contrôle non destructif in situ, d'oeuvres d'art par thermographie infrarouge stimulée

7
Contrôle non destructif in situ, d’œuvres d’art par thermographie infrarouge stimulée Par Jean Charles Candoré*, J.L Bodnar*, Vincent Detalle**, Philippe Grossel* *Laboratoire d’Energétique et d’Optique, UFR Sciences Exactes et Naturelles, BP 1039, 51687 Reims cedex 02 ** Laboratoire de recherche des monuments historiques, 29 avenue du Paris, 77420 Champs sur Marne Résumé Dans ce travail, nous présentons différents exemples d’aide à la restauration de peintures murales par radiométrie photothermique infrarouge. Nous présentons d’abord le principe de cette méthode de contrôle non destructif. Nous présentons ensuite le dispositif expérimental mis en œuvre pour l’étude. Nous présentons alors les peintures murales étudiées. Nous montrons enfin, la possibilité de détecter, in situ, par cette technique, des décollements ou des déplacages situés dans le Saint Christophe de la collection Campana du Louvres, dans les murs peints de l’église Saint Florentin de Bonnet, dans les plafonds peints de l’abbaye de Saint Savin sur Gartempe (classée au patrimoine mondial de l’UNESCO) et enfin dans les fresques Cocteau de l’église Saint Pierre de Villefranche sur mer. 1) Introduction Dans le cadre de l’aide à la restauration des œuvres d’art du patrimoine, le Laboratoire de Recherche sur les Monuments Historiques (LRMH), le Centre de Restauration et de Recherche des Musées de France (C2RMF) et les restaurateurs du patrimoine utilisent de nombreuses méthodes et instruments physiques et chimiques. Sans être exhaustifs, nous pouvons citer la photographie visible, la photographie ultra violet, la photographie infrarouge (mises en œuvre en lumière naturelle, en lumière polarisée ou encore en lumière rasante), la radiographie X, la microscopie électronique à balayage, la spectroscopie, la chromatographie en phase liquide ou vapeur, l’accélérateur de particules AGLAE, le sondage acoustique, …Ces méthodes, très diverses, sont très performantes dans leurs domaines d’applications mais, ne sont bien sûr, pas universelles. Par ailleurs, leur principe de mise en œuvre peut rendre certaines d’entres elles fastidieuses et fatigantes à mettre en œuvre. On peut citer, par exemple, la détection de défauts dans des fresques murales (pouvant s’étendre dans les églises sur une surface très importante) par analyse acoustique, dont la source sonore est le tapotement de l’index du restaurateur sur l’œuvre d’art. De nouvelles méthodes de contrôle, destructives ou non destructives peuvent donc encore trouver leur place dans le domaine de l’aide à la restauration d’œuvres d’art. Le Laboratoire d’Energétique et d’Optique de l’Université de Reims Champagne Ardenne travaille depuis environ 20 ans, au développement d’une méthode de contrôle non destructive particulière : la radiométrie photothermique. Ce mode de contrôle est non destructif, sans contact et est utilisé pour l' analyse thermophysique de matériaux minces. Elle a déjà été mise en œuvre pour détecter et caractériser différents types de défauts (délaminages, fissures, inclusions, ...,), localisés ou étendus, dans différents types de matériaux. Elle semble donc pouvoir être d’un emploi possible dans le domaine de la restauration d’œuvres d’art, pour par exemple aider à la restauration de fresques murales, et ce de façon complémentaire à l ‘analyse acoustique. Cela explique que depuis maintenant plusieurs années, nous l’avons mise en ce cadre. Dans ce travail, ce sont alors, différents exemples d’aide à la restauration de peintures murales par thermographie infrarouge stimulée que nous présentons. Nous montrons ainsi, la possibilité de détecter, in situ, par cette technique, des décollements ou des déplacages situés dans le Saint Christophe de la collection Campana du Louvres, dans les murs peints de l’église Saint Florentin de Bonnet, dans les plafonds peints de l’abbaye de Saint Savin sur Gartempe (classée au patrimoine mondial de l’UNESCO) ou enfin dans les fresques Cocteau de l’église Saint Pierre de Villefranche sur mer. 2) Principe du contrôle non destructif par radiométrie photothermique infrarouge Le principe de la radiométrie photothermique est relativement simple. Il consiste à soumettre l’échantillon à analyser à un flux de photons dont l’absorption produit une élévation locale de température au voisinage du point d’impact lumineux, puis à observer les variations d’émissions du matériau à l’aide d’une chaîne de détection optique infrarouge. Les phénomènes thermophysiques mis

