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NICE Pieds-noirs, Russes, Italiens, Maghrébins, Arméniens, Africains... des communautés bien intégrées ? Sfar L’ENTRETIEN « J’ai une passion pour Nice ! » JOANN SUPPLÉMENT - L’EXPRESS N°3274 DU 2 AU 8 AVRIL 2014 La ville mosaïque NAWAL BONNEFOY - DENIS FELIX

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NICEPieds-noirs, Russes, Italiens,

Maghrébins, Arméniens, Africains... des communautés bien intégrées ?

SfarL’ENTRETIEN

« J’ai une passionpour Nice ! »

JOANN

S U P P L É M E N T - L’ E X P R ESS N ° 3274 D U 2 AU 8 AV R I L 20 1 4

La ville mosaïque

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L’EXPRESS / 3Sommaire

N° 3274 / 2 avril 2014 Retrouvez l’équipe sur http://defigrandesecoles.lexpress.fr/edj-nice-2014

Supplément au N° 3274, semaine du 2 au 8 avril 2014WWW.LEXPRESS.FR

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04ENTRETIENJoann Sfar

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ÉDITION SPÉCIALE Ce supplément de L’Express a été réalisé par les étudiants de l’Ecole du Journalismede Nice.

08EN COUVERTURENice, ville ouverte

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de Christophe Barbier/

L’éditoChaque jour l’édito vidéo sur Lexpress.fr

LA BONNE SALADEIls ne partaient pas vers un plus grand inconnu, les marins de ChristopheColomb embarqués à la poursuite du soleil couchant, et ils ont foncé sanspeur et sans remords. Aujourd’hui, les journalistes en herbe s’accrochentaux rayons d’un soleil levant, celui de la nouvelle information : elle seraimprimée et numérisée, noir sur blanc et en 3D-HD, elle sera multimédiaet hyper-passionnée, elle sera dans l’instant et au-delà du temps…

Sur un frêle esquif, les aventuriers du Défi M6-L’Express GrandesEcoles ont affronté la houle protéiforme de l’actualité qui se dérobe, del’interviewé qui se décommande et de l’annonceur qui se décourage.Mais ils ont su réveiller l’une, traquer l’autre et convaincre le troisième,pour sculpter cet objet improbable et précieux qui s’appelle un journal.Enfin, puisque vous avez cet exemplaire sous les yeux, ils ont su vousséduire et vous intéresser…

Pour les étudiants de l’Ecole du Journalisme de Nice, la Méditerranéen’a ni flux ni reflux, et pourtant la ville a été façonnée par la marée : la maréehumaine, qui a déposé sur ses refuges hospitaliers des populations bigarrées.Russes, Arabes, Juifs d’Europe de l’Est ou Italiens, ils composent un mélangeaussi contrasté que la salade dite niçoise. Mais le melting-pot n’est pas unchaudron magique, et il faut en permanence protéger les communautéscontre le communautarisme. Etre fier de son identité, c’est apporter sacouleur au drapeau collectif. Se replier sur sa tribu, ce serait préparer deschars d’assaut pour un funeste carnaval.•

Ce magazine a été conçu, écrit et réalisé par

les étudiants de l’Ecole du Journalisme de Nice

parrainés par Eric Mettout, directeur adjoint

de la rédaction de l’Express.

L’ÉQUIPECoordinateur : Camille-Fleur Bernard

Rédaction : Matthieu Drouin, Hugo Lane,

Romain Massa

Photo : Nawal Bonnefoy

Publicité : Jules Besse, Cyrielle Dagueneau

et Thomas Huant

Promotion des ventes : Claire Stathopoulos

Responsable web : Claire Gaveau

Nous tenons à remercier notre parrain de rédaction

Eric Mettout, notre parrain publicité Brian Farnet,

notre parrain promotion des ventes Philippe

Custaud, ainsi que Virginie Skrzyniarz.

Nous tenons également à remercier toutes les

personnes qui ont permis d’élaborer ce supplément

et les étudiants qui ont participé à sa vente.

