article cardin&hec

1
GROUPEMENTS PROFESSIONNELS > IUXE & CREATION Rencontre ouec Piene Cordin [|émocrotisotion de lo mode ? Comment réussir dons lo mode tout en restont indépendont ? Créotion et licences ? Comment créer une morque mondiole ? Iémoignoge de l,l. Pierre Cord!n, quinous 0ppotte son regord personnelsur lo créqtion, lo mode et le business. ous avons eu le plaisir et I'honneur dhccueillir, le 17 mai, M. Pierre Cardin devant une centaine de nos camarades du Groupement Luxe & Création et d'étudiants HEC et IFM avec lesquels il s'est prêté au jeu des nombreuses questions et réponses. Srr-mnor NnH À un MoMENT oÉclstr or sn cnRRrÈnr Dans une actualité dominée par les rachats de marques de luxe, M, Pierre Cardin nous a retracé les débuts de son parcours profes' sionnel et confirmé son intention de vendre aujourd'hui, à 89 ans, son affaire pour 1 mil' liard d'euros afin qu'elle puisse continuer à exister après lui. Propriétaire à 100 7o de sa marque mondia- lement connue et de son affaire créée il y a plus de soixante ans, il nous a expliqué que les secrets de sa réussite ont toujours été l'ambition, l'énergie, la confiance en soi et la volonté de toujours voir le côté positifdes choses. Quand il avait 19 ans' une voyante lui avait prédit un brillant avenir alors qu'il venait d'un milieu pauvre. Après avoir appris la comptabilité à la Croix Rouge à Vichy, il monte à Paris dans les années difficiles d'après.guerre et trouve par recommandation un premier poste chez le couturier Paquin puis un deuxième chez Christian Dior. Il y réalise des costumes de théâtre et de bal et rencontre Jean Cocteau à lbccasion du film "La Belle et la Bête". Il crée sa maison de couture en 1950 et ses premières collections sonf un triomphe : il écoule plus de deux cent mille exemplaires de son fameux manteau rouge dès le début. Ror ors ucENcEs Il lance rapidement sa première licence de prêt à-porter qui sera la première d'une lon. gue série de huit cents licences : accessoires de mode, cravates, bijoux, parfums, meubles, eaux minérales et même des boîtes de sar. dines et du papier hygiénique I Il revendique et assume son business model qui fonctionne sur les revenus des licences. Il continue de créer dans son studio de I'avenue Marigny mais i1 a revendu les quaranle.huit boutiques en propre qu'il avait encore à l'époque de De 95 nor',tr,.rrs ET coMMERCE . rurN-rurttET 2011 Hervé Duquesnoy, directeur des licences Piene tardin ; sylvie Ebel (H.zs), DGA de I'ltM ; Piene (ardin et Stéphane Lacroix (H.81, conseil en [icences de marques. Gaulle car, selon lui, c'est difflcile de gagner de l'argent avec un réseau de boutiques. Interrogé sur ses licences, il reconnaît qu'elles sont nécessairement de qualité inégale, entre par exemple des productions indiennes et japonaises. A ceux qui critiquent son business model, il rappelle que bien souvent ce sont maintenant les occidentaux qui copient les asiatiques. Sur l'idée qu'une robe de couture se montre quand on sort au restaurant, il rachète le restaurant Maxim's qu'il décline également en licences avec une dizaine de restaurants Maxim's dans le monde et de nombreux produits dérivés. ProuHrrn DE fTNTERNATIoNAusATIoN Au cours de sa longue carriète, M. Pierre Cardin a rencontré tous les grands de ce monde (Mao, Deng Xiao Ping, Mme Gandhi, Fidel Castro) et, avec une âme de grand voyageur, visité tous les pays à I'exception de la Corée du Nord. Précurseur, il s'est rendu au Japon à une époque il fallait deux mois de bateau ou quarante,huit heures de vol puis en Chine il a réalisé à la fois la grande misère maté. rielle due au communisme el la volonté d'exister des asiatiques. Comme eux, M. Pierre Cardin pense qu'il faut toujours travailler et que demain sera meilleur quhuj ourd'hui. MÉcÈnr Er AMoUREUx DEs ARTS M. Cardin est aussi un homme de culture amoureux des arts : il a racheté le Théâtre des Ambassadeurs qu'il a transformé en Espace Cardin. Il a acheté le château du marquis de Sade dans le Lubéron où il orga- nise chaque année en juillet le Festival dArt Lyrique et de Théâtre de Lacoste. I1 nous invite aussi à découvrir le Musée Cardin à Saint-Ouen. Pour M. Pierre Cardin, la couture n'existe pas sans la culture. Pour lui, le succès réel ne se mesure pas par les privilèges mais par la popularité. Ii croit que luxe et volume sont compatibles et dans une distribution large des produits. Interrogé sur ses prochains défis, il nous parle du Palais Lumière, un édifice de 240 mètres de haut qu'il compte bâtir près de Venise puis à Las Vegas et à Macao. Pour conclure, il nous affirme que le plus important pour lui est la création sous toutes ses formes car la haute couture ne peut plus s'adresser qu'à quelques centaines de riches clientes dans le monde. Enthousiasmée pat son témoignage excep' tionnel et son franc-parler, la communauté HEC présente et les étudiants IFM applau' dissent chaudement M. Pierre Cardin dans une "standing ovatiori' finale. Sréphone Locroix lll.8lJ

Upload: slacroixlicensing

Post on 12-Feb-2017

176 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Article Cardin&Hec

GROUPEMENTS PROFESSIONNELS

> IUXE & CREATION

Rencontre ouec Piene Cordin[|émocrotisotion de lo mode ? Comment réussir dons lo mode tout en restont indépendont ? Créotion et licences ? Comment

créer une morque mondiole ? Iémoignoge de l,l. Pierre Cord!n, quinous 0ppotte son regord personnelsur lo créqtion, lo mode

et le business.

ous avons eu le plaisir et I'honneurdhccueillir, le 17 mai, M. Pierre Cardin

devant une centaine de nos camarades

du Groupement Luxe & Création et

d'étudiants HEC et IFM avec lesquels il s'est

prêté au jeu des nombreuses questions et

réponses.

