atr27 note dgccrf ni2014 45

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE D.G. T.P N.A.F. / C.P.F DIRECTION GÉNÉRALE DE LA CONCURRENCE, DE LA CONSOMMATION ET DE LA RÉPRESSION DES FRAUDES 59, BD VINCENT AURIOL TÉLÉDOC 223 75703 PARIS CEDEX 13 Réf : NI2014-45.doc 324 ED 1086Z 1089Z Note d'information n°2014-45 (communicable au sens de la loi du 17 juillet 1978) Destinataires M mes et MM. les Directeurs des DIRECCTE et des DIECCTE, M mes et MM. les Directeurs départementaux chargés de la Protection des populations, M mes et MM. les responsables des services centraux et des services à compétence nationale de la DGCCRF. Objet : Compte rendu de la TN 324 ED (2012) relative à une éventuelle falsification des compléments alimentaires à visée oculaire à base de lutéine et de zéaxanthine Résumé : De forts soupçons pesaient sur le secteur des compléments alimentaires à visée oculaire à base de lutéine et de zéaxanthine, à la suite de la survenue d’une quarantaine d’effets indésirables signalés dans le cadre de la nutrivigilance et d’une plainte déposée par une association professionnelle. A l’occasion de la TN 324 ED, les agents de la CCRF ont mis en évidence que 50 % des produits sont contaminés par de la méso- zéaxanthine, un isomère non évalué de la zéaxanthine. Présente dans l’ingrédient, cette molécule est le fruit d’un procédé de fabrication non autorisé au plan européen qui pourrait être à l’origine des effets indésirables observés. Affaire suivie par C. Franc, C. Laïolo et G. Cousyn Etiquetage de sécurité (allergène, santé...) Bureau 4A : Nutrition & information sur les denrées alimentaires Téléphone : 01 44 97 31 51 Fabrication d'aliments homogénéisés et diététiques Télécopie : 01 44 97 31 39 Courriel : [email protected] Fabrication d'autres produits alimentaires n.c.a. PARIS, LE 3 MARS 2014

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  • RPUBLIQUE FRANAISE

    D.G. T.P N.A.F. / C.P.F DIRECTION GNRALE DE LA CONCURRENCE, DE LA CONSOMMATION ET DE LA RPRESSION DES FRAUDES 59, BD VINCENT AURIOL TLDOC 223 75703 PARIS CEDEX 13

    Rf : NI2014-45.doc

    324 ED 1086Z

    1089Z

    Note d'information n2014-45 (communicable au sens de la loi du 17 juillet 1978)

    Destinataires

    Mmes et MM. les Directeurs des DIRECCTE et des DIECCTE, Mmes et MM. les Directeurs dpartementaux chargs de la Protection des populations, Mmes et MM. les responsables des services centraux et des services comptence nationale de la DGCCRF.

    Objet : Compte rendu de la TN 324 ED (2012) relative une ventuelle falsification des complments alimentaires vise oculaire base de lutine et de zaxanthine

    Rsum : De forts soupons pesaient sur le secteur des complments alimentaires vise oculaire base de lutine et de zaxanthine, la suite de la survenue dune quarantaine deffets indsirables signals dans le cadre de la nutrivigilance et dune plainte dpose par une association professionnelle. A loccasion de la TN 324 ED, les agents de la CCRF ont mis en vidence que 50 % des produits sont contamins par de la mso-zaxanthine, un isomre non valu de la zaxanthine. Prsente dans lingrdient, cette molcule est le fruit dun procd de fabrication non autoris au plan europen qui pourrait tre lorigine des effets indsirables observs.

    Affaire suivie par C. Franc, C. Laolo et G. Cousyn Etiquetage de scurit (allergne, sant...) Bureau 4A : Nutrition & information sur les denres alimentaires

    Tlphone : 01 44 97 31 51 Fabrication d'aliments homogniss et dittiques

    Tlcopie : 01 44 97 31 39 Courriel : [email protected]

    Fabrication d'autres produits alimentaires n.c.a.

    PARIS, LE 3 MARS 2014

  • Le bureau 4A de la DGCCRF a programm en 2012 une enqute visant examiner la composition des complments alimentaires vise oculaire. Cela fait suite des signalements traits par le dispositif de nutrivigilance mais aussi des soupons de falsification pesant sur ce segment de march : certains seraient additionns de msozaxanthine, une molcule de synthse moins coteuse.

