LA RECHERCHE ESPAGNOLE EN CRIMINOLOGIE DANS LESANNEES199O :

NOUVELLES APPROCHES POUR ANALYSER LA CRISE

Esther Girnénez-Salinas Colomer Amadeu Recasens i Brunet José Luis DonringuezFigueirido, avec la collaboration de Anabel RodrtguezBasanta

,, I - Le cadre sociologique et institutionnel de la crirninologie espagnole

S'íl est toujours compliqué de réaliser une synthése ou un résumé desrecherches scientifrques développées dans le cadre d'un secteur déterrniné, cettecornplexité se trouve particuliérement accentuée lorsqu'il s'agit d'analyser les dornainesde l'ordre et du conüóle pénal en Espagne au cours de cette derniére décennie. Leschangements sociaux, normatifs et institutionnels ainsi que la modification des cenfresd'intérOt liés aux phénornénes cités établissent un panorama nouveau., et ceci rnéne árecomlnander une réactualisation des lignes établies pour ce qui est des fravaux sur cesujet ayant trait á des périodes antérieurest.

En effet, ces demiéres années, l'Espagne a été marquée par la consolidation dela démocratie mais aussi par la pleine intégration de la société espagnole dans les dyna-rniques européennes. Ceci a perrris le développement des études en criminologie (au$ens large du rnot) - avec, bien sfu des différences de temps et d'échelle - d'une fagontrés proche des lignes générales de cet environnernent géographique, politique et écono-mique, nr0me si on peut encore trouver des caractéristiques tributaires d'un cadre acadé-mique et de support á Ia recherche qui est - rnalgré quelques efforts isolés - encore tropfaible.

La constitution d'un espace plus ouvert en Europe - du moins du point de vueinterne - et [a promulgation du traité de I'Union Européenne á Maastricht en 1992 ontétabti les conditions de [a pleine intégration espagnole de fait (elle l'était déj¿ en droit)eu sein de la sosiété européenne, mais cela a comporté en m€me temps I'apparition deproblémes déterminés (crime organisé, mafias en tous genres, blanchiment d'argenlctc.), I'adoption naissante de mécanisrnes communs de lutte contre css derniers(conshruction d'un état policier et judiciaire européen) et I'application, avec le débat quicn découle, de certaines politiques sociales et pénales qui présentent d'importants pointsde contact.

Un auke facteur dhornogénéité est celui qui a trait aux modifications apparuesdans l'espace comrnunicatif, tel le.cas du phénornéne "Intemet". Ce type de change-ntent, entre autres consfuuensss, a favorisé I'intégration de la recherche espagnole dansles réseaux européens tout en créant les conditions nécessaires pour faciliter untléveloppement en paralléle des lignes de havail et un échange continu d'inforrnations.Ainsi, le réseau scientifique s'est étendu et ses connexions nationales et internationalessont devenues plus complexes.

I Girnénez-Salinas, Funes, I993.

Crime et justtce en Europe deputs i'990

Les années 1990 ont également signifié un changement important pour I'insritutionnalisation universitaire de la crinrinologie. La réfonne des plans d'études tJc:,wriversités espagnoles a facilité l'inclusion dans certaines facultés de droit et tk'sociologie, essentiellemen! de mati.éres - nonnalement optionnelles et donnant droit *une quantité relativement réduite de crédits universitaires - ayant trait á ce charn¡rthématiflue. De cette maniére, la diffusion et le débat scientifique des connaissances (:rlcriminologie atteindront un public professionnellement plus large que celui des institr¡rsde criminologie et des centres spécialisés rattachés aux administrations publiques.

Mais cela signifiera un réel développement de la recherche en criminologir:sous deux conditions uniquement. La premiére est étroitement liée au fait qu'on puissr:obtenir des crédits, ou des heures de cours. Si la crirninologie se présente comme urlsimple devenir historique des écoles de pensée qui ont influé sur les maniéres de voilIes phénoménes de la délinquance, de Ia déviance ou du contróle social, elle pou¡r¡rdifficilement avoir une influence effective en ce qui concerne la préparation dcsjuristes, des sociologues ou d'autres professionnels du futur. Il est par conséquent urgcrrlde déterminer le róle informatif que de telles matiéres peuvent développer au sein clcl'université espagnole.

La deuxiérne condition est en rapport avec la création de structures stables quisuscitent la recherche. La possibilité de développer la recher+e de haut niveau cncriminologie est intimement liée á ce facteur de caractüre éconornique - prenonsI'exemple du Centre d'Etudes Juridiques et de Formation Spécialisée, qui, pendant dixans, a eu un r6le prépondérant á ce sujet - ainsi qu'¿ la normalisation d'une sfir¡cturcd'études de Master et de doctorat qui permette une formation interdisciplinaire elspécialisée. Voilá la ligne qui a été adoptée dans différentes régions du pays (InstitutBasque de Criminologie, Institut Andalou Interuniversitaire de Criminologie, Universitúde Castilla-La Mancha, Département de Justice de la Généralitat-Université Autononlc

. de Barcelone, Département de Droit Pénal et de Sciences Pénales de la Faculté de Droirde I'Université de Barcelone, Ecole de Police de la Catalogne, etc.) et qui commenccdéjá ¿L produire une intéressante collaboration entre le monde universitaire et lcsadm inistrations publiques.

Il n'est pas exagéré de dire que les ressources destinées á la recherche enmatiére de contr6le pénal sont décentralisées (ce qui est en partie logique cornpte tenude la structure administrative espagnole, constituée de trois niveaux différents etautonomes) et sont en plus réduites et ne se trouvent pas identifiées á des lignesinstitutionnelles d' appui spécifiques et stables.

Mises á part les ressources qui ont été destinées á certaines expériences liéesaux enquétes de victimation (dont la mairie de Barcelone en est sans aucun doute lapionniére) et des enquétes du Centro de Investigaciones Sociológicas,les chercheurs enEspagne ont du mal á créer ou á trouver des réseaux spécifiques pour intégrer leursprojets.

