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Economie nationale
Comparaison chômage US - CH
Prof. J.C. Lambelet Assistant S. Frochaux Auteurs : Wissam Boustany Anton Rachinski Daniel v. Wittich
Table des matières
Introduction..........................................................................................................................1 PARTIE I .............................................................................................................................2
Pourquoi mesure-t-on le taux de chômage ? ....................................................................2 La mesure du taux de chômage en Suisse........................................................................3
Chômeurs inscrits.........................................................................................................5 Personnes actives .........................................................................................................5 Personnes non actives ..................................................................................................6
Principales limites de la mesure du taux de chômage selon SECO.................................8 La mesure du taux de chômage selon l’OFS .................................................................10 La mesure du taux de chômage aux Etats-Unis .............................................................12
L’enquête sur la population actuelle (Current Population Survey) aux Etats-Unis ...12 La définition des personnes sans emploi ...................................................................13 La définition des personnes actives occupées selon le BLS......................................13 La définition des personnes non actives ....................................................................13
Principales limites de la mesure du taux de chômage selon l’ESPA et BLS.................14 Avis personnel des auteurs .............................................................................................15
PARTIE II..........................................................................................................................16 Proposition de facteurs explicatifs de la différence des taux de chômage entre la Suisse et les Etats-Unis entre 1949 et 2002 ..............................................................................16
Comment se fait-il que le taux de chômage suisse soit proche de zéro jusqu'en 1977 tandis qu'aux Etats-Unis, il ne descend pas en dessous des 2,9%? ............................16 Impact de l’évolution de la population active sur le chômage à partir de 1975 ........18 Facteurs d’influence probables sur le taux de chômage après 1990..........................20 Assurance chômage jusqu’en 1995............................................................................20 Assurance chômage après 1995 .................................................................................22 L’obsolescence du système éducatif comme facteur probable de l’augmentation du chômage .....................................................................................................................25
Le rôle du salaire minimum dans la différence entre les taux de chômage entre 1949 et 2002................................................................................................................................28
Le salaire minimum ...................................................................................................28 Conclusion .........................................................................................................................30 Annexe ...............................................................................................................................32 Bibliographie......................................................................................................................34
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 1/32 Juin 2003
Comparaison du chômage Etats-Unis-Suisse
0246
81012
1949
1953
1957
1961
1965
1969
1973
1977
1981
1985
1989
1993
1997
2001
Année
Taux
de
chôm
age
Chômage US
Chômage Suisse
Introduction
La courbe du taux de chômage aux Etats-Unis a une allure tout à fait différente de celle
de la Suisse. Il semble qu'en Suisse, le phénomène du chômage était quasi inexistant
entre les années 1949 et 1977 tandis que, pendant cette même période, le taux aux Etats-
Unis fluctuait autour de 5%. C'est à partir des années 77 jusqu'à 1990 que le taux de
chômage suisses commença à fluctuer entre 0,3 et 1 pourcent. A partir de 1991, nous
observons une croissance drastique du taux de chômage qui atteint son maximum de
5,2% en 1997. Parallèlement, on peut constater que le chômage aux Etats-Unis dépasse ,
pendant toute la période étudiée, en point de pourcentage celui de la Suisse, et ce,
jusqu'en 1997, où ce dernier le rejoint.
Au vu de ces constats, plusieurs questions se posent:
• Comment se fait-il que le taux de chômage suisse soit proche de zéro
jusqu'en 1977 tandis qu'aux Etats-Unis, il ne descend pas en dessous des
2,9%?
• Comment explique -t-on les différences entre le niveau de chômage en
Suisse et aux Etats-Unis après 1977?
• Quelles seraient les raisons de la croissance du chômage suisse après
1990?
1
1 http://www.snl.ch/dhs/externe/protect/textes/F13924.html et http://data.bls.gov
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 2/32 Juin 2003
Dans la première partie, nous décrirons la nécessité de mesurer le taux de chômage et
nous analyserons les différentes façons de mesurer ce taux. Ensuite, nous nous
efforcerons dans la deuxième partie de tenter de répondre aux questions précédemment
mentionnées à l’appui d'hypothèses qui nous semblent pertinentes.
PARTIE I
Pourquoi mesure-t-on le taux de chômage ?
Selon (Mankiw 2000), le chômage est un problème qui touche les gens d’une manière
directe et sévère. Pour la plupart des personnes, la perte du travail entraîne une
dégradation du niveau de vie et une détresse psychologique. Il n’est pas étonnant que le
chômage fait fréquemment partie des débats politiques et que les politiciens affirment
souvent que leur politique aiderait à créer des places de travail.
Les économistes étudient le chômage pour identifier ses causes et d’améliorer les
politiques qui pourraient affecter le chômage. Certaines mesures, comme par exemple le
programme d’emploi temporaire, sont des aides proposés aux personnes qui cherchent un
travail. D’autres, par exemple les assurances de chômage, protègent les chômeurs contre
la déroute financière. Il y a également des politiques qui, même si non voulu, amplifient
le chômage. Ainsi, la loi garantissant des salaires minimum très élevés est réputée avoir
cet effet.
De plus, le taux de chômage est un indicateur économique de performance. Afin d’être
performant, il est nécessaire d’utiliser les ressources économiques d’une manière
efficace. Puisque l’être humain est la principale ressource d’un système économique, les
politiciens ont intérêt à réduire le nombre de chômeurs à un seuil minimal.
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La mesure du taux de chômage en Suisse
Deux statistiques traitent du phénomène du chômage en Suisse: la statistique des
chômeurs inscrits du secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) et la statistique des
personnes sans emploi (chômeurs selon les normes internationales) selon l'enquête suisse
sur la population active (ESPA), réalisée par l'Office Fédéral de la Statistique (OFS). Le
SECO publie également la statistique des demandeurs d'emploi inscrits, qui regroupe les
chômeurs au sens strict et les demandeurs d'emploi inscrits qui ne sont pas au chômage.
Ces derniers comprennent les personnes inscrites comme demandeurs d'emploi dans un
Office régional de placement (ORP), mais qui ont actuellement un emploi régulier ou
sont enga gées dans un programme d'occupation, de reconversion ou de perfectionnement
ainsi que les personnes en gain intermédiaire2.
Selon le SECO, en moyenne, 149'609 personnes étaient inscrites auprès d'un ORP
comme demandeurs d'emploi en 2002, dont 100’504 en tant que chômeurs. Dans le
même temps, l’ESPA recensait 120’004 personnes sans emploi qui en cherchaient un.
Bien que ces statistiques ne soient pas entièrement compatibles, les définitions propres à
chacune permettent d'expliquer la plupart des incompatib ilités. La statistique du SECO
n'enregistre que les demandeurs d'emplois et les chômeurs inscrits, alors que la statistique
de l'OFS tient compte de toutes les personnes sans emploi qui en cherchent un. Donc,
l’OFS inclut également les personnes qui, pour une raison ou une autre, ne se sont pas
inscrit au chômage alors qu’ils n’ont pas de travail. Le graphique 1 ci-dessous clarifie
cette différence de mesure.
2 Les définitions du programme d’occupation, de reconversion, de perfectionnement ainsi que du gain intermédiaire (selon SECO) sont données dans l’annexe
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________________________________________________________________________
Graphique 1 Les personnes sans emploi selon l’ESPA, les demandeurs d’e mploi et
les chômeurs selon le SECO
(A) Chômeurs inscrits qui, selon les normes internationales, font partie des actifs occupés
(B) Chômeurs inscrits qui sont également sans emploi selon les normes internationales3
(C) Personnes sans emploi qui en cherchent un, mais qui ne sont pas inscrites dans un
office du travail.