    La TN 324 ED, initialement programme le 2me trimestre 2012, a t prolonge afin dexploiter les premiers rsultats obtenus. Cette note dinformation reprend les principaux enseignements tirs des synthses rgionales, des conclusions du SCL 67 et des donnes de SORA.

    I. Prsentation de lenqute

    1/ Prsentation du march

    Des effets prouvs Lengouement pour les complments alimentaires vise oculaire sest dvelopp partir des annes 2000 et la publication de plusieurs tudes pidmiologiques dmontrant lintrt dune supplmentation en antioxydants dans la prvention du vieillissement oculaire. Les composants tudis loccasion de ces tudes sont les suivants : carotnodes (bta-carotne, lutine, zaxanthine, astaxanthine), nutriments (vitamines C et E, zinc, cuivre, slnium), acides gras omga 3, coenzyme Q10.

    LAgence franaise de scurit sanitaire des aliments (AFSSA) avait dailleurs rendu un avis favorable en 2004, avant ladoption du rglement (CE) n 1924/2006, lutilisation de deux allgations :

    - la lutine contribue protger la rtine et le cristallin de l'oxydation - la lutine est un (des) constituant(s) de la rtine et du cristallin .

    Cet avis portait sur lingrdient FloraGlo obtenu partir de fleurs de Tagetes erecta (illet dInde), plante riche en lutine et en zaxanthine. Dans un des rares domaines ayant fait lobjet dune validation du fondement scientifique, se sont alors dvelopps de nombreux produits base de prparations de fleurs de Tagetes erecta.

    Des compositions variables La composition de ces produits, si elle prsente des similitudes en terme de ratio lutine / zaxanthine (10 / 2 mg), varie dans les ingrdients mis en uvre. Il existe notamment une relle opacit quant la nature des prparations de plantes mises en uvre et leur concentration en lutine et zaxanthine. Nanmoins, un apport supplmentaire en zaxanthine est souvent ralis pour obtenir le ratio 5/1 correspondant au ratio mis en uvre dans les tudes, mme si le rle de la zaxanthine nest pas connu. Il a t constat notamment quun mme ingrdient peut tre tiquet zaxanthine naturelle ou extrait de Tagetes erecta riche en zaxanthine

    Des produits prescrits par des mdecins et vendus par des pharmaciens Les tudes de consommation ont mis en vidence que la prise de complments alimentaires vise oculaire est essentiellement conscutive une recommandation par un professionnel de sant la suite dune dgnrescence maculaire lie lge (DMLA). Il sagit trs souvent dune prescription par un ophtalmologiste.

    Compte tenu de lenvironnement mdical associ ces produits haute technicit, les ventes sont principalement faites en pharmacie. Selon une tude de lIMS Health de dcembre 2012, les complments alimentaires vise oculaire reprsenteraient eux seuls 8 % des ventes de complments alimentaires en pharmacie (qui reprsentent elles mmes 60 % des ventes totales de complments alimentaires) soit un chiffre daffaires de 50 700 K.

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  • 2/ Motivations et objectifs

    Des remontes de nutrivigilance Depuis 2003, 41 dclarations deffets indsirables susceptibles dtre lis la consommation de complments alimentaires vise oculaire ont t ports la connaissance de lAgence nationale de scurit sanitaire de lalimentation, de lenvironnement et du travail (Anses) dans le cadre du dispositif de nutrivigilance. Parmi les signalements identifis, 10 rapportaient des effets indsirables cutans de type toxidermie dont 8 seraient lis la consommation de 4 produits base de lutine et de zaxanthine.

    Le recensement deffets indsirables avec des produits provenant de socits diffrentes permet dexclure un dfaut de qualit dans une entreprise. Une tude complmentaire tait donc requise pour dterminer les points communs entre ces produits.

    LAnses sest donc autosaisie en octobre 2010 dune demande davis relatif au risque de toxidermie induit par la consommation de lutine et de zaxanthine via les complments alimentaires. Lavis qui en ressort, en date du 25 fvrier 2011, conclut une implication potentielle des extraits de Tagetes erecta en raison de la prsence connue de thiophnes dans cette espce et de lactones sesquiterpnes dans la famille des Tagetes (mais pas dans lespce erecta). Ces deux catgories de molcules sont responsables de ractions dermiques, notamment aprs exposition au soleil.