GROUPE EXPRESS ROULARTADirecteurs généraux :

Corinne Pitavy, Christophe Barbier

Directeur de la publication :

Christophe Barbier

L’EXPRESSDirecteur de la rédaction :

Christophe Barbier

Directeur général adjoint : Eric Matton

Editeur délégué : Tristan Thomas

Rédacteur en Chef : Philippe Bidalon

Réalisation couverture :

Dominique Cornière

Réalisation : Cédric Pontes

Secrétaire de rédaction :

Sylvie Nouaille

Photogravure : L’Express

Fabrication : Catherine Pegon

Publicité : Partenaire Développement

Délégué régional : Philippe Custaud

Direction des ventes : Sophie Guerouazel

Coordination L’Express : Tony Douchet,

Stéphane Renault, Virginie Skrzyniarz

CPPAP n° 0318 C 82839; ISSN n° 0014-5270

avec

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4 / L’EXPRESS

N° 3274 / 2 avril 2014

L’entretien

JOANN SFAR

« Le Niçois me fait marrer »

Livres pour enfants, séries pour adultes et même un roman, Joann Sfar est l’un des auteursles plus doués et les plus prolifiques de sa génération, au point qu’il a fini par se sentir à l’étroitdans les cases de ses albums et a ajouté à sa panoplie une casquette de réalisateur. A son actif,deux films, Gainsbourg, vie héroïque, qui a raflé trois Césars en 2011, et une adaptation, lamême année, de son œuvre fétiche, le subtil, érudit et drôle Chat du rabbin. Ce fils de Juifsashkénaze et séfarade est né à Nice il y a quarante-deux ans. Il a grandi entre Riquier, leMont-Boron et le port, où il a forgé son amour de la Méditerranée et cet accent qui lui colle à lalangue, malgré vingt années de vie parisienne.

Propos recueillis par Matthieu Drouin, Hugo Lane et Romain Massa

Vous habitez Paris. Nice vous manque-t-elle ?� Nice est un cadeau empoisonné : il n’existe aucun autreendroit aussi agréable à vivre ! Avec la plage ou les jardinsau printemps, comment s’étonner qu’on y ait de moins bonnesnotes au bac qu’ailleurs ? Elle est difficile à quitter, cetteville… Ça fait vingt ans que je vis à Paris, ça fait vingt ansque je ne m’y fais pas. J’ai une passion pour Nice. C’est uneville extraordinaire, pleine de surprises. Le Niçois vient departout, il est bizarre, il est râleur… Bref, il me fait marrer.Vous avez quitté Nice il y a vingt ans. A quoiressemblait la ville à l’époque ?� Quand j’étais gamin, Nice était encore une petite ville.On connaissait tout le monde, j’avais des copains riches,des copains pauvres, de toutes les origines. A l’époque, leconcept de « communauté » n’existait pas. Il y avait desJuifs, des Arabes, des Corses, des Italiens, des gitans… maistous vivaient ensemble. Nous n’aurions jamais eu l’idée denous regrouper en fonction de nos origines ou de notre re-ligion. Les Juifs étaient bien intégrés, laïcs et républicains.

Mais je me souviens que les Arabes, eux, n’étaient pas bientraités. On a du mal à imaginer le racisme qui sévissait alorsdans la région. C’était très violent.Violent jusqu’à quel point ?� Moins nombreux qu’aujourd’hui, les Arabes étaientles plus pris pour cible. Le racisme ordinaire était bien plusterrible qu’aujourd’hui. Mes copains arabes me racontaientles moqueries dont ils étaient l’objet, les brutalités à l’école.J’étais élève au lycée Masséna quand un vieil Arabe a ététué à coups de pieds par des skinheads niçois, dans lesjardins suspendus. Ça n’arriverait plus aujourd’hui. Il n’ya plus de ratonnade en France – du moins je l’espère…Et vous, en tant que Juif, vous sentiez-vousmenacé ?� Bien sûr. Des Juifs étaient agressés, des pneus brûlésdevant la synagogue… Je connais bien ces affaires : monpère a été le premier avocat à envoyer des néo-nazis enprison à Nice, ce qui lui a valu de devenir une personnalitéimportante de la communauté juive de la ville. Les skinheads,

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N° 3274 / 2 avril 2014

INCONDITIONNEL Pour Joann Sfar, il n’existe aucun endroit aussi agréable à vivre que Nice.

