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© Langage & Société n° 153 – 3 e trimestre 2015 Interprétation, traduction orale et formes de médiation dans les situations sociales Introduction Anna Claudia Ticca et Véronique Traverso LabEx ASLAN-ICAR, Lyon Au long des dernières décennies, les phénomènes de migration et de mobi- lité ont multiplié les situations de contact entre des personnes appartenant à des communautés linguistiques et culturelles différentes (européennes aussi bien qu’extra-européennes). À partir de là, les situations mettant en relation les personnes employées d’institutions (nationales) avec des per- sonnes migrantes qui ne disposent que d’une connaissance partielle de la langue et des normes (sociales, culturelles, etc.) de l’institution concernée se sont multipliées 1 . De telles situations faisaient déjà l’objet des recherches de Gumperz et alii dans Cross talk en 1979 notamment en ce qu’elles recèlent de risques de malentendus interculturels (et de renforcement des préjugés) liés à l’interprétation des indices de contextualisation (Gumperz 1982). Plus de trente ans plus tard, ces questions restent plus que jamais pertinentes, et les réflexions sur les modes possibles de gestion des « situations de contact » se poursuivent. Dans ce dossier, nous nous intéressons à l’un de ces modes consistant à recourir à un interprète, médiateur, intermédiaire, les noms 1. Sans parler des situations de non-recours pour lesquelles Hoyez parle des « difficultés linguistiques qui sont reconnues par les professionnels et les patients comme des obs- tacles majeurs de non-recours et qui entravent l’accès aux droits à l’assurance-maladie, les démarches pour s’adresser à un établissement de santé, la bonne compréhension du diagnostic et des recommandations du médecin (puis de la pharmacie), l’observance du traitement » (Hoyez, 2012).

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© Langage & Société n° 153 – 3e trimestre 2015

Interprétation, traduction orale etformes de médiation dans les situations socialesIntroduction

Anna Claudia Ticca et Véronique TraversoLabEx ASLAN-ICAR, Lyon

Au long des dernières décennies, les phénomènes de migration et de mobi-lité ont multiplié les situations de contact entre des personnes appartenant à des communautés linguistiques et culturelles différentes (européennes aussi bien qu’extra-européennes). À partir de là, les situations mettant en relation les personnes employées d’institutions (nationales) avec des per-sonnes migrantes qui ne disposent que d’une connaissance partielle de la langue et des normes (sociales, culturelles, etc.) de l’institution concernée se sont multipliées1. De telles situations faisaient déjà l’objet des recherches de Gumperz et alii dans Cross talk en 1979 notamment en ce qu’elles recèlent de risques de malentendus interculturels (et de renforcement des préjugés) liés à l’interprétation des indices de contextualisation (Gumperz 1982). Plus de trente ans plus tard, ces questions restent plus que jamais pertinentes, et les réflexions sur les modes possibles de gestion des « situations de contact » se poursuivent. Dans ce dossier, nous nous intéressons à l’un de ces modes consistant à recourir à un interprète, médiateur, intermédiaire, les noms

1. Sans parler des situations de non-recours pour lesquelles Hoyez parle des « difficultés linguistiques qui sont reconnues par les professionnels et les patients comme des obs-tacles majeurs de non-recours et qui entravent l’accès aux droits à l’assurance-maladie, les démarches pour s’adresser à un établissement de santé, la bonne compréhension du diagnostic et des recommandations du médecin (puis de la pharmacie), l’observance du traitement » (Hoyez, 2012).

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sont nombreux pour désigner cette personne qui facilitera l’intercompré-hension entre les acteurs dans la situation. Les recherches sur cette pratique se sont largement développées au cours des quinze dernières années, et elles apparaissent aujourd’hui comme un champ. Avant d’en venir à la présen-tation de quelques questions essentielles qui l’animent, il est intéressant de montrer comment la situation d’interaction de service social avec interprète se trouve en fait à la croisée de plusieurs perspectives de recherche.

1. La croisée de différents courants de rechercheOn peut situer les recherches actuelles sur l’interprétation dans les si-tuations sociales par rapport à différents courants de recherche qui, au cours des dernières décennies, ont abordé la communication entre des personnes qui ne partagent pas les mêmes ressources linguistiques. Nous distinguons ces recherches en trois zones qui nous semblent se structu-rer les unes par rapport aux autres, bien qu’elles entretiennent dans la réalité des pratiques de nombreuses relations : les situations de contact/situations interculturelles ; la médiation/interprétation ; les migrants et leurs droits.

