des racines et des fleurs - collège jean boucheron · 2017. 3. 26. · des racines et des fleurs a...

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Des racines et des fleurs A droite, une superbe carte postale du collège de Castillonnès dans sa campagne paisible. A gauche, le lycée Zirmunai de Vilnius, dans un des quartiers de la ville. Au milieu, notre projet européen et les échos de nos premières correspondances et de nos premiers échanges..... Pour nous, la Lituanie est un pays du nord, entre l’Europe et la Russie, une destination originale et peu répandue. Un pays proche et lointain du nôtre et qui ressemble de plus en plus à l’idée que nous nous en faisons. A 2200 kilomètres du Lot-et-Garonne, un voyage doux.........jusqu’au bout de l’Europe ! Nous allons y séjourner une semaine pour y rencontrer nos correspondants lituaniens. Trop beau pour y croire! Nous avons réellement découvert la Lituanie et toute cette partie de l’Europe en géographie en travaillant le projet européen, parcourant ainsi un pays agréable et chantant, classique, gothique et baroque, magnifique et sympathique à vivre, qui ressemble beaucoup à notre région avec ses lacs, ses forêts, ses pins, ses plages sauvages et ses dunes de sable…. ! Quand on évoque Vilnius, on se fixe sur des images, on pense à une ville « froide » de culture populaire nordique et marquée par l’ère soviétique : à la lecture des témoignages, on voit que c’est au contraire une ville vivante et moderne au patrimoine très riche dans la quiétude de ses petites rues, une métropole élégante peuplée par des habitants qui sont prêts à recevoir des étrangers, à apprendre de nouvelles langues et à découvrir de nouvelles cultures. Nos correspondants disent qu’on retrouve parfois ce côté froid et distant qu’on imagine dans les pays du nord de l’Europe aux hivers rudes mais qu’on y fait aussi beaucoup plus sou vent des rencontres inattendues et heureuses, avec des personnes accueillantes et très gentilles ! Nous avons aussi une culture commune à partager avec la Lituanie. Si le pays est encore peu francophone, la langue et l’histoire française occupent toutefois une place privilégiée. Il est aussi important de comprendre cet héritage et de partager notre modèle culturel et notre façon de vivre : la France est notre pays mais l’Europe est aussi notre patrimoine. Les lycéens lituaniens parlent le français car il est enseigné dans de nombreux établissements de Vilnius; beaucoup aiment le français car leur culture est imprégnée de références concernant notre histoire, notre littérature, nos écoles de peinture, mais aussi nos principes et nos valeurs. Il y a des clubs de français, des académies et beaucoup de livres traduits dans les bibliothèques.L’âme de la francophonie aujourd’hui est aussi bien vivante à l’Université de Vilnius, qui prolonge les traditions de diffusion de la culture française en Lituanie. Les traditions du pays sont aussi fortement enracinées dans le berceau de l’histoire européenne. On retrouve ces traces à travers la langue et la culture française en Lituanie. Au lycée Zirmunai, les élèves écrivent et parlent aussi correctement le français. Cela nous demande de faire plus attention quand nous travaillons ensemble ou échangeons des mails ou des documents! Il nous faut redoubler d’efforts pour ne pas faire trop de fautes… !! Nous avons aussi appris que le français a aussi longtemps été perçu en Lituanie comme un instrument d’indépendance vis-à-vis des puissances voisines, un symbole et un idéal de liberté, un état d’esprit et une voie singulière....l C’est la langue de la culture des élites, de l’enseignement et de la démocratie ! Raffinée, sensible et vivante disent les Lituaniens. Comme dans toute éducation aristocratique russe, le français et la culture française tiennent une place majoritaire.

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Page 1: Des racines et des fleurs - Collège Jean Boucheron · 2017. 3. 26. · Des racines et des fleurs A droite, une superbe carte postale du collège de Castillonnès dans sa campagne

Des racines et des fleurs

A droite, une superbe carte postale du collège de Castillonnès dans sa campagne paisible. A gauche, le lycée

Zirmunai de Vilnius, dans un des quartiers de la ville. Au milieu, notre projet européen et les échos de nos

premières correspondances et de nos premiers échanges.....