Upload: independent

Post on 25-Nov-2023

0 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Contrôle non destructif in situ, d’œuvres d’art par thermographie infrarouge stimulée Par Jean Charles Candoré*, J.L Bodnar*, Vincent Detalle**, Philippe Grossel* *Laboratoire d’Energétique et d’Optique, UFR Sciences Exactes et Naturelles, BP 1039, 51687 Reims cedex 02 ** Laboratoire de recherche des monuments historiques, 29 avenue du Paris, 77420 Champs sur Marne Résumé

Dans ce travail, nous présentons différents exemples d’aide à la restauration de peintures murales par radiométrie photothermique infrarouge. Nous présentons d’abord le principe de cette méthode de contrôle non destructif. Nous présentons ensuite le dispositif expérimental mis en œuvre pour l’étude. Nous présentons alors les peintures murales étudiées. Nous montrons enfin, la possibilité de détecter, in situ, par cette technique, des décollements ou des déplacages situés dans le Saint Christophe de la collection Campana du Louvres, dans les murs peints de l’église Saint Florentin de Bonnet, dans les plafonds peints de l’abbaye de Saint Savin sur Gartempe (classée au patrimoine mondial de l’UNESCO) et enfin dans les fresques Cocteau de l’église Saint Pierre de Villefranche sur mer. 1) Introduction

Dans le cadre de l’aide à la restauration des œuvres d’art du patrimoine, le Laboratoire de Recherche sur les Monuments Historiques (LRMH), le Centre de Restauration et de Recherche des Musées de France (C2RMF) et les restaurateurs du patrimoine utilisent de nombreuses méthodes et instruments physiques et chimiques. Sans être exhaustifs, nous pouvons citer la photographie visible, la photographie ultra violet, la photographie infrarouge (mises en œuvre en lumière naturelle, en lumière polarisée ou encore en lumière rasante), la radiographie X, la microscopie électronique à balayage, la spectroscopie, la chromatographie en phase liquide ou vapeur, l’accélérateur de particules AGLAE, le sondage acoustique, …Ces méthodes, très diverses, sont très performantes dans leurs domaines d’applications mais, ne sont bien sûr, pas universelles. Par ailleurs, leur principe de mise en œuvre peut rendre certaines d’entres elles fastidieuses et fatigantes à mettre en œuvre. On peut citer, par exemple, la détection de défauts dans des fresques murales (pouvant s’étendre dans les églises sur une surface très importante) par analyse acoustique, dont la source sonore est le tapotement de l’index du restaurateur sur l’œuvre d’art. De nouvelles méthodes de contrôle, destructives ou non destructives peuvent donc encore trouver leur place dans le domaine de l’aide à la restauration d’œuvres d’art. Le Laboratoire d’Energétique et d’Optique de l’Université de Reims Champagne Ardenne travaille depuis environ 20 ans, au développement d’une méthode de contrôle non destructive particulière : la radiométrie photothermique. Ce mode de contrôle est non destructif, sans contact et est utilisé pour l'analyse thermophysique de matériaux minces. Elle a déjà été mise en œuvre pour détecter et caractériser différents types de défauts (délaminages, fissures, inclusions, ...,), localisés ou étendus, dans différents types de matériaux. Elle semble donc pouvoir être d’un emploi possible dans le domaine de la restauration d’œuvres d’art, pour par exemple aider à la restauration de fresques murales, et ce de façon complémentaire à l ‘analyse acoustique. Cela explique que depuis maintenant plusieurs années, nous l’avons mise en ce cadre. Dans ce travail, ce sont alors, différents exemples d’aide à la restauration de peintures murales par thermographie infrarouge stimulée que nous présentons. Nous montrons ainsi, la possibilité de détecter, in situ, par cette technique, des décollements ou des déplacages situés dans le Saint Christophe de la collection Campana du Louvres, dans les murs peints de l’église Saint Florentin de Bonnet, dans les plafonds peints de l’abbaye de Saint Savin sur Gartempe (classée au patrimoine mondial de l’UNESCO) ou enfin dans les fresques Cocteau de l’église Saint Pierre de Villefranche sur mer.

