CAHIERS ÉCONOMIQUES DU CAMEROUN
Janvier 2011 l Numéro 1
LE RÉVEIL DU LION ?
POINT SUR LA SITUATION ECONOMIQUE DU CAMEROUN
Spécial Télécommunications
UNITÉ DE LA REDUCTION DE LA PAUVRETE ET LA GESTION ECONOMIQUE, RÉGION AFRIQUE
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Janvier 2011
Le réveil du lion ?
Point sur la situation économique du Cameroun
Spécial Télécommunications
Unité de la Réduction de la Pauvreté et la Gestion Economique, Région Afrique
Table des matières
ABBRÉVIATIONS ET ACRONYMES ......................................................................................I
LE RÉVEIL DU LION ? ........................................................................................................ 2
Introduction ...................................................................................................................................... 2
Contexte ........................................................................................................................................... 3
Conjoncture économique ................................................................................................................. 8
Perspectives pour 2011 .................................................................................................................. 13
Secteur des télécommunications ................................................................................................... 14
RÉFÉRENCES .................................................................................................................. 20
Liste des Graphiques
Graphique 1 : Indicateurs comparatifs et structure économique, 1980-2009 ..................................................... 4
Graphique 2 : Situation budgétaire et efforts de lutte contre la pauvreté, 1996-2009 ....................................... 5
Graphique 3 : Contribution potentielle des infrastructures ................................................................................. 7
Graphique 4 : Contribution à la croissance du PIB par secteur, 2005-10 (En pourcentage) ............................... 8
Graphique 5 : Contribution à la croissance du crédit par secteur, 2010 (En pourcentage) ................................. 8
Graphique 6 : Production pétrolière, 2002-10, .................................................................................................... 8
Graphique 7 : Production de quelques cultures vivrières. 2005 – 10 (Indice 2005=100) ..................................... 9
Graphique 8 : Nombre d’abonnés, 2008-10 ....................................................................................................... 10
Graphique 9 : Indices de quelques prix, 2006-10 ............................................................................................... 10
Graphique 10 : Mobilisation des recettes non-pétrolières (moyenne 2007-09, en pourcentage du PIB hors pétrole) ............................................................................................................................................................... 11
Graphique 11 : Recettes non-pétrolières, 2005-10 (en pourcentage du PIB hors pétrole)................................ 11
Graphique 12 : Enveloppes budgétaires pour secteurs prioritaires, 2005-09 .................................................... 12
Graphique 13 : Enveloppes budgétaires pour secteurs prioritaires, 2010 ......................................................... 12
Graphique 14 : Enveloppes budgétaires pour secteurs prioritaires, 2011 (En pourcentage du budget) ........... 13
Graphique 15 : PIB réel par habitant, 2009-35 ................................................................................................... 14
Graphique 16 : Classement selon l’indice de développement des TIC, 2008 ..................................................... 16
Graphique 17 : Évolution de l’indice de Herfindahl-Hirschman au Cameroun, 2005-09 ................................... 17
Graphique 18 : Sous-panier de la téléphonie cellulaire, 2009 ............................................................................ 18
Graphique 19 : Sous-panier de la large bande, 2009.......................................................................................... 18
Graphique 20 : Largeur de la bande internationale Internet, 2008 ................................................................... 18
Graphique 21 : Taux de pénétration du marché de la téléphonie mobile, 2008 ............................................... 18
Liste des tableaux Tableau 1 : Accès aux infrastructures au Cameroun ............................................................................ 6
Tableau 2 : Coût des services d’infrastructures au Cameroun ............................................................. 6
Tableau 3 : Performance budgétaire, 2009-10 ................................................................................... 12
Janvier 2011 l Numéro 1
ABBRÉVIATIONS ET ACRONYMES
ACE Africa Coast to Europe
ANTIC Agence Nationale des Technologies de l’Information et de la Communication
ART Agence de Régulation des Télécommunications
ASS Afrique Subsaharienne
ASYCUDA Système automatique des données douanières
BEAC Banque des États d’Afrique Centrale
CAMTEL Cameroon Télécommunications
CEMAC Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale
CIMENCAM Cimenteries du Cameroun
COBAC Commission Bancaire de l’Afrique Centrale
DSCE Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi
DTS Droits de Tirage Spéciaux
FCFA Franc CFA
FMI Fonds Monétaire International
IADM Initiative d’Allégement de la Dette Multilatérale
IHH Indice de Herfindahl-Hirschman
IPC Indice des Prix à la Consommation
MINPOSTEL Ministère des Postes et Télécommunications
OMD Objectifs du Millénaire pour le Développement
PIB Produit Intérieur Brut
PPP Partenariat Public-Privé
PPTE Pays Pauvres Très Endettés
RCA République Centrafricaine
RNB Revenu National Brut
SAT3 South Atlantic 3
SNH Société Nationale des Hydrocarbures
SONARA Société Nationale de Raffinage
TIC Technologies de l’Information et de la Communication
WACS West Africa Cable System
WASC West Africa Submarine Cable
WiMAX Worldwide Interoperability for Microwave Access
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 2
LE RÉVEIL DU LION ?
Introduction
Avec ce premier numéro des Cahiers économiques
du Cameroun, la Banque mondiale inaugure un
programme de rapports économiques plus concis
et réguliers. Chaque numéro, publié deux fois par
an, fera le point de la situation économique et
traitera d’un sujet particulier.
Les Cahiers économiques visent à partager les
connaissances et susciter un dialogue entre ceux
qui cherchent à améliorer la gestion économique
du Cameroun et à libérer l’énorme potentiel
économique de ce pays. Ils proposent une autre
source d’information sur l’économie camerounaise
et une plateforme additionnelle pour encourager
l’interaction, l’apprentissage, et le changement.
Le titre de ce premier numéro, Le réveil du lion ? –
Point sur la situation économique du Cameroun.
Spécial Télécommunications, est à l’image des
difficultés du pays à mettre son énorme potentiel
économique au service d’une croissance rapide et
d’un recul de la pauvreté. Un cadre des affaires
peu favorable, des infrastructures
particulièrement inadaptées et une mauvaise
gouvernance empêchent le pays d’avancer. En
dépit de la marge de manœuvre financière
ouverte par l’allégement de la dette, les ressources
budgétaires demeurent insuffisantes à cause des
progrès limités dans la mobilisation de recettes
hors pétrole. De ce point de vue, la récente
émission couronnée de succès du premier
emprunt obligataire de l’État pour le financement
de projets d’infrastructure clés pourrait annoncer
le réveil du lion.
