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ENSEIGNER LA DEMONSTRATION AU COLLEGE N o 37 Septembre 2011

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  • ENSEIGNER LA DEMONSTRATION

    AU COLLEGE

    No 37 Septembre 2011

  • ISSN 0297 - 4347Copyright 2011, IREM d’Aix-Marseille

    Courriel : [email protected] : http ://www.irem.univ-mrs.fr

  • Table des matières

    Introduction 5

    I La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe 11I.1 La formalisation des démonstrations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11I.2 Chercher / rédiger-exposer une démonstration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14I.3 La démonstration dans la pratique mathématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

    I.3.1 Le squelette logique des démonstrations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15I.3.2 Les types de démonstration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15I.3.3 La démonstration en numérique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

    I.4 Démonstrations fausses, démonstrations partielles . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

    II Activités 23II.1 Motiver la démonstration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

    Une figure, plusieurs histoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25Le carré malgré lui . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31Le Cerf-volant caché . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37Conjecturer en géométrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

    II.2 Aspects logiques et formels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51Les dents vertes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53Calcul d’angles de proche en proche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61De l’aire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69I prove or I object . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75Divisibilité par 2 ou par 5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81

    II.3 Aspects langagiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89Questionnaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93Démarche à nombreux pas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103

    Annexes 113Conjecturer en numérique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113

    Les aventuriers de la règle perdue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115Les aventuriers de la règle perdue (2) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119

    Analyse du sujet du Brevet 2007 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125Sujet du Brevet 2007 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129

    3

  • Introduction

    1. Enseigner la démonstration au collège : notre approche

    1.1 La démonstration, une affaire plutôt intime :

    Chacun sait par son expérience personnelle combien il est difficile de s’entendre entrecollègues sur des exigences communes en matière de démonstration. Les uns voudront que soitexigée une rédaction ternaire de type ≪ on a ... ; or on sait que ... ; par conséquent ... ≫ ; lesautres s’y opposeront en prônant au contraire la liberté pour l’élève de choisir sa propre façonde raisonner. Certains exigeront que l’énoncé du théorème utilisé soit cité in extenso, d’autresaccepteront une rédaction y faisant seulement allusion ; uniquement pour les théorèmes qui n’ontpas de nom pour certains, même pour les théorèmes tels que celui de Pythagore pour d’autres.

    Il est évident que la démonstration tient une place tout à fait particulière dans la pratiquede l’enseignement des mathématiques, une place très investie. On peut dire sans risque de setromper, que, pour la plupart des enseignants du secondaire, la démonstration est quelque chosecomme le cœur de l’activité mathématique, quelque chose dont ils seraient personnellementgardiens ou garants, bref une affaire plutôt intime 1.

    Soulignons le paradoxe : les mathématiques sont réputées être la science de la certitude, lelieu où les points de vues doivent s’accorder au nom de l’objectivité parfaite que cette scienceserait la seule à pouvoir garantir, et voici qu’une partie essentielle de l’activité est l’objet d’uneimplication fort irrationnelle du praticien !

    C’est un fait qui doit nous faire réfléchir. Car il n’y a aucune raison pour que cette interven-tion de la subjectivité soit réservée aux enseignants de la discipline : les élèves aussi entretiennentun rapport particulier avec la démonstration, pour eux aussi il peut s’agir d’une affaire intime !

    1.2 Quelles dimensions cette “intimité” met-elle en œuvre ?

    Pour qu’enseigner la démonstration respecte le sujet qui apprend – respect si important dufait du rapport intime qu’il peut entretenir avec cette activité particulière des mathématiques– plusieurs dimensions doivent être prises en compte :

    La construction de la motivation :

    Motiver la démonstration, c’est construire des situations où la curiosité naturelle de l’élèvesoit sollicitée : ≪ pourquoi ? ≫, ≪ comment cela se fait-il ? ≫, ≪ comment comprendre ce qui sepasse ? ≫, ≪ comment puis-je me l’expliquer ? ≫ voilà des questions qu’on se pose d’abord pour

    1. Voir notre questionnaire II.3 et l’analyse des réponses des professeurs

    5

  • Introduction

    soi-même et sans lesquelles l’exercice de la démonstration risque de susciter l’ennui (au mieux)ou d’être ressenti comme du dressage (au pire).

    Mais en matière de “pourquoi”, les enfants n’attendent pas la Cinquième et la Quatrième ! Ilssont même beaucoup plus forts dans ce domaine dans leurs jeunes années ... En fait, le besoin desavoir “pourquoi” n’a pas d’âge, il est l’une des expressions de la condition humaine, intimementintriqué avec la capacité de conscience. L’activité mathématique authentique n’attend donc pasla Cinquième pour commencer à poser cette question. Dès la maternelle, on peut la mettre enscène auprès des élèves et on constate qu’ils y répondent. L’exemple de l’activité des boitesd’allumettes 2 en moyenne section l’illustre bien. Pour notre part, nous avons tenu à présenterdes activités d’apprentissage de la démonstration échelonnées de la classe de Sixième à celle deTroisième, pour illustrer la pertinence d’un apprentissage en continuité avec le Primaire.

    La prise en compte des aspects formels :

    Démontrer, c’est aussi faire la preuve qu’on peut rattacher une connaissance nouvelle au cor-pus des connaissances déjà établies, d’une façon excessivement formelle. Ceci concerne évidem-ment les démonstrations de cours (dont la place s’est considérablement amenuisée au collège),mais pas seulement : expliquer une configuration ou justifier un calcul, cela demande de savoirexactement sur quelles connaissances géométriques ou sur quelles règles de calcul déjà établieson peut s’appuyer. Ainsi, la démonstration ne se réduit pas à s’assurer d’une vérité, ni même às’expliquer ce qui se passe : elle fait intervenir un jeu formel qui consiste à trouver une châıned’étapes bien mâıtrisées capables de relier le nouveau à l’ancien. Cette dimension vient presquecontredire la précédente : où passe le sujet dans cette histoire, et son désir de comprendre ?

    Dans la gestion de cette dimension, l’enseignant a une grande responsabilité. Il doit êtrecapable de dire exactement de quoi il s’agit et surtout ne pas essayer de faire passer cet aspectde la démonstration pour autre chose que ce qu’il est. Reconnâıtre que le résultat est connu,que personne n’a de doute à son sujet, qu’on peut même l’utiliser tout de suite, l’appliquer,qu’on pourrait s’arrêter là. Mais qu’on va faire quelque chose de plus qui consiste à regarder endétail comment ce résultat se raccorde à ce qu’on savait déjà, comment on peut l’en déduire, brefaborder la question de la cohérence du savoir mathématique concerné et celle de sa construction.Il n’est pas dit que cet aspect des mathématiques rebute nécessairement les élèves ; encore faut-il le présenter pour ce qu’il est. Outre la satisfaction qu’ils peuvent trouver à explorer cettequestion éminemment humaine du “ pourquoi ” que nous avons présentée dans la dimensionprécédente, le côté formel d’une démonstration peut aussi revêtir pour eux l’aspect d’un jeu,auquel ils prennent alors plaisir, notamment dans ses aspects combinatoires (partir des données,partir de la conclusion, ou les deux à la fois, recenser les moyens dont on dispose, agencer deschemins, etc.).

    La prise en compte des aspects langagiers :

    Qui est le sujet de la démonstration ? Qui parle ? Ici aussi, il s’agit du respect de l’élève.S’il a investi la démonstration, si celle-ci est devenue “son affaire”, il est naturel que ce soit luiqui parle. Et ce qu’il va dire risque d’être, au début, fort éloigné de l’objet “démonstration”. Letravail d’enseignement consiste alors à faire évoluer ces formulations inévitablement personnelleset incorrectes, vers une forme progressivement plus standard. Si l’on peut dire que l’incorrection

    2. Cdrom Hatier Maternelle de J. Briand et all.

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  • Introduction

    de la forme est au début une garantie de l’authenticité de la pensée, ceci n’exclut pas uneéducation, une convergence vers le vocabulaire de la discipline et vers des formes d’expressionplus classiques des raisonnements.

    Nous proposons des idées pour gérer le foisonnement d’expressions auquel on se trouve viteconfronté avec cette façon d’enseigner la démonstration. Notamment en devoir à la maison. Nousproposons aussi de séparer la tâche de rédiger de celle de trouver le cheminement du raisonne-ment. Sinon, la difficulté où les élèves se trouvent pour rédiger risque d’amener l’enseignant àréduire tellement le nombre de pas des démonstrations que celles-ci perdent tout intérêt. Ainsi,dans certaines activités, le but sera uniquement de trouver un plan de preuve par étapes, dediscuter de sa validité, de le critiquer, de le corriger, de constater qu’il peut y avoir plusieurschemins. Dans d’autres activités, le but sera de rédiger une démonstration courte, de comparerles formulations de la déduction, de les critiquer et de les perfectionner. Pour les premières, lenombre de pas pourra être important car la rédaction ne viendra pas ralentir ou décourager letravail de recherche. Un plan, des flèches, des numéros pour citer les théorèmes ou les règlesutilisés permettent à chacun de suivre le cheminement du raisonnement. Pour les dernières, onse limitera à un ou deux pas, pour mettre l’accent sur les formulations et les travailler.

    Cette gestion de la démonstration comme une activité éminemment humaine amène à discu-ter en classe de la question de l’implicite et de l’explicite. Les élèves seront intéressés d’apprendrequ’il n’y a pas une réponse unique ; que ça dépend de la longueur de la démonstration (du nombrede pas), de la personne à qui on s’adresse, des connaissances qu’on partage avec le lecteur etde la confiance qui s’est établie avec lui. Pour une fois, les mathématiques laissent une place àl’interprétation.

