ressources humaines et formation pour la santé mentale

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RESSOURCES HUMAINES ET FORMATION POUR LA SANTÉ MENTALE Guide des politiques et des services de santé mentale « Les ressources humaines sont ce que les services de santé mentale ont de plus précieux. Les services de santé mentale se basent sur les compétences et la motiva- tion de leur personnel pour promouvoir la santé mentale, prévenir les troubles men- taux et fournir des soins aux personnes atteintes de tels troubles. »

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Page 1: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

RESSOURCES HUMAINES ET

FORMATION POUR LA SANTÉ MENTALE

Guide des politiques et des services de santé mentale

« Les ressources humaines sont ce que

les services de santé mentale ont de plus

précieux. Les services de santé mentale se

basent sur les compétences et la motiva-

tion de leur personnel pour promouvoir la

santé mentale, prévenir les troubles men-

taux et fournir des soins aux personnes

atteintes de tels troubles. »

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Guide des politiques et des services de santé mentale

RESSOURCES HUMAINES ET

FORMATION POUR LA SANTÉ MENTALE

Page 4: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

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© Organisation mondiale de la Santé 2010

Tous droits réservés. Il est possible de se procurer les publications de l’Organisation mondiale de la Santé auprès des Editions de l’OMS, Organisation mondiale de la Santé, 20 avenue Appia, 1211 Genève 27 (Suisse) (téléphone : +41 22 791 3264 ; télécopie : +41 22 791 4857 ; adresse électronique : [email protected]). Les demandes relatives à la permission de reproduire ou de traduire des publications de l’OMS – que ce soit pour la vente ou une diffusion non commerciale – doivent être envoyées aux Editions de l’OMS, à l’adresse ci dessus (télécopie : +41 22 791 4806 ; adresse électronique : [email protected]).

Les appellations employées dans la présente publication et la présentation des données qui y figurent n’impliquent de la part de l’Organisation mondiale de la Santé aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites. Les lignes en pointillé sur les cartes représentent des frontières approximatives dont le tracé peut ne pas avoir fait l’objet d’un accord définitif.

La mention de firmes et de produits commerciaux ne signifie pas que ces firmes et ces produits commerciaux sont agréés ou recommandés par l’Organisation mondiale de la Santé, de préférence à d’autres de nature analogue. Sauf erreur ou omission, une majus-cule initiale indique qu’il s’agit d’un nom déposé.

L’Organisation mondiale de la Santé a pris toutes les précautions raisonnables pour véri-fier les informations contenues dans la présente publication. Toutefois, le matériel publié est diffusé sans aucune garantie, expresse ou implicite. La responsabilité de l’interpré-tation et de l’utilisation dudit matériel incombe au lecteur. En aucun cas, l’Organisation mondiale de la Santé ne saurait être tenue responsable des préjudices subis du fait de son utilisation.

Imprimé en Suisse

Pour plus d’informations techniques concernant cette publication : Dr Michelle Funk Département Santé mentale et Toxicomanies Organisation mondiale de la Santé CH-1211 Genève 27 (Suisse)Tél. : +41 22 791 3855 Fax : +41 22 791 4160 Courrier électronique : [email protected]

Citation suggérée: Organisation des services de santé mentale. Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2003 (Guide des Politiques et des Services de Santé Mentale).

Catalogage à la source: Bibliothèque de l’OMS:

Ressources humaines et formation en santé mentale.(Guide des politiques et des services de santé mentale.)

1.Service santé mentale - main-d’œuvre. 2.Personnel sanitaire - organisation et administration. 3.Personnel sanitaire - enseignement. 4.Directives planification santé. I.Organisation mondiale de la Santé. II.Série.

ISBN 978 92 4 254659 0 (Classification NLM: WM 30)

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Page 5: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Remerciements

Le Guide des politiques et des services de santé mentale a été établi sous la direction du Dr Michelle Funk, Coordonnatrice, Politique de santé mentale et développement des services, et du Dr Benedetto Saraceno, Directeur, Département Santé mentale et toxico-manies, Organisation mondiale de la Santé.