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N° 3274 / 2 avril 2014

6 / L’EXPRESSL’entretien

à Nice, avaient cette particularité d’être fils de notables,quand, ailleurs, ils étaient souvent fils de prolétaires. Au-jourd’hui, les mêmes forment des mouvements pseudo-identitaires qui se plaignent de l’insécurité, alors qu’autrefois,l’insécurité, c’étaient eux !Quand vous étiez jeune, vous pratiquiez les artsmartiaux. Etait-ce en réaction à cette violence ?� Non, mais parce que j’avais l’impression que tout lemonde en faisait. Et parce que le sport est un facteur depaix sociale. Je fréquentais le club d’Edmond Ardissone,rue Smolett. Il y avait des Arabes, des Juifs et des skinheads,et fatalement tout ce petit monde finissait par devenir co-pains. Le professeur de culture physique avait une fonctiond’éducateur social. Le premier facteur de délinquance, c’estl’inaction et l’ennui. En prenant un jeune et en l’intégrantà un groupe qui ne fait pas de bêtises, on évite les problèmes.Dans vos albums, Le Chat du rabbin notamment,vous mêlez des personnages de culturesdifférentes, mais vivant dans le même monde. C’est un message ?� Oui. Et je suis bien embêté, parce que ce message esttellement naïf qu’il ne mérite pas d’être dit ! Mais je croisque c’est idiot de passer toute son existence à créer duconflit entre les êtres humains : c’est bon, les gens ontcompris que le racisme, c’est mal, et il suffit d’al-lumer sa télévision pour constater que le répéterne suffit pas pour que ça s’arrange. Moi, je pré-fère vivre dans le monde des Bisounours, êtrel’abruti qui écrit des livres dans lesquels les Juifset les Arabes s’entendent bien. Il existe peut-être des conflits, mais j’ai choisi de vivre dansune utopie optimiste. C’est toute la faiblesse demon message.Vous avez dessiné et réalisé des films en vousinspirant de Serge Gainsbourg, de GeorgesBrassens, de Chagall. Pourquoi ces hommages ?� Ce sont plus que des hommages ! Je fais comme LoràntDeutsch, mais à ma façon. Je m’invente un panthéon. Jemets en avant ce que j’aime dans ce pays. Ces mecs me ren-dent heureux. Quelqu’un qui me rend heureux, je lui ensuis reconnaissant toute ma vie, et j’essaye de transmettrecette joie aux autres. L’essentiel de mon travail, c’est derendre ce que j’ai reçu.Marc Chagall a passé une grande partie de sa viesur la Côte d’Azur. A Nice, un musée lui estconsacré. Est-ce cet enracinement local qui vous apoussé à vous intéresser à lui ?� Tout à fait. C’est l’école qui m’y a conduit la premièrefois, en CM2. Ma vocation vient de là, d’une visite au muséeMarc-Chagall. La Bible m’ennuyait. De la voir peinte parChagall, d’un coup, j’ai trouvé ça drôle et humain. Il représentaitle Christ parmi les Juifs, c’était un beau signe de fraternité.

Je ne suis sûrement pas le seul, beaucoup d’enfants se mettentà aimer la peinture après avoir découvert Chagall.De tous vos personnages, lequel préférez-vous ?� Difficile à dire… Le chat du rabbin, peut-être, parceque c’est le plus tendre et qu’il me fait rire. Et parce quec’est mon chat dans la vraie vie. Il a exactement la mêmetête que dans la BD, des expressions tellement étrangesqu’on voudrait le faire parler. Un dessinateur, ça veut faireparler tout le monde !En quoi la Méditerranée vous a-t-elle inspiré ?� Je n’ai jamais mis les pieds en Algérie – tout ce que jeconnais de la Méditerranée, c’est Nice. Et donc la villed’Alger que je raconte dans Le Chat du rabbin, ce n’est pasNice, évidemment, mais les lumières viennent de là. Je n’au-rais pas pu dessiner ces albums si je n’étais pas né au bordde la Méditerranée. Quand on a vu le jour face à la mer, onla dessine autrement.En 2011, vous avez adapté Le Chat du rabbinau cinéma, après avoir réalisé Gainsbourg, vie héroïque (2010). Est-ce difficile de mettre son œuvre en scène ?� C’est un exercice très difficile ! On se trahit soi-mêmeen permanence. Mais cette trahison est un mal nécessaire,sinon on n’arrive à rien. On est beaucoup moins libre que

lorsqu’on invente une histoire. En même temps, je nevoulais pas prêter mon chat à quelqu’un d’autre, je devaisle faire moi-même. J’ai adoré le dessiner, mais le film a ététrès angoissant.Vous avez signé des biographies, des récitshistoriques, fantastiques, des histoires pourenfants… Cette diversité fait-elle votre force ?� Je m’amuse avec des jouets différents, mais je parle tou-jours de la même voix. C’est ma petite fantaisie, mon universqui se développe. J’ai été influencé par Edmond Baudoin(trois fois récompensé au festival d’Angoulême, dont unefois pour le meilleur album, Couma acò, en 1991, NDLR)et Fred (l’auteur de Philémon, Grand Prix de la ville d’An-goulême en 1980, Alph’Art du meilleur album en 1994,NDLR). Les artistes français m’inspirent. Quand je faisdes livres ou des films, j’essaye d’aimer mon pays et detransmettre cet amour aux enfants. Ce n’est pas toujoursfacile. Les Français croient qu’ils sont malheureux et ne serendent pas compte à quel point ça va mieux ici que dansbeaucoup d’autres pays. •

