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CAHIER SCIENTIFIQUE FRANÇOIS VAILLANCOURT Analyse économique des politiques linguistiques au Québec : 40 ans de Loi 101 CS 2018S-16

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Page 1: Analyse économique des politiques linguistiques au Québec : 40 … · Ces cahiers sont écrits dans le style des publications scientifiques. Les idées et les opinions émises sont

CAHIER SCIENTIFIQUE

FRANÇOIS VAILLANCOURT

Analyse économique des politiques linguistiques au Québec : 40 ans de Loi 101

CS2018S-16

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Montréal

Mai/May 2018

© 2018 François Vaillancourt. Tous droits réservés. All rights reserved. Reproduction partielle permise avec citation du document source, incluant la notice ©. Short sections may be quoted without explicit permission, if

full credit, including © notice, is given to the source.

Série Scientifique

Scientific Series

2018s-16

Analyse économique des politiques linguistiques

au Québec : 40 ans de Loi 101

François Vaillancourt

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CIRANO Le CIRANO est un organisme sans but lucratif constitué en vertu de la Loi des compagnies du Québec. Le financement de son infrastructure et de ses activités de recherche provient des cotisations de ses organisations-membres, d’une subvention d’infrastructure du gouvernement du Québec, de même que des subventions et mandats obtenus par ses équipes de recherche.

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ISSN 2292-0838 (en ligne)

Les cahiers de la série scientifique (CS) visent à rendre accessibles des résultats de recherche effectuée au CIRANO afin de susciter échanges et commentaires. Ces cahiers sont écrits dans le style des publications scientifiques. Les idées et les opinions émises sont sous l’unique responsabilité des auteurs et ne représentent pas nécessairement les positions du CIRANO ou de ses partenaires. This paper presents research carried out at CIRANO and aims at encouraging discussion and comment. The observations

and viewpoints expressed are the sole responsibility of the authors. They do not necessarily represent positions of

CIRANO or its partners.

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Analyse économique des politiques linguistiques

au Québec : 40 ans de Loi 101*

François Vaillancourt†

Résumé

Ce texte examine à l’aide des outils de l’analyse économique l’offre et la demande pour le français et l’anglais au Québec puis leur utilisation et valeur sur le marché du travail pour la période 1971-2011. Nous présentons également la politique linguistique en vigueur au Québec et discutons de comment la rendre optimale. Nos principaux résultats empiriques sont que :

La connaissance du français a augmenté au Québec alors que la part de la population de langue maternelle française a diminué entre 1971 et 2016 (offre) ;

L’importance des employeurs francophones a augmenté au Québec entre 1961 et 2003 (demande);

Le statut socio-économique du français sur le marché du travail mesuré par son utilisation et sa rémunération s’est amélioré entre 1971 et 2011 alors que le bilinguisme est toujours plus rémunérateur que l’unilinguisme.

Mots clés : Économie de la langue ; Loi 101 ; Politiques linguistiques ; Rémunération de l’anglais et du français au travail ; Québec ; Utilisation du français au travail Codes JEL : H79 ; J15 ; J31 ; K39 ; Z13

Abstract

This paper examines using economic analysis tools the supply and demand of English and French in Québec and their use and value on the labour market over the 1971-2011 period. We also present the language policies of Québec and how to optimize them. Our main empirical findings are that:

The knowledge of French has increased in Québec while the share of French mother tongue population has dropped between 1971 and 2016 (supply);

The importance of francophone employers has increased in Québec between1961 and 2003(demand);

The socio-economic status of French on the labour market measured by its use and associated earnings has improved between 1971 and 2011 while bilingualism always pays better than unilingualism.

Keywords: Economics of language; Bill101; Language policies; Rewards to English and French in the labour market; Québec; Use of French in the workplace JEL Codes: H79; J15; J31; K39; Z13

* L’auteur remercie les participants à un atelier interne du CIRANO ainsi qu’Anna Kerkhoff et Jean-Philippe Meloche pour des commentaires forts utiles. † Fellow CIRANO et professeur émérite, sciences économiques, Université de Montréal.

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Table des matières

Introduction

1. Historique et cadre législatif linguistique au Québec

2. Analyse économique des langues et des politiques linguistiques 3. Offre de français au Québec 4. Demande de français au Québec 5. Utilisation et valeur du français sur le marché du travail 6. Les politiques linguistiques du Québec ; regard vers 2050

Conclusion

Liste des tableaux

Tableau 1 Pertes en capital humain du Québec ($ et %) causée par la mobilité

interprovinciale 1976-1981, 1986-1991 et 1996-2001

Tableau 2 Revenus moyen de travail, hommes et femmes, Québec, 1970-1980-1990-

2000-2010, $ courants

Tableau 3 Ratio des revenus moyens de travail par rapport aux unilingues francophones,

Québec, 1970,1980, 1990, 2000, 2010

Tableau 4 Impact net des attributs linguistiques, Hommes, Québec, 1970-2010

Langue maternelle /Connaissance des langues officielles

Tableau 5 Impact net des attributs linguistiques, %, Femmes, Québec, 1970-2010 Langue

maternelle /Connaissance des langues officielles

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Liste des figures

Figure 1 % de la population du Québec, connaissance du français et francophones (langue

maternelle) ,1971-2016

Figure 2 Soldes migratoires interprovincial et international du Québec, 1961-2016,

nombre de personnes

Figure 3 Importance (%) des immigrants internationaux avec une connaissance du

français, 1981-2015, Québec

Figure 4 % des élèves primaire et secondaire fréquentant l'école française, Québec et

Montréal, et % allophones, 1971-2015

Figure 5 % francophones et anglophones avec scolarité universitaire, cinq groupes d'âge,

et ratio de ces %, Québec, 2006

Figure 6 Importance des exportations interprovinciales, internationales et totales en % du

PIB, Québec, 1991-2015

Figure 7 Propriété des entreprises par groupe, % emplois, Québec, 1961,1978, 1991,

2003

Figure 8 Usage du français au travail, Québec, six années, 1971-2016,% par niveau

d'utilisation

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Introduction

L’objectif de ce texte est d’examiner à l’aide des outils de l’analyse économique les

politiques linguistiques en vigueur au Québec. Ceci est pertinent car ces politiques ont

des conséquences sur les attributs de la main d’œuvre et donc son employabilité et

rémunération. Le texte se divise en six parties. La première, après un bref rappel

historique, présente le cadre législatif en vigueur au Québec. La seconde expose les

principes de l’économie des langues. Les troisième et quatrième traitent respectivement

de l’offre et de la demande pour le français, l’anglais et les autres langues au Québec. La

cinquième partie examine l’utilisation et la valeur des langues sur le marché du travail.