    En conclusion, lAnses mettait les recommandations suivantes :

    - vrifier dune part, lorigine et la qualit des extraits de lutine et zaxanthine prsents dans les complments alimentaires associs aux signalements et exclure dautre part la prsence de thiophnes et de lactones sesquiterpnes ;

    - demander aux industriels et aux professionnels de sant, de dclarer sans dlai dventuels nouveaux cas de toxidermies associes la consommation de lutine et de zaxanthine.

    Une plainte des oprateurs En parallle, une organisation professionnelle dnomme Zeaxanthin Trade Association (ZTA), cre en 2009 et rassemblant des fabricants de zaxanthine, a signal au bureau 4A la prsence sur le march de complments alimentaires falsifis par de la mso-zaxanthine, un isomre synthtique de la zaxanthine. Cette assertion reposait sur une srie danalyses mettant en uvre une mthode spcifique de dtection (HPLC chirale)1.

    Cette substitution potentielle non affiche sur les documents commerciaux et les tiquetages soulve plusieurs interrogations. Tout dabord, en nexistant pas ltat naturel et en ne bnficiant pas dun historique de consommation avant 1977, la mso-zaxanthine relve du rglement (CE) n 258/97 du 27 janvier 1997 relatif aux nouveaux aliments et aux nouveaux ingrdients et ne peut donc pas tre utilise en alimentation humaine sans autorisation pralable en application dudit rglement. Par ailleurs, la question du lien entre la prsence de cette molcule et la survenue des toxidermies se pose lgitimement dans la mesure o des produits taient identifis dans les deux problmatiques. Lorigine et les motivations dune ventuelle substitution mritent galement dtre examines, certains oprateurs mettant en avant des considrations conomiques en raison dun cot moindre de la version synthtique.

    Objectifs des contrles Dans un tel contexte, il a t demand aux enquteurs de vrifier la qualit des complments alimentaires vise oculaire, prsents comme contenant de la lutine et/ou de la zaxanthine. A cette fin, la TN 324 ED fixait les objectifs principaux suivants :

    1 http://www.chrysantis.com/Chiral.aspx

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  • - vrifier la prsence de mso-zaxanthine dans les complments vise oculaire et, le cas chant, dterminer si elle rsulte dun ajout frauduleux,

    - contrler la qualit des extraits de lutine et de zaxanthine utiliss dans les complments alimentaires vise oculaire et les auto-contrles raliss, en particulier sur une ventuelle recherche de thiophnes et de lactones par les oprateurs.

    Des objectifs secondaires (tiquetage, allgations, dclarations) taient galement fixs.

    3/ Organisation

    17 DDI et 1 Direccte (10 rgions au total) ont particip lenqute couvrant 18 dpartements, programme en 2012 et prolonge en 2013. Elles sont intervenues au stade de la fabrication mais aussi de la distribution partir des listes doprateurs et de produits identifis par ladministration centrale. La liste des 31 produits rpertoris intgrait les 6 complments alimentaires suspects dtre adultrs et 4 des 5 complments alimentaires ayant fait lobjet de signalements deffets indsirables de type toxidermie.

    Il tait demand aux agents de prlever :

    - des rfrences de complments alimentaires parmi les 31 prdtermines et choisir, le cas chant, dautres produits si ceux cibls savraient tre indisponibles;

    - des ingrdients base de zaxanthine mis en uvre dans les produits suspects.

    Sur la base des informations rcoltes lors de cette phase, le bureau 4A a sollicit une prolongation de la TN afin dapprofondir les investigations et dobtenir des lments relatifs lhistorique de consommation de certains ingrdients afin dvaluer leur statut au regard du rglement (CE) 258/97. Ces investigations ont t menes par 10 DDI auprs des fabricants de complments alimentaires mais aussi des fournisseurs dingrdients.

    II. Contrles effectus

    Ce bilan a t ralis partir des donnes enregistres dans SORA2.

    1/ Entreprises

    60 tablissements contrls Dans le cadre de cette TN, 60 tablissements ont t contrls, donnant lieu 80 visites. Un peu plus de la moiti de ces entreprises exeraient leur activit au stade du commerce de dtail, 10 dentre elles avaient une activit de grossiste et 10 autres, une activit de production. Le reste des entreprises tait constitu doprateurs de la vente par correspondance (VPC), dintermdiaires commerciaux et de services. Daprs les donnes issues de SORA2, 20% des tablissements contrls (12 sur 60) prsentaient des anomalies.

