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  • Rachel Ari

    Ibn Hazm et l'amour courtoisIn: Revue de l'Occident musulman et de la Mditerrane, N40, 1985. pp. 75-89.

    Citer ce document / Cite this document :

    Ari Rachel. Ibn Hazm et l'amour courtois. In: Revue de l'Occident musulman et de la Mditerrane, N40, 1985. pp. 75-89.

    doi : 10.3406/remmm.1985.2095

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remmm_0035-1474_1985_num_40_1_2095

  • R.O.M.M., 40, 1985 - 2

    IBN flAZM ET L'AMOUR COURTOIS par

    R. ARI

    Au grand penseur de l'Islam andalou Ibn Hazm de Cordoue ont t consacres plusieurs tudes qui ont jet la lumire sur les vicissitudes de son existence tourmente au Ve/XIe sicle, dans les moments les plus tragiques de l'Espagne musulmane, et sur les aspects divers de son uvre de psychologue, de moraliste, de thoricien du langage, de juriste z- hirite et d'historien des ides religieuses (1).

    Parmi la douzaine des crits d'Ibn Hazm qui nous sont parvenus, l'un des plus attachants est son uvre de jeunesse, le Tawq al-hamma ft l-Ulfa wa l-Ullf. Dans ce Collier de la Colombe, vritable trait sur l'amour et les amants, Ibn Hazm a dvelopp sa conception de l'amour. Assurment ce sujet n'tait pas nouveau dans la littrature arabe. Plus d'un sicle auparavant, al-fehiz avait dj compos dans l'Orient cabbside un petit trait sur l'amour et les femmes intitul Fl-Ciq wa-l-nis'. Au Xe sicle, on trouve ce mme thme dans l'une des ptres des Ihwn al-saf'. Presque la mme poque, al-Mascdl en traite aussi dans ses Muru\ al-dahab. Mais Ibn Hazm a su donner un tour original ce code d'Amour qui renferme des lments autobiographiques marqus au sceau de la sincrit. L'auteur nous y parle de ce qu'il a vcu et prouv en lui-mme. Dans ce livre de confession, les personnages qui gravitent autour d'Ibn Hazm, ce sont des Andalous qu'il a connus et frquents : princes, ministres, savants, tudiants dont il nous conte les diverses histoires d'amour. Presque chaque page de sa prose, parseme d'une posie claire et naturelle, se font jour la vrit psychologique, la justesse de l'observation, et la finesse de la rflexion. Fidle aux mthodes de Yadab, Ibn Hazm cherche duquer tout en distrayant le lecteur. Les anecdotes servent illustrer un expos abstrait; elles se mlent aux citations du Coran et du hadt^ inspires par la profonde culture de l'auteur.

    Le texte du Tawq al-harrima a t dit par D. K. Ptrof Leyde en 1914; plusieurs traductions en langues europennes ont paru de 1931 1952 (2). Voici comment Lon Bercher (in Avant-Propos, p.XIII) qui a traduit le Tawq en franais en 1949 dfinit le plan gnral de l'ouvrage : C'est la demande d'un ami d'Almeria, venu lui faire visite dans sa rsidence de Jativa (Province de Valence), qu'Ibn Hazm composa ce petit trait sur l'amour, les circonstances dans lesquelles il nat, les vicissitudes qu'il traverse et le comportement qu'il impose aux amants. Peu de temps aprs, en relisant le Collier de la Colombe, ' Evariste Lvi-Provenal (1950, pp.335-375) a attir l'attention sur les dtails que fournit le Tawq al-hamma sur la civilisation cordouane aux derniers jours du califat umayyade. Avec sa prescience coutumire, il a not que ce petit livre, crit en 1022, dveloppe tout au long de ses pages une thorie d'idalisme erotique qui s'adapte fort exactement celle que l'on peut dgager de l'tude comparative de certains troubadours du Midi de la France

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    dont la posie lyrique fleurit des premires annes du XIIe sicle la fin du XIIIe sicle (E. Lvi-Provenal, 1948, p.293).

    En effet, la conception leve de l'amour exprime dans le Tawq se fait jour ds le XIe sicle chez bon nombre de potes andalous et bientt, de l'autre ct des Pyrnes, les troubadours, la fois potes et musiciens, vont chanter l'amour courtois, cette amiti amoureuse, cette servitude volontaire l'gard de la dame. Disposition strophique, amour idal et amour charnel sont des lments qui se retrouvent au Bas Moyen Age, la fois dans l'erotique andalouse et dans l'erotique occitane. On ne saurait omettre de rappeler que les expditions franaises en Espagne ont souvent t considres comme l'occasion de fructueux changes, de brassages culturels : tant de seigneurs aquitains et, leur suite, de troubadours, ont sjourn outre-monts ds la fin du XIe sicle. Aussi ne peut-on manquer d'tre sduit par les arguments qu'ont accumuls les tenants de la thse selon laquelle une influence andalouse se serait exerce sur les troubadours. Attachs l'origine latine de la posie occitane, les mdivistes ne se sont pas laisss convaincre. Il n'entre point dans notre dessein d'voquer ici cette question si souvent dbattue des rapports qui ont pu exister entre la lyrique arabe et la lyrique provenale (3).

    Notre propos se bornera dresser un parallle entre l'idal andalou qui se dgage du Collier de la Colombe et l'erotique occitane. Disons tout d'abord quelques mots sur les reprsentants les plus clbres de la posie des troubadours. La premire tape est illustre par les chansons d'un grand seigneur, Guillaume DC, comte de Poitiers et duc d'Aquitaine, n en 1071 et mort en 1127. Une note sensuelle se mle dans cette uvre la dpendance amoureuse, librement consentie.

    Entre 1130 et 1150, une deuxime tape est marque par les figures d'un jongleur gascon, Cercamon, d'un chanteur et soudoyer gascon, Marcabru, et du seigneur de Blaye, Jaufr Rudel. On trouve chez ces potes la mme aspiration, profonde et sincre la courtoisie. La doctrine de l'amour courtois a achev de se constituer au cours d'une troisime tape, entre 1150 et 1250 environ, c'est--dire dans la priode allant de la gnration de Bernard de Ventadour qui incarne le type parfait du troubadour celle d'Uc de Saint-Cire (4).

    Dfinition de l'amour chez Iba Hazm et les troubadours.

    Aprs avoir brivement situ Ibn Hazm et les troubadours dans leurs sicles respectifs, nous tenterons de donner une dfinition de l'amour tel qu'il se prsente dans leurs oeuvres.

    Ibn Hazm prend soin de prciser que l'amour n'est point condamn par la religion, ni prohib par la Loi car les curs sont dans la main d'Allah, Puissant et Grand {Le Collier du Pigeon, p.l3)(5). Il cite les souverains umayyades d'Espagne qui furent amoureux. L'amour, crit-il en vers, est pour moi aussi vital que la respiration, et j'ai remis mon il les rnes de mon coursier. On a longuement dissert sur l'amour car l'on n'est pas d'accord sur la nature de l'amour. Mon opinion, dit Ibn Hazm, est que c'est une conjonction des diverses parties des mes, parties qui sont divises entre les diverses cratures, conjonction qui s'opre dans leur lment originel le plus haut. Il poursuit ainsi : L'amour est quelque chose qui se trouve dans l'me elle-mme; l'amour est, coup sr, un tat de complaisance spirituelle, de fusion des mes (ibid., pp.15-16, p.21). Cet amour qui accapare les tres est expliqu par les affinits de diffrentes sortes entre les mes; l'lan spontan vers ce qu'il y a de plus lev donne l'erotique d'Ibn Hazm un caractre platonicien; nous y relevons l'cho du Banquet de Platon.