    2. Présentation de la brochure

    Sur l’importance de l’apprentissage de la démonstration au cœur des mathématiques ducollège et ses enjeux pour la formation des jeunes, le programme officiel (BO spécial N◦6 du28 Août 2008 : ”Programmes de l’enseignement des mathématiques.”) 3 est particulièrementexplicite.

    3. ≪ La question de la preuve occupe une place centrale en mathématiques. La pratique de l’argumentationpour convaincre autrui de la validité d’une réponse, d’une solution ou d’une proposition ou pour comprendre un “phénomène ” mathématique a commencé dès l’école primaire et se poursuit au collège pour faire accéder l’élève àcette forme particulière de preuve qu’est la démonstration. Si, pour cet objectif, le domaine géométrique occupeune place particulière, la préoccupation de prouver et de démontrer ne doit pas s’y cantonner. Le travail sur lesnombres, sur le calcul numérique, puis sur le calcul littéral offre également des occasions de démontrer.

    A cet égard, deux étapes doivent être clairement distinguées : la première, et la plus importante, est larecherche et la production d’une preuve ; la seconde, consistant à mettre en forme la preuve, ne doit pas donnerlieu à un formalisme prématuré En effet des préoccupations et des exigences trop importantes de rédaction,risquent d’occulter le rôle essentiel du raisonnement dans la recherche et la production d’une preuve. C’estpourquoi il est important de ménager une grande progressivité dans l’apprentissage de la démonstration et defaire une large part au raisonnement, enjeu principal de la formation mathématique au collège. La rédaction et lamise en forme d’une preuve gagnent à être travaillées collectivement, avec l’aide du professeur, et à être présentéescomme une façon convaincante de communiquer un raisonnement aussi bien à l’oral que par écrit.

    Dans le cadre du socle commun, qui doit être mâıtrisé par tous les élèves, c’est la première étape, “ rechercheet production d’une preuve ” qui doit être privilégiée, notamment par une valorisation de l’argumentation orale.La mise en forme écrite ne fait pas partie des exigibles.

    La prise de conscience de ce que sont la recherche et la mise en œuvre d’une démonstration est égalementfacilitée par le fait que, en certaines occasions, l’enseignant se livre à ce travail devant la classe, avec la participationdes élèves.

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  • Introduction

    Pour notre part, nous retrouvons dans ces directives l’écho de nos motivations pour cet as-pect de l’enseignement des mathématiques. Dans la présente brochure nous proposons le produitd’une réflexion commune entre enseignants du Supérieur (chercheurs en Logique) et du Secon-daire, au sein de l’IREM. Lors de nos échanges, nous nous sommes retrouvés sur l’importancedes différentes dimensions à l’œuvre dans l’apprentissage de la démonstration que nous avonsprésentées dans la section précédente et qui donnent l’articulation de notre travail.

    Nous consacrons cependant une première partie à l’“objet démonstration” : comment lesdémonstrations faites au collège se raccrochent-elles à celles qui sont l’objet des travaux deslogiciens ? quels enseignements peut-on en tirer ? Bien entendu, dans ce chapitre nous nousadressons aux professeurs ; le formalisme rigoureux qui y est utilisé n’a pas vocation à êtreenseigné, mais permet le recul nécessaire pour éclairer ces questions d’enseignement.

    Notre deuxième partie regroupe des activités à faire en classe. En effet, les activités per-mettent la compréhension et l’appropriation des connaissances mathématiques par tous lesélèves. L’intérêt pour les élèves d’aborder les notions nouvelles par le biais d’activités a été biendéveloppé dans la brochure ”Activités en classe de cinquième” (publication 2006 de l’IREM deMarseille, n0 35). Le travail sous forme d’activités est également pertinent pour l’apprentissagede la démonstration. Il permet de donner une place à l’expérimentation (faire des essais, tantdans le domaine géométrique que numérique), à la conjecture (généraliser ce que l’on voit surdes tests, ...) et au retour en arrière (après la découverte d’un contre-exemple, ...). Il permetd’alterner des plages de recherche individuelle et des temps d’échange par groupes ou par classeentière, ce qui permet de ne pas laisser d’élèves en difficulté. Ces temps d’échange permettent deplus aux élèves de s’exercer aux compétences orales liées à l’apprentissage de la démonstration :justifier leurs idées par des connaissances, argumenter pour convaincre de la validité de leurspropositions (on retrouve ici l’esprit des dernières instructions officielles : ≪ La rédaction et lamise en forme d’une preuve gagnent à être travaillées collectivement, avec l’aide du professeur,et à être présentées comme une façon convaincante de communiquer un raisonnement aussibien à l’oral que par écrit. Dans le cadre du socle commun [. . .] c’est la première étape, “ re-cherche et production d’une preuve ” qui doit être privilégiée, notamment par une valorisationde l’argumentation orale ≫).

    La mise en situation de ces activités dans l’une de leurs classes par les professeurs de collègedu groupe a, la plupart du temps, été menée en présence d’une des logiciennes. Les mises encommun et les discussions qui ont suivi ont permis de faire évoluer les activités qui ont souventété testées à nouveau. Toutes les activités que nous présentons sont donc accompagnées d’uncompte-rendu d’observation et d’un bilan.

    Il est à noter que nous proposons des activités non seulement en géométrie mais aussi dansle domaine du numérique et même sur des châınes déductives d’énoncés non mathématiques.

    Les activités proposées se présentent de la manière suivante :

    - Une ”fiche élève” pour guider l’élève dans son activité ;

    Cette initiation à la démonstration doit en particulier permettre aux élèves de distinguer une propriétéconjecturée et vérifiée sur des exemples d’une propriété démontrée. En particulier, l’enseignant doit préciserexplicitement qu’un résultat mathématique qui n’est pas démontré est admis. ≫

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  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

    - Un “dossier professeur” contenant les rubriques suivantes : intentions des auteurs ; déroule-ment possible ; compte-rendu de l’activité ; bilan, discussion de certaines modalités, alternatives,suites.

    Les activités proposées sont subdivisées selon les thèmes suivants :

    - Motiver la démonstration ;

    - Aspects logiques et formels ;

    - Aspects langagiers.

    9 IREM Aix-Marseille II

  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

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  • Chapitre I

    La démonstration des logiciens / ladémonstration dans la classe

    I.1 La formalisation des démonstrations

    La démonstration en classe de mathématiques tout comme dans la pratique des mathémati-ciens n’est ni un objet formel, ni réduite à sa dimension logique. Néanmoins, son squelettelogique la constitue (même s’il est implicite) et structure l’activité du praticien. Avoir en têteune définition formelle de la démonstration, comme objet de référence, peut alors être utile pourcerner l’objet qui nous intéresse la démonstration en classe de mathématiques.

    Il existe différentes définitions des démonstrations formelles. De telles définitions sont ap-pelées des systèmes formels. Ces différents systèmes sont tous également pertinents lorsqu’ons’intéresse à caractériser la démonstration dans la pratique mathématique. Nous en donnons icideux exemples :

    • La démonstration formelle dans un système axiomatique (à la Hilbert) :La démonstration est un discours dont l’enchâınement des propositions doit préserver la

    validité des énoncés successifs. C’est essentiellement sur ce modèle que sont manipulées, lues,écrites, pensées les démonstrations mathématiques.

    Plus précisément, dans un système axiomatique, une démonstration est une suite de formulesqui trouvent correctement leur place dans cette suite (en tant que leur validité est assurée), soitparce qu’elles sont des axiomes ou des théorèmes déjà prouvés, soit parce qu’elles peuvent êtredéduites des précédentes par l’application d’une règle de déduction essentiellement le modusponens et les règles gérant les connecteurs et les quantificateurs. Par exemple :

    ◦ Modus ponens : Si A et A ⇒ B sont deux propositions qui appartiennent à une démonstationformelle D alors la suite de propositions constituée de D suivie de B est une démonstrationformelle de B.En fait dans la pratique, on utilise une règle plus générale que nous appellererons dansce qui suit “Modus ponens généralisé”. Il s’agit d’appliquer en une seule étape, la règled’élimination du quantificateur ∀ et le modus ponens. Nous l’écrirons :

    De A(a1, · · · , an) et de ∀d1, · · · , dn [A(d1, · · · , dn) ⇒ B(d1, · · · , dn)],on déduit B(a1, · · · , an)

    Exemple : Démontrer que “le trinôme x2 − 5x + 7 n’a pas de racine” se fera par l’appli-

    11

  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

    cation de la règle ci-dessus avec :- pour tout a, b, c, si b2 − 4ac < 0 alors le trinôme ax2 + bx + c n’a pas de racine- A(1 ; −5 ; 7) : (−5)2 − 4 × 1 × 7 < 0- B(1 ; −5 ; 7) : le trinôme x2 − 5x + 7 n’a pas de racine.

    ◦ Généralisation : Si on a une démonstration formelle D d’une formule φ(x) (ayant unevariable libre x) alors la suite constituée de la démonstration D suivie de ∀xφ(x) est unedémonstration formelle de ∀xφ(x). Que l’on généralise à plusieurs paramètres x1, · · · , xnen :

    De φ(x1, · · · , xn), on déduit ∀x1, · · · , φ(x1, · · · , xn)Exemple : Dans tout triangle, les médiatrices sont concourantes.Par cette phrase, une proposition universelle est énoncée. Codée, elle s’écrirait : “Quelquesoit le triangle, ....”. Pour la démontrer, le professeur prendra un triangle “quelconque”(i.e. sans propriété particulière présupposée) et fera la démonstration de l’existence d’unpoint de concours des médiatrices dans ce triangle. Il conclura alors que la propriété estdémontrée pour tout triangle.