    Les RPMM contrls sont principalement des fabricants (au sens de larticle L. 221-1 du code de la consommation). La particularit de ce secteur rside dans la nature mme de ces fabricants qui peuvent tre des fabricants connus du march des complments alimentaires mais aussi des spcialistes de la vision. Les distributeurs contrls sont essentiellement des pharmacies.

    14 fournisseurs dextrait de Tagetes erecta identifis Daprs les fiches de spcifications relatives aux produits contrls et les factures rcoltes par les agents, plusieurs informations essentielles ont pu tre obtenues. En premier lieu, il convient de souligner que les complments alimentaires contiennent trs souvent 2 extraits de Tagetes erecta, un prsent comme tel apportant la lutine, et lautre, parfois identifi comme zaxanthine, servant atteindre le ratio 5/1.

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  • 6 fournisseurs dextraits de Tagetes erecta, sources de lutine, ont t identifis. 8 entreprises ont t identifies comme fournissant les extraits de zaxanthine. Ces 8 entreprises, parmi lesquelles figurent 3 entreprises franaises, sont diffrentes des fournisseurs de lutine.

    Les autres socits sont principalement bases dans lUnion europenne. Aucune entreprise chinoise na t identifie, malgr limportance de ce pays dans la vente dextraits vgtaux. Toutefois, les informations rcoltes ne sont pas exhaustives.

    2/ Produits

    Les 80 visites menes au sein des tablissements contrls ont contribu la ralisation de 181 actions de contrle dont le taux global danomalies sest rvl tre de 10%. Ces anomalies portaient sur ltiquetage (notamment la prsence dallgations thrapeutiques relatives la DLMA) ou sur la composition (prsence de mso-zaxanthine).

    Au cours de lenqute, 27 complments alimentaires base de lutine et zaxanthine prsents sur le march franais ont t contrls par les agents de la DGCCRF sur la base des fiches techniques, des bulletins danalyse mis par le SCL 67 et des cahiers des charges disponibles chez les oprateurs. La rpartition des produits contrls tait la suivante :

    - 20 complments alimentaires figurant dans la liste des 31 produits initialement cibls soit 65% (20 sur 31), dont 2 taient suspects dtre falsifis et 4 avaient fait lobjet dun cas de toxidermie,

    - 7 autres complments disponibles sur le march franais en remplacement des produits cibls qui nont pas pu tre prlevs.

    Labsence de certains produits a t contourne par le contrle des matires premires dont lorigine tait connue.

    3/ Analyses

    27 produits finis Les agents ont effectu 34 prlvements transmis au SCL 67, afin de vrifier la prsence de mso-zaxanthine dans les complments alimentaires contrls. 70% dentre eux se sont rvls tre non conformes aux dterminations demandes. Plusieurs lots dun mme produit ont parfois t prlevs en vue de dmontrer que la prsence de msozaxanthine ntait pas fortuite.

    Des analyses effectues par le SCL 67, il ressort les conclusions analytiques suivantes:

    - 4 prlvements sur 34 ont t dclars surveiller ;

    - 10 prlvements sur 34 ont t dclars conformes ;

    - 20 prlvements sur 34 ont t dclars non conformes.

    Rapport au nombre de produits contrls, le bilan analytique est le suivant:

    - 4 prlvements sur 27 ont t dclars surveiller ;

    - 8 prlvements sur 27 ont t dclars conformes ;

    - 15 prlvements sur 27 ont t dclars non conformes.

    Des analyses ralises par le SCL 67, il ressort que la mso-zaxanthine a t dtecte dans 14 produits (soit plus de 50 % des produits). Les analyses ont confirm les suspicions pour les 2 produits identifis par la ZTA. Sont galement contamins les 4 produits ayant fait lobjet de signalements de nutrivigilance.

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  • Produit Signalement de nutrivigilance Suspicion Prsence de mso-

    zaxanthine 1 Non Non Non 2 Non Non Non 3 Non Non Non 4 Non Non Non 5 Non Non Oui 6 Oui Non Oui 7 Non Non Oui 8 Non Non Oui 9 Non Non Non

    10 Non Non Non 11 Oui Oui Oui 12 Oui Non Oui 13 Non Non Non 14 Oui Oui Oui 15 Non Non Non 16 Non Non Non 17 Non Non Non 18 Non Non Oui 19 Non Non Oui 20 Non Non Oui 21 Non Non Oui 22 Non Non Oui 23 Non Non Non 24 Non Non Non 25 Non Non Oui 26 Non Non Oui 27 Non Non Non

    Tab. 1 : Dtection de mso-zaxanthine dans des complments alimentaires vise oculaire

    Les autres anomalies dceles lanalyse portent sur ltiquetage et, plus particulirement, une plus faible quantit de lutine ou de zaxanthine analyse que celle figurant sur ltiquetage.

