ce livre est dédié aux bien-aimés habitants de...

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Celivreestdédiéauxbien-aiméshabitantsdeStonington,dansleMaine–etplusprécisémentàLanceBradshaw,ThomasJonesetKellyKolysher.J’espèrequejevousairendujusticeetquevousm’ouvrirezgrandslesbraslejouroùjereviendrai.

1

Shaw

—Simi,oùjesuis,merde?grondé-jedansmonsmartphone.«Jen’ensaisrien,Ducon»seraituneréponseacceptable,étantdonnémagrossièreté,maismon

assistantevirtuelle,toujourstrèsprofessionnelle,gardesoncalme.—VousroulezsurUpperFallsRoad,endirectiondusud.La technologieest épatante,maiscelanem’aidepasbeaucoup.Nedevantcompterque surmoi-

même, je suis forcé de tirer les seules conclusions acceptables qui s’imposent. Pour autant que jesache,levolquej’aiprispourBangor,dansleMaine,aétédéviédesacoursepourarriverdansletriangle des Bermudes. Lequel est, j’en suis désormais convaincu, un monde parallèle où lesautoroutesn’ontpasencoreétéinventées.Oubientoutcelaaétééchafaudéparmonennemiejuréeetmaîtresseàmi-temps,CassidyWhalen,afindem’attirerdansunendroitàl’écartdetout,oùellevapouvoircontinuerdemetorturerà loisir,pourfinirparmedévorer lefoieavantdebalancermoncadavrelàoùpersonnenepourraleretrouver.Àvraidirecemeurtre–unrienmonstrueux–meconviendraitbien,carêtreforcéàsupporterson

regardcompatissantàlongueurdejournée,c’estundestinpirequelamort.Je laisse tomber mon téléphone dans le vide-poches près du levier de vitesses, pas très

délicatement,étantdonnéquejesuisdeplusenplusagacé.Jesuisauboutdurouleauetjepuisedansmesréservesaprèsunvoldedixheuresetdemieetuntrajetenvoituredeprèsdedeuxheures.Monestomacémetdesgargouillissonores,cequiesttoutàfaitlogiqueétantdonnéquejen’aimangéentoutetpourtoutquelescacahuètesserviesdansl’avion.Simi bipe, soit pourm’avertir de la traiter avec plus deménagement, soit pourme prévenir de

tourner à droite sur une énième route secondaire dans ce bled paumé. Encore soixante bornes deroutessinueusesjusqu’àcetteîleoùsetrouveunpetitvillagedepêcheursdunomdeStonington.LeterritoiredeCassidy.Maisqu’est-cequim’aprisquand j’aidécidédesauterdanscetavion?Oui,bon…Jevoulaisluidirecequejepensed’elle.Maispourlemoment,jen’aiqu’uneidéeentête:memettrequelquechosesousladent.J’entresurleparkingd’unestation-service,megareetdescendsdelapetitevoituredelocationoù

j’ai été forcé deme plier en quatre pourm’asseoir au volant, puisque aucun autremodèle n’étaitdisponible.Ledessindupouletqui figuredans lavitrinen’apasdequoi faire saliver,maisçame

donnepourtantenvie.Ledéliredoitmeguetter,carmangerdupouletachetédansunestation-service,cen’estpastrèsmalin.Jevaisenpayerleprixplustard.Le jeune serveur semontre patient le temps que jeme décide entre le poulet-poulet, le filet de

pouletoulesnuggets.Pendantqu’ilemballemonfiletetmespommesdeterresautées,jemedisqu’ilvautmieuxque jevérifie queSimine se trompepasdedirection,mais je prends laprécautiondeparler à voix basse, histoire qu’elle nem’entende pas. Il nemanquerait plus qu’elleme fasse unescène parce que je ne lui fais pas confiance. Les femmes sont parfois très susceptibles.Même lesvirtuelles.—Dites…Dale,commencé-jeenlisantsonnomsursonbadge.C’estnormalqu’ilyaitdestasde

petitesroutesdanslecoin,etpasd’autoroutes?Dalesemetàrire.Ondoitlaluiposersouvent,celle-là.—Oui.Vousallezoù?—Euh…àStonington,réponds-jeenprenantlaboîtecontenantmonrepas.Ilseredressecommesij’avaisditquelquechosed’extraordinaire.—Stonington?—Oui.Pourquoi?Jevaisdanslamauvaisedirection?J’enétaissûr,maugréé-jeenjurantàmi-

voix.—Non,vousêtesdanslabonne.C’estjustequepersonnenevaàStoningtonàmoinsd’yhabiter.—C’estmal?—Çadépendàquivousposezlaquestion,lance-t-ilenriantdeplusbelle.—Super,dis-jeavecunsouriresarcastique.Merci,monvieux.(Jeprendslaboîtedéjàimbibéede

gras.)Jenevaispasmouriraprèsavoirmangéça,quandmême?Ilhausselesépaulesavecuneexpressionquisignifiequejem’entirerai.Oupas, tantpis, il faut

bienmourirdequelquechose.Aprèsavoirpayépourunecrisecardiaqueàemporteretunebouteilled’eau,jereprendslaroute.

Dumoinscequientientlieu.Lachausséetortueusesanssignalisationestdéjàassezpénible,maislesbossesmedonnentl’impressiond’êtredansunchariotdesupermarchéquidévaleunescalier.Jesuissûrquesi jeparlais,celameferaitunevoixchevrotante.Jeferaisbienletest,puisquepersonnenepeutmevoir.Saufquemontéléphonesonne.—Allô?réponds-jed’unevoixéraillée.Ben?—Ouaip,patron!claironne-t-il,unpeutropexubérant.Commentc’est,leMaine?—Àchier,jusqu’ici.Qu’est-cequetum’astrouvé?—Ehbien,ilyaseulementdeuxendroitspossiblesetl’unestcomplet,figurez-vous,maisjevous

airéservéunejoliepetitechambreàlaWhalenHouse.Jenesaispaspourquoi,maisuneénormemigraines’empareaussitôtdemoi,mefrappantcomme

lafoudre.—Attends.TuviensbiendemedireWhalen?—Ouaip.Etc’estexactementcequevouscroyez.(J’entendslesouriredanssavoix.)Lerepairede

MissGlaçonenpersonne.CesontlesparentsdeCassidylespropriétaires.D’aprèslesquatreétoilesetdemiedescommentairesclients,c’estuncharmantpetitbedandbreakfastàl’atmosphèrefamilialeavectoutleconfortd’unemaisonmoderne.Vousdevriezêtredansvotreélément.

Jeluiauraisaboyédessussij’enavaiseulecourage.—Etçat’amuse,hein?—Unpetitpeu.Entoutcas,lui,ilesthonnêteavecmoi.PascommeCassidy.—Pasd’autrepossibilité?—Aucune.—Jetevirequandjerentre.—Certainement,chef.Enattendant,jem’occupeducontratdeDenverpourquetoutsoitenbonne

etdueforme.C’est avec Denver Rockford, dit Rocket Man, que tout a commencé. Cassidy Whalen et moi

sommesenconcurrencepourreprésenterlequarterbackstarleplusconvoitédumondedufootballetremporter unepetite part du gâteau, ainsi qu’unposte d’associé chezStrikerSportsEntertainment.J’aigagné.Surunequestiondeprocédure.Denverad’abordproposélecontratàCassidy,maiselleadéclinéetinsistépourqu’ilmeledonneàmoi.Toutcelaparcequ’elleadécouvertquejenesuispaslericheplay-boypourlequeljemefaispasser.Siellen’avaitpasétéunetellefouineuse,siprompteàmejugeretàmedisséquercommeunegrenouilleencoursdesciencesnat’,jeneseraispasdansunpotàyaourtsuruneroutemerdiqueversunendroitdontpersonnen’ajamaisentenduparler.Jefourrelamaindanslaboîtegraisseuseetjeleregretteaussitôtquandjetombesurlespommes

deterrebrûlantes,quidoiventêtreàpeinesortiesdel’huilebouillante.—Ah,l’enfoiré!—OK,jepeuxlegarderencoresivousytenez.Maisjevaisdevoirvousposerlaquestion:vous

nevoulezvraimentplusconclureleplusgrosdealdevotrecarrière?J’avaispresqueoubliéqueBenétaitauboutdufil.Peut-êtrequejesuisvraimententraindedélirer,

finalement.—Non,maistuentendscequetumedemandes?Évidemmentquenon.Jeviensjustedemebrûler,

c’esttout,réponds-jeensuçantmondoigtendolori.—C’estmarrant,j’airiensentidutout,moi.Etbim!IlestàdeuxdoigtsdesefaireremplacerparSimi.— Comporte-toi en adulte, Ben, dis-je en reprenant vraiment mon rôle de chef. Réserve la

chambre,vaposerlecontratsurlebureaudeWadeettrouve-moiunvolretourpourdemainmatinpremièreheure.—C’estnoté.Mais,euh…—Crachelemorceau.Jecommenceàperdrelepeudepatiencequimereste.—Jepréfèrevousprévenir,maisilyadumauvaistempsprévusurleMainepourlesprochains

jours.Mieuxvautquevousvousprépariezàprolongervotreséjour.—Alors,tuasintérêtàmefairerentreravantlegrain,parcequejen’aiaucunementl’intentionde

traîner ici plus longtemps qu’il ne faut. Rappelle-moi pourme donner tous les détails lemomentvenu.Etsurce,jeraccrocheetjetentedem’attaquerdenouveauàmaboîtepleinedegraillon.Il est exact que je n’ai aucunement l’intention de traîner ici plus longtemps qu’il ne faut, mais

encorefaudrait-ilquej’aieunebonneraisond’yêtrevenu.Bonsang,maisqu’est-cequejefichedanscefoutuMaine?Voyez-vous,CassidyWhalenaledondem’obséderetdemefaireagircommeunparfaitdément.Àcausedecettebonnefemme,j’aifaitdestrucsquejen’auraisjamaisfaits.Commeséduire une collègue pour remporter un contrat. Ou du moins, essayer de la séduire. Cela s’estretournécontremoi.Sil’onpeutdire.Maisaumoins,jemesuissoulagéuneoudeuxfoisencoursde route, c’est toujours une consolation. Seulement, je n’aime pas trop perdre et mon prix deconsolationaprislelargeenemportantsadélicieusepetitechatteavecelle.Etcelanemeplaîtpas.Zut.Mais pourquoi celame contrarie ?Avec les années, j’ai élevé unmur quime protège des

folies, et petit bout par petit bout, elle est en train de l’abattre et de me forcer à éprouver desémotions.Jefrissonneàcettepensée.Ne vous méprenez pas non plus : cette histoire d’émotions ne signifie pas que je suis tombé

amoureuxd’elleouquoiquecesoit.Non,cequ’ellemefaitéprouver,cesontlesémotionsquej’ailaisséesdanslepassé,lanuitoùj’aivuunhommeprendreuneballeenpleinetêtesousmesyeux.Jen’étais qu’un môme, mais à Detroit, on apprend très jeune à développer l’instinct de survie. Lesémotions,c’estdelafaiblesse.Etjen’avaispasdeparentspourmeprotégerdetoutesceshorreurs.Ils se contrefichaient que je sois vivant oumort.D’ailleurs, ilsm’auraient sûrement préférémort,parceque,aumoins,celaleurauraitpermisdetoucherunpeud’argent.Avec un grognement dépité, je balaie les souvenirs demon enfance bousillée, car ce genre de

penséesnerisquepasdemefaireavancerdanslavie.C’estderrièremoi,plutôt.Cettevie,c’estdupassé.J’aitournélapagedepuislejouroùjesuisdevenuunhommeàl’âgedeneufans.Nepasavoirdemèrequivousconsolequandvousavezététémoind’unmeurtreviolentetsanglant,celavousfaitrelativiser.Personnen’allaits’occuperdecepetitgaminàpartl’hommequ’ilétaitcensédevenir.Etpersonnenerisquaitdemefairedumal,saufsijeleurendonnaislesmoyens.J’aitravaillédurpourfairemonchemindanslavie.Etj’aisaisitouteslesoccasionspossiblespour

avancer,maisrecevoiruncontratoriginellementdestinéàunefoutuebonnefemme,c’estunaffrontcuisant.Castrateur.Même si je n’ai aucune intentionde refuser ce contrat en or, quelle que soit lamanière dont je l’ai obtenu, il faut avant tout que je recouvre ma virilité. Et pour l’heure, c’estCassidyquil’adanssonsacàmain.Unefoisquejel’aurairécupérée,jepourraitournerlapagesurelleettoutesceshistoiresdesentiments.LepontdeDeer Isle sedressedevantmoicommeunesentinelled’acierdecentvingtmètresde

haut qui peut soit me laisser passer, soit se transformer en périlleuses montagnes russes et meprécipiter dans les tréfonds d’Eggemoggin Reach, juste en dessous. Cela n’aurait rien d’amusant,maispourlecoup,jetraversesansencombre.Lescâblesd’aciernebougentpasetjesuisàpeuprèscertain que je n’ai fait qu’imaginer le rire demauvais augure qu’ilme semble avoir entendu. Cen’étaitquelegrincementdumétal.Bonsang,ilfautquejedormeunpeuavantquelesrochersquiparsèment les environs ne se transforment en créatures de pierre gambadant dans des champs demyrtilles.Lescréaturesdepierren’existentpas.Toutcommelesdos-d’ânedelaroutenesontpascrééspar

destaupesgéantesetlalanguedeterresurlaquelleestbâtilepontnevapassetransformerensablesmouvants qui vont m’engloutir jusqu’au cœur de la terre. En revanche, mon téléphone sonneréellement.Soulagéparcettediversion,jedécroche:—ShawMatthewsàl’appareil.Moncerveauprivéde sommeil abesoindegarderquelquesneuronesenétatde fonctionnement

pourquej’aieencoreunpeuderaisonquandjemeretrouveraienfinfaceàcettepetitecoquinequis’est enfuie jusquechezelle. J’aideuxmotsà luidire, et jecoursdangereusement le risquede les

oublierl’unetl’autre.—Hé,monpote,qu’est-cequetufais?demandeChazàl’autreboutdufil.—Jenesaispastrop,maisjecroisquejesuisentraindefranchirl’unedesseptportesdel’enfer.

(Enfait,j’ensuistoutàfaitcertain,maislemanquedesommeilaffectemonjugement.)Ettoi,monvieux?—Jevoulaisjusteteprévenirquetuferaisbiendefaireprofilbas.JecomprendstoutàfaitcequeChazvientdemedireetc’estlapreuvemêmequejeviensd’entrer

dansunmondeparallèle.Prêtàtoutentendre,jereprends:—Dis-moi.—LesfillesetQuinnprennentunvolpourleMaineafinderetrouverCassidy.Commec’estcensé

êtreunesurprise,neluidisrien,sinonDemivamelescouper.—Bienvenueauclub,réponds-jeensongeantàmesnoixdanslesacàmaindeCassidy.(Aulieude

répondre à la question interloquée qui suit, je préfère faire avancer la conversation.) Et pourquoidois-jefaireprofilbas?—Parcequ’ilssaventquetuesdéjàlà-bas.Celanetientpasdebout.C’estQuinnquim’adonnélenumérodevoldeCassidyetm’aditdeme

lanceràsapoursuite.Seulement,parcequ’ils’imaginaitquenousétionsenpleineromance,grossièreerreurdesapart,mêmesic’estquandmêmegrâceàcelaque j’aieu l’info.Oh,merde. Ilsontdûconclurequec’estàcausedemoiqueleurmeilleurecopineafichulecamp.Génial.Ilnemanquaitplusquecela:deuxmèrespoulesetunpetitcoqcompatissant,alorsquej’essaiedefairerentrerlapetitecoquineaubercail.—OK,monvieux.Mercidem’avoirprévenu.Avecunpeudechance,soupiré-je,jeseraireparti

avantqu’ilsarrivent.Jefichelecampàlapremièreheuredemain.—Qu’est-cequetuespartifairelà-bas,d’ailleurs?—Jemeposelamêmequestiondepuisledébut.—Ehbien,c’estdéjàuneréponse,non?—Quoi?Jenetesuispas.—Monpote,tuassautédansunavion…Maine…nana…Lalignen’arrêtepasdecouper.Je regarde l’écrandemon téléphonequinemontrequ’une seulebarrettevacillante. Jedois être

entrédansunezoneoùonnecaptepas,maisjereposeletéléphonecontremonoreille.—Chaz?Allô,tueslà?Lestroisbipsquej’entendset lemessage«Échecdel’appel»m’indiquentquenon.Oh,etpuis,

zut.Jelerappelleraiplustard,carsij’enjugeparl’océanquej’aperçoisàl’horizon,jesuispresquearrivé à destination. Même si Simi n’a pas fait son boulot et ne m’a rien dit. Parlez-moi detechnologie.Alorsquejefranchislacollineetsuislaroutemenantaupetitvillagenichéenbas,jesuisfasciné

malgrémoipar toutecette simplicité.C’est commedébarquerdans ledécordecinémad’unevilleimaginaire ou dans un livre. Jamais je n’aurais imaginé que des endroits comme celui-là existent,maisc’estbienréel.Lescarrefoursn’abritentpasdesStarbucksoudesMcDonald.Iln’yapasdegrandeschaînesde

supermarché, ni de galeries marchandes ou de stations-service. Même pas de feux tricolores. Lagrand-rueégrèneunepoignéedepetitesboutiques,unrestaurant,uneépicerieetuneseuleetuniquebanque.Maistoutel’agitationseconcentresurunquai,centrenévralgiqueencombrédecamionsdetoutessortesdemodèlesetmarquesjamaisproduitsdansnosbonsvieuxÉtats-Unis.Aprèsavoirdépassél’Opéra–attends,ilyaunopéra,ici?incroyable!–,jeprendsàgauchesur

SchoolStreetetjegagneWestMain,oùuneimmensepancarteusée,quiauraitbienbesoind’uncoupdepeinture,m’annoncequej’aienfinatteintmadestination.Jemegare,coupelemoteuretdépliemagrande carcasse pour sortir de cette voiture miniature. Comment les clowns peuvent s’entasser àautantdansuntrucpareilquandilsfontleurnumérodecirque,jamaisjenelecomprendrai.Une fois sur le trottoir, jem’étire et aspire une longue goulée d’air pur. Enfin,moins pur que

chargéd’odeursdepoissonetdesel,maisnaturelquandmême.Mespoumonssonttellementhabituésà l’empreinte carbone des grandes villes que je suis pris d’une violente quinte de toux ; j’ail’impression que je ne reprendrai jamaismon souffle.Une fois cela passé, je jette un coup d’œilautourdemoipourvérifierquepersonnenem’avu,etjesuisébahiparlespectacle.Desbateauxdepêcheentrentetsortentduport,desnuéesdemouettesdansleursillage.Lebruitdes

moteurs et des klaxons, les piaillements des oiseaux et les cris des pêcheurs qui se croisent sontpratiquement une berceuse en comparaison du vacarme de la ville. Des îles de toutes tailles sontéparpilléesdanslabaieetau-delàcommeunecarteautrésorquiattendd’êtreexplorée.Maisleplusimpressionnant,c’estl’horizon.Unevraietoiledepeintre:lescieuxsontd’unbleulimpideetlesraisdelumièrequitraversentlesnuagessontd’unblancimmaculé,commesilesdoigtsd’unjeunedieus’amusaientavecdesbateaux-jouetsflottantdanssonbain.CassidyWhalen est née dans une carte postale et en est sortie comme un personnage de fiction

faisantirruptiondanslaréalité.J’airarementeul’occasionderemarquerlasplendeurdecegenredechoses.Peut-êtreparcequej’aitoujoursétépressé,àcausedutumultedelaviecitadine,maisilyaquelquechosedanscepaysagequimeforceàprendredutempspourlecontempler.C’estpeut-êtreuncomportementdegamindemapart,maisjesuisimpressionné.JesorsmontéléphonepourappelerBenetluifairesavoirquejesuisarrivé.C’estavecsurprise

quejevoislesmotsPASDERÉSEAUsurl’écran,àl’endroitoùdevraientsetrouvercinqbarrettes.Jebrandismontéléphoneàboutdebrasetfaisuntoursurmoi-même,dansl’espoirdecapter.— Pas de réseau ? Comment c’est possible avec la technologie d’aujourd’hui ? soupiré-je en

rangeantavecabattementmontéléphonedansmapoche.Oublionslacartepostale.JesuisplutôtdansLaQuatrièmeDimension.Je regardedenouveauautourdemoiet secoue la têteenme rendantcompteque jemesuis fait

avoircommeunbleu.ToutcommeCassidy,lapetitevilleestravissanteetinnocente,c’estunsuccubequi leurre sa proie en lui donnant l’impression qu’elle ne risque rien, et puis boum ! Vous vousretrouvezsoussonemprisesansautrechoixquevoussoumettrependantqu’ellevousvampiriseavantdebalancervotrecadavredesséché.Heureusementpourmoi,jecomprendscelaavantqu’ilsoittroptard,cequiestmiraculeux,étantdonnémonétatd’épuisement.Derrière moi, Whalen House se dresse fièrement en haut d’une éminence qui domine non

seulementleportmaislavilletoutentière.Etquandjedisville,c’estvitedit.Quellebellecoïncidencequecesoitdanscetorgueilleuxetsomptueuxperchoirqu’avu le jourcettedonneusede leçonsdeCassidyWhalen.Jeneseraispassurprisd’apprendrequesonpèreestàlafoislejuge,lejuryetlebourreaudelaville.Si j’avais encore un peu de sens commun, je tournerais les talons et rejoindrais la civilisation.

Mais,jelerépète,àcausedemondéficitdesommeil,jemanquetotalementdelucidité.Laseulechosequimepréoccupepourl’heure,c’estdemeglisserdansunlitdouilletpouroffrirunpeudereposbienmérité à mon cerveau. Après cela, je dirai son fait à la diablesse, puis je m’empresserai deretrouverunsemblantdenormalitéàSanDiegoavecmonnouveauettrèsbienpayéposted’associéchezStrikerSportsEntertainmentetunevieextraordinairementexceptionnelle.Oui,toutcepourquoijemesuisdonnétantdemal,cerêve,vabientôtdevenirréalité…Dèsqueje

seraisortidececauchemar.

2

Cassidy

C’estdrôle, lavie.Toutescesconsidérationsexaltantesquiprétendentquel’onestmaîtredesondestin,qu’onpeuttoutàfaitchoisirladirectionquel’onprenddurantnotrevoyagesurterre,cenesontquedesâneries.Ilesttrèsrarequelesgensnésdansmapetitevillelaquittent.Oualorsilsreviennentdeuxtroisans

plustard,grandmaximum.LesusetcoutumesdeStoningtonsonttellementdifférentsdecequel’ontrouveàl’extérieurqueseshabitantsontdumalàvivreailleurs.C’estcommeseretrouverbalancéaubeaumilieu de l’océan avec pour consigne de nager ou se noyer. Et cela sans jamais avoir eu lamoindreleçondenatation.C’estcequej’aifait.J’aiprismonavenirenmainetjesuispartiedeStonington.Etnonseulement

j’ai appris à nager,mais j’ai vu poussermes nageoires et apparaître des branchies. Pourtant, cettevillearéussiàmerappelerquandmêmeàelle.Jenesuispaslamaîtressedemadestinée,j’ensuisl’esclave.J’ailaisséderrièremoitoutcequej’aieutantdemalàconstruire,afinderevenirdansuneville que jem’étais efforcée de quitter.Comme unemère qui vous couve, Stonington a le don deretenirsesenfants,delesétoufferdanssongironenrefusantdeleslâcher.Jesuissimplementlafilletêtuequiétaitbiendécidéeàtracerelle-mêmesavoie.Lesbrèvesvisitesquejerendaisàmafamilleilyapeuétaientsansrisques.Laplupartdutemps

parce qu’elles étaient planifiées, avec une date de départ précise et non négociable. Cette fois, cegarde-fouestabsent.Jen’aipaslamoindreidéedutempsqu’ilvamefalloirpouraidermesparentsàtraverser cette crise,mais je suis sûreque siStoningtonparvient à ses fins, je ne suis pasprès derepartir.C’estunrisquequejedoisprendrepourmesparents.Ilssontplusimportantsquen’importequel poste d’associé, que tel ou tel client, ou que ce salaud égoïste et torturé qui a le don demedonnerdesorgasmesfabuleux.C’estuncoupdefilurgentdurantlemomentleplusimportantdemaviequim’afaittraverseren

catastrophe le pays pour rejoindre ma mère hospitalisée. Quand papa est passé me prendre àl’aéroport, ilm’aassuréqu’elleallaitbien,mais ilm’aprévenuequ’elleavait l’air auplusmal. Ilavaitraison.Ondiraitquemamanavaitcombattupendantdouzeroundsaveclechampiondumondedespoidslourds.Lestraumatismesetfracturesqu’elleasubisnefontquejustifiercettemétaphore.Bienquejesoisdansunhôpital–cequimemettoujourshypermalàl’aise–,j’éprouvequelque

chose de bizarre et de déplaisant. Chaque fois que j’essaie d’identifier la raison de cemalaise, levisagedececrétindeShawMatthewssurgitdansmonespritetravivemontrouble.Peut-êtreparcequenousnenoussommespasditau revoir.Encorequecelan’aitaucune importance.Cen’estpascommesinousétionsuncouple,pourcommencer.Cen’estquedusexe,pasvrai?Etsitelestlecas,pourquoij’éprouveraislebesoindeprendredesesnouvelles?Del’appelerpourluidirequejesuisbienarrivée,quemamèrevabien,etluidonnerunedatederetourplusoumoinsprécise?Parcequejesuisuneidiotequiseretrouveaumilieudenullepart,avectrèspeud’espoirderetrouverunjourlacivilisation.—Çava,machérie?Lavoixbourruedemonpèreinterromptlecoursdemespenséesetjelèvelesyeuxpourlevoir

quim’observe,lefrontbarréd’unplisoucieux.Jeledévisageàmontouretjeconstatecombienilachangédepuismadernièrevisite.Sescheveuxrouxsontdeplusenplusclairsemésetilauraitbienbesoin de se tailler la barbe,mais sa large poitrine et sa grosse bedaine sont toujours lesmêmes.Mamanl’abiennourri,commetoujours.Commejenerépondspas, ilcontinuedemefixer.Ets’ilplisselespaupières,cen’estpasparcuriosité,maisparcequ’ilyvoitdemoinsenmoins.—Tout va bien, papa. Je suis juste un peu fatiguée. (Un bâillement arrive à point nommé et je

m’étire.)Jevoisquetuneportestoujourspasteslunettes.—Pfff,balaie-t-ild’ungeste.Çan’arienàfairesurunbateaudepêche,deslunettes.Lapreuve,la

dernièrepaireaglisséetesttombéedansl’eau.—Ellessonttombées,outulesasjetées?—Qu’est-cequeçachange?élude-t-il.Quelquepartaufonddel’eau,ilyasûrementunpoisson

quisebalademaintenantavec,etquisurveillenoscôtes,dit-ilavecunclind’œil.Jerismalgrémoi.Papaaledondefairepasserlaperteplusoumoinsaccidentelledeseslunettes

pourunecontributionpatriotique.DuffWhalenest têtuet il luttecontre l’âgede toutesonénergie.C’estpourcelaqu’ilcontinuedepêcheralorsqu’ildevraitprendresaretraite.Iljurequecelal’aideàrester jeune et en bonne santé. Il a probablement raison, mais jamais je ne lui dirais cela devantmaman.Commesielleavaitperçucettepensée–etelleenestsûrementcapable–,mamanremuedansson

sommeiletsoulèvesuffisammentlespaupièrespourquejevoielevertéclatantdesesyeux.J’aipeut-êtrehéritélescheveuxrouxetlecaractèredechiendemonpère,maisj’aireçudemamèrelesyeuxet l’obstination.Uneobstinationqui luiavalude finirà l’hôpitalavecune jambecassée,descôtesfracturéesetquelquesbleusetécorchures.Dieumerci,ç’auraitpuêtrepire.—Alors,l’endormie.Çava?luidemandé-jeenécartantunemèchedecheveuxgrisdesonvisage.—Cassidy,tueslà.Elle me fait un sourire de boxeur K.-O., les puissants analgésiques la forçant à un sommeil

réparateurpouraidersonorganismeàrécupérer.C’estunebonnechose,sinonAnnaWhalenseseraitdéjàlevéepourfairelesquarantekilomètresquilaséparentdeStoningtonafindes’occuperdesespensionnaires.—Tu sais, si tu tenais àme voir, il suffisait deme téléphoner pourme demander de venir. Tu

n’avaispasbesoinderecouriràdetellesextrémités.Ledemi-comamédicamenteuxnel’empêchepasdehausserunsourcilsarcastique.—Ahbon?Etçarecommence.

—Maman,nemeculpabilisepas,OK?Tusaisquejesuistrèsoccupée.—Oui,jesais.J’auraisvraimentpréféréqu’onnet’appellepas.Jevaisbien.Tudevraisretourner

enCalifornie avant demanquer à tout lemonde. Je nevoudrais pas quemonpetit accident soit lacause d’une catastrophe, genre un de tes clients qui n’a pas eu la bouteille d’eau minérale de samarquepréféréesurleplateaudetournaged’unepubpourDieusaitquoi.Bonsang,ellesaits’yprendre,maisjenevaispaslalaisserdresserlalistedemesmanquements

pourtenterd’esquiveruninterrogatoirebienmérité.Suruntondedéfi,jeluilance:—Ah,tuvasbien?Alors,tuesàl’hôpitalpourquoi?— Parce que vous êtes deux mères poules incapables de se rendre compte que les médecins

essaientdetirerlemaximumdemamutuelle.Jepeuxrentrer,maintenant?J’éclatederire.—Iln’enestabsolumentpasquestion.—Ahbon,etpourquoi?— Parce que tu as des problèmes de tension, ce que tu savais avant de te lancer dans ta petite

équipée. Les problèmes en question ayant provoqué l’étourdissement qui a causé ta chute. Et c’estpourcelaquelesmédecinsveulenttegarderunenuitdeplusenobservation.Laréponseneconvientguèreàmamère.Jem’yattendaisunpeu,aussi.—Pasquestionquejeresteunenuitdeplus.Jedoism’occuperdemespensionnaires.Ellerepousselescouverturescommepourselever,maisjel’arrête.—Oh,non.Abbys’enoccupetrèsbiensanstoi,etjevaisluidonnerunpetitcoupdemain.Dèsque

lemédecinm’auraexpliquépourquoiletraitementpourlatensionqu’ilt’aprescritnedonnerien.Mamanbaisselesyeuxsurlelitetentreprenddelisserdesplisimaginaires.Sijen’avaispasdéjà

perçusaculpabilité,laréactiondepapamel’auraittoutdesuitefaitcomprendre.Illitenellecommedansunlivreouvert.—Fichueentêtée.Tun’aspaspristontraitement,c’estça?Illèvelesbrasaucielcommes’ilconnaissaitdéjàlaréponse.Ellehausselesépaules.—Pasaussirégulièrementquej’auraisdû.—Pourquoi?demandé-je.Elleprendunairpenaudetjetteuncoupd’œilàmonpère.—Parcequ’onnepeutpaspayernos traitementsà tous lesdeuxetcontinuerdetenir lebedand

breakfast.—Oh,monDieu. Tu plaisantes, j’espère ? (Atterrée, jeme tourne versmon père.) Tu étais au

courant?—Évidemmentquenon!s’indigne-t-il.Tucroisquejel’auraislaisséefaire,sinon?Jenevoulaispasinsultermonpère,maislemalestfait.—Excuse-moi.Biensûrquejesaisquetuauraisréagi.Pourquoitun’asriendit,maman?— Parce que je ne voulais pas que ça se sache. C’est ma faute. Cette fichue crise a affecté le

tourismeàStoningtonetnousdevonsgarderlamaisonenétatdefonctionnerparcequecen’estpasseulementunesourcederevenus,maisletoitsouslequelonvit.Alors,j’aifaitdeséconomies,jemesuisditqu’enprenantmonmédicamentunjoursurdeux,ceneseraitpastropgraveetquejepourraisfairedurerl’ordonnancejusqu’àcequelasituations’améliore.

—Ah,c’estcequetut’esdit?grommellepapadepuissonfauteuil.Ilesttoutrouge,lesoreillesécarlates,etjemedemandesiluiaussinefaitpasdel’hypertension.—Ilfautquejetedemandesituprendstontraitementaussi,papa?Ilbalaielaquestiond’ungesteetpréfèreseconcentrersurmaman.—Tut’esditaussiquetupourraisgrimperàl’échelle,hein?Regardeoùtuasatterri.—Ilfallaitbienquequelqu’unnettoielesgouttières,répliquemaman.—Jet’avaispromisquejeleferaisenrentrant,répondpapa,deplusenplusrouge.—Mmm…Commetuasréparél’antenne?Lesgensn’ontpasenviedeséjournerdansunbedand

breakfastoùonnecaptepascorrectementlatélévision.—Pourquoiturefusesd’admettrequetuesmontéelà-hautparcequetuvoulaisregardertesfichus

programmes?C’estpourçaquetun’aspasvouluattendre.Tuasfailliteromprelecoujustepourça.Jefermelesyeux,conscientequepapaaraison,maisenespérantlecontraire.—Maman,jet’enprie,dis-moiquecen’estpaspourçaquetuesmontée.Inutiled’attendresaréponse.Elleestobsédéeparsesfeuilletonsàl’eauderose.Stoningtonestà

elleseuleungigantesquefeuilleton,sanslescaméras,lesprojecteursetlespreneursdeson.Mêmesije soupçonnecertainsdenosconcitoyensdeposséder cegenred’équipementpour surveiller leursvoisins.Mamansetourneversmoietl’ecchymosesursajouemefaitfrémir.S’illuiétaitarrivéquelque

chose…—Oui,bon,concède-t-elledansunsoupir.Tusaisbien…D’unepierredeuxcoups,quoi…—Oh,bonsang,maman.Jen’enrevienspas!Moncrid’exaspérationestinterrompuparunevoixquis’élèvedepuisleseuil.—C’estquoi,l’expression,déjà?C’estl’hôpitalquisemoquedelacharité?Jereconnaiscettevoix.Dugenrerocailleuxetrauqueàcausedutabac,qu’onnepeutniimiterni

contrefaire,etc’estsaforcetranquillequim’aréconfortéedurantlespériodeslesplusdifficilesdemavie.Jefermelesyeuxpourreprendremoncalmeavantdelesrouvriretdemeretourner.Il est appuyé contre le chambranle de la porte, les mains enfoncées dans les poches d’un jean

délavétellementmoulantqu’ilfaitpartiedubonhomme.Lesjambescroisées,ilportedeschaussuresdechantieruséesparunmétierqu’ilfaitdepuistoujours.SachemisebleumarineestouvertesurunT-shirtnoirmoulantdespectorauxobtenuspardesannéespasséesàcharrierlescasiersàhomards,etnonà leverdespoidsdansune salledegym.Et les ridesaucoinde sesyeuxont étécreuséesparpresquetrenteannéesdesoleiletdefrancssourires.—Casey…J’expirelittéralementsurladernièresyllabe,commesimespoumonssevidaiententièrement,etje

restesanssouffle.Moncœurs’emballeettambourinecommes’ilvoulaits’échapperdemapoitrineetsejeterdanssesbras.Caseymefaitunsourireducoindeslèvresaccompagnéd’unclind’œilquimerendtoutechose.—Qu’est-cequetudeviens,machérie?Seigneur, il y a quelque chose chez Casey Michaels qui me fait systématiquement chavirer. Je

redeviensaussitôtunegamine.C’estuneémotioninvolontairequ’aucunautrehommen’estcapabledeprovoquerenmoi.Celanemedéplaîtpas,maisjenepeuxpasdirequecelameplaisenonplus.

C’était sympa,mignonmêmepeut-être,quandonétaitenfants,mais jesuisuneadulteet jepréfèreconserverunminimumdecontrôlesurmesréactionsenprésenced’untiers.Àen jugerpar lavitesseà laquelle jevoledans sesbrasavantquemonespritn’ait le tempsde

réfléchir,ilestévidentquelecontrôleenquestionmefaitcruellementdéfaut.Caseyme rattrape – comme toujours – et j’enfouismon visage dans son cou en respirant cette

odeurfamilièred’airmarin,d’essenceetdelabeurqu’onnepeutenfermerdansunflaconmaisquimerappelletoujoursmonfoyer.Jesuisensécurité,mêmesijenesaispastrèsbienpourquoijesuisàcepointsoulagéedem’enrendrecompte.Dequoiai-jebesoind’êtreprotégée?La question que je lui pose est étouffée parmon étreinte : je refuse de le lâcher de peur qu’il

disparaisse.Caseyéclatederireetsedégagegentiment.—Jenesaispascequetuviensdemedire,maislaréponseestoui,machérie.Commetoujours.—C’estvrai?Tuvoudrasbienportermesenfants?Jeposelaquestionenmimantuntonpleind’espoirqueCaseyreconnaîtrasanslemoindredoute,

carilmecomprendmieuxquepersonne.Monplusvieiletpluscherami,quisetrouvejustementêtreégalementl’hommedemesrêvesque

j’aidécidédesacrifieràmacarrière,sedétourneavecunfrisson.—Mince, çava fairemalquand jedevrai accoucher,dit-ild’unair songeur.Mais tuenvaux la

peine.Nouséclatonsderireenchœuravecmesparents.— Je me sens déjà tellement mieux en vous voyant tous les deux vous comporter comme des

imbéciles,ditmamèreenseredressant.—Bienessayé,rétorqué-je,pasdupe.—Casey,empêche-lad’êtreaussiméchanteavecsamère,gémitmaman.Caseylèvelesbrasaucieletvalarejoindre.—Voussavezbienqu’elleferaexactementlecontrairedecequejeluidirai,Anna.Jel’aicompris

enpremièreannéedelycéequandj’aiessayédeladissuaderderejoindrel’équipedefootball.Ellen’écoutepas,ellealatêtedure.Ilsebaissepourl’embrassersurlajoue.—Pasassezdure.Elleafiniassomméelepremierjourd’entraînement.Celaluiaapprisànepas

setenircommeunedame.Jet’enveux,Duff,dit-elleentendantlebrasverssonmari.Tul’astoujoursmalmenéeettraitéecommelefilsquetun’asjamaiseu.—Qu’est-ce que tu voulais que je fasse, enfin ? Elle préférait le football plutôt que jouer à la

poupéeouàladînette.Etçanemegênaitpas.Regarde-la,maintenant.Ellereprésentelesmeilleursdesmeilleurs,etjepeuxavoirtouslesautographesquejeveux.Ilmefaitunpetitsignedetêtepourm’indiquercombienilestfierdemoi.Jesaisbienqu’ill’est.

Mesparentsneperdentjamaisuneoccasiondemeledire.Jegémis,lassed’êtresouslefeudesprojecteurs.—Çasuffit,maintenant.Qu’est-cequetufaisici,Casey?—Tuesmapréférée,Cass.Oùtuvoudraisquejesois?Toutes les fillesde lavilleconvoitentCaseyMichaelsetc’estmoisapréférée.N’importequelle

fillesesentàpartavecunpareilstatut.Maiscommenousnesommesplusensemble,jeneveuxpasqu’ilseméprenne.—Ah, c’est gentil,mais tu aurais pume voir en ville quandmaman sera sortie, dans quelques

jours.Étant donné que je ne veux pas qu’il se méprenne, je ne peux pas lui dire à quel point je suis

heureusequ’ilsoitlàencetinstant.Cen’estpasriendesavoirqueleportesttoutprès,quandvousvoussentezcommeunbateausedirigeantdroitsurdesécueilsdansunocéandémonté.Mercibien,ShawMatthews.Papas’enmêleetmeramèneàlaquestiondumoment.—Tunevaspasrestericicesoir.Ilvaterameneràlamaison.—ÀSanDiego?demandé-je,interloquée.Je suis bien certaine de ne pas avoir pris un aller-retour. J’étais prête au pire, comme tout le

monde,maismamanestunedureàcuire.Malgrétout,ellevaêtreclouéeaulitunmomentetilfautquejeresteunpeuletempsdel’aider.— On n’a qu’une seule maison, et la tienne n’est pas San Diego, ma petite. (Papa se lève

péniblement, ses articulations grinçant presque autant que le fauteuil.) C’est Stonington, chez toi.Depuis toujours, et pour toujours. Je suis tout à fait capable de rester ici et dem’occuper demafemme,maisjen’aipasassezdepatiencepourêtreàladispositiond’unepoignéed’inconnusquiontbesoinqu’onramassederrièreeux.C’esttoiquivaslefaireetmoi,jelaramèneraiàlamaisonquandelleseraremise.Ouquandilsnousficherontdehorsparcequ’elleleurmèneunevied’enfer.—DuffWhalen!s’indignemaman.—Tuvois?Çaadéjàcommencé.Jenesuispas trèsà l’aisede laissermamanqui semblesi faible,mais jesaisqu’Abbyvaavoir

besoin d’un coup de main. C’est mon devoir de fille de prendre les commandes jusqu’à ce quemaman soit denouveau sur pied, et je nevais pas la laisser tomber.Enplus, ce serait absolumentinutiledemedisputeravecmonpère.Etdetoutefaçon,jesuistropépuiséepourcela.Caseymesoulèvelementonetsebaisseàmahauteur.— Tu as l’air fatigué, dit-il, capable comme toujours de lire dans mes pensées comme si nos

cerveauxétaientreliéspardescâbles.(Puisilmefaitlesourirequisignifiequ’ilsaitquej’aibesoinqu’onvienneàmonsecours,mêmesi jene suis rentréequedepuispeude temps.)Allez,viens, jet’emmène.Jeluirendssonsourire.Parcequec’estmonpreuxchevalier.Qu’ilfaittoujourspasserlesautres

avantlui-même.Parcequec’estmonCaseyàmoi.Parcequecen’estpasShawMatthews.Lesquaranteminutesde trajetpourrentreràStoningtonmeparaissentdurer ledouble.Peut-être

parcequ’avecchaquekilomètrequinousrapprochedenotredestination,j’ail’impressionquenousremontonsdans le temps.Moi,dumoins.Stoningtonestmonpassé.CaseyMichaelsestmonpassé.Pourtant,ilestassisàmagauche,unvideentrenous,commesiquelqu’und’autreoccupaitl’espaceetnous séparait. Je me sens submergée par les émotions ; des habitudes, des sentiments anciens etfamiliersrefontsurface.L’ancienneCassidyauraittendulamainpar-dessuscevidepourprendrelasienne.Elleauraitprobablementmêmeglissélelongdusiègepourseblottiràcôtédeluietpasserlebras sur son épaule. Cela aurait été facile.Aussi simple que respirer et tout aussi naturel. Un peucomme se glisser dans son jean préféré et un sweat-shirt trop grand après une longue journée

stressante.EtDieusaitquejesuistentéedelefaire.MaisjenesuispluscetteCassidy-là.Cellequejesuisdevenuesentlatensiondansl’airetc’estsi

inconfortablequejemesenspresqueoppressée,commesi jepartageaisunespaceconfinéavecuninconnu.Commentest-cepossiblealorsquel’inconnuenquestionmeconnaîtmieuxquepersonneaumonde?Caseyetmoiavonsgrandiensemble.Nosparentsétaientdegrandsamis.Ilsonttoutfaitensemble.

Nousaussi.Decamaradesdejeuquiriaient,pleuraientetsebagarraient–autantentreeuxquepoursedéfendremutuellement–àadosamoureuxquiont toutexploréensemble.Ilconnaîtmessecrets lesplus intimes et moi ses peurs les plus obscures. Nos vies sont plus entrelacées que les racinesnoueusesd’unchênecentenaire,etleurlientoutaussipuissant.Un frisson me parcourt. Je sais qu’il me dévisage, mais pour une raison inconnue, je suis

paralysée, incapable de rien faire à part fixer la route droit devant moi. Peut-être que c’est unmécanismededéfense,untourquemejouemoncerveaupourmerendreservice;pourmeforceràtenir bon et regarder devantmoi au lieu deme retourner.Après tout,Casey est l’arme secrète deStonington.—Bon,tuvasmedirecequinevapasoubienjevaisdevoirtechatouillerpourquetucrachesle

morceau?demandeCaseyen tendant lebraspar-dessus levideque jen’aipasosé traverserpourm’enfoncerunindexentrelescôtes.Je frissonne engloussant, pluspour lui faireplaisir qu’autre chose.C’est bien legenredemon

petit copain d’enfance d’user d’astuces idiotes pour détendre l’atmosphère et éviter ce qui varapidementdevenirunesituationinconfortable.—Arrête,dis-jeensouriantetenrepoussantsamain.Commentça,«cequinevapas»?Cen’est

pasévident?Mamanestàl’hôpital.—Et?—Etjemefaisdusoucipourelle.—Conneries,répond-illaconiquement.—Quoi,conneries?—Tuasbienvuqu’elleallaitbien.—Elleneprendpassontraitement.Celametracassequ’ilsn’aientpasassezd’argentpourçaet

qu’ilsnem’aientpasdemandémonaide.—Cass, tu espartiedepuis tellement longtempsque tuasoubliéàquelpoint les insulaires sont

fiers?Enfin,machérie,tuesdesnôtres,ettuesprobablementlaplusentêtée.Qu’est-cequetuauraisfaitàlaplacedetamère?C’estjusteetilaraison,maisjenesuispasobligéed’apprécierpourautant.—J’auraisessayédem’ensortirtouteseule,moiaussi,j’imagine.—Oh,queoui,dit-ilavecunsourireconfiant.(Puis ilserembrunitetmeregarde, jetteuncoup

d’œilàlarouteetmedévisageànouveau.)Ilyaautrechosequicloche.Qu’est-cequisepassedanscettejoliepetitetête?—Riendutout.Pour une raison inconnue, la question ramène immédiatement le souvenir du visage deShaw la

dernièrefoisquejel’aivu.Dansunappartementvidequ’ilhabiteuniquementpoursauvegarderlesapparences.Je l’ai interrogésursaviesecrète,unevieque j’étaisbiendécidéeàdévoilerà tout le

monde,mais jeme suis sentie coupable d’avoir rouvert une blessure.Malgré tout son cinéma, cen’estrienmoinsqu’unimposteur.Ilfaitcroireàtousqu’ilestquelqu’und’autre:unhommequis’estfaittoutseul,quiaassezd’argentpourflamber,uneinfluencesanségaleetunetellelistedepeoplecommeamisetclientsqu’ilenestpresqueaussicélèbrequ’eux.En réalité,ShawMatthewsestungossedéfavoriséqui a été contraint à s’en sortirdans les rues

cruelles deSevenMile, au cœur deDetroit.Et qui n’a jamais connu l’amour de ses parents.C’esttristeettragique,mêmesicen’estpassafaute.Etmoiquil’aijugéenimaginantdeschosesquejen’avaispas ledroitd’imaginer.Jenesaisriendecethommequej’ai laisséuserdemoncorps–àplusieursreprises–,maissansluioffrirmoncœur.Etpendantquej’étaisoccupéeàbaiseravecluidans tous les coins possibles, mes parents souffraient de déboires financiers que j’ignoraistotalement.Oh,commeladonneusedeleçonstombedehaut.—Arrêtedeculpabiliser,ditCasey,quiadenouveauludansmespensées.Ducoup,jemedemandejusqu’oùilpeutlireenmoi.S’ilsavaittoutcequej’aifaitàShaw,toutce

quej’ailaisséShawmefaire,ilenauraitlecœurbrisé.J’incline la tête et je le regarde, essayant de deviner s’il est avec quelqu’un.Mais Casey est un

maîtreenmatièrededissimulation,quis’empressededétournerl’attentions’ilserendcomptequ’onessaiedelesonderalorsqu’iln’apasenviedesedévoiler.Sontrucdumomentestunautredesesfameux clins d’œil qui font se pâmer les filles de l’île. Avec son sourire sexy, c’est un mélangemortelpourn’importequelmembredusexeféminin.Etpeut-êtrepasuniquementlesêtreshumains.— C’est le sourire que tu utilises pour que tous les homards femelles se précipitent dans tes

casiers?Danslecoin,onassurequelesuccèsdeCaseydanssonmétierestdûàlaséductionqu’ilexerce

surlescrustacésdusexefaible.Iléclatederire.—Tevoilàrevenuedepuisàpeineunejournéeet tucommencesdéjààfairedesblagues,hein?

Qu’est-cequisepasse?Tuesjalouse?—Pasdutout.Maistuferaisbiendeprendregardeàleursgrossespinces.Jesuissûrequeçane

faitpasdebienàl’entrejambe.Àmoinsquecesoitlegenredetrucquitebranche.Nous nousmettons à rire en chœur, et celame fait un bien fou.Normal. Pour la première fois

depuismonarrivée,jesuisdenouveauinsouciante.C’estmonCaseyàmoi.Ilestlaseulepersonnequisoitcapabledemecalmer.Etaveclui,çaal’airtellementfacile,alorsquejesaistrèsbienqueçanel’estpas.—Peut-êtreque tudevraisen ramenerunenCalifornie,entrerendoucechez tonami,ceShaw,

pendantqu’ildort,etluiglissersouslesdraps.Çaluiapprendraitàsefrotteràtoi,hein?Etd’unseulcoup,mapetitebulleroseéclateet jemeretrouvemalà l’aise.J’aibeauessayerde

chasser ce bonhommedemes pensées, impossible de lui échapper.MêmeCasey, que je considèrecommemonrefuge,prononcesonnometfaitremonterdestasdedoutesàlasurface.Qu’est-cequ’ilfaitpendantmonabsence?Quiilsefait,plutôt?Probablementuneoudeuxidiotesdesplagesauxlèvresbotoxées,auxongles fuchsiaetauxcheveuxblondsdécolorés, le tout surunyachtqui luiacoûtéun ande salaire, histoired’enmettreplein la vue à tout lemonde.Quel crétin superficiel etprétentieux!—Mince,machérie,maisqu’est-cequ’ilt’afait?

JemetourneetjevoisCaseyquifixemespoingsserréssurmesgenoux.Gênéeparmaréaction,jemedétendsetjeposelesmainssurlesiège.—Excuse-moi.Cen’estrien.—Çan’apasl’airderien,d’aprèscequejevois.—C’estShawquiaeuleposted’associé,avoué-je.(Cen’estpastoutelavérité,maissuffisamment

prochepourquejenemesentepascoupable.)Jedoisluienvouloirunpeu,jepense.—Oh,zut.Désoléd’apprendreça.Jesaisàquelpointtuvoulaisleposte.Oui, je le voulais sacrément. D’après Shaw, suffisamment pour coucher et parvenir àmes fins.

Mêmesicen’estpasdutoutcequis’estpasséetquejen’enaijamaiseul’intention.J’aifaitbienpire.J’aicouchéavecShaw.Àmaintesreprises.Etquejesoisprêteàl’admettreoupas,j’aicommencéàavoirdel’affectionpourlui.Peut-êtreunpetitpeutrop.MonDieu,commentj’aipuêtreaussiidiote?J’aidûdirecelaàhautevoix,carCaseymeprendlamain,mefaisantfrissonnerpartout.—Tueslafillelaplusintelligentequejeconnaisse,Cass.Peuimportecequis’estpassé,jesuis

sûrquetunepouvaispasleprévoir,sinontuneteseraispaslaisséefaire.Tuestropfinepourça.Jenepeuxpasmerésoudreà luidire lavérité, luiavouerqueDenverRockfordm’avaitchoisie

pouragentetquej’avaisremportéleposte,maisquejen’aipaspuacceptercettevictoireparcequej’avaisétérappeléeàStonington.MêmesiCaseynepeutrienyfaire,jesaisqu’ilconsidéreraitquec’estunefautedesapart.Ils’esttoujoursconsidérécommeresponsabledemoi.Jeposelatêtecontrelavitreglacée.Seigneur,quejesuisfatiguée!—Cen’estpastout.Balancelereste,machérie.J’ailatêtesecouéeparlescahots.—C’estjusteque…Çan’aplusd’importance.—Jesuisdésolédedevoirteledire,machérie,maisj’ail’impressionquesi.NouscommençonsladescenteversStoningtonetlanostalgies’emparedemoi.Lanostalgieetla

claustrophobie.—Non,dutout.ShawMatthewsn’estplusunproblèmepourmoi.J’aidessoucisplusimportants,

commeremettremamansurpiedpourpouvoirrentrer.—MabonnevieilleCassidy.Toujoursentraindefuir.Ilritgentiment,maisjesenslepoidsdecetteréflexion.—Jen’aipas fui,marmonné-je,car jen’aivraimentpasenviederecommencer laconversation

quenousavonsdéjàeuemillefois.Devinantmonhumeur,Caseychangebrusquementdesujet.Dieumerci.—Figure-toiqu’onaunecélébritéenville,plastronne-t-ilavecunimmensesourirebéat.Jamaisjen’auraisimaginéCaseyenfan.Jemeraclelagorgepoursous-entendre:«Maisoui,c’estça!»—Trèsdrôle.LescélébritésvontenvacancesdansdesendroitscommeAspenouBora-Bora,pas

dansleMaine.—Ellesyviennentquandellessontécrivainsetqu’ellesveulentterminerunlivreoùilestquestion

d’unpêcheurdehomardssexyenquêted’amour,explique-t-ilenbougeantlessourcils.

—Ahoui?Ehbien,elles’esttrompéed’endroit,dis-jeenriant.—Hé!s’indigneCasey,unpeuvexé.Jepeuxêtresexy.IlgonflesespectorauxcommeTheRock,etjenepeuxm’empêcherderiredeplusbelle.C’estmonCaseyàmoi.MonDieu,commeilm’amanqué.

3

Shaw

Jesuistellementcrevéquejenemerappellepasletempsquej’aipasséàdormir.C’estcettetrèslonguetraverséedupaysquim’aépuisé,certes,maislelitincroyablementmoelleuxquej’aitrouvéenmeréveillantn’apasarrangéleschoses.Pasplusqueladélicatemélodiedessirènesdebateaux,desvaguesetdescrisd’oiseauxquifiltrepar lapetitefenêtredemachambre.Unechambrequejen’aimême pas eu le temps de visiter avant dem’affaler la tête la première sur le lit… je ne saiscombiend’heuresplustôt.Je parviens à tendre le bras jusqu’à la table de chevet pour tourner le réveil vers moi.Merde.

10 heures. J’ai sombré pendant plus de douze heures. Je laisse lourdement retombermon bras etrefermelesyeuxavecl’enviederefaireuntourd’horloge,maisj’aiunvolàattraperetunesacréerouteà faire avantd’arriver à l’aéroport– etpasquestiondeme lancer tantque je n’aurai pas pucoincerunecertaineCassidyWhalenentrequatre-z-yeux.Jeme hisse hors du lit en gémissant, m’étire et traverse la chambre en traînant les pieds pour

débranchermontéléphonedesonchargeuretvérifiermesmessages.Bonsang,j’avaisoubliéqu’onne capte rien, ici. Heureusement, grâce au wifi, je peux demander par iMessage à Ben mesinformations de vol, qu’il aurait déjà dûm’envoyer, soit dit en passant. Et après quoi, je file à ladouche.En entendant mon téléphone biper, j’abandonne à regret les délices du jet d’eau et traverse de

nouveaulachambre,nucommeunveretruisselant,pourtrouverunecopied’écrandumessageavectouteslesinfosdevolqueBenm’avaitdéjàenvoyées,commeprévu.Saufquejenel’aijamaisreçu,allez savoir pourquoi.Et que j’ai déjàmanquémon avion. Jeme suis comporté commeun crétin,c’étaitsûr.Jeluirépondspardesexcuses,cequejefaisrarement,etluidemandedenepasprendrederendez-voustantquejenesaispasquandjepourrairegagnerl’aéroport.Jen’aipasencoreparléàCassidy,etiln’estpasquestionquejem’enailleavant.Ilfautdéjàquejelatrouve.Lavé,rasédeprès,habillé,jemesensdenouveaupresqueprésentable.J’aimêmelepasguilleret

enmerendantcomptequejebénéficied’uneffetdesurprise.Cassidyn’imaginepasquejesuis là,danssavillenatale,pilesous le toitde lamaisonoùelleagrandi.Jedoisavouerquecelamefaitbander,cequiindiquequejen’aipasseulementenviedelavoir.Jedescendsl’escalierattiréparuneodeurappétissantedecookiestoutchauds.Jesuisleseffluves

sucrés jusqu’à leur source. Les marches de bois qui grincent sous mon poids étouffent lesgargouillementsdemonventre.Enbasdel’escalier,jetrouvesurmagaucheunevastecuisine,lumineuseetaccueillante,oùtout

estblancavecdelargesfenêtresencadréesderideauxàfleursbleuetjaune.Lesplansdetravailsontdu même bleu que les tabourets qui font cercle autour du bar occupant le centre. En fredonnantjoyeusement,unepetitedamerondeletteestoccupéeàenleverdescookiesauchocolatd’uneplaquedecuissonpourleslaisserrefroidir.Quelquechosedanscettescènem’interpelleetjeprendsletempsde tout absorber en me répétant que j’aurais préféré avoir cette inconnue pour mère plutôt quel’alcooliquequim’afaitnaîtreetm’aensuitelaissémedébrouillertoutseul.—Oh,jenem’étaispasrenducomptedevotreprésence,ditladameens’essuyantlesmainssur

sontablier.(Sescheveuxchâtainsdébordentdesonchignonetquelquesbouclesrebellesquisesontéchappéesencadrentsondouxvisagerond.Elleenrepousseunesursonoreilleetlaisseunetraînéedefarinesursapeauridéecommeunepeinturedeguerresurlevisaged’unesquaw.)Jenesaispassivous vous souvenez, mais c’est moi qui vous ai accueilli hier soir. Je suis Abby. C’est moi quim’occupe de tout ici pour lemoment. Vous devezmourir de faim. (Unemain sur la hanche, elles’appuieaucomptoir.)Normalement, j’auraisdûappelervotrechambrepourvousprévenirque leservicedupetitdéjeunerallaitêtreterminé,maisjenevoulaispasprendrelerisquedevousréveiller.Vousaviezl’airtellementfatiguéquandvousêtesarrivé.—C’estvrai?Sachantdansquelétatj’étais,jenesaispastroppourquoijeposelaquestion.—Ehbien,commevousvousêtes laissé tombersur le lit etmisà ronfleràpeineentrédans la

chambre, je dirais que oui. (Elle se met à rire et me prend par le bras pour me conduire à untabouret.)Asseyez-vous.Jevaisvouspréparerquelquechose.Vousvoulezdesœufsaubaconouunsandwichàladinde?Jeluifaisunsourire,maisc’estmoiquisuissouslecharme.—N’importe,dumomentquej’aiuncookieendessert.—Alors,ceseralesandwich,dit-elle.(Ellegagneleréfrigérateuretensortlenécessaire,puiselle

poseungril sur lacuisinièreetcommenceàs’affairer.)Vousnem’avezpasdit sivousétiezvenupourraisonsprofessionnellesoupourdesvacancesnicombiendetempsvouscomptiezrester.C’estapparemmentunequestionàlaquelleelleattenduneréponse.Maisquedois-jeluidire?Si

c’est lamèredeCassidy, elle risqueraitdeprévenirmacibledemaprésenceavantque j’aie eu letempsdel’affronter.—Je…euh…jesuislàpourm’occuperd’uneaffairepersonnellequipeutavoirdesrépercussions

professionnelles, en fait. (C’est la vérité,même si onpeut aussi voir les chosesdans l’autre sens.)J’espèrepouvoirrepartiraujourd’hui.Etpourm’enassurer,jesorsmonportable,prêtàappelerCassidypoursavoiroùelleest.—Oh,monpetit,sivousessayezdejoindrequelqu’unendehorsdel’île,vousferiezmieuxdele

faireàl’ancienne,dit-elleenmedésignantletéléphonefixeaccrochéaumur.Sansblague?Onentrouveencore?— La ville a fait installer le wifi l’année dernière, mais ça cafouille encore un peu et il faut

renonceràcapter,saufsionmonteenhautde lacolline.Maisvousavezune lignefixedansvotrechambre.Ilvavousfalloirunecartepourappelerlecontinent,maisvouspouvezenacheteruneenville.

Onfabriqueencoredescartestéléphoniques?Jenem’imagineplusêtredansunmondeparallèleoudansunépisodedeLaQuatrièmeDimension. Je suismaintenant convaincuque je suis remontédansletemps–saufquejen’aipasprisuneDeLoreanargentée,maisunepetiteYarisblanche.Uneassietteglissedevantmoiavecunsandwichbeurréettoastécoupéendeuxpourdévoilerune

montagnededindeetbaconruisselantedefromagefondu.Untasdefritesetdeuxgroscornichonsoccupent lerestede l’assiette.Encommandantcesandwich, jepensaisqueceseraitunmorceaudeviandesurdupainblancavecunetranchedefromageindustrieletunefinecouchedemayonnaise.Orcequ’onmesert,c’estunchef-d’œuvreculinaire,lerêvedetoutAméricainbonteint.Mespapillescommencentàfrétilleretjesalivedevantcedélice.Jesaisisunemoitiéàdeuxmainsenprenantbiengarded’éviterlefromagebrûlant,etjemordsdedans.—MonDieu,gémis-jequandunedélicatesensationvientcaressermonpalais.Abbyglousse,etc’esttoutàfaitadorable.Jemedemandesiellem’adopterait,ouaumoins,sije

pourrais l’adopter. Elle m’apporte un verre d’eau glacée avant de retourner à la cuisinière etd’entreprendredelanettoyer.Commejem’intéressedavantageausandwichqu’auverred’eau,jeprendsunedeuxièmeénorme

bouchée, comme si on risquait de me voler ma pitance si je ne me dépêchais pas. Le voleur leregretterait,celadit.—Vousavezunecharmantemaison.Elleme jetteundrôlede regard,sansdouteparceque jen’aipasattendupourparlerdeneplus

avoirlabouchepleine.Oui,c’estunevraiemaman.—Vousvoulezbienrépéter?J’avaleavantdecommettrelamêmeerreur.—Pardon.Jedisaisquevousaviezunecharmantemaison.Ellemefaitunsourireapprobateur,puiselleretourneàsonnettoyage,unetâchequ’elleapprécie,

apparemment.—Oh,ellen’estpasàmoi.ElleestàAnna.Jedonnejusteuncoupdemain.—Anna…Whalen?—Oui,comme indiquésur l’enseigne. (Elle rince legrilqu’ellea lavéà lamainet lepose sur

l’égouttoir.)MonThomasetmoi,onconnaîtAnnaetDuffdepuistoujours.Toutlemondeseconnaît,parici,àvraidire,maisnousquatre…Noussix,plutôt,onnepourraitpasêtreunefamilleplusuniesionpartageaitlemêmesang.—Six?Jesuisbonencalcul,maisjen’aicomptéquequatreprénoms.J’aimanquéquelquechose?—Oh,jeveuxdire,nosenfants.—Ah.Dontl’uneneserait-ellepasCassidyWhalen,parhasard?Elleseretourneenhaussantlessourcils.—VousconnaissezCassidyWhalen?—Eneffet.C’estlaraisondemavenueici.(Lavoyantinterloquée,jeprécise:)Noustravaillons

ensemble.—Jevois.Alors,vousêtesdeSanDiego,hein?—Ehbien, j’yhabiteet j’ytravaille,oui.(Jeterminelesandwichetrepoussel’assiette,qu’Abby

remplaceparuneautreavectroiscookies.)Vousnesauriezpasoùelleest,parhasard?Nousavonsquelquespetitesquestionsàrégleravantquejereparte.Lebruitd’ungrosmoteur s’élèvedans l’alléeet se rapprochede lamaisonavantde s’arrêter à

l’arrièredelamaison.Abbydéfaitsontablieretl’accroche.—Demandez,etilvousseradonné,déclare-t-elleavecunsourirecommunicatif.Aumême instant, laportes’ouvreet lacausedemesminivacances impromptues fait irruptionà

l’intérieur.—Abby!piailleCassidyensautantlittéralementdanslacuisinepourprendredanssesbrasmon

aimablehôtessesansremarquerous’inquiéterdemaprésence.Commeellemetourneledos,j’aiunevueimprenablesursesfessesmouléesdansunleggingnoir.

