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Mensuel de la Confédération paysanne Mensuel de la Confédération paysanne Campagnes solidaires N° 318 juin 2016 – 6 ISSN 945863 Photo Adear de Vendée Se réapproprier et maîtriser les abattoirs Foncier Des Chinois dans le Berry, plus ou moins bien accueillis

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Mensuel de la Confédération paysannepayMensuel de la Confédération paysanneCampagnes solidaires

N° 318 juin 2016 – 6€ISSN 945863

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Se réapproprieret maîtriserles abattoirsFoncier Des Chinois dans le Berry, plus ou moins bien accueillis

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2 \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 Les textes publiés dans Campagnes solidaires peuvent être reproduits avec indication d’origine à l’exception de ceuxde la rubrique Point de vue qui sont de la responsabilité de leurs auteurs et pour lesquels un accord préalable

est requis. Campagnes solidaires est imprimé sur du papier recyclé

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Vie syndicaleActualitéInstallation La Ciap, ça marche !

Foncier Des Chinois dans le Berry, plus ou moins bien

accueillis

Une conférence annuelle sur la protection sociale !

OGM Limagrain, nouveau Monsanto français

InternationalesSénégal Le mil sénégalais mis en péril par les importations

de grains

Culture/livresFrancesco, vétérinaire rural

Stéphane, ouvrier en abattoir

InitiativeMorbihan La Marmite, c’est de la dynamique !

Agriculture paysanneVendée Un parcours à l'installation mouvementé pour un

projet atypique

TerrainL’Alsace fête l’agriculture paysanne

Côtes-d’Armor L’union du nombre fait la force

Aveyron Martine à la ferme, ce n’est pas fini !

CourrierDu mauvais côté du manche

Annonces Culture/BDLa voie des Chevriers, de Samuel Figuière

Une BD hors des sentiers battus

ActionParis vaut bien une Ferme !

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SommaireDossier

Se réapproprier et maîtriser les abattoirs

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Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / 3

Mikel Hiribarren,paysan au Pays Basque,

secrétaire national

LOn l’ouvreCivilisations

Mensuel édité par : l’association Média Pays104, rue Robespierre – 93170 BagnoletTél. : 0143628282 – fax : 0143628003campsol@confederationpaysanne.frwww.confederationpaysanne.frwww.facebook.com/confederationpaysanneTwitter : @ConfPaysanneAbonnements : [email protected] de la publication :Laurent PinatelDirecteur de la rédaction :Christian BoisgontierRédaction : Benoît Ducasse et Sophie ChapelleSecrétariat de rédaction : Benoît DucasseMaquette : Pierre RauzyDessins : SamsonDiffusion : Anne Burth et Jean-Pierre EdinComité de publication :Jo Bourgeais, Michel Curade, VéroniqueDaniel, Temanuata Girard, Florine Hamelin,Sylvain Malgrange, Jean-Claude Moreau,Josie Riffaud, Geneviève Savigny,Véronique LéonImpression : Chevillon26, boulevard KennedyBP 136 – 89101 Sens CedexCPPAP n° 1116 G 88580N° 318 juin 2016Dépôt légal : à parutionBouclage : 25 mai 2016

Le 29 mars, pour la troisième fois, des images d’abattoir ont éclaboussé les visages descitoyen.ne.s des villes et des campagnes. Quelqu’un a tourné – à Mauléon-Licharre, cette fois –et diffusé des images insupportables. La colère et la rage débordent de partout. « Dessouffrances atroces et inutiles à ces pauvres bêtes », disent certains. « Conditions de travailtrop difficiles et travailleurs sous pression », pensent tout de suite les autres.

Je songe à un ancien, un voisin paysan qui a quitté ce monde depuis longtemps. Quelle belleproximité avec sa petite troupe de brebis ! Il vivait tellement pour ses bêtes, et celles-ci le luirendaient bien. Entre tant de souvenirs, j’ai gardé de ce vieux pâtre la fois où il s’était décidé àsacrifier une de ces brebis pour la partager en famille. Il lui marmonnait déjà régulièrementquelques mots, jusqu’au jour où il la coucha sur une table et lui enfila son couteau de bergerbien affûté à travers le cou, une première fois et plusieurs fois de suite… en vain, car il n’ensortait jamais ce jet de sang qui signe la mort. Déçu ou plutôt soulagé, le vieil homme remit surpied la bête, lui soigna les plaies du couteau et la rendit à la vie, comme si de rien n’était.

Tout récemment encore, sur une grande chaîne de télévision, c’est un éleveur de porc basquequ’on nous présentait, fier et heureux au milieu de la forêt, qui grattait et caressaittranquillement le dos d’une de ses truies à taches noires, trop docile.

Il y a mille preuves partout dans nos campagnes pour montrer que les animaux sont plus quebien traités par les éleveurs et les éleveuses. Après chaque traite, nous garnissons de lait chaudde brebis la gamelle des chats flemmards qui sont sur la ferme pour chasser les souris, loin ducuir des canapés où certains de leurs congénères sont recroquevillés, confinés dans lesappartements de ville, à attendre leur ration de croquettes.

Deux civilisations ne seraient-elles pas en train de cohabiter ? Les éleveuses et éleveurs,installés ici depuis longtemps, qui entretiennent vallées, montagnes et campagnes, fournissentdes produits appréciés et n’ont souvent qu’un maigre revenu en retour de tant d’heures etd’efforts consacrés aux animaux et au métier. Et puis, des chefs lieux de cantons auxmétropoles à résidences verticales, des populations urbanisées, davantage sous l’emprise demodes de vie plus sophistiqués et de modèles de consommation alimentaires plus artificiels,qui ne voient plus que loisir ou compagnie chez nos amis les bêtes !

Personne ne veut leur faire de mal, aux animaux. Les dommages par contre sont multiplesaprès les vidéos de Mauléon, du Vigan ou d’Alès. Ces abattoirs de proximité sont fermés, pourun temps ou à jamais. Des ouvriers lourdement désignés coupables. Des éleveuses et deséleveurs impuissants et révoltés. Et combien de concitoyen.ne.s qui ne savent plus à qui seréférer.

Un dessin de Samson résume bien des débats (1). Un paysan mène ses vaches sur un chemin decampagne. Les tenants de l’élevage industriel sont là, sur le côté du chemin, affichant« L’élevage aux vrais professionnels ! » et traitant notre homme de ringard. De l’autre cotés’agitent les fervents du véganisme, banderoles déployées pour dénoncer que viande égalemeurtre, et traitant l’éleveur de salopard. Et notre dessinateur de faire dire au vacher : « Pasfacile d’être la voie paysanne ! »

(1) cf. CS n° 312

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4 \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

Vie syndicale

La Confédération paysanne porteplainte contre Lactalis, la Fnseaet l’État pour vol en réunionLe 25 février des militants de la Confédération paysanne avaient investiles locaux de Lactalis, à Rodez, où ils avaient récupéré des fromages,fruit de leur travail, pour les redistribuer gratuitement en centre-ville.Le 3 mai, 4 paysans étaient convoqués au commissariat de Rodez, suiteà une plainte de Lactalis pour vol en réunion. À la sortie du commis-sariat, ils ont à leur tour déposé plainte au nom de la Confédérationpaysanne pour le même motif.« Le prix payé par Lactalis ne permet pas aux 3 000 producteurs de l’Avey-ron de vivre décemment de leur travail. En effet, leurs coûts de produc-tion et leur rémunération nécessiteraient un prix de 400 euros pour millelitres de lait, au lieu des 260 euros actuellement payés. Nous portons doncplainte pour vol aggravé en réunion contre Lactalis, la Fnsea, chef d’or-chestre de la disparition des paysan.ne.s au profit de quelques usines àlait, et les pouvoirs publics, complices par leur passivité et leur refusd’imposer la maîtrise des productions. »

(communiqué du 4/5)

GlyphosateArrêtons de procrastiner !La décision de reconduire l’autorisation du glyphosate au niveaueuropéen devait intervenir le 18 mai. En fait, il s’agissait surtoutde déterminer dans combien de temps on remettra le sujet sur latable, au lieu de se pencher sur la nécessaire interdiction du pes-ticide.Herbicide le plus utilisé dans le monde, le glyphosate est un outilemblématique de l’industrialisation de l’agriculture. En simplifiantles parcours de cultures, il rend le travail paysan inutile et favorisel’agrandissement des exploitations. Il est aussi le corollaire des OGMqui ont été créés pour y résister et accélérer ainsi les ventes duRoundUp, sa formulation commerciale. Il est un outil de l’élimi-nation des paysan.ne.s.L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) l’ayant classé cancé-rogène probable, la dangerosité du glyphosate pour la santé estévidente, même si une nouvelle expertise scientifique la contre-dit. Cette expertise du Joint Meeting on Pesticide Residues (JMPR),travaillant sous la direction de membres éminents de l’Internatio-nal Life Sciences Institute (ILSI), une organisation de lobbying scien-tifique notamment financée par des producteurs de glyphosate,jette un peu plus de flou, alimentant ainsi la fabrique du doute aubénéfice des multinationales.Mais c’est bien sa formulation avec adjuvants, comme le Round-Up de Monsanto, qui est utilisée comme herbicide, et est incrimi-née de toutes parts pour sa dangerosité. Trop d’exemples de conta-mination écologique et de catastrophes sanitaires de par le mondemettent en cause ce produit. Les gouvernements ne peuvent plusfermer les yeux !

(communiqué du 18/5)

Pour une déclaration des droitsdes paysansEn 2014, la Résolution 26/26 du Conseil des Droits de l’Homme desNations Unies donnait mandat à un groupe de travail intergouverne-mental pour négocier, achever et soumettre au Conseil un projet dedéclaration ONU sur les droits des paysan.ne.s et autres personnes tra-vaillant dans les zones rurales. La 3e session de négociations se tenaitdu 17 au 20 mai 2016 au Conseil des Droits de l’Homme, à Genève. Àcette occasion, la Confédération paysanne et ses partenaires (Coordi-nation Sud, CCFD-Terre solidaire, CFSI, Fian, Peuples solidaires) ontdemandé instamment à la France, non seulement de participer à cesnégociations mais aussi, et surtout, de soutenir l’aboutissement de cettedéclaration.En effet, qu’il s’agisse de parler de la faim dans le monde, de change-ment climatique, de droits des paysans et paysannes à utiliser leurssemences, ou encore d’accaparement des terres agricoles, la questiondes droits des paysan.ne.s et autres personnes travaillant dans deszones rurales doit être traitée de manière spécifique. Sans cela, ils etelles continueront à disparaître et les campagnes de se vider.

(Communiqué commun du 13/5)

Pac 2016 L’incertitude continueLe Président de la République a annoncé le 9 mai qu’une nouvelleavance de trésorerie serait mise en place au 15 octobre pour le paie-ment de 90 % des aides 2016. En clair, alors que la 3e avance detrésorerie pour les aides 2015 n’est pas encore complètement ver-sée, l’année 2016 s’annonce périlleuse pour les paysans et les pay-sannes puisqu’on envisage à nouveau de fonctionner par avanceset que des retards de paiements seront donc vraisemblablementà prévoir ! Alors que le dispositif de la nouvelle Pac devait être « sécu-risé » pour 2016, bien malin celui ou celle qui pourra dire quandles paysan.ne.s pourront avoir une visibilité sur leurs paiements àvenir…L’usine à gaz mise en place par le ministère de l’Agriculture et l’Unioneuropéenne n’en finit pas de grossir et ni les paysan.ne.s ni les ser-vices de l’État ne parviennent à suivre : Telepac n’est pas complè-tement mis à jour pour les déclarations 2016 pourtant ouvertesdepuis le 1er avril, les visites rapides ne sont pas terminées, le tra-vail administratif est sous-traité à l’étranger, les délais et le mon-tant de paiement du solde 2015 sont encore incertains, les pay-san.ne.s en redressement judiciaire sont toujours exclus de cesavances, la paperasse s’entasse et se contredit… À cela s’ajoutentles enveloppes du second pilier, en particulier des aides bio et desmesures agro-environnementales, déjà épuisées alors qu’ellesdevaient servir jusqu’en 2020 !En pleine crise agricole, ce sont encore les paysans et les pay-sannes les plus en difficulté qui sont confrontés à la crainte d’unemauvaise déclaration et à l’incertitude du moment où ils perce-vront leurs aides. Une telle improvisation, qui coûte par ailleurs cherau contribuable, est inadmissible !

(communiqué du 11/5)

Lait : colloque dans l’OuestLes Confédérations paysannes de Bretagne, Pays de la Loire et

Normandie organisent un colloque :

« Crise laitière : un modèle laitier à repenser

pour les producteurs ! »

À Saint-Gilles (Ille-et-Vilaine),

le mardi 14 juin (de 10h à 17h)

Ouvert à toutes les paysannes et les paysans

Renseignements et inscriptions (15 euros) :

[email protected]

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Le ruraleurEh ohles paysans !Il était une fois un monsieurcoiffé comme une personnequi connaissait la musique etjouait du pipeau comme pasun, à qui ses interlocuteursdonnaient du « Monsieur leMinistre ». Dans la profondeobscurité politique, un criretentit venant du fond de l’ou-bli : « Eh oh la gauche ! » Onaperçut alors la crinière blan-chie du ministre vers lequel unappariteur tendait une feuilleoù apparaissait un texte ausujet de terres agricoles donts’emparaient les Chinois. « Audiable les Chinois, je cours aprèsmes âmes progressistes égaréesdans le désordre du temps. »« Eh oh la gauche ! »

L’appariteur revint à la chargeet signifia au ministre quedepuis les déclarations de soncollègue de l’Économie, lagauche avait obliqué vers ladroite. Soudain, comme unécho, de tous les coins du ter-ritoire monte un cri : « Eh oh lespaysans ». « Que se passe-t-il ? » demande le ministre.« Cesont les oubliés des campagnesavec la Confédération pay-sanne », rétorque son affidé.« Ils ont encore du tonus », ditle notable. « Que veulent-ils ?Ils vont pouvoir vendre aux Chi-nois, ils adresseront alors leursdoléances au comité central duparti communiste chinois. »« Mais, Monsieur, vous êtes res-ponsable de l’agriculture, etcessez de chercher la gauche,elle vient d’être exécutée aucalibre 49-3. Les paysans dis-paraissent, c’est eux qu’il fautchercher avant leur engloutis-sement dans la gueule avide dumarché. Tous sont malades, deséleveurs aux vignerons, jus-qu’aux céréaliers qui pourtantont siphonné toutes les aides.Certains veulent en finir de l’in-vivable. »

Monsieur le ministre, nous vou-lons vivre de notre métier, pasmourir de désespoir. « Eh oh lespaysans ! »

Le ruraleur

15 mai 2016

Vie syndicale

Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / 5

La Confédération paysanne publie une infographie sur les enjeux agricoles et alimentaires des accords de libre-échange. Pour s’informer, décrypter, (se) mobiliser.À retrouver ici :www.enviedepaysans.fr/supports_pedagogiques/les-multinationales-dans-nos-assiettes

Alors que le gouvernement français sembleremettre en cause l’accord de libre-échange entreles États-Unis et l’Europe, le processus de ratifi-cation de l’accord avec le Canada (Ceta) va bontrain et l’Europe entame des négociations avec leMercosur. Le Ceta est conclu depuis 2014, sou-tenu par la France, et était mis en discussion auConseil européen le 13 mai pour une ratificationà l’automne. Loin d’être aussi anodin qu’on vou-drait nous le faire croire, cet accord comporte lesmêmes dispositions que le Tafta, et donc les mêmesrisques. Pourtant, les fameuses « lignes rouges »de l’un ne valent visiblement pas pour l’autre…

Ces deux accords sont intimement liés. Le Canadaet les USA ont des normes de sécurité alimentairealignées, des modèles agricoles similaires, sont liéspar des accords de libre-échange (Alena avec leMexique et accord transpacifique). L’un ne se ferapas sans l’autre. Le Ceta comprend d’ailleurs unedérogation à la règle d’origine : si le Tafta est rati-fié, en cas d’utilisation partielle du contingent cana-dien d’exportation de viande bovine, celui-ci fusion-nera avec le contingent états-unien.

Tout comme le Tafta, le Ceta va :• Impliquer le renforcement de la protection desinvestissements qui donnera aux multinationalescanadiennes, et à 41 811 firmes américaines qui ontdes filiales au Canada, le droit d’attaquer les lois etréglementations françaises.• Faciliter la participation des lobbies à l’élaboration,et donc à l’affaiblissement, des normes sanitaires,sociales et environnementales grâce aux mécanismes

de coopération et dialogue réglementaire. Par cemécanisme, l’interdiction des OGM, du traitementchimique des carcasses de viandes, des farines ani-males, et plus globalement notre principe de pré-caution, risquent d’être remis en cause !• Entraîner une baisse à terme de 93,8 % des droitsde douane agricoles, mettant définitivement fin à unoutil important de souveraineté alimentaire. Parexemple, les produits laitiers canadiens entrerontlibrement en Europe, sans droit de douane, alors quel’Europe est en pleine crise laitière !• Augmenter l’entrée, sans droit de douane, en Europede viande bovine (65 000 t/an) et porcine(75000 t/an), secteurs très sensibles et fortement tou-chés par la crise de l’élevage.• Permettre le brevetage de toutes les semences, doncl’interdiction pour les paysan.ne.s de ressemer unepartie de leur récolte, savoir-faire paysan indispen-sable à la souveraineté alimentaire.• La reconnaissance et la protection de seulement10 % de nos indications géographiques sur le mar-ché canadien.• La fin des initiatives de relocalisation et l’ouver-ture de nos marchés publics aux entreprises cana-diennes.

Avec cet accord, la pression sur les prix accélé-rera considérablement l’industrialisation de la pro-duction agricole et la disparition des paysans et despaysannes. Les risques pour notre alimentation etnotre agriculture sont bien trop importants : il fautmettre fin aux négociations de ces accords de libre-échange et ne pas signer le Ceta !

(communiqué du 12/5)

Ceta/Tafta Même combat !

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ÉcobrèvesNéonicotinoïdes : desalternatives existent

Sur invitation du sénateur JoëlLabbé (EELV, Morbihan), desorganisations écologistes et laConfédération paysanne ont par-ticipé le 3 mai à une conférencede presse sur les alternatives auxinsecticides néonicotinoïdes. «Siles néonicotinoïdes se sont autantdéveloppés, c’est parce qu’ils sontdes éléments de confort: l’agri-culteur choisit le traitement dessemences pour être tranquille »,affirme Valentin Beauval, repré-sentant la Confédération pay-sanne, avant de développer lesalternatives possibles aux trai-tements insecticides. La Conf’et les autres participants à laconférence de presse ont distri-bué un communiqué quidemande « d’entériner l’inter-diction de ces substances néfastespour l’environnement et pour lasanté ». À l’inverse, l’AGPB (lesproducteurs de blé de la Fnsea,ndlr) veut leur maintien, et àl’argument « santé » oppose labaisse de rendement… Nousn’avons pas les mêmes valeurs!

Le Sénat se soumetLes sénateurs n’ont pas entendul’appel en faveur de la santépublique concernant les néoni-cotinoïdes. Le 12 mai, ils ontadopté quasiment point parpoint la proposition de la Fnsead’encadrer plutôt qu’interdire.Ainsi le Sénat s’est-il prononcépour une diminution progres-sive des insecticides, mais sansfixer de date limite et en indi-quant comme préalable à uneinterdiction la découverte d’unproduit présentant un bilan plusfavorable… L’Union nationaledes apiculteurs de France (Unaf)réagit avec colère et dénonce« un manque de courage ». Ellemartèle: « Il y a unanimité de lacommunauté scientifiqueconcernant les impacts du pro-duit sur les abeilles ». Qu’ils’agisse d’OGM, de glyphosate,de néonicotinoïdes, etc., le mêmepouvoir montre sa redoutableefficacité.

OGM : un problème sans risque Pour l’Académie américaine dessciences (forcément indépen-dante), dans un rapport publiéle 17 mai, les cultures OGM« ne représentent pas plus derisques pour l’environnementet pour la santé que les récoltesconventionnelles », toutefois« certaines résistances déve-loppées autour des culturesOGM sont un sérieux problèmepour l’agriculture ». Ah bon?C’est quoi alors l’environne-ment pour ces scientifiques?

