droit spÉcial des sociÉtÉs licence 3 cours de monsieur

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. UNIVERSITÉ DE CERGY-PONTOISE Faculté de Droit DROIT SPÉCIAL DES SOCIÉTÉS LICENCE 3 Cours de Monsieur Tanguy ALLAIN Année universitaire 2016-2017 COURS MAGISTRAL SEANCE I - Propos de bienvenue et présentation de l’enseignant Présentation rapide de mon parcours Mail : [email protected] Twitter : @tnjlex #DSSCergy - Organisation des séances de cours magistral A chaque séance de TD correspond un fascicule contenant des documents à lire et des exercices à faire chez soi (vous pouvez aussi les préparer en groupe, à condition que chacun arrive en séance avec le travail fait en entier et pour son propre compte). L’organisation des séances de TD ainsi que les modalités du contrôle continu seront expliquées par les chargés de TD. - Examen Un galop d’essai est organisé en milieu de semestre. Il permet à chacun des étudiants de se préparer aux examens de fin de semestre, et surtout de s’obliger à apprendre son cours et à revoir ses séances de TD… La note de galop d’essai compte pour la moitié dans la moyenne de TD, l’autre moitié est tirée des travaux préparés à la maison, des interrogations écrites ou orales organisées par les chargés de TD au cours de leur séance. Un examen sera organisé à la fin du semestre selon le calendrier prévu par l’Université. Il ne portera que sur ce qui a été vu en cours et en TD. - Bibliographie Les ouvrages cités en bibliographie pour le cours de droit général des sociétés + D. Vidal, K. Luciano, Cours de droit spécial des sociétés, Gualino, 2ème éd. 2016-2017 J.-M. Moulin, Droit des sociétés et des groupes, Gualino, 2ème édition, 2016-2017 1

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise.

UNIVERSITÉ DE CERGY-PONTOISE Faculté de Droit

DROIT SPÉCIAL DES SOCIÉTÉS LICENCE 3

Cours de Monsieur Tanguy ALLAIN Année universitaire 2016-2017

COURS MAGISTRAL

SEANCE I

- Propos de bienvenue et présentation de l’enseignant

Présentation rapide de mon parcours Mail : [email protected] : @tnjlex #DSSCergy

- Organisation des séances de cours magistral

A chaque séance de TD correspond un fascicule contenant des documents à lire et des exercices à faire chez soi (vous pouvez aussi les préparer en groupe, à condition que chacun arrive en séance avec le travail fait en entier et pour son propre compte).

L’organisation des séances de TD ainsi que les modalités du contrôle continu seront expliquées par les chargés de TD.

- Examen

Un galop d’essai est organisé en milieu de semestre. Il permet à chacun des étudiants de se préparer aux examens de fin de semestre, et surtout de s’obliger à apprendre son cours et à revoir ses séances de TD… La note de galop d’essai compte pour la moitié dans la moyenne de TD, l’autre moitié est tirée des travaux préparés à la maison, des interrogations écrites ou orales organisées par les chargés de TD au cours de leur séance.

Un examen sera organisé à la fin du semestre selon le calendrier prévu par l’Université. Il ne portera que sur ce qui a été vu en cours et en TD.

- Bibliographie

Les ouvrages cités en bibliographie pour le cours de droit général des sociétés+D. Vidal, K. Luciano, Cours de droit spécial des sociétés, Gualino, 2ème éd. 2016-2017J.-M. Moulin, Droit des sociétés et des groupes, Gualino, 2ème édition, 2016-2017

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. Voir également les revues juridiques spécialisées, principalement : la Semaine juridique édition entreprise (JCP E) ; la Revue des sociétés (Dalloz) ; la revue Droit des sociétés (LexisNexis) ; Bulletin Joly Sociétés.

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Propos introductif sur le droit spécial des sociétés

Prolongeant l’étude du droit des sociétés dans sa généralité, il paraît maintenant nécessaire d’entrer davantage dans le détail. A la vérité, le droit des sociétés recouvre de multiples réalités et l’on ne peut se satisfaire d’une vision d’ensemble pour en saisir toutes les subtilités. Ainsi qu'il a sûrement été dit en introduction, le droit des sociétés qui repose sur l’outil contractuel, sert un objectif unique : structurer l’entreprise ou plus largement une activité économique. Or, précisément, il existe de nombreuses façons de mener une entreprise, en fonction de nombreux critères : souhaite-t-on travailler seul ou à plusieurs ? souhaite-t-on exposer son patrimoine personnel au risque de l’entreprise (de l’activité) ou non ? souhaite-t-on une structure complexe ou simple (ce qui a d’ailleurs des impacts économique en termes de coûts de fonctionnement) ? souhaite-t-on une société ouverte (notamment, les sociétés cotées en faisant appel au public pour le financement et nécessitant donc l’application de règles contraignantes) ou une société fermée (avec une organisation internes rapports juridiques entre associés relativement libre) ? souhaite-t-on avoir la qualité de commerçant ou non ? quelle activité sera exploitée (commerciale ? civile ? coopérative ? libérale ?) et bien d’autres. Pour tenter de répondre au mieux à cette diversité, le législateur a prévu de nombreuses formes sociales différentes en adaptant pour chacune un régime juridique propre. L’objet du cours de droit spécial des sociétés consistera à présenter non pas toutes, mais les principales formes de sociétés (celles que les étudiants seront le plus fréquemment amenés à rencontrer).

Le juriste, spécialiste du droit des sociétés, aura notamment pour mission de sélectionner parmi toutes les formes sociales celle qui sera la plus appropriée au projet des chefs d’entreprises qui le consultent. Il en résultera l’application de règles juridiques, fiscales, et sociales. Mais à la vérité, la maîtrise de la technique sociétaire s’illustrera non seulement par l’utilisation des marges de liberté qui sont prévues dans chaque forme sociale (plus ou moins grandes selon les sociétés), mais aussi par les montages juridiques, qui pourront être mis en place, en combinant, pour une même opération plusieurs sociétés et plusieurs contrats.

Par souci de classification, nous présenterons dans une première partie les sociétés dites à risque limité (Première partie) et dans une deuxième partie les sociétés à risque illimité (Deuxième partie). Enfin, nous travaillerons sur les restructurations sociétaires et les groupes de sociétés (troisième partie).

Première partie : les sociétés à risque limité

Les sociétés à risque limité sont celles dans lesquelles les associés ne se sont responsables qu’à hauteur de leurs apports. C’est-à-dire qu’ils ne sont pas tenus par le passif social en cours de vie sociale, les créanciers sociaux ne pouvant agir en paiement que contre la société, qui est leur seul débiteur. A tout le moins, les associés ne supportent-ils que le risque de perdre leur mise de départ au moment de la liquidation de la société si à ce moment là des pertes sont à déplorer. Parmi ces sociétés, on doit tout d’abord dénombrer : les sociétés par actions (Titre I), mais les sociétés à risque limité comptent aussi parmi elles les fameuses Sociétés à responsabilité limité (SARL), que l’on peut présenter comme étant des sociétés « hybrides » (Titre II) parce qu’elles sont tout à la fois des sociétés de capitaux (intérêt pour les fonds apportés par les associés) et des sociétés de personnes (intérêt pour la personnalité des associés).

Titre I. Les sociétés par actions

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. Les sociétés par actions sont relativement diversifiées. Il est vrai que la société anonyme (SA) (leçon n° 1) a connu un certain succès et qu’elle conserve aujourd’hui une place prépondérante par rapport à toutes les autres, en particulier d’ailleurs parce que son régime juridique, très précis, très réglementé (et donc potentiellement assez lourd), qui inspire l’ensemble du droit des sociétés et constitue une base commune à l’ensemble des autres sociétés par actions. Son étude qui sera déroulera dans le cadre de trois séance, apparaît donc comme un pré-requis avant de présenter les autres sociétés par actions, à savoir la société par actions simplifiée, qui offre pour sa part une liberté d’organisation beaucoup plus grande (Leçon n°2) et d’autres formes comme la société en commandite par actions et la société européenne (Leçon n°3), qui répondent à d’autres besoins : pour la SCA, à mieux maîtriser la composition du capital et à se protéger contre les éventuelles prises de contrôle hostiles, et pour la SE, à disposer d’une image européenne, transnationale, et à faciliter les opérations de restructurations transfrontalières. Pour terminer l’étude des sociétés par actions, nous préciserons qu’elles bénéficient de règles particulières relatives à leur financement (Leçon n°4).

Leçon n° 1. La société anonyme (SA)

Historiquement, le succès de la SA s’explique en ce qu’elle permet d’organiser très efficacement la réunion de capitaux (le Doyen Ripert avait dit que la SA était un « merveilleux instrument du capitalisme moderne » ). L’utilisation de la SA permet à des investisseurs, parfois en très grand 1

nombre (et sans limitation) et tout en restant anonymes (on est face à une société de capitaux et non à une société de personnes), d’apporter facilement des capitaux pour contribuer à la réussite d’une opération économique, en échange de la remise d’actions. Ces actions sont des titres qui confèrent à leurs porteurs différentes prérogatives politiques (droit de vote) et financières (dividende), et qui par ailleurs sont librement négociables et peuvent donc être échangés très facilement, permettant à chacun (devenu alors actionnaire) de ne pas être lié par un investissement qu’il souhaite abandonner. Jusqu’à leur dématérialisation, dans le cadre d’une loi adoptée en 1981, les actions étaient matérialisées par des titres « papier », dont la seule détention suffisait pour acquérir la qualité d’actionnaire. Les choses sont aujourd’hui tout à fait différentes : les actions et plus largement ce que l’on appelle les «  valeurs mobilières  » n’existent plus matériellement : elles sont simplement inscrites dans un compte tenu par la société. Au-délà, les actionnaires bénéficient d’un régime juridique très complet, leur permettant de contrôler l’action des dirigeants, qui les représentent, et donc indirectement, de contrôler l’usage des fonds qu’ils ont apporté, à travers une structure juridique dotés d’organes dont les compétences sont très strictement réparties par la loi.