Ce module a été préparé par le Dr Crick Lund, Département de Psychiatrie et de Santé Mentale, Université de Cape Town, Afrique du Sud, le Dr Soumitra Pathare, Ruby Hall Clinic, Inde, et le Dr Michelle Funk, Organisation Mondiale de la Santé, Suisse.

Groupe de coordination rédactionnelle et technique :

Dr Michelle Funk (Siège de l’OMS), Mme Natalie Drew (Siège de l’OMS), Dr Margaret Grigg (Siège de l’OMS), Dr Benedetto Saraceno (Siège de l’OMS), Dr Joseph Bediako Asare, Directeur en Santé Mentale, Ministère de la Santé, Ghana, Dr Stan Kutcher, Co-doyen, Clinical Research Centre, Université Dalhousie, Halifax, Nouvelle-Écosse, Canada, Dr Itzhak Levav, Mental Health Services, Ministère de la Santé, Jérusalem, Israël.

Assistance technique :

Dr Thérèse Agossou, Bureau régional OMS de l’Afrique, Dr José Miguel Caldas de Almeida, Bureau régional OMS des Amériques, Dr S. Murthy, Bureau régional OMS de la Méditerranée orientale, Dr Matt Muijen, Bureau régional OMS de l’Europe, Dr Vijay Chandra, Bureau régional OMS de l’Asie du Sud-Est, Dr WANG Xiangdong, Bureau régio-nal OMS du Pacifique occidental et Dr Tom Barrett (Siège de l’OMS).

Appui administratif :

Mme Adeline Loo, Mme Anne Yamada et Mme Razia Yaseen (Siège de l’OMS).

Présentation et conception graphiques : 2S ) graphicdesign

Éditeur : Mme Praveen Bhalla

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Page 6: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

L’OMS remercie également les personnes suivantes de leurs rapports d’expert et de leur contribution technique :

Dr Adel Hamid Afana Directeur, Département de la Formation et de l’Éduca-tion, Programme communautaire de la Santé mentale de Gaza

Dr Julio Arboleda-Florez Professeur et directeur, Department of Psychiatry, Queen’s University, Kingston, Ontario, Canada

Dr Kathleen Allen-Ferdinand Directrice, Services de santé communautaires, Ministère de la Santé, Basseterre, Saint-Kitts-et-Nevis

Dr Gavin Andrews Clinical Research Unit for Anxiety Disorders, (CRUFAD), Darlinghurst, Nouvelle-Galles du Sud, Australie

Dr Dahlia Arsyad Almatsier Psychiatre, Jakarta Barat, Indonésie Dr Bernard S. Arons National Institute of Mental Health, Bethesda, États-

Unis Mme Karine Balyan Conseillère en santé publique, Croix-Rouge néerlan-

daise, Amsterdam, Pays-Bas Mme Louise Blanchette Responsable du certificat de santé mentale, Université

de Montréal, Québec, Canada Mme Susan Blyth Psychologue clinique supérieure, Valkenberg Hospital,

Department of Psychiatry & Mental Health, University of Cape Town, Afrique du Sud

M. Martin Brown Directeur, Northern Centre for Mental Health, Durham, Royaume-Uni

Dr Claudina Cayetano Ministère de la Santé, Belmopan, BelizeDr Leo de Graaf Président, Mental Health Europe, Bruxelles, Belgique Dr Paolo Delvecchio Défense du consommateur, Substance Abuse and

Mental Health Services Administration (SAMSHA), United States Department of Health and Human Services, Washington, DC, États-Unis

Dr Maïga Douma Dibo Coordinatrice, Programmes de santé mentale, Ministère de la Santé, Niamey, Niger

Prof Glen Edwards Visiting Professor, Kobe University Medical School, Kobe, Japon