    • La démonstration formelle en ≪ déduction naturelle ≫ :La présentation des démonstrations en ≪ déduction naturelle ≫permet de mettre l’accent sur

    les règles logiques relatives à l’utilisation des connecteurs logiques (l’implication, la conjonction,la disjonction). Cette définition des démonstrations formelles est due à Gerhard Gentzen. Sonidée de départ était simple : remplacer les axiomes régissant les connecteurs par des règles dedéduction afin de reproduire toutes les formes élémentaires et naturelles de raisonnement. Pourréaliser cette idée, Gentzen a développé un formalisme où les déductions ne sont pas des suites dephrases mais des arbres, dont la racine est la conclusion de la démonstration et les feuilles en sontles hypothèses tandis que les nœuds sont les règles de déduction (voir les exemples ci-dessous).Comme règles de déduction on dispose d’une part pour chaque connecteur ∧, ∨, ⇒ et pourchaque quantificateur (∀, ∃) d’une règle d’introduction qui permet de déduire une formule selonson connecteur principal et d’une règle d’élimination qui permet d’utiliser une formule selonson connecteur principal ; d’autre part de la règle de l’absurde 1 (voir 3ième schéma ci-dessous).Par exemple :

    - Elimination de ⇒ (ou modus ponens) :H1, . . . ,Hn

    ...A ⇒ B

    H1, . . . ,Hn...A

    BSi sous les hypothèses H1, . . . ,Hn on peut d’une part déduire A ⇒ B et d’autre partdéduire A alors sous les hypothèses H1, . . . ,Hn on peut déduire B.

    1. ou de la règle du tiers exclu ou encore de la règle de la double négation qui lui sont équivalentes.

    IREM Aix-Marseille II 12

  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

    - Introduction de ∧ :H1, . . . ,Hn

    ...A

    H1, . . . ,Hn...B

    A ∧ BSi sous les hypothèses H1, . . . ,Hn on peut d’une part déduire A et d’autre part déduireB alors sous les hypothèses H1, . . . ,Hn on peut déduire A ∧ B.

    - Elimination de ∨ :H1, . . . ,Hn

    ...A ∨ B

    H1, . . . ,Hn, A...C

    H1, . . . ,Hn, B...C

    CSi sous les hypothèses H1, . . . ,Hn on peut déduire A ∨ B et si lorsque aux mêmes hy-pothèses on ajoute A on peut déduire C et qu’en outre, lorsque aux mêmes hypothèseson ajoute B on peut déduire C, alors sous les hypothèses H1, . . . ,Hn on peut déduire C.L’application de cette règle correspond à ce qu’on appelle “raisonnement par disjonctionde cas”.

    - Règle de l’absurde :H1, . . . ,Hn,¬A

    ...⊥A

    Si sous les hypothèses H1, . . . ,Hn et ¬A on peut déduire ⊥ c’est à dire une antilogie (uneformule toujours fausse) alors sous les hypothèses H1, . . . ,Hn on peut déduire A.L’application de cette règle correspond à ce qu’on appelle “raisonnement par l’absurde”.

    - Introduction de ∃ :H1, . . . ,Hn

    ...

    φ(t)

    ∃x φ(x)Si sous les hypothèses H1, . . . ,Hn, on peut déduire φ(t) (la formule φ est démontrée pourle terme t) alors sous les hypothèses H1, . . . ,Hn on peut déduire ∃x φ(x).L’application de cette règle correspond dans la pratique au fait de construire un témoinpour démontrer une propriété d’existence.

    Exemple : une démonstration en déduction naturelle présentée sous forme d’un arbre :

    Soit C([AB]) un cercle de diamètre [AB], decentre O. Soit C([AO]) le cercle de diamètre[AO]. Soit M un point sur C([AB]) distinct deA et de B. (AM) coupe C([AO]) en N . Montrerque N est le milieu de [AM ].

    A BO

    M

    N

    13 IREM Aix-Marseille II

  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

    On construit l’arbre de démonstration suivant :

    ...Thm Thalès

    `

    (ON)//(BM) Hyp : O milieu de [AB]

    N est le milieu de [AM ]

    où`

    est le sous-arbre suivant :

    ...Thm

    ...Thm N ∈ C(AO)

    (ON) ⊥ (AN)

    ...Thm M ∈ C(AB)

    (BM) ⊥ (AM)

    ANM alignés

    (AN) = (AM)

    (BM) ⊥ (AN)

    (ON)//(BM)

    I.2 Chercher / rédiger-exposer une démonstration

    Chercher et rédiger une démonstration sont deux démarches complètement différentes. Ellesne nécessitent pas les mêmes compétences. Par exemple, de nombreux théorèmes ont mis desannées, voire des siècles à être établis, mais ensuite ils ne posent pas de gros problème pour êtrecompris et exposés ; de même beaucoup d’élèves comprennent facilement les démonstrationsfaites par leurs professeurs, mais ils auront les plus grandes difficultés à résoudre les exercicesoù ils doivent effectuer eux-mêmes des démonstrations.

    Que l’on représente une démonstration comme une suite ou comme un arbre d’énoncés, onpeut dire que “rédiger/exposer une démonstration” revient à décrire cette suite (ou cet arbre)en partant des axiomes, des données du problème ou de résultats connus pour aller vers laconclusion ; tandis que “chercher une démonstration” consiste soit à deviner ces éléments soit àfaire une recherche de la suite (de l’arbre) en commençant par la fin (la racine) et faire ce quecertains appellent un “châınage arrière”.

    Les élèves auront tendance à vouloir utiliser la première méthode puisque c’est celle qu’ilsvoient exposée par leurs professeurs dans leurs cours. Cela réussit souvent car, bien sûr dansbeaucoup d’exercices posés au collège, la part réservée à la prise d’initiative est très réduite. Lesexercices sont proposés dans un contexte bien spécifié et les données sont clairement posées. Maiscela ne réussit pas à tous les coups ! Apprendre à démontrer, c’est aussi affronter des démarchesà plusieurs pas, imaginer les démarches intermédiaires, analyser l’énoncé à démontrer (retoursur les définitions des termes), rechercher les théorèmes à disposition ...Par exemple :

    - Si la proposition à démontrer est la conjonction de deux propositions, comme pour démontrerque ∆ est une médiatrice, on fera deux démonstrations ;

    - Si la proposition est une proposition universelle, comme pour démontrer que “tout trianglerectangle ...”, on se donne un élément générique (ici un triangle rectangle quelconque) et onessaie de démontrer qu’il possède la propriété demandée ;

    - Pour démontrer que deux droites sont parallèles, on pourra faire la liste des théorèmes quipermettent de conclure que deux droites sont parallèles. En confrontant les hypothéses de cespropriétés et les données du problème, on pourra déterminer quelle est celle qu’on choisira. Onaura ainsi remonté d’un cran dans sa démonstration. Il restera alors à observer si les hypothèses

    IREM Aix-Marseille II 14

  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

    de la propriété sont des données ou si on peut les obtenir par une démonstration annexe.

    Pour conclure ce paragraphe, disons qu’il n’y a pas de dichotomie entre les deux méthodes ;souvent c’est un mélange qui est utilisé pour la recherche de la démonstration : on com-mence par un châınage arrière, pour terminer par des démonstrations directes des propriétésintermédiaires qui sont apparues ou l’inverse. Par contre, pour la rédaction de la démonstration,on va généralement des hypothèses vers la conclusion.

    Remarquons qu’au lycée, il existe en plus des raisonnements spécifiques à tel ou tel domainedes mathématiques : par exemple lorsqu’on raisonne en arithmétique, une propriété universellese démontre rarement en utilisant un élément générique, mais plutôt en faisant un raisonnementpar récurrence.

    I.3 La démonstration dans la pratique mathématique

    Dans ce paragraphe, nous allons nous rapprocher un peu plus de la pratique de la démonstra-tion en classe de mathématiques. D’une part en faisant une typologie des différentes démonstra-tions pratiquées (directe, par l’absurde, par contraposée, raisonnement par cas ...) et d’autrepart en discutant le degré de rigueur qu’on peut demander à des collégiens si l’on ne veut pastrop les couper de leur façon naturelle de raisonner.

    I.3.1 Le squelette logique des démonstrations

    La démonstration, dans la pratique mathématique, est un discours, c’est à dire une suited’énoncés mathématiques. Les énoncés, quoique ponctués de “formules mathématiques”, sontformulés en langue naturelle. Néanmoins, leur enchâınement est contrôlé par une application im-plicite des règles de déduction, ce que l’on peut appeler le squelette logique de la démonstration 2.En effet, dans une démonstration, on utilise soit des théorèmes, soit des énoncés obtenus parapplication du modus ponens (voir page 12) ou de la règle de généralisation, soit, pour desdémonstrations un peu plus élaborées, des règles de la déduction naturelle. Il s’agit en quelquesorte de l’écriture linéaire d’une démonstration laquelle est essentiellement structurée en arbre.

    Un des enjeux de l’apprentissage de la démonstration sera alors d’expliciter ce squelettelogique, d’apprendre à repérer les formulations en langue naturelle qui jouent le rôle des règlesde déduction en donnant le statut de démonstration au discours étudié ou construit.

    On mesure ainsi l’importance du travail sur le langage qui permet de manipuler des énoncésmathématiques et également de les enchâıner dans les démonstrations.

    I.3.2 Les types de démonstration

    En plus de la démonstration directe (modus ponens), on utilise souvent une variété dedémonstrations mathématiques : raisonnement par l’absurde, par contraposée, par disjonctionde cas, utilisation de contre-exemples . . .Ces raisonnements reposent directement sur les règles

    2. Qui est en fait un mixte de démonstration définie dans un système à la Hilbert et de démonstration définieen déduction naturelle.