2) Principe du contrôle non destructif par radiométrie photothermique infrarouge

Le principe de la radiométrie photothermique est relativement simple. Il consiste à soumettre l’échantillon à analyser à un flux de photons dont l’absorption produit une élévation locale de température au voisinage du point d’impact lumineux, puis à observer les variations d’émissions du matériau à l’aide d’une chaîne de détection optique infrarouge. Les phénomènes thermophysiques mis

principalement en œuvre par cette méthode de contrôle sont la conduction et le rayonnement thermique. Le signal photothermique recueilli par le radiomètre infrarouge dépend donc des paramètres gouvernant ces phénomènes physiques (conductivité thermique, diffusivité thermique, émissivité, température, chaleur spécifique, masse volumique, …), mais aussi de tous les paramètres pouvant être corrélés à ces derniers (aspect de surface, présence de délaminage, présence de fissure, structure interne du matériau, avancement d'une transformation physico-chimique, séchage, sédimentation, …). Le principe de la méthode fait qu'elle est non destructive, sans contact, modulable et facilement personnalisable en fonction des besoins 3) Les dispositifs de radiométrie photothermique infrarouge mis en œuvre pour l’analyse in situ de peintures murales

Comme nous venons de le voir la radiométrie photothermique est une méthode de contrôle non destructif très modulable et personnalisable en fonction des besoins. Il existe donc de nombreuses façons de la mettre en œuvre et par conséquent de nombreux types de dispositifs expérimentaux. Examinons la démarche logique qui nous a conduit à choisir les différents éléments du dispositif expérimental mis en œuvre pour aboutir à la détection in situ de délaminage ou de déplacages situés dans des peintures murales. Le caractère « industriel » de cette application ainsi que le besoin de portabilité que nécessite une analyse in situ, nous ont conduits à mettre en œuvre un dispositif expérimental le plus simple et le plus robuste possible. Par ailleurs, les dimensions potentielles des défauts à détecter étant assez importants, nous avons choisi de mettre en œuvre une analyse étendue, tant pour l’excitation que pour la détection infrarouge. Le caractère « industriel » de cette application, nous a encore conduit à prévoir l’utilisation d’une excitation pulsée. Enfin, la fragilité éventuelle des échantillons analysés, nous a aussi conduit à prévoir la mise en œuvre d’une analyse aléatoire. Ainsi, nous avons choisi des projecteurs à halogènes industriels pour exciter de façon impulsionnelle ou aléatoire, les peintures murales à analyser, une caméra de thermographie infrarouge (par exemple de type A20 de chez FLIR) pour assurer la collecte des informations et enfin une électronique et une informatique de pilotage de l’instrumentation permettant une analyse photothermique (figure 1)

Figure 1 : Exemple de dispositifs expérimentaux utilisés pour l’analyse in situ de peintures murales

4) Analyse de peintures murales : Exemples de résultats expérimentaux obtenus

Le premier type de peinture murale que nous ayons analysé est une copie partielle du Saint Christophe de la collection Campana du Louvre. Il s’agit, comme le montre la figure 2 d’une mini fresque réalisée selon la technique des primitifs Italiens dans un mélange de chaux et de plâtre, le tout étant recouvert d’une couche picturale, qui représente ici l’enfant Jésus. Cette mini fresque, réalisée initialement comme échantillon de pré-étude en vue de l’analyse du Saint Christophe lui-même, comporte 4 défauts : des inclusions de plastazote (figure 2).

