carte manipulare vertebrala

244
ROBERT MAIGNE LES MANIPULATIONS VERTÉBRALES Préface du Professeur S. de SEZE EXPANSION SCIENTIFIQUE FRANÇAISE 15, rue St-Benoit - Paris-Vl e

Upload: florin-lozneanu

Post on 22-Nov-2015

171 views

Category:

Documents


34 download

DESCRIPTION

o carte interesanta, pentru cei interesati in recuperarea medicala, ca alternativa la medicina clasica.

TRANSCRIPT

  • ROBERT MAIGNE

    LES MANIPULATIONS VERTBRALES

    Prface du Professeur S. de SEZE EXPANSION SCIENTIFIQUE FRANAISE 15, rue St-Benoit - Paris-Vle

  • PREFACE

    C'est avec plaisir que je prsente au lecteur le travail du Docteur Maigne sur les manipulations vertbrales.

    Il y a maintenant une quinzaine d'annes que nous avons introduit dans la mdecine

    hospitalire, comme traitement de toute une srie d'affections douloureuses de la colonne vertbrale, la pratique des manipulations. On sait que, jusqu'alors, ce traitement n'tait gure appliqu que par de rares mdecins se qualifiant volontiers d'ostopathes, et surtout par des rebouteux, tantt avous comme tels et tantt dissimuls derrire des titres mystrieux et munis de diplmes sans valeur mdicale. Aujourd'hui, les manipulations vertbrales font partie des traitements physiques de routine qui, avec la collaboration des Docteurs Thierry-Mieg et Renoult, sont dispenss tous les jours nos malades du Centre Viggo-Petersen l'Hpital Lariboisire. Mais nous avons toujours souhait, en outre, que ce problme des manipulations fit l'objet d'une tude srieuse de la part d'un mdecin possdant fond la pratique de ce traitement, et qui ft capable d'en prciser, en s'appuyant sur les bases de son exprience personnelle, les indications, les techniques et les rsultats. C'est dire avec quel plaisir j'ai pris connaissance du livre de Maigne et combien il m'est agrable de lui consacrer ce court commentaire.

    D'abord parce que ce livre est l'uvre d'un mdecin disposant d'une culture de base solide et de connaissances rhumatologiques tendues. Ne craignons pas de le rpter: une manipulation n'est lgitime et n'a de chances srieuses d'tre efficace que dans la mesure ou elle est fonde sur un diagnostic mdical exact. Les incidents qui peuvent survenir au cours du traitement posent aussi des problmes diagnostiques qui sont d'ordre mdical. L'apprciation des effets obtenus n'est possible que grce une rfrence constante des connaissances anatomo-cliniques qui sont aussi du domaine mdical. C'est pourquoi les manipulations vertbrales sont un acte mdical, la pratique des manipulations par des oprateurs non mdecins n'tant qu'une des formes nombreuses de l'exercice illgal de la mdecine.

    Mais encore faut-il que les mdecins manifestent, par des efforts concrets, le dsir qu'ils ont de perfectionner cet art qu'ils ont seuls qualit pour exercer. Les mdecins qui s'adonnent la pratique des manipulations, crivions-nous il y a trois ans, doivent s'engager dans la voie d'une tude rationnelle des techniques aboutissant leur

  • amlioration. Il n'est gure concevable, en effet, que des techniques conues une poque o les connaissances sur la pathologie lombo-sciatique et cervico-brachialgique taient assez vagues et mme errones sur plusieurs points, aient pu cependant atteindre, ds cette poque, un point de perfection insurpassable. Il est certain, au contraire, que des progrs sont possibles dont on peut attendre avec confiance une amlioration des rsultats. Nous sommes heureux que le Docteur Maigne ait entendu cet appel et qu'il nous apporte aujourd'hui un ouvrage dont la plus grande partie est consacre la mise au point rigoureuse des techniques manipulatives et dont une autre partie, galement importante, est consacre l'tude et la critique raisonne des indications.

    Ainsi, les mdecins qui sont dsireux de s'initier la pratique des manipulations, comme

    ceux qui dsirent savoir qui conseiller, qui dconseiller le traitement manipulatif, trouveront dans ce livre tout ce qui peut les satisfaire. Mais ceux qu'intressent par-dessus tout le mode d'action, le mcanisme interne des manipulations resteront sur leur faim. Raliste avant tout, thrapeute d'abord, Maigne prouve visiblement l'gard des hypothses pathogniques une juste mfiance. Il sait trop quels abus l'esprit de systme et le manque d'esprit critique ont conduit l'art qu'il exerce avec tant de matrise, et comment l'ostopathie s'est discrdite aux yeux de beaucoup de mdecins pour avoir voulu btir sur des faits rels un systme pathognique fabuleux, o toute maladie s'explique par un dplacement des vertbres, toute amlioration manipulative par la remise en place d'une vertbre dplace... L'attitude de Maigne est tout l'oppos. Il reconnat que le mode d'action des manipulations nous chappe dans la plupart des cas : loin que le succs des manipulations nous livre le secret des lsions qui sont la base des maladies soulages, c'est, au contraire, une meilleure connaissance des lsions anatomiques et des mcanismes qui nous clairera sur le mode d'action des manipulations. Dbloquer, assouplir, restituer une mobilit segmentaire abolie, ces gnralits lui suffisent. Parfaitement convaincu que la sciatique et la nvralgie cervico-brachiale rsultent habituellement d'un conflit disco-radiculaire dont l'lment vertbral mcanique et l'lment radiculaire inflammatoire sont d'importance variable selon les cas, il adopte galement des pathognies orthodoxes pour le lumbago, les lombalgies, les cphales d'origine cervicale, il ne s'embarrasse pas de savoir par quel intermdiaire on passe du dblocage d'un segment vertbral la gurison d'un lumbago, d'une sciatique ou d'une cervico-brachialgie. Pareillement, ce n'est pas sur des donnes anatomo-cliniques qu'il va conduire ses techniques manipulatrices, les principes qui les commandent sont d'un ordre beaucoup plus gnral : la rgle de la non-douleur et la rgle du mouvement contraire (contraire au sens du blocage) sont les deux rgles d'or qui conditionnent pour lui toute la pratique des manipulations. Mme prudence, mme parti-pris d'agnosticisme, pourrait-on dire, en ce qui concerne les indications : pour dcider que les manipulations sont indiques dans telle ou telle affection et non indiques dans telle autre, Maigne ne se fonde pas sur

  • les ides que l'on peut se faire sur les mcanismes pathogniques de ces affections, mais sur les enseignements d'une longue pratique. Est-il besoin de dire que, loin de lui reprocher cette prudence et cette discrtion, nous lui en faisons, au contraire, un mrite ? Sans doute, les amateurs de pathognie garderont leur curiosit insatisfaite, et le problme physiopathologique des manipulations attendra encore sa solution. Mais prcisment, l'ouvrage de Maigne sera, pour les chercheurs que ces difficults pourraient tenter, le plus vif des stimulants.

    Tel qu'il est, ce livre excellent est certainement celui que l'on pouvait souhaiter pour orienter les jeunes mdecins que leur got pour les thrapeutiques directes attire vers la connaissance des manipulations vertbrales ? A ces jeunes praticiens, nous risquerons-nous donner un conseil ? Aborderons-nous, cette occasion, le dlicat problme des spcialisations ? Sans doute, il est bon qu'il existe un petit nombre de spcialistes qui la pratique journalire et quasi exclusive des manipulations vertbrales donne l'exprience qui leur permettra de faire progresser cette discipline et l'autorit ncessaire pour l'enseigner. Mais nous pensons qu'il n'est pas souhaitable que cette voie soit suivie par un trop grand nombre de mdecins. Qu'elle s'exerce sous la forme de manipulations vertbrales ou sous la forme de tractions, la vertbrothrapie mcanique ne doit pas se constituer elle-mme en spcialit mdicale. La vertbrothrapie mcanique n'est qu'une des techniques, parmi bien d'autres, de la mdecine physique, qui n'est elle-mme qu'une petite partie des thrapeutiques dont dispose la mdecine pour lutter contre les affections douloureuses d'origine vertbrale. Le mdecin qui serait tent de consacrer toute son activit mdicale la pratique des manipulations s'engage, pensons-nous, dans une voie seme de prils. N'ayant qu'une seule thrapeutique sa disposition, condamn ne s'intresser aux affections douloureuses que dans la mesure o des manipulations vertbrales peuvent leur tre appliques, il sera vite tent d'appliquer ce traitement a tous les malades qui s'adresseront lui, quitte modifier quelque peu l'orientation de ses conceptions pathogniques. En mme temps qu'il posera ses indications de faon de moins en moins rigoureuses, il se laissera enfermer par l'habitude dans le cercle troit de quelques techniques routinires. Perdant contact avec l'infinie varit de la mdecine, il finira par se dsinsrer de la ralit pour se livrer aux jeux artificiels d'une mdecine abstraite, et mme par s'garer enfin tout fait dans le got et la pratique dlibre des mdecines irrationnelles.

    Mais nous voici bien loin de l'ouvrage de Maigne dont une des qualits essentielles est,

    au contraire, de maintenir le mdecin sur le terrain solide des techniques et des indications. Excellent guide pour les praticiens de l'art manipulatif, stimulant trs vif pour ceux qui

    sont dous de l'esprit de recherche et que continue d'intriguer l'aspect physiopathologique

  • de ce problme, le livre de Maigne, intelligemment conu, clairement rdig, est celui que nous appelions de nos vux . Nous lui souhaitons la bienvenue, et le succs. S. DE SZE

  • Introduction

    Des efforts violents, des faux mouvements, des traumatismes, des mauvaises positions trop longtemps conserves, ou parfois des troubles statiques, peuvent provoquer des douleurs fugaces ou durables dans n'importe quel systme articulaire. La colonne vertbrale doit, sa fonction de soutien, aux normes tiraillements et pressions qu'elle doit subir, et sa constitution propre (disques qui se dtriorent, multiples articulations) d'tre frquemment atteinte. Il est des rgions, comme le cou et la charnire lombo-sacre, plus que d'autres vulnrables en raison des bras de levier qui jouent sur elles. Certains de ces tats douloureux peuvent tre soulags rapidement, parfois guris instantanment, par des manuvres orthopdiques portant sur la rgion atteinte. Ces manuvres passives forces sont les manipulations. C'est dire que ces manipulations ne peuvent tre dcides et excutes que par des mdecins. En aucun cas, elles ne sauraient tre dlgues un auxiliaire, aussi habile soit-il. Seul celui qui excute sent ce qu'il fait. Il faut le savoir d'un mdecin instruit de la pathologie et de la mcanique vertbrale, pour dterminer la manuvre faire, juger si elle se droule normalement, la modifier le cas chant, et enfin dcider si d'autres manuvres sont ncessaires et lesquelles. Ainsi la pratique des manipulations ne saurait se rsumer l'apprentissage de quelques gestes standards.