________________________________________________________________________
3 Il est important de noter que le nombre de personnes inscrites selon le SECO n’est pas forcement égal à celui mesuré par l’ESPA (voir le cadre B sur le graphique 1). Ainsi, en 2002, l’ESPA indique que le nombre moyen des « sans emploi inscrits » s’élève à 59’453 alors que le nombre moyen de chômeurs inscrits pendant cette même année est de 100'504 selon le SECO. Ces différences viennent du fait que le chiffre d’ESPA sort d’une estimation. Cette estimation est basée sur un échantillon de la population résidente permanente.
Chômeurs complets Cherchent un travail à plein
temps
Chômeurs partiels Cherchent un travail à
temps partiel
Demandeurs d’emploi inscrits non chômeur
Ne sont pas immédiatement disponibles pour placement ou ont un emploi puisqu’ils sont classés dans un des programmes suivants : - programme d’emploi
temporaire - programme de
reconversion - programme en gain
intermédiaire / perfectionnement
Statistique du SECO
Statistique de l’OFS
Sans emploi
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Mais regardons d’abord la formule qu’utilise le SECO afin de déterminer le taux de
chômage :
100 actives Personnesinscrits Chômeurs
chômage deTaux ×=
Chômeurs inscrits
Les chômeurs inscrits, représentant la demande de travail, se divisent en deux groupes, à
savoir les chômeurs complets et les chômeurs partiels. Les premiers cherchent un travail
à plein temps tandis que les derniers sont à la recherche d’un travail à temps partiel. La
définition officielle des chômeurs inscrits selon le SECO4 est : « Font partie des
chômeurs inscrits les personnes annoncées auprès des offices régionaux de placement,
qui n’ont pas d’emploi et qui sont immédiatement disponible en vue d’un placement,
indifféremment du fait qu’elles touchent ou non une indemnité de chômage ». De plus, il
doit s’agir des personnes ayant 15 ans ou plus, qui n’avaient pas de travail au cours de la
semaine de référence mais qui ont cherché activement un emploi au cours des quatre
semaines précédentes.
Personnes actives
Le nombre de personnes actives (effectif total de 3'621'716 personnes) qui constituent
l’offre de travail se base sur le recensement fédéral de la population résidente de 1990. Le
graphique 2 à la page 4 permet de reconstituer et de définir les deux principales
composantes du dénominateur de la formule du taux de chômage.
1. Personnes actives occupées selon le concept intérieur D’après le graphique 2, le nombre de personnes actives occupées selon le concept
intérieur ne comprend pas uniquement les personnes résidant (comme c’est le cas de
l’ESPA) en Suisse et travaillant à l’étranger ou en Suisse mais aussi les pe rsonnes
résidant à l’étranger mais qui travaillent en Suisse. Font partie de ces dernie rs notamment
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 6/32 Juin 2003
les frontaliers, le personnel des ambassades ainsi que les employés de la marine suisse.
Selon la définition du SECO, il s’agit des personnes :
• qui ont au moins 15 ans au cours de la semaine de référence
• qui ont travaillé au moins une heure contre rémunération
• ou qui, bien que temporairement absentes de leur travail (absence pour cause de
maladie, de vacances, de congé maternité, de service militaire, etc.) ont un emploi
en tant que salarié ou indépendant
• ou qui ont collaboré dans une entreprise familiale sans toucher de rémunération
2. Personnes sans emploi Les personnes sans emploi, la deuxième composante du dénominateur, constituent un
sous -ensemble de la population résidante. D’après le SECO, la définition des personnes
sans emploi est conforme avec celle des chômeurs inscrits.
Personnes non actives
Les personnes accomplissant uniquement du travail ménager dans leur propre ménage,
des activités d’entraide non rémunérées ou des autres activités bénévoles ainsi que les
étudiants 5 et les retraités ne sont pas classés dans la catégorie « Personnes actives
occupées ».
5 Les écoliers et les étudiants qui exercent une activité parallèlement à leurs études et les retraités qui continuent à travailler sont compris dans la catégorie « Personnes actives occupées »
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Graphique 2 : Schéma synthétique de la mesure du taux de chômage
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 8/32 Juin 2003
Principales limites de la mesure du taux de chômage selon
SECO
Premièrement, cette mesure ne compte comme personnes au chômage que les personnes
inscrites dans un Office régional de placement. Il serait intéressant de savoir combien de
personnes n’ont pas de travail mais qui, pour une raison ou pour une autre, ne se sont pas
inscrites.
Les chiffres de l’enquête sur la population active (ESPA) faits par l’Office Fédéral de la
Statistique nous fournissent plus d’informations. Au cours de l’année 2002, quelque
60’500 personnes sans emploi (50% de l'ensemble des sans-emploi) n'étaient pas
enregistrées comme chômeurs. Ce chiffre absolu est presque constant depuis 1991.
Malheureusement, ni Madame Lässig ni Mme Siegenthaler (les personnes de contact
concernant l’ESPA) ne pouvaient nous donner de réponse à la question : Pourquoi la
moitié des sans -emploi ne s’inscrivent pas auprès d’un Office régional de placement ?
D’après nous, les raisons peuvent être multiples. Il se pourrait que les personnes veuillent
éviter les incombances que doivent respecter les personnes qui se sont inscrites. Parmi
ces dernières, notons la participation aux mesures de réinsertion, sous peine de perdre ses
droits à l’assurance -chômage après 150 jours - ou 250 jours pour les personnes de 50 ans
et plus. Outre, il serait possible qu’un conjoint n’ait pas besoin ou ne veuille pas
s’inscrire puisqu’il partage le salaire de son conjoint afin de poursuivre d’autres activités
non rémunérées.
Selon le communiqué de
presse de l’office fédéral de
statistique de septembre 2000
sur l’enquête de la population
active, « Les femmes en
particulier sont nombreuses à
ne pas s'annoncer auprès d'un
Taux de chômage en Suisse 1991-2002 (moyenne sur l'année)
0.00%
1.00%
2.00%
3.00%
4.00%
5.00%
6.00%
7.00%
1991
1993
1995
1997
1999
2001
Taux dechômage selonSECO
Taux dechômage, sansemploi, noninscrits inclus
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ORP: au cours du 2ème trimestre 2000, seules deux femmes sans emploi sur cinq étaient
inscrites au chômage. »
A titre illustratif, le graphique ci-contre montre bien que le taux de chômage en Suisse
augmenterait en moyenne de 1,4 points entre 1991 et 2002 si on tenait compte des sans
emploi qui ne sont pas inscrits dans un Office fédéral de placement6.
Deuxièmement, le SECO met
le nombre de chômeurs
inscrits en rapport avec le
niveau de la population active
d’il y a 13 ans. Cependant,
entre 1990 et 2002, le nombre
de personnes faisant partie de
la population active occupée a augmenté de 3'621’716 à 3'959’166. Cette augmentation
du dénominateur diminue notre taux de chômage construit dans le paragraphe précédent.
En intégrant, dans notre graphique , le taux de chômage selon les évaluations de l’ESPA,
on constate que ce taux se situe , en moyenne, entre 1991 et 2002, a environ -0,05 points
en dessous du taux indiqué par le SECO.