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Actualité

InstallationLa Ciap, ça marche !La Coopérative pour l’installation en agriculture paysanne (Ciap) vient de tenir – le 26 avril –sa 4ème assemblée générale et de fêter la 60ème installation de porteurs de projet ayant bénéficiéde ses outils d’accompagnement.

6 \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

Àvrai dire, les responsablesde la Confédération pay-sanne de Loire-Atlantique,

initiateurs du projet Ciap, n’ima-ginaient pas une telle réussite.Depuis fin 2012, près de 150 por-teurs et porteuses de projet (dontenviron 35 en ce début 2016) ontété et sont en cours d’accompa-gnement par la coopérative. Pourtoutes et tous, elle propose le stagepaysan-créatif d’un an dédié à lamise en place du projet, offrant desjournées de formation etd’échanges entre porteuses et por-teurs de projet, une rémunérationminimale (650 euros par mois)financées par le conseil régional,ainsi qu’une couverture sociale etsurtout un soutien local à leurinsertion professionnelle et socié-tale (paysan référent et grouped’appui local). Pour un plus petitnombre (environ le quart) qui enfait la demande, la Ciap assure leportage temporaire (1) avant leurinstallation « officielle », ce qui leurpermet de démarrer leur activité,d’ajuster leur projet et d’être enmeilleure posture pour obtenir lefinancement auprès de la banqueet pour l’accès aux aides à l’ins-tallation (pour celles et ceux quiveulent y recourir). Enfin, pourquelques-un.e.s, la Ciap assure lagestion de plusieurs espaces-testen maraîchage bio afin de leurpermettre de se tester avant d’al-ler s’installer ailleurs. Il y a aussides projets d’espace-test en éle-vage.

Car initialement pensée pour desinstallations-créations en maraî-chage et petites productions envente directe, la coopérative a rapi-dement reçu des demandes d’ac-compagnement pour d’autres acti-vités végétales mais aussi et surtouten élevage qui représente aujour-d’hui près de 50 % des projets,dont certains en filière longue et

dans le cadre de reprise d’uneexploitation existante.

Relever le triple défide l’installation

La Ciap apparaît donc comme unoutil en mesure de relever les défisde l’installation et du renouvelle-ment des générations.

D’une part, elle contribue à sécu-riser le parcours à l’installation des« hors-cadre familiaux » (HCF) et,parmi eux, celles et ceux « nonissus du milieu agricole » (Nima),très nombreux à vouloir s’installerpaysan.ne mais qui rencontrent descontraintes spécifiques par rapportaux reprises dites familiales (accèsdifficile au foncier, a priori pas desolidarités familiales ni de trans-mission progressive du savoir-faireet du capital d’exploitation, inser-tion locale et professionnelle plusdifficile, etc.). D’autre part, elleentend répondre aux attentes de lasociété en contribuant au maintiende paysannes et de paysans nom-breux sur des productions de qua-lité ayant de fortes « valeurs ajou-tées » aux plans économique, social(emplois créés), environnemental etterritorial. La grande majorité desprojets sont en agriculture biolo-gique, dont une part importante

en circuits courts ou locaux (amaps,marchés fermiers, commerces bio,restauration collective…). Et la Ciapse révèle un outil très efficace vu letaux d’installations immédiates età brève échéance en sortie du stagepaysan-créatif (80 %), dont desfemmes en proportion beaucoupplus élevée (38 %) que la moyennenationale (25 %).

Enfin, la coopérative contribueaussi à relever le défi de la solida-rité vis-à-vis des porteuses et por-teurs de projet HCF et Nima. Dansles deux sens. Pour les candidat.e.sau métier, le stage paysan créatifest l’occasion non seulement deconfronter leur projet aux réalitésconcrètes du territoire, mais ausside réviser leur regard vis-à-vis d’unmilieu que d’aucuns considèrenta priori comme étranger à leurdémarche, voire même hostile. Laréussite de ces installations reposesur la solidarité des réseaux locaux,en premier lieu ceux des pay-san.ne.s (Cuma, groupes bio,Civam, groupes d’entraide, Soli-darité paysans, etc) mais aussi descitoyen.ne.s, des consommateurset consommatrices, des « ciga-lier.e.s » (2), des élu.e.s locaux, deplus en plus préoccupés de la vita-lité de leur territoire face à la

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ÉcobrèvesAlerte aux perturbateurs

endocriniens« Il y a 25 ans, à mon cabinet,les troubles de l’infertilitéétaient rares. Aujourd’hui je ren-contre quotidiennement descouples qui y sont confrontés »,révèle le docteur Périnaud, pré-sident de l’association Alertedes Médecins sur les pesticides(AMLP). Des scientifiques dumonde entier – et notamment,en France, de l’Inserm et duCNRS – mettent en cause surce point la Commission euro-péenne qui, au lieu de définirdes critères scientifiques telsque le demandait la Cour dejustice de l’Union européennedès 2015, a préféré lancer uneanalyse d’impact. Ceci « pourne pas trop affecter les secteursindustriels soumis à l’examende 700 molécules, dont 400produits phytosanitaires ». Lesscientifiques dénoncent le pro-cédé retenu qui retarde « uneprotection plus efficace de lasanté publique dans l’UE ». PourBruxelles, la santé de l’indus-trie phyto est prioritaire sur lasanté humaine…

Lait : la chute continueLa réduction volontaire de laproduction de lait autoriséepar la Commission européennen’a pas l’effet escompté. Uneréduction tellement volontaireque l’Irlande et les Pays-Bas,entre autres, ont continuéd’augmenter leurs volumes.Ainsi la production a grimpé de5,6 % dans l’UE sur les deuxpremiers mois de l’année 2015et les prix ont chuté de 4 %…En France, le prix est passé de31 centimes le litre de lait fin2015 à 26 cts aujourd’hui, etc’est pire ailleurs : en Europedu Nord, les prix sont tombésà 20-22 cts/l. Cela ne conduitpour autant pas à une aug-mentation de la consomma-tion : en 2003, les Françaisconsommaient 61 litres de laitpar personne et par an, aujour-d’hui c’est descendu à51 litres… Pendant ce temps,les grands groupes industrielset coopératifs investissent àtout va dans le rachat de filialeset la concentration. Les pro-ductrices et les producteurssont la variable d’ajustementdes comptes… jusqu’à l’étran-glement.

Actualité

Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / 7

logique de concentration desexploitations agricoles, synonymede désertification sociale et envi-ronnementale. Cette réussiterepose aussi sur les adear (3) et autresréseaux de développement pourassurer le primo-accueil des por-teurs de projet.

Et ce n’est donc pas pour rien quela Ciap est organisée sous la formed’une société coopérative d’inté-rêt collectif (Scic) permettant, dansla démarche propre à l’économiesociale et solidaire, d’associer à sagouvernance des citoyen.ne.s, desorganisations agricoles et de l’éco-nomie sociale et solidaire, des col-lectivités publiques (établisse-ments scolaires, élus locaux) etles salariés de la coopérative.

Une expérience quinourrit la réflexionet les projets

La (petite) expérience de la Ciap(déjà 4 ans, seulement 4 ans !), parles questions concrètes auxquelleselle est confrontée, ouvre tout unchamp de réflexions et proposi-tions relatives à l’installation enagriculture. Ainsi, la dynamiqueCiap suscite dans plusieurs dépar-tements de la région l’interpellation

de cédant.e.s qui voient à traverscet outil la transmission réellementpossible de leur ferme. La coopé-rative anime des groupes deréflexion entre cédant.e.s pouréchanger sur les questions qu’ils seposent et leur appréhension éven-tuelle à céder-transmettre (4) à untiers non familial. De plus, dans lecadre d’un financement nationalet européen accordé par le Réseaurural français (RRF), la Ciap coor-donne une étude de faisabilité d’unfonds de garantie destiné à sécuri-ser cédant et repreneur durant latransmission progressive de l’ex-ploitation. Autre sujet de réflexionqui aura cours dans l’année quivient : l’intérêt et la faisabilité d’unstatut de paysan.ne-salarié.e, quipourrait être analogue à celui desassocié.e.s-salarié.e.s des sociétéscoopératives de production (Scop),à savoir bénéficier de la protectionsociale des salarié.e.s (en particu-lier en droits retraite et chômage)en contrepartie d’une non oumoindre capitalisation personnelledu paysan ou de la paysanne. Cequi aurait pour effet de faciliter lareprise en limitant le montant descapitaux à reprendre à chaquegénération.

Réussirla régionalisation,déjà bien engagée

Depuis fin 2015, une Ciap existedans chaque département de larégion des Pays de la Loire. Désor-mais, la priorité est, avec la struc-turation de la gouvernance régio-nale, la montée en puissance surl’ensemble de ces départements.Soit en 2016, l’objectif d’accueillirune centaine de stagiaires « pay-san créatif » dont environ le quartdemanderait le portage temporaire.Ce qui représenterait environ lequart de l’ensemble des installationsréalisées en 2015 sur la région,dont la tendance est à une baissequi s’accélère dans le contexteactuel des crises de l’élevage. n

Paul Bonhommeau,

Co-gérant de la Ciap

(1) C’est la Ciap qui est l’exploitante pour lecompte du porteur de projet et peut engagerjusqu’à 40 000 euros pour avances de trésore-rie et premiers investissements dans l’outil deproduction.(2) Les Cigales sont des clubs d’investissementsolidaire et de proximité.(3) Associations pour le développement del’emploi agricole et rural, fédérées nationale-ment au sein de la Fadear, représentées enLoire-Atlantique par l’association Cap 44.(4) Les 2 mots peuvent ne pas avoir le mêmesens : on cède un capital ou un outil et ontransmet un savoir-faire.

À 41 ans, Sylvain Monsimert, ancien ouvrier de la production de poules industrielles, s'est installé paysan en Mayenne il y a unan, grâce à la Ciap. Il a ainsi pu reprendre un élevage de pigeons, après un an passé à travailler avec le paysan cédant. Partie deLoire-Atlantique, la Ciap se développe dans toute la région des Pays de la Loire.

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Foncier Des Chinois dans le Berry,plus ou moins bien accueillis

ÉcobrèvesTafta: la France se fâche

« Jamais nous n’accepterons lamise en cause des principes essen-tiels pour notre agriculture, notreculture…»: c’est ce qu’a déclaréle Président de la Républiquedébut mai au lendemain de l’of-fensive Obama-Merkel, fin avril,en faveur d’une conclusion rapidedes négociations du traité delibre-échange entre l’Union euro-péenne et les États-Unis d’Amé-rique, le Tafta. En Allemagne,Angela Merkel rencontre desrésistances dans son proprecamp. Son ministre de l’Agricul-ture déclarait le 7 mai: « Nousn’allons pas sacrifier nos stan-dards élevés dans l’agroalimen-taire… » Et son ministre de l’É-conomie estime que le projet,sans concession des États-Unis,va échouer. Obama veut conclureavant la fin de l’année et de sonmandat. Espérons que les freinsvont résister à son offensive…

Le Ceta passe incognitoLe Ceta est l’accord commercialnégocié en toute discrétion entrel’Union européenne et le Canada.Soumis au Conseil européen deschefs d’État, s’il est approuvé,comme l’y invite la Commission,il sera applicable en 2017. Soncontenu – 1 600 pages enanglais! – a été analysé par l’eu-rodéputé José Bové. Il y a décou-vert que « l’UE va sacrifier 90 %de ses appellations d’origine pro-tégée… ». « J’appelle tous lesproducteurs en AOP à se mobili-ser et à saisir la Cour européennede Justice », lance-t-il. Le Conseilnational des appellations d’ori-gine laitières (Cnaol) se joint à laprotestation. Les parlementsnationaux des 28 pays membresseront-ils consultés? La Com-mission européenne ne le prévoitpas! Cela donne un avant-goûtde ce que pourrait être le Tafta…

Plus c’est petit, plus c’est cher!

Selon une enquête de l’associa-tion Familles de France, les pro-duits en portions individuellescoûtent 52 % plus cher qu’enemballage familial. À titred’exemple: la brique de soupe de30 centilitres coûte en proportion97 % plus cher que celle d’unlitre, les compotes en petits pots76% de plus que celles d’un kilo,etc. L’écart augmente : lamoyenne était de 47,77 % en2012, pour atteindre 52 % en2015. Parfois, le coût de l’em-ballage est supérieur à celui duproduit contenu, indique le pré-sident de l’association. Cepen-dant, nuance-t-il, mieux vautacheter en portions que de jetersi on ne consomme pas entière-ment. Les consommateurs, sou-vent prêts à mégoter sur les prixalimentaires, choisissent parfoisles achats de confort sans pen-ser aux conséquences pour l’en-vironnement de l’abondance detous ces emballages.

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Dans l’Indre, des achats massifsde terres par des sociétéschinoises soulèvent biendes questions, interrogeanttant le double discours des éluslocaux que les failles dela récente loi d’avenir agricole.

De Paris à Châteauroux, oncrie et on s’agite. Ministre,président de chambre

d’agriculture, responsables de laSafer parlent d’accaparement deterres, comme en Afrique, depuisqu’a été révélé fin 2015 l’achatmassif dans l’Indre de terres agri-coles par des Chinois.

Début mai 2016, les journauxlocaux révèlent qu’une nouvelleexploitation d’une centaine d’hec-tares, située à La Berthenoux, vient« de tomber dans l’escarcelle d’in-vestisseurs chinois ». Avec les pre-miers achats dans le secteur deChâtillon, à l’ouest de Château-roux, les surfaces acquises dépas-sent les 1700 hectares. 400 autresseraient en discussion à Anjouin,dans le nord du département. Etla rumeur enfle : dans les cam-pagnes indriennes, on parle d’unobjectif de 10 000 hectares…

Un investisseur est connu : legroupe China Hongyang, basé àHong Kong, spécialisé dans lafabrication et la vente d’équipe-ments pour les stations-service etl’industrie pétrolière. PascalHérard, journaliste à France 5, arévélé que l’instigateur de cesinvestissements s’appelle MarcFressange. Marié à une avocatechinoise, il est le fondateur-diri-geant d’une entreprise d’importa-tion en Chine de vins et autresproduits agroalimentaires français,mais aussi directeur d’une entre-prise de gestion de portefeuillesspécialisée dans les investissementspour le secteur agroalimentaire enEurope et en Chine.

Le chef de culture en charge desterres acquises reste silencieuxquant aux objectifs. « On n’en saitpas plus que vous (...), on ne voit

personne », lâche-t-il début mai àun journaliste de France Télévi-sions. Depuis le départ des anciensexploitants, il dirige des salariés quicultivent essentiellement descéréales. Selon un intermédiaire encharge de démarcher les agricul-teurs, les nouveaux propriétaires« ont le souci d’assurer l’autonomiealimentaire chez eux ». La Chine quidispose de 9 % de la surface agri-cole exploitable dans le mondedoit nourrir 20 % de la popula-tion mondiale… CQFD ?

Cultures ou placement ?Avec la Confédération paysanne

de l’Indre, Jean-Claude Moreau,adhérent, regrette l’absence d’in-formations sûres et déplore qu’onen soit réduit à des interroga-tions : « Est-ce vraiment pour cul-tiver et envoyer les récoltes en Chinequ’ont été achetées ces terres ? Passûr. Celles des premières exploita-tions acquises sont “rincées”, épui-sées par des années de monocul-tures céréalières. Ne serait-ce pasplutôt et tout simplement un place-ment financier? Même achetées cher,ces terres généreront de la rente fon-cière, un placement plus sûr à longterme que les marchés financiers, ycompris chinois. » Le syndicatestime que c’est en tout cas unebelle opportunité pour les spé-culateurs.

Car les investisseurs ne lésinentpas sur la dépense. China Hon-gyang a payé l’hectare de 8 000 à

12 000 euros, quand il est estiméà 4 000 euros en moyenne dans ledépartement. On comprend quedes paysans en fin de carrière ouen difficulté aient accueilli favo-rablement de telles propositions.Conséquence : cela devrait tirer àla hausse le prix du foncier agri-cole dans la région.

La Safer s’inquiète des prix pra-tiqués, mais aussi du montage quipermet de passer outre ses préro-gatives. « On est notifié, mais on nepeut intervenir que si 100 % des partssont vendues », explique en avril àl’AFP Emmanuel Hyest, le prési-dent de la Fédération nationaledes Safer. Or les investisseurs chi-nois procèdent toujours de lamême manière. Un agriculteurvendant ses terres est approché,une société est montée et l’inves-tisseur en achète 98 ou 99 % desparts, évitant ainsi l’interventionde la Safer. Il s’engouffre dans unefaille juridique ouverte par la loiBussereau de 2006 élargissantl’échappement au contrôle desstructures des montages socié-taires. Malgré les dénonciations etles propositions de la Confédéra-tion paysanne, la faille n’a pas étécolmatée en 2014 par la loi d’ave-nir agricole.

Le ministre de l’Agriculture, Sté-phane Le Foll, ne se démontepourtant pas et réagit vivement :« Je n’imagine pas qu’on ait des terresagricoles achetées par d’autres pays,s’indigne-t-il dans une interview

Tel est pris…Le ministre de l’Agriculture et le président de la FNSafer ont beau pous-ser de grands cris contre ce qu’ils qualifient plus ou moins directementd’accaparement des terres françaises par des investisseurs chinois, ils ensont néanmoins pour leurs frais. Car même si le problème se compliquedans l’Indre par le niveau de prix pratiqué pour l’achat des terres, c’est bienle même stratagème qu’ont utilisé Michel Ramery et ses complices pourleur ferme-usine des 1 000 vaches, profitant des opportunités laissées parla loi d’avenir agricole de 2014. La société montée pour cela par l’entre-preneur en BTP achetait un tout petit peu moins de la totalité des partssociales des structures sociétaires constituées pour la vente d’exploitationslaitières, évitant ainsi l’intervention de la Safer tout en agglomérant terres(plus de 1 000 hectares revendiqués) et cheptel pour aboutir à la ferme-usine aujourd’hui construite à Drucat, dans la Somme.

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La MSA va supprimer1 300 emplois

La convention de gestion signéeentre l’État et la Mutualité socialeagricole (MSA) prévoit le non-remplacement de 1300 postes(9,2% des effectifs), soit les deuxtiers des départs en retraite d’ici2020. Toutefois, indique la direc-tion, les postes de travailleurssociaux devraient être épargnés.La CFDT et la CGT réagissent:« Les réductions drastiques demoyens humains sont incompa-tibles avec le maintien d’un ser-vice public de qualité. » Heu-reusement que les représentantssalariés sont là car les adminis-trateurs « agriculteurs » ges-tionnaires de la MSA sont res-tés très discrets sur les incidencespour les services aux paysan.ne.set autres affilié.e.s.

Ségolène Royal se mêledes 1 000 vaches

La ministre de l’Écologie remeten cause la procédure « simpli-fiée » dont bénéficie le projetd’extension à 880 vaches de laferme-usine de Drucat (dontl’objectif reste d’atteindre les1000 vaches). Début mai, elle ademandé au préfet de la Sommede procéder à une nouvelleenquête publique avec étuded’impact. Les services juridiquesde son ministère estiment quel’extension engendrerait desmodifications substantielles parrapport au projet initial. Le chefde projet de l’usine, Michel Wel-ter (l’initiateur, Michel Ramery,étant décédé début mai),conteste bien entendu cetteintervention qu’il juge « poli-tique » et annonce qu’il intro-duira un recours si le préfetdonne suite à l’injonction de laministre. Le feuilleton continue…Au fait, comment vont lesvaches?

Ferme école Nestlé en Chine

La firme suisse investit en Chinepour la production laitière. Elledispose déjà de trois usines depoudre de lait infantile. Maissurtout, elle investit dans la for-mation pour une production lai-tière locale. En 2014, elle aconstruit une gigantesqueferme-école qui dispose de troisunités représentant les diffé-rents modèles possibles : 400 à600 vaches pour le modèle leplus petit, 600 à 1200 pour lacatégorie intermédiaire, quandla plus grande unité, pas encoreouverte, accueillera 3 600vaches… Pas de dessin sur letype de formation dispensée!On a bonne mine, nous autresFrançais, à contester une petiteusine de 1000 vaches…

Jo Bourgeais

Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / 9

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fin avril au journal des cumas,Entraid. Je vais demander une exper-tise juridique pour voir comment lesSafer pourront agir là où elles ne lepeuvent pas aujourd’hui. » D’au-cun y verra une bonne intention,même si le ministre oublie lesinvestisseurs français accaparantdes terres agricoles dans l’Est del’Europe et en Afrique, tout autantque sa loi qui, à peine deux ansaprès son adoption, montre là unede ses plus graves lacunes.