    15 IREM Aix-Marseille II

  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

    de déduction ; les expliciter, en mâıtriser les ressorts permet de mieux les dominer lorsqu’il s’agitde les comprendre, les produire ou les enseigner.

    • Le modus ponens ou démonstration directe :On utilise uniquement la régle d’élimination de ⇒ dite aussi “modus ponens”. On utilise

    une preuve ou un théorème de l’implication A ⇒ B et une preuve ou une donnée de A pourconclure B.

    • Le raisonnement par l’absurde :On utilise une version un peu déformée de la règle de l’absurde. Mais essentiellement,

    ce que l’on appelle ainsi, c’est le fait de rajouter aux hypothèses H1, . . . ,Hn une hypothèsesupplémentaire : la négation (¬A) de l’énoncé A que l’on veut démontrer. Le nouveau contexted’hypothèses sera alors H1, . . . ,Hn,¬A. Si l’on en déduit une contradiction, alors, on peutconclure que dans le contexte H1, . . . ,Hn, l’énoncé A est démontré.

    Exemples :

    1. Dans un triangle ABC, les médiatrices d1 et d2 des côtés [AB] et [BC] sont sécantes.Supposons que d1 et d2 ne soient pas sécantes, elles seraient donc parallèles. Puisque (AB)est perpendiculaire à d1 alors, en utilisant un théorème du cours de sixième, on déduitque (AB) serait perpendiculaire à d2.Or, (BC) est perpendiculaire à d2 par construction. D’après un autre théorème du coursde 6ème, on peut en déduire que les droites (AB) et (BC) seraient parallèles.Comme B appartient aux deux droites, on peut conclure qu’elles seraient confondues.On a alors une contradiction avec l’hypothèse disant que ABC est un triangle.Ce raisonnement par l’absurde nous permet de conclure que d1 et d2 sont sécantes en unpoint que l’on peut nommer O.

    2.√

    2 n’est pas décimal.La démonstration se fait en supposant que

    √2 est décimal. Posons :

    √2 = 1, 141213562...a

    où a est la dernière décimale non nulle.On fait alors un raisonnement par cas suivant la valeur possible de a.Si a = 1, le produit 1, 141213562...1 × 1, 141213562...1 est un nombre décimal qui se ter-mine par 1. Ce qui n’est pas possible.Si a = 2, le produit 1, 141213562...2 × 1, 141213562...2 est un nombre décimal qui se ter-mine par 4. Ce qui n’est pas possible.Ainsi de suite. Aucune décimale n’est possible, ce qui contredit l’hypothèse : on conclutalors que

    √2 n’est pas décimal.

    • Le raisonnement par contraposée :Forme directe : Il consiste à utiliser ou démontrer un théorème de la forme A =⇒ B, pour

    en conclure que ¬B =⇒ ¬A.Forme indirecte : Il consiste à utiliser ou démontrer un théorème de la forme ¬B =⇒ ¬A

    pour en conclure que A =⇒ B.Exemples :

    1. Soit un triangle ABC dont les côtés sont de longueurs respectives BC = 11cm, AB = 5cm,AC = 7cm. Démontrer que ce triangle n’est pas rectangle en A.

    IREM Aix-Marseille II 16

  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

    On utilise la contraposée du théorème de Pythagore. De BC2 6= AB2 + AC2 on conclutque le triangle n’est pas rectangle en A.

    2. Démontrer que si p n’est pas divisible par 3, alors p n’est pas divisible par 12.

    On utilise le fait que si p est multiple de 12 alors p est un multiple de 3.

    3. Soit la fonction f(x) = ax2 + bx + c telle que f(1) = f(5) = f(-2) = 0. Que peut-onconclure ?Sachant qu’un trinôme dont les coefficients ne sont pas tous nuls a au plus deux racinesdistinctes, on en déduit que a = b = c = 0

    • Le raisonnement par disjonction de cas :Il s’agit de partager le domaine auquel les éléments appartiennent, en plusieurs parties

    disjointes ; on montre alors que la propriété à vérifier est satisfaite sur chacune de ces parties.

    Exemples :

    1. Pour tout n ∈ N, n(n + 1)(n + 2) est divisible par trois, (i.e. congru à 0 modulo 3).Le raisonnement par disjonction de cas consistera à partager N en trois sous-ensembles(les classes de congruence modulo 3) et ensuite à montrer que lorsque l’on prend n dansn’importe laquelle de ces classe le résultat est obtenu.

    2. On considère 3 points A, B et M sur un cercle C, avec M situé sur le grand arc AB. Onveut démontrer que : ÂOB = 2× ÂMB où O est le centre du cercle. (classe de troisième)Pour cela on commence par construire C le point de C diamétralement opposé à M . Ladémonstration se fait en distinguant trois cas : selon que le point C est A (ou B), que lepoint C est sur le grand arc AB ou qu’il est sur le petit arc AB

    3. Résoudre |x − 2| = |x + 6| se fera en distinguant trois possibilités, selon que x ≤ −6 ,−6 ≤ x ≤ 2 ou x ≥ 2

    • L’utilisation du tiers exclu :Il existe deux irrationnels a et b tels que ab soit rationnel. Cet énoncé n’est pas du niveau

    du collège, mais il est très éclairant sur le rôle du “tiers exclu”, lorsque l’on raisonne sur despropriétés existentielles. On y voit comment on accepte leur vérité sans pouvoir exhiber leséléments dont on veut affirmer l’existence.

    On raisonne en étudiant les deux cas possibles pour√

    2√

    2. Soit

    √2√

    2est rationnel, alors a = b =√

    2 donc on a trouvé deux irrationnels a et b tels que ab soit rationnnel. Sinon on pose a =√

    2√

    2

    et b =√

    2, alors ab = (√

    2√

    2)√

    2 = (√

    2)2 = 2. On a finalement trouvé deux irrationnels (sans lesexhiber) a et b tels que ab soit rationnnel. On peut donc conclure que la propriété est vérifiée.

    • L’utilisation d’un contre exemple :Lorsque l’on veut démontrer la négation d’une propriété universelle, qui de fait devient une

    propriété existentielle, la démonstration se fait en exhibant un “témoin” (un “contre-exemple”).

    Exemples :

    1. Pour infirmer que deux figures qui ont le même périmêtre aient forcément la même aire,on pourra exhiber les deux rectangles “ avec et sans le coin ”(Figure 1).

    17 IREM Aix-Marseille II

  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

    Figure 1 Figure 2

    De même pour infirmer que deux figures de même aire aient le même périmètre, on peutexhiber les deux rectangles “avec un morceau déplacé ” (Figure 2).

    2. Pour montrer que la “règle-élève”a

    b+

    c

    d=

    a + c

    b + dest fausse, le professeur pourra donner

    un contre-exemple. Par exemple : a = 1 ; b = 2 ; c = 1 et d = 2

    • L’utilisation d’un cas générique :Lorsque l’on veut montrer une propriété universelle, on utilise un élément que dans certains

    ouvrages, on appelle “exemple générique”. Remarquons que ce mot “exemple” peut porter àconfusion et peut amener l’élève à croire qu’il peut faire une démonstation en visitant un certainnombre de cas où “ça marche”.

    I.3.3 La démonstration en numérique

    • Le point de vue logique :Lorsqu’on travaille en numérique, on admet implicitement (rarement explicitement) les pro-

    priétés de l’égalité et des opérations usuelles qui engendrent, via le Modus Ponens, les règles decalcul usuelles :

    Propriétés de l’égalité :- l’égalité est réflexive : “Pour tout x, (x = x)”- l’égalité est symétrique “Pour tout x, y, (x = y ⇒ y = x)”(cela ne parâıt pas nécessairementévident aux élèves pour lesquels le sens du calcul est privilégié.)- l’égalité est transitive : “Pour tout x, y, z, (x = y et y = z ⇒ x = z)”- règle de substitution : “ Si la proposition Φ(a) est vraie et si a = b alors Φ(b) est vraie”

    Propriétés des opérations :- l’addition et la multiplication sont associatives (conséquence : on n’a pas besoin de parenthèsesdans une suite d’opérations de même nature) :“Pour tout x, y, z, (x+y)+z = x+(y+z)” ; de même “Pour tout x, y, z, (x×y)×z = x×(y×z)”- la multiplication est distributive sur l’addition :“Pour tout a, b, c, a × (b + c) = a × b + a × c”- les égalités sont stables à gauche et à droite par rapport à l’addition et la multiplication :“Pour tout a, b, c, (a = b ⇒ a + c = b + c) et “pour tout a, b, c, (a = b ⇒ a × c = b × c)”- à ces propriétés élémentaires il faut rajouter des propriétés acquises au cours des années commela régularité des éléments non nuls (par lesquels on peut “simplifier”), ....

    En conséquence, lorsque l’on manipule les équations pour les “résoudre”, on fait des démonstra-tions au sens indiqué dans les premiers paragraphes de ce chapitre : en effet, on utilise les règles

    IREM Aix-Marseille II 18

  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

    de l’égalité énoncées ci-dessus et d’autres démontrées, de la même façon qu’on utilise les règlespour les connecteurs logiques (rappelées au début de ce chapitre).

    Exemple : Résoudre l’ équation suivante : x + 40 = 3x

    La rédaction attendue des éléves est présentée ci-dessous à gauche, sous forme d’une listedéquations qui n’est en fait qu’un raccourci de la démonstration complète dont l’arbre est donnéà droite.

    x + 40 = 3xx + 40 − x = 3x − x40 = 2x2x = 401

    2× x = 1

    2× 40

    x = 20

    Régul. ×

    Sym.=

    ...