Jen’aipasl’habitudedelavoirdansdestenuesaussidécontractées,maisc’estsûrquejeseraiàfondpour les leggingsàpartirdemaintenant.Jen’aipasnonplus l’habitudedevoirses longs cheveuxrouxattachésenqueue-de-chevaletsonpulltropgrandestuneautresurprise.Elleesttellementsexyquej’enbandeàavoirmal.—Ah,Cass,tuestropmaigre,ditAbbyenreculantpourconfirmersapremièreimpression.Tout

çaàcausedecemodedeviecalifornienprétendumentsain.Letofuetleslégumes,cen’estpasdelanourriture.Maisnet’inquiètepas,jevaist’engraisserenunriendetemps.—Abby,si tucontinuesàfairecesfameuxcookiesauxpépitesdechocolatquiembaument,mes

fessesvontprendrecinqkilosrienqu’àlessentir.C’estlemomentoujamaisd’intervenir.—Etmoiquicroyaisquec’étaitlelegging.Cassidymanquedesauterauplafondenentendantmavoix.Quandelleseretourneetmevoitavec

monpetitsourirenarquois,ellepousseunjuronetporte lamainàsapoitrinecommepourretenirsoncœur.C’estmignondelavoirreculeretmanquerdetomber,rattrapéeinextremisparAbby.Jelui laisseunmomentpourrécupérer,cequiestfortmagnanimedemapart,etplusqu’ellene

mérite. Surtout étant donné qu’elle a Abby pour la réconforter. Pendant ce temps, je mange moncookieenfaisantlapetitemoueséductricequialedondefairetomberlesfemmesenpâmoisonendeuxsecondes.Apparemment,Cassidyyestinsensible,maisc’estmafaute.C’estdifficiledesesentirsexyquand

onestpriseaupiège.Saufsic’estlegenredetrucquivousbranche.Jeconnaisdesfemmescommeça.QuandCassidyfinitparretrouversavoix,elleestbientropassurée.—Qu’est-cequevousfaitesici,Matthews?Jesuistoutaussicalme.Aprèstout,jen’aiplusrienàcacher,maisondiraitquecen’estpaslecas

delaMiss.—Oh,jecroisquevouslesaveztrèsbien.Enrevanche,jenepourraispasendireautantdevous.Cassidy émet une série de bruits inarticulés qui n’ont aucun sens, mais à en juger par son

expression,c’estpeut-êtrequ’ellealebeccloué.Lavoirsetortillercommecelam’exciteauplushautpoint.— Qu’est-ce que vous avez tous les deux ? demande Abby comme une maman ourse prête à

défendresaprogéniture,mêmesijenesaispaslequeldenousdeuxellepréféreraitsecourir.

—Non,toutvabien,mentCassidyenarborantunsourirefaux.Shawetmoitravaillonsensemble.Jesuissurprisedelevoirarriverici…chezmoi…sansprévenir,enplus.Ilestévidentqu’ellenes’attendaitpasàmevoir,maisc’estlebutdelamanœuvre,non?— Je suis surpris de vous voir ici aussi… et pas à San Diego… sans prévenir, réponds-je,

moqueur.Commentsefait-ilquevousnesoyezpasàSanDiego?—Monpatron,mesamisetmesclientssaventpourquoi.Pourautantquejesache,ilssontlesseuls

àquijedoiveuneexplication.Enquoicelavousregarde,vous?—Nousavonsquelquespetiteschosesàrégler.Àmoinsquevousayezopportunémentoublié?—J’aidittoutcequej’avaisàdire.Iln’yarienàrégler.—Ahbon?rétorqué-je.Peut-êtrequenouspourrionsallerendiscuterentêteàtêtequelquepart.Cassidyjetteuncoupd’œilàAbbyavantderépondre.Elleal’airtropmalàl’aisepourquelqu’un

quiestcenséêtreinnocent.Ellecachemanifestementquelquechose.—Jenepeuxpas.JesuislàpourdonneruncoupdemainàAbby,alorsvousferiezprobablement

mieuxderetourneràSanDiego,aulieudemeharceler,espècedemalade.Abbybalaielaquestiond’ungeste,sansreleverlaremarquedésobligeanteàmonégard.—Sottises.Jesuistrèsbienici.Etpuis,qu’est-cequejeferaisàpartresterlesbrasballantsetme

fairedumouron?Aumoins, ici, j’ai l’impressiondeme rendreutile. (Elle s’emparede l’assietterestéedevantmoi,maisjeraflelederniercookiejusteàtemps,cequimevautunsourireapprobateuretattendri.J’aimevraimentbeaucoupAbby.Peut-êtrequejepourraislacacherdansmavalisepourl’emmenerendouce.)Etpuisçafaitunmomentquetun’espasrevenue.Tuassûrementbesoind’unpeudetempspourretrouvertesmarques.Houla.Sij’enjugeparl’expressionpeinéedeCassidy,cetteinnocenteremarqueafaitsacrément

mouche.Mapetitehôtesserondeletteayantl’airbientropgentillepourl’avoirfaitexprès,jedevinequec’estunesimplevéritéquiatouchélàoùçafaitmal.Ilyaclairementanguillesousroche,etbienquejesoiscurieux,ilvautmieuxquejemecontentederéglermesaffairesetdefilerd’ici.NonsansavoirsautéCassidyunedernièrefois,évidemment.C’estlàquelaportes’ouvreànouveausuruntypequim’évoqueunvaguesouveniretquivientse

poster auprès de Cassidy comme si elle lui appartenait. Si je ne savais pas déjà que cette île estremplie à ras bord de pêcheurs de homards, je jurerais qu’il a les jambes arquées par des annéespasséesàchevaldansunranchàdresserdesétalons.Jeneveuxpasdireparlàqu’ilalui-mêmel’aird’un étalon.Au contraire, il donne l’impression d’être à peine parvenu à lamaîtrise de la stationdeboutsurl’échelledel’évolution.Étantdonnéqu’ilalevisagemangéparunebarbedetroisjoursetqu’ilesttaillécommeunearmoireàglace,c’estpeut-êtrelefameuxchaînonmanquant.Samanièredefroncerlessourcilsenmeregardantconfirmemathéorie,maiscen’estpassuffisant.Sijepouvaisréussiràluifaireporteruneénormemassueetgrognerquelquesmotscomme«moifairefeu»,jel’amèneraisdirectaudépartementPréhistoireduSmithsonianMuseum.C’estalorsquetoutestbrusquementsuspendudanslapièce,assezlongtempspourquelasituation

change.Nous sommespassésde la junglepréhistoriqueàuneplainebrûlante et sauvage.Peut-êtrequec’estuninstinctprofondémentenfouienmoiquim’yforce,maisjemeredresseenbandantmesmusclescommeunprédateurfaceàunrivald’uneforceégale.Cassidysetiententrenouscommeuneantilopedanslasavane,figéesurplace.Quelquechosemeditqueleventvatourner.—C’estmescookies?grogneletype.Enfin,ilgrondeplusqu’ilnegrogne,maisjenesuispasbienloin.Bonsang,oncroiraitqu’ila

mangédescaillouxaupetitdéjeuner.Abbyluifaitunsourire.J’avouequecelamerendunpeujaloux.—Etvoilàmonpetitmonstredévoreurdecookies.(Ellesehaussesurlapointedespiedsetletire

parlecoljusqu’àcequ’ilsoitassezbaspourqu’elleluiposeunbaisersurlajoue.Qu’elleconclutavecunepetite tapeunpeutropferme,mais ila l’airhabitué.) Il fautpartager tescookiesavec lesclients,Casey.Nesoispasmesquin.Houla,attendez.Casey?J’aidéjàentenduceprénom.Pire,jel’aidéjàvu.Tatoué.Justeau-dessus

desdélicieusesfessesd’unefemmequej’aisautéerécemment.Laquellefermelesyeuxcommesiellevoulait remonter le tempseteffacercesdeuxsyllabesdu

scénarioavantderelancerlalecture.Oh,maisjevaism’amusercommeunfouavecça.Lapremièreimpressionétantsouventlabonne,ilfautquejemarquemonterritoire.Etlameilleuremanièred’yparvenir,encoreplusquelaforcebrute,c’estl’assurance.Jetraverselacuisinecommesij’étaischezmoi,tandisquelefameuxCaseymetoise,etjeviens

meplanterdevantlui.Aprèsquoi, jefaisunpasdeplus,pourfranchirlafrontièreinvisibledesonespacepersonnel,justepourvoirs’ilreculed’autant.Absolumentpas.Aulieudecela,ilredresselesépaulesetsepencheenavant.L’atmosphèresefaitlourde,chargéedetestostérone,etnoussommescommedeux lions rivaux faceà facequi rugissentpour savoir lequel sera le roi.Avecsapoitrinegonfléeetsesépaulessortiescommeuncobradressé,iltientbonetmeregardedroitdanslesyeux.Jesuisimpressionné,maispasintimidé.Lamainquejeluitendsavantqu’ilaitletempsderienfaireestlapremièrevictoiredanscequiva

sûrement être un concours pour savoir lequel a la plus grosse. Sa poignée demain fermeme faitcomprendresansunmotqu’ilrelèveledéfiquejeviensdeluilancer.—Casey,c’estça?Noussavonstousquej’aiparfaitemententendusonprénom,maisfaireminedenepasenêtresûr

estunemanièred’enminimiserl’importance.D’oùlerictussursonvisagemalrasé.— Ouais. Casey. (Il me lâche la main et croise les bras pour s’appuyer au mur et me faire

comprendrequ’ilnesesentpasmenacéparcetteattaque-surprise.Bellemanœuvredesapart.Jemedemandes’ilsaitquej’aisautésapetiteamie.)Etvous?Jesaisquoirépondre,évidemment.—Letypequiamangévoscookies.Etpoursoulignermonpropos,jetermineceluiquejesavouraissoussonnezetj’essuielesmiettes

surmesmains.—Etquis’apprêtaitàpartir,coupeCassidy.Jene luifaismêmepas l’aumôned’unregard.Paspourêtredésagréable,maisparcequequitter

desyeuxmonadversairereviendraitàluifairegagnerunpoint.—Voussavez…Jecroisquej’aichangéd’avis.Unpetitpeud’airmarinmeferaitleplusgrand

bien.—L’airmarinesttrèsrevigorant,approuveCasey.Çapourraitmêmevousfairepousserdespoils

surlapoitrine.Bienvu.— En fait, je me suis rendu compte que la plupart des femmes préfèrent les hommes glabres.

Partout.

Ilcomprendparfaitementdequoijeparle.—PascellesdeStonington,rétorque-t-ilavecunclind’œil.Jenepeuxm’empêcherdericaner.—Vousenêtessûr?demandé-jeavecunrapidecoupd’œilendirectiondeCassidy.Sonsourirepleind’assurancedisparaîtaussitôt,etilseraidit.Bravo!Jeremportedeuxpointsd’un

coupdanscematchquenousavonsdécidéde jouer.Onauraitdû leprévenirque je suisdugenrecompétitif.— CaseyMichaels, pas question de poursuivre cette conversation dans la cuisine, le morigène

Abby d’un ton qui nous force à nous redresser tous les deux. Cassidy, monte faire le lit dans lachambredenotrepensionnaire.Noustenonstoujoursunbedandbreakfast,tusais.Après,tupourrastereposerjusqu’audîner.—Non!répliqueCassidysivivementquetoutlemondesetourneverselle.(Elleessaiedeprendre

uneattitudenonchalanteetpoursuit:)Shawn’apasvraimentenviederester.IlabeaucoupdetravailàfairepourqueDenverintègreuneéquipeetsoitprêtpourcommencerl’entraînement.—Jepeuxtrèsbientoutfaired’ici.(JelaisseCaseyetvaislarejoindre.J’ail’intentiondenepas

bougerdelàpourqu’ellesoitleplusmalàl’aisepossibleduranttoutmonséjour.SanscompterquejeseraiunobstaclepourleChaînonmanquant.Jesuisvraimentunsalaud,desfois.JeregardeCaseydroitdans lesyeux tout enpassantunbras sur l’épauledeCassidy,histoirede revendiquerunpeumon bien. Elle se dégage brutalement, mais je recommence, parce que oui, elle est à moi, etqu’apparemment,Caseyn’estpasleseulquiabesoind’enêtreinformé.)Etpuisçaal’airtellementamusant,luidis-jeavantdeluichuchoteràl’oreille: tropdetravailetpasassezd’amusementrendShawtouttriste.Elle essaie de nouveau de se dégager, mais je résiste. Évidemment, comme cela ne plaît pas à

Cassidy,ellem’attrapelamainpourrepoussermonbras.Maisellenelalâchepasaprèsavoirréussisamanœuvre.Aulieudequoi,ellefaitunsourirepincéàAbbyetCaseyavantdeleurdéclarer:—Vousvoulezbiennousexcuser?NousavonsquelquespetiteschosesàdiscuterpourqueShaw

puisserepartir.Etsurce,ellem’entraînehorsdelacuisine.J’éclatederire,carc’estattendrissantdelavoir,aussiremontée,metireravecindignationversles

escaliers.—Pourquoivousêtessipressée,Cassie?Jeviensdevousdirequejecomptaisresterunpeu.—Certainementpas.Et, puis franchement, épargnez-moi lesCassie, dit-elle enme traînantdans

l’escalier,tâchequejeneluifacilitepasparticulièrement.Je me rejette en arrière, pas de tout mon poids, mais suffisamment pour que cela lui fasse de

l’exercice.—Oh,cen’estpascommeçaqu’onvousappelle?CassieetCasey,ça fait tellementgentilpetit

couple.Parcequec’estbiencequevousêtes,n’est-cepas?Elles’immobiliseetseretourne.C’estlàquejemerendscomptequenoussommesarrivésenhaut

de l’escaliermalgrémes tentatives de résistance. Elle est un peu essoufflée,mais sans lamoindregouttedesueur.Bonsang,etmoiquiaimeraistellementlavoirruisselerethaleterpourunetoutautreraison.Sanscompterqu’ilyaceleggingetcettepetitechattedontilfauts’occuper.En la voyant regarder de part et d’autre, je suis certain de lire dans ses pensées. Elle ne sait

absolumentpasquelleestmachambreetjesuistoutàfaitravidelaluimontrer.D’ungestevif, jel’attire contre ma poitrine et je la toise. Elle soutient mon regard avec ce halètement qui me faittournerlatêteetbander.Cettemanièredemedévisager,avecunriendedésespoirdanslesyeux.Ehbien,là,c’estlaCassidyquejeconnaisquandnoussommesseulselleetmoi.Elleaenviedemoitoutautantquemoid’elle.Etpeut-être…peut-êtrequ’ellen’attendqu’unechose,quejelapossède.Mes mains glissent sur ses fesses, qui sont encore plus fabuleuses au toucher qu’elles n’y

paraissaientdanscefichulegging,puisellesremontentlelongdesescuissesquej’empoignepourlahisseretlalaisserenroulerlesjambesautourdemeshanches.Etpuistoutsedéchaîne.Noslèvressecollent,nosdoigtss’emmêlentdansnoscheveuxetelleaspiremalangue.NomdeDieu,maisoùestmachambre,merde?

4

Cassidy

Ila l’odeurdeShawet legoûtdeCasey,àcausedescookiesd’Abby.Jemesurprendsàenfouirmon visage au plus profond de son cou, cherchant désespérément à respirer encore ce délicieuxparfumqu’exhalesoncorpscommeunesortedeconfiserieaddictive.Mesdoigtss’enroulentdanssescheveuxetjerefusedeleslâcher,malgrélesémotionscontradictoiresquimetraversentenconstatantcephénomèneaussinouveauquetroublant.Jedevraism’arrêter,maismesjambesseresserrentencoreautourdesatailletandisqueShawnous

entraînedans le couloir versunedestination inconnue. Jeme rendsd’ailleurs compteque celan’aaucuneimportancedumomentquej’yvaisaveclui.Aveclui,jesuisenterrainconnu.Etc’estcedontj’aibesoinencemoment.MonDieu,mais son sexe collé contremon bas-ventre est dur comme la pierre. Je ne peux pas

ignorercettebosseénormequifaitd’ailleurstoutpoursefaireremarquer.Etjen’aiqu’uneenvieentête:savourercettechairsalée,lasentirpesersurmalangueetlalécherd’unboutàl’autre.J’aidéjà commencéà réfléchir à lamanièredem’yprendrequandShaw franchit le seuil d’une

chambre–lasienne,j’imagine–etrefermelaported’uncoupdepied.Puisilmeplaquecontrelemur.—Qu’est-ceque…D’unemainsurmeslèvres,ilétouffemesprotestations.Puisilapprochesonvisagedumienetje

suiscondamnéeàmeperdredanslebleubrûlantdesesyeux.—Laferme,ordonne-t-ilsèchement,alorsquesonérectionpalpitantecontinued’indiqueràquel

pointilestexcité.Jesaliveàlapenséedel’engloutirtoutentieretdelesucer.Àfond.Comme jen’essaiepasd’échapperà son implacableétreinte, ilmepince la joueavantdeme la

caresser.—C’estcommeçaquejel’aime,murmure-t-il.Puis,sansdesserrersonétreinte,Shawsepencheenavantetenfouitsonvisagedansmoncou.La

douceurdeseslèvresglissesurmapeauetjefermelesyeux.Jesuispriseaupiègedemondésiretdesaprésenceenivrante.Jusqu’aumomentoùilplantesesdentsdansmachairdélicate.Celamemeten

rage,parcequej’aimeçaetqu’illesait.Sanscompterquesamainposéesurmabouchem’empêched’yenfournersonsexe.Etpuis,noussommeschezmoi,bonsang,ettoutlemondesaitquellessontlesrèglesdelamaison.

S’ilcherchelabagarre,ilval’avoir.Jel’empoigneparlescheveuxtoutenmedégageantdesamain.Maboucheestenfinlibre,maisd’unrictusfuribard,Shawmefaitcomprendrequecelaneluiplaîtpas et qu’il ne va pas se laisser faire bien longtemps. Ma mission n’étant qu’à moitié achevée,puisqu’ilfautencorequej’engloutissesabite,jedoismedépêcher.Sanslâchersescheveux,jelemaintiensenplacetoutendesserrantmesjambespourpouvoirme

laisserglissersurlesol.Shawnel’entendpasdecetteoreille.Ilcontinuedemeplaquercontrelemurdetoutsonpoids,avecunsourireaussisexyqu’agaçant,toutenessayantdeselibérer.Cequ’ilrisquederéussird’uninstantàl’autre,mêmeensacrifiantsacrinière.—Lâchez-moi,ordonné-jeenmecabrantetenessayantdemedégageràcoupsdepied.—S’ilvousplaît.—Pasquestion.—Alors,c’estmoiquivaisdirigerlamanœuvre.—Quellemanœuvre?D’un geste vif qui me prend au dépourvu, Shaw me laisse descendre, me rattrapant d’un bras

enrouléautourdemataille,letempsquejeretrouvemonéquilibre.Puisilmeplaquedenouveauaumur.—Cellequej’aientête.La lueurmauvaiseque jevoisdans son regardme fait comprendreque jeme suis jetéedans la

gueuleduloup.Nousallonsvoircela.—Nousn’allonsrienfairedutouttantquevousnem’aurezpasditcequevousêtesvenufaireici.Jediscelaenhaletantetd’unetoutepetitevoix,sibienquejenefaisguèreimpression.C’estsans

douteaussiquejesuisdécontenancéeparcequ’ils’estdenouveauattaquéàpleineboucheàmoncou.Enplus,ildescendàprésentdeplusenplusbasetseslèvresserefermentsurletétonqu’ilaréussiàtrouver alors qu’il était invisible sousmon pull,mon débardeur… etmon soutien-gorge. Et il nes’arrêtepaslà.Non:ilprendlapositionquejeconvoitais.Jeluienvoudraissijenesavaispasquelavantagejevaispouvoirenretirer.—Cequevousditesnetientpasdebout,étantdonnéquejesuisdéjàentraindelefaire.Pourquoi

vousneportiezjamaiscetrucjusqu’ici?Shaw,àgenouxdevantmoi,détaillemonlegging.Jesenssonhaleinebrûlanteentremescuisses

quandilvientyfourrersonmuseau.Jefermelesyeuxenessayantdemeconcentrer,puisjeluireposelaquestion:—Qu’est-cequevousvenezfaireici,Matthews?Lecoupde languehumideetbrûlantqu’ilm’assèneà traversces imbécilesdecollantssignema

perte.Mesgenouxflageolentsouslasensation,maisShawestlàpourmemaintenirdebout.Ilenfouitla têteentremescuisseset lorsqu’il entreprendde fairedesva-et-vientàpleinebouche toutenmetitillantdelalangueetenfrôlantmonclitorisduboutdesdents,jesuisélectriséeparunfrissonquiannonceunorgasmehorsducommun.Respire,Cassidy,respire.C’estalorsqueShawseretire–justeunpeu–moinspourm’accorderunsursisques’offrirunpeu

derépit.Sansmêmemeregarder,ilfinitparrépondre:—Cequejefaisici?Jevousdévore.Etvous,qu’est-cequevousfaitesici?Iln’attendpasderéponseetc’estaussibien.J’aiperdutoutecapacitédeformerlamoindrepensée

cohérente, et encoremoins d’enchaîner desmots et faire unephrase logique. Je préfèremenoyerdanslessensations,tandisquesesmainshabilespassentsurmeshanchespuismescuissesavantdeserefermersurmesfessesqu’ilpétritetmalaxedansseslargespaumescommes’ils’agissaitd’argilemalléable.Quand je sens sesdoigtsglisser sous la ceinturedemon legging, jemanqued’air. Jebaisse les

yeuxversmoncorpsdontchaqueterminaisonnerveuseestenalerte.Shaw,àgenoux,c’estunsacréspectacle.Tandisqu’ilentreprenddebaissermonlegging,jecontemplelestendonssaillantssursesavant-brasetjeperçoispratiquementlatensionquipalpiteentrenouscommeuneforcevitale.Sesgestessontd’unelenteuraffolante,et il faitexprèsdes’arrêter justeavantdefaireglisser le

mincejerseysurmeshanches.J’empoigne ce fichu legging pour l’enlever,mais ilm’en empêche,me refusant toute initiative.

Mauditsoit-il.Sesmâchoiressecrispent,mêmesijenesaispastrèsbiencequil’irrite.C’estluiquifaitdurerles

choses.Peut-êtrequ’ilestenréalitétoutaussipresséquemoi.—Pasavantquevousayezréponduàmaquestion,dit-ilenfourrantdenouveausonnezentremes

cuisses,m’ôtanttouteluciditédepensée.—Euh,jenemerappellepluscequec’était.—Alors,jevaisvouslareposer.J’essaie de me concentrer, vraiment, mais le délicat baiser le long de la couture de ce maudit

leggingnemefacilitepasleschoses.Shawpousseunlongsoupir.—Vousavezfui,dit-ilenenfonçantsesdoigtsdansmachair.Pourquoi?Àchaquerespiration,mestétonssontdeplusenplussensibles.Commesilepull tropgrandque

j’ai enfilé à la va-vite ce matin était devenu une tenue affriolante. Bon sang, aurait-on glissé del’ecstasydansmoncafépendantquej’avaisledostourné?—Jen’aipasfui.Qu’est-cequevousvouliezquejefuie?Il baisse mon legging d’un coup sec. Juste assez pour dénuder ma chatte, puis il s’arrête

brusquement.—Moi.Et sur cette unique syllabe, il empoigne le legging roulé surmes cuisses etme tire vers lui. Sa

bouchebrûlante fonce surmonclitoris– langue, lèvresetdentsœuvrentdeconcertpourme faireoublier toutcequej’aiapprisdepuismanaissanceà l’exceptiondecettesensationd’intenseplaisirqueseulunhommepeutaccorderàunefemme.Ils’arrêtetoutaussivitequ’ilacommencé.MonDieu,iljoueàladoucheécossaiseaveccequej’ai

deplusintime.Lapetitepartiedemoncerveauquinepensepasàengloutirsabitecalculeàprésentquellesmanœuvres furtives seront nécessaires pour le faire basculer en arrière afin que je puissem’asseoirsursonvisage.—Continuez,ordonne-t-il.Etvite.Jemedétachedumuretenfoncemesdoigtsdanssasplendidechevelure.Peut-êtremêmequejelui

donneunpetitcouppourl’encourageràpoursuivresursalancée.—Jenefuyaisriennipersonne.Jesuispartiepourretrouverquelquechose.—Casey?demande-t-ild’untonaigre.Peut-êtrequec’esttorduetpervers,maissajalousiem’exciteencoreplus.Ilnepeutpasmanquer

d’envoirlapreuvejustedevantsonnez.—Non, pas Casey.Mamère a eu un accident. J’ai dû rentrer à lamaison.Mes parents avaient

besoindemoi.—Peut-êtrequ’ilsn’étaientpaslesseuls.Dumoinsest-cecequ’ilmesemblel’avoirentendudire.Savoixestétouffée,carilalevisagede

nouveauenfouientremescuisses,cedont jenevaispasmeplaindre.Jeglissemamainentremonentrejambeetsonfrontetjepoussepourleforceràarrêtercequ’ilfait.—Qu’est-cequevousvenezdedire?Il redresse la tête, se frottant contre ma main comme un matou qui réclame une caresse bien

méritée.Puisunlégerbaisereffleuremapaume.—Caressez-vous.C’estàlafoisunordreetunedemande.—Cen’estpascequevousavezdit,réponds-jetoutenfourrantmesdoigtsentrelesplisdélicats.Hagard,boucheentrouverte, ilm’observe.Puissa langueapparaît furtivemententreses lèvreset

les humecte.Mes doigts tourbillonnent autour demon clitoris,mon plaisir décuplé de savoir queShawesttenuenhaleineparcesgestesexplicites.Maiscelaneluisuffitpasderegarder.Ilpasselecoudesousmacuisseetenfoncepar-derrièresonpouceenmoi.Jerejette la têteenarrièreaveclasensationd’êtreenfincombléeetc’estseulementenmemordantlajouequejeparvienstoutjusteàétouffermongémissement. Jeveux laisser leplaisirm’emporter,maisShaw,commed’habitude,ad’autresprojetsentête.Sa langue humide, chaude et veloutée qui s’insinue enmoime fait tout oublier.Mes doigts, sa

langue…c’estunbonheursansmélange.Del’autremain,jepoussesursanuquependantquesonpoucecontinuedes’activer.Jememords

la lèvre, ferme les yeux etm’abandonne à cette double sensation. Jeme fiche de savoir pourquoiShawestici.Jesuissimplementcontentequ’ilsoitlàetqu’ilmedonnecequis’annoncecommeunorgasmephénoménal.J’ai envied’écarter les jambespour lui offrir plusd’espace,mais cet imbécilede leggingm’en

empêche.Jesuisd’ailleurssûrequec’étaitdans l’intentiondeShaw.Jesuispriseaupiège,mais jen’échangeraisma place contre aucune autre.Mon orgasme continue demonter et je commence àondulersursonvisageetsonpouce…cherchantdésespérémentàaccentuerlasensationmêmesij’aicessédemecaresserpourlelaisserfaireseul.Puissondoigtpénètredansmoncul.Je jouis.Violemment.Mesdents serréesétouffentàpeinemongémissement. Jamais jenesaurai

comment j’aieu laprésenced’espritdem’efforcerderesterdiscrète,maisDieumerci, je l’aieue.PasShaw,enrevanche.Songémissementdesatisfactionaétéheureusementétouffé,maiscontresongré,grâceàmescuissesetmachatte.Quiabénéficiédesesvibrations,toutcommemonclitoris.Jejouis de nouveau en m’arc-boutant contre son visage et en attirant sa tête contre moi, tout enréussissantDieusaitcommentàondulerdeshanchesavecsonpouceetsonindextoujoursenfoncésenmoi.

Le feuquibouillonneenmoi s’est libéréet jem’empourpre, ruisselante.Lespulsationsdemonorgasme rivalisent avec les battements demon cœur et résonnent jusque dansmon crâne. Je suisétourdie,vaincueparunplaisirquinevapasdurer,maisdontjecompteprofiterlepluslongtempspossible.C’estalorsquejemerendscomptequelaseulechosequejedésire,encoreplusqu’unorgasme,

c’est d’avoir la bite de Shaw en bouche.Une fois de plus, il a réussi à parvenir à ses fins enmerefusantcequejeconvoite.Je refusedoncdecéder auplaisir.Bon sang, c’estpénible,mais celava l’être encorepluspour

l’ego de Shaw. Il va sûrement être déçu parma réactionmédiocre et cela va faire disparaître cetarrogantsourirequ’ilarboresursoncharmantvisage.J’aienviedesabite.Etjevaisl’avoir.Résolue,jeposemachaussuresursonépauleetétendsnonchalammentlajambe.Sonpouceetson

indexsontdélogésetjeréprimel’enviepressantedelesremettreàleurplace.Shawseretrouveaccroupietlèveversmoiunvisageinterloquéetinterrogateur.—Levez-vous,ordonné-jecalmement.Une grimace contracte sa bouche, puis il se relève et croise les bras, haussant un sourcil en

attendantquejelesurprenne.Je me décolle du mur, remonte mon legging pour lui signifier que les réjouissances sont

terminées,etjem’avanceverslui.D’unemainsurlanuquejeleforceàbaisserlatêteversmoietjel’embrassegoulûment.C’estmalanguequimènelebaletleforceàmesuivre,tandisquejeluimasselabiteàtraverssonpantalon.Pantelant,ilselaissefaire.Ilposesamainsur lamienneetappuiepourm’encouragerà lecaresserplusénergiquement.Sa

bitedureetépaissepalpitesousmesdoigts.Sansperdreuninstant,jenousretournepourquecesoitsontourd’êtreplaquécontrelemur.Illaisseéchapperungloussementamusé.J’aipeut-êtrelahautemainsurnotrepetit jeuet sur sabite,mais il ne fait aucundouteque c’est parcequeShawabienvoulumelaisserfaire.Jememets àgenouxetdéfais rapidement la ceinturede sonpantalonavantde libérer son sexe.

C’est avecun sourire satisfait que je vois enfin jaillir l’objet demonobsession. Jem’apprête à lesuceràfondquandils’emparedesabiteetl’écarte.Horsdemaportée.—Non,dit-ilquandjelèveversluidessourcilsfroncés.—Commentça,non?—Non,c’estunconceptassezrudimentaire.Qu’est-cequevousnecomprenezpasdanscemot?Ilsemordillelecoindelalèvreetrepousseunemècheéchappéedemaqueue-de-cheval.Qu’est-ce

quec’estqueceregardqu’ilmefait?Etpuis,bonsang,voilàqu’ilsecaresse.—Jevaisêtreclaire…Jeveuxavoirvotrebitedansmaboucheetvousvousrefusezvous-même

ceplaisir?—Vousvenezde ledire.C’estvousqui enavezenvie.Alors, àqui je refusequelquechose, en

définitive?Il me caresse les cheveux, d’une main adoratrice, et ce simple geste affectueux me surprend.

J’hésiteentremelaisserfaireetbattreenretraite.Maiscommesabiteest justedevantmoi, jemejettedessus.Shaw,plusrapide,mecoince la tête

contresacuisse.Sansmelaisserdécourager,jefaisuneautretentativeetdenouveau,Shawmerefuse

l’objetdemaconvoitise,l’écartantencoreplus.Jemerabatssurcequimereste.Avecunpeud’efforts,jeréussisàmepencherenavantetgoûteràlafriandisequisetrouvedevant

moi. Les noix de Shaw durcissent sous ma langue alors que je les lèche longuement etméthodiquement.Àdeuxmains,Shawmepousselatêted’uncôtéetsabitedel’autre.—Tss-tss!meréprimande-t-il.(J’ail’entrejambetrempé.Maispourquoijetrouvetoutçasexyàce

point?)Regardez-moi,ordonne-t-il.(J’obéis,mêmesijenepeuxtoujourspasbougerlatête.)Vousvousrappelezlafoisoùjevousaidemandédedire«s’ilvousplaît»etoùvousavezrefusé?Ilaraison.Maisj’aienviedelui…desabite…etjesuisprêteàravalermafiertépourobtenirce

quejeveux.—S’ilvousplaît?demandé-je,furieused’entendremavoixsuppliante.—S’ilvousplaîtquoi?Seigneur,ilveutm’achever.—S’ilvousplaît,est-cequejepeuxprendrevotrebitedansmabouche?—Vouspouvez,oui,maisvousavezledroit?demande-t-il.Ilrigole,là.—Pouvez-vouss’ilvousplaîtmedonnerlapermissiondeprendrevotrebitedansmabouche?Ilsecaressepourmenarguer,commeungrospleindesoupequidévore toute ladindedeNoël

devantunhommeaffamé.—Ah,oui?Vousenavezenvie?—Plusquetout,réponds-jeenmepourléchantleslèvresd’impatience.—Alors,prenez-la.Sabiteàlamain,Shawlapointeversmabouchetoutentenantmatêtepourmemettreenposition

delarecevoir.Alorsquejem’empressepourleprendredansmabouche,ilmecollecontresacuisse,afindecontinuerdecontrôler lemoindredétaildenosébats, commesiceladevaitalimentermonplaisirplutôtquelesien.Peut-êtrequec’estlecas,d’ailleurs.—Ouvrez,dit-ilenmetapotantlajoue.J’écarteleslèvresetShawfinitpars’enfoncerdansmabouche.Maispasenentier,puisquesamain

empoigne toujours la base de la hampe.Heureusement. L’engin de Shawn’est pas d’une longueurexceptionnelle,mais il est assezépaispourvousétirer lescommissuresdes lèvres.Et il aungoûtmerveilleusementdélicieux.—Voilà,dit-ildansunrâle.C’estcequevousvouliez,non?Lesyeuxclos,jenepeuxréprimerlelonggémissementquimontedansmagorge.Oui.Àmoi.Avidement,jelesuceàfonddegorgetoutenleléchantsoustouteslescoutures.—Ralentissez. (Ilm’empoigne parma queue-de-cheval etme force à reculer jusqu’à ce que je

n’aieplusquesonglanddanslabouche.Jegémis,craignantqu’ilmetteuntermeàcesdélices,maisils’enfonceànouveauenmoi,sansmelâcherlescheveux.)C’estmieux.C’estluiquidécidedelacadence,malgrél’urgencequim’envahittoutentière.

Àchaqueva-et-vient,ladouleursourdeentremesjambesempire.Ilfautquejejouisseencore.Jemecramponne à ses cuisses, lesgenoux rivés au sol.À lamanièredont ilme tient les cheveuxetm’imprimesonrythmeàcoupsdehanche,ilestévidentquec’estluiquicommande.Quantàmoi,jesuisraviedesuivre.Nousavonstouslesdeuxcequenouscherchions.Je lève les yeux, voulant voir son visage, et je constate qu’il a renversé la tête en arrière pour

l’appuyercontrelemur.C’estunspectaclemagnifique.Lestendonsdesoncousaillent,lesveinesdesonavant-brassontgorgéesdesangetilsecramponnepresquedouloureusementàlabasedesabite.Lesdoigtsposéssurmanuque,ilmaintientlerythmequiluiconvient.C’estclaircommedel’eauderoche:Shawestenpleineextase.Jecontinuede luimassacrer lescuisses,mesonglespourtantcourts luiéraflant lapeau,mais je

suis quasiment certaine qu’il adore cela. Sa bite est exquise, avec ces premières gouttes salées quiannoncent qu’il va jouir d’un instant à l’autre. J’entends ses halètements, sa respiration sifflanteentrecoupéedegémissements.Oh,oui,ilvajouir.Etcomment.Sousmamain,sesmusclessetendentetlescoupsdereinsjusque-làparesseuxmaismaîtriséssefontirréguliers.Jereconnaiscessignes,etjesuisprête.Àvraidire,jen’aijamaisétéaussiconcentréedetoutemavie.Sa bite grossit encore et les veines sous la peau délicate enflent à chaque va-et-vient dans ma

bouche. Sa main se crispe dans mes cheveux et il me maintient en place en me jetant un regardimpérieuxquimedéfiedebouger.Ilestauborddelajouissance.Toutaubord.Lepetit coup frappéà laporte résonnecommeun roulementde tonnerredans le silencechargé

d’énergiequirègnedanslachambre.—Cassidy?Tueslà?demandeCaseyàtraverslebattant.Je me libère brusquement de la main de Shaw, délaissant son sexe. D’un revers de main, je

m’essuieleslèvresetjemedépêchedemerelever.—Putain,souffleShaw.—Cassidy?demandeànouveauCasey.Jefermelesyeux,espérantqu’iln’apasentendulejurondeShaw.Nousnesommespasensemble.

Caseyn’estpasmonpetitcopain,necessé-jedemerépéter,envahieparlaculpabilité.Danscecas,pourquoiai-jel’impressiond’avoirétésurpriseentraindeletromper?Moncœurtambourinedansmapoitrine,jesuisenfeu.Mêmesijenesauraisdiresic’estàcausedecequivientdesepasseroudelapaniqued’êtrepriseenflagrantdélit.—Euh,j’arrivedansuninstant.Toutvabien?demandé-jed’unevoixtremblante.—Oui,ilyatonpèreautéléphone,répond-il.Commetun’étaispasdanstachambre,jemesuisdit

quetuétaisdanscelle-là.Toutvabien,là-dedans?— Tout va comme sur des roulettes, répond Shaw avec une grimace douloureuse en rangeant

difficilementsonsexedanssabraguette.—Leprenezpasmal,maisjedemandaisàCassidy,pasàvous.—Désolé,ellenepouvaitpasrépondre,parcequ’elleavaitmabitedanssabouche,chuchoteShaw

enfaisantàlaporteundoigtd’honneurqueCaseynepeutévidemmentpasvoir.Je lève les yeux au ciel devant ce comportement de gamin et je lui donne une petite tape sur la

poitrine.—Toutvabien,Casey.Jedescendsdansuninstant.—Dépêche-toi.Tamèrevabien,maistusaisquetonpèren’aimepasattendre,avertit-il.

Cequin’estpastoutàfaitvrai.Monpèreestaussipatientqu’unautre,maisildétesteabsolumentdiscuter au téléphone. Il préfère nettement le face-à-face, car d’après lui, la majeure partie de laconversationsefaitparlelangagecorporel.Jevérifierapidementdanslemiroirquetoutestenordre,puisjemetourneversShaw.—Cen’estpasterminé,luidis-je.—Manifestementpas,répond-ilenmedésignantlabossepeudiscrètedanssonjean.Entoutcas,je

diraisquevous,vousnevousensortezpastropmal.Jesourisnarquoisement,carc’estvrai.Etjesuismêmeraviequ’ilsoitdansunesituationaussipeu

confortable.Avecunclind’œil,jeconclus:—Jeparlaisdelaconversation.Commepourlereste,ceserapeut-êtrepouruneprochainefois.—C’estparfait,grommelle-t-il.Je ne peux réprimerma satisfaction en quittant la chambre, sachant qu’ilme suit du regard, les

mainssurleshanchesetunedouloureuseérectiondanslepantalon.Ilyaura,c’estsûr,uneprochainefois,mêmesijenesauraisdireàquelmomentle«peut-être»est

devenuunecertitude.

5

Cassidy

ShawMatthewsestchezmoi.Etjenesaisabsolumentpaspourquoinicommentilasuoùj’étaispartie.Maisj’aimapetiteidéepourtrouverlesréponsesqu’ilarefusédemedonner.L’appeldepapaquiainterrompunosébatsaétécommeunverred’eauglacéequej’auraisprisen

plein visage.Cela n’a pas eu lemême effet surShaw, en revanche. Sa bite est restée furieusementgonflée, réclamant qu’on la soulage, et je suis partie toute contente demoi. Cela lui apprendra àm’avoirtenuladragéehaute,sij’osedire.Papa n’appelait que pourme donner des nouvelles après le passage dumédecin. La tension de

mamans’estconsidérablementamélioréeetellevapouvoirsortirdanslamatinéeavecuntraitementapproprié. J’ai fait lenécessairepourque lapharmaciede l’hôpitalaitmescoordonnéesbancairesafindepouvoir régler leurs traitements tous lesmois,carcelanemeplaîtpas tellementde savoirqu’ils se tuent littéralement au boulot sans pouvoir se payer leurs médicaments alors que j’ailargementassezd’argentpourlesaider.Lasortiedel’hôpitaldemamanestunemerveilleusenouvelle,mêmesielleseraclouéedansun

fauteuilroulantjusqu’àcequ’onluienlèvesonplâtreetquejevaisêtreobligéederesterpourdonnerun coupdemain.Mais commentvais-je expliquer la présencedeShawàmesparents–oupire, àCasey–alorsquejen’enconnaispasmoi-mêmelaraison?Iln’yaquedeuxpersonnesquisavaientoù j’allais et une seule aurait eu assez de culot pour vendre lamèche à Shaw. Jem’installe doncconfortablement dans le salon et je sors mon portable, lance Skype et compose le numéro ducoupable.Quinnrépondàladeuxièmesonneriecommes’ilavaitattenduunappel.—Cassidy?Oh…euh…salut,toi!Moncoloc’estencoreaulit,cequin’ariendesurprenantpuisqu’ilest10heuresàSanDiegoun

samedimatin.Cequiestbizarre,enrevanche,c’estqu’ilesttoutpimpant,pasuncheveuquidépasse,et peut-être même un petit peu sexy, entouré qu’il est de draps en satin écarlates et d’oreillersimmaculéscommes’ilsepréparaitàuneséancedephotosdecharme.Àsonairtoutpenaud,ondiraitqu’ildissimulequelquechose.Évidemment,celaéveillemessoupçons.

—Quiiinn!Qu’est-cequetuasfait?—Hein?Rien,jetejure!C’est pratiquement un aveu. Il ferait mieux d’aller jusqu’au bout pour obtenir la clémence du

tribunal.Maisjepréfèrevérifier.—D’accord.Alors,peux-tum’expliquercommentilsefaitqueShawMatthewsasucommentme

trouver?demandé-je,histoiredepermettreàmoncoloc’deconfessersonpéché.—Oh,tuparlesdeça,répond-il,soulagé.(Ilseredresseetsonairdebicheauxaboisestremplacé

paruneexpressionvertueuse.)J’aifaitcequejedevaisfaire.Jenem’excuseraipas.Tun’aspasàmeremercier.—Teremercier?Dequoi?ShawMatthewsestchezmoi!—Attends,mecoupe-t-il.Jecroisquejeviensd’entendrequelquechose.Il penche la tête de côté et tend l’oreille. Il manque de sauter au plafond quand la porte de sa

chambres’ouvrebrusquement.S’ensuitunepagaille,l’écranestsecouéentoussensetundrapquilerecouvreétouffeleséclatsdevoix.—Quinn?Çava?demandé-je,craignantd’êtreletémoindumeurtredemonmeilleurami.—Tuestoujoursaulit?Réveille-toi,petitfainéant!—MonDieu,grommelleQuinn.Jesuistoutnusouslesdraps.Commentvousavezfaitpourentrer

touteslesdeux?Finalement,l’écranretrouvesapositionetledrapquilerecouvraitàmoitiéestarrachéetrévèle

DemietSasha,aussijovialesl’unequel’autre,assisesdepartetd’autredeQuinn.Ellesontréussiàtoutmettresensdessusdessous,cequin’apasl’airdeluiplaire.Demibranditunepetiteclésoussonnez.—Tunousasdonnéundouble,idiot.Quinngémitetselaisseretombersursesoreillers.—Laissez-lasurleplandetravailensortant,espècesdefolles.—Pasquestion,répliqueDemi.Tantquetuneseraspasrevenuàlaraison.Jen’ycomprendsplusrien.—Qu’est-cequisepasse?—Ellesmesurveillentpourquejenemesuicidepas,répondQuinnenlevantlesyeuxauciel.—Maisnon, intervientSasha.Onveut justequ’ilnesesentepas tropseul. (Ellese tortillepour

s’installerplusconfortablement et retape sonoreiller,quand soudain, elle retirevivement samain.Unepairedemenottesenfourrurenoireestsuspendueauboutdesonindex.)Qu’est-cequec’estqueça?—Arrêtedefouiner, rétorqueQuinnen les luiarrachantpour les remettresous l’oreiller. (Sans

prêterattentionauxriresdesfilles,iltentedechangerdesujet:)Commentvatamère,Cassidy?—Ehbien, tu sais…Elle est tombéed’uneéchelle,mais elleva s’en remettre.C’estunedureà

cuire,mamère.Cen’estpaslegenreàrestersansrienfairepourquelquesfractures,ecchymosesetcontusions.J’aieuunepeurbleue,évidemment,maislabonnenouvelle,c’estquelemédecinlalaisserentrerdemain.—Oh,Dieumerci,soupireQuinn.Lesfillesetmoiallionssortir,maismonimbéciledepatronne

refusedemedonnermajournée,cette truie.Elleditque j’aipris tropde jourscesderniers temps,

toutçaàcausedeDaddy.Jeledéteste,ajoute-t-ilavecaigreur.Jelehais,cegrossalaud.Daddyn’estpasgros,maisc’estledernierexendatedeQuinn.Unhommetrèsriche,trèssexyet

trèsmariéquin’apasappréciél’ultimatumqueQuinnluialancé,luidonnantlechoixentresortirduplacardoulequitter.Daddyapréféréresteravecsonépouse,et lecœurdeQuinnavoléenéclats.Quinn s’est vengé en faisant subir lemême sort à tout ce qui lui est tombé sous lamain dans lepenthousequeDaddyluiavaitoffertavantdelereprendre.Sansoublierdegraversurlesmurs:ILESTGAY.Cequirevientàleforceràsortirduplacard.ÀmoinsqueDaddyrefasselesplâtreslui-même,lesouvriersvontconnaîtrelavérité.Etunevéritédecegenre,pourquelqu’und’aussiricheetenvuequeDaddy,nepeutqueserépandre.—Désolée,Cass,maisonnepouvaitpaslelaisser,ditDemid’unairdouloureux.Évidemment,si

tuestimesavoirbesoindenous,onpeutsesépareretl’unedenouspeutvenirterejoindre.—Nedispasdebêtises.Vousn’avez rienà faire ici. Jevaism’occuperdubedandbreakfast le

temps que maman soit de nouveau sur pied et je rentrerai aussitôt après. En attendant, j’aimeraisqu’ondiscuteunpeudecesmenottes,dis-jeavecunpetitsourireàQuinn.—Tusaiscequ’ondit,commenceDemi.Lemeilleurmoyenpourseremettred’unhomme,c’est

de passer au suivant.Quinn partage totalement ce point de vue. (Elle lui donne gentiment un coupd’épaule.)MaistoutcommeDaddy,sonnouveauchéridoitrestersecretaussi.—Oh,fais-jeenhaussantlessourcils.Desindicessurl’identitédecenouvelamant?—Ah,vousvoulezparlerd’amantssecrets?s’offusqueQuinn.Trèsbien,alorsparlons-en.Ilaccepteunpeutroprapidement,enmeregardantcommesijel’avaisattirésurunterrainglissant.

Jemerendscompteavantd’avoireuletempsderéagirquejevaismeretrouverpriseaupièged’unfiletmétaphoriquesuspenduau-dessusdemoi.EtQuinns’empressedelefairetomber.—MissCassie,vousvoulezleurdire,ouvouspréférezquecesoitmoi?demande-t-il.Paspossiblequecesoitdecelaqu’ilparle.—Leurdirequoi?—Oh,alors tuveux joueraux idiotes?Trèsbien,voyons…Commentpourrais-je formuler les

choses?(Ilseraclelagorge.)ShawetCassiesontdansunbateau,chantonne-t-il.Ohnon!—MonDieu.Cesontlesdeuxseulsmotsquejeparviensàarticuler.—Shaw?s’étrangleDemi.—ShawMatthews?demandeSasha.Questionidiote:combiendeShawconnaissons-nous?J’ailesjouesenfeu,avecdenouveaulasensationd’êtrepriseenflagrantdélit.—Commenttuassu?Quinnéclatederire,tellementqu’iln’arriveàprononcerqu’uneseulesyllabe.Maiselleveuttout

dire.—Shaw.—Iltel’adit?Jesuisfurieuse.Ilvamelepayer,celui-là.Moncoloc’reprendsonsouffleetsoupire.

—Pasvraiment.Disonsquej’aidûlaisserentendrequej’étaisdéjàaucourant.Etqu’iladûpenserquetumel’avaisdit.Alors,j’ysuisjustealléaubluff.—Tul’aspiégé?(Jemepasselesmainssurlevisage.)Oh,monDieu,Quinn,maisquelcontu

fais.C’estvraimentdéloyal!—Ettrèsmalin,leféliciteDemi.Sashamefaitunsourireeffronté.—Siencoreonn’avaitpasdéjàétéaucourant,ajoute-t-elle.—Vousnesaviezpas.J’ailancécelapluscommeunequestionquecommeuneaffirmation.Ellessavaient?Commentest-

ce possible alors que nous avons été si prudents ?À vrai dire, nous n’étions pas particulièrementprudents,maisj’étaisconvaincuequepersonnenefaisaitattention.Oubienaulieuderéfléchir,j’ailaissémonentrejambepenseràmaplacesansmesoucierdesconséquences.—Onadesyeux,onabienvulespetitsregardsquevousvousjetieztouslesdeux,renchéritSasha

avecunsourireencoin.—Etdesoreilles,poursurprendrevosconversationspassidiscrètesqueça,ajouteDemi.Quinnsecolleàlawebcam,cequiluifaitdeslèvresénormes.—Etdesbouchespourcolporter les ragotsetcomparernosdécouvertes,complète-t-ilavantde

reculer.J’aisûrementl’aird’unpoissonhorsdesonbocal.—Sans blague ?Faut vous faire soigner, tous les trois.Et je vais porter plainte pour que vous

arrêtiezdem’espionner.—Àproposd’espion…ditDemientendantlebraspourquejeregardederrièremoi.—Salut,Shaw,faitSashaavecungrandsourireetunpetitsignedelamain.Jeme retourne et je le trouve là, tout aussi inquiétant quemes trois amis inquisiteurs, en train

d’écouterma–commentaditDemi?–«conversationpassidiscrètequeça».Seigneur,maispluspersonnenerespectel’intimitédesgens,ouquoi?

Shaw

Jesuisencoretoutendoloridem’êtrefaittirerlescheveuxetmonentrejambedouloureuxréclamed’être soulagé. Je suis donc parti à la recherche de Cassidy avec la ferme intention de jouer leshommes des cavernes, la balancer surmon épaule et la ramener à l’étage pour qu’elle termine leboulotqu’elleaentreprisavantqu’onnousinterrompesigrossièrement.J’ajusteengémissantmabiteencoreraidedansmonjean.Chaquepasquejefaisdansl’escalierest

pénibleetjedoisoffrirunspectaclelamentable.Onauraitpucroirequelavoixd’unautrehommeauraitsuffiàfairedégonflermongentilpetitcamarade,maislaperformancedeCassidyaététoutàfait impressionnante.Tellementqu’ilm’estpresque impossibled’effacerdemamémoire le regardsuppliantqu’ellem’alancé,quandellem’aimplorédelalaisserprendremabiteenbouche.

—BonDieu,grommelé-jeensentantmonenginpalpiterdeplusbelleàcesouvenir.Peut-êtrequeleseulmoyendelefairedégonflerseraitdel’assommerunboncoup.Caseylèvelesyeuxversmoienpassantenbasdel’escalierpourgagnerlacuisine.Jemeredresse

detoutemahauteur.Commemonrivalestàpeuprèsdemataille,c’estseulementparcequejesuisquelquesmarches plus haut que je peux baisser les yeux vers lui et jouer lesmâles dominants. Jem’abstiensquandmêmederetrousserlesbabines,histoiredenepasenfairetrop.Jeluilanceunpetitsourirenarquoisquisignifie:«Tacopinevientdemesucer.»Non,Cassidy

n’apasavouéquec’étaitsonpetitami,maiscen’étaitpasnécessaire.Toutlemondepeutvoirqu’ilsontétéencouple.Resteàsavoirsic’esttoujoursd’actualité,maisjesuisbiendécidéàcequecelanedurepas.Enarrivantenbasdel’escalier,jetournebrusquementàdroiteetmelaisseguiderparlavoixde

Cassidy.Unefoispassélehallentièrementlambrisséetsoncomptoiràl’anciennemode,jevaistoutau bout du couloir et la trouve assise sur un canapé vert olive dans un salon isolé du reste de lamaison.Àmonavis,c’estunepièceréservéeuniquementàlafamilleWhalen.Maisgrâceàlaportecoulissantequ’ellealaisséeentrebâillée,j’entendstoutelaconversationqu’elleaavecsesamis.Enfin,nosamis.Jesuispeut-êtreplusprochedeLandonetdeChaz,maisnoussommestousliés,

neserait-cequeparcequeLandonetSashasontencoupleetqueChazetDemisefontlesyeuxdouxsansallerplusloinqu’uneespècedevalse-hésitation.C’estuneconversationrévélatricequimedonnedeuxprécieusesinformations.Pourcommencer,

tout lemonde ne parle que de la liaison que nous entretenons.Nos amis savent que nous baisonsensemble.Dieusaitpourquoi,maiscelanem’agacepas.Commejenedoutepasunseulinstantquenousallonscontinuerdanscesens,ilétaitinévitablequenosprochesfinissentparledécouvrirtôtoutard.Jem’enfiche.Etjenesaisabsolumentpaspourquoicelanemefaitpaspaniquer.NipourquoijenepaniquepasquandDemietSashadénoncentmaprésence.Cassidy referme brutalement son portable, coupant la communication avec Quinn et les petites

rapporteusessansmêmeleurdireaurevoir.C’estunmomentaussibienqu’unautrepouraborderlasecondeprécieuseinformation.Jefaiscoulisserlaporte,entreetlarefermederrièremoi.—Votremères’estblessée?C’estpourcelaquevousavezquittéSanDiego?Elleselèveetentreprenddebranchersonportablepourlerecharger.—Jevousl’aidit.Vouspensiezquejementais?Elleestcalme.Unpetitpeutrop.Jem’étaisditqu’ilyauraitdescrisetquelesinsultesvoleraient

quandcetteconversationauraitfinalementlieu,maisjen’aipasenviedemelancerlà-dedans.Peut-être parce que l’énergie nécessaire pour cela est entièrementmonopolisée parma braguette, avectoutecettetensionsexuelleencoreinassouviequicrépiteentrenous.Inassouviepourmoi,entoutcas.Seigneur,maisilfautqu’ellearrêtedesepencherenavantsousmonnez.—J’aicruquec’étaitmoiquevouscherchiezàfuir.C’estcequ’elledevraitfaire.Çaetporteruneceinturedechasteté,aussi.Elles’interromptetseretourneversmoi.— Vous l’avez déjà dit aussi, et je vous ai répondu que non. Vous, en revanche, vous n’avez

réponduàaucunedemesquestions.Pourquoiêtes-vouslà,Shaw?L’imagede l’hommedes cavernesme revient à l’esprit et le poids de lamassue imaginaire sur

monépaulemedonneenviedel’assommerpourpouvoirl’emporter.Jemesuislancéàsestroussespoursoulagermabitetoujoursdressée,maisjenecroispasquec’estcelaqu’elleveutentendre.—Denverm’aditqu’ilvousavaitproposélecontratenpremier,maisquevousl’avezrefuséen

luidisantdemeledonneràmoi.—Etalors?répliqueCassidy.Jemecrispe,agacé,etj’aidenouveauenviedeluifilerunebonnepunition.Pasorale.Niphysique.

Sexuelle.—Alors,vousveniezdedécouvrirlavéritésurmonpassé.Celadonnaitl’impression…Jevoislalumièresefaireenelle.—Quejevouslecédais?—C’estça.D’unemainsurmapoitrine,elleretientl’élanquej’aiprissansm’enrendrecompte.Maisellene

merepoussepas.Non,ellehausse lementond’unair suffisantetmet lesmainssur leshanches, sibienquesonpullsetendetsoulignelescourbesdesesseins.—Vousauriezdûréfléchir,répond-elled’unevoixsourdeetsensuelle.Ellearaison.—Jesuisbientropcompétitivepourdonnerquoiquecesoit,àmoinsquecelam’avantageetme

permetted’atteindremonobjectif.J’airemportécecontratdanslesrèglesetgagnéledroitdevousfourrerlemuseaudansvotrepipi,etjel’auraisfaitsimesparentsn’avaientpaseubesoindemoiici.C’estplutôtmoiquiauraisenviedefourrermonmuseauquelquepart.Leproblème,c’estqueje

suisrestésurmafaim.Lacageenjeanquiemprisonnemabiteenfléeparvienttoutjusteàlaretenir.—Certaineschosessontplusimportantesqu’unposted’associé.Mêmeunpostepourlequeljeme

suisdonnéautantdemal.Maiscelan’expliquetoujourspaspourquoivousêtesici.Sonhaleinesuaveestàquelquescentimètresdemonvisage.Elleabesoind’uneexplication?Trèsbien,jevaislaluifournir.—Jemesuisdonnéunmaldechienpourquepersonnenedécouvred’oùjeviensparcequejene

voulais pas qu’on me prenne en pitié. Je n’ai jamais accepté d’aumône, jamais demandé d’aide,jamaisdépendudepersonneparcequej’étaisdéterminéàréussirparmespropresmoyens.Etj’étaisfier d’en avoir été capable. Quand j’ai eu l’impression que vous me faisiez la charité, cela a étécommesivousmettiezàbasd’unseulcouptoutcequemoi,j’avaiseutantdemalàédifier.Çam’aénervé.—Alors,vousavezfaitcinqmillekilomètresenavionpourvenirmeledire?Cettelanguebienpenduealedondemanœuvrermabitedepuislepremierjour.L’effetestdécuplé

maintenantquejel’aipossédéeetplusencoreencetinstantparcequejesuistoujourssurmafaim.Bonsang,toutcequifaitdemoiunhommen’aqu’unedouloureuseenvie:laprendre.—Oui,jepensequec’estça.Enm’entendantledireàhautevoix,j’aivraimentl’impressiond’êtreunidiot.—Waouh!(Ellemeprendlamainetmetripotelesdoigtsd’unemanièresensuelleetpeut-êtreun

peutropintime,maiscelameplaîtbien.)C’estcequis’appelleêtredévouéàsacause.—Jenesuisquedévouement.C’estlavérité,mêmesijesaisqueniellenimoinegobonscetteexcuse.

Nous restons silencieux. Durant tout le trajet jusqu’ici, j’ai songé à la manière dont cetteconfrontationallaitsedérouler,etlaréalitén’arienàvoir.Lescris,lesaccusations,lesinsultesquivolent,voirelesassiettes,voilààquoijem’attendais.Maisnousvoilà,toutprèsl’undel’autre,bienquepasassez,calmes,sanséclatsdevoix.Jen’aipasenviedelaréduireencharpie.J’aienviequ’ellemeserredanssesbraspendantquejelapénètre.—Alors,faites-le.Sesdoigtsjouentàprésentaveclescheveuxsurmanuque,cequimerendencoreplusdingue.Et

m’exciteàmort.Jefermelesyeux.Justeuneseconde,pourreprendrelefildenotreconversation.—Fairequoi?Cassidysepencheetmechuchoteàl’oreille:—Grondez-moi.Sonsoufflesurmoncou.Jesenslachairdepoulequimegagne.Cechatouillisquiparcourttout

monsystèmenerveuxpourvenirs’installerdansmonjeandéjàdistendu.Bonsang,cettefemmeesttropprèsdemoi,tropbaisable.Unefoisdeplus,jenemesuispasrenducomptedelapositionquej’aipriseetdecellequejeluiai

fait prendre. Cassidy se retrouve de nouveau plaquée contre un mur. Ou une bibliothèque. Peuimporte:mesmainsposéesdepartetd’autrevontl’empêcherdefiler,encorequ’ellen’essaiemêmepas.Quandelleagrippeledevantdemachemiseetqueseslèvresdélicatesfrôlentmoncou, jemerendscomptequecen’estpeut-êtrepasmoiquiaitenducetraquenard,maiselle.—Jepréféreraisvousfaireautrechose,dis-jeenrespirantleparfumdesescheveux.MonDieu,jen’ytiensplus.Ellemordillelelobedemonoreilletoutenenfouissantsesdoigtsdans

mescheveux.—Vousl’avezdéjàfait.Deuxfois.—Latroisièmeserauneformalité,dis-jeavecunsourirenarquois.Je glissemon genou entre ses cuisses pour la forcer à les écarter afin quema bite prisonnière

puissetoucherlachaleurdesonentrejambe.Bonsang,jelasensàtraversmonjean.Parunheureuxhasard,nousnous retrouvonsdans lamêmepositionque tout à l’heure.Peut-êtrequecette fois, ledestinaccepteradem’accorderunagréabledénouement.—Onnepeutpas.Pasici.Cassidysecambreensefrottantcontremoi.Ellen’enpensepasunmot.Ettantmieux.—Pourquoi?Vousavezpeurquevotrepetitcopainnoussurprenne?Sesmainsdescendentsurmesfesses.Ellelespétritetm’attirecontreelle.—Cen’estpasmonpetitcopain.—Ilfaudraitsûrementleprévenir,danscecas.Avant qu’elle ait le temps de répondre, je l’embrasse. Je n’ai pas envie de parler de Casey, le

pêcheurdehomards.NideQuinn,deSasha,deDemi,deDenveroudecefoutucontrat.Jen’aipasenviedeparlerdutout.C’estmontourdemelancerdansl’action,maisjenevoispaspourquoijenepourraispasenfaireprofiterunpeuCassidypendantquej’ysuis.Oui,jesais,jesuisgénéreux.L’ondulation de mes hanches la soulève pour qu’elle s’installe sur mes cuisses pendant que je

m’occupedesoncou.LemétaldelafermetureÉclairdemabraguettemedonnel’impressiondeme

frotter à un grillage, mais c’est une douleur agréable, puisque cela lui procure autant de plaisir.Cassidy se cramponne àmes épaules et onduledeshanches à lamêmecadence, se servantdemoipourobtenirsonplaisir.Dans mon oreille résonnent ses halètements et un faible geignement suppliant qu’elle essaie

désespérémentd’étouffer.J’empoignesescuissesetremontejusqu’àsesfessespourlarapprocherdemoi. Cette nouvelle position est nettement préférable, parce que les mouvements de Cassidy sonttellement déchaînés que je suis obligé de m’appuyer d’une main au mur pour nous maintenir enéquilibre.Ma bouche se pose dans son cou et je commence à lui faire un suçon. Cassidy se dégage

brusquementpourm’empêcherdedéposermamarque,cequinefaitquem’exciterplusencore.C’estidiot.Jelesais,maisj’aivucommentsonpetitcopainlaregarde.Illadésiretoujours,maiselleestàmoi.Etpourleprouver,jevaislafairejouirtellementfortqu’ellevahurler,pilesousletoitoùilestentraindefaireDieusaitquoi,etqu’ilnepourraquel’entendre.—Shaw…soupire-t-elledansungémissement.Jevais…—Jesais.Jeveuxvousentendre.Ellem’embrasseetseshanchessecollentplusencorecontremoi.J’enfaisautantdemoncôté.Il

fautqu’ellejouissepourquejepuisseenfinmelaisseraller.Jemefichequequelqu’unentre,ouquenous soyons encore complètement habillés et que nous allons être dans un sale état une fois celaterminé:jeveuxjustejouir,etvite.LegémissementdeCassidyestd’abordsourd,maisellecontinuedem’embrasser,etj’étaistoutà

faitsérieuxquandj’aiditquejevoulaisl’entendre.Jemedégagedoncdecebaiseretjemanquedejouirenvoyantsonexpression.Lesyeuxclos,ellesemordlalèvre,latêterenverséeenarrière,touten continuant deme chevaucher. Puis ses doigts s’enfoncent dansmes épaules quand ellem’attirecontreelleetenfouitsonvisagedansmoncou,alorsqu’ellejouitavecunetelleviolencequejesensqu’ellemouillesonlegging,etmêmemonjean.Leplusbeauspectacledumonde,c’estunefemmequiatteintl’orgasmegrâceàcequejeviensde

faire.C’estalorsqueCassidyouvrelentementsesyeuxvertémeraudeetquejemedoisderectifier:cen’estpasn’importequellefemme.C’estcelle-ci.Putain.—Àvotretour,murmure-t-elleavecunsourireàlafoismalicieuxetrepu.—Ça,j’ycomptebien.Campé sur mes deux jambes, je la coince dans l’espace entre le mur et la bibliothèque, puis

j’inclinesoncorpsdansunepositionpropiceàmescoupsdereins.Oh, mon Dieu, ce qu’elle est bonne. Je suis déjà prêt à tout lâcher avant qu’elle se mette à

m’embrasserdanslecou,maisc’estlàqu’ellecommenceàmesuçoteretquejesongeunbrefinstantqu’elle essaie peut-être de laisser sa marque, ce qui me fait bander encore plus, parce que,évidemment,j’enconnaisunquivaforcémentleremarquer.EtCasey,lepêcheurdehomards,devrabienfinirparfaireunpetitcalcul:moiplusCassidyégaleplusjamaisilnebaiseraavecelle.MaisCassidysedétourne.Peut-êtrequ’ellen’essayaitpasdemefaireunsuçonfinalement.Moi,en

revanche,j’essaietoujoursdejouir.Jesensvibrermonentrejambeetlasèvemonteretmonter.Deuxcoupsdereinsdevraientsuffireà…Lebruitd’uneportequicoulissemecoupetousmeseffets.—Hé,Cass…commenceunevoixquin’appartientniàelleniàmoi.