Le législateur tente cependantd’y remédier. Référent du groupesocialiste sur la loi d’avenir, ledéputé lorrain Dominique Potierconsulte la FNSafer et les syndi-cats agricoles afin de trouver dessolutions. Début mai, au sortirdes premières réunions, émanentdeux propositions à suivre. Lapremière: que seules les personnesphysiques puissent être porteusesde parts de sociétés propriétairesde foncier. La seconde : abaisser

fortement le taux de cession departs permettant l’intervention dela Safer ; la FNSafer propose untaux de 51 %. L’objectif est depouvoir présenter en juin desamendements dans ce sens lors dela discussion au Parlement du pro-jet de loi Sapin « sur la transpa-rence, la lutte contre la corruptionet la modernisation de la vie éco-nomique ».

Les Chinois ne sont cependantpas tous indésirables dans l’Indre.En septembre 2015, les élus locauxétaient fiers de montrer à la pressel’avancement des travaux d’Euro-Sity, présenté comme un « hubsino-européen » devant générerla création de 4000 emplois ! Auxportes de Châteauroux, sur440 hectares près d’une anciennebase de l’Otan, se profilent desbâtiments destinés à booster leséchanges commerciaux entre laChine et l’Europe, dont une plate-forme logistique de 120000 m².L’arrivée des investisseurs chinoisdans les terres du départementn’est peut-être pas complètementune coïncidence… n

Benoît Ducasse

Vue du projet EuroSity, aux portes de Châteauroux. Avant de s’inquiéter des investissements chinois dans les terres agricoles deleur département, les élus et responsables économiques de l’Indre présentaient avec fierté le « hub sino-européen » qui doitouvrir « aux entreprises chinoises des opportunités de premier plan pour s’implanter et se développer en Europe ». Cependant, pourJean-Claude Moreau, de la Confédération paysanne de l’Indre : « Même si les travaux de terrassements d’EuroSity ont fait entrerChâteauroux dans le Top 5 des chantiers publics en France, il y a loin de la coupe aux lèvres. Toutes les usines annoncées ne sont pasencore au rendez-vous et d’autres agglomérations françaises sont en concurrence pour appâter les “Chinois”. »

Lettre au ministreLe 15 mai, la Confédération paysanne de l’Indre a adressé une lettreouverte au ministre de l’Agriculture. Elle lui rappelle que lors de l’examenet du vote de la loi d’avenir, en 2014, le syndicat « avait émis des souhaitspermettant que les sociétés, de tous types, ne soient pas hors des règles s’ap-pliquant en matière de politique foncière et structurelle ». Elle propose enconséquence d’élargir le contrôle des structures sur les transferts de partssociales, pour donner plus de pouvoir aux Safer et au contrôle des struc-tures, et de définir pour cela un seuil de « participation significative » pourpouvoir appliquer un contrôle sur les transferts de parts sociales. Elledemande également à Stéphane Le Foll un plafonnement des aides Pac«pour limiter l’attrait d’exploiter des fermes de plus en plus grandes en Europe,ce qui serait en accord avec le modèle de ferme familiale à la française quevous plébiscitez ».

La lettre ouverte au ministre est à lire sur : http://indre.confederationpaysanne.fr

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10 \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

Le candidat Hollande découvrait avantde devenir président le niveau presquemisérable des pensions versées aux

« anciens paysans »: 784 euros, en moyennepour les chefs d’exploitations à carrièrecomplète, et 552 euros pour les« conjoints », généralement des conjointes.Il s’engageait à ce que ces pensions attei-gnent 75 % du Smic, alors que nous avionsmis la barre minimale – et dans un premiertemps – à 85 %.

La promesse sera petitement tenue puis-qu’un maigre complément de 66 euros,étalé sur trois ans, ne va bénéficier qu’à252000 retraité.e.s « chefs d’exploitation ».Les « conjointes », les chefs et cheffes à car-rières incomplètes et les aides familiaux sesont vus gratifiés d’une seule améliorationd’une trentaine d’euros. Soient en tout552 000 bénéficiaires. 700 000 personnesont été exclues de ces dispositifs. Lesretraites paysannes, en deçà du seuil depauvreté (987 euros) ont relégué le mondeagricole dans une presque seconde zone.

Après notre travail en assemblée généralenationale (1), nous voulons élargir cette pos-sible conférence à toute la protectionsociale : l’égalité hommes-femmes en termede statuts pour acquérir les mêmes droits,l’indemnité journalière maladie qui, à

20 euros, ne permet pas le remplacement,la pension de handicap à moins de300 euros quand on doit quitter le métier,la représentation syndicale au sein de laMSA, d’autres sources de financement de« nos devoirs sociaux » quand le revenus’est effondré pour cause de crises, les coti-sants solidaires qui n’ont pas les moyensd’entrer dans un statut à part entière… Etles travailleuses et travailleurs « détachés »dont le statut prive tous les régimes sociauxde recettes de cotisations…

Ce combat syndical n’est pas petit, les argu-ments des populistes appelant à cesser depayer « les charges sociales » font leur che-

min auprès de celles et ceux qui ont peu pourvivre tout en travaillant beaucoup. Sansoublier celles et ceux qui dirigent la profes-sion et qui, au nom de la compétitivité, sontprêts à sacrifier nos acquis sociaux.

En attendant des jours meilleurs, desmesures telles que le dispositif « Fillon » quipermet la prise en charge par l’État descharges patronales des salarié.e.s (4700 eurospar an) devraient être accessibles aux « non-salarié.e.s » de l’agriculture pour assurerleur « devoir de cotisations ». n

Christian Boisgontier

(1) Le 20 avril à Montreuil (93), cf. CS n° 317

Une conférence annuelle sur la protection sociale !Elle figurait dans les promesses de campagne du candidat Hollande en 2012 : tenir une conférence annuelle sur les retraitesagricoles. Mais depuis quatre ans, toujours pas de conférence...mais la nécessité de l'élargir désormais à tout le champ social.

Une organisation dédiée aux retraités : l’AnrafL’Association nationale des retraités agricoles de France (Anraf) a pour objectif de fédérer unmaximum de retraité.e.s de l’agriculture. Dans ses statuts, elle s’interdit « toute discussion par-tisane, d’ordre politique ou confessionnelle ». Plus concrètement, lors de ses assemblées géné-rales, la Confédération paysanne, la Fnsea, le Modef et la Coordination rurale sont invités.La Conf’ y est bien accueillie, d’autres se font siffler. Pas facile d’écouter et d’entendre à tourde rôle celles et ceux attachés à la protection sociale par solidarité, et celles et ceux qui regret-tent que les retraites soient petites mais brûlent ou mettent à sac les locaux de la MSA etvoudraient ne pas payer de cotisations.Tout a commencé en 1995. Le militant paysan Boulliou fait scission avec la Fdsea de Dordognepour consacrer le combat syndical à la question des retraites. 5000 retraités de Dordogne adhè-rent à l’association, et 1000 viennent à l’AG annuelle. Principalement implantée dans le Sud-Ouest, l’Anraf possède des structures dans 25 départements. Deux députés, Germinal Peiroet Brigitte Allain, sont les relais parlementaires de l’association qui voudrait faire financer l’amé-lioration des retraites paysannes par un fonds de financement alimenté par une taxe sur« ceux qui tirent profit de l’agriculture », comme l’agroalimentaire, l’agrofourniture, les ven-deurs de matériel ou la grande distribution, et qui vivent sur le dos des paysans et des pay-sannes. L’Anraf revendique elle aussi une conférence annuelle sur les retraites agricoles.

CB(1) Le 20 avril à Montreuil (93), cf. CS n° 317

Solidarité nationaleLes actifs et actives cotisent très peu pourles retraites des ancien.ne.s. D’après lescomptes de la nation, le compte social desexploitant.e.s agricoles (actifs et retraités),s’élève à 16,76 milliards d’euros. Les dépensesde santé s’élèvent à 7,2 milliards, dont 2,4pour les actifs. Les prestations « vieillesse »à 8,38 milliards (pour 1,5 million de retrai-tés non salariés), et les prestations fami-liales à 373 millions. Pour financer toutes cesprestations, le rendement des cotisationsne s’élève qu’à 3,5 milliards en 2015 et nereprésente que 20,8 % des ressources.Le reste est financé par la solidarité natio-nale : 3,4 milliards d’euros au titre de la com-pensation démographique, 600 millionsvenant de l’affectation d’une partie de laCSG et 900 millions venant du régime géné-ral et appelée « contribution d’équilibre ».Le tout complété par des ressources fiscalesaffectées par l’État, à l’exemple de 2,2 mil-liards d’euros venant des droits sur les alcoolsou de 2,2 milliards venant des droits sur letabac. CB

Groupe de travail lors de l'assemblée générale « sociale »de la Confédération paysanne, le 20 avril à Montreuil (93).

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Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / 11

Le groupe Vilmorin-Limagrain comptebien obliger les Français à manger sesnouveaux OGM brevetés. Mais com-

ment faire manger des OGM à des consom-mateurs qui n’en veulent pas ? Très simple :il suffit de dire que ce ne sont pas desOGM !

La ficelle est énorme, mais elle est déjàmise en œuvre au niveau mondial par letrio de tête des multinationales semen-cières. Monsanto, Pionner et Syngentaont colonisé tous les lieux de propa-gande et de décision du monde. Que cesoit à la FAO (Organisation des NationsUnies pour l’alimentation et l’agricul-ture), dans les universités les plus pres-tigieuses, les centres de recherche agri-cole, aux gouvernements étasuniens etcanadiens, à la Commission européenne,dans tous les programmes agricoles delutte contre la faim ou d’adaptation auchangement climatique, on entend désor-mais la même chanson : « Les nouveauxOGM issus de mutations dirigées in vitro,cisgénèse et autres techniques… ne sont pasdes OGM. » Ils seraient même devenusagroécologiques !

Vilmorin/Limagrain est le quatrièmesemencier au niveau mondial. Pour nepas rester à la traîne de ses trois concur-rents et complices, il a décidé d’appliquercette recette chez nous. Il a placé ses cadres

ou anciens cadres à tous les postes clefsdes lieux de décision des politiquespubliques concernant les semences : à l’in-terprofession semencière (Gnis), à l’Unionfrançaise des semenciers, au service offi-ciel de contrôle des semences (Soc), aucontrôle public de l’enregistrement aucatalogue des semences et de l’octroi decertificats d’obtention végétale (Geves),au Comité technique permanent de lasélection, aux pôles de compétitivité agro-nomique… Sans oublier pas moins detrois représentants au Comité écono-mique, éthique et social du Haut Conseildes Biotechnologies (HCB).

Forfait et aveuglementC’est là qu’il a pesé de tout son poids pour

permettre la publication en début d’annéed’un faux avis du HCB grâce auquel leministère de l’Agriculture peut reprendre lachanson préférée des « biotechnologues » :« Les nouveaux OGM ne sont pas des OGM. »Ce forfait a provoqué la démission d’unmembre du Comité scientifique du HCB etde sept organisations membres de sonComité économique, éthique et social (cf.CS n° 317). Suite à cette tempête, le fauxavis a été rétrogradé au rang d’un simpledocument. Mais le gouvernement, aveuglépar les pressions du lobby Fnsea/Gnis/Lima-grain, semble ne pas l’avoir remarqué.

Et il y a un « avantage » supplémentaireà ne pas réglementer ces nouveaux OGM :cela devrait permettre de breveter lessemences qui existent déjà dans leschamps des paysans et des paysannes ! Vil-morin/Limagrain a beau assurer qu’ilrefuse le brevetage de gènes existants déjàà l’état naturel (traits natifs), cela neconcerne en fait que les brevets de sesconcurrents. Lui en revendique d’autresafin de pouvoir interdire aux paysan.ne.sde continuer à sélectionner et reproduireleurs propres semences, et envoie ses lob-byistes convaincre les parlementaires dene pas l’en empêcher.

L’occupation des locaux de Vilmorin,près de Valence le 20 mai, se déroulait àla veille de la journée mondiale d’actionscontre Monsanto (cf.p.22), avec un mes-sage clair : Vilmorin/Limagrain doit s’en-gager publiquement à renoncer à ses nou-veaux OGM et à ses brevets biopirates surles traits natifs des plantes. Le gouverne-ment français est propriétaire de 10 % ducapital du groupe Vilmorin/Limagrain parl’intermédiaire de la Caisse des Dépôts etConsignations : il peut et doit l’ycontraindre !

Ne laissons pas l’industrie semencières’approprier nos savoir-faire ! n

La commission OGM

de la Confédération paysanne

Une centaine de paysansde la Confédérationpaysanne et des Faucheursvolontaires ont occupéles locaux de Vilmorinà Portes-lès-Valence(Drôme), le 20 mai, du matinjusqu’en fin d’après midi.Le syndicat dénoncele discours du groupesemencier, qui à l’instarde Monsanto, affirme queles nouveaux OGM issusde mutations dirigées in vitron’en sont pas afinde contourner l’interdictiondes OGM en Franceet de breveterles semences qui existentdéjà dans les champsdes paysans. À la finde l’occupation,les manifestants ont obtenupour la semaine suivanteun rendez-vous avecle ministre de l’agriculture,Stéphane Le Foll.

OGM Limagrain, nouveau Monsanto françaisLe 20 mai, la Confédération paysanne et les Faucheurs volontaires d’OGM ont occupé les locaux de l’entreprise Vilmorin,du groupe Limagrain, dans la Drôme. Dans leur viseur : les nouvelles techniques de sélection végétale pour produire des OGMde nouvelle génération.

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Internationales

12 \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

Ndiakhate Fall est paysan dans larégion de Thiès, au Sénégal. Aujour-d’hui, 80 % des produits horticoles

du pays, 20 % de l’arachide et 30 % du milsont cultivés dans cette région, par ailleurstouristique. Ndiakhate est actif au sein de laCNCR (Commission nationale de concerta-tion des ruraux) et siège au comité de coor-dination international de la Via campesina.

Que produisez-vous ?Sur 15 à 17 hectares, je cultive de l’ara-

chide, du niébé (1) et du mil. J’élève aussi8 bœufs et 15 ovins. Le mil est la base ali-mentaire du Sénégal, particulièrement enmilieu rural. C’est un produit culturellementsymbolique, utilisé pour célébrer les nais-sances, les mariages ou les cérémoniesfunèbres. Il peut être vendu à l’état brut oudécortiqué en brisure, farine, granulé oucouscous. Après la récolte, je conserve lesquantités nécessaires à la consommationfamiliale et le reste est vendu. La vente sefait au coup par coup sur les marchés heb-domadaires, en fonction des liquiditésnécessaires. Je ne vends jamais le tout aumoment de la récolte car les prix sont trèsbas. Les commerçants sont peu nombreuxet s’accordent en général sur les prix. Nous,paysans, nous sommes plus nombreux etn’arrivons pas à obtenir un bon prix. Toutela vente est informelle, il n’y a pas circuitofficiel et les prix fluctuent en fonction del’offre et de la demande des grandes villes.

Les organisations paysannes cherchent-elles à structurer la vente ?

Nous avons mis en place un système d’achatet de stockage pour prévenir la période desoudure, entre la fin des réserves et la pro-chaine récolte. Nous achetons à nos membresà un prix rémunérateur, plus élevé que lemarché, et nous stockons. Quand le prix dumarché se reprend, nous revendons moinscher à la population de la zone que le prixdu marché; les bénéfices réalisés permettentde faire des ristournes aux producteurs quinous ont vendu leur récolte. Cela évite qu’ilsbradent leur production.

Quels produits fait-on à base de mil ?Nous faisons du couscous, des bouillies,

des galettes, des beignets et nous cher-chons à développer des produits pour les

substituer au riz importé, avec notammentla vulgarisation du dugubu jenn (mil aupoisson, NDLR).

Estimez-vous que les importationsfreinent votre production ?

Indéniablement ! Les produits comme lemaïs argentin, le blé européen ou le riz thaï-landais arrivent à très bas prix. Ils concur-rencent le mil, mais aussi notre riz local, detrès bonne qualité mais 15 % plus cher. Deplus, ce riz local est moins bien distribué quele riz importé car les commerçants fontmoins de marge et ne s’y intéressent guère.Certains producteurs ont fortement réduitles surfaces cultivées de mil pour se limitertout juste à la satisfaction des besoins encéréales de la famille. La sécurité alimentairede la population rurale est fortement atteintepar cette concurrence déloyale. Le bléimporté à bas prix a permis au pain indus-triel d’envahir nos marchés et nos villagesles plus reculés et à concurrencer la bouilliede mil au petit-déjeuner. C’est pourquoinous cherchons à développer un pain tra-ditionnel qui comporterait au moins 50 %de farine de mil.

Quelles seraient vos exigences ?Il faut tout mettre en œuvre pour favori-

ser la production et la consommation locales.Pour l’oignon, le gouvernement a décidé debloquer les importations au moment de laproduction indigène. Au début, les impor-tations étaient bloquées pendant trois mois,puis pendant six mois, nos producteurs ont

pu trouver un marché rémunérateur et la pro-duction nationale a connu une forte hausse.Nous pourrions rapidement atteindre l’au-tosuffisance pour autant que les frontièresjouent leur rôle. C’est également valablepour le riz. Il faut aussi que l’État accom-pagne les producteurs pour vulgariser lestechniques permettant d’augmenter la pro-ductivité (utilisation d’engrais organiquesou de petite mécanisation, accès aux créditsacceptables) et que nous puissions mettreen place des circuits de vente pour obtenirdes prix rémunérateurs. Dans le cas du mil,de bonnes techniques et un marché juste per-mettent d’augmenter la productivité de prèsde 50 %. Enfin, il faut que la population soitsensibilisée à l’origine des produits.

Les produits transformés vous font-ilségalement du tort ?

Bien sûr ! Alors que nous avions de petitesunités de transformation dans les villages quipermettaient de créer des emplois ruraux etvaloriser nos produits, celles-ci ont étéconcurrencées par l’arrivée massive de bis-cuits européens en tout genre, de farine pré-cuite ou autres concentrés permettant de fairedes jus. Les consommateurs ont ainsi délaissénos fruits et produits locaux ou nos bei-gnets de mil pour manger des biscottes demauvaise qualité nutritionnelle. nPropos recueillis par Valentina Hemmeler Maïga,

pour le mensuel d’Uniterre, syndicat paysan suisse

membre de la Via campesina

(1) Le niébé, aussi appelé pois à vache, est une variété deharicot très courante en Afrique.

Sénégal Le mil sénégalais mis en péril par les importations de grainsAu Sénégal, la culture du mil est mise en péril par les importations de maïs, riz et blé venant d’autres continents.

Le mil est la base alimentaire du Sénégal, particulièrement en milieu rural.

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Dès le XIXe siècle, l’industrialisation de l’abattagea été présentée comme un modèle ; on dit que Fords’est inspiré des abattoirs de Chicago pourses chaînes de montage. Malgré tout, en Franceet jusqu’à la fin des années soixante-dix, chaquechef-lieu de canton avait son abattoir qui étaitsouvent celui du boucher local achetant sur piedles bêtes dans les fermes pour revendre la viandeaux habitant·e·s du coin.Les bouchers ont disparu, happés par la grande

distribution, les paysannes et les paysans sont partis àla retraite, laissant leur ferme en friche ou grossir celledu voisin, et bien sûr, les abattoirs ont été ferméset démontés. Aujourd’hui, on trouve moinsde 300 abattoirs en activité en France, et plus de 75 %du tonnage sont réalisés dans des grosses unitésappartenant à des groupes industriels et privés.Par cette évolution, l’abattage est devenu

une activité externe à l’élevage ; les éleveuseset les éleveurs se sont vu déposséder du devenirde leurs animaux, d’où une vraie souffrance moralechez celles et ceux proches de leurs bêtes. Quantau restant de la société, il est régulièrement interpellépar des scandales liés à la traçabilité des viandes etaux méthodes parfois employées dans les abattoirs.Aujourd’hui, les paysannes et les paysans, aux côtés

des autres acteurs de la filière (bouchers,

transformateurs) se mobilisent pour maintenirou recréer un service de proximité, avec l’appuide chercheurs et de chercheuses et le soutiendes consommateurs et des consommatrices.Des modèles et des solutions sont proposés, adaptésou transposés à partir de réalisations et de pratiquesen cours dans d’autres pays de l’Union européenne,notamment en Autriche, Belgique, Suèdeet Allemagne.Ces modèles vont de l’abattage à la ferme sans

intermédiaire à des ateliers collectifs valorisantla viande en circuits courts pour répondre, parexemple, aux besoins de la restauration collective,en passant par un camion-abattoir qui pourrait fairele lien entre les fermes et une plate-formede stockage et de redistribution. Ces projetsde développement se heurtent encore aux directivesdes contrôles sanitaires, aux normes structurellesplus que fonctionnelles et enfin et surtoutà l’habitude de l’ordre établi.Pourtant la législation européenne permettrait

d’organiser différemment ces contrôles et de lesadapter aux structures fermières ou artisanales.C’est donc aujourd’hui sur le terrain que l’on doitœuvrer pour mener à bien la reconquêtede nos outils de production, pour répondreà une demande de produits locaux et de qualité.