    Chez les troubadours, l'amour courtois est une sympathie amoureuse qui tend l'identification de deux mes nobles et leur union. D'aucuns y ont vu une sorte de sublimation, de spiritualisation de l'lan lmentaire (H. Davenson, 1961, p.147). Les troubadours

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    de 1150 insistent sur la nature toute spirituelle de l'amour. Alors que la passion est dmesure, l'amour courtois suit certaines rgles. La crtezia, pour se raliser pleinement, exige de l'homme qu'il se comporte selon un code en faisant preuve de mesure (mezura), soit une manire de se conduire, un savoir-vivre qui est un devoir social important. L'homme doit aussi respecter les exigences dejovens, soit une somme de qualits morales, de gnrosit et de libralit (M. Lazar, 1964, pp.27, 28, 30, 33).

    Pour Ibn Hazm, l'amour entrane une transformation : L'amour fait voir l'homme sous de riantes couleurs ce qui lui rpugnait nagure. Il lui fait paratre ais ce qui lui semblait difficile. Il va jusqu' transformer les caractres inns et les dispositions naturelles (Le Collier..., p.29).

    Chez les troubadours, l'amour amliore le caractre. A quarante-trois ans, Guillaume IX, en s'prenant de la Dame de Chtellerault, vite ce qui est commun; le Don Juan cynique devient vertueux.

    Tout joyeux d'une joie d'amour, Plus profond je m'y veux plonger, Et puisque veux parfaite joie, Tous mes efforts ferai porter Vers la parfaite entre les dames, La plus belle voir et entendre (G. Ribemont-Dessaigries, Let "ttoubttdours, 1946, p.44).

    Et Bernard de Ventadour chante : Celui qui aime et ne s'amliore point a certainement un cur mchant et misrable (Chansons d'amour, d. Lazar, 1966, chanson 6, vers 17-18).

    L'amour exerce sur les amants une vritable emprise. C*it iin mal accablant, pour Ibn Hazm : ., , '

    C'est une maladie dont le malade se dlecte, un tourihent qu'il dsite. Quiconque en est atteint ne souhaite pas de gurir; qui en souffre n'en veut pas tre dlivr \Lt Collier..., p\29).

    Ibn Hazm a rencontr un jeune homme de ses coiuiSssaceir qu'il tenait potir un malade ne voulant pas se dfaire de son mal telleirieht il ftik #ethptie dans les rets de l'amour (ibid., p. 17). Pour Bernard de Ventadouf, l'amour est une pfisoi (Chansons d'amour, 1, v. 22; 36, v.51; 37, v. 45).

    Pour Ibn Hazm et les troubadours, la passion est un feu qui consume. L'amant a t compar par le penseur cordouan un papillon que k feu btv (Le Colier..., p.35). Bernard de Ventadour assure qu'il vit aussi douloureusement q\ eui qui se fieurt parmi les flammes (Chansons d'amour, 12, v.65). La jtessfein rtggp l personnalit, emplit le cur d'angoisse; la souffrance amoureuse est toutefois, empreinte d'ttrie douce saveur. Ce ct fatal de l'amour, Ibn Hazm l'explique dafts le cadre de si dfinition. Si on est malheureux en amour, c'est que l'me de l'tre aim he rpond* pas l'appel de son autre moiti parce qu'elle est environne d'obstacles qui l'empchent de Voir clair (Le Collier..., p.21). Jaufr Rudel n'a d'autre dsir sinon de cet amour lointain qui absorbe tout son tre. Cercamon chante l'amour qui en ses rets l'a pris et ne lui a donn que les tortures et l'angoisse; il estime que

    Rien n'a fait si difficile prix Que l'objet de mon seul dsir, Et rien n'excite mon espoir ""' Que ce que je ne puis avoir (in G. Ribmont-Dessaigncs, ppM et 58).

    L'attente exaspre le troubadour, le pousse 1 crfer et tre pur. Ce qtti fait le charme des chansons de Bernard de Ventadour, c'est la mlancolie qui s'empare de lui par suite de la duret de la dame qui le torture. L'amour contenu lie pousse Vers une qute de l'idal.

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    La daim, l'amant et les autres.

    Dans l'amour courtois s'impose une trilogie : la dame, l'amant et les autres. Le canon de la beaut fminine tait reprsent dans la posie de l'Orient musulman

    et dans celle d'al-Andalus par la brune, l'abondante chevelure noire. Au XIe sicle, les Hispano-Musulmans ont vant dans leurs vers la femme au long cou svelte et aux cheveux courts (6). Ibn Hazm, pour sa part, connat un vritable engouement pour les blondes.

    Dans mes jeunes annes j'ai aim une esclave blonde et depuis je n'ai plus pris les brunes, mme quand une chevelure brune parat un visage aussi resplendissant que le soleil ou l'image de la beaut elle-mme.

    Il voque ensuite la prdilection des Califes umayyades de Cordoue pour les femmes blondes et ajoute que la femme au cou de cygne n'est pas toujours prfre celle qui a un cou normal mais que tout cela est affaire de got personnel. Rares sont les dtails physiques chez Ibn Hazm. Son esquisse demeure toute conventionnelle lorsqu'il voit dans la lumire de la lune un reflet de l'clat de sa belle. Il admire la blancheur de la peau, les grains de beaut et les mouches qui parent un visage, la dmarche balance de la femme aime, sa taille flexible comme un rameau (Le Collier..., p.73-77, 109, 154-155). La bien- aime est orne de toutes les vertus, comme il ressort d'une histoire qui lui est arrive personnellement. Epris d'une jeune esclave de seize ans qui avait grandi dans la maison de son pre, il a conserv d'elle le souvenir d'une personne

    parfaite par la beaut du visage, par son intelligence, sa chastet, sa puret, sa modestie et sa douceur. Elle tait trs srieuse, pleine de retenue, profondment sympathique, trs pudique, irrprochable, parlant peu; son regard tait modeste, elle tait trs prudente, sans dfauts, pleine de gravit; elle tait charmante quand elle se dtournait, gardait naturellement son quant--soi, tait agrable voir quand elle s'loignait (ibid., p.283).