    Le but de ce livre est de dcrire les techniques de manipulations les plus utiles, mais surtout d'essayer de les classer et de montrer comment on peut dterminer dans un cas clinique donn l'exacte manipulation faire. Ces manipulations osto-articulaires constituent une des techniques que nous utilisons en Mdecine Physique, et seulement une technique parmi les autres.

    L'adjonction dans un dernier chapitre de cet ouvrage d'une tude sur la gymnastique active du rachis que nous avons demand notre ami Ren Waghemacker de rdiger, montre bien que pour nous la manipulation constitue sans doute un moyen thrapeutique remarquablement efficace dans certains cas, mais n'est le plus souvent qu'une tape d'un traitement dont le but final est la restauration de la statique et de la dynamique normale du rachis.

  • Premire partie

    GENERALITES

  • 1. Rappel historique

    Dans tous les pays du monde et sous toutes les latitudes, il y a toujours eu des rebouteux qui

    ont remis en place les nerfs ou les petits os dplacs , faisant sur un faux diagnostic un geste parfois utile. De pre en fils, les secrets du reboutage se sont transmis, mais tellement enrobs de pratiques mystrieuses que l'excutant ne sait souvent plus discerner dans ce qu'il fait, l'acte utile. A dire vrai, les rebouteux de tradition ne font pas de manipulations, au sens o nous l'entendons dans ce livre ; ils font surtout des frictions, des pressions sur les muscles ou les tendons. Ces procds curieux sont parfois d'une remarquable efficacit. Ils ont t particulirement tudis par notre ami Bellon.

    On trouve dans de vieux traits certaines manuvres qui ressemblent d'assez prs nos

    manipulations. Mais leur premire utilisation systmatique date des environs de 1840, o certains lves de Ling, en Sude, poussant jusqu'au bout l'tude du mouvement analytique, taient arrivs pratiquer quelques mobilisations forces du rachis. La manuvre en Y de Tissi, par exemple, est une manipulation qui permet d'obtenir chez certains sujets un dblocage costo-vertbral donnant instantanment un gain de plusieurs centimtres d'ampliation thoracique (Balland).

    Mais ce n'est qu'en 1874 qu'ont t retrouves, codifies ou inventes, un grand nombre de techniques ingnieuses. Cela est l'uvre d'un seul homme, Andrew Taylor Still. Il en fit un systme cohrent et remarquable qu'il eut tort de considrer comme un moyen thrapeutique quasi universel. Il appela son cole Ostopathie . Elle se distinguait de l'cole traditionnelle par l'importance primordiale qu'elle donnait aux dfectuosits de l'appareil locomoteur, particulirement aux subluxations vertbrales , dans la gense des maladies. L'ostopathie

    Jeune mdecin, Still perdit trois de ses enfants au cours d'une pidmie de mningite crbro-spinale. Il se convainquit que la mdecine faisait fausse route, et aprs une dizaine d'annes de rflexion, il aboutit une conception mdico-philosophique de la maladie (1874).

    L'tre humain est le chef-d'uvre de la nature. Il a en lui tout ce qu'il faut pour lutter contre les agressions de la maladie. Mais lorsque l'intgrit de cet organisme est perturbe par une atteinte de l'appareil musculo-articulaire, il existe alors une faille dans les possibilits de dfense, car cela provoque une diminution de la circulation sanguine de la rgion correspondante. Structure et fonction forment un tout ; toute perturbation de la structure

  • dtermine un trouble de la fonction. Le rachis est la pice matresse. C'est son niveau que ces perturbations sont les plus frquentes et peuvent avoir le plus de retentissement.

    Still se convainquit que par suite d'effort ou de traumatisme, les vertbres pouvaient se subluxer . C'est ainsi que la sciatique tait pour lui cause par une subluxation de la cinquime lombaire, les lombalgies par une subluxation de la cinquime lombaire ou des sacro-iliaques, etc. Mais, il pensa aussi qu'une subluxation d'une vertbre dorsale haute pouvait dterminer des troubles cardiaques, ou celle d'une dorsale basse un dysfonctionnement rnal, conduisant la maladie de ces organes, rendus incapables de se dfendre contre l'agression microbienne. Il est cependant des cas o Still sent son systme insuffisant : celui de la coqueluche, par exemple. Il crit dans sa Philosophy of Osteopathy , publie en 1899, qu'il ne comprend pas l'origine de cette maladie qu'il pense due l' irritation du pneumogastrique par un microbe (La dcouverte de Bordet et Gengou date de 1906). A.T. Still crit dans un style grandiloquent qui se veut prophtique, typique de cette priode et de cette rgion frontier dans laquelle il vit.

    A une poque o la thrapeutique tait bien modeste, ses manipulations lui valurent de nombreux succs, et des malades enthousiastes le confirmrent dans ses thories. Les grandes dcouvertes mdicales taient alors toutes rcentes. Pasteur venait seulement de dcouvrir le rle des microbes. C'est en 1882 que Koch isole le bacille tuberculeux. Lister luttait encore contre le conservatisme en essayant d'imposer l'antisepsie. L'utilisation des rayons X ne commencera que deux dcades plus tard.

    En 1892, Still fonda une cole de mdecine dans laquelle il voulut qu' ct des sciences de base soient enseignes ses thories et ses techniques manuelles, mais il ne voulut pas que le diplme dlivr soit celui de M.D. (Docteur en Mdecine), mais celui de D.O. (Docteur en Ostopathie) pour bien marquer la diffrence de conception de base. Il voulait toutefois que ces D.O. soient es mdecins complets, pleins droits.

    Still mourut en 1918, 90 ans. Il existait alors six Ecoles de Chirurgie et Mdecine Ostopathique. La plupart de ses successeurs ne firent qu'utiliser et perfectionner, d'une faon remarquable d'ailleurs, ses techniques manuelles, et trop d'entre eux se limitrent cette thrapeutique. Ils s'enlisrent dans leur jargon, support indispensable de la manipulation ostopathique. Celle-ci est en effet base sur une thorie particulire de la mcanique vertbrale et sur un examen palpatoire qui cherche apprcier la tension des tissus paravertbraux. C'est cet ensemble qui, selon une convention, dtermine le sens de la subluxation et conduit excuter telle ou telle manipulation.

    Les ides ont beaucoup volu depuis Still chez les ostopathes. Si certains de ses successeurs firent jouer un rle capital la lsion ostopathique , c'est--dire au blocage d'une vertbre en malposition dans le dterminisme des maladies, d'autres, attribuent celle-ci un rle plus modeste. Leur opinion tait que l'irritation du paquet vasculo-nerveux du trou de conjugaison par la subluxation d'une vertbre est sans doute un lment qui perturbe le bon fonctionnement de l'organisme, et peut dterminer des douleurs locales ou radiculaires. Mais le dcoincement de cette vertbre ne saurait toujours assurer la gurison, aussi eurent-ils recours de plus en plus aux thrapeutiques mdicamenteuses, chirurgicales ou physiothrapeutiques.

  • Cette tendance se renfora vers 1935, et les Collges de Mdecine et Chirurgie

    Ostopathiques calqurent leur programme sur ceux des coles de Mdecine Traditionnelle, s'attachrent d'excellents professeurs, et peu peu purent donner leurs lves la mme ducation que celle des M.D. (Docteurs en Mdecine).

    Une dernire tape devait tre franchie dans la priode qui succda 1945 et qui vit les ostopathes avoir dans tous les tats les mmes droits et les mmes devoirs que les M.D. Mais il se crait alors au sein de la profession ostopathique des tendances divergentes. Le courant le plus fort tait celui qui, par opposition au pass, entranait de nombreux jeunes ngliger les thrapeutiques manuelles fatigantes, dlicates bien excuter, ncessitant une certaine habilet, une pratique continue, et le got de les faire. Dsir aussi de s'affirmer vrai mdecin : qui prescrit, infiltre, mais ne tripote pas le malade.

    Il est nanmoins parmi les jeunes D.O. un nombre important qui, tout en utilisant les ressources de la thrapeutique moderne, savent se servir le cas chant de leurs mains, et utiliser les excellentes manuvre s mises au point par leurs ans.

    Actuellement il y a 160.000 M.D. (Docteurs en Mdecine) et 12.000 D.O. (Docteurs en Ostopathie) aux U.S.A. Les droits de ces deux groupes de mdecins sont identiques. La plupart des D.O. sont des mdecins gnralistes, mais il en est de spcialiss dans toutes les branches : obsttrique, pdiatrie, psychiatrie, hmatologie, anatomie pathologique, neuro- chirurgie, chirurgie cardio-pulmonaire, etc.

    Dans leur journal, le J.A.O.A., fort bien prsent, les publications abordent toutes les disciplines mdicales. Les principaux articles parus dans le J.A.M.A. et dans les priodiques spcialiss sont rgulirement analyss. Il n'y est pratiquement jamais question de manipulations. Non pas que celles-ci soient mprises, mais ils savent parfaitement que leurs manipulations font partie d'un systme conventionnel ncessitant l'utilisation de ce qu'ils appellent eux-mmes leur jargon non comprhensible ceux qui n'ont pas reu la formation ostopathique. Tant qu'un autre systme n'aura pas t trouv et accept par les Ostopathes, pour la dtermination des manipulations, et l'explication des techniques il y aura un malentendu entre D.O. manipulateurs et M.D. et le rel apport de l'Ostopathie sera mconnu. La chiropraxie

    En 1895, un picier que d'autres disent magntiseur, D.D. Palmer remarqua une saillie anormale sur le cou du noir Harvey Lilliard, sourd depuis une chute qui s'tait accompagne d'un sonore craquement cervical. Il diagnostiqua une subluxation , la corrigea et rendit l'oue au malade. C'est du moins ce que nous raconte la lgende. Palmer venait vingt ans aprs Still ; on dit mme qu'il fut son lve. Le 18 septembre 1895, le Rvrend S.H. Weed, guri par Palmer, baptisa Chiropraxy cette nouvelle cole calque sur l'Ostopathie, mais qui s'en diffrencia trs vite : 1 par ses techniques faites

  • uniquement de pressions directes et uniquement ou presque sur les premires vertbres cervicales ; 2 par ses thories : alors que les ostopathes s'loignaient de plus en plus de la subluxation , cause des maladies, les chiropractors au contraire considraient que l'unique source des maladies est la subluxation vertbrale, et presque toujours pour ne pas dire toujours, la subluxation de l'Atlas ou de l'Axis.

    B.J. Palmer succda son pre. Les Ecoles de Chiropraxie se multiplirent, et ce fut une formidable entreprise. Les chiropractors comparent le cerveau une dynamo, les organes et les glandes des moteurs. Les fils conducteurs sont les nerfs. Le coincement du fil par la vertbre dplace provoque un ralentissement du moteur d'o rsulte malaise ou maladie. Le chiropractor en ajustant la vertbre enlve le court-circuit et permet la gurison.