1.1. Situations de contact, communication exolingue,rencontre interculturelleLa situation de traduction peut être considérée comme une forme parti-culière d’alternance codique, et plus globalement comme un des modes de gestion des situations exolingues. On remarque que, dans le foison-nement des études sur les situations exolingues, et leur fort développe-ment au cours des années 80-90 (voir une présentation synthétique de ces développements dans Véronique 1992 ; Vasseur & Arditty 1996 ; Matthey & Véronique 2004), la question de la traduction a peu été thé-matisée, sans doute en raison des orientations le plus souvent choisies, au premier rang desquelles figurent l’acquisition de la langue étrangère (Dubois et alii, 1981 ; Perdue ed., 1984 ; Noyau, 1976 ; 1980, De Pietro et alii 1989) et la réflexion sur les asymétries entre le natif et le non natif (Noyau & Porquier, 1984 ; Saillard, 1998 ; Vasseur, 2000 ; De Heredia-Deprez, 1990). Les études sur les spécificités de ces situations ont égale-ment permis la mise en place de différentes théories sur le code-switching (Auer 1985 ; Giles et alii 1991 ; Myers-Scotton 1993) et forgé des no-tions comme celle de « situation exolingue » (Porquier 1984) ou de « sé-quence potentiellement acquisitionnelle » (De Pietro et alii 1989), etc. Ces recherches voient également d’importantes avancées dans la descrip-tion de phénomènes interactionnels de portée très générale, comme les

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hésitations et reprises (Coste 1986), les réparations (Dausendschön-Gay 1988), les reformulations (Gülich & Kotschi 1985 ; Gülich 1986), et elles permettent d’établir des typologies et des caractérisations (De Pie-tro 1988 a et b ; Dausendschön-Gay et al. 1991, 1995, 2004 ; Lambert et alii 2011). Toutes ces recherches et ces résultats sont très utiles pour l’étude de la traduction dans/comme l’interaction, mais la traduction n’y apparaît guère en tant qu’une des formes possibles de l’alternance. Une exception notable est l’article de Müller (1989) qui, citant Harris (1973, 1976), s’intéresse à la traduction « naturelle » (voir ci-dessous 1.2) et la conçoit comme une des formes possibles d’alternance. Voici comment il structure le champ à ce moment-là :

Although translation has been rather neglected by conversation-analytic studies, detailed procedural descriptions have been given of two related interaction modes, called here for brevity ‘bilingual conversation’ and ‘exo-lingual conversation’: – ‘bilingual conversation’ : studies of language choice and language, in par-ticular of code-switching and transfer (Auer 1981, 1985, Auer & Di Luzio 1983, Gumperz 1982, etc.) have shown how members use their bilingual repertoires in processes of contextualizing an negotiating a common lan-guage of interaction. In the conversations described characteristically two languages are usable and used for interaction. – ‘exolingual conversation’: In exolingual conversation members with widely different linguistic repertoires have to interact within the borders of one language. Studies of exolingual conversation (e.g. Alber and Py 1985, Gülich (1986), Lüdi (1987), Noyau and Porquier (1984)) have described a wide and flexible spectrum of mutual accommodation processes, contai-ning e.g. ‘auto-’ and ‘hetero-facilitation’, ‘transcodic marking’, ‘syntactic guiding’, ‘collaborative utterance completion’.In this series translation can be considered as a third mode of interaction that may be open to a multilingual constellation. It is to be related to both of the modes summarized above. (1989 : 714)

Dans les études sur la rencontre interculturelle qui se développent en parallèle (Bremer et alii 1996 ; Camilleri & Cohen-Emerique 1989 ; Abdallah-Pretceille & Porcher 1999 ; Ting-Toomey 1999 ; Cohen-Emerique 2004), ce n’est pas l’interprétation en tant que telle qui est thématisée, mais plutôt les formes de médiation, que Cohen-Emerique définit comme « l’intervention d’un tiers entre des individus et des groupes à l’enracinement culturel différent et plus particulièrement entre les migrants et les acteurs sociaux chargés de leur intégration » (2004 : 36-37). Si la question de la langue elle-même est évoquée, elle l’est indirectement, ou au sein d’une conception d’emblée très large des

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fonctions de la médiation. Cohen-Emerique distingue trois fonctions : la « médiation relais », liée aux difficultés de communication – et c’est là que l’on retrouve la question de l’interprétation – ; l’aide à la recherche d’accord dans des conflits de valeurs (soit entre la société d’accueil et les migrants, soit au sein des familles traversant des processus d’acculturation ou des situations d’adaptation difficile) ; l’introduction du changement dans l’institution (ibid.).

Passons maintenant aux recherches sur l’interprétation.