Prof Alan J. Flisher Department of Psychiatry and Mental Health, University of Cape Town, Afrique du Sud

Dr Abra Fransch Vice-président régional, Organisation mondiale des médecins généralistes (WONCA), Bulawayo, Zimbabwe

Prof Melvyn Freeman Human Sciences Research Council, Prétoria, Afrique du Sud

Mme Diane Froggatt Directrice exécutive, Association mondiale de la schizophrénie et des maladies apparentées, Toronto, Canada

Dr Tesfamicael Ghebrehiwet Consultant, Infirmières & politique de santé, Conseil International des Infirmières, Genève, Suisse

Dr Jacqui Gough Chef de projet, Mental Health Directorate, Ministère de la Santé, Wellington, Nouvelle-Zélande

Prof Eric Kodjo Grunitzky Coordinateur en Santé Mentale, Ministère de la Santé, Lomé, Togo

Dr Gaston P. Harnois Directeur, Douglas Hospital Research Centre, Verdun, Québec, Canada

Prof Edvard Hauff Professeur en psychiatrie transculturelle, University of Oslo, Oslo, Norvège

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Page 7: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Prof Helen Herrman Département de psychiatrie, University of Melbourne, Melbourne, Australie

Dr Ahmed Mohamed Heshmat Conseiller technique en chef, Chef d’équipe, Programme de santé mentale, Ministère de la Santé, Le Caire, Égypte

Prof Frederick Hickling Section of Psychiatry, University of the West Indies, Kingston, Jamaïque

Prof Assen Jablensky School of Psychiatry & Clinical Neuroscience, The University of Western Australia, Perth, Australie

Prof Lars Jacobsson Département de psychiatrie, University of Umeå, Umeå, Suède

Mme Lilian Kanaiya Schizophrenia Foundation of Kenya, Nairobi, Kenya Dr David Musau Kiima Directeur, Département de la santé mentale, Ministère

de la Santé, Nairobi, KenyaM. Todd Krieble Ministère de la Santé, Wellington, Nouvelle-ZélandeDr Pirkko Lahti Directeur exécutif, Association finlandaise de Santé

mentale, Helsinki, FinlandeDr Philippe Lehmann Politique nationale suisse de la santé, Office fédéral

de la santé publique, Berne, Suisse Dr Peter Lindley The Sainsbury Centre for Mental Health, Londres, Royaume-Uni Prof Juan J. López-Ibor, Jr. Ancien président, Association Mondiale de

Psychiatrie, López-Ibor Clinic, Madrid, Espagne Dr MA Hong Consultant, Ministère de la Santé, Beijing, Chine M. John Mayeya Spécialiste en santé mentale, Central Board of Health,

Lusaka, Zambie Dr Joseph Mbatia Ministère de la Santé, Dar-es-Salaam, République

Unie de TanzanieDr Ritambhara Mehta Professeur associé en psychiatrie, New Civil Hospital

Campus, Majura Gate, Surat, Inde Dr Alberto Minoletti Ministère de la Santé, Santiago, Chili Dr Yousuf K. Mirza Consultant supérieur et chef des services de psychia-

trie, Ministère de la Santé, Oman Dr Paul Morgan SANE, South Melbourne, Victoria, AustralieProf Driss Moussaoui Département de psychiatrie, Université de

Casablanca, Maroc Dr Carmine Munizza Centro Studi e Ricerca in Psichiatria, Turin, Italie Dr Louise Newman Directrice, New South Wales Institute of Psychiatry,

Parramatta, Sydney, Australie Dr Olabisi Odejide Directeur, Post Graduate Institute for Medical

Research and Training, University of Ibadan College of Medicine, Nigeria

Mme Judith Oulton Présidente Directrice Générale, Conseil International des Infirmières, Genève, Suisse

Dr Rampersad Parasram Ministère de la Santé, Port of Spain, Trinité-et-Tobago Dr Vikram Patel Maître de conférences, London School of Hygiene &