Les Cahiers économiques du Cameroun sont
réalisés par l’Unité pour la Réduction de la
Pauvreté et la Gestion Economique du bureau de
la Banque mondiale au Cameroun, faisant appel à
une équipe dirigée par Raju Jan Singh. Jérôme
Bezzina a préparé la section sur les
télécommunications, thème spécial du rapport.
Cette équipe est également composée de James
Acworth, Simon Davies, Herminie Delanne,
Amadou Nchare, Emeran Serge Menang Evouna,
Menachem Katz, Faustin Koyassé, Peter Osei, Gael
Raballand, Rupa Ranganathan, Manievel Seme et
Paula White. Mary Barton-Dock (directrice des
opérations pour le Cameroun) et Jan Walliser
(directeur sectoriel) ont fourni des orientations,
des conseils et de précieux encouragements à
l’équipe.
De hauts responsables et analystes des
administrations camerounaises ont aussi fait
largement profiter l’équipe de leurs lumières. Ce
concours est notamment venu des institutions
suivantes : BEAC, Ministère des Finances,
Ministère de l’Économie, de la Planification et de
l’Aménagement du Territoire, Ministère des
Postes et Télécommunications, ANTIC, ART et
Institut National des Statistiques.
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 3
Contexte
Le Cameroun est un pays divers, linguistiquement
et ethniquement, dont la géographie s’étend du
semi-désert sahélien, au Nord, à la forêt
équatoriale, au Sud, en passant par des zones de
savanes. Même si cette diversité favorise la
pratique d’activités économiques et agricoles
variées, en réalité, 70 % de la population vit de
l’agriculture et de l’élevage. Au Cameroun, la
proportion de terres consacrées à la préservation
de la biodiversité est parmi les plus élevées
d’Afrique, 14 % du territoire national étant
occupés par des parcs nationaux, des réserves, des
sanctuaires et des concessions de conservation.
Le Cameroun est doté d’importantes ressources
naturelles dont le pétrole, les essences de bois
précieux et les cultures agricoles d’exportation
(café, coton, cacao). Le gaz naturel, la bauxite, le
diamant, l’or, le fer et le cobalt sont des ressources
inexploitées. L’économie camerounaise est
relativement diversifiée : les services
représentaient 44 % du PIB en 2009, l’agriculture
et le secteur manufacturier 19 % chacun, et le
pétrole et les mines 7 %.
La croissance économique reste cependant lente
par rapport au taux de croissance moyen des
autres pays d’Afrique subsaharienne
(Graphique 1). Des infrastructures inappropriées,
un cadre des affaires peu porteur et une
gouvernance insuffisante entravent l’activité
économique. Dans ces conditions, il est difficile
d’afficher des taux de croissance qui permettraient
de faire reculer durablement la pauvreté.
En effet, force est de constater que les taux de
pauvreté n’ont pas baissé au cours de ces
dernières années malgré les mesures d’allégement
de la dette consenties en 2006 dans le cadre de
l’initiative PPTE et de l’IADM, qui ont permis
d’améliorer sensiblement la viabilité de la dette du
pays et d’accroître la marge de manœuvre
budgétaire pour concentrer les dépenses sur des
mesures réduisant la pauvreté (Graphique 2). Le
taux de pauvreté au Cameroun n’a pratiquement
pas évolué entre 2000 et 2007, avoisinant 40 %.
Les données existantes font également ressortir de
fortes disparités géographiques et
socioéconomiques, et montrent que si la pauvreté
a diminué en zone urbaine, elle s’est accrue en
zone rurale. Selon la dernière enquête menée
auprès des ménages en 2007, quelque 55 % des
familles rurales sont pauvres, contre 12 % dans les
villes. En outre, environ 87 % des pauvres vivent en
zone rurale.
Sur sa lancée actuelle, il est peu probable que le
Cameroun atteigne les objectifs de
développement pour le Millénaire (ODM), à
l’exception possible de ceux correspondant à
l’éducation primaire pour tous et à l’égalité
hommes-femmes. La situation de l’enseignement
primaire s’est certes améliorée, mais les principaux
indicateurs de la santé et de la nutrition de l’enfant
se dégradent depuis 1990. Les régions
septentrionales connaissent actuellement des
niveaux exceptionnellement élevés de
malnutrition infantile et ont récemment subi une
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 4
épidémie de cholera. Près de 70 % des citadins et
l’ensemble de la population urbaine pauvre n’ont
qu’un accès limité aux réseaux publics de
distribution et aux prestations de base.
Bien que la simplification des formalités de
création d’entreprises ait permis au Cameroun
d’améliorer son rang au classement établi par le
rapport Doing Business, le cadre des affaires
demeure peu favorable.
Plusieurs indicateurs clés montrent que l’Afrique
centrale, dont le Cameroun, est la région d’Afrique
la moins bien équipée en infrastructures. Malgré
d’énormes potentialités hydro-énergétiques, le
secteur de l’électricité en Afrique centrale reste le
moins développé du continent. La densité de
routes bitumées (4 km/100 km²) est encore
inférieure à celle de l’Afrique de l’Ouest, où elle est
déjà faible.
Graphique 1 : Points de comparaison et structure économique, 1980-2009
Le Cameroun compte parmi les plus grandes
économies d’Afrique…
…et le pétrole y joue encore un rôle important
… l'économie du pays est aujourd'hui
relativement bien diversifiée…
Ventilation du PIB de 2009, en % du total
…pourtant le Cameroun se fait de plus en
plus distancé par les pays retenus comme
base de comparaison
PIB par habitant, 1980-2008 (en dollars constants, 2000)
Sources : Autorités camerounaises, estimations du FMI et de la Banque mondiale (Indicateurs du
développement dans le monde)
0 100 200 300 400 500 600
Guinée équatoriale
Côte d’Ivoire
Ghana
Cameroun
Tanzanie
Kenya
Éthiopie
Angola
Nigéria
Afrique du Sud
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30%
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50%
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70%
80%
90%
100%
PIB Recettes publiques Revenus d'exportation
Hors pétrole
Pétrole
Transformation 19,2%
Services 44,0%
Exploitation forestière et
élevage 5,9%
Agriculture 18,9%
Pétrole et mines 7,3%
Bâtiment et services de distribution
4,7%
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400,0
600,0
800,0
1 000,0
1 200,0
1 400,0
1 600,0
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Cameroun Pays à revenu intermédiaire, tranche inférieure
Cahiers économiques du Cameroun
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Graphique 2 : Évolution de la situation budgétaire et de la pauvreté, 1996-2009
Les Initiatives PPTE/IADM ont permis de réduire de
façon substantielle la dette publique par rapport au
PIB…
… ce qui a permis un accroissement des
investissements publics
… mais la pauvreté dans son ensemble, en
pourcentage de la population, n’a pas diminué
… et les écarts entre régions se sont même creusés.