1971 Naissance, le 28 août, à Nice, d’un père séfarade et d’une mère ashkénaze. 1994 Il publie Les Aventures d’Ossour Hyrsidoux et

Noyé le poisson. 1998 Avec Lewis Trondheim, il écrit le scénario de Donjon. 1999 Premier volume de Petit Vampire. 2002-2006

Il décline les cinq tomes du Chat du rabbin. 2004 Prix du Trentenaire au Festival de la bande dessinée d’Angoulême. 2008 Il s’attaque

au Petit Prince. 2010 Sortie de Gainsbourg, vie héroïque, pour lequel il recevra le César du meilleur premier film. 2010 Première partie

de Chagall en Russie. 2011 Sortie sur les écrans du Chat du rabbin. 2012 César du meilleur film d’animation pour Le Chat du rabbin.

JOANNSFAR

EN11 DATES

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« Je préfère vivre dans le mondedes Bisounours, écrire des livresdans lesquels les Juifs et les Arabes s’entendent bien »

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8 / En couverture

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L’EXPRESS / 9

N° 3274 / 2 avril 2014

Un climat béni des dieux, la Méditerranée en toile de fond, la montagne à l’horizon… Les atouts de la capitale azuréenne ont attiré, dès le milieu du XIX

e siècle, les aristocrates russes dont certains se sont installés après la révolution bolchevique. Leur ont succédé, par vagues successives et au gré dessoubresauts de l’Histoire, des Italiens, des Arméniens, des Juifsd’Europe de l’Est et d’Afrique du Nord, des Maghrébins. Jusqu’auximmigrants de la fin du XX

e siècle, venus de l’ex-Yougoslavie, de Tchétchénie ou d’Afrique noire, en quête d’une vie meilleuredans la baie des Anges. Enquête

Matthieu Drouin, Hugo Lane, et Romain Massa

NICE, VILLE OUVERTE

ANIMATION Le marché du cours Saleya,haut lieu de la vie commerçante de Nice.

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Quoique… Deux rues plus loin, sur leboulevard Gambetta, le luxe et les cli-chés s’effacent devant une autre réalité :ici, pas de caviar, mais des produits duquotidien : vodka, plats du pays, DVD.Ces autres Russes, bien plus nombreux,sont loin des excès de leurs compa-triotes dorés sur tranche.

François entre dans une boutique. Par-fois, le russe et le français, hésitant, semarient dans une même phrase. La ven-deuse, Hélène, a 67 ans. Elle s’amusedes a priori de son client. « Tous lesRusses ne sont pas milliardaires. Richeset pauvres se croisent à l’église ortho-doxe sans pour autant se mêler ni

osmopolite, Nice souffrepourtant d’une image de ville mono-colore, faite d’égoïsme, de repli sur soiet de rejet de l’autre. Un cliché queFrançois, un touriste imaginaire, va voirvoler en éclats au gré de ses rencontresdans les rues de la capitale azuréenne.Tout droit sorti de sa banlieue pari-sienne, ce quadragénaire en mal de so-leil débarque à Nice, les valises pleinesde crème à bronzer et de préjugés.

Au sortir de la gare Thiers, premiercontact avec la ville, première surprise,un sex-shop, au milieu de brasseries si-nistres, de magasins bon marché surfond du bruit des klaxons, omniprésent.Lui qui pensait ne trouver que des ruestranquilles et des retraités…

Pour se rendre à l’hôtel, François em-prunte la rue Paganini. Il est midi, l’heuredu coup de feu. La rue bouillonne, lesrestaurants asiatiques sont pleins à cra-quer. Quelques mètres plus loin, lestaxiphones et les boucheries hallal suc-cèdent au « petit Chinatown ». Le quar-tier est populaire, cosmopolite, chaleu-reux et turbulent. Là encore, Françoisne s’attendait pas à tant d’animation.

