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Quaderns d’Italià 11, 2006 313-326 Encore quelques reflexions sur l’usage des cartes par Petrarque Nathalie Bouloux Université François Rabelais (Tours) CESR Abstract Après avoir rappelé les différents types de cartes en circulation au XIVe siècle ainsi que leurs principaux usages, l’article étudie les mentions faites par Pétrarque des cartes qu’il possédait. Il ne reste aucun témoin de celles-ci, et les citations de l’humaniste ne permettent pas toujours d’identifier avec certitude la nature de ces cartes. Outre des cartes marines, Pétrar- que détenait des représentations contemporaines du monde connu et des cartes qu’il tenait pour très anciennes. La manière dont il les utilisait atteste à la fois un usage conforme à ceux de ses contemporains (restitution d’itinéraires, localisation, contemplation de l’espa- ce du monde) mais également plus originaux ( reconstitution de l’espace de l’Antiquité, explication des textes anciens), toujours dans un souci de problématisation du réel. Mots-clefs: Pétrarque, cartographie, usage des cartes, trecento. Abstract After recalling the different types of maps in circulation in the 14th century and their main uses, the article studies those references made by Petrarch to the maps he possessed. There is no remaining evidence of these and the humanist’s references to them do not allow iden- tification of the nature of these maps with any certainty. As well as sea charts, Petrarch owned contemporary representations of the known world and maps he believed to be very ancient. The way in which he used them shows, at one and the same time, usage in accor- dance with that of his contemporaries (plotting itineraries, location, contemplating space in the world) and also more original uses (reconstituting the space of Antiquity, explaining ancient texts) always with a concern for posing real problems. Key words: Petrarch, cartography, use of maps, trecento. Pétrarque a joué un rôle essentiel dans l’essor de la géographie chez les huma- nistes du XIV e siècle. Il possédait des manuscrits de géographes antiques qu’il lisait en les annotant avec constance pour mieux en comparer le contenu. Appre- nant la géographie de l’espace antique, il a conçu une méthode géographique appliquée à l’espace de son temps et fondée sur le souci de confrontations des

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  • Quaderns dItali 11, 2006 313-326

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    voir rappel les diffrents types de cartes en circulation au XIVe sicle ainsi que leursaux usages, larticle tudie les mentions faites par Ptrarque des cartes quil possdait.ste aucun tmoin de celles-ci, et les citations de lhumaniste ne permettent pass didentifier avec certitude la nature de ces cartes. Outre des cartes marines, Ptrar-enait des reprsentations contemporaines du monde connu et des cartes quil tenaits anciennes. La manire dont il les utilisait atteste la fois un usage conforme ses contemporains (restitution ditinraires, localisation, contemplation de lespa-onde) mais galement plus originaux ( reconstitution de lespace de lAntiquit,

    tion des textes anciens), toujours dans un souci de problmatisation du rel.

    lefs: Ptrarque, cartographie, usage des cartes, trecento.

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    calling the different types of maps in circulation in the 14th century and their maine article studies those references made by Petrarch to the maps he possessed. Theremaining evidence of these and the humanists references to them do not allow iden-n of the nature of these maps with any certainty. As well as sea charts, Petrarch

    contemporary representations of the known world and maps he believed to be very. The way in which he used them shows, at one and the same time, usage in accor-ith that of his contemporaries (plotting itineraries, location, contemplating spaceorld) and also more original uses (reconstituting the space of Antiquity, explaining

    texts) always with a concern for posing real problems.

    rds: Petrarch, cartography, use of maps, trecento.

    que a jou un rle essentiel dans lessor de la gographie chez les huma-u XIVe sicle. Il possdait des manuscrits de gographes antiques quil lisait

    annotant avec constance pour mieux en comparer le contenu. Appre- gographie de lespace antique, il a conu une mthode gographiqueue lespace de son temps et fonde sur le souci de confrontations des

  • 314 Quaderns dItali 11, 2006 Nathalie Bouloux

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    3. LDdies antiques et modernes.1 Il possdait galement des cartes, quil mentionne ses lettres et dans les annotations conserves dans son manuscrit de lHis- naturelle de Pline (BNF lat. 6802) et dans le Virgile de lAmbrosienne.vant de rappeler ce que lon sait sur les cartes utilises par lhumaniste et

    alyser les usages quil en faisait, quelques remarques mthodologiques sim-nt. Il convient en effet dadopter une attitude prudente dans lutilisationermes: on peut en effet hsiter parler de science, propos de la go-hie mdivale et prfrer le terme de savoir ou celui de culture. Le motographie nest pas employ avant la redcouverte de Ptolme au dbutVe sicle (encore ne simpose-t-il pas immdiatement). Ptrarque et sesemporains parlent plutt de cosmographia, terme dont la diffusionue le dbut dune autonomisation des savoirs gographiques. Ptrarque a

    leurs t lun des premiers reconnatre lexistence de spcialistes de laription de lespace (cosmographi). Labsence du terme de gographie neifie pas pour autant dfaut dans les perceptions et les reprsentations deace, mais marque, indirectement, lexistence de modes de reprsentationespace qui ne correspondent pas une modernit scientifique (encorerait-il sentendre sur la notion de modernit) et encore moins pr-scien-ue. Pourtant, dans lordre des reprsentations de lespace, le XIVe siclen moment dcisif qui na peut-tre pas t suffisamment identifi, en par-arce que beaucoup se focalisent sur les effets de la redcouverte de Ptol- au dbut du XVe sicle.

