document 1. la cochenille farineuse, un ravageur des cultures

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https://lewebpedagogique.com/bouchaud 21_Tspe_G2_G3_dst.docx 1 DST G2/G3 Durée 1h Comme beaucoup d’insectes, la cochenille farineuse héberge différentes bactéries dans ses cellules. Ce système symbiotique particulier a suscité l’intérêt des biologistes. Utilisez les informations apportées par les documents ainsi que vos connaissances pour montrer les conséquences de l’enrichissement du génome dans l’organisme de la cochenille et justifier les étapes du scénario évolutif proposé dans le document 5. Vous organiserez votre réponse selon une démarche de votre choix intégrant des données issues des documents et les connaissances complémentaires nécessaires. Document 1. La cochenille farineuse, un ravageur des cultures. La cochenille farineuse (Planococcus citri) est une espèce d’insecte originaire d’Asie. Elle doit son nom au fait que son corps est recouvert de filaments blancs et cireux, la rendant très difficile à éliminer. Introduite en Europe, en Afrique, en Océanie et aux Amériques, c’est un ravageur qui s’attaque à plus de 200 espèces végétales cultivées (orangers, bananiers, tomates, vigne, ficus, orchidées) mais aussi à la flore sauvage. Les cochenilles sucent la sève des végétaux qu’elles colonisent grâce à leurs pièces buccales piqueuses-suceuses et sécrètent un miellat qui enrobe feuilles et fruits, favorisant la croissance de champignons. Les feuilles jaunissent prématurément et la croissance des plantes est ralentie par ces attaques. Image d’après https://www.pourlascience.fr/ et Spécialité SVT terminale Bordas 2020 Document 2. Les symbioses chez la cochenille. La cochenille farineuse héberge deux bactéries, l’une appelée Tremblaya princeps, déjà connue comme endosymbiote, mais aussi une autre espèce de bactérie, plus récemment découverte, et nommée Moranella endobia. Tremblaya princeps, de grande taille pour une bactérie (10 à 20 μm), possède le plus petit de tous les génomes connus, avec 139 000 nucléotides organisés en 121 gènes. L’autre bactérie, Moranella endobia, beaucoup plus petite, possède 406 gènes répartis sur un ADN de 580 000 nucléotides. Pour référence, les génomes bactériens connus sont souvent compris entre 700 et 4250 gènes. Dans son abdomen, la cochenille possède un organe ovale, appelé bactériome, contenant de nombreuses cellules appelées bactériocytes, dans lesquelles se trouvent des bactéries. Cochenille et bactériocyte Un bactériocyte D’après https://www.sciencedirect.com Document 3. La synthèse du peptidoglycane de Moranella. La figure ci-contre représente la chaîne de biosynthèse du peptidoglycane (polymère de chaînes glucidiques) chez Moranella. Le peptidoglycane est un composant de la paroi bactérienne maintenant la forme des cellules et assurant une protection mécanique contre la pression interne. La paroi formée de peptidoglycane est située dans le périplasme, espace situé entre la membrane plasmique (ou membrane interne) et la membrane externe.

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Page 1: Document 1. La cochenille farineuse, un ravageur des cultures

https://lewebpedagogique.com/bouchaud 21_Tspe_G2_G3_dst.docx 1

DST G2/G3 Durée 1h

Comme beaucoup d’insectes, la cochenille farineuse héberge différentes bactéries dans ses cellules. Ce système symbiotique particulier a suscité l’intérêt des biologistes.

Utilisez les informations apportées par les documents ainsi que vos connaissances pour montrer les conséquences de l’enrichissement du génome dans l’organisme de la cochenille et justifier les étapes du scénario évolutif proposé dans le document 5.

Vous organiserez votre réponse selon une démarche de votre choix intégrant des données issues des documents et les connaissances complémentaires nécessaires.

Document 1. La cochenille farineuse, un ravageur des cultures.

La cochenille farineuse (Planococcus citri) est une espèce d’insecte originaire d’Asie. Elle doit son nom au fait que son corps est recouvert de filaments blancs et cireux, la rendant très difficile à éliminer. Introduite en Europe, en Afrique, en Océanie et aux Amériques, c’est un ravageur qui s’attaque à plus de 200 espèces végétales cultivées (orangers, bananiers, tomates, vigne, ficus, orchidées) mais aussi à la flore sauvage.

Les cochenilles sucent la sève des végétaux qu’elles colonisent grâce à leurs pièces buccales piqueuses-suceuses et sécrètent un miellat qui enrobe feuilles et fruits, favorisant la croissance de champignons. Les feuilles jaunissent prématurément et la croissance des plantes est ralentie par ces attaques.

Image d’après https://www.pourlascience.fr/ et Spécialité SVT terminale Bordas 2020

Document 2. Les symbioses chez la cochenille.

La cochenille farineuse héberge deux bactéries, l’une appelée Tremblaya princeps, déjà connue comme endosymbiote, mais aussi une autre espèce de bactérie, plus récemment découverte, et nommée Moranella endobia.