Finalement dans la sixième partie nous mettons de l’avant les caractéristiques d’une

politique linguistique optimale pour le Québec du XXIIème siècle.

1. Historique et cadre législatif linguistique au Québec.

Entre 1608 (début de la colonisation française) et 1763 (cession de la Nouvelle-France au

Royaume Uni) la langue officielle du Québec était le français alors que diverses langues

aborigènes y étaient parlées. Suite à la conquête britannique, un bilinguisme s’installe

avec des variations à travers le temps dans les exigences légales et les pratiques étant

donné entre autre l’adoption en 1774 du British North America (Quebec) Act 1774 pour

parer à la menace de rébellion des colonies américaines, la séparation du Canada en Bas

et Haut Canada (The Clergy Endowments (Canada) Act 1791) et la fusion du Haut

(Ontario) et Bas (Québec) Canada en 1840 suite à la rébellion des patriotes de 1837 et au

rapport Durham. Le cadre constitutionnel moderne est mis en place en 1867 par L’Acte

de l’Amérique du Nord Britannique (AANB ou BNA British North America act); il est

amendé à travers le temps en particulier avec des modifications importantes en 1982. Ce

cadre repose sur un modèle fédéral avec une certaine asymétrie dans le traitement du

Québec par rapport aux autres provinces. Examinons maintenant les aspects

constitutionnels et légaux s’appliquant à la langue.

L’article 133 de la constitution de 1867 prévoit que les débats du parlement fédéral

peuvent se tenir en anglais et en français et que les lois doivent être adoptées dans les

deux langues. Il n’y a aucune exigence sur la disponibilité de services en anglais ou

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français, mais en pratique les services fédéraux sont offerts en français au Québec. Divers

débats indiquent que l’offre de biens ou services en français n’est pas toujours apprécié.

Ainsi certains s’opposeront lors d’une révision de la loi de la Banque du Canada à ce que

les billets de banque soient bilingues (Bouthillier et Meynaud, 1972, document 80, 513-

531). L’AANB octroie également des droits aux anglophones et francophones du Québec

en termes de langue de l’Assemblée Nationale et de la rédaction des lois.

La révolution tranquille au Québec (1960-1966) entraina diverses réactions du

gouvernement fédéral dont la mise sur pied de la Commission royale d’enquête sur le

bilinguisme et le biculturalisme (commission Laurendeau-Dunton) en 1963 et l’adoption

de la Loi sur les langues officielles (fédérale) en 1969. Cette loi fait de l’anglais et du

français les deux langues officielles du Canada. Diverses lois, jugements et politiques

adoptées entre 1969 et 1982 renforcent le statut du français (Vaillancourt et Coche, 2009)

alors que les amendements constitutionnels de 1982 constitutionnalisent le statut des

langues officielles et octroient des droits dans le domaine de l’enseignement primaire et

secondaire aux minorités linguistiques.

Négligeant la Loi Lavergne1 (1910) qui ne compte que deux articles, la première loi

linguistique québécoise2, la Loi pour promouvoir la langue française au Québec (loi 63)

adoptée en 1969, permet de choisir sans contrainte sa langue d’enseignement primaire ou

secondaire. Ceci se fait suite à la crise de Saint-Léonard3 et à la création fin 1968 de la

Commission d'enquête sur la situation de la langue française et des droits linguistiques au

Québec (Commission Gendron). Son rapport déposé en 1973 mène à la Loi sur la Langue

Officielle (loi 22) qui est remplacée par la Charte de la Langue française (loi 101) en

1977. C’est cette loi, amendée à plusieurs reprises4, qui demeure le socle de la politique

1 http://www.axl.cefan.ulaval.ca/amnord/quebec_Lavergne.htm 2 Le lecteur intéressé par les politiques linguistiques des autres provinces du Canada peut consulter Vaillancourt et al (2012) 3 https://ville.montreal.qc.ca/memoiresdesmontrealais/les-italo-montrealais-et-la-question-de-la-langue-denseignement 4 http://www.axl.cefan.ulaval.ca/amnord/Quebec-6Charte-modif.htm

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linguistique québécoise. Elle vise à accroitre la connaissance et l’utilisation du français

au Québec.

Les principales dispositions de la Loi 101 en 2017 sont les suivantes:

1. Obligation des enfants de fréquenter l’école primaire et secondaire de langue

française sauf si l’un ou l’autre parent a étudié en anglais au Canada. De 1977 à

1984 l’exception ne s’appliquait que si un parent avait étudié en anglais au

Québec. En pratique ceci signifie que les francophones et les immigrants

internationaux doivent envoyer leurs enfants à l’école de langue française sauf

s’ils fréquentent des écoles privées non subventionnées par l’État ce qui est peu

souvent le cas

2. Exigence d’affichage public avec prééminence du français. Avant 1993 seul

l’affichage en français était permis;

3. Restriction sur l’offre de services de l’administration publique en anglais;

4. Exigence d’obtenir un certificat de francisation pour les entreprises de 50

employés et plus. Ceci exige une analyse de la situation linguistique et si pertinent

un programme de francisation5.

Donc l’environnement linguistique au Québec est le résultat de l’interaction de la

politique canadienne qui reconnait un statut officiel à l’anglais et au français partout au

Canada (mais avec des variantes d’offre dépendant de la demande potentielle), de la

politique québécoise qui fait la promotion du français et des choix de divers organismes

publics (commissions scolaires, cegeps, universités, établissements de santé, organismes

municipaux) et des entreprises privées.

2. Analyse économique des langues et des politiques linguistiques

Le premier texte qui a explicitement traité de la langue comme objet d’analyse

économique est celui de Marschack (1965) intitulé ‘’Economics of Language’’; il se situe

5 https://www.oqlf.gouv.qc.ca/francisation/entreprises/entreprises_plus/demarche.html 1. Un projet de loi (#14) mis de l’avant en 2012 et étendant cette exigence aux entreprises de 25-49 employés n’a pas été adopté.