    La palette dont se servent les troubadours donne un certain clat la femme aime. Guillaume IX clbre celle qui est plus blanche qu'ivoire. Un pote anonyme chante le beau corps de sa dame, blanc comme un lis en neige, frache sa couleur comme rose en mai, blonds comme de l'or ses plaisants cheveux (Les Troubadours..., p.36). Cependant la description de la beaut fminine reste vague et purement conventionnelle; ce que louent les potes lyriques occitans, c'est la sveltesse de la taille, l'clat du teint blanc comme la neige, vermeil comme la rose, la finesse des sourcils, la blancheur des dents, l'agrable proportion des parties du visage. Il n'est jamais question de la couleur des yeux, ni de l'expression de la physionomie. La dame des troubadours est la crature la plus parfaite que Dieu a forme; pour Bernard de Ventadour, elle dpasse toutes les femmes au monde (Chansons d'amour, 3, w. 53, 55: 6, w.21-24). Les troubadours se refusent sparer chez la dame les qualits de l'esprit de celles du corps. C'est une grande dame par la noblesse de son lignage, elle est douce, gracieuse et avise. Elle sait allier les plaisantes paroles aux louables actions. Les troubadours imaginent la beaut fminine comme empreinte de finesse et d'intelligence. La dame des troubadours possde les qualits de la parfaite femme du monde.

    Le comportement de l'amant est ainsi dfini par Ibn Hazm : on voit l'amoureux se dtourner ouvertement des personnes prsentes sauf de l'tre aim. Il va jusqu' montrer pour la famille, pour les proches, pour l'entourage immdiat de la femme aime une affection telle qu'elle surpasse celle qu'il prouve pour les siens et pour ses amis personnels (Le Collier..., p.45).

    Guillaume IX estime qu'il faut tre dfrent envers tous ceux qui habitent l o demeure son amour. Bernard de Ventadour est d'avis que l'amant doit adopter une attitude affable, mme envers le rival ou l'ennemi. L'amant manifeste beaucoup d'gards pour la dame. Je rvre la plus gentille dame du monde, crit Arnaut Daniel (7). L'amour dpose au

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    cur de l'amant toutes les vertus. Le parfait amant est tenu de ne jamais rien faire qui soit susceptible de dplaire la dame. Ses obligations vont des simples gards de politesse aux preuves de dvouement passionn. Les troubadours exigent de l'amant qu'il soit matre de sa passion et de ses instincts, conformment aux rgles de l'amour courtois. Devenir un parfait amant suppose tout un travail. Pour mriter cette appellation, il faut se dpouiller de toute vanit masculine. L'amant doit chercher charmer la dame par son chant afin de lui plaire. Bernard de Ventadour affirme qu'il idoltre la dame; il lui appartient cur et corps; il l'invoque et l'adore comme une divinit. H ajoute :

    je suis redevable mon amante et de ma valeur et de mon esprit; je lui dois ma douce gaiet et des manires agrables car si je ne l'avais jamais vue, je n'aurais jamais aim; jamais je n'aurais dsir plaire.

    A la suite d'une profonde dception, il arrive que l'amant ait lieu de se plaindre de la dame. Dans ses premires chansons, Guillaume LX dplore l'infidlit des femmes. Bernard de Ventadour est l'objet d'un brusque revirement : du, il est heureux de quitter la dame et accuse alors toutes les femmes d'tre volages (Chansons d'amour, 17, w. 21-23; 31, w. 33-34).

    Sur la scne de l'amour courtois se meuvent des personnages secondaires qui occupent Parrire-plan.

    L'ami secourable est, selon Ibn Hazm, un ami dvou et dlicat dans ses propos, incapable de trahir, l'me gnreuse, toujours prt bien conseiller. Celui qui a pour ami un tel homme ne manquera jamais d'une noble assistance (Le Collier..., pp.110-121). Il arrive que l'ami sincre se double d'un censeur ("dil). C'est un ami intime qui n'a plus aucune rticence et dont la bienveillante attitude est prfrable bien des complaisances. Mais c'est une grande calamit que de renconter un censeur qui rprimande toujours l'amoureux et ne cesse de le blmer (Ibid., pp.120-121). Guiraut de Borneil nous prsente dans une aube le type parfait de l'ami qui veille sur le pote et la dame durant la nuit (Troubadours, p. 111). Il est doux de pouvoir lui dvoiler son bonheur. Mais l'ami le plus intime s'avre souvent tre un bavard. Aussi, aprs avoir recommand l'emploi du confident, Guiraut suppute les dangers de cette situation et en vient conclure que sur trois compagnons se trouve en moyenne un ennuyeux. Une fois que la confiance rgne entre les amants, intervient l'envoi du messager (safr) auquel Ibn Hazm a consacr un court chapitre (Le Collier..., pp.88-91). Le messager doit tre choisi avec le plus grand soin et recherch parmi les plus ingnieux. Ibn Hazm recommande de confier l'envoi des messages un tre discret, fidle, humble et de bon conseil. Le messager qui ne possde pas ces qualits nuit celui qui l'envoie. A Cordoue, les amoureux employaient pour cette mission des femmes que leur mtier mettait en contact avec les gens : femmes-mdecins, tireuses de sang, crieuses publiques, coiffeuses, pleureuses, chanteuses, devineresses, servantes, fleuses, tisseuses (Ibid, p.89-91).

    Chez les troubadours, le messager est attendu avec impatience; Bernard de Ventadour crit :

    Messager, va et cours Et dis la plus belle L'amer chagrin et la douleur Que j'endure en martyre. (Les Troubadours, p.95)

    Le messager est souvent charg de transmettre l'amant le souvenir de la dame. Voici ce que chante un pote anonyme :

    Messager, lev matin Va-t-en pour un long voyage. La chanson mon ami Porte-la en son pays. (IbuL, pp.37-38)

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    Le confident peut tre un messager; il est alors le reprsentant de l'amant et son dfenseur en cas d'absence.

    Dans al-Andalus, au XIe sicle, les potes ont frquemment parl d'un personnage qui joue dans l'univers courtois le rle d'un trouble-fte; c'est le raqb ou observateur (H. Prs, 1953, pp.418-419). Il s'agit tantt du matre de la chanteuse qui empche l'union des amoureux, tantt du mari jaloux. Aux dires d'Ibn Hazm, le raqb pouvait tre un simple curieux, un rival ou un surveillant la solde du matre. Ibn Hazm estime que c'est une des calamits de l'amour. Il raconte plusieurs reprises comment on djoue la vigilance des observateurs. Enfin, il met le lecteur en garde contre la sparation provoque par la prsence d'un observateur {Le Collier..., pp. 128-131). Soudoy par un rival ou un mari, le gardador apparat souvent dans la lyrique occitane.

    Dans la vie amoureuse, le personnage secondaire qui joue le plus grand rle, c'est le dlateur {wS), ce calomniateur qui cherche sparer les amants par ses intrigues {Le Collier..., pp. 134-139). Un contemporain d'Ibn Hazm, le Cordouan Ibn Zaydn, chantre de l'amour, dnonce dans ses pomes l'action nfaste du waSi (cit par H. Prs, 1953, p.420). Ibn Hazm distingue deux sortes de dlateurs. Le type de la premire sorte est celui qui veut seulement provoquer la rupture entre les amants. C'est gnralement l'tre aim qu'il s'adresse et il ne cherche qu' desservir l'amant par son comportement venimeux. Tantt le dlateur rapporte l'aime que l'amour manifest par l'amant n'est pas vritable. Tantt le dlateur fait croire l'objet aim que la passion de l'amant est partage entre plusieurs tres. Une telle dlation, ajoute Ibn Hazm, brle comme un feu dvorant. Le type de la seconde sorte de dlateurs est celui qui n'a d'autre but que de provoquer la rupture entre les amants pour jouir seul de l'objet aim et l'accaparer. Le calomniateur ne peut se passer du mensonge. Or, Ibn Hazm hait le mensonge. Il rprouve l'attitude du dlateur en tayant ses affirmations par le recours aux dits du Prophte {Le Collier..., pp. 140- 147).