Après quelques heures de farnientesur la plage, l’inévitable balade sur la« Prom ». Le décor change. Notre tou-riste jette un coup d’œil aux annoncesqui recouvrent les vitrines des nom-breuses agences immobilières. Ellessont rédigées en russe ! François n’enlit que les chiffres – à plusieurs zéros.Comme il l’a lu à Paris, Nice est doncbien la terre promise des oligarques.

10 / En couverture/Nice, ville ouverte

N° 3274 / 2 avril 2014

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L’EXPRESS

« Les Russes, riches et pauvres, secroisent à l’église orthodoxe sans pourautant se mêler ou se connaître »

MYTHIQUES La baie des Anges et la promenade des Anglais.

1930 1945 1962De nombreux Espagnols cherchent refuge à Nice pour

Les Maghrébins constituent une main d’œuvre bon marché.

Les pieds-noirs doivent quitter

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1850 1860Les premiers touristes anglais font leur apparition.

Des aristocrates et artistes russes commencent à séjournersur la Côte-d’Azur pendant l’hiver.

1920Les Italiens viennent chercher du travail et, pour certains, fuient le fascisme.

Ils construisent littéralement la ville de Nice.

1915-20Des Russes quittent leur patrie après la révolution bolchevique. Les premiers Arméniens

débarquent à Nice, après le génocide dont ils ont été victimes en Turquie.

Nice, ville cosmopolite >>>

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UNE TRADITION D’ACCUEIL

Christian Estrosi, le maire de Nice, l’affirme : « Nice est une terre d’accueil,

une ville cosmopolite. C’est ancré dans son histoire. Diverses populations sont

venues s’installer ici, dont de nombreux artistes, et cela se retrouve aujourd’hui

dans notre richesse architecturale. Nice est une destination privilégiée, son

territoire est ouvert vers l’extérieur et le sentiment d’intégration est inscrit

dans les consciences collectives. »

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Bac 2014

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12 / En couverture/Nice, ville ouverte

N° 3274 / 2 avril 2014

1970à 2000De 1994 Fin du XXe s.

Quelque 780 Le temps des Africains :

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1930 1945 1962De nombreux Espagnols cherchent refuge à Nice pour échapper à la guerre civile. Des Juifs ashkénazes arrivent de l’Est où ils sont victimes des politiques antisémites en vigueur, entre autres, en Allemagne, en Pologne et en Russie.

Les Maghrébins constituent une main d’œuvre bon marché. Avec l'indépendance de l’Algérie, les accords d'Evian (1962) et le regroupement familial (1976), leur présence s'est intensifiée. Aujourd'hui ils représentent 40% des étrangers vivant à Nice.

Les pieds-noirs doivent quitter l’Algérie. Nombre d’entre eux choisissent Nice pour refaire leur vie.

>>>>>>

1850 1860Les premiers touristes anglais font leur apparition.

Des aristocrates et artistes russes commencent à séjournersur la Côte-d’Azur pendant l’hiver.

1920Les Italiens viennent chercher du travail et, pour certains, fuient le fascisme.

Ils construisent littéralement la ville de Nice.

1915-20Des Russes quittent leur patrie après la révolution bolchevique. Les premiers Arméniens

débarquent à Nice, après le génocide dont ils ont été victimes en Turquie.

Nice, ville cosmopolite >>>

se connaître. Il n’y a pas d’espritcommunautaire, simplement un rapportbrut, de patrons à employés », explique-t-elle.

Actes de violenceParmi les derniers arrivés, les Tchét-chènes se distinguent par leur modede vie précaire. Chassées par la guerre,au début des années 2000, 800 famillesse sont réfugiées à Nice, sans s’intégrer.Les policiers reprochent aux jeunesTchétchènes les rixes qui, depuis 2007,les opposent régulièrement à de jeunesMaghrébins dans le quartier de l’Ariane,ainsi que des actes de violence répétésdans la vieille ville. Clément Cosma,un jeune Seynois, a ainsi été poignardéau front par deux d’entre eux pour unesimple remarque, en décembre 2013.