    4 matires premires A lissue du contrle de ces produits, 4 matires premires ont t prleves afin de vrifier la prsence de mso-zaxanthine. Il sagit de 2 prparations de Tagetes erecta visant apporter de la lutine (mais contenant une faible proportion de zaxanthine) et de 2 autres prparations de Tagetes erecta visant apporter de la zaxanthine. 3 dentre elles taient prsentes dans des produits reconnus comme falsifis lissue de lanalyse.

    Les 2 matires premires apportant de la zaxanthine se sont rvles tre non conformes en raison de la prsence de mso-zaxanthine. Les prparations de lutine sont conformes.

    4/ Suites

    Les agents ont dlivr 12 avertissements loccasion de cette enqute. Les objets de ces avertissements sont les suivants :

    - prsence de mso-zaxanthine dans plusieurs produits finis et matires premires,

    - utilisation dallgations thrapeutiques interdites nonant un rle dans la prvention de la DLMA,

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  • - teneurs en lutine et/ou zaxanthine suprieures ou infrieures celles annonces sur ltiquetage,

    - non respect des dispositions gnrales et spcifiques du rglement (CE) n1924/2006 du 20 dcembre 2006 concernant les allgations nutritionnelles et de sant portant sur les denres alimentaires,

    - non respect des dispositions dclaratives du dcret n2006-352 du 20 mars 2006 relatif aux complments alimentaires par un introducteur de complments alimentaires revendant les produits au stade du commerce de dtail,

    - manquements aux dispositions relatives aux rgles gnrales dtiquetage tablies par le Code de la Consommation.

    Le choix de lavertissement en prsence dune adultration par la mso-zaxanthine se justifie notamment par la bonne foi de la plupart des fabricants de complments alimentaires concerns qui dcouvraient ce problme. Ils ont dailleurs modifi leurs formules ou arrt la distribution, pour 4 dentre eux, lissue de lavertissement.

    Il en va tout autrement pour les fournisseurs dextraits qui se doivent de matriser leur procd de fabrication et leur production. A cet gard, un fournisseur a fait lobjet dun procs verbal pour falsification. La prsence de mso-zaxanthine a galement donn lieu une mesure de police administrative chez un fabricant.

    Par ailleurs, des procdures pnales ont t engages lencontre de 2 entreprises ayant, pour lune, appos des allgations thrapeutiques et, pour lautre, mis sur le march un complment alimentaire dans lequel les teneurs en lutine et zaxanthine sont quasi nulles (tromperie). La premire a donn lieu une transaction de 7500 euros accepte par loprateur. Enfin, une mesure de police administrative (injonction de mise en conformit) a t mise en uvre pour un dfaut dtiquetage dingrdients conduisant taire la prsence dun allergne majeur.

    Cette enqute sest donc traduite par 12 avertissements, 2 MPA et 3 procdures pnales.

    III. Principaux enseignements

    1/ Confirmation de la prsence de mso-zaxanthine

    Les accusations de la Zeaxanthine Trade Association sont confirmes Deux des produits cibls par lassociation ont t analyss loccasion de la TN 324 ED et se sont avrs tre effectivement contamins par la mso-zaxanthine.

    Au-del de cette confirmation, le principal constat qui ressort de lenqute est le nombre important de complments alimentaires vise oculaire sur le march franais adultrs par de la mso-zaxanthine. En effet, la moiti des rfrences de complments alimentaires contrles est falsifie.

    Lenqute dmontre trs clairement que cette mso-zaxanthine provient de lingrdient tiquet zaxanthine , consistant en thorie en une prparation de fleur de Tagetes erecta concentrant la zaxanthine qui y est prsente.