    Dans l'erotique occitane de 1150, les mdisants commencent jouer un rle important dans la socit courtoise; ils ne songent qu' divulguer ces amours qui aspirent la discrtion absolue et, partant, les condamner l'chec. Ces lauzengiers, on les trouve dans l'oeuvre de Jaufr Rudel, dans les chansons de Cercamon, dans celles de Bernart Marti qui dclare sa dame : Je dsire tant russir auprs de vous, avant que notre amour ne soit bris par les jaloux et par les lauzengiers. Plusieurs textes font tat dans l'erotique des troubadours classiques de 1150 1250 environ de ces mdisants qui sont souvent des rivaux jaloux (A. Jeanroy, 1934, H, pp.109-112, et R. Nelli, 1963, p.129). Adversaires dclars de la joie d' autrui qu'ils ne peuvent supporter, les lauzengiers empchent les amants de s'aimer, sans en tirer profit eux-mmes. Bernard de Ventadour se plaint de cette gent perfide et maligne qui pie les vrais amants. C'est par la jalousie que s'explique leur mchancet. Aussi la dame ne doit-elle pas se laisser intimider par eux. J'implore donc la belle en qui j'ai confiance, chante Bernard de Ventadour, de s'en souvenir et qu'elle ne se laisse changer ni dvier par les rumeurs, afin que je fasse mourir d'envie les ennemis que j'ai {Chansons d'amour, 3, w. 30-32, v.40; 5, v.23, v.27). Peu soucieux de la rputation et de l'honneur des dames, les lauzengiers sont des tres mprisables dont l'objet aim doit se dfier. Vous devez, dame, me mettre bien au-dessus de ces perfides qumandeurs, dit Gui d'Ussel (A. Jeanroy, 1934, p.112).

    La thmatique de l'amour courtois.

    La thmatique de l'amour courtois retiendra maintenant notre attention. En premier lieu, quelles sont les causes de l'amour ? Selon Ibn Hazm, l'amour sensuel peut faire natre le vritable amour. Si les rapports charnels correspondent des dispositions de l'me, ils font natre l'affection car les parties sensibles de notre corps sont les voies qui aboutis-

  • Ibn Hazm et 1' amour courtois 8 1

    sent aux mes et qui y mnent. Pour Ibn Hazm, l'amour peut clore la suite d'une simple description et sans avoir vu l'objet aim. Les rcits, la description des belles qualits, les informations ont une influence vidente sur l'me (Le Collier..., p.53). Parmi les troubadours, Jaufr Rudel s'prend de la Comtesse de Tripoli, sans l'avoir vue, sur le tmoignage des plerins d'Antioche qui lui ont dit du bien d'elle. Et il compose sur elle des posies. Il se croise et prend la mer cause du dsir qu'il a de la voir :

    Amour de terre lointaine, Tout mon corps a mal de vous, De baume ne puis trouver Qui de vous ne se rclame Par l'attrait de douce amour, Au verger, sous la courtine Avec la tant dsire (Les Troubadours, p.52).

    En second lieu, la naissance de l'amour s'accompagne toujours d'indices, d'aprs Ibn Hazm. Ces signes qui rvlent l'amour et trahissent l'amant sont divers : contemplation prolonge de l'tre aim, intrt manifest l'couter, tre auprs de lui. Plusieurs gestes des amants sont significatifs : ainsi chercher toucher la main de l'aim au cours de l'entretien, boire le reste laiss par l'aim dans sa coupe. Parmi les signes de l'amour atrrit al-hubb), on relve le langage des yeux, les allusions par la parole, les gards que l'amant a pour l'aim, la mmoire qu'il garde de tous ses faits et gestes, la confusion et l'moi que l'amant montre quand il est soudainement mis en prsence de l'aim, le trouble qui se manifeste chez l'amant quand il entend prononcer le nom de l'aime (Le Collier..., pp.30-39). Cercamon a bien dcrit le trouble qui le saisit devant la dame :

    D'tre avec elle tant m'tonne Que n'ose avouer mon dsir Et quand m'en vais d'elle il me semble Que perds tout sens et tout savoir {Les Troubadours, p.58)

    La timidit est galement un signe de l'amour. Ibn Hazm cite le complexe de timidit qui empche l'amant d'extrioriser ses sentiments mme par allusions. Les choses tranent alors en longueur, l'amour se fltrit et la consolation arrive (Le Collier..., pp.276-277). Cercamon n'ose rien dire la dame; peut-tre avouera-t-il son amour au bout de deux ou trois ans de service amoureux (Les Troubadours, p.59). Autre signe de l'amour : les larmes; elles attestent que l'amour est ardent, sincre. Ainsi s'exprime Ibn Hazm en vers :

    La marque du chagrin, c'est un feu qui embrase le cur, une larme qui coule et se rpand sur les joues. Si l'tre pris cache le secret de son me, les larmes de l'il le dclent et le trahissent. Quand, des paupires, jaillit le flot des larmes, c'est que le cur renferme une passion cruelle (Le Collier..., p.47).

    Les larmes entranent chez les troubadours la pleur et l'amaigrissement de l'amant. De l'eau qui coule de mes yeux, crit Bernard de Ventadour, j'cris plus de cent saluts, que j'envoie la meilleure et la plus belle. Arnaut de Mareuil ne fait que parler de ses pleurs (A. Jeanroy, 1934, II, p. 103).

    Les souffrances de l'amant sont galement morales. Il endure toutes sortes de tourments. Ibn Hazm fait tat de l'affliction qui s'empare de l'amant, des gmissements qui s'exhalent d'un cur dsespr (Le Collier..., p.44-45). Bernard de Ventadour dit que l'amour le tient en balance comme la nef sur l'onde et dclare qu'il souffre plus que Tristan :

    Si grand'peine d'amour N'eut Tristan l'amoureux Qui dut souffrir maintes douleurs De par Yseut la blonde (Les Troubadours, p.94).

  • 82 R.Ari

    La femme apparat indissolublement lie ce qui fait la beaut de la nature. En homme du XIe sicle andalou, Ibn Hazm a situ les amants dans un cadre agreste. Voici les vers qu'il a composs ce sujet, dans le genre des rawdiyyt ou posie des jardins (8).

    Nous avons t heureux dans le dcor fleuri d'un jardin clatant. Des ondes l'avaient arros et, par sa riche floraison, il en rendait grces au Ciel. Il semble que la pluie, les nuages et le jardin embaum soient respectivement des larmes, des paupires et une joue incarnadine (Le Coter..., p.43).