    artographie au XIVe sicle en Italie

    stendre trop avant, il convient nanmoins de caractriser, au moins dansrandes lignes, ce que lon sait de lusage des cartes au XIVe sicle.2 Dansie du XIVe sicle, plusieurs types de cartes coexistent.3 Les mappemondesitionnelles (terme plus commode que rellement opratoire) donnent

    lensemble du monde connu entour dun anneau ocanique conven-nel. La carte dHereford (vers 1300) en est un exemple remarquable. Lesles de ces mappemondes remontent lAntiquit tardive. Elles dessinentmatiquement le pourtour des continents, localisent les lments naturelsntagnes, fleuves, les) et les principales rgions et villes. Le lgendaire et leeilleux, produits dune culture encyclopdique et de lessor de la philo-

    ur Ptrarque et la gographie, voir Nathalie BOULOUX, Savoirs et culture gographique en Ita-ie au XIVe sicle, Turhnout: Brepols, 2002 (Terrarum Orbis, 2).ur lhistoire de la cartographie, voir lirremplaable History of Cartography, dir. David

    OODWARD et J. B. HARLEY, Cartography in prehistoric, ancient and medieval Europe and theediterranean, Chicago-Londres: Chicago University Press, 1987.

    es typologies traditionnelles ont t remises en cause rcemment. Voir Patrick GAUTIERALCH, De la glose la contemplation, place et fonction de la carte dans les manuscrits

    u haut Moyen ge, in Testo e immagine nellalto medioevo. Settimane di studio del centrotaliano di studi sullalto medioevo, t. 2, Spolte: Centro italiano di studi sullalto Medio-vo, 1994, p. 693-764.

  • Encore quelques reflexions sur lusage des cartes par Petrarque Quaderns dItali 11, 2006 315

    sophieportanimageencoreet thoce a dcartes depuisrel aude natelles serhteu

    Cemmesationsuperpporainquelle(mmcices d

    4. Voimatutionga

    5. BOmedsimmet dgomamovercoude naturelle, sont galement prsents. Ces cartes sont caractrises par lim-ce des textes (indication des toponymes et lgendes plus longues) et dess (vignettes urbaines, dessins de peuples monstrueux, etc.). Elles sont trop souvent interprtes comme le rsultat dune vision symboliquelogique de lespace, propre au Moyen Age. Cette conception rductri-

    epuis longtemps t dnonce4 mais elle continue tre profre. Cesont plusieurs fonctions. Elles montrent lespace de lhistoire humaine ses origines do la prsence du paradis terrestre, portion de lespace Moyen Age et rassemblent un ensemble de connaissances diverses

    ure encyclopdique. Elles jouent un rle essentiel dans lenseignement orvent notamment de supports mnmotechniques comme le rappelle ler Boncompagno da Signa dans la Rhetorica novissima (1225):

    Quomodo possit aliquis provinciarum, urbium, diversorum locorum et flu-minibus nomina memorie commendare.

    Qui desiderat provinciarum, urbium, fluminum et locorum nomina memo-ria commendare, inspiciat mappam mundi in qua sunt omnes provincie orbis,insule, deserta, famose civitates, maria et flumina cum subscriptionibus suisdepictis. Legat etiam Solinum qui partes orbis terrarum nominat et distinguit,ut specificat duodecim mirabilia mundi. Legat philosophos atque poetas, quide huiusmodi tractaverunt, nec omittat vetus testamentum et historias Roma-norum in quibus poterit magnam copiam invenire.5

    t usage scolaire de la carte remonte lpoque carolingienne, peut-tre avant. Hritage antique, rle dans lenseignement et dans la mmori- du monde expliquent aussi une de leurs caractristiques, celle de laosition des temps sur des cartes qui montrent la fois lespace contem-, lespace de lhistoire des hommes et celui de lhistoire sacre. Parces rassemblent dans un espace restreint lensemble de lespace connu

    e quand elles sont de grandes tailles), elles servent de support des exer-e mditations religieuses. Elles permettent galement de montrer autant

    r les travaux de Patrick GAUTIER DALCH, notamment la conclusion de La Descriptioppe mundi de Hugues de Saint-Victor, texte indit avec introduction et commentaire, Paris:des Augustiniennes, 1988, p. 117-127 et Un problme dhistoire culturelle: percep- et reprsentation de lespace au Moyen Age, Mdivales, n. 18, 1990, p. 5-15. Voir

    lement la contribution de David WOODWARD dans History of Cartography, op. cit.NCOMPAGNO da SIGNA, Rhetorica novissima, dans A. GAUDENZI (d.), Biblioteca iuridicai aevi, II Bologne, 1892, p. 279. Ce passage se trouve dans la partie de la Rhetorica novis-a ddie aux arts de la mmoire. Pourtant, il ne traite pas de la carte comme un outilmnotechnique mais comme un support essentiel de lapprentissage de lespace du mondees noms gographiques. La carte est premire mais le recours au texte de Solin, un desgraphes latins les plus lus, est conseill, de mme lutilisation de textes non gographiquesis qui contiennent des noms de lieux. Au VIe sicle, lorsque Cassiodore conseillait auxines de Vivarium dapprendre la gographie du monde, il procdait exactement lin-se et conseillait de partir du texte et de saider de cartes. On mesure l la distance par-rue dans lvolution du statut de limage. Voir sur le texte de Cassiodore le commentairePatrick GAUTIER DALCH, De la glose la contemplation, cit. (cit n. 5).