Tropical Medicine, et Président, The Sangath Society, Goa, Inde

Dr Michel Perreault Maître de recherches, Douglas Hospital Research Centre, Verdun, Québec, Canada

Dr Jan Pfeiffer Centre for Mental Health Care Development, Prague, République Tchèque

Dr Malcolm Philip The Sainsbury Centre for Mental Health, Londres, Royaume-Uni

Dr Michael Phillips Beijing Huilongguan Hospital, Beijing, Chine Dr Yogan Pillay Equity Project, Pretoria, Afrique du Sud

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Dr Pino Pini Associazione Italiana per la Salute Mentale, Florence, Italie

Prof Ashoka Prasad Ministère de la Santé, Mahe, Seychelles Prof David Richards Professeur en Santé mentale, Département des

Sciences de la santé, University of York, Heslington, York, Royaume-Uni

Dr Agnes E. Rupp Maître de recherches en économie et Chef, Mental Health Economics Research Program, National Institute of Mental Health/National Institute of Health, Bethesda, États-Unis

Dr Torleif Ruud SINTEF, Département de la recherche en services de santé mentale, Oslo, Norvège

Dr Mirja Sevon Président, Association finlandaise de santé mentale, Helsinki, Finlande

Prof SHEN Yucun Directeur, Peking University Institute of Mental Health, Beijing Medical University, Chine

Prof Naotake Shinfuku Medical School, Kobe University, Kobe, Japon Dr Carole Siegel Nathan S. Kline Institute for Psychiatric Research,

Orangeburg, NY, États-Unis Mme Inkeri Siekkinen Département des Ressources humaines, Ministère de

la Santé, Le Caire, Égypte Dr Vesna Svab Présidente, Association Slovène de Santé Mentale

(SENT), Ljubljana, Slovénie Dr Giuseppe Tibaldi Centro Studi e Ricerche in Psichiatria, Turin, Italie Dr Laksono Trisnantoro Gadjah Mada University Medical School, Yogyakarta,

Indonésie Dr Bogdana Tudorache Président, Ligue roumaine pour la Santé mentale,

Bucarest, Roumanie Dr Roberto Tykanori-Kinoshita Psychiatre, Santos, Sao Paulo, Brésil Prof Chantal Van Audenhove LUCAS, Université Catholique de Louvain, Belgique Mme Pascale Van den Heede Directrice exécutive, Santé mentale Europe, Bruxelles,

Belgique Mme Josée Van Remoortel Conseillère politique supérieure, Santé Mentale

Europe, Bruxelles, Belgique Mme WAN Deborah Présidente Directrice Générale, New Life Psychiatric

Rehabilitation Association, Hong Kong, Chine Dr Danny Wedding Directeur, Missouri Institute of Mental Health, St.

Louis, MO, États-Unis Dr Ray G. Xerri Département de la Santé, Floriana, Malte Dr ZOU Yizhuang Directeur du Réseau Chinois de la Santé Mentale,

Vice-Directeur du Beijing Hui Long Guan Hospital, Comité permanent & Secrétaire scientifique de la Société Chinoise de Psychiatrie, Membre du comité de rédaction permanent du Chinese Journal of Psychiatry, Beijing, Chine

L’OMS remercie aussi de leur généreux soutien financier les Gouvernements de l’Italie, de la Nouvelle-Zélande et des Pays-Bas, ainsi que la Fondation Eli Lilly and Company et la Johnson and Johnson Corporate Social Responsability, Europe. « Les ressources humaines sont ce que les services de santé mentale ont de plus pré-cieux. Les services de santé mentale se basent sur les compétences et la motivation de leur personnel pour promouvoir la santé mentale, prévenir les troubles mentaux et fournir des soins aux personnes atteintes de tels troubles. »

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Page 9: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

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RESSOURCES HUMAINES ET FORMATION POUR LA SANTÉ MENTALE

Coordination de la version françaiseDr. Jean Luc RoelandtPsychiatre. DirecteurCentre Collaborateur de l’Organisation Mondiale de la Santé pour la recherche et la formation en santé mentale (EPSM Lille Métropole, France)