1.2. Community interpreting, traduction de dialogue,traduction naturelle, traduction de liaisonLes études sur l’interprétation sont plus récentes, et connaissent un plein essor depuis les années 2000. On peut les situer comme la rencontre des préoccupations liées à la médiation présentées ci-dessus et celles des interprètes-traducteurs. Citons toutefois les propositions pionnières de Harris dès 1977 (voir aussi Harris & Sherwood 1978) sur la traduction naturelle2, le travail de Knapp-Potthoff & Potthoff 1987 et Müller 1989, puis l’impulsion donnée par le réseau Critical Link depuis 19923 (ins-piré par Harris), et enfin l’ouvrage fondateur de Wadensjö en 1998. Le champ s’est par la suite développé dans d’autres domaines comme la lin-guistique appliquée (Lee 2009), la sociolinguistique (Davidson 2000), la pragmatique (Mason 2006) ou encore la linguistique interactionnelle (Gavioli 2012 ; Baraldi & Gavioli 2011 ; Traverso 2003, 2012 ; Tic-ca 2008). Plusieurs ouvrages monographiques et collectifs consacrés à ces questions ont été édités ces dernières années (entre autres Angelelli 2004 ; Corsellis 2009 ; Hale 2007 ; Wadensjö et alii 2007 ; Pöchhacker & Shlesinger 2007 ; Baraldi & Gavioli, 2012).

Ces travaux ont d’une part conduit à d’importantes réflexions visant à typologiser et caractériser les formes d’interprétation selon les axes per-tinents de la traduction-interprétation : le type d’interprétation (simulta-née, consécutive, uni- ou bi-directionnelle) ; la forme de l’interprétation

2. « La traduction naturelle s’avère une des plus usuelles si l’on tient compte de la pro-portion très considérable de personnes qui habitent dans un milieu bilingue, voire multilingue, si l’on tient compte aussi de la traduction faite à l’intérieur de la langue, de l’enfant aîné qui aide à interpréter le baragouinage de son cadet, des amis qui fournissent des interprétations en français académique des disques d’Yvon Deschamp [Monologueur du Québec qui exploite le patois], et ainsi de suite. » (1973 : 138), voir aussi Harris, 1977, 1980.

3. http://www.criticallink.org. Voir aussi la présentation et l’importante bibliogra-phie mises à disposition par B. Harris, sur https://www.academia.edu/5855596/Bibliography_of_natural_translation.

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(phrase par phrase, tour par tour ou bien alors « bloc » par « bloc »), etc. Différents termes sont proposés pour désigner le type d’interprétation qui nous intéresse dans ce dossier :– Interprétation de dialogue (Dialogue interpreting) : “interpreting in di-alogue-like interaction (rather than interpreting of monological speech); the interpreter is present in a face-to-face encounters (rather than deliv-ering her contributions from a space of her own, e.g. from a secluded cabin), the interpreter relays between two languages (i.e. not unidirec-tionally, only from one language to another, nor just between sociolects or styles) and the interpreting takes place in institutional settings… i.e. in encounters between laymen and representatives of an official body” (Wadensjö, 1992 : 48).– Interprétation de liaison (Liaison interpreting) : « the interpreter is phy-sically present in an interview or meeting, and usually uses the consecu-tive mode of interpreting. » (Gentile, Ozolins & Vasilakakos, 1996 : 1)– Interprétation communautaire (Community interpreting)4 : « takes place in the public service sphere to facilitate communication between official and lay people [...] It is sometimes referred to as dialogue in-terpreting or public service interpreting. Community interpreting is typically bi-directional and, as a rule, carried out consecutively. It cov-ers both interpreting in face-to-face situations and interpreting provided over the telephone and is probably the most common type of interpret-ing in the world. [...] communty interpreters have to handle real-time dialogue: more or less spontaneous and unpredictable exchange of talk between individuals speaking different languages, and they also have to interpret in both directions. This is often the case also in face-to-face in-terpreting undertaken in business and diplomatic settings. » (Wadensjö, 1998 : 133)

Ces travaux ont aussi montré le rôle central des interprètes dans la situation communicative où ils interviennent, qui va bien au-delà de l’activité linguistique. Ils s’inspirent souvent de Goffman (1982) sur les cadres de participation, à l’instar de l’étude pionnière de Wadensjö en 1998. Ils montrent le travail de coordination interactionnelle effectué par l’interprète, en plus de son travail de « passeur linguistique » (cf. Baraldi

4. « L’interprète communautaire pratique en milieu institutionnel. Ses actions visent à rendre la communication possible entre un professionnel et un bénéficiaire de services publics qui ne partagent pas la même langue (Pöchhacker et al. 1999). La désignation « communautaire » renvoie au fait que l’interprète intervient dans les ins-titutions publiques (en d’autres termes, au sein de la communauté) à la différence des interprètes de conférence qui n’interviennent que dans des rencontres à caractère exceptionnel, comme des conférences internationales. » (Boivin et alii 2012 : 36)

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& Gavioli 2012). Ils montrent aussi les difficultés rencontrées (gestion de la temporalité, simplification de l’information apportée, etc.). Un pan des recherches s’est aussi penché sur la dimension proprement culturelle de l’activité d’interprétation qui dépasse de loin la simple connaissance de la langue (voir entre autres, Traverso 2003 ; Ticca 2011). Plusieurs études ont porté sur les problèmes que pose le recours aux enfants ou aux proches, le brokering (voir ci-dessous).