  • 316 Quaderns dItali 11, 2006 Nathalie Bouloux

    quilnymtalempermancigemVescsin dcartepuye

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    6. Pr est possible lespace contemporain dans un souci dactualisation des topo-es et dintgration de rgions nouvellement dcouvertes; plus fondamen-ent, elles servent localiser les lieux du monde et par consquent, ettre un reprage et une investigation de lespace. Toutes ces formes

    ennes dutilisation de la carte perdurent au XIVe sicle, non sans amna-ent et nouveauts. La mappemonde dessine par le cartographe Petrusonte pour Marino Sanudo, auteur dun trait de croisade, intgre un des-u pourtour mditerranen copi sur celui des cartes marines. Le dossier des et de plans de villes rassembl par Marino Sanudo a pour fonction dap-r la stratgie de croisade et den assurer la faisabilit.es cartes marines donnent, elles, une reprsentation exacte des littorauxiterranens et atlantiques: en raison mme de leur exactitude, elles ontent t juges comme le meilleur produit de la cartographie mdivale,quelles se rapprochent de notre perception de lespace. Il faut tablir unenction claire entre la carte et le portulan qui est un livre de mer contenantndications nautiques (indications de distance et de direction, points dehe, approche des ports). Elles ont donc t lobjet dtude dune histo-aphie essentiellement soucieuse de chercher leur origine et de reconsti-

    leur usage comme outil de navigation. Les premiers tmoins remontentfin du XIIIe sicle (carte dite Pisane et portulan dit conpasso de navega- mais des textes antrieurs, notamment un Liber de existencia riveriarum eta maris nostri mediterranei, montrent que lon doit repousser leur exis-e au moins la fin du XIIe sicle, poque o cartes et portulans sortent dude des marins pour entrer dans la culture des lettrs urbains.6 Quant usage en matire de navigation, il semble quil faille abandonner lidee cartographie pratique qui sopposerait aux mappemondes thologiquesites ci-dessus. Rien ne permet en effet daffirmer que les cartes marinesamais servi prvoir techniquement la route que devaient suivre les navires: ont plutt servi comme outils de reprsentation des littoraux, des les et

    ers. Cest dans le milieu des marchands quil faut chercher la premiresion des cartes marines. Je signale, mais sans lintgrer dans mon champde, le dveloppement dune cartographie rgionale, particulirement

    ortante en Italie, en partie aujourdhui encore terra incognita. Enfin, il nepas ngliger les mappemondes schmatiques dessines dans les manus-. On peut identifier deux types, celles qui reprsentent le monde connubit (improprement appel TO) et celles qui montrent le partage de lare terrestre en cinq zones climatiques. Elles ont pour fonction dexprimeroncepts gographiques et des discussions savantes.ous ces types de cartes coexistent, sans que leurs utilisateurs ne cherchent

    re prvaloir lun sur lautre. Elles sont en fait complmentaires dans leurire de reprsenter lespace et les buts assigns cette reprsentation. Siappemondes traditionnelles intgrent parfois des formes cartographiques

    atrick GAUTIER DALCH, Carte marine et portulan au XIIe sicle. Le Liber de existenciaiverarium et forma maris nostri mediterranei, Rome, 1995.

  • Encore quelques reflexions sur lusage des cartes par Petrarque Quaderns dItali 11, 2006 317

    nouvecelle rcartes comm

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    Excertitureprise

    7. Je r8. Flo

    Sebren

    9. PETlles (ainsi la mappemonde dessine par Petrus Vesconte, ou au XVe sicle,alise par le camaldule vnitien Fra Mauro), linverse est aussi vrai. Les

    marines souvrent aux espaces intrieurs et aux donnes encyclopdiquese le montre le clbre Atlas catalan (vers 1375).

    rtes possdes par Ptrarque

    ure exacte des cartes que possdait Ptrarque est difficile apprcier dansure o lhumaniste ne les dcrit pas, se contentant den mentionnernce dans ses lettres et dans certaines de ses annotations dans ses manus- Pline et de Virgile. Il convient donc de rassembler le matriel disponible.7 ne conserve que deux cartes qui ont appartenu Ptrarque. La premi-ne mappemonde schmatique dessine dans un manuscrit du XIe ou ducle contenant le Bellum Iugurthinum de Salluste. Le texte a t lu avecon par Ptrarque comme en tmoignent ses annotations marginales etaires. Les manuscrits de Salluste contiennent souvent des mappemondes

    atiques de lensemble du monde connu, en gnral situes en ouverturepitre dcrivant lAfrique. Celle-ci, oriente lEst, reprsente le monde

    en trois parties, Asie, Europe, Afrique, avec leurs limites. Les dtails habi-oncernant les noms cits dans la description de lAfrique sont ports sur la

    n souci particulier pour lItalie, seule rgion clairement individualise ene (Venetia, Roma, Mediolanum, Papia) laisse penser une probable originee du manuscrit.8 Ptrarque possdait galement un exemplaire de la Topo- Hibernica de Giraud de Barri (XIIe sicle) dans lequel est dessin un sch-

    rtographique plac la fin du manuscrit. Il reprsente lIrlande et lae-Bretagne et constitue la fois une illustration et un rsum graphique duPtrarque a annot ce schma en en prcisant lorientation (il a inscrits en haut). Lhumaniste na jamais mentionn lexistence de ces schmas,

    eurant assez courants du moins pour la mappemonde du Salluste.aminons ce que lon sait des autres cartes quil utilisait. Il possdait avecde des cartes marines accompagnes de portulans, attests plusieurss dans lItinerarium syriacum:

    Viginti, nisi fallor, passuum milia emensus extentum in undas promontorium,Caput Montis ipsi vocant, obvium habebis et Delphini sive, ut naute nuncu-pant, Alphini portum, perexiguum sed tranquillum et apricis collibus abditum,inde Rapallum ac Siestrum et nomine Veneris insignem portum, securum ven-torum omnium et omnium que sub celo sunt classium capacem, nostrum propeHericem (habet enim alterum Sicilia). In medio sinus est maris, oportunus fati-gatis puppibus.9

    eprends, par commodit pour le lecteur des donnes disponibles dans ma thse, op. cit.rence, Biblioteca Medicea Laurenziana, LXIV, 18. Analyse et reproduction de la carte dansastiano GENTILE, Firenze e la scoperta dellAmerica. Umanesimo e geografia nel400 Fio-tino, Florence: Olschki, 1992, notice 2, p. 29 et fig. 1 b.RARQUE, Itinerario in Terra Santa, d. et trad. Francesco Lo Monaco, 18, p. 46.