Tremblaya princeps, de grande taille pour une bactérie (10 à 20 µm), possède le plus petit de tous les génomes connus, avec 139 000 nucléotides organisés en 121 gènes. L’autre bactérie, Moranella endobia, beaucoup plus petite, possède 406 gènes répartis sur un ADN de 580 000 nucléotides.

Pour référence, les génomes bactériens connus sont souvent compris entre 700 et 4250 gènes. Dans son abdomen, la cochenille possède un organe ovale, appelé bactériome, contenant de

nombreuses cellules appelées bactériocytes, dans lesquelles se trouvent des bactéries.

Cochenille et bactériocyte Un bactériocyte

D’après https://www.sciencedirect.com

Document 3. La synthèse du peptidoglycane de Moranella. La figure ci-contre représente la chaîne de biosynthèse du peptidoglycane (polymère de chaînes

glucidiques) chez Moranella. Le peptidoglycane est un composant de la paroi bactérienne maintenant la forme des cellules et assurant une protection mécanique contre la pression interne. La paroi formée de peptidoglycane est située dans le périplasme, espace situé entre la membrane plasmique (ou membrane interne) et la membrane externe.

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Chaque gène de la voie de biosynthèse produit une protéine, ici une enzyme, qui catalyse une

réaction déterminée. Les protéines produites par le génome nucléaire du bactériocyte pénètrent dans le cytoplasme de Moranella pour y accomplir leur fonction. De même certaines molécules nécessaires à la voie de biosynthèse sont fournies par le bactériocyte.

Document 4. La synthèse du tryptophane et de la phénylalanine par la cochenille. Spécialité SVT terminale Bordas 2020

Pour subvenir à ses besoins, la cochenille doit compléter son alimentation par la fabrication, dans ses propres cellules, d’acides aminés essentiels absents de la sève des végétaux.

La figure ci-dessous représente les chaînes de biosynthèse de deux acides aminés essentiels (le tryptophane et la phénylalanine) et l’origine des gènes impliqués dans ces chaines de synthèse.

Chaque réaction de transformation d’une molécule en une autre est représentée par une flèche à laquelle est associée l’enzyme (ainsi que le gène contrôlant sa synthèse), représentée par un rond coloré associé à une lettre (pour la photocopie), catalysant la réaction.

Les enzymes (et donc l’expression des gènes) sont disposées dans l’ordre où s’effectuent les réactions de synthèse. La couleur des ronds traduit la source du gène.

Document 5. Reconstitution de l’histoire évolutive de la symbiose : un scénario évolutif probable.

Spécialité SVT terminale Bordas 2020

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Correction.

On veut montrer que le génome de la cochenille s’est enrichi au cours de l’évolution suite à différentes interactions, et que cela a eu un effet important. Par ailleurs, un scénario évolutif est proposé, et on nous demande de le confirmer.

Le document 1 présente la cochenille farineuse et son rôle écologique (globalement négatif sur les écosystèmes) : élimination difficile, espèce ravageuse introduite sur divers continents, qui provoque des dégâts sur la végétation (favorise le développement de champignons et ralentit la croissance des plantes).

Le document 2 aborde les symbioses chez la cochenille. On observe une double symbiose (plus précisément une double endosymbiose) :

- La cochenille héberge dans des cellules spécialisées, les bactériocytes de l’organe bactériome, des bactéries Tremblaya princeps (grande taille, petit génome avec très peu de gènes).

- Les bactéries Tremblaya princeps hébergent elles-mêmes un autre endosymbiote bactérien, Moranella endobia, qui possède aussi relativement peu de gènes.

On peut supposer une régression du génome de ces bactéries au cours de l’évolution suite à cette double endosymbiose.