La recherche ernpirique n'a donc pas pu se développer d'une fagon cohérentedans les divers aspects sociaux de la question pénale, et encore moins réaliser ledéman age quantitatif qu'on pouvait attendre au vu de la richesse thématique et

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La recherche espagnole en criminologíe doru les années 1990

I'exigence de réalisme qui s'est irnposée dans I'université ainsi que de la part despouvoirs publics.

L'effort dispersé rnais existant, proúrit aussi des conséquences positivos. Dansce sens il faut souligner que l'évantail des publications criminologiques présente undynam.isme accru depuis quelques années. Les re\rues spécialisées semblent se stabiliseret des ouvrages sont publiés chez des éditeurs connus. De mOme, plusieurs bulletinsd'information sont parus (Beccaria, Boletín Criminológico, Criminoticias, Justidata,Notícias Criminológicas, etc.), qui jouent un róle d'informateur et dpamisant desnouvelles, recherches, acüvités académiques, publications, etc., et en méme tempsconstiírent le substat de la consbrction d'une communauté scientifique tr&s diverse enelle-rn6me, qui a su étre consciente du besoín de créer des espaces d'organisation et derencontre.

A cóté des activités de dimlgation destinées á un public relativement vaste, onfrouve aussi des espaces consacrés á Ia connaissance et débats des recherches en cours.Dans ce sens il faut souligner [e róle de l'&rstituto Internacional de Sociología úrídica,(qui se houve au Pays Basque), et des congrés organisés par la Federación Española deSociologta, oü la criminologie et la sociologie juridique ont toujours eu leur place.

Dans le cadre mentionné, une premiére approche de la production en matiérede crirninologie espagnole dans les années 1990 nous indique que les questions dérivéesde Ia redéfinition de fEtat-providence et celles qui sont liées au dévetoppement decertains leitmotivs européens ont participé á l'évolution des études sur la criminalité et lecaractére conflictuel des problürnes sociaux

ll - Les grandes lignes du développement de la production criminologique'espagnole des années 199O

Pour ce qui est du prernier théme, íl faut tenir compte du fait que la fansitiondémocratique espagnole s'est accompagnée du besoin irnpérieux de se joindre á I'effortd'intégration européenne cité plus haut. L'élément positif que ce double effort aentrafné, c'est le fait d'avoir atteint un ftés haut niveau de rnodernisation en un laps detemps trés bref, ce qui a supposé I'accélération des processus de changement culturel etpolitique ; mais cela a égalernent supposé des processus cornplexes de reconversionindustrielle et de rernise en cause des politiques économiques, nécessaires pour pouvoiratteindre les critéres d'homologation exigés par les partenaires européens. Deux aspects,gui, comme il fallait s'y atte¡rdre, ont engendré une recrudescence importante desconflits sociaux.

Ce qui importe ici, est que ces processus de changements se produisent enpériode de pleine redéfinition, ou - selon une autre perspective - de crise de I'Etat-providence. Il convient aussi de rappeler que cette forme-Etat n'était pas connue - dumoins dans sa plénitude et selon les mOmes paramétres historiques - de la sociétéespagnole du fait de lisolement socio-éconornique et politique provoqué par la dictaturefranquiste.

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Crime et justice en Europe depuís I99A

Cette redéfurition du r6le intégrateur et redistribuúsur de l'Etat a exigé unetáche de rationalisation (accompagnée á certaines occasions de réductions des inves-tissements) de la part des administations publiques, de sorte qu'elles se sont \ruesobligées do favailler et tenter de maintenir un niveau raisonnable d'acceptation socialedans des situations caractérisées par la polarisation sociale, l'existence de demandesdiversifiées et les exigences de participation et d'accés aux institutions, sans compter surles moyens qui avaient caractérisé les politiques de protection sociale des pays les plusavancés, lors de décennies antérieures.

L'exigence de politiques publiques fávorisant les processus d'intégration et departicipation de la population était trés tiée au besoin de trouver de nouvelles formes delégitimation politique. Un Etat moins bienfaiteur, mais pas pour autant moinsinterventionniste, devrait, semble-t-il, avoir besoin de chercher sa justification au deláde l'idée de pure et simple légalité en se servant de deux stratégies compatibles entreellesz : d'une pffi,. I'idée d'obtenir [e consensus social - si possible de fagon anticipée -des groupes impliqués en rappoft avec les politiques publiques, surtout ceux qui tententde faire face á des sifuations pertinentes de risque social, a gagné en irnportance. D'autrepd, I'obtention d'objectifs sociaux qui s'approchent de la demande de la population aexigé qu'on assouplisse au maximum les mécanismes normatifs de prise de décision.Comrne on le verra dans le paragraphe suivant, ces deux aspects ge trouvent reflétésdans la perspective depuis laquelle on envisage une bonne partie des études réaliséestout au long de ces années,

Pour ce qui est du second aspect évoqué supra, il est possible d'identifier - sansaucun doute comme une option personnelle ente auhes possibles - kois leitmotivsfonda¡nentaux dans Ie cadre du confróle pénal européen de ces derniéres décennies. I1convient en premier lieu de souligner le probléme du terrorisme, qui s'est propagé enEurope au cours des années 1970. L'Espagne continue de viwe une séquelle de cetteétape qui présente des caractéres propres, dérivée d'une fagon déterminée de poser leproblérne de I'intégration de la nationalité basque dans I'ensemble de l'Etat e! surtout,de I'incapacité de groupes déterrnínés á faire une distinction entre ce qui, pendant lefranquisme, avait pu éhe considéré comme une lutte pour les libertés politiques et cequi reléve aujourd'hui d'une stratégie de confrontation violente avec un systémedérnocratique.

En ce qui concerne le cadre de notre travail, il faut souligner que le fait demaintenir cette stratégie de confrontation peut déformer divers secteurs de la réalité, enparticulier celui des politiques pénales, et aussi maintenir vif l'intér€t pragmatique etconceptuel poru les questions ayant trait á la violence.