0
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2004 2005 2006 2007 2008 2009
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09
CFAF milliards
0
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30
40
50
60
70
1996 2001 2007
Cameroun Zones urbaines Zones rurales
-15
-10
-5
0
5
10
15
Évolution en pourcentage du taux de pauvreté
Cahiers économiques du Cameroun
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Tableau 1 : Accès aux infrastructures au Cameroun
Indicateur Unité Cameroun
CEMAC Bases de comparaison (Afrique subsaharienne)
Pays à faible
revenu
Pays dotés de ressources naturelles
Pays à revenu intermédiaire
Densité des routes classées Km/1 000 personnes 1,2 2 ,4 1,3 2,3 7,1
Routes classées en bon état En % 36 32 35 29 48
Capacité électrique installée MW/1 million de personnes
12,6 16 20 43 799
Accès à l’électricité % de la population 46 30 33 46 50
Abonnés à l’Internet Pour 100 personnes 3,8 2,8 5,7 11,8 8,9
Téléphones mobiles Pour 100 personnes 32,3 28,9 25,6 37,4 57,3
Lignes fixes Pour 100 personnes 1 0,7 0,8 0 ,8 4,8
Accès à l’eau courante % de la population 12,9 12 10,5 12 52,1
Accès à des toilettes modernes (chasse d'eau, fosse septique)
% de la population 8,1 6 4,9 11,2 40,8
Sources : Étude diagnostique des infrastructures nationales en Afrique ; Département américain de l’Énergie, Information et communication pour le développement (IC4D). Données sur les routes et les TIC pour 2008 ; données sur l’eau et l’énergie pour 2004/5, accès à l’électricité pour 2001. Les bases de comparaison correspondent à la dernière année connue de la période 2000-2005.
Tableau 2 : Coût des services d’infrastructure au Cameroun
Indicateur Unité Cameroun CEMAC Afrique subsaharienne
Autres pays en développement
Tarif de l'électricité USD/Kwh 0,11 0,11-0,30 0,03-0,43 0,05-0,10
Redevance de manutention de conteneur
USD/EVP 220 120-320 100-320 80-150**
Coût du fret routier USD/t/km 0,13* 0,13 0,04-0,13 0,01-0,04
Tarif mensuel – Mobiles USD 14,4 13-18 2,6-21 9,9
Tarif mensuel – Internet USD 48 48-110 6,7-148 11
Sources : Banerjee et al. (2008) ; Eberhard et al. (2008) ; Teravaninthorn et Raballand 2008. N.B: Les fourchettes de données correspondent aux prix dans différents pays et aux divers niveaux de consommation. Les prix du téléphone mobile et de l'internet correspondent à toutes les régions en développement, dont l'Afrique. * moyenne de l’Afrique centrale ; ** bonnes pratiques internationales.
La performance des deux ports d’Afrique centrale
– Douala et Pointe Noire – qui servent de centres
de transbordement pour la sous-région – sont très
en deçà des normes mondiales en la matière.
En comparaison avec le reste du monde et les
autres régions d’Afrique, le consommateur
d’Afrique centrale doit aussi s’acquitter d’un prix
substantiel pour les services en infrastructure.
L’abonnement mensuel à l’internet est ainsi
quatre fois plus élevé au Cameroun que dans les
autres pays en développement.
Les transports terrestres en Afrique centrale sont
les plus chers d’Afrique subsaharienne
principalement du fait de la cartellisation et de la
réglementation très restrictive du camionnage. Au
Cameroun, le coût du transport routier est de
l’ordre de 0,13 dollar par tonne-kilomètre contre
0,05 dollar en Afrique australe et 0,04 dollar dans
la plupart des autres pays en développement. La
cherté du fret ne tient toutefois pas au coût élevé
des transports, mais plutôt aux profits substantiels
des camionneurs, dus à l’absence de concurrence
dans le secteur.
Les infrastructures pourraient contribuer à la
croissance économique bien plus qu’elles ne l’ont
fait jusqu’à aujourd’hui. Les simulations montrent
que le PIB réel par habitant pourrait croître
d’environ 5 points si les infrastructures d’Afrique
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 7
centrale étaient du même niveau que celles du
pays le plus performant d’Afrique (l’Ile Maurice).
Des améliorations dans l’électrification peuvent
avoir un impact d’environ 2 points sur la
croissance. Le renforcement des infrastructures
routières et des équipements de
télécommunications peut contribuer à la
croissance à hauteur de 1,5 point dans chacun de
ces secteurs. Dans le cas précis du Cameroun,
l’impact de l’amélioration des infrastructures sur la
croissance du PIB réel par habitant serait d’environ
4,5 points.
Graphique 3 : Contribution potentielle du secteur des infrastructures
Dans ce contexte, il s’agit avant tout pour le
Cameroun de stimuler la croissance et de veiller à
la répartition plus équitable des fruits de cet effort
entre les différentes catégories de revenus pour
faire durablement reculer la pauvreté. Les objectifs
de développement du gouvernement sont
présentés dans « Vision 2035 », un document
ambitieux, clé de voûte du Document de stratégie
pour la croissance et l’emploi, DSCE (2009).
L’objectif principal de « Vision 2035 » est de
ramener le taux de pauvreté à moins de 10 %,
faisant ainsi du Cameroun « un pays industrialisé à
revenu intermédiaire », et de « consolider la
démocratie et l’unité nationale ».
Pour le DCSE, la faiblesse de la productivité, la
menace d’une crise énergétique, les méfaits de la
crise financière mondiale, le non-recul de la
pauvreté et le chômage élevé sont les principaux
défis à relever au cours de la période 2009-2019.
