste ainsi beaucoup à faire pour que l’alerte éthique ait vocation à s’appliquer que
ce soit au niveau des moyens financiers et au niveau des mentalités, d’où l’instauration de ce
dispositif demande l’adhésion de tous. La volonté n’est surement pas loin, mais sa mise en
pratique requiert toutefois un peu plus de rigueur.
L’approche éthique par les principes du droit des affaires laisse néanmoins subsister
des interrogations. La réalité de ces approches renvoie un autre aspect de ces principes.
Section 2- Réalités des approches éthiques par les principes du droit des affaires
Le besoin incessant d’éthique réclamé par les principes du droit des affaires n’est pas
toujours évident.
Leur application peut soulever des conflits.
Certaines situations font primer l’essor industriel au détriment de l’éthique.
L’ineffectivité des lois est encore plus frappant de même que la permanence des
comportements répréhensibles.
Paragraphe 1- Présence de conflits
On distingue deux sortes de conflit. D’une part, le conflit entre la transparence et le
secret. D’autre part, de nombreux conflits d’intérêts.
81
A- Conflit entre transparence et secret
L’éthique exige la transparence dans la conduite des affaires. Le classique secret des
affaires cède devant l’impératif de transparence. D’ailleurs, celle-ci constitue l’ingrédient
essentiel dans la mise en œuvre des principes de gouvernance d’entreprise. Manuel JORGE le
confirme d’ailleurs en arguant que « lorsque le droit commercial classique était un droit
exclusivement professionnel, il pouvait reposer sur le principe du secret. Mais peu à peu, en
se transformant en véritable droit des affaires, applicable à tous les agents économiques, ce
droit doit être transparent pour permettre l’équilibre et l’équité entre les parties »99.
L’évolution des technologies et l’ampleur croissant des informations ont conduit à redéfinir la
transparence comme un principe, faisant ainsi du secret l’exception. On assiste ainsi à un vrai
retour en force de ce concept de transparence.
Mais il est difficile d’opérer un équilibre entre ces deux valeurs alors que l’éthique
recommande la conciliation des intérêts en présence. Le secret est aussi nécessaire dans les
affaires mais les dérives d’utilisation sont à craindre.
C’est pourquoi la jurisprudence et la loi tendent à poser les jalons afin de concilier ces
deux impératifs contradictoires.
Denis KESSLER avance que « le secret a aujourd’hui mauvaise presse en
entreprise »100, il est généralement source de fraude. A cet effet, la jurisprudence admet que le
secret est remis en cause au niveau de la présentation des comptes annuels101. Cette position
de la jurisprudence est d’ailleurs entérinée par la loi qui fait peser sur les dirigeants une
obligation légale d’information en matière de présentation des rapports financiers.
La loi favorise également la transparence à l’égard des concurrents et des
consommateurs. Elle va même jusqu’à décrire les limites du secret spécialement au niveau du
secteur bancaire, le secret bancaire est inopposable aux autorités au nom de la lutte contre le
blanchiment d’argent. Evidemment, ces mesures sont exceptionnelles. Cependant, certains
impératifs de transparence peuvent heurter les mentalités. Comme elle se situe dans la sphère
99
JORGE Manuel, « Droit des affaires », Armand Colin, 2ème édition, 1999-2001, p.7-8
100 KESSLER D., « L’entreprise entre transparence et secret », Pouvoirs 2001/2, n° 97, p. 38.
101 A ce sujet, un arrêt rendu par la Chambre de cassation criminelle en date du 28 janvier 2009 (pourvoi
n° 08-80.884) qui a sanctionné le dirigeant qui n’a pas déposé ses comptes annuels au greffe au motif de la
sauvegarde du secret de ses affaires. Cette décision a le mérite de mettre en exergue l’obligation de transparence
qui pèse sur tout dirigeant.
82
de la propriété privée, il est difficile d’imaginer qu’un tel contexte ait vocation à s’appliquer à
Madagascar.
Cet essor de la transparence n’est pas exempt de limites. D’ailleurs, une transparence
absolue est quasiment impossible à instaurer. Le secret reste inhérent au contexte des affaires.
Un minimum de secret est toujours utile pour atteindre le succès en affaires.
Cependant, les conflits d’intérêts persistent toujours.
B- Conflits d’intérêts
L’essence même de l’éthique étant d’harmoniser et de réconcilier tous les intérêts en
présence et pourtant on perçoit des conflits d’intérêts.
D’une part, la divergence persiste sur la notion d‘intérêt social. Ces différents points
de vue font prévaloir malgré tout que l’intérêt personnel ne représente pas l’intérêt social.
D’autre part, des conflits d’intérêts sont également opérés par la loi.
1- Polémique sur la notion d’intérêt social
La gouvernance d’entreprise prônée par les Etats-Unis prône un intérêt social qui
équivaut au seul intérêt des actionnaires. La conception américaine de l’intérêt social est
largement différente de celle adoptée par la doctrine française. Un auteur illustre cette
conception en lui donnant une appellation particulière, qui n’est pas anodine d’ailleurs, « le
nouvel intérêt social made in USA »102. En effet, cette nouvelle qualification de l’intérêt social
est typique des Etats-Unis. D’ailleurs, un cas de recours en justice des actionnaires de la
compagnie de construction automobile Ford Motors contre Henri Ford lui-même illustre
parfaitement ce propos. En l’espèce, Henry Ford, le dirigeant de cette compagnie, a voulu
distribuer les bénéfices réalisés par la compagnie avec ses salariés. Les actionnaires ont vite
fait de poursuivre ce dernier au motif que cette distribution porte atteinte à leurs intérêts. Le
tribunal a tranché en leur faveur, « le juge donna gain de cause aux actionnaires en stipulant
que le partage de bénéfices avec les employés allait à l’encontre de l’éthique fiduciaire et
priverait les actionnaires de somme d’argent qui leur revenaient de droit. Ainsi, le partage de
102
MAURY Marc-Antoine « Abus de biens sociaux et actes anormaux de gestion: convergences et divergences.
Illustrations » mémoire de Maîtrise en Droit Privé (Université Paris Sud, la Faculté JEAN MONNET) mai 1997
83
profit avec les actionnaires devient donc ici un élément d’éthique prioritaire sur la moralité
conventionnelle de partage »103.
Cette décision qui prime les actionnaires sur l’ensemble des autres parties prenantes
est sujette à questionnements. L’éthique vise l’harmonisation des intérêts de toutes les parties
prenantes. S’agissant de la société observée du point de vue des américains, l’éthique réside
dans le fait d’assurer le bien-être de ses actionnaires au détriment des autres parties prenantes.
A première vue, l’intérêt général et le partage équitable semble ne pas être reconnus dans
cette décision. Daniel Arthur LAPRES le confirme d’ailleurs, « Dans la tradition américaine,
l'objet de la société commerciale n'autorise pas la poursuite d'objectifs autres que l'intérêt
des actionnaires »104.
La vision européenne à l’égard de l’intérêt social est moins radicale. Cet « impératif de
conduite qui s’impose aux organes de la société » comme l’a défini COZIAN105 connait une
interprétation extensive. PATOUOSSA Ng. Ange Nathalie avance admet l’existence de
plusieurs intérêts au sein de l’entreprise. C’est «le lieu où se rencontre divers intérêts à la fois
convergents et divergents. Il y a donc les intérêts des actionnaires, des travailleurs, des
dirigeants, des fournisseurs, des clients, des créanciers etc. »106. Cette opinion rejoint
également celle de certains auteurs qui ont proposé le « juste milieu », c’est-à-dire « en
analysant l’intérêt social comme étant à la fois celui des associés et de la personne morale
qu’ils ont créée »107.
La loi sur les sociétés commerciales malgache n’évoque pas l’intérêt social dans ses
dispositions. Toutefois, l’article 1 de la loi sur les sociétés commerciales stipule que « la
société commerciale doit être créée dans l’intérêt commun des associés ». Cet article laisse
sous-entendre la perception américaine de l’intérêt social. Comme Madagascar applique le
droit français dans certains cas, la perception française de l’intérêt social devrait retentir dans
103
Cf. « Les comportements éthiques et non éthiques en milieu de travail : état provisoire de la
question », Luc BRUNET et André SAVOIE, revue québécoise de psychologie, volume 23, n°1, 2002, p.103 104 Article de LAPRES Daniel Arthur, « Approche juridique des rôles de la morale et de l'éthique dans
la gestion des entreprises », parue le 30 juin 2009, p.10 105
Définition de l’intérêt social par COZIAN reprise par RAMAROLANTO RATIARAY, « le droit des
sociétés commerciales à Madagascar », revue de droit et de jurisprudence de Madagascar, décembre 1999, n°19,
p.14 106
Mémoire de PATOUOSSA Ng. Ange Nathalie, « Les dirigeants des sociétés responsables, les
responsabilités », 2004-2005, p.36 107
Droit de l’entreprise, « l’essentiel pour comprendre le droit », édition LAMY, 2006-2007, n°442,
p.207
84
ses murs. Heureusement d’ailleurs, car la conception américaine de l’intérêt social est jugée
trop stricte. Elle oublie la présence d’autres intérêts tout aussi importants au sein de la société.
Les conflits d’intérêts existent également au sein de la loi.
2- Conflits d’intérêts opérés par la loi
En théorie, la loi semble convenir à tout le monde ; mais dans la pratique,
certaines branches du droit des affaires tendent parfois à protéger un intérêt au détriment des
autres. On peut citer entre autres, à titre d’exemple, le droit du travail et le droit des
procédures collectives.
S’agissant du droit du travail, sa tendance protectionniste des droits du travailleur est
souvent mal perçue par l’employeur. Certaines entreprises estiment que le Code du travail
leur impose de fortes charges patronales. D’autres ont même déclaré que les intérêts de
l’employeur ne sont pas suffisamment pris en compte, particulièrement par le fait que le Code
ne mentionne pas les infractions relatives aux obligations des employés. Il est vrai que de
telles affirmations sont à prendre en compte. L’éthique exige une réelle harmonisation des
intérêts divergents de l’employeur et des employés.
La loi sur les procédures collectives présente également des conflits d’intérêts.
L’objectif étant de sauvegarder les activités et l’emploi mais les créanciers se trouvent
également en difficulté puisque la procédure gèle le paiement des créances. L’éthique cherche
la conciliation en présence d’intérêts conflictuels. L’éthique qui anime ce droit serait ainsi
pour les créanciers de renoncer à leur droit fondamental d’être payé pour sauver l’entreprise.
Pour C.SAINT-ALARY-HOUIN, « certaines règles morales font reculer les chances de
redressement de l’entreprise en difficulté qui est pourtant souhaitable pour sauver l’activité et
l’emploi»108. Une critique qui nous vient de la part des auteurs est la rigueur d’une offre de
cession qui interdit à tout parent ou allié de présenter une offre de cession. Cette rigueur de la
loi signifie qu’indépendamment de la contribution considérable d’une offre au maintien des
emplois, cette offre, si elle est faite par un parent ne serait pas admise. On souligne
l’incohérence de la loi qui prône pourtant le maintien des emplois.
108
SAINT-ALARY-HOUIN, op.cit. p.169
85
La réalité nous montre également que la croissance économique est parfois privilégiée
au détriment d’autres intérêts.
Paragraphe 2- Priorité de l’essor industriel
Le gouvernement malgache est déterminé à développer la croissance économique du
pays. Comme nous l’avons évoqué précédemment, nonobstant leur apport économique,
l’appel à des investisseurs étrangers constitue les principales niches d’emplois pour la
population.
Malheureusement, cette méthode n’est pas dénuée de critiques. Les réalités
médiatiques nous montrent l’envers du décor surtout en matière de droit des travailleurs et de
protection de l’environnement.
A- Priorité du développement économique au détriment des droits des
travailleurs
Selon un inspecteur du travail interrogé, les zones franches sont le spectacle de
mauvais traitements subis par les travailleurs. Une étude réalisée par un cabinet d’études a
confirmé cette réalité109. Elle a démontré les enjeux importants auxquels ces sociétés sont
souvent confrontées. Ils se doivent de « concilier l’atteinte des objectifs de plein emploi au
respect du travail décent et des droits fondamentaux ». Il ressort de cette étude que les
employés de zones franches sont souvent victimes d’injustices110. Ces derniers pour la plupart
subissent en silence en vue de garder leur travail.
L’inspecteur du travail a également évoqué que leur contrôle se faisait rare faute de
moyens matériels et financiers. De plus, leur contrôle exercé sur certaines zones franches était
pour la plupart du temps dénué d’effet. Cela est dû au fait que celles-ci entretiennent des
relations étroites avec le Gouvernement. Cette attitude conduit à dévaloriser leur contrôle, à
entrainer le manque de motivation au travail et de surcroit à favoriser la corruption. La
question qui vient à l’esprit est de se demander où est l’éthique quand ces sociétés dotées d’un
109
Rapport du Cabinet Miara-mita, Mme RABE Saholinjanahary Eugénie, Mr RALAIVELO
Maminirinarivo, « Etude des zones et entreprises franches textiles à Madagascar », Friedrich Ebert Stiftung,
2009 110
L’étude a mis en exergue que malgré des efforts entrepris, il reste encore beaucoup à faire. Les
conditions de travail sont souvent déplorables tels les accidents de travail fréquents, les conditions des femmes
enceintes qui sont victimes de discrimination au travail et exposées au risque de licenciement…
86
statut favorable empiètent sur les droits fondamentaux des salariés. Est-ce que les principes
fondamentaux doivent courber l’échine devant l’impératif de croissance économique ?
La question est d’autant plus pertinente surtout en matière de protection de
l’environnement.