    Chez les troubadours, l'vocation du cadre fleuri est quasi obligatoire dans la posie amoureuse. Si haut que l'on remonte, ce poncif apparat dj dans deux des trois chansons courtoises de Guillaume EX, dans les vers de Rudel, de Peire d'Auvergne. Chez Bernard de Ventadour, la proportion est assez forte. La belle saison de Pques apporte, selon lui, avec la frache verdure, feuilles et fleurs de couleurs varies; aussi tous les amoureux sont gais et chantent (Chansons d'amour, 17, w. 1-8). Les mois d'avril et mai apportent avec eux le bonheur. Mme loign de la dame, le pote trouve la consolation dans le chant des oiseaux et la renaissance de la nature, qui lui transmettent symboliquement espoir et gat. Voici ce que dit Bernard de Ventadour :

    Lorsque l'herbe frache et les feuilles paraissent, que la fleur bourgeonne sur la branche, et que le rossignol lve sa voix haute et claire et entonne son chant, j'ai joie de lui, et j'ai joie de la fleur, et joie de moi-mme. Et plus grande encore, de ma dame (ibtd, 20, w. 1-8).

    Parmi les thmes de l'amour courtois, il en est de fort caractristiques. Nous mettrons au premier plan la force d'amour. Voici la dfinition qu'en donne Ibn Hazm :

    L'amour a un pouvoir qui s'exerce sur les hommes, une souverainet dcisive, une autorit inconteste, des lois qu'on n'enfreint pas, un empire inviolable, une tyrannie inluctable, une domination absolue (Le Collier..., p.69).

    La pleur du front, la tristesse pensive, le tremblement pareil celui de la feuille au vent traduisent chez le troubadour l'emprise de l'amour. Bernard de Ventadour est dans un tat d'hbtude tel qu'il est tout prt, en plein hiver, marcher sous la froide bise, en chemise; les frimas lui semblent des fleurs printanires (A. Jeanroy, 1934, II, 104).

    Le dsir est rattacher la force d'amour. Le dsir de rencontre hante tout tre amoureux. Quand les amants se confondent dans un mme amour, se nouent des liens pistolai- res; Ibn Hazm a consacr un court chapitre la correspondance.

    L'arrive de la lettre entre les mains de l'aim, quand l'amant apprend qu'il l'a reue et lue, constitue une rare jouissance pour l'amant et quivaut pour lui la vue de l'objet de sa flamme (Le Collier..., pp.84-87).

    Pour nous donner une preuve de l'intensit de l'amour, Ibn Hazm nous raconte une anecdote o un amant se coupe la main avec son couteau. Du sang qui en coule, il se sert pour crire toute la missive (ibid., pp.86-87). Les troubadours exaltent le long dsir qui essaie de perptuer l'ternel rve de voir la dame ou de la possder. Le sire de Blaye, Jaufr Rudel, dont le seul dsir est de rencontrer la Comtesse de Tripoli, s'exprime ainsi en ses vers :

    Je vais courb par le dsir Sans que chants ni fleurs d'aubpine Me soient plus que glace d'hiver. Que le Seigneur, cnes, je crois, Me fera voir l'amour lointain (Les Troubadours, p.53).

    La discrtion est une des rgles essentielles de l'amour courtois. Ibn Hazm l'observe strictement et ne nous rvle pas les noms des personnes qu'il a connues et dont il nous rapporte les aventures. Ibn Hazm est d'avis que l'amant doit garder son secret, viter de se trahir par la pleur, le regard ou les larmes. La discrtion est souvent motive dans la socit cordouane par le dsir de l'amant d'viter les consquences de la divulgation de

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    son secret lorsque l'tre aim est d'un rang illustre (Le Collier..., pp.96-97). L'indiscrtion peut entraner la fin de l'amour. Au chapitre de la garde du secret succde le chapitre de la divulgation du secret. En pareille occurrence, l'amour l'emporte sur la pudeur et le besoin de le proclamer supprime toute retenue. Ibn Hazm pense que ce comportement provoque l'antipathie de l'tre aim et que c'est l un manque de diplomatie de la part de l'amant. (Le Collier..., p. 102-103). Chez les troubadours, la discrtion est la premire marque de respect envers la dame : pour mieux l'honorer, il faut lui vouer une passion secrte, toute intrieure. La discrtion est ncessaire l'amour, surtout quand il est adultre. Il appartient l'amant de dissimuler son trouble lorsqu'il est observ. L'amour courtois ne peut vivre que dans le secret; le divulguer comme le font les lauzengiers, c'est le tuer; aussi les bavardages de ces mdisants perfides sont-ils redoutables. Le parfait amant, en tout cas, doit faire preuve d'une discrtion absolue. Notre amour ne sera jamais divulgu par moi, soyez-en bien certaine, dclare Bernard de Ventadour sa dame. (Chansons d'Amour, 16, w. 47-48).

    Chez Ibn Hazm, comme chez les potes andalous du XIe sicle, le nom de la bien- aime demeure cach dans les rcits dont il maille Le Collier de la Colombe. La discrtion se manifeste dans l'emploi du masculin pour voquer la bien-aime; celle-ci est appele sayyid, mon seigneur ou bien mawtya mon matre (Le Collier..., pp. 119-121, 132-133, 156-157, 170-171, 248-249, 258-259). Le senhal ou attribution d'un nom suppos la dame est frquent dans l'erotique occitane. Guillaume DC appelle parfois sa dame midons mon seigneur et la dsigne par un senhal masculine : Bon Vezi (9). Chez Bernard de Ventadour, le senhal Beau-Voir cache le nom de l'pouse du comte de Toulouse Raymond V (Chansons d'Amour, 9, v. 41). Raimbaut de Vaqueyras qui composa de belles chansons en Provence la fin du XIIe sicle fit de brlantes dclarations d'amour Beau Cavalier (Les Troubadours, p. 179).

    Le thme de la soumission la dame est une pice matresse sur l'chiquier de l'amour courtois. Cette soumission amoureuse remontait dans la posie erotique arabe la priode pr-islamique. Ibn Hazm, hritier de la tradition orientale, vante la toute-puissance de l'amour :

    En amour, s'humilier n'est point blmable; en amour, l'homme le plus fier se soumet (Le Collier..., pp.106-107). Qu'on n'aille pas me dire, poursuit Ibn Hazm, que, pour un amant, supporter les humiliations que lui inflige l'aim, c'est de la bassesse d'me. Ce serait une erreur... Les injures de l'aim, ses durets l'gard de l'amant ne sont nullement dshonorantes et ne constituent point un affront durable travers les gnrations {ibid., p.109).

    Il n'existe pas, aux dires d'Ibn Hazm, de scne plus dlicieuse et plus aimable que celle o un amant humili, soumis et implorant, demande le pardon de son amante. Il dclare notamment :

    J'ai foul les tapis des Califes, assist aux runions des rois; mais jamais je n'y ai constat une vnration mle de crainte qui puisse se comparer celle que manifeste l'amant a l'gard de son aim... J'ai vu l'autorit exerce par les Vizirs, connu les satisfactions qu'prouvent les hommes d'Etat, mais je n'ai jamais vu panouissement plus intense, plus vif contentement de son sort que celui d'un amant qui est sr de possder le cur de son aim... J'ai vu comment les gens s'excusaient en prsence des souverains;... leur comportement tait moins humble que celui d'un amant perdu en prsence de son aim courrouc, transport de colre et plein de duret (ibid., pp. 182-183).