En second lieu, comme on le sait, la question de la drogue, á partir des années1980, a constitué un des centres privilégiés d'attention des politiques sociales et pénaleseuropéennes. Dans le cas espagnol, [a drogue atteint la qualification de probléme socialá partir de la moitié de cefte désennie et ce sur la base de deux définitions différentes :

2 DomÍngue4 1996,

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La recherche espagnole en crimtnologie dans les années 1990

celle d'une populaÉion qui présente des problémes á caractére médicat, social ou pénalassociés á différentes pratiques de consommation et celle d un espace territorial quidevient une zone de transit privilégiée pour le trafic de substances illicites. Il convienüde remarquer gue cette défurition de.la drogue comme probléme social a eu beaucoup ávoir avec la resüscturation du marché du tavail espagnol, et Qr€, par conséquent, elles'est développée en suivant les dynamiques liées á ce qu'on appelle la culturo duchómage, qui a touché essentiellement la jeunesse.

Finalemenq.tout au long des années 1990, une nouvelle problématique liée áI'idée de zone de passage est apparue, mais óette fois, liée á la question de la librecirculation de la population sur le territoire de l'Union Européenne. La question de lacriminalité organisée d'une pd, et celle des diverses manifestations conflictuellesassociées aux flux migratoires de I'autre (violence raciste, irrunigration clandestine, etc.)ont exigé la mise en place de politiques européennes coordonnées et sont devenues unélément obligatoire de réflexion dans notre pays. Dans cette mesure, le territoireespagnol se voit non seulement touché par sa proximité géographique avec Ie Nord ducontinent africain, mais aussi par I'ensemble de phénoménes sociaux survenus á la suitede la chute du mur de Berlin, phénoménes qui ont faiü émerger la question de lareconsbuction européenne - bien sür également dans sa dirnension de conffóle social -conrme un des &(es de base des politiques mentionnées.

Un autre facüeur fondamental pour comprendre l'état actuel de la productioncriminologique espagnole et pour prévoir son développement dans les prochainesannées concerne les changements normatifs que les circonstances politiques internes etles processus indiqués plus haut ont impliqué.

I-e niveau actuel de développement des analyses des politiques institution-nelles, le fonctionnement effestif des mécanismes pénaux, la production nonnative,etc... ne peuvent éte compris que si l'on tient cornpte de la fagon dont se construit lesystérne pénal et sa signification socio-politique. Cette donnée normative, méme si ellen'a pas eu encore le développement scientifique souhaité, produit des dynamiquescomplexes au niveau institr¡tionnel, politique, social, qui annoncent un développenentfutur de la ¡echerche.

La stabilité du systérne démocrati{Bo, qui pour certains observateurs estexprimée une fois de plus par la premiüre altemance politique au gouvernemenf maisqu'on appréciait déj¿ depuis quelques années, a pernís d'aborder des réfonnes législa-tives de fond dans le cadre pénal qui, d'une fagon ou d'une autre, se trouvent connectéesaux facteurs sociaux auxquels nous avons fait référence.

Sans prétendre éFe exhaustifs, nous pouvons citer, parmi d'autres secteurstouchés, les réfonnes de la juridiction des rnineurs (1992), la sécurité publique (1992),les rnécanismes de protection des témoins et des experts dans des causes crirninelles(1995), fassistance aux victimes de délits contre la liberté sexuelle (1995), le hibunalanti-cormption (1995), le tribunal du juy (1995), I'assistance juridíque grahrite (1996)et le réglement pénitentiaire (1996). Certaines cornmunautés autonornes ont égalementlargement utilisé leurs compétences en ces domaines, conune c'est le cas de la catalane,

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(.lrinrc er justice en Europe depuis 1990

qui méne á bien depuis les années 1980 des politiques institutionnelles spécifiques dansle cas de thémes tels que police, justice juvénile et toxicomanies.

Mais sans aucun doute la réforme de plus grande envergure est celleconsidérée par la loi organique 1011995, du 23 novembre, oü a été voté, par un héslarge consensus parlementaire, aprés dix ans de brouillons successifs et de projets delois qui n'avaient pas abouti, [e code pénal que certains secteurs de la docfrine ontdénommé de Ia démocratie.

Ce texte établit une nouvelle systématique, entarne une nouvelle étape d'essaid'un nouveau systéme de peines, et redéfinit - €il essayant de les rationaliser - certainstypes pénaux. Le second aspect cité avait été l'un des plus attendus et débattus en sonmomen! étant dónné qu'il représentait I'espoir, dans note pays, d'en fmir avecI'hégémonie de la peine privative de liberté. I1 faut tenir compte du fait qu'avant Iapromulgation du nouveau code, I'Espagne se trouvait en téte de I'augmentation relativede la population pénitentiaire, car il s'était produit un accroissement jusqu'en 1995 deI'ordre de. 67% (en 1985 la population pénitentiaire s'élevait ̂ 22 802 individus, tandisqu'en L995 ce chiffre était passé e 46 493).

Cependant, certaines voix critiques se sont élevées depuis la doctine et lesrnilieux proches des tibunaux, rnettant en garde conüe certains aspects de ce code,regrettant la précipitation finale de tout son processus parlementai¡e et considérant qu'ilne satisfaisait pas les attentes de dépénalisation de certains secteurS sociaux bien que, enle comparant avec son prédécesseur, il faut souligner que le législateur en restreintclairemen-t la portée punitive, ou qu'il n'a pas profité de cette opportunité pour inüoduiredes éléments comme le principe d'opporhrnité, la médiation, Ia conciliation, etc. Plusconcrétement, pour ce qui est de la question des alternatives á la peine privative delibefté, on a souligné le risque gue, par le biais de facteurs comme la méconnaissanceou Ie manque de mécanismes d'application pour sa mise en marche, ce ne soient que depures formules nominales.