B- Priorité du développement économique au détriment de la protection de
l’environnement
A ce titre, on songe à l’affaire très médiatisée de pollution industrielle du canal de
Pangalanes perpétrée par une compagnie pétrolière en 2004. L’Etat avait assigné cette
compagnie pour délit de pollution. L’affaire s’est terminée en queue de poisson car la
compagnie a été relaxée au bénéfice du doute, mais elle a néanmoins écopé d’une sanction
pécuniaire. Raphael JAKOBA reproche à cette décision que « plutôt que de se prononcer sur
cette chance historique de fixer le droit jurisprudentiel sur l’environnement, plutôt que de
donner l’exemple aux investisseurs non respectueux de l’environnement, le juge s’est
aventuré sur un autre terrain infiniment plus glissant : infliger 1.094 milliards à Galana…Et
ce n’est pas rien ! »111. Cette décision peut être interprétée de deux manières. D’une part,
trainer un pollueur devant la justice est certes une grande première, pourtant le propre de la
protection de l’environnement est avant tout sa prévention. Ainsi, il faudrait renforcer l’étude
d’impact environnemental pour éviter les bavures. D’autre part, cette décision retrace
également l’importance des investissements à Madagascar. « Une décision de fermeture
définitive aurait été mal vu sur le plan de la politique de promotion des investissements
économiques, principalement le secteur industriel, menée par le pouvoir actuel »112. A cet
effet, une décision de justice défavorable en faveur d’un investisseur le serait encore plus.
On pourrait également traiter le problème d’une autre manière. La compagnie
pétrolière garantit les emplois d’une majeure partie de la population. Est-ce ce sentiment
éthique qui a motivé le juge à relaxer la compagnie ? Une fermeture même temporaire, se
ressentirait sur ses employés qui se retrouveraient brusquement sans emploi. On peut avancer
que le juge était confronté à deux impératifs contradictoires tels la protection de
l’environnement et la préservation de l’emploi. C’est dans ce dilemme que l’éthique 111
Raphael JAKOBA, « L’affaire Galana pollution : oui mais… », Revue MCI, novembre-décembre
2004, n°14-15, p.2 112
Ravo RAMIADANARIVELO, « pollution industrielle : la jurisprudence admet le principe du droit
à l’environnement sain au nom de l’intérêt général », revue MCI juillet-Aout 2006, n°32, p.5
87
intervient. Le problème que soulève particulièrement l’éthique réside dans le fait qu’aucun
individu ne sait ce qui est bien pour lui à part lui-même.
La solution qui en résulte est souvent un consensus qui harmoniserait ces deux
exigences.
L’ineffectivité des lois en vigueur figure également parmi les obstacles les plus
récurrents.
Paragraphe 3- Ineffectivité des lois en vigueur
Le droit des affaires à Madagascar, comparé au droit des affaires des pays développés,
est encore à son état embryonnaire. La plupart de ses textes ne sont que la reproduction
textuelle des législations françaises. S’agissant de la gouvernance d’entreprise et de l’alerte
éthique, les textes régissant la matière méritent d’être réactualisés et devraient rejoindre le
rang des priorités du législateur étant donné les avantages apportées par ces initiatives
étrangères.
Il est également regrettable de constater que certaines dispositions légales restent
souvent lettre morte.
A titre d’exemple, la loi sur la concurrence a précisé l’existence d’un Conseil de la
Concurrence. Pourtant, jusqu’à ce jour, cette institution tarde à être instaurée alors que les
réalités économiques attestent de l’urgence de sa mise en place.
La méconnaissance des lois est également palpable. La maxime "nul n'est censé
ignorer la loi" reste au stade de pure théorie quand la pratique révèle que les lois sont pour la
plupart méconnues par les entreprises. A tire d’exemple, la loi sur les procédures collectives
est souvent ignorée par les entreprises. Un responsable de la Direction des Grandes
Entreprises s’est d’ailleurs plaint sur le fait que les entreprises en difficulté n’y recourent pas.
Rares sont les entreprises qui passent par cette procédure officielle. Certaines cessent leurs
activités à l’insu de tous et c’est après de longues recherches que les autorités s’aperçoivent
que l’entreprise en question n’existe plus. La plupart ne sont même pas radiées du registre du
commerce et des sociétés alors que la loi exige que toute modification de la situation de
l’entreprise doive être apportée au dit registre.
Madagascar accuse un retard en matière de législation. Un code de consommation fait
défaut dans le pays. Un projet de loi sur la protection des consommateurs a déjà été élaboré
mais n’a jamais fait l’objet de sortie officielle. Bien qu’il dispose d’une collection de textes
visant de nombreux domaines spécifiques touchant à la consommation, une synergie de ces
88
dispositions qui seraient à portée générale et qui concernent tous les domaines serait essentiel.
De plus, elle faciliterait l’accès des consommateurs à un texte global.
Ce constat met ainsi les consommateurs dans une situation de faiblesse chronique face
aux éventuels abus du secteur économique. Les associations de consommateurs locales ne
connaissent pas la même ampleur que ceux des pays développés lesquels constituent à juste
titre un contre-pouvoir du circuit économique. De plus, la plupart des consommateurs
malgaches, en tant que destinataires finaux du circuit économique, ne prennent pas
pleinement conscience de leur rôle d’acteur économique à part entière. Ces derniers
s’accordent plutôt à acheter un produit à moindre coût au lieu de s’attacher à la qualité ou à la
sécurité que doivent garantir les produits. Une éducation pour un changement de mentalité des
consommateurs est à prévoir pour changer ces habitudes de consommation.
La permanence de comportements répréhensibles est également une triste réalité.
Paragraphe 4- Permanence des comportements répréhensibles
Certains comportements des entreprises laissent à désirer. Pour percer sur le marché,
certaines entreprises n’hésitent pas à imiter les produits de leurs concurrents pour profiter de
leur renommée auprès des clients. Ils justifient leur manque d’imagination et d’innovation par
le fait qu’ils sont nouveaux sur le marché. Pour eux, imiter des produits existants qu’ils
jugent « standards » pour démarrer dans leurs activités ne constitue pas un acte répréhensible.
Les médias font l’écho de la circulation permanente de faux billets dont les
consommateurs sont les principales victimes.
La corruption généralisée figure parmi les infractions de grande envergure qui porte
sensiblement atteinte à l’éthique des affaires. Elle est fréquente aussi bien dans le secteur
privé que le secteur public. En effet, ses retombées sur les affaires sont néfastes car elle ruine
l’égalité des chances, tue la concurrence et fausse le jeu des marchés. Ces conséquences
précitées ne sont qu’une ébauche de la triste réalité qui entoure la corruption. Nous ne
pouvons qu’accueillir avec soulagement l’engagement de l’Etat dans l’éradication de ce fléau
économique et social.
En principe, le paiement de l’impôt par les contribuables vise à couvrir les charges
publiques et à alimenter les caisses de l’Etat. On constate que cette « devoir moral de payer
89
l’impôt » ne fait pas l’unanimité auprès des entreprises. En 2009,1648 entreprises de la
capitale sont déclarées défaillantes au niveau du paiement des impôts113.
Cependant, la tendance des entreprises qui se sentent assaillies d’impôts de toute sorte,
est de ne pas indiquer en totalité les revenus dont elles disposent : il s’agit de la fraude fiscale.
Ce refus de payer l’impôt représente ainsi un acte héroïque de légitime défense contre la
rapacité du fisc. P. SERLOOTEN n’a pas manqué d’affirmer que « Celui qui s’est montré
plus fort que le fisc, comme celui qui a triomphé du gendarme, suscite la sympathie, voire
l’admiration générale »114. De plus, cette infraction est difficile à prévenir du fait que les
recoupements et les contrôles des autorités se font à postériori, c’est-à-dire qu’ils
interviennent des années après. Selon un responsable de la BIANCO, la collaboration du
comptable de la société et du contrôleur des impôts qui manipulent ensemble les données
financières à leur disposition sur ordre du dirigeant favorise la fraude. Il a également ajouté
que certaines entreprises méconnaissent cette obligation de déclaration sincère de revenus au
motif que cette pratique est monnaie courante ; elles ignoraient qu’elles ne respectaient pas la
loi. A cet effet, il faudrait une vulgarisation accrue des textes en vigueur suivie d’un contrôle
poussé de son application pour éviter la commission des délits en toute impunité.
Cependant, il ne suffit pas de croire qu’un comportement éthique se résume à une
stricte observation des normes légales. Tous les acteurs du circuit économique ont également
leur part de responsabilité dans l’assainissement moral du monde des affaires.
Ainsi, l’intervention de la pratique dans la mise en œuvre de l’éthique des affaires fera
l’objet de notre prochain développement.
113 Statistiques de l’année 2009 de la Direction des Grandes Entreprises
114 SERLOOTEN, op.cit, p.149
90
TITRE IITITRE IITITRE IITITRE II ----
ETHIQUE AU TRAVERS DE LA ETHIQUE AU TRAVERS DE LA ETHIQUE AU TRAVERS DE LA ETHIQUE AU TRAVERS DE LA
PRATIQUE DES AFFAIRESPRATIQUE DES AFFAIRESPRATIQUE DES AFFAIRESPRATIQUE DES AFFAIRES
91
La loi suffit à imposer une ligne directrice de comportement à suivre. Mais être
éthique pour une entreprise ne se limite pas au respect des règles juridiques et règlementaires.
Les propos d’Alain BIENAYMÉ sont d’ailleurs clairs à propos de l’insuffisance des règles
juridiques : « Autant ils sont nécessaires pour définir des interdits, encadrer des initiatives.
Autant, ils sont insuffisants pour inspirer des actions positives, généreuses, créatrices,
enrichissantes pour les êtres »115. Autrement dit, la loi constitue le minimum éthique à
respecter et d’ailleurs, la réalité révèle que la loi ne suffit pas à ériger la meilleure attitude à
adopter dans les affaires.
N’oublions pas que l’éthique des affaires concerne également ceux qui sont au centre
de ses préoccupations à savoir les hommes d’affaires.
Sans se contenter d’avouer la nécessité d’une régulation et d’un respect de valeurs
morales dans la conduite des affaires, on assiste actuellement à la contribution des acteurs
économiques, selon leur méthode propre, dans l’assainissement moral du monde des affaires.
La pratique montre ainsi l’importance qu’accordent tant les entreprises que l’Etat à
intégrer concrètement l’éthique des affaires.
CHAPITRE 1 : ETHIQUE ET LES ENTREPRISES
Les acteurs économiques affichent cette conviction de moraliser le monde des affaires.
Ainsi, on peut distinguer la contribution des entreprises et de l’Etat dans cette noble
démarche.
La création même d’une entreprise, indépendamment de sa finalité première, répond
implicitement à un souci éthique qui est la création d’emplois.
L’éthique est entrée dans les mœurs ; les entreprises se sont rendu compte de
l’importance de principes moraux dans la conduite des affaires. La participation à la vie
économique implique un certain nombre de devoirs. Désormais, les entreprises, en tant que
premier acteur de la société, ne se limitent pas uniquement au souci de leur rentabilité. Elles
prennent pleinement conscience de leur rôle économique et social au sein des affaires. On
assiste alors aux efforts déployés par ces dernières en la matière.
115
Alain BIENAYMÉ, op.cit.
92
Notons toutefois que chaque entreprise est un cas unique, le but est de relever les traits
communs de la considération de l’éthique par ces entités.
Ainsi, on constate que la prise en compte de l’éthique par les entreprises se manifeste à
deux niveaux.
D’une part, l’éthique intègre l’organisation interne de l’entreprise par l’élaboration de
codes de conduite au sein de l’entreprise qui visent un comportement moral de la part des
destinataires.
D’autre part, au niveau des relations de l’entreprise avec son milieu, l’éthique prend
forme par l’avènement d’une responsabilité sociale de l’entreprise.
Section 1 : Formalisation de l’éthique par la mise en place d’un code de conduite
Un code de conduite, une charte éthique, code d’éthique, code de bonne conduite...
Peu importe la dénomination utilisée, sa mise en place au sein d’une entreprise fait office de
repère moral face à des dilemmes ou des choix auxquels les salariés et les chefs d’entreprises
sont confrontés.
La raison d’être de ces codes de conduites réside dans le fait que les entreprises
veulent conformer leurs actions selon une ligne de conduite morale. « Une entreprise ne
disposant pas d’une telle charte risque d’éprouver des difficultés dans l’instauration d’un
certain ordre moral et d’une confiance dans ses relations avec l’extérieur »116. Le fait pour
les entreprises d’adopter un code de conduite exprime la ferme détermination de l’entreprise à
s’engager sur le terrain de l’éthique, c’est-à-dire que les entreprises « acceptent que l’on porte
un jugement éthique sur leur activité et s’engage à tenir compte dans leurs
investissements»117 .
Afin de mieux appréhender la notion, nous allons au préalable la définir.
Ensuite, pour éviter toute équivoque, une distinction sera opérée entre le code de
conduite, le règlement intérieur et les conventions collectives.
Enfin, nous ne manquerons pas d’insister sur ses contours à savoir les divers codes
existants et son application au sein des entreprises.
116
Frédéric BARONI, Dorian BOISDRON, Jean Yves BOURGES, Matthieu CHADELAT, Julien
GAIRE, Alex DI FABIO, Paul SCHELL, « Ethique professionnelle ou morale de l’entreprise, un nouveau
concept pour le monde du travail », concours 2008, promotion de l’éthique professionnelle, p.5 117
GIRARD Bernard, « A quoi bon l’éthique d’entreprise ? », p.11
93
Paragraphe 1- Code de conduite et ses notions voisines
Le code de conduite est à distinguer du règlement intérieur et d’une convention
collective.
A- Code de conduite
Selon la définition de l’OCDE, le code de conduite consiste en un «engagement pris
volontairement par une société ou une organisation d'appliquer certains principes et normes
de comportement à la conduite de ses activités ou opérations »118. Il permet de donner des
éléments de réponses aux questions qui se posent sur la conformité des actes et sur ses effets.
Bien qu’il s’agisse d’un nouveau mode d’expression du pouvoir normatif de
l’employeur, l’instauration d’un code de conduite n’est pas obligatoire au sein de l’entreprise.
La valeur morale qui sous-tend l’éthique étant la liberté, son élaboration au sein de
l’entreprise reste ainsi à la discrétion de celle-ci.
A défaut d’un cadre juridique qui entourant le concept du code de conduite, son
élaboration relève de la volonté de l’entreprise. Il peut être rédigé unilatéralement par le
dirigeant ou avec la participation des départements au sein de son entreprise comme l’a
souligné Samuel Mercier, « le département des ressources humaines et le département
juridique »119. La rédaction unilatérale semble le cas qui se présente le plus fréquemment.