Aujourd’hui toutefois, on ne peut plus réduire la présentation du droit applicable à la SA aux seules dispositions en rapport avec ce rôle d’instrument de drainage des capitaux. On trouve en effet dans le régime juridique applicable aux SA des considérations beaucoup plus larges, basées sur le postulat que l’entreprise n’est plus seulement la chose des dirigeants, et qu’il faut prendre en compte l’ensemble des acteurs (les parties prenantes) qui animent l’entreprise exploitée sous la forme de la SA (les salariés notamment), mais aussi des acteurs qui gravitent autour de cette entreprise (l’Etat, les créanciers, la société civile). A ce titre, ce qu’on appelle la «  corporate governance » ou « gouvernance d’entreprise », qui désigne l’ensemble des règles destinées à encadrer la façon dont une entreprise est dirigée, administrée et contrôlée a pris une part de plus en plus importance ces 15 dernières années. Elle s’illustre bien évidemment par des règles de nature législative, mais aussi par le développement très important d’une « soft law » dédiée aux SA dont les actions sont cotées sur un marché financier, à travers notamment - mais pas seulement - un Code de gouvernement d’entreprise, élaboré par l’AFEP et le MEDEF, depuis 2008 (dernière version en date de novembre 2016) .2

G. Ripert, Aspects juridiques du capitalisme moderne, 2ème éd. 1948, p. 28.1

AFEP-MEDEF, Code de gouvernement d’entreprise des sociétés cotées, nov. 2016.2

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. Pour présenter l’essentiel du régime juridique des SA (nous ne pourrons pas tout dire), il conviendra, dans le cadre de la première séance de s’intéresser aux modalités de constitution et à la façon dont les SA sont dirigées et administrées (Séance 1). Nous travaillerons au cours d’une deuxième séance sur l’actionnariat de la SA et les différents organes de contrôle (séance 2). Nous terminerons l’étude de la SA, en s’intéressant à la modification des statuts de la SA (séance 3).

De nombreuses lois se sont succédées depuis le XVIIème siècle, pour encadrer, moderniser, préciser le droit de la SA, au titre desquels notamment la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966, mais depuis largement modifiée. Mais, plutôt que de faire la liste exhaustive de ces textes (probablement plus d’une vingtaine), il convient surtout de préciser que ce régime est codifié aux articles L. 225-1 à L. 225-270 du Code de commerce. Le Code monétaire et financier contient également quelques dispositions applicables aux SA.

Séance 1. Constitution - Administration et direction

Choisir d’exercer son activité économique sous la forme de SA, implique en premier lieu le respect d’un certain nombre de conditions (section I). Une fois la société constituée, il faudra alors bien comprendre comment celle-ci va fonctionner, en particulier à travers ces organes d’administration et direction (section II).

Section I. La Constitution de la SA

Précisons d’une part les conditions de fond (A) et d’autre part les conditions de forme (B), nécessaires à la constitution d’une SA.

A. Les conditions de fond

En tout premier lieu, il convient de noter que le Code de commerce distingue deux possibilités pour constituer une SA. La première possibilité est la constitution avec offre au public (C. com., art. L. 225-2 à L. 225-11-1), c’est-à-dire en sollicitant l’épargne des particuliers par le biais d’une offre de souscription à des titres financiers adressée au public. Ce cas de figure est relativement rare et particulièrement complexe, si bien qu’il est délicat de le présenter à titre de première approche de la SE. Nous nous concentrerons donc sur la deuxième possibilité : la constitution d’une SA sans offre au public (C. com., art. L. 225-12 à L. 225-16-1). C’est-à-dire que les associés qui se rassemblent pour constituer la société sont relativement proches, à tout le moins se connaissent et se réunissent pour mettre en oeuvre un projet commun.

En deuxième lieu, il faut réunir un nombre minimum d’associés (aucun maximum n’est fixé). Jusqu’en septembre 2015, il fallait impérativement trouver 7 actionnaires (à défaut, on nommait des « hommes de paille »). Aujourd’hui, depuis une ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 (ratifiée par la loi n° 2016-563 du 10 mai 2016), il suffit d’être 2 actionnaires pour constituer une SA. Néanmoins si ses actions sont cotées (admises aux négociations sur un marchés réglementé ou sur un système multilatéral de négociation), le nombre d’associés ne peut être inférieur à 7 . Le non respect de cet exigence en nombre d’actionnaires n’est toutefois pas 3

sanctionné de nullité .4

En dernier lieu, et comme pour toutes les sociétés par actions, le capital minimum doit être de 37 000€ (C. com., art. L. 224-2). La réunion de capital doit répondre à certaines conditions de forme.

Historiquement, la loi anglaise qui inspira le législateur français pour créer la SA en 1876 exigeait la 3

présence de 7 fondateurs. La dissolution peut toutefois être prononcée par le tribunal de commerce, sur demande de tout intéressé 4

si le nombre d’actionnaires est inférieur à 7 pendant plus d’un an (C. com., art. L. 225-247). �4

Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. Les causes de nullité pour non respect des conditions de forme sous celles applicables toutes sociétés.

B. Les conditions de forme

La constitution d’une SA est un processus impliquant le respect de nombreuses étapes. Suivant la complexité de son organisation et des négociations entre les associés, la création de la SA peut prendre de quelques semaines à quelques mois. Il faut en effet, successivement : rédiger un projet de statuts (1), constituer le capital (2), signer les statuts (3), désigner les dirigeants (4) puis accomplir des démarches administratives, autrement appelées, formalités de publicité (5).

1. La rédaction d’un projet de statuts

Formellement, le Code de commerce n’impose la rédaction d’un projet de statuts que pour la constitution de SA avec offre au public (C. com., art. L. 225-2) celui-ci devant par ailleurs être signé par les fondateurs et déposé au tribunal du commerce du lieu du siège social. Cette exigence n’est pas appliquée lors de la constitution sans offre au public, mais en pratique, elle paraît indispensable : c’est le contrat (le Code de commerce évoque plus étroitement un « acte sous seing privé ». C. com., art. R. 224-1) que les associés projettent de conclure et qui est donc le support de leurs négociations. Au demeurant, les projets des statuts sont souvent demandés par différentes institutions (banques, bailleurs, etc) pour pouvoir engager des démarches juridiques avant même la constitution définitive de la société.

Le projet de statuts est rédigé, en autant d’orignaux qu’il est nécessaire pour l’accomplissement des diverses formalités, par le conseil choisi par les fondateurs (ou par les fondateurs eux-mêmes, mais c’est beaucoup plus risqué) et doit contenir des mentions impératives (C. com. art. L. 210-2 ; R. 224-2) :

- identité des signataires ;- indication de la forme sociale (ici SA) ;- durée (maximum 99 ans) ;- dénomination sociale ;- siège social ;- objet social ;- montant du capital social ;- toutes les spécifications relatives aux actions (nombre, catégorie, valeur nominale, nature des

droits attachés, forme - au porteur ou nominative -, restrictions à la libre négociation ou la cession, identité des apporteurs et évaluation des apports…) ;

- stipulations relatives à la composition, au fonctionnement et aux pouvoirs des organes de la société ;

- dispositions relatives à la répartition des résultats, constitution de réserves et réparation du bon de liquidation.

2. La constitution du capital

Pour constituer une SA, les associés doivent réunir des moyens (matériels ou financiers). Les apports qu’ils vont ainsi réaliser au profit de la personne morale à naître vont ensemble, constituer le capital social (a). En contrepartie de ces apports, les associés se voient remettre des actions, qui représentent le capital ainsi constitué (b).

a. L’origine du capital : les apports

Lorsqu’ils décident de constituer une SA, les fondateurs souscrivent au capital, c’est-à-dire qu’ils s’engagent, pour un montant donné et définitif à réaliser des apports. Le capital doit ainsi être intégralement souscrit : les associés fondateurs ne peuvent plus revenir en arrière et souscrire

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. moins que ce à quoi ils se sont engagés (C. com., art. L. 225-12 et L. 225-3). Ces apports peuvent être réalisés soit en nature, soit en numéraire, mais jamais en industrie (C. com., art. L. 225-3).

- Les apports en numéraire

Lorsque l’apport est réalisé en espèces ou par compensation, la libération des actions (dites « de numéraire ») peut être de la moitié seulement de leur valeur nominale (C. com. art. L. 225-3), mais au moins de la moitié. Les associés devront alors verser le solde restant dans les 5 ans maximum à compter de l’immatriculation de la société, à une date fixée (ou plusieurs échéances) par le conseil d’administration ou le directoire, à charge d’intérêts en cas de retard. Les premiers bénéfices peuvent tout à fait servir à libérer ce solde par voie de compensation. Il faut toutefois être vigilant : l’apport est une source de financement de la société. Par conséquent, la libération du solde, sans attendre l’échéance des 5 ans, peut s’imposer en cas de difficultés financières .5

Les actions non entièrement libérées sont nominatives (l’actionnaire est donc identifié par les dirigeants). A défaut, les actions peuvent être annulées (C. com., art. L. 228-9).

Les fonds apportés, sont soit remis aux fondateurs, qui auront pour mission de les remettre sous 8 jours à un dépositaire , soit remis directement au dépositaire. Le dépositaire des fonds, qui 6

constate que tous les fonds ont été apportés, après avoir pris connaissance de la liste des actionnaires et de la sommes qu’ils se sont engagés à apporter, établi un certificat (C. com. art. L. 225-13). Ces fonds sont indisponibles, tant pour la société en formation que pour ses dirigeants, pour le temps que durent les formalités de création de la SA, et seront utilisables à compter de son immatriculation.

- Les apports en nature

Les actions remises en contrepartie d’apports en nature sont intégralement libérées dès leur émission (C. com., art. L. 225-3) : le transfert de propriété s’opère, sans autre formalité, à compter de l’immatriculation. Dans la mesure où ces apports ont vocation à constituer le capital, et servir de gage aux créanciers sociaux, il est nécessaire de les évaluer aussi exactement que possible : les surévaluer viendrait donner une image trompeuse de la solvabilité de la société ou permettrait d’éviter l’application ultérieure de plus-values taxables ; les sous-évaluer viendrait à l’inverse jeter le discrédit sur les capacités financières de la société (pour obtenir un crédit par exemple), ou permettrait de cacher une plus-value actuelle.