    Régul. + x + 40 = 3x

    x + 40 − x = 3x − x

    40 = 2x

    2x = 40

    1

    2× x = 1

    2× 40

    x = 20

    On remarque qu’il s’agit d’enchâıner une suite de propositions, à partir de l’équation à résoudrejusqu’à la dernière qui permet d’obtenir la solution. Ces propositions sont équivalentes (leséquations ont les mêmes solutions). Toutefois, il n’est pas à l’ordre du jour de parler de condi-tion nécessaire et suffisante aux élèves. On se contente alors de leur faire remarquer que toutesles étapes sont réversibles ou bien de leur faire vérifier que la valeur trouvée est bien une solu-tion. Cette habitude est une sage précaution pour les cas où ils n’utiliseront que des conditionsnécessaires, par exemple lorsqu’ils auront à résoudre des équations comme

    √2x2 − 7 = x + 1.

    • Démonstrations ou algorithmes ?La question souvent posée est celle de savoir si les activités faites dans le domaine du numériquerelèvent de la démonstration.Récapitulons les activités numériques qu’on pratique au collège : vérifier des égalités, développeret réduire ou factoriser des expressions, simplifier une expression ou une fraction, ... résoudre unproblème pratique (choix d’une inconnue, mise en équation, résolution), résoudre des systèmes,calculer sur les écritures fractionnaires, calculer des pourcentages, faire des calculs trigonométri-ques, ... On pourrait dire que la plupart de ces activités relèvent plutôt de l’utilisation d’algo-rithmes, et de l’application de méthodes que de démonstrations. Mais en fait un algorithme estune démonstration simplifiée : on néglige les justifications permettant de passer d’une étape à lasuivante. Par exemple, lors d’une résolution d’équation, il n’est pas exigé (et même déconseillé)de justifier chaque transformation d’équation par les règles de l’égalité et des opérations.

    • Résolution de problèmeLe raisonnement nécessaire à la résolution d’un problème obéit aux mêmes règles que cellesutilisées dans les démonstrations. Lorsque l’élève fait des choix sur les méthodes à utiliser (pourdes comparaisons de nombres, de fractions par exemple), lorsqu’il fait des choix d’inconnues, ilfait une activité de recherche de démonstration.

    Exemple : Exercice sur les équations du premier degré à une inconnue, d’après le brevet2005 : La somme de cinq nombres entiers pairs consécutifs est égale à 120. Quels sont ces cinqnombres ?

    Commentaire : Avant d’appliquer la technique apprise en cours (résolution d’une équation dupremier degré à une inconnue), l’élève doit raisonner : il doit extraire de l’énoncé du problèmedeux propositions utilisables : ≪ on cherche cinq nombres dont la somme est égale à 120 ≫et≪ ces nombres sont des entiers pairs consécutifs ≫ ; il utilise ensuite implicitement la règle de

    19 IREM Aix-Marseille II

  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

    substitution pour passer de cinq inconnues à une seule ; il obtient alors une équation à uneinconnue qu’il sait résoudre. Puis il doit conclure, puisque la solution de l’équation n’est pas laréponse à la question posée.Remarquons que, de même que pour une démonstration en géométrie il peut y avoir plusieurschemins pour arriver à la conclusion, il y a ici plusieurs façons de choisir l’inconnue principale(le terme le plus petit ou le terme central par exemple).

    I.4 Démonstrations fausses, démonstrations partielles

    Dans cette section nous allons donner quelques pistes de réflexion sur l’élaboration d’unerecherche, d’une construction, de la formulation d’une démonstration par un collégien, un pro-fesseur, un chercheur, ...

    Rappelons que ce qui est recherché, puis construit et enfin formulé n’est pas une démonstra-tion (une preuve) au sens strict défini par les logiciens (section 1 de ce chapitre). Ce n’en estqu’un synopsis. Le respect scrupuleux de ce squelette logique est toutefois le moyen le plussûr de développer une argumentation susceptible de convaincre le professeur, le correcteur, lelecteur, le ”referee”, que l’on serait capable d’écrire la preuve complète si le temps et l’espacene nous étaient pas comptés.

    Nous avons vu qu’une démonstration pouvait se structurer en modules (c’est la raison pourlaquelle nous privilégierons la présentation en arbre). La structure à l’intérieur des blocs oul’articulation des blocs entre eux se faisant par l’utilisation de règles ; pour nos exemples nousutiliserons le modus ponens que l’on notera MP, ou la règle d’introduction du ∃ . . .

    . . .que l’on représentera par : . . .que l’on lira ou rédigera par :

    `

    A

    `

    A ⇒ BMP

    B

    Puisque l’on a A et A ⇒ B, on peutdéduire B (par la règle du Modus Ponens)

    `

    Φ(a)∃

    ∃xΦ(x)

    Puisque a vérifie la propriété φ, on peutdéduire ∃x Φ(x)

    A l’instar d’une preuve formelle, une démonstration suppose que :

    1. les points de départ (les feuilles de l’arbre) soient soit des axiomes, soit des données duproblème, soit des théorèmes du cours (Pythagore, Thales, identités remarquables, ...),soit des lemmes (par exemple des résultats obtenus dans les questions précédentes) ;

    2. l’articulation des blocs entre eux soit justifiée par une règle.

    Exemple : reprenons la démonstration de la question suivante :

    Soit C([AB]) un cercle de diamètre [AB], de centre O. Soit C([AO]) le cercle de diamètre [AO].Soit M un point sur C([AB]) distinct de A et de B. (AM) coupe C([AO]) en N . Montrer que

    IREM Aix-Marseille II 20

  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

    N est le milieu de [AM ].dont l’arbre de démonstration est :

    ...Thm Thalès

    `

    (ON)//(BM) Hyp : O milieu de [AB]

    N est le milieu de [AM ]

    où`

    est le sous-arbre suivant :

    ...Thm

    ...Thm N ∈ C(AO)

    (ON) ⊥ (AN)

    ...Thm M ∈ C(AB)

    (BM) ⊥ (AM)

    ANM alignés

    (AN) = (AM)

    (BM) ⊥ (AN)

    (ON)//(BM)

    On peut imaginer, alors une rédaction du style :≪ Nous allons montrer d’une part que (ON) ⊥ (AN) et d’autre part que (BM) ⊥ (AN) [. . .].Nous pouvons en déduire, en utilisant le théorème . . ., (ON)//(BM).Sachant que O est le milieu de [AB], en appliquant le théorème de Thalès, nous avons lerésultat. ≫

    Très souvent, l’élève est dans le cas simple où, par le biais de questions, on lui a donné unestructure de preuve ; il ne lui reste plus qu’à relier les questions entre elles pour en faire unedémonstration et ensuite la rédiger. On ne lui demande pas de citer les règles appliquées et pastoujours les théorèmes utilisés (surtout lorsqu’ils n’ont pas de nom spécifique). Mais le travailde démonstration est aussi celui où l’on ne suggère pas la structure de la démonstration par desquestions préalables. Les difficultés commencent lorsqu’il est nécessaire de trouver des résultatsintermédiaires à ajouter aux données (hypothèses du contexte) et aux théorèmes du cours pourobtenir la propriété visée.

    Démonstration complète :

    Données`

    Propr. interm. ThmR

    Propriété

    Démonstration partielle :

    Données... ?

    Prop. interm. ∅. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    Propriété

    Ce qu’on obtient, dans le meilleur des cas, ce n’est pas l’objet de gauche, mais plutôt celuide droite, où le passage des données à des résultats n’est pas justifié, où les théorèmes utilisésne sont pas énoncés, ... ; ceci est remplacé par l’utilisation de ”donc” souvent très abusifs.

    Que doit-on penser des objets représentés par l’arbre de droite, qui ne ressemblent que trèsvaguement à une démonstration ?

    Nous préférons les qualifier de démonstrations partielles pour bien marquer la différenceavec les “démonstrations fausses”.

    - par “démonstrations fausses” nous entendons les productions d’élèves n’ayant pas encoreassimilé ce qu’est une démonstration, i.e. principalement lorsque les règles de déduction n’ontpas encore été assimilées et qu’ils effectuent des raisonnements circulaires, appliquent la règle

    21 IREM Aix-Marseille II

  • La démonstration des logiciens / la démonstration dans la classe

    de généralisation alors qu’ils n’ont à leur disposition que des exemples de ”cas qui marchent”,utilisent des ”théorèmes-élèves”, ...

    - par “démonstrations partielles” nous entendons les démonstrations dont l’arbre est correct,mais dans lequel, comme ci-dessus à droite, certains blocs ne sont pas explicités (volontairementou involontairement), et les règles appliquées pour relier les modules ne sont pas données. Sil’on analyse une démonstration dans n’importe quel livre de mathématiques, à quelque niveauque l’on se place, c’est exactement ce que l’on trouve. En particulier, les règles utilisées sonttrès rarement rappelées et, principalement, certaines étapes intermédiaires sont omises, étantconsidérées comme triviales. Il n’y a rien à redire, car sinon les démonstrations seraient illisiblespar un humain ordinaire. Cependant, se pose alors la question :

    Quel niveau d’ implicite peut-on admettre dans une preuve, de la part d’un collégien, d’un lycéen,d’un étudiant ?

    Pour répondre à cette question, reprenons ce que nous avons dit en commençant cettesection : une démonstration complète a pour but d’établir la véracité de la proposition à laquelleon s’intéresse ; une démonstration partielle a pour but de convaincre son interlocuteur que l’onserait capable d’écrire une démonstration, i.e. de remplir toutes les cases vides. Tout se passecomme si le rédacteur d’une preuve était prêt, comme un élève en train de passer à l’oral uneépreuve de mathématiques, à compléter à la demande les parties manquantes. L’interrogateur secontenterait de demander à l’élève seulement quelques points pour se convaincre, le professeuraccepte des parties non justifiées pour juger la preuve correcte et accorder une bonne note, lespécialiste est convaincu que la démonstration de la conjecture de Fermat est maintenant établieaprès avoir vérifié les points qui lui semblaient sujet à caution, ...