Finalement, la statistique du SECO dépend directement de l’évolution de la loi fédérale
sur l’assurance chômage. Ainsi, (selon Pellaz, Pipoz et Lufkin 2002 qui se réfèrent à
l’étude de George Sheldon) « l’allongement de la durée d’indemnisation des chômeurs a
toujours suivi une augmentation massive du chômage [augmentation du nombre de
chômeurs inscrits en Suisse] ». L’adaptation de la nouvelle loi sur l’assurance chômage
au 24 novembre 2002 concernant le raccourcissement de la durée maximale
d’indemnisation de 520 à 400 jours7 devrait donc diminuer le nombre de chômeurs
inscrits. Néanmoins , le nombre de chômeurs inscrits en Suisse n’a pas cessé d’augmenter
et se situe , en fin avril, à 141’624 par rapport à 120'674 à la fin de novembre 2002. Ce
résultat renforce le constat de Pellaz, Pipoz et Lufkin, « qu’à la suite d’un allongement de
6 Les données ainsi que les calculs des taux de chômage se trouvent dans l’annexe 2 7 Ne sont pas concernés les travailleurs âgés de plus de 55 ans et les allocataires de rentes et de l’assurance accidents s’ils ont cotisé pendant au moins 18 mois
Taux de chômage en Suisse 1991-2002(moyenne sur l'année)
0.00%
1.00%
2.00%
3.00%
4.00%
5.00%
6.00%
1991
1993
1995
1997
1999
2001
Taux de chômageselon SECO
Taux de chômage,sans emplois noninscrits inclus,dénominateur ajusté(Déf. selon l'ESPA)
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la période de couverture, le chômage n’est jamais redescendu au niveau qu’il avait
avant ».
La mesure du taux de chômage selon l’OFS
Depuis 1991, l’ESPA réalise chaque année au cours du 2ème trimestre (d’avril à juin) une
enquête ayant pour but de fournir des données sur le monde du travail. De 1991 à 2001,
l’enquête se base sur un échantillon de 16'000 ménages qui a été, dès 2002, augmenté à
40'000. Chaque année, ces derniers sont tirés au sort dans l’annuaire téléphonique. Dans
chaque ménage, une personne est ensuite choisie de façon aléatoire. Ainsi, chaque
individu qui participe à cette enquête représente en moyenne environ 150 personnes de la
population résidente permanente.
En plus des estimations qui permettent de déterminer le taux de chômage au sens strict,
l’ESPA fournit encore d’autres statistiques comme, entre autre, la statistique sur le métier
(appris et exercé), les conditions de travail, la mobilité sur le marché du travail, la
branche économique, les heures de travail, la formation (y compris la formation
continue), le travail non rémunéré ainsi que le nombre de personnes qui ont un travail à
temps partiel mais qui cherchent un travail à plein temps (personnes en sous emploi). Ces
dernières permettent d’approfondir certaines analyses que l’on ne pourrait effectuer si on
se basait sur les informations fournies par le SECO. Les statistiques du SECO et celle de
l’ESPA offrent donc des indicateurs complémentaires.
Plus important encore, les définitions suivantes sont conformes aux recommandations du
Bureau international du travail ; elles facilitent la comparaison du taux de chômage au
niveau international.
Personnes sans emploi 8
Font partie des personnes sans emploi les personnes d’au moins 15 ans révolus
8 http://www.statistik.admin.ch
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 11/32 Juin 2003
• qui n’étaient pas actives occupées au cours de la semaine de référence,
• qui ont cherché activement un emploi au cours des quatre semaines précédentes
• et qui pourraient commencer à travailler au cours des quatre semaines suivantes
A part le fait que les « chômeurs » ne doivent pas être inscrits auprès d’un Office fédéral
de placement afin de figurer dans la catégorie « sans emploi », le troisième point cité en
dessus représente une autre différence par rapport à la définition des chômeurs selon le
SECO. En effet ce dernier exige la disponibilité immédiate en vue d’un placement.
Personnes actives occupées
Font partie des personnes actives occupées les personnes d’au moins 15 ans révolus qui,
au cours de la semaine de référence,
• ont travaillé au moins une heure contre rémunération
• ou qui, bien que temporairement absentes de leur travail (absence pour cause de
maladie, de vacances, de congé maternité, de service militaire etc.), avaient un
emploi en tant que salarié ou indépendant
• ou qui ont collaboré dans l’entreprise familiale sans toucher de rémunération
Cette définition ne diffère pas visiblement de la définition du SECO. Néanmoins, il y a
une différence. L’ESPA se base sur la population résidante permanente afin de
déterminer le nombre de personnes actives occupées. Dans cette mesure on ne tient pas
compte des individus résidants à l’étranger mais qui travaillent en Suisse (Frontaliers,
personnel des ambassades et des consulats suisses, marine suisse). Par contre, le SECO
utilise le concept intérieur lorsqu’il définie les personnes actives occupées.
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 12/32 Juin 2003
La mesure du taux de chômage aux Etats-Unis
Depuis 1940, le bureau de statistique d’emploi, en anglais « Bureau of Labor statistics
(BLS) », conduit tous les mois une enquête sur le marché de travail qui se base sur un
échantillon. A travers le temps, la méthode d’échantillonnage s’est modifiée plusieurs
fois et les derniers changements majeurs avaient eu lieu en 1994. Cette nouvelle méthode
pour mesurer le taux de chômage trouve encore son application à l’état actuel et sera
analysée dans la suite de notre rapport.
Dans un premier temps, nous allons regarder de plus près comment le gouvernement
construit cet échantillon. Par la suite, nous aborderons la définition d’une personne se
trouvant dans la population active ainsi que celle du chômeur ce qui va permettre au
lecteur de comprendre les principales différences entre la mesure du taux de chômage en
Suisse et aux Etats-Unis.
L’enquête sur la population actuelle (Current Population Survey) aux
Etats-Unis
Le Bureau of Labor Statistics (BLS) regroupe 60'000 ménages dans l’échantillon pour la
réalisation de l’enquête sur la population actuelle. Afin d’obtenir un échantillon
représentatif de la population totale des Etats-Unis, 3'141 districts, ou villes étant
équivalent à un district, sont choisis et groupés dans 1'973 zones géographiques. Parmi
ces zones, seuls 754 sont choisies pour représenter chacun des 50 Etats ainsi que le
district de Colombie. Ensuite, chacune de ces zones est de nouveau subdivisée en
plusieurs districts qui contiennent environnement 300 ménages. A l’étape finale, chacun
de ces « subdistricts » est de nouveau fractionné en petites « unités de logement » qui
contiennent 4 ménages respectivement. Les « unités de logement » qui seront retenues
pour l’enquête sont sélectionnées selon une méthode statistique. Chaque mois, pour éviter
qu’aucun ménage ne soit interrogé pendant plus de 4 mois consécutifs, un quart des
ménages dans l’échantillon sera remplacé.
Donc, pendant une semaine et ceci à chaque mois, 1500 employés du BLS interviewent
les membre des ménages sélectionnés afin d’obtenir des renseignements sur la
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 13/32 Juin 2003
population. Ces derniers seront ensuite classés dans un des trois catégories suivantes :
Personnes actives occupées, personnes sans emploi ainsi que personnes non actives.
La définition des personnes sans emploi
Font partie de la catégorie «Personnes sans emploi » :
• des personnes d’au moins 16 ans n’ayant pas de travail au cours de la semaine de
référence et qui ont cherchées activement un emploi au cours des quatre semaines
précédentes et qui sont immédiatement disponibles en vue d’un placement.