Un commissaire aux apports doit alors être désigné à l’unanimité des fondateurs, ou à défaut par 7

le président du tribunal de commerce, à l’initiative de l’un ou plusieurs d’entre eux (C. com. art. L. 225-8). Ce professionnel du chiffre a pour mission d’évaluer, sous sa responsabilité , et assisté 8

éventuellement d’un expert de leur de son choix, la valeur des apports en nature. Pour cela, il doit rédiger un rapport , déposé au greffe avec le projet de statuts et mis à la disposition des 9

Cass. com., 16 oct. 2001, Dr. sociétés, mai 2002, n° 89, obs. J.-P. Legros.5

C. com., art. R. 225-6 : une banque, un notaire, la Caisse des dépôts et consignations…6

Parmi les commissaires aux comptes inscrits ou les experts inscrits sur une liste spéciale (C. com., art. R. 7

225-7 ; C. com., art. L. 822-1). Le commissaire aux apports qui commet une faute dans l’évaluation des apports en nature engage sa 8

responsabilité civile envers les actionnaires à qui une telle faute a causé un préjudice. Cass. com., 28 juin 2005, RJDA, 10/2005, n° 1107. Le contenu du rapport est prévu à l’article R. 225-8 du Code de commerce : description des apports, 9

mode d’évaluation retenu et raison du choix de ce mode d’évaluation, affirmation que la valeur des apports correspond au moins la valeur nominale des actions à émettre, augmentée éventuellement de la prime d’émission.

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. actionnaires avant leur signature. Les associés, lors de l’assemblée générale constitutive , restent 10

libres de retenir dans les statuts définitifs l’évaluation proposée par le commissaire aux apports 11

ou de s’en écarter. Ils peuvent ainsi soit la réduire (mais à l’unanimité), soit l’augmenter, mais à condition de ne pas attribuer frauduleusement à l’apport une évaluation supérieure à sa valeur réelle . 12

Cette procédure n’est pas applicable dans deux circonstances : apport en nature de valeurs mobilières cotées et apport d’éléments d’actifs ayant déjà fait l’objet d’une évaluation à leur juste valeur par un commissaire aux apports dans les 6 derniers mois (C. com. art. L. 225-8).

Une procédure similaire s’applique si dans les 2 ans de son immatriculation, la société acquiert un bien appartenant à un actionnaire et dont la valeur est au moins à 1/10ème du capital social (C. com., art. L. 225-101). Il s’agit de rendre inefficace les montages consistant pour un fondateur à vendre (sans versement immédiat du prix) un bien à la société, et d’augmenter consécutivement son capital, cette augmentation étant libérée par compensation avec la créance du vendeur sur la société.

En dernier lieu, il est à noter que le fait de ne pas libérer les actions de numéraire d’au moins la moitié, ou le fait de ne pas intégralement libérer intégralement les actions d’apports (résultant d’apport en nature) avant l’immatriculation au RCS interdit aux fondateurs et aux dirigeants d’émettre ou de négocier des actions. S’ils procèdent à une telle émission ou négociation, ils s’exposent à une peine de 150 000 euros d’amende, laquelle est doublée lorsque les actions dont l’objet d’une offre au public (C. com., art. L. 242-1). De même, un actionnaire qui n’aurait pas libéré la moitié de ses apports ne peut pas négocier des actions de numéraire, au risque d’encourir une peine de 150 000€ d’amende (C. com., art. L. 242-3).

b. La représentation du capital : les actions

En contrepartie de leurs apports, les apporteurs se voient remettre des actions. Toutefois, en tant que titres représentant un droit de créance des associés sur la société, ces actions n’existeront, en tant que telles, qu’au jour de l’immatriculation de la société, et ce n’est qu’à ces date que les apporteurs deviendront actionnaires. Dans la période courant entre l’apport et l’immatriculation, les apporteurs sont de simples créanciers d’un débiteur à naître… Ainsi à compter de l’immatriculation, les actions sont émises par la société, qui va les inscrire sur un compte tenu au nom de leur titulaire. Cette inscription en compte permet de prouver la qualité d’actionnaire (C. com., art. L. 228-1 ; CMF, art. L. 211-1 et s.).Les actions sont dotées d’une valeur nominale exprimée en euro. La détermination de cette valeur nominale peut avoir lieu de deux façons différentes. D’une part, il peut s’agir d’une valeur théorique, égale au capital divisé par le nombre de titres de capital (on dit qu’il s’agit alors de titres de quotité) lorsque les statuts n’indiquent pas cette valeur. D’autre part, les statuts peuvent déterminer la valeur nominale des actions (C. com., art. L. 228-8) et prévoir des valeurs nominales différentes selon les catégories d’actions. La seule limite est qu’il est impossible que la valeur totale des actions émises soit inférieure à la valeur nominale théorique totale.

Les actions ainsi émises vont permettre de connaître la part de chacun des actionnaires dans le capital, et de préciser l’étendue de leurs droits financiers et politiques, tels qu’ils seront précisés dans les statuts.

Attention : lorsque l’assemblée générale délibère sur l’approbation d’un apport en nature, les actions de 10

l’apporteur ne sont pas prises en compte pour le calcul de la majorité. L’apporteur n’a voix délibérative, ni pour lui-même ni comme mandataire (C. com., art. L. 225-10).

C. com., art. L. 225-14.11

Une peine d’emprisonnement de 5 ans, et une amende de 9000€ serait alors encourue. C. com., art. L. 12

242-2 4°. Cette sanction est applicable à «  toute personne » et donc par conséquent, aux commissaires aux apports eux-mêmes.

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise.

3. La signature des statuts

Une fois le capital constitué, les apports en nature évalués et les fonds déposés , les statuts 13 14

peuvent être signés par les associés fondateurs (C. com., art. L. 225-15). Cette signature cristallise leur consentement à l’acte juridique qu’est le contrat de société, et permet notamment la reprise par la société au jour de l’immatriculation, des actes accomplis pour le compte de la société en formation, et annexés aux statuts.

Si d’aventure la société n’était pas constituée (signature des statuts) ou immatriculée dans les 6 mois à compter du dépôt des fonds, les souscripteurs pourraient demander en justice la nomination d’une mandataire chargé de retirer les fonds apportés pour les leur restituer (C. com., art. L. 225-11).

4. La désignation des dirigeants

Pour mener à bien les dernières formalités et obtenir l’immatriculation de la société, il convient, soit dans les statuts directement, soit à l’occasion d’une décision des administrateurs réunis pour l’occasion, de désigner les dirigeants de la SA, c’est-à-dire un président et un directeur général.

5. Les formalités de publicité / démarches administratives

Il convient en dernier lieu de réaliser un certain nombre de démarches administratives. Plus particulièrement, il convient : - d’enregistrer les statuts à la recette des impôts ;- de publier une annonce dans un journal habilité ;- de déposer les statuts et un ensemble de documents au greffe du tribunal de commerce pour

obtenir l’immatriculation de la SA au registre du commerce et des sociétés (RCS) ;- d’obtenir la publication de la constitution au Bulletin officiel des annonces civiles et

commerciales (BODACC).

L’immatriculation obtenue, un certificat d’immatriculation est remis aux dirigeants (appelé « extrait K-Bis »), permettant ainsi l’accès à la vie juridique de la société. Les fonds déposés peuvent être utilisés.

Section II. La direction et l’administration de la SA

La SA se distingue de toutes les autres formes sociales en ce que le Code de commerce lui dédie deux types d’organisation pour la direction et l’administration. La première est dite « moniste » et s’articule autour d’un organe principal, le conseil d’administration (A), tandis que la second est dite dualiste, et s’organise autour de deux organes : le directoire et le conseil de surveillance (B).

A. La SA à conseil d’administration

Le régime juridique applicable aux SA à conseil d’administration est prévu aux articles L. 225-17 à L. 225-56 du Code de commerce. Si le conseil d’administration (1) constitue bien l’organe principal de la SA, il ne faut pas occulter toutefois la présence d’une direction générale (2), qui en procède. Il est vrai qu’historiquement (dans la loi de 1966 par exemple), la direction générale de la SA était confiée de droit au président du conseil d’administration (on parlait alors de Président-Directeur Général, le fameux « PDG »). Mais depuis 2001 et pour tenir compte de la pratique internationale, le droit français autorise les sociétés à « dissocier » les fonctions d’administration et de direction : le président du conseil d’administration et le directeur général peuvent être des personnes

Le dossier de formalités doit ainsi comprendre le rapport du commissaire aux apports.13

Le dossier de formalités devra également comprendre le certificat du dépositaire des fonds.14

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. différentes (C. com., art. L. 225-51-1). Pour faire le tour de la question, il conviendra en dernier lieu d’évoquer les règles relatives à la responsabilité de ces différents dirigeants (3).

1. Le conseil d’administration

Etudions successivement la composition du CA (a), le statut des administrateurs (b) et leurs attributions (c), avant de s’intéresser au président du CA (d) et de dire quelques mots sur le fonctionnement du CA (e).

a. Composition

- Qui nomme les administrateurs ?

Sauf pour les premier administrateurs, qui sont désignés dans les statuts (C. com., art. L. 225-16), les membres du CA sont nommés par l’assemblée générale des actionnaires (constitutive ou ordinaire en cours de vie sociale) pour une durée de 6 ans maximum (mais cette durée est prévue dans les statuts) . Ils sont rééligibles, sauf si les statuts prévoient le contraire. Leur mandat se 15

termine par l’arrivée du terme, mais aussi par diverses autres causes : la démission , la 16

révocation, qui peut être décidée à tout moment et sans motif (« ad nutum ») par les actionnaires réunis en AGO (C. com., art. L. 225-18), la perte de certaines qualités requises (âge maximal), la disparition de la société, etc .

- Combien d’administrateurs doivent être désignés ?

Il appartient aux statuts de prévoir le nombre d’administrateurs composant le CA, tout en respectant un plancher de 3 administrateurs et un plafond de 18 membres (C. com., art. L. 225-17) et en recherchant une représentation équilibrée des femmes et des hommes . 17 18

Le Code de commerce contient des dispositions permettant d’ajuster cette composition, lorsqu’en cas de décès ou démission d’un ou plusieurs des administrateurs, le nombre des administrateurs devient inférieur au minimum légal ou au minimum statutaire (C. com., art. L. 225-24). Cette cooptation provisoire doit alors être ratifiée par la plus prochaine assemblée générale ordinaire.

Toute nomination réalisée en violation des règles précitées est nulle, à l’exception de celles auxquelles il peut être procédé par voie de cooptation (C. com. art. L. 225-18).

- Qui peut être désigné comme administrateur ?

C. com., art. L. 225-18.15

A condition que celle-ci ne soit pas décidée dans l’intention de nuire à la société. Auquel cas 16

l’administrateur démissionnaire s’exposerait à verser des dommages et intérêts pour réparer le préjudice subi.