Le besoin de recourir à des interprètes pour faciliter l’intercompré-hension entre des représentants des services publics (services de santé, institutions éducatives, légales, etc.) et des migrants ou membres des communautés minoritaires, demande d’un côté une disponibilité de locuteurs bilingues capables de traduire l’interaction ; d’un autre côté, elle soulève des questions qui concernent à la fois la nature de l’activité des interprètes – aussi bien professionnels qu’improvisés – et les besoins et caractéristiques spécifiques de chaque situation communicative.

1.3. Migrants et accès au droitNous n’abordons dans ce paragraphe que la situation en France, les choses étant différentes selon les pays (pour des éléments sur la situation en Allemagne, voir ici même l’article de Bührig & Meyer ; en Italie, celui de Niemants, Gavioli & Baraldi). La réflexion sur l’interprétation dans les services sociaux se développe également dans les travaux sur la migra-tion. Parmi les thématiques récurrentes dans ce champ le plus souvent d’orientation sociologique ou anthropologique, on rencontre celle du droit des migrants. Dans ces travaux, la question de la langue est systé-matiquement mentionnée (Stanojevitch 2007 ; Hoyez 2012) comme barrière à l’accès aux soins (au même titre que le refus d’appliquer les réglementations par certains médecins).

Dans le domaine académique, d’une façon générale, il y a peu de recherches françaises sur ces questions (voir l’inventaire et l’étude détaillée effectuée par Schwarzinger en 2012), les Canadiens et les Suisses étant plus avancés dans ce domaine (voir entre autres Gajo et alii 2001 ; Singy et alii 2010). Une thématique importante dans ces travaux (souvent des recherches-actions et militantes) concerne l’importance ou le droit à un interprète professionnel, notamment dans la consultation médicale, comme l’indiquent clairement les titres et les slogans suivants :– « L’interprétariat et la lutte contre les inégalités d’accès aux soins » (dans Migrations santé Alsace, 2004) ;– « Maux d’exil. L’interprétariat, pour en finir avec les malentendus » (dans Lettre du COMEDE, Comité médical pour les exilés, 2008) ;

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– « Accès au droit des étrangers : la place centrale des interprètes so-ciaux » (dans Actualités sociales hebdomadaires, 2659, mai 2010).

Une autre des thématiques abordées de façon récurrente concerne l’im-portance de la formation des interprètes, voire la nécessité du recours à des interprètes professionnels. À titre d’exemple, dans la Lettre du COMEDE, Maux d’exil, le billet intitulé « Sortir du silence » énonce : « Si la famille ou les proches du patient peuvent jouer un rôle essentiel dans l’accompa-gnement ‘de terrain’ devant la diversité et la complexité des démarches à accomplir, la technicité et la neutralité d’un interprète professionnel sont indispensables à la rencontre thérapeutique et à la qualité du soin ».

De fait, il existe aujourd’hui en France une définition commune adoptée par un groupe d’associations5 qui, ont défini et promeuvent « l’interprétariat médical et social professionnel »6. Comme ils le précisent, si cette forme d’interprétariat n’est pas un droit à proprement parler, la suppression des obstacles à la communication est inscrite comme recom-mandation ou obligation dans différents textes officiels7. Ils définissent l’interprétariat médical et social professionnel comme « une forme d’in-terprétariat de liaison exercé dans les contextes spécifiques des champs médical, social, médico-social, éducatif et administratif ». Dans un autre chapitre de leur charte, cet interprétariat est présenté comme garantissant « aux professionnels des domaines concernés les moyens d’exercer pleine-ment leur fonction », et aux personnes allophones (peu ou non franco-phones) « les moyens d’expression afin qu’elles puissent se poser comme sujets autonomes, visant ainsi leur égal accès aux droits et aux soins ».

2. État actuel des recherches sur l’interprétationet la traduction comme (dans l’) interactionSi les études sur les situations sociales avec interprètes ont connu un large essor au cours des dernières décennies, beaucoup reste à faire sur différents aspects de ces situations. Nous proposons ci-dessous un rapide aperçu des axes majeurs qui organisent aujourd’hui ces recherches (pour

5. ADATE (Association Dauphinoise Accueil Travailleurs Étrangers) Grenoble, APTIRA (Association pour la promotion et l’intégration dans la région d’Angers), ASAMLA (Association Santé Migrants Loire Atlantique) Nantes, COFRIMI (Conseil et for-mation sur les relations interculturelles et les migrations) Toulouse, Inter Service Migrants Est Metz, Corum Lyon, Interprétariat Paris, MANA Bordeaux, Migrations Santé Alsace Strasbourg, RVH35 (Réseau Ville Hôpital 35) Rennes.

6. La charte est consultable sur plusieurs sites, par exemple celui de l’UNAF (Union nationale des associations familiales), http://www.unaf.fr/spip.php?article15352.