La définition des personnes actives occupées selon le BLS
Il s’agit des personnes qui, au cours de la semaine de référence:
• ont au moins 16 ans
• travaillent au moins une heure contre rémunération
• bien que temporairement absentes de leur travail (absence pour cause de maladie,
de vacances, de congé maternité, de problèmes familiales, de grève, de mauvaise
temps empêchant d’aller travailler, de service militaire) ont un emploi en tant que
salarié ou indépendant
• collaborent dans une entreprise familiale pendant 15 heures ou plus par semaines
sans toucher de rémunération
La définition des personnes non actives
Sont classées dans la catégorie de « personnes non actives » :
• les personnes ayant moins de 16 ans
• les personnes travaillant moins de 15 heures dans une entreprise familiale sans
toucher de rémunération
• les prisonniers ou des personnes dans les hôpitaux psychiatriques
• les personnes incapables de discernement
• les personnes actives dans les forces armées
• les personnes qui n’ont pas de travaille et qui n’en cherchent pas un
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 14/32 Juin 2003
• les écoliers, étudiants et les retraités9 Ces définitions ressemblent à celles de l’ESPA (ou vice versa). Aux Etats-Unis, la
définition de « temporairement absentes de leur travail » semble être plus large et inclue
les personnes ayant des problèmes familiaux, le facteur temps ainsi que les personnes qui
sont en grève 10. De plus, sont recensée les personnes qui ont plus de 16 ans et les
individus qui collaborent dans une entreprise familiale sans toucher de rémunération ne
doivent pas uniquement travailler au moins une heure (voir définition de l’ESPA) mais au
moins 15 heures ou plus pour qu’ils soient classés dans la catégorie « personnes actives
occupées »
Principales limites de la mesure du taux de chômage selon
l’ESPA et BLS
L’ESPA ainsi que le BLS basent la détermination du taux de chômage sur un échantillon.
On peut se poser la question si un échantillon peut valablement représenter la population
totale mais il convient au préalable de définir ce que l'on entend par le terme
«valablement ».
Dans le cas des Etats-Unis, l’intervalle de confiance est égale à 90 c'est-à-dire – en
prenant un exemple - dans 90% des cas, le nombre moyen de chômeurs estimé ne
diverge pas plus que de 115'000 personnes de la moyenne de la population totale. De
plus, on pourrait critiquer le fait que l’enquête se fasse par téléphone ou, dans certains
cas, par mail. Ainsi, les intervieweurs n’ont aucune possibilité de vérifier l’exactitude
des réponses.
9 Selon la définition du BLS, les écoliers et les étudiants qui exercent une activité parallèlement à leurs études et les retraités qui continuent de travailler font partie de la catégorie « Personnes actives occupées » 10 Il est possible que l’ESPA en tient également compte puisqu’on utilisant l’abréviation « etc » dans la définition, l’ESPA pourrait se réserver d’inclure d’autres éléments que ceux mentionnés dans cette défintion.
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Avis personnel des auteurs
Les définitions et méthodes servant à l’évaluation du taux de chômage diffèrent d’un
pays à l’autre. Dans la présentation nous allons voir que, malgré l’existence des
définitions « officielles » du Bureau international du travail, de nombreux pays ne les
suivent pas à la lettre.
MAIS, on peut demander si certaines des critiques sont justifiées. Ainsi, dans plusieurs
articles ou sites Internet on peut lire que le taux de chômage selon SECO sous-estime le
taux de chômage. Ces critiques étaient d’autant plus fortes pendant les périodes où l’OFS
annonça un taux supérieur à celui du SECO. Cependant, dans le graphique ci-dessus, on
voit clairement que le taux de chômage selon SECO se situait, au milieu des années 90,
en dessous du taux indiqué par l’ESPA. Finalement, est-ce que ce ne pas plutôt l’ESPA
qui « sous-estime » le taux de chômage en Suisse ?
De plus, même si le SECO ainsi que l’ESPA mesurent tous les deux le taux de chômage,
on ne peut pas dire que la statistique du SECO est plus juste que celle de l’ESPA. En
effet, l’objectif de ces statistiques diverge largement. Le SECO est étroitement lié à
l’assurance chômage. Les statistiques du SECO peuvent fournir des informations exactes
sur les conséquences financières du chômage. Par contre si l’objectif est de comparer le
taux de chômage suisse avec celui d’autres pays, il faut prendre le taux de l’ESPA. Ce qui
importe est que les deux taux reflètent bien les tendances et comme on l’a vu, d'ailleurs le
coefficient de corrélation à 0.97, le confirme.
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PARTIE II
Proposition de facteurs explicatifs de la différence des taux de chômage entre la Suisse et les Etats-Unis entre 1949 et 2002
Comment se fait-il que le taux de chômage suisse soit proche de zéro jusqu'en 1977 tandis qu'aux Etats-Unis, il ne descend pas en dessous des 2,9%? En Suisse, le premier système d'assurance chômage fut crée en 1884 par l'Union suisse
des typographes. A titre d'illustration, 204 caisses assuraient 552 000 personnes en 1936,
soit 28% de la population active11.
Les années de l'après-guerre marquèrent une période de prospérité économique pour la
Suisse. En effet, il semblerait que dans les années 60, la Suisse ait connu une période de
plein-emploi. L'assurance chômage perdit donc de son attrait au point de ne plus assurer
que 18% des personnes actives (545 000) en 1974. D'ailleurs, à ce moment-là, l'adhésion
à une assurance chômage n'était pas obligatoire. Ceux qui n'avaient plus de travail et qui
n'étaient pas préalablement inscrits auprès d'une assurance, n'avaient pas d'incitation à se
déclarer auprès d'un Office fédéral en tant que personne cherchant du travail. En effet,
cette inscription ne leur donnait pas le droit à une indemnisation de la part des assurances.
Faute d'assurance obligatoire, les étrangers licenciés regagnèrent leurs pays d'origine
tandis que les salariés indigènes non protégés abandonnèrent le marché du travail. Il
s’avère donc, étant donné le très faible nombre d’inscriptions auprès des Offices de
placement, que la proportion des personnes sans travail à la recherche d’un emploi, selon
les statistiques officielles12, n’aient pas été justement estimées. Cela pourrait être pour
cette raison que le chômage tendait vers 0 entre 1960 et 1974.
Avec le premier crash pétrolier on observe une augmentation notable du chômage à partir
de 1974. C'est uniquement en 1976, et en réponse à se phénomène semble t-il, que
l'affiliation de tous les salariés à une assurance de chômage devint obligatoire. Ainsi, le
11 http://www.snl.ch/dhs/externe/protect/textes/F16613.html 12 Estimées, à cette époque par l’Office Fédéral de l’industrie, des arts et métiers et du travail (OFIAMT).
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 17/32 Juin 2003
plein-emploi et l’inscription non obligatoire pourraient être deux raisons d’un chômage
quasi inexistant en Suisse de 1960 à 1974.
Comme la méthode de mesure aux Etats-Unis était et reste toujours basée sur un
échantillonnage 13, les personnes actives à la recherche d’un emploi pouvaient être
estimées sans qu’elles ne soient nécessairement inscrites auprès de l’assurance chômage.
Ceci pourrait expliquer le fait que, avant 1977, il n’y avait pas ou peu de chômeurs
recensés en Suisse, alors qu’aux Etats-Unis, le taux de chômage était bel et bien présent.
Sans trop rentrer dans les détails, nous pouvons survoler les phénomènes qui ont
influencé ce dernier taux dans la période étudiée. En regardant la courbe du chômage aux
Etats-Unis, nous constatons que les « pointes » surviennent lors quatre périodes de
récession de l’après-guerre, en 1948-1949, 1953-1954, 1957-1958, 1960-1961, et que le
chômage, après avoir monté, ne s’abaisse jamais à son niveau antérieur. A partir de 1963,
sous l’influence des politiques de l’administration du parti démocrate, le niveau de
chômage s’abaisse progressivement. Cette baisse s’accélère à partir de 1966 avec
l’accélération de l’activité économique, suscitée par l’intensification de la guerre au
Vietnam, avec un taux qui tombe en dessous de 4% en 1969. Ensuite, la politique de lutte
contre l’inflation mise en oeuvre entraîne un ralentissement de l’économie qui est
accentué par la réduction des hostilités au Vietnam. En conséquence, la croissance de
l’emploi se ralentit, alors que la population active augmente rapidement, en raison de la
réintégration des quelques 750000 militaires américains de retour au pays dans cette
population, ainsi que du nombre croissant des femmes en faisant partie. Il en résulte une
nouvelle hausse du chômage, avec un taux dépassant les 6% en 1970 qui va se maintenir
jusqu’en 1973.