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dans la lignée de ses travaux sur l’économie de l’information6. De nature théorique, il

avance que les langues qui demandent moins d’énergie (de temps) pour communiquer ont

une meilleure probabilité de survie à long terme. Migué (1970) et Raynauld et Marion

(1972) utilisent une approche théorique reposant sur les groupes ethniques pour

contribuer au débat. C’est finalement Hocevar (1975) qui va intégrer la langue en soi

dans l’approche offre et demande alors que Breton(1978) va se concentrer sur le

bilinguisme.

Les premiers travaux empiriques en économie des langues ont été faits par des

économistes québécois pour les deux commissions d’enquête mentionnées ci haut. Le

plus actif est André Raynauld (Raynauld, Marion et Béland, 1966; Raynauld, 1974,

Raynauld, 1985) qui a œuvré pour la commission Laurendeau-Dunton. Ces travaux ont

utilisé des microdonnées individuelles et d’entreprises pour mesurer entre autre les écarts

de revenus entre groupes ethniques et le contrôle des employeurs du Québec par groupe

linguistique. Divers travaux ont été faits pour la commission Gendron; ils portent sur la

langue de travail et non pas les revenus et sont synthétisés par Laporte (1974). Grin

(2016) a récemment fait une analyse exhaustive de l’analyse économique des politiques

linguistiques à travers le monde pour la période 1965-2015.

De façon générale on peut utiliser l’analyse classique de l’offre et de la demande pour

comprendre l’impact des politiques publiques québécoises, linguistiques et autres, sur

l’utilisation du français au Québec et sur la valeur de cette langue (Vaillancourt, 1983).

Ceci n’est pas le cas pour tous les environnements langagiers car la langue est un bien dit

de réseau7; la valeur de la langue peut donc augmenter avec le nombre absolu d’individus

qui la parle au sein d’une population / sur un territoire. Cependant étant donné qu’au

Québec 88,5% de la population parle déjà français en 1971 (figure 1, somme des

6 Le premier texte par un économiste sur la langue serait celui d’Adam Smith intitulé CONSIDERATIONS CONCERNING THE FIRST FORMATION OF LANGUAGES publié en 1767 en annexe à Theory of Moral Sentiments mais ce n’est pas une analyse économique. 7 Pour une discussion de ceci, voir Klemperer, Paul. "network goods (theory)." The New Palgrave Dictionary of Economics. Second Edition. Eds. Steven N. Durlauf and Lawrence E. Blume. Palgrave Macmillan, 2008. The New Palgrave Dictionary of Economics Online. Palgrave Macmillan. 08 August 2017< http://www.dictionaryofeconomics.com/article?id=pde2008_N000138> doi:10.1057/9780230226203.1176

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bâtonnets), la dimension bien privé de la langue domine dans ce cas et on peut utiliser

l’approche classique pour analyser l’impact des politiques linguistiques et autres sur la

quantité utilisée et le prix de la langue française. La valeur (prix) du français augmente

avec une hausse de la demande et diminue avec une hausse de l’offre8. Le prix (valeur)

n’est pas observable directement mais on peut, utilisant une analyse multivariée, le

calculer pour le marché du travail9; ce sont ces résultats que nous présenterons à la

section cinq du rapport. Nous examinons maintenant les facteurs qui ont affecté

l’évolution entre 1960/1970 et 2010/2016 de respectivement l’offre (section trois) et la

demande (section quatre) de français. Les bornes temporelles utilisées sont déterminées

par la disponibilité de données raisonnablement comparables.

3. Offre de français au Québec

L’offre de français au Québec se concrétise par la connaissance du français de ses

résidents. Cette connaissance est généralement acquise à l’école au Québec ou ailleurs

dans le monde ou lors d’activités de formation adulte, soit au travail (formation

linguistique de cadres du gouvernement fédéral par exemple) ou hors travail (francisation

de certains des immigrants au Québec). L’offre se mesure par le nombre et la part de

parlants français dans la population totale ou la main d’œuvre. La mesure de ceci se fait à

l’aide des données des recensements quinquennaux (1971-2016). Divers changements

dont le fait de permettre des réponses multiples à la question sur la langue maternelle

(1981+) et l’utilisation du questionnaire long en 2011 plutôt que du questionnaire de

l’Enquête Nationale des Ménages pour certaines questions font que les comparaisons

inter-temporelles ne se font pas strictement à l’identique.

La figure 1 présente l’importance dans la population des individus parlant français et des

individus de langue maternelle. On y observe une croissance de 88,5% en 1971 à 94,5%

en 2016 dans la part de la population qui indique parler français (somme des bâtonnets =

8 Ceci présume que la valeur réseau de plus de parlants français est dominée par la valeur privée de ceci. Cela nous semble plausible au Québec, une société déjà largement francophone 9 Ceci est similaire à l’approche hédonique utilisée pour estimer la valeur de telle ou telle caractéristique d’un bien immobilier. Voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Régression_hédonique

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ligne pointillée)10. Quant à la part de francophones (langue maternelle), elle atteint un

sommet de 83% en 1986 puis diminue à 77% en 2016.

Source : divers documents mais principalement : Connaissance des langues officielles :

Projections linguistiques pour le Canada, 2011 à 2036 Statistique Canada 89-657

Chapitre 5. Connaissance des langues officielles et bilinguisme français-anglais tableau

5.1 Statistique Canada

Francophones (langue maternelle) : INDICATEURS de la situation linguistique au

Québec, 1991 Conseil de la langue française et divers tableaux de Statistique Canada

Notes : Les chiffres de 1976 pour la connaissance du français sont la moyenne de 1971 et

1981 car cette information n’a pas été recueillie dans le Recensement de 1976

La mesure de l’importance des francophones entre 1971 et 2016 est approximative vu les

changements dans les définitions et données disponibles.