Yves Pierre Malbec,

paysan dans le Lot,

Commission Relocalisation de la Confédération paysanne

Se réapproprier et maîtriser les abattoirs

Dossier

Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / I

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Dossier

Les enseignements à tirer après la diffusion des vidéos choc de L214

Abattoir du Vigan « Maltraiter une bête juste avantde tuer, c’est une énorme faute professionnelle »En février 2016, la diffusion d’imagesvidéo de l’abattoir du Vigan a conduità la fermeture provisoirede l’établissement. Trois mois après,le point sur la situation avecla Confédération paysanne du Gard.

L’abattoir intercommunal du Vigan(Gard) a d’abord rouvert pour lesseuls ovins et caprins le 21 mars,

avant que l’autorisation d’abattage ne soitaussi accordée pour les porcins et bovins.Cet abattoir avait été fermé le 23 février, àtitre conservatoire, suite de la diffusiond’une vidéo de l’association de «protec-tion animale»L214 montrant des mauvaistraitements infligés à des animaux. « Ça aété assez violent car je me suis énormémentimpliqué depuis 25 ans dans la vie de cetabattoir, confie Rémi Leenhardt, éleveurd’ovins à Vallerauge. À toutes les périodes oùil a failli fermer, pour des raisons surtout éco-nomiques, nous sommes montés au créneauavec d’autres éleveurs usagers. Ça a permisde conserver l’abattoir et d’impliquer un peuplus les éleveurs. »

L’abattoir traite entre 300 et 350 tonnesde viande par an, provenant d’animaux d’unecentaine d’éleveurs et d’éleveuses des Causses

et des Cévennes travaillant en circuit court(1). Rémi refuse de croire que les actes demaltraitance montrés sur la vidéo arriventrégulièrement. « Il y a eu des actes absolu-ment anormaux, reconnaît-il. Mais si les bêtesétaient constamment maltraitées juste avantd’être tuées, ça aurait des conséquences surla qualité de la viande avec des problèmes decaillots, et nous le verrions. Un abatteur quimaltraite une bête juste avant de tuer, c’estune énorme faute professionnelle ! »

Avant cette vidéo, l’abattoir employaitquatre salariés et un directeur à temps par-tiel. Le président de la communauté decommunes qui gère l’établissement aannoncé fin mars « une réintégration par-tielle du personnel sur qui ne pèse aucunefaute grave », parallèlement à une procé-dure disciplinaire portant sur tout le per-sonnel. « Sincèrement, ma première réac-tion a été de penser au personnel qui faisaitquand même du bon travail, précise Rémi.Quand on parle d’abattoir de proximité, cen’est pas seulement une question de dépla-cement, c’est aussi un rapport humain : tousles éleveurs connaissaient ces salariés. Ilsont été du jour au lendemain accusés detout. Leur faire porter une telle charge, c’estquand même lourd. »

La chambre d’agriculture du Gard ademandé de revoir le statut juridique desabattoirs du Vigan et d’Alès – également misen cause dans une vidéo de L214 quatremois plus tôt – et de les faire basculer ensociété d’économie mixte, signifiant l’en-trée des éleveurs dans le capital. « Il fautévaluer le capital social demandé, et je nevois pas en quoi ça va vraiment faire changerle fonctionnement au quotidien, étant donnéque les éleveurs sont déjà en lien direct avecle directeur quand il y a un souci », observeRémi Leenhardt. « La Conf ’ du Gard avaitproposé un comité d’éthique réunissant deséleveurs, du personnel d’abattoir et éven-tuellement des personnes extérieures, maisnous n’avons eu aucun retour sur cette pro-position, si ce n’est celui d’un éthologue(2). »

Pour l’heure, la communauté de communesa déclaré avoir vérifié le matériel en intégralité,« avec une anticipation de la norme 2017pour le matériel d’anesthésie électrique », etprévoir l’adaptation à moyen terme « dupiège pour les bovins à grandes cornes», ainsique l’installation de caméras « permettantde filmer l’activité quotidienne ». n

Sophie Chapelle(1) Source : La Dépêche, 23/02/2016.(2) L’éthologie a pour but d’observer et analyser le com-portement des espèces.

II \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

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Moutonnier dans le Gard, adhérent à la Confédération paysanne, Rémi Leenhardt s’est beaucoup impliqué depuis 25 ans pour que vive l’abattoir du Vigan, indis-pensable pour les éleveuses et éleveurs cévenols.

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Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / III

Dossier

Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / III

Qu’est-ce qui vous a marqué dans lesvidéos de L214 ?

Les dernières vidéos portent sur de petitsabattoirs. Pas étonnant : mis à part les sala-rié.e.s et les services vétérinaires, personnene peut entrer dans les abattoirs industriels.Or, de nombreux problèmes dans les grandsabattoirs sont liés aux cadences et à l’ab-sence de respect des temps. Il n’y a aucuneréglementation sur les vitesses de chaîne.Pour le Snuitam-FSU, il ne faudrait parexemple pas dépasser en porcs les 400 ani-maux à l’heure, quand certains abattoirsbretons en tuent 850 ! Les salarié.e.s déve-loppent des troubles musculo-squelettiquesau bout de 20-25 ans de travail. Pour y faireface, les abatteurs utilisent l’intérim et il ya un fort turnover. L’abattoir use les gens.

Qu’en est-il des conditions de travailpour contrôler ces chaînes ?

Depuis la révision générale des politiquespubliques, chaque direction au niveau dépar-temental a une dotation objective ennombre de technicien.ne.s, en personneladministratif, etc. Dans les faits, noussommes toujours en sous-effectifs et lepersonnel dans les abattoirs est en fluxtendu. Quand il y a un congé maternité ouun arrêt maladie, des agents non titulaires– des contractuels – sont mis sur les chaînessans formation. Tout est géré dans l’ur-gence, les directions n’ont plus de marge demanœuvre. Entre 2007 et 2012,1 000 emplois ont été supprimés à l’ins-pection vétérinaire. En 2015, seulement

60 emplois ont été créés et 60 autres cetteannée.

La présence permanente d’uninspecteur sur la chaîne d’abattage estpourtant obligatoire ?

Pour avoir le droit d’exporter, la présenced’un inspecteur ou d’une inspectrice pen-dant toute la durée de l’abattage est indis-pensable. Or, comme les abattoirs travaillenten trois-huit et souvent les samedis commeen abattoir de volailles, il faut du monde.Et on ne peut pas être aux deux bouts dela chaîne, c’est-à-dire à la fois sur de l’ante-mortem et du post-mortem. Jusqu’à main-tenant, l’administration a toujours privilé-gié l’inspection post-mortem qui consisteà écarter de la consommation les carcassesporteuses de pathologies et à estampillerpour la mise sur le marché.

L’inspection ante-mortem est doncdélaissée ?

C’est une mission pour laquelle il n’y a pasde volonté politique. La situation peut parailleurs vite devenir conflictuelle avec l’abat-

teur qui, parce qu’il est souvent formé surle tas, peut avoir pris de mauvaises habitudes.Normalement, la réglementation permetd’arrêter la chaîne d’abattage quand y a unproblème. Dans les faits, le bouton d’ur-gence pour arrêter la chaîne n’existe pas tou-jours. Et l’arrêter peut être vu comme duzèle par l’administration : pour l’abatteur, lachaîne ne doit jamais s’arrêter. D’ailleurs,quand on met des PV, on n’en entendensuite plus jamais parler. On a besoin dusoutien de la hiérarchie et de la justice.

Est-il possible de respecter laréglementation dans les abattoirs ?

Oui, mais pour cela il faut une volonté poli-tique. Autrefois, les inspecteurs et inspec-trices vétérinaires faisaient des formationsen matière d’ante-mortem. Et aujourd’hui,un petit abattoir ne peut pas se permettrefinancièrement d’envoyer un opérateur enformation pendant une semaine. Il y a unedistorsion de concurrence en termes de for-mations entre les petits et les grands abat-toirs, et au final c’est l’abattoir de proximitéqui disparaît.

Le ministre de l’Agriculture a indiquél’impossibilité d’ouvrir des abattoirsde proximité du fait du manquede vétérinaires contrôleurs.Qu’en pensez-vous ?

En l’état, c’est vrai. Mais il suffit d’embau-cher, d’ouvrir des postes aux concours. C’estlà aussi un choix politique: veut-on ou nondévelopper des emplois de proximité? Unagent qui travaille dans un petit abattoir vaavoir contrôlé peu de tonnes abattues à lafin de l’année. Pour l’administration, c’est unagent qui va coûter cher. Elle en vient à par-ler comme une entreprise privée et à privi-légier les abattoirs industriels. Or, un abattoirprivé ne va pas s’installer à un endroit où cen’est pas rentable. Développer des abattoirsde proximité suppose qu’ils soient forcémentpublics. Il y a une réflexion à avoir sur la priseen charge par la collectivité de l’abattoir entant que service public.n

Recueillis par

Sophie Chapelle

(1) Le Snuitam est le Syndicat national unitaire interminis-tériel des territoires, de l’agriculture et de la mer

Austérité budgétaire L’inspection ante-mortem :une mission délaissée par l’ÉtatAlors que l’État rogne sur le nombre d’inspecteurs et d’inspectrices vétérinaires, ce sont pourtant ces dernier.e.s qui ontlongtemps assuré la formation des opérateurs en abattoir, empêchant les éventuelles dérives. Entretien avec Didier Herbert,membre du Snuitam-FSU (1), syndicat des inspecteurs vétérinaires en abattoir.

Quelques chiffres Des outils d’abattage de moins en moinsnombreux et mal répartisLe territoire français comptait 263 abattoirs en 2015, dont une majorité sous le giron du sec-teur privé, chiffre en forte baisse depuis le début des années 2000. Parallèlement, les ton-nages moyens sont en augmentation et les abattoirs industriels de groupe représentent les3/4 du tonnage français.La répartition des abattoirs est très inégale sur le territoire, avec une très forte concentra-tion dans le quart Nord-Ouest du pays.Au-delà de cette analyse quantitative, même lorsque des abattoirs sont présents sur un ter-ritoire, ils ne proposent pas toujours les services attendus par les producteurs fermiers. Parexemple, de nombreux abattoirs de groupe sont désormais mono-espèce (bovin), tandis quel’offre en services annexes (maturation, découpe) est parfois inexistante. D’où des situationsproblématiques pour de nombreux éleveurs et de nombreuses éleveuses de petits ruminants.

Source : Actes du colloque : « Quelles places pour les produits fermiers dans les politiques publiques », qui s’est tenu les4 et 5 mars 2015 en Champagne-Ardennes, et rapport Ravaux.

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La Confédération françaisedes bouchers, bouchers-charcutierset traiteurs (CFBCT) travaille surun label éthique visant à assurerune autre traçabilité de la filière viandeauprès de consommateurs quis’interrogent de plus en plus surle contenu de leur assiette.

Depuis un an, la CFBCT(1) porte la miseen place d’un label éthique. L’objec-tif? Conscientiser l’acte de consom-

mation de viande en offrant une bonne tra-çabilité. « D’un côté, le mouvement véganeet des associations comme L214 écœurentles gens de manger de la viande, sans se pré-occuper des hommes et femmes travaillant ausein de la filière. En face, l’agro-industrie vientmanger les petits éleveurs, estime FlorenceFrangeul, responsable “économie” de laCFBCT. Entre les deux, nous rappelons qu’il ya des gens qui veulent travailler correctementet qui proposent de la viande de qualité. Ils’agit de manger moins, mais mieux. »

« Nous en avons assez de voir cette indus-trialisation de la filière viande qui amène desdysfonctionnements, y compris sur les lieuxde transformation, poursuit Christian LeLann, président de la CFBCT. Nous sommesdes artisans, nous avons des savoir-faire etdes principes. La grande moitié des artisansbouchers sont aussi des abattants car ilsachètent des animaux en vif auprès des éle-veurs et des éleveuses. Nous sommes pré-occupés par une alimentation à l’herbe, sans

OGM, une fin de vie honorable, des animauxqui ne soient pas maltraités. Il faut réorien-ter la production française vers une produc-tion de qualité. »

Suite aux scandales relatifs à plusieursabattoirs, la CFBCT a décidé de rassemblerdes acteurs de la filière viande pour contri-buer, ensemble, à une proposition de cahierdes charges pour un label éthique. Ces der-niers mois, la confédération a notammentpris contact avec des organisations syndi-cales paysannes qui, précise Christian LeLann, « n’ont pas la même vision que laFnsea ». C’est le cas de la Confédération pay-sanne, sollicitée sur les parties « élevage »et « abattage », pour des propositions visantà améliorer la filière actuelle.

Face à l’opacité des abattoirs, des ren-contres ont aussi eu lieu avec des abat-teurs. « Nous échangeons sur ce qui peut êtreapporté du point de vue du bien-être animal,relève Florence Frangeul. L’éthique, c’est desanimaux bien élevés, bien transportés, bienabattus et bien transformés. Sur la valorisa-tion, les bouchers ont des valeurs et des fon-damentaux. Ils savent très bien que la qua-lité du produit redonne de la valeur ajoutéeau travail d’éleveur en amont. Il faut retra-vailler ensemble, recréer des connexions. »

« C’est ouvert à toutes les personnes vou-lant travailler autrement pour des consom-mateurs et des consommatrices en attente deréponses, précise Florence Frangeul. La tableest notamment ouverte aux restaurateurs etaux restauratrices, mais aussi à la grande dis-

tribution qui sera la première contrôlée ! »Quid des sanctions si le cahier des chargesn’est pas respecté? « C’est un engagementmoral qui va au-delà des contrôles, répondChristian Le Lann. Si l’on veut changer leschoses, il faut ramener un peu de morale danscette filière. » La proposition de cahier descharges sera transmise prochainement auxministères du Commerce et de l’Agriculture.Les référents de cette charte devraient consti-tuer une base de données consultable sur unblog. La CFBCT espère sortir le label éthiqued’ici l’automne 2016. n

Sophie Chapelle

(1) La CFBCT a 120 ans et représente 20 000 artisans bou-chers.

IV \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

Dossier

Quelles normes pour l’abattage paysan ?

Traçabilité Vers un label éthique pour valoriserune filière viande de qualité

Comme beaucoup le font, c’est-à-dire souvent avec les « moyens dubord », un paysan confédéré a récemment conduit un veau de bou-cherie à l’abattoir d’Hotonnes (Ain) dans un utilitaire type fourgon-nette. Le veau était attaché, il avait ses aises et n’était pas blessé. Maisselon le vétérinaire inspecteur, tatillon s’il en est, les fameuses normesréglementaires n’étaient pas respectées. Résultat de l’attention touteparticulière de notre fonctionnaire : 1 000 euros d’amende. Oui, vousavez bien lu : 1 000 euros !Abasourdi et humilié, notre paysan a cherché de l’aide. La Confédéra-tion paysanne et le Comité d’action juridique du département (CAJ) (1)

se sont donc retrouvés avec lui dans un bureau de l’administration concer-née(2) pour tenter d’expliquer que la réglementation s’appliquait d’abordet surtout aux professionnels du transport, que son veau avait été lar-gement mieux traité que s’il avait traversé la moitié de l’Europe avecdes dizaines de potes dans un camion, serrés comme des harengs, etqu’une amende de 1 000 euros correspondait au salaire mensuel d’unpaysan (et en ce moment, ce n’est même pas toujours vrai). Ainsi, nous

avons démontré qu’il fallait certainement adapter la réglementationaux abattoirs de proximité…Nos interlocuteurs ont seulement admis que l’amende était trop éle-vée et qu’ils allaient la revoir, mais depuis, trois semaines ont passé etnous attendons toujours. Il semblerait par contre qu’une autre réponseait été apportée : les contrôles prendraient de l’ampleur à Hotonnes !On dit merci qui ?Dans l’intervalle, une demande de rendez-vous est partie chez le pré-fet qui, nous l’espérons, saura faire la part des choses et adapter uneréglementation dans un sens plus favorable au développement des cir-cuits courts, tant que l’animal sera respecté bien sûr.

Jean-Claude Bouvier, membre du Comité d’action juridique (CAJ) de l’Ain,

Extrait du Journal Paysans Paysannes de l’Ain N° 139

(1) Association de bénévoles et de permanents qui apporte un appui juridique et humainaux ruraux dans une démarche participative et militante - www.comite-action-juridique.fr(2) La DDPP (direction départementale de la protection des populations).

Dérives administratives Transport des animaux à l’abattoir : un long chemin pour les circuits courts

Christian Le Lann, boucher à Paris et président dela Confédération française des bouchers, bouchers-charcutiers et traiteurs (CFBCT): « Nous sommes pré-occupés par une alimentation à l’herbe, sans OGM,une fin de vie honorable, des animaux qui ne soientpas maltraités. »

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Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / V

Dossier

Pouvez-vous nous présenter la FNEAP ?La Fédération a 42 ans et regroupe des

abattoirs de services et de proximité variantde 300 à 6 000 tonnes traités annuelle-ment. Elle compte 112 abattoirs publics etprivés qui font de la prestation de servicespour des éleveurs, bouchers, grossistes maisaussi des industriels. Ces abattoirs poly-espèces représentent 360 000 tonnesd’abattage, soit 10 à 12 % du tonnage fran-çais. Nous défendons et promouvons larépartition de nos abattoirs sur tout le ter-ritoire.

Qu’est-ce qui freine le développementdes abattoirs de proximité ?

Un abattoir est un outil industriel extrê-mement lourd en termes d’investissements,ce qui rend l’activité d’abattage difficilementrentable. Nous sommes par ailleurs assu-jettis aux mêmes contraintes réglemen-taires que les abattoirs industriels. C’est laraison pour laquelle nous incitons les éta-blissements d’abattage à créer des activi-tés connexes, notamment en découpe ettransformation, à une échelle permettantde faire travailler la vente directe.

Comment améliorer la transparencedans les abattoirs ?

La transparence va bien au-delà des inci-dents industriels isolés que nous avons vécus(en référence aux vidéos de L214 visant desabattoirs membres de la FNEAP, NdlR). Noustravaillons notamment avec les chambresd’agriculture mais aussi avec les ONG défen-dant le bien-être animal. Pour nous, la trans-parence passe par la mise en place d’unemeilleure gouvernance dans les abattoirs.

Nous incitons notamment les éleveurs,les éleveuses et les boucher.e.s à participerà la gestion des outils sur les structures degouvernance. C’est ce que permet, entreautres, la société coopérative d’intérêt col-lectif (Scic), une structure juridique per-mettant d’intégrer collectivement éleveurs,bouchers, salariés, exploitants de l’abattoiret élus dans une même forme juridiquepour travailler sur la transparence. De plusen plus d’abattoirs font le choix de se consti-tuer en Scic, comme à Perpignan parexemple depuis 2014.

L’abattage rituel des animaux faitpartie des sujets dont s’est saisie la

commission parlementaire sur lesabattoirs. Comment vous positionnez-vous en la matière ?