Dans certaines hypothèses de restructuration comme les fusions, le nombre d’administrateurs peut être 17

porté à 24 pendant une durée maximum de 3 ans (C. com., art. L. 225-95). Dans les plus grandes sociétés anonymes (sociétés cotées ou celles employant 500 salariés, et 18

présentant un chiffre d’affaires ou un total de bilan d’au moins 50 millions d’euros), c’est une exigence de parité qui est prévue à l’article L. 225-18-1 (dont l’application a été différée dans le temps jusqu’à 2017) du Code de commerce : la proportion de chaque sexe ne peut être inférieure à 40%. Le conseil dispose de 6 mois pour régulariser sa composition si en cas de vacance de l’un ou plusieurs de ses membres, la répartition des sexes n’est plus conforme (C. com., art. L. 225-24). Les nominations intervenues en violation de cette règle de répartition et n’ayant pour effet de remédier à l‘irrégularité de la composition du conseil sont nulles. Les décisions prises par le conseil ainsi irrégulièrement composé ne sont toutefois pas susceptibles de nullité. En revanche le versement des jetons de présence est suspendue tant que la composition du conseil est irrégulière (C. com., art. L. 225-45 al. 2).

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. Les administrateurs peuvent être désignés parmi des personnes physiques ou des personnes morales , en considération d’un certain nombre de critères laissés à l’appréciation des 19

actionnaires (âge, références, réputation, expertise, expérience, etc.).

Les statuts peuvent imposer que chaque administrateur soit propriétaire d’un nombre d’actions 20

qu’ils déterminent (C. com., art. L. 225-25). Si la qualité d’actionnaire vient à être perdue en cours de mandat, ou si l’administrateur n’est plus propriétaire du nombre d’actions requis, il est réputé démissionnaire d’office s’il n’a pas régularisé sa situation dans le délai de 6 mois. Si les statuts 21

n’imposent pas cette qualité d’actionnaire, l’assemblée générale peut donc tout à fait désigner une personne sélectionnée hors de la société, pour ses compétences par exemple.

Une limite d’âge peut également être prévue par les statuts pour l’exercice des fonctions d’administrateur, s’appliquant soit à la totalité du conseil soit à un pourcentage de ses membres (C. com., art. L. 225-19). Si les statuts ne prévoient rien à ce sujet, le code de commerce qui fait office de disposition supplétive (qu’il est donc facile de rendre sans effet en modifiant les statuts pour s’adapter éventuellement à l’âge des administrateurs en fonction), indique que le conseil ne peut pas être composé pour plus d’un tiers, par des administrateurs ayant plus de 70 ans, sous peine de nullité. Les administrateurs ayant dépassé l’âge statuaire ou légal sont réputés démissionnaires d’office.

En outre, il est prévu trois cas de figure dans lesquels les administrateurs doivent avoir la qualité de salarié. D’une part, dans les sociétés cotées, lorsque l’actionnariat salarié représente plus de 3% du capital social, un ou plusieurs administrateurs doivent être élus par les actionnaires, parmi les salariés actionnaires (C. com., art. L. 225-23). Ces administrateurs ne sont pas pris en compte pour le calcul du plafond du nombre d’administrateurs composant le CA. D’autre part, il peut être stipulé (ce n’est qu’une faculté) dans les statuts, que le CA comprend, en outre, des administrateurs élus par le personnel de la société ou de ses filiales françaises (C. com., art. L. 225-27). Il peut en être désigné 4 au maximum (5 dans les sociétés cotées), sans excéder le tiers du nombre des autres administrateurs. Ceux-là non plus ne sont pas pris en compte pour calcul du nombre minimal ni maximal d’administrateurs, ni pour la détermination de la parité homme-femme. Enfin, l’article L. 225-27-1 du Code de commerce prévoit (outre les administrateurs déjà présentés), que des administrateurs dont le rôle est de représenter les salariés doivent être désignés dans les plus grandes sociétés et leurs filiales (qui emploient au total au moins 2000 salariés permanents en France, ou 5000 en France et à l’étranger). Ils ne sont pas pris en compte pour la détermination du nombre minimal ni maximal d’administrateurs, ni pour la détermination de la partie homme-femme.

Pour boucler le propos sur la composition du CA, il faut évoquer la question du cumul des mandats. Afin qu’ils puissent se consacrer correctement à leur mission, le législateur prévoit que les administrateurs personnes physiques ne peuvent pas appartenir simultanément à plus de 5 conseils d’administration de SA ayant leur siège social sur le territoire français (C. com, art. L. 225-21). Cette règle a une portée relativement limitée : elle n’est pas applicable aux personnes morales (qui peuvent cumuler sans limite) ; les mandats exercés à l’étranger ne sont pas pris en compte. Par ailleurs des dérogations assez nombreuses sont prévues, dans le cadre des groupes de sociétés (afin de ne pas entraver la constitution de ceux-ci) : ne sont pas pris en compte (et peuvent donc être cumulés sans limite) les mandats d’administrateurs exercés par une personne physique dans les sociétés contrôlées (au sens de l’article L. 233-16 du Code de commerce) par la société dans laquelle elle est déjà administrateur ; de même, une personne physique peut exercer assez largement plusieurs mandats dans des sociétés non cotées et contrôlées (au sens de

Dans ce dernier cas, il faudra alors désigner un représentant permanent, soumis aux mêmes conditions, 19

obligations et responsabilités civile et pénale que tout administrateur (C. com., art. L. 225-20). Rien n’interdit toutefois au candidat à un poste d’administrateur d’être propriétaire temporairement de ses 20

actions en exécution d’un contrat de prêt de consommation (C. civ., art. 1892 et s.) durant le temps du mandat.

Cass. com., 7 juin 2001, n° 10-17-732, Bull. Joly sociétés, 2012, §3, p. 22, note F.-x. Lucas.21

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. l’article L. 233-16 du Code de commerce) par une même société (sans être administrateur dans cette dernière par ailleurs) : cinq mandats d’administrateurs ainsi exercés, comptent pour un seul.

Enfin, le fait d’occuper par ailleurs d’autres fonctions dirigeantes dans une société vient réduire d’autant le nombre de poste qu’il est possible d’occuper en qualité d’administrateur. En effet, un plafond global de 5 mandats (C. com., art. L. 225-94-1) s’applique en cas d’exercice simultané de mandats d’administrateurs, de membre du conseil de surveillance, de directeur général, de directeur général unique, de membre du directoire, de SA ayant leur siège social en France. Seuls les mandats de directeur général et administrateur dans la même société comptent pour 1 mandat. Ce plafond global est d’ailleurs réduit à 3 mandats «  exécutifs  » (DG, membre du directoire, directeur général unique) dans les plus grandes sociétés (sociétés cotées et leurs filiales employant au moins 5000 salariés en France ou au moins 10 000 en France et à l’étranger). Par dérogation, ne sont pas pris en compte les mandats d’administrateurs ou de membre du conseil de surveillance dans les sociétés qui sont contrôlées (au sens de l’article L. 233-16 du Code de commerce) par la société dans laquelle est exercé un mandat. De même, ne sont pas pris en compte les mandats d’administrateurs ou de membre du conseil de surveillance exercés par le DG, les membres du directoire ou le directeur général unique, des sociétés dont l’activité principale est d’acquérir ou de gérer des participations (au sens de l’article L. 233-2 du Code de commerce : participations représentant entre 10 et 50% du capital), dans les sociétés qui constituent des participations.

Toute personne se trouvant en infraction avec la législation relative au cumul des mandats doit se démettre de l’un des ses mandats ou du mandat en cause dans les trois mois de sa nomination ou de l’événement ayant entrainé la disparition d’une des conditions justifiant un cumul dérogatoire. A l’expiration du délai, elle est réputée s’être démise du nouveau mandat ou du mandat en cause et doit restituer les rémunérations perçues. Cette composition irrégulière de l’orage visée n’affecte toutefois la validité des décisions qui auraient pu être prise en présence du mandataire cumulard (C. com., art. L. 225-21 et L. 225-94-1)

Il est à noter en tout dernier lieu que ne peuvent pas être administrateurs les personnes interdites de gérer une activité commerciale ou qui ont fait l’objet d’une faillite personnelle, de même que certains fonctionnaires, les parlementaires, les officiers ministériels, les auxiliaires de justice (à l’exclusion des avocats et des notaires, mais à certaines conditions).

b. Statut des administrateurs

Les administrateurs de société ne sont ni salariés, ni commerçants, ni des dirigeants , et ne 22

déficient d’aucune protection sociale attachée à ces qualités. Ils n’assument pas de fonction de gestion. Sauf lorsqu’ils cumulent par ailleurs la fonction de salariés, les administrateurs ne reçoivent en principe aucune rémunération de la société (C. com., art. L. 225-44) et toute clause ou décision contraire est nulle. L’assemblée générale des actionnaires peut toutefois leur allouer, en rémunération de leur activité, à titre de «  jetons de présence  », une somme fixe annuelle. Déterminée sous forme d’enveloppe globale annuelle, la répartition des jetons de présence est déterminée de façon discrétionnaire par le conseil d’administration (C. com., art. L. 225-45). D’autres sommes peuvent par ailleurs être versées aux actionnaires, au titre par exemple du remboursement des frais de déplacement (C. com. art. R. 225-33) ou de missions ponctuelles spécialement confiées à un administrateur (négociation d’un contrat, etc.).

Fiscalement, les jetons de présence doivent être déclarés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers (CGI, art. 117 Bis). La société doit pour sa part porter le montant des sommes

Sauf en matière de procédures collectives : Cass. com., 31 mai 2011, n° 09-13975, Bull. Joly sociétés 22

2011, §405, p. 817, note B. Saintourens ; JCP E 2011, n° 1655, note A. Couret, B. Dondero.�11

Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. versées en charges d’exploitation, et ne peut les déduire de son résultat imposable que dans la limite des 5% de la moyenne des rémunérations les plus importantes de la société (CGI, art. 210 sexies).

