une simulation numérique pour déterminer quand les poutres de la chambre du roi de la grande...
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Une Simulation Numérique pour Déterminer quand les Poutres de la
Chambre du Roi de la Grande Pyramide ont craqué
Par Richard Breitner, Jean-Pierre Houdin et Bob Brier
Traduit de l’anglais par Jean-Pierre Houdin
Résumé
Depuis plus d'un siècle, il est bien connu que les poutres formant le plafond de la Chambre du Roi et ceux des première
et deuxième chambres de décharge dans la Grande Pyramide sont fissurées. Cependant, on ne sait pas quand les
désordres se sont produits. Cet article présente les résultats d'une simulation numérique en réalité virtuelle 3D conçue
pour déterminer avec précision quand les poutres se sont fissurées. Il est suggéré que ces simulations numériques
pourraient avoir un large éventail d'applications à des questions archéologiques.
Introduction
En 1880-81, Flinders Petrie a été l'un des premiers, parmi ceux qui ont étudié la pyramide, à parler des
fissures dans la Chambre Funéraire de la Grande Pyramide. Petrie a estimé que le dommage a été causé " ...
sans doute par un tremblement de terre durant lequel chaque poutre a été brisée près de la partie Sud... » 1
.
Petrie réitère la notion du tremblement de terre en disant: « Tous ces mouvements persistent encore bien que
très petits - seulement de quelques 3 à 4 centimètres, - mais suffisants pour détruire la résistance théorique et
la stabilité de ces chambres et faire de leur chute une simple question de temps et de tremblements de terre
"2. Bien que de telles déclarations puissent suggérer que Petrie pensait que ces fissures se sont produites peu
de temps après que la pyramide soit terminée, il est clair que Petrie pensait qu’au moins quelques fissures
sont apparues alors que la pyramide était en construction. " La fissure dans la poutre de plafond la plus à l'Est
a été colmatée au ciment, laissant donc croire qu’elle avait craqué avant que la chambre ne soit été
terminée ». Petrie se réfère, bien sûr, au plâtre placé à l'intérieur de la fissure pour servir de témoin, ceci afin
de constater tout élargissement de la fissure. Une telle mesure indique certainement que les fissures sont
apparues lors de la construction, mais, comme nous allons le voir, pas nécessairement avant que la chambre
soit achevée.
Dieter Arnold est d'accord avec la suggestion de Petrie que les fissures se sont produites lors de la
construction de la Chambre du Roi et suggère que les chambres de décharge au-dessus de la Chambre du Roi
étaient une réponse aux fissures. « Mais les constructeurs, peut-être irrités par les fissures qui se sont
ouvertes lors de la construction, s’inquiétèrent de sa stabilité et ajoutèrent alors un système fantastique de
cinq chambres de décharge au-dessus »3.
Il y a certainement des preuves pour soutenir la théorie selon laquelle les fissures sont apparues lors de la
construction de la pyramide. Pour accéder à cette chambre de décharge, un petit tunnel a été creusé au
sommet de la Grande Galerie. En plus du plâtre en sous-face des poutres de la chambre funéraire, il y a aussi
du plâtre en partie haute de ces mêmes poutres donnant dans la première chambre de décharge. ______________________________ 1 W.M. Flinders Petrie, The Pyramids and Temples of Gizeh. (Histories and Mysteries of Man: London , 1990), 27.
2 Petrie, The Pyramids and Temples, 27
3 Dieter Arnold, Building in Egypt, ( Oxford, 1991), 183.
2
Il semble ainsi que seule une personne ayant une connaissance intime de la construction de la pyramide a pu
percer ce tunnel. Qui d’autre pouvait savoir qu'il y avait une chambre de décharge au-dessus de la chambre
funéraire et qu'un tel tunnel y donnerait accès? En outre, si un tel passage avait été creusé plus tard par des
chasseurs de trésor, pourquoi se sont-ils arrêtés à la première chambre de décharge? Pourquoi n’ont-ils pas
continué quand ils ont vu qu'il y avait encore une autre chambre au-dessus? Tout cela mène à la conclusion
que les poutres se sont fissurées lors de la construction de la pyramide, mais précisément quand?