35 % des abattoirs de la FNEAP pratiquentl’abattage sans étourdissement préalable.Il est autorisé depuis des années par laCommunauté européenne et fait l’objetd’une réglementation beaucoup plus dra-conienne que l’abattage classique. Selonun avis de l’Agence nationale de la sécu-rité de l’alimentation (Anses), publié en2010, il n’y a aucun risque supplémen-taire avec ce type d’abattage. Il y a parailleurs sur le plan économique une réelledemande en produits halal et casher. Si onn’a plus la capacité de le faire, des abat-toirs fermeront.

Depuis 42 ans, nous avons mis en placeun organisme de formation qui fait desaudits dans deux abattoirs chaque semaine.Nous réalisons, le cas échéant, des forma-tions sur la protection animale, les bonnespratiques d’hygiène, le management, la pré-vention des risques professionnels. La prio-rité est de respecter la base de la régle-mentation. n

Recueillis par Sophie Chapelle

Statut coopératif « La transparence passe par la mise en place d’une meilleure gouvernance »La FNEAP, Fédération nationale des exploitants d’abattoirs prestataires de service, incite les éleveurs, éleveuses et boucher.e.sà travailler sur les modalités juridiques de fonctionnement des abattoirs pour améliorer la gouvernance et la transparence.Entretien avec André Eloi, directeur de la fédération.

Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / V

Les abattoirs de proximité sont indispensables à la vie des petits élevages.

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Initiatives pour améliorer le processus d’abattage

Un abattoir mobile sillonne les campagnes de Suède

Dossier

VI \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

Au début des années 2000, avec lacrise de la « vache folle » et lesdébats sur la traçabilité de la viande,

la chambre d’agriculture des Vosges observeun accroissement de la vente directe. Ellelance alors des réflexions afin de pérenni-ser ces démarches. Ainsi est créé en 2003un outil à destination des éleveurs et pro-fessionnels de la viande des Vosges: la coopé-rative « Adequat », comme « abattage,découpe, qualité et tradition ». L’exploita-tion démarre en juillet 2005.

Une coop pour rester maîtrede l’outil

L’objectif principal est que « les éle-veurs restent maîtres de l’outil », expliquePhilippe Mauchamp, directeur d’Adequat,un des intervenants invités au colloquesur les produits fermiers organisé par laConfédération paysanne, à Chaumont(Haute-Marne) en mai 2015. Les éleveurs,éleveuses et professionnel.le.s de la viandequi souhaitent bénéficier des services

d’Adequat deviennent ainsi sociétairesde la coop (337 à ce jour) et participentaux orientations données à l’outil. Lacoopérative propose des services cou-vrant le ramassage des animaux, l’abat-tage, la découpe, la transformation et lalivraison.

En 2013, Adequat adhère à la Cuma LaForgeronne pour proposer aux adhé-rent.e.s de la transformation en circuitcourt, marquant clairement son engage-ment pour le développement de ce modede vente. Les bouchers peuvent exercerau sein de la coopérative et ainsi tra-vailler directement avec les éleveurs etles éleveuses.

L’abattoir se porte très bien pour sesonze ans. Initialement prévu pour un ton-nage de 600 tonnes, il atteint les1 100 tonnes en 2015. Des travaux d’ex-tension ont débuté en février et devraientêtre achevés à l’été. Les aménagementsprévus ont pour buts principaux de confor-ter l’abattage du porc fermier, d’amélio-

rer le traitement du cinquième quartier etla gestion des déchets, et de créer un ate-lier de viande hachée. Deux emplois sup-plémentaires seront créés à la livraisondes travaux.

Pour autant, pour les gérants, les abat-toirs sont des outils industriels avec un grosinvestissement et doivent tourner à pleinrégime pour diluer les coûts fixes. D’où unepoussée vers le rendement. « Adéquat abien revivifié les circuits courts dans larégion, commente Romain Balandier, éle-veur dans les Vosges. Mon gaec en est tou-jours sociétaire mais nous n’y faisons plusabattre et découper nos moutons. Larecherche de débit pour répondre à la pres-sion économique fait que la qualité dedécoupe n’était plus assez soignée, etcomme l’abattoir est à 80 kilomètres dechez nous, nous allons un peu moins loin,à Chaumont, sur un abattoir plus “fami-lial” qui assure une découpe de meilleurequalité. » n

BD

En Suède, une unité d’abattage à laferme veut réduire le stress du gros

bétail. La démarche veut aussi rassurerl’éleveur ou l’éleveuse qui peut ainsi

accompagner jusqu’au bout les bêtesélevées avec soin.

Depuis plus de deux ans, l’entre-prise Häsingestintan propose auxéleveuses et aux éleveurs suédois

le premier abattoir mobile d’Europe pourgros bétail. L’outil consiste en trois modules,sortes de mobile-homes transportés parautant de camions jusque dans la cour del’élevage. Quatre personnes sont néces-saires pour faire fonctionner cette unité quidispose de son propre système d’approvi-sionnement en eau et en électricité.

À la ferme, deux simples barrières sontmises en place entre le pré ou l’étable etl’unité d’abattage. L’éleveur accompagneainsi ses bêtes jusqu’au bout. Il faut envi-ron vingt minutes par animal entre l’étour-dissement, la saignée et la découpe de laviande. 5 000 animaux, principalement desbovins, ont jusqu’ici été abattus chaque

année, ce qui ne représente qu’un pour centde la production totale de viande en Suède.

La démarche est donc expérimentalemais semble satisfaire tout le monde etne demande qu’à se développer. C’est dumoins ce dont témoignent les journa-

listes européens invités en avril 2016 àassister au déploiement et au travail deces unités mobiles dans les fermes deSuède. n

Reportage diffusé sur France Info :

www.franceinfo.fr/player/resource/785333-1719237

Au service des circuits courtsÀ Rambervillers (Vosges), l’abattoir coopératif Adéquat offre un outil qui s’oriente de plus en plus vers les circuits courts.

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Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / VII

Suite à la fermeture des abattoirs prèsde chez lui, un éleveur adhérentde la Confédération paysanne d’Alsacea fait le choix d’abattre ses animauxen Allemagne. Il témoignedes différences de pratiques.

Frantz Baumann est éleveur de vachesvosgiennes laitières, producteur defromages ; il élève également quelques

cochons. Installé à 900 mètres d’altitude àLinthal (Haut-Rhin), il a pris la décision de« gérer tous les animaux naissant sur la fermejusqu’au bout ». La fermeture du dernierabattoir départemental l’a amené à se tour-ner vers des abattoirs près de Belfort ou deMontbéliard, avant que ceux-ci ne fermentà leur tour. Frantz décide alors d’abattre enAllemagne. « Un collègue allemand nous adonné l’adresse d’un abattoir familial où tra-vaillent le père, le fils et un jeune apprenti.Ils font l’abattage deux fois par semaine : lelundi, c’est les cochons, et le vendredi, lesbovins. Le reste de la semaine, ils transfor-ment et découpent. C’est terriblement simpleet logique. »

Frantz apprécie la qualité du travail (abat-tage, découpe et transformation) proposépar ce petit établissement – une vingtainede porcs abattus par semaine et une dizainede bovins – qui bénéficie de l’agrémenteuropéen. Outre la simplicité du processus,

il souligne la professionnalisation du per-sonnel. « Il y a vraiment une responsabilisa-tion car ce sont les patrons qui font le bou-lot, estime-t-il. Après la fermeture successivedes petits abattoirs en Alsace, nous avionsmilité à la Conf ’ pour développer trois abat-toirs de 400 tonnes répartis sur le territoire.Mais nous avons été éjectés des négocia-

tions, et c’est la Fnsea qui a été l’interlocu-teur pour monter un projet de 1 200 tonnesfinancé par le conseil régional. Quand tuemmènes les bêtes là-bas, il y a du bruit, dustress. Il faut beaucoup de monde et quandy a des coups de bourre, c’est là que çadérape. »

Bilingue, Frantz a noué des liens de sym-pathie avec les responsables de l’abattoirallemand. « Peu à peu, on a réussi à mettreau point une approche de l’abattage contreles prescriptions normales, souligne-t-il.Par exemple, quand j’amène une vache,elle ne passe pas par le couloir. Dans un rap-port de confiance, le patron de l’abattoiraccepte que ce soit moi qui tienne l’animalau licol au moment où il est abattu. Il y aun peu d’humanité qui apparaît dans l’abat-tage par ce biais-là et les bêtes demeurentplutôt tranquilles. Il y a une ambianceconsensuelle entre le désir des respon-sables de l’abattoir d’être efficaces et notredésir d’accompagner les animaux jusqu’aubout. »

Cette démarche se heurte à quelquescontraintes. Outre la distance – 1h15 deroute –, plusieurs formalités administrativesdoivent être respectées. Une déclarationd’abattage est faite en début de semaine.La veille du départ à l’abattoir, une visite ante-mortem est réalisée par le vétérinaire quiatteste que l’animal est en bonne santé. Undocument est envoyé par courriel à la direc-tion des services vétérinaires (DSV) qui ren-voie à Frantz le certificat de transport. Arrivéen Allemagne, l’éleveur transmet ces docu-ments au vétérinaire local qui fait à son tourune visite ante-mortem, avant d’envoyer lacarte verte à la DSV.

« Une délégation d’éleveurs de Saône-et-Loire est venue en Alsace et nous enavons profité pour visiter des abattoirs enAllemagne, dont celui avec lequel on tra-vaille, relève Frantz. On a aussi visité desabattoirs de village où les gens viennent àpieds avec leurs animaux. Il n’y a pas depersonnel salarié, mais un ouvrier commu-nal formé pour faire une partie du travail,et les paysans font l’abattage eux-mêmes.Les abattoirs, c’est un sujet prioritaire dansnotre nouvelle région “Grand Est” pourrésoudre la difficulté qu’ont beaucoup d’éle-veurs et d’éleveuses à abattre correctementleurs animaux. » n

Sophie Chapelle

Dossier

En Allemagne, un abattoir permet d’accompagnerl’animal jusqu’au bout

L’achat en vif par des bouchers-abatteursUne étude, menée en 2013 par l’Association pour le développement agricole et rural du Boi-schaut-Sud (Adar-Civam, Indre) indique que la majorité des artisans-bouchers du Pays de laChâtre s’approvisionne directement auprès des éleveurs et des éleveuses (9 artisans sur unetotalité de 16) : c’est ce qu’on appelle l’activité de « boucher-abatteur ». Ces partenariats depersonne à personne (chaque artisan travaille avec son groupe d’éleveurs), sont traditionnels(transmis de génération en génération pour une majorité) et de longue date (les artisans tra-vaillent avec les mêmes élevages depuis des années). De nombreux éléments de contexteont favorisé ce type de partenariat : la présence d’un abattoir local, un territoire d’élevagebovin allaitant, la proximité entre artisans et éleveurs, etc. Contrairement à d’autres régions,ces partenariats ne s’organisent pas en collectifs d’éleveurs ou de bouchers autour d’un pro-duit spécifique ou dans le cadre d’une filière locale.Le plus grand danger guettant ce modèle concerne le renouvellement des bouchers, aussibien du point de vue de la transmission de l’entreprise que du savoir-faire. Le centre d’ap-prentissage peine de plus en plus à remplir ses formations. En remarquant combien les pra-tiques de connaissance des animaux en vif tombaient peu à peu en désuétude, le Civam estintervenu dans des formations pour remettre du lien « élevage-apprentissage » en organi-sant une visite de ferme pour les apprentis. Pour le Civam, il ne fait pas de doute que cettepratique, pour peu qu’elle soit défendue dans une optique de qualité et de communication,pourrait valoriser les métiers d’éleveur et de boucher.

Jean-Claude Moreau

Éleveur en Alsace, Frantz Baumann accompagne sesbêtes en Allemagne, dans un petit abattoir fami-lial : « Le patron accepte que ce soit moi qui tiennel’animal au licol au moment où il est abattu ».

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VIII \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

Dossier

Supprimer l’élevage pour sauverla planète, arrêter de faire du mal

aux animaux : telle est la vue simplistede celles et ceux qui filment

les abattoirs pour arriver à leurs fins.Le monde paysan doit s’aventurer surle terrain philosophique pour contrer

ces vues erronées.

Sans la mort, la vie n’est pas possible,et si nous sommes vivants, c’est parceque d’autres sont morts avant nous.

Et nous devons mourir pour que d’autresaprès nous puissent vivre ! Si les animauxou les humains ne mourraient jamais, laterre serait vite trop petite. Les plantes senourrissent d’animaux et de végétaux endécomposition, donc morts, et les animauxvivent parce qu’il mangent des plantes oud’autres animaux, en les tuant. Telle est lagrande roue de la vie.

On ne peut donc vivre sans tuer. On nepeut pas vivre en laissant mouches,cafards, moustiques et autres rats enva-hir nos habitations. On ne peut pas vivreen laissant poux et autres morpions enva-hir nos corps. On ne peut pas cultiver dusoja, par exemple, sans écrabouiller desmilliers de vers de terre. On ne peut mois-sonner du blé sans aplatir des centainesde sauterelles. L’association L214 devraitfilmer l’intérieur d’une moissonneuse :beaucoup s’arrêteraient de manger dupain !

Le monde paysan doit être présent pourrappeler les réalités du monde vivant qu’ilcôtoie sans relâche : sans la mort, la vien’est pas possible !

Dans notre société, beaucoup de per-sonnes n’acceptent plus la mort. Végétaliens,végans et autres transhumanistes en sontl’illustration. Ils peuvent nous fabriquer unmonde bien triste.

Un monde sans animaux.Un monde sans animaux d’élevage.Un monde sans animaux de compagnie

aussi ?Un monde sans chiens, ni chats, ni che-

vaux ?Mais n’y a-t-il pas une imposture à

accepter que l’on tue pour nourrir nosbêtes chéries et refuser que l’homme tuepour se nourrir ? Une contradiction àacheter des croquettes issues de l’éle-vage industriel où les animaux souffrent ?

L’agriculture paysanne élève des animauxdans le respect et la dignité de ceux-ci, enleur laissant le maximum de liberté, à l’op-posé de l’élevage industriel concentration-naire. Élever des animaux nous élève, enapprenant à s’oublier (très bon pour l’ego).Nous vivons dans le respect et l’empathiepour ces animaux avec qui nous partageonsnotre vie. Quand ils souffrent, on souffre.Quand ils sont bien, on est bien. Le fait desavoir qu’un jour ils nourriront nos sem-blables ne nous empêche pas de chercherleur bien-être. Et l’éleveur ou l’éleveuse netue pas par plaisir, mais pour servir la vieavec ses produits carnés. Et le paysan ou lapaysanne sait que pour faire du lait, on doitéliminer les animaux mâles, et que pourproduire des œufs l’on doit éliminer lespoussins mâles.

Un autre argument des anti-élevage estla consommation des terres agricoles. L’agri-culture paysanne valorise plus que touteautre les espaces pentus impropres à la cul-ture. Et les protège efficacement contre lesincendies, ce qui peut arriver de pire à unespace naturel. Et pour entretenir cesespaces, je préfère le doux tintement dessonnailles de mes brebis au hurlement destondeuses et autres débroussailleuses !

Beaucoup d’hommes et de femmes sontfaits pour vivre au contact des animaux.L’enfant est spontanément attiré par ceux-ci. Des personnes en difficultés sociales trou-vent la paix à leur contact. La nécessité del’élevage va donc plus loin que sa fonctionnutritionnelle. Bref, en conclusion, on pour-rait dire que ça serait bête de s’en passer n!

Vincent Delmas, paysan dans la Drôme

Troupeau dans la Drôme. Pour Vincent Delmas, paysan dans le département : « La nécessité de l’élevageva plus loin que sa fonction nutritionnelle ».

Livre blanc pour une mort digne des animauxCe livre repose sur les résultats d’une enquête collective menée en 2013 auprès de 66 éle-veurs et éleveuses dans toute la France, dialogue et paroles sur l’abattage des animaux et lesabattoirs.« La mort des animaux d’élevage est un événement qui nous concerne tous », rappellent les quatreauteurs, dont Jocelyne Porcher, sociologue et directrice de recherche à l’Inra (cf. p. IX). « Elleengage les conditions de possibilités de notre vie en commun avec les animaux et sa pérennité. »Comme ce dossier de Campagnes solidaires, le livre qui explore les alternatives à l’abattageindustriel tente d’allumer la lumière dans le tunnel des abattoirs où la vie de leurs animaux,à sa toute fin, échappe aux éleveuses et aux éleveurs. En témoigne l’un d’eux : « On veut pou-voir mettre les pieds partout où nos animaux mettent les pieds, on les suit dans la montagne,dans la bergerie et on veut les suivre jusqu’au moment où ils passent de l’autre côté (…) Saufqu’à un moment donné, clac, et là, no man’s land… »Livre blanc pour une mort digne des animaux – J. Porcher, E. Lécrivain, N. Savalois, S. Mouret– Les Editions du Palais – 110 pages – 14,50 euros.Commande possible à : [email protected] – 01 43 62 04 04

Points de vue

On a beaucoup à apprendre du corps en saignant

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L’abattage des animaux est un acte quine va pas de soi, ni pour les éle-veurs et les éleveuses, ni pour nos

concitoyen.ne.s, consommateurs de pro-duits animaux ou non. Il ne va pas de soimais il est pourtant consubstantiel à l’éle-vage et plus largement à nos relationsdomestiques avec les animaux, même sidans certains cas, le terme « abattage » estpudiquement remplacé par celui d’« eutha-nasie ». L’abattage des animaux ne va pasde soi parce qu’il s’agit de donner la mort.De donner la mort aujourd’hui dans dessociétés où elle est devenue invisible, radi-calement indésirable, et où l’animal estconsidéré et défendu comme un prochain.Abattre les animaux devient alors un crimeet l’alimentation carnée une pratiqueanthropophage.

Pour les éleveurs et les éleveuses, donnerla mort à leurs animaux est difficile. Diffi-cile mais indispensable à la survie écono-mique de l’élevage. Difficile mais néan-moins porteur de sens. Pour la majorité, le« comment » de l’abattage est donc plusproblématique que le « pourquoi ». Le pro-cessus d’industrialisation des productionsanimales a entraîné une concentrationcroissante des abattoirs et la disparition denombre de structures locales. Les éleveuseset les éleveurs sont alors dépendants d’abat-toirs très éloignés et dont le fonctionne-ment est contraire à leurs besoins mais, bienplus gravement, contraires à leurs exigencesmorales (1).

Légaliser l’abattage à la ferme

C’est ce déficit de sens moral dans lesabattoirs qui conduit certains éleveurs etcertaines éleveuses en vente directe ouen circuits courts à recourir à l’abattageà la ferme, en dehors de tout cadre légal,et à se mettre de facto dans l’illégalité.Le collectif « Quand l’abattoir vient à laferme » (2) travaille à rendre légales ces pra-tiques car il est indispensable de déve-lopper des alternatives à l’abattoir telqu’il fonctionne actuellement, petit ougrand, afin de permettre aux éleveurs etaux éleveuses d’être à la hauteur de leursanimaux et de leur métier. Celles et ceuxqui abattent illégalement à la ferme ris-

quent une forte amende, voire de la pri-son. Ce risque est assumé car il renvoieà une exigence d’excellence dans le tra-vail, de l’élevage à l’abattage.

Dans une structure mobile ou dans unlocal dédié à la ferme ou à proximité,peut-on penser que l’abattage des ani-maux ou qu’un abattoir puisse être« idéal » ? Je répondrais oui, il peut exis-ter un abattage des animaux idéal. Quivise précisément à l’excellence. Au mieuxdu mieux du possible.

Rappelons que les rapports d’un éleveurà la mort de ses animaux au moment del’abattage renvoient à deux temporalités.La première est celle de l’abattage pro-prement dit, durant laquelle l’éleveur oul’éleveuse mobilise les ressources affec-tives et morales qui légitiment le fait detuer l’animal. C’est le moment de l’élabo-ration éventuelle de rituels que chacun.e

peut inventer à sa façon (récitation depoème à haute voix, adresse intérieure ouadresse directe à l’animal…). La secondetemporalité commence lorsque l’éleveurou l’éleveuse reconnaît que l’animal estmort. Commence alors le travail sur la car-casse, qui n’est plus l’animal mais ce quireste de lui sans lui. Ce travail, qu’il soit faitpar l’éleveur (volailles par exemple) ou parun autre professionnel, est source de pro-fondes satisfactions car il démontre lescompétences à produire une nourriture dequalité à la hauteur de l’animal et de ceuxqui vont la consommer et vont vivre grâceà cet animal.