Le document 3 traite de la voie de biosynthèse du peptidoglycane de Moranella (composant de la paroi bactérienne). Cette voie de biosynthèse complexe s’effectue grâce à de nombreuses enzymes (chacune produite par un gène), qui chacune catalyse une réaction déterminée. On constate qu’il faut au moins 22 gènes (produisant au moins 22 protéines) pour que la voie de biosynthèse soit complète. Certaines protéines sont produites par des gènes de gammaprotéobactérie (3), d’autres par des gènes de bactéroïdetes (2), d’autres par des gènes d’alphaprotéobactéries (5) qui sont tous maintenant des gènes nucléaires, d’autres par des gènes de cochenilles (3) et d’autres enfin par des gènes de Moranella (9) Les protéines produites par le génome nucléaire du bactériocyte pénètrent dans le cytoplasme de Moranella pour y accomplir leur fonction. De même certaines molécules nécessaires à la voie de biosynthèse sont fournies par le bactériocyte. Les protéines codées par les différents gènes nucléaires du bactériocyte pénètrent donc dans Tremblaya puis Moranella pour réaliser leur fonction. Il y a donc des transferts horizontaux de gènes entre ces trois espèces bactériennes et le génome nucléaire de la cochenille. Ces gènes sont indispensables car ils permettent la synthèse de peptidoglycane par Moranella (sans ces gènes, la synthèse ne pourrait se faire). Ces espèces bactériennes ne sont pas présentes dans la cochenille. Elles ont dû être éliminées, mais une partie de leur génome s’est intégré dans le génome nucléaire par transfert horizontal. Lorsque l’on étudie le document 4, on apprend que la cochenille doit compléter son alimentation par la fabrication, dans ses propres cellules, d’acides aminés essentiels (dont le tryptophane et la phénylalanine) absents de la sève des végétaux. La chaîne de biosynthèse comprend ici aussi de nombreuses étapes (13 pour le tryptophane et 9 pour la phénylalanine), chaque étape étant catalysée par une enzyme codée par un gène. On voit que certaines enzymes sont codées par des gènes de Tremblaya, d’autres par Moranella, d’autres par Tremblaya et Moranella, d’autres par des gènes de l’insecte. Sans l’apport de gènes bactériens, la chaîne de biosynthèse ne pourrait être complète et l’insecte ne pourrait synthétiser ces deux AA essentiels. On voit ici que cette double endosymbiose permet la réalisation de ses voies et est très importante pour l’évolution de cette cochenille. L’étude de ces deux exemples de voies de biosynthèse permet alors de confirmer le scénario évolutif probable du document 5. Des gammaprotéobactéries, des bactéroïdetes et des alphaprotéobactéries auraient été absorbées par des cellules de cochenilles (aboutissant aux bactériocytes), leur génome aurait régressé et des gènes auraient été intégrés dans le génome nucléaire par transfert horizontal. Les bactéries auraient

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par la suite totalement régressé ou auraient été éliminées. Dans un deuxième temps, une bactérie serait devenue ensymbiote (Tremblaya princeps) et au cours du temps son génome aurait régressé, certains gènes passant dans le noyau du bactériocyte. Dans un dernier temps, une bactérie, Moranella endobia, serait également devenue endosymbiote de Moranella endobia (avec probablement aussi une régression de génome). L’ensemble de ces génomes importés permet la réalisation de la synthèse de peptidoglycane par Moranella, et la synthèse d’AA essentiels par la cochenille. Cela permet alors un enrichissement des génomes de la cochenille et a un effet important sur son évolution (ainsi que sur celle de Moranella qui peut continuer à synthétiser sa paroi alors qu’il lui manque des gènes essentiels). Notions de cours en relation avec les problématiques (à placer dans la démarche). - Des échanges de matériel génétique, hors de la reproduction sexuée, constituent des transferts horizontaux. Ils se font par des processus variés. - Ils sont permis par l’universalité de l’ADN et l’unicité de sa structure dans le monde vivant. - Les transferts horizontaux sont très fréquents et ont des effets très importants sur l’évolution des populations. - Les endosymbioses transmises entre générations, fréquentes dans l’histoire des eucaryotes, jouent un rôle important dans leur évolution. - Le génome de la cellule intégré dans une cellule hôte régresse au cours des générations, certains de ses gènes étant transférés dans le noyau de l’hôte. Conclusion. La conclusion doit montrer les conséquences de l’enrichissement du génome dans l’organisme de la cochenille, c’est-à-dire que l’apport de génomes étrangers permet la réalisation de voies métaboliques, tant chez Moranella (synthèse de peptidoglycane) que chez la cochenille elle-même (synthèse d’acides aminés essentiels). Cette acquisition de génomes étrangers s’est faite en plusieurs temps au cours de l’évolution et par divers processus (transferts horizontaux et endosymbioses).

Démarche de résolution personnelle 2 1 0

Construction d’une démarche cohérente bien adaptée au sujet

Construction insuffisamment cohérente de la démarche

Absence de démarche ou démarche incohérente

Analyse des documents et mobilisation des connaissances, dans le cadre du problème scientifique posé

4 3 2 1 0 Informations issues des documents pertinentes, rigoureuses et complètes et connaissances mobilisées pertinentes et complètes pour interpréter

Informations issues des documents pertinentes, rigoureuses et complètes mais connaissances à mobiliser insuffisantes pour interpréter

Informations issues des documents incomplètes ou peu rigoureuses et connaissances à mobiliser insuffisantes pour interpréter

Seuls quelques éléments pertinents issus des documents et/ou des connaissances

Absence ou très mauvaise qualité de traitement des éléments prélevés

Exploitation (mise en relation/cohérence) des informations prélevées et des connaissances au service de la

résolution du problème 3 2 1 0

Argumentation complète et pertinente pour répondre au problème posé

Argumentation incomplète ou peu rigoureuse Argumentation absente et/ou réponse explicative absente ou incohérente Réponse explicative

cohérente et complète avec le problème posé

Réponse explicative cohérente avec le problème posé

Absence de réponse ou réponse non cohérente avec le problème posé