Cela s’explique surement par le fait que le dirigeant veut inculquer sa propre philosophie aux
employés. Pourtant, étant les principaux concernés, ne serait-il pas envisageable de faire
participer les salariés à l’élaboration du code de conduite ? Des études ont démontré
l’importance capitale de leur contribution. De plus, cette initiative renforcerait le sentiment
d’appartenance à l’entreprise.
Les domaines traités par le code de conduite sont divers. A titre d’exemple, les
« Directives du Code de Conduite des Affaires » de la société Zain évoquent les conflits
d’intérêts et la lutte contre la corruption. Cet instrument d’autodiscipline agrémenté de normes
éthiques affirme la volonté pour l’entreprise d’orienter les actions de tout un chacun vers un
comportement souhaité. L’entreprise requière ainsi aux employés un comportement vertueux
118Définition donnée par le Dictionnaire sur le site
http://www.lafinancepourtous.com/spip.php?motdictionnaire&page=mot&id_mot=136 119
TETE Laeticia, « Samuel Mercier, l’éthique dans les entreprises », fiches de lecture de la chaire
DSO, 2000
94
et respectueux de valeurs morales, cette attitude reflète la volonté des dirigeants d’exiger un
niveau d’éthique allant au-delà du simple respect des lois et des règlements.
S’agissant des destinataires du code de conduite, son application va au-delà de la
sphère de l’entreprise. La plupart des codes de conduites s’adressent également aux personnes
extérieures à l’organisation comme les clients ou les fournisseurs.
Le code se caractérise ainsi par la variété des domaines d’application et par la pluralité
de ses destinataires. C’est ce qui la distingue particulièrement du règlement intérieur et de la
convention collective.
B- Règlement intérieur
Le règlement intérieur relève du seul pouvoir normatif de l’employeur.
Son élaboration est d’ailleurs obligatoire selon l’article 169 du Code du travail « dans
toutes les entreprises employant habituellement au moins onze travailleurs ».
Les domaines traités par le règlement intérieur présentent un brin de similitude avec le
code de conduite, il évoque des règles de disciplines générales et permanentes auxquelles
doivent se conformer les employés, établit des normes relatives à l’exécution du travail. La
différence réside cependant dans l’aspect technique du règlement intérieur et de son domaine
limité. Celui-ci traite par exemple des règles d’hygiène et de sécurité, des heures de sortie des
employés, du respect des employés entre eux, du port du badge obligatoire, de certaines
interdictions comme l’interdiction de boire de l’alcool sur le lieu de travail… S’agissant du
règlement intérieur de l’ACCES BANQUE par exemple, il régit principalement les horaires
de travail, les salaires, les appointements, les permissions, les congés et les sanctions120. C’est
cette restriction des matières traités par le règlement intérieur qui pousse les entreprises à
recourir au code de conduite afin d’élargir leur champ d’application à d’autres domaines.
Les destinataires du règlement intérieur sont les salariés uniquement. Le règlement
intérieur ne régit que les relations sociales au sein de l’entreprise contrairement à un code de
conduite qui régit non seulement les relations internes mais également les interactions de
l’entreprise avec d’autres tiers.
Les distinctions entre le code de conduite et la convention collective sont nombreuses.
120
Cf. Annexe 1
95
C- Convention collective
Elle « est conclue entre un ou plusieurs employeurs ou un groupement d'employeurs,
d'une part ; et les délégués du personnel, d'autre part » selon l’alinéa 1 de l’article 173 du
code du travail. Alors que le code de conduite est pour la plupart du temps élaboré
unilatéralement par l’employeur.
L’article 176 stipule qu’elle est obligatoire « Dès lors que l'entreprise occupe
habituellement cinquante travailleurs ».
Il s’agit d’une négociation portant sur les conditions de travail du salarié et sur ses
garanties sociales. Son contenu doit présenter des dispositions plus favorables que le code du
travail tel la confection d’un plan social en cas de licenciement économique par exemple. Le
code de conduite n’est pas crée à cet effet. Au contraire, il vise le bon fonctionnement de
l’entreprise sous l’égide de valeurs morales que les salariés s’engagent à respecter.
Les codes de conduite se démarquent également par leur diversité.
Paragraphe 2- Diversité des codes de conduites
Il peut s’agir notamment d’un code spécifique à un secteur d’activité ou d’un code
propre à une entreprise. Un code de conduite peut également être adopté au niveau
international.
A- Code de conduite spécifique à un secteur d’activité
Certains secteurs d’activités se sont rendu compte de l’importance de l’éthique. A
titre d’illustration, le secteur hôtelier a élaboré une « charte éthique » applicable à tous les
hôtels membres de la FHORM. Cette charte exige l’engagement de l’établissement, du
personnel et des clients en vue de préserver l’enfant de toute forme d’exploitation sexuelle.
Ces secteurs étant très prisés, il est ainsi susceptible de dérives.
De ce fait, l’encadrement éthique de ces activités est justifié. Les dispositions de
ces divers codes de conduite confirment l’hypothèse selon laquelle le respect du code exige
un comportement dont le degré de moralité est largement supérieur à celui de la loi.
Toutefois, la tendance des entreprises est d’adhérer à des codes à portée
internationale.
96
B- Code de conduite à portée internationale
Les textes internationaux relatifs à une harmonisation du monde des affaires dans un
climat moral sont nombreux. On peut citer le célèbre « Global Compact »121 ou « Pacte
mondial » auxquelles les sociétés telles FLORIBIS et AQUALMA ont adhéré.
Il s’agit d’un pacte lancé en 1999 par l’ancien Secrétaire Général de l’ONU Kofi
Annan. Ce pacte invite les entreprises à adhérer à dix principes concernant principalement les
Droits de l’Homme, le Droit du Travail, l’environnement et la lutte contre la corruption.
L’idée est de conformer les activités de ces dernières à ces principes qui permettent aux
entreprises de baser leurs actions. Jusqu’à ce jour, aucune sanction n’est prévue en cas de non
respect de ce pacte. L’adhésion à ce pacte relève ainsi de la volonté des entreprises. Mais le
constat affiche que ce sont plutôt des sociétés d’envergure internationale qui adhèrent à ce
pacte. S’agissant des entreprises locales, elles ne connaissent même pas son existence.
Un autre texte qui revendique la moralisation des affaires, les « principes
d’Equateur »122 dont la BOA-Madagascar fait partie des signataires. Il s’agit de normes qui
reposent sur la protection de l’environnement. Ils présentent l’avantage d’offrir un cadre
commun relatif aux évaluations des projets aux institutions financières qui les ont adoptés. En
effet, « en adoptant les principes d'Equateur une banque s'engage à prendre en compte un
certain nombre de critères d'évaluation sociaux et environnementaux dans le choix des
projets qu'elle finance(…)Signer les principes d'Equateur entraîne des modifications dans le
processus d'octroi des crédits: l'emprunteur doit remplir un formulaire d'évaluation
environnementale et sociale dont le degré d'exigence varie en fonction de l'impact potentiel
du projet. » 123
Soulignons que l’adhésion à ces codes de renommée mondiale contribue à améliorer
leur image au devant de la scène internationale.
La dernière catégorie de code de conduite retiendra le plus notre attention.
121
Cf. Annexe 4 122
Principes visibles sur le site / www.equator-principles.com/.../LesPrincipesdelEquateur.pdf 123SZYLER Christian, « Le besoin d’éthique dans la finance internationale »,
« QUALITIQUE »Mensuel International du management intégré, mai 200, Page 17/30
97
C- Code de conduite propre à une entreprise
Comme nous l’avons relevé précédemment, chaque entreprise est un cas unique. En
effet, l’élaboration d’un code de conduite diffère selon qu’elle relève d’une entreprise
malgache ou étrangère.
S’agissant d’entreprise malgache, la plupart de leur code présente une connotation
religieuse de par leur appellation. A titre d’illustration, les « dix commandements » de la
société Espace Médical ou les « cinq commandements de l’ONE »124.
Les entreprises étrangères implantées à Madagascar pour la plupart, héritent du code
de conduite de leur société-mère. A titre d’exemple, la société ZAIN implantée à Madagascar
applique le code de conduite de son homologue africain125.
Cette différence est également palpable au regard de leur application
Paragraphe 3 – Modalités d’application des codes de conduite
Un code de conduite mis en place nécessite également son application concrète et
effective. Malgré leur objectif commun qui est avant tout la satisfaction du client, son
application diffère selon qu’on soit en présence d’une entreprise étrangère ou d’une entreprise
malgache.
A- Au sein des entreprises étrangères implantées à Madagascar
La régulation des comportements au sein d’une entreprise étrangère peut prendre la
forme d’un énoncé de valeurs ou d’un code de conduite proprement dit.
S’agissant d’un énoncé de valeurs comme celui de la société AQUALMA126, ces
valeurs expriment la philosophie de leurs dirigeants et leur volonté d’adhésion des employés à
124
ONE ou n’est pas une entreprise certes, mais s’appuyer sur son code de conduite a permis de fonder
l’affirmation selon laquelle la religion prend une importance capitale pour le malgache dans l’élaboration d’un
instrument disciplinaire. 125
C’est le cas des « Directives du Code de Conduite Des Affaires » de la société Zain. Etant implanté à
Madagascar, la filiale de la société Zain implantée dans le pays dispose également de ce code de conduite. 126
L’énoncé de valeurs de la société AQUALMA est comme suit : « visez l’excellence : la
transparence, le souci de la qualité sociale, le respect de l’autre, travailler en équipe, permettre l’audace,
garder l’équilibre, défendre l’éthique, c’est-à-dire la loyauté vis-à-vis de l’entreprise, de l’environnement social,
politique et économique »
98
leur vision. Leur diffusion au sein de l’entreprise se fait par le biais de l’affichage sur les murs
des locaux. La société a affirmé que le non-respect de ces valeurs peut conduire au
licenciement du salarié.
Il faut noter que ces termes aussi vagues et imprécis peuvent engendrer des abus
d’interprétation, il est difficile de déterminer dans quelle mesure l’action du salarié peut être
conforme ou contraire à ces principes.
Aussi, un code écrit et plus explicite serait préférable car il donne plus de détails sur
les comportements que doivent adopter les employés. C’est le cas du le « code des conduite
des affaires » de la société ZAIN dont les dispositions s’efforcent d’être claires et
compréhensibles127. Le code est précédé d’un préambule, vient ensuite les domaines traités
qui concernent notamment les conflits d’intérêts, l’usage abusif des biens de la société, les
gratifications, les pots de vin, corruption et extorsion. Eu égard à la présence croissante de ces
problèmes, l’instauration du code marque la prise de conscience de la société de la réalité de
ces problèmes et affirme sa volonté à les prévenir. Ainsi, elle réclame l’obéissance stricte des
salariés. A juste titre, l’éthique s’inscrit justement dans ce rôle de prévention des
comportements répréhensibles.
En principe, un code régit les relations de l’entreprise au niveau de son organisation
interne, et les relations de l’entreprise avec les autres parties prenantes.
Le code de conduite de l’ACCES BANQUE par exemple régit les relations entre les
employés mais aussi les relations de la société avec ses clients et ses concurrents. Dans le
« code des conduite des affaires » de la société ZAIN, une section qui traite des pots de vin
stipule que « la société mène ses affaires sur la base de bonne foi, équité, intégrité et s’attend
à ce que les partenaires agissent de la même façon ». Implicitement, elle requière un
comportement comparable au leur, c’est-à-dire que le comportement des tiers doit adhérer à
leurs principes.
La mise en œuvre du code varie selon les entreprises. L’ACCES BANQUE, par
exemple, assure sa mise en place et sa surveillance par un comité de direction.
Concernant les sanctions prévues par le code de la société ZAIN, la société est très
stricte à ce sujet : « tolérance zéro pour les violations aux directives du code de conduite des
affaires ».
127
Cf. Annexe 5
99
Les modalités d’application d’un code de conduite diffèrent au sein d’une entreprise
malgache
B- Au sein des entreprises malgaches
La réalité montre que la mise en place d’un code de conduite au sein des entreprises
malgaches reste encore marginale par rapport au vécu dans les pays développés. Les actions
des entreprises malgaches se situent ainsi au niveau de « l’informel ». La plupart n’en dispose
pas encore et reste au stade du règlement intérieur. Certaines songent à en adopter dans un
futur proche, d’autres ne l’envisagent même pas.
Deux motifs justifient principalement cette prise de position de ces sociétés. D’une
part, il n’est point besoin d’une quelconque norme à respecter face à un individu capable de
maitriser son comportement et ses actions. Les individus étant par essence élevés dans des
valeurs que forcément ils appliquent aussi bien dans leur vie personnelle que dans
l’entreprise.
D’autre part, un code de conduite est inutile quand l’esprit de famille et un climat de
confiance mutuelle règne entre l’employeur et ses employés. D’ailleurs, d’autres méthodes
utilisées par ces entreprises tendent vers le même objectif que le code de conduite. A titre
d’illustration, la société AXIUS qui ne dispose pas de code de conduite, effectue une fois par
semaine des comités de direction où la priorité est accordée au dialogue entre les employés.
Elle profite également de l’occasion pour diffuser les valeurs prônées par leur dirigeant.
L’initiative peut également venir de la part des employés eux-mêmes. Lorsqu’un confrère se
comporte mal, ils traitent ensemble le problème voire même s’engagent à sanctionner en cas
de comportement répréhensible.
Nonobstant ces codes de conduites qui régissent principalement les relations internes
de l’entreprise, elles affichent également leur volonté d’améliorer ses relations avec son
environnement extérieur.
On assiste à l’avènement de la responsabilité sociale de l’entreprise désireuse
d’adopter un comportement éthique permanent.
100
Section 2-Avènement de la responsabilité sociale de l’entreprise
Nous verrons en profondeur sa notion et ses manifestations.
Paragraphe 1- Notion de responsabilité sociale des entreprises
Outre son obligation de respecter les règles légales et d’assurer la pérennité de son
activité, l’entreprise se voit assujettie d’une responsabilité qui s’avère plus exigeante que celle
prévue par la loi.
Selon la commission européenne, « être socialement responsable signifie non
seulement satisfaire pleinement aux obligations juridiques applicables, mais aussi aller au-
delà et investir "davantage" dans le capital humain, l'environnement et les relations avec les
parties prenantes »128.