Pour nous, la Lituanie est un pays du nord, entre l’Europe et la Russie, une destination originale et peu

répandue. Un pays proche et lointain du nôtre et qui ressemble de plus en plus à l’idée que nous nous en

faisons.

A 2200 kilomètres du Lot-et-Garonne, un voyage doux.........jusqu’au bout de l’Europe !

Nous allons y séjourner une semaine pour y rencontrer nos correspondants lituaniens. Trop beau pour y croire!

Nous avons réellement découvert la Lituanie et toute cette partie de l’Europe en géographie en travaillant le

projet européen, parcourant ainsi un pays agréable et chantant, classique, gothique et baroque, magnifique et

sympathique à vivre, qui ressemble beaucoup à notre région avec ses lacs, ses forêts, ses pins, ses plages

sauvages et ses dunes de sable…. !

Quand on évoque Vilnius, on se fixe sur des images, on pense à une ville « froide » de culture populaire

nordique et marquée par l’ère soviétique : à la lecture des témoignages, on voit que c’est au contraire une ville

vivante et moderne au patrimoine très riche dans la quiétude de ses petites rues, une métropole élégante

peuplée par des habitants qui sont prêts à recevoir des étrangers, à apprendre de nouvelles langues et à

découvrir de nouvelles cultures. Nos correspondants disent qu’on retrouve parfois ce côté froid et distant

qu’on imagine dans les pays du nord de l’Europe aux hivers rudes mais qu’on y fait aussi beaucoup plus souvent

des rencontres inattendues et heureuses, avec des personnes accueillantes et très gentilles !

Nous avons aussi une culture commune à partager avec la Lituanie. Si le pays est encore peu francophone, la

langue et l’histoire française occupent toutefois une place privilégiée. Il est aussi important de comprendre cet

héritage et de partager notre modèle culturel et notre façon de vivre : la France est notre pays mais l’Europe

est aussi notre patrimoine. Les lycéens lituaniens parlent le français car il est enseigné dans de nombreux

établissements de Vilnius; beaucoup aiment le français car leur culture est imprégnée de références

concernant notre histoire, notre littérature, nos écoles de peinture, mais aussi nos principes et nos valeurs. Il y

a des clubs de français, des académies et beaucoup de livres traduits dans les bibliothèques.L’âme de la

francophonie aujourd’hui est aussi bien vivante à l’Université de Vilnius, qui prolonge les traditions de diffusion

de la culture française en Lituanie.

Les traditions du pays sont aussi fortement enracinées dans le berceau de l’histoire européenne.

On retrouve ces traces à travers la langue et la culture française en Lituanie. Au lycée Zirmunai, les élèves

écrivent et parlent aussi correctement le français. Cela nous demande de faire plus attention quand nous

travaillons ensemble ou échangeons des mails ou des documents! Il nous faut redoubler d’efforts pour ne pas

faire trop de fautes… !!

Nous avons aussi appris que le français a aussi longtemps été perçu en Lituanie comme un instrument

d’indépendance vis-à-vis des puissances voisines, un symbole et un idéal de liberté, un état d’esprit et une voie

singulière....l C’est la langue de la culture des élites, de l’enseignement et de la démocratie ! Raffinée, sensible

et vivante disent les Lituaniens. Comme dans toute éducation aristocratique russe, le français et la culture

française tiennent une place majoritaire.

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On y trouve donc une concentration de sens qu’on ne rencontre nulle part ailleurs.

Le français symbolise la liberté dans l’espace européen des idées et des cultures, l’amitié et l’enthousiasme. Les

Lituaniens aiment l’anglais, le russe et l’allemand mais ils pensent que le français les aidera plus à l’avenir.

L’enseignement du français a un rôle concret dans la construction de l’Europe. Ici, à Vilnius, les jeunes aiment

chanter, danser, faire de la musique et…….apprendre le français. On est content pour eux !

Les lycéens s’y intéressent plus encore depuis qu’on a commencé le projet : ils posent plus de questions sur la

France. Ils sont devenus de vrais francophiles ! Le désir et le besoin de France restent incontestables et tout

particulièrement dans le domaine culturel et artistique. Le français porte aussi loin la Lituanie ! On s’en rend

compte à travers nos échanges.