_____________________________________________

10 Un résultat intéressant est qu’en 1971 36,7% des anglophones se déclarent bilingues et en 1986 53,7% se déclarent bilingues Tableau 1.2 INDICATEURS de la situation linguistique au Québec 1991 Conseil de la langue française

60,9 60,5 60,1 59 58,2 56,1 53,8 53,9 51,8 50

27,6 30 32,4 34,5 35,4 37,8 40,8 40,6 42,6 44,5

0

20

40

60

80

100

1971 1976 1981 1986 1991 1996 2001 2006 2011 2016

Figure 1: % de la population du Québec, connaissance du français et francophones(langue

maternelle),1971-2016

Français uniquement Français et anglais

Francophones français connu

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Les sources de la croissance relative et absolue de l’offre de français sont diverses. Une

source possible serait des différences dans les taux de natalité. Mais au Québec ‘’… les

femmes ayant le français ou l’anglais comme langue maternelle ont une fécondité

semblable… Les allophones ont une fécondité plus élevée que les francophones et les

anglophones, mais néanmoins inférieure au seuil de remplacement des générations. La

plus forte fécondité des allophones résulte de la fécondité plus élevée des immigrantes

qui comptent pour la majorité des femmes de ce groupe linguistique..’’11 . Une autre

source serait des différences dans les taux de mortalité mais les anglophones ont une

espérance de vie plus élevé que celle des francophones12 . Un troisième facteur serait les

soldes migratoires. La figure 2 présente les soldes migratoires interprovincial et

international du Québec. Le Québec est un perdant net (entrées – sorties) de

l’immigration inter provinciale et un gagnant net en termes d’immigration internationale.

Source : Migrations internationales et interprovinciales, Québec, 1961-2016, ISQ

______________________________________________________

11 P119 Le bilan démographique du Québec ISQ Édition 2012 12 ‘’La mortalité et la fécondité selon le groupe linguistique au Québec, 1976 et 1981’’ Marc Tremblay and Robert Bourbeau dans Cahiers québécois de démographie Volume 14, numéro 1, avril 1985

-60 000

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20

16

Figure 2: Soldes migratoires interprovinciaux et internationaux du Québec, 1961-2016, nombre de

personnes

Solde migratoire inter-prov solde migratoire internationale

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La perte nette d’immigrants inter provinciaux (1991-2001) est composé principalement

d’unilingues anglais (65 pour mille) puis d’individus bilingues (10 pour mille) et non pas

d’unilingues français (zéro pour mille)13. Cette sur-représentation des anglophones est

probablement stable à travers le temps. Charest (2008) a examiné l’impact des

mouvements migratoires inter- provinciaux sur le stock de capital humain québécois pour

trois périodes. Nous présentons ses résultats au tableau 1.

Tableau 1 : Pertes en capital humain du Québec ($ et %) causée par

la mobilité interprovinciale 1976-1981, 1986-1991 et 1996-2001

Période Perte

(millions$)

Perte % capital

humain initial

% anglophones

dans

immigrants

inter

provinciaux

1976- 1981 31 737 3,77 64, 37

1986-1991 7946 0,66 47,29

1996-2001 19 275 1,63 43,36

Source : Charest, Olivier L’exode des cerveaux : une estimation des flots du capital

humain entre le Québec et le Canada - 1976-2001 rapport MSc 2008

https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/handle/1866/2467

____________________________________________________

Par contre, l’immigration internationale est devenue plus parlant français comme

l’indique la figure 3. Ceci s’explique en partie par un rôle accru du Québec dans la

sélection de ces immigrants suite à un ensemble d’ententes conclues durant les années

197014. Elle a des conséquences sur la composition linguistique de la main d’œuvre

québécoise.

13 Évolution de la migration au Québec Alain Bélanger et Éric Caron Malenfant Division de la démographie Statistique Canada Septembre2006 14 http://www.cic.gc.ca/francais/ministere/lois-politiques/ententes/quebec/abc-quebec-acc.asp et Vaillancourt (1989)

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Source : Immigrants selon la connaissance du français et de l'anglais, Québec, 1980-

2015, ISQ

http://www.stat.gouv.qc.ca/statistiques/population-

demographie/migration/internationales-interprovinciales/607.htm

___________________________________________

Finalement, les mouvements entre groupes linguistiques ou l’acquisition du français par

les migrants jouent un rôle. Avant 1971, 31,7% des immigrants choisissaient le français

et 68,3% l’anglais comme langue d’usage alors qu’en 1996-2001 ce sont 73,8% des

immigrants qui choisissent le français comme langue d’usage.15 Un des facteurs

expliquant ceci est leur connaissance du français à l’arrivée (figure 3); un autre est la

scolarisation en français découlant de la Loi 101. La figure 4 présente l’évolution de

l’importance de l’école de langue française; elle indique un accroissement de sa part de

marché surtout à Montréal ; ceci s’explique par la forte croissance du % d’allophones

(multiplié par six entre 1971 et 2015) qui fréquente l’école francophone. Presque 2/3 de

cette croissance chez les allophones se fait entre 1976 et 1986 soit dans les dix ans

suivant l’adoption de la Loi 101. Par ailleurs en 2006, deux-tiers des enfants inscrits à

15 http://www.axl.cefan.ulaval.ca/amnord/Quebec-2demo.htm#1.6_Les_transferts_linguistiques_

40,534,9

37,5 38,9

47

57,762,5

55,5

0

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20

30

40

50

60

70

1981 1986 1991 1996 2001 2006 2011 2015

Figure 3: Importance (%) des immigrants internationaux avec une connaissance du

français,1981-2015, Québec

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12

l’école primaire anglaise au Québec le sont dans un programme d’immersion en

français16alors que 11% des enfants admissibles à l’école anglaise vont à l’école

française par choix en 200617.

Cette francisation de la population québécoise s’est accompagnée d’une amélioration

relative pour les francophones du capital humain acquis par la scolarisation comme

l’indique l’évolution par groupe d’âge du taux de scolarisation des francophones et des

anglophones présentée à la figure 5. Donc en comparant leur scolarisation, on constate

que les jeunes francophones sont plus similaires aux jeunes anglophones que les vieux

francophones aux vieux anglophones. Ceci accroit leur employabilité.