L’émergence de cette nouvelle responsabilité est justifiée pour deux raisons. D’une
part, une prise de conscience s’est installée au sein des entreprises qui reconnaissent que la
conduite de leur activité doit tenir compte des parties prenantes. Est considéré comme tel, tout
acteur interne ou externe à la société ayant une relation directe ou indirecte avec l’entreprise.
Elle ne se résume pas aux actionnaires, elle inclut également d’autres individus concernés de
près ou de loin par les activités de l’entreprise. Il s’agit entre autres des salariés, des
fournisseurs, des clients, des associations, des collectivités etc.
D’autre part, l’Etat n’est plus en mesure d’assurer seul la prise en charge les grands
maux de la société. La responsabilité sociale constitue « une réponse partielle aux appels
croissants faits au secteur privé pour qu’il contribue davantage au développement »129. Ainsi,
les entreprises, de leur propre initiative, agissent en faveur du progrès social. Elles apportent
leur contribution dans l’amélioration des conditions de vie des citoyens et dans la préservation
de l’environnement.
Selon CAROLL, la responsabilité sociale des entreprises est de quatre ordres : « une
responsabilité économique, légale, éthique et philanthropique »130. A ce stade, il n’est plus
besoin de préciser leur responsabilité économique et légale tant leur réalité est évidente. Notre
128
Définition de la RSE, (Livre Vert, Commission Européenne, Juillet 2001, P.8) 129, Revue SPORE n°139, « Responsabilité sociale des entreprises, des sociétés plus conscientes, février
2009, p.2 130
Hypothèse de CAROLL reprise dans le mémoire de Allison MARCHILDON, « vers une culture
éthique de l’organisation : étude de deux cas », mars 2002, p.23-24
101
étude mettra plutôt en lumière les méthodes employées par les entreprises dans le cadre de
l’accomplissement de leur responsabilité éthique et philanthropique.
Afin de mieux appréhender la notion de responsabilité sociale de l’entreprise, nous
allons développer ses manifestations.
Paragraphe 2- Manifestations de la responsabilité sociale
Les initiatives et engagement volontaires de l’entreprise se manifestent notamment par
la prise en considération des travailleurs, la protection de l’environnement et enfin par
l’accomplissement de diverses actions sociales.
A- Prise en compte du bien-être du travailleur
Le salarié en tant qu’être humain est au centre des préoccupations éthiques des
entreprises. Nonobstant les dispositions légales en la matière, les entreprises tiennent
également à instaurer un climat de travail favorable aux employés. Cette préoccupation de la
situation du travailleur se manifeste à deux niveaux.
D’une part, l’entreprise aspire à assurer leur bien-être personnel du salarié.
Nombreuses sont les sociétés qui accordent des faveurs comme les primes à leurs employés
afin de les motiver dans la réalisation de leur travail. D’autres entreprises comme la
compagnie d’assurance COLINA accorde des tickets restaurant et laisse à la discrétion du
salarié la répartition de ses huit heures de travail par jour.
D’autre part, elle vise le bien-être du salarié par rapport à l’entreprise. La société
AXIUS par exemple procède à la création de nouveaux emplois ou à la récupération des
anciens employés pour éviter le chômage. La compagnie d’assurance COLINA organise une
politique de soutien d’un salarié frappé par un deuil et favorise les sorties récréatives des
salariés avec les dirigeants pour faciliter le dialogue.
La société ZAIN par exemple privilégie le personnel interne en cas d’éventuel
recrutement avant de le lancer dans les annonces publicitaires. Une remarque est à porter
quant à cette démarche. De manière tacite, cette mesure ruine l’égalité des chances. Elle
favorise le personnel interne au détriment des éventuels postulants. L’éthique semble ne pas
trouver sa place dans cette mesure car elle ne tient compte que d’un seul intérêt.
Enfin, la sécurité du travailleur figure également dans les préoccupations des
employeurs surtout lorsque les conditions du travail présentent des risques pour son intégrité
102
physique. La société AQUALMA par exemple garantit que leurs infrastructures tels les
casques, masques, gants, bottes etc. respectent les normes de protection internationale.
La protection de l’environnement figure également au rang des responsabilités sociales
de l’entreprise.
B- Protection de l’environnement
La plupart des entreprises intègrent dans leur politique de gestion la protection de
l’environnement. Ce souci de la préservation du milieu naturel est par essence logique lorsque
la spécificité de l’activité de l’entreprise l’exige. Elles visent à réduire l’impact des produits et
des méthodes utilisées par l’entreprise sur l’environnement.
A titre d’illustration, la société TOTAL par exemple, en raison de son activité à risque
sur l’environnement, a mis en place un système d’élimination des huiles usées « pour
préserver l’environnement et la santé, pour arrêter le déversement dans la nature, pour
limiter les coûts d’élimination et revaloriser les déchets et pour répondre à la demande des
consommateurs et des bailleurs de fonds »131. Toujours dans cette optique, certaines sociétés
n’hésitent pas à diversifier leurs domaines d’intervention comme les campagnes de
reboisement ou la promotion de l’utilisation des réchauds à gaz et la gestion des déchets.
Le plus surprenant réside dans le fait que même des activités qui n’ont en principe
aucun impact sur l’environnement prennent l’initiative de le faire. Le cas de la société ZAIN
par exemple, dont les activités sont axées aux services de télécommunications, a créée en son
sein un département « Environnemental and Social Program ».
Les initiatives en matière de responsabilité sociale de l’entreprise peuvent constituer
en des actions sociales diverses.
C- Réalisations des actions sociales diverses
Elles se manifestent notamment par une collaboration entre l’Etat et l’entreprise. Les
actions sont pour la plupart des actions de grande envergure comme la construction des
écoles, des hôpitaux, des infrastructures routières, l’implantation de services de
télécommunications dans les zones enclavées…La plupart des sociétés étant implantées dans
131
« Un centre de traitement d’huile usée à Madagascar », Mada business journal, février 2009, n°098,
p.30
103
des zones enclavées, elles essayent de coordonner leurs actions avec celles de la communauté
locale sous réserve du respect de leurs usages et de leurs coutumes. La société AXIUS, en vue
de faire participer la communauté à leur projet, a mis en place un projet nommé « agriculture
contractuel ». C’est un contrat de collaboration qui permet à la société d’acquérir un terrain
appartenant à toute personne intéressée par les projets d’investissements de la société.
Les actions sociales peuvent également résulter d’une collaboration entre plusieurs
entreprises. Elles sont dirigées notamment dans l’éradication de certaines maladies graves.
Citons notamment « La Coalition d'Entreprises Citoyennes de Madagascar (CECM)
regroupe une quinzaine d’entreprises décidées à œuvrer pour lutter contre trois maladies : le
VIH/SIDA, la tuberculose et le paludisme »132. Dans le cas où une entreprise est déterminée à
combattre ces maladies mais qu’elle ne sait pas comment procéder, l’entité offre de
l’accompagner dans ses démarches.
Mais la majorité des entreprises partent de leur propre initiative comme la distribution
de kits scolaires, la circoncision des enfants etc.
Un constat global permet d’affirmer que les interventions sociales des entreprises sont
rares surtout en cette période suite à la conjoncture politique actuelle. Certaines ne prennent
pas cette initiative faute de moyens financiers conséquents et préfèrent s’adonner à des actions
sociales plus restreintes. Le sponsoring d’évènement et d’activités sont les interventions les
plus fréquentes des entreprises.
A ce sujet, une remarque s’impose. Il est faux d’affirmer que le sponsoring rentre dans
le cadre de la responsabilité sociale bien que certaines entreprises se bornent à le prétendre. Il
intervient certes dans la promotion des actions sociales de l’entreprise mais des différences
sont à mettre en exergue. C’est l’auteur de l’activité ou de l’évènement qui va solliciter la
collaboration de l’entreprise alors que dans le cadre de la responsabilité sociale, Il faut
souligner le caractère volontaire de leur démarche. Ensuite, le sponsoring accordé par une
entreprise impose certaines obligations à l’auteur de l’activité ou de l’évènement alors que les
actes accomplis au nom de la responsabilité sociale sont en principe des actes désintéressés.
132 Author: La Banque Mondiale « Les entreprises malgaches s’unissent pour lutter contre le
VIH/SIDA » , article visible sur le site http://www.business-humanrights.org/Categories/Individualcompanies/G/GalanaPetroleum, Dated: 1 décembre 2008
104
Ces initiatives sociales sont flatteuses certes, mais laissent néanmoins subsister des
questionnements quant à la portée réelle de l’éthique des affaires perçue par les entreprises.
Section 3- Portée de l’approche éthique par les entreprises
L’approche éthique revendiquée par les entreprises laisse planer des ambigüités et
n’est pas exempte de critiques. Les doutes persistent notamment sur le mode de régulation de
l’entreprise par le biais d’un code de conduite. La deuxième interrogation réside dans
l’engagement de l’entreprise.
Paragraphe 1- Questions persistantes sur les codes de conduite
Les conditions d’élaboration et d’application ne font pas l’objet de règlementation
stricte laissant ainsi leur interprétation à la discrétion des entreprises qui les ont édictés.
La mise en place du code de conduite n’est pas obligatoire ; elles adoptent un code de
conduite de leur plein gré, déterminent elles-mêmes le contenu et les sanctions y afférentes.
Ce constat révèle les similitudes qu’elles présentent avec les règles d’origine légales. Toutes
les deux sont assorties de sanctions en cas de manquement au respect de la règle. La
différence réside dans l’auteur de ces règles. La réalité montre que l’Etat ne dispose plus de la
plénitude de pouvoirs dans la création des règles. L’entreprise s’estime également investie
d’un véritable pouvoir normatif. Des études effectuées ont d’ailleurs confirmé le fait qu’on
assiste à une privatisation du droit et à « transformer le chef d’entreprise en justiciable
potentiel, en législateur, policier et juge au mépris de la plus élémentaire des règles de
séparation des pouvoirs »133.
A cet effet, le statut du code de conduite institué par les entreprises est incertain et
suscite des problèmes juridiques.
Afin de mieux appréhender le problème, nous allons déterminer en premier lieu la
portée morale qui constitue le principe d’un code de conduite. Ensuite, les difficultés
engendrées par les codes de conduites. Enfin, nous allons établir les conditions selon
lesquelles un code de conduite peut acquérir force obligatoire.
133
Opinion de Mireille Delmas-Marty reprise dans la brochure « Responsabilité sociale des entreprises
et les codes de conduites, nouveaux enjeux ou vieux débats », Willy Thys 33, avril 2004, p.9
105
A- Principe : valeur morale du code de conduite
Sa portée morale est due à l’auteur de l’élaboration des règles. Comme c’est
l’entreprise qui a pris l’initiative des règles et que son élaboration ne relève pas de la loi, le
code ne dispose pas de force légale. Les auteurs définissent notamment le code de conduite
émergeant du circuit économique élaboré par un acteur privé comme relevant de la « Soft
Law » ou « droit mou »; « au sens large, peuvent être qualifiés de soft law ou « normes
douces » « toutes les normes à l'exception des lois, des règlements et des contrats ». La
Commission Européenne (DG SANCO) a classé les différents instruments de normes douces
en deux catégories : l'autoréglementation (normes juridiques élaborées par et pour
l'entreprise) et la réglementation volontaire (normes encouragées par les décideurs et
élaborées en coopération avec les acteurs concernés) » 134.
Par contre, les règles relevant du pouvoir étatique sont appelés « Hard Law » ou
« droit dur » car elles présentent un degré réel de contrainte juridique.
Cependant, cette permissivité engendre des difficultés quant à la perception du code
de conduite.
B- Difficultés engendrées par le code de conduite
Bien que sa portée morale soit affirmée, les difficultés se précisent quand on regarde le
contenu et la façon dont l’entreprise communique ce document.
La mise en place d’un code de conduite suscite des critiques lorsqu’il est détourné de
sa finalité première. La réalité nous montre que la plupart des codes se résument à une
stratégie de communication marketing ciblée pour rassurer les investisseurs au lieu de
répondre aux préoccupations éthiques.
S’agissant du contenu, en principe, les normes n’ont pas de valeur juridique puisque
l’entreprise se borne à énumérer des valeurs auxquelles elle tient particulièrement, ces valeurs
peuvent même aller au-delà de ce que prévoient les règles légales. A titre d’exemple, le code
de conduite de l’ACCES BANQUE évoque la conduite dans le lieu de travail, vis-à-vis des
employés, dans l’utilisation de sa position…
134
Françoise de Bry, « éthique au cœur du management », « QUALITIQUE »Mensuel International du management intégré, mai 2005, Page : 5 / 30
106
Mais leur contenu se complique quand elles renvoient également au respect d’une
règle déjà prévue par le droit comme le respect des droits de l’homme, le respect des normes
légales. Ce qui est le cas des codes précités qui font référence à la lutte contre la corruption,
infraction également sévèrement réprimée par la loi. Selon P. SPITERI, « cette réaffirmation
des principes juridiquement essentiels peut correspondre à un souci pédagogique au moment
où la violation de la règle juridique est courante, où le respect des lois n’est plus un impératif
ancré dans tous les esprits. En cela, l’éthique serait utile »135. Cette redondance des règles
juridiques dans le contenu des codes de conduite permet ainsi une meilleure accessibilité de la
loi par les destinataires. Toutefois, cela peut engendrer la confusion du public qui penserait
que le code de conduite et la loi sont identiques. Le « code de conduite des affaires » de la
société ZAIN par exemple présente cette similitude. Tout comme le droit, il prévoit un
mécanisme de contrôle de son application par un système d’alerte et les sanctions prévues se
présentent sous forme de mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au licenciement. On peut
également ajouter que le code de conduite et le règlement intérieur présenté ensemble à
l’employé, comme le cas de la Société ACCESS BANQUE, peut laisser penser qu’ils ont
même valeur juridique.
Notons également que les recommandations du code de conduite peuvent aller à
l’encontre des valeurs personnelles du travailleur. D’où l’importance d’une collaboration dans
l’élaboration d’un code de conduite en vue d’établir des valeurs communes.
Il s’avère ainsi nécessaire de poser de manière claire dans quelles mesures le code peut
avoir une portée juridique.