La première étape a été de construire un modèle géométrique détaillé de la pyramide en trois
dimensions. Le rendu de la chambre funéraire et des cinq chambres de décharge était particulièrement
important. Seule la Grande Pyramide possède de telles chambres de décharge et elles sont uniques sous
plusieurs aspects.
La structure n'est pas homogène. Alors que la chambre funéraire est entièrement construite en granit,
les chambres de décharge sont à la fois constituées de blocs de granit et de blocs de calcaire, ces derniers étant
utilisés uniquement dans les chambres supérieures. Les murs des chambres de décharge sont indépendants,
non liés au noyau de la pyramide et comme Maragiolio et Rinaldi le soulignent, «Peut-être que seuls les
chevrons du toit sont liés au noyau »4. Avec une telle structure excentrique, il était essentiel d'avoir le modèle
3D le plus précis possible pour notre test.
En 1620, l'astronome d’Oxford John Greaves a publié la première enquête au sujet de la chambre
funéraire. Il était venu équipé de barres de mesure en laiton usiné avec précision, mais il semble qu'il ait été
submergé par son expérience à la pyramide et a commis des erreurs sur les détails les plus simples. Il a
indiqué que les murs de la chambre funéraire comportaient six rangées de pierre, alors qu’il n’y en a que
cinq5. En outre, n'ayant aucune idée de l’existence des chambres de décharge au-dessus, son étude était de peu
d'utilité pour notre projet.
Bien que la première chambre de décharge ait sans doute vu de nombreux visiteurs avant, l'astronome
d’Oxford Nathaniel Davison la visita en 1765 ; elle est nommée Chambre de Davison en son honneur. Bien
que Davison ait exploré la pyramide, il n'a pas cherché à entrer dans la deuxième chambre de décharge visible
au-dessus de la première. Il n'a pas non plus laissé une description minutieuse de la première chambre.
Le colonel Howard Vyse est le premier à être allé, en 1837, au-delà de la première chambre de
décharge. Il utilisa de la dynamite pour percer son chemin jusqu'à la dernière chambre. Son rapport en trois
volumes sur le plateau de Gizeh6 est encore d’une grande valeur pour les chercheurs modernes, et alors qu'il a
consacré deux gravures à une reproduction minutieuse des graffitis des ouvriers dans les chambres de
décharge, il n'a laissé aucun plan détaillé des chambres qu'il a découvertes.
En 1864, l'astronome royal d'Ecosse Piazzi Smyth a mené une étude détaillée de la Grande Pyramide,
mais étant à la fois influencé et obscurci par ses croyances religieuses excentriques, ses résultats publiés, là
encore dans la presse, se révèlent dans la plupart des cas de peu de valeur scientifique.
La première étude ayant une réelle valeur scientifique est celle réalisée par Petrie en 1880-81
mentionnée ci-dessus. Dans une large mesure, toutes les études ultérieures de la pyramide lui sont redevables.
Son enquête date maintenant de plus d'un siècle, mais elle est encore largement utilisée. Dans leurs relevés de
plans des pyramides memphites, Maragiolio et Rinaldi indiquent qu’elles dépendent des mesures de Petrie
parce que celui-ci a réalisé « .... des mesures de très haute précision »7.
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4 V. Maragiolo and C Rinaldi, L’Architettura Delle Pirimidi Memfiti. Part IV (Cheops) ( Rapallo, 1973), 133.
5 John Greaves, Pyramidographia, (London, 1736).
6 Howard Vyse, Operations Carried on at the Pyramids of Gizeh in 1837. 3 vols. (London, 1837-42).
7 Vyse, Operations, 5.
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Figure1 . Assemblage complet de la chambre funéraire : Granit en gris, calcaire en jaune, affaissement du
mur sud en rouge.