Source : Langue et éducation au Québec, Éducation préscolaire et enseignement primaire

et secondaire, 2017 Office québécois de la langue française tableau 2 par Charles-

Étienne Olivier

Note : Loi 101= élèves allophones et donc les plus visés par cette loi

_____________________________________

16‘, Les minorités prennent la parole : résultats de l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle Statistique Canada (91-548-X) tableau 5.8 https://www.statcan.gc.ca/pub/91-548-x/2007001/4185569-fra.htm 17 P17 https://www.oqlf.gouv.qc.ca/ressources/sociolinguistique/2017/20170331_etude1.pdf

14,620,3

43,4

63,2

76,4 79,9 78,7 81,486,3 89,4

0

20

40

60

80

100

1971 1976 1981 1986 1991 1996 2001 2006 2011 2015

Figure 4: % des élèves primaire et secondaire fréquentant l'école française,Québec et Montréal, et % allophones, 1971-2015

QC Montréal Loi101

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13

____________________________________________________

Source : figure 4 ‘’La scolarité des francophones et des anglophones à travers les groupes

d’âge au Québec et en Ontario’’ par Yvan D’Amours Données sociodémographiques en

bref Février 2010, Vol 14, #2 ISQ

___________________________________________________

La conclusion que l’on peut tirer de cette section est que l’offre de français au Québec

s’est accrue au Québec entre 1971 et 2016. Ceci devrait en abaisser la rémunération sur le

marché du travail si la demande est demeurée inchangée. Tournons-nous donc vers la

demande pour le français

4. Demande de français au Québec

La demande de français peut s’exprimer sur le marché des biens et services (par les

consommateurs) et sur celui du travail (par les employeurs)

4.1 Biens et services

Les déterminants de la demande de biens et services en français au Québec sont les

préférences linguistiques des consommateurs, leur capacité de payer et les prix relatifs

des biens et services en anglais et en français.

24,820,4

15,5 14,5

8,8

34,9

28,224,3 25,9

18,2

1,41 1,38 1,57 1,79 2,07

0

5

10

15

20

25

30

35

40

25-34 35-44 45-54 55-64 65-74

Figure 5: % francophones et anglophones avec scolarité universitaire, cinq groupes d'âge, et

ratio de ces %, Québec, 2006

Francophones Anglophones Ratio anglo/franco

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14

Presnukhina (2016) examine les choix linguistiques des francophones en matière de

consommation de biens culturels (lectures, chansons, spectacles…); elle constate que les

francophones consomment surtout en français et les anglophones en anglais. Vaillancourt

(1985) quant à lui constate, suite à une analyse probit, que la préférence des francophones

pour l’utilisation du français dans les activités de consommation est présente mais est

moins forte pour les individus dont la connaissance de l’anglais est meilleure.

Le tableau 2 présente les revenus moyens de travail des hommes et des femmes par

groupe linguistique pour cinq années : 1970, 1980, 1990, 2000 et 2010. Le tableau 3 les

présente relativement au revenu des francophones unilingues.

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15

Tableau 2 : Revenus moyen de travail, hommes et femmes, Québec, 1970-1980-1990-2000-2010, $ courants

Hommes Femmes

Langue maternelle et

connaissance des langues

officielles

1970 1980 1990 2000 2010 1970 1980 1990 2000 2010

Anglophones unilingues 8 171 17 635 30 034 34 097 46 943 3 835 10 271 18 844 23 002 31 176

Anglophones bilingues 8 938 19 562 33 511 38 745 56 677 3 956 10 759 20 292 26 247 38 330

Francophones

unilingues

5 136 14 408 24 702 29 665 38 772 3 097 8 801 15 850 20 786 30 263

Francophones bilingues 7 363 19 547 33 065 38 851 55 307 3 842 11 195 20 261 26 644 40 262

Allophones anglais 6 462 15 637 20 609 27 216 38 832 3 329 9 753 13 393 18 996 27 058

Allophones français 5 430 13 287 18 503 21 233 31 820 3 241 8 191 12 647 15 551 24 119

Allophones bilingues 7 481 17 964 22 837 33 097 48 972 3 881 10 868 16 229 24 034 35 521

Allophones sans

connaissance d’une

langue officielle

4 229 10 003 15 748 20 146 26 340 2 342 7 589 10 067 15 379 19 117

Source : Source : 1970 et 1980 : Vaillancourt (1988) ; 1990 : Vaillancourt (1996); 2000 : Vaillancourt et al (2007) ; 2010 :

Vaillancourt et Fontaine (2017). Les données de revenus des Recensements sont pour l'année le précédant donc 1970 pour

1971,...,2010 pour 2011(ENM).

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16

____________________________________________

Tableau 3 : Ratio des revenus moyens de travail par rapport aux unilingues francophones, Québec, 1970,1980, 1990, 2000, 2010

Hommes Femmes

Langue maternelle +

langues officielles

1970 1980 1990 2000 2010 1970 1980 1990 2000 2010

Anglophones

unilingues

1,59 1,22 1,22 1,15 1,21 1,24 1,17 1,19 1,11 1,03

Anglophones

bilingues

1,74 1,36 1,36 1,31 1,46 1,28 1,22 1,28 1,26 1,27

Francophones

bilingues

1,43 1,36 1,34 1,31 1,43 1,24 1,27 1,28 1,28 1,33

Allophones anglais 1,26 1,09 0,83 0,92 1,00 1,07 1,11 0,84 0,91 0,89

Allophones français 1,06 0,92 0,75 0,72 0,82 1,05 0,93 0,80 0,75 0,80

Allophones bilingues 1,46 1,25 0,92 1,12 1,26 1,25 1,23 1,02 1,16 1,17

Allophones sans

connaissance d’une

langue officielle

0,82 0,69 0,64 0,68 0,68 0,76 0,86 0,64 0,74 0,63

Source tableau 1. Le ratio des revenus de chacun des groupes /revenu des unilingues

francophones_________________________________

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17

Les tableaux 2 et 3 indiquent que les revenus de travail des francophones unilingues se

sont rapprochés de ceux des anglophones unilingues entre 1970 et 2010. Par conséquent

le pouvoir d’achat des individus susceptibles de préférer être servis en français s’est accru

ce qui augmente la demande pour le français dans les commerces et services.

Finalement, les prix des biens et services sont règle générale similaires et nombre de sites

web d’achat en ligne sont disponibles en anglais et en français. Ce n’est donc pas un

facteur important sauf peut-être pour quelques biens culturels. Par contre certains biens et

services ne sont pas disponibles au Québec car leurs fournisseurs ne jugent pas pertinent

de les offrir en français.

4.2 Marché du travail

Trois facteurs ont été identifiés dans les travaux sur ce sujet comme jouant un rôle dans le

choix de la langue de travail et donc la demande pour le français ou l’anglais soit : la

propriété des entreprises (employeurs), la langue des marchés desservis et la langue des

intrants, particulièrement de la technologie, - utilisé par les entreprises.

A priori, on peut croire que la généralisation des technologies de l’information augmente

l’utilisation de l’anglais au travail comme langue de la technologie. Mais la plupart des

logiciels existe en version française. Il n’est donc pas clair que ce soit le cas. Certes le

contenu du web global est surtout en anglais mais ceci n’est pas nécessairement utilisé au

travail. Et comme l’indique la figure 8 plus bas, il y a eu croissance de l’utilisation du

français au travail au Québec.