C- Exception : valeur juridique du code de conduite
Un adage célèbre « tu patere legem quam fecisti » qui signifie que l’individu doit subir
les conséquences de sa propre loi, peut trouver à s’appliquer si le code de conduite est connu
tant en interne qu’en externe. La force obligatoire du code s’imposerait ainsi à l’employeur.
Cependant, cette conception large et vague ne vaut pas mieux qu’un cadre juridique qui
définit clairement ses modalités d’application.
Il serait intéressant de donner une force obligatoire à ces initiatives éthiques pour
garantir au mieux son effectivité. En France, ces conditions sont prévues par le circulaire
135
SPITERI P., « Ethique des affaires » Actes du colloque organisé à Pointe à Pitre (Guadeloupe),
« Droit des Affaires, Ethique et Déontologie » 1ère édition, L’Hermès, 1994p.27
107
DGT n°2008-22 du 19 novembre 2008 relative aux chartes éthiques, dispositifs d’alerte
professionnelle et au règlement intérieur136.
L’avènement de ce texte est relativement récent, il marque la prise de conscience de
l’Etat sur les problèmes suscités par les codes de conduite à savoir leur nature juridique et leur
contrôle par l’inspecteur du travail.
En principe, il acquière force juridique dés lors qu’il constitue une annexe au
règlement intérieur. De ce fait, il fait également l’objet d’un contrôle de l’inspecteur du
travail. Selon BERRA, un code de conduite nantie de force légale est risquée pour une
entreprise, « c'est alors s'aventurer dans le domaine du droit, avec toutes les contraintes
propres à chacun de ces supports. Et s'obliger à la précision des termes, en veillant à leurs
implications juridiques ».137
S’agissant de Madagascar, il n’existe pas encore de texte qui prévoit cette possibilité.
Quand la société ZAIN a fait part à l’inspecteur du Travail de l’introduction de son « code de
conduite des affaires », ce dernier s’est uniquement contenté de vérifier sa conformité aux
Code du travail. En matière de contrôle, l’Inspecteur s’est déclaré incompétent du fait que ce
sont des principes d’organisation propres à la société et qu’ils restent dans le domaine de la
sphère privée. Pourtant le code précité précise clairement qu’il représente une annexe du
règlement intérieur.
Une réglementation devrait consacrer et encadrer la mise en place d’un code de
conduite au sein d’une entreprise. D’ailleurs, comme l’a souligné BOSDEVESY Maxime
«(…) la formalisation des valeurs et des normes de comportement de l’organisation à travers
l’adoption d’un code d’éthique ne suffit pas non plus à garantir le comportement éthique réel
d’une organisation. (….) l’important reste avant tout d’agir en conformité avec son code et
que le meilleur code d’éthique pour une entreprise reste celui qui est bel et bien appliqué»138.
Ainsi, pour parer aux éventuels abus d’utilisation, il serait judicieux d’édifier des mécanismes
136Texte téléchargeable sur le site http://www.intefp-
sstfp.travail.gouv.fr/datas/files/SSTFP/Circ_DGT_%202008%2022%20du%2019%2011%2008%20Chartes%20
ethique.pdf 137
BERRA Daniel, « Analyse juridique des chartes éthiques », Actes du colloque Ethique économique,
fondements, chartes éthiques, justice, Librairie de l’université, 1996, p.121
138 BOSDEVESY Maxime « Concours éthique professionnelle : « L’éthique professionnelle, un enjeu
d’avenir ? », CONCOURS 2010, PROMOTION DE L’ETHQIUE PROFESSIONNELLE, ROTARY –Conférence des Grandes Ecoles, Groupe Ecole Supérieure de Commerce et de Management Tours-Poitiers, P.4
108
de contrôle qui éviterait les dérives d’utilisation. Un contrôle rigoureux de son application par
un organe indépendant favoriserait son renforcement.
Il ne faut également pas tomber dans l’excès. La tendance est de vouloir contrôler tous
les comportements des individus dans tous ses aspects. N’oublions pas que l’éthique ne se
limite pas à un simple respect de normes combien même ces règles d’éthique découleraient
d’un code de conduite. L’éthique ne signifie pas conformisme. C’est un état d’esprit qui
nécessite qu’un acte soit accompli sans contrainte ; il doit découler d’une volonté consciente
de ses conséquences sur soi et sur les autres.
D’où des questions qui se posent sur la vraie nature de l’engagement des entreprises
qui empruntent cette voie.
Paragraphe 2- Questions persistantes sur l’engagement des entreprises
Les questions se rapportent aux vrais raisons qui poussent les entreprises à améliorer
leur conduite. Pour cela, nous rejoindrons l’hypothèse de CHAMBON Nadège qui s’interroge
sur les relations entre l’éthique et les entreprises. Les interrogations s’articulent autour de
deux questions fondamentales : « Qu’est-ce qui pousse les entreprises dans ce mouvement ?
Quels sont les outils mis en œuvre pour tenir les promesses affichées : simple vitrine ou
véritable engagement ? »139
. A travers les développements qui vont suivre, la réalité nous
montre un autre visage de l’éthique appréhendée par les entreprises.
D’une part, l’éthique des affaires est un outil de management qui œuvre dans la
rentabilité de l’entreprise. Mais d’autre part, respecter l’éthique des affaires est ressenti
comme une obligation pour les entreprises.
A- Ethique des affaires : outil de gestion de l’entreprise
Nombreuses sont les écoles de gestion qui enseignent l’éthique des affaires au motif
qu’elle concoure à la pérennité de l’entreprise. Philippe VAN PARIJS est d’avis pour
confirmer que l’éthique des affaires est une technique de management à part entière. Selon
lui, une conduite éthique : -« donne au partenaire (au sens plus large) le sentiment qu’il est
traité et induit de ce fait un climat de coopération (…)»
139
Mémoire CHAMBON Nadège, sur le thème : « Les logiques contemporaines de l’éthique
d’entreprise. Recherche appliquée au cas Danone », 2003, p.3
109
-« peut contribuer à la performance d’une entreprise en donnant d’elle une image
attrayante aux yeux de partenaires potentiels (…)»
-« peut aussi procurer des avantages à ceux qui la pratiquent parce que leurs
partenaires effectifs ou potentiels sont parfois prêts à sacrifier leur intérêt personnel à la
réalisation de certaines valeurs (…)»140
Cette affirmation est vraie dans ses résultats mais fausse dans son intention. L’éthique
des affaires devrait être la fin de toute action réalisée et non le moyen pour y parvenir.
L’intention qui nourrit les entreprises arborant les bannières de bonnes intentions n’est pas
désintéressée comme le veut le principe de l’éthique au sens strict.
Les entreprises approchées n’hésitent pas à le confirmer. Elles ne sont pas des
philanthropes de nature, tous leurs actes sont dictés par un intérêt quelconque. Certains actes
accomplis dans le cadre de leur responsabilité visent particulièrement à améliorer leur image
de marque auprès du grand public ou à la redorer suite à un scandale par exemple. Ainsi, leurs
actions éthiques ne sont que pure-façade à effet cosmétique et vides de tout engagement réel
de leur part.
L’écart entre le discours et l'acte est également flagrant. La réalité nous montre
également que la plupart des entreprises affichent un florilège de grands engagements sociaux
alors qu’elles ne disposent pas de moyens suffisants pour les respecter. La tendance des
entreprises est d’afficher des principes moraux et de concrétiser le moins d’actions possibles.
A contrario, que penser d’une entreprise qui réalise certes des actions sociales alors que leurs
activités sont orientées vers des activités dangereuses comme le nucléaire ? La question de
l’éthique est là et malheureusement il est parfois difficile de se prononcer sur les mesures
adéquates à prendre.
Le respect de valeurs morales est pressenti comme une obligation de la part de
certaines entreprises.
B- Ethique des affaires : passage obligé pour l’entreprise
La recrudescence de l’éthique des affaires est sans nul doute due au cri d’alerte lancé
par l’opinion publique. Les pressions faites par cette dernière sur les entreprises à respecter
des valeurs morales ont conduit les entreprises à considérer l’éthique des affaires. L’adhésion
140
VAN PARIJS Philippe, «Le trilemme de l’éthique des affaires », revue nouvelle, Bruxelles, 93(1),
janvier 1991, p.36
110
des entreprises à des principes moraux est pour la plupart due à des pressions de la part de
cette dernière. Or, rappelons que le respect de l’éthique des affaires doit venir d’un sentiment
libre et volontaire. Julie RAVAT l’a réaffirmé en avançant que « l’adoption d’un
comportement éthique ne doit pas être guidé uniquement par la peur de coup de bâton »141.
Pourtant la réalité montre que les pressions de l’opinion publique sont très poussées. A titre
d’illustration, certaines entreprises font parfois l’objet d’un contrôle massif d’un client pour
vérifier leur respect de normes éthiques.
Il arrive que les exigences de l’opinion publique soient si pressantes que les
entreprises doivent les satisfaire au risque de perdre des partenaires précieux et d’être évincé
par d’éventuels concurrents. Une entreprise s’est d’ailleurs plainte à ce sujet. Vu que ses
activités sont tournées vers l’exportation, donc à l’échelle mondiale, les partenaires exigent
que leurs produits soient fabriqués dans des conditions respectueuses du Droit du travail. A
cet effet, l’entreprise a fait l’objet d’une certification internationale dénommée SA 8000.
Cette certification accordée par un organisme indépendant définit l’entreprise qui a été
certifiée comme socialement honnête au regard du respect des conditions de travail de ses
employés.
Le respect de l’éthique demande non seulement la volonté de l’entreprise mais
également un budget conséquent. Les actions sociales menées par les entreprises sont très
onéreuses. Mais ces dernières sont obligées de le faire pour ne pas être évincé du circuit
économique et malheureusement cela a des retombées sur le prix des produits. Leurs prix sont
très élevés par rapport aux concurrents.
L’éthique approchée par les entreprises n’est pas dénuée de difficultés d’appréhension.
Toutefois, malgré les critiques formulées sur leur approche, force est de constater que
nonobstant l’effet de mode qui entoure la notion, l’éthique des affaires est une réalité. Mais
son application concrète relève parfois de la fiction de la part des entreprises.
Malgré cela, les entreprises ne sont pas les seules à mettre au cœur de leurs
préoccupations la moralisation du monde des affaires. Dans la promotion de l’éthique des
141
RAVAT Julie, « Ethique pourquoi ? Du principe à la pratique », concours 2006, promotion de
l’éthique professionnelle, p.5
111
affaires, P.DIENER a souligné que « les pouvoirs publics ont leur part dans cette
évolution »142.
CHAPITRE 2 : ETHIQUE ET LES POUVOIRS PUBLICS
Les pouvoirs publics ne sont pas étrangers à l’assainissement du circuit économique.
Les efforts accomplis en ce sens se manifestent par la mise en place d’entités indépendantes
tels le BIANCO et le SRF.
Section 1- Bureau Indépendant Anti-Corruption
L’engagement de l’Etat dans la lutte contre la corruption marque sa volonté réelle
d’éradiquer ce fléau mondial. Notons que Madagascar dispose d’un arsenal juridique
conséquent en la matière tant au niveau national qu’international. A ce titre, citons la loi
2004-030 du 9 septembre 2004 sur la lutte contre la corruption et la Convention des Nations
Unies sur la lutte contre la corruption ratifiée par Madagascar.
Pour mieux appréhender l’intervention de cet organe, nous allons passer en revue les
actions qu’il a réalisées et les obstacles rencontrés.
Paragraphe 1- Actions réalisées par le Bureau Indépendant Anti-Corruption
Le BIANCO s’est fixé l’objectif de réduire de manière sensible et significative la
corruption. Elle veut faire en sorte que Madagascar atteigne le niveau 7 en 2015143. Dans cette
optique, les avancées ont été plus marquantes au sein du secteur public. La date du 9
décembre 2009 restera un évènement mémorable pour le secteur privé. En effet, l’avènement
de la « déclaration des principes d’affaires » et « le code de conduite d’affaires du secteur
privé»144 constitue une grande première.
Afin de comprendre en quoi consistent ces méthodes, nous allons les détailler
successivement.
142
P.DIENER, « Réflexions liminaires », Droit des affaires, Ethique et déontologie, Hermès, 1994, 1ère
édition, p.11 143
Selon une brochure du BIANCO distribué par le responsable lors de l’entrevue
144 Cf. Annexe 2 et 3
112
A- Déclaration des principes d’affaires
Il s’agit d’un écrit rassemblant les valeurs, les principes et les normes de
comportement qu’une société ou organisation déclare respecter dans ses activités. Elle définit
la façon dont l’entreprise s’engage à travailler ensemble et avec les autres personnes
concernées par ses activités.
Grâce à ces principes, l’entreprise dispose d’un cadre de bonnes pratiques
commerciales et de stratégies de gestion des risques en vue de combattre la corruption. De
plus, l’entreprise verrait sa réputation préservée et son image de marque améliorée.
Concernant « le code de conduite d’affaires du secteur privé », il s’agit de la
codification formelle des principes issus de cette déclaration.
B- Code de conduite des affaires du secteur privé
Il s’agit d’un ensemble de règles et de standards de comportements souhaités dans
l’environnement des affaires. Il définit ce que les destinataires de ce code doivent faire et ne
pas faire. Ce code présente un avantage considérable par rapport aux différents codes abordés
dans cette étude : sa force légale. Cette caractéristique la rend ainsi obligatoire ; cela signifie
d’emblée que le code sanctionne toute violation aux dispositions du code.
Nonobstant ces évolutions au sein du secteur privé, il faut néanmoins mettre en
exergue les obstacles rencontrés dans la lutte contre la corruption.
Paragraphe 2- Obstacles rencontrés par le le Bureau Indépendant Anti-
Corruption
L’initiative de ces approches semble prometteuse. On regrette toutefois leur champ
d’application restreint à la région de Vakinankaratra. En raison de sa mise en œuvre récente, il
est encore trop tôt pour évaluer son effectivité. Mais le code prévoit un contrôle permanant de
l’application de ses dispositions et des sanctions sévères en cas d’éventuels manquements.