    La mso-zaxanthine na pas t ajoute directement mais proviendrait de lingrdient extrait de Tagetes erecta visant apporter de la zaxanthine

    Lhypothse sur laquelle reposait lenqute tait celle dune adjonction directe de mso-zaxanthine achete un prix rduit pour remplacer la zaxanthine. Or lexpertise mene par le SCL 67 partir des rsultats danalyses a permis de mettre vidence que la prsence de mso-zaxanthine ntait pas le

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  • fruit dun ajout direct de la molcule mais bien du procd de fabrication de lextrait de Tagetes erecta visant concentrer la zaxanthine.

    En effet, la synthse dingrdients base de lutine et de zaxanthine partir de Tagetes erecta (hydrolyse alcaline chaud) saccompagne dune production rsiduelle de mso-zaxanthine partir de la lutine (saponification). Le pourcentage de mso-zaxanthine rsiduel est variable selon les conditions ractionnelles mais ne dpasse que trs rarement les 30 % (soit un ratio de zaxanthine / mso-zaxanthine de 70 / 30). Par ailleurs, les extraits de Tagetes erecta de bonne qualit doivent probablement subir une tape de purification visant liminer les rsidus (ce qui augmente leur cot de revient) et donc diminuer ce ratio. Or les 2 matires premires analyses prsentent des ratios de lordre de 10 / 90 cest--dire 90 % de mso-zaxanthine ! Cette mso-zaxanthine se retrouvait ensuite dans les complments alimentaires dans des proportions variables (selon les quantits incorpores de lingrdient falsifi et de lextrait riche en lutine), allant de 30 80 % de la zaxanthine totale.

    Cette prparation de Tagetes erecta est en infraction avec le droit europen Les informations relatives aux extraits de Tagetes erecta dtenues par les fabricants de complments alimentaires restent trs parcellaires. Ainsi, 14 reprises sur 27 produits contrls, les oprateurs ne disposaient mme pas de la fiche technique de lingrdient mis en uvre dans leur produit. Dans ces conditions, il tait difficile dexaminer les prparations en cause. Lenqute a nanmoins pu tre poursuivie chez un fournisseur, ce qui a permis dobtenir des informations complmentaires.

    Aprs examen des fiches techniques et du procd de fabrication, il sest avr que la prsence de mso-zaxanthine est le rsultat dune raction de saponification des esters de lutine temprature leve visant fabriquer un concentr de zaxanthine. Cette saponification est ralise en partie grce lutilisation dun solvant qui nest pas autoris par la directive 2009/322, le DMSO (dimthylsulfoxyde). En effet, sa mise en uvre lors de ltape de cristallisation augmenterait lisomrisation de la lutine et ainsi la concentration en mso-zaxanthine dans les matires premires fabriques.

    Indpendamment de lusage dun solvant non autoris, un tel procd de fabrication relve du rglement 258/97 relatif aux nouveaux aliments et aux nouveaux ingrdients. Il a en effet t demand aux agents de prolonger leur enqute pour dterminer si le procd de fabrication conduisant la production de mso-zaxanthine tait mis en uvre avant 1977. Or les lments apports tendent prouver que ce nest pas le cas puisque les brevets portant sur les procds en cause ont tous t dposs aprs 1997. Les complments alimentaires falsifis auraient t mis sur le march entre 2006 et 2011 et lutilisation la plus ancienne dune des matires premires contenant de la mso-zaxanthine remonterait 2005.

    Les fabricants de cet ingrdient ne peuvent pas ignorer la formation de mso-zaxanthine

    Les oprateurs ont plaid lignorance pour la plupart, arguant que la dtection de la mso-zaxanthine ncessitait une mthode analytique spciale qui nest pas mise en uvre en routine. Cest faire peu de cas des obligations qui leur incombent au titre de larticle 17 du rglement 178/2002 et de larticle L. 212-1 du code de la consommation. Les oprateurs doivent assurer une veille scientifique et rglementaire active sur tout ce qui touche leur activit. Il faut dailleurs rappeler que les informations relatives une potentielle contamination par la mso-zaxanthine ainsi qu la mthode analytique requise pour la dtecter ont t largement diffuses par les membres de la ZTA. Cela aurait d conduire certains oprateurs sinterroger, voire faire procder par un laboratoire indpendant des analyses par sondage pour en vrifier la vracit.

    2 http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CONSLEG:2009L0032:20100916:FR:PDF

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  • En tout tat de cause, lignorance ne peut tre plaide par les fabricants dextraits qui se doivent de matriser leurs procds de fabrication.