Il est à noter enfin qu’un administrateur peut cumuler cette fonction avec un contrat de travail dont il bénéficie déjà dans la société (ce qui lui permettra notamment de continuer à profiter du statut fiscal et social applicable aux salariés et de certaines mesures de protection : indemnités de licenciement). Des conditions sont toutefois prévues pour empêcher toute tentative de contrat de travail fictif : un salarié ne peut être nommé administrateur que si son contrat de travail correspond à un emploi effectif (sérieux, sincère et correspondant à des fonctions techniques ; avec un lien de subordination véritable vis-à-vis de l’employeur, la société). Il faudra par ailleurs s’assurer que le nombre d’administrateurs liés à la société par un contrat de travail n'excède pas le tiers des administrateurs en fonction (C. com., art. L. 225-22). Si ces conditions sont respectées, le contrat de travail peut être maintenu. A défaut, la nomination en qualité d’administrateur est en principe nulle, sauf à considérer que le contrat de travail est suspendu pendant la durée du mandat. Les 23

règles sont un peu plus restrictives lorsque l’on se situe dans l’hypothèse inverse (C. com., art. L. 225-21-1), celle dans laquelle un administrateur, déjà en poste, souhaite devenir par ailleurs salarié. C’est en principe interdit , sous peine de nullité absolue , sauf dans les micro, petites et 24 25

moyennes entreprises et à la condition - toujours - que le contrat de travail corresponde à un 26

emploi effectif. Ces règles sont applicables sans exception au président du conseil.

c. Attributions

A titre de pouvoirs généraux, le conseil d’administration a pour mission de déterminer les orientations de l’activité de la société de veiller à leur mise en oeuvre (C. com., art. L. 225-35). Il peut ainsi se saisir de toute question intéressant la bonne marche de la société et règle par ses délibérations les affaires qui la concernent. Il procède aux contrôles et vérifications qu’il juge opportuns. Plusieurs limites viennent encadrer l’activité du conseil d’administration : - il doit agir conformément à l’intérêt social ; - il doit agir conformément à l’objet social ; 27

- Il doit agir conformément aux statuts et respecter les éventuelles clauses limitatives de pouvoirs ; 28

Cass. soc., 13 juin 2006, RJDA, 10/2006, n° 1026. La chambre sociale de la Cour de cassation, 23

considère qu’à défaut de convention stipulant expressément le maintien du contrat de travail, celui-ci est suspendu pendant la durée du mandat. Le salarié siégeant au conseil est alors protégé : malgré sa révocation de son poste d’administrateur, il pourra retrouver son emploi, quitte éventuellement à être licencié (dans le respect des règles du droit du travail), si la société souhaite définitivement se passer de lui.

On tire cette conclusion de l’analyse des dispositions des articles L. 225-44 (aucune rémunération ne 24

peut être versée aux administrateurs autres que celles prévues au titre de leur mandat) et L. 225-22 (qui prévoit seulement l’hypothèse inverse : un salarié peut être nommé administrateur).

Cass. com., 21 févr. 2006, RJDA, oct. 2006, n° 1044. V. pour une hypothèse de fraude : Cass. soc., 18 25

mai 2005, RJDA, 11/2005, n° 1243. C’est-à-dire celles disposant d’un effectif salarié inférieur à 250 personnes, et ne dépassant pas l’un des 26

deux critères suivants : 43 millions d’euros au total du bilan, ou 50 millions d’euros de chiffre d’affaires hors taxes (Art. 2 de l’annexe à la recommandation 2003/361/CE de la Commission du 6 mai 2003, concernant la définition des micro, petites et moyennes d’entreprises).

La société reste toutefois engagée vis-à-vis des tiers par les actes du conseil d’administration qui ne 27

relèvent pas de l’objet social, à moins qu’elle prouve que le tiers savait que l’acte dépassait l’objet social, ou qu’il ne pouvait pas l’ignorer compte tenu des circonstances (la publication des statuts ne suffit pas à apporter à cette preuve).

La société reste toutefois engagée vis-à-vis des tiers (de bonne comme de mauvaise foi) par les actes du 28

conseil d’administration pris en violation des clauses limitatives de pouvoirs.�12

Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. - il ne peut pas s’approprier les pouvoirs expressément attribués aux assemblées générales

d’actionnaires, sous peine de nullité de ses actes. Il s’agit ici du principe de hiérarchie et de spécialisation des organes ; 29

Le conseil d’administration dispose en outre de nombreuses prérogatives propres (qu’aucun autre organe ne peut exercer), éparpillées dans le Code de commerce, et de différents degrés. On peut citer des pouvoirs : - de nomination, révocation, et fixation de la rémunération des dirigeants ; 30

- d’autorisations (conventions réglementées conclues entre les dirigeants et la société ; 31

cautions, avals et garanties ) ; 32

- de convocation des assemblées générales et fixation de l’ordre du jour ; 33

- de décision (transfert de siège social en France, sous réserve de ratification par l’assemblée générale ; émission d’emprunt obligataire ) ;34 35

- établissement des comptes sociaux et proposition d’affectation du résultat ;36

- rédaction de nombreux rapports : en particulier le rapport de gestion présenté à l’assemblée 37

générale annuelle, mais aussi des rapports spéciaux à l’occasion de certains opérations (modification du capital, opérations de restructurations etc.).

- …

Le conseil n’est donc pas un représentant légal de la société et ne peut pas, par exemple, engager une action en justice.

Notons en dernier lieu que pour les aider dans la réalisation de ces différentes missions et préparer leurs travaux, les conseils d’administration peuvent constituer des «  comités  ». Composés d’administrateurs, on trouve surtout ces comités de travail dans les sociétés cotées : comité de rémunération, comités stratégiques, comité de sélection des dirigeants, comités d’audit .38

d. Le président du conseil d’administration

Le président du conseil d’administration est élu (et indéfiniment rééligible) par le conseil d’administration, parmi ses membres et pour la durée de son mandat, en tenant compte des règles de cumul applicables aux administrateurs (C. com., art. L. 225-47). A peine de nullité de la nomination, il doit nécessairement être une personne physique et ne pas avoir plus de 65 ans, à moins que les statuts ne prévoient le contraire (C. com., art. L. 225-48). Si en cours de mandat, le président atteint la limite d’âge statutaire ou, à défaut, d’âge légal, il est réputé démissionnaire d’office. En cas d’empêchement temporaire ou de décès, le président est remplacé par un administrateur délégué dans ses fonctions, jusqu’à son retour, ou l’élection d’un nouveau président (en cas décès).

En qualité d’administrateur, le président est naturellement susceptible de se voir verser des jetons de présence, mais, le Code de commerce prévoit aussi que le conseil peut lui attribuer une rémunération. Cette rémunération, versée en contrepartie de l’exécution des fonctions de

Cass. civ., 4 juin 1946, aff. Motte, JCP 1947, II, 3518, note D. Bastian.29

Président du conseil (C. com., art. L. 225-47) ; directeur général (C. com., art. L. 225-51 1) ; directeurs 30

généraux délégués (C. com., art. L. 225-53). C. com., art. L. 225-38.31

C. com., art. L. 225-35.32

C. com., art. L. 225-103.33

C. com., art. L. 225-36.34

C. com., art. L. 228-40, sauf si les statuts réservent ce pouvoir à l’assemblée générale, ou si celle-ci 35

décide de l’exercer. C. com., art. L. 232-1.36

C. com., art. L. 225-102 et L. 225-102-1.37

Celui-là est d’ailleurs obligatoire dans les sociétés cotées (C. com., art. L. 823-19).38

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. président, peuvent être accompagnées d’autres gratifications financières : stock-options , 39

attributions d’actions gratuites, etc.

Dans les sociétés cotées, de nouvelles règles ont été insérées à l’article L. 225-37-2 du Code de commerce, dans le cadre d’une loi du 9 décembre 2016 , pour redonner du pouvoir aux 40

actionnaires dans la détermination de la rémunération des dirigeants (procédure issue du droit anglo-saxon, dite de «  say on pay  »). Le texte prévoit que, dorénavant , les principes et les 41

critères de détermination, de répartition et d’attributions d’éléments fixes, variables et exceptionnels composant la rémunération totale et les avantages de toute nature attribués aux dirigeants en raison de leur mandat, doivent faire l’objet d’une résolution annuelle soumise à l’approbation de l’assemblée générale ordinaire des actionnaires. Les projets de résolutions établis par le conseil sont présentés dans un rapport joint au rapport de gestion. Le conseil d’administration sera ainsi tenu par les orientations définies préalablement par l’assemblée générale (on parle de décision ex ante) : les rémunérations ne peuvent être versées qu’avec l’accord de l’assemblée générale. Toute modification des éléments de rémunération, et tout renouvellement de mandat implique également l’approbation de l’assemblée générale. A défaut d’approbation, c’est la rémunération entièrement approuvée antérieurement qui continue de s’appliquer . 42

Fiscalement et socialement, le président du conseil bénéficie du régime applicable aux salariés : il peut déduire ses frais professionnels à hauteur de 10% ou opter pour une déclaration de ses frais réels ; il profite de la même couverture sociale (à l’exclusion toutefois de l’assurance chômage). Les actions qu’il détient sont considérés comme des biens professionnels au titre de la détermination de l’ISF (CGI, art. 885 O bis).

Il peut être mis aux fonctions de président du conseil de plusieurs façons : fin du mandat, décès, limite d’âge, démission, dans les mêmes conditions que pour tout administrateur. Il peut également être révoqué ad nutum par le conseil (C. com., art. L. 225-47 al. 3), ou par l’assemblée générale 43

(puisque celle-ci peut révoquer à tout moment les administrateurs). Son départ peut donc être décidé sans que des motifs valables ne soient exigés et ce, sans préavis ni indemnités. La jurisprudence vient toutefois apporter la nuance : les juges considèrent qu’on ne peut pas tendre une embuscade au président du conseil en le prenant à défaut à l’occasion d’un conseil ou d’une assemblée générale. Avant que sa révocation soit prononcée, le président doit avoir eu connaissance des motifs de son éviction, avoir été mis en mesure de présenter ses observations et de discuter de façon contradictoire ces motifs. A défaut, il pourrait obtenir la réparation du préjudice subi sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle (C. civ., art. 1240). Il en irait 44

C’est-à-dire la possibilité de souscrire à un prix déterminé à l’avance à une augmentation de capital 39

future. Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016.40

Jusqu’ici la procédure de « say on pay » n’était prévue que dans le Code de gouvernement d’entreprise 41

AFEP-MEDEF (art. 26) : l’assemblée générale jouait un rôle purement consultatif, et seulement «  après coup », sur la rémunération due ou attribuée au titre de l’exercice clos. Le vote (approbation ou rejet de la rémunération) des actionnaires était toutefois de peu d’effet sur la décision finale du conseil d’administration. Cela a permis par exemple au CA de Renault de maintenir la rémunération de son P-DG Carlos Ghosn, malgré un vote consultatif à 54,12% (ce qui doit être analysé comme un rejet) par les actionnaires en avril 2016.