    Les troubadours se dclarent serviteurs de la dame. La rgle majeure, pour le parfait amant, est de satisfaire la volont de la dame, de ne rien faire qui puisse lui dplaire. Nul ne peut tre assur de triompher de l'amour, s'il ne se soumet en tout en sa volont, proclame Guillaume DC (Les chansons de Guillaume IX, VII, 26). Bernard de Ventadour clbre le vasselage d'amour : Toujours, je voudrai son honneur et son bien, et je serai son homme-lige, son amant et son serf (Chansons d'Amour, 9, w. 22-23). C'est au cours de

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    cette longue patience que s'panche la joie exaltante cause par l'amour (joy onjo)(\0). Bernard de Ventadour est domin par la joie. Gui d'Ussel chante sa dame en ces termes :

    Vous tes sans pareille Pour me donner la joie (Les Troubadours, p.152).

    La soumission a pour corollaire la fidlit. Ibn Hazm dclare que la fidlit est d'obligation plus imprieuse pour l'amant que pour l'aim; c'est pour l'amant une condition plus stricte car c'est de lui que vient l'initiative de l'attachement... L'aim, au contraire, n'est autre que quelqu'un vers qui l'on est attir, vers qui l'on se dirige (Le Collier..., pp.206-207).

    Les troubadours sont hants par l'image de la dame. Uc de Saint-Cire clame : Que ferai-je ? Hors de vous je ne puis trouver Rien, ici-bas, qui me tente ou m'attire. Que ferai-je, moi, pour qui sont tristesses Toutes les joies qui de vous ne viennent (Les Troubadours, p.217).

    Peire de Rogiers assure la dame de son attachement. Il ne sait vouloir qu'Elle : Ne plus vous voir n'est gure de mon gr, Si loin pourtant que je suis encore de vous Mon cur et ma raison vous demeurent attachs (ibuL, p.89).

    Bernard de Ventadour sert la dame avec fidlit, mme quand elle est hautaine et montre un visage dur (Chansons d'Amour, 15, w. 33-36; 44, v. 33).

    Ibn Hazm consacre plusieurs chapitres aux accidents de l'amour. Ces cts ngatifs dcoulent de sa dfinition de l'amour. Ainsi,

    l'me de celui qui n'aime point la personne qui l'aime est entoure de tous cts par des accidents qui la cachent, par des caractres matriels qui l'obnubilent, en sorte qu'elle n'a pu prendre conscience de la prsence de la partie qui tait appele s'unir elle ds avant son sjour dans son enveloppe actuelle. Si elle tait dbarrasse de ces entraves, il n'est pas douteux que cette me et l'autre auraient part gale l'union et l'affliction rciproque (Le Collier..., pp.20-21).

    Les accidents de l'amour les plus courants sont les reproches, l'aversion, Ploignement, l'inconstance, la froideur. L'impatience est une calamit puisque l'amant ne reoit pas encore de marques d'amour. Les troubadours affirment que l'amour fait souffrir. Les tourments de l'amour sont incommensurables. Gui d'Ussel exhale sa plainte :

    Ferais bien des chants plus souvent, Mais suis lass de toujours dire Que me plains d'amour et soupire, Car tous ont coutume d'en faire autant. (Les Troubadours, p. 158)

    Un des accidents de l'amour, le dsespoir, comporte toute une gamme de degrs, selon Ibn Hazm. Une note de mlancolie perce dans les chansons des troubadours; il y a chez ces potes lyriques alternance entre l'espoir et le dsespoir. Rimbaut de Vaqueyras se lamente :

    Que m'importe hiver et printemps, Ciel clair et feuilles de futaies, Car mon succs semble infortune, Toutes mes joies se font douleur Et sont tourments tous mes plaisirs, Et mon espoir me dsespre (Ibtd., p. 177)

    Chez Ibn Hazm, un accident frquent est la consomption. Elle surgit lorsque l'amant doit tenir son amour cach, pour une raison quelconque, ou bien lorsque l'union avec l'tre aim est interdite, soit cause d'une sparation, soit parce que celui-ci l'vite (Le Collier..., pp.264-271). La lassitude survient chez les troubadours. Aprs une longue et vaine attente, Bernard de Ventadour donne libre cours son dsenchantement (Chansons d'Amour, 30, w. 11-12, 39-40; 38, w. 29-30).

    Devant la duret manifeste par l'tre aim l'amant, celui-ci, pour peu qu'il ait l'me

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    fire et noble, en vient la consolation. Parmi les situations reprsentes dans le Collier de la Colombe, figure la consolation : d'abord, la consolation naturelle qu'on appelle oubli et grce laquelle le cur se libre, puis la consolation artificielle dans laquelle l'me est soumise une contrainte. Un homme qui fait montre de courage alors que son cur est transperc n'oublie pas mais se souvient et avale les amres gorges de la patience, pour reprendre l'expression d'Ibn Hazm (Le Collier..., pp.274-275). Une autre cause de consolation, c'est la trahison qu'Ibn Hazm condamne lorsqu'elle est le fait des personnes aimes.

    Celui qui se console pour cette raison n'est blmable en aucun cas, qu'il oublie ou qu'il cherche prendre son mal en patience (ibid., p.290-291).

    Les troubadours ressentent une vive douleur devant la trahison de leur dame. Peire de Boussignac s'crie :

    Des dames je me dsespre Jamais en elles n'aurais foi, Autant d'elles j'avais estime, Autant je les mpriserai (Les Troubadours, p.97).

    Autre thme commun Ibn Hazm et aux troubadours : la mort. Ibn Hazm y a consacr un chapitre truff d'exemples puiss dans les histoires d'amour de ses contemporains. La mort est le malheur naturel qui fait cesser l'amour. Chez les tres d'une sensibilit extrme, c'est parfois le retour de l'aim qui tue, force de joie. Parfois la passion consume l'amant, entrane la consomption puis la mort. Les troubadours ont fait aux amants une sorte d'obligation de vivre dans une espce de mort lente, provoque par la cruaut de la dame. Bernard de Ventadour dcrit ainsi son tat d'me :

    Elle m'a tu et par la mort je lui rponds; et je m'en vais puisqu'elle ne me retient pas, malheureux, en exil, je ne sais o (Chansons d'Amour, 31, v. 53, w. 59-60).

    L'idologie amoureuse chex Ibn Hazm et les troubadours : idalisme et ralisme. Tout en poursuivant notre tat de recherches, nous mettrons l'accent sur le mlange

    d'idalisme et de ralisme qui constitue la toile de fond sur laquelle s'inscrivent l'idologie amoureuse d'Ibn Hazm et celle des troubadours.