Ce document prévoit des investissements
importants dans les infrastructures pour doper la
croissance notamment dans les domaines de
l’énergie, des routes, des ports, de l’accès à l’eau,
et des technologies de l’information et de la
communication. Des gains de productivité sont
attendus dans l’agriculture et l’élevage,
l’extraction minière, les principales chaînes de
valeur ajoutée (bois, technologies de l’information
et de la communication, tourisme), et dans le
climat des affaires. Le but est de renforcer le
développement humain et de créer des emplois
plus stables dans le secteur formel. Le DSCE met
également l’accent sur l’intégration régionale et
l’amélioration de la gouvernance. Il comprend des
initiatives particulières sur la corruption, les
marchés publics, le cadre des affaires et la
participation citoyenne.
Alors que l’État a émis son premier emprunt
obligataire en décembre 2010, il reste à savoir si la
nouvelle stratégie du pays permettra d’obtenir de
meilleurs résultats que les programmes
précédents. L’heure du réveil du lion a-t-elle
sonnée ?
0
1
2
3
4
5
6
Afrique Afrique du Nord
Afrique de l'Ouest
Afrique de l’Est
Afrique australe
Afrique centrale
Cameroun
(en points de croissance du PIB annuel par habitant)
Source: Calderon (2009)
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 8
Conjoncture économique
Croissance
Depuis deux ans, le Cameroun subit les effets de
la crise financière et économique mondiale qui
se traduit par une forte baisse des cours et de la
demande de ses produits d’exportation à savoir
le pétrole, le bois, le caoutchouc, le coton et
l’aluminium (Graphique 4).
Graphique 4 : Contribution à la croissance du PIB par secteur, 2005-2010 (en pourcentage)
Toutefois, dans le sillage de la reprise de
l’économie mondiale et des mesures prises par
les autorités pour relancer la production
nationale, les premiers signes d’un redémarrage
de l’économie sont perceptibles. Pour 2010, la
croissance du PIB est estimée à 3 %, tirée par le
rebond des activités non pétrolières
(notamment les cultures vivrières, l’exploitation
forestière, le bâtiment, le transport, et les
télécommunications), qui ont connu une
expansion de quelque 4 %. Les chiffres de la
croissance du crédit privé corroborent cette
évaluation (Graphique 5).
Graphique 5 : Contribution à l’expansion du crédit par secteur, 2010 (en pourcentage)
Le Cameroun est un producteur de pétrole assez
modeste, dont la production est en déclin
(Graphique 6). L’épuisement des réserves, le
vieillissement des infrastructures et – plus
récemment – le report de certains
investissements et projets de développement
suite à la crise financière expliquent ce tableau.
Pour l’essentiel, la contribution de ce secteur à
la croissance du PIB est négative depuis
quelques années, et l’on estime que la
production pétrolière a encore reculé de 16 %
en 2010 (passant à 23,2 millions de barils).
Graphique 6 : Production pétrolière, 2002-10, (en millions de barils)
-2
-1
0
1
2
3
4
5
2005 2006 2007 2008 2009 2010
Primaire Secondaire (hors petrole)
Petrole Tertiaire
Croissance du PIBSources: Autorites camerounaises et estimations
de la Banque Mondiale
-
1.00
2.00
3.00
4.00
5.00
6.00
Agriculture, Elevage, Peche
Industries Logement, Travaux publics
Transport, Telecoms
Autres
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30
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40
2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010
Oil Production, 2002-10
(in mio barrels)
Source: SNH
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 9
Hors pétrole, le secteur primaire a redémarré en
2010 et devrait connaître une croissance de
3¾%. Cette reprise s’explique par la forte
croissance du secteur forestier et des cultures
vivrières. L’exploitation forestière est le secteur
qui a le plus souffert de la crise financière. Sous
l’impulsion du redémarrage de l’économie
mondiale, la demande est repartie à la hausse
sur les marchés traditionnels d’Europe et
d’Amérique du Nord, et de nouveaux marchés
se sont ouverts. Les pays asiatiques importent
essentiellement des grumes (environ 25 % des
exportations de bois du Cameroun) alors que les
pays européens achètent principalement du bois
travaillé (environ 55 %). Ce redressement du
secteur forestier a entraîné le relèvement des
activités de transport qui en dépendent
beaucoup.
L’accroissement de la production vivrière (riz,
soja, patate douce et sorgho) tient
principalement à trois facteurs (Graphique 7).
D’abord, les zones qui accueillent ces cultures
ont bénéficié de conditions météorologiques
favorables. Ensuite, la hausse des prix des
denrées alimentaires a incité les agriculteurs à
accroître leur production. C’est ainsi que des
rizières ont été remises en état à Yagoua, Lagdo
et Ndop. Enfin, suite aux émeutes de 2008
contre la vie chère, le gouvernement a appliqué
certaines mesures de soutien de l’offre pour
accompagner des productions telles que le riz, le
maïs et la pomme de terre. Il a redoublé d’effort
pour aider les agriculteurs à tirer profit des
opportunités commerciales offertes par les
marchés sous-régionaux et permettre une plus
grande participation du secteur privé.
Graphique 7 : Exemples de productions vivrières, 2005 –2010
(Indice 2005=100)
Sources : Autorités camerounaises et estimations de la Banque mondiale
Selon les estimations, le secteur secondaire hors
pétrole a connu une croissance de 3¾ % en
2010, tiré par le développement continu du
secteur du bâtiment et le rebond de
l’agroalimentaire. Le bâtiment devrait
progresser pour la deuxième année consécutive
avec une croissance attendue de 9 %. La
création de trois nouvelles unités de production
à Cimencam (Cimenteries du Cameroun) a
permis d’inverser la tendance au ralentissement
des activités constaté dans ce secteur en 2008
du fait d’une pénurie de ciment.
Enfin, les services – principal moteur de la
croissance économique en 2010 – ont profité de
la reprise dans le transport de bois et du
dynamisme persistant du secteur de la
téléphonie mobile. Après une baisse des
activités en 2008, ce secteur a rebondi, affichant
un taux de croissance d’environ 3½ % en 2009 et
de 4 % en 2010. L’augmentation de 14 % du
nombre d’abonnés en 2010 (Graphique 8) serait
80
90
100
110
120
130
140
150
160
170
180
2005 2006 2007 2008 2009 2010
Riz Soja Patate douce Maïs Mil/sorgho
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 10
Graphique 8 : Nombre d’abonnés, 2008-2010
Sources : CAMTEL, Orange, MTN
à porter au crédit de l’utilisation accrue de la
fibre optique, des campagnes promotionnelles
lors de la Coupe du monde de football et du
lancement de nouveaux produits.