  • 318 Quaderns dItali 11, 2006 Nathalie Bouloux

    Crencprobsible

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    10. S11. B

    C12. I13. Ie sont les notations prcises de distance, lattention pour les ports, la rf-e aux marins qui font nettement penser ici un portulan, qui tait trsablement accompagn de cartes marines, objets devenus facilement acces-s en Italie10 et dont on analysera lusage par Ptrarque plus loin.l tait en possession de cartes dun genre tout diffrent comme lattestentuelques mentions disperses dans ses lettres et ses manuscrits. Il qualifiaitines dentre elles de vetusssimae et cest cette anciennet mme qui fait yeux tout leur prix, comme il lexpose dans une lettre envoye Boccace. 40). Ptrarque y mentionne le prt dun livre (probablement le Pline) ete vetustissima charta, quil recommande au soin de Boccace. Cest cette (ou une de ces cartes?) quil cite plusieurs reprises dans le Virgile debrosienne:

    itation 1:

    Nos autem hoc quantum potuimus scurpulosius inquirentes, tam apud scrip-tores presertim cosmographos quam in descriptionibus terrarum et quibus-dam cartis vetustissimis que ad manus nostras venerunt, deprehendimus locumesse in ipso Ytalie angulo supra sive ultra Ydruntem, qui dictum est Castrumvel Castra Minerve.11

    itation 2:

    Columpnan Messanam dicunt moderni, sed de hac apud autenticos nihil quodmeminerunt legi. Est et Columpna Regia in adverso litore Ytalie, non procula Regio, cuius et Pomponius in Cosmographia et carte vetustissime memine-runt.12

    itation 3:

    Iste locus multis facit errorem, nec minus Lucanus 7 querentibus Timavoin Patavino agro vel etiam iuxta Aponum, cum querendum sit in Aquilegen-si, quod et Plinius ait Naturalis Ystoria 2 libro capitulo 106 et carte vetustis-sime testantur.13

    ne glose dans son manuscrit de lHistoire naturelle de Pline signale aussiartes cosmographicas:

    Attendendum in cartis cosmographis quod in illa quam peninsulam isthmosfacit et quam multi Achaiam solam putant. Est primum Peloponensus ad dex-teram contra Italiam et supra Chorinthium sinum ubi est Patras. Secundo est

    ur ce point, voir Nathalie BOULOUX, op. cit., p. 88-101.iblioteca Ambrosiana, S. P. 10/27, f. 99 r (d. en facsimil, Francisci Petrarcae Vergilianusodex, Milan: G. Galbiati, 1930).

    bid., f. 96 r., propos propos du commentaire de SERVIUS, In Aen, III, 411.bid., f. 60.

  • Encore quelques reflexions sur lusage des cartes par Petrarque Quaderns dItali 11, 2006 319

    Enremertotumficioun arbdun sde larralisgot dpar Jeaconnuintgrgrant Ptrarqcite csur le sens dtores pcriptiole termpartag laqusententrs annest pmodllpoqque lesmeme

    Damogracarte e intermappcartes,

    14. Par15. Voi

    motecaAchaia in medio ubi est Moton et Coron contra meridiem. Tertia Messeniasimulque Laconica contra Orientem, Cretamque insulam ubi mons Maleus.Quarto sinus Argolicus ad Scilleum reflexus ad Arthon ipsumque ad isthmumquo in tractu Argos ipsa est: quamuis in mensura ultima uideatur Pelopo-nensus hec universa comprehendere quasi nomen to et 14

    fin, dans une lettre adresse Jean de Parme (novembre 1355), Ptrarquecie celui-ci et Luchino delle Verme pour lenvoi dune carte: sed michi terrarum orbem in membranis descriptum insigni quidem arti- (Var. 61). Dans une missive prcdente, Ptrarque avait dcrit Jeanre spirituel en lui conseillant de le mmoriser. Jean de Parme, lorsjour Gnes, fait raliser dans un atelier une reprsentation figurebre quil envoie Ptrarque, prsent auquel il joint une carte, peut-tree par le mme atelier. Il sagit l dune cadeau luxueux, qui signale lee Ptrarque, bien connu par ses amis, pour ces objets. La carte envoyen de Parme et Luchino delle Verme reprsentait lensemble du monde, mais on ne peut gure en dire plus. Mappemonde traditionnelle ouant des donnes issues de la cartographie marine? Carte marine int-dans le continent des donnes encyclopdiques? Le terme utilis parue ( descriptio ) peut tre en revanche rapproch de la premire glosei-dessus dans laquelle lhumaniste voque une descriptio terrarummme plan que les carte vetustissime. La construction grammaticale et lee la phrase, qui juxtaposent enqute dans les textes (tam apud scrip-resertim cosmographos) et recherche dans les cartes (quam in des-nibus terrarum et quibusdam cartis vetustissimis), incitent interprtere de descriptio terrarum dans ce sens. Pour Ptrarque, la ligne de