Maisc’estpasvrai!Jesuismaudit!Jen’aiqueletempsdelaisserCassidysereleverqueCaseyentredanslapièce.Ils’arrêteenvoyant

qu’ellen’estpasseule.Leregardqu’ilmejette,metoisantencrispant lamâchoire, laisseentendrequ’ilacompriscequisepasse.Nosjouesrougesetnotrerespirationhaletantenousontforcémenttrahis.J’arbore un sourire victorieuxmais crispé,même si j’ai surtout envie de lui fracasser le crâne

contrelemurpourm’avoirencoreunefoiscoupédansmesélans.Bonsang.Cetypeaunsixièmesensquil’avertitchaquefoisqu’unmecessaiedesefairesacopine,ouquoi?C’estuneCassidy très troubléequiessaiede sauver lesmeublesavecunsourire forcéetun ton

tropenjoué.—Hé!Qu’est-cequ’ilya,Case?Casey l’empêcheur de baiser en rond n’est pas dupe. Je me prépare pour l’empoignade qui va

forcéments’ensuivre,presqueravidel’occasion,parceque,jel’avoue,j’aienviedeluienflanquerune ou deux.Mais je suis surpris quand il détourne son regard noir demoi pour fixer le vide.Àcroirequ’iln’arrivepasàregarderCassidydanslesyeux.—Mamanm’ademandédetedirequec’estl’heuredepréparerledîner.Elleestdanslacuisine.Etsurce,ilrepart.—Merde,souffleCassidy.Jel’airaremententenduediredesgrosmots.Celaneluiarrivequelorsqu’elleestfurieusecontre

moi, et même dans ce cas, c’est parce que je l’ai poussée à bout. De toute évidence, la situationprésente lui poseproblème.Àmoi aussi, si j’en juge par les douloureuses palpitations demabitetoujoursinsatisfaite.Maispourdesraisonsdifférentes,j’imagine.Cassidyserajusteets’apprêteàmeplanterlàsansunmotdeplus.Commec’esthorsdequestion,

jel’attrapeparlecoude.—Vouscomptezmelaisserencoreunefoisdanscetétat?Elle jetteun coupd’œil à la trèsvisiblebossedansmon jean et sourit.Cette fois, le sourire est

sincère.Autantque l’énormeérectionqui l’aprovoqué. JemedemandesiCasey l’a remarquée luiaussi.Jetriompheintérieurement,carmêmesic’estparticulièrementdouloureuxdedevoirattendreunefoisdeplusdemesoulager,jenecessedemarquerdespoints.—Jesuisdésolée,répond-elleavecunaircompatissant,maissijenevaispasàlacuisine,elleva

venirme chercher. Et la colère d’Abby, c’est quelque chose que ni vous nimoi n’avons envie desubir.Croyez-moi,elleapeut-êtrel’airdouxetinnocent,etellel’estlaplupartdutemps,maissivouslamettezenrogne,vousavezintérêtàcourirvousmettreàcouvert.Cen’estpaspourrienqu’onlasurnommel’ouraganAbby.Elleéclatederireetjetrouveceladélicieux.Maisqu’est-cequimeprend?—Nousavonsencorequelquespetiteschosesàdiscuter.—Pasvraiment, réplique-t-elleenhaussant lesépaules.Qu’est-cequ’ilyaàajouter?Vousêtes

venu me reprocher quelque chose que vous vous êtes imaginé tout seul. Maintenant quevousconnaissezlesfaits,vousallezpouvoirrentreràSanDiegosavourervotrevictoire,j’imagine.Pasvrai?Jeconnaislaréponseàcettequestion.Etjesuissouslechoc.Peut-êtrequejel’aisuiviejusqu’ici

pouruneautreraison.

—Faux.Jenevaisnullepart.AvoirvuCassidydiscutersurSkypem’offreunnouvelangledetravailquejen’avaispasenvisagé

jusqu’ici : jepeuxgérermesaffaires toutaussibiend’icique si j’étaisàmonbureauchezStrikerSportsEntertainment.Cassidyinclinelatêteetmeconsidèreavecperplexité.—Pourquoicela?Jenesuispassûrd’avoirencorelaréponseàcettequestion.Lespenséess’entrechoquentdansmon

espritetj’aibesoindetempspourfaireletri.SijeledisàCassidy,ellevainsisterjusqu’àcequejesorteunesottiseouquelquechosed’encoreplusincohérent.Ducoup,jepréfèreluidonnerlaréponsequ’elleattendduShawMatthewsqu’elleconnaît.—Jevousaifaitdéjàjouirtroisfoisaujourd’hui.Vousavezunedetteenversmoi.Ilfautêtrejuste.Elleéclatederire,etcommeellesemoquedemoi,jedécidedejoueraveccequej’imagineêtrela

mentalitédeshommesdeStonington.—Vame faire àmanger, femme, dis-je en baissant la voix d’une octave et en lui donnant une

claquesurlesfessespourqu’elleaccélèrelemouvement.Cassidymeregardecommesij’étaistombésurlatêteetquittelapièce.Pourmadéfense,jeviens

dedécrocherlecontrataveclequarterbackleplusconvoitédupays,j’aitraversélepaysd’ouestenest,cruellementsouffertdeprivationdesommeil,sombrédansunquasi-comapluslongtempsquejen’auraisdû,toutcelapourmeréveilleretmelancerpardeuxfois–si,si,deuxfois–dansdesébatsfurieusementérotiquesavecune femmeque j’adoredétesteretquim’a laissésurma faim.J’ai lesnoixenfeuetmafermetureÉclairm’amislabiteàvif.Oui,jesuissûrementauborddelafolie.Etvoilàque,àprésent,j’envoiemapetitefemmemepréparerledîner.Mapetitefemme?«Onva

tepasserlacamisoledeforce,Matthews.»J’ai dit cela à voix haute pour essayer de retrouver un peu de raison.Maismon cerveau refuse

d’obéir.Peut-êtrequ’ilvafalloirenvisagerlesélectrochocs.Maisnon,jesaisquelestleproblème.Ilfautjustequejemesoulage.Aprèscela,toutrentreradans

l’ordre.Jebaisselesyeuxversmabraguetteetjemerendscomptequelaseulemanièred’yparvenir,c’estdeprendrel’affaireenmain.—Soigne-moi,mapetite,dis-jeenlevantcellequivafaireletravail.Papaabesoinderetrouverun

peudesérénité.

6

Shaw

Ma tentative échoue lamentablement. Pas parce que je ne me donne pas assez de mal. Maissimplement parce que,même si j’ai envie de jouir plus que tout aumonde, j’ai la tête deDenverRockfordquin’arrêtepasdesurgirdevantmoiaulieudecelledeCassidy.Cen’estpasparcequ’ilestgay que cela se termine en fiasco, mais parce que je le vois en train de faire les cent pas enm’exhortantàmedépêcherdejouirafindepouvoirm’occuperdesesaffaires.Bonsang.Jejettel’éponge,auproprecommeaufiguré.Mesnoixsonttoujoursgonfléesàblocet

prêtes à donner lemeilleur d’elles-mêmes,maismonbras est sur le banc de touche à cause de lacrampequejeviensdem’infliger.Jefermelesyeuxpouressayerdetempérermonagacement,maisjeneréussisqu’àempirerlasituation.Peut-êtrequesijepenseàautrechose,quejemeconcentresurlecontratquej’aidécrochéetquiestcausedetoutescesabsurdités,celairamieux.Je rangemapitoyablebitedansmonpantalon, remontemabraguette,m’asperge levisaged’eau

froideetsorsmonportable.Grâceaudécalagehoraire,Benesttoujoursaubureau,maismêmes’ilestdéjàparti,jesaisqu’ilrelèvesese-mails.J’enenvoiedoncunpourluidirequejevaisprolongermonséjouràStoningtonetqu’ilfautqu’iltéléchargeSkypesursonordinateuretsursonsmartphone.JeluidemandeaussidejoindreDenverpourqu’ilenfasseautantafinquejepuisselecontacter.Justeaprèsavoirenvoyélemessage,j’aiunappel.Benestpeut-êtreunsalepetiteffronté,maisil

esttrèsproetilsemettoujoursenquatredèsqu’ils’agitdeboulot.Ilrépondàmonsalutparun«Salut,patron!Vousavezl’air…constipé».Quandjevousdisque

c’estunpetiteffronté.«Vousvoulezquejevousenvoieuntraitementapproprié?»—Va te fairevoir,Ben. (La frontièrequiséparenos relationsprofessionnelleetpersonnelleest

peut-êtrefloue,maiscelafonctionnebien.)Donne-moilesdernièresnouvelles.Cequ’ilfaitdonc,enmepassantlesmessagesquim’ontéchappéàcausedel’absencederéception

ici,avantdenoter toutcequeje luidemandederégler.Ilconfirmeavoircontacténotreclientstar,Denver,lequelestprêtàrecevoirmonappel.Cen’estpasquenousayonsbeaucoupdechosesàfairepourlemomentétantdonnéquelesavocats

n’ontpasencorerédigé lescontrats,mais lessportifssuperstarscommeDenveront l’habitudequeleuragentsoitauxpetitssoinspoureux.Jenevaispasledécevoirsurcepoint.Benm’informeaussique Denver est déjà retourné chez ses parents dans le Colorado et est prêt à commencer

l’entraînement dès qu’il aura signé son contrat à plusieurs millions de dollars. Que des bonnesnouvelles.Sonenthousiasmepourlesportestprécisémentcequiluiavaludeconnaîtretoutcesuccèsetdecontinuer sur sa lancée.Sansoublier sonbrasdeSuperman.Onne l’appellepasRocketManpourrien.Cassidy s’est déjà chargée de lamajeure partie des négociations avec leColoradopourDenver

avant qu’il y ait changement d’agent. La part substantielle que je vais toucher atterrira sur moncompteenbanque,maispourlapremièrefoisdemavie,jeluiendonneraiuneportionraisonnable.Comme je lui ai dit : il faut être juste. Le contrat de Denverm’a été offert sur un plateau et j’aiparticipéauxdiscussionsdefinalisationavecleColorado,maisjen’aipasvraimentméritélagrosserécompense.BienquejesachecequeCassidypensedemoi,jenevaispasprendrequelquechosequinem’appartientpaslégitimement.En revanche, le poste d’associé chezStriker, c’est une autre histoire. Il est àmoi, sans discuter.

Monty Prather m’a formé pour cela avant de prendre sa retraite, et Wade Price sait que je suisl’hommede la situation,même s’il espérait que ce serait sa protégée,Cassidy, qui remporterait labataille.CommeWadeetmoiavonsénormémentderespectl’unpourl’autre,latransitionseferaendouceur.L’annonceofficielleaurestede l’entreprisedevraattendremonretourde«vacancesbienméritées»selonlestermesdeWade.Ma communication Skype avec Ben est sur le point de se terminer quand il m’interroge sur

Cassidy.—CommentseporteMissGlaçon?Maréactionmesurprendmoi-même.Passeulementparcequemabitesedresseimmédiatementdès

quel’onprononcesonprénom,maisparcequejetiensàprendresadéfensecommejenel’aijamaisfaitjusqu’ici.—Cassidyvabien.C’est peut-être Miss Glaçon sous le soleil de Californie, mais dans les frimas du Maine, tout

devienttrèsrelatif.MerendantcomptequeBennem’apasdemandépourquoijesuisvenularetrouverici, jeluien

demandelaraison.—Vousmepromettezquevousn’allezpasmevirer?demande-t-ild’unaircoupable.—Àquoiçaservirait?Chaquefoisquejetevire,turéapparaissurmonpasdeportecommeun

chatinfestédepuces.Allez,crachelemorceau.—LefaitestquelorsquevousêtesarrivéaubureaudeSanDiego,Allyetmoionapariésurle

momentoùCassidyetvous,vousvousbrancheriez.C’estmoiquiaigagné,conclut-ilavecungrandsourireniais.VenantdeDetroit,pasgrand-chosenepeutlechoquer.Maisça?Si.Jenesaismêmepasparquelle

questioncommencer.—Qu’est-cequitefaisaitcroirequ’onsebrancherait?—Enfin, vous lui avez couru après à l’autre bout du pays, dit-il comme si cela expliquait tout.

(Voyantquecelanesuffitpas,ilpoursuit:)Unhommenefaitçaquequandilestsoumisàunefemme.Jedevrais lui raccrocher aunez sur-le-champ,ouaumoins luidirede ranger ses affaires etde

ficherlecampdéfinitivement.Maisjen’enfaisrien.—Etpourquelleraisonvousavezcrutouslesdeuxqu’onsebrancherait?

—Parcequevousnepouvezpasvoussupporter,répond-ilcommesic’étaituneévidence.CommeditAlly,lafrontièreesttrèsminceentrel’amouretlahaine.Jemanquedem’étrangler.L’amourn’estabsolumentpaslesujet.Ledésir,oui,d’aprèsmabiteà

nouveauturgescente,maisl’amour,non.— Ben, dis-je d’un ton calme et très professionnel, s’il y a la moindre rumeur selon laquelle

Cassidy etmoi sommes ensemble, elle se fera virer.Pour devrai.Dans les faits, je suis son chef,maintenant.Tucomprendscequejetedis?Monassistantesttoutàfaitsérieux,àprésent,etilcomprendlesenjeux.Quesessoupçonsaientété

ou non fondés, peu importe. Cassidy n’a rien fait demal et jamais je ne la laisserais payer pourquelquechosequenousavonsfaitentreadultesconsentants.Mêmesic’estmoiquil’aiséduite.Enfin,c’estunpeucompliquédesavoirquiaséduitquiaudébut.Disonsquenoussommesex-aequodececôté-là.—Pasd’inquiétude,merassureBen.Allyetmoinesouffleronspasunmot.Jelecrois.AllyetBensonttellementloyauxqu’ilspréféreraientrisquerleurspostespourCassidy

etmoi.JemedisquejedevraisarrêterdebaiseravecCassidymaintenantquemapositionhiérarchiquea

changé,maisensentantmabitepeserdenouveaucontremacuisse,jesaisquejen’enferairien.BonDieu,cettedouleursourdedanslesnoix,c’estinsoutenable.Ledînervaêtrebientôtprêtetiln’estpasquestionque jepasse tout le repasennepensantà riend’autre. Je raccrochedoncpouressayerdenouveauderéglerleproblème.Avant que j’aie entièrement baissé ma braguette, j’ai déjà glissé la main dans mon jean pour

empoigner ma bite. Un gémissement involontaire annonce la fête du slip qui s’ensuit. N’ayant nilotionni lubrifiantàportéedemain, jedoismecontenterdesquelquesgouttesquiperlentauboutpourpréparermonglandendoloriàcequejevaisluifairesubir.Je n’ai pas besoin deme creuser la tête pour trouver un sujet sur lequelme concentrer, car le

souvenirdéjàprésentdeslèvresdeCassidyenserrantmabitemesuffitamplement.Pourfairebonnemesure,jemecaresselesnoixtoutenregardantmamainastiquerfermementmabite.Je suis hypersensible, les frottements que je me suis infligés tout à l’heure rendent ces

manipulationspénibles,mais jepeuxm’enaccommodermieuxquedecettedouleurpersistantequipalpitedansmonentrejambe.Lesveinesdemabitesontgorgéesdesangetleglandécarlatevibresousmonpoucequilefrotte

encadence.Lapeauest tenduesurma tigequin’a jamaisétéaussidure,etdansmapoitrine,moncœurs’accélèrecommepoursuivre le tempodemamain.Jesens leplaisirquimonteenmoi.Marespirationsefaitpluscourte,commesichaquesoufflemerapprochaitdel’orgasme.C’estpeut-êtrelecas,d’ailleurs.Fasciné,jefixemabite,toutenrelevantmachemisequejecoincesousmonmentonafind’éviter

delasouilleraveccequejevaislâcher.Cequirisqued’arriveràtoutinstant,Dieumerci.Jeredoubled’énergie,lesdoigtscrispéssurmabite.J’ysuispresque…presque…Jesursauteenentendantfrapperàmaporte.—J’ycroispas,putain,grommelé-jeàmi-voixensentantl’excitationretomber.—Hé,monpote!retentitlavoixdecetemmerdeurdeCaseydel’autrecôtédelaporte.Ledîner

estprêt.(Jevais l’égorger,celui-là.Desang-froid.Etàmainsnues.)Vousavezentendu?insistecechieur.

—Oui,oui,jedescendsdansuneminute.Tout en lui répondant, je calculementalement de quelle longueur de corde je vais avoir besoin

pourl’attacheraupare-chocsdemavoituredelocationetletraînerdanslarue.—Dépêchez-vous.Mamann’aimepasqu’onsoitenretardaudîner.—Cen’estpasmamère,luirappelé-je.—Peuimporte.Pastouche.C’est unemenace indirecte, et je ne peuxm’empêcher demedemander s’il parle d’Abbyoude

Cassidy.Le dîner n’est de toute évidence pas une mince affaire àWhalen House. La table de la salle à

mangerestassezgrandepouraccueillirdouzeconvives,maiselleestdresséepoursix.Unenappeimmaculéeetimpeccablementrepasséelarecouvresurtoutesalongueur.Pouletrôtiaujus,purée,maïs,haricotsvertsetbiscuitssontaumenu.Monventregargouilleàce

spectacle,rivalisantpourmonopolisermonattentionavecladouloureusepulsationquipersistedansmonpantalon.Commejenerisquepasdepouvoirmebranlerà table, jemerésigneàassouvirunautrebesoin.Lesplatscommencentàpasserdemainenmainpourquechacunseserve.Enfin,presquetoutle

monde.CommeAbbys’occupedubonhommeassisenboutdetable,j’endéduisquec’estsonmari.Ilal’aird’avoiraumoinsdixansdeplusqu’elle–peut-êtresoixanteetquelques–etc’estleportraitcrachédeCaseyavecdesannéesetdesridesenplus,desyeuxpleinsdesagesseetunebedainedueàunpeutropdebonsrepas.—Toutal’airdélicieux,Abby,luidis-jeenprenantplacesurlachaisevidequ’ellem’adésignée

entreCassidyetl’hommequejeneconnaispasencore.Caseyestassisàcôtédesamère,justeenfacedeCassidy,etilyaàcôtédeluiunechaisequiest

restéevide.Abbypiqueunmorceaudepouletavecunefourchetteetledéposedansl’assiettedel’hommeassis

àcôtéd’elle.—Merci,répond-elle.J’espèrequecelavousplaira.—Sic’estdumêmegenrequelesandwichquevousm’avezpréparétoutàl’heure,jen’endoute

pasuninstant.—Attendez,coupel’homme.VousavezeudroitaugratinéfaçonAbby?Jen’aipaslamoindreidéedecequ’estlegratinéfaçonAbby,maissicelaressembleaudéliceque

j’aieuaudéjeuner,ilyadequoisepâmer.—Unsandwichdinde,baconetfromagefondu?demandé-je.—Oui,c’estcelui-là. (Iléclatede rirependantqu’Abbydéposeunepleine louchedepuréedans

sonassiette.)C’estlemeilleursandwichducoin.— Il est un peu partial, dit-elle en passant les pommes de terre à Casey et en prenant la sauce.

Évidemment qu’il l’est, s’il veut continuer à manger, ajoute-t-elle en riant. C’est mon Thomas.Thomas,jeteprésenteShawMatthews.—ShawMatthews?répèteCasey.(Jesuisunpeusurprisquepersonneneleluiaitencoredit.Je

hochelatêteetilajoute:)Cassidym’abeaucoupparlédevous.

—Ah bon ? fais-je avec un sourire ingénu en dépliant ma serviette sur mes genoux. Eh bien,j’auraisaiméquelaréciproquesoitvraie.Cassidy me décoche un coup de pied sous la table, mais je suis tellement habitué après les

nombreuses réunions auxquelles nous avons assisté ensemble, que je n’ai même plus besoin deprotège-tibias.—EtvoiciMiaMorgan,déclareAbbyendésignantlaretardatairequivientd’entrer.Caseyposeleplatdepuréeetse lèved’unbondpour tirer lachaiseàcôtéde lui.Miaestpetite,

avecdesyeuxnoirsetdelongscheveuxbruns,mignonne,maispasextraordinaire.Cassidyl’accueilled’unsourireaimableetchaleureuxquejeneluiconnaissaispas.Enfin,àmon

égard,entoutcas.—Bonjour,dit-elle,jesuis…—Jesaisquivousêtes.Cassidy,achèveMiapourelle.Puis elle baisse la tête et s’assoit en se rendant compte qu’elle doit passer un peu pour une

fouineuse.Cassidyal’airstupéfaitetCaseyintervient.—Ouaip.C’est…maCassidy.Ilposesurelleunregardsiinsistantquec’enestgênant,commes’ilétaitsaisid’uneémotiondont

lerestedel’assistancen’estpascenséêtretémoin.Cassidysetortille,sentantlemalaise,etbaisselesyeuxenseraclantlagorge.Cequisuffitàtirer

CaseydeDieusaitquellespenséesquiluioccupaientl’espritetàlerameneràlaréalité.—Jesuisdésoléedemonretard,Abby.J’étaisabsorbéeparunescènequ’ilfallaitquejefinisse,

sinon je risquais de perdre l’inspiration, ditMia en balayant l’air d’un geste comme si c’était uneexcuseidiote.—Ce n’est rien,ma chérie. Nous venons de commencer, de toute façon. (Abby se tourne vers

Cassidyetmoi.)Miaestauteurderomansd’amour.ElleestvenueàStoningtonpoursedocumenterafind’écrireunlivre.—Caseym’aditqu’ilyavaitunecélébritéenville,opineCassidy.Ilajusteoubliédepréciserque

vousétiezdescenduecheznous.(Ellelegratified’unemoueréprobatriceavantdereveniràMia.)Ilyamilleendroitsplusromantiquesqu’ici.Qu’est-cequevoustrouvezdesiparticulieràStonington?Cassidyétanthabituéeparsonmétieràêtreentouréeauquotidienpardessportifsmondialement

connus,ellenerisquepasd’êtreéperdued’admirationdevantcettefemme.— Eh bien, pour commencer, c’est absolument magnifique, commence la romancière d’un air

rêveur.Etensuite,monhérosestunpêcheurdehomards.QuandMiaregardeCaseyetrougit,lesourirepolideCassidydisparaîtbrièvementpourrevenir,à

lafoissemblableetdifférent.—Oh,jenepensaispasquepêcherlehomardétaitconsidérécommeunevocationromantique.—Ehbien,ditMiaenhaussantlesépaules,ilyadesfemmes,ici.Laplupartrestent,doncildoity

avoirquelquechosechezlespêcheursdehomardsquilesretient.—Oui,l’argent,ditCassidy,defaçonunpeuabrupte,avantdeprendreunmorceaudegâteau.—Enfin!s’indigneAbby.Cassidyreposelebiscuitdansleplat.

—Pardon,Abby,maistusaisquec’estvrai.(Elleprendsafourchetteetchipotedanssonassiette.)Alors,surquoivousdocumentez-vous,Mia?—Jecommencejusteàmefamiliariseraveclaville,maisjevoulaissurtoutinterrogerunpêcheur.

Comme j’écrisde la fiction, jepeuxprendrequelques libertés,mais j’aimeêtre auplusprèsde laréalité,sijepeux.Celapermetdeplongerleslecteursdansl’atmosphère,sijeleurfaisressentircequejeressens,voircequejevois,etc.Vouscomprenez?—Pasvraiment,maisc’estpeut-êtreparceque,ayantfaitdudroit, j’aitendanceàprivilégierles

faitsparrapportàlafiction.(Bim.Cassidylaisseletempsàsoninterlocutricededigérer.ElleestdenouveaulaMissGlaçondeSanDiego.)Alors,quiavez-vousinterrogé?—Moi,ditCasey,venantausecoursdeMia.—Depuisquandtuaimesexposertavieaugrandjour?ricaneCassidy.—Depuisquequelqu’uns’y intéressesuffisammentpourmeposerdesquestionsdessus, répond

Caseyavecunregarddedéfi.Celaluiclouelebec.Vaincueparlaculpabilité,ellereplongelatêtedanssonassiette.MiasemetàexpliquercommesiellecherchaitàtirerCaseydupétrin.—Quandj’airéservémachambreici,j’aidemandéàAnnasielleconnaissaitunpêcheurquiserait

disposéàmeparler.C’estellequim’aproposéCasey.—Ahoui,vraiment?rétorqueCassidy.Jemedoutaisqu’ellenepourraitpass’empêcher.Jamaisellenereculedevantunejouteoratoire,

mêmesipersonned’autrenes’enrendcompteànotretable.Moi,enrevanche,si.C’estcequ’ellefaitavecmoidepuisquejelaconnais.Samères’enrendraitsûrementcompteaussi,sielleétaitlà.—Commej’aipasmaldetempslibre,j’aiaccepté,répondCasey,histoiredejeterunpeud’huile

surlefeu.Àvoir les coups de fourchette rageurs deCassidy, il se passe quelque chosede bizarre.Elle se

comportecommeuneépousequivientdesurprendresonmarienflagrantdélitd’adultère.QuantàCasey,jenesauraisdires’ils’afficheavecsamaîtresseous’ilimplorelepardonpoursoninfidélité.Jecomprendslorsquejesurprendsunéchangequejen’auraisprobablementpasdûvoir.Pendant

queMiaestoccupéeàparlerducontextedesonroman,CaseyfixeCassidy,etsonregardglissesurmoiavantdereveniràellecommepourdire:Tun’espassiinnocentequecelanonplus.Jesuistirailléentrel’enviedeleféliciteretcelledeladéfendre.Maisj’aisurtoutenviedeprendre

CassidysurmesgenouxetdedireàCaseyqu’iln’apasàsesoucierdecequ’ellefait,puisquec’estmoiquecelaregardedésormais.Enmêmetemps,c’estuneidéeidiotedemapart.MiaterminederésumersonromanetCassidyal’airstupéfait.—Waouh!Alors,vousécrivezlabiodeCasey,engros,quoi.C’est-à-dire…lamienne.—C’estvraiqu’ilasurtoutparlédevous,oui.Vousavezjouéunrôleimportantdanssavie,vous

enavezpeut-êtremêmeétélecentre.Maisjamaisjenemepermettraisdevousexposer.L’uncommel’autre.Jesuisdésoléesic’estl’impressionquevousavezeue.Cesurquoijecomptesurtoutjouer,c’estsamanièredeconsidérerleschoses,cequ’ilpensedevousetlesextraordinairesaventuresquevousavezvécuesensemble.Sivousvoulezbien,évidemment.—Oui,c’estvraiqu’onaconnudesupermoments,seradoucitCassidy.Pasvrai,Case?—Ah,oui.Sonregardsefaituninstantpensif,puisellefaitungrandsourire.

—Tuterappelleslafoisoùonestmontésurunbateaupourlapremièrefois?—Pourtoi,paspourmoi,corrigeCasey.Maisjem’ensouviens.Commentjepourraisoublier?

Tuétaisunvraipetitmonstre.Constamment.—C’estça,répliqueCassidyenlevantlesyeuxauciel.Tuaseucequetuméritais.— C’est vrai ? demande Mia dont le visage s’éclaire avec gourmandise. Casey a eu ce qu’il

méritait?Jesuissûrequel’anecdotedoitêtreamusante.Racontezdonc.CassidygloussetandisqueCaseygémit.—Tu luiasuniquement raconté tous lesgrandsmomentsde laviedu fabuleuxCaseyMichaels,

hein?—Elle écrit un roman d’amour. Pourquoi j’irais lui raconter une histoire où je n’apparais pas

commeunhéros?— Parce que cela ferait de toi un être humain imparfait comme nous tous. Et parce que

l’imperfectionparfaite,c’estréeletsexy.—Sexy,jen’ensaisrien,s’esclaffeThomas,maisjevaisvouslaraconter,moi,l’histoire.—Vas-y,soupireCaseyàsonpère.Detoutefaçon,tularacontesmieuxquen’importequi.—Tupensesbien,ditThomas.Parcheznous, lespèresemmènent leurs filsdebonneheuresur

leur bateau pour leur apprendre les rudiments de la pêche au homard. La première fois que j’aiemmenéCaseyenmer,c’étaitàpeuprèsàl’époqueoùilaapprisàmarcher.Jevoulaisqu’ilaitlepiedmarin.—Cassidyenafaittouteunehistoire,renchéritAbby.C’étaitunvraigarçonmanqué.Jamaiselle

nes’estintéresséeauxjeuxdefilles.CelarendaitfolleAnna.ToutcequefaisaitCasey,ellevoulaitlefaireaussi.—Parcequ’ellevoulaitêtrecommemoi,ditCaseyenriant.—Ha ! Tu parles ! C’est parce que j’aimais la compétition et que je voulais te prouver que je

pouvaisfairetoutcequetufaisais,etenmieux.Cassidyetmoinoussommesaffrontésplusd’unefois,mais j’ai toujoursadmiréetrespectéson

tempéramentdecompétitrice.Bon sang,quand j’y repense, c’estprobablementcequim’excitait leplus.Enplusdesoncul.Etpeut-êtremêmesalanguebienpendue,aussi.Cespenséesn’arrangentpasl’étatdemabitetenduecontremacuissequicontinuedepalpiteretderéclamerqu’onlasoulage.—Quoiqu’ilensoit,poursuitThomas,jel’aiemmenédetempsentempsjusqu’àsesdouzeans,et

c’estàcetâge-làqu’ilacommencéàtravailler.Ehbien,Cassidyenaeuassezqu’onluidisequ’ellen’avaitpasledroitdevenir,etunmatinelleafilédechezelleets’estglisséeendoucesurlebateau.Etc’estunefoisaulargequ’elleadécidédesortirdesacachette,etcelaauraitétépluscompliquédelaramenerquedelagarder.Sanscompterqu’ons’estditqueceseraitunebonneleçonpourelleetqu’ellearrêteraitpeut-êtredenouscasserlespieds.—Çan’apasmarché,dit-elleavecunsourirenarquois.—Onétait donc en trainde remonter le chalut quandCasey a sorti unmollet d’un casier et l’a

lancé sur Cassidy pour prouver que c’était une gamine. Et il l’a prouvé, c’est sûr, dit-il en serenversantenarrièreetensefrottantlabedaine.Cemollet…—Excusez-moi,demandé-je,certaindepasserpourunimbécileenposantlaquestion.Maisqu’est-

cequec’est,un«mollet»?—C’est un homard qui s’est débarrassé de son ancienne carapace, mais qui n’a pas encore la

nouvelle, répondMia, qui rougit envoyant queCassidy la regarde, l’air impressionné.Caseym’aapprisbeaucoupdechoses.Caseypasselebrassurledossierdesachaiseetfaitungrandsourire.—Etvousavezétéuneélève trèsattentive.C’estagréabled’avoirquelqu’unqui s’intéresseaux

chosesquej’aime.—Quoiqu’ilensoit,reprendThomas,lapinceduhomardatterritsurCassidy,surson…Ils’interromptpourchercherletermeadéquat.—Monnichon,achèveCassidyenlevantlesyeuxauciel.Ellecroiselesbrassursapoitrinecommepourlacacher,maisc’estpeineperdueaveclesseins

qu’ellea.—Oui,voilà,toussoteThomas.Caseyéclatederire,etilmefautavouerquec’estplutôtdrôle.—Ristantquetuveux,petitpêcheur,rétorqueCassidyenrelevantlementon.J’aieumarevanche.—Ça,c’estbienvrai,ditThomasens’esclaffantàson tour.Cassidy luia flanquéuncrochetdu

droitetl’afaitbasculerpar-dessusbord.J’aieul’occasiondetestersoncrochet.Àvraidire,j’engardeencorelatraceàmonœilquis’en

estàpeineremis.J’yaieudroitquandj’aiinsinuédevantCassidyqu’ellecoucheraitavecn’importequipourarriveràsesfins.Évidemment,jesavaisàl’époquequecen’étaitpasvrai,maiscommeelleavait égratignémavie privée, j’avais éprouvé le besoinde riposter.D’unemanière puérile.Enfin,bref.Elleauraitdûs’occuperdesesaffaires.Entoutcas,pourlemoment,c’estellequiestsouslesfeuxdesprojecteurs.ThomasetCaseyrienttellementd’ellequecelanem’étonneraitpasquelesvoisinsentendent.Mia

etAbbymettentdutempsàsejoindreàeux,maislefourirefinitparlesgagneràleurtour.Cassidy,quifaitlatête,etmoi,sommesapparemmentlesseulsànepaspartagercettehilaritégénérale.Celadit,sijem’abstiens,c’estuniquementparcequemonentrejambedouloureuxmerappelleàsonbonsouvenir.Unefoisquetoutlemondereprendsesesprits,Caseyrespireunboncoupets’essuielesyeux.—C’estlapremièrefoisquej’airemarquéqu’elleavaitdesseins.Etjelesadoredepuiscetemps-

là.—Casey!s’indigneAbby,consternée.—PasceuxdeCassidy,maman.Lesseinsengénéral,tente-t-ildeserattraper,serendantcompte

qu’ilnefaitqu’aggraversoncas.Jeveuxdire…—Tuferaismieuxd’enresterlàaulieudet’enfoncerdavantage,mongarçon,ditThomasd’unton

paternel.—N’essayezpasdemefairelemêmecoupdemainquandnousferonsnotresortieenmer,ditMia

enluidonnantuncoupdecoudedanslescôtes.Cassidyseredresse.—Tul’emmènessurtonbateau?Jecroyaisqu’ilétaitinterditauxfilles.—JefaisuneexceptionpourMia.—Ah.Alors,jepenseque,ducoup,j’aurailetempsdevousfairevisiterlaville,enfindecompte,

Shaw.

Ellemesouritcommesinousétionslesmeilleursamisdumondeetquec’étaittoutàfaitnormal.Cen’estpaslecas,etjesuisunpeudécontenancé.—Pardon?Quoi?—Vousm’avezdemandédevous fairevisiter les environset jevousai réponduque j’avaisdu

travailà faire ici,maispuisqueMiaestnotreseuleautrepensionnaireetqu’elleseraoccupéeavecCaseydemain,jepeuxvousconsacrertoutemonattention,àprésent.Oui,ellevientd’inventertoutcela,maisjepige.EllesesertdemoipouressayerderendreCasey

jaloux. Ce n’est pas sympa. Pas parce que c’est méchant de lui faire cela – je m’en fichecomplètement–,maisparcequ’ellejoueavecmoi.Sanscompterqu’iln’estpasquestionquejesoisunpiondontelleusepourquesonpetitcopainladésireplusquel’autrefille.Cassidysepencheversmoietposesurmongenouunemainqu’ellelaisseremonteràl’intérieur

demacuisse.Celamerendfouetsijenemeretenaispas,jememettraisàgenouxpourlasupplierdemebranler.Onpourraitimaginerquec’estunesituationsexy,maisavecmesnoixprêtesàexploseretentourés demonde commenous le sommes, il n’y a absolument rien à faire pour calmer l’oragequ’ellevientdedéclencherdansmonpantalon.Jerepoussesamainenessayantderesterdiscret,étantdonnéquejenetienssurtoutpasàattirer

l’attentiond’Abby.MaislefaitquejerefusesesavancesrendCassidycurieuseetellebaisselesyeuxsurmonentrejambepourévaluer lasituation.Peut-êtremêmeque jeme tourneunpeuverselleetsouligne lachosede lamainpourqu’ellevoiebiendequoi il s’agit. J’espèrequecelasuffiraà lamettre en garde. Sauf que c’est de CassidyWhalen qu’il s’agit, la femme qui fait de ma vie uncauchemaretquial’aird’yprendreplaisir.Zut.Ellefaitunpetitsourirequin’augureriendebon.Jeconnaissuffisammentmonadversaireet

maîtresseàtempspartielpourreconnaîtrecettelueurdanssonregard.Ellevoit l’occasiondefaired’unepierredeuxcoupsetellenecomptepass’enpriver.Elle repose lamain surma cuisse avec une insistance indiquant sans équivoque qu’elle n’a pas

l’intention de se laisser déloger. Pendant ce temps, elle continue avec les autres convives uneconversation sur laquelle jenepeuxpasmeconcentrer etdont jeme fiche totalement, étantdonnéqu’elle me pétrit la cuisse. Chaque mouvement de son corps qui ponctue cette conversation n’estqu’unprétextepourremonterlamaindeplusenplushaut,jusqu’àcequesesdoigtsfrôlentmabite.Je retiens mon souffle en essayant de me retenir de jouir. Statistiques sportives, catalogue de

mobilier,imagesdeclowns–rienn’yfait.Carsamainàprésentposéesurmabiteondulelentement.J’essaie de la repousser d’un coup de coude, mais ma tentative n’aboutit qu’à la forcer àm’empoignerlabitepoursecramponner.Bonsang,maiscettebonnefemmeestunesadique.Elleinclinelatêteversmoietsemordlalèvretoutenmebranlantàtraversmonjean.C’estcuit.

L’orgasmecommenceàbouillonner,maisjefermelesyeux,tentantdevaincrelanatureparlaseuleforcedemavolonté.Jesuisentraindeperdrelabataille.Lamentablement.Etjesuissurlepointdejouir.—Shaw,vousvoussentezbien?Jesursauteenentendantlavoixd’Abbyetjecognelatabledansmasurprise.Jemanquedepasser

pourunpervers,maisaumoins,lamaindeCassidyestretournéesursesgenoux.NomdeDieu!Ladouleurdemonentrejambeagagnémonbas-ventreetilmefautdesnerfsd’acierpourquecela

nesevoiepassurmonvisage.Quelquechosedechaudetd’humideestentraindecoulerlelongde

macuisse,maisjen’aipasàréfléchirlongtempspourcomprendredequoiils’agit.Malgrétousmeseffortspourmeretenir,unpeudespermearéussiàsuinter.Onpourraitcroirequecelam’auraitunpeusoulagé,maispasdutout:aucontraire,celanefaitqu’empirerleschoses.Aussipéniblequ’uncoupdansl’entrejambe,cettesensationquimenouel’estomacmeforceàme

concentrerpournepastoutbalancersurlatable.Courirauxtoilettesestinenvisageable,carmêmesij’aicommencéàjouirdansmonpantalon,cen’estpassuffisantetjebandetoujoursautant.Etjen’aipasenviedemontreràtoutlemondelatachehumideajoutéeàcetteérectionplusqu’évidente.Jesuiscoincé.—Shaw?répèteAbby.—Houla,ondiraitquevousenavezmispartout…chantonneCassidysuruntonmoqueur.Oh,ellevapayerchèrementsondernierforfait.C’est seulement à ce moment que je remarque que j’ai cogné la table et renversé la saucière,

répandantleliquideblancetcrémeuxsurlanappe.Bonsang,c’estàcroirequ’elleavaittoutprévu.—Oui,oui,jevaisbien.Excusez-moi.Jevaisnettoyer.Jem’apprêteàprendremaserviettesurmesgenoux,maisjemeravise.Ellepeutm’êtreutilesije

n’aipasd’autrechoixquedebattreenretraite.—Nevousmettezpasenpeine,monpetit,ditAbbyenselevant.Detoutefaçon,c’estl’heurede

débarrasserettoutnettoyer.Mesgarçonssontdeslève-tôt.Ellemegratifiedenouveaudesonsourirematernelet jemesens toutpenaudàcausedecequi

vientdesetramerjustesoussonpetitnez.Toutlemondeselève,maisjenepeuxtoujourspasbouger.Jevaisdevoirattendrequelapiècese

vide,puisjevaisfileràmontour.Aprèsquoi,jevaisdevoirattendreencoreunpeu.Patiemment.Secoucherdebonneheuresignifiequ’ilyaunelumièreauboutdudouloureuxtunneldanslequel

j’aiétéemprisonnétoutecettefichuejournée.CassidyselèvepouraiderAbby,etsepenchedevantmoi pour prendremon assiette etmes couverts. Je suis sûr que c’est un simple prétexte pourmecollersesnichonssouslenez,maisj’enprofitepourlaprévenirquejecomptebienmevenger.—Àpeineleslumièreséteintes,vousserezàmoi,chuchoté-je.Etsurce,jelaissemeslèvresfrôlerletétonqu’elleastratégiquementprésentéàleurportée.Cassidy se raidit et sa peau se couvre de chair de poule.Le bruit des couverts qui tintent sur la

porcelainetrahitletremblementdesesmains.Oui,ellesaitcequil’attend.Ouplutôt:quil’attend.Etellesaitaussiqu’ellen’aurapasledroitdejouir.

7

Cassidy

IlesttardlorsqueAbbyetmoiterminonsdenettoyeraprèsledîner.Enfin,tardselonleshabitudesdeStonington,en toutcas.Outre le faitque les journéessontpluscourtessi loindans leNord, lespêcheurs sont toujours au lit de bonne heure pour pouvoir se lever très tôt. La plupart sont déjàdeboutavantmêmelespremièreslueursdel’aube.Thomas est rentré juste après le dîner, pendant que Casey restait pour raccompagner Abby.

Maintenant que je suis là, ils n’ont aucune raison de passer la nuit sur place. Shaw etMia se sontcouchésdepuisunmomentdéjà.Mia. Je ne sais pas trop à quoim’en tenir sur son compte pour l’instant,mais elle a l’air d’en

savoirsacrémentlongsurCasey.Étrange.Ils’esttoujoursmontréplutôtréservésursavie,avectoutle monde, sauf moi, évidemment. Maintenant, voilà qu’il s’épanche auprès de cette Mia Morgancomme si… comme si c’était moi. Cela ne me plaît pas. D’autant plus que certaines de sesconfidencesdévoilentaussiquelquesdétailsdemavie.Probablementlaplupart,àvraidire.Enéteignant la lumière, jenotementalementqu’il va falloirque je le cuisine afinqu’ilmedise

précisémentcequ’ellesait.Lamaisonestplongéedanslapénombre,endehorsdupâleclairdelunequi filtre par les fenêtres. Cela n’a aucune importance. Lemobilier ayant toujours été à lamêmeplace, jepourraismedéplacer lesyeux fermés si nécessaire. Jemonte l’escalier, l’instinct guidantmespaspouréviterlesmarchesquigrincent.En entendant le froissement de mes vêtements alors que je gagne ma chambre, je me rends

brusquementcomptequ’ilrègneunsilencesurnaturel.Nonseulementdanslamaison,maisdanstoutStonington.Pasdesirènesdebateaux,pasdevoixdepêcheursquisehèlent,pasdecrisd’oiseauxnidebruitsdevaguessurlajetée.C’estcommesiDieului-mêmeavaitexigélesilenceparrespectpourlespêcheurs.Voilàqui tombebienpourunevillequi traitesaprincipalesourcederevenuscommeunevéritablereligion.Arrivéeenhaut,j’hésite,sentantuneprésenceinvisible.Jesaisqu’onm’observeetj’enailachair

de poule. Toutes les portes sont closes, sauf celle dema chambre,mais elle est trop loin dans lecouloir pour que le clair de lune parvienne jusqu’ici. Peut-être quemon espritme joue des tours,maisjejureraisentendreunerespiration.Jen’aipasbesoindemeteniràlarampe,maisjemecollecontreelle,ainsipersonnenepourrame

sauterdessusdececôté.Soudain,j’entendsuncraquementetjelaisseéchapperuncridesurprise.Une silhouette sombre surgit de l’ombre,mais avant que je puissem’enfuir, deux robustes bras

m’enserrent et m’empêchent d’identifier mon agresseur. Jeme raidis instinctivement, mais le flotd’adrénaline qui se déverse enmoi est provoqué par une excitation née de la peur. Une peur quej’éprouvealorsquejesaisquiestcethomme.Sonodeur,lesbattementsdesoncœurcontremondos,l’énergiequisedégagedelui…toutcelaestfamilieretbienvenu.LeslèvresdeShawfrôlentmonoreilleetsonhaleinemebrûlelecou.—Mmm,regardezcequejeviensdedécouvrirentrainderôderdanslanuit.Je souris,bienqu’ilnepuissevoirmonvisage, car je saisdequoi il retourne. Jemedétendset

m’arc-boutepourtaquinersonsexedurcollécontremesreins.—Quesepasse-t-il,vousêtesaugarde-à-vous?Sonpetitrireestmenaçant,etsavoixencoreplus:—Vousallezvousfairebaiser.Commejel’entends.Toutdesuite.Ceneserapasagréable.Jene

prendraipasmon temps.Etvousn’en retirerez aucunplaisir. (Ilmemordille le lobede l’oreille.)Voustrouveztoujoursceladrôle?Non,pasdutout.Jecroistoutcequ’ilm’adit.Maisilsetrompesurunpoint.Jevaisytrouverdu

plaisir.Énormément.D’ungestebrusque,ilmepousseenavant.Bienqu’ilnemedisepasoùjedoisaller,jesaisoùje

vaisl’emmener.ShawMatthewsestdansmavillenatale,chezmoi,etjevaislemettredansmonlit.Jemedirigealorsversmachambre.Jenemeretournepaspourregarderpar-dessusmonépaule.

C’estinutile.Ilvamesuivreetiln’apasbesoindelumièrepourmevoir.Àn’enpasdouter,jelaisseunetraînéedephéromonesqu’ilpeutsuivrecommesinousétionsdesanimauxdanslanatureauplusfortdelasaisondurut.Àpeinesuis-jeentréedansmachambrequejemeretourneetmeretrouvecolléecontresapoitrine.

Dans le clair de lunequi filtre par la fenêtre, je peuxvoir lemoindredétail de sonvisage. Il a lamâchoirecrispéeetlesnarinesdilatées,tandisqu’ilbandesesmusclespourseprépareràl’attaque.Lemoindretressaillementleferabondir.Unsourireespièglesedessineaucoindemeslèvres.MonDieu, que j’ai envie de le voir s’élancer. Du coup, j’entrouvre les lèvres et je laisse échapper unsoupir.Shawbondit,seslèvress’écrasentsurlesmiennesetsesmainspuissantesagrippentmeshancheset

meserrentcontrelui.Fébrilement,ilentreprenddem’aideràmedéshabiller.J’empoignemonpullàdeuxmainsetlefaispasserpar-dessusmatête.Shaw,quim’adéjàbaissé

monlegging jusqu’auxchevilles,attend impatiemmentque jedéfassemeschaussuresd’uncoupdepiedafindeterminersatâche.Jem’exécuteetjesensl’airfraissurmesfessesnues.Sansdoutequelaculotteaétéemportéeaveclelegging.Avantquejepuissem’occuperdemonsoutien-gorge,Shawl’adéjàenlevé,m’aallongéesurlelitets’estglisséentremescuisses.Ses lèvres sont partout surmoi et m’embrassent furieusement la bouche, le cou et les épaules,

tandisqu’ildéfaitsaceinture.J’essaiedel’aideràôtersachemise,maisilesttellementfocalisésursonpantalonqu’ill’aapparemmentoubliée.Auxabois.Sesgestes sontdésespérés et pressés, et je saisprécisémentpourquoi. J’aiunpeude

peinepourlui.Iln’apaseusapartdeplaisir,alorsqu’ilaétéplusquegénéreuxpourmoi.Cen’estpas juste.Donc, jem’abandonneet jem’offreà lui comme l’agneausacrificielpourqu’il fassedemoicequebonluisemble.

Etilnes’enprivepas.Sans unmot, sansmême s’être assuré d’une caresse que je suis prête, Shawme pénètre. Jeme

cambredevantcetteprésencesoudaine.Bienquecenesoitpaslapremièrefoisqu’ilmeprend,étantdonné qu’il est particulièrement gâté par la nature, le manque de préliminaires me distenddouloureusement.Shawgémitetcecrideplaisiretdesoulagementmegonfledefierté,carj’ensuislacause.Ilne

s’arrêtepas,iln’attendpasquejem’habitueàlui,nes’assurepasquetoutvabiendemoncôté.Levisageenfouidanslecreuxdemoncou,ilm’empoignelescuissesetlesécartelargement.Clouéesurlelitparsonpoids,jenepeuxquesubirsessauvagescoupsdereins.Profonds,violentsetagréables,uniquementpourlui.Normalement,Shawn’estpasunamantégoïste.Ils’esttoujoursassurédemonplaisir,maisilest

évidentque,enl’occurrence,ilfaitpasserlesienavant.Ilyaquelquechosedetotalementérotiqueàsavoirquel’onestl’instrumentduplaisird’unautre.Maisl’orgasmequecelameprometneviendrapas.Rien de plus que trois grognements de fauve et il se retire rapidement. Il empoigne son sexe et

l’astiquesisauvagementquejeneparvienspasà imaginerquelplaisircelapeut luiprocurer,maisson sperme brûlant vient se répandre en plusieurs giclées sur mon ventre. Je me caresse en leregardantfaire,carjetrouvelespectaclesexyetjesensl’orgasmemonterenmoi.Shawmesaisitlamainetlacloueaumatelas.—Pasquestion,gronde-t-il.Vousm’avezlaissédeuxfoisinsatisfait.Etvousavezdécidédejouer

avecmoidurantledîner,avecdumondeautourdenous,carvoussaviezquejenepourraisrienfaire.Samainlibreseposesurmachatteetsesdoigtsmemassentleclitorisjusteassezpourmeforcerà

me tortiller.Encore. J’aibesoinqu’ilmecaresseavecplusd’insistance,plusde force,plusde…Ilreprenddeplusbelle:—Vousm’avezinfligéunegrandefrustrationetvousm’avezmisdansunesituationgênante.(Il

regarde ses doigts, apparemment fasciné parma réaction à ses caresses.Et pour réagir, je réagis,encorequecelaneservepasàgrand-chose.Jemecambreetonduledeshanchespourmefrotteràlui,mais il se dérobe.)Vous pensiez que je neme vengerais pas ? demande-t-il d’un tonmenaçant. Jepourrais,voussavez,jepourraisvouslaisserenplan.Jedevraislefaire.Jefermelesyeux,conscientequ’ilpourraitbienlefairemaispriantpourqu’ilreste.Aprèstout,ce

seraitmérité.—Maiscontrairementàcertains,jamaisjeneseraisaussicruel.Ilenfonceprofondémentundoigtenmoi.Jeserrelespoingsetravalelegémissementquimonte

dansmagorge, incapable de réagir autrement. Puis il commence à bouger le doigt et titillermonpointG.MonDieu,cethommeauraitdûêtrepianiste.Jemerendscomptequec’estpeut-êtreunpiège,uneformedesupplicecommelafoisoùilm’a

faitfrôlerleplaisiràmaintesreprisessurmonbalconavantdemelaisserenfinjouir.Peut-êtrequ’ilvarecommencer.Dansuncascommedansl’autre,jenepeuxignorercequ’ilestentraindemefaire.Jemedélectedechaqueinfimecaresseetmelaisseconduireaubordduprécipice.—Pasencore,chuchote-t-il.Avantquej’aiepumerendrecompte,Shawcessesonmanège.Ilm’empoigneetmetirejusqu’au

borddulit,meretourneetmeforceàmepencherenavant,lajouecontrelematelas.Ilmetientparlanuquependantquesesdoigtscaressentleslèvresdemachattedansd’incessantsva-et-vient.

—Quec’estbeau,dit-il.Je le vois encoredebiais,mais il neme regardepas.Dumoinspas le visage.Son attention est

dirigée plus bas. Jemouille de plus belle en voyant sa fascination, comme si mon entrejambe sepréparaitàsedonnerenspectaclepourlui.Il plonge ledoigtdansmes chairs et le ressort trempépour caressermonanus. J’ai enviede le

recevoirenmoi,mêmesijesaisquecelavamefaireunmaldechien.Maiscen’estpassonintention.Une fois deplus, sondoigtmepénètre et reprend ses caresses comme s’il appelaitmonorgasme.Celanevapastarder.Surtouts’ilcontinuedepressersonpoucecontremonanus.Apparemment insatisfaitparcetteposition,Shawsemetàgenouxderrièremoietm’introduitun

deuxièmedoigtpourselancerdansdesva-et-vientàlamêmecadencequesabitequelquesinstantsplustôt.Jemecramponneàlacouetteetmemordslalèvreenregrettantdenepaspouvoirlemordrelorsque le dos de samain claquemon clitoris à chaquemouvement. Il s’enfonce si profondémentqu’iltouchecepointparticulierenmoietquejenepeuxrienfaired’autrequemecrisperenattendantquel’orgasmesedéchaîne.Ilmebranledeplusenplusviteetviolemmentavecsesdoigtstandisqueseslèvresembrassentmesfessesqu’ilécartedesonautremain.Monanusquisedistendm’offreunedélicieusesensationquinefaitqu’amplifierlesautresmerveillesquimefonttournerlessens.Puisc’estlasensationbrûlanteethumidedesabouchesurcetorificeinterditquimefaitbasculer.Ladiguecèdeet lapuissancedemonorgasmejaillit, libérée.Sachaleurruisselle le longdema

cuisse tandisquemoncorpsseraidit,que jeserre lesdentsetquemonventresecontractepour lelaissers’échapper.Jamaisjen’aijouiavecunetelleintensité,unetelleférocité.—Putain.C’estcommeçaquejel’aime,grondeShawavantdememordillerlecul.Ilenlèvesesdoigts,maiscontinuedecaresserdélicatementmachairàvifcommes’ilcalmaitun

animalsauvageencolère.Moncorpsnepeutensupporterdavantageetjefinisparm’effondrer.Jesuisincapabledebougeroudeparler,etàpeinederespirer.Mespaupièressontlourdesetmonesprits’engourdit dansun comaorgasmiquequi paralyse toutmon corps.Cela va être le trounoir d’uninstantàl’autre,etj’aitoutjusteletempsdevoirShawquiremontesurmoncorpsnulacouverturerestéeaupieddulit.—Jevousenprie.Dormezbien,chuchote-t-ilavantquejesenteseslèvresfrôlermajoueetqueje

sombredanslesommeil.Le lendemain matin, je roule sur le côté, m’étire délicieusement avant de me pelotonner de

nouveau contre l’oreiller avec lequel jeme suis endormie. J’ouvre les yeux avec un grand soupird’aise en voyant une aube éblouissante qui teinte l’horizon d’unmélange d’orange, de rose et debleuséclatants.Jeme rappelle ce lever de soleil. Je l’ai vu enme réveillant chaquematin pendant des années,

depuismapetiteenfancejusqu’aujouroùj’aiquittéStoningtonpouralleràl’université.Maiscetteaubemeparaîtdifférente,jenesaispaspourquoi.Pourlapremièrefoisdepuistrès,trèslongtemps,jemesens…rafraîchie,peut-êtremêmeunpeurajeunie.En repoussant les couvertures d’un coup de pied pour bien commencer la journée, jeme rends

brusquementcomptequelapièceestglacéeetquejesuisnue.Tousmeshabitssontéparpilléssurleplancher.Unsourireéclairemonvisagequandlessouvenirsdelanuitprécédentemereviennentunàun.Shawm’aoffertunsacréorgasme.Lemeilleurquej’aie jamaiseude toutemavie.Jemerends

compteaussiqueShawasouillélacouette.Celadevraitmedégoûter,maiscequimesoucieleplus,

c’estdetrouverlemoyendeladescendreàlabuanderieavantqu’Abbyladécouvre.Sanscompterqu’ilfautaussiquejeprenneunedouche.Quelquesminutesplustard,Abbypasselatêtedanslabuanderiealorsmêmequejeviensdelancer

lamachine.—Ah,tevoilà.Allez,nousdevonspréparerlepetitdéjeuner.Qu’est-cequetulaves?demande-t-

elleens’approchantpourvoir.—C’estjustemacouette,dis-je.Ellesentaitunpeulerenfermé,alorsjemesuisditqu’ellen’avait

pasétélavéedepuisunmoment.Lesdemi-véritéssontpréférablesauxmensongeséhontés.—Ah,fait-elle.(Puisellemeregardeetsecouelatête.)Seigneur,mapetite,maistun’espasencore

habillée?(Jebaisselesyeuxpourm’assurerquejesuistoutdemêmehabillée,–j’aitrouvéunshortau fond d’un tiroir que je portais pour dormir à l’époque du lycée –, mais pas habillée pour lajournée.)TuespartiedeStoningtondepuistroplongtemps.Tuasdeshorairesd’actrice.(Elleéclatederireets’envaavecungeste.)Allez,jevaism’occuperdupetitdéjeuner,MissHollywood.J’adoreAbby.Toutlemondel’adore.Medoucheretm’habillernemeprendpaslongtemps.LesfemmesdeStoningtonsontsimpleset

sans chichis. Bien que la plupart ne semaquillent pas du tout – et c’est ainsi que les hommes lespréfèrentici–,jenesuispasdecelles-là,maisjemeborneàmettreseulementunpeudemascara.Jenem’attachepaslescheveuxetj’enfileundébardeuretunevieillechemiseàcarreauxavecunjeanetdesbottesquejen’aipasmisesdepuisladernièrefoisquejesuisvenue.Aprèsquoi,jedescendspourlepetitdéjeuner,carilnefautsurtoutpasqu’Abbydécidedemontermechercheretmeramèneenmetirantparl’oreille.Maisjen’aipasbesoindem’inquiéterpourcela.AbbyesttrèsoccupéeavecShaw,àquiellesert

uneportiondepancakesetdesaucissesquirassasieraitunbûcheronetqu’ilenfournegoulûment.Jen’aijamaisvuShawaussi…gamin.C’estmignon,maisunpeutroublant.—Qu’est-cequitemetdesibonnehumeur?demandeAbbyenmevoyantsurleseuil.Jesensmesjouesquiretombent:jedevaissouriresansm’enrendrecompte.Maispourquoipas?

C’estunejournéemagnifiqueetjemesensenpleineforme.—Oui,dites-nouspourquoivousêtesaussiresplendissante,cematin,melanceShawavecdéfi.Jemedirigeverslacafetièred’unpasdésinvolte.— Je n’en ai pas lamoindre idée, figurez-vous. Je crois que j’ai eu quelque chose dont j’avais

énormémentbesoinhiersoir,dis-jeenmeservantetenluifaisantunsourirenarquois.Ilmerépondparunclind’œilenmastiquantavecunemimiqueunpeutropsexy.C’estlapremière

foisquejevoisquelqu’unquiréussitàmâcherd’unefaçonquasiporno.JejettemêmeunregardàAbbypourvérifierqu’ellen’arienvu.—Ehbien,unebonnenuitdesommeilfaittoujoursdubien,dit-ellesansavoirrienremarqué.Du bruit à la porte nous fait tous tourner la tête. Je vais voir ce qui se passe et mon sourire

s’agrandit.—Maman!Dieumercituesrentrée!dis-jeenposantmatassepouraidermonpère.Mamanestdansunfauteuilroulant,sajambesurélevéedansunplâtre.Touslesdeuxsebagarrent

aveclaporte.—Pourquoitun’espaspasséparlacuisine?demandé-je.

—J’aipenséqueceseraitplusdifficiledelapousseraveclegravier,grommellemonpère.Etpuisnousavonsfaitinstallerunplaninclinédevant.Autantqu’ilserveàquelquechose.—C’estunevieilletêtedemule,ditmamanentendantlesbraspourm’étreindre.—Attendez,laissez-moivousaider.DevançantAbby,Shaws’empressedeprendrelesacdesmainsdemonpère.—Quiêtes-vous?demandecelui-ci.—Unpensionnaire,alorssoisaimable,réponds-je.—Pensionnaireoupas, jecroisquejesuiscapabledeporter lespetitesculottesdemonépouse,

renchérit-ilendésignantlesac.Shawleluirend,surpris.—Oh,excusez-moi.Jevoulaisseulementvousaider,monsieur.ShawMatthews,ajoute-t-ilenlui

tendantlamain.Ravidefairevotreconnaissance.—DuffWhalen,ditmonpèreenluiserrantlamain.Etcettecharmantecasse-couestmafemme,

Anna.Noussommeslespropriétaires.—J’espèrequevousavezpasséunagréableséjourjusqu’ici,ditmamèreenluisouriant.Abbyest

auxpetitssoinspourlesclients.—C’esttoutàfaitcela,répondShaw.—Ehbien,maman,dis-jeensoupirant.C’estunebonnechosequetachambresoitenbas.Sinon,je

nesaispascommentnoust’aurionsmiseaulit.—Jel’auraisportée,plastronnemonpèreengonflantlapoitrineetenrentrantleventre,refusant

qu’onpuissel’imaginerincapabledelefaire.— Heureusement pour ton dos, tu n’y seras pas obligé, répliqué-je en l’embrassant pour le

récompenserdevouloirsecomporterenhérospourmamère.Allez,onyva!Alorsquejem’apprêteàdébloquerlesrouesdufauteuilpourlapousserverslefonddelamaison,

mamèrem’arrêted’ungeste.— Je n’ai rien fait d’autre que de rester allongée depuis des jours. Si tu crois que tu vas me

remettredansunlit,tutetrompes.Etpuiscen’estpaslemomentdesereposer.Ilfautêtreprêtpourdemain.MonDieu,qu’est-cequ’elleestencorealléeinventer?—Qu’est-cequ’ilyademain?questionné-je,redoutantlaréponse.—Toutelavilleaorganiséunefêtepourtonretour,avecunpique-niqueentonhonneur.J’enétaissûre,songé-je,accablée.—Maman,enfin.Tun’ypensespas!Turentresàpeinedel’hôpital.—Etjevaistrèsbien.—Tuasconsciencequeriennepourralafairechangerd’avis,n’est-cepas?meprécisemonpère.— Oh, ne t’inquiète pas, Cassidy, intervient Abby. C’est mon Anna qui va donner les ordres,

pendantquejeferaitoutleboulot.Ellemegratified’unclind’œil,commesicelapouvaitmeréconforter.Peut-êtreunpeu,maisà

peine.Même si jeme fais du souci pourmaman, je sais qu’elle vabien et qu’Abby etmonpère ne la

laisserontjamaissefatiguer.Jecroisquec’estsurtoutcettefêtepourm’accueillirquim’inquiète.Jenesuis làquepourquelques jours.Maiscommeje l’aidéjàdit,Stoningtondétesteperdre l’undessiens.Cen’estdoncriendeplusqu’unetentativedemeconvaincrederester,cettefêtequimobilisetoutlemonde.Enfin,lesfemmes.Carpourleshommes,cen’estqu’unesimpleexcusepourmanger,boireetmontrerleursbateaux.—C’estunedureàcuire,ditpapa.—Etàproposdecuisson,ditAbbyensetournantversShaw,j’aiunefournéedecookiesquivous

attendàlacuisine.Allezvousenchercherquelques-uns.—Oh,quevousêtesgentille,Abby,faitShawavecunsourired’enfantgâtéavantdeluidonnerun

baisersurlajoueetdefonceràlacuisine.Jesuisétonnée.CelafaitdeuxjoursqueShawestlàetcesdeux-làs’entendentcommejamais.Peut-

êtrepascommeunvieuxcouple,maisen toutcas, leurrelationdépassecellequise tisseentreunemaîtresse demaison et son invité pour frôler les liensmère-fils. SiCasey avait vu cet échange etsavaitqu’Abbydonnesescookies…Jefrémisrienqued’ypenser.Abbysetourneversmoiaumêmemoment.—Jevaism’occuperdetoutpendantquevoussortez,touslesdeux.Assure-toidel’emmeneràla

carrière.Ilaeul’airintéresséquandjeluienaiparlé.Elle prend le fauteuil demaman et le pousse.Àn’en pas douter, le salon va devenir le quartier

généraldel’opération«RetenirCassidy».—Etiln’enrestaplusquedeux,dis-jeengloussantàmonpère.Monpèremedévisageavecundrôled’air.—Vas-y,jet’écoute,papa.—Rien,dit-ilensecouantlatête.Vat’amuser,maisnousenreparleronsplustard.—Dequoi?—Toiettonnouveaupetitcopainsouslemêmetoit.Montoit,dit-ilendésignantlacuisine.Vous

avezintérêtàdormirchacundansvotrechambre.—Cen’estpasmonpetitcopain,papa,dis-jeenlevantlesyeuxauciel.—Quandtuétaisplusjeuneetquetuavaisdesennuisàcausedetesbêtises,tut’imaginaistoujours

que quelqu’un t’avait dénoncée. (Parce que c’était le cas, songé-je.) Personne ne te dénonçait,continue-t-ilenpointantl’indexsurmoi.C’esttoiquitedénonçaistouteseule.J’aitoujourssuquetufaisaisunebêtiseparcequetufaisunegrimacequandtumens.Ettuviensdelafairequandtum’asditquecetypen’estpastonpetitami.Je ne sais pas quoi lui répondre. Pour commencer, j’ai apparemment un tic dont je n’ai pas

conscience.Etdeuxièmement,Shaw,monpetitcopain?Jelèvementalementlesyeuxauciel.—Letoutestdesavoiràquitumens.Àmoiouàtoi-même?Etsurcesmots,papameplantelà.Jen’aiguèreletempsderéfléchiràlaquestion,carShawarrive

d’unpasguilleretdelacuisineavecuncookieentreleslèvresetunsacrempliàlamain.—Toutestprêt,sourit-il.Je secoue la tête en riant, tellement il est adorable. Les cookies d’Abby ont fait une nouvelle

victime.

8

Shaw

Lavisitedelavilleest…brève.DeerIslen’estqu’unpointsurlacarteetStoningtonn’enoccupequ’unecentainedekilomètrescarrésà l’extrémité,dont seulementunquartde terres, le resteétantconstitué d’eau. Je me fais beaucoup dévisager par les gens du cru, surtout les pêcheurs quireviennent de leur sortie enmer pour se remplir la panse de pizzas – sorties du four de l’uniqueépicerielocale–etd’alcool.Bienquelaplupartsoientaussijeunesquemoi,sinondavantage,ilsparaissentdixansdeplus,avec

leurs trognesmal rasées et leurpeau tannéepar le soleil. Ils sont tous sans exception tellement enforme que j’éprouve le besoin de rentrer le ventre et bomber un peu le torse, et aucun d’eux nemanquel’occasiondemetoiser.Sansdoutequemesvêtementsbienrepasséssevoientdanscetocéandechemisesàcarreauxetdejeanscriblésdetrous.Aumoins,macoiffureal’airconformeàlamodelocale, mais je pense qu’eux se lèvent comme ça, alors quemoi je passe un temps fou devant lemiroir.TousconnaissentCassidy.Presquetousceuxquenouscroisonss’arrêtentpourdemandersielleest

deretour–alorsqu’elleestlàsousvotrenez,bandesd’andouilles.Cassidyrépondàchaquefoisensouriantqu’ellelesverraaupique-niquedulendemainavantderâlerdèsqu’ilsontledostourné.Jenecomprendspas.La satanéevillenataledecette filleorganiseune fêtepour son retouret tout lemondeal’airravidelavoir,maiselle,elleronchonne!BonDieu,qu’est-cequejenedonneraispaspouréchangernosviesjusteunejournée,letempsqu’ellevoiequellechanceellea.AlorsquenousdescendonsMainStreetpourrentreràWhalenHouse,unedizainedecamionnettes

nouscroisentetklaxonnentpourlasaluer.C’estlàquejecommenceàfaireattentionetregardetouslesvéhiculesgaréssurlecôtédelarue,maissurtoutsurlequai.Àpartunepoignée,cesonttouslesmêmes.—Toutlemondeconduitunecamionnette,parici?demandé-je.LabrisevenuedelabaiesoufflelescheveuxrouxdeCassidysursonvisage.—Nan,répond-elled’untonsarcastiqueenlesécartant.Justelesvraishommes.Commec’estspirituel,songé-jeenvoyantmapetitevoituredelocationdevantlamaison.—J’aientendudirequepluslevéhiculeestgros,plusl’enginestpetit,contré-je.