Pour valoriser sa portée sociale effective, il faut ajouter á la trés courte, encore,période de vie du code (entré en vigueur Ie 25 mai 1996), d'importantes carences de sondéveloppement normatif. La plus significative consiste en l'absence d'une loi qui réglela responsabilité pénale du mineur, mais l'existence d'un avant-projet dans ce senspennet de nourrir I'espoir que les démarches á ce sujet ne sauraient tarder.

La réfofTne pénale n'aura pas de sens, non plus, si elle ne s'accompagne pasd'une nouvelle loi de jugement criminel qui permette d'actualiser et de modemiser toutle processus pénal. La loi actuelle, vieille de plus d'un siécle, était un rnagnifique instru-ment pour son époque mais les retouches successives et Ie déphasage déterminé par letemps ésoulé depuis exigent un nouveau texte dans lequel il faut prendre d'importantesdécisions (telle que se définir sur .l'option enfe un juge d'insfuction ou un juge degaranties, ce qui prédétermine des élérnents fondarnentaux ayant üait á la bonne marcheaussi bien du processus comme du r6le de procureur, de la police judiciaire, etc.).

Bien que nous ne puissions pas encore compter sur une production théorique etempirique pertinente dans le cadre de la production de la réglernentation pénale, otr peutespérer que - vu l'arnpleur des changements qui se sont produits - cette branche de la

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La recherche espsgnole en crímínologie dans les années i'990

sociologie commence á se réveiller dans nohe pays. La réforme du code pénal elle nonPlus, n'a pas été l'objet d'une analyse détaillée d'un point de \rue sociologique oucrininologique, méme s'il existe une prise de position á titre théorique3, qui a étédébattue lors de diffrrents congrés et colloques, et il semble logique de penser qu'elle vaconstituer une aire d'attention privilégiée au cours des prochaines années, surtout du faitde I'effort budgétaire et institutionnel que la mise en Guvre de ces nouveautés suppose.

lll - Les différents champs thématiques de la recherche espagnole encriminologie

1 - Etudes sur la délinquance, la marginalisation et l 'aspect confl ictuel desproblérnes sociaux

On observe dans ce chapite une irnportante production d'études sur lescontrevenants de la norrne pénale et sur les formes de délinquance. Naturellement, ellesfont référence á des charnps thémaüques divers, bien qu'il soit possible de constaterI'int¿rét pour toute une série de lignes de travail qui permeüent de fxer la recherche encriminologíe dans le cadre precédemment cité.

Comme c'était le cas dans les années 19804 I'intér0t pour Ie phénoméne de ladélinquance juvénile est toujours important, mais aujourd'hui tous les thémes y sontcomparés. Nous trouvons ainsi un bon nombre de travaux sur les différentes formes deviolence qui se produisent :

a) dans le cadre de la famille - rnanifestatíon d\rne cerüaine déstructuration desrelations nricro-sociales ;

b) sur les relatíons possibles entre le fait d'eft femme et la réalisation de'conduites délichrelles - cotnme conséquence de sa pleine intégration aux processusproductifs ;' c) sur les connexions qu'on peut établir entre consommation de drogues illiciteset délinquance - marquant ainsi un terrain oü I'interrogation sur les nonnes decomportement sernble conduire, d'un point de vue favorable á I'interdiction, á desfonnes d'exclusion sociale ;

d) sur les comportements liés au racisme et á la xénophobie - qui rendentmanifeste, en derniére instance, la difficulté á cohabiter avec et á accepter l'aute dansdes situations caractérisées par Ia complexité norrnative ;

e) sur la criminalité organisée et la récidive.Cette pluralité thématique est abordée par des points ds vue théoriques et

disciplinaires divers ; il faut cependant souligner des lignes comrnunes á tous cestravaux, qui sont constantes dans les divers champs analysés.

En premier lieu, si dans les années 1980 il était habituel que les auteurs -pionniers en ce sens - délimitent les cad¡es en matiére de crinrinologie et introduisent

'Aa.Vv., 1996b.o Giménez-Salinas, Funes, 1993, 105.

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Crime et justice en Europe depuis 1990

les perspectives théoriques, fondamentalement européennes, quí apportaient deséléments de réflexion et de débat par rapport á ces cadres, on observe actuellement unintérét pour établir les régles réelles des phénomdnes étudiés.

n existe quand m€me des réflexions théoriques, souvent dans le cadre depublications ou de débats sur l'état actuel de la crirninologies. Ou trouve aussi deseuwes sur les écoles récentes qui ont influencé la recherche en Espagne6 ou qui tententune approche historique du róle de certains courants7.

Une fois connu le cadre de la discussion, et compte tenu du fait qu'il n'existepas de théorie générale qui offre des solutions d la carte, et que les réajustementsbudgétaires exigent de tirer le plus grand parti possible des investissements publics, ilsernble logique que les chercheurs se préoccupent de touver des indicateurs fiables ápropos des problématiques abordées. Cette stratégie du üavail scíentifique quotidienpermettrait, théoriquement, de concevoir une intervention institutionnelle réaliste face áces problérnatiques, ou, tout au moins, de dessiner un panorama quantitativement clairau sujet de leur portée.

En second lieu, cette demande de réalisme est connectée avec une plus grandeexigence de rigueur méthodologique, de sorte que la recherche ernpirique a augmentéen nombre et a gagné en diversité. Par rapport á cela, il convient de souligner qu'on nese contente pas de comrnencer á exploiter l'information institutio.nnelle disponibles,mais aussi, selon le type d'étude, de s'adresser directement á la version du collectifimpliqué par le biais d'enquétest, ou d'autres techniques.