La figure 6 indique une croissance de la part des exportations dans le PIB québécois suite

à l’introduction de l’Accord de libre-échange entre le Canada et les États Unis en 198918.

Les deux principaux marchés d’exportation du Québec sont le Canada hors Québec et les

18 http://www.international.gc.ca/trade-commerce/trade-agreements-accords-commerciaux/agr-acc/united_states-etats_unis/fta-ale/background-contexte.aspx?lang=fra Cet accord est remplacé par l’ALENA en 1994.

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18

États-Unis comptant respectivement pour 18,7% et 20,6%19 du PIB québécois en 2015.

Ces deux marchés sont desservis pour l’essentiel en anglais depuis toujours. Leur

importance plus grande dans le PIB québécois tend à augmenter la demande pour

l’anglais au Québec qui serait donc plus importante en 2015 qu’en 1991 ou présumément

avant.

Source : Statistique Canada. Tableau 384-0038 - Produit intérieur brut, en termes de

dépenses, provinciaux et territoriaux, annuel

_________________________

Les résultats de Vaillancourt et al (1992) sur les déterminants de la langue du travail

indique que l’utilisation du français est plus élevée dans les secteurs avec une propriété

francophone plus forte. Or il y a une croissance importante de la propriété francophone

mesurée par la part de l’emploi sous contrôle entre 1961 et 200320. Elle s’explique par

19 Nous obtenons ce chiffre en multipliant la part des exportations internationales dans le PIB-le 28,4% de la figure 6 par la part des exportations aux États-Unis dans le total des exportations internationales. Les données proviennent de http://qe.cirano.qc.ca/tab/theme/activite_economique/commerce_exterieur/commerce_international_et_interprovincial_2015 pour part des exportation interprovinciale et internationale et http://qe.cirano.qc.ca/tab/theme/activite_economique/commerce_exterieur/principaux_pays_dexportation_et_dimportation_du_que pour destination des exportations internationales 20 Dernière année disponible

20,3% 17,7% 19,6% 19,6% 19,8% 18,7%19,9%

31,2%

39,2%32,5%

25,9% 28,4%

0,0%

10,0%

20,0%

30,0%

40,0%

50,0%

60,0%

70,0%

1991 1996 2001 2006 2011 2015

Figure 6: Importance des exportations interprovinciales, internationales et totales en %

du PIB, Québec, 1991-2015

X interprovinces Xinternationales Xportations totales

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19

une croissance du secteur public et parapublic québécois et par l’émergence

d’entrepreneurs francophones qui, dans certains cas avec l’appui de la Caisse de Dépôt et

Placement du Québec (CDPQ), achètent des établissements (Cascade) ou des entreprises

(Vidéotron) ou encore fonde de nouvelles entreprises. Cette croissance de la propriété

francophone accroit donc la demande pour le français.

Source : La propriété des employeurs au Québec en 2003 selon le groupe

d’appartenance linguistique par François Vaillancourt et Luc Vaillancourt, Québec :

Conseil Supérieur de la Langue Française, 2005, Figure 3.1

________________________________________________

La conclusion que l’on peut tirer de cette section est que la demande pour le français au

Québec s’est accrue entre 1971 et 2016. Ceci devrait en augmenter l’utilisation et la

rémunération sur le marché du travail si l’offre est demeurée inchangée. Mais la section

précédente indique une augmentation de l’offre; l’effet est donc incertain. Il nous faut

donc examiner les données sur l’utilisation et la rémunération des langues observée sur le

marché du travail pour connaitre l’effet combiné de ces deux changements.

5. Utilisation et valeur du français-le marché du travail

13,6 13,98,7 10

39,3

31,226,2

22,9

47,154,8

65,1 67,1

0

10

20

30

40

50

60

70

80

1961 1978 1991 2003

Figure 7: Propriété des entreprises par groupe, % emplois,Québec, 1961,1978, 1991, 2003

Étrangère Canadienne -Anglo Canadienne -Franco

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20

Le cadre théorique présenté plus haut (section 2 du texte) nous indique que les

changements d’offre et de demande du français peuvent en affecter son utilisation

(quantité) et sa valeur (prix).

La figure 8 porte sur l’utilisation du français au travail au Québec. Son examen indique

que le français est plus utilisé au travail en 2016 qu’en 1971. En effet, en 1971, 64% des

résidents du Québec indiquent travailler en français exclusivement ou généralement, et 19

% le faire régulièrement pour un total de 83%. En 2016, ces deux pourcentages sont plus

élevés de trois points de pourcentage chacun et leur somme passe donc de 83% à 89%. Le

français est donc plus utilisé au travail en 2016 qu’en 1971. Ce chiffre de 89% est

inchangé depuis 1997 mais avec une baisse de 4% de l’usage général exclusif et une

hausse de 15% de l’usage régulier sur cette période.

Source Langue publique au Québec en 2016 : le travail Office québécois de la langue

française Graphique 42, p26. GE= Général/exclusif; R=Régulier

______________________________________

6470 73 70 69 67

19 18 18 19 20 22

0

20

40

60

80

100

1971 1979 1989 1997 2007 2016

Figure 8: Usage du français au travail, Québec, six années, 1971-2016,% par niveau d'utilisation

Général/exclusif Régulier somme GE et R

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21

Comme discuté plus haut, la valeur du français sur le marché du travail est estimée par

une analyse multivariée des revenus de travail des résidents du Québec. L’équation

utilisée est la suivante :

Logarithme naturel du revenu de travail annuel= B₀ Constante + B₁ Attributs

linguistiques +B₂ Scolarisation +B₃ Expérience + Expérience2 +B₄ Semaines travaillées

Le revenu de travail est la somme du revenu salarial et du revenu de travail

autonome;

Les variables d’éducation sont des variables dichotomiques qui correspondent au

plus haut niveau de scolarité atteint par l’individu;

Les variables d’expérience et son carré sont calculées en utilisant l’âge de

l’individu et un nombre d’années de scolarité associé avec son niveau de

scolarisation par hypothèse;

Le nombre de semaines travaillées est celui rapporté par l’individu;

Les variables d’attributs linguistiques sont des variables dichotomiques

construites comme suit (un √ indique une combinaison d’attributs utilisés dans

l’analyse).