—Ehbien,onpeutappelerundesgarspourvérifier.—Maisoui.Çaneseraitpasgênantdutout.«Excusez-moi,dis-je,imitantunpauvrescientifique

tout timide, mais nous menons une étude pour savoir si les hommes qui conduisent de grossescamionnettesontunpetitpénis.Pouvons-nousvoirlevôtre?»—Vousneconnaissezpaslesgarsd’ici,répondCassidyenriant.Ilsvouslasortiraientsansqu’on

aitbesoindedemander.Faites-moiconfiance,ilsnes’embarrassentpasdefaux-semblants.—Vousditescelacommesiçaarrivaitrégulièrement.— Il faut que vous compreniez où vous êtes. Nous n’avons pas de centres commerciaux ni de

boîtesdenuit.Iln’yarienàfairepariciàparttraîneràl’épicerieouroulerauhasardenbuvantdelabière.L’ennuivousconduitàfairetouteslesbêtisespossibles.(Ellemeprendlamainettraverselarue.)Biensûr,ilyauneseulechosequipeutfairepasserletempsetsoulagerl’instinctdestructeurd’untypequis’ennuie.Jelaforceàs’arrêterenlatirantbrusquementversmoietjehausseunsourcil.— Si j’apprends que vous avez joué le rôle de chef des distractions de Stonington, vous allez

prendrecher.Trèscher.L’idéedeCassidydistrayantdesbonshommesmedonneenviedetouslesdécapiteretdémembrer

dansunrayondemillebornesautourdelaville.Elleéclatederireenrenversantlatêteenarrière,sigracieusementquejemeradoucis.—Pourcommencer,nousn’avonspasdeprison.Lapolice localeseborneàunseulhomme,et

c’est plus un temps partiel.On le garde seulement pour qu’il gronde les damesmal garées.Nousfaisonslapolicenous-mêmes.C’estplusefficacecommeça.Etensuite…L’attentiondeCassidyestbrusquementattiréeparunpiaillementdegaminesurlajetée.Ondirait

queCaseyetMiasontrentrésdeleuréquipéeenmeretqu’elleadumalàgardersonéquilibreenretrouvantlaterrefermeaprèsleroulisdubateau.Commedebienentendu,Caseylarattrape,maissimaladroitementqu’elle lui tombedans lesbras.Cassidynepeutdétourner leregardetmoi…jenepeuxm’empêcherdel’observer.—Etensuite…reprend-ellesansdétournersonattention,avantvous, jenesuisalléequ’avecun

seulhomme.Maisc’étaitilyatrèslongtemps.(Elleseretourneversmoiavecunsouriregênéquinelarendpasmoinsbelle.)Nousferionsmieuxderentrerpourquejepuisseaideràpréparerledîner,avantquemamannevienneenclopinantmehouspiller.Etn’imaginezpasunesecondequ’ellen’enseraitpascapable.Cassidy remonte l’alléeet se retourneunedernière foispour jeteruncoupd’œilà la jetée.Bon

sang,c’est seulementàcet instantque jeprendsconsciencede toutcequenousavonsencommun.Peut-êtrequeniellenimoinesommescapablesdesurmonternotrepassé,mêmeennousenfuyanttrèsloin.C’estunpuddingauxmyrtillesquicomposeledessert.JecomplimenteabondammentAbby,quime

répondquelemériteneluirevientpascettefois,carellenel’apaspréparé.D’accord,Mrs.Whalenpeutelleaussis’occuperdelacuisine,maisellerépondquecen’estpasellenonplus.Imaginezmasurprise quand je me tourne vers la seule autre possibilité qui reste et que je trouve Cassidyrayonnantedefierté.Bonsang,cequej’aienvied’elle.Cequin’échappepasàsonpère.Àvraidire,jecroisquerienne

luiéchappe.Ilneparleguère,maisjesenslepoidsdesonregardsurmoialorsqu’ilobservechacun

de mes mouvements et pèse chacune de mes paroles. Exactement comme Cassidy a toujours fait,finalement.Sansdoutequec’estdeluiqu’elleapriscela.Jesuisforcédemedemandercequ’elleapu lui raconter sur mon compte, car j’ai l’impression qu’il est convaincu que je saute sa fillerégulièrement et qu’il a l’intention dem’égorger dansmon sommeil.Nul doute qu’un bonhommecommeDuffWhalensauraitoùdissimuleruncadavre.Etdanslecascontraire,jesuissûrquelavilletoutentièreseligueraitpourcouvrirlemeurtre.Casey,l’empêcheurdebaiserenrond,lepremier.Craignantunpeupourmavie,jepréfèreéviterdemefaufilerdanslachambredelafillepréférée

deStoningtondeuxnuitsdesuite.Jemedisqu’unpetitpeud’airmarinmeferadubienetjesorssurlavérandamedétendresurlabalancelle.Denouveau,Stoningtonestplongédanslanuit,assoupietsilencieux. Jeme rends compte que c’est probablement comme cela jour après jour : se réveilleravant l’aube, manger, pêcher, manger, se coucher. Et recommencer. Quel ennui. Pas étonnant queCassidyaitfichulecampd’ici.Etjustement,lavoiciquisortmerejoindre,unplaidsurlesépaules.—Vousn’avezpasfroid?demande-t-elle.Bienquecesoitleprintemps,l’airestencorefrisquetàlatombéedelanuit.Étantnéetayantvécuà

Detroit,j’ail’habitude,maiscelaneveutpasdirequejevaismanquerl’occasionquis’offreàmoi.—Unpetitpeu.Pourquoinevenez-vouspasprèsdemoicommetoutebonnehôtesse?Ellemejetteunregardsoupçonneux,maisellevienttoutdemêmes’asseoiràcôtédemoisurla

balancelle.Commejenepeuxmecontenterdepartagerunplaid,jelaprendsparl’épauleetl’attirecontremoi.—Voilà,c’estmieux,luidis-je.Jenecomprendspaspourquoiellemeregardecommesij’étaistombésurlatête.Ilfaitfroid:la

chaleurcorporelleestunesolutionlogique.Rentrerdansunemaisonchaufféeaussi,maiscen’estpaslaquestion.Jenesaispastrèsbienquelleestlaquestion,àvraidire.Jesaisseulementquej’aienviequ’ellesoittoutprèsdemoietjesuisheureuxqu’elleselaissefaire.—Alors,soupiré-je.Grospique-nique,demain,hein?Jelasensleverlesyeuxaucieltandisqu’ellelaissetombersatêtesurmonépauleengémissant.—Nem’enparlezpas.—Dites donc, vous êtes une vraie célébrité, par ici, continué-je en la serrant contremoi.Vous

devriezêtrecontente.Unpique-niqueenvotrehonneur?—Ce n’est pas aussi extraordinaire que vous l’imaginez.C’est juste leurmanière à eux deme

culpabiliser.—Personnen’ajamaisorganisédepique-niqueenmonhonneur.Etsic’étaitarrivé,jenevoispas

dutoutpourquoicelam’auraitculpabilisé.—Ilfautquevouscompreniezquecen’estriend’autrequ’untraquenard.Onvousattireavecla

promessedebienmangeretdevousamuser,etbim!Tousceuxquevousconnaissezsepointentpourvous souhaiter la bienvenue à la maison, « là où est votre place », ajoute-t-elle en mimant desguillemets,etonvousculpabilised’êtrepartie,envousdisantcombienonasouffertdevotreabsence.Vousavezdelachanceden’avoirjamaisdûsubircegenredetorture.—Delachance?Cassidy,mesparentsnesaventmêmepasoù jesuisencemoment.Et ilss’en

contrefichent.Vouscroyezquejelesaiabandonnés.Pasdutout.C’esteuxquim’ontabandonné.—MonDieu.Jesuisvraimentdésolée,Shaw.

—Ne lesoyezpas.Celam’aaguerri.Maismonséjour icimefaitcomprendrecequiamanquédansmavie.—C’est-à-dire?—Jen’aijamaiseuunvrairepas.(Lavoyanthausserlessourcils,j’explique:)Jenemerappelle

pasavoirétéàtableavecmesparents.Àvraidire,ilsnem’ontjamaispréparéunseulrepaschaud.Jemenourrissaisdecéréales,et laplupartdutemps, jecroisais lesdoigtspourquele laitnesoitpastourné.Jenesaisabsolumentpaspourquoijeluiconfietoutcela.Jen’aijamaisrienditàpersonnedema

vieprivée.Cassidyensaitplusquequiconqueuniquementparcequ’ellen’acessédefouinerjusqu’àcequ’elledécouvredestrucs.Maispascettefois.Cettefois,jeveuxqu’ellesachequejenesuispasunsalaudégoïste.Cettefois, jeveuxqu’ellesachequellechanceelleaquedesgenstiennentàelle.Mêmesic’estlapopulationentièredesavillenatale.Aumoins,elleaunfoyer.Aumoins,elleaunemère.—Abbyaétéplusunemèrepourmoiendeuxjoursquelafemmequim’adonnénaissancedurant

toutemavie,avoué-je.Cassidysetourneversmoiavecunregardcompatissantquejeneconnaisquetropbien.Etcelane

m’irritepas,contrairementàcequej’auraisimaginé.—Jesuisdésolée,murmure-t-elle.Merde.Finalement,si,çam’irriteunpetitpeu.—Nelesoyezpas.Cen’estpasvotrefaute.—Non,jesuisdésoléedem’êtreméprisesurvotrecompte,avoue-t-elle.ÀDetroit.EtàSanDiego

aussi,pourlecoup.MonDieu,j’aiétéunevraiegarce.C’estvrai.Ellem’afaittoutunsermonparcequ’ellepensaitquejevivaisdansleluxependantque

mes parents habitaient un taudis au cœur d’une ville bien connue pour sa criminalité et sondélabrement.Sielleacrucela,c’étaitmafaute,enfait,maisjevaisbienmegarderdeleluidire.—Cen’estrien,dis-jeenlaserrantcontremoipourqu’elleposelatêtesurmonépaule.(Jesuis

surprisd’avoirjouélacomédieaussilongtemps.Cen’estpluslapeine,maintenant.)C’estpeut-êtreagaçant,maisnevousplaignezjamaisqu’onaittropd’affectionpourvous.Parcequejevousassurequelaviepeutêtrefranchementbienpire.Unlongsilences’installe.Quelquechoseachangé,etjenesaispastrèsbienquoi.Depuisquandje

parledemesémotions,moi?Cassidydoitpensercommemoi,carellereprendavecunpetitrire:—Vousvousramollissez,Matthews.Vousêtescensémedétester,nel’oubliezpas.Jesaisprécisémentquoiluirépondre:—Jenesuisplusobligé.Jesuisvotrepatron,maintenant,nel’oubliezpas.Cassidy me décoche un douloureux coup de coude dans les côtes. C’est par plaisanterie,

évidemment, et j’éclate de rire, car je l’ai probablement bienmérité. Et le bleu que je vais avoirdemainmatinn’estpascherpayé.ChaquehabitantdeStonington,lesjeunescommelesvieux,vientaupique-niquedulendemain.Je

trouvecelaincroyablequetouteunecommunautéseréunissepourtémoignersonsoutienàl’unedesleurs.Peut-êtrequelemot«communauté»n’estpaslemieuxchoisi.Mêmequelqu’uncommemoi,

quin’ajamaissucequec’étaitquefairepartied’unefamille,comprendquec’estexactementdecelaqu’ils’agit.Duffs’occupedefrireetgrillerlepoissonavecThomasetdeuxautrescostauds.Abbycourtdans

tous les sens comme un poulet décapité, mais elle trouve quand même le temps de passerm’ébourifferlescheveuxetmefaireunrapidebaisersurlajoue.JejureraisentendreCaseygronderunemiseengarde,cequimeferaitplutôtplaisir.Celadoitêtredéplaisantpourluidesavoirquejeluiaipiquésananaetquejesuissurlepointdedevenirlechouchoudesamère.MaisAnna?Elleestpartout.Malgrésonhandicaptemporaire,elledonnedesordres,accueilleles

invités et papillonne en passant de l’un à l’autre. À part ses cheveux roux, Cassidy est le portraitcrachéde samère, cequidevrait la transporterd’aise, carAnnaest l’exemplemêmede la femmed’âgemûrencoretrèsbaisable.Enrevanche,Cassidyn’apashéritédesasociabilité.Mêmesielleal’airaimableavectouslesgensquil’approchent–etcroyez-moi,ilssontnombreux–,jevoisbiencequ’ilenestvraiment:ellen’appréciepastoutecetteattention.Lavoyantmalàl’aise,jenepeuxm’empêcherdemerappelerlesinnombrablesfoisoùjel’aivue

enactiondanslesréunionsoupourséduireunclient.Danscessituations,elleestentoutpointaussiféroce que sa mère en ce moment et cela n’a pas l’air de trop la gêner d’être sous le feu desprojecteurs.Peut-êtreparcequelalumièreestmoinsviolentequandonestdansl’ombred’unsportifsuperstar.Sielleconsidéraitlasituationprésentedelamêmefaçon,peut-êtrequ’ellenelatrouveraitpasaussipénible.Jem’apprêteà traverser le jardinpourle luidirequandunebeautéauxcheveuxnoircorbeause

dirige droit sur moi. Elle est menue, mais toute en courbes. Ce qui serait déjà assez visible sansqu’elleaitbesoindeporterunminishortaussiprovocant.Pourcommencer,ilnefaitmêmepasassezchaudpourcela.Mais cequi saute surtout auxyeux, c’est sapoitrine.Elle se cambreexagérémentpourmettre lamarchandiseenavant,cequin’estpasnécessaire,avec lechemisierqu’elleporte. Ilsuffirait d’un faux mouvement pour que ses nichons en jaillissent. Mais à mon avis, cela ne lagêneraitpas.—Ehbien,ehbien,ehbien…qu’est-cequenousavonslà?demande-t-elleenmedétaillantsans

vergognedehautenbas.(Ellepenchelatêtedecôté,puisellemesourit.)JesuisBrittnie,etelle,c’estWhittney,dit-elleendésignantdupoucesonacolyte.Laquellesecambreaussi,maispourmettreenvaleursonculplutôtquesapoitrine.Unbeaucul,je

leluiaccorde.Maispasautantqueceluid’uneroussedemaconnaissance.Jemeprésenteàmontour,eninclinantlatête.—Etmoi,Shaw.Ravidevousconnaître.Etavantquej’aieletempsdedireouf,mevoilàencadréparBrittnieetWhittney,quimeprennent

chacunelebrasetm’emmènentversunetablelibre.Ellesn’arrêtentpasdebabilleretapparemment,celanelesgênepasquejenedisepasunmot.—Oooh,vousêtescostaud,faitWhittneyenmemalaxantlebiceps.—Ilfautquequelqu’unaillevouschercheràmangerpourquevouslerestiez,renchéritBrittnie.

Whitt,valuichercheruneassiette.—Vas-y,toi,rétorquel’autre.—Pourtelaissertouteseuleaveclui?Pasquestion.Jeleslaissesedébrouiller,nevoulantdetoutefaçonpasd’assiettenidel’unenidel’autre,àvrai

dire.Maisjeneveuxpasêtredésagréable.J’étouffeunpeusoustoutescesattentions,maisellesne

medérangentpastrop.Ellessonttouteslesdeuxjolies,danslegenrenaturel.CommeCassidy.Peut-êtrequec’estlegenredefemmesqueproduitStonington.MaiscontrairementàCassidy,ellessontunpeutropavidesàmongoût.Aumêmeinstant,unecopieuseassietteestposéedevantmoi.JelèvelesyeuxettrouveAbbyquime

sourit.—Etvoilà,monpetit.Mangez.(Ellese tournevers lesdeuxfillesetsonsouriredisparaît tandis

qu’ellelesfusilleduregard.)Nerêvezpas,vousdeux.C’estl’invitédeCassidy.— Qu’est-ce que vous voulez dire ? répond innocemmentWhittney en faisant mine de ne pas

comprendre.Ilétaittoutseul,alorsonavouluêtregentillesetlemettreàl’aise.—Maisoui. Jesaisàquoi rimevotregentillesse, rétorqueAbby.Et je saisaussicommentvous

mettezleshommesàl’aise.Vousm’aveztrèsbienentendue.Etsijedoismerépéter,j’enprofiteraipourdireàvospèresàquelpointvousêtesgentillesavectoutelaville.Jesuissûrequ’ilsserontfiersdevous.J’adore Abby quand elle joue les mères fouettardes. Si je pouvais, je la ramènerais dans mes

bagages.Abbyretourneàsesoccupationsaprèsm’avoirfaitunclind’œilcomplice.Àpeineest-ellepartie

queBrittnieetWhittneys’installentàcalifourchonsurlebancenattendantquejeprenneplaceentreelles.Au lieudequoi, jeprends l’assiettequ’aapportéeAbbyet jecommenceàpicorerdedansenrestantdebout.Cequin’apasl’airdedécouragercesdemoiselles.Etàenjugerparlamanièredontellesregardentlerestedesinvités,ellesvontsemettreàjouerlescommères.Etpeut-êtrequecequejevaisapprendremeserautile.Jenesuispasdéçu.Whittneycroiselesjambesets’agitenerveusement.—Alors,commeça,vousêtesl’invitédeCassidy?J’opine,mêmesicen’estpasréellementlecas.Jen’aipasétéinvité,etsûrementpasparCassidy.

Peut-êtrequ’AbbyauraitdûpréciserquejesuisletypequitraqueCassidy.Maisquelquechosemeditquecelanedécourageraitpasnonpluscesdeux-là.—DeCalifornie?demandeBrittnie,pleined’espoir. (Jehochela têteànouveau.Elleajusteson

top…pourm’endonnerunpeuplusàvoir.)Oh,j’adoreraisallerlà-bas.J’adoreraisallern’importeoù,dumomentquejenerestepasàStonington.—Pourquoi?répliqueWhittneyenlevantlesyeuxauciel.Tureviendrais.Toutlemondefinitpar

revenir.Aprèsavoiravalémabouchéedesalade,jedemandefinalement:—Ahbon?Commentça?—Vousn’êtespasd’ici,vousnepouvezpascomprendre,répondunevoixbourruederrièremoi.

(JemeretourneetjemeretrouvenezànezavecDuffWhalen.)Filez,vousdeux.Onaàparler.Bienquecelasemble leurdéplaire,BrittnieetWhittneyobéissent.Unbref instant, jesongeà les

supplierdenepasmelaissertoutseulavecDuff.Àvraidire,ilmefaitunpeupeur.Encoreunefois,je ne sais pas trop ce queCassidy lui a dit surmon compte,mais je ne suis pas à l’aise avec lui.Pourquoi suis-je aussi nerveux ? Je sais commentgérer des types comme lui. J’ai séduitDieu saitcombien de parents de sportifs. Cela ne devrait pas être différent. Mais ça l’est. C’est le père deCassidy.

Effectivement. C’est le père de Cassidy. Et je sais à quel point cela irrite la fille quand elle estconvaincuequ’onessaiede l’apaiserouqu’onnerespectepascequiest importantpourelle.Etdetouteévidence,cepetitvillagedepêcheursestimportantpourl’hommequiyavécutoutesavie.Jeposemonassietteetleregardedroitdanslesyeux.—Aidez-moiàcomprendre,alors.Ilmedévisageunmoment,puisilhochelatête.—Regardezautourdevous,dit-ilendésignantl’assistance.Vousnepouvezprobablementpasle

savoirquandvouslesvoyez,maisbeaucoupdecesjeunesgenssonttrèsinstruits.Celui-là,là-bas,dit-il en désignant un blond qui bavarde avec ses potes, il est allé à l’université et il a décroché undiplômed’ingénieur.Vous savezcequ’il a fait, après? Il est revenuet ilpêche lehomardcommenoustous.—Pourquoi?demandé-je,surpris.Uningénieur,c’estbienpayé.—Unpêcheurdehomardsl’estencoreplus.—C’estvrai?Ehbien…—La plupart de ces gars commencent à sortir avec leur père l’été de leurs quatorze ans et ils

gagnent leurargent toutseuls.Voussavezcequec’estdevousbaladeravecautantde fricdans lespochesàquatorzeans?Je n’en sais rien. À quatorze ans, je traînais dans les stades et j’épiais les conversations entre

joueurs,entraîneursetagentspourapprendrelesrudimentsdumétier.Jen’avaispasd’argent,j’avaisfaimlamajeurepartiedutemps,etjeportaisdesvêtementsquejetrouvaisdanslesfriperies.—Évidemment, certains le claquent et legaspillent.Mais s’ils sont intelligents, ils lemettentde

côtépour s’acheter leurproprebateauet leurmatériel.Ceuxqui font celaquittentgénéralement lelycéeavantd’êtrediplômés,et c’est trèsbienétantdonnéqu’ilsgagnenténormémentd’argent toutseuls. (Il soupire.) Et certains se servent de cet argent pour aller à l’université, mais comme jedisais…—Ilsfinissentparrevenirici.—C’estça.Pêcherlehomard,c’estcequ’ilsconnaissent.C’estdel’argentpropreethonnêtement

gagné.Maiscen’estpasquepourçaqu’ilsreviennent.Voyez-vous,Stonington,c’estunmodedevie.Lesrèglessontdifférentesdans lemondeextérieur,alors laplupartn’arriventpasàs’ensortir. Ilspartentpeut-êtreavecdegrandsespoirsetl’enviedes’éloignerd’ici,maisauboutd’unan,deuxtoutauplus,ilsreviennentlàoùestleurplace.Ilposesagrossepaluchesurmonépauleavecunregardquienditlong.—Ma petite fait partie des rares exceptions. C’est la femme la plus têtue et déterminée que je

connaisse,etquandelleest faceàundéfi,elle le relève.Toutça,continue-t-ilavecungeste large,c’estpourma femme,paspourCassidy.Etmêmesi jene ledirai jamais àma femme, jen’aipasenviequemafillerevienneici.Àvraidire,jenecroispasquequelqu’unquiestpartideStoningtondepuissilongtempspuisseyrevenir.Pasdemanièredéfinitive,jeveuxdire.Elleachangé.Etçan’ariendemauvais.Jesuisfierdecequ’elleestdevenue.—Pourquoivousmeditestoutça,alors?Il sourit, et pour la première fois depuis notre rencontre, j’ai l’impression que nous avons en

communquelquechosequin’estpasencoreévidentpourmoi.—Vouslecomprendrezquandellelecomprendra.Etlemomentvenu,n’oubliezpas:l’océanlà-

basestimmense.Etildébordedecasiersremplisd’appâtsappétissants.(Iléclated’unriretonitruantetunpeuinquiétantenm’assenantunetapesurlebras.)Etméfiez-vousdeWhittetBritt,dit-ilenseretournantpourlesdésignerdumenton.Ellesvoustournentautourcommedeuxvautoursdepuisqueje lesaienvoyéesbalader.Ellessont lanumérodeuxet lanuméro trois.Cassidyest lanuméroun.Ellesessaientdeprendrelaplace.Quoi?Là,ilyaquelquechosequejenecomprendspas.—Jesuissûrquevousêtesentraindemedirequelquechosedetrèsimportant,maisjen’aipasla

moindreidéedecequec’est,monsieur.—Jevousaiditquec’étaitunmondedifférent,ici.Ilyaunehiérarchiechezlescélibataires.Les

garssontclassésselonleursrevenus,leurtalentdepêcheur.Etlesfillesselonleurbeauté.CassidyestlanumérounetCasey,étantd’unefamilleancienne,estlenuméroun.C’étaitentenduqu’ilsfiniraientensemble tous les deux, mais quand Cassidy est partie, la donne a changé. Maintenant qu’elles’intéresseàvous,lesautresfillesvontessayerd’attirervotreattention.(Ilsecouelatête,incrédule.)Cesgaminssemarchentdessuspourdécrocherceluioucellequiestleplushautdansleclassement.Votremeilleuramiestcapabledevouspiquervotrecopinesousvotrenez,sivousnefaitespasgaffe.Évidemment,jen’aijamaiseuàmeméfierdeThomas,c’estunmecsûr.—Monsieur,Cassidyetmoinesommespas…Jenesaispascommentfinirmaphrase,maiscen’estpasnécessaire.Duffcomprend.—Oui,ehbien,rappelez-vouscequejeviensdevousdireetvousnefinirezpascommeappâtà

homards.Etaprèsm’avoircolléunetapesurl’épaule,ilretourneàsonposte.Etcommeparhasard,BrittnieetWhittneyrefontleurapparition.—Nousrevoilààà,chantonnelapremière.—Jevoisça,constaté-jeavecunsourirenarquois.Brittniemereprendparlebrasencollantsesnichonscontremoi.—Et si on vous emmenait ailleurs ?On vousmontrerait des cachettes secrètes où on pourrait

mieuxfaireconnaissance,touslestrois?demande-t-elled’untonlourddesous-entendus.Jeglousseenmedisantqu’elles sontmignonnesdemeproposerquelquechosequ’ellescroient

que jene connaispas.Ellesont tort.Lesplans à trois, c’est bon,mais en fait, c’est beaucoupplusfatigantpourl’homme,puisqu’ildoits’occuperdedeuxfillesalorsqu’ellesserépartissentlatâche.Ilsuffitdefairelecalculpourvoirquecen’estpastrèsjuste.Maisjenesuispasunamantparesseux.Etiln’yadanslesparagesqu’uneseulefemmequipuisse

en attester.Une seule femme pour qui celam’intéresse deme donner autant demal. Et elle est del’autre côtéde lapelouse, en traind’observer un autre couple plongédans cequi semble être uneconversationdistrayante.CaseyetMia.PourCassidy,celacommenceàdevenirunehabitude.Peut-êtremêmeuneobsession.

Quinemeplaîtguère.Saposturem’estbeaucouptropfamilière.Jeladevineénervéeetelleabeaucoupdemalàcontenir

l’énergiequibouillonneenelle.Finalement,elledétournesonattentiondeCaseyetMia,maisilestévident qu’elle cherche à la fixer sur autre chose. Tournant la tête d’un côté et de l’autre, à larecherchedequelquechose–oupeut-êtredequelqu’un–,elles’arrêtequandnosregardssecroisentetjecomprendsqu’elleatrouvé.Saciblelocalisée,Cassidysetourneetsedirigeversmoiàgrandspas.

EllefusilleduregardBrittnieetWhittney,quiontprofitédemadistractionpoursemontrerencoreplusamicales,pournepasdireentreprenantes.Etc’estlàquejecomprends…Nomd’unchien.Ellevaleségorger.Oubienc’estmoiquivaisêtrelavictime.Dansuncascomme

dansl’autre,unmeurtrevaêtrecommis.Sij’étaisuntrouillard,jem’empareraisd’unedesfillesenguisedebouclier,maisceneseraitpasbien.Arrivéedevantnous,elleredresselesépaulesetseplantedevantBrittnie.—Excuse-moi, fait-elle en agitant lamain au-dessusde l’opulentepoitrinequedévoileBrittnie,

maisilfautquejel’emprunteuninstant.Vat’exhiberailleurs.Houla!Puisellemeprendlamainetm’entraîneàsasuite.—Oùm’emmenez-vous?Jesuisprêtàprendrelerisquedeposerdesquestions.—Loind’ici.Génial,onneretrouverapasmoncorps.Jecommenceàégrenermentalementlesnomsdesgensquisaventoùjesuis.Demi,Sasha,Quinn?

Non, ils l’aideraient sûrement à dissimuler son crime. Ben ? Non, il ne dirait rien pour pouvoirprendremaplace.Chaz?Demimenaceraitdelesluicouperetelleseraitcapabledelefaire.Landon?Oui!Landonestunsoldatetilestimeraitsûrementqu’ilestdesondevoirdedénoncerlecrime.Mais peut-être qu’il y a une explication logique et que je dois gardermon sang-froid et la lui

demander.Jecroiselesdoigts.—Pourquoi?—Parcequejeveuxm’éloignerd’ici.—Pourquoidois-jevenir?Laquestionestlégitime.Etjemesentiraismieuxsijeconnaissaislaréponse.—Parcequejeveuxêtreloind’iciavecvous.Aumoins,elleaditqu’ellevoulaitêtreavecmoi,pasqu’ellevoulaitmetuer.Cependant,j’estime

nécessairedeluifaireremarquerquesonabsencenevapaspasserinaperçue.—Vousêtesl’invitéed’honneur.Vousnecroyezpasqu’onvaselanceràvotrerecherche?—C’estprobable,maisonnemetrouverapas.Vousnonplus.—C’estbiencequejecraignais,marmonné-je.

9

Cassidy

JenesuispasDorothy.Jen’aipasdesouliersenrubisnidepetitchienprénomméTotonideTanteEm.MaisStoningtoncommenceàressemblerdeplusenplusàOz.Touslesgensquejeconnaissontlà, familiers,maisdifférents.Lesmêmesnoms,visageset lieuxm’entourent,mais toutcedont j’aienvie,c’estdem’arracherlapeaucommesiellen’étaitpasàmoi.Commesijen’étaispaschezmoi.Deshordesdegensnecessentdeveniràmoipourmesouhaiter labienvenueà lamaisonetme

direquejesuispartiebeaucouptroplongtemps.Touséprouventlebesoindemeracontertoutcequileurestarrivédepuismondépart–commesimonabsenceavaitétélacausedeleursproblèmesetquemonretourallaitbrusquementtoutarranger.Ceenquoiilssetrompent.Etjenesuispasrentréepourtoujours,nomd’unchien.Commecettevieillesensationd’étouffementquejepensaisavoirlaisséederrièremoiestderetour,

jecherchenaturellementl’uniquepersonnequiajusqu’icisum’enprotéger.Casey.Jemehaussesurlapointedespiedsetsautilletoutensillonnantlafouleetjefinisparl’apercevoir.

Ilestsousl’érablegéant,unpiedposésurunbanc,accoudésursongenou,décontractécommeàsonhabitude.Àn’enpasdouter,ilparlebateauxethomardsavecundesespotes,carilagitelesmainsetquesonmagnifiquesouriremefaitoublierlesconversationsautourdemoi.C’estalorsquelafoules’écarteetquejevoisqu’iln’estpasencompagniedesescopains.IlestavecMia.JenotementalementdevérifierdanslesréservationscombiendetempscetteMiacompteséjourner

cheznous,carellecommenceàoccuperunpetitpeutropmonCasey.Franchement,decombienderenseignementspeut-elleavoirbesoinpourécriresonidiotdebouquin?EtilyachezellequelquechosequineutraliselesixièmesensdeCasey,luiquisait toujoursquandj’aibesoindelui,carj’aibeaumeconcentrer de toutesmes forcespourqu’il se tourne etme regarde, il nebougepas. J’aibesoin de lui. C’est mon Épouvantail, mon Bûcheron en Fer-Blanc, mon Lion, mon Toto et messouliersderubisàluitoutseul.Maispourlemoment,c’estcommesijecriaisdansledésert,cariln’entendriendutout.Jesuisfurieuse,dépitéeetjalouse.Jesuisvexéeetjeveuxseulementrentrerchezmoi.Saufqueje

nesaisplusoùc’est,chezmoi.Maisjesaisquipeutm’aideràleretrouver.LeMagicien,évidemment.Je scrute de nouveau la foule et je le trouve. Contrairement à Casey, Shaw est déjà en train de

m’observer.Peut-êtrequej’aienvoyémesondesdedamoiselleendétresseàlamauvaisepersonne.Celadit,envoyantlesdeuxsingesvolantsquileharcèlent,BrittnieetWhittney,jemedisquec’estpeut-êtreluiquiaenvoyéleSOS.CoupantcourtàlaconversationdontMrs.Paddockfait touteseulelesfrais, jetraverselejardin.

Shaw continue de me regarder tout le long du chemin, mais il me semble percevoir comme unsoupçondepeur.C’estprobablementmafaute.J’airetroussélesbabinesenvoyantBrittniefrottersesnichonscontrelui.Ilestàmoi,c’estlaseulechoseiciquim’appartienneencore,etpersonnenevam’empêcherdelerevendiquer.J’empoigneShawetl’entraîneavecpouruniqueidéedemeretrouverseuleavecluiquelquepart.Il

posedesquestions,auxquellesjeréponds,maisjenesuispasd’humeuràbavarder.Cequejeveux,c’estquelquechosed’excitant.QuelquechosequivamerappelerquelemorneetternequotidiendeStoningtonn’estpaslemien.Nousnousmettonsdoncenroutesurlaroutedebriquesjaunespourgagnerleparcvoisin,etnous

nenousarrêtonsqu’unefoisarrivésàlaCitéd’Émeraude,l’uniquelieudedistractiondeStonington.Lacageàécureuilsoùjejouaisquandj’étaispetiteaétéremplacéeparuneinstallationplusgrandeetplusélaboréecomposéedepasserelles,filets,balançoiresettoboggans.Ilyaaussiunecabaneavecuntoitvert.C’estnotredestination.—Allez,dis-jeàShawenmedirigeantversl’échellequejecommenceàgravir.—Vousessayezderevivrevotreenfance?semoque-t-il.—C’estcomplètementl’inverse,enfait.D’unpasvif, jefranchislepontsuspenduetparviensàlacabane.Jemeretourne,pensantqueje

vaisvoirShawtoujoursenbas,maisiln’enestrien.Ilm’asuivie,sansvraimentsavoirpourquoijeveux qu’il m’accompagne. C’est du Shaw tout craché. Il prend des risques, il relève des défis, iln’hésitepasàselancer.Ilmegalvanise.J’aienvied’êtrecommelui.Maisplusquetouteautrechoseencetinstant,j’aienviedemegriserenlesentantenmoi.—Etmaintenant?demande-t-ilunefoisqu’ilm’arejointe.Jel’empoigneparledevantdesachemiseetletireversmoienmehaussantsurlapointedespieds

pourluirépondreparunbaiserquidevraitluifairecomprendrelebutdenotreescapade.Ilmerendmonbaiser,etm’étourditdeseslèvresetdesalangue.MonDieu,cetypesaits’yprendre.Commejen’aiaucuneintentiondeperdredutemps,jecontinuesurmalancéeetjelefaisreculer

enlepoussanttoutenm’activantsursaceinture.Unefoisquejesuisdanslapartiedelacabanequimeconvient,jeglisselamaindanssonpantalonpourempoignerfermementsabitelongueetépaisse.Shawmesaisitlebrasetinterromptbrusquementsonbaiser,maisilnesedérobepas.—Holà,holà!Ici?Enpleinair?Sans prêter attention à ses réticences, je le chauffe en continuant de le caresser sur toute la

longueur.—Oui.Ici.Ettoutdesuite.Parcequej’aienviedevous.—Etsiquelqu’unnousvoit?Ilabeauposerdesquestions,ilsuitlerythmedemamain.Oui,ilaenvieaussi.Jemepencheenavantetl’embrassedanslecou.—N’ayezpaspeur,Shaw.Toutlemondeestaupique-nique.—N’ayezpaspeur,qu’ellemedit,glousse-t-il.Jesuisunétrangerdansunevillequin’apasde

postedepoliceetdont la fillepréféréeveutque je la saute surunecageàécureuils, alorsque leshabitants pourraient à tout moment quitter le pique-nique donné en son honneur et venir noussurprendre.Ilproteste,maislatêtequ’ilrejetteenarrièrepourmepermettredel’embrassertoutàmonaiseest

uneinvitationàcontinuer.—Ilsneviendrontpas,luichuchoté-jeàl’oreilletoutenluimordillantlelobeetendéboutonnant

sonpantalondontjebaisselafermetureÉclair.Illaisseéchapperunrâletoutenmepétrissantlesfesses.—Ilspourraient.Jefaisglissersonjeanetreculed’unpaspouradmirerlegroslot.LabitedeShawvautlecoup

d’œil.Jesoupireàlaperspectivedelaprendreenmoi.—Jem’enfiche.Etjesuissincèrequandjerépondsça.J’enlèvemachemise,gardantmondébardeur,puisjel’étale

surlebancdeboisavantdepousserShawpourqu’ils’assoiedessus.— Je vous assure que votre père m’a menacé de me réduire en appât pour homards, dit-il en

enlevantsonpantalon.Ilfinitparsetairequandjel’enfourcheetcommenceàfrottermachattesursabite.—S’ilvousplaît?Jemebalanced’avantenarrièrepourimprégnersabitetoutenluimordillantdélicatementlalèvre.

MonDieu,maisquec’estbon,cequejesensentremescuisses.Etceslèvressontsidélicieuses.Shawm’empoignelescuisses,puislesfesses.—Pas lapeinededemander,dit-ild’unevoix rauque.Vouspouvezavoircequevousvoulez. Il

suffitdeleprendre.(Jelisundéfidanssonregardtandisqu’ilencouragemonmouvement.)Qu’est-cequevousvoulez,Cassidy?Jesoulèveleshanchesetinclinemoncorpsdemanièreàcequesabitepuissemepénétrer.—Vous,dis-jeavantdemelaisserretombersurlui.Je gémis à cette sensation qui me dilate et me remplit. Shaw en fait autant et cela ne fait que

décuplermonplaisir.Cramponnéeàsesépaules,j’onduleau-dessusdelui,pourfaireentrersabitedeplusenplusprofondémentjusqu’àcequejesoishabituéeàlatailledesonsexe.Shawm’enlaceetm’attirecontreluitoutenfourrantsonnezentremesseinsencorecouverts.—Cen’estpasmoiquevousdésirez,c’estmabite,corrige-t-il.Peuimportequecesoitvraioupas.ÊtrederetouràStoningtonaprèsuneaussi longueabsence,

c’est comme gambader en songe dans un champ de coquelicots et il est temps pour moi de meréveiller.Peut-êtrequeShawaeuunebonneidéeenrefusantd’affronterpendantdesannéeslavéritédesonexistenceetendonnantàvoirauxgenscequ’ilvoulaitleurfairecroire.Lestoursdepasse-passe,lesillusions…c’estmagiqueet impressionnant,etpersonnenepeutdirequeShawMatthewsestquelqu’undeterne.C’estlemagicienetjeveuxvivredanssonmonde.Emmenez-moiloind’ici,c’estcequej’aientête,mêmesijen’osepasledireàvoixhautedepeur

qu’ilseméprenne.MaisShawabrusquementacquisledondeliredansmespensées–quelquechosequ’ilvafalloirquej’étudiedeprèsplustard,quandjeneseraipasentraindechevauchercetypequiaunebiteénorme.Ilmesaisitparleshanchesetprendlescommandespourmefairealleretvenird’avantenarrièreafinquemonclitorisbénéficiedecedélicieuxfrottementquej’adoretant.

—Bonsang,pourquoijenesuisjamaisrassasiédevous?La sensation est partagée. Même dans cette ville où chaque endroit est peuplé du souvenir de

quelqu’und’autre, je nedésirequeShawet jen’en ai jamais assez. Jedevraisme sentir coupable,maisiln’enestrien.Pourquoileserais-je?Casey, lui,n’apas l’airdeculpabiliserpuisqu’ilpassetoutsontempsavecquelqu’und’autre.Shawmesoulèveetmerassoitsursabite,commepourmefairereveniràlaréalité…etàlui.C’est

efficace.J’ouvrelesyeuxetjelevois,leslèvresentrouvertesetlespupillesdilatées,lefrontperlédesueurmalgré l’air frais duMaine. Je l’empoignepar les cheveux et lui renverse la tête en arrièrepour découvrir son cou. Et oui, je prendsmême du plaisir à entendre le grognement que cela luiarracheetsesmainsquisecrispentsurmeshanches.Ilvamefairedesbleusetilneleregretterapas,carjelesaimérités.Oui,emmenez-moiloind’ici…JamaisCaseyn’accepteraitcela.Ilpréféreraitquelquechosedeplusromantiqueetrespectable.Il

meferaitl’amour,mecaressanttendrementlevisageetlescheveuxtoutenmurmurantdeschosesquimeferaientdes trucspartout. Ilplongeraitsonregarddans lemienpourypuiserunesignificationplusprofonde…toutcommelefaitShawencetinstant,jem’enrendsbrusquementcompte.Du coup, une tornade de pensées semet à tourbillonner sousmon crâne. Les visages des deux

hommeslesplusimportantsdemaviesesuperposentcommedeuxuniversquis’entrechoquent.Oùcommencel’unetoùfinitl’autre?Monhérosestdevenuceluidontondoitmesauveretmonennemiestàprésentmonsauveteur.Cen’estpascequejevoulais.Etcen’estabsolumentpascequ’ilmefaut.—Non,luidis-jeavantdefermerlesyeuxetd’enfouirmonvisagedanslecreuxdesoncou.—Non,quoi?demandeShaw.(Ilm’imite,maisjemecramponneàsesépaulesenrefusantdeme

redresser.)Vousvenezdemedemanderdevousemmenerloind’ici.Qu’est-cequevousvoulezdire?Zut.Jenem’étaispasrenducomptequej’avaisparléàvoixhaute.MonDieu,qu’est-cequ’ildoit

penser.—Vousalleztoutgâcher,marmonné-je.Jevousenprie,non.Jesuisauxabois.J’aibesoindecelienquim’apportelaplénitude.Mesgestessefontprécipitéset

maladroitspourassouvircebesoinégoïste.MaispasShaw.Ilsetaittandisquejelechevauche,maisilesttroptard.J’aibeaufaire,jenepeuxeffacerdemonespritlamanièredontilm’aregardée.Ilavuquelquechosededifférentenmoi.Oubienc’estmoiquivoisquelquechosededifférentenluiàprésent.Disparus,sonarrogance,sonégoïsme,lesalaudquej’avaisfinipardétester.Quanddonclegrandetpuissantmagicienest-ildevenuunsimplebonhommecachéderrièreunrideau?—Hé!Ilmesecouegentimentdenouveau,d’unevoixtropdoucepourquejel’ignore.Jecèdeetredresse

latêtepourqu’ilpuissemevoir.Shawprendmonvisageentresesmainsetlescrutepourychercherlaréponseàunequestionmuette.J’imaginequ’illatrouve,carunelueuréclairesesyeux.—Jenevaisriengâcherdutout,dit-ilenmecaressantlalèvredupouce.Servez-vousdemoi.Etc’estlelienqu’ilmefallait.Avecuneferveurrenouvelée,jereprendsmesondulationsd’avant

enarrière,glissantsursabitecommesimavieendépendait,carc’estbiendecelaqu’ils’agit.Shawm’embrasse langoureusement, sa languesemêlantà lamienneau rythmedemeshanches.

Puislâchepriseetmelaisseprendrelecontrôle.C’estexactementcequ’ilmefaut.

Jelechevauche.Sansménagement.Mesgenouxmefontmal,éraflésparleboisàtraverslafineétoffedemachemise.Maisjel’observe.JenequittepasShawdesyeux,mêmesijesaisquejevaisleregretterplustard.C’estmabouéedesauvetage,c’estgrâceàluiquejem’échapped’unmondequine tient plus debout. Peut-être que ce n’est pas lemagicien, en définitive. Peut-être que c’estmonKansas.

Shaw

C’estpresqueàlatombéedelanuitqueCassidyetmoirentronsàWhalenHouse.Unefoisqu’elles’estépuiséesurmabite,jelaserredansmesbrasetj’attends.Jenesaispaspourquoi.Sansdoutequej’ai l’impression de bien faire. Je ne jouis même pas et cette fois, je m’en contrefiche. Pourcommencer,nousn’avonspasdemouchoirsenpapiernirienetjenevaispasmerépandrepartoutdansunecabanedegosses–ceseraitdégoûtantetgrossier–etjenejouisjamaisdansunefemme,car je n’ai pas un tempérament de futur père. Et deuxièmement – raison probablement la plusimportante–,danscequis’estpasséentrenous,cen’étaitpasmoiquicomptais.C’étaitCassidyetcedontelleavaitbesoin.Jel’aisudèsl’instantoùj’aivudanssesyeuxceregarddésespéréquandellem’ademandédel’emmenerloin.Jenesaistoujourspascequ’ellevoulaitdire,maispeuimporte.CassidyWhalen est la personne la plus sensée que je connaisse. Chez elle, tout est logique et

professionnel, cen’est pas legenredegaminequi se laissegouvernerpar ses émotions.Si tel estpourtantlecas,elles’esttrèsbiendébrouilléepourlecacher.Pasaujourd’hui.Aujourd’hui,jenesaispasdansquelétatd’égarementellesetrouvait,maiscelasevoyaitdanssesyeux.C’estsûrementpourcelaqu’onditqu’ilssontlemiroirdel’âme.Ellen’avaitplustoussesesprits.Elleétaitsensdessusdessous,déchiréepardes tourments intérieurs,et j’aiétéplusqu’heureuxde la laisserseservirdemoipourretrouverunpeud’équilibre.Si ça cen’est pas la preuvequeShawMatthews« évolue» et devient humain…Mamère serait

vraimentfière–siellesesouciaitdemoi.CelledeCassidy,c’est tout lecontraire,enrevanche.Etc’estprécisémentpourcelaqu’elleseprécipitesurelleàpeinenousavonsunpieddanslamaison.—Cassidy,monDieu,maisoùétais-tupassée?Celanefaitquedeuxjoursqu’elleasonfauteuilroulant,maisAnnaWhalenlepilotecommeune

prodelaF1.Peut-êtrequejedevraislaprendresouscontratsijamaisjemedécideàmelancerdanscesport.—Nesoispasconstammentsurmondos,maman,s’agaceCassidycommeunegamineirritable.

Shawetmoiétionsfatiguésdetoutcemonde,alorsnoussommesallésfaireuntour.Tout ce monde ? Si elle s’est volatilisée aujourd’hui, c’est peut-être plutôt parce qu’elle avait

l’impressiond’étouffer.Parcequ’elle était aubout du rouleau, sans aucundoute.Qu’elle ne savaitplusoùelleenétait.Entoutcas,ellesavaitoùelleétaitquandelleétaitassisesurmoietqu’elleaeuunorgasmephénoménal.Toutcommeceuxquej’aieusavecellejusqu’ici.Quandnousbaisonsensemble,c’esttoujoursfabuleux.Cassidy s’apprête à gagner l’arrière de lamaison,mais Anna refuse de la laisser s’échapper à

nouveauetlasuit.

—Ahbon?Tuétaisfatiguée?Ehbien,c’estmoiquiaiétéobligéedetetrouverdesexcuses.Toutlemondevoulaitvoirl’invitéed’honneur,maiselleétaitintrouvable.Sanscompterqu’ilyavaittoutun tas de choses à faire ici, mais heureusement, Casey et Mia ont donné un coup de main.Franchement,Cass,jenesaispasoùtuaslatête.Cen’estpastongenrede…Savoixdécroîtàmesurequelesdeuxfemmess’éloignent.J’aiunpeudepeinepourCassidy,mais

d’unecertainemanière,jesuisaussijaloux.Jepouvaisdisparaîtredurantdesjours:mamèrenes’estjamaissouciéedesavoiroùj’étais.D’unautrecôté,jecomprendsmaintenantdequiCassidytientsonénergie.—Vousavezprislabonnedécision.Jeme retourne et trouve Duff appuyé au chambranle de la porte de la cuisine, un canif et une

pommeàlamain.—Pardon?C’estlaseulechoseàdireàunhommearméd’uncouteaudontonvientdelaisserlafillesautersur

votrebitedansunlieupublicetdontonignores’ilestaucourant.Ilcoupeunquartierdepommeetlaglissedanssaboucheendésignantlecouloirdumenton.—Denepasavoirajoutévotregraindesel,explique-t-il.Jemeretiensd’essuyerlasueurquiperlesurmonfront.—Oui,çaavaitl’airunpeutendu.—Mafemmevadirecequ’elleasurlecœur,Cassvas’excuser,etpuistoutirabien.(Ilcoupeun

autremorceauqu’ilmetend,maisquejerefusepoliment.)Vousavezprisuneautrebonnedécision,aujourd’hui.—Laquelle?Jem’abstiensdetouteallusionàcequenousavonsfaitensemblesafilleetmoi,carj’imagineque

cen’estpasdecelaqu’ilveutparler.—Vousavezbienfaitdel’emmenerfaireuntourcetaprès-midi.Ahsi,c’estdeça.—Jen’aipasvraimenteulechoix.C’estellequim’aentraîné.Etellenes’estpasarrêtéelànonplus,maislàencore,jenepensepasqueceseraitprudentd’en

parler.Dufféclatederire.—C’estmafilletoutcraché!Elleressembleplusàsamèrequ’elleveutbienl’avouer.Chaquefois

queCaseyet elle faisaientdesbêtises, c’est lui qui s’accusait.Mais je savais bien cequ’il en était.Cassidyportaitlaculotte,danscetterelation.Elle la portait peut-être avec Casey, mais avec moi, elle l’enlève, plutôt. Mais là encore, je

m’abstiensdetouteremarque.—Peut-êtrequ’iln’aimaitpasdiscuter,avancé-je.—Etvous,si?—Oui, jecroisbien. (Puis,mepenchant, jecontinueenbaissant lavoix.)Ne luiditespas,mais

c’estlaseulequisoitcapabledem’enremontrer.C’estlavérité.Etàbiendeségards.SentantlafatiguedelajournéeetconscientquejedoiscontacterDenveravantdedormir,j’étouffe

unbâillement.

—Ehbien,jecroisquejevaisallermecoucher.—Qu’est-cequevousavezprévupourdemain?demandeDuffavantquej’aieeuletempsdefaire

unpas.—Jenesaispastropencore.Pourquoi?Ilseredresseetvientmecollerunetapedansledos.—Passezunebonnenuitdesommeil.Jevaisvousemmenerenmer,demainmatin,mongars.Ona

besoind’uncoupdemain.Bonsang.Quelqu’unm’avuavecCassidyetàl’heurequ’ilest,demain,jeseraientraindedormir

aveclespoissons.Maisbon…ilm’adonnédu«mongars».Lesassassinssont-ilsaussiaffectueuxavecleursfuturesvictimes?Peut-êtrequeoui,quandcesontdestueurspsychopathes.Avantquej’aieletempsdedéclinerpolimentl’offre,Duffestdéjààlamoitiéducouloir.Detoute

évidence,jen’aipasvoixauchapitre.EtsiCassidyportelaculotte,c’estdesonpèrequ’elleahéritécela,pasdesamère.

10

Cassidy

Impossible de savoir ce quim’a réveillée d’aussi bonne heure,mais j’ouvre l’œil avant tout lemonde.Etpasmoyendemerendormirmalgrétousmesefforts.Ducoup,plutôtquedecontinueràmetourneret retournerdansmonlit, jemelèvepéniblement,sans tropsavoirceque jevaisfaire.J’ai bien l’idée de passer rendre une petite visite à Shaw dans sa chambre, mais quandmaman aterminésonsermonhiersoir,j’aidécouvertquepapaavaitl’intentiondel’emmenerenmeretjen’aipasenviequenousnousfassionspincer.Peut-êtrequejedevraiscourirausecoursdeShawetl’empêcherd’êtretourmentéparmonpère,

maislavéritéestquejesuistrèspréoccupéeetqu’unpeudesolitudemepermettraderéfléchir.Jemerendsdoncdansl’uniqueendroitquim’atoujoursserviderefuge.Jedescendslecouloirauparquetciréglacésousmespiedsnus.Unefoisaubout,j’ouvreuneporte

quipourraitdonnersurunechambrequelconque,maisiln’enestrien.Elledébouchesurunescalierencolimaçonmenantàunesortedenid-de-pietoutenhautdelamaison.C’estunepetitepiècevitréejouissantd’unevuepanoramiquesurtoutStonington,leportycompris.Celaaétémonrefuge,celuioùCaseyetmoiallionspourêtreseulsquandnousavionsbesoindefuirlaréalitéousimplementunendroitvraimentsympapourseroulerdespelles.Jemedemandecombiendefoisilyestmontésansmoidepuisquejesuispartie.Combiendefois

ilyestvenuenpensantàmoi,enregrettantquejesoisàdesmilliersdekilomètresdelàaulieud’êtreensacompagnie.Peut-êtrepasuneseule,enfindecompte.Jem’installe sur lebanccapitonné rougequepapaa installédans laparoi,pose le coude sur le

reborddelabaievitréeetcontempleleport.Àl’horizon,l’aubecommenceàpeineàcolorerdesesrosesetorangespoudréslecielviolacéoùscintillentencoredesétoiles.Lesfeuxrougesetvertsdesbateauxparsèmentleport,tandisquelesmouettessechamaillentdanslesillagedesembarcationsquiseglissentsansunbruitdanslapaisibletranquillitéd’unenouvellejournée.Stoningtonestvraimentmagnifique.Pourlesgensdel’extérieur,c’estunesortederêvepeint,de

cartepostale,ouundécordecinéma.Maiscetendroitexisteréellement.Peut-êtrequ’ilafalluquejelequitteafind’enappréciertoutelabeauté.En bas, la jetée grouille d’activité, des dockers chargent le matériel pour les pêcheurs qui

commencent à arriver les uns après les autres dans leurs camionnettes.Casey doit être parmi eux.

Maismonpèreégalement,ainsiqueShaw.Seigneur, l’expression deShawhier, l’éclat de ses yeux bleus… Jeme suis servi de lui comme

d’unebouéedesauvetageaprèsavoirvuCaseyencompagnied’uneautrefemme.Et ilm’a laisséefaire.Jecroisqu’iladûs’enrendrecompte,maisilnem’apasretenue.L’opinionquej’aideShawMatthewsévoluelentement.Peut-êtrequecen’estpaslesalaudégoïstequej’aitoujourscru.Peut-êtrequec’estmoil’égoïste.Àlamanièredontilm’aregardéeencetinstant,j’aicomprisimmédiatementqu’il m’aurait donné tout ce que je lui aurais demandé. Il me regarde comme cela souvent, cesdernierstemps.Je dois fermer les yeux pour balayer cette image avant qu’elle me submerge encore.

«Désorientée»,lemotn’estpasassezfortpourdécrirel’étatdanslequeljesuisencemoment.Jenepeuxpasmepermettredemelaisseraller.Jenepeuxpasallerau-delàdecequec’estcenséêtre.Dusexeet riendeplus.Si jem’autoriseàavoirdessentimentspour lui, jevais fairecourirunrisqueénormeàmoncœur.Casey,enrevanche,c’estuneautreaffaire.C’estlaconstantesurlaquellej’aitoujourspucompter.

Laseulepersonneautourdemoiquiseratoujoursdemoncôté,quoiqu’ilarrive.Peut-êtrequej’aitoujours tenu pour acquis que cela ne changerait jamais, qu’il ne cesserait de m’attendre, où quej’aille.—Waouh!Turamènestoutàtoi,CassidyRose.Tuesincroyablementégoïste,dis-jeàhautevoix,

pourbienimprimerenmoicesmotscruels.Peut-êtrequeShawetmoiavonsplusdepointscommunsquejeneveuxbienl’admettre.ParcequeleschosesontbienchangéentreCaseyetmoi.Nousavonschangé.Mêmesi,danslesfaits,nousavonsrompuilyalongtemps,quandj’aiquittélaville,jenecroispas

quej’aievraiment intégrél’idée,dansmonespritetplusencoredansmoncœur,quenousn’étionsplus ensemble. Le voir se comporter avec une autre comme ilm’a toujours traitée, enme faisantmêmepasserausecondplan,celam’afaitsouffrirplusquejen’auraispensé.Etjeconnaisceregard.IlregardeMiacommeilmeregardaitnaguère.Lesourirequ’illuiadresse,aveccepétillementdansl’œil,commes’ilregardaitl’étoilelapluséclatanteduciel…c’estlesourireauquelj’étaislaseuleàavoirdroit.J’ai été remplacée.Mais lui aussi l’a été, finalement.C’estShaw, après tout, vers qui jeme suis

tournée, quand je me suis effondrée en voyant que Casey m’ignorait. Enfin, c’était purementphysique,non?Seigneur,jen’arriveplusàsavoir.Cen’estpascommesijeprévoyaisdereveniràStoningtonpourdebon.Jen’aiaucundésird’être

avecCasey,physiqueouautre.Jesaisquecelanetientpasdebout,cequej’éprouve,maisjeneveuxpasleperdre,toutsimplement.Etjesuisentraindeleperdre,monrefuge.Jelesens.Touteslesfoliesqui ont accompagné ce jeu du chat et de la souris entre Shaw et moi, mon incapacité à séparerdésormais le physiquede l’émotionnel, tout celamedonne enviedem’accrocher désespérément àquelquechosedefamilier.Casey,c’estlasécurité.MaisCaseyn’estplusàmoi.Est-ilàMia?Etsic’estlecas,celaveut-ildirequejel’aitotalementperdu?Etvoilàquelaconfusionmonted’uncranoudeux.Je tire sans doute des conclusions précipitées concernantCasey etMia.Casey a toujours été un

gentilgarçon.Oui,c’estcela.Ilesttoutsimplementgentilavecuneétrangère.Pasvrai?Çaneveutriendiredutout.Miaestunauteurderomansd’amourquiécritl’histoired’unpêcheurdehomards,

etquellemeilleuremanièredeserenseignersursonsujetquedes’adresseràquelqu’undontc’estlemétier ? EtCasey en rajoute sûrement pour lui faire plaisir : le jeune héros fringant, un peumaldégrossi,avecseslargesépaulesetsonsplendidesourire,soncorpsparfait,savoixgraveetdesyeuxtellementbeauxetsincèresquetouteslesfemmessontimmédiatementchavirées.Sanslemoindredoute,Mias’est laisséeprendreàsoncharme.C’est l’effetqu’ilasurtoutesles

femmes.Pourunpeu,j’aipresquedelapeinepourlechagrinquecelavainévitablementluicausersielle se laissealler à croirequ’ilpuisseêtre à elle.Beaucoupont essayéet échoué. Je suis la seuleexception.PourlebiendeMia,j’espèrequ’ellevaobtenirtouslesrenseignementsdontelleabesoinetficherlecampdeStonington.Parcequepersonneneresteici,àmoinsd’yêtrené.Seulement,voilà,c’estmoiquiailesentimentdenepasêtred’ici,cesdernierstemps.Toutcequi

estfamiliermeparaîtunpeuétrangeretcelanemecorrespondplus.Ouplutôt,c’estmoiquinesuisplus àma place ici.Ce qui soulève la question : une fois que l’on a quitté sa ville natale, peut-onvraimentyrevenir?Peu importe. Je n’ai pas l’intention de revenir. Du moins, pas autrement que pour des visites

occasionnelles. Du coup, il faut que je comprenne pourquoi je suis jalouse deMia. Caseymérited’êtreheureux.C’estcequejedésirepourlui.Peut-êtrequejen’aijamaisimaginéqu’ilpuissel’êtresansmoi.Etmoiquibaiseavecunautre,enfin!Unautrepourquij’éprouvedessentimentspastrèscohérents.Dequeldroitserais-jejalouse?—Mince,Cassidy.Jemepasselamainsurlevisage,dépitéeetagacéeparmonproprecomportement.Jesuisrevenue

àmonpointdedépartsansavoirentrevulamoindresolution.MonDieu,j’aihâtederetourneràSanDiegoetretrouvermesamisetmonboulot.C’estcelama

vie, désormais.Aumoins, là-bas, je suis trop occupée pourme laisser absorber parmes pensées.S’arrêter pour réfléchir, ce n’est pas toujours une bonne chose. Il arrive qu’on réfléchisse trop.Surtoutquandonfinitparserendrefolleainsiqueceuxquivousentourent.Çasuffit.Étantdonnéquemamèreatoujoursditquel’oisivetéétaitlamèredetouslesvices,jedécidederedescendredonneruncoupdemainetpréparerledéjeunerpourl’uniquepensionnairerestéeàlamaison.Etpeut-être…quisait, jelasonderaipoursavoircequ’ilyaentreelleetmonpetitcopain.Euh,

monex-petitcopain.Enfin,bref.Jemelèvepéniblementetjen’encroispasmesyeuxenapercevantlebateaudemonpèrequisort

duportavec,àsonbord,unmembred’équipageinattendu.IlyaencoredanslapiècelalanterneetlesjumellesqueCaseyetmoiutilisionsdansnotre adolescencepour épier les gens. Jem’emparedesjumellespourvérifiercequ’ilenest.C’estCaseyMichaels l’autrepersonneàbord.Celadit, j’auraispuledevineràsaposture,façon

Poséidon,souveraindesmers.—Oh,voilàquin’augureriendebon,murmuré-jepourmoi-même.Maisd’ici,jenepeuxrienyfaire,àpartformuleruneprièresilencieusepourqueShawrevienne

en un seul morceau et ne finisse pas en chair à pâté pour les requins. Cela lui apprendrait à meharceler et àmesuivrede l’autrecôtédupays.La seulemanièrepour luid’en réchapper, c’estdefermersagrandegueule,cequinerisquepasd’arriver,j’ensuissûre.Oh,etpuistantpis.Jeverraibienplustardcequ’ilressortiradecetteexcursionenmerchargéede

testostérone.Pourlemoment,moiaussi,jevaisalleràlapêche.Aprèstout,medocumenteràfondsurunsujetquimepassionne,c’estcequejefaislemieux.

Aumêmemoment,jeremarquequelquechosedebizarresurlequai.Lesdockersnepréparentpasle matériel pour décharger la cargaison au retour des bateaux. Ils sont en train de tout ranger etd’arrimerlesgrues.C’estcequ’ilsfontquandungrainmenace.Jejetteuncoupd’œilverslelargeetjevoislesbateauxseprépareràl’affrontereuxaussietnons’occuperàreleverlescasiers.Jemetournesurmadroiteetc’estseulementlàquejeremarquelesnuagesnoirsquiarriventdu

sud-est.Toutelapaisibletranquillitéquej’airemarquéen’étaitriend’autrequelecalmeprécédantlatempête.Bonsang.Bienque jen’yaiepas fait attention sur lemoment, étantpréoccupéeparautrechose,moncerveautrèsorganiséaenregistrécequemedisaitMrs.Paddockaupique-nique,ettoutmerevient.Ellemeparlaitd’unouraganquimenaçait.Nousnesommespasprêts,c’estlapenséequimevientàprésent.Decombiendetempsdisposons-

nous ? Il y a tellement de choses à faire etWhalenHousen’a pas été sécurisée.Àmoins que si ?C’étaitdecelaquemamanparlaithiersoir?Nomd’unchien.Maintenantjesaispourquoijemesuisréveilléed’aussibonneheure.Moninconscientyaveillé,alorsquejeneprêtaispasattentionàcequim’entoure,tellementj’étaisoccupéeàanalysermessentimentsetmesémotions.Nousallonsymettrebonordresur-le-champ.Ilesttempsdeseressaisiretdefairequelquechose

deproductifetd’utile.Jepasseàlasalledebainspourunerapidetoilette.Jemebrosselesdents,mechange,puisjeme

précipite enbaspourvoir comment seportemaman.Laquelle est évidemmentdéjà réveillée et entrainderegarderlesinformationsàlatélévisiondanslesalon.—Bonjour,Cass, dit-elle avecun sourire inquiet avantde tapoter l’accoudoir du canapé auprès

duquelelleaarrêtésonfauteuil.—Qu’est-cequisedit?demandé-jeenm’asseyant.Ellemefaitsignedemetairependantquelaprésentatricereprendlaparole.Harmony Hale est plantée derrière son bureau avec un sourire rayonnant comme si la Nature,

saisiedefolie,n’avaitpasdécidédes’enprendreàStonington.— LeMaine doit se préparer au pire. La tempête tropicale Ayla a été reclassée en ouragan de

catégorie1 et se rapprochedes côtes.Pour en savoirdavantage,voyonscequ’il enest avecnotrespécialistemétéo,KippEdgington.Kipp?Lacamérapasseàungrandtypesvelteauxdentséclatantesetcouvertd’autobronzant.Kippn’est

manifestementpasduMaine.—En effet,Harmony. Tout lemonde a le regard tourné vers le ciel, et avec raison. (Ilmontre

diverspointssurlacartesituéederrièrelui.)Latrajectoireactuelled’AylatraverselesîlescôtièresduMaine, mais on ignore actuellement si elle atteindra le continent. Bien qu’il soit inhabituel deconnaîtreunemenacedecetteampleuràunepériodeaussiprécocedel’année,lestempératurespluschaudes que de saison enregistrées le long des côtes sud et est dans l’Atlantique ont fourni lesconditions idéales.Etnevousméprenezpas,chers téléspectateurs,cette tempêtea lepotentielpourdevenirunvéritablefléau.Ellerisqued’êtrereclasséeencatégorie2ou3d’icipeu.Cela,cesontlesmauvaises nouvelles, enchaîne-t-il. Les bonnes, c’est que le front chaud qui remonte du golfe duMexique va nous empêcher d’être ensevelis sous la neige. Les inondations constituent encore unrisque,bienentendu,ainsique lesdégâtscauséspar levent,maisaumoins,quandcetépisodeserapassé,nousn’auronspasàluttercontrelescongères.Ilcontinuesesexplicationsmétéorologiques,maisjesuisdéjàenmodeurgence.—Qu’est-cequ’ilresteàfaire?demandé-jeàmamère.