13 Voir première partie, L’enquête sur la population actuelle (Current Population Survey) aux Etats-Unis
Economie nationale Prof. Lambelet Comparaison chômage US-CH
Boustany, Rachinski, v.Wittich 18/32 Juin 2003
Impact de l’évolution de la population active sur le chômage à partir
de 1975
Comme l’illustre le graphique ci-dessous, la population active suisse totale augmente sur
la période 1975-1992. En 1992, la population
active totale était de 4'058’000 contre 3'173’000 en
1975, ce qui représente un taux de croissance
annuel de 1,45%. Nous remarquons également
qu’entre 1992 et 2002 l’augmentation n’est que de
0,29%. Donc, le taux de croissance de la population
active entre 1975 et 1992 est plus fort que celui de
la population totale. En effet, comme nous le
constatons à l’aide du graphique ci-contre,
l’augmentation de la participation de la femme
dans la population active a contribué à amplifier le
taux de participation. Aussi, le taux de
participation, c'est-à-dire la population active
divisée par la population totale, lui aussi a
bien cru sur la période (voir graphique ci-
contre).
Essayons maintenant d’expliquer la
croissance vigoureuse du taux de
participation suisse entre 1975 et 1990. Il
semblerait que le changement soit imputable à l’évolution des mœurs et comportements
de la population suisse qui l’ont rendue plus active et également plus présente sur le
marché du travail. En d’autres termes, l’offre relative de main d’œuvre croit de façon
considérable sur cette période. En même temps, dans la situation de la crise pétrolière de
1974 ainsi que celle du début des années 80, où la conjoncture économique suisse s’est
trouvée affectée, l’accroissement de l’offre de travail se confronte à une baisse de la
demande du travail. Ce qui pourrait expliquer, dans cette même période, une croissance
annuelle moyenne du taux de chômage de l’ordre de 12%.
Population active 1975 - 2002(Echelle Semi-log)
1'000
10'000
1975
1979
1983
1987
1991
1995
1999
En m
illi
er d
e pe
rson
nes
Pop. active totale Hommes Femmes
Taux de participation en Suisse
46
47
48
49
50
51
1975
1977
1979
1981
1983
1985
1987
1989
%
Taux de participation
Economie nationale Prof. Lambelet Comparaison chômage US-CH
Boustany, Rachinski, v.Wittich 19/32 Juin 2003
Si notre étude ci-dessus ne s’étend que jusqu'au début des années 90, c’est parce qu’en
Suisse il convient de distinguer la période qui suit. En effet, le chômage s’accroît
nettement après et pendant les années 1990, ce qui contraste avec le niveau
comparativement faible des années
précédentes. Sortant du contexte de la crise
pétrolière des années 80, la Suisse se voit
confrontée à des problèmes sévères ; en
effet, sans en reparler les motifs , le PIB par
tête suisse (voir graphique à la page 20) est
en constante diminution après 1990, avec
une pente relativement importante. Le taux
de participation14 s’étant stabilisé à un
niveau nettement plus élevé qu’auparavant, la demande de travail induite par cette
dernière ne s’est pas vue absorbée par le marché de l’emploi au même titre que les années
précédentes.
La situation aux Etats-Unis n’est pas la même. En effet, en observant le graphique du
professeur Lambelet à la page 20, nous nous
apercevons que non seulement le PIB par
tête n’est pas en baisse, comme c’est le cas
en Suisse, mais qu’il subit un trend positif
lent à partir de 1991. Nous pouvons ainsi
supposer que le marché américain de
l’emploi est capable d’absorber une
population active elle aussi en plein essor
(voir graphique ci-contre). Cette hypothèse
est confirmée par une étude du FMI 15 qui
14 Jusqu’en 1990, le numérateur (population active) était constitué des personnes actives occupées exerçant une activité professionnelle d'au moins 6 heures par semaine et des chômeurs inscrits. Dès 1991, le numérateur est constitué des actifs occupés à partir d’une heure par semaine (définition recommandée par le Bureau international du Travail) et des personnes sans emp loi. Il s’agit de la population permanente et du taux d’activité brut calculé pour la population totale. 15 Pour plus de détails, consulter l’article du Prof.Lambelet dans Bilan, 17 décembre 1995
Taux de participation en Suisse
46
48
5052
54
56
58
1991
1993
1995
1997
1999
2001
%Taux de participation
Population active 1975 - 2002 Etats-Unis(Semi-log)
10000
100000
1000000
1975
1978
1981
1984
1987
1990
1993
1996
1999
2002
Per
son
nes
en
mill
iers
Pop. active totale Hommes Femmes
Economie nationale Prof. Lambelet Comparaison chômage US-CH
Boustany, Rachinski, v.Wittich 20/32 Juin 2003
suggère que la faiblesse du ratio capital réel/main d’œuvre aux Etats-Unis est due à un
niveau de salaire réel significativement plus bas qu’en Europe. Ainsi, la rationalisation du
travail (c'est-à-dire le remplacement de la main d’oeuvre par le capital) ne touche que peu
les Etats-Unis sur cette période, moins que la Suisse (le ratio étant de 122 en Suisse et de
150 aux Etats-Unis). Le volume de l’emploi est donc plus susceptible de suivre une
augmentation de la population active aux Etats-Unis.
Facteurs d’influence probables sur le taux de chômage après 1990
Assurance chômage jusqu’en 1995 En observant le graphique ci dessous retraçant l'évolution du chômage en suisse à travers
le temps on remarque à partir de 1990 une montée significative par rapport aux années
précédentes. Cela est notamment dû à une phase de stagnation prolongée que le Prof.
Lambelet démontre16 par l’évolution du PIB par tête depuis 1990.
Cette soudaine augmentation du chômage
a donc pour cause un déclin relatif de
l’économie non pas aux proches environs
de l’année 1994 mais bien avant. Les
raisons avancées sont multiples, « Le
problème est donc bien plutôt du côté des
marchés intérieurs, des branches
travaillant pour ces marchés, ainsi que du
côté d’une bonne partie du secteur public.
Structures inefficaces et sclérosées,
absence ou insuffisance de concurrence, rentes de situation, fiscalité mal conçue et
toujours plus lourde, appareil éducatif qui « ne suit pas » ou qui suit mal, Etat social
toujours plus généreux et plus onéreux, rigidité du cadre réglementaire ». Les causes que
16 Dans l’article « Déclin de l’économie suisse »
60
80
100
120
140
160
90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 00 01
USA
Suisse
Australie
Pays-BasIrlande
PAYS EN ESSOR RELATIF (plus la Suisse)PIB par tête, OCDE=100 dans chaque année
Graphique 1
Economie nationale Prof. Lambelet Comparaison chômage US-CH
Boustany, Rachinski, v.Wittich 21/32 Juin 2003
l’on vient de citer ont donc fini par déclencher une montée remarquable du chômage en
1990, un taux qui d’une part atteint des proportions officielles jamais vue auparavant et
d’autre part qui tend à se rapprocher de celui des Etats-Unis. Nous allons voir par la
suite, jusqu’en 1994, dans quelle mesure l’Etat social, en particulier l’assurance chômage
à cette époque, aurait pu avoir un impact sur cette croissance du chômage.