Figure 2 : La mini fresque étudiée et la position des défauts internes

Afin de détecter ces défauts, nous avons analysé cette mini fresque par radiométrie photothermique infrarouge aléatoire. Les figures 3 représentent pour l’une, en codage fausses couleurs et pour l’autre

en vue tridimensionnelle, les images infrarouges post traitées obtenues dans ce cadre. Elles font toutes les deux clairement apparaître une signature infrarouge plus importante à l’endroit des défauts : apparition de quatre rectangles bleus dans le premier cas et de quatre bosses dans le second cas. Ces signatures caractéristiques sont dues aux propriétés thermiques plus isolantes du plastazote par rapport au mélange chaux plâtre. En effet notre mode opératoire consiste à exciter notre échantillon avec de la lumière visible. Cette lumière, au cours d’une interaction rayonnement matière chauffe légèrement la surface de l’œuvre d’art. Cet échauffement se propage ensuite par conduction dans la fresque. A l’endroit des défauts, constitués essentiellement d’air et donc plus isolants thermiquement que le mélange chaux/plâtre sur lequel a été déposé la couche picturale, cette propagation a été ralentie. Il s’en suit un refroidissement moins rapide de la surface éclairée au droit des défauts et donc une signature infrarouge plus importante à cet endroit.

Figure 3 : Image photothermique infrarouge codée en « fausses couleurs » (à gauche)

et tridimensionnelle (à droite) de la mini fresque étudiée

Les résultats obtenus sur la mini fresque étant encourageants et effectivement non destructifs, nous avons analysé dans un second temps le Saint Christophe lui-même. Cette œuvre d’art représente Saint Christophe portant l’enfant Jésus et est attribuée à Tommaso del Mazza. Elle a été créée entre 1385 et 1390. Elle fait partie de la collection Campana du Louvre (figure 4).

Figure 4 : La fresque du Saint Christophe étudiée

Cette fresque a d’abord été analysée de façon acoustique par Gabriella Szatanick, restauratrice du patrimoine. Nous l’avons ensuite analysée, zone par zone, afin d’obtenir une résolution optique suffisante pour chaque image, par radiométrie photothermique pulsée. Un exemple de résultat obtenu dans ce cadre est présenté sur la figure 5. Il concerne l’analyse de la zone proche de la main droite du Saint Christophe. Cette figure fait apparaître une tache sombre, au niveau de la main droite du Saint Christophe, qui est caractéristique de la présence d’un défaut.

Figure 5 : Détection d’un délaminage par radiométrie photothermique à côté de la main du Saint Christophe

Dans le but de valider les résultats obtenus sur l’ensemble de la fresque à l’aide de la méthode

photothermique, nous les avons comparés sur la figure 6, à ceux obtenus par analyse acoustique. Cette figure montre clairement que les signatures caractéristiques de défauts visibles par radiométrie

photothermique (zones bleues) correspondent à des zones de décollement détectées avec la méthode acoustique (zones grises).

.

Figure 6 : Comparaison entre les résultats expérimentaux obtenus lors de l’analyse photothermique (à gauche) et acoustique (à droite) du Saint Christophe

La troisième peinture murale que nous ayons étudiée est une fresque de l’église Saint Florentin de Bonnet. Les fresques de cette église datent 13ième et du 14ième siècle et sont en cours de restauration. Nous avons pu obtenir, grâce à l’aide de l’Andra et du conseil municipal du village de Bonnet, quelques heures pour procéder une analyse photothermique in situ. La fresque que nous avons étudiée représente Saint Florentin alité (figure 7).