Ellemeregarde,d’unairdéterminéetserein.—Lepetitdéjeuner,secontente-t-ellederépondre.Etsurce,elledesserrelefreindesonfauteuiletentreprenddesedirigerverslacuisine.—Maman?Latempête?—Ellen’empêchepasnospensionnairesd’avoirfaim,répond-elle.Etpuisétantdonnéquenousne

savonspascombiendetempsilresteavantqu’onaitunecoupuredecourant,ilfautqu’ons’occupedepréparerquelquechosequiseconserveraletempsquel’électricitérevienne.Manger?C’estcelaquilapréoccupe?—Mais,etlamaison?Elles’arrêteetfaitpivoterlefauteuilpourseretournerversmoi.Impressionnante,lamanœuvre.—Tun’as donc rien entendude ce que je t’ai dit hier soir ? Pendant que tu gambadais dans la

nature, tout le monde a donné un coup de main pour préparer la maison. Notre pensionnaire ycompris.Interloquée,jeregardelesfenêtresdusalon.Lesvoletstempêtesn’ontpasencoreétéfermés,mais

ilsontétéinstallés.Commentcelaa-t-ilpum’échapperquandShawetmoisommesrentréshiersoir?Seigneur,peut-êtrequetoutcesexeavecShawcesdernierstempsm’adéréglélecerveau.Shaw!—PapaaemmenéShawreleverlescasiers,n’est-cepas?Mamanadéjàfaitdemi-touretestpresquearrivéeàlacuisine.J’accélèrelepaspourlarattraper.—Ilavaitbesoind’uncoupdemain,Cass.Lapaniquemesaisit.Jesaisàquelpointlahouleestmauvaisequandunetempêteapproche,etc’est

pireencoreaularge.—MaisCaseyestlàpourça!—Caseyestaveceux,dit-ellesansmeregarder.Tut’inquiètesautantpourluiaussi?—Quoi?Maisjen’aipasbesoindem’inquiéterpourCasey,maman.Ilal’habitude.PasShaw.Je

nesaismêmepass’ilestdéjàmontésurunbateau,etencoremoinsdurantunetempête.Ilpourraitnepasenréchapper!—Arrêtede te fairedusouci, répondmamèreavecungestedésinvolte.Tusaisque tonpèreet

Caseyveillerontsurlui.Monpère?Oui.Casey?Ehbien,jenepeuxpasenêtreaussisûre.Ilesttrèsprotecteur,etavectout

cequejeluiaiditdemalsurShawetnosquerellesàSanDiego…Ilsepeutqu’onn’entendeplusjamaisparlerdeShaw.—Bonjour!claironned’unevoixbientropenjouéel’autrepensionnairedeWhalenHousealors

quenousentronsdanslacuisine.MiaMorganestassisedevantl’îlotcentral,tenantdanssesdoigtsmenusunetassedecafébrûlant,

commesielleseprélassaitdevantunfeudecheminée.Sescheveuxnoirstombentencascadesursesépaulesenveloppéesd’unplaidencrochetenguisedechâle.—Alors,commeça,noshommessontsortisbraver lesélémentspourque toutsoitprêtpour la

longue nuit qui nous attend, dit-elle d’une voix rêveuse, nous laissant seules toutes les trois à lesattendreenfaisantcequenouspouvons.Parquoifaut-ilcommencer?—Noshommes?répété-jeenhaussantunsourcil.

Lesourireextatiquedisparaîtetellerougit,gênée.—Oh,excusez-moi,jevoulaissimplementdireque…Ellen’achèvepas,etcen’estpasnécessaire.Jesaiscequ’elleveutdire.Elleessaiesimplementde

fairesonintéressante,cequipeutmarcheravecn’importequid’autre,maispasmoi.Etunechoseestsûre,«nos»hommesnesontpaslesnôtres.Cesontmonpère,monmeilleuramietmon…ehbien,peuimportecequ’estShaw,maisilestàmoi.C’estdumoinscequeditmonbas-ventre.Etilsfonttouspartiedemonhistoire.Unehistoirequidevientmouvementée,auproprecommeaufiguré.Meshommessontsortissurunemercapricieusedansdesconditionsdangereusesetjeveuxqu’ilsrentrenttoussainsetsaufsàlamaisonavantquelesélémentssedéchaînent.MissMiaMorganabesoinderedescendresurterre.Nousnesommespasdansunromanàl’eaude

rose.WhalenHousen’estpasunbungalowdansleVermont.Iln’yapasdefeudecheminéedevantlequelsepelotonner,nousnenousbarricadonspaspouréviteruneromantiquetempêtedeneige,etellenevapasseblottirtoutenueavecCaseysousunecouverturepourseréchauffer.C’estseulementquandmamanmedonneuncoupdecoudedanslescôtesquejemerendscompte

quejefoudroieMiaduregardcommepourladéfierd’oserrajouterunseulmot.EncorequeMianemeregardepas.Elleabaissélatêted’unairsoumisetfixesatassedecafécommesidescrevettesétaiententraind’yfaireunballet.Jemeraclelagorgeetdétendsmesmusclesprêtsàl’attaque.Maisqu’est-cequim’apris?—Non,jesuisdésolée,cen’estpascequejevoulaisdire.(Jemenseffrontémentcommeunevraie

pro.JecroisqueShawdéteintsurmoi.)Jem’inquiètesimplementpoureux.Mamanmeprendgentimentlamain.—Toutirabien,Cass.Nous,enrevanche,ilfautquenousnousmettionsautravail.

Shaw

ÀDetroit,lesseulsàêtreréveillésà4heuresdumatinsontlesvoleurs,lesmeurtriers,lesvioleurs,lesprostituées, lesdrogués et lespoliciersquiontpour tâchede les surveiller.Tous ceshorriblesindividusprospèrentlanuitetjusqu’àl’aube.ÀStonington,iln’yaquelespêcheursetlesdockersquisontdesortie.Etilsnesontpasmoinseffrayants.QuandDuffetmoiarrivons,noustrouvonsCaseyquinousattendsurlajetée.Cecrétinfaitexprès

denousdirequ’ilestlàdepuisunboutdetemps,maisDuffluiexpliquequenousavonseuquelquespetitsproblèmesd’habillementcematin,ayantdûnousmettreàdeuxpourquejepuisseenfilersonsurpantalonencaoutchouc,sonjeanetsachemiseélimésdeuxfoistropgrandspourmoi.J’étaisloind’avoirapportéunetenuecomplètepourchalutier.QuantàCasey,ils’estapparemmentdéjàoccupéd’arrimersonbateauenprévisiondelatempêteetilseproposepouraiderDuffàenfaireautant.Celaaurait été bien d’être au courant avant de revêtir tout cet accoutrement, mais je crois que Duffm’auraitquandmêmeemmené.JelefaispourCassidy,etparcequecelaal’airtrèsimportant.Jen’aijamaisvudeprèsunetempêtetropicale.Jenesavaismêmepasquecesfichusmachinsremontaientaussi loinaunord.Maisjeveuxbiendonneruncoupdemaindanslamesuredemescapacités.Entoutcas,ceserasûrementuneaventurequejen’oublieraipasdesitôt.

Ilfaitsombre,froidethumide,lamerestdeplusenplusagitéeetjemanquedeglisserdixfoisenessayantdedescendrel’échelledecoupée.Ilnemanqueraitplusquejetombeetquejemefendelecrâne,etquecelam’arriveenplusdevantlepèredeCassidyetsonex-petitcopainseraitencoreplushumiliant.Nevousméprenezpas:jesuisundur,maisundurdelarue,alorsquecesdeux-làsontdesmarins.

Jemesuisbattucontredesvoyous.EuxsebattentcontreMèreNature.Donc,danslesfaits,cesontdesmauviettes,parcequelesvraisdursnes’attaqueraientpasàunefemme.Unefoisquenousavonschargénotrematériel–etjeseraisincapabledevousdirecommenttout

cela s’appelle –,Duff semet à la barre et lemoteur démarre en rugissant.Malgré le grondementsourd,c’estlebourdonnementdepluspetitsmoteursquifilentànoscôtésquejeremarqueleplus.—Pourquoilesautressontdansdesbateauxpluspetits?JeregretteaussitôtlaquestionenvoyantqueCaseymeregardecommesij’étaisidiot.Jemecrispe

unpeu,carjedétestequ’onmeprennepourundemeuré.—Vousvoulezparlerdesyoles?Oui,bon,commentvoulez-vousquejeconnaisseletermetechnique?—Leursbateaux,ce sontceuxqui sontancrésdans labaie. Ils font l’aller-retourenyole,parce

qu’ilsnepeuventpass’amarrerauport.—Pourquoi?—Parcequeceprivilègeestréservéauxdescendants.—Lesdescendants?C’est-à-dire?Àunmoment, je commence à posermes questionsmoins par simple curiosité quepour agacer

Casey.Etçamarche.Ilprendlamouche.— Les descendants, ce sont les membres des plus anciennes familles, ceux qui pêchent depuis

longtemps. Le quai où ils s’amarrent leur est réservé. Duff est un descendant.Mon père aussi. Etquandilprendrasaretraite,ceseramoiledescendant.—Alors,votrebateauestàl’ancredanslabaieaussi?J’auraismieuxfaitdenepasposerlaquestion.Iltendlebrasversunbateaud’unblancéclatantavecdeslignesbleues.—Oui,ilestjustelà.LenomÉtoile filante estélégammentcalligraphiésur lapoupe. Jemecrispeencoreplusenme

rappelantuneétoilefilanteidentiquetracéesurlahanchedeCassidyaveclenomdecetabrutiinscritdessous.Cedoitêtrel’équivalentdestatouagesjumeaux,chezeux.—Bellebête,non?demandeCasey.Jenepeuxquehocherlatête,car,oui,Cassidyestbelle,effectivement.—C’estlemomentdesemettreenroute,lesgars,nouscrieDuffdepuislabarre.Letempschange

plusvitequeprévu.Fautpasqu’onselaisseprendreaupiège.Caseysautedesonperchoirettiresurl’amarreàlaproue.—Vousêtesprêt?demande-t-ilendésignantlapoupe.Jenelesuispasdutout,maispasquestiondel’avouer.Jevaistirerladeuxièmeamarre.

—Biensûr.Çanedoitpasêtresiterrible,non?réponds-jeenhaussantlesépaules.Ilnes’agitjamaisquedetirerunecorde.J’entendsCaseyetDuffglousserdansmondos.—Jepensequevousallezvousrendrecompteparvous-mêmedecequecelafait.Lebateaus’élancebrutalementetjemanquedeperdrel’équilibreunefoisdeplus,alorsqueCasey

estrestésansbroncheràlaprouedanssaposedecapitaineMorgan.Dansquoimesuis-jeencorefourré?

11

Shaw

Cequiétaitencorehierunocéantoutbleuestdevenud’unnoircharbonneuxquedesvaguesauxcrêtesblanchesdéchirentirrégulièrement.Lesbouéestressautentetpenchentparfoistellementquejeme dis qu’elles ne se redresseront jamais. Les nuages qui se sont lentement accumulés sontmaintenantau-dessusdenous,cachantlesoleiletnousplongeantdansl’obscurité.JedoisavouerquejesuisintimidéparlapuissancebrutaledeMèreNature.À une demi-douzaine de milles de la pointe d’Isle au Haut, Duff lutte contre un courant

particulièrement violent. Même moi, je peux voir le savoir-faire nécessaire pour manœuvrer cebateau,etiln’enmanquepas.Ilvaavoirdroitàmonrespectéternel.Caseyavaitditquejemerendraiscompte«parmoi-mêmedecequecelafait»etjenesuispas

déçu.J’ai travaillédur toutemavie, j’enaibavéchaqueminuteetchaque jourdansmonboulot,mais

seulementpsychologiquement.Là?C’estdutravailphysiquepur.SeptcentscasiersenacieràhisseràborddubateaudeDuff.Septcentspiègesremplisd’eauetlestésquiexigentdanslesbiceps,ledosetles épaules la force et lesmuscles d’un championolympiqued’haltérophilie. Je ne connais pas depommade ou de liniment qui pourront soulager la douleur que je ressens partout, mais je medébrouillebienpourlecacher.Enfin,jecrois.Nous sommes accablés par le vent et la pluie.Une pluie glacée qui vous transperce et qui vous

fouetteàenlaisserdesmarquessurlapeau.Etétantdonnéquelebateauestsecouédanstouslessenscommeuncanarddanslebaind’ungossesurexcité,jepeuxajouteràcelaunmaldemercarabiné.Etbiensûr,Caseyl’aremarqué.—Vousavezl’airunpetitpeuvertsurlesbords,monvieux.Vousferiezbiendevousasseoir,dit-il

pendantqueDuffmanœuvrehabilementjusqu’àl’emplacementsuivant.Ledernier,Dieumerci.Jeredresselesépaulesetj’afficheunmasquestoïque.J’ail’habituded’enporterunlaplupartdu

temps.Cettefois-ci,ilfautsimplementquej’aillelechercheraufonddemonsacàmalice.J’aibeauavoir peur pourma vie, pas question de laisser Casey s’imaginer que je ne peux pas affronter lamêmechosequelui.Iln’apasencoretranspirénimontrélemoindresignedefatigueetilsetientsurcebateausecouéentoussenscommeuncow-boydressantunchevalsauvage.Jenepeuxmeconsolerqu’enconstatantqu’ilestaussitrempéquemoi.Maiscelaluivamieux,celadit.

Jeledéteste.Jeréprimemonenviederépandremestripessurtoutlepontetluifaislesouriredontjegratifie

toutclientpotentiel.Celuiquiassuredemonaplombetdemonaudace.Ilnemebattrapas.Personnenemebatjamais.SaufqueCassidym’adéjàbattu,danslesfaits,maisjesuissortivictorieuxaufinal.—ShawMatthewsnesedéfilejamais,dis-je.— Cassidy avait raison vous concernant, sourit-il en secouant la tête. Vous êtes vraiment

égocentrique.—Ellevousaditça?—Ellemedittout.Sonexpressionestlourdedesous-entendus,maisjedoutequ’elleluiaitditquejel’avaissautéeen

maintesoccasions.Jemedemandes’ilferaitautantlemalins’ilétaitaucourant.—Maismêmesiellen’avaitriendit,jem’enseraisrenducomptedèsl’instantoùvousavezparlé

devousàlatroisièmepersonne.Lebateaus’arrêtedevantl’emplacementsuivantetCaseyetmoiallonshisserlescasiers.Plusvite

ilsserontàbord,plusvitenouspourronsrentreràterreetc’estmonobjectifdumoment.Jedoissûrementavoirl’aird’univrognequierredanslaruequandjetraverselepont,maisj’ai

renoncéàmarcherdroitetjeconsidèrequ’atteindrel’autrecôtésansm’étalerlesquatrefersenl’airestunexploitpersonnel.—Jenevoisriendemalàavoirunehauteopiniondesoi-même.Ilsetrouvequejemeconsidère

commeuntypeplutôtgénial.—Vousêtesbienleseul.Ilattrapelefilinetletireàluiavantdel’accrocheràlagrue.—C’estcensévouloirdirequoi,ça?Caseyagrippelepremiercasierets’interromptpourmeregarder.—Pourquoivousêteslà,aufait?—Pourlamêmeraisonquevous,réponds-jeavecdésinvolture.J’aideDuff.—Non, pas là, sur le bateau. Là, à Stonington. Et vous n’avez pas gagné le droit d’appeler cet

hommeparsonprénom,alorsabstenez-vous.Ayezunpeuderespect.Waouh!C’estlegenredesortiequimefoutenrogne.Jeregardeducôtéde«Mr.Whalen»pour

voir sa réaction etm’excuser, sauf que je le trouve en train de tenir la barre, l’air perdudans sespensées. Mais Casey m’a demandé autre chose, il m’a posé une question dont je n’entrevois laréponsequemaintenant.—Jesuislàparcequejenepouvaispaslalaissers’enfuir.MesparolesmechoquenttoutautantqueCasey,apparemment.—SiCassfuyaitquelquechose,c’étaitvous.Maisnevoussurestimezpas.Lavérité,c’estqu’elle

couraitretrouverquelquechose.—Vouscroyezquevouslaconnaissezsibienqueça,hein?Ilhausseunsourcil.—Vouscroyezquevouslaconnaissezneserait-cequ’unpeu,vous?Cassetmoi,onestdesamis

d’enfanceetdesamoursd’adolescence.Jelaconnaismieuxquepersonne.

—Ahbon?Ehbien,vousn’auriezpasremarquéquecelal’agacequevouspassiezautantdetempsavecMia?Parcequemoi,oui.Casey hisse brutalement le dernier casier sur le pont et se redresse, crispé et tendu. L’attitude

défensiveclassique.—Maispourquivousvousprenez,merde?—Pourceluiquifaitattention.Vousdevriezessayer,detempsentemps.Çaasesavantages.Peut-êtrequej’enaitropdit,maisjem’enfiche.Jenecessederevoirledésespoirquej’ailudans

lesyeuxdeCassidyhiersoiretdemerappelercommentelles’estcramponnéeàmoi.Et toutcelaaprèsl’avoirvuelecœurbrisé,parcequ’elleavaitaperçucetypeavecuneautrefemme,cetypeenquielleavaittantconfiance.—Cassidyvousdétesteetlesujetestclos.Retournezauboulot.Casey empoigne le casier suivant et le fait glisser dansma direction. Sans prêter attention à la

douleurcuisantequej’éprouvedanstousmesmuscles,jelesoulèvecommes’ilnepesaitriendutoutetjel’empilesurlesautres.—Peut-êtrequevousavezraison.Peut-êtrequ’ellemedéteste,effectivement.Maisvoussavezce

qu’on dit. La frontière estmince entre la haine et l’amour. Sauf que dans ce cas, il faudrait plutôtparlerdedésir.Jemetournepourluidécochermoncélèbresouriresarcastique,saufquejesuisaccueilliparun

sacrécoupdepoingenpleine face.Pasmoyendemeprépareràquelquechoseque jen’aipasvuvenir,maisàquoij’auraisdûm’attendre.Ilmefaitl’effetd’uneboulededémolitiondansunbâtimenten briques, mais en plus rapide. Une douleur fulgurante irradie aussitôt ma mâchoire et je medemande si elle n’a pas été déboîtée.Qu’est-ce qu’ils ont tous ces gens avec leur propension à laviolence ?ÀDetroit, jem’attendais à ce genre de choses.Mais dans une petite ville de pêcheurs,nettementmoins.Duffbrailledepuislabarrequelquechosequejenedistinguepastantmonoreillebourdonne,mais

celan’a aucune importance.Là, je vois rouge et la colèrebouillonnedansmesveines.Retrouvantmonéquilibre,jebalanceundirectàCasey.Ilesquive,maisj’enchaîneaussitôtavecunuppercutaumentonquileprojetteenarrière.Le bateau penche de côté. Surtout, rester debout. Si j’ai appris quelque chose dans les rues de

Detroit,c’estqu’ilnefautjamaislaisservotreadversairevousfairetomber.Maistoutseliguecontremoi:lamétéo,l’océan,leponttrempéetlesintentionsdeCasey.Ilseprécipitesurmoietmeplaqueau sol.Nous nous étalons tous les deux contre les casiers à homards que j’avaisméticuleusementempilés.L’undescoinsenaciers’enfoncecruellementdansmondos,cequin’arrangerien.Fatiguédetoutescesconneries,j’empoigneCaseyparlecoldesonstupidesuroîtetjelerepousse

detoutesmesforces.Celamedonneassezdetempspourmerelever,maisdansmoneffort,l’undescasiersmecognelecrâne.CelaasuffiàCaseypourseressaisiretreveniràlacharge.Jemeprépareàl’impact,conscientque,cettefois,jevaisfinirlesoufflecoupé,maisilm’estimpossibledeprévoircequivam’arriver.Alorsque j’étais fermementcampésurmespieds, la seconded’après, jeme retrouveàboire la

tasse. J’ai été projeté par-dessus bord et l’océanm’engloutit. Instinctivement, je réagis et remonte,prenantune longuegouléed’airàpeineai-je refait surface.Aumême instant, jevoisunemurailled’eau qui se dresse devantmoi. Elle s’écrase surmoi avec une telle force que jeme retrouve denouveausousl’eau.Jemedébatsdeplusbelle,sanstropsavoirdansquelledirectionestlehaut,maisbien décidé à le trouver. À force de m’agiter, je finis par ressortir de l’eau et reprendre ma

respiration.Jenedevraispasmedonner tantdepeine.Lamer joueauchatetà lasourisavecmoi.Profitant

d’unmoment de répit, je me retourne en tous sens, cherchant le bateau de Duff du regard. Il esttoujourslà,maisj’aiétéentraînétrèsloin.—Ici!hurlé-je.Enfin,jecroisquejehurle.Étantdonnélaquantitéd’eausaléequej’aiavalée,j’ailavoixéraillée

etlagorgeàvif.Et c’est alors qu’une autrevagueme submerge.Celle-là est encoreplusgrosse, plusviolente et

décidéeàmefairepasserparlefond.Medébattantentoussens,j’essaiedereprendreunpeud’air.Toutestsombre.Jenevoispluslalumièredelasurfaceetj’ailespoumonsenfeu.Maispasmoyende respirer. Car ce serait signer mon arrêt demort. Et une chose est sûre :Mère Nature n’a pasl’intentiondemelâcher.Arriveunmomentoùjesuistropépuisépourbougerlesbras.Jenesaismêmepassijelesagite

danslebonsens,detoutefaçon.Ensuite,cesontmesjambesquim’abandonnent.Toutcommenceàdevenirflouet jemerendsbrusquementcomptequec’estainsiqueShawMatthewsvamourir.J’aisurvécuàSevenMileetàuneexistenceoùlesobstaclessesontaccumuléscontremoi,toutcelapoursuccomberdevantuneforceàlaquelleonnepeutrésister.Finalement,jepeuxêtrebattu.Etc’estlecas.Je laisse échapper le souffle que je retenais, je renonce et je lâche prise. C’est étrange comme

l’océanestcalmesousletumultedelasurface.Ceseraunpaisiblerepospourmadépouille.Etj’aipresquel’impressionqu’ilmeprenddanssesbrasalorsquejesombre.

Casey

J’auraisdûlelaissersenoyer.Vraiment,j’auraisdû.J’yaisongé,j’aimêmepenséàl’explicationquejedonneraisàCassidyetauxautorités.«Oh,zut!Ilesttombépar-dessusbordetiln’yatoutbonnementpaseumoyendelerécupérer.

Quellepertetragique.»Voilàcequej’auraisdit,enbaissantlatêteetenfaisantminedem’envouloird’avoirétéincapabledelesauver.Mais je suis un héros, bon sang. Depuis toujours. Dumoins, c’est comme ça que Cassidym’a

toujoursvu.Ets’ilyaunechosequinem’estjamaisarrivéeetquejenesupporteraispas,c’estdesavoirquejel’aidéçue.Parfois,c’estvraimentnuldedevoirêtreleplusfort.Mettantma vie en danger, je plonge dans cet abysse glacial et je nage dans la direction où j’ai

aperçuShawpourladernièrefois.Çan’ariend’évident.Lesélémentssontcontremoi,maisjesuisunmarinetparconséquent,unexcellentnageur.Sansoublierquejesuiscostaud.Jeplongeet,plusbas,j’aperçoislesuroîtjaunetropgrandpourlui.Avecunpeudechance,ilesttoujoursdedans,carjenevoisriend’autre.Letempsquej’arriveàlui,ilestinerte.Livide,leslèvresbleutées,ondiraituncadavrequiflotte

dansleréservoird’unlaboratoire.Jenesaisvraimentpassionpourralerameneràlui,maisentout

cas,jevaism’assurerqu’ilnesoitpasperduenmer.J’empoignesamainetjeremonteverslasurfaceenleremorquant.Seigneur,j’ailespoumonsen

feu.LepharedubateaudeDuffperce l’obscuritécomme la lumièreauboutd’un tunnel.Ce seraitréussi,sinousmourionstouslesdeuxici.Bonsang,laseulechosequej’aientête,c’estqueCassidyseraiteffondréedenousperdrel’unetl’autreaumêmemoment.Rassemblant toutesmesforces,et ilm’enfautavec lepoidsmortquereprésenteShaw, jesurgis

horsdel’eaucommeunmarsouinetjeprendsunegrandegouléed’air.Lesvaguesontencoreenflé,etilfautquejefasseattention,tandisquejenageensoutenantlatêtedeShawhorsdel’eau.Encorequecelan’aitpasgrandeimportance,carapparemment,legarsnerespireplus.Duff est penché sur le bastingage, prêt à le hisser à bord, et c’est une sale situation, car il ne

manqueraitplusquelepauvrefinisseàl’eaucommeShawetmoi.C’estunvieuxloupdemer,celadit,doncilyapeuderisquesqu’ilperdel’équilibre.—Ilestenvie?crie-t-ilpar-dessusleventetlapluie.—Jecroispas!Une fois arrivé au bateau, j’empoigne l’échelle de corde queDuff a jetée et je hisse Shaw à sa

hauteur. Je l’aide autant que je peux,mais ce n’est pas grand-chose, étant donné l’énergie que j’aidépensée rien que pour le ramener jusqu’ici. Quand Duff manque de tomber à son tour, j’ai unbrusquesursautd’adrénalineetd’unedernièrepoussée,jeparviensàfairebasculerShawsurlepont.Letempsquejesortedel’eauàmontour,Duffestdéjàentraindetenterdeleranimer.—BonDieu!s’exclame-t-il.Lecœurnebatplus!Je le laisse s’occuper du bouche-à-bouche, car il n’est pas question que j’embrasse ce connard,

maisjeluiouvresonsuroîtpourpouvoirluifaireunmassagecardiaque.Trentetentativesplustard,Duffcherchedenouveaulepouls.Rien.—Continue!hurle-t-ilenabandonnantsonposteetenretournantprendrelabarre.Merde.Jepoursuislemassagecardiaque.—Qu’est-cequetufais?Ilnerespiretoujourspas,dis-je.—Jefouslecampd’icietjenousramèneàlamaison.Maintenant,sauvesaputaindevie!Le moteur accélère et le bateau s’élance comme un hors-bord sur une vague. Je m’efforce de

maintenirShawtoutenessayantderamenercesalaudàlavie.Ravalantmafierté,jeluipincelenezetposemabouchesurlasiennepourinsufflerdel’airdanssespoumons.Jem’enfiche.Iln’yauraquemoipoursavoirquemeslèvresonttouchélessiennes.MêmesiShaws’ensort,ilnes’ensouviendrapasetj’emporteraicesecretdansmatombe.Jemebaisseetcollel’oreilleàsabouche,guettantunsouffle,maispasmoyend’entendrequoique

cesoitaveclemugissementduvent,lefracasdesvaguesetlegrondementdumoteur.Jecherchesonpoulsàtâtons,maisayantlesdoigtsgeléscommetoutlerestedemapersonne,quidoitêtreauborddel’hypothermie,jenesensriendutout.Je reprendsmonmassage cardiaque et finalement,Shawest saisi d’unequintede toux et crache

l’eauquiencombraitsespoumons.Lagorgedecepauvregarsvaluifaireunmaldechienpendantles jours suivants. Il ouvre tout grands des yeux paniqués et pendant un bref instant, je perçois saterreur.Nevoulantpasm’êtredonnétoutcemalpourlevoirs’étouffer,jeleroulesurlecôtéetlelaissetoutexpulser.Quelquesminutesplustard,ilseredresse,continuantàtousser,maisbienvivant.Je luiassèneunebonneclaqueentre lesomoplates, justepour l’aider–enfin, sionveut–,puis jem’écartepourluilaisserdelaplace.

Ilrelèvelatêteetmefoudroieduregard.—Quoi?Vousnemeremerciezpasdevousavoirsauvélavie?—Excusez-moi, répond-il, essoufflé.Merci surtoutpour le coupdepoingquim’a faitbasculer

par-dessusbord,connard.—Derien,mecontenté-jederépliqueravecunsourirenarquois.J’auraisdûlelaissersenoyer.Lemoteur commence à ralentir et jeme relève, voyant que la jetée se rapproche.Ainsi quema

mère,MiaetCassidy.Évidemment.Ellesaccourentversnous,l’airpaniquéetinquiet.Jen’aijamaisvumamèrecouriraussivite. Jene l’ai jamaisvuecourirdu tout,àvraidire.Maiscen’estpas lapremièrefoisquejevoisCassidyeffrayéeainsi.C’étaitilyalongtemps.Nousvenionsdesortirtouslesdeuxsurleparkingd’unmagasinquand

deuxapprentisdélinquants,JeremyetKennedy–commentonpeutvouloirêtreunpetitduravecunprénompareil,d’ailleurs?–m’ontbraquéavecunflinguepouruneembrouilledepêche.Ilss’étaientaventurésunpeu trop loindans lesemplacementsdema familleet je leuravaiscoupé leurs filins.Rienàfoutred’eux.Nideleurflinguedemauviette.Lequelflingueétaitpartidurantl’échauffouréeetla balle s’était logée dansmon épaule.Même blessé, j’avais filé à ces gamins une leçon qu’ils nerisquaient pas d’oublier. On se frotte pas aux descendants. Nous autres descendants, on est desdingues.Maisceregardeffrayéàlapenséedemeperdreadésormaisunautreobjet.Cassidyestpresqueen

larmesquandelleaperçoitShaw.—Oh,monDieu!Dégagezdelà!crie-t-elleauxdockersquis’efforcentdenousamarrer.Aumomentoùelles’apprêteàmontersurlebateau,Duffl’arrête.—Pasquestionqu’onsoitobligédeterepêcheraussi.Resteoùtues.—Quoi?Quiesttombéàl’eau?Shaw!Vousallezbien?Quequelqu’unappellelessecours!Ouais,mercidet’inquiéterpourmoi,Cass.Jevaisbienaussi.—Non,n’appelezpersonne!s’écrieShaw.Jevaisbien.—Vousn’avezpasl’air.Papa,ilfautqu’on…—Non,ilaraison,lacoupeDuffenarrêtantlemoteur.Çan’auraitaucunsens,detoutefaçon.Il

leur faudrait trop longtemps pour arriver ici, surtout avec la tempête qui déferle sur nous. Il fautqu’onremonteàlamaison,toutdesuite.DuffetmoiattendonsqueShawdébarque,aidédeCassidyetdemamère,puisnousleuremboîtons

le pas. Selon les instructions de Duff, les dockers se mettent en devoir d’arrimer le bateau enprévisiondelatempête,pendantquejeregardecevoleurdemèreetdepetiteamiesefaireescorterjusqu’àWhalenHouseoùilvasansaucundoutefairel’objetdetoutesleursattentions.Miaresteavecmoietessaiedeparaîtrecalmeetpleined’assurancealorsquesonregardtrahittout

autrechose.C’estcequej’apprécietantchezelle.Elleadesyeuxéblouissants,maisilssonttellementsincèresquejen’aijamaisàmedemandercequ’elleaentête.Ellefrissonneetcroiselesbraspourseréchauffercommeellepeut.Deboutsouslapluiebattante,

sescheveuxdégoulinantsetcollésauvisage,ellemedemanded’unetoutepetitevoix:—Casey?Toutvabien?Enfin,quelqu’unmontreunpeudecompassionetsesoucieduhérosdélaissé.

C’est alors que jeme comporte d’unemanière inattendue. Toujours très protecteur, cette fois àl’égardd’uneautrefemme,jepasselebrasautourdel’épauledeMiaetl’attirecontremoi.Jen’aipasbeaucoupdechaleuràluioffrir,maisellepeutprendretoutcequej’ai.—Çava.Rentronsàl’abri.

12

Cassidy

J’aifaitlescentpasdanslamaisonenallantd’unefenêtreàl’autre,guettantlebateaudemonpère.L’ouraganAylaestdéjàdéchaînéetpasseencatégorie2enunriendetemps.AbbyetThomassontvenusnous tenircompagnie,carnosdeuxfamillesfont toujours toutdeconcert.Etsinousdevonsmourir,ceseraensembleaussi.JemeretiensdehurleràThomasquec’étaitàluid’alleraidersonfilsetmonpère,carjesaisqu’il

était occupé à sécuriser leurmaison avant de venir et qu’il n’aurait doncpas pu leur prêtermain-forte,mêmes’ilavaitvoulu.Etl’envienedevaitpasluienmanquer.MamanetAbbysesontactivéesencuisineetm’ontchassée,carjelesagaçaisàtournerenronden

me tordant les mains. Mia a eu le droit de rester, en revanche, car elle a « tellement envied’apprendre»et«saprésenceestunplaisir».Jecroisquejelesaifoudroyéesduregardensortant.Jen’aipasbesoind’apprendreàcuisiner.J’aipeut-êtrepassébeaucoupdetempsdansmonenfancesurlesquais,maisquandjen’yétaispas,j’étaisdanslacuisineavecmaman.Elleytenait.Peuimporte.Jesuiscontented’avoirletempsdescruterleport,mêmesic’estseulementdepuisla

fenêtredusalon.Lecielestdeplusenplusnoiràchaquesecondequipasseet lapremièreaverseadéjàatteint le

rivage.Maislepire,c’estlevent.Monimaginations’emballeetjevoisdéjàlebateauchavirerousebriserendeuxavantd’êtreenglouti.Etl’eau…legolfeduMaineestabsolumentglacialauprintemps.Peuimportequeleprésentateurmétéoaitditquelatempératureétaitélevéepourlasaison,celanechangerienpourl’océan.Jesuissoulagéequandj’aperçoisenfin lebateaudemonpèrepar-delà lesrues inondées.Plus il

approche,plusjemeconvaincsquequelquechosecloche.Jemeprécipitedenouveauaunid-de-pie,sansprêterattentionàmamanquimecriederalentirsouspeinedemeromprelecou,commeellelefaisaitquandj’étaispetite.Unefoisenhaut,jereprendslesjumellesetjeconstatequejenemesuispas trompée. Shaw est allongé sur le pont etCasey est penché sur lui. Sans réfléchir un instant jedévalelesescaliers.MaisAbbymebarrelecheminunefoisquejesuisarrivéeenbas.—Oùcrois-tualler?Ilyaunouragandehors,tuasoublié?

—Désolée,Abby,dis-je en labousculantpourouvrir laporte.Tupourrasmecrierdessusplustard,maisilssontenmeretquelquechosecloche.—Quelquechosecloche?(Jen’aipasl’intentiondelapaniquer,maisjen’aipasle tempsdela

rassurer,surtoutquejenelesuisguèremoi-même.)Jeviensavectoi.—Moiaussi,ditMiaensurgissantdelacuisine,d’oùellenousépiaitsûrement.Peu importe. Jeme fiche bien d’elle, en cemoment. Je sais que je devrais convaincreAbby de

rester,maisjen’aiqu’uneidéeentête:retrouverShaw.Jem’élance.Aussivitequejepeux,sautantpar-dessuslesflaquesetlesobstacles,sansprêterattentionàlapluieetauvent.Jenevoisquemonobjectif,lebateaudemonpèreetsespassagers.L’und’euxenparticulier.J’aiunpincementdecœurquandj’arriveaubateauetquejevoislapâleurdeShaw.Seslèvressont

décolorées,ilfrissonne,ilauneentailleaufrontetlamâchoireunpeutuméfiée.J’essaiedem’approcherdelui,maispapanel’entendpasdecetteoreille.Enplus,pasmoyendeles

convaincre d’appeler une ambulance, mais mon père a une bonne raison pour cela. Je suissimplement heureuse que tout lemonde soit sain et sauf et revenu à bonport.Et je ne désire plusqu’unechose:ramenerShawàlamaisonetvérifierparmoi-mêmesitoutvabien.Abby est évidemment de la partie. Ellem’aide à ramener Shaw qui ne répond à aucune de nos

questions.—Ilnes’estrienpassé.Jevousexpliqueraiplustard,dit-ilcommesicen’étaitriendutout.Jesuis

geléetjeveuxjusterentrer.Monpèrearéussiànousrattraper,étantdonnéquenousmarchonslentementpourménagerShaw.

Ilmontelarampejusqu’àl’entrée,oùThomasestentraindevérifierlesvolets.JetienslaportepourAbbyetShaw,maismonpèrem’arrêtealorsquejem’apprêteàlessuivre.—Cass,occupe-toidecalfeutrerlesfenêtres,dit-ilenmedésignantl’autrecôtédelamaison.—Maispapa,Shaw…—Tout irabien,mecoupe-t-il.Abbys’occupede lui.Nousn’avonsplusbeaucoupde temps.Va

fairecequejet’aidit,ajoute-t-ild’untonsansréplique.—Attends,oùestmaman?demandé-jeàThomas,quiestoccupéàfermerunvoletenpoussantle

loquetd’uncoupdepaume.—Occupéeàcequ’ellesaitfairelemieux:setordrelesmainsetsefaireunsangd’encretouten

restantcolléedevantlesinfosennousdonnantdeminuteenminutedesnouvellesdelamétéo,commesionnesavaitpasquec’estunefoutuetempête.Et il reste une dernière personne dont je dois m’inquiéter, même si, à ce que je vois, ce n’est

vraimentpaslapeine.CaseyetMiaarriventàleurtour,Miablottiecontrelui.Etcen’estpaspourlesoutenir.Peut-êtreque jeme suis trompée.Peut-êtrequemonauteurde romansà l’eaude rosevafinirparl’obtenir,enfindecompte,soncâlinsousunecouvertureavecmonCaseydevantunfeudecheminée.Je claque un volet en les regardant d’un œil noir quand ils arrivent sur la véranda. Casey le

remarqueets’écartebrusquementdeMiaavecunairnavré.Iladebonnesraisonsd’êtredésolé.Pasàcause de Mia, mais pour Shaw. Parce que je parierais jusqu’à mon dernier sou que c’est lui leresponsabledecesblessures.Ducoup,quandilseprécipitepourm’aideràfermerlesautresvolets,jel’arrêted’ungeste.—Jemedébrouilletrèsbientouteseule.

Ils’arrête,manifestementchoquéquejenelelaissepasjouerleshérosavecmoicettefois-ci.—Laisse-moit’aider,Cass.—Jet’aiditquej’yarrivaistrèsbientouteseule.Contente-toiderentreravectatrèschèreamie.

(Là, jefaismouche.Surlesdeux.CaseyetMia.Et jen’ensuispasmécontente.)Jem’occuperaidevousplustard.—Trèsbien,répond-ilsansinsister.Faiscommetuveux.—Commetoujours,marmonné-jeenmeremettantautravail.Je ne me rappelais plus que la maison comportait autant de fenêtres. Cela dit, je me demande

comment j’ai pu l’oublier, étant donné que leur nettoyage était l’une de mes corvées mensuellesquandj’étaispetite.Cen’estpasgrave.Jevaisprofiterdecetempspourmecalmer,maiscelanedurepas,carmonpère,nesupportantpasdevoirsapetitefilledehorsparce tempsdechien,meditderentrer.Jesautesurl’occasion,impatientedevoircommentseporteShawetd’apprendreenfincequis’estpassé.En arrivant, je le trouve en pleine conversation avecAbby. Il a ôté ses vêtements trempés et est

enveloppédansunecouverturethermique.Commejeneveuxpaslesinterrompre,jen’entrepasetlesécoutedepuislecouloir.—Jesaisquecelanemeregardepas,maisl’expressionquej’ailuesurlevisagedeCassidyquand

ellel’avuavecuneautrefemmeaupique-nique…Illuiavraimentfaitdelapeine.Qu’ellel’avoueoupas.—Etellenerisquepas,répondAbby.—Jenesaispaspourquoicelam’aautanttroublé.—Ehbien,peut-êtrequevousapprécieznotrepetiteCassidyplusquevousnelepensiez,ditAbby

enimbibantd’alcoolunmorceaudecoton.—Franchement,jel’aitoujoursappréciée.Admirée,même.Elleestbelleetintelligenteetelleade

l’humour.(Brusquement,ilsetaitcommes’ilserendaitcomptequ’ilenatropdit.)Siellesavaitquejevousaiconfiécela,elletrouveraitlemoyendel’utilisercontremoi.—Votresecretnerisquerienavecmoi,souritAbby.Maintenant,nebougezpas,celavapiquerun

peu.Shawtressailleetsiffleentresesdentsquandelletamponnelablessure.Quelbébé.— Désolé, mon petit. Cela vous rappelle sûrement l’époque où votre mère vous soignait vos

bobos,hein?Onpourraitcroirequeçapiquemoinsavecl’âge,maisnon.—Non,çanemerappellerien.Lafemmequim’adonnénaissancen’étaitpasvraimentunemère,

voussavez.Sinousavionseuunearmoireàpharmacie,ellem’auraitditdemedébrouillertoutseul.Ilabeauglousser,onsentbienquelesouvenirestdouloureuxpourShaw.J’aienviedeleprendredansmesbras.Etaussid’ajoutersasaletédemèreàlalistedesgensque

j’aimeraisbaffer.Abbyreposesoncotonets’assiedsurletabouretfaceàlui.—Ungarçonabesoind’unemère,monpetit.Jen’arrivepasàimaginerqu’unefemmenepuisse

pasavoirenviedevousavoircommefils,mais ilyenacertainesquinesontpasfaitespourcela.Heureusementpourvous,j’aiénormémentd’amouretd’attentionàoffrir.Alors,sijevousadoptaisofficieusement?Shawad’abordl’airabasourdi,puisilprendl’expressiond’unenfantémerveillé.

—Jecroisqueçameplairaitbeaucoup,dit-ilavecunechaleurdanslavoixquej’entendspourlapremièrefois.Abbyadroit à l’étreinteque j’aurais voulu lui offrir,mais je ne suismêmepas jalouse. Je suis

heureusequ’elles’occupede lui.Mais jenesaispas tropcommentCaseyvaprendrecelaquand ill’apprendra.—Waouh!s’exclameShawunefoisqu’ellel’alâché.Lecoupentraîtrequem’aflanquévotrefils

envalaitlapeine.—Ilvousafaitça?nousécrions-nousenchœur,Abbyetmoi.ShawetAbbyseretournentets’aperçoiventdemaprésence.JedoisressembleràCarriedurantle

baldulycée,mapeaud’Irlandaiseécarlatecommedusangdecochontellementjesuisfurieuse.Uncoup en traître ? Ce n’est pas comme ça qu’on se bat, ici. On affronte nos adversaires et on lesprévient de cequi les attend, parceque c’est la seulemanièredeprocéder. Je suis scandaliséequeCasey,plusqu’aucunautre,aitfaituncouppareil.Etilvadevoirsubirmacolère.—Calme-toi,Cassidy,ditAbby,conscientedecequirisqued’arriver.—Abby,n’essaiemêmepasdeledéfendre,lapréviens-je.—Jen’ysongeaispas.Jeveuxjustequetutecalmes.Toutlemondeestsainetsaufetc’estleplus

important.—Ahbon?Toutlemondevabien?Shawabasculépar-dessusbord!—Cen’estpasàcauseducoupentraître,répond-il,dédouanantainsiCasey.— Non ? demandé-je, une main sur la hanche. Et si vous me racontiez comment c’est arrivé,

alors?Shaws’apprêteàrépondre,puisilseravise.—Peu importe.Ce qui compte c’est que je sacheme débrouiller tout seul,Cassidy. Je n’ai pas

besoinquevouspreniezmadéfense.—Si,çaimporte.Etsivousnemeleditespas,j’iraisimplementposerlaquestionàCasey,dis-je

entournantlestalonspourallertrouvercegranddadais.—Cassidy!crie-t-ilenselevantd’unbond.—Laissez-lafaire,entends-jeAbbyluidireenmontantl’escalier.Écoutezvotremère,pourcette

fois,monpetit.Oui,Shaw,écoutezvotremère.MalgrémacolèrecontreCasey,Shawm’attendrit.JesaistrèsbienoùCaseysetrouveetjenemesuispastrompée.Maisjesuissurprisedevoirqu’il

n’est pas seul dans notre nid-de-pie. J’ai la réponse à la question que jeme posais tout à l’heure.Caseyestvenuiciavecd’autresfemmes.Celamemetenfureurqu’ilaitprofanécelieuquiétaitsacrépournous.Ilestànous,cenid-de-pie,pasàluietàMia.Pourtant,enouvrantlaportedel’escalierquimènelà-haut,j’entendsdistinctementlavoixdelaromancière.Caseyaduculot.Nousallonsvoirs’ilenauraencoreunefoisque j’enaurai finiavec lui.Mais

avant,jetendsl’oreille.Mial’abienfaittoutàl’heure,pourquoijemegênerais?—Vousêtestoujoursamoureuxd’elle,est-elleentraindeluidire.C’esttoutàfaitnormalquevous

soyezbouleverséparlasituation.—Jemesuismisencolère. Jen’auraispasdû. Je jureque jen’avaispas l’intentionde le faire

tomberàl’eau.

—Mais c’est vous qui l’avez secouru,Casey.Vous avez risqué votre vie pour sauver la sienne.Celafaitdevouslehéros,pasleméchant.Jel’imagineentraindebattredesfauxcilsdevantlui.Bon,d’accord,jenepeuxpasprouverqu’ils

sontfaux.Maisilslesontforcément.Etdansuncascommedansl’autre,cespectaclem’écœure.ElleestsûrementconvaincuedejouerlesLoisLaneavecsonSuperman.—Elleneleverrapascommeça,enrevanche.Cen’estqu’unequestiondesecondesavantqu’elle

rappliqueicietqu’ellem’encolleune.—Jecroisquevousvousfaitesunemontagnedepasgrand-chose.Non,MissMorgan, pas du tout. Et vous devriez vous occuper de vos affaires avant de finir en

victimenumérodeux.—VousneconnaissezpasCassidyaussibienquemoi,plaisanteCasey.Quandelleestencolère,

houlàlà!—Ehbien,ellevouscrieradessus.Etalors?—Non,ellenecrierapas.Jepréférerais.Ellem’envoudraàmort.Je souris intérieurement enme rappelant quelques-unes de nos chamailleries quand nous étions

ados.Unefois,j’avaispassétoutunmoisàluirépondreuniquementparmonosyllabesetsansjamaisleregarder.Toutcelaparcequ’ilavaitévitémescoupsdefilpendanttouteunejournéeetquej’avaisdécouvertquec’étaitparcequ’ilavaiteuunappeldeBrittniequiluiavaitditquesavoitureétaitenpanne,quesonpèreétaitpartienmeretqu’ellenesavaitpasquiappelerd’autre.Ehbien,n’importequi,saufmonpetitami.Maiscequim’avaitrenduefurieuse,c’estqu’ilaitdécrochépourelleetpaspourmoi,etqu’ilnem’aitpasappeléeavantdesortirdechezluipourm’expliquercequisepassait.C’étaitlouchecommejamaisetpuisqu’ilnepouvaitpasmeparlerautéléphone,ehbien,jerefuseraisde lui parler tout court. Oui, j’étais allée un peu loin, mais nous étions ados, n’oublions pas. EtcommeCaseyn’avaitjamaisrecommencé,jediraiquecelaluiavaitservideleçon.—Oh.Lecoupdusilence,encore?demandeMia.Quoi?elleestaucourant?Bonsang,maisilluiadonnétouslesdétailsdenotrevie?—Exactement,répondCasey.Detouteévidence,c’estlaréponseàsaquestionmaisaussiàlamienne.—Ehbien,sij’étaiselle…commenceMia.(Ha!Tuaimeraisbien,hein!)Jevoudraisquevousme

disiezlavéritésurcequis’estpassé,cequivousamisencolère.Elleabesoindesavoircequevouséprouvez.Etsiellen’éprouvepaslamêmechose,aumoinsvouslesaurezetvouspourrezfinalementtournerlapage.Apparemment,écriredesromansà l’eauderose larendcompétentepourfairede la thérapiede

couple.Maisbiensûr.Celasembleêtreunmomentpaspirequ’unautrepourm’enmêler.Jefaisconnaîtremaprésence

enmontantbruyammentlesmarches.CaseyetMiasetaisent,etquandj’arriveenhaut,jelestrouveentraindemefixer.Ehbien,s’ilsnesontpasmignonscommetout,assisl’unàcôtédel’autre,genoucontregenouet

lesjambescroisées?Aumoins,ilsnesontpastoutnus,mêmesijemedemandes’ilssesontchangésensembleunefoisrevenusavecleursvêtementstrempés.Lalanternealluméeéclaired’unelueurromantiquelesdeuxtourtereaux.Ceserait ledécor idéal

pourl’unedesscènesd’amoursirupeusesdeMias’iln’yavaitlevacarmeépouvantabledelapluie

quicriblelesvitresetduventquimugitetsecouelesmontantsdesfenêtres.LatempêteAyladébouleenvilleetelleestdemauvaispoil.Maiscequimepréoccupedavantage,c’estlatempêteintérieure.Cellequej’aidanslecœuretsous

moncrâne.—J’aimeraistedireunmot,déclaré-jeàCaseyencroisantlesbrassurmapoitrine.Enprivé,siça

net’ennuiepas.Etmêmesiçat’ennuie,jem’enfiche.Miapose lamainsur legenoudeCaseycommesic’était legeste leplusnatureldumonde.J’ai

enviedeladélogerd’unrevers,maisjemeretiens.—Àtoutàl’heure?luidemande-t-elle.Il hoche la tête avec un sourire rassurant. Ce n’est pas le sourire qu’il me donnait, mais il ne

ressembleàaucundessouriresquejeluiconnais.Surce,elleselèveets’apprêteàpartir,prudentemalgrétoutessessimagrées.Jenem’écartepasetjelalaissemecontourner,cequiestgrossier,maislà,jen’aipasenvied’être

polie.Puisqu’elles’estmanifestementsuffisammentdocumentéepourpouvoirécriretoutunromansurmoi, elledevrait comprendremonhumeuretnepas leprendrepour elle.Bon, jem’excuseraiplus tard. Je n’ai franchement aucune raison d’être fâchée contre elle. Je suis juste jalouse,déraisonnablement. C’est le couplet classique : « Je ne te désire plus, mais je ne veux pas quequelqu’und’autre teprenne.»Peut-êtreque leshommesont raison.Peut-êtreque les femmes sontvraimentfolles.Entoutcas,jesaisquejesuislimite,là.Caseys’estlevépourvenirmerejoindreetafourrésesmainsdanslespoches,lesépaulesbasses.

Ilalemêmeregardqueladernièrefoisquenousnoussommesditadieu.Quechaquefoisquenousnoussommesséparés.C’étaittoujourscommes’ilsedisaitquecettefois-làseraitladernière.Etbienque j’aie enviede lui hurler dessuspour cequ’il a fait àShaw, instinctivement, jeveuxm’assurerqu’ilvabien.Iln’apasdebosses,debleusnid’entaillessurlevisageouailleurs.Ilneboitepas,etilnegrimace

pasquandildoitfaireunmouvement.Ilal’aird’allerparfaitementbien.Sijeneleconnaissaispas,jediraisquerienn’estarrivé.Jeluiprendslementonentrelesdoigtsetluitournelevisaged’uncôtéetdel’autrepourêtresûre

qu’iln’avraimentaucunemarque.—Ilaréussiàt’enmettreun?Ilrecule,montrantenfinunpeudegêne.—Oui.Unsacréuppercutaumenton.Jecroismêmequejemesuisébréchéunemolaire.—Oh.Désolée,dis-jesanslepenservraiment.Tuveuxquejejetteuncoupd’œil,oubientapetite

copines’enestdéjàoccupée?Illèvelesyeuxaucieletseretourneversmoi.—Cass…—Quoi?—Cen’estpasmapetitecopine,dit-ilensedétournantetensecouantlatête.—Ahnon?Parcequevousavezl’airinséparables,jetrouve.Depuisquejesuislà,tupassestout

ton temps avec elle, alors que d’habitude c’est avec moi. Enfin, vous finissiez pratiquement vosphrasesl’unl’autreaudîner,Casey.Etensuite,elles’estprécipitéesurlequaitoutàl’heure,tellementinquiète pour son grand costaud de pêcheur qu’elle a éprouvé le besoin de te raccompagner elle-

même…blottiecontretoicommesituétaissonpetitami.—Ahoui?rétorque-t-ilenmeregardantenfindroitdanslesyeux.Qu’est-cequeçapeuttefaire?

Tutesouciaisbienplusdececonnardquedemoi!Jenesaispassic’estcequ’ilvientdemedire,maisjemefâchevraiment.—Parcequetuluiascolléuncoupdepoingentraître,Casey!Vraiment?Pourquoi?Pourquoitu

asfaituntrucpareil?(Ilessaiederépondre,maisjesuissiénervéequejenelelaissepasenplacerune.)Çanetesuffisaitpasquepapaettoil’ayezentraînéenmerenpleinetempête,ilafalluquetuailleschercherlabagarrepar-dessuslemarché!Tunet’esmêmepasbattuloyalement!—Jenevoulaispasle…essaie-t-ilànouveaudesedéfendre.—Etvousaveztouslesdeuxfiniàl’eau!Tuauraispuyrester,Casey!Shawaussi!C’étaitd’une

bêtise ! Et tout ça pour quoi ? Je sais que Shaw a une grande gueule et, crois-moi, il y a des tasd’occasionsoùj’aieuenviedeluiencolleruneenpleinefaceet,d’ailleurs,jel’aifaitunefois,maisc’étaitmérité.Maistoi?Tuvauxmieuxqueça.Tuvauxmieuxqu’uncoupentraître,CaseyMichaels.Alors,dis-moi…Qu’est-cequit’aconduitàt’abaisseràcepoint?Caseynerépondpas.Ilsecontentederesterlà,lesdentsserrées,ensecouantlatête,sansmêmeme

regarderdanslesyeux.Jesensqu’ilaenviedemedirequelquechose,maisqu’ilseretient.Etplusceladure,plusj’enrage.—Crachelemorceau!Seigneur,ilmeclouelebecd’unregardfuribard.—Trèsbien.Jet’aivue,Cassidy.Jet’aivueavecluidansleparc.Entraindebaiser.Je suis abasourdie et réduite au silence.Une grimace peinée déforme le visage deCasey et son

chagrinmetranspercelittéralement.Jesensmoncœurquisebrisepourlui.Pire,quivoleenéclats.—Oh,monDieu,Casey.Jesuistellementdésolée.J’essaiedeleprendredansmesbras,maisjem’arrêteenlevoyantreculer.—Non.Qu’est-cequej’aifait?—Jen’avaispasl’intentionde…Cettefois,c’estmoiquisuisincapabledeterminer.—Tuimaginescequeçaapumefairedesavoirquejet’aiattenduetoutcetempspourfinirparte

voiravecunautre?Jesuislà,moi!s’exclame-t-ilenponctuantchaquemotd’uncoupsursapoitrine,avecuneviolencequimefaitfrémir.J’aitoujoursétélà.Àattendre.Commeleplusgrandcrétindumonde.Je ne sais pas quoi dire. Je ne crois pas avoir jamais imaginé que Caseym’attendait. Cela dit,

commentaurais-jepunepasremarquercela?Ilatoujoursétédisponiblepourmoiquandj’appelais,il a toujours trouvé du temps quand je venais. Il n’y avait jamais d’autre femme, il ne parlait pasd’autresrelations,etnousfaisionsl’amourchaquefoisquejerevenais.JeconnaissuffisammentbienCaseypoursavoirqu’iln’auraitpasfaitcelas’ilyavaiteuquelqu’und’autredanssavie.—Jecroyaisquetu ledétestais.Tucomprendsquejesoissurpris.Commentonpeutdétesterun

mecetbaiseravecluidansunparcpourenfants?Cesontdesquestionslégitimes.Letonestagressif,maisjesaisqu’ilestsimplementblessé.—Jenesaispas,dis-jeensecouantlatête.Maisjeneledétesteplus.

—Ehbien, tantmieux, répond-ilen levant lesbrasauciel.Contentquevousayez réussiàvousentendre.J’espèrequetunet’espasprisd’échardesdurantlamédiation.Ça,cen’étaitpasnécessaire.—Casey,netecomportepasenidiot.— En idiot ? Tu n’as pas entendu ? Je t’ai attendue, Cassidy. J’ai perdu des années à attendre

quelquechosequin’étaitriendutout.Àm’attendre ?Ehbien, je suis sûrequec’estungeste romantiqueque sanouvelle amiepourra

apprécier.Peut-êtremêmequ’ellesepâmera.Maismoi?Jesuisunefillequibouge.Jen’attendsrien.Sijedésirequelquechose,vraiment,jeprendsl’initiative.J’aidoncdumalàcomprendrecequ’ilmeditalors,quesoncomportementestdiamétralementopposé.—C’estunchoixquetuasfait,Casey,luirappelé-je.TuesrestéiciàStoningtonettum’aslaissée

partiràl’autreboutdupayscommencerunenouvellevie.Loindelatienne.— Je t’ai donné ce que tu voulais, Cassidy. Comme toujours. Et je continue encore jusqu’à

aujourd’hui. Qu’est-ce que j’étais censé faire ? Te suivre à San Diego et faire l’époux qui attendsagementàlamaison?—Non.Tuétaiscensém’aimersuffisammentpourmedemanderderester.Cesparolesfranchissentmeslèvresmalgrémoi.Jenesavaismêmepasquejepensaiscela.Peut-

êtrequemalgrétousmeseffortspourêtreindépendanteetautonome,jemesuisconvaincuequesadécisionmeconviendraittoujours.—Oh,Cass…soupire-t-il.Tunecomprendspas?Jet’aimaisassezpourtelaisserpartir.—Eneffet.C’estcequetuasfait.Tum’aslaisséepartir,Casey.Et tuasattendu.(Jemarqueune

pause.)MaisShaws’estlancéàmapoursuite.Laphrasesemblefairemouche.Jem’enveuxdeleblesser,maisc’estlavérité.—Ilnet’aimepas,dit-ild’unevoixsourde,maisquej’entendstrèsbien.Moi,jet’aime.—Jesais.—Alorsqu’est-cequetuveux,maintenant?Quituveux?Jemepasselesmainssurlevisage,dépitéeparlasituation,parmoi-même,parcettequestion.—Jen’ensaisrien.Jenesaispasoùj’ensuis,encemoment.Shawestunvraiégocentrique laplupartdu temps,mais ilm’amontréune facettedifférenteces

derniers jours. Casey a toujours été l’homme que tous veulent être, foncièrement bon, et cela nechangeraprobablementpas.N’importequellefemmedansmasituationlechoisirait,maisjenesuispasn’importequellefemme.J’ai besoind’unhommequime laissevivre en toute indépendance, prendremesdécisions toute

seuleetassumermeserreurs.Etenmêmetemps,quelqu’unquisaitinstinctivementquandmesauverdemoi-même,quandinterveniretdire:«Çasuffit.Laisse-moifaire.»J’aibesoind’êtreàlabarredansmavie…endehorsdulit.Maisdanslelit,jeveuxêtredominée,dévoréeetanéantie.Maislesmursdelachambrepeuvent-ils

empêcherqueceladéteignesurmesémotionsetmaraison?Caseyestlechoixleplussûr.Maisiln’estpasShaw.—Eh bien,moi, je sais où j’en suis. Je désire lamême chose et lamême personne que depuis

toujours: toi.(Ils’approche,meprenddanssesbrasetm’attirecontresapoitrinetoutenpliantles

genouxpoursemettreàmahauteuretmeregarderdroitdanslesyeux.)Tum’asmanqué,machérie.Tonparfum,tapeau…tasaveur.Sonhaleineestchaudeetsuave,commelescookiesd’Abbyàpeinesortisdufour,dont l’arôme

appétissantmetitillelessensetmedésarçonneencoreplus.Jefermelesyeux,conquiseparcequejeconnaissibien.Puisjesensseslèvressurlesmiennes,

douces et souples, se tendre dans leurmuette supplication de lui rendre son baiser. Ce baisermemanquait.Caseymemanquait.Etbienquemonespritmesoufflequecen’estpasraisonnable,quejevaisleregretter,jecèdeetl’embrasse.Àl’instantoùmeslèvress’écartent,lapassiondeCaseyprendledessus.Ilsaisitmonvisageentre

sesmainsetletientcommes’ilavaitpeurquejeluiéchappes’ilmelâche.Jeposemesmainssurlessiennesavecl’intentiondefaireprécisémentcela,maisaulieudequoi,jelesguidejusqu’àmataille.Puis je leprendspar lecouet l’attirecontremoi, renversant la têtepour luioffrirmaboucheafinqu’ilretrouvecettesaveurquiluiatantmanqué.Etilnes’enprivepas.Noslanguess’enlacentetjefondsenlui.LesbaisersdeCaseyonttoujoursétéanimésparsapassionpourmoi,etjelasensencetinstant.Miaavujuste.Ilesttoujoursamoureuxdemoi.Etd’aprèscequejesensdurciretsecollercontremonventre,ilmedésireencoreaussi.Sesmainsglissentsurmesfessesetilmesoulèvepourquej’enroulelesjambessurseshanches.Je

me rends, je succombeà sonbaiser, à cemondeque j’ai connuautrefois.Mondos touche lebanccapitonné et Casey s’allonge sur moi. Ses lèvres quittent ma bouche et commencent à descendre,brûlantes, le long de mon cou, tandis que sa bite dure frotte lentement et puissamment monentrejambe.—C’estcommeçaquejel’aime,souffle-t-ildansmoncou.C’estalorsquejeflippe.CesontlesparolesdeShaw,maiscen’estpassavoix.—Arrête…Casey,arrête,dis-jeenlerepoussantetenmedégageant.Caseyseredresse,maisilnes’éloignepastotalement.Ilalesoufflecourtetilestmanifestement

encoretoutexcité,cequimedonnel’impressiond’êtrelapireallumeusedumonde.Maiscequejeremarqueleplus,c’estl’expressionpeinéequicreusesonbeauvisageviril.Ondiraitquejeviensdelegifler.—Pourquoi?Qu’est-cequinevapas?—Jenepeuxpas,dis-jeensecouantlatête.Excuse-moi,maisjenepeuxpas,c’esttout.—Àcausedelui?—Non.Oui.Jeveuxdire,non.(Jemelèved’unbondengrognant,énervéeetagacéecontremoi-

même.Jerespireunboncoupet jereprends.)Jenepeuxpasparcequecen’estpasbien,Casey.Jet’aime.Çanechangerajamais.Maislamanièredontjet’aime,elle,achangé.Jeme rappelle d’une fois où j’étais avec Shaw et où j’avais l’impression de tromper Casey. À

présent, lasituationest inversée.QueShawéprouve lamêmechosepourmoioupas,peu importe.J’éprouvequelquechosepourlui.Etbienquejenesachepasvraimentcequec’est,jesaisquejevaisdevoirledécouvrir.Enattendant,cen’estpasjustedetraiterCaseycommeunepoirepourlasoif.Ilatoujoursétémon

repère ; l’unique personne toujours prête àme rattraper si je tombais. Peut-être que je lui laissaismiroiterinconsciemmentquelquechoseafinqu’ilconservecerôle,sijamaisquelquechosetournaitmal dans ma vie. Ce n’est pas juste et ce n’est pas bien. Et je refuse de lui faire vivre cela pluslongtemps.

Caseyserassoit,lesépaulesbasses.—Alors,çayest?C’estfinientrenous?—Non,çan’estpasça,Casey.Tuesmonmeilleurami.Tul’astoujoursété.Nousnesommestout

simplement pas faits pour être ensemble d’une autre manière. (Je marque une pause, pas pour lelaisserdigérerouparcequej’attendssaréaction,maisparcequ’ilyaautrechosequejedoisluidireetquej’aidumalàexprimer.Iln’estplusmonCasey.Jedoisluirendresaliberté.)Tueslibre,Casey.Vraimentlibre.Soisheureux.C’esttoutcequej’aitoujoursvoulupourtoi.—EttuvasêtreheureuseavecShaw?C’estunequestionà laquelle jenepeuxpasrépondre.Pasencore.JenesaispassiShawveutde

moi.Jenesaispassij’aienviedelui.Jenesaistoutsimplementrienpourl’instant,maisentoutcas,jeneveuxpasqueCaseycontinuedem’attendre.Jeluifaisunsourireetmepenchepourdéposerunbaisersurlajouedemonmeilleurami.Jemerendscomptealorsquec’estuniquementcegenredebaiserquenousallonsdésormaiséchanger.Jeluiessuielajoueduboutdupouceenmeredressant,puis:—Jeseraiheureusedesavoirquetuesheureux.Etjesuissincèrequandjeluidisça.