En regardant de plus près et en comparant certains attributs de l’assurance-chômage en
vigueur à cette époque en Suisse et aux Etats-Unis, on obtient des données assez
pertinentes pour être sujettes à interprétation.
Comparaison de l'assurance chômage Suisse - Etats-Unis
Suisse Etats-Unis Durée de cotisation
nécessaire 6 mois 6 mois
Durée d'indemnisation 400 18217 Pourcentage moyen du
salaire versé mensuellement 70% 50 a 70%
Pourcentage du seuil de pauvreté couvert par
l’indemnisation18 140% pour une personne
130% pour une personne 85%19 pour une famille de
trois personnes
Nous constatons, d'après ce tableau, que les conditions de l'assurance chômage suisse
sont plus généreuses qu'aux Etats-Unis. Le chômeur suisse serait donc d’une part plus
incité à « profiter » de son indemnisation, et d'autre part d’utiliser pleinement la période
d'indemnisation qu’un chômeur américain, durée qui est plus élevée qu'aux Etats-Unis.
En effet, cette dernière étant 2.2 fois plus grande, on ne serait donc pas étonnés de voir
qu’un chômeur suisse persiste dans sa situation plus longtemps qu’un chômeur
Américain.
17 Gregory Mankiw (2000) 18 A titre d’exemple, en suisse le seuil de pauvreté étant de 2500 CHF (pour 2000), l’indemnité moyenne perçue par un chômeur étant de 3500CHF (70% du salaire moyen qui est de 5000 CHF), ce dernier vivra au dessus du seuil de pauvreté. Le rapport entre l’indemnité moyenne ainsi perçue et le seuil de pauvreté est de 140%. (3500/2500). Les chiffres proviennent du rapport de Mr Manfred Reist, ADC Bale. 19 http://www.sante.gouv.fr/drees/etude-resultat/er-pdf/er137.pdf
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 22/32 Juin 2003
Assurance chômage après 1995 Sans expliquer en profondeur les mécanismes qui ont causé la récession de 1994-1997,
nous allons en fournir, dans ce qui suit, un bref rappel : en 1994 la suisse enregistre une
hausse du PIB de l’ordre de 1% en termes réels. Pour éviter l’inflation, la BNS décide de
réduire la masse monétaire. Cette action, combinée avec l’effondrement du dollar à la
même époque, fait apprécier le franc suisse, ce qui à son tour produit un effet néfaste sur
les exportations. La baisse des exportations freine l’économie, ce qui a pour conséquence
d’augmenter le chômage. Dans cette période la suisse connaît une croissance faible, en
effet après la croissance de 1% de 1994 le PIB ne croît plus que de 0.1% 20 en 1995, ce
qui s'explique, selon le conseil fédéral, (archives mars 1997) par « …les efforts entrepris
entre 1994 et 1995 pour redresser les finances publiques, de même que par la crise qui a
frappé le secteur de la construction [qui, avec 52,2 milliards de francs, était en recul de
4,4% ]21) et de l'immobilier, par le régime restrictif adopté par les banques en matière de
crédit… ».
En réponse à cette augmentation soudaine et inattendue du chômage, qui a contribué à
augmenter la dette publique (la dette de l’assurance-chômage frôlait les 9 milliards de
francs suisses 22), le gouvernement suisse a modifié le système d'assurance -chômage.
Ainsi, le taux de cotisation a été augmenté de 2 à 3% et une contribution de solidarité de
1% ou 2% en fonction du salaire a été introduite23. Cela dit, il semblerait que par un souci
social la durée maximale d’indemnisation a été rallongée de 400 à 520 jours. En
revanche, le demandeur d’emploi s’est vu l’obligation de fournir une contre-prestation,
par sa participation à des mesures de réinsertion, sous peine de perdre ses droits à
l’assurance-chômage après 150 jours - ou 250 jours pour les personnes de 50 ans et plus.
20 http://www.statistik.admin.ch/news/archiv96/fp96082.htm 21 http://www.statistik.admin.ch/news/archiv96/fp96082.htm 22 http://www.pdc.ch/francais/aktuell/text -detail.asp?contentid=1670 23 Le lecteur interessé peut se réferer au travail « Révision de la loi sur l’assurance-chômage » de Lufkin, Pipoz, Pellaz (Novembre 2002)
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 23/32 Juin 2003
Comme déjà mentionné plus haut24, une augmentation de la durée d’indemnisation
semble influencer à la hausse le taux de chômage. Par la suite, nous allons nous
demander s’il d’autres facteurs au sein de l’assurance-chômage, pourraient avoir une
influence semblable.
A cet effet, nous allons examiner les attributs de la politique en vigueur après 1995 et de
celle en vigueur aux Etats-Unis sur la même période; à savoir :
• La durée de cotisation nécessaire pour bénéficier d'une indemnisation en cas de
chômage
• La durée d'indemnisation maximale dont un chômeur peut bénéficier
• La durée d'indemnisation maximale dont un chômeur peut bénéficier sans qu'il ne
fournisse de contre-prestations
• Le pourcentage du salaire versé dans le cadre de l'indemnisation
• Le seuil de pauvreté en suisse et aux Etats-Unis
• Salaire moyen mensuel en vigueur dans chacun de ces deux pays
24 voir partie sur la mesure du taux de chômage
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 24/32 Juin 2003
Les recherches que nous avons effectuées sur les valeurs de ces attributs, dans la période
concernée, nous ont permis de constituer le tableau ci-dessous:
L'assurance-chômage en suisse et aux Etats-Unis après les années 1995
Suisse Etats-Unis Durée de cotisation
nécessaire 6 mois 6 mois
Durée d'indemnisation avec contraintes légales
respectées 520 182
Durée d'indemnisation si non respect
150 250 si personne âgé 50 ans
ou plus 18225
Pourcentage moyen du salaire versé mensuellement 70% 50 a 70%
Pourcentage du seuil de pauvreté couvert par
l’indemnisation26 140%
130% pour une personne 85%27 pour une famille de
3
Au vu de l'opinion générale à propos du chômeur suisse qui serait mieux loti que les
chômeurs dans d'autres pays, il serait intéressant de voir si la chose se vérifie aussi pour
Etats-Unis.
L’imposition de contreprestations pour bénéficier d’une période d’indemnisation
maximale devrait contribuer à une baisse de l’abus du système d’assurance. En effet,
entre 1990 et 1995, contrairement aux Américains dont la moitié des chômeurs finissent
par trouver un emploi en moins de 6 semaines28, les suisses eux passe une période au
moins deux fois plus longue. L’on peut se demander si ce faible système de protection en
Amérique n'a pas toujours joué comme une incitation à se réinsérer rapidement sur le
25 Gregory Mankiw (2000) 26 A titre d’exemple, en suisse le seuil de pauvreté étant de 2500 CHF (pour 2000), l’indemnité moyenne perçue par un chômeur étant de 3500CHF (70% du salaire moyen qui est de 5000 CHF), ce dernier vivra au dessus du seuil de pauvreté. Le rapport entre l’indemnité moyenne ainsi perçue et le seuil de pauvreté est de 140%. (3500/2500). Les chiffres proviennent du rapport de Mr Manfred Reist, ADC Bale. 27 http://www.sante.gouv.fr/drees/etude-resultat/er-pdf/er137.pdf 28 http://www.ifrap.org/0-ouvrirlesite/protec.html
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 25/32 Juin 2003
marché et interdit les abus. Le système Suisse, à l'image de son voisin Français, donnerait
une impression trompeuse de sécurité à une personne qui perd son emploi.