    e entre deux types de cartographie nest pas leur exactitude mais la dateelle elles ont t ralises et le caractre historique de ce quelles repr-t. Car il ne fait pas de doute que Ptrarque pensait possder des cartesciennes, qui lui permettaient de contempler un monde disparu. Laffaireas impossible: des cartes antiques, ou tout le moins trs proches dune antique, transmises sur parchemin ou dans un manuscrit datant deue carolingienne, ont pu circuler.15 Il est difficile den dire plus, parce toponymes mentionns par Ptrarque propos de ces cartes sont extr-nt courants.ns la glose lHistoire Naturelle de Pline, il mentionne des cartas cos-phicas. Quelle carte dsigne-t-il par ce terme? Une carte ancienne? Lanvoye par Jean de Parme? une carte marine? Les indices sont difficilesprter. On remarquera galement quil nemploie jamais le terme dea mundi, expression encore usuelle au XIVe sicle pour dsigner lesy compris marines. Cette mergence du terme carta est fort intressante.

    is, BNF lat. 6802 f. 31.r par exemple la carte de la Gaule dessine dans un manuscrit de Solin (XIVe sicle) et quintre une probable origine antique avec un remaniement lpoque carolingienne (Biblio- Apostolica Vaticana, Ross. 228, f. 35v.)

  • 320 Quaderns dItali 11, 2006 Nathalie Bouloux

    Boccnavidsiglapprepr dmariPtrde gavanle PtratalItalcomcrit ddunet co vrgurdoutque doutcolleait ttissa

    16. Bmsd(

    17. F18. V

    Bpi1

    19. VttcfaCeace lutilise dans le commentaire la Teseida o il parle dune carta dacare, cest--dire dune carte marine. Ptrarque emploie le terme pourner plusieurs types de cartes, dont les cartes anciennes. Il semble en fait quearition de ce mot accompagne lmergence de la cartographie commesentation autonome et suffisante du monde, mme si lorigine il servaitsigner les parchemins (carta) sur lesquels taient dessines les cartesnes.16 Au total, les certitudes que lon peut avoir sur les cartes utilises pararque sont tnues. Il est manifeste quil connaissait et possdait des cartesenres trs diffrents, et quil en faisait un usage parfois original. Il reste,t dtudier son utilisation de ses cartes, signaler une tradition selon laquel-trarque aurait lui-mme fait uvre de cartographe. Dans son Italia illus-, Flavio Biondo dit avoir utilis pour dcrire le cours du P une carte deie ralise par Ptrarque et Robert dAnjou.17 En 1457, lhumaniste Gia-o Antonio Marcello mentionne, dans une lettre accompagnant un manus-e la Gographie de Ptolme envoy Ren dAnjou, roi de Naples, lenvoie carte de Terre sainte, ralise par Lombardo della Setta, dernier disciplempagnon de Ptrarque.18 Le second tmoignage, dailleurs bien difficileifier, nimplique Ptrarque quindirectement. Celui de Flavio Biondo neste plus prcis et la prudence incite le rejeter.19 Cependant, il ne fait pas dee que Flavio Biondo a utilis une carte dItalie, dj ancienne ses yeux etla tradition (ou lhumaniste lui-mme?) attribuait Ptrarque. Il faut sanse interprter ce fait comme leffet du souvenir dun Ptrarque amateur etctionneur de cartes. Un autre aspect ne doit pas tre nglig: que la carte rpute uvre de Ptrarque en collaboration avec Robert dAnjou garan-it sa fiabilit et son prix.

    occace, Teseida, I, 40, 7. Habituellement, les lettrs usent des mots compassus, compassusari, mappa mundi. Francesco da Barberino dfinit les cartes marines de la manire

    uivante: compassum: carta est in qua ad modum mappe representantur portus et maria etistantia viarum et loca pericolosa et terre, I documenti damore di Francesco Barbarino,ed. F. EGIDI, III, Milan, 1982, p. 125).LAVIO BIONDO, Opera, Ble, 1531, p. 353 et p. 355.oir BNF lat. 17452, f. 61, lettre date du 1er mars 1457. Cf. galement Giuseppe.ILLANOVICH et Elisabeth PELLEGRIN, Una nuova lettera di Lombardo della Seta e larima fortuna delle opere del Petrarca, dans Classical Mediaeval and Renaissance studiesn honore of B. L. Ullman, d. Ch. Henderson, t. II, Rome: Ed. di storia e letteratura,964, p. 216.oir par exemple, Giovani Alfredo CESAREO, La carta dItalia di Petrarca, dans Dai

    empi antichi ai tempi modernie. Raccolta di scritti critici, di ricerche sotriche, filologiche e let-erarieper le Nozze di M. Scherillo con T. Negri, Milan, 1903, p. 219-225 et, en 1918, laontroverse entre Giovani B. SIRAGUSA et Giovani Alfredo CESAREO dans la Rivista geogra-ica italiana (respectivement anne 25, fascicule 1-2, janvier-fvrier 1918, p. 51-58 etnne 25, fascicule III-IV-V mars, avril, mai 1918, p. 126-132). Voir galement OttavioLAVUOT, Biondos Italia illustrata. Summa oder Neuschpfung? Uber die Arbeitsmethoden

    ines Humanisten, Tubinge: Max Niemeyer, 1990, p. 197-198.