    Tel est le style chiropractique. De telles explications, et les espoirs qu'elles suscitent font comprendre l'immense succs de la chiropraxie d'autant que tout est orchestr par une publicit habile et savante, et que la plupart des chiropractors sont des convaincus. Comme l'crivait spirituellement le Professeur Le Lorier, pour le chiropractor, une blennorragie n'est que le rsultat d'un cot turbulent qui a dplac le sacro-iliaque. Il serait puril de dire que les chiropractors n'obtiennent pas des rsultats valables. Ils les obtiennent lorsque la manipulation est indique, et lorsqu'elle est correctement excute, l'endroit o elle est ncessaire. Les techniques chiropractiques sont efficaces mais nous paraissent limites dans leurs possibilits et brutales. Comme pour eux toutes les maladies sont causes par le dplacement d'une vertbre, on ne compte pas les malades atteints de Parkinson, de sclrose en plaques, d'affections les plus diverses qui reoivent plus de cent ajustements en une anne.

    Aux USA, il y a 40.000 D.C. (Docteurs en Chiropraxie), diplms par une soixantaine d'coles, mais dont les plus importantes sont Davenport, Saint-Louis et Chicago. A Davenport, la Mecque de la Chiropraxie, on enseigne que toutes les maladies sont dues au dplacement de l'Atlas et de l'Axis. Pour l'cole de Saint-Louis, au contraire, il n'est pas une maladie qui ne trouve son origine dans un dplacement sacro-iliaque . Il faut aller l'cole de Chicago pour trouver des chiropractors qui manipulent toute la colonne the full spine . C'est le neurocalomtre , couple thermo-lectrique permettant la lecture instantane de la temprature cutane qui indique au chiropractor le sige de la vertbre dplace, et les radiographies qui lui donnent (?) le sens du dplacement. Les sances de rajustement sont toujours courtes mais nombreuses.

    Les droits de ces D.C. sont variables d'un tat l'autre. Ils n'ont par exemple pas le droit d'exercer dans l'Etat de New-York. en rgle gnrale, ils ont le droit d'examiner et de traiter par rajustement vertbral les malades qui se confient eux. Ils ne peuvent ni

  • prescrire ni faire d'injections et de petite chirurgie. On les appelle les Drugless Healers (soigneurs sans mdicaments). C'est sous ce titre que les journaux mdicaux rapportent les procs dont les chiropractors sont de temps en temps les accuss l'occasion par exemple de la mort d'un diabtique pour qui les rajustements de l'atlas n'ont pas remplac l'insuline interrompue ds le dbut du traitement sur l'ordre du chiropractor. A ceux qui s'tonneraient qu'aux U.S.A. les chiropractors soient officiellement reconnus, il faut rappeler qu'il existe entre autres des Docteurs en Naturopathie qui ne soignent que par les lments naturels tels que rgimes, bains, massages et lavements, et que les Christian Scientists n'admettent que la prire comme seule thrapeutique. La Chiropraxie n'a pas volu depuis sa cration. Les manipulative surgeons

    Il s'est cr dans les pays anglo-saxons une spcialit qui s'appelle la Manipulative Surgery. Les manipulative surgeons sont gnralement des chirurgiens orthopdistes. L'un des plus connus est Timbrell Fischer.

    Il utilise les manipulations pour restaurer le mouvement dans des articulations bloques par ce qu'il appelle les adhrences .

    Les manipulative surgeons pensent en effet que quantit d'infections invalidantes, traumatiques ou rhumatismales atteignent et limitent les mouvements articulaires par le moyen de ces adhrences . A partir du moment o il y a perte de mobilit il se produit un cercle vicieux aboutissant l'augmentation des adhrences , la fonte musculaire ou la contracture. La mobilisation est l'arme la plus efficace pour viter ou rompre ce mcanisme. L'immobilisation est alors l'ennemi de l'articulation.

    Il est plus important , a crit Timbrell Fischer, d'apprendre quand et comment on doit mobiliser ou immobiliser une articulation, que d'apprendre des techniques chirurgicales orthopdiques compliques.

    Ces manipulations s'adressent des affections invalidantes telles que les coxarthroses, les priarthrites de l'paule, les arthroses du genou, les lsions mniscales du genou, les entorses sacro-iliaques, les dformations de la vote plantaire avec adhrences tendineuses (nous empruntons ces indication Ray), beaucoup plus qu'aux sciatiques discales et qu'aux nvralgies cervico-brachiales, par exemple.

    Leurs manipulations se pratiquent le plus souvent avec l'aide d'un assistant et se font sous anesthsie, ce qui ncessite une parfaite connaissance des limites normales du mouvement, tant donn le relchement musculaire produit par la narcose. Ces manuvres nous ont paru assez traumatisantes et aveugles, et leurs rsultats irrguliers ; les succs obtenus ne compensant pas nos yeux les risques d'aggravations et les accidents possibles.

  • Forcer les mouvements bloqus va tout fait l'encontre de nos conceptions des manipulations et de mobilisations articulaires. La mdecine physique

    C'est J.B. Mennell (1877-1957) qui a introduit les manipulations vertbrales douces sans anesthsie dans le domaine de la Mdecine traditionnelle.

    Professeur de Mdecine Physique, il a consacr toute sa vie l'tude des manipulations. Le but de son travail a t de faire de l'art des manipulations une possibilit scientifique, bien que cet art puisse tre difficile acqurir .

    Il a tudi avec beaucoup de soin les mouvements articulaires volontaires et non volontaires. Il a bien montr que ces derniers taient de loin les plus importants en thrapeutique manipulative. 1'tude de ces mouvements ne se diffrencie pas pour lui du traitement : lorsque l'un de ceux-ci est restreint, il le restaure en mobilisant progressivement ou brusquement. Mais s'il dcrit des techniques manipulatives intressantes (empruntes pour la majeure partie aux ostopathes), il ne dit ni quand ni comment les utiliser, notamment en ce qui concerne les manipulations du rachis. La partie la plus intressante de son uvre est celle qui concerne les mobilisations et manipulations des membres. On y trouve de trs nombreuses remarques intressantes et des conceptions originales sur certaines douleurs articulaires. Mennell a t le premier faire entrer les manipulations dans le domaine de la Mdecine Physique. Il a t un remarquable manipulateur. James Cyriax, successeur de Mennell Saint Thomas's Hospital, s'est beaucoup attach l'examen et au traitement des douleurs ligamento-musculaires. Il a mis au point un intressant systme d'examen bas sur l'tude des mouvements contraris, et une mthode de traitement par un massage profond et transversal, le deep massage que O.Troisier a fait connatre en France. Il utilise aussi un nombre restreint de techniques manipulatives qu'il pratique dans des indications trs limites.

    En France

    C'est le Dr R. Lavezzari qui a eu le mrite de faire connatre les traitements par manipulations en France, en introduisant en 1924 dans notre pays la mthode ostopathique de Still dont il est toujours l'ardent propagandiste. Il est l'auteur d'un livre que tout le monde connat. Ds 1934, P. Le Go associe sa pratique de l'lctrothrapie des massages et des manipulations, faisant ainsi une premire synthse de Mdecine physique .

  • Quelques annes plus tard, W.J. Douglas donna aux quelques mdecins qui

    s'intressaient ces traitements, de prcieux conseils. Parmi ceux-ci taient Le Corre et Romeyer trop tt disparus, et Pascal Pidallu qui apporta la thrapeutique manipulative son exprience de la gymnastique corrective et de la mdecine sportive.

    Aprs la libration, quelques jeunes mdecins qui s'intressaient aux traitements par manipulations, partirent outre Manche ou outre Atlantique tudier ce que l'on faisait dans ces pays Anglo-Saxons, Thierry-Mieg, puis I,escure, Waghemacker et nous-mme. Chacun ft vite convaincu, aprs avoir vu pratiquer, dans des services officiels, qu'il ne trouverait un enseignement valable que chez les ostopathes dont on leur avait pourtant dit grand mal. C'est ainsi que Lescure, Waghemacker et nous-mme nous retrouvmes lves de M.C. Beal, considr actuellement comme l'un des premiers techniciens de la manipulation ostopathique aux U.S.A. Il nous appris ce que nous n'avons trouv nulle part ailleurs : des techniques de manipulation prcises et douces, et une recherche constante de la perfection du geste.

    Les premiers rsultats des traitements par manipulations dans un service de

    Rhumatologie furent rapports par S. de Sze, J. Robin et Levernieux, et par Coste et Galmiche en 1948, dans une mme sance de la Ligne Franaise contre le rhumatisme. En 1951, Lescure consacrait aux manipulations une thse longuement prpare dans le Service du Professeur de Sze.

    L'intrt tait veill pour cette forme de traitement. Malheureusement, dans beaucoup de cas, l'inexprience des oprateurs a fait prendre pour des insuccs de la mthode ce qui n'tait qu'insuffisance technique de leur part. Il est peu de traitements qui aient fait couler autant d'encre et dclench autant de polmiques de mauvaise foi. Il est vrai que certains masseurs, ayant eu connaissance de quelques techniques manipulatives, se sont faits passer auprs de mdecins ignorant cette thrapeutique pour les aptres d'une science nouvelle, alors que c'est en voyant pratiquer des mdecins spcialiss qu'ils avaient glan leur petit bagage. D'autres, plus hardis, firent que manipulation devint pour beaucoup synonyme de brutalit. Quelques autres, enfin, plus ambitieux, et sans doute encore plus ignorants, soucieux de paratre scientifiques s'intitulent abusivement Ostopathes , et jonglant avec les subluxations et les thories pseudo physiologiques mal assimiles, se servant de la presse, portent dans l'esprit de nombreux mdecins le coup de grce une mthode intressante qu'ils ne connaissent pas.

    Nous serions un pays privilgi si nous n'avions pas en plus un certain nombre de

    Docteurs en Chiropraxie, diplms Davenport, qui ne sont ni mdecins, ni masseurs, et

  • qui rajustent (illgalement) l'atlas de leur prochain au cours de ces brves et nombreuses sances qui caractrisent la chiropraxie.

    Les manipulations sont des interventions qui ne peuvent tre dcides et pratiques que par des mdecins. Cela n'est discutable que pour ceux qui ne savent pas de quoi il s'agit (1).