Avec l'apparition d'un chômage significatif ayant comme déclencheur les causes
précédemment évoquées, il semble donc que l'Etat suisse ait réagi par une adaptation
inadéquate de ce dernier ce qui a probablement maintenu la croissance du chômage. Cela
pourrait donc expliquer le rapprochement du taux de chômage suisse avec celui des Etats-
Unis.
L’obsolescence du système éducatif comme facteur probable de
l’augmentation du chômage
Aux Etats-unis, la crise et la dérégulation du travail ont donné naissance à une foule de
"petits boulots ", d'emplois précaires ne nécessitant guère de qualification pointue ni un
niveau de savoirs généraux très élevé. Ainsi en 1982 aux Etats-Unis, le rapport FAST II
sur l'emploi a montré qu'on trouve en tête des professions au taux de croissance le plus
élevé : les nettoyeurs, suivis des aides-soignants, des vendeurs, des caissiers et des
serveurs. Le seul emploi à composante technologique, celui de mécanicien, arrive en
vingtième et dernière position. Voilà pourquoi un minimum de compétences de base (lire,
écrire, calculer et se servir d'une interface informatique simple) suffit pour un grand
nombre de jeunes. On peut s'interroger sur la validité de la question sur le système
éducatif, du moins au Etats-Unis, puisque aucune formation spécialisée n'est nécessaire
pour effectuer les emplois susmentionnés. En effet, la majorité des emplois crées depuis
déjà 1982 concernent ceux à faible connaissance requise, et avec faible rémunération à la
clé.
Selon Philip H.Coombs 29 "D'un côté un nombre limité de postes de techniciens de haut
niveau dans l'industrie, très rémunérateur, exigeant une formation supérieure de
spécialiste, et, de l'autre des offres de plus en plus nombreuses d'emploi peu
29 http://users.swing.be/aped
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 26/32 Juin 2003
rémunérateurs, demandant peu de qualifications, dans des secteurs de service en
expansion tels que les établissements de restauration rapide, les supermarchés, et les
grandes surfaces"
Donc, on réclame des ingénieurs et des techniciens aux qualifications toujours plus
élevées et pointues, mais en même temps on exploite une masse croissante de main
d'oeuvre à tout faire: assez compétente et flexible pour être productive; assez nombreuse
et privée d'instruction pour être peu exigeante. Ainsi, un développement du système
éducatif Américain vers des formations plus pointues contribuerait à accentuer les
inadéquations entre la formation de la population et compétences requises pour les
emplois disponibles; ce qui aurait une influence sur le chômage structurel aux Etats-Unis
après les années 80.
Il est de notoriété publique que le système éducatif suisse dépasse son comparse
américain de par plusieurs caractères dont le plus intéressant est celui de l’intégration, par
voies de formation professionnelles, au marché du travail. Mais, plus on s’approche du
deuxième millénaire, plus ce constat devient un mythe. En effet, la cassure dans le
marché du travail des années 90 a rendu exigeante la politique suisse en matière d'emploi
qui, jusque-là, était essentiellement passive. Le manque de qualifications nécessaires est
une des causes majeures du chômage de longue durée en Suisse30. Auparavant, une
grande partie des chômeurs renonçaient à la formation continue. En outre, la structure des
salaires était alors plus dépendante de l'ancienneté que du niveau de formation. Alors que
la formation en Suisse est largement contrôlée et financée jusqu'au degré tertiaire, c'est le
contraire qui se passe pour la formation continue. Beaucoup de personnes actives ne
profitent toutefois d'une formation continue qu'à partir du moment où elles ne sont plus
occupées, c'est-à-dire qu'elles perdent leur emploi. C'est pourquoi Wolter et Weber
(1999) préconisent de ne pas attendre les mesures de formation continue, autrement dit de
ne pas attendre que les personnes actives occupées deviennent chômeuses, mais de créer
de nouvelles stratégies et des incitations financières pour la promotion de l'apprentissage
tout au long de la vie.
30 http://research.credit-suisse.ch/de/publications/spotlight/pdf/spotlight_migration_f.pdf
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Boustany, Rachinski, v.Wittich 27/32 Juin 2003
En suisse, dans les années 1990 l'économie et le système d'éducation sont donc en pleine
mutation. Selon le Conseil Fédéral "la compétition économique prend toujours plus la
forme d'une course à l'innovation où les connaissances et les savoir faire sont autant de
ressources stratégiques. Le système éducatif doit réponde à ces nouveaux enjeux".
Encore, selon le rapport du Crédit Suisse Group (2001) "l'éducation suisse doit s'adapter
au défis de la société du savoir." La situation est donc tout à fait différente au sein des
Etats-Unis.
En résumé on a donc aux Etats-Unis une croissance nette des emplois précaires (énoncée
dans le rapport FAST II) depuis le début des années 80 alors qu'en Suisse le phénomène
concerne, depuis les années 90, surtout les emplois hautement qualifiés.
A l'appui de Geert Hofstede, la population des Etats-Unis ayant un indice de qualification
plus bas qu'en Suisse, elle s'est plus particulièrement prêtée à la croissance des emplois à
faible qualification depuis les années 80. Ce qui pourrait en partie expliquer pourquoi le
chômage connaît une tendance à partir 1983.
En Suisse par contre, la nécessité d’une réadaptation du système de formation trouve sa
justification pour deux raisons qui nous paraissent intéressantes :
Premièrement à cause de la migration et du décalage des besoins de qualification : En
effet, la population étrangère résidant en Suisse se présente, en grande majorité, comme
une force de travail non formée. Déjà en 1998, presque la moitié des 750 000 travailleurs
peu qualifiés en Suisse sont de nationalité étrangère. La divergence croissante entre
l'offre et la demande des qualifications conduit les non formés ou les travailleurs
étrangers à un chômage structurel grandissant qui gonfle les coûts. Aujourd'hui, le
chômage de longue durée concerne justement pour une majeure partie les non formés peu
qualifiés. Les offres de formation, comme celles qui aujourd'hui sont proposées
couramment dans le cadre des mesures actives de l'assurance -chômage, devraient être
rapidement remplacées par une véritable reprise de la formation, qui -- à long terme --
Economie nationale Prof. Lambelet Comparaison chômage US-CH
Boustany, Rachinski, v.Wittich 28/32 Juin 2003
déboucherait sur une réelle certification permettant d'éviter le chômage de longue durée
et, par là, de favoriser une vraie disponibilité pour l'emploi.
Le rôle du salaire minimum dans la différence entre les taux de
chômage entre 1949 et 2002
Parmi les raisons du chômage on compte la rigidité des salaires, c'est-à-dire l’incapacité
des salaires à s’ajuster pour que la demande du travail égale l’offre du travail. En effet,
dans un marché parfaitement libre le salaire réel s’ajuste pour équilibrer l’offre et la
demande du travail. Cela dit, dans certaines économies il existe un salaire rigide qui est
parfois supérieur au salaire d’équilibre. Quand le salaire fixe est supérieur à celui de
l’équilibre l’offre du travail dépasse la demande, les entreprises sont alors obligées de
répartir un nombre inférieur de postes parmi un nombre supérieur de demandeurs
d’emplois. Ceci augmente donc le taux de chômage. Le chômage résultant d’une rigidité
des salaires minimum s’appelle le chômage d’attente. Le phénomène du chômage
d’attente se produit quand les entreprises ne peuvent pas réduire les salaires malgré un
excès d’offre de travail. Examinons le salaire minimum en tant que cause du salaire
rigide.
Le salaire minimum
Afin d’empêcher les salaires de descendre à un niveau d’équilibre qui serait socialement
inacceptable, un gouvernement peut introduire un salaire minimum.