Eléments nécessaires pour une simulation numérique 3D
Pour réaliser une simulation numérique 3D de la construction de la Grande Pyramide il fallait encore
plus de données que celles apportées par Petrie. Heureusement, l'équipe française qui a mené une étude de
microgravimétrie de la pyramide8 a également produit des plans architecturaux détaillés de la chambre
funéraire et des chambres de décharge9. Ces plans ont servi de base pour notre modèle numérique
(Figures 1-2).
Dans l'industrie, les modèles informatiques des bâtiments, des avions, des voitures, etc. sont souvent
construits pour prévoir les faiblesses structurelles avant la construction proprement dite. Notre espoir était que
la construction détaillée d'une pyramide virtuelle en 3D, niveau par niveau, nous permettrait de voir les
faiblesses structurelles de la pyramide elle-même et de reconstituer l’historique de la fissuration des poutres.
Pour les modélisations virtuelles graphiques 3D, nous avons utilisé le logiciel CATIA ; notre logiciel
d'ingénierie mécanique était SIMULIA (Abaqus pour Catia), un programme utilisé dans l'architecture, mais
aussi dans les industries de l'aéronautique et de l'automobile10
.
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8 Hui Duong Bui, et al. ‘First Results of Structural Analysis of the Cheops Pyramid by Microgravity,’ in Proceedings of
the First International Symposium on the Application of Modern Technology to Archaeological Exploration of the Giza
Necropolis. (Cairo, 1988, 66-90. 9 Gilles Dormion, Pyramide de Cheops: Architecture des Appartements. (Lille, 1996).
10 Tous les logiciels de ce projet ont été fournis par Dassault Systèmes, Paris. L’équipe de l’étude qui a réalisé la
modélisation et fait tous les calculs était dirigée par Emmanuel Collard et comprenait Philippe Etcheverry, Julien
Lemarie, Estelle Ronsoux et Mehdi Tayoubi.
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Figure 2 . Assemblage complet de la chambre du Roi : dimensions
Une fois que les informations architecturales ont été saisies, les caractéristiques structurelles de
chaque bloc de pierre ont dû être ajoutées au modèle. La chambre funéraire et les chambres de décharge sont
construites en granit et en calcaire et les propriétés physiques pertinentes de ces deux pierres sont données
dans le tableau I ci-dessous.
TABLEAU I Caractéristiques des matériaux
Module de Young
(MPa)
Coefficient de Poisson Masse volumique
(kg/m3)
Granit 50,000 0.27 2,770
Calcaire 12,000 0.27 2,200
Parce qu'il y eu glissement de plusieurs parties de la chambre funéraire et des chambres de décharge, les
coefficients de frottement ont dû être pris en compte et ils sont donnés dans le tableau II.
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TABLEAU II Coefficients de frottement
Type de matériau en contact Valeur du coefficient de frottement
Granit/Granit 0.43
Granit/Calcaire 0.40
Calcaire/Calcaire 0.40
Les premières simulations
La première simulation informatique a consisté à tester la théorie de Dieter Arnold, c’est-à-dire que
les poutres se sont fissurées lors de la construction de la chambre funéraire et que les chambres de décharge
ont été construites en réponse à ces fissurations. Ce modèle était uniquement composé de la chambre
funéraire et des poutres du plafond ; il a montré peu de contraintes et pas de fissure. Ainsi, l'effet de la
gravité seule sur les poutres du plafond n'était pas suffisant pour provoquer des fissures. (Figure 3)
Nous avons continué à construire le modèle en ajoutant les deuxième, troisième, quatrième et
cinquième chambres de décharge, y compris les chevrons au-dessus de la cinquième chambre, et avons
trouvé des résultats similaires. Il n'y avait pas de contraintes importantes et certainement pas de fissures dans
les poutres du plafond. (Figure 4) En fait, les contraintes étaient inférieures à 3 MPa alors que la contrainte
en rupture à la traction du granit est d'environ 12 MPa. Notons que la stabilité et l'efficacité de cette
construction ne devraient pas être surprenantes. Sous la chambre funéraire, la Chambre de la Reine possède
un système de chevrons (sans chambres de décharge) pour supporter le poids de la pyramide au-dessus et
celui-ci est parfaitement stable. L'endroit logique pour rechercher la cause des fissures était donc les
imperfections dans la chambre funéraire et les chambres de décharge qui avaient été relevées par Petrie et les
autres. Il s'agissait de: 1) le glissement des chevrons au-dessus de la chambre funéraire et 2) l'affaissement du
mur sud de la chambre funéraire.