De nombreux écrivains, artistes, intellectuels continuent de donner une impulsion à cette culture francophone

et francisée, qui appartient aussi aux Lituaniens.

Avec cette façon différente de voir les choses et cette importance plus particulière, cette priorité pour eux de

porter un regard neuf sur la liberté et les droits, dans un pays qui longtemps a souffert d’en être privé et où ils

restent fragiles....

En effet, la Lituanie, en raison de son histoire et de sa proximité avec des zones particulièrement instables

d’Europe de l’Est, et notamment avec l’actuel conflit russo-ukrainien, aspire à s’ouvrir davantage vers l’Europe

continentale qui lui offre de nouvelles perspectives. Depuis la crise économique de 2011, elle se tourne de plus

en plus vers l’Union européenne, et non exclusivement vers les pays scandinaves ou anglo-saxons: l’Allemagne

et la France sont donc des partenaires de plus en plus privilégiés. Une évolution internationale que l’Institut

français et le système éducatif encouragent depuis 2012 par.........la pratique du français et les échanges de

mobilités.

Peut-être le fait d’employer notre langue contribue-t-il à atténuer les différences culturelles ?

Ou alors les thèmes choisis – la ville et la culture européennes, la musique, le patrimoine et les idées d’Europe

donnent aussi l’impression que les sujets discutés sont les mêmes que ceux que l’on traite dans nos

programmes. Nous pouvons simplement constater que cette expérience a défriché un terrain inexploré dans

nos cours de géographie et de langues......

Le français pour mieux connaître la Lituanie! Le projet peut se targuer d’un vrai succès !

Nous avons aussi étudié en classe des textes de Romain Gary (né à Vilnius et naturalisé français) sur l’éducation

à la française. Des images du roman et d’émouvants passages pour construire une identification à travers cette

double culture. Assurément, nous avons trouvé notre sujet pour compléter le projet !

L’exception française, c’est aussi “être” français, se sentir français..... Question de culture, de sensibilité, de

ressenti et d’expérience personnelle. D’expérience de l’autre et d’amitié aussi.

Des interrogations inquiètes avant le voyage.

Quand on se rend dans un pays étranger, on doit aussi tout quitter pour trouver un environnement et une

langue totalement inconnus, on ressent donc énormément le besoin de trouver des soutiens, des repères , des

personnes qui peuvent vous aider dans vos recherches ou vous guider au quotidien le temps que tout se mette

en place. La langue française et la culture européennes sont sûrement les meilleurs vecteurs culturels de

communication pour ça ! J’espère qu’elles nous serviront bien à Vilnius !

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Il est clair que présenter notre projet européen commun à l’Université de Vilnius le 25 mai 2017 sera aussi

comme un symbole car celle-ci a longtemps été au coeur de la vie culturelle de l’Europe orientale!

Ce sera pour nous une occasion unique de rencontrer d’autres jeunes européens dans un cadre prestigieux et

convivial et d’échanger, de parler de la France, de Castillonnès, de Bordeaux, de Vilnius et de la Lituanie… en

français et avec des fleurs* ! Sûrement le plus beau moment de l’échange avec une jolie surprise finale en

prime!

On a hâte d’y être……

Lilou Fournié, Eve Dieudonné et Emilie Roger

Collège Jean Boucheron –Castillonnès (47330)

Projet européen 2017 « Cities in their way »-classes de 3ème

Nous l’Europe-concours national AMOPA 2016-2017

Texte revu et corrigé par Bruno PHILIPPE, professeur d’histoire-géographie au collège Jean Boucheron

Coordonnateur du projet européen « cities on their way » mis en place avec le lycée Zirmunai de Vilnius et Marijaa Zarembiene

*Les fleurs accompagnent toutes les relations humaines en Lituanie

Etudes et ressources associées

Extraits de textes « La promesse de l’aube » de Romain Gary

https://www.youtube.com/watch?v=0yf67dxjUP4

Romain Gary, un webdocumentaire de l’Institut français de Lituanie

https://www.youtube.com/watch?v=ayB6J6uxwvI

Les journées de la culture française à l’Ambassade de Lituanie à Paris et à l’Ambassade de France à Vilnius