Srr-mnor NnH À un MoMENT oÉclstr or

sn cnRRrÈnr

Dans une actualité dominée par les rachats

de marques de luxe, M, Pierre Cardin nous

a retracé les débuts de son parcours profes'

sionnel et confirmé son intention de vendre

aujourd'hui, à 89 ans, son affaire pour 1 mil'liard d'euros afin qu'elle puisse continuer à

exister après lui.Propriétaire à 100 7o de sa marque mondia-

lement connue et de son affaire créée il y aplus de soixante ans, il nous a expliqué que

les secrets de sa réussite ont toujours été

l'ambition, l'énergie, la confiance en soi et

la volonté de toujours voir le côté positifdes

choses. Quand il avait 19 ans' une voyante

lui avait prédit un brillant avenir alors qu'ilvenait d'un milieu pauvre.

Après avoir appris la comptabilité à la CroixRouge à Vichy, il monte à Paris dans les

années difficiles d'après.guerre et trouve par

recommandation un premier poste chez le

couturier Paquin puis un deuxième chez

Christian Dior. Il y réalise des costumes de

théâtre et de bal et rencontre Jean Cocteau

à lbccasion du film "La Belle et la Bête".

Il crée sa maison de couture en 1950 et ses

premières collections sonf un triomphe : ilécoule plus de deux cent mille exemplaires

de son fameux manteau rouge dès le début.

Ror ors ucENcEs

Il lance rapidement sa première licence de

prêt à-porter qui sera la première d'une lon.gue série de huit cents licences : accessoires

de mode, cravates, bijoux, parfums, meubles,

eaux minérales et même des boîtes de sar.

dines et du papier hygiénique I Il revendique

et assume son business model qui fonctionne

sur les revenus des licences. Il continue de

créer dans son studio de I'avenue Marignymais i1 a revendu les quaranle.huit boutiques

en propre qu'il avait encore à l'époque de De

95 nor',tr,.rrs ET coMMERCE . rurN-rurttET 2011

Hervé Duquesnoy, directeur des licences Piene tardin ; sylvie Ebel (H.zs), DGA de I'ltM ; Piene (ardin

et Stéphane Lacroix (H.81, conseil en [icences de marques.

Gaulle car, selon lui, c'est difflcile de gagner

de l'argent avec un réseau de boutiques.

Interrogé sur ses licences, il reconnaît qu'elles

sont nécessairement de qualité inégale, entre

par exemple des productions indiennes etjaponaises. A ceux qui critiquent son business

model, il rappelle que bien souvent ce sont

maintenant les occidentaux qui copient les

asiatiques.

Sur l'idée qu'une robe de couture se montrequand on sort au restaurant, il rachète le

restaurant Maxim's qu'il décline également

en licences avec une dizaine de restaurants

Maxim's dans le monde et de nombreuxproduits dérivés.

ProuHrrn DE fTNTERNATIoNAusATIoN

Au cours de sa longue carriète, M. Pierre

Cardin a rencontré tous les grands de ce

monde (Mao, Deng Xiao Ping, Mme Gandhi,

Fidel Castro) et, avec une âme de grand

voyageur, visité tous les pays à I'exception de

la Corée du Nord.Précurseur, il s'est rendu au Japon à une

époque où il fallait deux mois de bateau ou

quarante,huit heures de vol puis en Chineoù il a réalisé à la fois la grande misère maté.

rielle due au communisme el la volontéd'exister des asiatiques.

Comme eux, M. Pierre Cardin pense qu'ilfaut toujours travailler et que demain sera

meilleur quhuj ourd'hui.

MÉcÈnr Er AMoUREUx DEs ARTS

M. Cardin est aussi un homme de culture

amoureux des arts : il a racheté le Théâtre

des Ambassadeurs qu'il a transformé en

Espace Cardin. Il a acheté le château du

marquis de Sade dans le Lubéron où il orga-

nise chaque année en juillet le Festival dArtLyrique et de Théâtre de Lacoste. I1 nous

invite aussi à découvrir le Musée Cardin à

Saint-Ouen.Pour M. Pierre Cardin, la couture n'existe

pas sans la culture. Pour lui, le succès réel ne

se mesure pas par les privilèges mais par la

popularité. Ii croit que luxe et volume sont

compatibles et dans une distribution large

des produits.

Interrogé sur ses prochains défis, il nous parle

du Palais Lumière, un édifice de 240 mètres

de haut qu'il compte bâtir près de Venise

puis à Las Vegas et à Macao.

Pour conclure, il nous affirme que le plus

important pour lui est la création sous toutes

ses formes car la haute couture ne peut plus

s'adresser qu'à quelques centaines de riches

clientes dans le monde.

Enthousiasmée pat son témoignage excep'

tionnel et son franc-parler, la communauté

HEC présente et les étudiants IFM applau'

dissent chaudement M. Pierre Cardin dans

une "standing ovatiori' finale.

Sréphone Locroix lll.8lJ