Parce que deux variables pourraient être impliquées dans le craquement des poutres, chacune a été
modélisée séparément pour voir les effets relatifs de chaque facteur. Dans notre premier modèle nous avons
pris en compte le fait que les chevrons ont glissé de 5 mm chacun (nous avons fait les mêmes simulations
avec un seul chevron glissant de 10 mm et nous avons obtenu le même résultat), mais pas le fait que le mur
sud se soit tassé. Avec cette simulation, les poutres à pleine charge (pyramide terminée) étaient beaucoup
plus contraintes (10 à 15 MPa) par rapport à la simulation sans glissement (2,5 MPa). (Figure 5) Il convient
de souligner ici que les poutres sont restées horizontales et étaient toujours en compression. Le point de
rupture de granit sous compression est très élevé (150-250 MPa) de sorte que le seul glissement des chevrons
n'aurait pas pu provoquer de fissures. Évidemment, la prochaine étape était de tenir compte de l'affaissement
de la paroi sud et voir l'effet des deux combiné.
Le nouveau modèle a montré que la combinaison de l’affaissement de la paroi sud et du glissement
des chevrons générait suffisamment de forces à pleine charge (pyramide achevée) dans les supports en granit
et en calcaire pour que les poutres soient prises dans un mouvement en tenailles. Celui-ci, combiné avec la
différence de hauteur entre les parois sud et nord, créait des contraintes en cisaillement dans les poutres. Les
extrémités des poutres étaient coincées entre leurs supports et sont restées horizontales, tandis que la longue
section des poutres enjambant la chambre s’est inclinée. (Figure 6) Le modèle a montré que les trois
premiers niveaux de poutres ont été les plus contraints parce que leurs supports ont été entièrement réalisés
en granit et elles ont craqué alors que la pyramide était en construction. Les quatrième et cinquième niveaux
étaient moins contraints parce que leurs supports en calcaire (partiels pour le quatrième plafond) se sont
tassés, permettant une déformation moindre des poutres en appui sur ceux-ci ; les poutres ne se sont pas
fissurées.
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Figure 3 . Contraintes Principales : 1er étage + gravité
Cette simulation a été la seule, parmi toutes les possibilités testées, qui a mené à une réplique exacte des
fissures dans les poutres des trois premiers plafonds.
Ce modèle a révélé un important défaut dans la conception des chambres de décharge qui
n’avait jamais été abordé. Sous les chevrons de calcaire il y a un remplissage (faux appuis) en blocs de
calcaire. Quand les chevrons ont glissé, une partie des forces qui étaient distribuée obliquement dans le corps
de la pyramide a été transmise verticalement sur ces blocs de remplissage, qui à leur tour, ont transmis ces
forces verticalement dans les poutres en dessous, provoquant une contrainte considérable conduisant au
craquement des trois premiers plafonds. Il est important de noter que sans les blocs de remplissage, les forces
auraient continué à être distribuées obliquement dans le corps de la pyramide et qu’aucune force n’aurait été
transmise aux poutres. Nous avons compris que l'inclusion de blocs de remplissage était un défaut de
conception, les Egyptiens n’ayant pas laissé assez d'espace au-dessus des blocs de remplissage de manière à
absorber toute déformation de la structure. Nous savions alors que les fissures se sont produites alors que la
pyramide était en construction, après que le mur sud se soit affaissé de 3 cm et que les chevrons aient glissé
de 5 mm chacun. Nous devons garder à l'esprit que nous parlons d’erreurs de quelques centimètres dans une
pyramide haute de près de 147 mètres. Notre prochaine étape était de déterminer précisément quand ces
fissures se sont produites pendant la construction de la partie supérieure de la pyramide.