13

Cassidy

Je suis absolument épuisée, ayant émotionnellement subi desmontagnes russes toute la journée,sans oublier le stressmental lié aux décisions concernantmon avenir et la fatigue physique de lapréparation de Whalen House en prévision de l’ouragan Ayla. Malgré les mugissements et lessifflementsdelatempêtequivientd’atteindrelescôtes,jen’aiqu’uneenvie,c’estmetraînerjusqu’àmonlitetmeterrersouslescouverturesjusqu’àcequetouscesdramessoientterminés.Jeviensdeterminerdeprendremadouche;j’enfilechemisedenuitetpetiteculotteetjem’installe

confortablementparmiunemyriaded’oreillers,quandonfrappeàmaporte.Avecunsoupiragacé,jerepousse la couette, sors du lit et vais accueillir d’un pas lourd l’intrus qui s’aventure dans monrepaire.C’est Abby. Encore que cela ne me surprenne guère, à vrai dire. Avec ce fichu ouragan, c’est

normalquelesparentss’inquiètent.—TuasdelachancequecesoitmoietpasAnna,dit-elleenvoyantmonagacement.Sielleavait

pumonterenfauteuiljusqu’ici–etcrois-moi,elleaessayé–,ellet’auraitligotéeettraînéepourteramenerenbas.Cen’estpasexagéré.Mamèreenseraitcapable.—Bonsang,Abby,tupeuxluidemanderdesecalmer,s’ilteplaît?Jesuisdanslamaison,saineet

sauve.Siletoitcommenceàs’arracher,jeprometsquejedescendrai.Maispourlemoment,jeveuxjustequ’onmelaisseenpaix.—Trèsbien.Jevais fairemonpossible,dit-elle,compréhensive.Oùestmongarçon?Tuenas

laisséassezpourquejepuissel’enterrer?—Jen’aipaslevélepetitdoigtsurlui.(Enfin,si,maissansviolence.)ChercheMiaetjesuissûre

quetuletrouveras.EtShaw?Ilvabien?—Ilenavaitl’airquandjesuispasséelevoir,répond-elleenhaussantlesépaules.Encoreunpeu

ébranlé,absorbédanssespenséespeut-être,maisphysiquement,toutvabien.—Mercideceque tuas faitpour lui,Abby.Jenecroispasque tuaiesconsciencedecequeça

signifiepourlui.—J’enaiplusconsciencequetun’imagines,rétorque-t-elleavecunclind’œilenmetapotantla

joue.Vatereposer,mapetite.Jevaisveillersurlamaison.Etmetsunpantalon,aucasoùilfaudraitficherlecampenvitesse.Elletournelestalonsetjerefermelaportederrièreelle.Audiablelepantalon.Jeretourned’unpas

traînantjusqu’aulitquimefaitsignedelerejoindreetjemepelotonnesouslacouetteenessayantdemeviderl’espritetdefairevenirlesommeil.Maisplusjem’yefforce,pluslespenséesfourmillentsousmoncrâne.Ai-jepris labonnedécisionconcernantCasey?Oui,sansconteste.Laplupartdes femmesn’ont

jamaislachancedetrouverl’hommeidéal.Moi,pourlecoup,j’enaideux.Choisirentreeuxn’apasétéfacile,maisquandjeprendslapeined’analyser,jeperçoislesdifférencesentremonmeilleuramietl’outsider.TandisqueCaseym’atoujourslaisséletempsetlalatitudedefairemeschoix,Shawmemalmène.

TandisqueCaseysoutienttoutesmesdécisionssansdiscuter,Shawnemelaissepasmereposersurmes lauriers etme lancedenouveauxdéfis.AlorsqueCasey estmonplus ardent supporter,Shawm’accompagne dans ma course jusqu’à la ligne d’arrivée quand je relève ces défis. Et alors queCaseym’aaidéeàfaçonnerlafemmequejesuisdevenue,Shawm’aaidéeàcomprendrecellequejevoulaisêtre.Oui, Shaw est l’outsider, celui auquel personne ne pensait, mais qui a réussi à franchir les

éliminatoires, malgré ses états de service guère impressionnants. Maintenant que j’ai une vued’ensemble, jemerendscompteque jene joueplus lesarbitres,maisque jesuis l’équipeadverse.Sera-t-ilceluiquiremporteramoncœur?Onfrappedenouveauàmaporte,cequimemethorsdemoi.Bonsang,mamanadûse laisser

tomberde son fauteuil et clopiner jusqu’ici. Jeme lèvedenouveauet gagne laportedupas irritéd’une gamine prête à piquer sa crise.Mais quand j’ouvre, ce n’est pasmamère que je trouve.NiAbby.Je manque de tomber à la renverse en essayant de m’écarter devant Shaw qui entre dans ma

chambreentrombe.Sinotrehistoiremouvementéem’aapprisquelquechose,c’estquelorsqueShawMatthewsestdanstoussesétats,commec’estlecasencetinstant,unaffrontementtoutsaufdiscretvas’ensuivre. Je refermedonc laporte, en espérantque levacarmede l’ouraganAyla empêchera lesparents etCasey d’entendre. SurtoutCasey. Il ne faut surtout pas que je lui donne une raison pourenfoncerlaporteetvenirterminerlabagarrequ’ilsontcommencéedanslajournée.JemeretourneetShawesttellementprèsquejemanquedemecogneràsapoitrine.Maiscelane

m’empêche pas de remarquer à quel point son jean tombe scandaleusement bien sur ses hanches,souligne ses cuisses et laprotubéranceaumilieu.SonT-shirtblancest tendu sur sapoitrine et sesépaulesmuscléesetsoncolmouleparfaitementsoncou.Pourlapremièrefoisdetoutemavie,j’aienviedelaissermamarquesurunhomme.Celui-cienparticulier.Làaussi,ilyaunedifférencedansmamanièredeconsidérerShawetCasey.AvecCasey,j’avais

envie de me blottir dans le confort de ses bras. Mais Shaw, j’ai envie de lui grimper dessus etd’enfoncermesdentsenlui.Et j’aienviequ’ilmerepoussepourquecenesoitpassifacile.Ilyaquelque chosedemalsain là-dedans, voire de dérangeant.Enmême temps, c’est la seule et uniquepersonnequiréussitàmerendredingue.À en juger par son expression, ce n’est pas le moment d’attaquer. Il n’arbore pas son sourire

insolent, ne crispe pas la mâchoire et ne hausse pas le menton d’un air supérieur. Son regardflamboie,mais ilyaquelquechosededélicatdanssesyeux. Iln’estpasvenupourquenousnousquerellions.Alors,qu’est-ilvenuchercher?

—J’aifrôlélamortaujourd’huietcelam’afaitprendreconsciencedequelquechose.J’aiunpincementdecœuretl’idéequeShawpuissemourirmerendmalade.Jen’aiprobablement

pasréfléchiàlamanièredontcetteexpériencel’aaffecté,cequiestincroyablementbêtedemapart.Cen’estpasdemoiqu’ils’agitenl’occurrence,maisdelui.Ilfautquejetrouvelemoyend’arrangercela.—Shaw,commencé-je.Ilm’arrêted’ungesteetmeprendparlesépaules,fermement,maissansbrutalité.—Non,laissez-moiterminer.Sinon,jen’arriveraijamaisàtoutsortir.—D’accord,dis-jeenbaissantlesyeuxversmonépaule.Ilsedétend,commes’ils’étaitrenducomptedecequ’ilvientdefaire.— J’ai faillimourir aujourd’hui et j’étais tout seul.Comme je l’ai été durant toutema vie. J’ai

toujourscruquecelanemegêneraitpas,maisjemetrompais.(Ilmarqueunepauseetmeprendlevisagedanslesmains.)Cassidy,jeneveuxplusêtreseul.Pascettenuit.Niaucuneautre.Avantquejepuissedigérercequ’ilvientdedire,Shawm’embrasse.Etbienquetoutsoncorpssoit

tendu,ses lèvressont tendres.Jen’arrivepasà identifiercequiestdifférent,maisquelquechoseaindiscutablementchangé.Peut-êtrequec’estparcequ’il a frôlé lamort.Oubien l’ouraganqui faitrageau-dehors.Oubienc’estlatempêteintérieurequiagiteShawetquifinitpars’exprimer.Àl’opposédeladouceurdesabouche,lesdoigtsdeShaws’agrippentfermementàmeshanches.

C’estalorsqu’ilempoignemachemisedenuitetinterromptsonbaiserpourlafairepasserau-dessusdematêteavantdeplaquerànouveauseslèvressurlesmiennes.Ilesttoujourshabilléetmêmesijenedésireriendavantagequechangercela,c’estShawquimènelebal.Ilmefaitreculertandisquesabouchedescendsurmoncou,mesépaules,lavalléequiséparemes

seins,qu’ilfinitparpousserl’uncontrel’autrepourendévorersuccessivementchaquetéton.Quandj’atteinsleborddulit,sesmainsabandonnentmapoitrinepours’emparerdemesfesses,mehisseretm’asseoirsurlematelas.Sescheveuxbrunshirsutessontlaseulechosequejevois,tandisqu’illaissetombersatêtesurmonventreetpoursuitsadescente…—Oh,monDieu,gémis-jeensentantlachaleurdesabouchemouillermaculotte.Enfin,sabouchen’estpeut-êtrepaslaseuleresponsable,moncorpsasansdouteaussisonmotà

dire,mais,monDieu,cethommesaitcommentéveillertoutcequifaitdemoiunefemme.Ilfautquejevérifiequ’iln’yapasuneciblestratégiquementplacéesurcetteculotte,carShawaréussiàtrouvermonclitorissanslemoindreproblème.Ilétaitpourtantbiencaché.J’empoignesescheveuxàdeuxmainsetjemecramponne.Cetteinterruptiondemesréflexionsest

bienvenue,envérité.MêmesijenesaispastrèsbiencommentjepourraispenseràquoiquecesoitquandShawcommenceàmefairesonpetitnuméro…toutcelaàtraversmapetiteculotte.J’essaiedem’allongerafindesavourerlecadeauquim’estfait,maisShawmarmonneun«mmm-

mmm»étoufféetmemaintientfermementenplace.Jefaisdonccequen’importequelleautrefemmeferaitdansmasituation.Jeleregarde,etjeneleregrettevraimentpas.Satêtebougeàunrythmelentetrégulierpendantquesalanguemefaitl’amour.Puis,enfin,lapetiteculotteestécartéeetilenfoncedeuxdoigtsprofondémentenmoi.Jemecambreet,cettefois,ilmepermetdem’allongersurlematelas.Desalangue,seslèvreset

ses dents, il entreprend de me rendre folle. Il fait aller et venir ses doigts, tantôt légers, tantôtprofonds,afinderesterimprévisible.Jen’ytiensplus.Jenesupporteplusqu’ilsoitaussiloinetjenesupporte plus cette fichue culotte qui l’empêche de faire autre chose que me titiller à m’en faire

perdrelatête.Jepourraisjouir.Etjesuiscertainequec’estl’intentiondeShaw,maisjeneveuxpas.Jeveuxque

cesoitsabitequimefasseconnaîtremonpremierorgasmeavecluicesoir.—Shaw,j’aienviedevous.Jevousveux.Ils’interromptetl’espaced’unmoment,jechangepresqued’avispourlelaissercontinuer.Maisil

meregardeaveccetaird’abandonalliéàuneavidelueurdedésirdansleregardetcelamedonnelachairdepoule.—Vousm’avezdéjà,répond-ilavecuneconvictiontranquille.Jenesaispascequ’ilyadanslechoixdesesparoles,maisjemeredresseetprendssonvisage

entremesmainspourl’embrasseretmegoûtersurseslèvres.Ilfautqu’ilsachequ’ilm’aluiaussi,etc’est ce que j’essaie de lui faire comprendre avec ce geste aussi simple que passionné. Car mesparolesn’ontaucunsenssansunepreuvephysique.Ilempoignemescuissesetm’attireverslui,etjesenslachaleurdesapoitrineàtraversceT-shirt

entoutpointaussiagaçantquemastupidepetiteculotte.Ilfautqu’elledisparaisse:jel’attrapeetlafais passer par-dessus sa tête. Comme il se rassoit et me regarde d’un air interrogateur, j’y vaisfranchement.—Jevoulaisdirequejevousveuxenmoi.Monancienrivaletdésormaisamantselèvesursespiedsnus.Sansmequitterdesyeux,ildéfaitle

bouton de son jean et baisse sa braguette. Je contemple sa poitrine ciselée, les ondulations de sesabdominaux et les courbes de sa ceinture d’Apollon. Je prends le risque de tendre la main et decaresserduboutdesongleslalignedepoilsquidescenddesonnombrilàsonpubis.Shawrespirelonguementtandisquesonventretressaillesousmesdoigts.Ilestsibeau.Etimpatient.Faisantglissersonjeansurseshanchesétroites,ils’endébarrassed’uncoupdepiedetseredresse.

Sabiteaussiestdresséepourmoi,mesuppliantpresquedelagoûter,tellementellepointeversmoi.Maiscen’estpaslemoment,carShawsepencheetmeforceàm’allongerànouveau.Tantmieux,carlorsqu’ilglissesesdoigtssouslaceinturedemaculotteettiredessus,jen’aimêmepasletempsdeleverlesfessespourl’aider.Iln’apasbesoind’unassistant:ilveutsimplementquejesoisnuepourlui.Alorsqu’ilmerejointsurlelit,ilmeredressecontrelesoreillerstoutensesoutenantd’unemain.

Puis il aungestebien tropdélicatpour leShawMatthewsque j’ai toujours connu.Tendrement, ilpasselesdoigtsdansmescheveuxpourlesécarterdemonvisage,presqueméthodiquement,commepourenfaireunhalorougeoyantautourdematête.Lesveinesdesonavant-brassontsifascinantesquejenepeuxendétournerleregardniréprimer

unefurieuseenviedelesgoûter.Alors,égoïstement,jemesers,malanguesuivantuneveinegonfléede sang qui palpite sous la peau. Shaw pousse un gémissement entre protestation et approbation,commes’ilhésitaitentrem’arrêterafinderestermaîtredu jeu,oum’encouragerafindeperdre lecontrôle.Jerefermemabouchesursapeaupourluifaireunsuçon,etc’estlàqu’ilprendsadécision.Avec

l’insistancedominatriced’unlion,ilsepencheetécartemabouchedesonbrasafindepouvoirsaisirmalèvreentresesdents.Ilpeutfairecequebonluisemble.Jel’aimetelqu’ilest.Saufque…jenel’aimepas,si?Confondrel’amouravecledésirestunpiègedanslequeljerefuse

detomber.Pasavecunhommequialepouvoirdem’anéantir.PasavecunhommecommeShaw.Son épaisse crinière de lion est douce entremes doigts. Je l’empoigne et tire pour tenter de le

forceràlibérermalèvreavantdemefairesaigner,maisiln’yapasdevictoireàremporterici.Parbonheur,l’appétitdeShawpourlachairlaisselaplaceàcettetendreetpourtantardentepassionqu’ilm’amontréequandilestentrédansmachambre.Glissantungenoupuisl’autreentrelesmiens,ilmeforceàécarterlesjambespourpouvoirs’y

installer. Et mon Dieu, sa bite s’étale, lourde et épaisse, sur ma cuisse. Son baiser s’intensifie,devenantpresqueimpossibleàsuivrejusqu’aumomentoù,sanscriergare,il l’interromptpourmeregarder.Lesoufflecourt,jesuiscertainequejedoissemblerdéconcertée,étourdie,tandisquel’airdevienttorrideentrenous.C’estalorsqu’ilmepénètre.Songlandlargeforcemachatteserréeetmepréparepourrecevoir

l’épaisse hampe. Je retiens mon souffle devant cette intrusion tellement puissante qu’elle en estpresquedouloureuse.Mais ladouleurva rapidementdécroîtrepour laisser laplaceauplaisir. J’ensuisarrivéeànerienattendredemoinsetShawnem’ajamaisdéçue.Unefoisqu’ilestentièrementenmoi,ilentreprenddemerempliraveclenteur,avantdeseretirerà

nouveau.Lecoupsuivantestaccompagnéd’un frottementdélibérépour stimulermonclitoris.Oh,quec’estdélicieux!Je ferme lesyeux,m’offrant toutentièreà laprésencedeShawsurmapeau,dansmonesprit et

mon corps, le laissant s’enfouir de plus en plus dans un lieu que je ne l’aurais jamais imaginéoccuper:moncœur.—Non,Cassidy.Jevousaiditquejenevoulaispasêtreseul.Ilfautquevoussoyezlàiciavecmoi

encetinstant.Passeulementphysiquement,maisdetouteslesfaçonsimaginables.Regardez-moi.Jenesaispastrèsbiencommentinterprétercesparoles,maisjesaisque,mêmesicelarisquede

medétruireauboutducompte,j’aienviedeluidonnertoutcequ’ilpeutmedemander.—D’accord,murmuré-jeenhochantimperceptiblementlatête.Jenesuismêmepassûrequ’ill’aitentendudanslegrincementdesvoletsetlefracasdesdébrisqui

s’abattentsurletoit,maisquelquechosedoitleconvaincrequetoutestpossible,carlamanièredontilbougeenmoi,dont ilm’embrasse…Que lesdieuxaientpitiédemonâmequandelle traverserapourgagnerl’autremonde.CarcenouveauShawseramamort.Bienquenousvenions seulementdecommencer,nousdevonsnous interromprepour reprendre

notre souffle et cela ne nous dissuade pas de vouloir aller plus loin. Il m’embrasse à nouveau,longuement, sonfrontposésur lemienentrechaquebaiser, le regard fixésurmes lèvres.C’est legenredebaiserquivousmontedroitàlatêteetvousfaitoubliertoutlereste,ycompriscommentrespirer.Le cerveauprivéd’oxygène, je suis tout étourdie et je doisme tenir pournepas tomber.Maisilesttroptard.Jesuisdéjàtombée,etlachuteestdure.Iln’yapasdefiletdesécuritéetc’estunechutesansfin.Jen’aiplusqu’àespérerqueShawseralàpourmerattraper.Jemecramponneàlui,lescuissesenserrantseshanchespourtenterdelecollerplusencorecontre

moi. Ses mains encadrent mon visage tandis que mes doigts tentent de lui agripper les cheveux.Comme cela ne suffit pas, je passe les bras sous les siens pour me tenir à ses épaules. Enfin, lasécurité.Quelquechoseàquoimecramponner.Quelquechosequimerendmonéquilibre.Jeveuxcontrôlerlejeuplusencore,maisShawnemelaissepasfaire.Chaquefoisquej’essaiede

conduirelesébats,ilfaitmontrededominationetcontrechacundemesgestesens’écartantouenmemordillantlalèvre.Non.MonDieu.Jenepeuxpaslelaisserfaire.Jenepeuxpasluilaisserautantdecontrôleetjenepeuxpasluidirequ’ilacepouvoir.Sijamaisilsavaitcequej’éprouve,s’ilsavait

quejesuisamoureusedelui…Monsouffles’arrêtedansmagorge.Amoureusedelui.Allonsbon.Tout s’arrêtedèsque j’enprendsconscience,commesiunedivinitéavait figé lemouvementdu

monde.Toutestimmobile.Trop.Mêmeleventhurlantetlapluiebattantesesontcalmés.Shawralentitsesmouvements,seshanchesabandonnentleursva-et-vientpourseconcentrersurle

frottement.Ilestsiprofondémentenmoi.Tellementloinenmoi.Plusqu’ilnel’ajamaisété.—C’estl’œilducyclone,murmure-t-il.Maiscen’estpasencoreterminé.Enfait,toutvaredevenir

violent.Vousêtesprête?Je sais qu’il parle d’Ayla, mais je ne peux m’empêcher de songer que la phrase s’adapte

parfaitementàtoutcequisepasseentrenousencetinstant.—Non,jenecroispasquejelesois.Maisjen’aijamaisreculédevantundéfi.Etjesuissincère.—C’estcommeçaque je l’aime,murmure-t-ilensefrottantcontremoiavecune lenteuretune

forcequimanquedemedonnerunorgasme.Mafemme.Puis ilenfouitsonvisagedansmoncou, lemordilleet l’aspire…pourmefaireunemarque.Sa

femme.Dieumevienneenaide,maisc’estbiencequejesuis.Jelaisseglissermesmainslelongdesondos,fascinéeparlesmusclestendus,jusqu’aumoment

où j’atteins son cul. Je ferme les yeux etme remémore ses fesses telles que je les ai vues dans lemiroirlorsqu’ilm’asautéedanslasalledebainsdujetprivé.Saufqu’ilnemesautepas,àprésent.Ilmefait l’amour.Peut-êtrequec’estuneillusionquejemefais,causéeparunespritencoreébranléparlarévélationquejeviensd’avoir,maismêmesic’est lecas, jem’enfiche.Jemelaissealleràcroirequ’ilm’aimeluiaussi.Mêmesicelanedurequecetinstant.J’enfoncemes ongles dans ses fesses divines, sentant les muscles se bander sousmes doigts à

chacundesesmouvements.Plusprès.Jeveuxqu’ilsoitencoreplusprès.Alors,jesoulèvelesjambesjusqu’àcequemesgenouxarriventàlahauteurdesescôtesetjel’enenserretoutenempoignantsesfessespourl’attirerencoreplusenmoi.—Putain, cequevousêtesbonne,murmureShawdansun râleàmonoreille. Jeveux rester en

vouséternellement.Pourtoujours.MonDieu,moiaussij’aimeraistellementqu’ilresteenmoi.Maisjenepeuxpasleluidire.Cela

luidonneraitbeaucouptropdepouvoirsurmoi.Mêmesi,àvraidire,illedétientdéjà.Sonpubismassemonclitorisavecunedélicieuseinsistancequifaitmonterleplaisirenmoi.Jene

pourraispasleretenir,mêmesijevoulais.Etjeneveuxpas.Jeveuxjouirsursabite,jeveuxqu’ilsentemonorgasmel’attirerenluietjeveuxfairejaillirlesien.Jesenssurmoilachaleurdesapeau,rendueplusbrûlanteparlafièvredesapassionqueparle

sangquicouledanssesveines.Chaquecoupdereinsponctuéd’unrâlem’emmèneplusloin,sabiteépaisse s’enfonçant délibérément en moi pour aller titiller follement ce point où se concentre leplaisir. Ildoitêtregonfléà forced’être stimulé,gonfléetprêtàexploser.Oh,mais je suisprêteàconnaître un double orgasme, l’un grâce à mon point G et l’autre grâce au frottement sur monclitoris.—Shaw,jesuispresque…gémis-je,incapabledeterminermaphrase.—Jesais,monange.Moiaussi.J’essaiedevousattendre,maisvousêtestellementétroite…Ils’interromptetpousseunlongrâletoutens’enfonçantencoreenmoi.(Jeluimordsl’épauleetil

secabre.)—Bonsang,nefaitespasça!Vousallezmefairejouir.Jem’en fiche. Je suis aubordde l’orgasmeet celadéclencheenmoiune sortede frénésie. J’ai

enviedeledévorer,desentirsachairentremesdentsetdesavourersapeausalée.Jem’attaqueàsoncou, que je suçote tandis que monte en moi le gémissement de l’orgasme. C’est alors que Shawredouble d’énergie et que ses va-et-vient m’ébranlent de la tête aux pieds. Comprimés sous sapoitrine,mestétonsdurcissontdélicieusementendoloristandisquemesbattementsdecœursontdeplusenplusdéchaînés.Je pousse un gémissement qui doit vibrer dans tout son corps. Chacun de sesmuscles se raidit

encoreplus,tandisquesesfessessecrispentsousmesmains.Ilabesoinquejeluilaisseunpeudemargedemanœuvre.Jecommenceàdesserrerl’étaudemescuisses,maisilm’arrête:—Non.Tenez-vousàmoi,Cassidy.Nemelâchezpas.Jeresserremonétreinteenondulantsousluienrythmeaveclesmouvementsdeseshanches.Oh,

monDieu…sonpubisruisselantquifrottecontremonclitoris,sabitegonfléedesèvequipalpiteenmoi et le grognement de plaisir qui résonne dans mon oreille… Je n’ai d’autre choix que d’ysuccomber.Mon geignement est d’abord sourd, puis il enfle enmême temps quemon orgasme.C’estmon

clitorisquim’offrelapremièrevaguedeplaisir,suivieaussitôtparcellequemeprocuremonpointG.Shawseredressepourcontemplermonvisage.—Oh,putain,murmure-t-ilavantdeplaquersabouchesurlamiennedansungémissement.Je lasens.Lachaleurdesonsperme.Passurmonventrenisurmacuisse.Non,sonorgasmese

fondaveclemien,toutaufonddemoi.Etalorsquesesmouvementsralentissentprogressivement,jesensmachattequisecontractesursabitetoutencontinuantdesavourerleplaisirqu’ilmedonne.Puis,enfin,lebaiserdeShawsefaitmoinscharnel,plustendre.Sabouchesefaitplusdouceetsa

langue moins impérieuse. Et après avoir tiré une dernière fois sur ma lèvre, il se redresse pourreprendresonsouffleetmepermettred’enfaireautant.Ilnebougepas,maisjesensencoresabitequipalpiteenmoietc’estlasensationlaplusintense

qu’ilm’ait jamaisétédonnédeconnaître.Presqueaussi intensequesamanièredemeregarder, leslèvresentrouvertes,encorehaletant,desgouttesdesueurperlantsur toutsoncorps.Maiscequejeremarque le plus, c’est son expression à la fois perplexe et pensive. Il n’est pas le seul à êtredéconcerté.Jesenssonabsenceavantmêmequ’ilsesoitcomplètementretiré,maisjesuistoujourscomblée.Je

laisseretombermesjambesafinqu’ilpuisseroulersurlecôté,maisilnechangepasdeposition.Qu’est-cequ’ilyadanssamanièredemeregarderquimefaitdanserdespapillonsdansleventre?—Vousvoulezquejem’enaille?demande-t-il.Jen’aimêmepasbesoinderéfléchir.J’aiassezréfléchicesoirpourtenirtouteunevie.Etsicette

nuitestlaseulequejevivraiainsiavecShaw,jelaprends.Sansaucunregret.Alors,ensecouantlatête,jeréponds,sincère:—Jeneveuxplusêtreseulenonplus.Lesourirequiéclairesonvisagemecoupepresquelesouffle.Puisilselaisseretombersurledos,

glisse un bras sous mes épaules pour me ramener contre lui et me forcer à poser la tête sur sa

poitrine.—Tantmieux,dit-il.Etj’entendslesouriredanssavoix.Oui,c’estdélicieux.

14

Mia

Jememetsrapidementautravaildansmachambreetjegriffonnetouslesdétailsdelatempêtequifait rage dehors. Je couche par écrit tout ce que je vois et entends : en effet, si je dois décrire unouraganplustard,jepourraileraconterdemonproprepointdevue,cequirendralerécittoutàfaitauthentiquepourmeslecteurs.Maisl’ouragann’estpaslaseulechosedontjeprendsnote.Caseyaeuuneréactionémotionnelleviolentequiaeupourconséquenceunebagarre,unhommeà

lamerquiafrôlélamortetlechagrindeperdrel’uniquefemmeaumondepourlaquelleilajamaiséprouvéquelquechose.Enfin,dumoins,jecroisqu’ill’aperdue.Ill’avuedesespropresyeuxbaiseravecunautrehomme,nomd’unchien!Etsij’aiapprisquelquechosesurCaseyàforcedel’étudier,c’estqu’iln’yapasplusloyalquelui,etqu’ilexigequecesoitréciproque.Jesuisaussichoquéequeluiparcetintéressantretournementdesituation:Cassidyquis’acoquine

avec un homme qu’elle est censéemépriser.Nous avons tellement parlé d’elle et de ce qu’ils ontpartagétouslesdeuxquej’ail’impressiondelaconnaîtrepersonnellement.Mêmesi,àvraidire,ellem’intimideconsidérablement.Ellepossède tout :une famillequi l’aimeet la soutient,unecarrièreexceptionnelle, la notoriété dans sa ville natale, et un petit ami (pardon, ex-petit ami) qui est unevéritableperlerare.Commenta-t-ellepurenonceràtoutcela?Lesgensmefascinent.Comprendrecequilesmotive,voilàcequim’obsède.J’étudielamanière

dont tel individumarche, parle, s’habille, se comporte. Ses gestes, ses mimiques, ses mots et sesinflexions,sesdécisions…tout.Toutcequifaitdechacundenousunêtresingulier.Nonseulementj’étudie tout cela dans le présent, mais aussi dans le passé. Nous sommes le produit de notreenvironnement.Lamanièredontnousréagissonsauxsituationsestconditionnéeenpartieparnotregénétique,enpartieparlecontextedanslequelnousavonsgrandietenpartieparlesleçonsquenousavons tiréesparnous-mêmes.Toutcequenous faisonsaétéprogramméàunmomentdonnéet jechercheàconnaîtretouscesfacteurs.C’estunjeu,uneénigmeàrésoudre.Maismieuxconnaîtrecesgens–mieuxconnaîtreCasey–amisfinàcejeupourmoi.C’estréel.

Sesémotionssontréelles.Etj’aivoulusimplementvivredanssonunivers.J’aidoncfaitcepourquoijesuisleplusdouée.J’aiécritsurlesujet.Àl’intérieurdecespagesderéflexionpersonnelle,c’estmoiquitienslescommandes.Jesuisenmesuredesentirsesmains,savourersesbaisers,apaiserses

peurscachées…Jepeuxluioffriruneviedecontedefées.Etimaginerqu’ellesedérouleraenmacompagnie.Etcelamêmesilafrontièreentrecequiprovientdemonimaginationetcequirelèvedelaréalitécommenceàêtredeplusenplusfloue.CaseyetCassidysontdespersonnagesdefictionauseind’unmondeartificielproduitparunesprit

romantique en surchauffe. C’est le rêve de tout écrivain de pouvoir toucher ses personnages etinteragiraveceuxd’unemanièretangibleetréelle.Mespersonnages,JaysonBassetJanellKain,ontprisviesousmesyeuxetjesuissubmergéed’excitation.Biensûr,celasignifiepeut-êtreaussiquejesuis devenue bien trop familière avec leurs modèles du monde réel, une proximité que Casey etCassidynepourraientpascomprendreetnepartagentsûrementpas.Àtous lescoups, ilsvoientenmoiunefollequ’ilsdoiventjugerbeaucouptropintrusive.Espéronsqu’ilsmelaisserontpoursuivremapetitefantaisieencoreunpeupourquejepuissearriverauboutdemonmanuscrit.J’aurais déjà dû être partie,maisAnna s’est blessée et Caseym’a annoncé queCassidy était en

routepourrentrerici.JenepouvaispaspartirsansrencontrercettefemmeetvoirsielleressembleàmaJanell.J’avouequ’aprèstouteslesdiscussionsquenousavonseuessurelle–toutel’admirationdontelleafaitl’objet,concernantsabeauté,sontalent,saréussite,sonabsolueperfection–,j’auraispresquedel’affectionpourelle.Enrevanche,ellenem’apprécieguère.Cassidy n’est pas du tout réceptive à mon égard, mais j’essaie de ne pas le prendre

personnellement.Après tout, je suisuneétrangèreet j’aipasséénormémentde tempsavec sonex-petitami,lequelnecomprenaitpasqu’ilétaitunex,sij’enjugeparnosconversations.C’estpourtantsiévident.Caseyestencorefouamoureuxd’elle.Ilseraitprêtàdécrocherlalunepourelle.J’aimeraisbienquequelqu’unenfasseautantpourmoi.Uncoupfrappéàmaportemefaitsursauteretjemanquedetomberdemonlit.Cequid’ailleurs

finitparm’arrivervraimentquandj’essaiedemeleveretm’emmêledanslesdraps.Unautrecoupretentit,pressant,cettefois.Seigneur,aveclatempêtequifaittoujoursrage,j’espèrequ’iln’estrienarrivédegrave.Je finis par retrouvermon équilibre et je vais ouvrir enme répétant d’arrêter de trop réfléchir.

C’estvraimentunemauvaisehabitudechezmoi.Maismoninstinctreprendledessusquandj’ouvreetquejevoisquiestplantésurleseuil.C’estCasey, qui respire avec ceproverbial « calmeprécédant la tempête ». Ironie du sort, étant

donnécellequimugitdehors.Cesyeuxbleuclairquipromettaientnaguèreconfortetsécuritésontcesoir de la couleur sombre de la baie et font penser à un marin perdu en mer qui cherchedésespérémentàs’accrocheràtoutcequilui tombesouslamainpourpouvoirregagnerlerivage.Oh,c’estbientrouvé,ça.Oùai-jefourrémoncalepin?Avalant lenœudque j’aidans lagorge, jedécidedeparlerplutôtquede rester lesbrasballants

commeuneidiote.—Quelquechosenevapas?— Oui, quelque chose ne va pas du tout, dit Casey d’une voix encore plus rocailleuse que

d’habitude,maisavecuncôtémenaçantetterriblementsexy.Jesuisforcéedereculerquandilentreetrefermelaportecommes’ilétaitchezlui.Ilyaquelque

chosedanssesyeuxquichangetoutetquim’excite,toutenéveillantlapeurenmoi.—Vousm’avezdéclaréquelamanièredontquelqu’unembrasseenditlongsurcettepersonne.J’opine.Allantdroitaubut,ilmesaisitparlanuqueetm’immobiliseencollantsabouchesurlamienneet

en la forçantdesa langue. Iln’ya riendedélicatdanscebaiser.Pasde légermordillementdemalèvre,desuçotementpréliminaireaucoinde labouche,pasdecaressede la languepour implorermonaccordcommeonle litdanslesromansà l’eauderose.Iln’yadanssongestenidouceurnilenteur.C’estsidifférentdel’hommequ’ilmesemblaitconnaître,maisc’estcependantexactementtelquejem’yattendais.Ilsereculeetl’intensitédesonregardvadepairaveccebaiser.—Etqu’avez-vousapprisdecelui-ci?Jedéglutisdenouveau,puisjesorslapremièrechosequimeviententête:—Vousavezbesoindebaiser.Jen’enrevienspasdemonaudace.— Exact. Alors, si vous ne voulez pas en faire les frais, vous avez intérêt à le faire savoir

maintenant.Jenedispasunmot.Mêmesijelevoulais,meslèvresrefuseraientd’obéir.Maisildoitavoirvuà

monexpressionquej’étaisconsentante,carl’atmosphèredéjàélectriques’embrasepourunechoseàlaquellejenesuispeut-êtrepaspréparée.—Déshabillez-vous.J’obéis, pas parce que je suis terrorisée, mais parce que j’ai surtout peur qu’il puisse changer

d’avissijen’obtempèrepas.Jeveuxlesoulager.JemedépêchedoncdedéfairemonjoggingetmonT-shirt trop grand, et je remercie le ciel d’avoir pris une douche et laissé de côté petite culotte etsoutien-gorge.Unefoiscelafait,jerestesurplace,toutenueetgauche,attendantqueCaseyenaitfaitautant.Jeveuxl’aider,jeleferaisvolontiers,maisquelquechosemeditqueceneseraitpasbienvenu.Caseyseredresseetjerestebouchebée.Jedoisbaver,même.Nomd’unchien,cetypeestencore

plus splendide nu que le Jayson que j’ai pu imaginer dansmes rêves les plus insensés. Et je doisavouerqu’ilsontéténombreuxdepuisquejesuissurcetteîle.Caseyaunepoitrinerobusteetample,avecunepetitetouffedepoilsentrelespectoraux,desbrasauxveinessaillantesetlatraînéedepoilsquidescenddesonnombrilmériteraittoutunchapitreàelleseule.Maisjen’aipasletempsd’écrire,carunpeuplusbas,jevoisuntrophéedegranitquiméritetoutemonattention.LesexedeCaseysedresse,longetépais,etjeledévoreduregard.Ilneprendpasletempsdemedétaillerautant.J’ensuispresquereconnaissante.Jenesuispasfaite

commelesfemmesdemesromans.Jen’aiqu’unbonnetBetjen’aipasunetailledeguêpe.Jesuismoyenne–nimaigrenigrosse–,unpeulourdeàforcederesterassisedevantmonordinateurtoutelajournéeetdemalmanger.Caseymeprendparlebras,meconduitverslelitetmeretourne.Ilestd’uneefficacitéredoutable.

Celameplaît.Puis ilmepoussedoucementet jeme retrouvecouchéeàplatventre sur lematelas.Celameplaîtaussi.—Vousêtesprête?—Oui.Etmêmeplus.Sans la moindre préparation – même si, à vrai dire, je ruisselle déjà –, Casey s’enfonce

profondémentenmoi.—Oh,monDieu,oui…murmuré-jeenmecambrant.—Pasunmot,dit-ilensepenchantenavant.(Lachaleurdesoncorpsmebrûleraitpresqueledos.)

Etjevousconseilledevouscramponner.Jesenssabitequiseretired’uncoup,etjemanquedeprotesterbienqu’ilm’aitordonnélesilence,

mais j’ai de nouveau droit à la délicieuse douleur de chaque centimètre qui s’enfonce enmoi. Lacadenceaccélèreetlapuissancedesescoupsdereinsestdeplusenplusexigeante.Ilaraison:ilfautquejemecramponne,etducoup,j’agrippelesdraps.Samanièredemecouvrirdetoutsoncorps,d’enfoncersesdentsparfaitesdanslapeaudemonépaule…c’estcharnel,intense.Sublime.Ilmesaisitparlecouetmecloueaulit.Jesuispriseaupiègeetincapabledebouger.Jenevoispas

sonbeauvisageburiné,cequisignifiequ’ilnepeutpasvoirlemien.Etc’estprécisémentainsiqu’ilveutquecesoit.Cependant,j’entendsnettementlesgrognementsàmonoreille.Jefermelesyeuxetjelaissecebruit,lasensationdesoncorpsetsonodeurm’entraînerdansmonrêve,làoùj’aienregistréchaquenuancedemonJayson,etlesdeuxhommessefondentenunseul.Toutcommedanssonbaiser, ilyaunedéterminationàcesva-et-vientrapideset réguliers. Ilne

dévie pas de l’angle qu’il a choisi, il ne se perd pas en lents frottements. Il ne s’attache pas àmedonnerduplaisir.Ilcherchelesien,maisjenepeuxm’empêcherdemedemandersiceplaisirvaluiapporterautrechosequedelapeine.Je neme fais aucune illusion sur le sens de tout cela. Sa bite est enmoi parce qu’il est tombé

follementamoureuxdelafemmesurgiedenullepartaumomentoùilétait leplusdésespérédesavie.Cen’estmêmepasparcequejesuissivoluptueuseetséduisantequ’ilnepeuttoutsimplementpasmerésister.Etcen’estpasnonplusmoninsolencequil’étourditetluidonneenviedem’apprendrelesbonnesmanières.Caseyn’estpasJaysonBassetjenesuispasJanellKain.Maisj’aitoutdemêmeenviedelui.Arrachée àmonmonde imaginaire et ramenée sansménagement à la réalité, je suis interloquée

quand la sublime bite qui occupaitma chatte si avide disparaît d’un coup. Et encore plus lorsqueCaseymesoulèvecommesij’étaisaussilégèrequ’uneplumeetquejemeretrouveàcalifourchonsurcefauve.Sans avoir apparemment besoin que je l’aide, Casey guide mes hanches jusqu’à ce qu’il m’ait

totalement embrochée à nouveau. Je gémis, savourant une fois de plus cette sensation. Mais mapersonnenecomptepas,etj’enailapreuvequandilcommenceàmefairecoulisserdebasenhautsur sa bite, dans un va-et-vient aussi rapide que brutal. J’en suis réduite à me cramponner à sesépaulesetlelaisserfairecequebonluisemble,aussiparadoxalequesoitlaposition.Entantquefemmeetauteurderomanssentimentaux,j’aitoujoursconsidéréqu’enchevauchantun

homme,unefemmeexprimeladominationqu’elleexercesurlui,lapossibilitédeprendreleschosesenmain.Cen’esttoutbonnementpaslecasavecCasey.Commeunchevaldébridé,iln’enfaitqu’àsatête.Ilestsauvageetlibre,sesmusclessouplessaillentàchaquemouvementetseshalètementssontaussi puissants que l’énergie qui l’anime.Casey est devenu un étalon qui ne connaît ni clôtures nientraves.Enfin.Ilfautquej’écrivecela.Jevaislesimmortaliser,luietcemoment,danslespagesdel’undemes

livres.Car celaméritede l’être.Enbon écrivain, jemémorise chaque infimedétail – ses robustesépaulescontractées,sesmainsimplacablesquim’empoignent,lecaldeleurspaumessurmesfesses,l’exquisesensationdansmonanusàchaquefoisqu’ilmesoulève,etleclaquementdespeauxl’unecontrel’autrelorsquejeretombe.Maisplusquetout,jevaissaisiretgarderdansmonespritchaquenuanced’émotionbrutequejelisdanscesyeux,aussibleusqu’unmarlinprisàl’hameçonquitentedésespérémentdes’échapper.Carsesgestesontbeauparaîtrelibres,cequedisentsesyeux,c’estunetoutautrehistoire.

Je suis rivée à son regard, incapable dem’en détourner de peur demanquer quelque chose decapital.CequeCaseyvoitquandilmeregarde,cen’estpasdutoutmoi.Àlaplacedesternescheveuxchâtains, il voit d’éclatantes boucles auburn luisantes.Au lieu de la peau ambrée, il voit un ivoireimmaculé. Et à la place des yeux bruns si communs, il voit des pupilles couleur de feuilles auprintemps.Cequ’ilvoit,cellequ’ilvoit,c’estCassidy.Sesmainsdesserrentleuremprisesurmesfesses,maislabitequiestenmoin’arienperdudesa

raideur.QuandCaseycessedemefairecoulissersur lui, jemedemandes’ilachangéd’avisetneveutplusachevercequ’ilacommencé.J’arrêtealorsmoiaussidebougeretj’attendsqu’ilmedisededescendre.Iln’enfaitrien.Aulieudecela,ilm’attireenavantparleshanches,m’encourageantàprendrelescommandes,à

bougercommejeledésire…àlechevaucher.Moncœurs’emballedansmapoitrine,jesuisgriséepar l’opportunitéquim’estoffertedepossédercethomme.Jen’ai riendésiréd’autredepuisnotrepremièrerencontre.Caseyestgrand,avecdelargesépaules,robusteetpuissant,c’estunemontagnequimedonneenviedesortirmonattiraild’alpinismepourlegravirjusqu’ausommet.Maisjesuisparvenuejusque-lààmaîtrisermespulsions,intimidéeparsasimpleprésence,luiauprèsdequijemesensminuscule.Àprésent,ilestentremescuisses,ettoutecetteforcebruteestàmaportée.Jesaisisdonccetteoccasionquin’arrivequ’unefoisdanslavieetj’acceptecequ’ilm’offre.Jemepencheenavantetpositionnemeshanchespourmieuxglisser,avantd’ondulerd’avanten

arrièreàunrythmequiestbeaucoupplussensuelquelescoupsdeboutoirqu’ilm’aassenés.Jeneveuxpasqu’ilsedéfouledesacolère.Jeveuxqu’ilsesentedésiré,vénéré.Jel’étreinsetenfouismonvisagedanssoncou.Quandjel’entendspousserunlentsoupiretqu’ilinclinelatêtepours’offriràmoi, j’enprofitepleinement.Mais je saisque jedoisprendregardedenepas l’effrayer.Alors, jeprendsmon temps, je le suçote délicatement, en faisant attention pour ne pas laisser demarque. Iln’estpasàmoi.Jenefaisquel’emprunter.Quandmeslèvresemprisonnentlelobedesonoreilleetquemesdentslemordillent,iltressaille.

Jem’enhardisdemesavoircapabledefaireunteleffetàcethomme.J’aitrouvésonpointfaibleetj’aiachevémesrecherches.Maisjen’enaipastoutàfaitterminéaveclui.Ilresteautrechosequejedésireetquejen’aipaseul’occasiondefaire.C’estunrisque,maisquivautlapeined’êtrepris.Jetitilleunefoisdeplussonoreilledansl’espoirdelemettredansunétatplusréceptif,puisjedéposedesbaiserslelongdesamâchoiresculptéejusqu’àsabouche.Caseynem’apas embrasséedepuis l’uniquebaiserdudébut. Jene suismêmepas sûrequ’il va

accepter de recommencer ; peut-être que c’est un geste trop intime pour qu’il le supporte. MaisembrasserCaseyn’estpasmonintention.Jeveuxsimplementenfoncermesdentsdanssafichuelèvresicharnue.Alors,d’unmouvementdehanches,jeprendssabiteauplusprofonddemoi,jerespireunboncoupet,oublianttouteprudence,jeplaquemabouchesurlasienne.EtmonDieu,oui!Caseyposesesgrossesmainssurmondosetmeserrecontreluitandisquesa

languechercheladouceurréconfortantedelamiennedansunsuavebaiserquim’enivre.Jelesensenmoi,plusdurquejamais,sapeaunuebrûlecontrelamienne,iln’estquevirilité.L’espaced’unbrefinstant,jem’enhardisàfairecommesijepouvaisleplieràmavolonté.Jel’enlaceetluiempoignelescheveuxpourluirenverserlatêteenarrièreetleforceràlibérermabouche.Puisj’ose.Jeprendscettelèvretentatriceentremesdentsetl’érafleenlamordillant.Casey grogne. Pas pour me mettre en garde, mais pour approuver. Je lui fais mon plus beau

sourire enjôleur, le genre que les héroïnes effrontées de mes livres décochent à leur partenairemasculinpour lesrendrefousdedésir,et je lemordsànouveau.Cettefois, jenemeretirepas.Jepoursuis lebaiser, je ledirige et je luimontre l’effet que cela fait d’êtredominé.Peut-être suis-je

douce,maisinnocente,sûrementpas.Cettenuitestsansdoutelaseuleoccasionquis’offreàmoideleposséderainsi,alors,jevaistoutfairepourquecesoitaussimémorablepourluiquepourmoi.Jeme cramponne à ses épaules et jeme sers aumieux demon corps pour lui faire plaisir. La

cambruredemesreinsmemetdanslapositionparfaitepourchevauchersalongueetépaissebitetoutencontinuantdetitillerseslèvresenlesfrôlantdemontéton.Jeveuxqu’ils’enempare,etc’estcequ’ilfait.Casey capture la pointe dressée entre ses dents et l’érafle enme faisant délicieusement souffrir.

Bienquej’aielaprudencedenepasdireunmot–ilnem’atoujourspasdonnélapermission–,jelaisseéchapperungémissement.Encore.J’enveuxencore.Comprenantcequecelasignifie,ilprendle téton entièrement dans sa bouchepour le lécher et le téter tout enme regardant.Quelque chosechangedanssonregardetj’entrevoisl’hommequisedévoueauplaisirdesapartenaire.Jeleregardepasserd’unseinàl’autreetlespétrirdesesmainspuissantesetcalleuses.Chacunede

mes ondulations titille mon point G et fait monter mon plaisir de plus en plus haut, comme unascenseur qui fonce jusqu’au dernier étage d’un gratte-ciel. L’impatience d’atteindre la destinationfinales’ajouteàcelledecettelongueascension,maisjesaisquelorsquelesportess’ouvriront,monorgasmedéferlera.Deuxièmeétage…troisième…quatrième…J’accélèrel’allure,concentréesurlasensationqueprocureàmonclitorisgonflélatouffedepoils

sur lepubisdeCasey.Commeellemechatouille toutenstimulantceboutonhypersensible, jem’ycolledeplusenplus.Jesuistellementhypnotiséeparl’expressiondansleregarddeCasey,sabouchesurmesseins,chaqueinfimedétaildesabitegonfléeprofondémentenfouieenmoi,quejen’aipasremarquéquejememordaislalèvreaupointdemefairesaigner.Cinquièmeétage…sixième…septièmeciel.La destination est atteinte. À peine les portes s’ouvrent-elles que l’ascenseur retombe dans une

chutevertigineusequienvoiedesvaguessuccessivesdeplaisir jusquedanslamoindreterminaisonnerveusedemoncorps.J’ailasensationd’avoirlapoitrinelégèreetvide,presqueglacéetantlesangarefluédansmonbas-ventrepourexploseretserépandredansmesveinescommeunfeudebroussedévastanttoutsursonpassage.Jemepâmeetdéfaille,griséedebonheur.J’aiàpeineremarquéquejem’étaisimmobiliséequandCaseyprendlarelèveetmesaisitparles

hanchespourprolonger leplaisir.Lesparoisdemachattese refermentsursabite incroyablementdurepourlaserreretl’attirer,lesupplierdemerejoindredansceroyaumequelesamantsdoiventpartager.Etc’estexactementcelaquenoussommes,j’ensuisconvaincue.Jusqu’aumomentoùj’ouvreles

yeuxetquejesuisforcéederetomberunefoisdepluslespiedssurterre.Lechangementquej’avaisentrevuquelquesinstantsplustôtadisparu,commes’ilétaitbrutalement

revenuàuneréalitéquim’échappe.Disparu,ledouxCasey,remplacéparledésespéré.Nospositionschangentànouveau.Allongéesurledos,lesbrasramenésderrièrematêteetclouésaumatelas,jemesenstransportée.

Oui,c’estcequejedésire.—Écartezencore!ordonne-t-il.Je suis à ses ordres,mais il neme laisse pas le temps d’obéir. Il passe unbras sous un demes

genoux et m’ouvre les cuisses à sa convenance. Il pivote sur ses hanches et son énorme bite quipénètre à nouveau enmoime combledélicieusement.Seigneur, si seulement j’avais le pouvoir de

revenirenarrièreafinderessentircelaànouveau.Bonsang,maissasublimebiteestgigantesqueet…sublime.Maissurtout,elleestinlassabledans

son égoïste entreprise. Chacun des violents coups de boutoir queme donneCaseyme projette enarrièreencoreetencore.Bienqu’ilsoitbrutal,jesavourecesva-et-vient.Maiscommeaudébut,ilsnesontpasfaitspourme

donnerduplaisir,maispourqu’ilenprenne.Jenesuisriendeplusqu’uneparticipanteconsentante.Ilpeutseservirdemoiàsaguise. Jem’enmoque. J’ai justeenviede lesentir,de legarderenmoi,d’avoiravecluiceliensiéphémèresoit-il.Sonplaisirestlemien.LesgrognementsdeCaseysefontpluspressants,sescoupsdereinsplusinsistantsetlacadencede

plusenplusdirecteetprécipitée.Puis,finalement,sabitequittemachatteetretombelourdementaucreux dema cuisse. Je la sens palpiter à chaque giclée de son orgasme et je savoure la sensationcharnelledesesdentsdansmoncoutandisquesonspermebrûlantserépandsurmapeau.Lesyeuxclos, je leserrecontremoi,car jesaisque jeneconnaîtraiplus jamaiscettesensation.

J’aimeraispouvoirdirequedurantcetuniquemoment, ilestàmoi.Maisiln’enestrien.Ilneserajamaisàmoi,carilseratoujoursàelle.Quelleidiote,maisquelleidiote,cetteCassidyWhalen.S’arrachantàmonétreinte,Caseyroulesurleflancpours’allongeràcôtédemoi.Lafraîcheurqui

règnedanslachambren’estpastrèsagréablesurmapeauenfiévréeetjemerendssoudaincomptequejesuistoutenue.JerisqueunregardversCaseyetletrouve,unbrasau-dessusdelatête,lesyeuxfermés,encorehaletantettentantdereprendresonsouffle.J’aienviedeposermatêtesursoncœurpourenentendrelesbattementsassourdissants.Demeblottirdanslecreuxdesonbrasetdepassermajambepar-dessuslessiennestoutendéposantsurtoutsoncorpsdesbaisersreconnaissants.Maisjen’enfaisrien,carjenepeuxpas.Cen’estpasmonpetitamietnousnesommespasamants.Noussommeslà,c’esttout.Caseyouvrebrusquement lesyeuxet se tourneversmoi. Il a certainementdû sentir lepoidsde

monregard.Jemedétourne,pas trèssûredecequ’il fautdiredans lesilencegênéquis’ensuit,nimêmesijedoisparler.J’ailaréponsequandilselèved’unbond,empoignesonpantalonetl’enfileprécipitamment sansmême prendre la peine de le boutonner. Il s’assoit sur le rebord du lit pourmettreseschaussettesetsesgrosseschaussures,sansmeregarderniproférerunmot.Unefoisqu’ilaterminé, il se lève et ramasse sa chemise en tournant vers moi son dos musclé, taillé comme lacollerettedéployéed’uncobraencolère.—Désolé,dit-ilavantdesehâterdesortir.Unefoisquej’aientenduledéclicdelaportequisereferme,j’oseenfinluirépondre:—Pasmoi.

15

Shaw

J’aiàpeinefermél’œildelanuit.Pasàcausedelatempête,maisparcequej’airéfléchiausensdelavie.OK,peut-êtrequej’exagèreunpeu,maispasdebeaucoup.J’aifailliperdrelaviehier,aprèstout. Ce genre de truc a tendance à vous amener à faire un bilan de votre existence. Pas un bilanmatériel de ce que je convoite depuis toujours,mais de ces trucs plus importants dont parlent lesbouquins de développement personnel. Des trucs comme la famille, le bonheur, l’épanouissementpersonnel, les valeurs fondamentales…et le temps – celui quime reste et lamanière dont je vaisl’utiliser.Jusque-là,jeconsidéraistoutcelacommedesconneries.Plusmaintenant.Àprésent,aulieud’unhangarremplidejouetsrutilants,jenevoisqu’unvasteetvainespacevide.Inutilededirequejenesuispastrèsfierdecequejesuisdevenu.Malgré tous mes efforts pour ne pas être comme mes parents, mon égoïsme m’a fait leur

ressembler en touspoints.Monpère cupide etmamèreobsessive et droguée étaient tous lesdeuxnichésàl’intérieurd’unbébéjouffluquin’étaitpaslajoied’uncouple,maisplutôtl’incarnationduregret.Sijem’étaisnoyédanscetocéan,ShawMatthewsn’auraitrienlaisséderrièrelui.Jamais je n’ai eu envie de cela, jamais cela ne m’a effleuré. Mais maintenant, cela m’obsède.

Qu’est-cequiachangé,bonsang?Toutcequej’aidanslacabocheestsensdessusdessous.Pour couronner le tout, j’ai joui dans Cassidy. Et ce n’est pas le genre de connerie que je fais

habituellement.Du coup, j’essaie de comprendre la raison demongeste, et surtout pourquoi c’estavecCassidyquec’estarrivé.Celasuffiraitpourexpliquermoninsomnie,maisilyaaussilefaitqueje ne n’aie pas voulumanquer une seconde de cette femme endormie dansmes bras. Lamanièreparfaitedontelles’estblottiecontremoi,sarespirationetmêmesesgrimacesattendrissantesm’ontcombléetrenduheureux.Heureux,combléetdésarçonné.Dormirtoutseulseraitvraimenttropnul.Cassidys’agitedanssonsommeiletseblottitencorepluscontremoi,alorsqu’elleadéjàlatête

surmapoitrine,lesjambesemmêléesauxmiennes,sesseinsmagnifiquescollésàmonflancetsonbraspassésurmataille.Merde,jesouris?Ehoui,jesouris.Jemetourneverselleetdéposeunbaisersursonfronttoutencaressantsescheveux,raviqu’elle

réagisseparunsoupirdesatisfactioncommesiellen’avaitattenduquecetteattention.Quecesoitlecasoupas,peu importe.Elle l’a,monattention,entièrement.Etcomme leperversque je suis sans

doute,jehumesescheveuxparcequesonparfumesttoutsimplementfantastiqueetqu’ilasurmoiuneffetinexplicable.Je vais la faire mienne. Bien que je sois terrifié à la perspective qu’elle me rejette. Si elle

m’accepte,siellemedonneneserait-cequ’unechancedefairemespreuves,jeveilleraiàcequ’ellene le regrette jamais. Bon Dieu, je suis prêt à renoncer au titre d’associé chez Striker SportsEntertainment,cetitrepourlequelmapetiteMissGlaçonetmoiavonsétéaucoudeàcoude,parceque je saisquec’est la seule façonpossibled’être ensembleauvuet au sude tous. Jem’en fiche.CassidyWhalenenvautsacrémentlapeine.Oui,ShawMatthewsaunnouvelobjectif,deveniruntypebien,quelqu’unqu’elleserafièred’avoir

comme homme.Mais le plus génial, c’est que je ne vais pas changer simplement pour la rendreheureuse:jevaislefairepourledevenirmoiaussi.Etiln’yariend’égoïstelà-dedans.Mais il fautprocéderparordre.D’abord, jedoisvoirAbby,quise trouveêtre la femme laplus

gentille dumonde et qui est en train deme faire changer d’avis sur la questiond’avoir un enfant.Seigneur,jevaisfinirparmefaireunecrampeàforcedesourireenpermanence.Même si je sais qu’Abby a Thomas et Casey pour s’occuper d’elle, j’ai pris moi aussi cette

responsabilitéenverselle.C’estunemissionqu’unfilsdignedecenom–adoptifoupas–endosseavecfierté,aprèstout.Ellevaêtrefièredemoi,etjevaismêmeessayerdem’entendreavecCasey,car je sais que cela la rendra heureuse. Non pas que je sois obligé de lui lécher les bottes sousprétextequelarivalitéentrefrèrescen’estpasuneblague,maisquandmême.Nousavonsquelquechoseencommun,àprésent.Enplusdufaitd’avoirbaiséaveclamêmefemme.Etpuisquepenseràcedétailmerendronchon,jelebalaieunebonnefoispourtoutesdemonesprit.Cassidyestmanana,Abbyestmamèreetriend’autren’ad’importance.Pointbarre.SaufquejevaisdevoirréveillerCassidypourpouvoirm’extirperdulit.Cen’estpasquej’enaie

envie–oh,sûrementpas–,maisnousnepouvonspasresteréternellementcommecela:onvaavoirbesoindemoipourréparerlesdégâtscausésparl’ouraganetjetiensàparticiper.Leproblème,c’estquejesuistoutchoseàl’idéedelaréveiller.EtsiellealamêmeréactionquelelendemaindenotrenuitensembleàDetroit?Celanem’apasaffectéàcemoment-là,maisàprésentj’aidéconnéetj’aidessentimentspourelle.C’estdrôle, lessentiments :c’est fragileetonest facilementblessé.C’estbienpourcelaquej’aiévitéd’enavoirjusqu’ici.Non,jenevaispasmeréfugierderrièrecettemuraille.Siellepiqueunecrise,ellelapiquera.Je

ferai avec et je trouverai lemoyende tourner la page.Mais je respecterai ses désirs.Dans un cascommedansl’autre,jenepeuxpaséviterl’inévitable.Jebougedélicatementl’épaulepourlaréveiller.—Machérie?demandé-jeàmi-voixpournepaslafairesursauter.Oui,jel’aiappelée«machérie».Etalors?—Mmm?fait-elleens’étiranttellementquesescheveuxretombentsursonvisage.—Machérie,dis-jeenlesécartant,ilfautqu’onselève.— Non, marmonne-t-elle de cet air boudeur qui me donne envie de lui sauter dessus et de

l’embrasserpassionnément.—Oooh,roucoulé-jecommelamauviettequejesuisapparemmentdevenu.Onn’auraitpasencore

sommeil?Ellegardelesyeuxfermés,maisellerépond.Enseblottissantencoreplusprès.—Non,jesuisjustetropbien,jen’aipasenviedebouger.

Zut.Jenevaispaspouvoirlaforcer.Saufquejesuisobligé.— Je serais ravi de te laisser ici pour l’éternité,mais la vérité, c’est que la réalité nous attend

dehorsetqu’avantlongtemps,tonpèrevarappliqueraussi.(Jemepencheverselleavecdesairsdeconspirateurs.)Etjevaistedirequejen’aipasenviedemefairesurprendretoutnuaulitaveclafilledeDuffWhalenquandilviendrafrapperàmaporte.—Ilneferariendutout,glousse-t-elle.Ilt’aimebien.—Ahbon?Ilm’aimebien?J’avouequej’aiunpeudemalàdigérercettenouvelleinformation.Jesuistombéàl’eaudubateau

de ce bonhomme pendant une bagarre avec un type qu’il considère comme faisant partie de safamille,bonsang.Ahoui,sanscompterquejesautesafillerégulièrement.Cassidyhochelatêteetsajouemefrôledélicieusementlapoitrine.Ellen’apasl’airdeflippernon

plus.Absolumentpas.—Ettoi?Tum’aimesbienaussi?—Peut-êtreunpetitpeu,marmonne-t-elleavecunsourirequimeravit.Merde,ellem’aimebien,quoi.—Ahbon?Peut-êtreunpetitpeu?l’imité-je,cequilafaitdenouveauglousser.Ilvafalloirquejelapunissepours’êtremoquéedemoi.D’unemain,jeluichatouillelescôteset

de l’autre, j’en fais autant à l’aisselle. Cassidy fait un bond et se débat, ouvrant tout grands sesmagnifiquesyeuxverts,etdévoileseséclatantesdentsblanchesenriantàgorgedéployéeetenfaisantuneespècedegrognementpasmignondutout.Mais,bonDieu,commeelleestbelle.Profitantdel’occasion,jerouleavecelleetprendslapositiondominantetoutencontinuantdela

chatouiller.Cassidyritdeplusbelleetmeclaquevainementlesépaulesensedébattanttoujourspourécartermesmains.Uncoupdegenoumefrôlel’entrejambeetjeparvienstoutjusteàéviterl’accidentenmetordant,sibienquejemeretrouveentresescuisses.Ellerenverselatêteenarrière,sescheveuxéparssurl’oreiller,etdeslarmesd’extaseperlentau

coindesesyeux.J’aimerais tellementqu’ellesoitperpétuellementainsi.C’estseulementquandellecommenceàs’essoufflerquej’abrègesonsupplice.Avantqu’elleaitletempsdeseressaisir,jeprofitedemapositionpourlapénétrer.Oui,jebande

déjàcommeuntaureau:n’oublionspasquenoussommesnusetquenoussommesentraindenousbagarrergentiment.Cegenredechoseàtendanceàexciterunbonhomme.Cassidy étouffe un cri, mais elle ne proteste pas. Son rire irrépressible est remplacé par un

gémissement qui me donne envie de jouir sur-le-champ. Bon sang, mais ce que je l’aime, cettefemme.—Qu’est-cequ’ilya?demande-t-elle.C’estseulementlàquejemerendscomptequejesuisimmobileetquejelacontemple.Mêmesije

suis en train de pénétrer une femme splendide qui m’excite comme jamais, je comprendsbrusquementpourquoijesuisaussidécontenancé.Serait-cequejel’aime?—Chéri?Çava?demandeCassidy,l’airinquiet,tandisquesesonglesfrôlentlescheveuxsurma

tempedansungesteattendrissant.Ellem’aappelé«chéri»…Etvoilàque jemesensbrusquementcomme leGrinchunmatinde

Noëletquemoncœurtripledevolume.

—Oui,unecrampeàlajambe.Absurde,commemensonge,enplus.MaisjeneveuxpastenterlediablesousprétextequeCassidy

ne flippe pas, et être en train de pénétrer la femme demes rêves n’est pas lemoment idéal pourbafouillerquelquechosesansavoirunpeuréfléchiavant.Jen’aijamaisaimépersonneendehorsdemoi-même.Est-cequejesaiscequeçasignifie?Ayant faitminede soulagermacrampe, jeme ressaisisetprends le rythmequiaeu l’airde lui

plaire cette nuit. Profond et insistant, avec un frottement qui nous rapproche autant que le peuventdeuxêtreshumainssansentamerlapeau.Maisjeseraisprêtàm’écorchervifsiellemeledemandait.Mon Dieu, ce qu’elle est bonne sur ma bite – chaude, étroite et douce à la fois. C’est trop de

bonheuretjevaisjouirbientropvitesijecontinuecommecela.C’estfaciled’yremédier:jeroulesur le côté afinqueCassidy se retrouve surmoi,positionà laquelle ellen’étaitmanifestementpaspréparée.Maisbon,commenousavonsdéjà faitpasmaldegalipettescematin,unedeplusoudemoinsnechangerapasgrand-chose.Cassidygloussedevantmabrusquerieetsachatteseresserreàchaquecontractiondesonventre.Je

commenceàsongeràmillemanièresdel’ameneràcontinuerainsi,maiscen’estpasnécessaire,carelle est à califourchon surmoi, les ongles enfoncés dansma poitrine. Ses cheveuxme frôlent levisage et sesmagnifiques seins ronds aux pointes durcies ne demandent qu’à être pris enmain etcueillis.Peu importe laposition ;peu importequimène ladanse ;peu importeque jesoisounonsubmergéparlesémotions.Ellemefaittoutsimplementdestrucsqu’aucuneautrefemmenem’avaitfaitsjusqu’ici.Etj’enaiconnubeaucoup,desfemmes.CassidyWhalenestàpart.CassidyWhalenest…cellequ’ilmefallait.Alors,jelalaisseprendrelesrênes,car,àvraidire,c’estcequ’elleatoujoursfait.Ellememène

parleboutdunez,pournepasdireautrechose.Oui,jel’aime,bonsang.Maintenant,ilfaudraitquejetrouveunmoyendeleluidire.