Un idéal à construirecollectivement

Promouvoir l’excellence dans l’abattagerenvoie à une véritable cohérence entrel’élevage des animaux et les pratiquesd’abattage. Cohérence entre le systèmed’élevage et l’abattage du point de vue dutravail, cohérence de responsabilités enversles animaux. Ainsi que l’a dit une éleveuse :« J’étais là pour leur naissance, je serai làpour leur mort aussi ». Cohérence de res-ponsabilités également envers les consom-mateurs et les consommatrices. L’éleveurou l’éleveuse veut être sûr que les produitsqu’il ou elle vend sont bien issus de sesanimaux.

L’abattage excellent laisserait à chacun.eses responsabilités et l’exercice de sescompétences. À la ferme ou dans un petitabattoir, l’éleveur ou l’éleveuse serait là,près des animaux, pour garantir qu’ils sontabattus dans le respect de leur dignité etde la sienne propre, sans souffrance. C’estla première condition de toute la chaîned’excellence dans la production de laviande. Éleveurs, tueurs, bouchers sont liéspar un engagement envers les animaux etenvers les humains. C’est la reconnais-sance et la mise en actes de cet engage-ment qui, contre tout ce qui l’empêche,constitue aujourd’hui un idéal à construirecollectivement. n

Jocelyne Porcher

(1) Livre blanc pour une mort digne des animaux. Éditionsdu Palais, 2014 (voir l’encadré p. VIII).(2) www.facebook.com/Quand-labattoir-vient-a-la-ferme-1684101585156112

Abattre les animaux de ferme : l’exigenced’un excellent travailL’abattage mobile ou dans un local dédié à la ferme peut-il être « idéal » ? Le point de vue de Jocelyne Porcher, sociologue etdirectrice de recherche à l’Institut national de recherche agronomique (Inra) (1).

Dossier

Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / IX

Après avoir été éleveuse, ouvrière dans l’industrieporcine, technicienne agricole et ingénieure agro-nome, Jocelyne Porcher est directrice de rechercheà l’Institut national de recherche agronomique(Inra) à Montpellier. Ses recherches portent sur larelation de travail entre humains et animaux.

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Les actrices et acteurs des filièresélevage et viande doivent être associésafin de construire ensembleune politique et des modes d’abattagerépondant à l’élevage paysanet aux attentes de la société.

Depuis plusieurs semaines, la ques-tion de la consommation de viandeest abordée au travers de doubles

pages dans les journaux nationaux. Philo-sophes, sociologues, consultant.e.s et autresexpert.e.s se succèdent pour exprimer defaçon radicale un rejet de l’élevage dans saglobalité. À ces témoignages sont acco-lées des photos de plus en plus violentesqui ancrent ces prises de positions dansles registres du sensationnel et de l’émo-tionnel.

Ces démarches de communication élu-dent l’ensemble des acteurs et des actricesparticipant à la vie des filières élevage etviande. Ce dossier de Campagnes soli-daires leur redonne la parole. Toutes et tousévoquent des marges de progrès pour lemaillon abattage de ces filières mais par-lent aussi des difficultés rencontrées dansl’exercice de leur métier. La formation desopérateurs et opératrices, le développe-

ment du lien entre les différents acteurset actrices des filières, l’accompagnementde leurs animaux par les éleveurs et les éle-veuses qui le souhaitent, la relocalisationd’outils d’abattage, l’abattage à la ferme,ou encore la diminution des cadences,sont autant de leviers pour sortir l’acte demise à mort d’un animal destiné à l’ali-mentation du processus d’industrialisa-tion dans lequel il est entré depuis denombreuses années. Il ne s’agit pas deleviers utopiques, mais bien de réalitésconcrètes qui existent ou ont existé enFrance ou en Europe.

Un débat a été ouvert dans la sociététoute entière, mais les arguments les plusentendus ne sont pas nécessairement lesplus justes. Il est important de poursuivrece débat et de l’enrichir des visions pay-sannes, du point de vue des vétérinaires,de celui des ouvriers d’abattoir et desprofessionnels de la boucherie. Un travailsur trois ans est projeté en ce sens surl’abattage de proximité (cf. encadré).

Notre syndicat pressentait depuis quelquesannées déjà l’importance croissante de cer-taines franges de la société crispées et cri-tiques envers les traitements en élevagecomme en abattoir, sur les consommations

de viandes ou de produits animaux. On saitbien que les excès de l’élevage industriel,intensif et concentré, ont largement contri-bué à ternir l’image de l’ensemble des filièresanimales de nos pays, comme ils contribuentà la disparition des paysans et des pay-sannes. Il s’agit donc de repenser l’agricul-ture, de la façon la plus large possible, pourchanger enfin de cap, pour un élevage pay-san qui respecte ses travailleuses et ses tra-vailleurs, les animaux, les territoires, l’envi-ronnement, et les attentes de la société. n

Mikel Hiribarren,

secrétaire national de la Confédération paysanne,

et Martin Métayer,

animateur national de la Fadear

Étudier les conditions d’un abattage socialement,économiquement et écologiquement acceptable

X \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

Dossier

Des député.e.s auditionnentLa création d’une commission d’enquête parlementaire « sur les conditions d’abattage desanimaux de boucherie dans les abattoirs français », a été officialisée le 22 mars à l’Assem-blée nationale. Cette création fait suite à la diffusion des vidéos tournées clandestinementdans les abattoirs d’Alès et du Vigan (Gard). Voici les thèmes que la Confédération paysannea choisi de défendre en priorité lors de son audition, attendue dans les semaines qui vien-nent :• Nécessité de maintenir un maillage d’abattoirs de proximité multi-espèces : la rentabilitééconomique des agents de l’État ne doit pas être le seul critère pour penser la répartitiondes abattoirs. Les petits élevages nécessitent un abattoir de proximité afin que le coût dudéplacement reste économiquement tenable : la rentabilité économique doit être pensée àl’échelle du territoire et des filières.• Les contrôles ante-mortem par les agents de l’État doivent être rétablis dans tous les abat-toirs.• Les agents d’abattoirs doivent être formés au bien être animal.• Les éleveuses et les éleveurs qui le souhaitent doivent pouvoir accompagner leur bête jus-qu’à la mise à mort. Le caractère hostile d’un lieu inconnu pour l’animal génère un stress quipeut-être réduit par la présence de l’éleveur ou de l’éleveuse à ses côtés.• Les aménagements doivent être adaptés à des animaux non standardisés, et pensés pourleur bien-être. Les cadences mises en place doivent également être adaptées aux aménage-ments et aux animaux.• La vidéosurveillance n’est pas une solution acceptable, elle ne s’attaque pas aux causes struc-turelles des dérives qui peuvent arriver.• Il est important de défendre des filières de viande éthique pour notre souveraineté alimentaire,pour le dynamisme de nos territoires, pour lutter contre l’industrialisation de notre alimen-tation et ses conséquences pour le bien-être animal.

Un projet pour traiterle sujet en profondeurDepuis trois ans, plusieurs Adear (1) et dessyndicats départementaux de la Confé-dération paysanne se sont mobilisés surl’abattage de proximité. Un projet derecherche-action a été déposé en avril 2016par la Fadear dans le cadre de l’appel à pro-jet Casdar Innovation et Partenariat (2) pro-posé par le ministère de l’Agriculture. Ceprojet s’est construit avec une quinzainede partenaires (3) et a pour question cen-trale : « Quelles sont les conditions pourque l’abattage des animaux d’élevage soitsocialement, économiquement et écologi-quement acceptable ? ».Il faudra certainement attendre l’été poursavoir si le dossier est accepté et si lesmoyens sont accordés pour traiter le sujeten profondeur. Si c’est le cas, les actriceset acteurs du projet chercheront lesmoyens d’œuvrer au maintien et à la relo-calisation des outils d’abattage sur leurterritoire.

(1) Associations pour le développement de l'emploiagricole et rural, fédérées nationalement au sein de laFadear.Elle rassemblent des paysannes et des paysans,pour majorité membres de la Confédération paysanne.(2) Casdar : Compte d’affectation spécial « Dévelop-pement agricole et rural ». Le Casdar est alimenté parla taxe Adar payée par toutes les exploitations agri-coles.(3) Dont la Coobof (Fédération nationale des groupe-ments d’achat et coopératives de la boucherie-char-cuterie française), la Fédération nationale des abat-toirs prestataires de service - FNEAP, la FRCivam deBretagne, l’INRA, l’ESA d’Angers, la chambre régionaled’agriculture de PACA, l’École nationale vétérinaire,agroalimentaire et de l’alimentation de Nantes-Oni-ris…

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Culture

Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / 13

Un livre étonnant : « du témoignage livré et de l’instantsaisi », des photos saisissantes. Il décrypte la marche forcéedu « progrès » imposé au détriment d’autres valeurs : le lienpuissant à l’animal, l’autonomie des métiers, le savoir-faire…

Être veto de campagne et prendre du temps pour parler deson métier n’est pas banal. Francesco Formisano exercedepuis près de 30 ans dans le Bourbonnais et raconte son

travail par la photo et quelques commentaires : « C’est pas un métier,c’est une vie, mais une vie imbriquée dans le métier, comme le yin etle yang » (1). Un livre plein d’images, quelquefois floutées, des

moments difficiles comme la césarienne, l’expulsion de matrice,le veau trop gros qu’il a fallu découper. « J’ai peur si l’éleveur negagne pas sa vie, je ne sais pas dans combien d’années il ne pourraplus… » Et d’enchérir : « La naissance d’un veau, c’est la brique quiconstruit le revenu, et quand j’échoue, ce boulot devient trop épuisantet mange ma vie privée. Les éleveurs, quand ils nous appellent la nuit,la première chose à penser est qu’il faut y aller. » « Des fois, on arrivedans des endroits où la lumière, c’est un portable. » « Toutes mes déci-sions ont ce pouvoir de sauver ou de mettre en danger l’animal. » EnItalie, raconte Francesco, son grand-père l’emmenait au marchéaux bestiaux, et l’enfant aimait cette typologie de travail entrel’homme et l’animal. « C’est magique, ce pouvoir de soigner, maisquelquefois mon travail se conclut par la rédaction d’un certificat d’abat-tage d’urgence. »

Un livre d’une grande humilité, qui aide à modifier le regard del’éleveur et de l’éleveuse sur celui ou celle qui est bien autre chosequ’une charge dans les coûts de production. n

Christian Boisgontier

(1) Dans la philosophie chinoise, le yin et le yang sont deux catégories complémentaires,que l’on peut retrouver dans tous les aspects de la vie et de l’univers. Cette notion de com-plémentarité est propre à la pensée orientale qui pense plus volontiers la dualité sous formede complémentarité.

Le Yin et le Yang – Photos : Philippe Busser, rédaction : CatherineThoyer, éclairage : Jocelyne Porcher, directrice de recherche Inra– Éditions du Miroir – 2016 – 36 euros.www.editions-du-miroir.com

À 46 ans, Stéphane Geffroy est salariédepuis 25 ans dans un abattoir,près de Rennes. Il raconte son travailet sa vie dans un petit livre prenantqui vient de paraître dans la collection« Raconter la vie », aux éditions Seuil.

« J’ai l’impression qu’on nous prendpour des parias, de gros ouvriers unpeu primaires, qui feraient quelque

chose de sale, de tabou. En tout cas, on préfé-rerait ne pas trop entendre parler denous. » (…) « Dès mon premier jour de bou-lot, j’ai compris que je rentrai dans un universde durs à cuire, pas du genre à se plaindre. Unmilieu de taiseux aussi. Il faut dire qu’avec cebruit infernal, on ne peut pas se parler nor-malement ? Du coup, on bosse la plupart dutemps en silence. Dans la tuerie, l’ouvrier estla seule machine qui ne fait pas de bruit ! »

Plutôt que des thèses et de longs discours,le témoignage d’un ouvrier en abattoir. Etbien au-delà de son quotidien, ses constatset réflexions sur un monde ouvrier ato-misé par les CDD remplaçant les CDI, l’es-prit de corps (de classe) qui se perd, laperception de l’autre qui se modifie, lessalaires qui stagnent (1500 euros net en fin

de carrière). Diviser, régner : on sait quigagne et qui perd à ce jeu-là. Personne n’yéchappe, même pas lui : « C’est vrai qu’il ya encore parfois des abus. J’ai été étonné d’unreportage à la télé sur un abattoir à Alès :c’était du travail d’amateur, ils bricolaient, ilsabattaient différentes sortes de bêtes les unesaprès les autres, avec des moutons parfois àterre et des bœufs qui continuaient un momentà s’agiter parce qu’ils n’avaient pas été cor-rectement abattus. De telles choses arriventpeut-être encore dans de petits abattoirslocaux. »…

Mais dans ce contexte déclinant, StéphaneGeffroy témoigne aussi de l’arrivée du syn-dicalisme dans son entreprise – « ça n’a pasété sans mal, il a fallu l’intervention de l’Ins-pection du travail et des menaces de procès » –,de son apport sur les conditions de travail,sur les relations avec les patrons, sur sa vieaussi de délégué syndical « qui le fait tenirdebout ». Mais ne l’empêchera pas d’« êtrevieux à 50 ans. » n

BD

À l’abattoir, Stéphane Geffroy Collection « Raconter la vie » Seuil éditions – 84 pages – 7,90 euros http://raconterlavie.fr/collection

Stéphane Geffroy. « À 46 ans, j’ai déjà eu deux her-nies inguinales qui ont été opérées, une à chaqueaine. J’ai aussi été opéré à la main gauche du canalcarpien, et tout récemment de l’épaule, une grosseaffaire entraînant six mois d’arrêt. Et je ne comptepas les multiples lombalgies, les varices, l’arthrosedans les mains, et plusieurs fois des points de suturepour une corne rentrée dans la cuisse ou un couteauplanté dans le bras, sans même mentionner l’abla-tion des amygdales à cause de l’alternance du chaudet du froid. »

Francesco, vétérinaire rural

Stéphane, ouvrier en abattoir

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Initiative

14 \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

La Marmite est un réseau d’échangeset de ressources en milieu rural. Plus

précisément dans le Sud du Morbihan,sur les communautés de communes

de Vannes et de Questembert. Sa raisond’être est l’accompagnement

de porteuses et porteurs de projets.Bilan provisoire : 50 emplois créés,

aux deux tiers paysans.

La dynamique s’est montée à partir d’ungroupe de militants du Mouvementrural de jeunesse chrétienne (MRJC),

encore bien vivant par ici, et de jeunesvenant dans ce coin de Bretagne avec desenvies de s’y installer, le plus souvent entant que paysannes ou paysans sur de petitesfermes… En 2003 commence à vraimentse percevoir la demande d’accueil, d’ac-compagnement et d’entraide. De premièresactions se montent, des « cafés installa-tion » s’organisent. En 2008, l’associationest officiellement créée et pose son siège auxcôtés de la Confédération paysanne dansles beaux locaux écorénovés du hameau deBohebec, sur la commune de La-Vraie-Croix.

« La Marmite, c’est un syndicat de porteursde projets ! », résume Julien Brothier, un deses adhérents et ancien coprésident, aujour-d’hui porte-parole de la Confédération pay-sanne du Morbihan (1). On y vient avec sesidées plus ou moins claires, des projetsplus ou moins bien ficelés, souvent desenvies de reconversion professionnelle…Les trois animatrices salariées (2) reçoivent,écoutent, orientent : « On part de là où ensont celles et ceux qui nous sollicitent, préciseLili. Dès qu’on peut, on leur propose de ren-contrer des actrices et acteurs du territoiredéjà en place sur le type d’activité projetée, ouen situation similaire. On s’appuie sur le réseaude nos 140 adhérent.e.s et de 700 contacts ! »Tout le monde doit trouver chaussure àson pied, l’accompagnement s’adapte, destutorats se mettent en place.

Formations et discussionsLa formation « De l’idée au projet » (3) est

une étape capitale dans la démarche pourse donner toutes les chances d’aboutir. Endouze jours, répartis sur treize semaines etdeux stages, elle permet d’aborder toutesles questions à se poser, des motivations àcreuser jusqu’à la construction des pers-pectives en passant par la nécessité de bienconnaître le territoire où l’on souhaite s’ins-taller ou les statuts possibles pour l’activité

envisagée. Deux sessions sont proposéeschaque année, au printemps et à l’automne.Entre-temps, d’autres formations courtes etdiverses sont construites selon les besoinscollectifs du moment (compta, élagage,phytoépuration, soudure, autoconstruc-tion d’éoliennes…) et chaque mois, un« café installation » propose de discuter d’unthème particulier. Le 31 mars, c’était« Lumières sur les finances solidaires ».

En 2015, 85 porteuses et porteurs de pro-jets ont tapé sur le couvercle de la Marmite.Et l’activité continue à augmenter : durantle seul premier trimestre de 2016, déjà unetrentaine de personnes ont pris contactavec l’association qui depuis qu’elle existea été partie prenante dans la création fina-lisée d’une cinquantaine d’emplois. Lesdeux tiers de ces emplois sont agricoles.

Cécile Daguin-Linares et Christian Linaressont là depuis les débuts de la Marmite.Originaire d’Ille-et-Vilaine, ils se sont installésdès 2003 en pain et brebis allaitante. « Nousétions les premiers paysans-boulangers à nousinstaller dans le coin ; actuellement, nous sommescinq », commente Christian. « Et tout lemonde trouve sa place et sa clientèle », préciseJulien Brothier. Aujourd’hui, Cécile et Chris-tian cherchent un.e troisième associé.e pourleur gaec, cependant que dans la dynamiquecollective se multiplient dans le pays lesmagasins de producteurs : cinq à ce jour !

Parmi les derniers emplois créés, ceuxd’Amélie, productrice de jeunes arbresfruitiers greffés à Saint-Laurent-sur-Oust,ou Valérie, vannière qui cultive son osierà Saint-Gravé. Ritchie, lui, s’est installéà Monterblanc le 1er avril 2014 commepaysan-glacier-cidrier en redonnant vieà un verger abandonné depuis desannées.

L’association est tellement dynamique queles élu.e.s locaux ont du mal à suivre : « Onn’est pas assez soutenus par les collectivitéslocales », peste Julien Brothier. Avec70 000 euros de financement annuel, laMarmite fait beaucoup avec peu. Elle peutsurtout compter sur son vivace réseau etsur l’énergie de ses… 16 co-présidentes etco-présidents ! « On tourne, on partage, onne se pose pas la question de la parité quis’établit naturellement, on a à cœur de fairevivre le pays, et c’est pourquoi, pour nous,nous sommes toutes et tous paysannes et pay-sans ! », conclut Julien. n

Benoît Ducasse

(1) Cf. CS n° 316.(2) Pour l’équivalent de deux emplois à temps plein.(2) La formation est un outil du réseau des Centres d’initia-tives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural (Civam)dont est membre la Marmite.

La Marmite – Bobehec 56250 La Vraie-Croix – 02 97 67 28 06www.association-la-marmite.fr

Rencontre de porteuses et porteurs de projets en maraîchage sur la ferme d’Ozon, à Séné, où deux couplesde paysan.ne.s et un salarié cultivent sur quatre hectares 60 variétés en plein champ et sous abris. Les légumessont vendus en direct localement, tout comme les œufs, les aromatiques et les conserves de légumes «maison ».

Morbihan La Marmite, c’est de la dynamique !

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Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / 15

Agriculture paysanne

Vendée Un parcours à l'installation mouvementépour un projet atypique

Après un parcours à l’installation pleinde rebondissements, Sarah Rezzoug s’est

installée en mars 2014 à Saint-Mesmin(Vendée) en poulets de chair. Avec peu

d’investissements, une fabriqued’aliments à la ferme et un mi-tempssalarié, Sarah limite les charges pour

développer son activité.

Après des études littéraires et despetits boulots, Sarah a envie dechanger de voie. Non issue du

milieu agricole, elle est tentée par l’élevageet le métier de paysanne ; l’idée d’une petiteferme avec plusieurs productions lui trottedans la tête.