Figure 7 : La fresque murale « Saint Florentin alité » étudiée

Cette fresque a d’abord été analysée par voie acoustique par madame Taillefer, restauratrice du

patrimoine et chargée de la mission de restauration des peintures murales de l’église. Comme le montre la figure 8, elle détecte un décollement de la couche picturale dans la partie basse de la fresque. Suite à cette analyse acoustique, nous avons analysé la même zone de la fresque par voie photothermique. Le résultat alors obtenu est présenté sur la figure 8. Il montre clairement une signature photothermique particulière dans le bas du thermogramme post traité significatif de la présence d’un délaminage.

Figure 8 : Comparaison entre les résultats expérimentaux obtenus lors de l’analyse photothermique (à droite) et

acoustique (à gauche) de la peinture murale du « Saint Florentin alité »de l’église Saint Florentin de Bonnet

La quatrième peinture murale que nous ayons étudié fait partie des peintures de la nef de l’Abbaye de Saint Savin sur Gartempe. Cette Abbaye est classée depuis 1984, du fait de la qualité exceptionnelle des peintures murales qu’elle contient, au patrimoine mondial de l’UNESCO (figure9). La plupart de ces peintures ont été réalisées à la fin du XIième siècle et sont caractéristiques de la

période Romane. Elles représentent des thèmes religieux inspirés de la Bible, source majeure pour l'art du Moyen Age: ce sont l'Apocalypse, la Passion, la Résurrection du Christ et bien d'autres analogues. Le berceau de la nef, long de plus de 40 mètres, est entièrement recouvert de peintures sur une surface d'environ 500 m2. Elles illustrent la Genèse et l'Exode. Plusieurs campagnes de restauration des peintures murales ont eu lieu. La première fut développée par Prosper Mérimée en 1835. En 1967 une seconde campagne de restauration à visé les peintures du narthex, des voûtes de la nef et des deux cryptes. Enfin, depuis 2005, une nouvelle campagne de restauration des peintures de la nef a débuté. C’est dans ce cadre et en complément des relevés acoustiques effectués par l’équipe de restaurateurs travaillant sur le chantier (Brice Moulinier, Emmanuelle Cante) qu’intervient notre étude. Cette dernière, outre le fait qu’elle visait à confirmer, voire à compléter les relevés des restaurateurs, avait aussi comme objectif de tester les possibilités de la radiométrie photothermique aléatoire en conditions réelles de restauration (sur un échafaudage, à la poussière, au froid, parallèlement à d’autres types d’analyses, parallèlement à des travaux de restauration, …). La peinture murale que nous avons étudiée est une partie de la fresque de la « traversée du désert », plus particulièrement la zone entourant la roue arrière du chariot (figure 9).

Figure 9 : La fresque murale étudiée

Sur la figure 10, nous présentons le relevé acoustique de l’équipe de restaurateurs (à gauche) et l’image infrarouge post traitée, obtenue par radiométrie photothermique aléatoire (à droite). Elle montre d’une part, clairement et comme précédemment, que les résultats obtenus par les deux méthodes d’analyses sont corrélées. Elle montre d’autre part, que la méthode photothermique semble pouvoir être mise en œuvre, in situ et dans des conditions réelles de restauration.

Figure 10 : Comparaison entre les résultats expérimentaux obtenus lors de l’analyse photothermique (à droite) et acoustique (à gauche) de la peinture murale de la «traversée du désert » de l’Abbaye de Saint Savin sur Gartempe

La dernière peinture murale que nous ayons étudiée est « l’hommage aux pécheurs de Sainte Marie » réalisé par Jean Cocteau en 1956-57 sur les murs de l’église Saint Pierre de Villefranche sur mer (figure 11).