    Le Collier de la Colombe s'achve par deux chapitres moraux : l'un sur la laideur du pch, l'autre sur les mrites de la continence (pp.3 16-409). C'est l'influence zhirite qui explique l'uvre. Ibn Hazm rappelle constamment qu'en matire de dogme et de loi religieuse, il convient de s'en tenir la lettre du Coran et du Hadt. Du reste, la conception de l'amour dveloppe tout au long du Tawq al-hamama relve de la tradition orientale. Dans l'Orient musulman, on accolait l'amour spiritualise l'pithte de cudr, du nom d'une tribu bdouine du Nord de l'Arabie dont les membres auraient compt des amants perdus. Toute une littrature romanesque s'tait constitue, partir du VIIIe sicle, autour de couples insparables, Qays et Layla, Kutayyir et cAzza et surtout fcaml et la chaste Butayna. Cet amour a t assimil, il y trois dcennies,par le grand arabisant espagnol Emilio Garcia Gomez, une perptuation morbide du dsir (11). Le prcurseur de la thorie de l'amour platonique a t un juriste zhirite, Ibn Dwd (12), originaire d'Isfahan qui mourut en 294/907. Ce chef d'cole qui prit la direction du mouvement zhirite bagd- dien, la mort de son pre, Dwd b. cAh~, nous a laiss un anthologie courtoise, le Kit- b al-Zahra, traduit tour tour par Livre de la Fleur ou Livre de Vnus (13). On y trouve une cinquantaine de chapitres, chacun tant l'illustration d'une maxime en prose rime. Dans les dix premiers chapitres est expose une sorte d'thique amoureuse; les dix chapitres suivants noncent les diverses consquences de la passion et les malheurs qui s'abattent sur les amants : mdisants, calomniateurs, exil. Dans la dizaine de chapitres qui suivent, la passion est guette par des obstacles tels que la consolation, la sparation avec les consquences qu'elle entrane. Enfin, il est trait des valeurs thiques, en particulier celle

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    du secret et de la mort d'amour. L'originalit du Kifb al-Zahra est d'avoir cherch dgager une morale courtoise indpendante de la mystique et entirement base sur le hadti : Celui qui aime, reste chaste, sait taire son amour et en meurt; celui-l meurt en martyr. Ainsi se prsente la premire systmatisation de l'amour platonique, selon la rflexion de Louis Massignon. Il s'agit en outre de l'unique source livresque du Tawq al-hamma, car Ibn Hazm a eu connaissance de l'uvre d'Ibn Dwd, comme en fait foi un passage du Collier de la Colombe (pp.l4-15)(14). En bon zhirite, Ibn Hazm, m par son idalisme, se prononce pour un amour pur. Dans les dernires pages de son ouvrage o il loue les hauts mrites de la chastet, Ibn Hazm recommande de freiner l'amour afin de ne pas le dgrader. Toutefois, il ne rejette pas l'amour sensuel; maint passage du Tawq l'atteste. La place qu'il rserve dans ce trait sur l'amour aux attraits physiques et aux relations sexuelles n'est pas ngligeable. Pour Ibn Hazm, la voie des sens mne l'me, et c'est par cette voie que s'tablissent les unions solides. Le ralisme se donne libre cours dans les anecdotes qui parsment le Collier de la Colombe, anecdotes souvent obscnes, au langage direct et cru.

    Dans l'amour courtois des troubadours, on remarque galement la coexistence de l'lvation et de la sensualit. Bon connaisseur de l'erotique occitane, Ren Nelli a jug que les troubadours ont spiritualise la passion en dgageant la sensibilit de la sensualit. Tout en cherchant idaliser leur amour, ils n'en demeurent pas moins attachs la personne terrestre de la dame et l'exaltation charnelle; ils rclament ce que Jaufr Rudel appelait le prsent d'amour. En dpit du langage strotyp des troubadours, le ralisme merge par les dtails vivants et revt des formes parfois brutales. Ren Nelli est d'avis qu'on ne saurait qualifier l'amour provenal, tel qu'il s'exprime sous sa forme lyrique, ni d'absolument platonique ni de franchement raliste. On a eu tendance insister, par exemple, sur les posies grivoises de Guillaume IX dont les sujets relvent d'ailleurs d'un vieux folklore misogyne. Or, les mmes potes ont pu clbrer tour tour ou simultanment l'amour le plus pur et le dsir le plus naturaliste, sans renier leur foi enfin 'amors, l'amour fin qui entrane une sorte d'ascse purificatrice (R. Nelli, 1963, p. 135, pp. 174-175).

    Concordances et divergences dans la thorie de l'amour courtois chez Ibn Hazm et les troubadours.

    La thorie de l'amour courtois prsente des points de contact entre Ibn Hazm et les troubadours. Nous dgagerons donc brivement les principales concordances. Ibn Hazm et les troubadours ont cultiv la lyrique amoureuse. C'est en rcitant des vers, fait remarquer le lettr andalou, que l'amant commence manifester son amour l'objet de ses vux. Il y a l un moyen de se faire aimer. Bernard de Ventadour illustre par sa vie et son uvre ce pouvoir magique de la posie et de l'amour runis. La posie des troubadours est messagre d'amour. Parfois, la chanson, au lieu de s'ouvrir par une vocation du dcor printa- nier, commence par le rappel du don inspirateur de la dame; elle se clt souvent par une ddicace en vers offerts la femme aime. Tant Ibn Hazm que les troubadours ont t anims par la sincrit de la passion; ils ont eu la mme conception labore de l'amour.

    S'il n'est pas possible de prouver qu'il existe un rapport de filiation entre l'erotique d'Ibn Hazm et celle des troubadours, on ne saurait passer sous silence leurs tonnantes ressemblances dans la thmatique, notamment dans le surgissement de personnages secondaires et dans la masculinisation honorifique de la dame (15).

    Les diffrences de conception entre les deux erotiques apparaissent en des points particuliers. Nous ne laisserons pas d'attirer l'attention sur l'originalit du Collier de la Colombe. Tout en dissquant l'amour, Ibn Hazm ne recommande nullement une dmarche prcise. Assurment il prne la galanterie, la fidlit et mme la continence, mais tout est laiss l'initiative des amants. L'amour est une aventure qui se cre chaque exprience. Par

  • Ibn Hazm et l'amour courtois 87

    contre, l'attitude de l'amant l'gard de sa dame a t soigneusement codifie en Occita- nie. La part d'impulsion s'avre minime dans cet amour qui consiste observer scrupuleusement un formulaire courtois. Les diffrences d'expressions et mme de sentiments varient peu d'un troubadour l'autre. Une sorte de monotonie mane parfois de la posie occitane.

    D'aprs les anecdotes que rapporte Ibn Hazm, l'namourement se fait par les sens, surtout par les yeux. Un chapitre du Tawq est consacr ceux qui s'prennent sur un simple regard (Le Collier..., pp.56-59). Dans cet amour, la beaut joue un rle primordial. Mais ce sont surtout l'habitude, la fidlit, l'exprience des sens qui affermissent l'amour. On dirait que la femme, une fois aime, est pare de toutes les qualits. L'tre aim n'est pas ncessairement une femme de condition libre. Les aristocrates andalous, les membres de la hssa cordouane dont Ibn Hazm narre par le menu les histoires d'amour s'prennent souvent de femmes de condition servile et l'on se rappelle le rle jou par la femme-esclave (griya) dans la posie hispano-musulmane (H. Prs, 1953 p.400, p.430). Dans l'amour courtois des Occitans, la femme est choisie; celle qui l'on offre le service amoureux doit avoir du mrite. Gui d'Ussel prcise ainsi sa pense :

    Mais vous, dame, vous ai choisie De si grande valeur emplie (Les Troubadours, p.151).