  • Encore quelques reflexions sur lusage des cartes par Petrarque Quaderns dItali 11, 2006 321

    Ptrar

    Vision

    Le preautre tle mondirectebliquementehommet la fi(CicrlosophiMoyenCommpar Cile thmregardcosmiqt rapprsenvangmargeplifietion replaaiePtrarantiqutions dsiennetransfochrtiissues voqubiennextrmbrlede, ludes mpagn

    20. SurRevSon

    21. Voique, lecteur de cartes

    cosmique

    mier passage que je voudrais commenter nous conduit encore vers unype de carte. Par deux fois, dans lAfrica et le Secretum, Ptrarque dcritde vu den haut (vision cosmique). Dans lAfrica, Ptrarque, sinspirement du songe de Scipion dcrit par Cicron dans le livre VI de la Rpu-. Scipion contemple lensemble du monde tandis que son pre com- ce quil voit: la petitesse du monde vu dans son ensemble alors que leses qui y vivent sont persuads de son immensit; la vanit de la gloiren de toutes choses. Ce thme avait inspir plusieurs auteurs antiqueson, Rpublique, VI, 20-21; Pline, II, 65, 172-174; Boce, Consolatio Phi-ae, II, pr. 7, 7, Snque, Quaestiones naturales, prface). Durant le Haut Age, la postrit du songe de Scipion est vive. Macrobe, dans son

    entaire du Songe de Scipion explique les donnes savantes mises en uvrecron selon une mystique no-platonicienne. Grgoire le Grand reprende de la vision cosmique et en transforme le sens. Il montre saint Benot

    ant lensemble du monde du haut dune tour. Dans ce texte, la visionue est lie lexprience de la contemplation religieuse.20 Ce passage aproch dun extrait de la vie de saint Colomban: lors dun rve, un angete au saint une carte du monde, reprsentant lensemble de lespace liser. Les cartes, notamment les schmas cartographiques dessins en

    des manuscrits (schma TO, cartes macrobiennes, reprsentations sim-s de lorbis terrarum) pouvaient ainsi tre les supports dune mdita-ligieuse: rassemblant lensemble du monde en un petit espace, ellesnt lobservateur en situation de voir la terre avec les yeux de Dieu.21

    que est lhritier de lensemble de cette tradition. Relisant les texteses et mditant le Commentaire du Songe de Scipion (les nombreuses cita-e ce texte dans les annotations ralises dans son Virgile de lAmbro-

    attestent de son importance dans la culture de lhumaniste), Ptrarquerme le contenu du Songe de Scipion en activant une nouvelle morale

    enne. Il montre quil connat fort bien les reprsentations du mondede lAntiquit, ces grandes doctrines physiques ou potiques quile dans le Secretum et qui renvoient pour lessentiel aux donnes macro-es (division de la sphre terrestre en cinq zones climatiques, les deuxes inhabitables en raison du froid, la zone centrale, dite zone torride,

    par le soleil, et les deux zones tempres de part et dautre de la torri-ne seulement habite avec certitude par les hommes). Dans la plupartanuscrits du Commentaire de Scipion de Macrobe, le texte est accom- de schmas explicatifs, dont une mappemonde en zones qui a pour

    tout ceci voir les articles de Pierre COURCELLE, La vision cosmique de saint Benot,ue des tudes augustiniennes, n. 13, 1967, p. 97-117 et ID, La postrit chrtienne duge de Scipion, Revue des tudes latines, n. 36, 1958, p. 215-233.r Patrick GAUTIER DALCH, De la glose la contemplation, art. cit (n. 3).

  • 322 Quaderns dItali 11, 2006 Nathalie Bouloux

    foncvoq

    une gieumon

    Cart

    Uneusag

    Pquen usoppcdsid

    22. A23. Stion de rsumer le partage de lorbe terrestre. Dans lAfrica, Ptrarqueue ce concept:

    Utque simul totum videas, huc lumina volve.Verticibus celi adversos atque alta tenentesCernis stare polos, subiectaque cunta duobusPerpetuo durata gelu? Prohibetur ab illaStirps hominum regione procul; nil nascitur illicQuod victum prestare queat. Qua semita solisLatior, obliquusque vagis it circulus astris,Ignibus arva rubent, mediusque exestuat ingensPontus et ardorem celi male temperat humorSubditus................. : mediam vetitum est attingere zonam,Etheris hinc etenim vos inclementia longeSummovet; at circum flammis permixta tepescuntFrigora; sic gemina mortales sede fruuntur.Altera sed vobis est invia: separat illamEt calor et pelagus. Statio tantum unica restatParva22

    Pour embrasser dun regard la totalit de lunivers: on est bien ici dansvision cosmique, dsormais dtache du motif de la contemplation reli-se, et il nest pas interdit de penser que Ptrarque sest servi dune mappe-de en zones pour regarder son tour le monde dans sa totalit.

    e marine, construction ditinraires et reconstitution du monde antique

    lettre adresse Francesco Bruni en 1368, permettra dapprcier un autree de la carte. Ptrarque y expose sa lassitude des voyages et conclut:

    Itaque consilium coepi ad eas terras, non navigio, non equo pedibusque perlongissimumque iter semel tantum, sed per brevissimam chartam, sepe librisac ingenio proficisci, ita ut quotiens vellem horae spatio ad eorum littus iremac reverterer, non illaesus modo sed etiam indefessus, neque tantum corporeintegro, sed calceo insuper in attrito et veprium prorsus et lapidum et luti et pul-veris inscio.23

    trarque dcrit ici un voyage par lesprit, avec la carte comme support.ivalent exact du rel, elle le rend accessible du regard et rassemble le monden petit espace (cest l sans doute ce quil faut entendre par brevissima quiose justement la longueur des vrais voyages, longuissimum). Le pro-

    intellectuel est similaire celui dcrit ci-dessus. Cest le mme qui a pr- la rdaction de lItinerarium syriacum, ouvrage qui trace un itinraire en

    frica, II, v. 370-392.en., IX, 2.