    ______________________ (1) A la question souvent pose de savoir qui peut pratiquer les manipulations vertbrale le Ministre de la Sant

    Publique et de la Population vient de donner une rponse officielle : Journal Officiel (Dbats parlementaires) 28 juillet 1959, n 1659, p. 1534. - L'ostopathie ou ostothrapie entre dans le cadre de la mdecine physique constitua l'une des mthodes thrapeutiques que peuvent utiliser les mdecins, ct de la chimiothrapie, !a chirurgie, la radiothrapie, la psychothrapie, la dittique, etc. Elle consiste en des manipulations appropries de la colonne vertbrale visant la rduction de minimes dplacements osto-articulaires gnrateurs de troubles pathologiques locaux ou loigns, bnins ou graves. Ces manuvre s sont essentiellement des actes mdicaux, comme le sont les manuvre s de rduction des luxations vraies ; leur technique en est dlicate, les dangers en sont rels. Seuls les docteurs en mdecine ont les connaissances anatomo-cliniques suffisantes pour prescrire les manipulations et pour les excuter, et Ils ne peuvent en aucun cas dlguer l'excution de ces actes des auxiliaires mdicaux. C'est pourquoi il ne peut tre envisag de rglementer une profession de masseur-ostopathe, l'enseignement, l'tude, comme la pratique de l'ostothrapie tant de la comptence des seules personnes titulaires du diplme d'Etat franais de docteur en mdecine, tout comme le titre d'ostopathe ou d'ostothrapeute ne devrait s'appliquer qu' ces seules personnes. Le ministre de la sant publique et de la population n'en mconnat pas pour autant le rle jou par les masso-kinsithrapeutes en rducation fonctionnelle. Aussi tient-il rappeler que ceux-ci, conformment aux textes en vigueur, peuvent se voir confier certains actes mdicaux, bien entendu sur prescription mdicale seulement, savoir par exemple, la pratique des massages avec application de rayons infra-rouges ondes longues, la conduite des exercices de mcanothrapie, l'application des mthodes de posture et, mais seulement sous la responsabilit et la surveillance directe d'un mdecin traitant, la mise en uvre des longations ou tractions vertbrales (Journal Officiel. Dbats Parlementaires, 28 juillet 1959, n 1559, p. 1534).

  • 2. Objet de ce livre

    Les manipulations vertbrales sont, on le sait, fort critiques. Les griefs ne manquent pas

    : thrapeutique brutale, hasardeuse, aveugle, disent les uns ; les quelques rsultats qu'elles permettent ne compensent ni les abus ni les accidents qu'elles provoquent, disent les autres. Il faut reconnatre que tout cela n'est pas sans fondement, et il faut regretter qu'une thrapeutique aussi valable ait suscit tellement de vocations discutables et si peu de travaux.

    Un observateur, curieux de ces problmes (aprs avoir laiss de ct les manipulateurs et

    les doctrines fantaisistes), va dcouvrir deux tendances parmi les praticiens de la manipulation.

    1) La premire est trs rpandue dans les services d'Orthopdie ou de Rhumatologie Anglo-Saxons. La thrapeutique manipulative s'y rsume quelques manuvres standard. Elles sont appliques rituellement tous les cas.

    Une rotation lombaire droite puis gauche, une pression directe, seront le traitement de

    routine des sciatiques, des lumbagos, des lombalgies, des cruralgies, etc. Aucune recherche de spcificit. L'apprentissage est vite fait, mais les manuvres gnralement douloureuses et d'efficacit hasardeuse. L'anesthsie est souvent utilise, ce qui permet des manuvres puissantes et traumatisantes.

    2) La deuxime tendance se rencontre chez les mdecins qui utilisent les techniques

    ostopathiques. L'observateur remarque la souplesse des manuvres, le souci de prcision de l'oprateur,

    et se rend compte qu'une lgre modification de l'application des forces peut transformer un chec en succs.

    Mais lorsqu'il entend parler de 5e lombaire en arrire et droite , il se sent loin de la

    pathologie classique et comprend mal que tout ce systme de manipulation ait pour support des critres aussi peu objectifs. L'oprateur conditionne en effet ses manuvres un examen palpatoire subtil, subjectif, indpendant du diagnostic clinique.

  • Si cela permet ceux qui en ont acquis la pratique d'excuter des manuvres valables, il est bien vident qu'aucun enseignement ne peut tre fait sur ces bases dans le cadre de la Mdecine Traditionnelle ; de mme un ouvrage sur les Manipulations va se trouver rduit une description de techniques en fonction des lsions : manipulation pour un Atlas postrieur gauche ou pour une 7e cervicale en extension et rotation gauche , et non pas en fonction d'un cas pathologique donn : algie cervico-brachiale droite ou sciatique discale gauche L5 par exemple. Nous voulons montrer dans ce livre que l'on peut faire des manipulations vertbrales un mode de traitement rationnel et prcis. Pour cela nous reprendrons les choses la base : nous analyserons le mouvement manipulatif, diffrencierons chaque varit de manuvre, leur donnerons un nom et verrons comment il est possible de manipuler lctivement un segment vertbral. Nous proposerons une technique d'examen reposant sur des critres objectifs, donc contrlables, et une doctrine entranant des rgles d'application trs strictes. Tout cela permettant de dterminer l'exacte manipulation faire dans un cas clinique donn et conditionnant la conduite du traitement. Enfin, aprs avoir dcrit en dtail les techniques, nous analyserons, d'aprs notre propre exprience, les principales applications et indications de cette mthode. Nous esprons ainsi montrer que les manipulations vertbrales ont leur place dans la Mdecine Traditionnelle.

  • 3. Dfinitions Manipulation. Mobilisation

    Manipulation et mobilisation sont des termes souvent utiliss l'un pour l'autre. Ils ne sont pourtant pas synonymes. LA PRPARATION DE LA MANIPULATION

    Elle comporte une mise en position et une mise en tension. Voici un exemple : Un patient est allong sur le dos. Le mdecin lui saisit la tte des deux mains, de la manire figure ci-contre. Il porte lentement la tte en rotation droite, ce mouvement entranant bien entendu le cou, c'est la mise en position. Bientt il peroit une rsistance : il ne peut aller plus loin, il a l'impression d'tre au bout du mouvement possible, impression partage par le patient. S'il insiste et maintient sa pression contre cette rsistance, il fait ce que nous appellerons la mise en tension. Il s'agit ici d'une mise en tension en rotation gauche.

    LA MOBILISATION

    L'oprateur relche sa pression, laissant la tte revenir vers la position mdiane, et recommence ainsi plusieurs fois la rotation droite jusqu' la mise en tension. C'est une MOBILISATION en rotation gauche, mouvement souple, lastique, que lon rpte plusieurs fois.

    L'XCUTION DE LA MANIPULATION

    Mais si, ayant mis en tension, l'oprateur exagre brusquement d'un petit coup sec du poignet gauche la rotation, il a soudain l'impression d'avoir vaincu une rsistance, il peroit un brusque ressaut qui s'accompagne d'un bruit de craquement, analogue celui que l'on produit en tirant d'un coup sec sur les doigts. Cette brusque, sche et courte mobilisation force mais mesure, partir de la mise en tension, est une

  • MANIPUI.ATION, ici en rotation droite. Cette manuvre tend porter brusquement certains lments d'une articulation au-del des limites de leur jeu volontaire et habituel, sans pour autant dpasser le jeu anatomiquement possible de l'articulation. Cela ne veut pas dire qu'elle doive tre brutale, et cela ne veut pas dire non plus que l'oprateur doive utiliser une grande force pour la faire. En aucun cas, cette manipulation ne doit tre douloureuse. De plus, elle doit tre facile si le patient a t plac dans la position convenable, et la force correctrice bien applique. En rsum, le premier temps d'une manipulation est la mise en position correcte. Elle est indispensable. Elle dpend avant tout des points d'appui et du choix de la technique. Le deuxime temps est la mise en tension, celui o l'oprateur prpare le mouvement selon le sens dtermin par l'examen : cette mise en tension est une traction segmentaire oriente. Le troisime temps enfin est la manipulation proprement dite. Il s'accompagne habituellement du fameux bruit de craquement. LE CRAQUEMENT

    Il rjouit le cur du manipulateur novice et satisfait le patient qui pense trouver l, bien tort, la preuve qu'on lui a remis quelque chose en place . En ralit, il signifie simplement que le degr de mobilisation a t suffisant pour exercer une brusque sparation des surfaces articulaires. Ce bruit est un tmoignage de la manipulation pas autre chose. Il est des cas o le manipulateur a intrt ne pas aller jusqu' ce craquement, mais souvent il doit aller au-del. Le craquement est l'habituel accompagnateur des manipulations. On ne l'entend pas au cours des mobilisations passives d'assouplissement. Les craquements existent aussi bien au niveau du rachis qu'au niveau des membres. On peut faire craquer les doigts, les pieds, etc. chaque fois que l'on peut obtenir la brusque sparation de deux surfaces articulaires. Au niveau du rachis, ce sont les articulations postrieures qui craquent, ce n'est pas le disque. Ce bruit parat d au vide articulaire, au brusque dcollement de la capsule (Mennell), ou plutt au mnisque intra-articulaire des articulaires inter-apophysaires postrieures brusquement mis en tension par traction sur ses attaches capsulaires et son retour lastique contre la surface articulaire (J.C. Rnier) : une fois qu'on a produit ce craquement, il faut attendre un certain temps pour pouvoir l'obtenir nouveau. Ce temps de recharge est variable d'un sujet l'autre, d'une plusieurs heures. Le craquement ne prouve pas que la manipulation ait russi. Toute manipulation, bonne, mauvaise ou inutile, peut produire un craquement Le tout est que celui-ci se produise l'endroit o doit se faire la manipulation. Si, de plus, celle-ci a t faite dans le bon sens, alors seulement le craquement a quelque valeur: il tmoigne que la rgion a bien t manipule . Il n'est ni ncessaire, ni suffisant, il est habituel. Un bon manipulateur doit tre capable de faire craquer le rachis d'un sujet normal en entier, vertbre par vertbre, sans lui faire le moindre mal.

  • Les mouvements effectus

    Les mouvements physiologiques de la colonne vertbrale sont la flexion, l'extension, l'inclinaison latrale et la rotation droites ou gauches. Des manipulations peuvent donc tre pratiques selon toutes ces orientations isoles ou combines entre elles. On peut y associer un lment de traction segmentaire. Il est bien vident que l'on ne manipule pas une vertbre, mais un joint. La manipulation agit sur l'cartement des plateaux vertbraux, selon des orientations variables, donc essentiellement sur les disques ; mais galement sur les articulations postrieures, car si minimes que soient les mouvements de ces articulations, ils existent et conditionnent en partie la mobilit vertbrale. C'est l'ensemble : disques, articulaires postrieures et systme ligamento-musculaire d'union que nous appellerons joint intervertbral. Ainsi, on peut dire que manipuler un joint inter-vertbral en extension, c'est rapprocher les bords postrieurs des plateaux vertbraux, le noyau du disque glissant un peu vers l'avant, tandis que les bords antrieurs des plateaux vertbraux s'cartent. Manipuler en flexion, c'est faire le mouvement inverse : les bords antrieurs des plateaux vertbraux se rapprochent, les bords postrieurs s'cartent ; le noyau discal glisse un peu vers l'arrire, Manipuler en inclinaison latrale ou latro-flexion droite, c'est rapprocher les plateaux vertbraux du ct droit et les carter du ct gauche. Manipuler en rotation droite, c'est imprimer un mouvement tel que la transverse droite de la vertbre intresse tende se porter vers l'arrire. On sait que l'anneau fibreux du disque intervertbral est compos de lamelles concentriques formes de fibres obliques. Dans chaque lamelle, les fibres ont la mme obliquit, mais celles des lamelles voisines ont une obliquit inverse. Un mouvement de rotation dans le disque entrane le mise en tension de la moiti des fibres, l'autre moiti se relchant.