    Cette prise en compte des démonstrations partielles permet alors aux professeurs, du collègeà l’université, de moduler les notes données aux démonstrations de leurs élèves.De plus, nous pensons que l’objet “démonstration partielle” n’est pas seulement utile dans lecadre de l’évaluation mais qu’il peut intervenir à différents stades de l’apprentissage :- Il permet de différencier la recherche d’une démonstration qui peut se voir comme une construc-tion de bas en haut de l’arbre de démonstration, de la rédaction d’une démonstration qui peutse voir comme une lecture du haut en bas d’une démonstration.- Il permet de faciliter le côté expérimental d’une recherche de preuve : ≪ je veux démontrer B,j’essaie parmi les théorèmes que je connais et qui se présentent sous la forme A ⇒ B, ceux pourlesquels mes données me permettent directement d’avoir A, ou bien je cherche si je ne pourraispas obtenir A à partir des données et théorèmes que je possède ≫.- Il permet d’inciter l’élève à faire lui-même ses expérimentations. L’élève a intêret à prendreconscience que la démonstration faite en cours par un professeur est une activité (principalementde lecture de l’arbre de haut en bas), très différente de l’activité “recherche d’une démonstration”(construction de l’arbre de bas en haut). Se contenter d’essayer de refaire ce qu’à fait le profes-seur est certes utile, mais pas suffisant.- Il permet la valorisation par le professeur d’une telle recherche même si elle n’a pas complètementabouti, même si elle ne pouvait pas aboutir !

    IREM Aix-Marseille II 22

  • Chapitre II

    Activités

    II.1 Motiver la démonstration

    En géométrie, il est important de conduire le plus tôt possible une réflexion sur le statutdes différentes propriétés qui apparaissent sur les figures : certaines sont le résultat d’une actiondélibérée et de l’utilisation de l’instrument de géométrie ad hoc (ce sont celles qui font partie des“données”) ; d’autres sont des conséquences des premières, conséquences qui dépassent largementle résultat direct des actions effectuées.

    Motiver la démonstration consiste dans ce domaine à attirer l’attention des élèves sur cettequestion : ≪ Comment se fait-il qu’apparaisse telle propriété remarquable sur la figure sansqu’on l’ait fait exprès ? ≫, ce que nous appellerons “la question du pourquoi”.

    Pour cela, il faut d’abord que les élèves distinguent cette propriété des propriétés spécifiquesà la figure qu’ils ont faite et qu’ils découvrent son caractère de généralité. Ceci a peu de chancede se produire s’ils ne disposent pas de plusieurs figures différentes réalisées à partir du mêmeénoncé. Dans ce but, on peut utiliser les productions de l’ensemble de la classe à conditionde pouvoir les rendre visibles à chacun, on peut aussi travailler sur un logiciel de géométriedynamique qui permet justement d’obtenir instantanément de multiples exemplaires de la figure.

    D’autre part, une fois cette propriété perçue, il faut qu’elle reste distinguée de celles qui fontpartie de la construction à partir des données. Ce n’est pas si évident dans la pratique, dans lamesure où, sur la figure terminée, toutes les propriétés se retrouvent au même niveau lorsquel’on en reste à la perception. C’est ici que le codage des données intervient pour rendre visiblel’historique de la figure (cf nos activités : Une figure, plusieurs histoires (1) et (2) (II.1 et II.1).

    Une fois que la question du “pourquoi” est ainsi bien mise en scène, le besoin d’y répondre estressenti très fortement dans la classe : les élèves éprouvent un vrai besoin d’explication. On peutsatisfaire ce besoin d’explication ou au contraire le frustrer (cf notre activité : Le Carré malgrélui II.1). Mais sa rencontre répétée, dès les petites classes (cycle III du Primaire, Sixième), nousparâıt constituer une étape indispensable pour motiver l’exercice de la démonstration.

    La même analyse peut être faite concernant la démonstration en numérique. Nous noussommes placés du point de vue géométrique de façon à avoir des exemples plus parlants. Ontrouvera une activité dans le domaine numérique sur la création de conjectures (Conjecturer ennumérique II.3).

    Il est peut-être plus difficile de motiver les élèves au “pourquoi ça marche” à une époque oùparents et enfants, nous utilisons tous les jours des appareils de plus en plus sophistiqués que

    23

  • Motiver la démonstration

    l’on sait faire marcher sans qu’on en comprenne le fonctionnement (un enfant excelle dans lamanipulation de la souris d’un ordinateur).

    La motivation de la démonstration est donc un exercice difficile ; par exemple, les élèvesn’auront aucune difficulté à appliquer l’algorithme d’Euclide pour calculer le pgcd de deuxnombres sans comprendre “pourquoi ça marche”. Si cette explication (démonstration) leur estdonnée plus tard, ils diront qu’ils n’en ont rien à faire car cela fait longtemps qu’ils l’utilisent !On rencontre ce type de réaction depuis l’entrée en sixième concernant une grande quantité deconnaissances fréquentées à l’école primaire sans démonstration, jusqu’à l’arrivée à l’universitéoù les étudiants renaclent à démontrer des résultats sur les limites de suites qu’ils ont déjàutilisés maintes fois au lycée par exemple.

    Dans les activités proposées, nous nous sommes attachés à faire émerger des situationssurprenantes où il demeure un doute soit sur la véracité de ce que l’on observe, soit sur les raisonsqui l’ont provoqué ; ces situations font apparâıtre des invariants en situation de variabilité etdemandent de les comprendre (II.1, II.1).

    Une autre direction pour motiver la démonstation est de proposer une pratique de “typeexpérimental”. On peut déjà remplacer certaines questions du type : “Démontrer que ... ”,par des questions du type : “Est-ce que ... ?” avec des réponses alternativement positiveset négatives (cf. notre analyse du sujet du brevet 2007 en annexe II.3 et II.3). Pour allerplus loin, on peut aussi étudier un phénomème graphique ou numérique comme le ferait uneautre science expérimentale, identifier la causalité à l’œuvre, produire une conjecture, faired’autres expériences pour la conforter ou l’invalider. Par rapport aux autres sciences qui n’ontque l’expérience pour valider leurs conjectures, en mathématiques la démonstration viendrade surcrôıt. Mais sans la phase expérimentale, les élèves risquent de produire des pseudo-démonstrations correspondant d’avantage à un exercice scolaire ou à une demande du professeurqu’à une compréhension personnelle des mécanismes en jeu. (cf nos activités : le carré malgrélui II.1 ; Le Cerf-volant caché II.1, Les aventuriers de la règle perdue(1) et (2) (II.3 et II.3)

    IREM Aix-Marseille II 24

  • Le codage pour restituer l’historique de la figure 5ème - Fiche élève

    Une figure, plusieurs histoires

    Fiche-Elève no1

    Voici un problème :

    Dans la figure ci-dessous, le cercle donné a pour diamètre le segment [AB] ; la symétrie decentre I transforme A en A’ et B en B’. On a perdu le centre des cercles, le centre I de lasymétrie, le point A’ et la figure symétrique du cercle donné. Construis-les et code les actionsque tu as faites.

    A

    B

    ×B’

    Voici deux figures qui montrent deux solutions différentes :

    Figure n◦1 : Figure n◦2 :

    ×IA

    B

    A’

    ×B’×O’

    /

    /

    ////

    //////

    ×IA

    B

    0

    ×B’×O’

    /

    /

    ////

    //////

    Ces figures sont codées. Le codage montre comment on a retrouvé les éléments perdus duproblème et comment on est arrivé à construire le cercle symétrique du cercle donné.

    Voici ce que tu dois faire :

    1. Programmes de construction :

    Pour chaque figure, raconte la construction du cercle symétrique du cercle donné en combi-nant des phrases choisies parmi les phrases données page suivante. Présente ta réponse commeun programme de construction en allant à la ligne pour chaque nouvelle action.

    25 IREM Aix-Marseille II

  • 5ème - Fiche élève Le codage pour restituer l’historique de la figure

    Une figure, plusieurs histoires

    Fiche-Elève n◦2

    Voici la liste de phrases :

    - Je place le point O (centre du cercle donné) au milieu du segment [AB].

    - Je place le point O’ (centre du cercle image) au milieu du segment [A’B’].

    - Je place le point I (centre de la symétrie) au milieu du segment [BB’].

    - Je construis le point O’ symétrique de O par rapport à I.

    - Je construis le point A’ symétrique de A par rapport à I.

    - Je trace le cercle de centre O’ passant par B’.

    Programme de la figure n◦1 :

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    Programme de la figure n◦2 :

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    2. Justification des deux constructions :

    Pour chacune des constructions précédentes, choisis parmi les propriétés de la symétrie centralerappelées ci-dessous celle qui permet de la justifier. Recopie-la ci-dessous.

    - Théorème : Dans une symétrie centrale, le centre du cercle d’arrivée est le symétrique ducentre du cercle de départ.

    - Théorème : La symétrie centrale conserve les milieux.

    La construction de la figure n◦1 est justifiée par la propriété :

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    La construction de la figure n◦2 est justifiée par la propriété :

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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  • Le codage pour restituer l’historique de la figure 5ème - Dossier professeur

    Une figure, plusieurs histoires

    Intention des auteurs

    Une figure papier une fois terminée, son histoire disparâıt : toutes ses propriétés se trouventramenées au même niveau, celui de propriétés qu’on perçoit. La figure est là, devant nous,comme si elle existait de toute éternité ; le temps est aboli et, avec lui, toute idée de cause et deconséquence. Dans ces conditions, il est difficile pour un élève de comprendre ce que l’énoncéveut dire lorsqu’il lui demande de démontrer certaines d’entre elles.