Figure 11 : La fresque murale étudiée

Ces peintures murales, relativement récentes subissent déjà les effets induits par leur environnement et par le comportement de nos contemporains. Elles sont déjà légèrement dégradées. Un relevé acoustique rapide, préalable à une restauration souhaitée a été effectué par une équipe de restaurateurs. Il montre la présence d’un certain nombre de défauts, comme des déplacages, des efflorescences de sels, des boursouflures ou encore des écaillages. L’objet de l’analyse photothermique était dans cette dernière étude, d’une part d’essayer de confirmer le relevé acoustique. Il était d’autre part, en conditions réelles, d’essayer d’améliorer la précision du relevé acoustique assez grossier (figure 12). Il était enfin de confirmer une nouvelle fois, les possibilités de la radiométrie photothermique infrarouge en matière de détection in situ de défauts situés dans des peintures murales. Un exemple d’image photothermique aléatoire post traitée obtenue dans ce cadre est présenté sur la figure 12. Il confirme d’abord les résultats obtenus par analyse acoustique, c'est-à-dire qu’un déplacage semble bien exister dans la zone analysée. Il semble ensuite montrer un relevé plus fin du contour de cette zone de déplacages, que l’analyse acoustique, ce qui présente un intérêt certain pour les restaurateurs du patrimoine.

Figure 12 : Comparaison entre les résultats expérimentaux obtenus lors de l’analyse photothermique (à droite) et acoustique (à gauche) de la peinture murale « Hommage aux pécheurs de Sainte Marie »

de l’église Saint Pierre de Villefranche sur mer

5) Conclusion

Dans ce travail, nous avons présenté différents exemples d’aide à la restauration de peintures murales par radiométrie photothermique infrarouge.

Nous avons d’abord présenté le principe de cette méthode de contrôle non destructif. Nous avons ensuite présenté le dispositif expérimental mis en œuvre pour l’étude. Enfin, dans une troisième étape, nous avons présenté les résultats obtenus lors de l’analyse in situ,

du Saint Christophe de la collection Campana du Louvres, des murs peints de l’église Saint Florentin de Bonnet, des plafonds peints de l’abbaye de Saint Savin sur Gartempe (classée au patrimoine mondial de l’UNESCO) et enfin des fresques Cocteau de l’église Saint Pierre de Villefranche sur mer.

Ces résultats montrent d’abord que la méthode photothermique permet bien de détecter in situ des défauts situés dans des peintures murales.

Ils montrent ensuite que les résultats obtenus par analyse photothermique infrarouge sont toujours corrélés à ceux obtenus par analyse acoustique.

Ils montrent encore, que la méthode photothermique semble, par rapport à la méthode acoustique, permettre une détection plus précise et plus objective de ces défauts (voire même moins destructive en ce qui concerne les défauts situés à proximité immédiate de la surface de la peinture murale, qu’une analyse acoustique pourrait détériorer).

Ils montrent enfin, que la méthode photothermique semble utilisable in situ et dans des conditions réelles de restauration de peintures murales pour aider à la restauration de ce type d’œuvre d’art.

Ces résultats très encourageants demandent maintenant à être confirmés et complétés. Il y a d’abord à définir et à mettre en œuvre la variante photothermique qui conduira à l’analyse la

plus complète possible des œuvres d’art tout les perturbant le moins possible (analyse aléatoire ?). Il y a ensuite à étudier les possibilités quantitatives de la méthode photothermique. Il y a encore à confirmer les résultats obtenus sur d’autres échantillons réels et dans d’autres

configurations expérimentales. Il y a aussi à étudier l’intérêt d’une fusion potentielle des informations fournies par une analyse

acoustique et une analyse photothermique, voire même par d’autres types d’analyses physiques. Ils y a enfin à améliorer les procédures de dépouillements afin de mieux faire ressortir les

informations photothermiques utiles et de faire disparaître les artefacts de détections. Des études allant dans ce sens sont en cours