Toufefois, une approche réaliste - tant institutionnelle que scientifique - duphénoméne de la délinquance sur le tenitoire espagnol butte encore confe les gravesproblémes posés par les statistiques policiéres et judiciaires á ce sujetro. En guise dediagnostic global, il est possible de dire que nous nous touvons confrontés á uneinformation partielle et sans aucune coordination. Il faut néanmoins reconnaftre que desprocessus de rationalisation á ce sujet ont été entamés - non-exempts de difñcultéstechniques et opérationnelles - aussi bien de la part des instances policiéres, touchantpar conséquent pour I'heure les corps de police qui dépendent du rninistére de ['Inté-rieur, la police basque et catalane, que de la part du Conseil Général du pouvoir judi-ciaire.

Ces lignes générales, aussi bien du point de vue thématique que méthodo-logique, apparaissent á nouveau dans les études qui analysent la nrarginalisation, la

5 Aa.Vv. ,lgg2; Garcia-Pablos, 1992; Gonzalea 1997; Serano, 1991.6 Larrauri, 1991a.? Garcla Valdés, lggT; Trinidad , lgg3-8 Ávila 1993; Estarellas, Carbonell, 1992; Estébanez,Peña, 1990; Funes et aI., 1996; Orós a¡al., l99l ; Redondo, Funes, Luque, 1993.e Rechea, Barbere! Montañés, Arroyo, 1995.ro Serrano Maíllo,1994; Stangeland, 1995a ; 1995b.

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La recherche espagnole en criminologie dans les années I99A

divergence et I'aspect conflictuel dans les problérnes sociaux en tant que facteurs dedélinquance.

n faut de toutes fagons souligner que Ia plupart des études sont regroupées endeux aires. L'une prétend analyser les processus culturels et psychosociaux qui ont uneincidence sur la conduire de la populaüon infantile et juvénile, I'autre essaie de savoirquelle est la pertinence et quelles sont les conséquences de Ia consornmation de droguesen tant que phénoméne social,

Souvent ces deux lignes se recoupentrr mais dans d'autes cas les phénoménesde la violence de groupes associés á la détérioration du tissu social urbain et á lapolarisation des dynamiques socialesr2 et les problématiques socio-familiales qui seproduisent dans ce dernier cadrer3 constituent les cas d'analyse privílégiés.

La conséquence générique de ce type de travaux, inespérée peut-étre des pointsde vue particuliers i chaque chercheur, consiste justement en l'émergence de certainsgroupes á risque qui peuvent arriver á centrer, ces prochaines années - si tant est qu'il neI'aient pas encore fait -, l'attention des politiques pénales elou d'assistance publique.L'intér€t qui a été dérnontré á l'égard de la récidive comme indicateur du succés despolitiques instifirtionnelles I a soulignerait cette tendanse.

Finalement, pour ce qui est de ce groupe de travaux, oD décéle un certainintérét pour le r0le que les moyens de communication jouent dans le cadre pénal¡s. Unefois assumée ceüe capacité de construire des réalités - ou, si I'on veut, des images et dessensations - qui sont diffusées par le corps social, on discute de leur intervention dans Iecadre des risques indiqués plus haut. On regrette cependant Ia mise en @uwe d'uneréflexion générale - réalisée sur des bases ernpiriques - qui établisse les paramétreseffectifs de cette capacité.

2 - Attitudes face á la délinquance

L'exigence de réalisrne - et la légitimation de politiques déterminées que cetteexigence suppose - a également son influence dans cé champ d'études. Les travauxautour de I'opinion publique sur la délinquance, enqu€tes sur des fonnes concrétes dedélit, ou enqu€tes de victimation, offrent aux institutions des données qui sontnécessaires pour fonder ses directives de politique crirninelle, et qu'il est diffrcile, pourtout ce qu'on a dit précédemment, d'obtenir á partir de l'information statistiqueinstizutionnelle.

tr Baulenas, Grácia, Escudero, lgg2; Escudero, Frigol4 1996; Martin, Urendes, Navanuel,I 996.tt Adán, 1996 ; Anton, 1992; Costa, Pérez,Trope4 1996, Gómez, 1995 ; Tropea, 1993.f3 Garrido Genovés, Martín, 1991 ;Osun4 Pérez Carceles, Lun4 1991 ; Ruidíae,1996; Ur4t994a; 1994b ; 1995a; 1995b.to Delbos , 1992, Funes et a\.., 1996; Redondo, 1994 ; Redondo, Funss, Luque, 1992 ; 1993.It Funes, 1994a; Giménez, 1997; Murillo,1992; Rodrigo, 1991.

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Crinte eI jwtice en Europe depuís 1990

Cela dit, sans vouloir réduire le mérite d'une option réaliste de ce b{pe, il fauttenir compüe du fait gue l'information obtenue ne se base pas seulement sur des donnéesobjectives, mais aussi sur des perceptions médiatisées - sentiment de sécurité, confiancedans les institutions, etc. - qui sont l'objet d'une élaboration cognitive sociale. Il s'agi!de plus, de certaines données qui s'avérent e maintes reprises diffrcilementobjectivables ; un citoyen peut, pñr exernple, savoir qu'il a été victime d'une conduite,mais il peut se tromper dans sa qualification au moment de fournir l'inforrnation, ou, üun autre niveau, il peut ne pas éhe conscient d'avoir été vicüme de délits déterminés dedéfinition factice pas toujours individualisable, comme c'est Ie cas pour les délitsécologiques. Plus encore, ce tSpe d'analyse peut donner lieu á une vision réductionnistede la sécurité en la centrant uniquement sur certains facteurs de la vie en comrnun(délinquance) et pas sur d'autes (travail, santé, etc.).

Constater I'existence d'une idéologie de la sécurité ne doit pas seulementconduire á corroborer que celle-ci est devenue un centre de préoccupation socialer6 -

Qui, soit dit en passant, ouvre dlintéressants marchés - mais aussi elle exige qu'on analy-se les mécanismes sociaux qui se ffouvent derriére et qui structurent le niveau réceptifet cognitif du citoyen sur [a base d'un schéma binaire de type sécurité-risque, Panninous, certaines études á caractére empirÍque ont commencé á explorer cette voierT.