François s’arrête à la terrasse d’uncafé, pour consulter son guide devoyage. Il lit qu’à Nice, le taux de cri-minalité est le plus élevé des grandesvilles françaises : 109 crimes et délitspour 1 000 habitants en 2009. La presselocale fait état d’une descente de policespectaculaire dans le quartier del’Ariane. Accoudé au bar, agacé par lesréactions et sarcasmes des habitués,Mehdi, 20ans, s’emporte : « J’ai toujoursvécu à l’Ariane, c’est vrai que c’est unquartier à problèmes. Mais sa réputa-tion dépasse largement la réalité ! »François interroge le jeune homme surl’extrême-droite et les résultats niçoisde Marine Le Pen à l’élection prési-dentielle de 2012 – 23,02 % des Niçois

ayant voté lui ont apporté leur suffrage.« Je ne me l’explique pas, répond-il.Oui, il y a du racisme, mais je n’en ai ja-mais été victime personnellement. Etpuis, je me sens Niçois avant tout, je neme verrais pas vivre ailleurs. Vous savez,personne ne compte détruire l’identiténiçoise, au contraire ! »

Autour du port, de nombreuses affichesaffirment l’inverse. Elles revendiquentl’autonomie niçoise à coups de slogansxénophobes. Pour tenter de comprendre,François se rend dans le quartier le pluspittoresque et le plus emblématique de

l’identité niçoise, le Vieux-Nice, un dé-dale de rues étroites, longtemps insalu-bres, aujourd’hui branchées et touris-tiques. On n’y compte plus les restaurantsestampillés « nissarts », arborant fière-ment le drapeau du comté. Le linge pendaux fenêtres de bâtisses aux couleursvives, des vieilles dames convergent versl’une ou l’autre des cinq églises quecompte la vieille ville. Il flotte là commeun air d’Italie.

Sur la place Rossetti, juché sur uneestrade de fortune, un homme fait undiscours, en marge d’une manifestation.« Nous, Niçois, avons accueilli la terreentière sans que ce soit un problème.C’est en intéressant les gens à notreculture que nous les intégrerons. Neprêtez pas attention à ceux qui bafouentl’identité niçoise à des fins politiquesnauséabondes! », s’emporte-t-il. L’ora-

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« Les Niçois ont accueilli la terre entière.C’est en intéressant les gens à notreculture que nous les intégrerons »

CENTRALE La place Masséna, lieu névralgique de la ville.

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L’EXPRESS / 13

N° 3274 / 2 avril 2014

1970à 2000De 1994 Fin du XXe s.

Quelque 780 Yougoslaves fuyant le régime de Tito s’installent à Nice.

Des Tchétchènes se réfugient à Nice, loin de leur pays en guerre.

Le temps des Africains : majoritairement Cap-Verdiens (30 000, en 1995, dans les Alpes-

Maritimes), mais aussi des Sénégalais et des Maliens.

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1930 1945 1962De nombreux Espagnols cherchent refuge à Nice pour échapper à la guerre civile. Des Juifs ashkénazes arrivent de l’Est où ils sont victimes des politiques antisémites en vigueur, entre autres, en Allemagne, en Pologne et en Russie.

Les Maghrébins constituent une main d’œuvre bon marché. Avec l'indépendance de l’Algérie, les accords d'Evian (1962) et le regroupement familial (1976), leur présence s'est intensifiée. Aujourd'hui ils représentent 40% des étrangers vivant à Nice.

Les pieds-noirs doivent quitter l’Algérie. Nombre d’entre eux choisissent Nice pour refaire leur vie.

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1850 1860Les premiers touristes anglais font leur apparition.

Des aristocrates et artistes russes commencent à séjournersur la Côte-d’Azur pendant l’hiver.

1920Les Italiens viennent chercher du travail et, pour certains, fuient le fascisme.

Ils construisent littéralement la ville de Nice.

1915-20Des Russes quittent leur patrie après la révolution bolchevique. Les premiers Arméniens

débarquent à Nice, après le génocide dont ils ont été victimes en Turquie.

Nice, ville cosmopolite >>>

teur suscite des applaudissements, maisaussi quelques remarques plus scep-tiques. « Il ne peut quand même pasignorer les actes de vandalisme des im-migrés ! », lance un premier. « Les vraisNiçois, c’est nous ! », réplique un autre.