Inflation
Les prix ont peu augmenté (Graphique 9).
L’inflation moyenne au cours du premier
semestre de 2010 a été de 0,4 %, contre 4,4 %
au cours de la même période en 2009. Cette
situation est en partie due aux mesures prises
par les autorités pour améliorer les
disponibilités alimentaires. La stabilité des prix
de détail des produits pétroliers a également
contribué à contenir l’inflation. Les composantes
« alimentation » et « transport » de l’IPC ont
progressé en moyenne de 0,4 % et 0,5 %
respectivement au cours du premier semestre
de 2010. D’ici à la fin de l’année, sous l’effet de
la hausse des prix alimentaires, il faut s’attendre
à une inflation plus forte, mais inférieure au
critère de convergence régionale de 3 %.
Graphique 9 : Quelques indices de prix, 2006-10
Performance budgétaire
Il n’a pas été possible de mobiliser l’intégralité
des ressources inscrites au budget de 2010,
malgré les efforts de réforme. Un décret
présidentiel portant modification de ce budget a
donc dû être signé en septembre. Il visait
essentiellement à réduire le budget
d’investissement.
Même comparé à la situation des autres pays
producteurs de pétrole, l’effort de mobilisation
de recettes non-pétrolières reste limité au
Cameroun (Graphique 10). Malgré
l’accroissement des recettes douanières, la
mobilisation des revenus non-pétroliers reste en
général décevante (Graphique 11). L’effort fiscal
devrait continuer à baisser en 2010 du fait de
l’érosion de l’assiette suite à la multiplication
des incitations fiscales, ainsi que du déclin du
civisme fiscal.
0
1000000
2000000
3000000
4000000
5000000
6000000
7000000
8000000
9000000
10000000
2008 2009 2010
Lignes fixes Mobiles
-10%
-5%
0%
5%
10%
15%
20%
dé
c.-0
6
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.-0
7
avr.
-07
juin
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aoû
t-0
7
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.-0
7
dé
c.-0
7
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.-0
8
avr.
-08
juin
-08
aoû
t-0
8
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.-0
8
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c.-0
8
févr
.-0
9
avr.
-09
juin
-09
aoû
t-0
9
oct
.-0
9
dé
c.-0
9
févr
.-1
0
avr.
-10
juin
-10
IPC (total) Indice des prix alimentaires Indice des prix pétroliersSource : Autorités camerounaises et calculs de la Banque mondiale
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 11
Graphique 10 : Mobilisation de recettes non-pétrolières (moyenne 2007-2009, en pourcentage du PIB hors pétrole)
Graphique 11 : Recettes non-pétrolières, 2005-2010 (en pourcentage du PIB hors pétrole)
L’émission du premier emprunt obligataire de
l’État a été reportée à la fin de l’année. Le
niveau d’endettement du Cameroun s’est
sensiblement amélioré au cours de ces dernières
années et le pays cherche à accéder aux
marchés des capitaux. Selon la dernière analyse
conjointe FMI-Banque mondiale de viabilité de
la dette des pays à faible revenu, le risque de
surendettement du Cameroun reste faible, ce
qui devrait permettre au pays d’emprunter aux
conditions du marché d’une manière modérée.
Dans ce contexte et face à l’insuffisance de ses
infrastructures, le Cameroun a renforcé son
cadre de gestion de la dette afin d’émettre un
emprunt obligataire qui servira à financer des
investissements. Les autorités ont élaboré une
stratégie de gestion à moyen terme de la dette
de l’État et l’ont annexée à la loi de finances
de 2010. Elles ont également commencé à
réaliser leurs propres analyses de viabilité de la
dette. Dans le cadre du budget 2011, le
gouvernement a également préparé une
stratégie nationale de gestion de la dette qui
aidera à exécuter ce budget, à gérer la dette
publique et à en assurer la viabilité.
Il a malgré tout fallu attendre octobre 2010 pour
que le gouvernement signe un accord avec trois
banques commerciales (Afriland First Bank,
Société Générale du Cameroun, et Citibank)
pour préparer l’émission de son emprunt
obligataire. La période de souscription des
obligations, qui sont assorties d’un taux
d’intérêt de 5,6 % et remboursables de 2012 à
2015, s’est achevée fin décembre. L’opération a
permis de mobiliser le montant escompté de
200 milliards de francs CFA (environ 1,8 % du
PIB), qui contribueront au financement de
projets structurants clés.
Ainsi, on estime que le solde budgétaire global
(y compris les dons mais hors régularisation des
arriérés) s’est détérioré. Proche de l’équilibre en
2009, il pourrait accuser un déficit de près de
1 % du PIB en 2010 du fait d’une baisse des
recettes pétrolières et d’une augmentation des
dépenses d’investissement (Tableau 3).
0
5
10
15
20
25
Gabon Angola Congo, Rép. du Algérie Cameroun
12.8
13
13.2
13.4
13.6
13.8
14
14.2
14.4
2005 2006 2007 2008 2009 2010
Sources: autorites camerounaises et estimations Banque Mondiale
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 12
Le gouvernement a utilisé son allocation de DTS
(103 milliards de francs CFA) pour s’acquitter de
ses obligations envers la SONARA, la société
nationale de raffinage, et la dédommager des
pertes résultant du gel des prix de détail des
produits pétroliers. En revanche, d’autres
obligations de paiement se seraient accumulées.
Le solde budgétaire (avant régularisation des
arriérés) devrait donc être inférieur aux
prévisions, le report du lancement de l’emprunt
obligataire ayant probablement freiné
l’apurement des arriérés et créer de fortes
pressions sur les dépôts du gouvernement
auprès de la BEAC.
S’agissant de la composition des dépenses, les
comptes définitifs publiés récemment pour 2009
montrent que la part des crédits affectés aux
secteurs définis comme prioritaires a un peu
augmenté (Graphique 12). Leur part dans le
budget 2010 n’atteint toutefois pas les niveaux
prévus par le DSCE (Graphique 13). Par exemple,
les dépenses publiques de santé restent
inférieures aux normes internationales : le
secteur de la santé ne représente qu’environ
8 % des dépenses totales de fonctionnement,
soit bien moins que la norme d’Abuja (15 %). Les
ménages supportent l’essentiel du fardeau
financier des soins de santé tant du point de vue
des dépenses à leur charge que du rapport
qualité/prix des prestations fournies.