Nicolas Daumerie Psychologue. Chargé de mission Centre Collaborateur de l’Organisation Mondiale de la Santé pour la recherche et la formation en santé mentale ((EPSM Lille Métropole, France)

Comité de lecture et de supervision techniqueCentre Collaborateur de l’Organisation Mondiale de la Santé pour la recherche et la for-mation en santé mentale (Lille, France) : Aude CariaPsychologue. Chargée de mission. CH St Anne, Paris Joseph Halos Directeur de l’ EPSM Lille MétropoleNicolas Daumerie Docteur Jean Luc Roelandt

Centre Collaborateur de l’Organisation Mondiale de la Santé pour la recherche et la formation en santé mentale (Genève, Suisse) :Professeur François Ferrero, Directeur

Centre Collaborateur de l’Organisation Mondiale de la Santé pour la recherche et la formation en santé mentale (Montréal, Canada) :Professeur Gaston Harnois , Directeur

Conception graphique de la version française Service Communication de l’Etablissement Public de Santé Mentale Lille MétropoleAteliers Malecot Lomme

Publié par l’Organisation Mondiale de la Santé sous le titre «Human resources and training for Mental Health » 2005

© Organisation Mondiale de la Santé 2010

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« Les ressources humaines sont ce que

les services de santé mentale ont de plus

précieux. Les services de santé mentale se

basent sur les compétences et la motiva-

tion de leur personnel pour promouvoir la

santé mentale, prévenir les troubles men-

taux et fournir des soins aux personnes

atteintes de tels troubles. »

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Table des matières

Préface XIIRésumé d’orientation 2Objectifs et public ciblé 16

1. Introduction 19

2. Ressources humaines : politique et modèles de soins 222.1 L’importance d’un cadre politique 222.2 Changer les modèles de soins 22

2.2.1 Les communautés en point de mire et la désinstitutionnalisation 222.2.2 Intégration à la santé en général 232.2.3 Approches multidisciplinaires 242.2.4 Collaboration intersectorielle 242.2.5 Changer le rôle du personnel 252.2.6 Stigmatisation 26

2.3 Évaluation 27

3. Planifier les ressources humaines pour les soins en santé mentale 283.1 Étape 1. Analyse de la situation 30

3.1.1 Tâche 1 : Contrôler la politique actuelle des RH 303.1.2 Tâche 2 : Évaluer les effectifs actuels du personnel 313.1.3 Tâche 3 : Évaluer l’utilisation des services 42

3.2 Étape 2. Évaluation des besoins 443.2.1 Tâche 1 : Estimer les besoins 453.2.2 Tâche 2 : Cartographier les services nécessaires pour les besoins identifiés : la pyramide cadre pour les services définie par l’OMS 463.2.3 Tâche 3 : Identifier le personnel nécessaire à chaque niveau de services 463.2.4 Tâche 4 : Estimer les effectifs nécessaires à chaque niveau de services 49

3.3 Étape 3. Définition des objectifs 533.3.1 Tâche 1 : Comparer les effectifs et les besoins 533.3.2 Tâche 2 : Adapter les objectifs en fonction de l’utilisation : des ressources humaines « croissantes » 54

3.4 Étape 4. Mise en œuvre 58

4. Gestion des ressources humaines 594.1 Direction, motivation et burn-out 594.2 Disponibilité de la main-d’œuvre 62

4.2.1 Recrutement et fidélisation 624.2.2 Déploiement 634.2.3 Engager des prestataires du secteur privé 644.2.4 Utiliser des non-professionnels pour les soins de santé mentale 654.2.5 Développer des partenariats avec les ONG 664.2.6 Utiliser des opportunités stratégiques pour développer les RH 67

4.3 Pratiques de travail 67

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Page 13: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