    En réalité, la figure à analyser est inséparable de son histoire. Un logiciel de géométrie dyna-mique, grâce à la fonction dénommée ”Historique” justement, permet à tout moment de revoiren accéléré, de clic en clic, toutes les étapes de la création d’une figure présente à l’écran. Pourles figures papier, c’est le codage qui constitue le moyen le plus efficace de restituer cet historiqueaux élèves et d’ouvrir tous les questionnements qui motivent la démonstration.

    L’activité proposée met en scène le rôle du codage pour retrouver l’histoire d’une constructionen proposant deux codages différents pour une même réalisation finale (il s’agit de la construc-tion de l’image d’un cercle par symétrie centrale). Les élèves sont amenés ensuite à identifier lapropriété principale de la symétrie qui est à l’oeuvre dans chaque construction et à constaterque ce n’est pas la même. Cette étape constitue une initiation à la démonstration dans la mesureoù elle met en évidence que certaines connaissances sont utiles pour justifier les propriétés d’unefigure que l’on construit ou qui nous est donnée.

    D’autre part, dans cette activité, les propriétés de la symétrie centrale ne sont pas seulement desconstats, des descriptions ; elles servent à résoudre un problème de géométrie. Ceci constitue unexemple de problématisation des connaissances géométriques que le lecteur pourra multiplier.Les lignes suivantes du Document d’application du Cycle III du Primaire évoquent cet enjeu :≪ Les activités du domaine géométrique ne visent pas des connaissances formelles (définitions,propriétés), mais des connaissances fonctionnelles, utiles pour résoudre des problèmes ≫. Cesobjectifs restent pertinents au collège.

    Déroulement possible

    Après avoir distribué les fiches aux élèves, l’enseignant attire leur attention sur le fait qu’ilsn’ont pas à résoudre eux-mêmes le problème présenté en haut de la première fiche (il y a fortà parier que malgré cette mise en garde, certains s’y engageront tout de même ...). En effet, leproblème est déjà résolu sur la fiche, et même deux fois : on est arrivé à la solution par deuxdémarches différentes. Leur première tache est un travail d’enquête à propos de ces solutions :reconstituer dans quel ordre les actions ont été faites, en utilisant comme indices le codage desfigures.

    Les élèves écrivent le programme de construction de chaque figure. Ce travail peut être donnéindividuellement ou par équipe de deux. Dans ce dernier cas, les élèves se mettront d’accord

    27 IREM Aix-Marseille II

  • 5ème - Dossier professeur Le codage pour restituer l’historique de la figure

    sur une chronologie avant d’écrire, chacun, le programme. Aux élèves en difficulté ou qu’on voitcommettre des erreurs de chronologie, on peut suggérer d’exécuter eux-mêmes leur programmeau fur et à mesure, au brouillon ou sur leur cahier. On peut aussi attirer leur attention sur l’in-dice supplémentaire que constitue le nombre de petites barres du codage d’égalité de longueurs.

    Une mise en commun permet de s’assurer que tous sont arrivés à un programme comportantles phrases pertinentes dans un ordre pertinent. Pour la seconde figure, il est indifférent decommencer par le placement de O ou par celui de I.

    Dans la seconde partie de l’activité, pour la justification de chaque construction, nous avonsproposé uniquement les théorèmes qui distinguent les deux solutions.

    Pour conclure, l’enseignant pourra demander : ≪ Quelles sont les propriétés utilisées qui justi-fient aussi bien l’une que l’autre des deux constructions ? ≫ ; ≪ Quelle est la propriété qui n’estutilisée que pour la première construction ; celle qui n’est utilisée que pour la seconde ? ≫.

    Enfin, il insistera sur le fait que le codage a permis de distinguer deux histoires différentespour une même figure, deux histoires auxquelles correspondent des idées différentes et desagencements différents de ces idées. Il faudra s’en souvenir pour d’autres exercices où ce n’estplus “ construire ” qui sera demandé, mais “ démontrer ”.

    Compte-rendu de l’activité

    L’activité présentée ici a été conduite à partir de fiches élèves un peu différentes : dans laphase de justification, figuraient davantage de propriétés, notamment la définition ponctuellede la symétrie centrale.

    La séance a lieu en septembre lors d’un cours d’une heure. La classe comporte 22 élèves etle collège est classé en ZEP. Dans les dialogues qui vont suivre, le professeur sera désigné par Pet les élèves par E.

    Le professeur distribue la fiche élève et la projette en simultané. Il précise que ce travail nesera pas noté et ne sera pas non plus au prochain contrôle. Les élèves sortent leurs affaires ets’installent.Le professeur présente le travail comme un exercice sur la symétrie centrale. Un élève lit l’énoncédu problème.P : ≪ Il y a deux solutions d’élèves, on va les lire. ≫

    Un élève lit donc les solutions et le professeur explique qu’il va falloir utiliser les phrases de lapremière page et les remettre en ordre pour reconstituer le programme de construction de lapremière figure, puis celui de la deuxième figure. ≪ C’est comme un puzzle. ≫

    Quelques élèves ne comprennent pas la consigne, le professeur explique une seconde fois le travailattendu.Silence dans la classe, les élèves commencent leur recherche. Un élève arrive en retard et bénéficied’une ré-explication personnelle.

    Au bout de 5 minutes le professeur reprend la parole afin d’aider les élèves ayant du mal à

    IREM Aix-Marseille II 28

  • Le codage pour restituer l’historique de la figure 5ème - Dossier professeur

    démarrer.P : ≪ On va choisir la première phrase ensemble, qui peut me dire la première chose à faire ? ≫

    E : ≪ On construit les pointillés pour mettre le point I. ≫

    P : ≪ Ca correspond donc à la phrase n◦3. Maintenant vous cherchez les suivantes. ≫

    Un second élève arrive en retard et bénéficie également d’une ré-explication personnelle.Un élève demande la parole : ≪ Monsieur j’ai pas compris. Qu’est-ce qu’on fait après ? ≫

    P : ≪ Qu’est-ce que tu placerais sur le dessin après le point I ? ≫

    E : ≪ Le point A′ ... ≫Le professeur aide alors l’élève qui trouve la deuxième réponse.P : ≪ Maintenant tu passes à la suite. ≫

    Le professeur passe dans les rangs pour répondre à des questions de manière personnalisée.

    Au bout d’une dizaine de minutes, certains élèves commencent à bavarder, immédiatementrepris par le professeur.Un autre élève, complètement désintéressé du travail à faire, est invité par le professeur à réfléchirsur un autre travail.

    Le professeur laisse encore cinq minutes de travail en autonomie puis corrige.P : ≪ Tout le monde regarde par là, on corrige ensemble. Qui me donne la phrase suivante ? ≫

    E : ≪ On peut construire A′. ≫

    Le professeur valide la réponse, l’écrit au tableau et attend la suite.E : ≪ On place O′ au milieu de [A′B′]. ≫

    Le professeur écrit cette réponse et la fin de la première construction au tableau.Ensuite, les élèves doivent chercher le programme de construction de la deuxième figure.

    Le professeur laisse cinq minutes, passe dans les rangs pour aider les élèves en difficulté etencourage ceux qui ont abandonné à reprendre leur recherche. Les élèves sont dans l’ensemblecalmes et studieux. Le professeur corrige alors la seconde figure.P : ≪ Deuxième figure, je la corrige, il faut que j’avance. Alors qu’est-ce que je fais ? ≫

    Un élève donne les réponses et le professeur écrit les quatre étapes au tableau.

    9h32 : Un élève lit la consigne de la deuxième partie.P : ≪ Dans l’énoncé des deux théorèmes, c’est-à-dire des deux propriétés, il n’y a pas un trucqui cloche ? ≫

    P : ≪ La conservation des milieux n’est pas écrite dans le cours. On va donc l’admettre pourcette activité. ≫

    P : ≪ Essayez de voir pour chaque figure s’il y a une propriété utilisée pour chaque étape. ≫

    Le professeur donne alors un exemple : pour la figure 1, pour la première étape, on utilise lapropriété 1.E : ≪ Je n’ai pas compris. ≫

    Le professeur fait une ré-explication plus détaillée en ajoutant que certaines étapes n’auront pasde propriété associée.

    Le professeur laisse quelques minutes de réflexion aux élèves, mais devant l’inactivité générale,il reprend la parole : ≪ On va faire la première figure ensemble parce que j’ai l’impression quecertains n’ont pas compris ce que je demande. ≫

    29 IREM Aix-Marseille II

  • 5ème - Dossier professeur Le codage pour restituer l’historique de la figure

    La correction est donc écrite au tableau : pour l’étape 2, pas de propriété ; pour l’étape 3, onutilise la propriété 3 ; pour l’étape 4, pas de propriété.P : ≪ Tout le monde a suivi ? ≫

    Des élèves répondent : ≪ Non. ≫

    Le professeur reformule la correction et répond aux questions des élèves. Mais un certain nombred’élèves ne semblent toujours pas convaincus. Le professeur ré-explique donc une nouvelle fois.

    Le cours devant se terminer bientôt, le professeur corrige la justification pour la deuxièmefigure.E : ≪ Pour l’étape 1, propriété 1 comme pour la figure 1. ≫

    P : ≪ Si vous deviez inventer une propriété qui n’est pas dans la liste pour l’étape 2 ? ≫

    E : ≪ Le milieu du diamètre sera le centre du cercle. ≫

    Le professeur corrige, avec l’aide des élèves, les deux dernières étapes.Le professeur fait un point sur le travail à faire pour la séance suivante.La cloche sonne, fin du cours.