Il serait opportun d’appliquer ces initiatives dans la capitale. Mais son retard se heurte
à la réticence des acteurs économiques. Il serait faux d’admettre que l’éradication de la
corruption relève de la seule compétence du BIANCO. Comme l’a soulevé un des
responsables du BIANCO, combattre la corruption est l’affaire de tous, mais cette opinion ne
semble pas être partagée par la plupart des acteurs économiques. Il déplore le manque, voire
113
l’absence de collaboration de leur part. En effet, en 2004, le BIANCO, avec la participation
d’un groupement professionnel, avait prévu de mettre en place le même code de conduite dans
la capitale d’Antananarivo. Mais certaines entreprises, notamment les entreprises d’origine
étrangère, n’ont pas hésité à montrer leur réticence au projet.
Ce comportement est regrettable. Un encadrement éthique et légal des activités des
entreprises serait pourtant bénéfique eu égard aux avantages qu’il apporterait dans
l’optimisation de l’éthique des affaires.
Le blanchiment d’argent a également atteint les frontières de l’île. C’est avec
soulagement qu’on accueille l’intervention de l’Etat qui préconise une autre méthode
d’approche en créant une branche spéciale : le Service de Renseignements Financiers.
Section 2- Service de Renseignements Financiers
De manière générale, le blanchiment consiste à dissimuler l’origine de la provenance
des fonds de manière à échapper aux conséquences juridiques de ses actes. La nature de cet
acte porte considérablement atteinte à l’éthique des affaires.
Le blanchiment d’argent constitue une lutte à l’échelle internationale. A titre
d’illustration, nous pouvons citer le Groupe d'Action financière (GAFI) créé par le G7 et la
Convention des Nations Unies sur la lutte contre la corruption. Il s’agit d’ « un organisme
intergouvernemental visant à développer et promouvoir des politiques nationales et
internationales afin de lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du
terrorisme. Le GAFI est donc un organe de décision, s'efforçant de susciter la volonté
politique nécessaire pour réformer les lois et réglementations dans ce domaine. Le GAFI a
publié 40 + 9 recommandations afin de satisfaire cet objectif » 145. Pour adhérer au GAFI, les
pays postulants doivent créer une législation en la matière. Madagascar entre dans cette
catégorie par l’avènement de la loi 2004-024 du 19 Août 2004 contre le blanchiment des
capitaux, le dépistage et la coopération internationale dont les dispositions reposent également
sur les recommandations du GAFI.
Dans un premier temps, nous allons développer le mode de fonctionnement de
l’organisme et dans un deuxième temps les obstacles qui entravent sa route.
145
Des informations sur le GAFI sont visibles sur le site http://www.fatf-
gafi.org/pages/0,2966,fr_32250379_32235720_33631745_1_1_1_1,00.html
114
Paragraphe 1- Fonctionnement du Service de Renseignements Financiers
Le SRF a été créé et il est devenu opérationnel depuis le 18 Juillet 2008. La prévention
du blanchiment d’argent relève également de la participation légale des professions visées par
l’article 3, principalement les établissements bancaires. Le SRF ne pouvant pas saisir d’office
ces derniers, ses actions doivent partir obligatoirement d’une DOS ou « Déclaration d’Ordre
Suspecte » de leur part. Selon les dires d’un responsable du SRF, les banques constituent la
majeure partie des entités qui transmettent les DOS. En 2008146, cette entité a pu recueillir 23
DOS. Bien que ce chiffre paraisse faible, cela représente déjà un signe de l’appropriation du
dispositif par les assujettis.
Le SRF, comparé à son homologue le BIANCO, ne dispose pas des pouvoirs de
poursuite. Il s’agit d’un organisme à titre d’investigation technique qui se charge uniquement
de récolter des informations, de les analyser, et de les transmettre au Parquet. Un des
responsables du SRF a jugé important de souligner que les renseignements ne veulent pas dire
preuves. En effet, le juge dispose d’un pouvoir discrétionnaire, il n’est pas lié par les DOS qui
lui sont transmis. Il dispose de l’opportunité de poursuite. A titre d’exemple, sur vingt-trois
(23) DOS transmis aux autorités compétentes, seulement trois (3) ont été jugées par le juge
comme étant des opérations de blanchiment.
Le souhait du SRF est de pouvoir étendre ses activités dans quelques secteurs
économiques et professionnels. Récemment, son Directeur Général souhaite se pencher sur le
financement des partis politiques, « longtemps présumés comme auteurs potentiels de
blanchiment d’argent »147. A titre d’exemple, les campagnes électorales qui exigent des
investissements importants, présentent des suspicions quant à leur origine.
Mais leurs revendications peinent à s’appliquer en raison des obstacles qu’ils
rencontrent.
146
Rapport d’activité 2008, p.18 (les résultats du rapport d’activités de 2009 ne seront mis aux
dispositions du public que 6 mois après le 15 Mai 2010) 147
Journal Madagascar Matin, N° 0019, p.3
115
Paragraphe 2- Obstacles rencontrés par le Service de Renseignements Financiers
Des obstacles sont également rencontrés eu égard à l’ampleur grandissante que
présente cette infraction.
Du fait de l’obligation de confidentialité qui incombe à tout le personnel du SRF, les
informations recueillies s’avèrent limitées.
L’obstacle souligné par le Responsable du SFR repose sur l’inexistence de la loi sur le
terrorisme. En effet, certaines DOS traitées peuvent prendre une dimension internationale.
Des échanges d’informations avec le groupe EGMONT faciliteraient les investigations. Or,
l’adhésion à ce groupe exige du pays postulant l’existence d’une loi sur le terrorisme.
Le rapport d’activités du SFR met également en relief la prolifération du marché
informel de devises. Il a évoqué les causes de cette situation comme le taux de change
effectué par ces marchés qui semblent plus intéressants pour ces acteurs économiques, les
mesures non contraignantes par rapport au marché formel.
Le problème réside également dans le fait que la recherche des preuves en matière de
blanchiment est difficile. Bien que la DOS soit une obligation légale, la qualification d’une
opération suspecte relève du pouvoir d’appréciation discrétionnaire des établissements visés
par l’article 3. Le même Responsable a ajouté que la détection d’opération suspecte doit
revêtir un caractère objectif et non subjectif. Si ce cas se présentait, il appartient à la SRF de
faire des investigations et non aux établissements bancaires.
La meilleure méthode serait que ces derniers renforcent leur vigilance et signalent
toute opération douteuse aux autorités compétentes.
116
CONCLUSIONCONCLUSIONCONCLUSIONCONCLUSION
Cette étude a permis de mettre en relief les considérations éthiques qui imprègnent le
monde des affaires sous des angles différents.
Au niveau du droit des affaires, l’exigence morale transparait à travers la plupart des
disciplines. La prise en compte de l’individu, le souci de moralisation des relations d’affaires
et la répression des comportements indésirables rentrent dans son domaine d’application. De
plus, des valeurs morales telles la transparence et la loyauté, bien que déjà ancrées au droit
des affaires malgache, se retrouveraient d’autant plus renforcées avec l’introduction de la
gouvernance d’entreprise et de l’alerte éthique.
La perception de l’éthique par les juges diffère selon qu’on soit en présence du juge
français ou du juge malgache. Le juge français ne se limite pas uniquement à veiller à
l’application des lois en vigueur. Selon les cas d’espèce, il prend l’initiative de créer de
nouvelles règles morales. Le juge malgache s’en tient plutôt à la première position si l’on se
base sur les différents arrêts cités dans cette étude.
L’engagement des pouvoirs publics à lutter contre la prolifération des infractions
d’envergure internationale tel le blanchiment d’argent et la corruption, exprime également
leur volonté d’éradiquer ces comportements contraires à l’éthique des affaires.
La démarche des entreprises constitue une avancée spectaculaire dans la promotion de
l’éthique des affaires. Ces dernières ont pris conscience de la responsabilité qui leur incombe
à mettre en œuvre des valeurs morales dans leurs activités.
Cependant, de nombreux obstacles persistent dans tous ces niveaux. Les conflits
d’intérêts, les dilemmes moraux, les injustices et la recherche effrénée de profit rendent
impossible sa mise en œuvre, voire son effectivité dans le circuit économique.
Des obstacles au niveau de cette étude ont également été rencontrés. S’agissant
principalement de l’accès à l’information, le principe de confidentialité était souvent opposé,
limitant ainsi les données recueillies. Le refus catégorique d’aborder le thème était également
visible auprès de certaines entités notamment les entreprises.
Ainsi, cette étude a abouti aux résultats suivants :
- le minimum éthique consiste à respecter les textes en vigueur. Or la méconnaissance,
l’ignorance et les manquements aux règlementations demeurent des problèmes constants.
117
- Le monde des affaires met en relief de nombreux intérêts divergents et conflictuels.
En effet, un acte éthique suppose une harmonisation de ces intérêts. Mais en pratique, ces
intérêts divergents le demeurent encore plus que même souvent un intérêt est sacrifié au profit
d’un autre.
- L’ineffectivité de l’éthique des affaires est également tangible. Elle réside
principalement dans le manque de vulgarisation de la notion. En effet, le terme « éthique des
affaires » est nouveau et inconnu pour certains acteurs économiques.
- Le débat dont l’éthique des affaires fait l’objet favorise également son ineffectivité.
Certains s’accordent à dire que l’éthique et les affaires sont conciliables, toutes deux aussi
nécessaires que complémentaires. D’autres prétendent le contraire en affirmant que c’est
comme marier l’eau et le feu. Mais la remarque la plus virulente est le fait pour la plupart des
acteurs économiques d’affirmer que l’éthique des affaires n’existe pas à Madagascar.
- Force est de reconnaitre que « l’éthique en affaires est sui-generis différente de la
morale qui régit les autres activités humaines non soumises à cette dernière » 148 comme l’a
souligné Bergmann. En effet, elle ne répond pas aux exigences de l’éthique au sens strict.
Trois théories sont avancées pour confirmer cette hypothèse.
D’abord, le principe qui gouverne l’éthique est le désintéressement et pourtant
certaines sociétés qui adoptent des démarches éthiques veulent quelque chose en retour.
Ensuite, la prise en considération de l’éthique doit relever d’une démarche volontaire,
d’une liberté affranchie de toute contrainte. Or, certaines entreprises y recourent par
obligation ou suite à des pressions socio-économiques.
Enfin, l’éthique des affaires se distingue encore plus de l’éthique si on se réfère à la
cause qui l’anime. En effet, deux causes peuvent être évoquées. Selon la cause proche, qui
répond à la question « pourquoi l’éthique des affaires ? » C’est parce que l’éthique aspire
sincèrement à une moralisation du monde des affaires. Mais selon la cause lointaine, qui
répond à la question « pour quoi l’éthique des affaires ? », la réponse serait-elle « pour
rassurer les consommateurs ? Les clients ? Les investisseurs ? Pourquoi pas mais cette
éthique ne serait qu’un simulacre »149. Dans ce contexte, l’éthique des affaires est orientée
148
Citation de Bergmann reprise par OBRECHT Jean Jacques, « les entreprises à taille humaine face à
la demande éthique », revue trimestrielle d’économie industrielle, n°67, 1er trimestre 1994, p.59 149Cf. « Ethique dans une organisation, Proposition d’analyse pour la qualité sociale et
environnementale en entreprise », document extrait de la thèse professionnelle réalisée et présentée en février
2004 par Marie Françoise Clamens dans le cadre de la préparation au Master Spécialisé en Management de
118
pour préserver la réputation, l’image, la crédibilité et la pérennité de l’entreprise. Et dans la
pratique, c’est la cause lointaine qui est souvent avancée.
Ce constat montre ainsi que l’instauration de l’éthique dans les affaires exige des
efforts importants.
Dans cette optique, des recommandations peuvent être proposées :
- L’éthique des affaires doit être une nécessité et non plus une option pour le monde
des affaires. La première recommandation serait en une vulgarisation accrue de la notion
d’éthique des affaires. Une législation spécifique en la matière faciliterait son appropriation
par tous.
- La deuxième recommandation serait donc de préconiser une mobilisation et une
éducation du secteur privé vers un changement de comportement et de pratiques.
- L’éthique des affaires appelle à une reconversion des comportements des acteurs
économiques. Cependant, il serait utopique d’imaginer un changement radical de leur part.
Qu’on le veuille ou non, la recherche du profit occupera toujours une place privilégiée.
Aussi, pour favoriser l’adhésion des acteurs économiques au concept d’éthique des
affaires, la quatrième recommandation serait d’insister sur le lien de cause à effet que présente
l’éthique pour les affaires : c’est-à-dire qu’il faudrait insister sur le fait que l’éthique et le
profit ne sont pas contradictoires dans la mesure où l’éthique contribue à la pérennité de
l’entreprise. Il est vrai que l’éthique des affaires ne s’accorde pas parfaitement avec l’image
de l’éthique au sens strict mais ça reste une éthique quand même.
- il est également préconisé de développer les codes de conduites qui peuvent servir de
valeurs et de principes de références dans les actions des acteurs économiques. Les codes de
conduite sont moins utilisés par les acteurs économiques malgaches. Pourtant, il présente
l’avantage d’éclairer les employés sur la meilleure conduite à tenir et à renforcer le sentiment
d’appartenance à l’entreprise. Ainsi, il faudrait insister sur ce fait avant de s’engager dans
cette voie au lieu de réduire le code à un outil de communication pour faire bonne figure aux
l’Innovation, de la Qualité et de l’Environnement (2002/2003), License « Creative Common Developing
Nation », p.29
119
yeux des partenaires. Sa transmission aux employés, son suivi et son contrôle doivent être
assurés pour une meilleure application.
- Les pouvoirs publics ont également un rôle à jouer dans l’optimisation de l’éthique
des affaires. Un renforcement de ces institutions en matière de contrôle et de suivi des
activités est recommandé pour assurer son effectivité et pour pallier à d’éventuels dérives.
Une collaboration entre les acteurs économiques et les pouvoirs publics devrait également être
envisagée dans la mise en œuvre des principes gouvernant l’éthique des affaires.
-Le respect de la loi constitue le minimum éthique pour les acteurs économiques. Or,
on a pu constater la méconnaissance, voire l’ignorance et les manquements par ces derniers
aux règlementations en vigueur demeurent des problèmes constants. L’administration devrait
déployer des efforts pour résoudre ces problèmes.
- L’ineffectivité de l’éthique des affaires est également tangible. Il faudrait en premier
lieu une vulgarisation de la notion. L’ignorance du concept constitue un frein à son
application. Une législation spécifique en la matière est préconisée. Pour une meilleure
appropriation du concept, des ateliers de travail ou des conférences sont également
recommandés.