En 2005, elle s’inscrit au BPREA (1) « Ele-vage et cultures fourragères, spécialité ovinet volailles », en apprentissage. Elle passedeux ans chez Marc Pousin, paysan bioconfédéré en polyculture élevage avec unsystème économe et autonome. « C’était lechoc des cultures! Dans ma classe, j’étais la seulefemme, je n’étais pas fille de paysan, et en plusj’avais un projet en bio. J’ai découvert à la foisle monde agricole et ses contradictions, puis viaMarc les réseaux bio, Civam (2) et Conf’. »

Après le diplôme, l’opportunité dereprendre une ferme ovine se présente. Elley est embauchée d’abord par le service deremplacement puis via un contrat desix mois. Mais la ferme est mal équipée etles problèmes sur le troupeau, composédu rachat de trois élevages, se multiplient :Sarah abandonne le projet de reprise, unpeu dégoûtée des moutons !

La jeune femme intègre alors un groupede porteurs de projet en maraîchage. Enparallèle, elle multiplie les expériences auservice de remplacement : porc plein air,gibier, volailles… « Travailler au service deremplacement m’a permis de mieux savoir ceque je ne voulais pas faire et d’affiner mon pro-jet personnel. »

Un nouveau projet d’installation, en maraî-chage et poules pondeuses cette fois, émergeavec deux autres personnes. Mais il échouepour des problèmes de foncier. « Dépitée,je suis partie au Japon faire du wwoofing (3), his-toire de recharger les batteries ! »

Au retour, des petits boulots dans l’agri-culture puis un emploi de magasinière enusine lui permettent de remettre un peud’argent de côté… Le projet d’installationn’est pas abandonné ! Une ferme de Saint-

Mesmin lui met à disposition 1 000 m²pour qu’elle puisse lancer un petit élevagede poules pondeuses. 90 poules, nourriesavec des céréales bio achetées localement,lui permettent de commencer à se fami-liariser avec les réseaux de commercialisa-tion : amap, dépôt-vente et marché du vil-lage. En parallèle, Jean-Marie Roy et AntoineBiteau, du Gaec Les Rocs, l’embauchent àmi-temps pour la traite des vaches. Avecl’aide au retour à l’emploi et la productiond’œufs, cela lui permet de tirer un petitrevenu.

Paysanne, enfin !Après un an et demi, Sarah ne touche plus

les aides de Pôle Emploi : son salaire et lebénéfice des œufs ne lui suffisent plus. LeGaec lui cède alors deux hectares pour qu’elley installe un atelier de poulets de chair bio.Elle monte un projet demandant peu d’in-vestissements. « Le Gaec me proposait de louertracteur et fabrique d’aliments, d’échanger monfumier contre de la paille. C’était à lui que jeprévoyais d’acheter les céréales. Je n’avais doncqu’à acheter mes deux bâtiments volailles dépla-çables, d’une valeur de 14000 euros chacun, etdu matériel d’élevage. »

Sarah s’installe ainsi sur une petite struc-ture et conserve son emploi salarié. « Au

quatrième rendez-vous à la chambre pour lestage préparatoire à l’installation, on me ditque je ne peux pas toucher la DJA (4) car monprojet sort du cadre des aides. Grâce à unappui technique sur la fabrication d’alimentà la ferme, j’ai finalement pu prouver les résul-tats économiques escomptés dans le projet etainsi être agricultrice à titre principal. »

Les poulets que Sarah élève aujourd’huisont vendus dans le réseau Biocoop via lacoopérative Volailles Bio de l’Ouest (VBO),mais aussi en direct au marché fermier deSaint-Mesmin, sur Pouzauges et sur Poitiers.

« L’achat local des céréales et la fabricationde l’aliment à la ferme me permettent d’éco-nomiser jusqu’à 130 euros par tonne sur l’ali-mentation des volailles. Non négligeable quandon sait que c’est sur l’alimentation qu’il fautjouer pour augmenter ses marges. La mise enplace d’un toasteur va permettre de travaillerà partir de pois et de féverole et de réduire mesachats de tourteaux et de complémentairesazotés. »

Pour cet été, la jeune paysanne a inscritsa ferme sur le site du Wwoof France(5) afind’accueillir des personnes souhaitant décou-vrir l’agriculture et la ruralité en partageantle quotidien des fermier.e.s qui lesaccueillent. Elle envisage aussi, une foisles cinq premières années d’installationpassées, de partir afin de développer unautre projet, en collectif : « L’atelier est peucoûteux, donc facile à transmettre ! » n

Propos recueillis par Lili Robert, animatrice

de la Confédération paysanne de Vendée

(1) Brevet professionnel responsable d’exploitation agri-cole.(2) Centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et lemilieu rural.(3) Le wwoof ou woofing (de l’anglais « World-WideOpportunities on Organic Farms ») est un réseau mondialde fermes bio. Créé en Angleterre en 1971, il s’est étendudans le monde entier. Des hôtes se proposent d’accueillirdes visiteurs pour partager leurs connaissances, leur savoir-faire, leur quotidien et leurs activités avec la possibilitépour ces derniers de se voir offrir le gîte et le couvert.(4) Dotation jeune agriculteur.(5) www.wwoof.fr

Quelques chiffresSAU : 2 hectares.Productions animales : 11 400 volailles paran, en 3 lots.Emplois : 1 UTH.Aides à l’installation : 10 200 euros+ 6000 euros du Conseil régional pour l’ins-tallation en bio.

Sarah Rezzoug, une nouvelle paysanne à Saint-Mes-min, en Vendée.

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Le 24 avril, dans le cadre de la semainedes alternatives aux pesticides,

la Confédération paysanne d’Alsace,avec le soutien de l’associationrégionale de ses Ami.e.s a fêté

l’agriculture paysanne.

La Confédération paysanne n’est passeulement dans la dénonciation et l’op-position à l’agriculture industrielle, tel

l’atelier d’engraissement des 1200 taurillonsà Wintershouse ou, dans le Nord de l’Al-sace, la stérilisation des terres avec le grandcontournement routier de Strasbourg ou lesoutien aux arracheurs de vigne OGM del’Inra de Colmar. Elle porte une agriculturepaysanne bien vivante, productrice à traversde nombreuses fermes à taille humainediversifiées, et va à la rencontre des consom-matrices et consommateurs avec les standsde production fermière. À côté de ces standss’en animaient d’autres, des semences avecSativa, producteur biologique qui emploiede nombreuses personnes en situation dehandicap, jusqu’à la restauration à based’épeautre, pâtes fraîches, salades, radis,brochettes de bœuf et d’agneau, sans oublierla tarte à la rhubarbe et un bar servant juset pétillant de pomme, vin d’Alsace et bièrede soutien aux faucheurs d’OGM.

Lors de la fête, nous avons voulu montrerdifférentes facettes moins connues de cer-tains de nos travaux paysans, avec la plan-tation de pommes de terre en traction ani-male, la diversité de la flore des pâtures etl’utilisation des plantes comestibles à tra-

vers des balades botaniques, l’élaborationd’une préparation biodynamique, le cheminde la laine à travers la tonte, le filage, le car-dage et le feutrage…

Une calèche tirée par les chevaux véhi-culait les participant.e.s de la gare à laferme. Un four solaire chauffait l’eau du thé.Une exposition photo (« Les mains dansla terre »), des contes, une « grotte auxnains » qui faisait rêver petits et grands, desmusiciens et chanteuses ont enrichi la jour-née et réchauffé l’air et les danseurs. Unsketch avec témoignages de confédérésillustrant les six pétales de la marguerite de

l’agriculture paysanne a remporté un beausuccès. La transmissibilité était illustréepar la ferme accueillant l’événement, entransmission avec Terre de Liens.

Bien que nous ayons vécu le temps desquatre saisons dans la même journée, nousavons été surpris par le nombre des parti-cipant.e.s et la qualité des rencontres. Pourles paysan.ne.s, c’est une bonne occasionde resserrer des liens. Merci à tous et toutesles bénévoles qui ont fait de cette journéeune réussite et la démonstration qu’unautre monde est possible. n

Rémi Picot, paysan dans le Bas-Rhin

L’Alsace fête l’agriculture paysanne

16 \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

Terrain

Grand succès des ateliers pour petits et grands, tout au long de la fête de l’agriculture paysanne en Alsace,le 24 avril.

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Terrain

Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016 / 17

Au fur et à mesure des installations, àaucun moment n’est venue l’idée de tra-vailler sans les autres. Chaque ferme étantautonome dans ses ventes, dans ses asso-lements, le matériel, souvent coûteux, futle premier pas de mutualisation. Puis lescommandes groupées de semences et de

plants suivirent, diminuant ainsi les coûtslogistiques de chaque ferme.

Constatant chaque année une gestion « àla petite semaine » des surplus des un.e.set des autres, en 2015 une première expé-rience de mutualisation de cultures degarde fut mis en place, de faible ampleur

au départ (quelques dizaines d’ares au plus)afin de ne pas prendre le risque de s’enga-ger pour les autres sur des cultures diffi-ciles ou à fortes valeurs ajoutées et les rater.L’essai étant concluant, les surfaces sontamplifiées pour 2016 (1). La notion d’auto-nomie, bien présente dans l’agriculturepaysanne, se conjugue ainsi au pluriel.

Dans cette dynamique, les éleveuses et leséleveurs sont bien sûr présents pour lesgros coups de bourre, les conseils, des outilsnon accessibles pour les seul.e.s maraî-cher.e.s… Personne n’est oublié. Parce quel’union fait la force, un système d’entraideet d’échanges en cas de difficultés est fonc-tionnel en toutes circonstances. Ainsi, surun territoire restreint, être concurrents nenous intéresse pas et la solidarité prime surl’égoïsme. n

Jonathan Chabert,

paysan dans les Côtes-d’Armor

(1) Mon calcul personnel estime à environ 4 000 à5 000 euros de flux totaux échangés entre les fermes, pourdes surfaces allant de 7 000 m² à trois hectares, tout au plus.

N’en déplaise aux fossoyeurs del’agriculture paysanne et fami-liale, les petites fermes font de

la résistance. Ce modèle agricole, de taillemodeste, est plébiscité par de nombreuxjeunes, et parfois moins jeunes, qui veu-lent devenir paysans ou paysannes. L’ave-nir sera fait de nombreux petits projetsindividuels ou collectifs.

Pourtant la Fnsea, par la parole de Chris-tiane Lambert, voulait en faire un slogande nettoyage de campagne : « On veut desfermes de 200 ou 250 vaches, plus rentablesque des fermes de 80 vaches. (…) Martine àla ferme c’est fini ! », avait-elle dit fin jan-vier sur TV5. On ne doute pas du soutiende tout l’agrobusiness, avide de moder-nisme et de mondialisation.

La coopération n’est pas en reste en Avey-ron. Lors de son festival annuel, débutavril, le groupe coopératif Unicor a mis enavant une ferme laitière dans l’ouest dudépartement. Pas n’importe laquelle : ungaec à trois associés, avec 140 vaches lai-tières aujourd’hui, et on ne sait combiendemain… C’est une des fermes les plus

robotisées de France, tout y est automatisé :traite, alimentation des animaux, traite-ment du lisier, contrôle du lait. Trois robotsde traite pour un million d’euros d’inves-tissement… La députée PS Marie-Lou Mar-cel, qui était là avec tous les notables locaux,ne tarit pas d’éloges sur cette réussite :« Vous êtes devenu un exemple et unmodèle »…

Lors de la session du 22 mars de lachambre d’agriculture , nous avons imposéaux élus et autres invités présents, la lec-ture des déclarations décomplexées de laN°2 de la Fnsea. Petit moment de stress,puis de plaisir où nous pensions ébranlerles certitudes des responsables de la Fdseaet compagnie. Mais, pas de tous, et laréponse élégante de Dominique Fayel, pré-sident de la Fdsea de l’Aveyron – « Arrêtezde me casser les couilles ! » – fit monter leton des échanges.

À l’opposé, l’assemblée générale de laConfédération paysanne du département,le 29 mars, se devait d’être belle et porteused’espoir. Je crois que ce fut le cas. De nom-breuses têtes nouvelles se sont mêlées aux

militant.e.s plus aguerris. L’école paysannemise en route pendant l’hiver a permis, parla découverte du syndicalisme paysan, demotiver des jeunes à s’y investir. Certain.ne.sont même rejoint le comité départemental.Quant au rapport d’orientation, il a pu êtreécrit ensemble, avec comme base la pro-position rédigée par les jeunes lors de la jour-née de clôture de l’école paysanne.

« Des paysan.ne.s nombreux pour descampagnes vivantes » est un slogan que l’onest les seuls légitimes à porter.

Des fermes riches de diversité, et non desexploitations agricoles.

Des paysan.ne.s heureux, et non desexploitant.e.s agricoles toujours insatis-faits.

Des Martine, Oriane, Jeanne, Tatiana,Elise, Aïcha… à la ferme ;

Des Sylvain, Téo, Jules, Pio, Momo,Sascha… à la ferme.

Des fermes à notre taille pour des projetshumains ! n

Francis Enjalbert,

Porte-parole de la Confédération paysanne

de l’Aveyron

Côtes-d’Armor L’union du nombre fait la forceSur le bassin de Lamballe, dans les Côtes-d’Armor, plusieurs fermes maraîchères se sont installées depuis 2006. On endénombre sept installées et trois en cours d’installation dans un rayon de dix à quinze minutes les unes des autres. Toutes envente directe, toutes pratiquant un maraîchage diversifié.

Chantier collectif chez Jonathan Chabert : la notiond’autonomie, bien présente dans l’agriculture pay-sanne, se conjugue ainsi au pluriel.

Aveyron Martine à la ferme, ce n’est pas fini !

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Courrier

18 \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

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A

Installé avec mon épouse sur 70 hec-tares en 1987 à Champignelles, dansl’Yonne, je cultive aujourd’hui une sur-

face de 68 hectares en céréales bio, toujoursà deux travailleurs (2 UTH).

Je n’ai eu cesse de conforter notre fermeafin d’obtenir une surface autour de100 hectares, surface qui la préserveraitd’une disparition dans un avenir proche.Entre 1999 et 2009, j’ai ainsi postulé àcinq reprises de terres dans le secteur.

En 1999, je me porte candidat pour lareprise de 8 hectares sur les 92 cultivéspar un paysan en fin d’activité. Je me retirecar mon concurrent est un jeune en pre-mière installation qui abandonne sonemploi extérieur. Mais il se révèle que soninstallation n’est que l’agrandissement del’exploitation de son père. Ce « jeune »conservera son emploi pendant 12 ans,jusqu’à la retraite paternelle. Aujourd’hui,il cultive 460 hectares en gaec avec son frère!

En 2000, je postule pour la reprise d’unepetite exploitation de 27 hectares. Pendant35 ans, j’y ai fait les foins et la moisson carl’exploitante n’avait pas le matériel pourréaliser ces travaux. Dans cette besogne,j’ai succédé à mon père. Pour la reprise se

présente un concurrent à l’agrandissement,soutenu par le président de la Frsea (laFnsea régionale, NDLR). Ce candidat à lareprise s’est installé seul en 1997 sur 84 hec-tares – plus 15 hectares de prés non décla-rés –, succédant à son grand-père. La Com-mission départementale d’orientationagricole (CDOA) le choisit comme repre-neur, faisant fi du schéma directeur et duseuil de contrôle (qui, à cette date, est icià 100 hectares). Je saisis le tribunal admi-nistratif de Dijon qui annule la décision dela CDOA. La cour administrative d’appelde Lyon confirme ensuite le jugement dutribunal administratif. Le candidat déboutédépose un nouveau dossier, identique aupremier. Je saisis de nouveau le tribunaladministratif qui annule la nouvelle auto-risation, jugement confirmé par la couradministrative d’appel. Troisième dépôtde dossier de mon concurrent. Petit chan-gement : le grand-père de 80 ans reprendune partie de ses terres ! Le candidat passeainsi sous le seuil de contrôle. Donc pasd’autorisation à demander ; dans ce cas, laCDOA n’intervient pas. Le petit tour depasse-passe est organisé par la juriste dela chambre. Par la suite, le vainqueur

reprendra bien sûr toutes les terres de songrand-père…

Quelque temps plus tard, je me portecandidat pour reprendre 14 hectares, avecun bois et un étang. La Safer est sur cetteopération, puis se retire pour laisser le pré-sident de la communauté de communesCœur de Puisaye acheter le domaine. Jedemande à la Safer de préempter : refusé.

Après le grand-père, la belle-fille

L’acheteur loue les 14 hectares au gaec dontil fait partie. Dans la foulée, je rencontre ledirecteur départemental de l’Agriculture(DDA) qui n’est pas d’accord avec la déci-sion prise par la Safer et me conseille dedemander une autorisation d’exploiter lesterres du nouvel acquéreur. La CDOA doitstatuer sur nos deux candidatures : elledécide d’accorder l’autorisation au gaec.

Je saisis le tribunal administratif de Dijonqui annule l’autorisation d’exploiter demon concurrent (240 hectares de terres et800 000 litres de quotas laitiers). Qui faitappel et perd à nouveau : la cour adminis-trative d’appel de Lyon confirme le juge-ment du tribunal administratif. Nouveau

Du mauvais côté du mancheTémoignage d’un paysan confédéré de l’Yonne qui s’est déjà heurté cinq fois à la mainmise de la Fdsea et des gros exploitantslocaux sur les attributions de foncier. Ce qui ne l’a pas fait renoncer, ni changer de camp.

Au recensement agricole de 2010, l’Yonne comptait 4 300 exploitations agricoles, 800 de moins qu’en 2000. La diminution du nombre de fermes et l’agrandisse-ment de la plupart de celles qui subsistent n’ont pas apporté de développement de l’emploi : dans le même temps, 1 900 emplois agricoles permanents ou à tempspartiel ont disparu dans le département.

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S’abonner à Campagnes solidaires, c’est participer à l’émergence d’« autres mondes possibles »

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Je vous prie de bien vouloir présenter en faveur de Média Pays sur le compteréférence ci-dessous les sommes correspondant à mon abonnement:Tous les quatre mois r 15 € ou r 20 € Soutien, collectivité et étranger(le 15ème jour du premier mois)

Annuellement r 45 € ou r 60 € Soutien, collectivité et étranger(à la date du renouvellement)

TARIFS : Annuel (11 numéros) : 45 €6 numéros : 24 €Soutien, collectivité et étranger: 60 € (ou plus)

Ou avec le bulletin d’abonnement à retourner sous enveloppe timbrée avec votre chèqueà l’ordre de Campagnes solidaires au 104, rue Robespierre – 93170 BAGNOLET

Tél. : 0143628282 – [email protected] informations contenues dans la présente demande ne seront utilisées que pour les seules nécessités de gestion de l’association

et pourront donner lieu à l’exercice du droit individuel d’accès aux informations dans les conditions prévues par la délibération N°80 du 1/4/80 de la CNIL.

Mensuel de la Confédération paysanneCampagnes solidaires

Ou avec le mandat de prélèvements sepa ci-dessousà retourner en y joignant un relevé bancaire (RlB) ou postal (RIP)

Média Pays – 104, rue Robespierre – 93170 BAGNOLET

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N° 318

Ou sur le site de la Confédération paysanne : www.confederationpaysanne.fr

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Association bénéficiaire : Média pays – Numéro national d’émetteur : FR96ZZZ492109

dépôt de dossier du président de la « com-com » : cette fois il installe sa belle-fille surles 14 hectares ; elle ne possède aucundiplôme agricole et exerce un emploi àtemps complet. La DDA confirme que lajeune est inscrite à la MSA, sans présenterde preuves. La CDOA se bidonne car ducoup, elle vient d’installer une jeune sur 14hectares ! L’année suivante, les terres sontbien sûr apportées au gaec

Je ne me désespère pas de consolidernotre ferme pour pouvoir lui assurer unecertaine pérennité. En 2004, quatrièmetentative et candidature pour la reprise deterres exploitées par une paysanne qui cesseson activité. 51 hectares en tout, de quatrepropriétaires. Face à moi, quatre puis fina-lement trois concurrents : une ferme de167 hectares (1 UTH), une de 160 hectares(2 UTH) et une de 97 hectares (1 UTH).Toutes plus grandes que la nôtre et moinsintenses en emploi. Les trois se partagerontl’exploitation, avec la complicité de monconcurrent magouilleur lors de madeuxième tentative (celui avec le grand-père). La CDOA leur donne à tous trois l’au-torisation d’exploiter. Je saisis le tribunal

administratif de Dijon qui annule les auto-risations, ce que confirme la cour admi-nistrative d’appel de Lyon. S’en suit touteune série de manœuvres, de nouveauxdépôts de dossiers, de nouvelles attribu-tions, de nouveaux recours et en tout, j’ensuis à la quatrième annulation de l’autori-sation d’exploiter de mes concurrents. Suiteau dépôt d’une nouvelle demande d’auto-risation d’exploiter déposée le 14 septembre2015 par le plus gros des candidats, laCDOA lui donne un avis favorable le 8 mars,avis confirmé par un arrêté préfectoral…du même jour (à croire que l’arrêté était caléavant la commission). Je dépose donc unnouveau recours au tribunal administratifde Dijon. À suivre.