A défaut de principes et critères déjà approuvés, la rémunération est déterminée conformément à celle 42

attribuée au titre de l’exercice précédent. En l’absence de de rémunération au titre de l’exercice précédent, elle est attribuée conformément aux pratiques existant au sein de la société.

La règle est d’ordre public : toute disposition statutaire ou extra-statutaire (mandat à durée déterminée ; 43

respect d’un préavis ; autorisation préalable d’un organe de la société ; versement d’une indemnité très importante etc…) dissuadant la société de révoquer son président serait réputée non écrite.

Cass. com., 24 janv. 1998, JCP E, I, 1306, n° 6 obs. A. Viandier et J.-J. Caussain ; Cass. com., 14 mai 44

2013, n° 11-22845, PB, Bull. Joly sociétés 2013, p. 634, note A. Gaudemet. �14

Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. de même en cas de révocation abusive (circonstances vexatoires, injures, violence, diffamation, atteinte à l’honneur, etc).De façon beaucoup plus sereine, il peut être décidé à l’avance et de façon conventionnelle que la révocation du président impliquera le versement par la société d’une indemnité de départ (« parachute doré ») ou de «  retraites chapeaux » (versement régulier d’une somme d’argent à titre de retraite complémentaire) à son ancien dirigeant. Cette décision implique le respect de la procédure des conventions réglementées (C. com., art. L. 225-38 et s.) et donc l’autorisation préalable du conseil d’administration et l’approbation de l’assemblée générale. Dans les sociétés cotées, ces indemnités de départ et ces « retraites chapeaux » sont par ailleurs subordonnées au respect de conditions liées aux performances du bénéficiaire au regard de celles de la société dirigée (C. com., art. L. 225-42-1).

En dernier lieu, évoquons les pouvoirs du président du conseil. L’article L. 225-50 du Code de commerce prévoit qu’il organise et dirige les travaux du conseil. C’est lui qui le convoque, fixe l’ordre du jour, prépare les réunions et assure leur discipline.

Il rend compte chaque année de l’activité du conseil à l’assemblée générale : nombre de réunions, durée des réunions, membres présents ou représentés, questions traitées, etc. Dans les sociétés cotées, un rapport spécial comprenant des informations plus détaillées doit être réalisé : composition du conseil, application de principe de parité hommes-femmes, conditions de préparation et d’organisation des travaux, procédure de contrôle interne et de gestion des risques, principes et règles de détermination des rémunération des dirigeants, etc… (C. com., art. L. 225-37 al. 6).

Il veille par ailleurs au bon fonctionnement des organes de la sociétés, et s’assure en particulier, que les administrateurs sont en mesure de remplir leurs fonctions, notamment quant à l’information qui leu est due. Il intervient à ce titre en tant que rouage dans un bon nombre de procédures (conventions réglementées , questions des actionnaires dans le cadre de l’expertise de gestion 45 46

ou en cas de menace sur la continuité de l’entreprise , etc.).47

e. Fonctionnement du conseil

Le conseil d’administration est un organe délibératif et collégial : aucun administrateur ne peut intervenir individuellement pour exercer son pouvoir ni représenter la société.

Il appartient aux statuts de prévoir les règles de convocation et de délibération du conseil (C. com., art. L. 225-36-1). Ce faisant, c’est au président qu’il appartient normalement de convoquer le conseil et d’en fixer l’ordre du jour, selon la périodicité qu’il juge opportune (sauf spécifications statutaires). Il peut être tenu de convoquer le conseil, sur demande du directeur général, ou si le conseil ne s’est pas réuni depuis de 2 mois, sur demande du tiers des membres du conseil.

Le conseil ne délibère valablement que si la moitié au moins des membres sont présents (quorum de la moitié). Le nombre de membres représentés n’est pas pris en compte pour le calcul de ce quorum. Les statuts ne peuvent pas aménager cette règle (C. com., art. L. 225-37).

Les décisions sont prises à la majorité des membres présents ou représentés. Les statuts peuvent aménager cette règle, mais seulement pour prévoir une majorité plus forte. Chaque administrateur dispose d’une seul voix (vote par tête) et le président dispose d’une voix prépondérante en cas de partage (les statuts peuvent prévoir le contraire).

C. com., art. L. 225-38.45

C. com., art. L. 225-231.46

C. com., art. L. 225-232.47

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. Pour tenir compte de l’éventuel éloignement géographique des différents membres du conseil, ou d’emplois du temps difficiles à concilier, le règlement intérieur du conseil peut prévoir la tenue de réunions par visioconférence. A condition que les moyens mis en place garantissent l’identification et la participation effective des administrateurs (C. com., art. R. 225-21), ceux-ci sont alors réputés présents et comptés pour le calcul du quorum et de la majorité.

Un registre de présence est tenu (C. com., art. R. 225-20) et les délibérations doivent être constatées par procès-verbaux du président, sous peine de nullité. Les délibérations sont consignées dans un registre (C. com., art. L. 235-14 et R. 225-22).Des membres extérieurs peuvent participer : deux délégués du comité d’entreprise quand la société est pourvue d’une telle institution représentative du personnel (celles qui emploient plus de 50 salariés) ; le commissaire aux comptes, quand le conseil examine ou arrête les comptes 48

annuels ou intermédiaires (C. com., art. L. 823-17).

Pour exercer au mieux leurs missions, les administrateurs bénéficient d’un droit à l’information, dont la réalisation repose sur le président du conseil ou le directeur. Ceux-ci doivent en effet communiquer à chaque administrateur, et en temps utile et sous peine de nullité des 49

délibérations , tous les documents et informations nécessaires à l’accomplissement de leur 50

mission (C. com., art. L. 225-35 al. 3) . 51

Notons enfin que les administrateurs et toute personne appelée à assister aux réunions du conseil sont tenus la discrétion à l’égard des informations présentant un caractère confidentiel et données comme telles par la président du conseil (C. com., art. L. 225-37).

2. La direction générale

Pour présenter la direction générale d’une SA, il faut s’intéresser à sa composition (a), au statut des dirigeants (b), ainsi qu’à leurs attributions (c).

a. Composition

La direction générale de la société est assumée soit par le président du conseil d’administration (on parle alors de P-DG, puisque les fonctions sont associées), soit par une personne physique (même tiers à la société) nommée par le conseil, qui prend le titre de directeur général (C. com., art. L. 225-51-1). Les deux fonctions sont dissociées. C’est le conseil d’administration qui choisi entre ces deux modalités d’exercice de la direction générale. Ce choix est mentionnée dans le rapport annuel présenté à l’assemblée générale, et fait l’objet d’une publicité au RCS ainsi que dans dans un journal d’annonces légales.

Le directeur général se voit appliquer les mêmes limites d’âge (65 ans max, sauf dispositions contraires des statuts) , sous peine de nullité de la nomination, ou de démission d’office si la 52

limite d’âge est atteinte en cours d’exercice.

On ne peut exercer en principe qu’un seul mandat de directeur général de SA ayant son siège social en France (C. com., art. L. 225-54-1) . Néanmoins, un 2ème mandat de directeur général 53

de SA peut être exercé dans une société contrôlée (au sens de l’article L. 233-16 du Code de

C. trav., art. L. 2323-62.48

Cass. com., 8 oct. 2002, JCP E 2003, 317, note A. Viandier.49

Cass. com., 8 oct. 2002, Bull. Joly sociétés 2003, §69, note D. Vidal.50

Ce droit a d’abord été reconnu par les juges, avant d’être consacré par le législateur : Cass. com., 2 juill. 51

1985, Cointreau, JCP E 1985, p. 14758, note A. Viandier) C. com., art. L. 225-54.52

C’est donc qu’un mandat à l’étranger peut être effectué, de même que dans une forme sociale différente 53

de la SA, même en France. �16

Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. commerce) par la société dont on est directeur général. De même un seul autre mandat de directeur général peut être exercé dans une société (sans distinction de forme) dès lors qu’elle n’est pas cotée.

Celui qui se trouve en infraction avec ces règles doit se démettre de l’un de ses mandats dans les 3 mois de sa nomination ou du mandat en cause dans les 3 mois de l’événement ayant entrainé la disparition de l’une des conditions dérogatoire à la règle du mandat unique. A défaut d’avoir démission dans les délais requis le directeur général est réputé démissionnaire du nouveau mandat ou du mandat en cause et doit restituer les rémunérations reçues.

Le directeur général peut proposer au conseil d’administration la nomination d’un ou plusieurs directeurs généraux délégués (5 max), qui auront pour mission de l’assister (C. com., art. L. 225-53). Ces directeurs généraux délégués bénéficient pour l’essentiel du régime juridique fiscal et social que celui du directeur général. L’étendue et la durée de leurs pouvoirs est toutefois déterminée par le conseil d’administration en accord avec le directeur général. Bien qu’ils n’aient que des pouvoirs «  délégués  », ils disposent, à l’égard des tiers des mêmes pouvoirs que le directeur général (C. com., art. L. 225-56 II).

b. Statut du directeur général

Ni commerçant , ni salarié , le directeur général est un mandataire social : il tient son pouvoir 54 55

d’un mandat, confié par les administrateurs, qui représentent les actionnaires.

Sa rémunération est fixée de façon préalable par le conseil d’administration dans les mêmes 56

cadres que celle attribuée au président du conseil, et en particulier pour les sociétés cotées, en application de la procédure de « say on pay » (renvoi à l’article L. 225-37-2). Les modalités de rémunération sont également les mêmes : partie fixe et partie variable (intéressement au résultat), avantages en nature, rémunération différée (actions gratuites, stock-options).

Le directeur général peut cumuler cette fonction avec un contrat de travail. Il faut toutefois distinguer deux circonstances différentes. S’il est administrateur, on retrouve les mêmes règles que précédemment (renvoi). S’il n’est pas administrateur, il semble que la seule condition applicable soit celle de la réalité de l’emploi occupé (selon les mêmes critères évoqués précédemment) et de son caractère subordonné , et le respect de la procédure des conventions 57

réglementées si le contrat de travail est conclu (ou modifié) après l’entrée en fonction de directeur général.

Fiscalement et socialement, le directeur général, est comme le président du conseil (Cf. supra), considéré comme un salarié et les actions qu’il détient sont considérées comme des biens professionnels au titre de l’ISF.