Dans le cas espagnol, il existe deux sources fondamentales d'information surI'attitude de Ia population face ü la délinquance. Le Centro "de investigacionuSociológicas (CIS) continue á of;frir un matériel d'intérét, pas toujours rnís á profi! pourle chercheur. Dans les années 1990, le CIS a développé des recherches spécifigues surI'avortement (étude-enquéte n"1996), la drogue (études-enquétes n*2005 et 2080), lafraude fiscale (éildes-enquétes n*1974, 2L52 et 2200) et les mauvais traiternents ienfants (étude-enquOte n2202).

Mais il faut tenir compte du fait que d'autres enqu€tes á caractére général (voirá ce sujet les études n*2001, 2105, 2133,2189,2203,2214,2217,2221 ou 2231)insluent des données concrétes pertinentes, norrnalement sous la forme d'échelles devalorisation, du point de vue de I'opinion sociale sur la délinquance et I'aspect conflic-tuel des problémes sociaux.

En second lieu, i[ convient de souligner que I'on rnaintient et élargit - jusqu'árecouvrir toute I'aire rnétropolitaine de la ville de Barcelone - I'effoft mené ü bien áBarcelone pour disposer d'une information sur la criminalité qui refléte les préoc-cupations et le vécu de la population par le biais de I'utilisation d'enquétes devictirnationrs. Le résultat en est que nous disposons d'une série informative Qui, pour Iaville de Barcelone, remonte á 1985. Cette ligne de travail tend á s'étendre á d'autres

16 Alabart, Aragay, Sabaté, 1992c; Sabaté, Aragay, lgg5.t? Garcla-Borés et a\.,1995.r* Afabart, Aragay, Sabaté, 1990; l99l ; 1992 ; 1993 ; Alabart, Aragay, Sabati Torelles, Lgg4.

t28

La rrcherche espagnole en criminologie dans les années 1990

zones de I'Etat espagnol, concrétement Málaga, oü diverses expériences ont eu lieu en

ce sensle.

3 - Etudes sur le systéme de justice criminelle et ses professionnels

Dans les années 1990 on a consolidé l'étr¡de des diverses instances qui

composent le systéme de justice criminelle gráce aux apports qui provenaient des

sciences sociales. Fréquents sont les fiavaux théoriques qui - tirant parti des apports dusystérne symbolique d'interaction, les théories du conflit et la criminologie critique -

tentent d'offrir un panorama générat des instances qui constituent le systürne pénal4, dutraitement que celui-ci réserve i certaines thématiques - comme le terrorisrne, la délin-quance juvénile ou le contróle de la dépendance á l'égard de [a drogue2t - ou qui analy-sent des aspects cenhaux détenninés pour une sociologie du systéme pénalz.

La sociologie de [a police en tant que profession et la sociologie juridico-

pénale dans le cadre policier commencent á produire des études, théoriques eternpiriques, qui décrivent la réalité espagnole. Cette production sur la police en tantqu'institution, agcompagnée d'une réflexion générale sur les apports possibles dessciences sociales á une meilleure connaissance de celle -ci23 et d'une réflexion générale

sur le róle de la police au sein de l'ensemble des mécanismes qui comprennent les

appareils d'Etat de confióle social2a, peut 6he classée en trois grands groupes.

En premier lieu apparaissent les travaux eui, comme cornpléments alu(

opinions de la population su¡ la délinquance, se consacrent essentiellement au r6le de [apotice en tant que garante de Ia sécurité des citoyenszt, ou, par contre, analysent d'unpoint de nre critique; l'idéologie de la sécurité26 et son rapport avec les processu;

d'adrninishation du systéme pénal.Ce dernier aspect concerne la peine adrninistrative utilisée pour le contrÓle des

immigrants ou les toxicomanies. Cette pression cherche i générer, sur la base d'uneprotectíon de la sécurifd, un consensus social á propos des politiques adoptées.

En second lieu, les études qui dans une perspective de la sociologie desprofessions, analysent les éléments constitutifs de Ia táche policiüre et sa valorisationsociale2t ou qui, de divers points de vue, font réference aux circonstaüces qui y introdui-

ru Díez Ripollés et al., 1996.tt' Aa.Vv.,l99l ; Bergalli, l99l ; 1995 ; 199ó.'r G¡rnénez-Salinas, Rífá, 1992; Reinares, 1993 ; 1996;Rios, 1993 ; Unq 1995a; I995b; Usó,

| 996.tz González,1991 ; Terradillos, 1991.tr Barberet" 1993 ; Maeso, 1992; Solores, 1995 ; Torrente, 1992.i't Bcrgalli Ed., 1996.'s Delgado, Guardi+ 1994.rttMuñagorri, 1995.'? l-lernándezo Díaz, 1994; Martín, 1990 ; 1992; Raldúa" 1996; Rodríguez Gonzáles, l99l ;

WqZ ; Torrente, 1995 ; 1996 ; 1997a ; 1997b.

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Crime et justice en Europe depuis I990

sent des rnodifications. Il faudrait inclure dans cette derniére catégorie l'analyse desprocessus d'accés, pour Ia femme, aux corps de police28, de privatisation de la sécurité2'f(et de reconsffuction de I'espace policier, aussi bien au niveau national3o qu'européen3r).

il s'agit de üavaux qui rnonilent selon des points de we différents, destensions institutionnelles qui sont caractéristiques des corps de police mais aussi desespaces politiques oü ils se développent.

Sous un angle théorique, Larrauri signale la question des polices privées et lacréation d'un espace politique (le marché de Ia sécruité) qui doit 6te contrólé si on veulgarder les grands principes de I'Etat de droit.