La semaine de la culture française en Lituanie

La langue française comme moyen de développement culturel en Lituanie

L’Institut français de Vilnius

https://www.youtube.com/watch?v=79UQ1mZIx0Q

Le français comme langue d’ouverture en Lituanie

http://www.tv5monde.com/cms/chaine-francophone/Revoir-nos-emissions/Destination-Francophonie/Episodes/p-27037-Destination-

Lituanie.htm

Destination Lituanie : le fil du bilingue

http://lefildubilingue.org/book/export/html/195

L’invitée culturelle : la chanteuse franco-lituanienne Giédré

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Document de référence choisi par les élèves pour illustrer le thème et compléter la réflexion (français-histoire)

L’éducation à la française de Romain Gary

*l’image de la France et les épisodes de l’histoire de France : une vision idyllique du pays

*L’avenir français

*les études et la culture favorisent l’intégration (l’efficacité de l’éducation)

Romain Gary a 8 ans : il est élevé à Wilno (Vilnius) dans l’amour de la France.

« L’amour, l’adoration, je devrais dire, de ma mère, pour la France, a toujours été pour moi une source considérable d’étonnement. Qu’on me comprenne bien. J’ai toujours été moi-même un grand francophile. Mais je n’y suis pour rien : j’ai été élevé ainsi.

Essayez donc d’écouter, enfant, dans les forêts lituaniennes, les légendes françaises. Regardez un pays que vous ne connaissez pas dans les yeux de votre mère, apprenez-le dans son sourire et dans sa voix émerveillée. Ecoutez le soir au coin du feu où chantent les bûches, alors que la neige dehors fait le silence autour de vous.

Ecoutez la France qui vous est contée dans le Chat botté, ouvrez de grands yeux devant chaque bergère et entendez des voix. Annoncez à vos soldats de plomb que du haut de ces pyramides, quarante siècles les contemplent. Coiffez-vous d’un bicorne en papier et prenez la Bastille, donnez la liberté au monde en abattant avec votre sabre de bois les chardons et les orties. Apprenez à lire dans les fables de la Fontaine, et essayez ensuite à l’âge d’homme, de vous en débarrasser. Même un séjour en France ne vous aidera pas.

Il va sans dire qu’un jour où vint cette image hautement théorique de la France vue de la forêt lituanienne, se heurta violemment à la réalité tumultueuse et contradictoire de mon pays : mais il était déjà trop tard, beaucoup trop tard : j’étais né.

Dans toute mon existence, je n’ai entendu que deux êtres parler de la France avec le même accent : ma mère et le général de Gaulle. Ils étaient fort dissemblables, physiquement et autrement. Mais lorsque j’entendis l’appel du 18 juin, ce fut autant à la voix de la vieille dame qui vendait des chapeaux au 16 de la rue Grand-Pohulanka à Wilno, qu’à celle du général de Gaulle que je répondis sans hésiter.

Dès l’âge de 8 ans, surtout quand les choses allaient mal, et elles allèrent mal très rapidement, ma mère venait s’asseoir en face de moi, le visage fatigué, les yeux traqués, me regardait longuement, avec une admiration et une fierté sans limites, puis se levait, prenait ma tête entre ses mains, comme pour mieux voir chaque détail de mon visage, et me disait :

-tu seras ambassadeur de France, c’est ta mère qui te le dit.

Tout de même, il y a une chose qui m’intrigue un peu.Pourquoi ne m’avait-elle pas fait Président de la République, pendant qu’elle y était ? Peut-être considérait-elle aussi que dans l’univers d’Anna Karénine et des officiers de la Garde, un Président de la République, ce n’était pas tout à fait du « beau monde », et qu’un ambassadeur en grand uniforme, cela faisait plus distingué.

J’allais parfois me cacher dans mon refuge de bûches parfumées. Je songeais à tout ce que ma mère attendait de moi et je me mettais à pleurer, longuement, silencieusement. Je ne voyais pas du tout comment j’allais pouvoir me retourner…. »

Romain Gary-la promesse de l’aube-1960-chapitre XIII-Editions Gallimard

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