Enfin, précisons que la durée des fonctions de directeur général est fixée par le conseil d’administration et peut tout à fait différer de celle du mandat d’administrateur (s’il cumule les deux fonctions). Ces fonctions peuvent prendre fin par ailleurs par décès, démission et révocation. Cette révocation peut être prononcée à tout moment par le conseil d’administration . 58

Il possède pourtant certaines prérogatives reconnues aux commerçants : il est éligible à la Chambre de 54

commerce et au tribunal de commerce. Il est par ailleurs exposé à certaines sanctions en cas d’ouverture d’une procédure collective.

Le droit du travail n’est pas applicable au directeur général, sauf naturellement s’il cumule par ailleurs un 55

contrat de travail. Cass. com., 11 oct. 2005, JCP E2005, 1796, note H. Hovasse.56

En l’occurence, si le directeur général est par ailleurs actionnaire majoritaire, le lien de subordination fait 57

défaut. S’il s’agit d’un directeur général délégué, sa révocation doit être au préalable proposée par le directeur 58

général.�17

Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. Sauf s’il est aussi président (il reste alors révocable ad nutum), la révocation du directeur ne peut être effectuée sans juste motif (C. com., art. L. 225-55). Ainsi, à défaut de juste motif, des dommages et intérêts pourraient être alloués au dirigeant révoqué. Au demeurant, si la révocation est fautive ou abusive - mais indépendamment de l’existence ou non d’un juste motif - (circonstances brutales, injurieuses, vexatoires ; impossibilité de présenter sa défense, etc.), une indemnité peut être accordée au directeur général en réparation du préjudice subi . On retrouve 59

ici ce qui a été dit à propos du président du conseil. Il a va de même au sujet des indemnités de départ ou retraites chapeaux conventionnelles.

c. Attributions

Le directeur général est le véritable chef de l’entreprise et le seul représentant de la société à l’égard des tiers. Ainsi, le directeur général est investi des « pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société  » (C. com., art. L. 225-56). C’est à lui que revient la charge d’effectuer toutes opérations juridiques engageant la société : conclure de contrats, négocier des accords, agir en justice, etc. Il agit seul au quotidien pour assurer la gestion de la société. Néanmoins pour les décisions les plus importantes, il n’est pas exclu que les statuts ou le règlement intérieur imposent un travail collaboratif avec le conseil d’administration, lequel peut être amené à donner son avis sur certaines orientations stratégiques.

Sa mission s’exerce dans les limites connues (objet social ; principe hiérarchie et spécialisation 60

des organes ; limitations statutaires ).61

3. La responsabilité des organes d’administration et de direction

Les différents organes qui viennent d’être exposés peuvent voir engagées contre eux deux types de responsabilité : la responsabilité civile (a) et la responsabilité pénale (b).

a. La responsabilité civile

A titre préalable, notons que, du fait de l’écran de la personnalité morale reconnue à la société, les tiers cherchant à obtenir la réparation d’un préjudice causé par l’activité de cette société ne peuvent pas agir contre les organes d’administration ou de direction. Seule la société peut être recherchée en responsabilité . 62

Finalement la responsabilité des dirigeants et des administrateurs s’exerce seulement envers la société ou envers les associés, et à condition, naturellement, d’avoir commis des fautes.

Quelles fautes peuvent-elles leur être reprochées ? L’article L. 225-251 du Code de commerce prévoit que les administrateurs et les directeurs généraux sont responsables des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux SA, des violations des statuts, ou des fautes commises dans leur gestion. Cette responsabilité peut être solidaire (si elle est imputable à plusieurs dirigeants) ou individuelle (si elle est imputable à un seul dirigeant). Lorsque la responsabilité est solidaire, l’action peut être engagée contre l’un quelconque des acteurs, à charge pour celui qui est tenu de payer, de retourner contre les coresponsables. Le tribunal peut

V. par ex. Cass. com. 24 févr. 1998, rev. sociétés 1998, p. 571.59

La société reste toutefois engagée vis-à-vis des tiers par les actes du directeur général qui dépassent 60

l’objet social, sauf si le tiers savait que l’acte dépassait cet objet ou qu’il ne pouvait l’ignorer compte tenu des circonstances (la publication des statuts ne suffit pas à constituer cette preuve).

Ces limitations statutaires (par ex. une autorisation préalable du conseil) sont toutefois inopposables aux 61

tiers (même de mauvaise foi). A moins que les dirigeants n’aient commis une faut détachable de l’exercice de leurs fonctions sociales : 62

v. par ex. : Cass. com., 3ème civ., 10 mars 2016, n°14-15326, JSS n°93, 14 déc. 2016, p. 14, note M. Pedron, (défaut de souscription d’assurance décennale, constitutive d’une infraction pénale intentionnelle).

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. dans les mêmes circonstances, déterminer la part contributive de chacun dans la réparation du dommage. Il est à noter que chaque administrateur commet une faute, lorsque, par son action ou son abstention, il contribue à la prise d’une décision fautive par l’organe collectif auquel il participe, sauf à démontrer qu’il s’est comporté en administrateur prudent et diligent, notamment en s’opposant à la décision .63

Deux types d’actions peuvent être engagées.

La première action est dite « sociale » et vise à réparer le préjudice subi par la société du fait de la faute commise par ses dirigeants (caractérisée notamment par des pertes financières). Celle-ci peut être exercée soit ut universi, c’est-à-dire par un personne habilitée à représenter la personne morale et à défendre ses intérêts. Ce sera, le plus souvent, un nouveau dirigeant qui engagera une action à l’encontre d’un ancien dirigeant fautif, et depuis révoqué. L’action peut également être engagée ut singuli, c’est-à-dire par les actionnaires (individuellement ou dans le cadre d’une association s’ils agissent à plusieurs et à condition de représenter au moins 5% des droits de vote) . Les dommages et intérêts ainsi obtenus seront versés à la société. 64

La deuxième action est dite «  individuelle ». Celle-ci est celle qui est engagée par un actionnaire qui subi personnellement un préjudice, distinct du préjudice subi par la société (ce qui est en pratique assez difficile à démontrer).

Aucune clause des statuts ni vote en assemblée ne peut, à l’avance, éteindre une action en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général, ni la subordonner à l’avis préalable ou à l’autorisation de l’assemblée générale, ni impliquer une renonciation à l’exercice d’une telle action (C. com., art. L. 225-253).

Qu’elle soit sociale ou individuelle, l’action en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général doit être engagée dans les trois ans à compter du fait dommageable , ou s’il a 65

été dissimulé, dans les trois ans à compter de sa révélation (C. com., art. L. 225-254). Si le fait est qualifié de crime, l’action se prescrit par dix ans.

b. La responsabilité pénale

Outre le droit pénal commun (escroquerie, faux, abus de confiance, etc), le droit des sociétés comporte des dispositions répressives spéciales applicables aux administrateurs et aux directeurs généraux. Celles-ci sont prévues notamment aux articles L. 242-6 à L. 242-8 du Code de commerce.

On peut évoquer par exemple l’abus de biens sociaux, qui consiste pour le président, les administrateurs ou les directeurs généraux de « faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu’ils savent contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement » (C. com., art. L. 242-6, 4°). L’ABS est puni de 5 ans d’emprisonnement de 375 000€ d’amende. Des peines complémentaires peuvent être prévues (C. com., art. L. 249-1 : par ex. : interdiction de gérer une entreprise).

La même sanction est encourue par exemple pour le délit de présentation de comptes annuels ne donnant par une image fidèle. Il s’agit, pour les mêmes personnes, de publier ou présenter aux actionnaires des comptes annuels ne donnant pas une image fidèle du résultat des opérations de

Cass. com., 30 mars 2010, aff. du. Crédit Martiniquais, JCP E, 2010, p. 1416, note A. Couret.63

C. civ., art. 1843-5 ; C. com., art. L. 225-252.64

Date de l’opération ou date de la décision, même si le préjudice n’est apparu qu’après.65

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. l’exercice, de la situation financière et du patrimoine, en vue de dissimuler la véritable situation de la société (C. com., art. L. 242-6, 2°).

B. La SA à directoire et conseil de surveillance

Le deuxième mode de direction et d’administration est dualiste, car il s’articule autour de deux organes : un directoire (1) et un conseil de surveillance (2). Ce système a été calqué dans la loi de 1966 sur une formule existant en droit allemand. L’objectif majeur consistait alors à dissocier plus clairement les fonctions de direction (exercée par le directoire) de celles de contrôle confiées au conseil de surveillance), ces dernières n’étant pas efficacement assurées par les conseils d’administration. Ce n’est pourtant pas - et de loin - le mode de fonctionnement le plus fréquemment retenu dans les SA françaises, qui restent traditionnellement attachées à la conception moniste, en ce qu’elle est un peu plus facile à manier, et dans laquelle on peut désormais dissocier les fonctions de directeur général et de président du conseil. Pour autant, le système dualiste peut apporte un certain nombre d’avantages, notamment en matière de transmission de l’entreprise (le jeune dirigeant étant sous le contrôle des anciens au conseil de surveillance).

Pour sélectionner ce mode de fonctionnement, il convient de le préciser dans les statuts (C. com., art. L. 225-57). Ce choix, peut être fait en cours de vie sociale, comme son abandon, pour la forme moniste.

1. Le directoire

Exposons brièvement la composition (a) et les attributions (b) du directoire, puis les responsabilités des membres (c).

a. Composition

Le directoire est en principe une équipe de plusieurs membres, dont le nombre est fixé par les statuts sans pouvoir excéder 5 membres (C. com., art. L. 225-58), et jusqu’à 7 dans les sociétés cotées. Il est possible de ne nommer qu’un seul membre du directoire, dans les SA dont le capital est inférieur à 150 000€. Il prend alors le titre de directeur général unique. S’ils sont plusieurs, l’un d’eux prend le titre de président (c’est le conseil de surveillance qui lui confère cette qualité).