16

Casey

Jesuisunconnard.Dansladouche,alorsquel’eautambourinesurmoncrâne,jemerendscomptequ’avoirouvertle

robinet d’eau chaude à fond ne sera toujours pas suffisant pourme décrasser dema connerie. Jepourrais aller me plonger dans une marmite d’eau bouillante. Peut-être que je devrais toutsimplementmefoutrelefeu.Oumieuxencore,m’attacheràunpieusurunbûcherenpleincentre-villeetlaisserlapopulacehargneusearméedefourchesmebrûlerviftoutenmeforçantàregarderMiadanslesyeux.Jemesuisservid’elle.Toutbonnement.Mia.LadouceetinnocenteMia.Elleneméritaitpaslamanièredontjel’aitraitéecettenuit.Elleatoutsimplementétéprisedansle

feucroisédelagrandiosetragédiedeCaseyetCassidy.Enfin,c’estplutôtuncessez-le-feu.CarleschosesentreCassidyetmoisesontbrutalementarrêtées.Celadit,c’estarrivéilyalongtemps,doncce n’est pas aussi brutal que je voudrais le croire. Jeme suis juste accroché à quelque chose quin’existaitplus.Jecroisquenousnousysommesaccrochéstouslesdeux.Maismoiplusqu’elle.Je ne suis sorti avec personned’autre queCassidy, je n’y aimêmepas songé, à vrai dire.Mais

Mia?Elleestarrivée icicommeuneboufféed’air frais.Avec toute son innocenceaubeaumilieud’unenvironnementapparemmentinviolé.Sesyeuxdebiche,unebeauténaturellequin’apasbesoindemaquillagepourdissimulercequ’elleestvraiment,descheveuxquiflottentautourdesonvisagecommelesvaguesquidansentsurl’océanpartempscalme,etlephysiqued’unesirène.C’estunrêvedevenuréalitépourn’importequelmarin.Etjel’aigâché.Jementiraissijedisaisquejenemedoutaispasquejel’attirais.Jelesavais,jel’avaissentiàde

subtils indices.Samanièredesepencherlégèrementversmoipourserapprocher.Demeregardercommesi je lui avaisdécroché la lune.Cequ’elledisait, lesexpressionsqu’ellechoisissait étaienttrèsintimesetfamilièrestoutennel’étantpas.C’étaitincroyablementagréabledebavarderavecelleetquandelles’intéressaitàmoi, jenepensaisvraimentplusdu toutàCassidy.Etd’ailleurs,c’étaitpourçaqueCassidyétaiténervée,non?Bon sang. Je n’avais pas prévu ça, même si je n’ai pas à me creuser la tête pour comprendre

pourquoi.

Donc, contrairement à toutes les femmes que j’ai connues jusqu’ici,Mia était suspendue àmeslèvres. Je pensais que c’était uniquementparcequ’elle sedocumentait pour son roman,mais il luiarrivait souventdeposerpapieret stylopourmieuxm’écouter.Avecelle, jemesentais important,commesi j’étais lamoitiéd’untout.Jeneveuxpasdireparlàquejenemesentaiscompletquesij’avais Cassidy à mon bras, mais disons que là, j’étais quelqu’un qui avait sa propre histoire àraconter.Jecroisqueçam’asurprismoi-même.Queçaamodifiélafaçondontjemepercevais.Maisçanem’apasempêchéd’essayerdesauverceque jepouvaisdemarelationavecCassidy.

Nousétionsensembledepuistoujoursetjepensaisqueçadureraitjusqu’ànotredernierjour.Alors,quandCassidym’asurprisavecMiadanslenid-de-pie,unendroitquiétaitnotrerefugeànous,jemesuis senti coupabled’yavoiramenéuneautre femme.Et j’aibienvu ladéceptionsur levisagedeCassidy.Elleétaitjalouse.Etçam’arenduencoreplusmalàl’aise.Jel’avaisvueaveccesalaud,etdansleparcpourenfants,enplus.Celuioùonallaitquandonétait

gosses.MaCassidyétaitdanslesbrasd’unautrehomme.Untypequ’elleétaitcenséemépriser.Etpasseulementça,maiselleétaitentraindeselefaire.Toutcequejecroyaissavoiravoléenéclatsàcetinstant.Çaauraitdûêtremoi.Moi,lemecquil’attendaitpourexaucersesrêvesetdanslesbrasduquelelle

reviendrait,puisquec’étaitsaplace.Maisjem’étaistrompé.Etellem’avaitlaissédanscenid-de-pieen train de bander comme un taureau. On aurait pu penser que me briser le cœur m’aurait faitdébanderaussitôt,maispasdutout.Etilfallaitquejetrouveunmoyend’évacuertoutça.MiaaétébientropcontentedejouerladoubluredeCassidy.Maisquelquepartaumilieudecette

baised’enfer,quelquechoseabrusquementchangé.C’estellequej’aivue.J’aivuMiaquimevoyaitmoi.C’estcequ’ellevoulait,c’estmoiqu’elledésirait.Etjen’aipaspusupporterça,aveclablessureque venait deme faireCassidy.Et le pire, c’est que jeme sentais bien avecMia.Comment c’étaitpossible?EnsortantdemachambreàWhalenHouse,j’entendslesvoixdenosparentsenbas.Jenesaispas

pourquoi,maisjen’aipastropenviedelesvoirtoutdesuiteetjepréfèremonterdanslenid-de-pieévaluerlesdégâtscausésparl’ouraganAyla.Latempêteafinipars’éloigner,quelquepartaumilieudelanuit,etpourautantquejesache,àlamaison,toutlemondeestindemne.Mêmesijem’enveuxd’avoirlaisséMiatouteseulecettenuit,jesaisquejenepouvaispasresteravecelleaprèslamanièredontjem’étaiscomporté.Ilfaitsombredanslecouloir,maisunraidelumièreestvisiblesouslaported’unechambre.Celle

deMia.Elleestréveillée.Maconsciencerefusequej’évitelaconversationqu’ilfautquej’aieavecelle.Jeluidoisunesacréeexcuse,etmêmesijesaisquejenepourraipastrouverlesmotsraffinésqu’ellemérite,mieuxvautuneexcusepastrèsbienformuléequepasdutout.Repousseràplustardn’estpasunebonnechose,etplusj’attends,pirejemesentirai.Jeprendssurmoietdécidederéglerlaquestionunebonnefoispourtoutes.Je fais grincer les lames du parquet sous mon poids en m’avançant à la rencontre de ce qui

m’attend de l’autre côté de cette porte. Elle sera parfaitement dans son droit si elle refuse mesexcuses,etelleatouteslesraisonsdemebalancerunelampeàlatête.Etjesupporteraicelacommeunhommeparceque,quoiqu’elleexigeenréparation,jevaisleluidonner.Nevoulant pas attirer l’attentionde lamaisonnée sur ce qui va se passer,même si jemérite un

sermondeleurpart,jefrappelégèrement.—Entrez!répondunevoixàl’intérieur.Jemeféliciteégoïstementqu’ellesoitdugenrediscret.

Jepousselaported’unemaintremblante.Bonsang,cequejesuismalàl’aise.C’estunepremièrepourmoi.Enmêmetemps,jen’aijamaisétéobligéd’implorerlepardondeCassidyetj’aitoujourssuqu’ellemel’accorderaitsijerampais.MaisavecMia,jenesaispastropsurquelpieddanser.Endehorsde la lueurblanchede l’écrandevantMia, la chambre estplongéedans lapénombre.

Évidemment,puisquel’électricitéaétécoupéeaubeaumilieudelatempête.Lalumièreesttoutjustesuffisantepourquejevoiequelesdrapssonttoujoursfroissésetendésordre,et jemedemandesielle amouillé l’oreiller de ses larmes. Seigneur, rien que d’imaginer cette scène, j’en ai le cœurserré.Oui,jesuisunconnard,jesais.MaisonnesedouteraitderienenregardantMia.Assiseentailleurdanslefauteuildevantlebureau,ondiraituneétudiantequiessaiedésespérément

d’acheverunedissertationjusteavantd’allerencours.LeT-shirttropgrand,lejoggingetlechignonen bataille ne parviennent pas à faire oublier sa beauté. C’est comme ça, avec Mia. Elle estincroyablementbelle,sansavoirbesoindesedonnerlemoindremal.—Bonjour.Elle ne me regarde pas et je ne peux vraiment pas lui en vouloir. Elle continue de pianoter

énergiquement sur le clavier de son portable. C’est son outil de travail et c’est probablementuniquementpourcelaqu’ellenemel’apasbalancéàlafigurecettenuit.—Bonjour.Vousvousêteslevéedebonneheure,dis-je,estimantqu’uneévidenceestlameilleure

manièredelancerlaconversation.—Vousvoulezdirequejeveilletard,corrige-t-elle.Elleamanifestementpasséunenuitblanche.—Vousnevousêtespascouchée?Putain,c’estmafaute.Jesuisvraimentpirequ’unconnard.Jesuisleroidescons.—Ehbien,quandl’inspirationestlà,ilfautlasuivreourisquerdelaperdrepourtoujours.Lalumièreduportablen’estpascharitablepoursonvisagehabituellementangéliqueetjevoisles

cernesbleutéssoussesyeux.—Vousavezl’airfatigué,avancé-jeprudemment.Ellehausselessourcilssanspourautantsedétournerdesonécran.—Ahbon?Jenemesenspasfatiguée,moi,répond-elleavecunriresansenthousiasme.Etpuis

c’estunpeudifficilededormiravecunouraganquifaitragedevantvotrefenêtre.Bon,etavecça,jesuisleplussalauddetoutel’île.Unconnardetunsalaud,c’estunsacrémélange.—Merde.Vousdeviezêtreterrifiée.J’auraisdûresteravecvous.Ellefinitparseredresseretsedétournerdesonécranpourmeconsacrertoutesonattention.—Casey,franchement…nesoyezpastropsévèreenversvous-même.(Ellesourit,etjejurequela

chambre s’éclaire malgré les fenêtres condamnées et l’électricité coupée.) Je n’ai pas eu peur. Etavantquevousn’abordiez lesujet, jen’étaisabsolumentpascontrariéeparcequis’estpasséentrenoushier soirnonplus. Jen’aipaspudormir,parceque Jaysonétaitd’humeurbavardeetqu’il afalluquejemelibèrel’esprit.—Jayson?C’estsonpetitcopain?Lajalousiepointesonnez,alorsquejel’aibannieaprèsavoirfaillinoyer

unhommeàcaused’unefemme.

—Oh,jenevousenaijamaisparlé,fait-elleenlevantlatête,touteexcitée.(Ellesepencheenavantetcommenceàs’animer.)JaysonBass,c’estcommecelaques’appellemonpersonnageprincipal.Jevousjurequejenesuispasfolle.Lesvoixquej’entendsdansmatête,c’esttoutàfaitnormalpourlesécrivains.Jenemeprendspaspouruneprophétesse.Enfin,c’estcequeditmapsy,ajoute-t-elleavecunclind’œil.(Jen’aijamaisvuexpressionplusattendrissante.Elleposel’indexsurlafossettedesonmenton et poursuit.) Enfin, on ne peut pas totalement écarter cette hypothèse quand on a autant depersonnalitésqui gambadent là-dedans.Mmm. (Elle penche la tête sur le côté.) Peut-être qu’écrirenoussertàdissimuleruntroubledelapersonnalitémultipleetquenousréussissonsàfaireillusion.Elleéclated’unrirecristallinquimefaitfrissonner,tantilestdélicat.Cequiestvraimentbizarre,

étantdonnéqu’unrire,cen’estpasquelquechosedetangible.—Alorsvousêtesrestéeàécriretoutelanuit?demandé-je,puisqu’unsalauddoubléd’unconnard

nepeutqu’imaginerquec’estàcausedelui.—Oui!C’estmonpetitrefugedouillet.Elleseretourneverslebureauetseremetàécrire.MonDieu,maiscettefemmetapeàlavitessede

lalumière.—Votrepetitrefugepourvousprotégerdel’ouragan,hein?Etpasseulementdel’ouragan:dessalaudscommemoiaussi.SiMia pouvait entendre les voix des salauds dans sa tête, elle ne serait probablement pas aussi

calme.—Mon petit refuge est toujours là. Le temps qu’il fait dehors n’y change rien. Écrire est une

manièredem’évader.Vouscomprenezcequejeveuxdire?C’estl’équivalentdepêcherpourvous,j’imagine.Ehbien,elleaviséjustesurcecoup-là.Maisc’estsûrementàcausedemoiqu’elleaeubesoinde

s’évader.Bienquejesoisincapablederevenirenarrièreettouteffacer,mêmelesbonsmoments,jesaisqu’ilfautquejetrouveunmoyenderéparerl’irréparable.—Ilfautquejem’excusepourhiersoir,bafouillé-jeavantdeperdretoutmoncourage.Ellecontinuedefixersonécran,imperturbable.—Vousdevezouvousvoulez?—Lesdeux.Ellesepencheunpeupourrelirecequ’elleaécrit,maiselleréussitquandmêmeàmerépondre.—N’enfaitesrien.Jevousassure.Celam’aénormémentinspirée.D’aprèsl’intonation,ilestdifficiledediresielleestsincèreoupas.—Vouspouvezmeregarder,s’ilvousplaît?—Jelepeux,etjevaislefaire,répond-elleavecunsourireeffronté.Laissez-moisimplementle

temps de sauvegarder ceci, dit-elle en déplaçant sa souris et en cliquant. Alors ? demande-t-ellefinalementaprèsavoirreferméleportable.Jelaregardedanslesyeux,nonseulementpourvoircommentelleréagitàcequejeluidis,mais

aussiparcequ’unhommedoitsecomporterainsiquandilavoueseserreurs.—Jeneveuxpasquevousmedétestiez.Elleposelesbrassurlesaccoudoirsetcroiselesdoigts.— Mais pourquoi voudriez-vous que je vous déteste ? Vous n’avez pas entendu ? Cela m’a

beaucoupinspirée.Jedevraisvousremercier.Là,jenem’yattendaispas.—Inspirée?J’avouequejesuisperplexe.Jenemesuismêmepasdonnébeaucoupdemal.Cettepetitepartiede

jambesenl’airaétéagréable,maispassensationnelle.Sij’aiuneautreoccasion,jesuissûrqu’elles’ensouviendra.Maisoui,jeveuxremettrelecouvert.Queçafinissedanssonbouquinoupas.— Oh, incontestablement. (Elle penche la tête sur le côté et me scrute un instant avant de

poursuivre.)Comme vous ne voyezmanifestement pas de quoi je parle, je vais vous proposer unmarché. Je suis prête à vous raconter tout ce que j’ai écrit, si vousme promettez de ne pas vousfâcher.Jen’aipasvraimentledroitdemefâcher,maiscommejel’aiditplustôt,jeveuxbienluiaccorder

toutcequ’elledemandesiçapeutlaréconforter.Etpuisjedoisavouerquejesuiscurieux.—D’accord.— Non, vous devez dire que vous le promettez, reprend-elle en pointant vers moi un index

impérieuxquimontrequ’elleneplaisantepas. (J’endéduisque jedoisprononcercesmotsàhautevoix pour la satisfaire. Jem’apprête à le faire, quand ellem’interrompt.)Avant que vous parliez,sachezquejeprendslespromessestrèsausérieux.Alors,sivousditesquevouslepromettez,ilfautquevoussoyezsincère.Jesoupire,cequiluifaithausserlessourcils,etfinisparmurmurer:—D’accord.(Jem’assoissurlelitfaceàelle,poselescoudessurlesgenouxetprononcelesmots

qu’elleademandés.Passeulementparcequ’elleveutlesentendre,maisaussiparcequejelespense.)Jevousprometsdenepasmefâcher.Le sourire qui se peint sur ce ravissant visageme donne envie de lui promettre tout ce qu’elle

désire.—Bon.Alors,Jaysonvientdedécouvrirquelafemmequ’ilaime,JannellKain,nel’aimeplus.Et

lasituationestunpeucompliquéeparcequeJanellestamoureused’unautrehomme.Waouh ! Elle est vraiment en train d’écrirema vie. Jem’attendais à ce qu’elleme parle d’une

extraordinairepartiedejambesenl’airouqu’ellemeracontequeletypes’estcomportéensalaud.Maisquemoncœurbriséserved’inspiration, jenesaispastropquoienpenser.Maisbon,commeMias’esttoujoursmontréetrèsperspicaceencequimeconcerne,jesuiscurieuxdevoircommenttoutcelasedénouedanscettehistoirequ’ellea«inventée».Parcequedanscegenred’histoire,ilyatoujoursunproblèmesuividesasolution,non?—Etqu’est-cequefaitJayson,alors?questionné-je.—Mmm…fait-elleensemordantlalèvre.Ehbien…euh…ilcoucheavecuneautrefemme.Bon sang. C’est ce qui s’appelle rouvrir des blessures. Les miennes ne sont pas seulement

ouvertes : le sangcoule. Jenesuispas fâché.Vraimentpas. J’aientièrementméritécecoupque jeviensdeprendredanslesdents.—Pourquoiilaagicommeça?C’est là que je vais pouvoir savoir ce que penseMia de ce que je lui ai fait. Ce sera peut-être

pénibleàentendre,maisjedoissavoir.Bonsang,jepréféreraisquandmêmequ’ellenemeregardepasaveccetaircompatissant.—Parce qu’il est blessé et frustré, et qu’il a simplement besoin d’éprouver autre chose que du

chagrin.L’entendredirecelaàhautevoix,c’estcommesielleavaitrépanduduselsurmaplaie.Celame

brûleatrocement,parcequec’estvrai.Etàtraversmapeine,jenepeuxm’empêcherd’éprouverdel’admirationpourMia.Nonseulementcettefemmeécritdeslivressurlesgens,maiselleliteneuxcommedansunlivreouvert.Maispuisquelavérité,c’estlavérité,jelâchetout.Mêmesic’estbrutal.—Alors,ilsesertd’uneautrefemmepouroublierlapremière?Quelenfoiré…—Jenevoispasçacommeça,etlafemmequiaétésonexutoirenonplus.«Exutoire.»C’estintéressantqu’elleaitchoisiceterme.Jemedemandesic’estcommeçaqu’elle

s’estvuequandelles’estregardéedanslemiroircematin.Parcequeçanemeconvientpasdutout.—Ahbon?Etelles’appellecomment,cettefemme?—Maria,répond-elled’unepetitevoixaprèsunsilence.Maria…Mia…Non,celanepeutpasêtreunecoïncidence.—Mariasaitqu’elleaétéutiliséeetçaneluifaitrien?Sonregardsevoileet leboutdesonnezrosit.Merde.Elleadumalàseretenirdepleurer.Elle

déglutit,puiselleseforceàsourireavantderépondre.—Biensûr.Elle,elleadel’affectionpourlui.Etpuis…(Ellebatdescilscommepourchasserdes

larmes.)…lesamis,c’estfaitpourquoi?Foutaises. Je mériterais des coups de pied au cul. N’importe quel connard qui fait pleurer

quelqu’un d’aussi vertueux queMia lemérite. Elle a un cœur d’or, elle n’est que bonté et elle nemérite pas qu’on la fasse pleurer. Jamais. Personne ne peutme convaincre du contraire. Pourtant,c’est ce que j’ai fait. Je l’ai sautée enméprisant totalement ses sentiments. Quel genre d’ami agitcommeça?Etpuis,jen’aijamaisvuMiacommesimplementuneamie.Elleestquelquechosequejen’arrivepasàexpliquer.Elleest…unepossibilité.Jemelaisseglisserdulitettombeàgenouxdevantelle.—Mia,quandvousmeregardez,qu’est-cequevousvoyez?Il lui faut un moment pour répondre. Un moment durant lequel elle a l’air de me détailler

entièrementavantdeterminerparmesyeux.Etquandelleyplongelessiens,c’estcommesielleytrouvaitlaréponse.—JevoisJayson…leproduitdemonimagination,riendeplus.Jenesaispaspourquoi,maisçanemeplaîtpas.—Voussavez,quandvousêtesarrivéeendisantquevousvouliezmequestionnerpourlelivreque

vous étiez en train d’écrire, j’ai cru que vous étiez en quête de détails pratiques sur la pêche et lequotidiend’unpêcheurdehomards.Jenepensaispasquevousalliezvousmettreàécriresurmavie.—Honnêtement, cen’était pasmon intention.MaisCasey, vous êtes l’archétypeduhérosviril :

vousavezdesdéfautstoutenétantparfait;vousêtespleind’assurance,sansêtreeffronté;passionnépar ce que vous faites ; doué de force et de volonté ; intelligent sans être prétentieux ; vous avezl’allure d’un mauvais garçon avec le cœur d’un gentil garçon ; vous êtes dominateur sans êtreagressif;etvousêtesuntrèsbonamant.Cettedernièreréflexionfait tressaillirmabitedansmonjean.Hum.Jen’aipaslecouragedelui

direqu’unhérosvirilneseserviraitjamaisd’unefemmepourenoublieruneautre.Miadoitvoirdansmonsilencepensifquejemesensinsulté,carellereprend:—Jevaisjetertoutlemanuscrit.Jevouslepromets.Tantpispourlecontrat.Jeneveuxpasvous

offenserouvousdonnerl’impressionquevotrevieaétéétaléeaugrandjour.Ce n’est pas du tout ce que je désire.À vrai dire, je suis honoré qu’ellem’ait estimé digne de

devenirlesujetdesonroman.Etm’enfairelehéros?Ehbien,jenemesenspastrèshéroïqueencemoment.Maisquoiqu’ilensoit,c’estcommeçaqu’ellemevoit.Peut-êtrequ’elleestlaseule.Etjetiensàcequeçacontinue.Puisquej’aipuavoirunaperçudesonespritmerveilleusementcréatif,jemedemandesilesréponsessontdissimuléesquelquepartdanscegénie.—Non,vousnedevezpaslejeter.Maispeut-êtrequevouspouvezm’aiderpourquelquechose.Elledéglutitetcelaattiremonattentionsursoncouquej’aienvied’embrasser.—Cequevousvoudrez,répond-elledoucement.—Dites-moicequiarriveàJayson.—Vouslesavezbien,Casey…VousêtesJayson.—Non,pasça.Jeveuxdire,cequiluiarriveàlafindulivre?—Ilpartdanslesoleilcouchant,ilvitheureuxetilabeaucoupd’enfants,évidemment.—Avecqui?Unpauvresourirepassesurseslèvresetsesjouesrosissent.—Devinez.—Maria?—Oui.Ilesttoutcequ’elleatoujoursdésirésansjamaissavoircequ’ellecherchait.—Jenevoispascommentc’estpossibleaprèscequ’illuiafait.Peut-êtrequevousdevriezjustele

tuer.—C’estimpossible,dit-elleenriant.—Pourquoidonc?Ellecontinuedesourireetilpassedanssonregardquelquechosequimefaittressaillir.— Parce que, à partir du moment où une femme écrivain tombe amoureuse de vous, vous ne

pouvezpasmourir,idiot.Jehausselessourcils.—Vousêtesamoureusedemoi?Euh,jeveuxdiredeJayson?corrigé-je.—Jesuisamoureusedetousmespersonnages.—Mia…Ellemecoupeprécipitamment.—Casey,neflippezpas,jevousenprie.Jesuisuneromantique.Cen’estpasgrave,jevousassure.

Celam’arriveconstamment–avecmespersonnagesfictifs,pasleshommes,etjefinistoujoursparm’enremettre.Jevouslepromets.Vousn’avezpasàredouterquej’aierêvéunscénariodébridéetquejeveuillequ’ildevienneréalité.Ets’ilestexactquelafrontièreesttrèsminceentrelegénieetlafolie, etquenous sommesenpermanencesur le fildu rasoir, jene suis jamais tombéeducôtédel’illusion.J’aiparfaitementconsciencequejenesuispasMariaet jesaispertinemmentcequis’estvraimentpassécettenuit.Vousaviezbesoindecoucheravecune femmeet j’ai étéheureused’être

cettepersonne.Etpuiscelaafaitavancermonintrigueetj’aieuquelquesorgasmesphénoménauxparlamêmeoccasion.Alors, tout va bien. Personne n’en veut à personne. (Elle se tait et reprend sonsouffleavantdedemander:)N’est-cepas?Sansqu’elles’yattende,jelaprendsparlatailleetl’attirecontremoi,l’obligeantàdécroiserles

jambesetà lespasserautourdemeshanches.Exactementcommeje ledésirais.Puis je l’embrasse.Elle m’a dit qu’elle était capable de connaître les sentiments d’un homme à la manière dont ilembrasse,etc’estcommeçaquejeluiaifaitcomprendrehiersoirquej’avaisenviedebaiser.Cettefois,jel’embrassepourluifairecomprendreautrechose.Ses lèvres sont si douces, si dociles sous lesmiennes, et lorsque j’approfondis ce baiser, elle y

répond.Songémissementdescendtoutdroitjusqu’àmabite,puisellepasselesbrasautourdemoncouennoyantsesdoigtsdansmescheveux.Ellesecambreetappuiesurmapoitrinesachattedontjesens immédiatement lachaleurà traversmachemise.Cen’estpasunexutoire.Etc’estplusqu’unepossibilité.Miaest…tout.Je me dégage légèrement pour lui laisser le temps de reprendre son souffle. Elle continue de

m’enlaceretappuiesonfrontsurlemien.—Waouh,chuchote-t-elle.Jesouris:monmessageaétéreçu.—Vousn’avezpaslemaldemer,n’est-cepas?demandé-jealorsquejesaistrèsbienquenon.Ellesecoueimperceptiblementlatêteensemordillantlalèvre.—Casey,soyezsûrdevous.Sivouscherchezseulementàl’oublier…—Jesuissûr,assuré-je,refusantqu’ellesefassedetellesidées.Quelhommenevoudraitpasvivre

heureux?Accordez-moilebonheur,MiaMorgan.—Vousavezfaitlamoitiéduchemin,répond-elleenmegratifiantd’unchasteetdélicatbaiser.—Ahbon?Elleéclatederireetmoncœurs’envolecommeunoiseau,unavion,uneballe,commes’ilpouvait

sauter au-dessus des gratte-ciel. Je vais être son héros incarné, même si c’est plutôt elle qui m’asauvé.Maisjevaismebattrepourelleparcequejesaisqu’elleenferaitautant.Nouspouvonsdevenirun

fabuleuxduo.Peuimporte,dumomentquenouspouvonsluttercontren’importequiensemble.ElleenWonderwomanavecsonlassodoréetmoienSupermanavecunecaperougeflottantdanslevent.Non,jenemefaispasd’illusion.EllevaquitterStonington,toutcommel’afaitCassidy.Jelesais.

Maiscettefois,jenevaispaslaisserledestindécider.Cettefois,jevaismeremueretfairetoutpourconvaincreMiaderester.

17

Shaw

Onparletoujoursducalmeavantlatempête,maispersonnenesoulignejamaiscombienlesilencequisuitpeutêtreassourdissant.Cassidyetmoisommesbienà l’abridansnotrechambre,maisau-delàdecesquatremursnousguettelaréalité.Jel’aiprévenue.Laseulemanièredesavoircequ’ilenest,c’estd’ouvrirlaporteetdesortirvoir.Ensemble.Juste après avoir pris une douche. Ensemble. Pour ce faire, je suis obligé d’aller chercher

discrètement des vêtements dans ma chambre, mais nous réussissons notre coup sans nous faireprendre. Jeneveuxplusque cequenouspartageons continued’être secret,mais je ne sais pas cequ’elleenpense.Jen’aipasl’intentiond’allerlecriersurlestoitsnonplus.D’autantquejen’enaimêmepasparléàCassidy,maisj’ail’intentiondelefairetrèsrapidement.Deluienparler,pasdelecriersurlestoits.Ceseraitexcessif.Alorsqu’elle terminedenouerses lacets,Cassidy lève lesyeuxversmoietmefaitungracieux

sourire.MonDieu,elleréussitàêtresexyenmettantsimplementdesbaskets.Celafait,elleselèveetroulesonjoggingjusqu’auxgenoux,dévoilantsesmolletsmusclés.Jelui

demanderaisbiensielleapenséàapportersestalonsaiguilles,maiscelarisqueraitdemedétournerdelatâchequim’attend.—Alors,prêtàallerconstaterlesdégâts?demande-t-elle,lesmainssurleshanches.Elleparlesûrementde la tempête,maisenréalité, laquestionpourraitaussis’appliqueràcequi

s’est passé entre nous la nuit dernière. Quand on vient de frôler la mort et d’avoir une prise deconscienceémotionnellealorsqu’ons’esttoujourstarguédenejamaisrienéprouver,ilyadequoiseposerdesquestions.Celavaêtretrèscompliqué.Surtoutsi,pourelle,c’esttoujoursuniquementdusexesanslendemain,exactementcommeceladevaitêtredepuisledébut.Je prends unmoment pour admirer son épaule dénudée, grâce au sweat à col enV trop grand

qu’elleachoisideporter,jeluidonneuneréponsequipeuts’appliquerauxdeuxsituations:—Commentpeut-onêtreprêtpourunechosepareille?Je ne le suis pas, c’est sûr,mais n’ayant jamais reculé devant aucundéfi, je sais que je vaisme

lancer–danslesdeuxcas.—C’estvrai,répond-elle,debonnehumeurmalgréletravailquinousattend.Alors,allons-y.

J’ouvrelaporteetm’effacepourlalaisserpasser,carc’estcequ’ungentlemandoitfairedevantunedame.Quecelle-cisacheoupasqu’elleestsienne.Maisàpeineavons-nousmisunpieddanslecouloirquenoustombonsnezànezsurCaseyetMia,côteàcôteexactementcommenous.Iln’yapas lemoindreéchangedesalutationsnid’ailleurs lemoindremot,mais je remarque le

regardentreCassidyetCasey. Justeavantqu’ellemeprenne lamainet enlacemesdoigtsavec lessiens.Celamesurprend,maisDieumerci,pasassezpourmefairefaireunebêtise.Enrevanche,jesouriscommeunidiot,parceque,oui,c’estmoiqu’elleachoisietquelapositiondemâledominantm’estassurée.C’estalorsqueCaseyprendà son tour lamaindeMia.Ah.Deuxmâlesdominants sur lemême

territoire ? Eh bien, voilà un concept nouveau et intéressant. Un autre étant le tendre sourirequ’échangentCaseyetCassidy,suiviparlelongregardévaluateurdontilmegratifie,concluparunhochementdetêterespectueux.Jecomprendsparfaitementlemessage:j’aiintérêtàsacrémentbienm’occuperd’elle.Etc’estjustementcequejecomptefaire.C’est amusant la quantité d’informationsqui peuvent être échangées entre quatre personnes sans

qu’unseulmotsoitprononcé.MaisilesttoutàfaitclairqueCaseyestavecMia,queCassidyestavecmoietqueCaseyetCassidysontsincèrementheureuxdelasituation.Toutestdoncpourlemieux.Casey etMia étant les plus proches de l’escalier, c’est cette dernière qui s’y dirige la première,

Caseyàsescôtés.Cassidyetmoilessuivonsetnousdescendonsdeuxpardeux,commelescouplesd’animaux débarquant de l’arche de Noé après le Déluge. C’est une image de circonstance, étantdonnélespéripétiesqueMèreNaturenousafaitendurerpendantlanuit.Nous entrons l’un après l’autre dans la cuisine où les parents sont déjà en train de s’affairer et

quatrepairesd’yeuxsetournentverslesnouveauxcouples.Etlàencore,pasunmot.Abby,Thomas,DuffetAnnavoienttrèsbiencequ’ilsontdevanteuxetremarquentnotammentavecintérêtlesmainsquisetiennent.Jenotementalementqu’ilvafalloirfairecelapartoutoùj’iraiavecCassidyafinquetoutlemondesachequ’elleestmapropriété.Le visage d’Abby s’éclaire d’un sourire approbateur devant la tournure qu’ont prise les

événements. Pour Casey et moi. Je ne remarque pas vraiment ce que les autres pensent, carl’approbationd’Abbyesttoutcequicomptepourmoi.Enfin,d’AbbyetdeDuff,évidemment.Ilmeladonneàsamanière.Iltapebruyammentdanssesmainsetromptfinalementlesilence.—Bon,alors,voyonscequ’ilenest.NousnousécartonspendantqueDuffpousselefauteuildesonépouseverslaporte.Unefoistout

lemondedevant,Cassidymeregardeetsoupire,pasvraimentpréparéeàconstaterlesdégâtslaisséspar la tempête dans sa ville natale. Je presse sa main dans la mienne, et sur ce, nous fermons lamarche.Le soleil matinal éclatant contraste avec la maison plongée dans l’obscurité à cause des volets

fermésetde l’électricitécoupée,et lesmouettespiaillentcomme tous les jours.Maispour leshuitpersonnesqui se tiennent côte à côte sur lavéranda, chacune totalement sous le choc causépar cequ’ellesdécouvrent,ilestévidentquec’esttoutsaufunejournéeordinaireàStonington.Sa situation sur le flanc de la colline, ainsi que ses robustes fondations, ont permis de sauver

WhalenHouse.D’autresmaisonsn’ontpaseucettechance.QuandonregardeversMainStreet,onadumalàdétermineroùcommencetellepropriétéetoùfinittelleautre.Lesruessontjonchéesdetasd’algues,debranchesd’arbres,debardeauxarrachésauxtoitsetauxmurs,dedétritus,mais,cequiestplussurprenant,ilyaaussidesarbresdéracinésquisesontabattussurdesbâtiments,desmaisons

dévastéesdontlecontenus’estrépandudanslesruesouflottedansleport.LapuissancedeMèreNatureforcelerespect.Lamanièredontellechoisitquellesfamillesperdent

tout, lesquelles subissent des dégâtsmineurs et lesquelles sont épargnées est une véritable énigme.NousnesavonstoujourspascequeWhalenHouseasubicommedommages,carnousnesommespasallésplusloinpourinspecterlesalentours,maiscelanepeutenaucuncasêtreaussigrave.Quelques-uns des habitants sont déjà sortis et s’affairent. Des personnes âgées secouent la tête,

incrédules,tandisquedesmèresserrentleursenfantscontreellesoulesaidentàenjamberdestasdedécombres.L’instinctprend ledessuset je lâche lamaindeCassidypouralleraidercesgens, toutcommeCaseyquiestdéjàenchemin.Maisjem’arrêtetoutnetenentendantreniflerderrièremoi.Jejetteuncoupd’œilpar-dessusmonépauleetjemefigeenvoyantunelarmeroulersurlajoue

d’AnnaWhalen.Lamère demapetite copine a le cœur brisé pour sa ville. Je suis effondré. Il nes’agitpasd’unenégociationquiacapotéoud’ungroscontratmanqué,maisd’uneréellecatastrophe.C’estvraimenthorrible.—Toutvas’arranger,machérie,tuverras,ditDuffenposantunemainrassurantesurl’épaulede

safemme.

18

Cassidy

LatempêteAylaaétéunesacréegarce.Enatteignantlacatégorie4avantdetoucherlescôtes,elleadéferlésurStoningtonendévastanttout,nelaissantquasimentplusquedesconfettisdanssonsillage:maisonsréduitesenmiettes,vieschambouléesetruinées.Ettoutcelasanssesoucierlemoinsdumondedeceuxquirestentpourramasserlesdébris.Cependant,leshabitantsdeStoningtonnes’apitoientpassurleursort.Cesontdesgenscoriaces,

opiniâtresetbiendéterminésàcontinuerleurvieetsauvegardercequienreste.Stoningtonvas’ensortir.Nousallonstousnousensortir.Danslesheuresquisuiventlafindelatempête,nouspassonsparlescinqphasesdudeuil:déni,

colère,négociation,dépressionetacceptation.C’estdans ladernièrequenousnousmontronssousnotremeilleurjour.Lenettoyageadéjàcommencéet,parmiracle,l’électricitéestrevenue.Espoireténergie sont les fondations sur lesquelles cette île a étébâtie, et aucunouragann’a lepouvoird’ychangerquoiquecesoit.Lesviesontétéépargnées.Aucunevictimen’estàdéplorer,etc’estsurtoutl’orgueildespêcheurs

quiaétéblessé.Ilsontbeauêtretousrivaux,ilsseserrentlescoudespourlebiendelacommunauté.Jesuisfièred’enfairepartie.BienquejesoisrevenueàStoningtonentraînantlespiedsetenmaugréant,jemerendscompteque

jen’ensuisjamaispartie.Unequasi-laissequ’onm’amiseàlanaissancem’ytientattachéeet,mêmesij’aitirédessusaussiloinquej’aipu–jusqu’àl’autreboutdupays,enfait–,elleesttoujoursreliéeàStonington.Jelèvelenezdutasdedécombresquejesuisentraindetrieretj’essuiemonfrontruisselantde

sueur.Ilfaitchauddehors,l’airétouffantestchargéd’humiditéetlesoleiltapetellementquec’estàse demander ce qui lui prend.Le ciel d’unbleu azur est strié deminces traînées denuagesblancscommesilemondesetrouvaitdansunécrindemarbrebleu.Derrièremoirésonneungrognementguttural,dugenrequ’unhabituédessallesdegymferaiten

soulevantunebarrechargéedetroisfoissonpoids.ShawetCaseyétantdanscecoin-là,jemetournepour voir s’ils ne sont pas en train de se sauter à la gorge. Imaginez ma surprise quand je lesapperçoissouleverensemblelesrestesdutoitdelacapitainerieduport.

VoilàqueShawMatthews,unhommequines’estjamaissouciédepersonned’autrequelui-même,participeàl’effortgénéral.Etmonamilepluscher,l’hommequiluiabalancéunedroiteentraîtrehier,esten trainde luidonneruncoupdemain.Oui, lescatastrophesnaturellessontdévastatrices,maisellessemblenttoujoursréunirdesgensqu’onn’auraitjamaisimaginésensemble.Jesuisfièredemesdeuxhommes.Àcôtédemoi,Mias’efforced’extirperunmicro-ondesd’unénormetasdeboue.Elleymettoute

sonénergieetjepressenslerésultatavantmêmequ’elleperdel’équilibreettombelesfessesdanslaboue.Maisjenemeréjouispasdesonmalheur.Simesbonshommessontassezgrandspourenterrerlahachedeguerre,j’ensuiscapableaussi.Appuyée sur le micro-ondes en question, je tends la main à Mia. Elle lève les yeux, d’abord

interloquée,puisellesourit.JecomprendsaisémentcequeCaseyvoitenelle.Elleestvraimentjoliedanslegenresimpleetdiscret,charmantecommetoutettotalementlegenredeCasey.Sanscompterqu’elleestauteurderomanssentimentaux,doncjesuissûrequ’ilsauras’yprendre.Miaprendmamainetunetrêveesttacitementconclueentrenousalorsquejel’aideàserelever.—Alors,vousetCasey…mmm?fais-je.(Lesourirequiéclairesonvisageéclipselesoleilqui

illumine notre ciel demarbre.Oh, oui, elle est folle de lui. Et elle baisse les yeux comme si ellevoulaitque jenevoiepasàquelpoint.Etcommeiln’enestpasquestion, je lui relève lementon.)C’esttrèsbien,luiassuré-je.Franchement.Ilvousadorevraiment.—Vouscroyez?demandeMiaenseretournantverslui.—Oh,oui,dis-jeenriant.Faites-moiconfiance,personneneleconnaîtmieuxquemoi.C’estmon

meilleurami,etcelanechangerajamais,maisjesuisvraimentauxangespourvous.Elleentreprenddetenterd’essuyerlabouedesonpantalon.—Merci.Celaveutdirebeaucoup,venantdevous.Jedécidedel’aiderenluiessuyantlajoue.SasituationavecCaseyestencoretoutenouvelleetje

suis sûre qu’elle ne voudrait pas qu’il la voie dans un état pareil. Les filles doivent se serrer lescoudes dans ce genre de circonstances, après tout.Àmoins d’être une garce, et auquel cas, on enrajouteunpeu.Maisjenesuispasd’humeuràjouerlesméchantes.—Vousvoulezunconseil?luiproposé-je.—Oh,certainement!s’empresse-t-ellederépondre.—Nelemenezpasenbateau.CaseyestStonington.C’estchezlui,ici,etilneconnaîtriend’autre,

luiexpliqué-jetoutenenlevantlabouequimaculesescheveux.Jenesaispastropcommentpourraitfonctionnerunerelationàdistanceentrevousdeux,maissivousvenezsouventetquevousluirestezfidèle,jevousprometsqu’illeseraaussi.—Jevousprometsdeprendresoindelui,Cassidy.Aussilongtempsqu’ilmelaisserafaire.—Vousavezintérêt,plaisanté-jeensouriant.Oh,ets’ilfaitdesbêtises,refusezdeluiparler.Ilne

supportepas.Çamarcheàtouslescoups,ajouté-jeavecunclind’œilcomplice.Aumêmeinstant,mamèrem’appelledepuislamaison.—Cass,vadireàtonpèrequesondînerestprêt.Lesautresaussi,vouspouvezvenirvousremplir

lapanse.—OK,maman!Oùilest,d’ailleurs?demandé-jeenregardantvainementautourdemoi.—Làoùilvatoujoursquandilessaiedesedéfiler.—Jevois!

Je sais qu’elle exagère, car elle est comme cela. En plus, mon père ne fuit jamais sesresponsabilités.Ildisparaîtpouréchapperàsesremontrances,etc’est toujourspouralleraumêmeendroit:laplage.Avantquej’aieeuletempsdedirequoiquecesoit,Miaprendlesdevants:—Allez-y.Jevaism’occuperdesautres.C’est legenrede fillequiprend leschosesenmain.J’aimebien.Ellesauras’occuperdeCasey,

vraiment.—Nevousinquiétezpaspourlaboue.Lesgarsd’iciaimentbienqu’unefemmen’aitpaspeurde

sesalirunpeulesmains,luiconfiai-je.Etj’entreprendsdefairerentrermonpèreaubercailenl’appâtantaveclespetitsplatsmitonnéspar

maman.

Shaw

Il y a quelques semaines, quelqu’un quim’aurait vume salir lesmains avec les habitants d’unvillagedepêcheursn’enauraitpascrusesyeux.Nomd’unchien,jen’enseraispasrevenunonplus.Je n’en reviens toujours pas,maisme voilà en train de prêtermain-forte àmes semblables. Et lemieux?C’estqueje lefais justeàcôtédutypequim’enacolléunepasplustardqu’hier.Et jeneveuxmêmepasessayerdemevengerdecetteinvolontairetentatived’homicide.Enrevanche,cequejevoudraisbien,c’estunverredethéglacéetmanana.— Tous ensemble, maintenant, les gars ! aboie Thomas une fois que quatre types et moi nous

sommesmisenpositionpoursouleverletoitdelacapitainerie.Àtrois,nousdonnonstoutcequenousavonsetnousparvenonsàleredressersuffisammentpour

queCaseypuissefairepasserdessousdescâblesenacierdestinésàêtrefixésàunegrue,laquellesechargeradelehisser.CettesaloperiepèsedestonnesettousmesmusclessedonnentpourqueCaseypuisse accomplir sa tâche sans danger.Malheureusement, de l’autre côté, quelqu’un glisse et perdl’équilibre.—Holà!Holà!crieThomasquis’élancepourprendresaplaceavantquel’ouraganAylafassesa

premièrevictime,sonproprefils.Sortez-ledelà!Caseyestjustedevantmoietletoitquipèsesursesjambesneluilaissepaslemoindreespacepour

bouger.Ilrestedemarbre,alorsquejesuissûrqu’ildoitmentalementdiresesprières.—Unpeuplusd’espace!crié-je.Avecunderniersursautd’énergie,jesoulèveencoredetoutesmesforcesdubrasgauchetouten

tendant l’autre pour que Casey le saisisse. Samain gantée se referme sur lamienne et il lève degrands yeux vers moi, le front plissé de détermination. Un grognement féroce s’échappe de mapoitrine,medonnantuneforcequejen’auraisjamaiscruposséder,etjetiresursonbras.Unesecondeplustard,letoits’écraseausolenfaisantvolertoutuntasdedébris.Jejetteunbref

coupd’œilsurmadroiteetjevoisCaseyallongé,sainetsauf,surlecimentauprèsdemoi,quifixeleciel,haletant.

Thomasvientvoircomments’enestsortisonfils.—Çava,mongars?demande-t-il.Casey hoche la tête et Thomas m’assène une grande claque dans le dos assortie d’un « bon

boulot»,puisilnousdonnelapermissiond’allerfaireunepausependantqu’ilretourneharanguerseshommes.Caseyetmoiéchangeonsunregardcommesisonpèreavaitperdula tête,puisnouséclatonsde

rire.Puisjerespirecalmement,letempsdemeremettre,etjetendsdenouveaulamainàCasey.Ilyadanssonregardlevéversmoiquelquechosequimefaitgonflerlecœurdefierté.Sansun

mot,nousvenonsdeconclureunetrêvequiaccompagneuneconfiancenouvelle.Illasaisitetsehissedebout.—Merci,monpote,dit-ilens’époussetantd’ungeste instinctifquinechangepasgrand-choseà

sonétat.—Vousenavezfaitautantpourmoi,luirappelé-je.Ilglousse.C’estunpeuunemanièred’avouerparlamêmeoccasionquec’estàcausedeluique

j’aifailliêtreenvoyéadpatres,maisjenerelèvepas.—Onestquittesalors.—Oui,sûrement,dis-je,unpeumalàl’aise,carilyaencoreunénormedétailàrégler.Aufait,

concernantCassidy…commencé-je.Avantquej’aiepupoursuivre,ilmeregardedroitdanslesyeuxetdemande:—Vousl’aimez?Méthodiquement, il retire son gant en tirant un doigt après l’autre.Bon sang, voilà qu’on va se

lancerdansledeuxièmeround.—Je…euh…J’esquive,pasparcequej’aipeurdelui,maisparcequejenesuispasentièrementsûrquejeveux

aborderlesujettantquejen’aipasparléavecCassidydessentimentsquej’éprouve.—Bon,sivousvoulezpasqu’onenparle,jerespecteça,dit-ilenglissantlepremiergantsousson

aisselleetens’attaquantaudeuxième.Maissivousl’aimez,faudravousbattrepourelle.Soyezpasunidiotcommemoienlalaissantpartir.Vouspigez?(J’opine,conscientqu’illuifautunsacréaplombpouradmettrequ’ilacommisuneerreur.)PourcequiestdeCassidyetmoi,continue-t-il,vousfaitespasdebile.Çaavaitrienàvoirdutoutavecvous.Enfindecompte,c’estCassidyquiétaitbeaucouptroppourmoi.(Iléclatederiremalgréluietsecouelatête.)Bonsang,cequ’elleesttêtue.Elleadorese chamailler.C’était clairement elle qui portait la culotte dans notre relation.Moi, ilme faut unefemmeunpeuplusdocile.Unequiestdisposéeàêtreunegentillepetitefemmesijelatraitecommeuneprincesse.Vousvoyez?J’éclatederireàmontour.—EtMiaestcommeçaavecvous?Ilprendlesdeuxgantsdansunemainetposelepoingsurlahancheenregardantverslamaison.Je

meretourneetvoisMiaquidescendversnousd’unpasguilleret.—Peut-être,répondCaseyavecunsouriregourmand.—Ehbien,c’estparfait,alors,dis-je,m’apercevantquejesuisenquelquesorteheureuxqu’ilse

satisfassedelasituation.

Cassidy

LaplagedeStoningtonn’aabsolumentriendecommunaveccellesdeSanDiego.D’abordparcequ’elles sont innombrables à San Diego, alors qu’il n’y en a qu’une seule ici. Les plages deCaliforniesontgénéralementplatesetsablonneuses,celledeStoningtonestprincipalementcomposéedegrosrochers.Cequiluipermetderemporterlapalme,c’estsabeauténaturelleetpure,sanslesmilliersdevisiteursquotidienset leursdéchets.Saufaujourd’hui,cependant.Àcaused’Ayla, ilyadesdébrispartout.Celadit, les algueset lebois flotté fontun spectaclebienplusagréableque lesordures.Jetrouvemonpèreassissursonrocherpréférédonnantsurlacrique,oùdesvaguesétonnamment

modesteslèchentlapierre.Jesaisavantd’arriveràsahauteurqu’ilaunepoignéedegaletsplatsaussilissesquesesmainssontrêches.Monpèreestunmanueldepuistoujours,unpeuabruptàl’extérieur,maisaussidouxqu’ungaletàl’intérieur,etilprendtoujoursletempsd’apprécierlesmerveillesdelanature,petitesetgrandes.Jemesuissouventdemandécequiluipasseparlatêtequandilvients’asseoiricitoutseul,maisje

nepeuxpasmepermettredeleluidemander.Ilaledroitdeméditercommeilveut,contrairementàcequepeutpensersonépouse.Sansunmot,jem’assoisàcôtédeluisurlerocher,nevoulantpasdérangersatranquillitéalors

quelavilleoùilvitestàcepointsensdessusdessous.Ilnesetournepasversmoi,nechangepasd’expression.Ilsecontentedetendrelamainetdemeproposerundesesgalets,quejeprendssanshésiter.Jemerappelleavoirétéenvoyéeiciparmamèremaintesetmaintesfoisétantenfantpourvenir

cherchermonpère,maisaussiavoirprétextéqu’elle ledemandait, simplementpourpouvoir resteraveclui.Ilatoujoursaimém’appelersonpetitcanard:ils’amusaitparfoisàmarcherenzigzagpourmevoirlesuivrepasàpas,cequejefaisaissansfaillir.J’adoremamère,vraiment,maisjesuisunefille à sonpapa. Il fallait souventqu’il joued’astucepourpouvoir sortir de lamaison sansque jem’élancederrièrelui.Jepiquaisunecolèrequandjem’enapercevaisenfinetjepartaisquandmêmeàsarecherche.Àvraidire,ilyavaitdesfoisoùjerestaisassisetoutelajournéesurlequaiàattendrequ’ilrentredelapêche.C’estàcausedemonpèrequej’adorelesport.Assisesursesgenouxdanssonfauteuilpréféré,je

l’écoutaism’expliquerlefootballcommesitoutsavoirsurlesujetpouvaitvousdonnerunavantageen cas de catastrophe nucléaire. Et j’avaismêmemon tabouret àmoi auMaggie, l’unique pub deStonington.Lesoleilscintillesursabarbe,faisantressortirl’orangedorédesesoriginesirlandaises.—Tu te rappelles la fois où tu as parié avec les gars du pubque je pouvais réciter la liste des

joueursdeDallas?C’étaiten1993,jecrois.—Ouaip.Attaquants,défenseursetremplaçants,complète-t-ilavecunsourirepleindefierté.Ila

falluqu’onlefasseduranttroissaisonsavantquecescrétinscomprennentquetuétaisunprodige.Ona gagné plein de sous avec cette vieille astuce. Encore plus quand tu étais capable de donner lesstatistiques de n’importe quel joueur dont ils te disaient le nom. (Il se met à rire et me tapote legenou.) Je savais que tu ferais degrandes choses.Merci dene jamaism’avoir dénoncé à tamère,ajoute-t-ilavecunebourradeaffectueuse.—Mercidem’avoirdonnélamoitiédesbénéfices,réponds-jeenluidonnantuncoupdecoude.

Et il éclatedenouveaude rire,parcequevousvousdoutezbienque je l’avais fait chanterpourpouvoirobtenirmapart.Mon pèreme serre contre lui pour que je posema tête sur son épaule, et c’est comme si nous

avionssoudainremontéletempsetquej’étaisredevenuesonpetitcanard.Lavieétaitbeaucoupplussimplequandjen’avaisqu’àmecontenterdelesuivre.S’arrangerpourdupermamèreetépaterlesgarsdechezMaggie,c’étaitunechose, trouvercommentembobinerShawpourqu’ilneconnaissepasmessentimentspourlui,c’estunetoutautrepairedemanches.—Qu’est-cequitetracasse,monpetitcanard?—Lesgarçons,réponds-je,sincère,avecunlongsoupir.—Beurk,fait-ilenmerepoussant.Lesgarçonssontdégoûtantsetilsontdespoux!Jenepeuxm’empêcherd’éclaterderire.—Papa,arrête.—Pourquoi?C’estcequetudisaisquandtuétaispetite.(Iljetteungaletdansl’eau.)Etj’enétais

biencontent,àl’époque.—Ettunel’esplusmaintenant?—Tamèreveutdespetits-enfants,répond-ilenhaussantlesépaules.Jemedisquecen’estpeut-

êtrepasunesimauvaiseidée.—Oh,monDieu.Elledéteintsurtoi,soupiré-jeenlevantlesyeuxauciel.—Bon,parle-moide tonproblèmedegarçon, alors,dit-il en jetantunautregalet.Caseyet toi,

vousvousêtesarrangés?Jelancemongaletaussi,maisiltombeavecunplouflamentableaulieudericocher.J’aiperdula

main.—Onarompu.—Jen’avaispasremarquéquevousvousétiezremisensemble.—Onnel’étaitpas.C’estjuste…c’estcompliqué.Jeretenteunlanceretc’estencorepireladeuxièmefois.—Lesaffairesdecœurlesontgénéralement,monpetitchou.Ilcontempleauloinlesvaguelettesprobablementcauséesparunetortuequis’agitesouslasurface.

Jemedemandeàquilabestiolevaallerracontercequ’elleentend.—Vousavezétéélevésensemble,alorslesgenssesontfaitdestasd’idéessurcequeseraitvotre

avenir.Leproblème,c’estquecen’estpasparcequetun’avaisconnuqueluiquetuneconnaîtraispersonned’autre.Ilmedonneunautregaletpourquejefasseunnouvelessai.Jemeplanteencore.—Tulancescommeunefille,semoque-t-il.Toutestdanslepoignet.Commeça.Illancesongaletquiricochecinqfoisavantdesombrer.—Prétentieux.Ilritdenouveau,puisilreprendsonsérieux.—Jenesaispas si tu te rappelles,maisquand tuavais septans, je t’aiamenéeexactementàcet

endroitpourtemontrercommentilfallaits’yprendre.(Ilsepencheetchuchoted’unairfinaud:)Tuétaisbienplusdouéeàl’époque.

—Tuparles,soupiré-jeenlerepoussant.—Quoi qu’il en soit, tu as levé le nez versmoi et tum’as dit qu’il y avait dans les villes des

bâtimentsquiétaientfaitsaveccettepierre–iltapotelegranitsurlequelnoussommesassis–etquetuauraisbienaimélesvoir.Jesuisrestésurlecul,parcequejenevoyaispascommenttuavaispusavoirdequoiétaientfaitscesbâtiments,maisbon,ilfautdirequetuastoujoursététrèsintelligente.—Jem’ensouviens,dis-jeenriant.Maisjenesaispluscommentj’aiapprisça,enrevanche.Ilmeregardeetjevoisdanssesyeuxqu’ilaquelquechoseàmeconfier.—Tu te rappelles que je t’ai demandé dans quel endroit dumonde tu avais envie d’aller ? (Je

secouelatête.)Moisi.Jen’aijamaisoublié.Jem’ensouviendraitoujours.Tuasrépondu:n’importeoùsaufici.(Ilsetait,l’airpensif.)C’estlàquej’aisuquejet’avaisperdue.Qu’ilfallaitquejefassetoutmonpossiblepourquetuquittescerocher.Leboutdemonnezcommenceàmechatouiller.C’estdepuistoujourslesignequeleslarmesne

vontpastarderàcoulermalgrétousmesefforts.—Tunem’aspasperdue,papa.—Jesaisbien.Tun’asjamaisétéàmoi.C’estmoiquisuisàtoi,mapetitechérie.Une larme rebelle glisse sur ma joue. Mon père n’a jamais été un sentimental. Soit il est très

sérieux,soitiln’estqu’éclatsderire.C’estlàunefacettedesapersonnequejen’avaisencorejamaisvue. Ni quand j’ai quitté Stonington pour aller à l’université, nimême quand je suis partie à SanDiego.Ilsouritetmereprendparl’épaulepourmeréconforterenmeserrantcontrelui.—Jesaisquej’aiétéunvieuxbonhommeentêtéquiavaittroppeurdelaisserpartirsafille.Etj’en

suis désolé. On a le droit de s’installer ailleurs qu’à Stonington, Cass. Tout comme c’est permisd’aimerquelqu’und’autrequeCasey.SituveuxpartirdanslesoleilcouchantavecShaw,vas-y.Maisn’oubliepasd’oùtuviens.Et c’est ainsi que le lien quime retenait ici se brise.Mon pèreme libère.Même si je n’ai pas

l’impressiondepouvoirprendreencoremonessor.—Jel’aime,papa.J’aimeShaw,avoué-je.Ce n’est pas si déplaisant deme l’entendre dire à haute voix. Le ciel ne s’assombrit pas, l’eau

devantnousnesechangepasensang,desdémonsnes’échappentpasdesportesdel’enferetcen’estpaslafindumonde.Etmalanguenesedécrochepas,figurez-vous.Alors,pourquoisuis-jeencoreaussiterrifiée?—Jesaisbien.Maislui?Parfois,monpèreestplusfutéquejenel’imagine.Saquestionestlaréponseàlamienne.Shawne

saitpascequej’éprouvepourluietjesuisterrifiéedeleluidire.C’esttoutbonnementaffreuxd’êtrerejetée.J’hésite:jenesaispastropsijepeuxmedévoileretrisquerqueShawmeconsidèrecommeunepitoyablelycéenneamoureused’unchanteurdeboysband.—Jenepeuxpasluidire.—Etpourquoidonc?—Parcequejeneveuxpasqu’ilmeprennepouruneidiote.Jesaisquej’airépondud’untonboudeurdegamine.Maisunefemmequiestenprésencedeson

père, si adulte qu’elle s’imagine être, quoi qu’elle ait pu faire ou vivre, a toujours le droit deredevenirlafillettequipleuraitsursonépaule.Unpèresaitcommenttoutarranger.Peut-êtreparce

quec’estleseulhommedontl’amourpourelleresteratoujoursinconditionnel.—Ah,machérie…ladernièrechosedontonpourraitt’accuser,c’estd’êtreidiote.Tunel’espas.

Etluinonplus.D’ailleurs,tupourraisbienêtresurprisedecequ’ilterépondra.— Il me dira probablement que je suis virée, réponds-je en tripotant un fil qui dépasse sur sa

manche.C’estmonchef,àprésent,finalement.—Ahbon?s’étonnemonpère.Etdepuisquand?—Quand j’aiperdu lecontratDenverRockford. Ilestdevenuassocié,donc,dans les faits,c’est

monchef.—Tul’asperduoutuyasrenoncé?—Tuesaucourant?Questionné-jeenmeredressant.Maiscomment?—CassidyRose,glousse-t-il,tueslapersonnelapluscompétitivequejeconnaisse.Pasquestion

quequelqu’untebattequandtuveuxquelquechose,mêmes’ilesttrèsmalin.Tuasrenoncéauposted’associéparcequetamèreavaitbesoindetoiici.C’estbiença?—Pasquestionquetuluidises,grondé-jeenagitantunindexmenaçant.—Net’enfaispaspourça.Ceseranotrepetitsecret,merassure-t-il.Toutcommemeservirdema

filleuniquepourgagnerquelquesparisdansunpuboùunegaminen’arienàfaire.—Tantmieux.Ondevraitrentreravantqueledînersoitfroidetqu’elleenvoieunepatrouillepour

nousramenerdeforce.—Oui,tuassûrementraison,dit-ilensautantdurocher.Jem’apprêteàenfaireautant,maismonpèremeprendpar la tailleetm’aideàdescendre.Tout

comme il le faisait quand j’étais petite.Etmême si je sais que cela lui démolit le dos, je pose lesmains sur ses épaules et je me laisse faire. C’est mon père ; mon amour inconditionnel, moncompliceetleseulhommequimepassetousmescaprices.Ilnemeresteplusqu’àaffronterShawunefoisquejeserairedevenuelafemmequemonpèrem’a

permisdedevenir.

19

Shaw

AnnaWhalen est aussi une championne en cuisine. Je repartirai de Stonington gras comme unporcelet,mais tant pis. Je vais demander à Ben deme réserver des séances privées avec l’un descoachs de ma salle de sport quand je rentrerai, et cela réglera le problème. En attendant, je vaissavourercespetitsplatsmaisonaussilongtempsquejelepourrai.Tourteaupoulet,pommesaufourettomatesvertessontaumenu,arroséesdudélicieuxthéglacé

d’Abby.Jesuisauparadis,etjevaissûrementavoirbesoindeprendreunetrèslonguedoucheetdemecouchertôtdèsledînerterminé.Maisjenerisquepasderetrouvermonlitdebonneheureétantdonnétoutcequ’ilresteàfairedehors.Caseyetmoiavonstravailléensembletoutelajournéesansunsoupçond’animosité.Etaprèsnotre

petitediscussion,touteslestensionsentrenoussesontenvolées.Oh,ilyauratoujoursdesrivalitésdemâlesdominants,maisjerespectelemecetlaplacequ’iloccupelégitimementdanslaviedeCassidy.Jecomprends.Ilssontamis, ils l’ont toujoursétéet ils leseronttoujours.Sanscompterqu’ilssontquasimentdelamêmefamille.Jenevaispasm’interposer.Caseyetmoinouscomprenons,désormais.Cassidyn’estpasaucourant,etpeut-êtrequejenelui

diraijamais,maisilajouélesprotecteurstoutàl’heureenmedisantquej’aiintérêtàbienlatraiter.Sinon…Jenepeuxpasmalprendrecettemenaceàpeinevoilée,carjelavoispourcequ’elleestetjesuisheureuxqu’elleaitquelqu’unquitientsuffisammentàellepourvouloirlaprotéger.Ilal’airdifférent,etjesaisquejelesuismoiaussi.Enpartieparcequej’aifrôlélamorthier,eten

partie parce que lamère de Caseym’a officieusement adopté – ce qui n’a pas du tout l’air de legêner–,maissurtoutparcequej’aisoudainementprisconsciencedemessentimentspourCassidyetque je les ai reconnuspourcequ’ils sont.L’amour,bon sang.Çavouschangeunhomme.Parfoispour le meilleur, parfois pour le pire. Comme je suis presque certain que l’homme que j’étaisjusqu’iciétaitlepire,désormaiscelanepeutêtrequemieux.Siellenem’écrabouillepasdèsqu’elleauradécouvertcequ’ilenest.Cetruc, l’amour,c’estdévirilisant,maintenantquej’ypense.Peut-êtrequejedevraisgardermes

sentimentspourmoi.—Ehbien,ilétaittempsquevousvousdécidiezànousrejoindre.D’oùest-cequevoussorteztous

lesdeux?demandeAnna,quin’aimeapparemmentpasceuxquiontl’audaced’êtreenretard.

Commesijenesavaispasdéjàquimanqueàcôtédemoi.JelèvelenezetjevoisCassidyquientreaubrasdeDuff,commesisonpèreremontaitlatravéede

l’églisepourlaconduireàl’autellejourdesonmariage.Uneidéequejechasseauplusvitedemonesprit, car il n’est pas question de mariage. Du moins, pas si je fais partie de son avenir. Nonseulement je ne suis pas fait pour être père,mais à causedu couple raté formépar l’hommeet lafemmequim’ontdonnélavie,jenecroispasnonplusàl’institutiondumariage.Malgrétout,moncœur bondit dansma poitrine quand je la vois. Je comprends alors qu’il vam’être impossible degardermesnouveauxsentimentspourmoi,parcequecelavade toute façon finirpar sortir tôtoutard.C’estdireàquelpointilssontviolents.Les cheveux deCassidy s’échappent de sa queue-de-cheval, elle transpire et elle est couverte de

poussière–etelleestplussexyquejamais.Bonsang.—Netefâchepas,maman.OnrentraitquandpapaaaperçuJaxcoincésurunarbreetilatenuàce

qu’ons’arrêtepourl’aideràdescendre.—QuiestJax?demandeMia.—LechatdeMrs.Jones,répondCasey.—Tuauraisdûlevoir,maman.Papaaétéunvraihéros.Tuauraisétéfièredelui.Cassidydonneunbaisersurlajoueàsonpèrequivientdes’asseoir.—Jesuistoujoursfièredelui,rétorqueAnna,satisfaitedeleurexcuse,avantdepréparerl’assiette

desonmari.Commentelleréussitàprépareràdîneraussibienenétantclouéedanssonfauteuil,celaresteun

mystèrepourmoi.Cassidyfaitunclind’œilcompliceàsonpèrequandsamèrealedostourné,puiselles’installeà

son tour. Juste à côtédemoi.Mais ellement commeune arracheusededents, cette petite futée. Jemanquedem’étoufferenvoulantcamouflermonriresousunequintedetoux.Abbyremarquemonmanège,mais elle neme trahit pas.Et figurez-vousque lamaindeCassidy atterrit surma cuisse,commesic’étaitlegesteleplusnaturelaumonde.—Désolée,murmure-t-elleenmevoyantfixersamain.Elles’apprêteàlaretirer,maisjeposelamiennedessuspourlagarderàsaplace.Lachaleurdesapaumepénètrel’épaisseétoffedemonjeanetmefaitfrissonnerpartout.Cequi

n’arrangepasmonvagueàl’âmesentimental.Iln’yariendesexuellà-dedans.Samainestjustelàsouslamienne.Àlaplacequiluirevient.Unesonnerieretentitdansl’entrée–quelquepartducôtéducomptoirdelaréception,j’imagine–

et tout lemonde se retourne comme si c’était une énigme.C’est une sonnerieparticulière, commecelle d’un téléphone à cadran. Étant donné qu’Anna Whalen est vieux jeu, je suppose que c’estexactementdecelaqu’ils’agit.—Ehbien,ondiraitqueletéléphoneestrétabli,ditThomas.C’estmalélevéd’appelerdurantle

dîner,malgrétout.C’estétrangequ’ildisecela,étantdonnéqueWhalenHouseestuneentreprise,maisjemedisque

cela fait sans doute partie des choses qui ne se font pas à Stonington. Les petites villes ont leursrègles.Annacommenceàs’essuyerlesmainssursontablier,maisAbbyselève.—J’yvais,machérie.Donnesonassietteàtonmari.