  • 4. Identit de la manipulation

    Une manipulation ne doit pas tre une mobilisation force hasardeuse d'un segment

    rachidien qui s'accompagne de craquement.

    Pour tre pratique d'une manire rationnelle, il est ncessaire que la manipulation soit parfaitement prcisable. Tout mouvement passif ou actif du rachis est une combinaison des mouvements lmentaires flexion ou extension, rotation droite ou gauche, latro-flexion droite ou gauche.

    Si l'on dit que l'on a manipul la charnire lombo-sacre en rotation droite latro-flexion droite et flexion, cela dfinit parfaitement la position du joint pendant la manipulation, mais ne prcise pas selon laquelle de ces orientations l'oprateur a forc le mouvement. Ainsi une manipulation en rotation droite sur un joint amen en rotation droite, latro-flexion droite, extension, n'a pas exactement le mme effet qu'une manipulation en latro-flexion droite sur le mme joint en mme position (rotation droite, latro-flexion droite, extension) C'est pourquoi il est mieux, pour dfinir une manipulation et lui donner une identit prcise, de dire : manipulation en rotation droite d'un joint mis et latro-flexion droite et extension, si c'est essentiellement dans le sens de la rotation que l'on veut forcer le mouvement. Lorsque, pour tre plus bref nous disons : manipulation en rotation droite, latro-flexion droite et flexion nous donnons toujours d'abord la coordonne dominante, Celle selon laquelle sera forc le mouvement.

  • 5. Les diffrents types de manipulation Nous dcrirons trois varits de techniques manipulatives :

    Les premires que nous appellerons directes, car elles consistent en des pressions directes faites sur la colonne elle-mme ; les secondes que nous appellerons indirectes, car on utilise pour les excuter les bras de leviers naturels que constituent la tte, les paules, le bassin et les jambes, par l'intermdiaire desquels on peut mouvoir le rachis ; les troisimes, enfin, sont des manuvres indirectes dans lesquelles l'oprateur prend en outre un appui direct ; nous les appellerons semi-indirectes. Les manipulations directes

    Ces manuvres sont essentiellement celles des Chiropractors. Elles se pratiquent avec le talon de la main ; plus exactement c'est le pisiforme qui constitue le point de pression. La force exerce est brusque, brve, sche. Elle s'applique soit au niveau d'une transverse, soit sur l'pineuse. Elle doit tre suivie d'un relchement encore plus rapide que la pression, c'est le recoil de Palmer. Ces manuvres sont plus difficiles bien faire qu'il n'y parat. Elles ncessitent une pression assez forte, non dosable, donc dangereuse. Elles sont toujours dsagrables et souvent douloureuses, et offrent en pratique des possibilits limites. Les manipulations indirectes

    Au contraire des prcdentes, elles sont d'une infinie varit. Elles permettent de manipuler dans tous les sens la totalit des segments vertbraux, avec une force toujours dosable. Elles sont prcdes de la prparation que nous avons vue plus haut: mise en position, et mise en tension qui donnent l'oprateur la possibilit de faire des mouvements de mobilisation rpts et doux, bauchant la manipulation, supriorit vidente sur la brusquerie des manuvres directes. Sans entrer dans les dtails, voici un exemple de manipulation indirecte :

  • Le patient est couch sur le ct droit. Le mdecin lui fait face. Il engage son avant-bras gauche sous l'aisselle gauche du patient, et prend appui avec son avant-bras droit sur l'ischion gauche. C'est la mise en position. Il repousse l'paule gauche 45 par rapport au plan de la table, et il la maintient en cette position, tandis que de son bras droit il appuie en sens inverse sur l'hmi-bassin gauche, provoquant un mouvement de rotation du rachis lombaire, jusqu' sensation de rsistance. C'est la mise en tension. Enfin son bras gauche restant fixe, il exagre brusquement sa pression sur l'ischion, faisant une mobilisation force. C'est la manipulation. En faisant varier l'inclinaison des paules et du bassin, en plaant le rachis lombaire en lordose ou en cyphose, en prenant d'autres points d'appui, et en modifiant la direction de la force manipulatrice, on obtient des manuvres varies rpondant aux diffrentes ncessits des cas traiter.

    Les manipulations semi-indirectes

    Pour obtenir une prcision plus grande, pour certaines rgions, on est amen

    pratiquer des manipulations semi-indirectes. Dans ce type de manuvre, la mise en tension est toujours donne l'aide de points d'appui distance, mais l'oprateur prend aussi un appui direct au niveau du segment manipuler avec sa main, son genou ou sa poitrine. L'effort manipulatif sur cette colonne mise en tension, se fera suivant les cas soit par l'exagration brusque du mouvement distance, le genou ou la main faisant contre-pression pour localiser la manipulation, la contrariant ; soit au contraire en exagrant la pression locale, assistant ainsi le mouvement amorc par la mise en tension distance. Exemple: le patient est assis sur un tabouret, les mains croises derrire la nuque. Le mdecin debout derrire lui, passant ses avant-bras sous les aisselles du patient, lui empaume les poignets ; puis il appuie son genou droit contre le rachis au niveau du joint manipuler. Enfin en soulevant les aisselles du patient et en tirant lui, le mdecin produit la manipulation, tandis que son genou localise la manuvre en faisant contre-appui sur la colonne (fig. 4 et 5).

  • Les qualits du mouvement

    De toute manire il faut bien noter que :

    1 La manipulation ne doit jamais tre le rsultat de deux mouvements contraires. Il existe de nombreuses techniques o l'oprateur semble exercer avec ses deux mains des mouvements en sens oppos. En ralit, une fois la mise en tension excute, l'une de ses mains doit rester fixe, bloquer, et ne donner aucun mouvement. Seule, une main doit tre

  • active, excuter le brusque supplment de mouvement qui effectue la manipulation. Sans cela, il ne saurait y avoir de prcision, de dosage1.

    2 La manipulation n'est pas un mouvement lanc. Il ne faut jamais lancer le

    mouvement. Il ne faut pas partir d'une position neutre faire brusquement un mouvement forc. Il faut toujours amener l'articulation son maximum de tension, l'y maintenir, marquer un temps d'arrt, et seulement alors produire la petite exagration qu'est la manipulation. C'est la seule manire de bien contrler son mouvement, d'tre prcis et doux.

    3 La manipulation est toujours un mouvement contrl, bref, limit et amorti. Lorsque loprateur excute ce mouvement au del de la mise en tension, son mouvement est bref, sec, mais court et mesur. Ce mouvement doit tre limit : exactement comme le coup d'un boxeur qui veut frapper dans une cible lgre et dont le coup s'arrte net, juste en arrire de la cible, ou comme le joueur de billard qui frappe la boule d'un coup bref, sec, suivi d'un lger et rapide recul contrl, bref, limit et amorti.

    1 Dans les schmas de ce livre les points fixes sont indiqus par une croix

  • 6. Localisation de la manipulation sur le rachis

    Nous avons vu qu'une manipulation peut tre parfaitement dfinie par ses coordonnes.

    Il nous faut voir maintenant comment on peut arriver l'appliquer en un point donn du rachis. Il peut paratre absurde ceux qui ne sont pas familiariss avec les manipulations d'affirmer que l'on peut agir d'une manire trs prcise sur un joint rachidien donn. Et pourtant non seulement cela est possible, mais cela est mme indispensable dans la majorit des cas. Le problme existe surtout pour les manipulations indirectes, qui sont presque toujours des manipulations en rotation. Il faut sans doute une certaine habitude et une certaine habilet pour arriver imposer en souplesse au patient toutes les attitudes ncessaires et le maintenir dans la position correcte pendant l'excution de la manuvre. Pour ce faire, on utilise certaines particularits de la mcanique vertbrale qui permettent d'agir plus lectivement sur un segment que sur un autre, en combinant entre elles les diffrentes orientations. En effet, si par exemple l'on impose une rotation au rachis dorso-lombaire d'un sujet assis, en prenant point d'appui sur ses paules, la manuvre portera sur la colonne dorsale basse, vers D8-D9, si le rachis est en position normale. Mais si l'on fait la mme manuvre sur le rachis en flexion, elle portera plus haut, alors qu'au contraire, elle portera plus bas si le rachis est en extension. Il en va de mme au niveau de la colonne cervicale : si l'on saisit entre les deux mains la tte d'un patient allong sur le dos, et l'on pratique une manipulation en rotation, elle portera sur la colonne cervicale moyenne, si celle ci est en position normale, sur la colonne cervicale haute si elle est en extension, et sur la colonne cervicale basse si elle est en flexion. Il n'y a pas que les variations de flexion et d'extension qui modifient le point d'application d'une manuvre, la latro-flexion permet aussi la localisation. Le niveau du point de moindre rsistance en rotation varie en effet selon le degr de latro-flexion associe. On sait d'ailleurs que pour Lovett, rotation et latro-flexion sont un seul et mme mouvement. Si l'on imprime une latro-flexion un segment rachidien et si secondairement, tout en maintenant cette latro-flexion, on introduit un mouvement de rotation de mme sens, ce mouvement de rotation

  • tend tre maximum au sommet de la courbure forme par l'inflexion latrale. On peut donner de cela une image simple, en le comparant aux mouvements obtenus sur un mtre mtallique ruban : imaginons un segment de mtre mtallique vertical que l'on fixe en bas, et que l'on saisit en haut entre pouce et index. Si on lui imprime une rotation, celle-ci se rpartit sur toute la hauteur du mtre, maximum en son milieu. Mais si on l'incline sur le ct, tout en maintenant la rotation, on peut son gr en modifiant ces deux coordonnes, faire varier le sommet de la courbe obtenue de haut en bas, d'une manire trs prcise. Ce sommet est le point de moindre rsistance : un mouvement petit rayon donne une cassure haute, grand rayon une cassure basse : plus importante est la latro-flexion, plus basse est la rotation.