7. Charte Sociale Européenne, Recommandation de la Haute autorité de Santé (France), Code de santé publique, etc.

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les domaines liés à la linguistique). On peut rappeler que ces recherches émanent soit du domaine de la traduction/interprétation (Harris 1977 ; Wadensjö 1998 ; Pöchhacker & Shlesinger 2007), soit de chercheurs en interaction ou pragmatique (Ticca 2011, 2013 ; Traverso 2002, 2003 ; Gajo 2006 ; Gavioli 2012 ; Merlino 2012 ; Pasquandrea 2011, etc.), ce qui conduit à des perspectives sensiblement différentes sur les mêmes phénomènes. Toutefois, un grand nombre des recherches dans les deux catégories est aujourd’hui basé sur l’analyse de données empiriques, et se rejoint sur de nombreux questionnements.

Participation, coordination dans les situations avec interprèteDans son travail pionnier de 1998, Wadensjö a mis en évidence la double fonction des contributions de l’interprète dans la situation : fonc-tion de traduction et fonction de coordination. La première, l’interprète en tant que traducteur, correspond à l’image de l’interprète comme un transmetteur, un intermédiaire (voir Wadensjö 1995 : 116, sur les mé-taphores associées aux fonctions de l’interprète). La seconde vient en quelque sorte s’opposer à celle-ci, et faire apparaître l’interprète comme un participant dans une situation « trilogale »8, et non comme un simple instrument dans une situation « dilogale », une courroie de transmission qui serait (devrait être) transparente.

À partir de là, l’analyse des données empiriques a montré l’importance du rôle de l’interprète pour la communication. Mason le résume en ces termes :

To the multi-tasking processes involved in all interpreting (simultaneous listening/watching, discourse processing, speaking, self-monitoring) is added constant (re-)negotiation of role, turn-management and general monitoring of the unfolding of the talk exchange, in which at least three parties are involved (2001 : i).

Différentes questions sont en cours d’investigation dans ce champ de recherche, notamment celle de « rendu/non rendu » d’un élément par l’interprète (“rendition/non rendition”), i.e. ce que l’interprète traduit ou pas, et ses effets sur le service et les soins apportés aux patients (voir par exemple Baraldi & Gavioli 2007, 2008, 2010, 2011 ; Bolden 2000 ; Davidson 2000 ; Meyer 2012 ; Pasquandrea 2011 ; Traverso 2002 ; Valero-Garcés & Martin 2008).

8. Nous employons le terme « trilogal » dans le sens utilisé dans Kerbrat-Orecchioni & Plantin 1995, correspondant aux échanges se déroulant au sein d’une triade, c’est-à-dire entre des personnes existant en chair en et en os (des locuteurs, et pas seulement des énonciateurs). Wadensjö de son côté parle de « pas de trois » (1998 : 12).

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Dès lors que les situations d’interaction avec traducteur sont traitées avec les outils interactionnels se pose la question de l’organisation de la participation au niveau séquentiel du tour de parole : par quels procédés et selon quelles modalités demande-t-on à l’interprète de traduire ou retarde-t-on sa prise de parole ? Comment négocie-t-il sa prise de parole si les autres participants produisent de trop longs segments ? (sur les procédés séquentiels et multimodaux de prise de parole par l’interprète voir Merlino 2012 ; Pasquandrea 2011 ; Ticca 2011, à paraître ; Traverso 2012 ; sur les interruptions effectuées par l’interprète au tribunal voir, entre autres, Hale 2003). Ces études mettent en évidence la complexité de l’organisation locale de l’interaction dans ce cadre, et l’importance des indices gestuels et liés au regard dans son fonctionnement. Elles posent aussi la question des statuts participationnels (Goffman 1 981) dans cette interaction, et souvent celle de la marginalisation du patient (Traverso 2003 ; Amato & Gavioli 2008) ou du professionnel (Rosenberg et alii 2007).

La place de l’interprète, quant à elle, pose de nombreuses questions.

– L’interprète, qui est-il ?Les recherches sur les situations sociales avec interprète ont montré que la catégorie « interprète » est loin d’être homogène. Elle recouvre en effet, d’une part des interprètes professionnels (interprètes de conférence par exemple), des interprètes formés (comme on l’a vu ci-dessus souvent dans les associations de médiateurs interprètes : ce sont des personnes choisies pour leurs compétences linguistiques – elles sont bilingues – qui ont suivi une formation dans l’association). Ces deux types d’interprètes sont « fournis » par l’institution. À l’autre extrême, on trouve des interprètes improvisés, personnes dont la compétence bilingue peut-être plus ou moins développée.

Les interprètes improvisés peuvent être choisis sur le coup, dans la situation où se trouvent les participants, en raison de leur compétence dans la langue du migrant : il peut s’agir par exemple à l’hôpital d’un voisin de chambre, d’un employé de service, d’une personne d’un autre service qui vient donner un coup de main, etc.9 Dans ce cas, c’est le représentant institutionnel qui cherche une solution au problème d’in-tercompréhension rencontré.