D'un autre c0té, la création, évolution et consolidation d'un espace policiereuropéen suppose, d'aprés Recasens, des dangers par son rnanque de contróle et unemise en question du concept méme de soul'eraineté

On a également considéré, en troisiénre lieu, certains secteurs d'interventionpoliciére spécialisee : I'attitr.rde policiüre á l'égard des mineurst?, de la femme en tantque vistime3' ou des phénoménes liés á I'irnmigration3a. De plus, ces thématiquess'inscrivenf dans le souci général d'obtenir que les serices de police se rapprochent dela population en nuangant son caractére d'agent de contr0le au bénéfice d\rne idée deservice public.

D'autre part, un remarquable effichissement thématique et méthodologiques'est produit dans les études ayant trait á I'administration de la justice. La question de saréforrne continue d'étre présente, mais elle est rnoins abordée dans la perspective dubesoin de grands investissements et de clrangements législatifs - question qui a centré ladoctrine et les chercheurs au cours de la derniére décennie - que dans celle de laconfiance dans la rationalisation de dynamiques internes de fonctionnemen! el commec'est le cas pour la police, d'un rapprochenrent du citoyen.

C'est vrai que l'on n'a pas assez approfondi I'idée lancée par Toharia etZaragoza sur l'analyse sociologique des professions juridiques - il y a quelques travauxthéoriques35 et la recherche empirique de Santos36 sur le secrétariatjudiciaire - mais parcontre on a maintenu la ligne de üavail sur les opinions de la population au sujet de Iajustices?, oo a réfléchi sur la position du systéme judiciaire dans noFe modéle d'Etaf8,

18 Jar, 1992 ;1997; Ma¡tfn, 1994.2e Larrauri, 1992a.to Recasens, 1996c.3rRecasens, 1995a; 1995b; 1996a.32 Ciru¡ano, 1995 ; Luque, 1992; Mallo, I990; Moreno, Mallo, Palacios, lgg5.33 Comisaría General de [a Policla Judicial, 1996.3o Borreguero, 1994; Caballera, 1997.35 Hierro , lgg7.36 Santos, lgg4.37 CIS, 1992a;1992b; I996c ; Ruidíaq 1994; Toharia,lgg4.3t Recasens, 1996.

I30

La recherche espagnole en uiminologíe dans les années I gg0

on s'est penché sur les besoins en rnatiére de formation du personnel judiciaire3e, egtlepuis la perspective de la psychologie sociale, on a approfondi I'incidence dans laclécision judiciaire des différents sujets qui participent á ce processus : experts, témoinsct membres du jury, panni d'autres. Bref, on a avancé dans la description des processusréels de prise de décisions judiciaires en tenant compte des divers facteurs qui ont uneinfluenceao.

Dans ce méme cadre, la ratification de la loi organique 511,995 du tribunal dui,rry, tentée comrne fonnule du rapprochernent de la justice et de la population et les¡rrerniéres expériences de son application - certaines d'entre elles trés discutées - ontsuscité l'intérét pour cette institutionor.

Mais lá oü I'on observe la plus grande production scientifique, c'est dans lecadre des instifutions de traitement, que ce soit pour les majeurs ou les mineurs selonl'áge pénal. Bien que certains travaux mettent en cause l'idée méme de kaiternent etinsistent sur les conséquences désocialisatrices des institutions fermées",laplupart desótudes se centrent sur les facteurs internes (caractéristiques de la population, dupersonnel et des programrnes) qui peuvent étre mis en jeu pour que ce soit viable etpour réduire Ie plus possible l'impact négatif des institutions ferméesa3,

Ainsi, l'établissement la valorisation et la mesure des indicateurs defonctionne¡nent interne des institutions fermées est toujours plus présente dans lalittérature spécialisée, ce qui suppose, en derniére instance, une certaine reconnaissancecle la difficulté - les plus critiques parleraient d'impossibilité - pour atteindre sesobjectifs sociaux externes, C'est peut-étre la raison pour laquelle on observe unimportant développement de deux autres lignes thématiques : I'utilisation de ressourcespour le traitement en rnilieu ouvert, qui suppose qu'on préte attention au r6le ¿développer par les travailleurs sociaux qui collaborent avec le systérne pénal, et les¡rlarrs de travail avec les populations spécifiques (délinquants violents, consornrnateursde drogues, etc.), sonstitutives, également du point de vue interne de la cohabitation ausein méme des institutions, des groupes á risque cités supra. On définit ainsi deuxfagons différentes de comprendre le fraitement pénal par rapport e h catégorie -appartenance ou non á des groupes á risque - dans laquelle on pourrait inclure le sujetqui doit s'y soumettre : la premiére exige qu'on mobilise des ressources externes ¿l'institution pénale et qu'on utilise des formules qui favorisent une certaine perméabilité

tn Garcia Valdés, 1991 ; Puig, Puig, Rosil lo, 1991.'to

Cea, 1992; Mazoa, 1995; Sobral, 1990'; 1994.4r PaúI. I99la ; l99lb; 1992a; 1992b; 1993a; 1993b ; 1993c ; 1995a; 1995b ; Pérez-Cruz,t992.'t '

Bona, 1993 ; GarciaBorés, 1993a; 1993b; 1995a; 1995b; Manzanos, l99l;1992; River41992 ; 1993 ; 1994 ; Zino, 1996a ; 1996b.ot Carreño, Pinilta,'lrujillo, 1992; Cuesta, 1993; Elejabarrieta, Perera, Ruia l99l; Garrido1990a; I990b ; 1993 : 1994; Gamido, Montoro, 199?; González 1992; h,fartín, 1997; Ortíal99t; Polanco, 1992; Ponce, 1994; Redondo, 1990; l99l ;1992;1993;1994; Redondo elal., 1992; Redondo, Garrido,1992; 1993 ;Sanchq 1992;Valverde, 1991 ; Vigil, Guil lén, 1991.

r3t

Crtme et justice en Europe depuis i'990

sociale ; tandis que la seconde, sur la base de la condition prédictive de la conduitadélictuelle du sujet qui rnanifeste ce fype de caractére dangereux, tend á accentuer I'idé$de surveillance. Les murs de la prison, par conséquent, ne s'écroulent pBS, mais plut0ts'élévent davantage et se cornpriment autour de populations détenninées,

4 - Etudes des alternatives aux institutions du systéme de justice criminelle,Problérnatique de la victime et subjectivité

L'idée de rapprochement vers le citoyen et la crise des institutionstraditionnelles du contr0le pénal conjuguent leurs efforts pour souligner la possibilitéd'un systéme plus attentif á la réparation du délit, á la satisfaction de la victime et au failde rendre responsable I'auteur du comporternent délictuelaa. Ces objectifs qui - bien quede fagon limitée - Fouvent une place dans notre législation, ont engendré un intér€tcertain et une irnportante production en matiére de mesrues alternativesas ainsi qued'intéressantes contributions au débat concemant son influence dans le systéme dejustice criminellea6.