Langue Maternelle

Langue officielle

Anglais Autre

Allophone

Français

Anglais √ √ √

Français √ √ √

Les deux √

Aucune √

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22

Les données sont tirées des bases de micro données des recensements canadiens sauf

pour 2011 car nous devons alors utiliser les données de l’enquête nationale des ménages

qui remplace en partie le recensement pour cette année.

Les résultats clefs sont présentés aux tableaux 4 (hommes) et 5 (femmes). Ils indiquent

un important changement dans la valeur relative de l’anglais et du français sur le marché

du travail québécois. Les résultats pour les variables de contrôle sont conformes aux

attentes soit un impact positif sur le revenu de travail annuel d’un niveau de scolarité plus

élevé ou d’un nombre de semaine travaillées plus élevé et un impact tout d’abord

croissant puis décroissant du nombre d’années d’expérience ; l’indicateur du degré

d’explication (R²) est à un niveau raisonnable pour ce type de modèle. Vaillancourt et al

(2007) rapportent que l’utilisation d’un modèle comptant plus de variables de contrôle ne

modifie pas la conclusion sur le changement dans la valeur relative de l’anglais et du

français mais affecte les valeurs des paramètres.

L’interaction des changements dans l’offre et la demande du français au Québec entre

1970 et 2010 a donc augmenté sa valeur alors que de 1971 à 2007/2016 on observe une

augmentation dans son utilisation au travail.

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23

Tableau 4 : Impact net des attributs linguistiques sur les revenus de travail, %,

Hommes, Québec, 1970-2010, Langue maternelle /Connaissance des langues

officielles

Groupe 1970 1980 1990 2000 2010

Anglophones unilingues 10 -7 -12 -18 -10

Anglophones bilingues 17 0 0 0 -8

Francophones bilingues 13 5 7 12 7

Allophones anglophones 0 -16 -35 -30 -25

Allophones francophones 0 -20 -21 -34 -36

Allophones bilingues 6 -6 -20 -12 -21

Allophones ni anglais ni français -18 -45 -27 -26 -54

Source : 1970 et 1980 : Vaillancourt (1988) ; 1990 : Vaillancourt (1996); 2000 :

Vaillancourt et al (2007) ; 2010 Vaillancourt et Fontaine (2017)

Note : Ces % sont par rapport aux francophones unilingues. Un zéro indique un impact

non statistiquement significatif. Les données de revenus des Recensements sont pour

l'année le précédant donc 1970 pour 1971,...,2010 pour 2011(ENM).

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24

Tableau 5 : Impact net des attributs linguistiques sur les revenus de travail, %,

Femmes, Québec, 1970-2010 Langue maternelle / Connaissance des

langues officielles

Groupe 1970 1980 1990 2000 2010

Anglophones unilingues 0 -5 0 0 -9

Anglophones bilingues 0 0 4, 7 0

Francophones bilingues 10 7 11 17 8

Allophones anglophones 0 0 -11 0 -41

Allophones francophones 23 0 -8 -19 -32

Allophones bilingues 11 0 0 5 -15

Allophones ni anglais ni français 0 0 -13 0 -41

Source : 1970 et 1980 : Vaillancourt (1988) ; 1990 : Vaillancourt (1996); 2000 :

Vaillancourt et al (2007) ; 2010 Vaillancourt et Fontaine (2017)

Note : Ces pourcentages sont par rapport aux francophones unilingues. Un zéro indique

un impact non statistiquement significatif. Les données de revenus des Recensements

sont pour l'année le précédant donc 1970 pour 1971,...,2010 pour 2011(ENM).

__________________________________________

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25

6. Les politiques linguistiques du Québec ; regard vers 2050

Nous avons indiqué plus haut que :

i. La part de la population du Québec qui a le français comme langue maternelle a

diminué entre 1971 et 2016;

ii. Le % d’enfants allophones fréquentant l’école primaire ou secondaire au Québec

a fortement augmenté entre 1971 et 2015;

iii. La connaissance du français a augmenté au Québec entre 1971 et 2016 malgré la

réduction noté en i) et en partie à cause de ii);Arsenault Morin et Geloso (2016)

présente un indice synthétique traitant de ceci plus en détail;

iv. Le statut socio-économique des francophones s’est amélioré entre 1971 et 2016;

v. Le bilinguisme est plus rémunérateur que l’unilinguisme.

Selon nous la croissance de la connaissance du français au Québec qui s’explique en

partie par la croissance de la scolarisation en français des enfants allophones est en bonne

partie le résultat de la loi 101 et ne serait pas produit en son absence.

L’amélioration du statut socio-économique des francophones par contre ne s’explique pas

principalement par la loi 101. En effet un ensemble de politiques publiques jouent un rôle

à savoir :

un ensemble de mesures mises en place entre 1964 et 1969 pour accroître la

scolarisation des francophones du Québec : re-création du ministère de

l’Éducation21 en 1964, transformation du réseau post-secondaire avec la création

des cégeps (1967) et de l’Université du Québec (UQ) en 1968;

création de la CDPQ en 1965 qui permet à divers entrepreneurs francophones

d’obtenir un meilleur accès au marché du capital;

21 Le ministère de l’Instruction Publique a existé entre 1867 et 1875. Il fut remplacé par un surintendant de l’instruction publique et un conseil dominé par l’église catholique. https://www.erudit.org/fr/revues/haf/1968-v22-n2-haf2067/302780ar.pdf

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26

émergence en 1957 d’un mouvement réclamant l’indépendance du Québec du

Canada avec une composante violente entre 1963 et 1970. Ceci rend moins

attrayant le Québec pour les anglophones qui le quittent ou ne s’y installent pas;

déplacement lent mais constant des centres de décisions économiques

anglophones vers Toronto, et dans une moindre mesure Calgary et Vancouver, ce

qui réduit l’attrait du Québec pour les anglophones;

Le principal déterminant du statut socio-économique du français au Québec à long terme

est le succès économique des francophones qui leur permet de résider et vivre en français

au Québec. Quels devraient donc être les objectifs de la politique linguistique pour

atteindre un tel succès?

Nous avions énoncé en 1988, soit quelque dix ans après la mise en place de la loi 101 ce

que devraient être les objectifs de la politique linguistique québécoise soit (Vaillancourt,

1988):

1) de faire du français la langue commune des interactions exclusives (communications

orales) sur le marché interne du Québec;

2) de permettre l'utilisation d'autres langues que le français lors d'interactions non

exclusives (affichage, formulaires) des langues;

3) de permettre aux firmes d'utiliser la combinaison optimale de langues dans la desserte

des marchés externes;

4) de faciliter l'apprentissage de l'anglais par tous les francophones;

5) d'exiger ou de faciliter, selon leur lieu de naissance et leur âge, l'apprentissage du

français par les non francophones.