Les interprètes improvisés peuvent aussi être accompagnants du migrant, amis, parents, voisins, et souvent enfants. Un pan entier de la

9. Voir l’article de Duchêne (2011), qui étudie la façon dont ces compétences, qui sont non valorisées officiellement, sont en fait utilisées (et répertoriées) dans une entreprise de gestion des passagers et des bagages située à l’aéroport international de Zurich.

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recherche concerne ces situations de « brokering » (littéralement, courtage, négociation) qui, comme le souligne Antonini (2010), sont extrêmement répandues et concernent une très vaste variété de domaines : tourisme, médias, services publics, activités militantes, situations de conflits, etc. Cette pratique est notamment due à l’absence de ressources pour résoudre les problèmes d’intercompréhension linguistique (et culturelle) dans un grand nombre de situations institutionnelles pour des raisons budgé-taires le plus souvent, ce qui met la personne migrante dans la nécessité de recourir à un proche qui aurait une compétence linguistique qu’il ne possède pas dans la langue de l’institution à laquelle il doit s’adresser. De nombreuses recherches portent sur les enfants brokers (par exemple, Valdés 2003 ; Orellana 2009 ; Antonini 2010), qui interviennent dans une très grande variété de contextes formels et informels : école, commis-sariat, hôpitaux, magasins, etc.

La difficulté de la tâche des médiateurs communautaires est aussi soulignée. Rudvin (2010) par exemple mentionne la fréquence des burn-out, liés aux conditions de travail (bas salaires, peu de développement de carrière), mais aussi à certaines caractéristiques du travail lui-même (notamment le fait de vivre, et parfois revivre, avec le patient les trauma-tismes que ce dernier relate et qu’il faut traduire).

– L’interprétation/médiation : bonne solution ?Les recherches ont aussi investigué les avantages et désavantages des diffé-rentes solutions adoptées pour résoudre les problèmes de communication rencontrés par les migrants ou les locuteurs de langues minoritaires dans les situations sociales.

Dans la littérature, le débat est ouvert entre ceux qui préconisent la présence d’un interprète/médiateur formé ou professionnel en cas de difficulté d’intercompréhension linguistique/culturelle et ceux qui adop-tent une position plus mitigée. Parmi les premiers, on trouve souvent les associations de médiateurs interprètes, qui témoignent des difficultés de gérer les situations sans avoir de langue commune, ou de l’apport consi-dérable que représente la présence d’un interprète. Voici l’extrait d’un témoignage, intitulé Enfin un interprète à ma consultation, apporté par C. Jung, médecin généraliste dans le Bulletin de Migration Santé Alsace :

Je connais Mme X depuis bientôt dix ans. Elle m’est fidèle et reconnais-sante de parler quelques mots de turc. Elle est en France depuis 19 ans [...] Cette semaine-là, elle est venue me voir trois fois en urgence et chaque fois elle est en larmes, très inquiète en montrant son cœur [...] Je ne comprends pas sa plainte qui devient de plus en plus envahissante. Je lui propose un rendez-vous avec un interprète professionnel [...]

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Le temps de la traduction rythme la consultation, il permet de réfléchir à ce qui se passe, la consultation se déploie lentement, mais cette lenteur lui donne de l’épaisseur : Mme X m’apparaît avec toutes ses difficultés à être là, avec son histoire, sa façon d’être mère. Elle pleurera à l’évocation de son mal-être, la présence de l’interprète n’a pas empêché ses larmes… au contraire, il a vraiment été passeur de sens mais aussi d’émotions. À la fin de la rencontre, je sais que je ne porterai plus jamais sur Mme X le même regard qu’aupa-ravant : il s’est passé quelque chose entre nous, on pourrait dire qu’une ren-contre thérapeutique a eu lieu, qu’une alliance s’est faite. (2008 : 3)

L’anthropologue médicale Hudelson, dans la brochure Paroles de migrants10, évoque les nombreuses stratégies mises en œuvre par les migrants pour surmonter leurs problèmes de communication : demander à une personne de son entourage qui parle français d’assurer la traduc-tion, communiquer dans une langue intermédiaire (l’anglais souvent), demander au professionnel de la santé de parler lentement et de répéter, utiliser des signes pour se faire comprendre, chercher à l’avance dans le dictionnaire les mots dont on aura besoin pendant la consultation… Elle conclut toutefois sur l’importance de la présence d’un interprète formé.

Divers travaux à l’inverse mettent en lumière des réticences quant au recours aux interprètes médiateurs : en Suisse (Weber & Molina 2003 pour les situations médicales et psychologiques ; Graz et alii 2002, mon-trent que les soignants considèrent que des glossaires sont des solutions tout aussi efficaces), au Canada (Bischoff et alii 2003 ; Boivin et alii 2012).