Les conditions de nomination sont pour ainsi dire calquées sur celles des directeurs généraux. Les membres du directoire sont nommés par le conseil de surveillance. Il doit d’agir de personnes physiques n’étant pas nécessairement actionnaires , ayant 65 ans au plus , le tout à peine de 66 67

nullité. Ils ne peuvent en revanche pas être sélectionnés parmi les membres du conseil de surveillance . Aucune cooptation n’est possible.68

On retrouve les règles de cumul applicables au directeur général : un seul mandat de membre du directoire est en principe possible, sauf pour un 2ème mandat dans une filiale (contrôlée au sens de l’article L. 233-16) ou un autre mandant dans une autre société non cotée . L’infraction à ces 69

règles est sanctionnée de la même façon .70

Ils sont nommés pour une durée prévue par les statuts pouvant aller de 2 à 6 ans. Dans le silence des statuts, cette durée est fixée par la loi à 4 ans . Ils sont indéfiniment rééligibles. En cas de 71

C. com., art. L. 225-59.66

Sauf stipulations contraire des statuts. Si le membre du directoire atteint la limite d’âge légal ou statutaire 67

en cours de mandat, il est réputé démissionnaire d’office. C. com. art. L. 225-60. C. com., art. L. 225-74.68

C. com., art. L. 225-67.69

C. com., art. L. 225-67 al. 3.70

C. com., art. L. 225-62.71

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. cessation prématurée des fonctions, un remplaçant est désigné, pour le temps qu’il reste à courir jusqu’au renouvellement du directoire.Leurs fonctions peuvent se terminer par le décès, la démission, l’atteinte de la limite d’âge, mais aussi par l’option pour la forme moniste. Ils peuvent naturellement être révoqués. Toutefois, il n’y a pas ici de parallélisme des formes avec la nomination car c’est l’assemblée générale qui les révoque, à moins que les statuts ne donnent cette compétence au conseil de surveillance (C. com.,art. L. 225-61).

Comme pour le directeur général, la révocation doit être prononcée avec un juste motif , sauf à 72

ouvrir droit à des dommages et intérêts (C. com., art. 225-61). En dehors de la question du motif, la solution déjà rappelée au sujet des mandataires sociaux révocables ad nutum est également applicable ici (respect du principe du contradictoire ; action en responsabilité en cas de circonstances vexatoires ou injurieuses).

La rémunération des membres du directoire est fixée dans l’acte de nomination par le conseil de surveillance selon les mêmes modalités que les directeurs généraux, et en appliquant la procédure de say on pay, si la société est cotée (C. com., art. L. 225-63 et L. 225-82-2).

Les membres du directoire bénéficient du même statut fiscal et social que les salariés, comme les président du conseil et le directeur général.

Enfin, notons que le cumul avec la qualité de salarié est possible, avant la nomination en tant que membre du directoire, comme après cette nomination (dans ce cas là néanmoins, il faudra se soumettre à la procédure des conventions réglementées) . Il est toutefois impératif que l’emploi 73

soit effectif et distinct des fonctions sociales, et qu’un lien de subordination soit présent.

b. Attributions

Le directoire est un organe collégial et délibératif. Les modalités de délibération et de prise de décisions sont laissées aux statuts, voire au règlement intérieur, ce qui confère une très grande souplesse à l’organisation du fonctionnement du directoire (C. com., art. L. 225-64) : fréquence des réunions, modalités de convocation, quorum et majorité. A la rigueur, on observe quelques obligations : la présence obligatoire d’un président du directoire (C. com., art. L. 225-59), la rédaction d’un procès-verbal de séance (C. com., art. L. 235-14) et la tenue d’un registre spécial (C. com., art. L. 238-4). A l’intérieur de ce collège, il n’est pas rare que des missions, des tâches, des domaines spécifiques, soient répartis, avec l’autorisation du conseil de surveillance, dans les mains de chaque membre du directoire en fonction de leurs compétences (C. com., art. R. 225-39). En tout état de cause, le directoire exerce la mission de gérer la société en tant que chef de l’entreprise : il est ainsi, comme le directeur général, « des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société » et dans les mêmes limites (objet social ; stipulations statutaires ; principe de hiérarchie et de spécialisation des organes) . Mais à la différence du 74

directeur général, le directoire jouit par ailleurs de toutes les fonctions qui sont ordinairement attribuées au conseil d’administration ou à son président : définition des orientations stratégiques de l’entreprise ; établissement et arrêté des comptes annuels ; convocation de l’assemblée générale et fixation de son ordre du jour ; rédaction des rapports destinés aux actionnaires ; transfert du siège social en France.

Par exemple : une mésentente entre membres du directoire (Cass. com., 10 févr. 2015, n° 13.27967, JCP 72

E 2015, 1463, note B. Dondero). C. com., art. L. 225-61 al. 2.73

C. com.,art. L. L. 225-64.74

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. En revanche, le pouvoir de représentation de la société à l’égard des tiers n’appartient qu’au président du directoire, ou également aux directeurs généraux s’il en désignés parmi les membres du directoire (C. com., art. L. 225-66).

c. Responsabilités

Dans la mesure où les membres du directoire exercent une fonction de gestion, ils sont responsables dans les mêmes termes que le directeur général, tant sur le plan civil que sur le plan pénal .75

2. Le conseil de surveillance

Nous pourrions certainement développer en reprenant point par point la composition et les attributions du conseil de surveillance . A la vérité une telle méthode nous imposerait de réécrire, 76

parfois mot pour mot ,ce qui a été dit à propos des membres du conseil d’administration. Effet, que ce soit au sujet de la composition du conseil , des conditions de nomination (si ce n’est que le 77 78

cumul avec la fonction de membre du directoire est interdit), de la procédure de nomination , de la 79

durée des fonctions et des causes mettant fin aux fonctions , les règles sont pour ainsi dire les 80 81

mêmes. Il n’en va d’ailleurs pas autrement en ce qui concerne fonctionnement du conseil de 82

surveillance, et le statut de ses membres. 83

Seuls les pouvoirs et les responsabilités des membres du conseil de surveillance connaissent une véritable spécificité.

En effet, le conseil de surveillance « exerce le contrôle permanent de la gestion de la société par le directoire » (C. com., art. L. 225-68). Pour y parvenir, il dispose de prérogatives importantes. Ainsi, il peut à tout moment, opérer des vérifications et contrôles qu’il juge opportuns, et se faire communiquer les documents qu’il estime nécessaire à l’accomplissement de sa mission. De même, le directoire doit lui remettre un rapport une fois par trimestre. Il présente à la clôture de chaque exercice ses observations sur le rapport annuel du directoire ainsi que sur les comptes de l’exercice. Il dispose par ailleurs d’autres pouvoirs plus spécifiques, au titre desquels on peut citer par exemple : il nomme les membres du directoire et fixe leur rémunération ; il choisi le président du directoire ; il autorise les conventions réglementées ; il autorise les conventions, aval et garanties,

C. com., Art. L. 242-30. 75

Pour plus de détails, consulter les articles L. 225-69 et s. du Code de commerce.76

Nombre des membres du conseil de surveillance, de la présence de représentant des actionnaires, de la 77

représentation équilibrée des hommes et des femmes et plus largement de la parité… Être actionnaire ou non, condition d’âge, cumul de mandat, présence de salariés élus au conseil, 78

possibilité pour une personne morale d’être membre du conseil, … Désignation dans les statuts pour les premiers, puis par l’assemblée générale. Possibilité de cooptation 79

en cas de défection en cours de vie sociale. 6 ans renouvelables indéfiniment. Il est notable toutefois que cette durée n’est pas calquée sur celle du 80

mandat des membres du directoire (l’assemblée générale peut néanmoins réajuster ces durées par le jeu des révocations).

Dont notamment les questions relatives à la révocation ad nutum.81

Collégialité ; quorum de la moitié des présents ; vote à la majorité des présents ou représentés sauf 82

majorité plus forte prévue dans les statuts ; possibilité de visioconférence ; présence d’un président, dirigeant les débats et convoquant le conseil, etc…

Les règles relatives à la rémunération (jetons de présence) des administrateurs sont applicables aux 83

membres du conseil de surveillance, qui, par ailleurs ne sont, ni fiscalement, ni socialement, assimilés à des salariés. La possibilité de cumuler un contrat paraît toutefois plus largement ouverte, puisqu’aucune disposition n’interdit la conclusion d’un contrat de travail (effectif et distinct des fonctions sociales) après l’entrée au conseil de surveillance.

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Droit spécial des sociétés - support de cours, à usage exclusif des étudiants de L3 Droit de l’Université de Cergy-Pontoise. etc. Plus largement, les statuts peuvent subordonner à l’autorisation préalable du conseil de surveillance la conclusion des opérations qu’ils énumèrent (C. com., art. L. 225-68 al. 2) .84

De son côté, le président du conseil de surveillance dispose également de quelques prérogatives (connues déjà du président du conseil d’administration) propres : il convoque seul et dirige les 85

débats du conseil (C. com., art. L. 225-81), il rend compte dans un rapport spécial soumis aux actionnaires lors de l’assemblée générale annuelle, des conditions de préparation et d’organisation des travaux du conseil, ainsi que des procédures du contrôle interne et de gestion des risques mises en place par la société (C. com. art. L. 225-68).

En ce qui concerne les responsabilités, la situation est tout à fait différente de celle des membres du conseil d’administration, dans la mesure où les membres du conseil de surveillance ne participent pas à la gestion de la société.

Ainsi, si l’article L. 225-257 du Code de commerce prévoit que les membres du conseil de surveillance n’encourent aucune responsabilité en raison des actes de la gestion ou de leur résultat : le fait d’exercer une surveillance ou un contrôle n’impliquent pas qu’ils puissent éviter les fautes commises par le directoire. A la rigueur, la seule chose qui pourrait leur être reprochée serait une carence dans leur mission de contrôle , ce qui vient sensiblement réduire le risque de 86

voir engager contre eux, une action en responsabilité (sans pour autant dire que ce risque n’existe pas). En outre, le texte précise que les membres du conseil de surveillance sont responsables des fautes personnelles commises dans l’exécution de leur mandat. Ils peuvent par ailleurs être déclarés civilement responsables des délits commis par les membres du directoire si, en ayant eu connaissance, ils ne les ont pas révélé à l’assemblée générale.

Au pénal, et pour la même raison tenant au fait qu’ils n’ont pas de pouvoir de gestion, les membres du conseil de surveillance échappent en principe aux infractions déjà rappelées : abus de biens sociaux ; présentation de comptes ne donnant pas une image fidèle, etc. A tout le moins conviendra-t-il de rechercher leur responsabilité, en qualité de complice, ou en tant que dirigeant de fait.

Il convient d’être prudent dans le choix et le nombre des opérations qui sont soumises à l’autorisation du 84

conseil de surveillance : a trop en prévoir, le rôle du conseil de surveillance ne serait plus un simple rôle de contrôle, mais pourrait glisser vers un rôle de gestion impliquant une direction de fait.

Le directoire ne peut pas lui demander de convoquer le conseil de surveillance.85

Cass. com., 6 févr. 1979, Rev. sociétés, 1979, p. 539, note J. Guyénot.86

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