Surveillance vidéo

François a remarqué qu’à l’image deMonaco, sa voisine, Nice est sous hautesurveillance vidéo. Encore n’a-t-il repéréqu’une partie des 893 caméras qui scru-tent la ville. Elles rassurent une popula-tion sous tension depuis, notamment, lamanifestation de janvier 2009 sur l’ave-nue Jean-Médecin. Des vitrines avaientété brisées, des bagarres avaient éclaté,des slogans anti-juifs avaient été enten-dus lors de ce qui ne devait être qu’unrassemblement pacifique de soutien auxPalestiniens. Autre sujet d’exaspération,les prières de rue, dans le quartier No-tre-Dame. L’arrêt « anti-regroupement »pris par le maire, Christian Estrosi, enmars 2013, y a mis un terme. Sans répon-dre à la question collatérale de laconstruction de la Grande Mosquée, ceserpent de mer qui empoisonne la viepolitique niçoise et mobilise les musul-mans depuis des années…

De retour dans le centre-ville, Françoiss’arrête devant la Grande Synagogue.A la porte, deux hommes en grandeconversation. Alexis a 25 ans, il vit dansle quartier des Musiciens, où résidentde nombreux Juifs, comme lui. Il est in-quiet. « Nous mangeons casher, res-pectons les traditions et célébrons laplupart des fêtes religieuses, mais lesjeunes ont tendance à délaisser les lieuxde culte et il y a de moins en moins deJuifs. Nous étions environ 30000 il y aune dizaine d’années, aujourd’hui beau-coup moins. L’alya (le retour en Israël,NDLR) s’est répandue avec la dégra-

dation de l’économie française et lamultiplication des actes antisémites »,se désole-t-il. Cheval de bataille desorganisations juives de Nice, la luttecontre l’extrême-droite a longtempsfédéré la communauté. En 1990, quandJacques Médecin s’était dit d’accord à90 % avec les idées du Front national,trois membres juifs de son conseil mu-nicipal avaient démissionné. En 2001,c’est contre Jacques Peyrat, ex-FN sou-tenu par Jean-Marie Le Pen, que lesJuifs de Nice s’étaient mobilisés enmasse.

La « cité arménienne »

Sur les hauteurs, François découvreune église apostolique arménienne, àquelques pas de l’école Barsamian (lireci-contre). Un homme l’interpelle etlui propose de lui faire découvrir sonquartier, la « cité arménienne ». « Toutesles maisons que vous voyez ici, à flancde colline, sont occupées par des Fran-çais d’origine arménienne », s’enor-gueillit Kirkor. Il lui raconte l’histoirede son peuple, persécuté et massacréen Turquie, et la communion qui en arésulté : « Moi, par exemple, j’aide lesnouveaux arrivants à trouver du travail.Nous sommes très soudés, mais pascommunautaristes ! » De toutes lesdiasporas niçoises, l’arménienne (en-viron 4 000 personnes) est pourtant laplus isolée géographiquement. Françoisa l’impression de visiter une ville dansla ville.

En retournant vers le centre en bus,François tombe sur un vieux numéro,oublié sous un siège, d’une revue d’uneautre communauté importante de Nice,celle des 27000 pieds-noirs, pour la plu-part débarqués d’Algérie au tout débutdes années 1960 (lire article page 14).Dans un article incisif, un chroniqueur

UNE IMMIGRATION PAR VAGUES

Ralph Schor, docteur en histoire, professeur à

l’université de Nice Sophia-Antipolis, détaille les

différentes vagues d’arrivée des communautés,

dues pour certaines aux soubresauts de l’Histoire,

pour d’autres aux conditions économiques ou

encore à la douceur du climat azuréen… « Si la

communauté juive est implantée à Nice depuis

le Moyen Age, et a été partie intégrante de l’évo-

lution de la capitale azuréenne, au XXe siècle, les

Juifs des pays de l’Est fuyant les persécutions

et d’Afrique du Nord après la décolonisation sont

venus apporter un nouveau souffle à la commu-

nauté. Quant à la présence russe, elle remonte

au milieu du XIXe siècle avec l’arrivée des aristo-

crates attirés par la douceur du climat hivernal,

suivis au début des années 1920 par les réfugiés

de la révolution bolchevique.

Sur le plan architectural, Nice est très marquée

par l’héritage culturel et artistique italien. Dans

les années 1920, les Italiens représentaient 25 %

de la population niçoise. A l’époque, la pire insulte

était : “Sale Piémontais”. Puis, comme les Italiens

pendant l’entre-deux-guerres, les immigrés venus

du Maghreb se sont installés dans des conditions

très difficiles et ont vécu dans le plus grand bidon-

ville de France en 1970, la Digue-des-Français.