Soulignons tout spécialement en ce sens le cadre matériel de la justice jur'énileet territoriale en Catalogne, communauté qui a joué un róle important pour laconnaissance de ce type d'expériences dans le reste de I'Etat, Ou peut trouver unprenrier bilan de cette expérience, qui utilise des techniques quantitatíves et qualitatives,dans le travail dirigé par J. Funesa?, oü I'on souligne les difficultés de toute médiation,et I'on rernarque sa capacité d'introduhe, aux sujets concemés, une tendance á laresponsabilisation.

Il est logique que dans la mérne période les études sur la victime aient étéimportantesot. Cette redécouverte de la victime a suivi des cours divers.

On a ainsi essayé de connattre ses besoins et ses affentes lorsqu'elle prendcontact avec le systérne pénal et quelles sont les forrnules de satisfaction de Ia demande(policiéres, judiciaires et sociales) les plus adéquates dans ce sensae. On s'est intéressé ádes populations qui étaient inconnues du systdme pénal, I'agression s'étant produitedans le domaine du privé, ce qui rendait difficile le dépót de plainte agressionssexuelles domestiques - ou dans des espaces de marginalité * comme par exemple la

aa Giménez-Salinas, 1992a ; 1996a; 1996b.4t Aa.Vo., tg94; AaVv., 1996b; Asúa" lgg2; Cid, Larrauri, lggT; Giménez García, 1992;Marsal, 1993; Pedraz, 1995 ; Sola" 1990; Toharia, 1990a; Vizcarro,1996.a6 Bergalli, I994;Larauri, 199lb.ot Funes, 1994b.aE Beristáin, Cuesta" 1990; Bustos, Larrauri, t993; García-Pablos, lgg2; Ganido, Berenguer,l99l ; I{erera, 1996; Landrovs, 199ü; Tamarit, 1993.oe Beranoaguirre, 1991 ; Dapena" Martín, I992; González Vidos4 1995 ; Ricardo Palacio, t992;Romero , 1994 ; Ruidfaz, 1992 ; Soria" Hernánd ez, 1995.

r32

La recherche espagnate en criminologie dans les années 1990

prostitutions. Mais on a également réfléchi, dans une perspective plus théorique, sur la

fagon dont intervient sa présence sur la construction générale du systéme de justice

criminelle, Il ne faut pas oublier, á ce suje! que cette redécouverte peut éte comprisenon seulement cornme rapprochement vers les intéréts matériels et affectifs de lapopulation mais aussi comme rnanifestation du processus de privatisation de la justice

pénalest bien que ce processus n'ait pas encore été I'objet en Espagne de l'analysescientifique qu'il rnérite, hormis quelques reflexions stricternent juridiques.

Mais la question de ta subjectivité, c'est-á-dire de I'identité sociale du sujet qui

se transmet aux autres et qui est intériorisée personnellement et institutionnellement aregu un taiternent plus large que la sirnple manifestation du besoin de traiter plushumainement la victime. Les importantes ffansformations vécues au cours des derniéresdécennies dans notre structure sociale ont engendré des quesüons hansversales I tousles niveaux des actes de collectivité, et I'une d'elles est celle qui touche au r6le doI'individu face aux sbuch¡res institt¡tionnelles congues depuis plus de deux siécles.

Rien d'étonnant, dés lors, á ce que cette question ait également affecté le cadrepénal. Le droit pénal et [e systéme pénal n'ont plus conrme seule référence un sujetáUstlzit (fu citoyen potentiel producteur), et par conséquent, leurs objectifs, leurs

¡néthodes et leurs stratégies font face au paradigme de la complexité. De quelle fagon le

droit pénal comprend la diversité et quel üraitement spécifique il lui réserve dans le casoü son aspect conflich¡el en arrive á atteindre de hauts niveaux, voilá un thémerécurrent dans la production des demiéres années, de sorte que la femmes2, le jeunes3 oul'étranget'n - pour nous en tenir i ces tois exemples - sont devenus des items habituelsde nofe littérature scientifique.

:j,.

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Lode VAN OUTRfVE, Philippe ROBERT, dir.

CRIME ET JUSTICE EN ET]ROPE DEPTIIS 1990

Etat des'recherches, évaluation et recommandations

Cendido da Agta, Hans-Jórg Atbrecht, John Blad, Klaus Boers, AmedeoCottino, José-Luis Domínguez Figueirido, Jacques Faget, Daniel Fink,Esther Giménez Salinas i Colomer, Dan Kaminski, Karl-Ludwig KunaDario Melossi, Amadeu Recasens i Brunet, Philippe Robert,

-Anabel

Rodríguez Basanta; Robert Roth, Joanna Shapland, Sonja SnackerqRichard Sparks, Heinz Steine*, Veerle Van Gijsegem, Lode VanOutrive, René Van Swaaningen, Anne Wyvekens

Mise au paint édítoriale de Bessie Leconte (GEHN)

Déviance/GERII

Dditions L'Ífarmattan5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique75005 Paris

L'ffarmattan Inc55, rue SaintJacques

Monhéal (Que), Canada H2Y 1K9