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Figure 4 . Modèle complet : Gravité et chevrons fixes
Les dernières simulations: la fissure des Poutres
Parce qu’en prenant uniquement en compte le tassement du mur sud de la chambre funéraire et le
glissement des chevrons, les poutres de la chambre funéraire ne se fissuraient pas avec la gravité seule, nous
avons conclu que la charge de la pyramide au-dessus des chambres de décharge pouvait être un troisième
facteur nécessaire pour provoquer les craquements. Alors que nous construisions le modèle de la pyramide
au-dessus de la chambre funéraire couche par couche, des indications de contrainte accrue ont commencé à
apparaître, mais aucune poutre ne craquait. Toutefois, lorsque la hauteur sur l'axe central de la pyramide
virtuelle a atteint environ 120 mètres (à plus ou moins 5 mètres), toutes les chambres de décharge étant
achevées, les poutres de la chambre funéraire ont craqué. La diffusion des fissures dans les poutres virtuelles
était la même que celle sur les poutres réelles ; au sud, sur la face inférieure de l’extrémité libre des poutres
et, au nord, dans la partie supérieure des extrémités. (Figure 7) Au moment des fissurations, il y avait environ
55 mètres de pierre au-dessus des chevrons, ce qui, combiné avec l'affaissement de la paroi sud de la
chambre funéraire et le glissement des chevrons, a causé les fissures. Cela nous a permis de reconstituer les
séquences d’apparition des fissures lors de la construction de la pyramide.
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Figure 5 . Modèle complet : Gravité + chargement chevrons + glissement des chevrons
A environ 120 mètres de hauteur, au moment où les poutres de la chambre funéraire se sont fissurées,
98,5% du volume de la pyramide était achevé. Nous avons continué notre modélisation de la construction de
la pyramide, et quand la pyramide a atteint environ 130 mètres (plus ou moins 5 mètres), la charge était
suffisante pour casser le deuxième ensemble de poutres, ceux au-dessus de la première chambre de décharge.
Ensuite, les poutres du plafond de la deuxième chambre de décharge ont craqué quand la pyramide a atteint
environ 140 mètres de hauteur (plus ou moins 5 mètres), à seulement quelques mètres du sommet. En
revanche, les quatrième et cinquième séries de poutres n’ont jamais craqué parce que la pyramide était
achevée et qu’il n'y avait pas une charge suffisante au-dessus de ces poutres pour qu’elles craquent.
La réaction aux fissures à l’époque
La simulation numérique nous a permis d'identifier les facteurs qui ont causé la fissuration des
poutres et de faire également une estimation raisonnable du moment où elles se sont fissurées. Elle nous a
permis aussi de mieux comprendre la séquence des mesures prises par l'architecte de la pyramide,
Hemiounou, lorsque les poutres se sont fissurées.
Il avait déjà terminé les chambres de décharge et construisait la maçonnerie de la pyramide au-
dessus lorsque les poutres de la chambre funéraire se sont fissurées. Avec encore environ 30 mètres à
construire pour atteindre le sommet, il lui fallait absolument savoir si la chambre funéraire était
suffisamment stable
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Figure 6 . Modèle complet : Gravité + chargement chevrons + glissement des chevrons +tassement du mur
sud (6mm)
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Figure 7 . Modèle complet, poutres 1 à 4 : Gravité + chargement chevrons + glissement des chevrons
+tassement du mur sud (6mm)
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pour supporter le poids supplémentaire qui s’accumulait au-dessus. Il a donc placé du plâtre dans les fissures
pour servir de témoins afin de surveiller ces fissures tandis que la charge augmentait au-dessus. De plus, il a
fait percer une petite ouverture dans le mur est au sommet de la Grande Galerie et fait creusé un tunnel afin
de pouvoir entrer dans la première chambre de décharge, déjà scellée, et ainsi de mieux pouvoir évaluer les
dégâts.