    Certains oprateurs ont mis en avant lexistence dune formation rsiduelle de mso-zaxanthine lors de tout procd destrification de la lutine. Nanmoins, comme indiqu prcdemment, les ratios retrouvs ne permettent de sappuyer sur une telle argumentation. Dautres ont justifi la prsence de mso-zaxanthine par une interaction entre le fer et la zaxanthine au sein du produit fini. L encore, la contamination trs forte de la matire premire (avant toute mise en contact avec le fer) contredit largument.

    Des proccupations conomiques lorigine de la falsification ? Lenqute partait galement de lhypothse selon laquelle le recours la mso-zaxanthine permettrait aux oprateurs daccrotre leurs marges ou, tout au moins, de rduire leurs cots de production. Les informations recueillies dans le cadre de la TN 324 ED nont pas permis de prouver la vracit de cette hypothse. Toutefois, loin de la contredire, elles tendent lui donner du crdit.

    En effet, il na pas t possible dtablir avec certitude des diffrences de prix dachat et de vente entre la zaxanthine pure et adultre au cours de lenqute, les lments obtenus tant trop nombreux pour tirer des conclusions. Ainsi, une seule facture concernant lachat de zaxanthine pure a pu tre recueillie. Nanmoins celle-ci a mis en vidence une diffrence importante entre le prix de cette zaxanthine et celui des matires premires falsifies.

    Par ailleurs, certains oprateurs ont prfr retirer purement et simplement la zaxanthine de leurs formules plutt que de remplacer la zaxanthine falsifie par une zaxanthine de bonne qualit, craignant une augmentation du prix de vente de leur produit de 20 %. Dautres oprateurs voquent une multiplication du prix de la zaxanthine par deux.

    2/ Lorigine des toxidermies nest pas avre mais des doutes sont permis

    Les recommandations de lAnses ne peuvent pas tre respectes Lenqute a permis de constater quaucun oprateur ne recherche les lactones sesquiterpniques comme le recommande lAnses. Les fabricants dextraits considrent quune telle recherche nest pas pertinente dans la mesure o ces lactones sont absentes de lespce erecta. Une identification de lespce en amont doit permettre de sexonrer dune recherche analytique. En outre, en labsence de prcisions, il est difficile de cibler les lactones concernes. Ces lments tant recevables il parat difficile dimposer aux oprateurs une telle recherche.

    Sagissant des thiophnes, un fabricant dextraits a indiqu avoir tabli leur seuil 300 mg/kg dans ses prparations. Compte tenu des mcanismes daction lorigine de la toxidermie, un tel seuil parat satisfaisant mais aucune donne ce jour ne permet den confirmer la pertinence.

    Les toxidermies pourraient tre imputes aux extraits falsifis Deux lments plaident pour une telle hypothse :

    - tous les complments alimentaires identifis dans le cadre de la nutrivigilance ont t falsifis par de la mso-zaxanthine,

    - depuis la mise en uvre de la TN et les nombreuses reformulations qui lui ont succd, le nombre de toxidermies dclares lAnses a fortement chut.

    Bien videmment, il ne sagit l que de conjectures compte tenu des inconnues qui demeurent mais cette hypothse mriterait dtre explore. Les cas de toxidermie pourraient sexpliquer par la prsence de sous-produits issus du procd de fabrication de la mso-zaxanthine qui nont pas t identifis et valus ou des rsidus de solvant.

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  • 3/ Une qualit amliorer

    Une absence dauto-contrles Les investigations des enquteurs ont montr que la plupart des fournisseurs de zaxanthine identifis au cours de la TN 324 ED utilisent une mthode danalyse de la zaxanthine (chromatographie liquide haute performance classique) qui ne permet pas de mettre en vidence une ventuelle falsification et ce, malgr les alertes lances par la ZTA sur Internet depuis 2009. Quel que soit le crdit accord par les fabricants aux dires de cette association, une vrification aurait d simposer.

    Comme le rappelle la ZTA dans ses publications, une chromatographie chirale permet de mettre en vidence la prsence de mso-zaxanthine. Un protocole opratoire bas sur cette technique a t mis au point par trois membres de la ZTA et est disponible depuis septembre 2010 sur internet. Pour effectuer les analyses ncessaires lenqute, le SCL 67 a utilis une mthode analytique sinspirant du protocole mis au point par cette association. Daprs le laboratoire, les analyses permettant de dtecter la mso-zaxanthine seraient peu onreuses et facilement ralisables en routine. Tous les appareillages ncessaires lanalyse sont actuellement commercialiss. Rien ne soppose donc la ralisation dessais par les fabricants dextraits mais aussi de complments alimentaires afin de vrifier lassertion de la ZTA.