References [1] P. et L. Mora, P. Philippot, La conservation des peintures murales, Bologne, 1977, p. 30. [2] W.Eposti, S. Levrero, G.Stella, actes de la 1ère conférence internationale sur les essais non destructifs en conservation d’œuvres d’art, Rome, 1985, p. I/11.1-I/11.14. [3] V. Tornari, E. Esposito, V. Zafiropulos, N. Paone, C. Fotakis, E.P. Tomasini, N. Smyrmakis, S. Stassinopulos, M. Stefanaggi, « Non invasive laser mesurement for diagnosing the state of conservation of frescoes and wooden icons », 4th European Commission Conference on Researchfor protection, conservation and enhancement of cultural heritage : Oppotunities for European enterprises, Strasbourg, 2000, p. 74-80. [4] T. Fricke-Begemann, G. Gülker, K.D. Hinsch, H. Joost, „Remote localisation of debonded areas in historical murals by TV-holography“ 1999, p. 247-255 ; Schirripa Spagnolo, Guattari, Grinzato, 1999. [5] G. Szatanik, Etude et restauration d’une peinture murale représentant Saint Christophe (collection Campana, Louvre), mémoire de fin d’études, INP- département des restaurateurs, 2004. [6] P. Baratono, F. Cardelli, M. Diana,C. Trombetta, G. Venturini : Termografia e analisi di immagine, ultime applicazioni su strutture architettoniche, 2° Conferenza internazionale sulle prove non distruttive, metodi e indagini ambientali per lo studio e la conservazione delle opere d’arte, Pérouse, 1988, p. 1/9.1-1/9.13 [7] E. Grinzato, P.G. Bison, S. Marinetti, V. Vavilov, : Activ thermal testing of delaminations in frescoes’ plaster, 4th International Conference on Non-destructive Testing of Works of Art, Berlin,1994, p. 357-367 [8] G. Schirripa Spagnolo, G. Guattari, E. Grinzato : Frescoes Diagnostics by electro-optic holography and infrared thermography, 6th World Conference on NDT and Microanalysis in Diagnostics and Conservation of Cultural and Environnemental Heritage, Rome, 1999, p. 385-398. [9]C. Cennini, Le livre de l’art, éd. C. Déroche, Paris, 1991. [10] J.L. Bodnar : Le contrôle optique des matériaux par radiométrie photothermique aléatoire infrarouge, Revue REE, février 2007, pp 68-74 [11] Jean Charles Candoré, Gabriela Szatanik, J.L Bodnar, Vincent Detalle et Philippe Grossel : Infra-red photothermal thermography: A tool of assistance for the restoration of murals paintings? Proceeding of the QIRT2006 congress, Padoue, 2-4 July 2006 Italie [12] S. G. Tavares,A. Agnani, E. Esposito, M. Feligiotti, S. Rocchi , R. M. de Andrade : Comparative study between infrared thermography and laser Doppler vibrometry applied to frescoes diagnostic Proceeding of the QIRT2006 congress, Padoue, 2-4 July 2006 Italie [13] Gabriela Szatanik – Panaït, Mathieu Gerard et Jean-Luc Bodnar : La thermographie infrarouge stimulée pour l’examen des enduits dans les peintures murales : Application au Saint Christophe portant l’enfant Jésus, CoRé n° 17 , décembre 2006, pp 64 – 70 [14] Jean Charles Candoré, J.L Bodnar, Vincent Detalle, Philippe Grossel : Non destructive testing of works of art by stimulated infrared thermography Proceeding of the QIRT2008 congress, Kracow 2-5 July 2008 Poland [15] Jean Charles Candoré, J.L Bodnar, F. Depasse, Vincent Detalle, Philippe Grossel: Approach of the characterization of delamination in mural paintings Proceeding of the QIRT2008 congress, Kracow 2-5 July 2008 Poland