Il a pu constater que les faces supérieures des poutres de la chambre funéraire avaient craqué à leur
extrémité nord, mais que la chambre était intacte car les poutres formant le plancher de la deuxième chambre
de décharge ne s’étaient pas fissurées. Plus tard, quand ces poutres ont craqué, il retournera dans la première
chambre de décharge pour contrôler les dégâts, mais il ne fera pas creuser un second tunnel pour vérifier la
deuxième chambre de décharge, ayant le sentiment que cela n'était pas nécessaire. Par contre il plaça du
plâtre dans les fissures des poutres du plafond de la première chambre de décharge, pour à nouveau surveiller
la stabilité de la structure. Comme la construction de la pyramide continuait, les poutres au-dessus de la
deuxième chambre de décharge ont craqué, mais Hemiounou ne prit aucune autre mesure spéciale car les
témoins au plâtre dans les poutres de la chambre funéraire et dans la première chambre de décharge
n’avaient pas bougé (quarante-cinq siècles plus tard, ils n'ont toujours pas bougé). Cependant, comme la
pyramide était en voie d'achèvement, la charge au-dessus devenait insuffisante pour casser la prochaine série
de poutres. Hemiounou était maintenant pleinement convaincu que la chambre funéraire était assez solide
pour protéger la momie du roi et a continué de l'avant, achevant la Grande Pyramide.
Conclusions
La simulation virtuelle en 3D de la construction de la Grande Pyramide a, à ce jour, apporté la
meilleure explication de la cause des fissures dans les poutres de la chambre funéraire et des chambres de
décharge de cette pyramide. Tout indique que les poutres ne se sont pas fissurées toutes en même temps à la
suite d'un tremblement de terre ou d'un autre traumatisme. Au contraire, les poutres ont craqué
séquentiellement lors de la construction de la pyramide, mais après que la chambre funéraire et ses chambres
de décharge eurent été achevées. La cause des fissures est une combinaison de trois facteurs: 1) Le
glissement des chevrons de calcaire au-dessus de la cinquième chambre de décharge; 2) L'affaissement de la
paroi sud de la chambre funéraire et 3) La charge liée à la maçonnerie de la pyramide au-dessus des
chambres de décharge. Cette explication est conforme aux traces physiques visibles à l'intérieur de la
pyramide (plâtrage dans les fissures des poutres et percement d’un tunnel pour atteindre la première chambre
de décharge) qui indiquent la réaction de l'architecte de l’époque dès l’apparition des premières fissures.
L'utilisation de logiciels sophistiqués pour modéliser l'architecture ancienne n'est pas
nouvelle. Par exemple, la Bab al-Barqiyya, une porte fortifiée au Caire construite par Salah Al Din
(circa 1176) a été modélisé en 3D11
. Toutefois, à notre connaissance, c'est la première fois qu'un
logiciel de conception numérique assistée 3D (CATIA) a été combiné avec un programme intégré
d’ingénierie par analyse d’éléments finis (SIMULIA) pour étudier les éléments structurels dans la
réalité virtuelle. L'étude dans la réalité virtuelle nous a permis de voir la Grande Pyramide en 3D,
tout en testant une hypothèse structurale. Le succès de cette application à la Grande Pyramide de
Gizeh suggère que des applications vers d'autres sites archéologiques, pour déterminer la cause de
défaillances structurelles, pourraient donner des résultats intéressants.
Dassault Systèmes, Paris
C. W. Post Campus, Long Island University
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http://archive.cyark.org/bab-albarqiyya-intro.