    Bilan, discussion de certaines modalités, alternatives, suites

    Avec la première version de la fiche élèves beaucoup d’élèves ont cherché à justifier le pro-gramme de construction par une propriété pour chaque étape, ce qui n’était pas possible. Doncnous avions à choisir entre proposer une propriété pour chaque étape ou ne conserver que cellequi donne l’idée générale de la construction. Pour ne pas ajouter une sophistification inutile quiempêche les élèves d’avoir une vision globale des deux démarches nous avons choisi la deuxièmealternative.

    IREM Aix-Marseille II 30

  • Identifier la causalité à l’œuvre dans une configuration 6ème - Fiche élève

    Le carré malgré lui

    Voici le programme d’une construction à partir du triangle ABC de la figure n◦1 ci-dessous :1. Tracer la perpendiculaire à (BC) passant par A ;

    2. Placer D le point d’intersection de cette droite avec (BC) ;

    3. Tracer la perpendiculaire à (AB) passant par A ;

    4. Placer E le point d’intersection de cette droite avec (BC) ;

    5. Tracer la perpendiculaire à (AE) passant par E ;

    6. Placer F le point d’intersection de cette droite avec (AD) ;

    7. Tracer le segment [BF ].

    Réaliser le film de cette construction avec une image par étape, en commençant à l’image n◦2 ;coder toutes les actions réalisées :

    A

    A A

    AA A

    A

    AAA

    BBB

    BBB

    BBB

    C C

    C C C

    C

    CCC

    Image n◦1 Image n◦2 Image n◦3

    Image n◦4 Image n◦5 Image n◦6

    Image n◦7 Image n◦8 Image n◦9

    31 IREM Aix-Marseille II

  • 6ème - Fiche élève Identifier la causalité à l’œuvre dans une configuration

    Le carré malgré lui (suite)

    A

    A A

    AA A

    A

    AAA

    BBB

    BBB

    BBB

    CCC

    CCC

    CCC

    DDD

    DDD

    D

    EEE

    EE

    FFF

    Image n◦1 Image n◦2 Image n◦3

    Image n◦4 Image n◦5 Image n◦6

    Image n◦7 Image n◦8 Image n◦9

    Etude du quadrilatère AEFB :

    Est-ce que tous les côtés ont la même longueur ? ...............................................................................................................................................................................................................Est-ce qu’on l’a fait exprès ? ..............................................................................................................................................................................................................................................Est-ce que tous les angles sont droits ? ..............................................................................................................................................................................................................................Est-ce qu’on l’a fait exprès ? ...............................................................................................................................................................................................................................................Quelle est la nature du quadrilatère AEFB ? .....................................................................................................................................................................................................................

    Aura-t-on toujours cette sorte de quadrilatère en partant d’un triangle ABC quelconque ?

    IREM Aix-Marseille II 32

  • Identifier la causalité à l’œuvre dans une configuration 6ème - Dossier professeur

    Le carré malgré lui

    Intention des auteurs

    Dans l’activité ”Une figure, plusieurs histoires”, les élèves ont été sensibilisés au codagecomme moyen de lire l’historique de la construction sur une figure. Dans la présente activité,c’est un autre volet de l’intérêt du codage qui est présenté : il permet de visualiser les donnéesà partir desquelles une démonstration pourra être recherchée. C’est en ce sens que le carré decette activité est ”un carré malgré lui” : les longueurs des côtés n’ont pas été mesurées à la règlegraduée ni reportées au compas et seuls deux des quatre angles ont été codés droits. Commentse fait-il qu’on obtienne un carré ”alors qu’on ne l’a pas fait exprès” ? Ce débat pose la questionde la causalité à l’œuvre dans la configuration obtenue. Et cette question trouve un écho chezles élèves car le dispositif lui donne une grande visibilité.En fait, les élèves devront découvrir que sans la présence d’un angle de 45◦ dans le triangle initial,le quadrilatère obtenu n’est pas un carré mais un trapèze rectangle. Ils ne pourront expliquerpourquoi. Ceci constitue une forme de frustration. Néanmoins, ils auront pu explorer la part devariabilité de la figure et découvrir la cause du phénomène observé. Ces étapes constituent unemotivation naturelle à l’exercice de la démonstration.

    Déroulement possible

    Les deux fiches élèves proposées ci-dessus correspondent à une conduite de l’activité où lesélèves agissent en géométrie classique avec les instruments. Comme on le verra dans le compte-rendu, cette option peut amener des difficultés techniques avec certains élèves ou dans certainesclasses ; l’aspect ”introduction à la démonstration” devient alors difficile à mettre en avant parmanque de temps ou perte de motivation. Une autre possibilité consiste à travailler en géométriedynamique.

    La première fiche élève propose la réalisation d’un programme de construction, sous laforme d’un ”film”. Dans ce procédé, la figure apparâıt image par image : à chaque nouvelleinstruction du programme, un nouvel élément s’ajoute à la figure. L’historique de la figure restedonc visible contrairement à ce qui se passe dans une construction classique. De plus, les élèvesdoivent coder toutes les actions qu’ils ont effectuées (il s’agit uniquement d’angles droits etd’intersection de droites) pour en avoir une conscience plus nette : il faut insister et vérifierqu’ils le font effectivement.

    A partir de là, un questionnement est possible sur le résultat obtenu à la dernière image. Cerésultat est en effet surprenant dans la mesure où un carré apparâıt sans qu’il ait été construitvolontairement. Pour les élèves qui ne reconnaissent pas le carré ”posé sur la pointe”, on rappellela définition du carré et les moyens de vérification aux instruments.

    C’est le moment de distribuer la deuxième fiche élève (il est préconisé de garder au moinsvingt minutes pour la suite). Le corrigé permet tout d’abord de récupérer les élèves en difficulté.On demande à tous de répondre aux quatre premières questions, ce qui relance l’ensemble dela classe sur la recherche de la causalité à l’œuvre dans la configuration obtenue : ≪ Comment

    33 IREM Aix-Marseille II

  • 6ème - Dossier professeur Identifier la causalité à l’œuvre dans une configuration

    se fait-il qu’on obtienne un carré alors qu’on ne l’a pas fait exprès ? ≫

    Malgré leur désir d’explication, les élèves sont démunis pour répondre. La dernière questionde la fiche oriente la recherche en posant la question d’une façon qui permette l’action : ”Est-cequ’on aura toujours cette sorte de quadrilatère en partant d’un triangle ABC quelconque ?”.On invite les élèves à expérimenter : ils peuvent réaliser plusieurs figures.

    Cette étape de l’activité requiert beaucoup de temps dans la version ”papier”. Par contre, lagéométrie dynamique permet de modifier le triangle initial sans avoir à refaire complètement lafigure (voir un tel déroulement dans le deuxième compte-rendu ci-dessous). Le premier résultatest que lorsqu’on change la forme du triangle ABC, le quadrilatère AEFB est en fait rarementun carré ! Il faudra une longue discussion pour que la cause manquante soit trouvée : le qua-drilatère AEFB est un carré seulement si l’angle ÂBE mesure 45◦ (ou ”la moitié d’un angledroit” niveau fin de cycle III) ; sinon, c’est un simple trapèze rectangle.

    Avec cette découverte, on est au terme de l’activité pour une classe de sixième. On dit aux

    A

    B CDE

    F

    élèves qu’il resterait à expliquer en détail comment la présence d’un angle de 45◦ dans le trianglede départ transforme le trapèze en carré : ce travail s’appelle ”faire une démonstration” et ilfaudra attendre la classe de cinquième pour pouvoir le faire.

    Compte-rendu d’observation en classe

    • Premier compte-rendu (géométrie classique).

    L’observation a eu lieu dans une classe de 6ème du collège ZEP Vincent Scotto. L’activitén’a pas pu arriver à son terme et notamment au point crucial : la nature du quadrilatère.

    Les élèves ont eu beaucoup de mal avec le programme de construction, tracer une perpen-diculaire passant par un point n’était pas une technique acquise dans la classe. Ce point detechnique a retenu toute leur attention jusqu’à la fin de l’heure ; seulement une partie des élèvessont arrivés au bout du programme de construction, d’autant plus qu’il faut tout retracer depuisle début à chaque nouvelle image. Le professeur a abordé sur le gong de la sonnerie, la questionde la nature du quadrilatère. Mais les élèves absorbés par la construction n’ont pu s’en détacheret envisager d’autres réalisations avec une configuration de départ différente.

    IREM Aix-Marseille II 34

  • Identifier la causalité à l’œuvre dans une configuration 6ème - Dossier professeur

    • Deuxième compte-rendu (géométrie dynamique).

    La classe comporte une vingtaine d’élèves du collège ZEP Pont de Vivaux.L’activité est basée sur un logiciel de géométrie dynamique (GéoGébra) ; aussi le professeur avaitau préalable fait une séance pratique sur ordinateurs pour apprendre aux élèves à manipuler lelogiciel.

    Préparatifs à la séance :Le professeur (que l’on nommera P.) dispose dans sa classe d’un ”chariot mobile” contenantdouze ordinateurs ; il avait pris soin la veille de vérifier le bon état de marche des appareils (enparticulier s’ils étaient bien chargés ...).Avant le cours, il a envoyé le fichier Géogébra de la figure de départ (celle avec l’angle de 45◦)sur le compte de chaque élève via le réseau intranet du collège ; il a photocopié la fiche-élève(contenant en particulier les questions posées aux élèves) afin de la distribuer et il a installéle vidéo-projecteur raccordé à son portable, afin d’une part de donner quelques explicationssupplémentaires sur le fonctionnement de Géogébra à ce