Entre-temps, je postule en 2005 à lareprise de terres exploitées par un hommede… 78 ans. Les terres sont achetées parun exploitant de 61 ans. La Safer est saisied’une demande de préemption de ma part,mais refuse de préempter au motif quel’agriculteur est éleveur laitier et que ledépartement manque de lait. Le domaineest d’un seul tenant ; les parcelles sont sépa-rées de chênes centenaires. Depuis, les

haies et les chênes ont été arrachés et toutel’exploitation reprise est en céréales.

En conclusion, les discours de façade enCDOA ou en réunion publique de la Saferfaisant appel au respect du schéma directeurdes structures ont sérieusement du plombdans l’aile. On s’aperçoit que tout le systèmeva dans le sens d’une restructuration par ladisparition des petites fermes, voulue par leslobbies de l’agriculture et appliquée conscien-cieusement par la Fdsea et l’administration(la DDT, remplaçante de la DDA). Si vous pen-sez être prioritaire, vous n’êtes que rarementattributaire. Ce qu’ont bien compris tous mesconcurrents dans les affaires précédemmentracontées, qui sont tous à la Fdsea!

De là à changer de syndicat pour êtreattributaire, c’est un pas que je ne franchiraipas. De plus, en restant à la Confédérationpaysanne, nous n’avons pas à cautionnerla gestion calamiteuse de l’agriculture fran-çaise. n

Jack Rigollet, paysan dans l’Yonne,

représentant de la Confédération paysanne

au comité technique de la Safer de l’Yonne,

de 1999 à 2005, toujours délégué

sur la petite région « Puisaye ».

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20 \ Campagnes solidaires • N° 318 juin 2016

Emploi - stages - formationOffres• Morbihan - Les Bergers d’Er Borelcherchent un ou une stagiaire pourde l’aide cet été - Petite ferme en ABélevage de brebis allaitantes et transfo- Les chantiers sont les suivants: réa-lisation de clôtures, reconquête pas-torale, garde du troupeau, soin, mar-chés, tannerie - Possibilité denourriture et logement en caravane- [email protected] -0635115553 - 0984021048• Cantal (proche Lozère et Haute-Loire) - Cherche salarié·e pour 6mois, via service de remplacement,cause congé maternité - Couple enGaec, ferme extensive, 35VL, 60 ha,agriculture paysanne, conversionbio, race locale, prairies naturelles,100 % herbe, tout foin, maximisa-tion du pâturage, lait livré en laite-rie - [email protected] 0676218945Demandes• Toutes régions - Je suis actuelle-ment à la recherche d’un contratd’apprentissage en maraîchage bioafin de pouvoir suivre un BPREA àMontmorot (39) à la rentrée pro-chaine (octobre 2016) - Issue dumilieu agricole, j’ai de l’expériencedans le domaine de l’agriculture bio-logique - Lucile : [email protected] 0629654312• Toutes régions - Cherche emploide vacher-fromager ou aide vacher-fromager en CDI ou CDD -Titulaire BTSACSE et CS production laitière fer-mière - 4 ans d’expérience: traite,alimentation, suivi du troupeau, repro-duction, soins aux veaux, et concer-nant la transformation (essentielle-ment pâte molle à croûte lavée et pâtepressée demi-cuite) : fabrication etaffinage - Connaissances réglemen-tations sanitaires - Permis B et véhi-cule - Étudie toute proposition -06 89 88 94 43 [email protected]• Rhône-Alpes - JF cherche travailsaisonnier entre le 22 juin et 31 aoûten production de plantes, cueillette,maraîchage, élevage ou accueil àla ferme - Aide familiale pendant5 ans (ferme bio en polyculture-élevage), je prépare mon installa-tion à moyen terme. Expérience etconnaissances en maraîchage, cul-ture PPAM, récoltes diverses, éle-vage viande/laitier (habituée à latraite manuelle), accueil à la ferme,restauration, maîtrise du tracteur etremorques - Bonne capacité phy-sique - 07 81 38 14 08 [email protected]

Association - installationtransmission

Offre• Dordogne. Ferme à vendre avecune maison à restaurer (90 m2), des

bâtiments (une grange de 250 m2,des petits bâtiments) et 4 ha atte-nants pour 200000€. Possibilité delouer ou d’acheter 30 à 35 ha sup-plémentaires à proximité. La fermeétait tournée vers l’élevage (baudetsdu Poitou, moutons, chevaux) et letourisme. Possibilité de développerune activité maraîchère. Possibilitéde passer en AB - La Maison des Pay-sans : l 0553574726• Dordogne. Ferme à vendre d’unseul tenant avec 19,54 ha de terresde bonne qualité, 1 puits et 1 fon-taine, une maison d’habitation (F5),une grange avec un grenier à foin(250 m2), une étable avec un han-gar de stockage (90 m2), une sta-bulation (85 m2) - La maison est pro-posée à 150000€, les bâtiments à80 000 €, les terres à 120 000 €(location-vente possible) - Pourraitconvenir pour un petit élevage(volailles, porcs), des fruits ou dumaraîchage - La Maison des Pay-sans : 0553574726• Calvados - A vendre propriété sur3,7 ha en AB, à 20 minutes de Caen- Actuellement auberge paysanne etpréparation de confitures et tisanes,le lieu pourrait convenir à divers pro-jets: maraîchage, PPAM, petit élevage- Maison d’habitation 7 pièces(200 m2), rénovation écologique(chaudière bois, chauffe-eau solaire)- Nombreux bâtiments en pierre bonétat - Jardin clos, PPAM, fruitiers etpetits fruits, terrain constructible -Nombreux atouts - Disponible rapi-dement - 0231250961 (HR) - [email protected]• Calvados - AV ferme d’élevage -26 ha en 2 îlots -10 ha labourables- AB depuis 20 ans - 130 pommiersAOP Pays d’Auge - Maison d’habi-tation et nombreux bâtiments d’ex-ploitation - Diverses possibilités dediversification - 0231611043 (HR)• Côtes-d’Armor - Gaec sur l’île deBréhat, en maraîchage, arboricul-ture, petits fruits et transforma-tions, 2 ha dont 1100 m2 de tun-nels, vente directe, en bio depuis 30ans et pratique progressive de labiodynamie depuis 2 ans, rechercheporteur de projet (ou couple) avecexpérience en arboriculture etmaraîchage plein champ (tracteur),autonomie, initiative, travail enéquipe - Association souhaitéeaprès salariat : CDD saisonnier(juillet-août 2016) puis CDI annua-lisé à l’automne - Logement surplace possible - 02 96 20 02 91 [email protected]• Vosges - Transmission d’une petiteexploitation de montagne - 23 ha,en bio - Viande bovine (vosgienneset higland), vente directe, agrotou-risme Accueil Paysan (2 chambresd’hôte et gîte de groupe 25 per-sonnes) - Recherche futur repreneur

pour 2017 - Vente de la ferme tra-ditionnelle avec son logement -Etudions toutes propositions -0329610030 - [email protected]• Gers - A transmettre pour 2017exploitation 6 ha volailles bio (ventedirecte) et petite ferme auberge -Grande maison habitable + petitemaison à retaper + grange - EntreBordeaux et Toulouse, sur cheminSaint-Jacques - Conviendrait pourprojet collectif (d’accueil à la ferme)- 0562282524 [email protected]• Loiret - A céder ferme laitière enAB - 62 hectares de SAU, terresgroupées autour des bâtiments - 30vaches laitières - Atelier de trans-formation fromagère : vente enamap, restauration collective, res-taurant - Bâtiments fonctionnels -Possibilité de créer d’autres ate-liers de production sur la ferme -Parrainage et tuilage possibles -Maison d’habitation à vendre ou àlouer - [email protected] -0238 92 32 62 - 0699302977• Ardèche (Sud) - AV corps de fermeen pierre dans petit hameau authen-tique, 580 m², dans cadre naturelpréservé - Partie habitation (110 m²,4 ch, grenier aménageable, cavesvoûtées) - Partie agricole: 2 grangeset des écuries, terres (6 ha), prés(4 ha), vignes (3 ha) et bois (10 ha),d’un seul tenant autour des bâti-ments, en grande partie bénéficiantde l’irrigation - Peut convenir notam-ment pour un élevage (caprin, ovin…)et accueil touristique - 0689170241• Dordogne -Ferme bovin viandeà reprendre - Aujourd’hui le cédantélève et engraisse des bovins derace Limousine (30 mères et lasuite). Possible de reprendre l’acti-vité, mais aussi de développer unautre élevage (caprin, porcin,volailles) et/ou d’installer un vergerde pommiers - 35 ha en propriété- Accès à l’eau pour l’abreuvement- Plusieurs bâtiments d’élevage -Reprise possible du matériel enfonction des besoins - A 8 km d’unbourg avec écoles, services et com-merces - 0553574726• Dordogne - Serres à louer pourproduction horticole près de Péri-gueux - 3000 m2, bon état, 9 serresdont 7 chauffées, alimentées par unpuits dont la pompe est neuve -Un bâtiment de 60 m2 peut servirpour le stockage et le rempotage -Un parking sera aménagé pouraccueillir les clients (l’ensemble dela production était vendue surplace) - Un peu de matériel àreprendre (brouettes, machine àrempoter, pots, cagettes…) -1 400 €/mois - Pas de logement

proposé sur place, mais des possi-bilités à proximité - 0553574726• Tarn (Sud) - Cause retraite dupère recherche associé - 650 bre-bis laitières - Coop PastourelleRoquefort - 0563758488• Drôme - Ferme à reprendre dans leDiois - En polyculture-élevage 100 %bio: poulets fermiers et noix - 2 ha àvendre + fermage transmissible -Tout le matériel nécessaire - [email protected] - 0664260531• Indre (Boischaud Nord) - Fermearboricole, maraîchage bio àreprendre en fermage, polycultureélevage possible - 48,2 ha, entiè-rement irrigable, en partie drainée- Idéalement située à 3 km d’unecommune comprenant regroupe-ment scolaire et épicerie - Tout enbio depuis 30 ans - Le cédant adéjà pris sa retraite, donc la repriseest souhaitée rapidement. Projetcollectif souhaité, ou couple, étantdonnée la surface et le nombre deproductions [email protected] -0254616241• Indre (Nord Brenne) - Fermecaprine à vendre ou à louer (par-rainage souhaité) - Avec maisond’habitation, dépendances, bâti-ments d’élevage à réaménager, untroupeau de 50 chèvres et un hec-tare sur aire fromagère de SteMaure de Touraine, Pouligny etValençay - Fermage à reprendre sur9 ha et possibilité d’obtenir un fer-mage sur 7 ha de plus - Le foncierest groupé autour de la ferme et leschèvres pâturent - Vente actuelle-ment sur les marchés de Loches etCormery - 0254380067• Indre - Cherche repreneur pour ate-lier caprin - Chèvres de race alpine,actuellement en production de laitvendu à une laiterie - Zone AOC - Lesterres, les bâtiments d’élevage et destockage et le troupeau sont à vendreou à louer. Il y a une quarantained’hectares disponibles - Un parrai-nage est souhaité dès 2016, maisnous pouvons nous adapter auxenvies de chacun - Nous recherchonstoutefois un repreneur en bio (laferme est actuellement en conven-tionnel) - Ma compagne et moireprendrons la surface restante pourcultiver des céréales bio diversifiéestransformées en huile et en farine, unpeu de maraîchage bio et faire du pain

au levain et au feu de bois, le tout envente directe - Nous avons la volontéde mutualiser la vente des différentsproduits de la ferme, et d’avoir éven-tuellement certains matériels en com-mun, et de l’entraide - Tous les pro-jets seront étudiés - 0254390177 [email protected] - [email protected]• Indre-et-Loire - A céder exploita-tion caprine avec transformationfromagère en Sud-Touraine - 25 had’un seul tenant, 140 chèvres Saa-nen, un atelier de transformationfromagère (AOP Sainte-Maure deTouraine), un logement et un gîte -L’activité emploie 5 personnes -Remise de l’activité pour départ enretraite entre fin 2016 et début 2018- Conditions à négocier (tuilage,parrainage, location provisoire desterres, etc) - Idéal pour une familleavec salariés ou deux couples asso-ciés - [email protected]• Lot-et-Garonne - Ferme à louer -production de semences pota-gères/maraîchage AB - Dans l’ob-jectif d’une transmission, je loue unepetite unité de production desemences potagères bio :: bâtimentd’exploitation, 4 ha irrigables, lar-gement équipée pour le travail du sol,le battage et le tri des semences.Possibilité de participer à un grou-pement de producteurs pour la ventedes semences. Facilement reconver-tible en maraîchage. À 5 km du plusvieux marché bio de France, qui vaconnaître le départ de plusieurs pro-ducteurs. Profil des candidats recher-chés: jeune couple engagé dans unprojet de vie et professionnel avancé.Accompagnement envisageable sousla forme d’une transmission pro-gressive, d’un stage parrainage…Dispo pour évaluer ensemble toutepossibilité. Pas de logement sur place,mais possibilités de location à proxi-mité - christian. [email protected]• Rhône-Alpes - Recherche de fon-cier pour installation en zone demoyenne montagne en Savoie, Ainou Isère - Couple (27 ans) avec for-mation d’ingénieur agricole, nousrecherchons de 5 à 7 ha avec habi-tation en moyenne montagne -Nous souhaitons mettre en place enbio à long terme : verger diversifiéet petits fruits, atelier poules pon-deuses, si possible 1 ha de maïs

grain pour l’alimentation desvolailles, avec une rotation de 3ans, et accueil à la ferme (campinget chambre d’hôtes) - Les produitsseront écoulés en vente directe, lesinvendus transformés - Nous envi-sageons soit une reprise soit unecréation en achat ou location. Sinous pouvons acheter, nous sou-haitons acheter au travers d’un GFA- [email protected] ou0630202668• Lorraine - Recherche exploitationà reprendre ou à créer : maraîchage,petit élevage, accueil a la ferme…- Étudie toute proposition, en AB ouautres - Bruno : 06 61 25 69 85 - [email protected]• Sud-Ouest - Je suis paysan dansles Ardennes belges, en maraîchagenaturel avec traction animale. Jesuis à ma 4e année d’expérience etde production, en vente directe. Jecherche 4/5 hectares (avec 1 hec-tare de bois/forêts serai idéal), pourmener à bien mon projet de m’ins-taller dans le Sud-Ouest (Dordogne,Lot…), soit en bail à ferme, en col-laboration ou en association avecune personne - Je vous invite à visi-ter mon site internet pour décou-vrir mon projet : alter-nativa.be [email protected]• Aveyron - Couple cherche terrespour installation en maraîchage,minimum 2 hectares dans le secteurNord/Nord-Ouest de l’Aveyron - Étu-die toute proposition - 0670461005- [email protected]

Vacances

• Doubs - Vallée du Dessoubre -Paysans bio (morbier fermier etcomté), nous vous accueillons dansnotre gîte paysan (6 pers.) - Bien-venue aux confédéré·e·s et ami·e·sde la Conf’ ! - 03 81 44 39 77 [email protected]

Divers

• Cévennes, Larzac (montagne) -Homme d’âge certain collaboreraità groupe bio autonome, participe-rait à coup de main selon mes pos-sibilités (travaux agricoles, vente,menuiserie, bâtiment, cuisine) - Dis-pose d’un petit capital en plus dema retraite - 09 51 26 21 67 (de14 heures à 21 heures)

Les petites annonces sont payantes, sauf celles qui concernentl’emploi, les recherches et propositions d’installation, et touteautre demande à but non lucratif.Tarif : 8,5 € les six lignes + 1,5 € par ligne supplémentaire (30 caractères par ligne).Pour les tarifs publicitaires, contacter :Média Pays – 104, rue Robespierre – 93170 BAGNOLETTél. : 0143628282

Rencontres Semences paysannesLes 16 et 17 juin, le Centre d’étude et terre d'accueil des blés (Cetab)vous invite pour deux soirées sur la ferme du Roc, à Port-Sainte-Marie(Lot-et-Garonne). Au programme: conférence sur l'histoire des céréaleset du pain à travers les âges par Philippe Marinval du CNRS, visite desjardins-collections avec plus de 200 blés paysans et anciens, ainsi quedébat sur les problématiques liées aux intolérances croissantes au glu-ten (interventions de chercheurs, diététiciens, médecins et paysans)– Pour plus d'informations, notamment sur la programmation à des-tination des professionnels – [email protected] – 05 53 93 14 62

Participez au financement du film Semences du futur !Ce film qui sera réalisé par Honorine Perino devait être cofinancé par la région Auvergne-Rhône-Alpes. Mais le nouvel exécutif régional veut se débarrasser des « doryphores et des rats tau-piers » (selon les propos de Laurent Wauquiez, président de la région, devant un parterre conquisd'élus de la Chambre régionale d'Agriculture) que représentent à ses yeux les associationsd'environnement ! Aidez-nous à montrer à Wauquiez et sa clique productiviste que nous résis-terons ! Présentation sur le site où 15 000 euros sont à récolter : www.kisskissbankbank.com/semences-du-futur

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Culture

Une BD hors des sentiers battus

Une piste interminable qui mène au bout de nulle part : c’estvraiment l’impression qu’on a lorsqu’on débarque chez Cécileet Nico, adhérents de la Confédération paysanne. Ce petit coin

de paradis de la Drôme provençale, niché en haut de la colline et fai-sant face au « géant de Provence » est le coin rêvé pour faire pâturerun troupeau de chèvres du rove. Encore fallait-il avoir le courage et l’éner-gie pour entreprendre les démarches, réaliser cette installation agricoleet rendre à l’élevage ce petit coin perdu hors des sentiers battus.

La voie des chevriers, bande dessinée de Samuel Figuière, relate à mer-veille cette aventure humaine qui s’apparente souvent à un parcoursdu combattant. Elle met en avant les complexités administratives etles nombreuses difficultés rencontrées par les porteurs et porteuses deprojet qui souhaitent intégrer la belle famille des paysans et des pay-sannes.

Elle illustre également très bien les nombreuses incohérences d’unsystème qui fonce droit dans le mur si on ne modifie pas rapide-ment sa trajectoire.

Cette BD, très agréable à lire de par la qualité de ses dessins et deson contenu, illustre ce que peut être l’agriculture paysanne. À lire,offrir ou s’échanger sans modération. n

Sébastien Pelurson, paysan dans la Drôme

La voie des chevriers, de Samuel Figuière, ed Warum, 112 pages,18 euros, paru le 24 février 2016 - www.warum.fr

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Les 20 et 21 mai, sur la place Stalingrad, entre quartiers bobos et quartiers prolos, laConfédération paysanne tient sa « Ferme à Paris ».Les cabas se remplissent de produits fermiers. Sous le barnum s’animent débats etconférences, dont celle de lancement d’une année de travail sur le thème de l’alimen-tation (cf. CS n° 317). Les enfants se ruent dans la paille pour jouer ou viennent autourdes barrières de la petite ferme aux animaux animée par l’association Sors de Terre. Unefanfare fait chanter et taper des mains… Le samedi après-midi, la foule envahit la place :c’est l’arrivée de la marche parisienne contre Monsanto, défilé participant de bellemanière à la marche mondiale contre la firme productrice – entre autres – d’OGM etdu RoundUp. Cette année,500 marches de ce type ont eulieu à travers le monde, dont unetrentaine en France.Le samedi soir, il n’y a plus de frites(traditionnelles, au gras de bœuf !)sur le stand de Pierrot et Chantal,militants confédérés et jeunesretraités venus bénévolement duNord nourrir l’assemblée. Plus debière non plus sur le stand de laConf’. Plus de comté à couper. Plusbeaucoup de miel. Plus grand chosedans de pas mal de stands…

Paris vaut bien une Ferme !

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