Plusieurs chercheurs ont travaillé à partir d’entretiens et de question-naires sur les attentes et les préférences de soignants (Gajo et alii 2001 ; Hudelson & Vilpert 2011). Ces études montrent à quel point les choses sont complexes, puisqu’en effet, à côté des plaidoyers pour le recours aux interprètes formés/professionnels (émanant tant des associations que de la plupart des chercheurs), les acteurs eux semblent trouver d’autres solutions préférables. Hudelson & Vilpert (2011) par exemple montrent qu’il existe à Genève une sous-utilisation des services d’interprétation, même lorsqu’ils sont facilement disponibles dans l’institution. Gajo et alii 2001 montrent que l’idéal d’interprète présenté dans les entretiens est souvent « une machine à traduire, un ordinateur ». Par ailleurs, les arguments avancés pour préférer les interprètes informels sont nombreux. Pour ce qui concerne les membres bilingues de l’institution, il s’agit d’une plus grande facilité d’organisation (disponibilité immédiate versus

10. http://consult-transculturelle-interpretariat.hug-ge.ch/_library/pdf/Paroles-de-Migrants9.pdf.

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– L’interprétation à distance : une voie d’avenir ?Afin de simplifier les procédures (et les coûts), les services d’interpréta-riat à distance – par téléphone et visioconférence – sont de plus en plus répandus. Ozolins (2011) présente un état des lieux de la recherche sur ce type d’interprétation, en soulignant ses difficultés d’action et de réa-lisation. Selon Rosenberg (2007), elles tiennent surtout au manque de familiarité avec cette situation, qui désoriente la personne à interpréter. L’auteur souligne aussi les problèmes techniques liés au contexte de la situation (co-présence d’au moins deux participants, usage de voix haute, circulation du combiné téléphonique entre les participants, etc.). Mais tandis que Wadensjö (1999) montre que les difficultés de l’interprétation par téléphone sont liées aux différences dans la gestion de la prise de tour, ce qui conduit à une interprétation moins fluide, avec des nombreux chevauchements, Rosenberg montre que les différences les plus impor-tantes ne sont pas inhérentes à l’utilisation du téléphone mais sont plutôt à attribuer au manque d’un cadre contextuel et de référence partagée. En général, l’accès à l’espace de l’interaction est une question centrale dans la recherche sur la communication à distance, où les différents systèmes de médiation – l’interprète et la visioconférence – ont un impact sur les configurations participatives et la distribution des tours de parole entre les participants (voir aussi Licoppe & Verdier 2013, et ici même).

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À côté de ces considérations sur les possibles perturbations ou simples modifications que l’interprétation à distance peut entraîner sur les pra-tiques communicatives ou la façon de communiquer des individus, les différentes parties prenantes adoptent des positions différentes par rapport à l’implémentation de cette forme d’aide à la communication interlinguis-tique. En effet, en contrepoint des avantages pratiques et économiques mis en avant par les institutions utilisatrices sont avancés les arguments des interprètes, qui voient leur travail et leur professionnalité peu reconnue, que ce soit pécuniairement ou socialement (Ozolins 2011 ; Lee 2007).

3. Présentation du dossierLes articles réunis ici offrent un large échantillon des études actuellement développées dans le domaine de l’interprétation en interaction. Ils pré-sentent des situations variées sur plan géographique (France, Allemagne, États-Unis, Italie, Mexique). Les méthodologies mises en œuvre vont d’une sociolinguistique recourant surtout à des entretiens à une analyse conversationnelle qui se fonde sur des données prélevées en situation. Il est intéressant de remarquer que plusieurs articles (Bührig & Meyer ; Verdier & Licoppe ; Ticca & Traverso) recourent de façon plus ou moins développée à la comparaison d’une même situation sociale avec ou sans interprète. Différents types de situations sont illustrés : le tribunal (Bührig & Meyer ; Verdier & Licoppe), les consultations médicales (Bührig & Meyer ; Niemants, Gavioli & Baraldi ; Ticca & Traverso), les entretiens parents/enseignants (Reynolds, Faulstich & Sanchez). L’article de Verdier & Licoppe aborde en outre ce qui se passe lorsqu’une strate supplémen-taire de complexité vient s’ajouter à la configuration avec interprète, l’in-terprétation dans une situation médiatisée (visioconférence).

Les formes d’interprétariat étudiées sont également variées : child bro-kering dans l’article de Reynolds, Faulstich & Sanchez, interprétation professionnelle ou recourant à des interprètes formés (Niemants, Gavioli & Baraldi ; Verdier & Licoppe), interprétation par des proches (Ticca & Traverso), ces différents cas étant discutés dans l’article de Bührig & Meyer.