Tableau 3 : Performance budgétaire, 2009-2010
Graphique 12 : Crédits affectés aux secteurs prioritaires,
(en pourcentage du budget) 2005-2009
Graphique 13 : Crédits affectés aux secteurs prioritaires,
(en pourcentage du budget)
2010
2009
Est. LFR Jan.-Sept Proj.
Recettes et dons 1926 1932 1399 1936
Recettes 1839 1842 1346 1845
Recettes petrolieres 507 407 340 461
Recettes non-petrolieres 1332 1435 1006 1384
Dons 87 90 53 91
Depenses totales 1937 2151 1447 2044
Fonctionnement 1496 1552 1134 1545
Investissement 441 599 313 499
Solde global -11 -219 -48 -108
Arrieres -17 -172 -153 -158
Solde global base caisse -28 -391 -201 -266
Sources: autorites camerounaises et estimations Banque Mondiale
2010
0
5
10
15
20
25
30
35
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2005 2006 2007 2008 2009
Education, Formation, et Recherche Sante Infrastructures
Sources: autorites camerounaises et estimations Banque Mondiale
0,0
5,0
10,0
15,0
20,0
25,0
30,0
Éducation, formation et recherche
Santé Développement rural
Infrastructures
DSCE Budget2010
Sources : Autorités camerounaises et calculs de la Banque mondiale
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 13
Perspectives pour 2011
L’évolution de la situation observée en 2010
devrait se confirmer en 2011. La reprise
économique se poursuivra avec une croissance
d’environ 4 %. Elle sera essentiellement tirée par
le secteur non pétrolier (qui gagnera environ
4½%) alors que les activités pétrolières
continueront de reculer (d’environ 11 %). Plus
particulièrement, la croissance dans les secteurs
secondaire (hors pétrole) et tertiaire devrait
rester forte.
Sur le plan budgétaire, l’objectif pour 2011 est
de revenir à un quasi-équilibre (en comptant les
dons, mais hors régularisation des arriérés). Cela
supposera un renforcement de l’effort de
collecte des recettes afin d’inverser la tendance
baissière récente des revenus non-pétroliers.
Les dépenses de fonctionnement, quant à elles,
devraient nettement diminuer par rapport au
résultat attendu de 2010, ce reflux n’étant que
partiellement compensé par une augmentation
des investissements. Sur le plan de la
composition de dépenses, la part de la santé, du
développement rural, des infrastructures et de
l’énergie augmentera alors que celle de
l’éducation se réduira (Graphique 14).
L’apurement des arriérés et le service de la
dette nécessiteront cependant le lancement
d’un autre emprunt obligataire de 200 milliards
de francs CFA.
Graphique 14 : Crédits affectés aux secteurs prioritaires, 2011 (en pourcentage du budget)
Le volume des obligations de paiement non
honorées restera élevé et continuera de peser
sur l’exécution du budget. Bien que
partiellement reconstitués par l’emprunt
obligataire, les dépôts du gouvernement à la
BEAC ne pourront compenser que d’une
manière limitée d’éventuels manques à
percevoir ou retards dans la mobilisation de
fonds sur les marchés financiers. En outre, il
pourrait être difficile de contenir un
accroissement des dépenses à l’approche de
l’élection présidentielle. Pour l’année à venir, il
conviendrait donc que les autorités accordent
une attention particulière à i) la mobilisation de
recettes non-pétrolières, ii) l’accès en temps
opportun aux marchés financiers, et iii) la
maîtrise des engagements de dépenses.
02468
1012141618
Edu
cati
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Ene
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2010 Budget 2011 BudgetSources: autorites camerounaises et estimations Banque Mondiale
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 14
Secteur des télécommunications
Selon des simulations, si la qualité et le tarif des
services de télécommunication au Cameroun
atteignaient le niveau de l’Ile Maurice, la
croissance réelle du PIB par habitant connaitrait
une hausse annuelle de 1,3 %, ce qui permettrait
de réduire d’un tiers l’écart entre les
performances économiques passées du pays
(statu quo) et ses aspirations (Vision 2035)
(Graphique 15). Malheureusement, la réticence
des autorités à entreprendre les réformes
nécessaires, notamment celles permettant une
plus grande concurrence, va à l’encontre de ces
bienfaits potentiels.
Graphique 15 : PIB réel par habitant, 2009-2035 (en dollars constants)
Contexte régional
L’isolement et la tarification élevée qui
caractérisent les pays d’Afrique centrale freinent
le développement de services de
télécommunication à des prix abordables.
Plusieurs pays d’Afrique centrale ont commencé
à prendre des mesures pour réduire le coût de
l’accès aux services en libéralisant le marché et
en entreprenant des réformes du cadre
réglementaire des politiques publiques.
Malheureusement, la libéralisation inachevée du
marché et l’absence d’infrastructures
maintiennent le coût des services de
communication à des niveaux élevés. Sans accès
à des services de télécommunication de qualité
et d’un coût abordable, le coût des échanges
commerciaux internationaux et transfrontaliers
restera très élevé, limitant les opportunités de
création d’emplois et freinant l’accroissement
de la production de biens et services.
La mise en place de l’infrastructure de base pour
les technologies de l’information et de la
communication (TIC) en est encore à ses débuts
en Afrique centrale. Comparativement aux
autres communautés économiques régionales,
la CEMAC a le plus faible niveau d’accès à
l’internet et au téléphone de tout le continent,
avec moins de 2,8 abonnements internet pour
100 habitants. La cherté des prestations peut
expliquer en partie le nombre réduit d’abonnés,
le service prépayé au téléphone mobile coûtant
environ 14 dollars, soit plus que dans toute
autre région.