—Qu’est-cequeçadonneducôtédesquais?demandeCassidyàCasey.Ilhausselesépaulesetavaleavantderépondre.—Ça avance.Shawetmoi onvaprendre le bateaudemainpour aller y jeter un coupd’œil. Je

penseques’ilyadesdégâts,ceserapasgrand-chose.—Voilàquevousvouscomportezcommedesadultes,s’étonne-t-elleenmecaressantlacuisse.Jenepeuxqueleverlesyeuxaucieldevantsaréflexion.—Iln’yapasdequoienfairetoutunplat,Whalen.Jesuiscapabled’oublierlepassé.—Shaw?m’appelleAbbydepuisl’embrasuredelaportedelacuisine.Unjeunehommedunom

deBenvousdemandeautéléphone,transmet-elle,intriguée.Jenem’yattendaispas,maisc’estnormal.IlyaquelquechoseàStoningtonquivousfaitoublier

que le monde extérieur existe. Je suis un agent sportif – pardon : associé chez Striker SportsEntertainment–etjenesuispasalléaubureaudepuisuncertaintemps.Jemesuisretrouvépile-poilau milieu d’un ouragan. Et je n’ai pas pensé à appeler mon assistant pour lui donner de mesnouvelles.Jesuisvraimentlargué.Jem’essuieleslèvres,repoussemachaiseenvitesseetmelèveenm’excusantdecetteinterruption.

Avantdequitterlapièce,jen’oubliepasdefaireunpetitbaiserchasteàCassidy.—Jevaisleurdirequevousallezbienaussi,dis-je,cequimevautunsourirereconnaissant.Unefoisdans l’entrée, jem’assoisdans le fauteuilderrière lecomptoiret jeporte lecombinéà

monoreille.—Ben?—Oh,vousvoussouvenezdemonprénom?mereproche-t-ilavecinsolence.—Oui,maisjepourraisoublierdesignertesnotesdefrais,situveux,répliqué-je.Qu’est-cequ’il

ya?—Monvieux,ilfautquevousreveniez.Sijen’étaispasresponsabledesonattitudeplusquedécontractéeavecmoi,jel’égorgerais.—Ben,jesuistonpatronetdepuispeudirecteurassociédel’agencedanslaquelletutravailles.Ne

m’appellepas«monvieux».Qu’est-cequisepasse?—Wadeestsurlesnerfs,monsieur.Ilappuiesurcederniermot.C’estunpeumieux,maispastellement.—Etpourquelleraisonest-ilsurlesnerfs?—LeColoradopasse son temps à l’appeler parcequeDenverne s’est toujourspasprésenté au

campd’entraînement.Matensionmonted’uncran.—Quoi?Etcommentçasefait?—J’aimeraispouvoirvousledire,maisilnerépondpasquandjel’appelle.—Ehbien,pourquoitunem’aspasappelé,alors?Celaauraitpourtantétélachoseàfaire.—J’aiessayé.Vousvousrappelez?çanecaptepas, làoùvousêtes.Jevousaienvoyédeuxou

troise-mailsaussi,maisapparemmentvousn’avezpasconsultévotreboîte.Bonsang,ilm’acoincé.J’aivraimentétéendessousdetoutsurcecoup-là.

— Ça fait deux jours que j’essaie d’appeler ce numéro, mais les lignes ont sûrement dû êtrecoupéesdurantl’ouragan,non?C’estl’excusequej’aidonnéeàMr.Price,entoutcas,maisjenesaispascombiendetempsjevaispouvoirluifaireavalerça.Je vois d’ici Wade en train de faire les cent pas dans son bureau comme un lion en cage en

desserrantsacravateetens’efforçantde trouverdesexcusespourDenveretpourmoi.Jesuissûrqu’ildoitaussipasmalbraillerettaperdupoingsurlatable.Cequidoitterrorisertoutlepersonnel.—OùestDenver?demandé-je,exaspéréetunpeupaniquémoiaussi.—Paslamoindreidée.Jesuismêmealléchezlui,maispersonnen’aouvert.Merde.SiDenvern’estpasdéjàmort,jevaisl’égorger.Ilestprobablementterrédenouveaudans

unpenthouse àVegaspour fuir lemonde. Ilme semblait pourtant qu’il avait fini par accepter sonhomosexualité et s’apprêtait à faire soncomingout– il estvraiquecelapeut êtreuneperspectiveterrifiante.J’espèrequ’iln’apasdécidédeprendrelemaquis.—D’accord,écoute.Jevaisessayerdelechoperetdevoircequ’ilenest.Enattendant,ilfautque

tumeréservesunvolderetour,dis-je,espérantquejevaispouvoirquitterl’îleetgagnerl’aéroport.Lesroutessontdéjàmauvaises,maisenajoutant lesarbreset les lignesélectriquestombés,elles

vontêtretotalementimpraticables.Étonnamment,laminusculebagnolequej’ailouéeasurvécuàlatempêteauprixdequelquesrayuresetbosses,maisc’estloind’êtreun4×4.—Jem’enoccupe,répond-il.Sicen’estpastropvousdemander,pensezàrelevervosmails,parce

quec’estcommeçaquejevaisvousenvoyerlesinfosderéservation.Benpousselebouchonunpeuloin,maisjevaisêtreindulgent,carjel’aimérité.Celadit,jesuisen

modesituationdecrise.—AssurezàWadequejem’occupedetoutetquejevienslevoirdèsquej’auraiatterri.Pigé?—Oui.Underniertruc,patron.—Oui?Jemeprépareàd’autresmauvaisesnouvelles,mêmesijenesuispassûrdepouvoirenencaisser

davantage.—Jesuisvraimentcontentquevousalliezbien,dit-ild’untonsincère.(Jenepeuxjamaisluien

vouloirbienlongtemps,àcepetit.)CommentvaCassidy?— Tout le monde va bien ici, Ben. Merci d’avoir demandé, réponds-je, tout aussi sincère.

Maintenant,fonce.Ilfautquejem’occupederetrouvercettedivadequarterback.Etsurce,jeraccroche.Puisjemeprendslatêtedanslesmains.J’aiunesacréemigrainequime

guette.Stoningtonm’aramolli.—Toutvabien?C’est la voixdeCassidy. Je redresse la tête et je suis vraiment content de la voir, car je ne sais

absolumentpascommentjevaissortirdecettepagaille.—Non,pasvraiment.Denveradisparu.—Oh,zut,fait-elle,sincèrementinquiète.Vousvoulezquej’appellesamère?Malgrémapanique,jeluifaisungrandsourire.Cettefemmenelaissepasdemesurprendre.Jeme

détends.— Vous voulez bien le faire ? Ça m’aiderait vraiment si vous pouviez découvrir où il est. Je

m’occuperaidurestedepuisici.

—Biensûr,pasdeproblème.Jevaischerchermonportable.LenumérodeDelilahestdessus.Elles’apprêteàpartir,maisjeluiattrapelamainetl’attireàmoipourdéposerunbaisersurses

délicieuseslèvres.—Merci.Aveclesourirequ’ellemefait,jemesensmillefoismieux.—Noussommesdanslamêmeéquipe,Shaw,medit-elleavecunclind’œilavantdes’enaller.Etc’estsacrémentvrai.Uninstantplustard,CassidyarécupérélenumérodeDelilahRockfordetl’appelle.Delilahn’est

quetropheureusedetéléphoneràsonfilspourlehouspillerenleprévenantquejevaisl’appeleretqu’ilaintérêtàmerépondre.Et,coupdechance,lewifidelavilleétantdenouveauopérationnel– intermittent, aumieux–, jepeux joindreDenverparFaceTime. J’adore la technologie.Mêmeunepetiteville commeStoningtonenabesoind’unemanièreoud’uneautrepourpouvoir continueràfonctionner.Revenudansma chambre, je lance l’appli surmon téléphone et appelleDenver.Deux sonneries

plus tard, il répond. Sans doute que les grands costauds superstars du sport ont peur de subir lecourrouxdeleurmère.—Salut,mec!Commentçava?demande-t-ilavecunsourireniais.Ilestvautrésurdesoreillers,torsenu,manifestementaulit.Jejetteuncoupd’œilàlapenduleet

calculeledécalageentrecôtesouestetest.Iln’estque14heures.—Denver,bonsang,monpote?Vousêtescenséêtreaucampd’entraînementdansleColorado,

m’étonné-je,sachantquec’estl’approchecopain-copainquimarchelemieuxaveclui.—Ouais, jesais.Jem’occuped’affairespersonnellesimportantes,répond-ilavecunhaussement

desourcilstoutendésignantuneformeblottiecontreluisouslesdraps.—Bravo.Alors,vousjouezvotrecarrièrepourdeshistoiresdecul?—Pasn’importequelcul,rectifieunevoixfamilière.Laformesemetàbouger,puisunbrasapparaîtetrepousselesdraps.—Quinn!m’exclamé-je,souslechoc.—Salut,Shaw,dit-ilavecunsouriremalicieuxtandisqueDenverleprendparl’épaule.Jesuisstupéfait.—Nomd’unchien!Depuiscombiendetempsçadure?QuinnposelatêtesurlapoitrinedeDenveretlèvelesyeuxverslui.—Depuiscombiendetemps,àtonavis,chéri?—Jenesaispas,répondDenverenluicaressantaffectueusementlebras.Onestqueljour?—Oh, on s’en fiche, répondQuinn en se blottissant contre lui. Ce qui compte, c’est qu’on est

inséparablesetqu’ons’amusefollementdepuisquevousêtespartistouslesdeux.Nevenezpasnousgâchernotrebonheur,Shaw.—Gâcher votre bonheur ? répété-je, sidéré. La seule personne qui gâche quelque chose, c’est

DenveravecuncontratqueCassidyetmoinoussommesdonnéunmaldechienàluidécrocher.Jesuiscontentquevoussoyezheureux,maisDenver,vousnepouvezpasrisquer toutevotrecarrièrecommeça.—Mon pote, je suis Denver Rockford, dit Rocket Man, rappelle-t-il, comme si c’était le plus

important. Le quarterback le plus convoité. Vous avez oublié ? Manquer quelques joursd’entraînementnevapasmerendremoinssensationnelet leColoradovacontinuerdemefairedulèche-cul.Jemepasseunemaindanslescheveuxetsurlevisage.—Vousallezêtremisàl’amende,dis-je.—Etalors?fait-ilavecunsourireinsolent.J’aipleindefric.Jedécidedem’attaqueràcequicomptelepluspourlui:lesapparences.—Vousallezpasserpourunfumiste.Untypequis’enfout.Etpasseulementvous,maismoiaussi.

ToutcommeStrikerSportsEntertainment…l’agenceoùjeviensdedevenirassociéparcequejevousaisigné.Oubienvousavezoublié?Enfin,monvieux,soyezsympa.Jevaismefaireécorchervifàcausedeça.Sivousn’allezpasàl’entraînement,jevaisprobablementperdremonboulot.—Chéri,tunepeuxpaslelaissersefairevirer.Cen’estpasquetonagent,c’estnotreami.Etpuis

c’estlepetitplanculdemacoloc’.Ellemetuera.Fais-lepourmoi.S’ilteplaît,minaudeQuinn.—Maisj’aienvied’êtreavectoi,supplieDenver.Jen’airiencontresespréférencessexuelles.Quinnpourraitêtreunefillequej’estimeraistoujours

que les geignements deDenver sont un spectacle comique de la part d’un homme qui a une telleréputationdanslemondedufootball.—Etsi j’allaisdans leColoradoavec toi?proposeQuinnavantd’ajouterd’unair lascif : je te

regarderaidepuislesgradinstemettreensueur.—OK,concèdeDenver.Jeveuxteprésenteràmesparents,detoutefaçon.LevisagedeQuinns’éclaire.—C’estvrai?—Biensûr,monchéri,confirmeDenverenleserrantcontrelui.C’est probablement une conversation à laquelle je ne suis pas censé prendre part, mais je suis

contentde lesvoirheureux tous lesdeux.SurtoutensachantàquelpointQuinnasouffertquesonprécédentamant,Daddy,l’aitcachépendantsilongtemps.Ilaenfinquelqu’unquiestassezfierpourlerevendiquercommesien.—Merveilleux,dis-je,soulagédepouvoirannonceràWadequel’incendieestéteint.Voussautez

dansl’aviondemain?—Voussavezbienquejenesupportepasl’avion,faitremarquerDenver.Sapeuresttellequ’ilestforcédesebourrerdesédatifspourpouvoirmonteràbord.—Oh,net’inquiètepas,monchéri,intervientQuinn.Jeserailàpourtedistraire.—Parfait.Alors…demain?Pasquestionquejelelâchetantqu’iln’apasconfirmé.—Oui,onpeutfairecommeça,concèdeDenver.Désolédevousavoirposédesproblèmes,mon

pote.—Pasgrave,Rocket.J’ail’habitudedejoueraupompier,luiassuré-je.J’appelleleColoradopour

lesprévenirquevousêtesenroute.—EtditesàCassqu’ellevam’entendrepournepasavoirprisdemesnouvelles,ajouteQuinn.— D’accord. Amusez-vous bien, mais n’oubliez pas de prendre cet avion, insisté-je avant de

raccrocher.

Profitantdusignalwifiquifonctionne,jerelèvemese-mails.Benm’aenvoyélesinfospourmonvol.C’estdansdeuxjours.Ilprécisequel’aéroportadûsuspendresesopérationspournettoyeraprèsl’ouragan.C’estjouable,maisvoilàquejetergiverseunpeu.JevaisdevoirlaisserCassidy.EtaussiAbbyettoutelavilledeStonington.J’aipresquel’impressiondelesabandonner.C’est impossible à éviter. Il faut que je rentre pour prendrema place de directeur associé chez

StrikerSportsEntertainment,unpostequejemesuisdonnétoutlemaldumondeàobteniretauqueljenesuispasprêtàrenoncer.SaufpourCassidyWhalen.Qui,ironiedusort,estlaseulepersonnequivoulaitm’enpriver.Jesecouelatête.Ledestinnousjouedesacréstours,parfois.Mais je ne vais pas sauter le pas tant que je ne sais pas ce qu’elle éprouvepourmoi. Si elle se

contentedemerireaunezparcequej’aidessentimentssérieuxpourelle,pasquestionderenonceràmonrêve.Noussommesdoncapparemmentàladeuxièmemi-tempsetilneresteplusquequelquessecondes de jeu. Tout peut être remis en question. Si Cassidy est mon wide receiver, je suis sonquarterback et il n’y a plus qu’une seule chose à faire : lancer le ballon et espérer qu’elle va lerattraperetmarquer.Etc’estexactementcettepenséequim’entraînedanslecouloirdudeuxièmeétagejusqu’aumoment

oùjemeretrouvedevantsaporte.

20

Cassidy

Lecoupfrappéàmaporteétaitattendu.Oudumoins,espéré.Shawadéclaréqu’ilnevoulaitplusêtreseuletjesuisvraimentheureusequecettedécisionnesoitpassimplementlefruitd’unmomentdedésespoirpassager,suiteàl’ouraganetàsaquasi-noyade.Unefoisdouchéeetparfumée,lesjambeslissescommeilsedoit,jemeregardeunedernièrefois

danslemiroir–enlevantlesyeuxaucieldevanttantdechichis–etjevaisluiouvrir.Ilestsurleseuil,luiaussifraiscommeunerose,vêtud’unsimpleT-shirtgrisrasducouetsexyet

d’unjeanquiluimouleleshanches.Seigneur,qu’ilestmagnifique.Etsilencieux.—Salut,lancé-jeavecunsourirechaleureux.Pourquoia-t-ill’airaussinerveux?—Salut,répond-il.Ilmedétaillesiattentivementdespiedsàlatêtequejesenssurmapeauunechaleurcommes’ily

avaitposélesmains.Pourtant,ilnebougepasetnedittoujoursrien.Ilcommenceàmemettremalàl’aise,plusquejenelesuisdéjà.—Quelquechosenevapas,Shaw?—Non,dit-ildansunsourireenmeregardantenfindanslesyeux.Jemedemandaisjuste…Alors,

euh…vousvouliezêtreseule,cesoir?Oh,Dieumerci,soupiré-jeintérieurement,soulagée.—Pasdutout,m’exclamé-jeenriant.Enfait,venez,jeveuxvousmontrerquelquechose.(Jelui

prends lamain et le happe quasiment d’un coup à l’intérieur avant de le traîner jusqu’à la fenêtreouverte.Jemebaissepoursortirsurletoitenprenantgardedenepasglisser.)Faitesattention,dis-jeàShawenluilâchantlamainpourqu’ilpuissemesuivresansencombre.Je longe l’auvent avant de gravir la pente en me penchant en avant pour répartir mon poids

équitablement.C’estdéjàdifficiled’ordinaire,maisAylaayantarrachéquelquesbardeaux,onadumalàtrouveroùposerlepied.Ilfaudraquejepenseàenparleràpapa.Jejetteuncoupd’œilpar-dessusmonépauleetjem’aperçoisqueShawn’apasbougé.—Qu’est-cequevousfichez?

Seigneur,voilàqu’ilrecommenceavecsonpetitsouriresexy.—J’admirelavue.—Ehbien,elleestencoremieuxdelà-haut,sivousarrêtezdetraîner,dis-jeenriant.Ilpenchelatêtedecôtéets’humecteleslèvresencontemplantmesfesses.—Jenesuispasd’accord.Jepréfèrecellequej’aid’ici,MissWhalen.—Shaw!m’indigné-jeenmeredressantbrusquementcommesicelaallaitcachermesfesses.Sauf que ce brusque mouvement ne réussit qu’à me faire perdre l’équilibre. Je me rattrape de

justesse,maisjesurprendsl’expressionalarméedeShaw,effrayéparlaperspectivedemachute.—Çasuffit,maintenant.Onredescend,ordonne-t-ilcommesic’étaitluilechef.Cequ’il est,dans les faits.MaisàSanDiego,pasàStonington.Avecunsourirenarquois, je lui

lanceavecdéfi:—Sivousavezpeur,avouez-le!Shawpoussecegrognementquej’aientendutantdefoisquandjelecaresseetquinemanquepas

demerendretoutechose.Àtelpointquejecommenceàenvisagerdebaisersurletoitdelamaisondemesparents avantdedéciderque le contactdesbardeaux surmes fessesnuesne seraitpas trèsagréable.Revenue au niveau du chien-assis central, celui de la fenêtre de ma chambre, je m’assois à

califourchon et j’attends queShawvienneme rejoindre. J’avoue que j’en profite pour lorgner sesavant-brasmusclés,tandisqu’ilgrimpeetsamanièredesepencherenavantpourgarderl’équilibre,cequim’offreunevueimprenablesurceculquim’obsède.Quandilarriveenfinàmahauteur,ilprendlaseuleplacequireste:àchevaljustederrièremoi.

Puisilserapprochepourmesaisirparlatailleetmeserrercontresapoitrine.Jesuisravie.—Pasquestionquevoustombiez.C’esttoutcequ’iltrouvecommeprétexte.Commes’illuienfallaitun.Etnousrestonsassislà.Caseyetmoiavionslenid-de-piecommerefugeànous,maiscetendroitestmonpetitsecretàmoi.

Personnen’estjamaismontéiciavecmoi.Jusqu’àmaintenant.Je renverse la tête en arrière et la pose sur l’épaule de Shaw pour contempler le ciel. Les

innombrables étoiles scintillent dans un spectacle que domine un clair de lune éclatant. Une petitebrisetièdeetrégulièresouffledusuddelabaie.Jesoupire.Jemesensdansmonélémentetjeprofitedecemomentprivilégiépourrassemblermoncourage.Lechantdesgrillonsestpresqueassourdissant.Àmoinsquecenesoitqu’uneimpressiondueau

silence qui règne entre Shaw et moi. J’avais tellement de choses à dire, et maintenant que noussommesseuls,jenetrouveplusmesmots.Jesorsdonclapremièrechosequimevientàl’esprit.—Enfait,sionneregardepasenbas,onpourraitcroirequ’iln’yajamaiseudetempêteetfaire

commesirienn’étaitarrivé.Shawécartetendrementmescheveux,puisilposesajouecontremonoreille.Sonhaleinebrûlante

mechatouillelapeauavantqu’ilydéposeunlégerbaiser.—Voulez-vousfairecommesirienn’étaitarrivépourautrechoseaussi?Je ferme les yeux, grisée par la sensation de ses paumes à l’intérieur de mes cuisses. Entre le

panorama et les coquineries qu’il est en train de me faire dans le cou et à l’oreille, je suis tout

étourdie.—Non,chuchoté-je.—J’adorevraimentcelegging,dit-ilenrapprochantdoucementlesmainsdemonentrejambe.Ça

tientchaud?Parcequejetrouvequec’est…torride.Ilcaressefurtivementmachatteetleboutdesesdoigtstrouvelaciblesansfaillir.J’étouffe un cri enme cambrant et toute pensée rationnelle disparaît tandis que jemurmure un

«Oui,s’ilvousplaît».Jepassemesmainssoussescuissesetmecramponne,enivréed’êtreassisedans une position aussi précaire au bord d’un toit tandis que cet homme dont je ne serai jamaisrassasiéemedonnel’impressionquej’aidesailes.—MonDieu,voussentezsibon,dit-ileninspirantprofondémenttoutencontinuantdemecaresser

àtraverslelegging.Salangueglissedansmoncouetunchapeletdebaisersmoitesy laisseunsillagebrûlantquela

brise rafraîchit à peine.Moncorps tout entier fourmille et j’ai la chair depoule.Sapersonne, sesmains,sasimpleprésencesuffisentàmefaireperdrelatête.Qu’est-cequejevais luidire?Jedécidequecelan’apasd’importance.Enfin,si,maiscelapeut

attendre,carlamaindeShaws’égaresurmonventreetsefaufilesouslaceinturedemoncollant.Jemeraidiscommelefonttouteslesfemmespourrentrerleventrelorsqu’unhommeletouche.PuisShaws’insinuedansmapetiteculotteetmecaresse.Ilposelapaumesurmachatteetglisselesdoigtsentrelesplisdechairpourleslubrifier.Shawest

unmaîtredansl’artdudoigté,telunguitaristevirtuosequipincelescordesdesoninstrumentpourentirerlaplusbellemélodiejamaiscomposée.D’avantenarrière,encoreetencore,rapide,puislent.Sesmouvements s’accompagnent d’unepression changeante et déliée.La symphoniequ’il crée estaffolanteetimprévisible,maiselleestharmonieuse.Jesenssabitedurcircontremesreins.Ilestprêtetilaenviedejouir,maissonseulsoucisemble

êtredemedonnerduplaisir.Celanevapastardersisesdoigtsinsistent.Il mordille et titille le lobe de mon oreille, puis il descend de nouveau le long de mon cou.

J’entendssonsouffle,jelesensrespirerdansmondos.Iladorecela,iladoremefairevoirencoreplus d’étoiles qu’il n’y en a dans le ciel. J’ouvre les yeux et lève la tête en rêvant de les toucher.Pendantcetemps,Shawmepoussedeplusenplusaubordduplaisir,commesij’étaisaussilégèrequ’uneplumeetquejeflottaisdansununiversinfini.C’estpresqueimpossiblededécrireunorgasme.Maispascesoir.Cesoir,c’estcommes’élancer

depuislasurfacedelaluneettendrelesbrasverslapluslointaineétoiledelagalaxie,puislaserrercontremoipourlalaisserbrûlerdanslaplusdélicieusebéatitude.Jeposeunemainsurlasienneetluisaisislatêtedel’autreavantdetournermonvisageversson

couetretenirmonsouffle.L’orgasmedéferlesurmoidansungémissementétoufféquin’estdestinéàn’êtreentenduquedeluiseul.Cenedoitpasêtretrèsagréablepourluidesentirmamainluitordrequasimentlecou,maisiln’a

pas l’air d’en être gêné.En fait, il change de position et prendmon visage de samain libre pourm’embrasservoluptueusement.Ilmecoupelesouffle,maiscen’estpaslapremièrefois.Ilaledroit.Puisqu’ilpossèdedéjàmoncœur,jen’aipasbesoinderespirer.Ilsedégageenfrottantdoucementleboutdesonnezsurlemienavantd’enembrasserlebout.—Rentrons,dit-il.Franchement,jenesuispassûrequemesjambesserontassezsolidespourredescendrelelongdu

toit,maisjesaisque,grâceàShaw,jerentreraisaineetsauve.Jeluiconfiedoncmonsort,quelquechosequejen’auraisjamaisimaginéfaireavantceséjouràStonington,etjelelaissemeconduire.Unefoisquenoussommesrevenusà l’intérieur, il ferme la fenêtreet se retourneversmoi. Ila

l’airmalàl’aise,commes’ilavaitquelquechoseàmedire.Oubienc’estqu’ilafollementenviedebaiser.Jejetteuncoupd’œilàsonentrejambe,maislabossequej’yaivutoutàl’heureadisparu.—Qu’est-cequinevapas?demandé-je.—Jecroisqu’ilfautqu’onparle,dit-ilensepassantunemaindanslescheveux.Houla.Cegenredephraseneprésagejamaisriendebon.Ducoup,mevoilàmoiaussi inquiète,

tandis quemille scénarios se bousculent dansma tête et que j’essaie de trouver une solution à unproblèmedont j’ignoreencorelanature.Est-ce lemomentoù ilestcensémeplaquer?L’orgasmequ’ilm’adonnéétait-illedernier?—Attendez,dis-je.Jene suispas toutà faitprêteà le laisserpartir avantde luiavoir faitpartdeceque j’éprouve,

mêmesijenesuispasdutoutsûrequecelapuisselefairechangerd’avis.Maissijeneleluidispas,jesaisquej’auraiénormémentdemalàrassemblerànouveaulecouragepourlefaire.—Celanepeutplusattendre,Cassidy,explique-t-ilenmarchantdelongenlarge.Jedoisretourner

àSanDiego,maisjen’irainulleparttantquejen’auraipasexprimécequej’aisurlecœur.Ils’enva.Jenesaispaspourquoicelamechoqueàcepoint.Cen’estpascommesinouspouvions

rester ici éternellement. Mais cela me donne l’impression que la bulle dans laquelle nous noussommesréfugiéssurcettepetiteîleestsurlepointd’éclater.Jemesuispluàcroirequejem’étaiséchappée;jemesuisretrouvéedansl’étatd’espritdeStoningtonetj’aicruquelemondeextérieurn’existaitplus.Ilestpourtantbienlàetjen’aipasd’autrechoixquedereveniràuneréalitéquimeregardedroitdanslesyeux.—Trèsbien.Ditescequevousavezàdire,alors.—Écoutez, il y a beaucoup de choses qui se sont produites ces derniers jours – ces dernières

semaines, en fait – et tout s’est passé vraiment très vite. Tellement que j’ai énormément demal àsuivreetquetoutesttrèsconfusdansmatête.Toutcequejeconnaissais,monmodedeviedanssonensemble, toutcelaaétébousculé.Jenesaispassurquelpieddanser,qui jesuisnicequejeveuxêtre.Maisjesaisquecequ’ilyaentrenousdoitchanger.Iln’estpas le seulpourqui tout est trèsconfuset cediscours incohérentnevapasarranger les

choses.—Essayezdemedireleschosessimplement,Shaw.—Jeveuxdavantage,Cassidy.C’esttranchant.Onnepeutpasfaireplusprécis.Lalumièresefaitenmoi.Lavéritédureetglaciale.—Jenevoussuffispas.(Jemarqueunsilence,letempsderéaliserlasituation.)J’aiparfaitement

comprislemessage.— Manifestement pas, renchérit-il. Parce que c’est davantage de vous que je veux, Cassidy.

Davantage,c’est-à-diredemanièrepermanente.Jefroncelessourcils,pastrèssûred’avoirsaisisonmessage.Jenevoudraissurtoutpastirerde

conclusionsprécipitéessansavoireudesprécisions,carsijemetrompe,j’aurail’aird’uneidiote–etjen’enaipasdutoutenvie.

Shawdoitavoirsentimonmalaise.—Mamanièredevivretoutentièreachangé…àcausedevous.Vousnecomprenezpas?Toutce

quej’aitoujoursconnu,c’étaitlecombat.J’aidûmebattrepoursortirdelamouise.J’aidûmebattrepour avoir un toit au-dessus de la tête et de quoi manger. J’ai dûme battre pourmonter dans lahiérarchie.Etmebattreaussipourprouverquej’enétaisdigne.Jesuisfatigué,Cassidy.Jesuislasetjeneveuxplusmebattre.Saufsijelefaispourresteràvoscôtés.Saufsic’estpourconquérirvotrecœur.—Nemeditespascela,Shaw.Neleditespassivousnelepensezpas.— Je le pense vraiment. (Il s’avance vers moi et me prend le visage dans les mains avant de

plonger son regard dans le mien.) Je vous aime. Je n’ai jamais aimé personne. Vous me croyezégoïste,maislavérité,c’estquejenemesuismêmejamaisaimémoi-même.Jesuispétrifiée.MaislesparolesdeShawontmislefeuenmoi.Jesuisabasourdie.Etpeut-êtreun

petitpeudésorientée.Mince,c’estsûrementl’effetquecelafaitquandonestenétatdechoc.LesyeuxbleusdeShawvirentaugris.—Jevousenprie,ditesquelquechose.Envoilàunebonneidée.—Jenesaispasquoidire.Maisqu’est-cequejeraconte?Biensûrquejesaisquoidire!Alors,pourquoilesmotsrefusent-

ilsdesortir?Ilmelâcheetrecule.—Oh,monDieu. Jemesuis totalement ridiculisé. (Il se tournevers la fenêtre,puisdenouveau

versmoi,exaspéré.)Jeviensdevousavouerquejevousaimeetvousmerépondezquevousnesavezpasquoidire?Son regardm’implore, avec une sorte de désespoir et de vulnérabilité que je n’y avais encore

jamais vus. C’est comme un homme qui semeurt d’une blessure qu’il s’est lui-même infligée enpleine poitrine et qui change brusquement d’avis et voudrait revenir en arrière. Et je suis la seulepersonnequisoitenmesured’empêchersoncœurdeseviderdesonsang,maisjesuistropterrifiéepouragir.Est-il sincère ? De toutes les femmes qui ont dû entrer et sortir de sa vie, pourquoi serais-je

différente?Irritédemevoirtergiverser,Shawsecouelatête,dépité,ettournelestalons.Etcela,jenepeuxpas

lesupporter.Àvraidire,celameterrifieencoreplusquedetenterdepansercetteplaiebéante.Jefermelesyeuxetjeravalemafiertépourprononcerdeuxmotsqui,j’espère,serontsuffisants.—Shaw,arrêtez.Ilobéit,maisilmetourneencoreledos.—Pourquoi?—Parcequ’ilyaunmilliondechosesquejevoudraisvousdireencetinstant,etquetoutmevient

en tête en même temps. Mais je sais que si vous franchissez cette porte, je n’aurai plus jamaisl’occasiondevouslesdire.Surtoutlaplusimportantedetoutes.Ilseretourneettoutenluiexigeuneréponseàcettequestionquin’apasencoreétéposée.—Alors,dites-le.Qu’est-cequivouseffraieàcepoint?

Ilfautqu’ilcomprennemapeur,mêmesijenelacomprendspasmoi-même.— Si je le fais, cela changera tout. Il ne sera pas possible de revenir en arrière. Vous le

comprenez?—C’estvousquinecomprenezpas,dit-ilenhaussantlesépaulesetensecouantlatête,exaspéré.

Cetteballequejeviensdelancerm’adéjàfaitfranchirlepointdenon-retour,detoutefaçon.Vousavezréussiàl’intercepter,alors,renvoyez-la.—Cen’estpasunjeu,Shaw.—Vousavezraison,Cassidy.Cen’estpasunjeu.Alors,arrêtezdejoueravecmoi.Brusquement,jecomprendspourquoijesuisaussiterrifiéedeluidirecequej’aisurlecœur.Etil

esttempsqu’illesacheaussi.— Shaw Matthews, vous êtes prétentieux, dominateur, mélodramatique, têtu et vaniteux. Vous

enfreignez toutes les règles, vous croyez que vous pouvez sortir de n’importe quelle situation enembobinantlesgenspardebellesparoles,etlaplupartdutemps,vousnecomprenezmêmepaslesémotionshumaineslesplusélémentaires.—Ehbien,nevousretenezpas.Dites-moicequevousavezsurlecœur.—Vousêtesunrisque…Ilbaisselesyeuxetjenesupportepasdelevoirainsi.Alors,jem’approchelentementetjelèvesonmentonsculptépourqu’ilvoielavéritéinscritesur

monvisage.—Maisvousêtesunrisquequej’aitoujoursvouluprendre.Nemelefaitespasregretter,c’esttout.Unsourirevictorieuxluimontejusqu’auxoreillesquandilmeprendparlatailleetm’attirecontre

lui.—Alors,vousm’aimezbien,hein?—Unpetitpeu,peut-être.—Ah,justeunpetitpeu?fait-ilenhaussantunsourcil.J’éclatederirecarilesttropmignonpourêtrehonnête.Ilm’aconquise,jesuisàlui…corps,âme

etcœur.—Tais-toietembrasse-moi.—Pasavantquetul’aiesdit.—Bon,trèsbien,réponds-jeenfeignantl’agacement.Jet’aime.Voilà.Tuesheureux,àprésent?— Extrêmement. Surtoutmaintenant que je comprends enfin la véritable définition du bonheur.

C’estàtoiquejeledois.—Nemeprendspaspourunegamine.—Maispasdutout,rit-il.Jetepréfèrenettementtellequetues.—Çacommenceàdevenirbeaucouptroplarmoyant,réponds-je,presquesérieuse.Shawm’empoignelescheveuxetmerenverselatêteenarrièrepourmeforceràleregarderdans

les yeux. Puis il m’embrasse passionnément tout en mordant ma lèvre, avant de joindreimpérieusement ma langue à la sienne. Et je le laisse faire… Parce qu’il n’y a qu’un seul ShawMatthewsetqu’ilestàmoi.Unefoisqu’ilaconclusadémonstration,ilseredressepourposersurmoiunregardbrûlantde

désir.Jesensunebosseparticulièrementproéminentecontremonventre.— Tu as raison, dit-il. (Il lâche mes cheveux et d’un geste vif comme l’éclair, il empoigne la

ceinturedemonleggingetlebaissesansménagement.)Baissez-voussurcefichulit,MissWhalen.Jevaisbaiservotrejoliepetitechattejusqu’àvousfairejouir,etensuite,jevousdéfoncerailabouchejusqu’àcequecesoitmontour.Oui,nousnousaimons.Noussommestrèsclairssurcettequestion,àprésent.Maiscelaneveutpas

direpourautantquenotredynamiquesexuelledoitchangerlemoinsdumondeàcausedecela.Alors,jefaiscommetoujours:jerelèvelementond’unairdedéfietjejoueleseffrontées.—Vousn’avezpasàmedirecequej’aiàfaire.Shawfaitcepetitsourireencoininsolentetsexyquej’adore.Ledéfiestrelevé.Ilm’empoignepar

les hanches,me retourne et d’unemain sur le dos,me pousse dans la position que je refusais deprendre.Puisilmemaintientenplacependantqu’ilenlèvesonpantalon,sansjamaisvoirlesouriresatisfaitquej’aisurleslèvres.D’un coup de reins rapide et brutal et qui aurait très bien pume faire très mal, il me pénètre.

J’auraisétéprojetéedel’autrecôtédulits’ilnemetenaitpas,maisjenemeplainspas.Ilestàmoietjesuisàluietiln’estpasquestionqu’ilensoitautrement.Unefoisqu’ilestentièrementenmoi,ilsepenchesurmondosetm’enveloppejusqu’àcequesa

bouchesoitsurmonoreille.—Montitrededirecteurassocié indiquetout lecontraire.Etvouspouvezpariervotredélicieux

petitculquejevaisenprofiterpleinement.Etavecdescoupsdeboutoirlentsetpuissants,ilmebaise.Sesbraspasséssouslesmienspourme

saisirparlesépaules,ilveilleàcequejenepuissepasluiéchapper.Nonquejeleferaissij’enavaislapossibilité,car j’aime le sentir toutprèsdemoietentendreseshalètementset sesgémissementsrésonnerdansmesoreilles.Sescoupsdereinssontcourtsetprécisetsesdentsmefrôlentlanuque.Jejouisetlespalpitations

demachattesontencoreplusprononcéesgrâceàl’épaisseurdesabite.—Jevousenprie,dit-iltoujoursaussiégocentrique.Surce,ilmelâchelesépaulesetseredresseavantd’empoignermeshanchesetmelabourerplus

violemmentencore.— Et ce fichu tatouage va être enlevé à peine nous aurons atterri à San Diego, ordonne-t-il,

apparemmentpastrèsravidevoirlesouvenirdeCaseyàcetendroit.Vousêtesàmoi,putain.Oui,jesuisàluietjeseraiheureusedesatisfairecetteexigencequin’enestpasvraimentune.Nous

allonsdevoirnousoccuperderéglerdestasdechoseslorsquenousseronsrevenusdanslemonderéel. Même si, pour l’heure, il s’occupe surtout de me donner un autre orgasme. C’est sontempérament possessif qui l’y pousse. Je détesterais presqueme l’avouer, car j’ai toujours été unefemme très indépendante, mais cela neme gêne pas d’être soumise avec lui. Uniquement dans lachambre, évidemment.En dehors ?Eh bien, c’est une autre histoire, une autre affaire et une autrepartiedecequenoussommes.Quandmondeuxièmeorgasmedécroît,labitedeShawabandonnemachatteetilmeretourneface

àlui.Ilsebranled’unemainetsonexpressionseradoucit.—Jet’aime,dit-ilavecunetendressequejeluiairaremententendue.—Moiaussi,jet’aime.

Etcelasevoitdansmesyeuxaussi,carjesuissincère.—Tantmieux.Maintenant,sucemabite,ordonne-t-ilenposantl’autremainsurmonépauleeten

meforçantàmebaisser.Etcelaaussi,j’adore.Jem’agenouille,lelaisseposerlamainsurl’arrièredematêteetavancersonglandjusqu’àmes

lèvres.Levoyantencorehumide,jetirelalanguepourygoûter,gestequiluiarracheungémissementapprobateur.Shawesttrèsvoyeur.Ilaimeregarderetilapprécielespectacle.Alors, jeleluioffre.Faisanttournermalangueautourdugland,jefermelesyeuxetgémisensentantmasaveursurlui.—BonDieu,cequec’estsexy,souffle-t-il,haletant.Je lève les yeux vers lui et je sens de nouveauma chatte exposéemouiller quand je le vois se

mordrelalèvre.Commej’aienviedelamordremoiaussi,jemerisqueàunpetitgestedominateur:jetiresursonbraspourleforceràsebaisseretmelâcheravantdeluiattraperlatêteàdeuxmainsetl’embrasser.Jesuisàpeuprèssûrequ’ilmelaissefaireparcequ’ilaenviedemegoûteraussi,maisj’ai à peine commencé qu’il percemonpetit jeu à jour et essaie de se dégager. Je suis toute fièred’avoirréussiàleretenirassezlongtempspourmordrecettelèvresucculentequejeconvoitaisetleforceràpresqueseladéchirerpourselibérer.—Assez,dit-ilenseredressant.Il passe la langue sur ses lèvres pour vérifier qu’il ne saigne pas etme foudroie du regard en

voyantleplaisirquejeprends.—Ahoui?Tutecroismaligne?demande-t-il.(Jehochelatête.)Enlèvetonchemisier.J’obéis,puisjepasselamaindansmondospourdégrafermonsoutien-gorgedontjem’empresse

demedébarrasser.—C’est comme ça que je l’aime, approuve-t-il.Maintenant, voyons si tu as l’air toujours aussi

malignequandtut’étouffesavecmabite.Suce-moi.Ilmesaisitdenouveaul’arrièreducrâneetenfoncesabiteentremeslèvres.—Ouvreplusgrand,ordonne-t-il.Jem’exécute,lelaissantmeremplirlaboucheavecsonénormebitejusqu’àcequ’ilnepuissealler

plusloin.Ilmerécompensed’un«c’estbien».Mêmesinousjouonstouslesdeuxnotrerôle,Shawveilleànepasêtretropbrutal.Ilconnaîtmes

limites,etbienqu’illesfrôle,ilnevajamaistroploin.Ilcommencesesva-et-vientdansmaboucheàlacadencequiluiconvientlemieux.Jem’efforcede

suivreetjemedébrouilleplutôtbien,maiscen’estpasuneminceaffairequedel’accueillir.Ilm’aideenbranlantlapartiedesabitequinepeutentrerdansmabouche,toutcelasansmequitterdesyeux.Les veines de ses bras sont dilatées et les tendons crispés ondulent souplement sous sa peau à

chaquemouvement.Ilcommenceàhaleter,laboucheentrouverte,etjedevinequ’ilvabientôtjouir.MonDieu,j’aimeraistantpouvoirvoirsesmagnifiquesfessessecrisperpendantqu’ilmedéfoncelabouche,maisjen’yaipasdroit.Cen’estpasgrave,carjepeuxvoirsonvisage:lessourcilsfroncésdeconcentration, sescheveuxépars sur son front, et sesyeuxbleusquimecontemplentcommesij’étaislafemmelaplusbelleetlaplusséduisantedumonde.C’est alors qu’il fait ce petit bruit que j’attends. Une sorte de geignement qui se transforme en

grognementsourd.Sabitegonfléeenfleencoredansmaboucheetjemeprépare,mêmesijen’aipastrèsenviequ’ilmejouissedanslabouche.Jesuisprêteàlelaisserfairepourluifaireplaisir.Mais

Shawrévèleunefoisdeplussadélicatesseendécidantderespectermapréférencesurlaquestion:ilse retire et continue de se branler énergiquement jusqu’à ce que son sperme jaillisse et que lasubstancebrûlanteetcrémeusegiclesurmesseinsnus.Jetrouvesexylebruitqu’ilafaitavantdejouir,maiscen’estrienàcôtédeceluiquiaccompagne

sonorgasme.J’adore.Àtelpointquejemefichecomplètementqu’ilm’aitinondélesseins.Jesuisprêteàdonneràcethommetoutcequ’ildésire.Etjesaisqu’ilferademêmepourmoi.Lavieestparfoiscruelle.Shawenestlapreuvevivante.Etc’estidiotdevouloirl’affronterseul,

mêmesinousavonstouslesdeuxprouvéquenousensommescapables.Maispourquoipersisterseulquandonn’yestpasobligé?Mêmedesgensaussiindépendantsquenousontbesoind’unautresurquicompteretquisoitprêtàtout.EtjesuisheureusequeShawtiennecerôlepourmoi.Carsijedoisaffronterlemondeavecquelqu’unàmescôtés,jenevoispasquienseraitplusdignequelui.Nous avons commencé comme les pires rivaux d’un point de vue professionnel, mais nous

sommesdevenusenquelquesortepartenairessurunplanpersonnel.Et,oui,cepartenariatpersonnelestunrisque,maisquivautlargementlapeined’êtrepris.Nosmentors,WadePriceetMontyPrather,seraientfiersdenous.Mêmes’ilsn’ontpasvraimentbesoind’êtreaucourantdesdétailscroustillants.Shawetmoipouvonslesgardercommenotrepetitsecretànous.

Épilogue

Deuxmoisplustard…

Mia

Lesmatinssont incontestablementmonmomentpréférédela journée.AssiseàmonbureauavecmonordinateurdevantmoietunevueimprenablesurStoningtonetlabaiedePenobscot,jepeuxvoirlesoleilpoindreàl’horizontoutenlaissantlibrecoursàmonimaginationdéchaînée.L’installationdansmanouvellemaisonestunrêvedevenuréalitéetleshabitantsdeStoningtonm’ontaccueillieàbrasouvertscommesij’étaisl’unedesleurs.Et puisque nous parlons d’eux, je suis totalement remplie d’admiration pour ces gens. En deux

mois,lenettoyageaprèslepassagedel’ouraganAylaaétéachevéetlestravauxdereconstructiondesquelquesmaisonsetcommerceséprouvésparlatempêtesontbienavancés.Letourismen’apaspâtietlesecteurdelapêcheauhomardn’amêmepassouffert.Toutsembleredevenunormal.Jenepensepasqu’uneautrevilleauraitpufairepreuved’autantderésistance,maisjecroisquelesinsulairesduMainesontfaitsdecebois-là.J’aiessayédem’inspirerdeleurténacitéencequiconcernemacarrière.Alorsqueserapprochela

datederemisedumanuscritsurlequeljetravaille,jesenslapaniquemonter.Lesmotsontdeplusenplusdemalàveniretjen’aipasdenouvellespéripétiesàraconter.Jesuistrèsendessousdunombredepagesquejesuiscenséefournirselonmoncontrat.Celametracasse.Etplusjem’inquiète,plusjesuisstressée.Etplusjesuisstressée,plusj’aidemalàécrire.Peut-être que j’aurais dû attendre d’avoir achevémon roman avant de déménager. Peut-être que

j’aurais été moins distraite par ma vie privée et plus concentrée sur ma carrière. Mais je suisPoissons,etlesPoissonssontconnuspourleurtempéramentexcessivementromantiqueetrêveur,cequiestaussiutilequenéfastepourmonmétier.Mêmesi,endéfinitive,avecuneviedésormaisplusstable,jesuisassezinstalléepourpouvoirmeplongerdansmontravailetquelesmotsmeviennentplusfacilement.J’espèresimplementquecen’estpastroptard.Unetassedecaféavectroissucrettesetunegénéreusedosedelaitàlacannelleglissecommepar

miracledevantmoi.

—Bonjour,mabeauté,murmureunevoixensommeilléeàmonoreille.Jesourissansavoirbesoinderegarderd’oùvientcettevoix,mêmesi j’enaiévidemmentenvie.

Toutesmesinquiétudesconcernantmadatederemisedumanuscrits’envolentdèsl’instantoùjemeretournepourvoirceluiquipartagemamaison.Casey.MonCasey.Ilestencoretoutébouriffé–cepourraitêtredûàsonoreiller,maisjesaisquecesontmesdoigts

lescoupables–etsabarbeesttoutebroussailleusecommejel’aime.Ilesttorsenu,maisilaréussiàenfilersonpantalondepyjamafavori–mêmesijelepréfèresans–etilsentencorelesexe.—Bonjour,beaugosse.Il sepencheetmedonne legenredebaiserquimefaitchavirer,puis il jetteuncoupd’œilpar-

dessusmonépaulepourvoircequej’aiécrit.—Attends,jesuisàpeuprèscertainquec’estcequ’onafaithiersoir.—C’esttoutàfaitexact,monsieur,confirmé-je.Tuesmamuse,aprèstout.Celadit,jesuiscoincée

surcettepartiedelascène.Jeremontedansletextepourluimontrerledébutmanquant.Illitl’endroitquejeluiindique,avec

unintérêtaussisincèrepourmontravailquel’estlemienpourlesien.Etilnetardejamaisàmefairedessuggestionspourl’histoireet,commec’estunhomme,ilyatoujoursuneoudeuxpropositionsdemeurtre.Cequiestunpeumacabrepourunromansentimental,maisentoutcas,ilessaie.—Mmm, ehbien, voyons si je peux t’apporter unpeud’inspiration, susurre-t-il avecune lueur

coquinedansleregard.Avecle temps, ils’intéresse(et il lesapprécieaussibeaucoup)auxfacettes lesplussexydemon

travail.Aprèstout,c’estluiquienrécoltetouslesavantages.Ilretournemonfauteuilversluietsemetàgenouxtoutenglissantlesdoigtssouslaceinturede

mon pantalon pour l’enlever. Je glousse en levant les fesses pour lui faciliter la tâche.MonDieu,commej’aimelamanièredontcethommem’inspire.Je ne sais pas très bienoù atterritmapetite culotte une fois qu’il l’a lancée à l’autre bout de la

chambre,maisenmêmetemps,jem’enfichecomplètement.Caseym’adéshabilléeetm’aécartélesjambesafindepouvoircouvrirdebaisersl’intérieurdemescuisses.Etmêmesijesuisparfaitementconscientequec’estsabouchequimelèchelapeau,jefermelesyeuxetlelaissem’entraînertoutaufonddemoi,làoùleshistoiresdefictionprennentvie.Jesuisunefillechanceuse,unesacréeveinarde,etlui,c’estunhommevraimenttrèsdoué.Ilm’attrapeetmetireenavantsibienquemesfessessontauborddelachaise.Etc’estlàqu’ilme

lèche.Caseynesepressejamaisquandilmedévorelachatte.Ilaimesavourersonmomentetjenesuis

quetropheureusedelelaisserfaire.Deseslèvresdouces,ilembrasselégèrementmonclitoris,etsalangueestgénéreuseentrelesplisdechair.Deuxgrosdoigtssefaufilentenmoietillesfaitalleretvenir,d’abordaveclenteur,puisdeplusenplusviteàmesurequejem’habitueàleurprésenceetunefoisqu’ilatrouvémonpointG.C’estunexpertenlamatière,désormais.D’abordtrèstraditionnelaudébutoùnousfaisionsl’amour,j’airéussiàleconvaincredes’ouvriràdenouvellesexpériences,cequi a ouvert la voie à de tout nouveaux plaisirs, non seulement pour nous, mais aussi pour mespersonnages.Ilglissesonpoucedansmoncul,gestequimecontraintàluiempoignerlescheveuxtellementle

plaisirqu’ilmeprocureest immense.Sabouchesurmonclitoris, sesdoigtsdansmachatteet sonpoucedansmonculvontrendretrèscourtletrajetquivameconduireàunorgasmeexceptionnel.

Satêtes’agiteentremesjambesetsescheveuxmechatouillentlescuissesquienserrentsonvisagebrûlant.Mais c’est sabarbequime titille comme jamais. Il le sait et il enprofitedèsqu’il en a lamoindreoccasion.Toutencontinuantdetétermonclitoris,illaisseéchapperungémissementquandjeluiempoigne

les cheveux. C’est un avertissement, qu’il sait que je vais ignorer, car mon châtiment sera marécompense.Sesdoigtss’enfoncentplusencoreenmoietsabouchedevientplusinsistantetandisquesonpoucecommenceàentreretsortir.— Chéri… Oh, mon Dieu… Continue ! l’imploré-je en sachant très bien qu’il ne compte

absolumentpass’arrêter.Sesdoigts et sonpouce s’activentdeplus enplusvite. J’écarte les jambespour lui laisserde la

place, car ce n’en sera que plus avantageux pourmoi si je lui accorde toute liberté.Casey nemedéçoitpas.J’oubliemespersonnagesetleurhistoireetj’ouvrelesyeuxpourleregardertandisquesalangueetseslèvresfontdeschosesindiciblesàmonclitorisetquelesmusclesdesesbrassecrispenttellementilsefaitinsistant.Sonpoucequittemoncul,maiscelam’estégal,carc’estlaseulefaçondontilpeutmepénétrerconvenablementdetoutelalongueurdesesdoigts.Etjeprécisequ’ilssontaussilongsqu’épais.C’estsabouchequirenonceensuitequandilseredressepourcontemplerlerésultatultimedeson

acharnement. Casey connaît mon corps comme personne. Tout indique que mon orgasme estimminentetiladoremevoirruisselersursesdoigts.Ils’enfonceenmoiavecencoreplusd’ardeuretsesdoigtsclaquentsurmeschairstoutenm’ébranlantdelatêteauxpieds.Moncœurbat lachamadeet j’ai lesoufflecourt.Monventresecrispeet je laissemonorgasme

déferleravecungémissementrauqueetretentissant.Caseyregarde.Ilregardeetsepourlèche.Etlorsquejejouis,ilretiresesdoigtsetlesenfoncedans

sabouche.Unautreorgasmemefoudroieetmêmesil’instinctmedictedefermerlesyeuxetdemecambrer,jen’enfaisrien.CarjesuishypnotiséeparlespectacledeCaseyentremescuisses.Ilcontinuedemebesognerdelabouchejusqu’àcequejeretombe.Puis,avecundernierbaisersur

monclitorisàvif,ilserassoitavecunsourireespiègle.Ilserelève,sebaisseetm’embrasseàpleinebouchepourquejepuissemesentirsurseslèvres.—Écrisça,mechuchote-t-ilàl’oreilleavantdequitterlapièced’unpasguilleret,avecl’assurance

del’hommequisaitqu’ilestdésormaisdanssondroit.—Jet’aime!crié-jeaprèslui.—Moiaussi!

Cassidy

Avoiruneliaisonavecsonchefn’estpasquelquechosedefacileàgérer.Maispourl’instant,toutsepassebien.Shawetmoicontinuonsdenouschamaillercommeavant, toutennousréservantdesmomentsprivilégiésdansl’intimité.Àvraidire,lesdisputesnefontquedécuplernotredésirmutuel.Nousnesommespasdugenrenunucheetc’estnotreattitudevindicativel’unenversl’autrequinousapoussésdanslemêmelit.Toutsepassedonccommed’habitude.Saufqu’aprèsm’avoirrenverséesur

unbureaupourm’apprendrelesbonnesmanièresàcoupsdebitesousprétextequejel’airidiculisédevantlescollègues,ilconclutparun«jet’aime».DepuismonretourdeStonington,nouspassonstoutesnosnuitsensemble.AprèsledépartdeShaw

pourSanDiego, je suis restéequelques jourspour aidermesparents, jusqu’aumomentoù ils ontpratiquement dûme flanquer à la porte etme coller de force dans l’avion pour que je reparte leretrouver. Apparemment, sans lui, j’étais d’humeur changeante et je les rendais dingues. Allezcomprendre.Ilsontpassédesannéesàmeculpabiliserdenepasrentreràlamaisonassezsouvent,toutcelapourmefairecomprendreaujourd’huiquej’abusedeleurhospitalité.Maisj’aiétéheureusederetrouvermonquotidien.Etj’avaishâtedemeblottirdenouveaudansles

brasdeShaw.J’aipassétoutesmesnuitspelotonnéecontrelui.Tantôtchezlui,tantôtchez-moi.Nousn’avons pas commis l’erreur de nous installer ensemble,mais nous avons laissé des affaires chezl’unetchezl’autre,genrepyjamasetbrossesàdents.ShawaréussiàconserversonpostededirecteurassociéchezStrikerSportsEntertainmentmalgré

la catastropheque labrèvedisparitiondeDenver a failli provoquer.Catastrophedontmoncoloc’,Quinn, a été le centre. Je suis heureuse pour Quinn. Denver a fait son coming out durant uneconférence de presse, etmalgré les commentairesméprisants auxquels nous nous attendions tous,Quinn,luietleurrelationontsurvécu.Lanouvelleaétésurtoutesleslèvrespendantàpeuprèsunmois,puis leschosesontfiniparsecalmer.Franchement, j’aicruqueDenverseraitdéçuquandlecirqueseraitterminé,maiscommeilfaitlesunesàcausedesesexploitssurleterrain,ilestsatisfaitd’êtredenouveausouslefeudesprojecteurs.Ilcherchevraimentàfaireparlerdelui.Quinnn’estpasenreste,etcelafaitd’euxlecoupleparfait.Etpuisquenousparlonsdeperfection…LandonetSashasonttoujoursensemble.Ils’occuped’elle

commeun parfait gentleman doit traiter une dame, et les seules larmes qu’elle verse sont de joie.Franchement,nousnousattendonstousàcequ’illademandeenmariaged’unjouràl’autre.Landonétantunromantiquequiavancemasqué,jeneseraispaslemoinsdumondesurprise.Cequimesurprend,c’estqueChazsesoitenfinraisonnéetaitacceptésasituationfinancièrepour

pouvoirproposeràDemide sortir avec lui.Lapetite cochonneétait tellementexcitéequ’elle s’estdonnéeàluilepremiersoir–faitqueSasha,Quinnetmoiluirappelonsàlamoindreoccasion.Etelleenprofiteenretourpoursevanterdesestalentsaulit.Tantmieuxpourelle.LeMonkeyBusinessest toujoursnotrerepaireet ilestdeplusenplusfréquenté.Bienquenotre

tablesoittoujoursréservéeetsurveilléeparnotrebarmanpréféré,Chaz.Cetraitementdefaveurestvraiment agréable. C’est notre petit refuge, notre deuxième maison. C’est donc là que nous noustrouvonsassisaujourd’hui,commen’importequelautrejour.Laseuledifférence,c’estquecelafaitlongtempsquejen’aipasbuunebièrebienfraîche.Jemedemandemêmesijevaislasupporter.Cela fait quelques semaines que je ne suis pas dansmon assiette. Rien de plus que des nausées

passagères.Jelesaiattribuéesaustressduvoyageetàl’obligationdemeréhabituerprécipitammentàlaviedeSanDiegotoutendevantrattrapertoutleboulotlaisséenplanpendantmonabsence.Etlesdossiers se sont entassés. Non qu’Allie n’ait pas fait tout son possible pour garder un semblantd’ordre.Certainsdemesclientsexigentsimplementundialoguepermanentavecleuragentetnesontsatisfaitsqu’enparlantànulautrequemoi.Celanemegênepas,maiscelam’épuiseenpermanence.Shaw,aubaravecLandonetChaz,estdevantunebièrefrappéequimemetl’eauàlabouche.Enfin,

jenesaispassic’estlavuedeShawouduverrequimedonnedesenvies,maiscommejenepeuxpasvraimentsautersurShawici,jedécidedemerabattresurlabière.Ilmesuffitd’unhochementdetêtedanssadirectionpourqueChazcomprenneetm’enfasseglisserunesurlecomptoir.

La bouteille glacée dansmamain et l’arôme du houblon quime titille les narinesme donnentvraimentenvied’ygoûter.J’aiàpeineletempsdelaporteràmeslèvresqu’onmel’arrache.Avecungrondement,jejetteunregardcourroucéàlacoupable,Demi.— Pas question, objecte-t-elle en passant la bouteille à sa complice, Sasha, qui la donne à un

Landonperplexe.Aumêmemoment,laclochettedelaportetinteetQuinnfaitsonapparition.Lepasguilleret,ilse

dirigedroitversnousenjetantunregardnoiràdeuxclientsquionteulemalheurderestersursonchemin.—Jel’ai,dit-ilenbrandissantunsacenpapiermarron.Allez,onyva.— Arrêtez, les filles, c’est idiot, gémis-je en voyant Demi et Sasha se lever d’un bond et

abandonnernotretable.—Cen’estpasidiot.Tuasacceptédelefaire,merappelleDemi.Vraiment,jelesdéteste,parfois.—Trèsbien,soupiré-jeenmelevant.Finissons-en,commeçaj’aurailapaix.TelleprésidentdesÉtats-UnissouslaprotectiondesServicessecrets,jemeretrouveencadréepar

mesamisquim’escortentjusqu’auxtoilettesaufonddelasalle.Sashapousselaporteenboisverni,passelatêteàl’intérieur,puislaressort.—Lavoieestlibre,annonce-t-elle.Demi jette un coup d’œil vers le bar et, satisfaite que notre brusque disparition soit passée

inaperçue, me pousse à l’intérieur. En dehors des toilettes pour handicapés, il n’y a qu’une autrecabineetunlavabo.End’autrestermes,cen’estpasassezgrandpourcontenirquatrepersonnesauxfortespersonnalités,maisnousnousyentassonstoutdemême.Commes’iln’étaitpassatisfaitdel’inspectiondeSasha,Quinnvérifiequ’iln’yapersonnedansles

W-C.—Tiens,dit-ilenmetendantlesachet.Aumême instant, la porte d’accès aux toilettes s’ouvre et une grande bonne femme sans forme

entre.Oudumoinsessaie-t-elle.—Non!Occupé!luidéclareQuinnenretenantlaportepourqu’ellenes’ouvrepasdavantageet

enluifaisantsignederetournerd’oùelleestvenue.Lafemmereculeenmaugréant.—Vousn’avezmêmepasledroitd’êtrelà-dedans.Cesontlestoilettesdesdames.Unemainsurlahanche,Quinnluimetlespointssurlesi,enlatoisant:—Machérie,jesuisplusdamequevousneleserezjamais.Vousnetrompezpersonneavecvotre

soutien-gorge rembourré. Peut-être que si vous épiliez vos jambes velues… Et votre moustache,ajoute-t-ilsournoisement.—Commentosez-vous!s’exclamelafemme.— Comme j’ose ? s’indigne Quinn. Comment vous, vous osez ! Je sais que les modes sont

cycliques,maisvous essayezdenous ramener à la préhistoire.Vous devriez avoir honte,madamePierrafeu.Allezplutôtvousoccuperdevotremari,conclut-ilenagitantl’indexsoussonnezavantdelafairesortirdeforce.DemileféliciteetSashaaunfourire.Puistoustroisreportentleurattentionsurmapersonneetme

considèrentenhaussantlessourcils.Jelèvelesyeuxaucielensoupirant.Ilsnevontpasmelâcher.—OK,trèsbien!Jetournelestalonsetentredanslacabine,talonnéeparletrioquirestelààmefixer.—Ça vous ennuierait deme laisser ? demandé-je en leur faisant signe de reculer pour que je

puissefermerlaporte.Seigneur,cequ’ilssontmalélevés.—Cecaractèreirritablenefaitqueconfirmernossoupçons,lanceDemiàtraverslacloison.Je l’imiteavec insolence,mêmesiellenepeutpasmevoir,mais jem’exécute.Neserait-ceque

pour leur prouver simplement qu’ils se trompent. Je sors le contenu du paquet, baisse ma petiteculotte et me mets en position. Une fois que j’en ai terminé, je me relève et j’attends. Encore etencore.—C’estl’heure!crieSasha.D’unemaintremblante,jem’emparedupetitstickroseetblancetlislerésultat.Quandj’ouvrelaporte,ilsseprécipitentsurmoietnemelaissentpaspasser.Jenepeuxqueles

regardersansunmot.Unsilencedemorttombedanslapièce.Quinnestlepremieràbouger.Lentement,ils’approchepourjeteruncoupd’œilaustick.—Qu’est-cequeçadit?demandeDemi.—Madameaunpolichinelledansletiroir.Etzut.

Remerciements

J’airéfléchipendantdesmillionsd’heuresauxnomsquej’allaiscitericienpassantenrevuetouslesgenshabituels.Etmêmesijecomptebienlesciter–oui,parcequ’ilsm’ontsoutenue–,j’aidécidédelefaired’unemanièrequileurpermettradesavoir–etàvousaussi,lecteurs–l’impactqu’ilsontvéritablementeusurcelivre.Dansmesprécédents remerciements, j’aiditque les livresavaientétédifficilesàécrire,maisce

n’étaitriendutoutàcôtédecelui-ci.Vraiment.Etpasparcequel’histoireoulespersonnagesétaientcomplexes.Cettefois,c’étaitpersonnel.Trèsintime.Jevousépargnerailesdétailssordides,maistoutce qui m’est arrivé – tout ce que j’ai laissé m’arriver – pendant que j’écrivais ce livre peut êtrerésuméàuneseuleetuniqueraison:j’avaisoubliéquij’étais.Dansma vie étaient présentes une quantité de personnes précieuses qui se sont efforcées deme

remettre sur les rails – PatriciaDechant,Whittney Sherman,KimberlyRackley,MaureenMorgan,JanellRamos,MelanieEdwards,BrittnieDay etBobbieButler – et si leurs efforts ont retourné lasituationparcequ’ellesmeconnaissentmieuxquequiconque, j’aidûrésoudre touteseulecertaineschoses.Cequiaexigéénormémentdetempsetd’énergie,alorsquejepeinaisàtrouverlesmotspourraconterl’histoirequej’avaisentête.Pasuneseconde,jen’aitenupouracquisel’occasionquim’étaitdonnée,bienqu’unécrivainreste

toujoursunêtrehumainenmesuredetraversertoutseullestragédiesdelavie.Leschamboulementsquiarriventdanslaréalitépeuventavoirdesconséquencesdirectessurlelivrequ’ilécrit.Dèslors,dansceromansontéparpillésdesfragmentsdemonâme.VouslesretrouverezdanslesmomentsdeconfusiondeCassidy,quandShawcomprendcequiestvraimentimportantdanslavie,quandCaseyapprend à lâcher prise, quandMia fuit la réalité, et dans la tempête qui bouleverse la vie de gensinnocents.Mon éditrice incroyablement compréhensive, Shauna Summers, et mon agent, Alexandra

Machinist,m’ontsoutenuecommevousn’imaginerezjamais.Jen’aifranchementpasdemotspourlesremercierdes’êtremontréesaussiconciliantesetd’untelsoutien.Unmotenparticulier:merci,Shauna,dem’avoirdonné la libertédem’exprimeretdem’avoir faitconfiancepour raconterunehistoirevraie.La révélation est arrivée au moment où – en tant qu’auteur de romans sentimentaux – j’avais

commencé à croire que les romances de contes de fées ne sont qu’une fiction. Le destinm’a faitconnaîtreunhommequiatoutremisenquestionetm’afaitchangerd’avis.Merci,monSuperman,de

m’avoirpermisdecroiredenouveauauxcontesdefées.Moncheminementincroyablementdifficileversmonaccomplissementindividuelaétéuncombat

de tous les instants, mais j’en suis sortie victorieuse. Alors, retenez bien la leçon,Mrs. Parker…n’oubliezplusjamaisquivousêtes.

C.L. Parker est née à Los Angeles. Avant de se consacrer pleinement à sa carrièred’écrivain,elleaservipendantdeuxansàlabasenavaledeNorfolkenVirginie.SasérieMillionDollarestunvéritablebest-sellerauxÉtats-UnisetaétépubliéeenexclusivitéauLivredePoche.C.L.Parkervitaujourd’huidansleKentuckyavecsesdeuxfilsetsonchien.

Titreoriginal:GETTINGROUGH

Couverture:©SteffenLachmann/GalleryStock.

©C.L.Parker,2016.©LibrairieGénéraleFrançaise,2016,pourlatraductionfrançaise.

ISBN:978-2-253-11022-4

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Épilogue-Deuxmoisplustard…Mia

Remerciements

LeLivredePoche

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