Les Arméniens, quant à eux, sont arrivés à Nice

au milieu des années 1920. Réfugiés du génocide,

ils se sont installés à la Madeleine grâce à un

bienfaiteur qui leur a vendu le terrain à un prix

modique. »

proteste contre l’inauguration d’unestatue du général De Gaulle, place dela Libération. François l’a lu quelquepart, Christian Estrosi a depuis fait ungeste, en inaugurant une stèle à la mé-moire des rapatriés (lire page 14). ANice, les communautés ne sont pas seu-lement affaires de culture, d’histoire,d’économie ou de religion : elles consti-tuent aussi un enjeu politique. •

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14 / En couverture/Nice, ville ouverte

N° 3274 / 2 avril 2014

Emile Serna a sillonné la France tout au long de savie professionnelle, mais c’est sur la Côte-d’Azurqu’il a décidé, en 1995, de venir couler une retraiteensoleillée. Ce « pied-noir indécrottable », commeil se définit lui-même, est un homme dévoué. A

sa famille, d’abord, à laquelle il consacre tous les jours sonénergie. A ses associations, ensuite : il préside la PEP 06(Pupille de l’enseignement public), la Chaire algérianisteet la Joyeuse Union de Don Bosco. A sa communauté, enfin,et à jamais. Son engagement : réhabiliter l’image des pieds-noirs – qui sont légion à Nice – envers et contre tout. Entreles étés 1962 et 1963, quelque 27000 rapatriés d’Algérie dé-barquent dans la capitale azuréenne. Trois ans plus tard, ilssont plus de 30000. De 1954 à 1962, la population niçoiseaugmente de 50000habitants et franchit la barre des 300000.

L’intégration par le travailExilé en métropole, Emile avait à cœur de prouver ce qu’ilvalait. Il concède d’ailleurs bien volontiers avoir d’autantplus travaillé qu’il était un « rapatrié » : « Si j’étais resté là-bas, je n’aurais certainement pas fait la même carrière. »

Et il n’aurait sans doute pas obtenu ce poste de recteur ad-joint d’académie à Paris, qui a clos son parcours à l’Educationnationale. Emile n’est pas le seul pied-noir à s’être ainsiinvesti dans son métier : « Ils travaillaient pour s’intégrer »,explique Gérald Léger, le responsable départemental duCentre de documentation historique sur l’Algérie.

Parmi eux, ceux, ouvriers qualifiés, qui ont participé à laconstruction de Nice. Ou les docteurs Bourgeon et Laverne,qui ont fondé la clinique Saint-Georges, en 1969. « Outreune centaine de médecins, des avocats et des commerçantsse sont installés à Nice et ont apporté leur savoir-faire à laville », précise Gérald Léger.

« Plutôt à droite »Les pieds-noirs l’affirment : à Nice, ils ont été bien accueillis.Ils l’ont bien rendu aux maires niçois. « Politiquement,notre communauté se situe plutôt à droite. Elle a fourniun soutien indéfectible à Jean et Jacques Médecin, à JacquesPeyrat comme à Christian Estrosi », raconte Emile. Avecl’actuel député-maire de Nice, le climat a pourtant faillivirer à l’orage. En 2011, Christian Estrosi inaugure, place

de la Libération, une statue du généralDe Gaulle – l’ennemi intime de beaucoupde pieds-noirs. Devant l’émotion soulevéepar cette décision, le maire fait un geste etérige sur la promenade des Anglais une stèleà la mémoire des Français d’Algérie. « Ellenous a apporté un grand réconfort », se sou-vient Gérald Léger.

Quand on évoque avec Emile l’avenir desa communauté, l’octogénaire s’inquiète etlance un appel à tous les fils et petits-fils depieds-noirs pour qu’elle ne disparaisse pasirrémédiablement. Né à Nice et présidentde l’Association des fonctionnaires rapatriés,Bernard Tapia, qui parle d’un « devoir demémoire », se veut rassurant : « Les deuxièmeet troisième générations sont concernées. Ily a chez elles une demande, voire une quêteidentitaire. » A l’en croire, Emile n’a pas desouci à se faire : à Nice, la culture des pieds-noirs n’est pas près de disparaître. • H. L.

Une des premières communautés de Nice

La fierté pied-noirEn 1962, les pieds-noirs sont rapatriés en métropole. Ils s’installent en nombre dansle sud de la France, à Nice en particulier. Parmi eux, Emile Serna, qui a choisi d’y vivresa retraite, pour retrouver la Méditerranée qui l’a vu naître et qu’il aime tant.

ACTIF Emile Serna consacre beaucoup d’énergie à la vie de sa communauté.

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