Contrairement aux autres régions, l’Afrique
centrale n’est connectée à aucun câble sous-
marin à fibre optique. À l’heure actuelle, seuls
l’Angola, le Cameroun et le Gabon ont
directement accès à SAT3/WASC (South Atlantic
3/West Africa Submarine Cable), le câble sous-
marin à fibre optique posé entre la Malaisie et
l’Afrique du Sud, qui remonte ensuite le long de
la côte ouest-africaine jusqu’au Portugal et à
l’Espagne. Les autres pays côtiers ou enclavés ne
sont pas inclus et n’ont pas non plus de
0
500
1000
1500
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2500
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3500
2009 2014 2019 2024 2029 2034
Scenario avec reformes des telecomunications
Scenario du statu quo
Scenario "Vision 2035"Source: estimations Banque Mondiale
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 15
connexion terrestre à fibre optique au réseau
régional, qui aurait pu leur donner une forme
d’accès indirect au service.
L’installation d’un certain nombre de systèmes
de câblage est prévue pour la région,
notamment l’Africa Coast to Europe (ACE) et le
West Africa Cable System (WACS), qui fourniront
un accès direct à la plupart des pays non
enclavés de la région. La pose de plusieurs
autres câbles sous-marins est prévue. Ainsi, il est
fort probable qu’en 2012, l’Afrique centrale soit
desservie par plusieurs câbles sous-marins. Par
exemple, le WACS reliant l’Afrique du Sud au
Royaume-Uni en passant par la côte ouest-
africaine et l’ACE allant de la France au Gabon
devraient être opérationnels en 2011.
Pour tirer profit de ces nouveaux projets, les
pays côtiers doivent créer un portail
international d’accès à ces câbles sous-marins,
et les pays enclavés doivent mettre en place des
connexions par fibre optique avec les pays
côtiers voisins. Des efforts dans ce sens sont
déjà en cours. La première phase du projet
Central African Backbone (CAB) entre le
Cameroun, la République centrafricaine et le
Tchad vise à améliorer la connectivité entre ces
trois pays par la pose de câbles en fibre optique
le long du tracé de l’oléoduc Tchad-Cameroun.
La mise en place de ces nouvelles infrastructures
sous-marines devrait permettre de réduire le
coût de l’accès à l’internet et des autres
communications internationales. Elle donnera
accès à une technologie moins coûteuse et
favorisera la concurrence entre fournisseurs.
Bien que l’accès au câble sous-marin soit une
condition préalable à la réduction du coût des
principaux services fournis par les TIC, ce n’est
toutefois pas une condition suffisante : une
concurrence accrue, y compris pour l’accès aux
portails, est également nécessaire.
Perspectives : Le projet Central African Backbone
Le réseau CAB est un réseau régional de
télécommunications. Il s’agit de connexions à
fibre optique terrestre vers des câbles sous-
marins à fibre optique reliant plusieurs pays
d’Afrique centrale et fournissant à la région un
accès à large bande numérique vers le réseau
mondial à fibre optique. Outre l’installation
d’une nouvelle infrastructure à fibre optique
d’environ 2 200 km de long, le réseau à large
bande envisagé mettra en valeur les 1 000 km
de fibre optique déjà existant le long du tracé de
l’oléoduc entre Kribi (Cameroun) et Doba
(Tchad).
Selon l’étude de préfaisabilité qui a servi de base
à la conception du projet CAB, pour que ce
projet soit rentable et génère les économies
d’échelle attendues, le réseau CAB doit être une
infrastructure partagée promouvant un régime
de libre accès dont la propriété et l’exploitation
se feront selon les principes du partenariat
public privé (PPP). En mai 2007, sur la base des
conclusions de cette étude, les chefs d’État des
pays de la CEMAC ont adopté une déclaration
appelant au lancement du CAB dans le respect
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 16
des principes de libre accès et de partenariat
public-privé.
La structure du CAB nécessite l’arrivée sur le
marché de nouveaux opérateurs régionaux de
télécommunications pour la revente de la
capacité internationale, régionale et nationale
aux opérateurs et prestataires de service
nationaux dans les pays en question, en
pratiquant des prix inférieurs au niveau actuel.
Ainsi, le réseau CAB permettra une concurrence
accrue pour l’approvisionnement de la capacité
internationale et nationale à travers de
nouvelles infrastructures, un réseau de base à
fibre optique, alternative à la connectivité par
satellite et micro-ondes.
Le rôle du gouvernement est de prendre des
mesures incitatives pour encourager la mise en
place d’infrastructures et l’offre de services dans
des zones normalement peu rentables pour le
secteur privé s’inscrivant dans une perspective
purement commerciale. Le secteur privé devrait
participer au financement, à l’installation, à la
maintenance et à l’exploitation du réseau CAB.
Enjeux et perspectives au Cameroun
Malgré la poursuite de la pénétration de la
téléphonie mobile au Cameroun, le secteur des
télécommunications se heurte toujours à des
obstacles juridiques, réglementaires et
opérationnels, sous l’effet desquels le
classement du pays à l’Indice de développement
des TIC de l’UIT1 s’est détérioré entre 2007 et
2008. Pendant cette période le pays est passé de
la 132e à 138e place d’un indice qui regroupe 159
pays (Figure 16) 2.
Graphique 16 : Rang de pays classés à l’indice de développement des TIC, 2008
La téléphonie fixe et la téléphonie mobile étant
en situation de monopole et de duopole,
respectivement, la structure du marché est
pratiquement restée la même depuis 2005,
comme le montre la courbe de l’Indice
Herfindahl-Hirschman Index3.
1 L'Indice de développement des TIC est un indice
composite bâti autour de 11 indicateurs couvrant l'accès à ces technologies, leur utilisation et les compétences en la matière. Il a été conçu pour mesurer le niveau et l'évolution des TIC au fil du temps et prend en compte la situation des pays développés et des pays en développement. 2 Dans le cas du Cameroun (comme dans celui des
159 pays), les dernières données de l'indice pour la période 2007-2008 montrent que le pays a amélioré ses résultats, ce qui confirme la pénétration actuelle des TIC et le passage généralisé à une société mondiale de l'information. 3 L'Indice de Herfindahl-Hirschman, ou indice HHI,
mesure la taille des entreprises par rapport au secteur d'activité considéré et évalue le degré de concurrence sur une échelle de 0 à 1 qui va d'un très grand nombre de très petites entreprises à un seul producteur en situation de monopole. D'une façon générale, lorsque l'indice augmente, la concurrence diminue et la concentration du marché s'accroît, et inversement.