Nous notions alors que : ces objectifs sont différents de ceux des politiques linguistiques

actuelles (dont la Loi 101) qui:

— n'obligent pas les offreurs (vendeurs, etc.) de biens et de services privés et publics à

desservir leur clientèle en français;

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27

— demandent aux entreprises de généraliser plutôt que d'optimiser l'usage du français;

— restreignent l'apprentissage de l'anglais par les francophones en limitant leur accès à

la scolarité en anglais au niveau post-secondaire, tout en n'exigeant pas une

connaissance d'usage du français des non francophones étudiant ou immigrant au

Québec.

Le deuxième objectif est maintenant atteint suite à un jugement de la Cour suprême du

Canada (1988) invalidant l’interdiction d’une langue autre que le français dans

l’affichage et de son acceptation par un amendement à la loi 101 en 1993.22 Du point de

vue économique, l’ajout d’information à celle offerte en français résultant de la présence

d’une ou plusieurs autres langues dans l’affichage ne peut être que désirable car elle

n’enlève aucun intrant utile aux francophones et ajoute des intrants utiles aux non-

francophones.

Les quatre autres objectifs que nous avions mis de l'avant n’ont pas été atteints. Ils sont

encore pertinents selon nous en 2018; pour les atteindre, quels moyens sont appropriés?

Pour le premier objectif les commerces et les services privés et publics desservant le

marché québécois doivent, en tout temps, pouvoir servir leurs clients en français, ce qui

implique la connaissance individuelle du français par les employés des commerces, des

institutions du secteur public (hôpitaux, cégeps, universités, etc.) et des élus

(commissaires, conseillers, etc.). Ceci entraîne un coût pour les résidents du Québec ne

connaissant pas le français qui devront l'apprendre ou ne pas avoir accès à ces emplois.

Ces commerces et ces services pourront évidemment servir leur clientèle en anglais ou

dans d'autres langues s'ils le désirent. Ceci accroitra l’utilisation du français au travail.

Pour le troisième objectif les exigences des programmes de francisation évolueront à

travers le temps en fonction de l'évolution de la technologie utilisée et des marchés

desservis par l’entreprise. On y viserait l'usage optimal et non pas général du français,

soit un usage qui tienne compte à la fois des intérêts privés (profits) et publics (effets

22 Voir paragraphes 6.1-6.3 (5) La politique linguistique et la Charte de la langue française http://www.axl.cefan.ulaval.ca/amnord/Quebec-5Politique_lng.htm

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externes) liés à l'utilisation du français. Ceci réduira les coûts de ces programmes, rendra

le Québec plus attrayant pour certains investisseurs et réduira quelque peu l’utilisation du

français au travail.

Le quatrième objectif serait atteint en imposant à tous les élèves de l’école francophone

de fréquenter un programme d'immersion anglais (100%) pendant un an. Ceci permettra à

l'ensemble des francophones d'avoir l'occasion d'apprendre l'anglais plus aisément que

maintenant. Une possibilité est de faire ceci en recourant à l’expertise des écoles

anglaises. Le fait d’exiger plutôt que d’offrir la possibilité reconnait l’importance pour

l’individu et la société de cette connaissance. Une telle politique augmente le risque

d'assimilation, mais, simultanément, accroît le potentiel économique des Québécois

francophones et donc rend le français plus payant et donc plus attractif.

Le cinquième objectif requière que les non francophones nés au Québec fréquentent le

premier cycle du primaire en français, soit à l'école française, soit en programme

d'immersion. Ceci leur assurera à faible coût la connaissance du français requise par la

politique sur la langue du commerce et des services (objectif 1). Les non francophones

nés hors du Québec et d'âge scolaire devront fréquenter, à leur arrivée, l'école en français

ou un programme d’immersion pendant un an. Quant aux adultes, ils auront la possibilité,

mais non l'obligation, d'étudier le français six mois, à temps plein, aux frais de l'État

(allocation de subsistance et cours gratuits). Cet ensemble de politiques fera que

l'exigence d'une connaissance individuelle du français pour desservir le marché québécois

ne sera pas excessivement contraignante.

Ces objectifs et ces moyens devraient évidemment être précisés par des modalités

d'application, par exemple, l'exigence de connaître le français en milieu universitaire ne

s'appliquerait pas aux professeurs et chercheurs invités, mais pourrait être une condition à

l'octroi de la permanence. De même, l'exigence de fréquenter l'école en français pourrait

ne pas s'appliquer lors de séjours de courte durée, ou ne s'appliquer qu'aux enfants de

moins de 12 ans (primaire).

Ces objectifs et ces moyens visant à la fois l’offre de français (objectifs 4 et 5) et la

demande de français (objectifs 1 et 3) nous paraissent, dans l'ensemble, susceptibles

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d'assurer au français la place qui lui revient sur le marché interne québécois et également

de desservir les marchés internationaux en anglais. Ceci va accroître la rentabilité et la

viabilité du français.

Conclusion

La politique linguistique québécoise fera toujours face à des défis, le Québec étant

entouré d’anglophones. Mais étant donné l’état des lieux présenté dans ce texte il faut

selon nous, mettre de côté des politiques linguistiques qui considèrent l’anglais comme la

langue de la conquête et non pas comme la langue de l’ouverture internationale. Il faut

développer une politique linguistique moderne tournée vers le monde et qui pourrait

s’inspirer des pratiques au Pays-Bas; dans ce pays 90% de la population parle anglais et

71% allemand23. Et pourtant personne ne prévoit la disparition du hollandais dans un

avenir prévisible. Ceci dit si ce type de politique avec une connaissance généralisée de

l’anglais et importante de l’espagnol (plutôt que l’allemand) amenait sur un horizon de

quelques centaines d’années la disparition du Québec francophone, il faudrait

comprendre que ceci est le résultat d’un choix des francophones eux-mêmes et non pas

d’une assimilation forcée.

23 Special Eurobarometer 386 EUROPEANS AND THEIR LANGUAGES 2012 P21 http://ec.europa.eu/commfrontoffice/publicopinion/archives/ebs/ebs_386_en.pdf

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