    Ainsi le point d'action d'une manuvre donne varie sur le rachis, selon le choix des autres coordonnes. On peut, en combinant ces coordonnes obtenir que la manuvre excute porte plus particulirement sur tel ou tel segment rachidien. Cela est affaire d'habitude, l'oprateur devant en gnral imprimer d'une main les mouvements et de l'autre main contrler au niveau du rachis, en palpant les gouttires para-vertbrales, les pineuses, l'tage exact o se produit la courbure rsultant des mouvements combins, courbure dont le sommet va tre le point de moindre rsistance, celui o va porter 1a manipulation. La manipulation lective

    Mais quelle que soit l'habilet de l'oprateur, ce mode de localisation par manipulation

    indirecte, n'offre en gnral qu'une prcision limite, et surtout la force manipulatrice

  • imprime distance risque d'tre insuffisante et en tous cas mal contrle. Aussi tout en conservant ce mme procd de localisation demi-prcise, il faut avoir recours, pour faire des manipulations lectives, ce que nous avons appel les manipulations semi-indirectes, parmi lesquelles nous diffrencions les manipulations assistes et les manipulations contraries. 1) MANIPULATION ASSISTEE

    La manipulation est prpare comme il a t vu ci-dessus, en combinant rotation, latro-flexion, extension ou flexion, selon les donnes de l'examen, de manire ce que le joint manipuler se trouve tre le sommet de la courbe impose au rachis. Mais en plus, le mdecin va au cours de la manipulation agir directement au niveau du joint, en l'accompagnant, en l'assistant dans son mouvement. Cette pression directe portant au niveau de la transverse on de l'pineuse de la vertbre sus ou sous-jacente selon les cas, rend la manuvre encore plus lective. Prenons l'exemple d'une manipulation du rachis dorsal o l'on veut obtenir une rotation force droite portant essentiellement au niveau du joint D9-D10. Le patient est assis cheval en bout de table, les mains derrire la nuque. L'oprateur debout derrire lui, passe son bras droit sous l'aisselle droite du patient, et empaume son paule gauche. Tirant sa main droite vers la droite et l'arrire, il imprime alors au tronc un mouvement de rotation qui va normalement, comme nous l'avons vu, puisqu'il n'y a ni flexion ni extension, se passer au niveau de la rgion dorsale basse. Mais si l'oprateur appuie en mme temps son pouce gauche au niveau de la transverse gauche de D9, et si la mise en tension tant faite, il exagre le mouvement de rotation par la main qui tient l'paule, il va simultanment avec le pouce de l'autre main faire une brve pression sur la transverse exagrant localement le mouvement de rotation en assistant le mouvement. C'est pourquoi nous appelons cette technique : Manipulation assiste . Il s'agit ici d'une manipulation assiste en rotation droite. II) MANIPULATION CONTRARIEE Dans d'autres cas, il faudra avoir recours un autre type de manuvre obtenir une manipulation lective. On veut par exemple obtenir une manipulation en flexion portant essentiellement sur le joint D9-D10. Nous allons pour cet exemple nous servir de la technique de manipulation au genou qui sera dcrite plus loin.

    Le patient est assis sur un tabouret, les mains croises derrire la nuque. L'oprateur passe ses avant-bras sous les aisselles du patient, et lui saisit les poignets. Par la position qu'il donne au corps du malade et par l'action de ses avant-bras, le mdecin amne la colonne du sujet en position de flexion globale et fait donc bailler les disques en arrire, et

  • pour localiser la manipulation agit de manire ce que la courbure globale ainsi impose la colonne ait son sommet en D9-D10. Puis il appuie son genou droit ce niveau contre le rachis, protg par un petit coussin.

    La mise en tension se fait en soulevant les aisselles du malade, puis tandis que le mdecin maintient fermement l'appui de son genou il exagre lgrement mais brusquement son mouvement de soulever tout en tirant lgrement lui, ce qui entrane la manipulation accompagne du craquement habituel. Analysons ce qui s'est pass : le schma n 7 bis montre les vertbres en flexion maximum, et la flche G est le point d'appui du genou. Brusquement ce mouvement de flexion est exagr, en mme temps, le mdecin tire lui l'ensemble du rachis : le point d'appui du genou s'oppose ce que la vertbre A suive le mouvement. Lorsque soulevant les aisselles, le mdecin a port le rachis en flexion, le joint entre A et B est devenu celui o porte le maximum d'effort de sparation des bords postrieurs des plateaux vertbraux. Lorsque le mdecin exagre brusquement son mouvement de soulever les paules et de tirer lgrement lui, il a exerc une force F qui s'oppose la force G du genou immobile qui maintient l'pineuse en appuyant sur elle vers l'avant et vers le bas. Ainsi le genou est un point fixe qui contrarie le mouvement global impos. C'est une manuvre contrarie. On voit donc que si l'on veut obtenir un mouvement en flexion entre deux vertbres, il faut prendre appui sur la vertbre la plus basse, si l'oprateur met en tension le segment sus-jacent, ce qui est le cas habituellement. Le mme type de manuvre contrarie peut tre utilis pour des manipulations en rotation (voir p. 137).

    S'il s'tait agi d'une manuvre en extension, les choses se seraient passes d'une

    manire sensiblement diffrente. Au dbut, le droulement de l'opration se fera de la mme manire que tout l'heure : mise en position d'extension, appui du genou. Mise en

  • tension maximum, puis unique exagration de l'extension. Mais si l'on tudie ce qui se passe au niveau du joint considr, l'on voit que le point d'appui ne doit plus tre pris sur la vertbre sous-jacente au joint manipul, mais sur la vertbre sus-jacente, la pression du genou exagrant dans ce cas l'hyper-extension locale, ce n'est plus une manuvre contrarie, mais assiste passivement.

  • 7. La dtermination de la manipulation

    faire dans un cas clinique donn

    C'est sans doute le point le plus important du traitement par manipulation, et malgr

    cela il ne nous a jamais paru tre prcis et tudi sous cette forme. Rappelons pour mmoire que : Les chiropractors

    dterminent leur manuvre l'aide de la radiographie de l'Atlas sous trois incidences

    et l'aide du neurocalomtre (couple thermo-lectrique mesurant instantanment la temprature cutane). Or, sans revenir sur le fait qu'il parat pour le moins irrationnel et puril de ramener un dplacement de l'Atlas toutes les maladies, il n'est pas du tout prouv que les trs lgres dsaxations des masses latrales de l'Atlas par rapport l'apophyse odontode, correspondent des dplacements rels. On sait par ailleurs que presque toujours, mme aprs des manipulations ayant entran la disparition des symptmes objectifs et subjectifs, les images radiologiques restent les mmes aprs le traitement qu'avant, qu'il s'agisse de ces lgres dsaxations de l'Atlas des dysharmonies de courbures du rachis cervical, par exemple. Quant la temprature cutane, elle varie avec le moindre frottement, la moindre contracture musculaire sous-jacente. Que de prcautions ne faut-il prendre pour faire une lecture valable en admettant que cela puisse tre de quelque utilit dans la conduite du traitement ? Les ostopathes

    Pour dterminer la manuvre faire dans un cas donn, les ostopathes amricains

    utilisent d'une part une thorie de la mcanique vertbrale qui le est propre, d'autre part un examen qu'ils appellent diagnostic ostopathique La thorie de la mcanique vertbrale, due Fryette, et qui a l'agrment de plupart des coles ostopathiques est, sans entrer dans les dtails, la suivante : Lorsqu'un segment rachidien est en position indiffrente d'extension ou de flexion (easy normal), la latro-flexion et la rotation se font

  • de sens oppos, la latro-flexion prcdant la rotation. Cette rotation se fait donc vers la convexit de la courbe forme par la latro-flexion. Par contre, si le segment rachidien est en flexion ou en extension marque, la latro-flexion est impossible, si elle n'est pas prcde par une rotation de mme sens. Toute manuvre doit tre conduite de manire faire le mouvement selon le processus inverse du mcanisme physiologique du blocage ; ce blocage constituant la lsion ostopathique . Quant au diagnostic ostopathique , il est purement palpatoire. Les ostopathes testent avec beaucoup de soin la mobilit segmentaire en palpant le mouvement des pineuses, et les modifications de tension des tissus para-vertbraux, leur contracture superficielle et profonde, tandis qu'ils impriment au rachis des petits mouvements d'aller et retour en flexion et en extension. Cette mthode particulire et subtile, qui demande un long entranement et un doigt certain, peut paratre fantaisiste. Mais il faut convenir qu'elle conduit ceux qui la possdent bien excuter des manipulations prcises, indolores et d'efficacit parfaite. Il est bien vident que ceux qui prtendent utiliser ce procd, et apprcier les minimes contractures superficielles et profondes, sont infiniment plus nombreux que ceux qui en sont capables. Les manipulative surgeons anglo-saxons

    Les manipulative surgeons font des manuvres globales sans souci de prcision, symtriques, le plus souvent sous anesthsie. Ils excutent deux ou trois manuvres pour une sciatique par exemple, dans un ordre arbitraire, sans se proccuper pour la plupart de conditionner les mouvements aux particularits du cas prsent. Mme Mennell ne dit pas comment dterminer la nature et le sens des manuvres faire dans un cas donn de sciatique. Il s'tend beaucoup sur les diagnostics diffrentiels, dcrit de nombreuses tech-niques d'examen, mais finalement ne donne que des indications assez imprcises pour le traitement. Il conseille pour la colonne lombaire de manipuler d'abord en extension par pression directe (le malade tant sur le ventre), puis de faire une rotation des deux cts (le malade tant couch sur le ct), enfin de porter la colonne en hyperflexion (le malade tant allong sur le dos). Cyriax recommande les m mes manuvres, et dit simplement que dans la manuvre de rotation, il place de prfrence la jambe douloureuse en l'air . Une telle pratique systmatique ne parat pas rationnelle, si elle est valable quelquefois, elle ne saurait l'tre toujours. De plus, la manuvre chiropractique d'extension, utilise en premier lieu est une manuvre souvent douloureuse qui nous parat viter. Mthode propose

    Est-il possible de dterminer par l'examen les manuvres viter et surtout celle qu'il faut faire pour soulager le malade dans un cas clinique donn ? Peut-on arriver prciser cette manuvre selon ses composantes : extension ou flexion ; rotation et latero-flexion

  • droite ou gauche ? Contrairement ce qui a t souvent dit, nous rpondons formellement oui. Deux remarques nous ont conduit utiliser systmatiquement un procd simple qui nous permet de dterminer d'une manire rigoureuse la manipulation faire dans un cas donn.

    1 Une manuvre indolore peut ne pas tre utile, mais l'exprience montre qu'elle n'est jamais nuisible. Par contre, une manuvre douloureuse a peu de chance de soulager et beaucoup d'aggraver.

    Ainsi nous nous sommes peu peu convaincus que la rgle de la non douleur, est la rgle d'or des manipulations. On retrouve l la leon bien brve qu'un trs clbre rebouteux anglais donna un jour un mdecin non moins clbre qui lui demandait quel tait son secret : Ne jamais faire mal , rpondit-il. Cette simple phrase contient la moiti du secret des manipulations, l'autre moiti c'est d'agir au bon endroit, de bien localiser sa manuvre. Nous avons vu comment on pouvait y arriver.

    2 Forcer, mme sous anesthsie, un mouvement bloqu ne saurait satisfaire l'esprit : si un mouvement est bloqu, c'est qu'il y a un conflit, forcer ce mouvement c'est aggraver ce conflit, c'est peut-tre le vaincre, mais c'est bien plus souvent l'envenimer et risquer une catastrophe. L'exprience quotidienne nous montre que lorsqu'un mouvement est limit dans un sens donn ce n'est pas en forant ce mouvement selon cette direction qu'on le restaurera dans son sens normal, mais en excutant le mouvement de sens oppos: c'est ce que nous appelons la rgle du mouvement contraire . Par exemple : si la rotation droite est limite, ce n'est pas en forant le mouvement vers la droite qu'on pourra la restaurer, mais en le forant vers la gauche, dans le sens o le mouvement est libre. Comme nous l'avons dj vu, les mouvements sont lis notamment latro-flexion et rotation, aussi c'est en pratique la bonne combinaison de ces mouvements qui va constituer le mouvement le plus utile.