0
20
40
60
80
100
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160
Botswana Gabon Nigéria Gambie Congo Côte Ivoire CamerounSource: ITU 2010
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 17
Figure 17 : Courbe de l’Indice Herfindahl-Hirschman au Cameroun, 2005-2009
Créé par décret (no 98/198 du 8 septembre
1998), détenu par l’État et placé sous la tutelle
du ministère des Postes et Télécommunications
(MINPOSTEL), CAMTEL détient le monopole du
service longue distance et est le principal
fournisseur de la plupart des bandes passantes
internationales. CAMTEL a aussi le monopole
des lignes fixes, des infrastructures de
transmission interurbaine et du portail
international. La compagnie est membre du
consortium SAT3/WASC et contrôle l’accès au
système SAT3 au Cameroun, ce qui lui donne la
haute main sur le marché de la bande passante
internationale dans le pays.
Il n’y a que deux opérateurs privés de téléphonie
mobile au Cameroun, Orange et MTN, qui
regroupaient plus de 96 % des abonnés fin 2008.
Ces opérateurs fournissent aussi des services
internet haut débit par le réseau WiMAX
(Worldwide Interoperability for Microwave
Access), un protocole qui assure l’accès fixe et
mobile à l’internet.
Du fait de cette structure du marché, le prix des
télécommunications est élevé au Cameroun
(Graphiques 18 et 19). Mesurés par un sous-
ensemble tarifaire « téléphones mobiles
cellulaires » en pourcentage du RNB par
habitant, le prix des services téléphoniques
mobiles est plus élevé que dans d’autres pays
comptant un plus grand nombre d’opérateurs
(le Kenya a délivré quatre licences, le Nigéria
neuf, le Sénégal, la Guinée et le Ghana trois
chacun).
Le coût de la bande passante internationale est
particulièrement élevé du fait du monopole
d’accès au système SAT3/WASC détenu par
CAMTEL. La qualité des services de
télécommunications est également en question
(Graphiques 20 et 21). Les ressources en matière
de bande passante internationale sont rares et
la pénétration et l’utilisation des services sont
plus faibles que ne le laisserait supposer le PIB
par habitant du Cameroun. En 2008, la
télédensité mobile dans le pays (34,53 pour
100 habitants) était inférieure à celle de
plusieurs pays d’Afrique centrale tels que la
République du Congo (54,84), la Guinée
équatoriale (49,01), et le Gabon (94,35).
Du point de vue juridique et réglementaire, le
pays est également confronté à de nombreux
problèmes comme la nécessité i) d’harmoniser
le cadre institutionnel des TIC afin d’assurer
0.45
0.46
0.47
0.48
0.49
0.50
0.51
0.52
2005 2006 2007 2008 2009
Evolution of Herfindahl-Hirschman Index in Cameroon, 2005 - 09
Source: Wireless Intelligence
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 18
l’homogénéité des opérations de l’agence de
régulation (ART), de l’Agence nationale des
technologies de l’information et de la
communication (ANTIC), de MINPOSTEL et de
tous les autres acteurs du secteur ; et ii) de
refondre la loi 98/014 de juillet 1998 relative au
télécommunications pour prendre en compte
les profonds changements intervenus dans le
secteur et disposer d’un instrument légal
moderne, complet, stable et réaliste, sur la base
duquel il sera possible de planifier, bâtir et
développer les télécommunications. Le
6 décembre 2008, le législateur a adopté un
nouveau cadre légal et réglementaire (Loi
régissant les communications électroniques au
Cameroun) qui devrait être promulgué
prochainement par le président de la
République.
Dans le contexte de la préparation de la
deuxième phase du programme CAB de fibre
optique, consacrée au financement de
l’infrastructure de connectivité du réseau (voir
plus haut), le Cameroun a engagé un dialogue
avec le Tchad et la République centrafricaine sur
l’adoption d’un cadre juridique permettant de
mettre en place et de gérer ce réseau dans le
respect des principes de libre accès et de
partenariat public-privé.
L’adoption d’un régime de libre accès dans le
cadre d’un partenariat public-privé visant à
promouvoir la concurrence et à optimiser le
Graphique 18 : Sous-ensemble tarifaire « téléphones mobiles », 2009
Graphique 19 : Sous-ensemble tarifaire « téléphones fixes », 2009
Graphique 20 : Bande passante internet international, 2008 Graphique 21 : Pénétration du marché de la téléphonie mobile, 2008
0,0
2,0
4,0
6,0
8,0
10,0
12,0
14,0
16,0
Cameroun Kenya Nigéria Sénégal Guinée Ghana
(en pourcentage du RNB par habitant)
Source : UIT 2010
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
Cameroun Ghana Zambie Kenya Angola Côte Ivoire Sénégal
(en pourcentage)
Source : UIT 2010
0
500
1000
1500
2000
2500
3000
3500
Gabon Sénégal Afrique du Sud
Ghana Côte Ivoire
Rwanda Cameroun
(bit par internaute)
Source : UIT 2010
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
Cameroun Sénégal Kenya Guinée équatoriale
Rép. du Congo
Côte Ivoire Gabon
(Pourcentage)
Source : Wireless Intelligence, December 2010, and staff calculations
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 19
potentiel des TIC pour permettre au pays de
faire office de pôle régional devrait présenter les
avantages suivants pour le Cameroun :
L’attribution d’une nouvelle licence de
téléphonie mobile à un opérateur privé
devrait être source de recettes budgétaires
importantes pour l’État et inciter très
fortement les opérateurs actuels à baisser
leurs tarifs.
La suppression de toute forme d’exclusivité,
par exemple en séparant l’unité SAT3 de
CAMTEL et utilisant des systèmes de câbles
sous-marins internationaux tels qu’ACE et
WACS, permettrait au secteur de donner toute
la mesure de son potentiel.
L’harmonisation des politiques réglementaires
au sein de la CEMAC, voire le rôle
réglementaire que la Communauté pourrait
jouer pour les télécommunications en Afrique
centrale, comme le fait la COBAC dans le
secteur bancaire, donnerait au pays un rôle de
pointe dans la région.
Une coopération active avec les autorités
centrafricaines et tchadiennes pour structurer
d’un commun accord le programme CAB
autour de principes de partenariat public-privé
et de libre accès faciliterait et dynamiserait le
processus de mobilisation des financements
nécessaires pour la mise en œuvre de ce
programme et l’adoption d’un instrument
spécialement conçu pour exploiter, maintenir
en place et gérer ce réseau.
Cahiers économiques du Cameroun
Janvier 2011 l Numéro 1 / Page 20
RÉFÉRENCES
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