Les problématiques centrales des différentes contributions se rejoi-gnent pour montrer les difficultés inhérentes à ces situations, ainsi que la variété des fonctions que l’interprète joue, bien loin d’être une simple courroie de transmission. Un grand nombre de ressources et de procédés utilisés par les interprètes, aussi bien que par les autres participants, pour organiser l’espace interlocutif et moduler, équilibrer, diriger, etc. les prises de parole sont décrits. Quasiment toutes les contributions se retrouvent pour constater, de façon plus ou moins explicite, que dans bien des cas,

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les patients, clients, usagers, se retrouvent livrés à eux-mêmes, et que les institutions prennent peu en compte ce problème social.

Les deux premiers articles traitent de consultations médicales, qui sont étudiées avec des méthodologies interactionnelles.

L’article de Niemants, Gavioli & Baraldi montre à travers l’étude de consultations médicales avec interprète en Italie, comment s’effectue la coordination entre les trois protagonistes à l’occasion de « questions déli-cates ». Leurs analyses montrent la variété des formes d’échanges qui se développent au cours de l’interaction (par exemple, préparation entre le soignant et l’interprète de ce qui va être dit à la patiente ; séquence duelle développée entre l’interprète et la patiente pour clarifier ce que cette dernière répond au soignant, etc.), la question majeure restant toujours celle de favoriser la participation des patients.

L’article de Ticca & Traverso aborde lui aussi des moments délicats de la consultation médicale (parler de la douleur, l’examen physique), qui le sont encore plus en présence d’un interprète. L’analyse se concentre sur l’organisation des cadres de participation, et leurs variations au cours de l’interaction, à l’initiative de l’un ou l’autre des participants. Elle montre de façon détaillée les ressources, notamment visuelles et vocales, qui sont utilisées pour sélectionner un interlocuteur, en marginaliser momenta-nément un autre, solliciter une traduction, etc. La réflexion se construit autour de la notion de « non personne » (Goffman, 1969), qui met l’accent sur le travail interactionnel et multimodal que les participants réalisent autour du patient pour identifier et décrire son ressenti et pour le rendre accessible au médecin.

Les deux articles suivants examinent les difficultés de différents ordres liées au statut de locuteur ne maîtrisant pas la langue de l’institution à laquelle il doit d’adresser. Les études reposent sur l’analyse d’interactions ou d’entretiens.

L’article de Bührig & Meyer dénonce à proprement parler les « régimes linguistiques » observés dans différentes institutions en Allemagne, qui conduisent à négliger les problèmes rencontrés par les usagers ou clients allo-phones, et favorisent en conséquence le recours à des interprétations ad hoc de différents types, avec tous les problèmes qu’elles sont susceptibles de poser.

L’article de Reynolds, Faulstich & Sanchez, dans le même ordre d’idée, aborde le problème spécifique du recours aux enfants comme interprètes (child brokering). Il porte sur la situation d’entretien des parents avec les enseignants. Il montre la difficulté de la tâche qui incombe à l’enfant dans ce cas, du fait qu’il doit traduire entre deux figures de l’autorité (l’enseignant et le parent), un discours qui non seulement l’évalue, mais

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qui est souvent truffé de considérations désobligeantes pour le parent (comportant par exemple des consonances raciales) ou pour l’enseignant (le parent critique l’école).

Enfin, l’article de Licoppe & Verdier aborde la situation de l’interpré-tation au tribunal, lorsqu’elle recourt à une communication médiatisée, des visioconférences mettant en relation l’interprète présent dans la salle d’audience et un prévenu qui se trouve dans un autre site. L’analyse montre comment ce dispositif modifie le mode de traduction et le déroulement habituel des échanges entre les protagonistes. Il se concentre également sur les procédés que le prévenu met en œuvre pour accéder à la parole.

Cet ensemble d’études montre la diversité des situations sociales dans lesquelles il peut être nécessaire de recourir à l’interprétation. Cette diversité, qui ressort également des types de données et des méthodologies d’étude utilisées, illustre bien la complexité d’un phénomène qui est ici observé dans ses différentes dimensions, qu’elle soit sociale, culturelle, linguistique ou interactionnelle.

Si on ne met plus aujourd’hui en question le fait que l’interprète, qu’il soit plus ou moins professionnalisé, participe de plein droit à la construc-tion du sens, beaucoup reste encore à faire pour comprendre comment cette construction du sens a lieu, et quels sont les apports de l’interprète aux activités spécifiques qui forment l’ensemble de la situation de com-munication à laquelle il participe. De même, l’exploration des façons dont les différents participants à ces situations s’adaptent et adaptent leurs pra-tiques – même les plus apparemment conventionnelles et normativisées (comme c’est le cas au tribunal par exemple) –, à la situation médiatisée.

Les études réunies dans ce dossier apportent des éclairages précis et variés sur ces différents aspects de la communication en situation de contact langagier et culturel. Ils montrent la vitalité et la diversité des recherches dans ce domaine, et offrent un espace de réflexion sur la question des droits des locuteurs de langues autres et des difficultés émergentes de la rencontre interlinguistique et interculturelle dans les contextes sociaux les plus divers.

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