Depuis l’introduction du « Fair Labor Standard Act » en 1938, le gouvernement
américain a instauré un salaire minimum qui oscille habituellement entre 30 et 50% du
salaire moyen d’un emploi dans le secteur manufacturier. Actuellement, il est de 5.15 $
Economie nationale Prof. Lambelet Comparaison chômage US-CH
Boustany, Rachinski, v.Wittich 29/32 Juin 2003
par heure.31 Selon les économistes, le chômage engendré par le salaire minimum touche
surtout les jeunes travailleurs. Ainsi, nous allons essayer de chercher s’il existe un lien
entre le niveau de chômage des jeunes de 16 à 19 ans et le salaire minimum en termes
réels aux Etats-Unis sur la période étudiée.
Taux de chômage et salaire minimum aux Etats-Unis 1949-2002
0.0
5.0
10.0
15.0
20.0
25.0
1949
1952
1955
1958
1961
1964
1967
1970
1973
1976
1979
1982
1985
1988
1991
1994
1997
2000
%
Taux de chômage 16-19Salaire minimum en termes réels (Index 1960 = 100)
Comme l’indique le graphique ci-dessus, il y a une très faible relation entre le taux de
chômage des jeunes et le salaire minimum avec un coefficient de corrélation de 0.13.
Ainsi, il semblerait que l’existence d’un salaire minimum aux Etats -Unis n’influencerait
pas de manière notable le niveau de chômage chez les jeunes et, à plus forte raison, celui
des autres classes. Ceci est confirmé par l’étude de Catherine Saget32 de l’Organisation
Internationale du Travail. Nous savons aussi qu’en Suisse, il n’existe pas de salaire
minimum officiel.
Au vu des conclusions précédemment tirées, on est en mesure de dire que la différence
des taux de chômage entre la Suisse et les Etats-Unis, sur la période étudiée, n’est pas
expliquée par la présence d’un salaire minimum aux Etats-Unis. Gardons tout de même à
l’esprit l’étude de Charles Brown dans le Journal of Economic Perspectives qui démontre
qu’il existe en effet une relation positive entre le niveau de chômage chez les jeunes et le
31 www.bls.gov 32 Etude réalisée pour le International Labour Review
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niveau de salaire minimum. En effet, selon lui, une augmentation du salaire minimum de
10% entraîne une hausse entre 1 et 3% du taux de chômage de ces derniers.
Conclusion
Dans notre étude, l’évolution du taux de chômage en Suisse ainsi qu’aux Etats-Unis
traverse trois périodes successives (Début années 50 jusqu’au milieu des années 70.
Milieu des années 70 jusqu’au début des années 90 et milieu des 90 jusqu’au début des
années 2000), dont les frontières ne sont pas clairement définies. Concernant la première
période, nous avons vu que le plein emploi ainsi que les sous-estimations étaient l’une
des causes du faible taux de chômage en Suisse. Les Etats-Unis, procédant bien avant par
estimations du taux de chômage, le phénomène de ce dernier est bien présent chez eux.
L’assurance chômage, la crise pétrolière ainsi que le changement dans la structure de la
population active peuvent être cités comme causes de la progression du chômage dans les
deux pays lors de la deuxième période.
Finalement, en ajoutant le taux de capitalisation dans notre étude, nous avons tenté
d’expliciter l’influence de ce dernier ainsi que d’autre facteurs déjà évoqués pour finir
avec l’étude de l’influence de la rigidité des salaires sur le chômage.
De par l’ensemble des hypothèses avancées pour expliquer et comparer le chômage au
sein de la Suisse et des Etats-Unis, nous espérons avoir donné une idée au lecteur sur la
complexité de la conjonction des facteurs en cause. A la question soulevée de multiples
réponses sont proposées par d’éminents économistes. Hélas, ces derniers ont parfois des
points de vue divergents sur le sujet. Aucun des facteurs avancés ne peut à lui seul fournir
une explication concluante. Ceci est confirmé par Mankiw : « In the end, the trends in the
unemployment rate remain a mystery. The proposed explanations are plausible, but
neither seems conclusive on its own. Perhaps there is no single answer ». Cette phrase est
dans la prolongation des propos de Charles. R. Bean, un autre important spécialiste du
chômage : «…we are not much further on in understanding the causes of high
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unemployment than ten years ago. There are plenty of plausible suspects, quite a few
smoking guns, but little definite proof… »
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Annexe
Annexe 1 Définitions selon SECO
Programmes d’emploi temporaire (PET)
Programmes financés par l'assurance-chômage dans le but de faciliter l'intégration ou la
réinsertion professionnelles des assurés. Ils permettent aux participants de conserver leurs
qualifications professionnelles et de développer de nouvelles aptitudes. L'emploi
temporaire peut également prendre la forme de stages pratiques dans des entreprises ou
dans l'administration ou de semestres de motivation pour les jeunes sortant de l'école.
Reconversion/ perfectionnement
Le but des mesures de reconversion et de perfectionnement (cours) est d'améliorer
rapidement et sensiblement l'aptitude au placement de l'assuré sur le marché du travail.
La mesure peut également prendre la forme de stage de formation dans une entreprise ou
dans le cadre d'une entreprise d'entraînement.
Les demandeurs d'emploi non chômeurs en mesure de reconversion ou de
perfectionnement sont partiellement libérés de l'entretien de conseil afin de pouvoir se
consacrer plus intensivement à la formation.
Les chômeurs en mesure de reconversion ou de perfectionnement ont par contre
l'obligation de se présenter aux entretiens de conseil.
Gain intermédiaire
Est réputé gain intermédiaire tout gain que le bénéficiaire de l'assurance-chômage retire
d'une activité salariée ou indépendante exercée pendant une période de contrôle dans le
but d'éviter ou de diminuer le chômage.
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Annexe 2 Calculs du taux de chômage selon SECO et du « taux de chômage fictif »
(1) : http://www2.seco-admin.ch/seco/seco2.nsf/AMSfr
(2) : http://www2.seco-admin.ch/seco/seco2.nsf/AMSfr
(3) : http://www.statistik.admin.ch/stat_ch/ber03/eckdaten/download_f/espa_pse,%20tx.se_f.xls
(4) : http://www.statistik.admin.ch/stat_ch/ber03/eckdaten/download_f/espa_pse,%20tx.se_f.xls
(5) : http://www.statistik.admin.ch/stat_ch/ber03/eckdaten/download_f/espa_pop_statut_f.xls
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Bibliographie
• Filippini Paolo, (1998), Regional Unemployment disparities: The Cas of the
Swiss Cantons, Zürich, VDF
• Joly Régis, Jean-Christian Lambelet, Cédric Tille, (1993), Origine et causes de la
montée du chômage en Suisse, Lausanne, Institut « Créa »
• King Desmond S., (1995), Actively seeking work?, Chicago, The University of
Chicago Press
• Lufkin Thomas, Charlotte Pellaz, Véronique Pipoz, (2002), Révision de la loi sur
l’assurance chômage, Lausanne, HEC
• Mankiw Gregory (2000), Macro economics, New York, Worth Publishers, 4th
edition
• Sehnholz Hans F., (1987), The politics of unemployment, Spring Mills,
Libertarian Press
• Vallée Annie, Annie Kawecki, (1972), Le chômage aux Etats -Unis, Paris, Presses
Universitaires de France
• Vedder Richard, Lowell Gallaway, (1993), Out of work, New York,
Holmes&Meier
Liens internet
Sites suisses
SECO
http://www2.seco-admin.ch/seco/seco2.nsf/AMSfr
OFS/ESPA
http://www.statistik.admin.ch/stat_ch/ber03/eckdaten/ami_resultats_espa_01_f.htm
http://www.statistik.admin.ch/news/pm/2000/fp00090.pdf (Communiqué de presse 2000)