    L'amour des troubadours est foncirement diffrent de l'amour fatal des anciens qui paralysait la volont. Il s'agit d'un vritable culte

  • R. Ari

    entre Ibn Hazm et les troubadours. Tout en dissertant sur la nature de l'amour et sur son volution, Ibn Hazm ne manque pas d'appuyer sa conception de l'amour sur le verset coranique : Dieu vous a crs en vous donnant une seule me, et il ajoute : Allah a voulu que la cause du repos [que trouverait Adam en son pouse] rsidt dans le fait qu'Eve tait une partie d'Adam (Le Collier..., p. 17). En dehors des dveloppements sur l'amour et des anecdotes profanes, le Collier de la Colombe contient des exposs de thologie musulmane. L'Islam est omniprsent dans l'ouvrage. Ibn Hazm y tale son souci de se situer au sein de l'Islam par le recours aux citations du Coran et aux dits du Prophte. L'amant prend pour modle le croyant. La dvotion envers l'tre aim rend meilleur et ennoblit le caractre; l'humilit en amour honore celui qui la pratique, l'image de l'homme pieux qui s'humilie devant Allah. Par contre, l'amour des troubadours est dtach de la morale chrtienne, il a sa propre thique. L'amour provenal se prsente comme le moyen de tous les perfectionnements spirituels. L'Eglise le sentit fort bien et se montra hostile ds le dbut la posie courtoise dont elle dnonait la morale lubrique. Le troubadour Mon- tanhagol eut beau taler des tendances moralisatrices dans ses chansons qui s'chelonnrent de 1233 1258 et y faire l'loge de l'amour platonique, l'Eglise continua de jeter Pana- thme sur la littrature courtoise. Celle-ci fut solennellement condamne pour son caractre hrtique par Pvque de Paris Ernest Tempier en 1277.

    Les quelques observations que nous avons prsentes dans cette modeste tude n'avaient d'autre but que de dessiner un bilan de nos recherches et de planter des jalons pour une meilleure connaissance des liens entre Ibn Hazm et l'amour courtois.

    Notes

    (1) Sur Abu Muhammad cAlrb. Ahmad b. Sa id Ibn Hazm, n Cordoue en 384/994, mort Manta Lis- im en 456/1064, voir l'important article de R. Arnaldez dans YE.I.2, III, pp.814-822.

    (2) Traductions anglaises de : A.R. Nykl, Paris 1931; A.J. Arberry, Londres 1953; russe de A. Salle, Moscou- Leningrad 1933; allemande de M. Weiseller, Leyde 1941; italienne de F. Gabrieli, Bari 1949; espagnole de E. Garcia Gomez, Madrid 1952.

    (3) II existe sur cette question une abondante bibliographie. Bornons-nous citer A.R. Nykl (1946); lente mise au point d'E. Lvi-Provenal, Posie arabe d'Espagne et pote d'Europe mdivale, dans Islam d'Occident, Paris 1948, pp.283-304, qu'il convient de complter par la lecture de P. Le Gentil (1954). Voir aussi l'article de R. Lemay (1966).

    (4) Nous avons consult avec profit les ouvrages classiques d'A. Jeanroy (1927, 1934), et les ditions de textes cits en bibliographie. Voir les numros spciaux des Cahiers du S*/(1943, 1947), et l'intressant livre de R. Nelli (1963). On lira avec intrt la thse de doctorat de M. Lazar (1964 et son dition 1966). Voir galement l'anthologie de G. Ribmont-Dessaignes (1946).

    (5) Nos rfrences au Tawq al-hamma se rapportent l'dition et traduction de L. Bercher. (6) Sur l'idal fminin dans la posie orientale de la priode archaque, voir J.-Cl. Vadet, 1968, p.43. Sur

    le canon de la beaut fminine en Espagne musulmane, voir H. Prs 1953, pp.372 et 400. (7) Voir R. Lavaud, 1910, p.300. (8) Sur ce thme potique, voir H. Prs, 1953, pp.161-166. (9) Les chansons de Guillaume IX, d. A. Jeanroy, III, 9; DC, 21-27. (10) A. Jeanroy dfinissait ainsi le py : une espce d'exaltation mystique qui a pour cause et objet la

    fois la femme aime et l'amour lui-mme. (11) Voir El Collar de la Paloma, Madrid, 1952, p.41. (12) Voir l'article Ibn Dlwd dans E.I.2., III, pp.707-708, par J.-Cl. Vadet. (13) Sur le Kiib al-Zahra, voir L. Massignon, 1975, pp.388-390, et les belles pages de J.-Cl. Vadet sur Ibn

    Dwd et l'amour courtois dans l'esprit courtois en Orient, pp.301-305. (14) Ibn Hazm y rappelle qu'Ibn Dlwd a cit sans la faire sienne la parabole platonicienne selon laquelle

    les mes seraient des sphres segmentes.

  • Ibn Hazm et 1' amour courtois 89

    (15) R. Nelli (1964, p.97) s'est demand si la coutume de masculiniser l'objet aim, qui s'est tablie partir du XI' sicle, ne serait pas la transposition de la coutume arabe, en vigueur, depuis le X* sicle, en Espagne musulmane.

    (16) II fallait aussi que l'amant - le troubadour - ft, en principe, clibataire, car il reprsentait la jeunesse. Andr le Chapelain, dans son livre De Amove, crit vers 1185, rsume toute la pense amoureuse des troubadours. Il mprise le mariage parce qu'il n'tait gnralement pas prcd - dans les milieux aristocratiques de son temps - d'un courtisement vraiment libre et sincre, susceptible de crer une communion sentimentale.

    (17) Dans son Eptre morale (Kiib al-ahq wa-l-sivar), Ibn Hazm dfinit la jalousie comme un sentiment vertueux qui est form de courage et de justice; l'homme juste, en effet, dteste porter atteinte aux droits sacrs d'autrui et dteste voir autrui porter atteinte ses droits (Traduction N. Tomiche, Beyrouth, 1961, p.62).

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    InformationsAutres contributions de Rachel AriCet article cite :Richard Lemay. propos de l'origine arabe de l'art des troubadour, Annales. conomies, Socits, Civilisations, 1966, vol. 21, n 5, pp. 990-1011.

    Pagination757677787980818283848586878889

    PlanDfinition de l'amour chez Iba Hazm et les troubadours. La dame, l'amant et les autres.La thmatique de l'amour courtois. L'idologie amoureuse chez Ibn Hazm et les troubadours : idalisme et ralisme.Concordances et divergences dans la thorie de l'amour courtois chez Ibn Hazm et les troubadours. Bibliographie