  • Encore quelques reflexions sur lusage des cartes par Petrarque Quaderns dItali 11, 2006 323

    Terre sde liticonsisaux lietitudequer econnales yeulans; ilde ceslItinernier pment l

    Pographiniennepar Cocendreroute dgnralittorasavoir

    Laen situ

    Lale textverrastion dLa cartgraphi

    24. Itin25. Ibidainte crit pour un noble milanais, Giovanni Mandelli. La descriptionnraire vers la Terre sainte est en fait un prtexte un voyage littraire quite voquer les faits historiques, littraires et mythologiques rattachsux qui sont dcrits. Cette mise en scne du voyage est fonde sur la cer- que seul celui qui dispose dune culture livresque est capable de remar-t dadmirer les qualits dun lieu: Il est admirable pourtant que nousissions ce que nous navons jamais vu et ignorons ce que nous avons sousx.24 LItinerarium a t ralis partir de cartes marines et de portu- est vident que Ptrarque ne prcise pas lorsquil utilise lun ou lautre objets et quil est difficile pour lhistorien de discerner dans le texte dearium ce qui provient de la lecture de la carte ou du portulan. Ce der-ourtant se signale lorsque lauteur est particulirement prcis, notam-orsquil donne des indications de distance.rtulans et cartes marines structurent ce texte en fournissant lordre go-que du parcours. Litinraire dcrit part de Gnes, longe la cte tyrrh-, le dtroit de Messine, la pointe extrme de lItalie puis rejoint la Grcerfou, contourne le Ploponnse, traverse les les grecques avant de des- vers la cte du Proche-Orient suivie en partie jusquen Egypte. Cetteiffre de celle habituellement emprunte par les plerins, qui partent, enl, de Venise et longent la cte Adriatique: Ptrarque entend dcrire lel italien quil connat et apprcie le mieux, par sa culture littraire, sonlivresque et ses voyages. carte permet la mise en scne du voyage par lesprit, en plaant le lecteuration de spectateur, au centre de litinraire:

    Post hec paucis passuum milibus, portus et ipse manufactus, Pisanum vocant,aderit et fere contiguum Liburnum, ubi prevalida turris est, cuius in verticepernox flamma navigantibus tuti litoris signum prebet. Hinc si ad dexteramte deflectas Gorgon atque Capraria, parve quedam Pisanorum insule, prestoerunt, nec non turris exigua, pelagi medio, que Meloria vulgo dicitur, [] Sinpressius intenderis, videbis et Corsicam incultam insulam et armentis silves-tribus abundantem []. Quinquaginta inde, vel non multo amplius, passuummilibus Plumbinum, insigne oppidum ad levam fertili sedet in colle, portussubest neque multarum capax navium et securitatis ambigue. Ad dexteram,exiguo spatio, Ilva est25

    lecture de la carte permet un reprage dans lespace qui se traduit danse par la mention droite, gauche, renforc par les mentions tu, tu apercevras. Les informations concrtes du texte (distance, men-e la capacit du port) viennent en revanche de la lecture du portulan.e permet doffrir aux yeux et lintellect une investigation de lespace go-que en supplant la connaissance directe:

    erarium Syriacum, d. Francesco LO MONACO, 1990, p. 40.., p. 50.

  • 324 Quaderns dItali 11, 2006 Nathalie Bouloux

    Sdansdisp

    LNoucondespate retreinpartconjvoyade mmarmoinlisatives

    Usag

    PtrcomtiontrumlocaLhuprodancide m

    Ptextelisatileme

    26. I27. IEt de Luca quidem dubius sum, Florenctia prorsus extra conspectum latet.26

    i la carte sert localiser les tapes de litinraire, elle permet aussi de situer lespace des lieux antiques quelle nindique pas, ces lieux clbres maisarus de lAntiquit qui suscitent lintrt des humanistes:

    In hoc tractu Formie seu Formianum et Liternum sunt: dicam verius, fuerunt:alterum Ciceronis infanda cede, alterum Scipionis indigno exilio nobilitatumet cineribus patrie negatis. Sed hec duo loca extimatione magis animi quamoculis assequeris: alter enim iacet, alter et latet, nisi quod apud Formias adhucdeue seu tres magne supereminent arene 27

    a carte est donc un outil privilgi de la reconstitution du monde antique.s sommes ici la fonction ultime du voyage par lesprit dont elle est laition essentielle. La lecture de la carte permet de faire concider deux

    ces, celui de la civilisation de lAntiquit et celui de la modernit: russi-marquable dune synthse du savoir gographique, dans un espace res-t, limit au sein mme de lItinerarium au littoral tyrrhnien,

    iculirement bien connu de Ptrarque. Ce savoir est li lutilisationointe des traits gographiques, des textes littraires des Anciens, de sesges, et de la connaissance du littoral issue de la pratique de gnrationsarins et de marchands, conserve et transmise par les portulans et les cartes

    ines. La carte marine au service de lrudition antiquisante nest pas ledre paradoxe de ses usages. Il nest pourtant pas tout fait exclure luti-

    on des cartes anciennes. Ces dernires sont cependant de prfrence rser- une autre utilisation.

    e philologique et discussions gographiques

    arque fait en effet un usage philologique des cartes quil juge anciennes,me le montre la glose mthodologique du Virgile de lAmbrosienne (cita- 1). Reprsentant lespace du monde ancien, elles sont ses yeux des ins-ents fiables pour servir ses recherches de topographie antique (cest--dire

    liser des toponymes anciens qui ont disparu ou dont le nom a chang).maniste les place clairement sur le mme plan de fiabilit que les textesuits par les spcialistes, cest--dire les cosmographes. Les cartes, par leurennet, conservent la ralit de lespace antique, comme latteste le terme

    eminerunt (citation 2).arce quelles sont considres comme fiables, elles peuvent contredire less des autorits, et en corroborer dautres (citation 3, o lon remarquera luti-on du terme testantur). Anciennes ou modernes, elles permettent ga-nt une investigation et une problmatisation du rel. Dans lItinerarium,

    bid., p. 48.bid., p. 54.