    Par ailleurs, lenqute a montr que seule une prparation de Tagetes erecta faisait lobjet dun dosage en thiophnes, malgr les recommandations de lAnses.

    Une absence de matrise Lors de lenqute, il est apparu que dans 14 cas sur 27, les fiches techniques des ingrdients ntaient pas disponibles. Bien videmment, une telle obligation ne sapplique pas aux distributeurs qui ne sont pas responsables de la mise sur le march du produit. Toutefois cette absence a galement t constate chez des RPMM.

    Ce constat nest pas sans rappeler celui constamment fait loccasion des enqutes de la DGCCRF dans le secteur des complments alimentaires, savoir le manque de matrise global de la qualit des productions. Il est impratif que les oprateurs du secteur des complments alimentaires dveloppent leurs procdures HACCP. La qualit a un cot mais elle est la garante de la scurit demploi des produits et de la loyaut des pratiques commerciales aussi bien entre oprateurs que vis--vis des consommateurs.

    Des tiquetages dfaillants Lors de cette enqute, il a t constat lutilisation dallgations thrapeutiques prohibes par larticle 8 du dcret n2006-352 ainsi que par larticle R. 112-7 du code de la consommation. Ainsi un tiquetage de complments alimentaires faisait rfrence la DMLA quand des sites Internet voquaient les bnfices de certains produits proposs la vente sur des maladies telles que la cataracte et le glaucome en plus de la DMLA (y compris une pharmacie tablie en France revendant des produits provenant de Monaco).

    Ont galement t observs des rfrences des recommandations du corps mdical, le recours des termes incomprhensibles voire des vocations de modifications physiologiques pouvant susciter une crainte pour le consommateur moyen, des pratiques interdites par le rglement (CE) n 1924/2006.

    De nombreuses allgations de sant relatives aux bnfices de la lutine (fonctionnement de lil, maintien de la vue, rle dans la rtine) ont t recenses malgr les avis dfavorables de lAutorit europenne de scurit des aliments (AESA) et leur absence dautorisation au niveau europen.

    Enfin, de manire rcurrente, ont t constates des infractions aux dispositions du code de la consommation en matire dtiquetage : dfaut dindication dingrdients (maltodextrine, dulcorant), absence de catgorie dadditifs, absence de la quantit dingrdients mis en avant sur ltiquetage

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  • IV. Ce quil faut retenir

    La TN 324 ED, ralise en 2012 et 2013, a mis en vidence que la moiti des complments alimentaires vise oculaire prsents sur le march franais sont falsifis par de la mso-zaxanthine, un isomre synthtique de la zaxanthine dont linnocuit na pas t value.

    Cette mso-zaxanthine est prsente dans les ingrdients base de Tagetes erecta visant apporter de la zaxanthine et tiquets comme tels. Elle est absente des ingrdients base de Tagetes erecta visant apporter de la lutine.

    Elle nest pas incorpore directement lingrdient mais provient du procd destrification de la lutine dont les conditions conduisant la formation majoritaire de cet isomre aux dpens de lisomre naturel (90 % de msozaxanthine pour 10 % de zaxanthine). 5 fournisseurs de zaxanthine ont t identifis comme tant lorigine de ladultration des produits contrls. Pour un des extraits, fabriqu par une entreprise franaise, le recours un solvant non autoris, le DMSO, a t mis en vidence.

    Peu doprateurs mettent en uvre les recommandations de lAnses en matire de recherche et de dosage de thiophnes et de lactones sesquiterpnes, ce qui ne permet pas dcarter leurs implications dans la survenue de toxidermies. Toutefois, dautres facteurs pourraient tre lorigine des effets indsirables constats, notamment la prsence de mso-zaxanthine ou de rsidus de DMSO. Le retrait du march des matires premires incrimines et la reformulation de certains produits pourraient expliquer la baisse des cas de nutrivigilance observe partir de 2012.

    La matrise de la qualit et des dispositions rglementaires en vigueur reste globalement dfaillante dans un secteur pourtant minemment technique, novateur et sensible (car touchant la sant humaine).

    Le sous-directeur des produits alimentaires et des marchs agricoles et alimentaires

    Jean-Louis GERARD

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