    Pour nous, la rgle de la non douleur et la rgle du mouvement contraire conditionnent la pratique des manipulations. Mais outre la garantie qu'elles donnent de ne pas faire mal au malade, leur utilisation systmatique conduit la dtermination prcise de la manuvre utile : dans le cas d'une sciatique gauche avec attitude antalgique croise et cyphose, nous allons pouvoir crire que la latro-flexion droite est libre. La latro-flexion gauche est bloque et douloureuse. La rotation droite est libre. La rotation gauche est douloureuse. La flexion est limite. L'extension est impossible, bloque.

    La manipulation ne pourra tre que une rotation droite, faite sur un rachis lgrement flchi et plac en latro-flexion droite. Cette manuvre sera totalement indolore. Elle sera aussi utile. L'exprience nous le montre tous les jours, mais de plus cette faon de

  • procder va trouver une pleine justification dans l'analyse de ce que produit un tel mouvement au niveau du disque et de la racine.

    Nous allons pour cela rappeler les conclusions des travaux du Pr de Sze et de son cole, sur les rapports du disque et de la racine dans les cas de sciatique discale, et de leur rle dans la production de l'attitude antalgique. On sait que l'attitude antalgique dplace la racine pour l'loigner de la hernie et rduit le volume de la hernie discale par billement postrieur (cyphose) ou billement latral (inflexion croise) (de Sze). Dans ce cas de sciatique gauche L5 avec attitude antalgique croise, la racine est comprime par un fragment discal qui lui est externe, elle fuit vers l'intrieur (de Sze). Il faut donc, pour dcomprimer la racine, faire fuir ce fragment vers l'extrieur, c'est--dire imposer au disque une rotation vers la droite, une rotation faite vers la gauche accrocherait au contraire la racine. La rintgration de ce fragment va tre favorise par l'augmentation du billement latral gauche et du billement postrieur c'est--dire par l'exagration de la position antalgique. Ainsi le mouvement utile va donc tre une rotation vers la droite, sur un joint plac en inclinaison latrale droite et en flexion. Ce mouvement est accompagn, comme toujours, d'une traction segmentaire. C'est donc ici une manipulation en rotation droite faite sur le joint mis en traction oriente en flexion et latro-flexion droite. Tel est bien le mouvement qui nous avait t donn en appliquant la rgle de la non douleur. Par contre, pour une sciatique gauche S1 avec attitude antalgique directe, la manipulation

    serait : une rotation gauche sur un rachis lgrement tendu (ou flchi, selon le cas) latro-flexion gauche.

    Ainsi dans le traitement des sciatiques, c'est l'attitude antalgique qui dtermine le

    mouvement manipulatif utile. Il en va de mme pour les lombagos, qui s'accompagnent souvent eux aussi d'attitudes antalgiques analogues celles des sciatiques, bien qu'on ne puisse invoquer exactement le mme mcanisme de production de ces attitudes, puisqu'il n'y a pas ici de compression de racine. Une hypothse plausible est que le fragment discal sous tension fait coin l'intrieur mme du disque, carte les plateaux vertbraux, imposant ce joint un billement latral ou postrieur. De toute matire, la manuvre a pour but de faire rintgrer ce fragment discal le centre du disque, ou tout au moins de le porter en une zone silencieuse. Pour le dcoincer, il faut exagrer le billement latral ou postrieur dans le sens oppos celui qui provoque la douleur : c'est--dire l encore exagrer l'attitude antalgique et faire une rotation dans le sens non douloureux. Le mme principe de manipulation s'avre galement valable pour des affections telles que les torticolis, les nvralgies cervico-brachiales, les dorsalgies d'effort ou de posture, dont le mcanisme de production est moins bien connu que celui des sciatiques par exemple, mais

  • pour lesquelles il est facile de dterminer les mouvements limits et douloureux. Car quelle que soit la nature exacte du conflit responsable du spasme musculaire du torticolis ou de la souffrance de la racine dans une algie cervico-brachiale, la manipulation a pour but de le supprimer. Ce qui revient dire l encore qu'augmenter la douleur en manipulant, c'est augmenter le conflit. Ie but tant inverse, c'est rgle de la non douleur qui va dterminer les coordonnes de la manuvre faire. Il peut arriver enfin au niveau du dos par exemple, que la limitation du mouvement ne soit pas trs nette, et que le trouble mcanique ne se traduise pas que par une vertbre sensible : la pression de l'pineuse ; avec un point douloureux exquis para-vertbral, 2 cm environ de la ligne mdiane, au niveau d'une petite zone de contracture, de tension des tissus profonds. On appuie alors tangentiellement sur l'pineuse vers la droite, puis vers la gauche: l'une de ces manuvre s est douloureuse, l'autre non. C'est selon ce dernier sens que se fera la manipulation en rotation, associe une latro-flexion du mme ct. (Il ne faut pas confondre la douleur ainsi provoque par la pression de l'pineuse, avec celle due une apophysite qui ne s'accompagne ni du point douloureux para-vertbral, ni de la contracture, et qui n'est pas modifie par les pressions droite ou gauche). Dans tous les cas, le mouvement inverse de celui qui est le plus limit, sera la coordonne principale, donc le sens dominant, de la manuvre faire, les coordonnes secondaires tant, comme on l'a vu, les mouvements inverses des autres mouvements limits. Il peut arriver que deux orientations soient seulement limites : la manuvre va tre faite selon un mouvement combin avec les deux orientations opposes celles-ci. Par exemple : rotation droite, latro-flexion droite limites, extension, flexion libres. la manuvre sera : rotation gauche, latro-flexion gauche ; mais il y aura souvent intrt faire cette manuvre d'abord sur un rachis en flexion, puis sur un rachis en extension. Ainsi la rgle de la non douleur et celle du mouvement contraire

    - permettent ou contre-indiquent le traitement, - dterminent la manuvre utiliser, - conditionnent l'excution de cette manuvre.

    Lorsqu'une manipulation fait mal, mais apporte quand mme un soulagement, c'est que

    l'une des coordonnes secondaires (la latro-flexion, le plus souvent) n'a pas t bien choisie, alors que la coordonne principale tait correcte. Il faut ici insister sur le fait que sur un rachis normal, il est possible d'excuter toutes les manuvre s tous les tages, sans provoquer la moindre douleur. Celui qui veut faire des manipulations sur un sujet malade, doit pouvoir les excuter sur un sujet normal, sans lui faire mal. S'il n'en est pas capable, c'est qu'il n'est pas matre de ses mains et que ses manuvres ne sont pas au point.

  • 8. La conduite du traitement

    La conduite du traitement varie essentiellement avec le cas clinique. Nan-

    moins, quelques rgles gnrales sont observer. La premire est que l'emploi correct des manipulations dpend d'abord du diagnostic (John M. Mennell). Toute douleur vertbrale ncessite un examen clinique et radiologique, au besoin complt par les donnes de laboratoire. et il est bon de se souvenir que:

    1 Toute douleur d'origine vertbrale, qu'elle soit locale, radiculaire, ou

    projete , n'est pas forcment en rapport avec une atteinte du rachis relevant de la thrapeutique manipulative. En consquence, un diagnostic prcis doit tre fait avant de dcider si un traitement par manipulation est justifi.

    2 N'importe quelle lsion inflammatoire, tumorale ou infectieuse du rachis

    peut se rvler l'occasion d'un effort ou d'un faux mouvement. Il serait grave de mconnatre alors le diagnostic rel.

    3 Enfin le traitement par manipulation n'est pas une thrapeutique

    irremplaable. Il est sans doute sduisant par la rapidit de son action souvent immdiate, et par son lgance. Mais il ne doit tre pratiqu qu' la condition d'tre bien excut. Il vaut mieux faire autre chose que de mal manipuler : Primum non nocere .

    Toutes ces conditions tant remplies, alors seulement le traitement par

    manipulation peut tre dcid. La sance de manipulation

    La sance de manipulation, car il s'agit bien d'une sance et non pas d'un acte isol, va tre obligatoirement prcde d'un examen particulier, dont nous avons dj parl, et qui est destin dterminer les manuvres utiliser. Cet examen va consister dterminer les mouvements limits ou douloureux, le sige exact de la limitation, et aussi rechercher les points douloureux; non pas ceux qui sont connus du malade, mais ceux musculaires qu'il va falloir faire disparatre par les manuvres appropries de dtente, de dcontraction, ou ceux para-

  • vertbraux, dont la pression reproduit souvent la douleur ressentie, mais que localisait mal le malade. Le mdecin, son diagnostic clinique et prmanipulatif termin, va commencer la sance de manipulation. Ayant plac le malade dans la position adquate, il va commencer par des manuvres lentes, rythmes de dcontraction ; cela va lui permettre aussi d'apprcier la qualit des muscles du patient (on se mfiera de manuvres un peu trop pousses chez des malades mauvaise qualit musculaire, sujets de fortes ractions de courbatures), leur tonicit, leur dveloppement, de dcouvrir des nouvelles contractures profondes, qui n'taient pas apparues ds le dbut de l'examen, alors que commencent dj disparatre certaines autres sous l'influence du ptrissage particulier que sont ces manuvres de dcontractions. Ces manuvres, faites lentement, amplement, posment, bien lies, ne heurtant jamais le malade, ont un effet sdatif certain et peuvent donner elles seules des amliorations notables. Il n'est pas rare de soulager et mme parfois de gurir une sciatique par le seul massage de la fosse iliaque externe et notamment du moyen fessier ; de mme, la dcontraction de la fosse sus-pineuse et des fixateurs de l'omoplate a un effet souvent heureux sur les nvralgies cervico-brachiales.

    Un nouvel examen de la mobilit montrera le gain ventuel dj obtenu et sera suivi de manuvres de mobilisations qui permettront de mieux apprcier les mouvements limits. Ces mobilisations seront insistantes selon les orientations libres. Ces mouvements de mobilisation doivent tre lents, appuys, lastiques, bien lis. Ils sont rpts une dizaine de fois pour chaque technique, trois ou quatre de celles-ci tant successivement utilises. Enfin, nouvel examen des mouvements douloureux et bloqus (dont certains ont pu tre dj trs amliors) et enfin manipulation proprement dite, trois quatre manuvres, pas plus, visant dbloquer d'abord les mouvements les moins limits, allant progressivement vers les blocages les plus importants. A la premire sance, dans des cas aigus ou sur des rachis raides, il vaut mieux ne pas manipuler et se contenter des mobilisations. Il ne faut pas trop insister sur celles-ci, mme si elles sont indolores, car la premire sance on ne connat pas la susceptibilit des tissus et l'on peut provoquer des ractions trs violentes, mme aprs un traitement lger. Nous avons dj vu, dans un chapitre prcdent, que les manuvres faire taient dtermines par la Non douleur, et qu'il ne fallait jamais forcer un mouvement bloqu pour le librer, et que le mouvement librateur est en rgle l'oppos de celui qui est limit. Prenons par exemple le cas d'une cervicalgie aigu o l'examen nous montre que :

    la rotation droite est limite et douloureuse,

  • la latro-flexion droite est limite et douloureuse, l'extension est limite et douloureuse.