- L’éthique des affaires étant un terme célèbre en France et aux Etats-Unis, une
collaboration avec ces pays, dans la promotion de l’éthique des affaires à Madagascar, serait
envisageable. En effet, il faudrait tenir compte des expériences internationales en la matière.
Bien sur, il ne s’agit pas de faire une vulgaire copie mais de revêtir les formats étrangers en y
puisant le meilleur et en les adaptant aux spécificités nationales.
Ces solutions ne sont pas exhaustives, mais Madagascar semble sur la bonne voie dans
l’application de l’éthique des affaires malgré son retard par rapport aux autres pays
développés. Toutefois, il ne faut pas occulter que la volonté de tous constitue le rouage
essentiel à leur mise en œuvre. Ces propositions doivent être suivies d’actes en vue d’un
meilleur résultat. L’élaboration de valeurs communes relatives à l’éthique des affaires
faciliterait davantage son adoption par tous.
Mais au niveau international, avec des différences culturelles très marquées, est-ce
qu’une perspective d’élaboration de normes communes serait-elle possible?
120
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125
ANNEXES
AAN
ANNEXES
126
ANNEXE 1 : REGLEMENT INTERIEUR ET CODE DE CONDUITE ACCES
BANQUE
127
128
129
130
131
132
133
134
135
136
137
ANNEXE 2 : AN CODE DE CONDUITE DES AFFAIRES DU SECTEUR PRIVE
REGION DU VAKINANAKARATRA
PREAMBULE
- Considérant la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la corruption, et plus
particulièrement en ses articles 12 et 39 qui obligent chaque Etat partie à prendre des mesures
pour prévenir la corruption en impliquant le secteur privé et en encourageant la coopération
entre autorités nationales et secteur privé ;
- Considérant le Pacte Mondial, une initiative lancée en 1999 au Forum économique
mondial de Davos, regroupant des milliers d’entreprises privées responsables, en
collaboration avec l’Organisation des Nations Unies (ONU), qui invite les entreprises à
adopter , soutenir et appliquer dans leur sphère d’influence un ensemble de dix valeurs
fondamentales, dont le dixième principe relatif à la lutte contre la corruption ;
- Considérant la Convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la
corruption et particulièrement en son article 11 qui oblige chaque Etat partie à mettre en place
des mécanismes pour encourager la participation du secteur privé à cette prévention et lutte ;
- Considérant la loi n° 2004-030 du 9 septembre 2004 sur la lutte contre la corruption ;
- Considérant les axes stratégiques de mise en œuvre du Plan de Développement
Régional (PDR) de la Région du Vakinankaratra afin de restaurer un Etat de droit,
assurer une bonne gouvernance et réussir la lutte contre la corruption dans la Région,
Le code de conduite ci-après du secteur privé de la Région du Vakinankaratra a été
érigé, afin de définir l’ensemble des standards et des règles qui va régir les
comportements du secteur privé dans l’exercice de ses activités.
TITRE I : DISPOSITIONS GENERALES
SECTION PREMIERE : OBJET
ARTICLE PREMIER :
En voulant s’assurer que les pratiques du secteur privé sont bien en phase avec les nouvelles
exigences internationales ratifiées par Madagascar telles que : l’équité, la dignité, le respect,
la courtoisie, l’honnêteté, la transparence, l’intégrité, l’estime, la responsabilité, le refus de la
corruption et de la concurrence déloyale …dans la conduite des affaires.
138
Les principes des affaires, base du présent code de conduite du secteur privé du
Vakinankaratra, servent de référence aux comportements des entreprises en s’appuyant aux
objectifs de développement de Madagascar.
SECTION II : CHAMP D’APPLICATION
Article 2 : Le présent code s’applique aux employés, dirigeants et administrateurs des
entreprises du secteur privé du Vakinankaratra.
TITRE II : DES PRINCIPES GENERAUX
SECTION 2 : DE L’INTEGRITE
Article 3 : Le secteur privé est tenu d’accomplir son travail et mener ses relations d’affaires
de façon intègre, honnête, avec probité et par respect des lois et règlements en vigueur.
SECTION 2 : DE LA TRANSPARENCE
Article 4 : L’entreprise s’engage à prendre toutes les dispositions nécessaires pour se
prémunir contre le risque de corruption et des infractions assimilées
Article 5 : Les employés ou dirigeants du secteur privé doivent éviter de donner, solliciter ou
recevoir de la part d’autrui des faveurs illégales en vue d’effectuer ou non un sevice dans
l’exercice de ses fonctions.
Les employés ou dirigeants du secteur privé acceptent de faire régner un climat sain des
affaires par respect d’une concurrence loyale, d’un traitement égalitaire des entrepreneurs et
de la non application des pratiques anticoncurrentielles collectives comme les ententes, les
abus de position monopolistique et de concentration.
TITRE III : COMPORTEMENTS AU SEIN DE L’ADMINISTRATI ON DU SECTEUR
PRIVE
SECTION PREMIERE : DES RELATIONS AU SEIN DE L’ENTRE PRISE
Article 6 : L’entreprise accepte de créer un milieu de travail fondé sur le respect mutuel et sur
des comportements corrects les uns envers les autres.
Article 7 : L’entreprise accepte de favoriser un climat sain où harcèlement et discrimination
doivent être bannis.
Article 8 : L’entreprise accepte de promouvoir une communication ouverte, pertinente et
transparente.
Article 9 : L’entreprise doit accepter les critiques constructives en termes de conduite
139
SECTION 2 : DE LA CONDUITE DES AFFAIRES
Article 10 : L’entreprise est soumise à fournir des informations fiables, précises et
compréhensibles dans les délais réglementaire et impartis.
Article 11 : L’entreprise doit s’abstenir de toue tentative d’influence de manière inappropriée
ou d’induire en erreur tout lecteur de documents financiers.
Article 12 : L’entreprise est tenue de protéger la confidentialité des informations concernant
les consommateurs, les vendeurs et toue les partenaires.
Article 13 : L’entreprise est liée par l’obligation de respecter et d’assurer de la protection du
droit de propriété intellectuelle telle les brevets, les marques déposées, les secrets de
fabrication, le droit d’auteur, le label…
TITRE IV : DES RELATIONS AVEC LES CONSOMMATEURS
Article 14 : L’entreprise doit éviter toutes formes de corruptions et tous paiements et
transactions illicites pouvant influencer les circuits de commercialisation des produits.
Article 15 : L’entreprise est tenue de refuser d’offrir et de recevoir des dons et cadeaux
d’affaires, sous quelque forme que ce soit, susceptibles d’influencer des personnes
responsables.
TITRE V : DES RELATIONS AVEC LES FOURNISSEURS, VENDEURS ET
AUTRES PARTENAIRES
Article 16 : L’entreprise doit sélectionner ses fournisseurs, vendeurs et partenaires sur les
mêmes bases de critères, sans état d’âme et par respect des principes et éthiques des affaires.
TITRE VI : DES RELATIONS AVEC LES ORGANISMES GOVERN EMENTAUX ET
LES AUTORITES
SECTION PREMIERE : DES AUTORITES LOCALES
Article 17 : Le secteur privé est soumis à la règlementation en vigueur.
SECTION 2 : DE L’ADMINISTRATION PUBLIQUE
Article 18 : L’entreprise doit s’atteler à respecter toutes les exigences légales relatives à ses
propres activités.
Article 19 : L’entreprise et ses ayants droits sont tenus de refuser toute participation directe
(comme les donations) ou indirecte (comme les achats participatifs) à des activités sociales,
caritatives, levées de fonds et autres formes similaires des organismes publics et de ses agents,
140
ayant fonction de surveillance ou de contrôle à leur égard ou ayant pouvoir de leur octroyer
avantages et dérogations dans les domaines où ils évoluent.
Article 20 : L’entreprise accepte de ne donner directement ou par personne interposée, aucun
avantage ou intérêt quelconque à tout fonctionnaire ou toute personne dépositaire de l’autorité
publique ou chargée d’une mission de service public ou investie d’un mandat public électif et
qui a, en tout ou en partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation
ou le paiement de l’entreprise ; et ce, pendant l’exercice de ses fonctions ou dans les deux ans
de la cessation de celles-ci.
Article 21 : L’entreprise accepte de ne conclure aucun contrat, de ne donner aucun mandat
social quelconque, de n’attribuer aucune activité rémunérée de quelque manière que ce soit, à
tout fonctionnaire public ou tout agent ou préposé d’une administration publique qui, à raison
même de sa fonction, exerce la surveillance ou le contrôle direct de cette entreprise.
Cette assertion restera valable en cas de position de congé ou, de disponibilité ou admission à
la retraite ou après émission ou destitution ou révocation du fonctionnaire concerné, et ce,
dans un délai de trois ans à compter de s cessation de fonction.
Cette assertion restera aussi valable aux entreprises privées possédant au moins 30 pou cent
du capital commun avec l’entreprise concernée ou qui conclut avec celle-ci une exclusivité de
droit ou de fait.
Article 22 : L’entreprise accepte de ne demander à tout fonctionnaire public ou tout agent ou
préposé de l’administration publique, de divulguer des informations confidentielles qu’il aura
obtenues durant son service à moins d’être autorisé par la loi ou par une autorité compétente.
TITRE VII : ATTITUDES FACE A LA CONCURRENCE
Article 23 : Le secteur privé accepte de se soumettre à la loi sur la concurrence ainsi qu’aux
procédures de passation de marchés.
Article 24 : Le secteur privé doit promouvoir une concurrence loyale, équitable, honnête et
transparente.
Article 25 : L’entreprise doit éviter toute activité considérée comme illicite ou déloyale.
Article 26 : Le secteur privé est tenu de refuser toute entente avec les concurrents concernant
les prix, les rabais, les conditions de vente, les bénéfices, les mages bénéficiaires, les coûts, le
partage de marché…
Article 27 : La conduite des affaires du secteur privé doit être exempte de toutes fraudes à
savoir la sous facturation, la sur facturation, la fausse déclaration…
141
Article 28 : Le secteur privé doit assurer la mise sur le marché des produits de qualité et
normalisés
TITRE VIII : DISPOSITIONS FINALES
Article 29 : Tout manquement aux prescriptions du présent code expose son auteur à des
poursuites pénales conformément aux lois et règlements, notamment la modification dans la
loi n°2004-030 du 09 septembre 2004 relative à la lutte contre la corruption.
Article 30 : Dès l’entrée en vigueur du présent code, la Chambre de Commerce et d’Industrie,
avec ses Cellules d’Animation, a le devoir d’informer tous les intervenants du secteur privé
sous son autorité sur ces dispositions.
Les entreprises du secteur privé doivent prendre toutes les mesures nécessaires afin de se
conformer aux dispositions du présent code.
Article 31 : La Chambre de Commerce et de l’Industrie, avec l’appui du BIANCO, est
chargée de l’exécution du présent code qui sera publié à tout le secteur privé de la région du
Vakinankaratra, par le biais des moyens de communication tels que radiophoniques, télévisés,
journalistiques ainsi que toutes autres voies jugées nécessaires.
Fait à Antsirabe, le 09 décembre 2009
Le Président de la CCI du Vakinankaratra
ANDRIANJANAKA Mandrindra Albert
N
142
ANNEXE 3 : DECLARATION DES PRINCIPES D’AFFAIRES
143
ANNEXE 4 : LE PACTE MONDIAL OU GLOBAL COMPACT
Le Pacte Mondial invite les entreprises à adopter, soutenir et appliquer dans leur sphère d'influence un ensemble de valeurs fondamentales, dans les domaines des droits de l'homme, des normes de travail et de l'environnement, et de lutte contre la corruption. En d'autres termes, c'est seulement dans les domaines qui les concernent que l'on requiert des entreprises de véritables évolutions.
Ces dix principes sont inspirés de :
La Déclaration universelle des droits de l'homme, la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail, l’Organisation internationale du travail, la Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement, la Convention des Nations Unies contre la corruption
Droits de l'homme
1. Les entreprises sont invitées à promouvoir et à respecter la protection du droit international relatif aux droits de l'homme dans leur sphère d'influence ; et 2. A veiller à ce que leurs propres compagnies ne se rendent pas complices de violations des droits de l'homme.
Normes du travail
3. Les entreprises sont invitées à respecter la liberté d'association et à reconnaître le droit de négociation collective ; 4. L'élimination de toutes les formes de travail forcé ou obligatoire ; 5. L'abolition effective du travail des enfants ; et 6. L'élimination de la discrimination en matière d'emploi et de profession.
Environnement
7. Les entreprises sont invitées à appliquer l'approche de précaution face aux problèmes touchant l'environnement ; 8. A entreprendre des initiatives tendant à promouvoir une plus grande responsabilité en matière d'environnement ; et 9. A favoriser la mise au point et la diffusion de technologies respectueuses de l'environnement.
Lutte contre la corruption
10. Les entreprises sont invitées à agir contre la corruption sous toutes ses formes, y compris l'extorsion de fonds et les pots-de-vin.
144
ANNEXE 5 : DIRECTIVES DU CODE DE CONDUITE DES AFFAIRES- SOCIETE
ZAIN
145
146
147
148
TABLE DE MATIERES
REMERCIEMENT LISTE DES ACRONYMES SOMMAIRE RESUME
INTRODUCTION .....................................................................................................................................................................
TITRE PRELIMINAIRE- GENERALITES …………………………………………………………………….. 1 3
A- Concept d’éthique des affaires……………………………………………………………………………… 3 1- Notions voisines……………………………………………………………………………………………………... 3
a- Ethique, morale et déontologie…………………………………………………………………….. 3 b- Confusion entre éthique et morale………………………………………………………….......... 4 c- Préférence pour le terme éthique……………………………………………................................. 5
2- Essai de définition de l’éthique des affaires…………………………………............................................ 6 B- Particularités de l’éthique des affaires…………………………………….............................................. 7 1- Fondements de l’éthique des affaires………………………………………………………………………... 8 2- Buts poursuivis par l’éthique des affaires……………………………………............................................. 9 C- Légitimité de la place de l’éthique dans les affaires………………………..................................... 10 1- Non-conciliation de l’éthique avec les affaires………………………………………………………….. 10 2- Conciliation de l’éthique avec les affaires………………………………………………………………… 11 3- Opinion des acteurs économiques malgaches……………………………………………………………. 13
TITRE I - ETHIQUE AU TRAVERS DES PRINCIPES DU DROIT DES AFFAIRES………………………………………………………………………………………………………………………..