  • Encore quelques reflexions sur lusage des cartes par Petrarque Quaderns dItali 11, 2006 325

    propcrit:

    La eu cola lectpourratible dde lItilaire det lextet de r

    Concl

    Lattitune decarte, haut. Ition code lesgograau rebtificatide. LaGaulelettre Fgnie dreconsune fatuelle

    Il fla repldcriremarinune im

    28. Ibid29. PLIos de la traverse entre lItalie et la Grce quil na jamais faite, Ptrarque

    Iam ad fines orbis Italici ventum est, in quo ultimum cum Ydruntem attigerispedem, habens obvium Adriaticum equor emensus primam insularum abadverso litore Corcyram ignobilesque alias invenies, donec ad Achaie primumangulum perveneris. Illics quidem optabis isthum (quod quibusdam venit inmentem) esse perfossum quo cum rectius tibi tum brevior cursus sit.28

    ventualit du canal est un projet discut dans lAntiquit. Ptrarque ennnaissance par lHistoire naturelle de Pline:29 le savoir livresque rejoint

    ure de la carte, pour mettre en vidence ce que lil du voyageur neit voir sur le terrain, en proposant une reprsentation dun rel suscep-tre modifi. Ou questionn. Il est possible de rapprocher ce passagenerarium de la glose du Pline (citation 4) o se discerne un usage simi-e la carte. Le dessin de la carte permet, partir de la discussion des limitesension des rgions, didentifier ce quil convient dappeler le Ploponnseejeter lappellation dAchae pour lensemble de la pninsule.

    usion: Ptrarque et les nouvelles utilisations des cartes

    de de Ptrarque peut tre interprte comme relevant dun usage moder- la carte, si lon accepte didentifier modernit et usage raisonn de latranchant sur des pratiques plus traditionnelles, que jai rappeles plusl est certain que la relation entre lanciennet de la carte et son utilisa-mme instrument didentification des toponymes antiques et de tmoin

    pace de lAntiquit est remarquable. Ptrarque tend vers une sorte dephie historique, laquelle implique un processus dobjectivation du pass,ours des traditions encyclopdiques des mappemondes et de leur stra-on du temps. Dautres textes de Ptrarque montrent une mme attitu- Vie de Csar souvre sur une tentative de gographie historique de la, accompagne de rflexion autour des difficults la raliser. Dans laamilire sur Rome (V, 1), Ptrarque se met en scne errant en compa-

    e Giovanni Colonna dans les ruines de la Ville Eternelle et se livre unetitution de la Rome antique (cependant, la description de la ville donneusse impression de spatialisation alors mme que la construction tex-est strictement chronologique).aut cependant nuancer la modernit de Ptrarque ou tout le moins,acer dans un mouvement plus gnral. On a dit quil tait le premier lItalie sous la forme dune jambe, telle quelle apparat sur les cartes

    es (Eptre mtrique Luchino Visconti, II, 2, 29-35) alors quon trouveage similaire issue de ltude dune carte marine dans le Dittamondo

    ., p. 66.NE, Histoire naturelle, IV, 10.

  • 326 Quaderns dItali 11, 2006 Nathalie Bouloux

    de Fles rgrapce encartelongno Scomnouvdu Xlectudco

    Rsu

    PtrtiquIl letramreprgiqugaletmode P

    30. Sazio degli Uberti (I, XI, v. 76-83).30 Leffort de Ptrarque pour localisergions du Ploponnse avec prcision est fond sur lpistm de la go-hie mdivale, soucieuse avant tout de dcouper rationnellement lespa- rgions identifies par leurs contiguts. Enfin, la fiabilit accorde auxs accompagne un processus dautonomisation de la cartographie engag deue date, dont tmoignent au dbut du XIVe sicle Paulin de Venise et Mari-anudo. Fascin par lespace antique, Ptrarque a utilis les cartes la foisme le faisaient certains de ses contemporains tout en inventant des formeselles, lies la culture humaniste. sa manire, il tmoigne de limportanceIVe sicle comme moment fondateur o senracinent des attitudes intel-elles encore trop souvent considres comme propres lge des grandesuvertes.

    m

    arque possdait des cartes de nature diffrente (mappemondes schma-es dessines en marge des manuscrits, cartes marines, cartes anciennes).ur rservait divers usage: les cartes marines lui ont servi pour donner lae de litinraire de lItinerarium syriacum tandis que les cartes anciennes,sentant lespace de lAntiquit, lui servaient dans ses enqutes philolo-es sur la localisation des toponymes anciens. Ces cartes lui permettaientment dinterroger le rel. Ces diffrents modes dans lusage des cartesignent dune modification gnrale du statut des cartes propres lpoquetrarque, mme si lhumaniste en est un tmoin remarquable.

    ur ce point, voir Nathalie BOULOUX, op. cit.,p. 104.

    Encore quelques reflexions sur lusage des cartespar PetrarqueAbstractAbstract

    La cartographie au XIV e sicle en ItalieLes cartes possdes par PtrarquePtrarque, lecteur de cartesVision cosmiqueCarte marine, construction ditinraires et reconstitution du monde antiqueUsage philologique et discussions gographiques

    Conclusion: Ptrarque et les nouvelles utilisations des cartesRsum