    Alors que rotation gauche, latro-flexion gauche et flexion sont libres et

    indolores, le point douloureux maximum tant en C6 par exemple. Il est possible qu'une seule manuvre bien centre sur C6 en flexion, rotation gauche, latro-flexion gauche, amne d'un seul coup le soulagement total. Mais dans la plupart des cas, il nous parat prfrable de dcomposer le mouvement faire. Voici comment pratiquer dans l'exemple donn selon notre technique des Mouvements dcomposs .

    C'est une bonne habitude que de noter avec des croix le degr de limitation. Pour ce cas, nous pouvons crire :

    Rotation droite + + + (trs limite) Latro-flexion droite + + (limite) Extension + (un peu limite)

    On va alors agir de la manire suivante : librer d'abord les mouvements les moins limits : en l'occurence l'extension, en manipulant en flexion, que l'on associe une rotation gauche lgre. Celle-ci tant libre, l'examen devient :

    Rotation droite + + Latro-flexion droite + + Extension libre

    On va alors pouvoir manipuler en latro-flexion gauche et rotation gauche. On commencera par des mobilisations progressives, en utilisant au besoin l'extension qui vient d'tre dgage : rotation gauche sur rachis en latro-flexion gauche et extension, puis rotation gauche sur rachis en latro-flexion gauche et flexion. Enfin une manuvre en latro-flexion gauche sur un rachis en rotation gauche et en flexion. Les mouvements seront parfaitement libres lorsque la manipulation en rotation droite, latro-flexion droite et extension pourra tre faite sans douleur, ce qui sera la dernire manuvre de la dernire sance. Ainsi dans un cas donn, il est toujours possible de dterminer d'une manire rigoureuse la manuvre prcise faire. Si aucune manuvre ne peut tre faite sans douleur, c'est--dire si tous les mouvements de flexion, extension, rotation droite et gauche, latro-flexion droite et gauche, sont limits ou douloureux, aucune manuvre n'est faire. C'est une contre-indication la manipulation.

  • Les ractions au traitement

    I) RACTIONS DOULOUREUSES Les courbatures post-manipulatives sont banales aprs la premire sance. Elles sont en gnral modres et cdent l'aspirine et au bain chaud. Elles durent 6 48 heures et se voient dans 40 % des cas. Elles sont exceptionnellement violentes. Elles ne se reproduisent gnralement pas aux sances suivantes, ou alors sont trs diminues dans leur intensit et leur dure. II) EXAGRATIONS TRANSITOIRES DE LA DOULEUR TRAITE Elles sont assez frquentes mme aprs une manipulation russie qui va donner un bon rsultat. Aprs la manipulation, on peut assister la disparition complte et immdiate de la douleur ; celle ci peut tre dfinitive ou transitoire, la douleur rapparaissant attnue dans les jours suivants, ce qui ncessite une deuxime manipulation. Ou bien, quelques heures aprs le traitement, aprs avoir disparu la douleur va revenir plus aigu, accompagne souvent de courbatures, et va ainsi durer trs vive de 6 24 heures, puis disparatre nouveau pour de bon. Autre modalit enfin : le malade a l'impression, immdiatement aprs la manipulation, que le bnfice va tre lger ou nul. Mais le lendemain ou le surlendemain, il constate une nette amlioration des phnomnes douloureux, prcde parfois d'une raction. Dans certains cas trs anciens, il arrive que l'amlioration ne se manifeste que plusieurs jours aprs la manipulation.

    Les ractions sont particulirement frquentes et violentes dans les cas o les phnomnes sympathiques sont au premier plan. Elles sont alors d'excellent augure. Qu'il s'agisse de courbatures post-manipulatives ou d'augmentation temporaire de la douleur traite, une rgle qui ne comporte que de trs rares exceptions, est qu'il ne faut jamais faire une seconde sance de manipulations avant que les ractions de la premire ne soient teintes.

    Ces ractions n'existent gure qu' la premire sance ; elles sont trs attnues la seconde et rares la troisime. Leur reproduction chaque sance, jointe une non amlioration de l'tat trait, doit conduire interrompre le traitement et revoir le diagnostic. Par contre, on ne tiendra pas compte de courbatures se produisant plusieurs jours aprs une manuvre et une zone du

  • rachis autre que celle sur laquelle a port la manipulation. Pidallu les attribue un remaniement statique progressif. Il ne faut pas confondre ces exagrations transitoires de la douleur traite, qui sont des ractions quasi invitables, avec les exagrations de la douleur dues des manipulations mal faites ou pratiques sur une mauvaise indication qui sont des aggravations Dans le premier cas, le malade ne souffre pas pendant la sance, il est mieux aprs, il y a toujours un intervalle libre entre la sance et la raction, intervalle qui est gnralement de 6 18 heures pendant lequel le patient se sent mieux ou tout au moins non aggrav. Par contre, s'il s'agit d'une exagration de la douleur par mauvaise indication ou mauvaise excution, celle-ci survient ds la manipulation et va, sans intervalle libre, aller en augmentant rapidement. De plus, alors que dans le premier cas la raction va durer 24 on 48 heures dans le second la douleur va persister des jours, et mme des semaines, et se montrera particulirement rebelle aux traitements. Il est vident que si les ractions se voient surtout aprs la premire manipulation, les aggravations peuvent succder n'importe quelle sance. III) RACTIONS FONCTIONNELLES

    A ct des ractions douloureuses, on peut voir des ractions fonctionnelles ; celles-ci peuvent tre immdiates, quasi instantanes. Il est courant qu'aprs un mouvement mme minime de manipulation, le patient prsente une sudation importante des aisselles et du corps. Cela se reproduit chaque sance, qu'elle suive de quelques jours ou de quelques mois la prcdente. Cela montre sim-plement l'action de ces manuvres sur le sympathique, et n'a aucune incidence sur la conduite du traitement.

    Beaucoup plus rares sont des crises de tremblements qui ne sont attribuables

    ni la crainte, ni la nervosit du sujet. Le patient est pris pendant quelques minutes de tremblements violents avec parfois des frissons immdiatement aprs une manuvre vertbrale, cervico-dorsale en gnral. Dans les heures qui suivent une manipulation lombaire ou dorsale basse, on voit parfois des crises de mtorisme abdominal, avec ou sans dbcle diarrhique. Les modifications des rgles sont elles aussi assez frquentes, tendant en gnral les dclencher, les avancer, les rendre plus abondantes. Une de nos malades manipule quatre fois du cou en un mois, pour une pri-arthrite de l'paule, a prsent chaque fois, dbutant le soir mme, un coulement sanguin de quatre jours, absolument analogue ses rgles normales. Revue un an plus tard, trois fois en un mois, pour une nvralgie cervico-brachiale, elle a eu chaque fois ses rgles quatre jours. Il n'est pas trs rare de voir dans les vingt quatre heures qui suivent une sance de

  • manipulation, des malades prsenter une crise douloureuse pigastrique, pelvienne ou abdominale, parfois violente, durant quelques heures, surtout chez ceux qui se plaignent d'une manire plus ou moins frquente et marque de symptmes analogues. Cette raction est alors gnralement l'annonce de la disparition qui peut tre dfinitive de ces symptmes. La rptition des sances de manipulation

    Le traitement par manipulation est parfois remarquable par son action

    instantane, quasi-miraculeuse : le lumbago aigu qui est aussitt guri ; le rachis douloureux et bloqu du lombalgique chronique qui instantanment redevient libre et indolore (le patient touchant facilement ses pieds), la sciatique immdiatement soulage.

    Mais il ne faut pas croire que si la manipulation n'agit pas aussitt, elle

    n'agira jamais. Il ne faut pas toujours lui demander un rsultat instantan. Cependant, ct des gurisons immdiates qui ne sont pas rares, il est habituel de noter le plus souvent une amlioration au cours mme de la premire sance: un Lasgue peut passer de 20 60, en mme temps que le malade accuse un net soulagement, le torticolis peut mouvoir son cou librement, et le lombalgique se tourner facilement sur la table. Si la manipulation est facile ds la premire sance, il doit y avoir un gain net. Celui-ci peut se maintenir ou non, mais il doit exister. Par contre, si le rachis tant trs bloqu, une manipulation satisfaisante est difficile, il faut attendre la sance o elle pourra tre excute d'une manire convenable pour juger (la troisime en moyenne pour un cas chronique). Le pronostic sera bon si cette sance apporte une amlioration sensible. Il ne faut jamais faire une deuxime sance avant que les ractions de la premire se soient compltement teintes. Il n'y a jamais intrt manipuler trop et trop souvent. Pour une sciatique moyenne par exemple, il est sage de ne pas rapprocher les sances moins de cinq jours. Une sance par semaine est un bon rythme dans le traitement d'attaque pour les lombalgies chroniques ou les scolioses douloureuses. Ce traitement d'attaque va consister en trois six sances. Il y aura lieu de faire une manipulation de rappel de temps autre, une trois fois par an selon les cas, mais il faut surtout penser la gymnastique rducative.

    Les sujets ne ragissent pas et ne supportent pas tous de la mme manire les traitements par manipulation : les brvilignes raides supportent des traitements rapprochs et pousss. Les hyperlaxes longilignes s'accommodent mal au contraire de ce type de traitement. Chez eux, il faut tre avare de manipulations,

  • faire uniquement le geste utile, et espacer le plus possible. Sans cela les manipulations vont leur crer un vritable syndrome douloureux vertbral, que des amliorations trompeuses transitoires, aprs les sances, contribuent faire se perptuer.

    Les sujets gs tirent grand bnfice des mobilisations douces ; elles leur apportent plus d'aisance et font disparatre beaucoup de petits ennuis mineurs dus aux contractures para-vertbrales entretenues par ces enraidissements segmentaires. Mais il faut se garder chez eux de toute manuvre sche et brusque. Il est curieux de constater comme certains rachis sniles peuvent tre considrablement aids par quelques mouvements doux, paraissant illusoires, alors que ces malades pourraient tre considrs sur la clinique et la radiologie comme au-del de toute ressource de la thrapeutique par le mouvement.

    Un grief courant est que les rsultats des traitements par manipulations ne sont pas durables. Cela est parfois vrai, bien que trs nombreux soient les bons rsultats qui se maintiennent en dpit de conditions apparemment mauvaises : sujets mauvaise statique, muscles insuffisants, prsentant des dtriorations discales importantes.

    Le rsultat dpend d'abord de la qualit du traitement, et si la manuvre n'a pas t suffisamment prcise, suffisamment pousse, le soulagement apport a videm