14
CHAPITRE I- ETHIQUE APPREHENDEE PAR LE DROIT DE S AFFAIRES……………………………………………………………………………..................................................................
15
Section 1 - Rapport complexe entre le droit et la morale………………………………………………….. 16 Paragraphe 1 - Principe traditionnel : distinction du droit et de la morale………………………………………………………………………………….....................................................................
16
A-Principaux éléments de distinction……………………………………………………………………. 17 1- Au niveau de leur finalité………………………………………………………………………………….. 17 2- Au niveau de leur sanction…………………………………………………………................................... 17
B- Autres éléments de distinction…………………………………………….................................................. 17 1- Au niveau de leur création………………………………………………………………………………… 17 2- Au niveau de leur élément d’appréciation…………………………………………………………... 18 Paragraphe 2 - Atténuation du principe traditionnel : complémentarité entre le
droit et la morale……………………………………………………………............................................................................. 18
A- Fondement de la relation entre le droit et la morale………………………………………... 18 B- Issue de la relation entre le droit et la morale…………………………..................................... 18 1- Influence de la morale sur le droit…………………………………………………................................ 19 2- Droit des obligations : domaine prisé par la morale………………………………....................... 19
Section 2 - Relation affirmée entre l’éthique et le droit des affaires……………................................... 20 Sous-section 1 - Présence récente de l’éthique dans les disciplines du droit des affaires…………………………………………………………………………………………........................................................
21
Paragraphe 1 - Droit de la concurrence……………………………………............................................ 21 A-Justification de l’éthique au sein du droit de la concurrence…………………………………... 21 B-Appréciation de l’éthique par le droit de la concurrence……………………………………….... 22
1-Promotion de valeurs………………………………………………………........................................................ 22 a-Liberté……………………………………………………………….................................................................. 22 b-Loyauté………………………………………………………………………………………………………… 23 c-Transparence…………………………………………………………………………………………………. 23
2-Protection du jeu de la concurrence…………………………………………………................................. 24 a-Répression des actes déloyaux………………………………………….................................................. 24 b-Mise en place d’un organe bicéphale………………………………………………………………… 25
Paragraphe 2 - Droit des procédures collectives d’apurement du passif………………... 25 A-Justification de l’éthique au sein du droit des procédures collectives
149
d’apurement du passif……………………………………………………........................................................... 26 B-Appréciation de l’éthique par le droit des procédures collectives d’apurement du passif……………………………………………………...........................................................................................
26
1-Maintien des emplois et continuité des activités de l’entreprise…………………………. 26 a-Directives particulières…………………………………………………………………………….. 26 b-Entorses au droit commun………………………………………………………………………... 28
2-Protection des créanciers………………………………………………………………………………... 29 Sous-section 2 - Présence tacite de l’éthique dans les disciplines du droit des affaires………………………………………………………………………………………………………………………………
29
Paragraphe 1 - Droit des investissements……………………………………………………………… 29 A-Objectif express : promotion des investissements……………………………………………… 30
1-Statut commun des investisseurs…………………………………………………………………….. 30 2-Statut particulier des zones franches……………………………………………............................... 30
B-Objectif tacite : création d’emplois……………………………………………………………………. 31 Paragraphe 2 – Droit des sociétés……………………………………………..............................................
A-Aspects techniques du droit des sociétés……………………………..…........................................... 31 31
B-Aspects moraux du droit des sociétés…………………..…………………………………………….. 32 1-Exigence de transparence………………………………………………………...................................... 32 2-Reconnaissance des droits des associés…………………………………………………………… 33 3-Reconnaissance de la responsabilité des dirigeants…………………………………………... 34 4-Contrôle de la société…………………………………………………………………………………….. 34
a-Présence d’un commissaire aux comptes…………………………………………………… 34 b-Contrôle des actes sociétaires…………………………………………………………………… 35
Paragraphe 3 – Droit fiscal…………………………………………………………………………………… 35 A-Immoralité apparente du droit fiscal...………………………………………………………………. 35 B-Moralité évidente du droit fiscal…...…………………………………………………………………… 36
1-Comportement moral du contribuable exigé…………………………….………………………. 37 2-Mesures à visée éthiques prises par les autorités compétentes…………………………… 37 3-Autres aspects moraux du droit fiscal….…………………………………………………………... 38
Section 3 – Présence certaine de l’éthique dans les disciplines du droit des affaires………….. 39 Paragraphe 1-Droit du travail………………………………………………………………………………. 39 A-Prise en compte d’une certaine catégorie de travailleur ……………………………………. 40 B-Reconnaissance des droits du travailleur………………………………………............................... 40 C-Protection complète du travailleur………………………………………............................................. 40 Paragraphe 2 – Droit pénal des affaires………………………………………………………………... 41 A-Répression des infractions relatives au fonctionnement de la société………………… 42 B-Répression des infractions relatives aux relations de la société avec les tiers……………………………………………………………………………………………………………………….
42
C-Répression des infractions spécifiques………………………………………………………………. 43 Section 4 – Discipline d’exception : Droit de l’environnement…………………………………………... 43
Paragraphe 1 – Justification de l’éthique au sein du droit de l’environnement………………………………………………………………………...............................................................
43
Paragraphe 2 – Manifestations de l’éthique au sein du droit de l’environnement 44 A-Obligations des investisseurs………………………………………………………...…………………… 44 B-Contrôle de leur activité……………………………………………………………………………………. 44 C-Sanctions prévues……………………………………………………………………………………………… 45
CHAPITRE 2 – ETHIQUE APPREHENDEE PAR LE JUGE ………………………………………... 45 Section 1- Ethique perçue par le juge français………………………………………………............................... 45
Paragraphe 1- Ethique au regard du juge français…………………………………………………. 46 Paragraphe 2- Limites fixé par le juge français………………………………………………………. 47 Section 1- Ethique perçue par le juge malgache……………………………………........................................... 48 Paragraphe 1- Ethique : application stricte des règles légales…………………………………. 49 Paragraphe 2- Ethique : application stricte des règles contractuelles………………............. 50 CHAPITRE 3 – PORTEE DES APPROCHES ETHIQUES PAR LES PRINCIPES DU DROIT DES AFFAIRES…………………………………………......................................................................................
51
150
Section 1 – Renforcement des considérations éthiques du droit des affaires…………………….. 52 Sous-section 1 – Renforcement des considérations éthiques du droit des sociétés : la gouvernance d’entreprise………………………………………………………………………………………………….
52
Paragraphe 1 – Notion de gouvernance d’entreprise………………………………...................... 52 Paragraphes 2 – Principes directeurs de la gouvernance d’entreprise…………………... 54
A-Principes rigoureux des Etats-Unis…………………………………………………………………………. 54 1-Transparence………………………......................................................................................................................... 54
a-Au niveau des documents comptables…………………………………........................................... 55 b- Au niveau du contrôle interne de la société…………………………………………………….. 56
2-Indépendance……………………………………………………………………………………………………… 56 3-Extraterritorialité…………………………………………………………………………………………………. 57
B-Principes laxistes de la France………………………………………………………………………………… 58 1-Emprunt à la loi Sarbanes Oxley………………………………………………………………………....... 58 2-Portée limitée de la loi Sarbanes Oxley…………………………………………………………………. 59 Paragraphe 3- Perspectives d’application des principes de la gouvernance d’entreprise à Madagascar……………………………………………………………………………………
60
A-Comparaison des principes de gouvernance d’entreprise avec la loi 2003-036 sur les sociétés commerciales…………………………………………………………………………………
60
1-Au niveau des sociétés concernées………………………………………………………………….. 61 2-Au niveau des organes internes…………………………………………………................................. 61 3-Au niveau de la présentation des rapports financiers………………………………………… 62 4-Au niveau du contrôle interne………………………………………………………………………… 62 5-Au niveau des sanctions…………………………………………………………………………………. 63
A-Condition essentielle à l’application de la gouvernance d’entreprise: existence d’un marché boursier………................................................................................................................................
63
1-Existence d’un marché libre : le cas de Madabourse………………………………………… 63 2-Vision d’un marché boursier règlementé………………..………………………........................... 64
B-Suggestions………………………………………………………………………….............................................. 64 Sous-section 2 – Renforcement des considérations éthiques du droit du travail : l’alerte éthique………………………………………………………………………………………………………………………………
65
Paragraphe 1 – Notion d’alerte éthique………………………………………………………………… 66 Paragraphe 2 – Principes de l’alerte éthique………………………………………………………… 66 A-Principes laxistes de l’alerte éthique aux Etats-Unis………………………………………….. 67 B-Principes restrictifs de l’alerte éthique en France……………………………………………… 68
1-Réticence profonde à l’alerte éthique………………………………………………………………. 68 2-Agrément de l’alerte éthique sous certaines conditions……………………………………... 69
Paragraphe 3- Perspectives d’application des principes de l’alerte éthique à Madagascar…………………………………………………………………………....................................................................
71
A-Comparaison des principes de l’alerte éthique avec la législation malgache relative à la dénonciation……………………………………………………………………………………….
72
1-Dénonciation prévue par le code pénal………………………………………………………………….. 72 2-Déclaration d’opérations suspectes prévue par la loi sur le blanchiment d’argent………………………………………………………………………………………………………………….
72
3-Alerte prévue par la loi sur les sociétés commerciales………………………………...................... 73 4-Dénonciation prévue par le Code du Travail………………………………………………………….. 74 A-Conditions relatives à l’application de l’alerte éthique……………………………………… 75
1-Au niveau des faits susceptibles d’être dénoncés……………………………………………… 75 2-Au niveau de la qualification du salarié…………………………………………............................ 76 3-Au niveau des supports utilisés………………………………………………….................................. 77 4-Au niveau de la protection des donneurs d’alerte …………………………………………….. 77
C-Suggestions………………………………………………………………….......................................................... 79 Section 2 – Réalités des approches éthiques par les principes du droit des affaires…………… 80
Paragraphe 1 – Présence de conflits…………………………………………............................................ 80 A-Conflits entre transparence et secret…………………………………………………………………. 81
151
B-Conflits d’intérêts……………………………………………………………………………………………… 82 1-Polémique sur la notion d’intérêt social…………………………………………………………… 82 2-Conflits d’intérêts opérés par la loi………………………………………………………………….. 84
Paragraphe 2 – Priorité de l’essor industriel………………………………………………………… 85 A-Priorité du développement économique au détriment des droits fondamentaux des travailleurs……………………………………………………………………………………………….
85
B-Priorité du développement économique au détriment de la protection de l’environnement……………………………………………………………………….............................................
86
Paragraphe 3 – Ineffectivité des lois en vigueur…………………………………….......................... 87 Paragraphe 4 – Permanences des comportements répréhensibles…………………………. 88
TITRE II – ETHIQUE AU TRAVERS DE LA PRATIQUE DES AF FAIRES…………………. 90 CHAPITRE 1 – ETHIQUE ET LES ENTREPRISES………………………………………………………. 91 Section 1 – Formalisation de l’éthique par la mise en place d’un code de conduite…………… 92 Paragraphe 1 – Code de conduite et ses notions voisines………………………………...................... 93
A-Code de conduite………………………………………………………………………………………………. 93 B-Règlement intérieur………………………………………………………....................................................... 94 C-Convention collective………………………………………………………………........................................ 95
Paragraphe 2 – Diversité des codes de conduite………………………………………………………….. 95 A-Code de conduite spécifique à un secteur d’activité…………………………………………... 95 B-Code de conduite à portée internationale…………………………………………………………... 96 C-Code de conduite propre à une entreprise………………………………………………………… 97
Paragraphe 3 – Modalités d’application des codes de conduite……………………….................. 97
A-Au sein des entreprises étrangères implantées à Madagascar…………………………… 97 B- Au sein des entreprises malgaches ………………………………………………………………….. 99
Section 2 – Avènement de la responsabilité sociale de l’entreprise……………………………………. 100 Paragraphe 1 – Définition de la responsabilité sociale des entreprises……………….............. 100 Paragraphe 2 - Manifestations de la responsabilité sociale de l’entreprise……………….. 101
A-Prise en compte du bien-être du travailleur…………………………………………………………….. 101 B-Protection de l’environnement ………………………………………………………………………………. 102 C-Réalisation des actions sociales diverses…………………………………….............................................. 102
Section 3 – Portée de l’approche éthique des entreprises…………………………………………………... 104 Paragraphe 1 – Questions persistantes sur les codes de conduite……………………………….. 104
A-Principe : valeur morale du code de conduite.………………………………………………………… 105 B-Difficultés engendrées par le code de conduite………………………………………………………… 105 C-Exception : valeur juridique du code de conduite.…………………………………………………... 106
Paragraphe 2 – Questions persistantes sur l’engagement des entreprises…………………………. 108 A-Ethique des affaires : outil de gestion des entreprises……………………………………………... 108 B-Ethique des affaires : passage obligé des entreprises………………………...................................... 109
CHAPITRE 2 – ETHIQUE ET LES POUVOIRS PUBLICS ……………………………………………. 111 Section 1 – Bureau Indépendant Anti-Corruption…………………………………......................................... 111 Paragraphe 1 – Actions réalisées par le Bureau Indépendant Anti-Corruption ...……………… 111
A-Déclaration des principes des affaires……………………………………………………………………... 112 B-Code de conduite des affaires dans le secteur privé…………………………………………………. 112
Paragraphe 2– Obstacles rencontrés par le Bureau Indépendant Anti-Corruption ………………………………………………………………………………………………………………………...
112
Section 2 – Services des Renseignements Financiers…………………………………………………………. 113 Paragraphe 1 – Fonctionnement du Service de Renseignements Financiers.……………………... 114 Paragraphe 2 – Obstacles rencontrés………………………………………………………………………………... 115 CONCLUSION………………………………………………………………………………………………………………… 116 BIBLIOLGRAPHIE …………………………………………………………………………………………………………. 120 ANNEXES………………………………………………………………………………………………………………………... 125