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Table des matières

5. Éducation et formation 70

5.1 Fonctions des services et exigences de formation pour obtenir un mélange optimal de services de santé mentale 71

5.1.1 Services de santé mentale communautaires informels 715.1.2 Services de santé mentale fournis par les soins de santé primaires 755.1.3 Services de santé mentale fournis par les hôpitaux généraux 785.1.4 Services de santé mentale communautaires formels 815.1.5 Établissements pour séjours de longue durée et services de santé mentale spécialisés 84

5.2 Développement des programmes d’enseignement 865.3 Éducation, formation continue et supervision 87

5.3.1 Développer une politique et un plan d’éducation et de formation continue 885.3.2 Supervision 93

5.4 Approches de formation 95

6. Conclusion 98

Annexe 1. Ressources pour les programmes de formation 99Annexe 2. Formation en santé mentale : protocole de réforme1 101Annexe 3. Exemples de pays 120

Définitions 126

Références 127

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Préface

Le présent module fait partie du Guide OMS des politiques et des services en matière de santé mentale, qui donne des informations pratiques pour aider les pays à améliorer la santé mentale de leur population.

Pourquoi ce Guide ?

Ce Guide est destiné à aider les décideurs et les planificateurs à :− concevoir des politiques et des stratégies globales d’amélioration de la santé mentale de la population ;− utiliser les ressources en place de façon à en tirer le meilleur parti possible ;− offrir des services efficaces à ceux qui en ont besoin ;− contribuer à réintégrer dans la vie de la communauté sous tous ses aspects les person-nes souffrant de troubles mentaux, et à améliorer ainsi leur qualité de vie en général.

Que contient le guide ?

Le Guide consiste en une série de modules d’emploi facile qui traitent les multiples besoins et priorités à considérer dans l’élaboration des politiques et la planification des services. Chaque module porte sur un aspect essentiel de la santé mentale.

Le Guide se compose des modules suivants :

La situation de la santé mentalePolitiques, plans et programmes de santé mentaleFinancement de la santé mentaleLégislation, droits de l’homme et santé mentaleSensibilisation à la santé mentaleOrganisation des services de santé mentalePlanification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentaleAmélioration de la qualité des services de santé mentaleAmélioration de l’accès aux médicaments psychotropes et de leur utilisation La santé mentale de l’enfant et de l’adolescentRessources humaines et formation pour la santé mentaleSystèmes d’information sur la santé mentale

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Page 15: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

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La situation

de la santé

mentale

Législation et droits de l’homme

Financement

Organisation des services

Sensibilisation

Amélioration de la qualité

Politiques et pro-grammes sur le lieu

de travail

Amélioration de l’accès aux médica-ments psychotropes

et de leur utilisation

Systèmes d’infor-mation

Ressources humai-nes et formation

La santé mentale de l’enfant et de

l’adolescent

Recherche et évaluation

Planification et bud-gétisation pour l’ offre de services

La situation de la santé mentale

À élaborer

Page 16: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Préface

Il est prévu d’inclure les modules supplémentaires suivants au Guide complet :

Les politiques et les services de santé mentale : recherche et évaluationPolitiques et programmes de santé mentale sur le lieu de travail

À qui ce guide est-il destiné ?

Les modules intéresseront :

– les décideurs et les responsables des plans sanitaires ;– les pouvoirs publics aux niveaux fédéral, national/régional et local ;– les professionnels de la santé mentale ;– les groupes qui représentent les personnes souffrant de troubles mentaux ;– les représentants des familles de malades mentaux et des soignants ou leurs associa-tions ;– les organisations de sensibilisation représentant les intérêts des personnes atteintes de troubles mentaux ainsi que leurs familles ;– les ONG qui offrent des services de santé mentale ou s’y intéressent.

Comment utiliser les modules ?

− Les modules peuvent servir séparément ou ensemble. Ils renvoient les uns aux autres pour plus de commodité. Les utilisateurs d’un pays peuvent souhaiter prendre systéma-tiquement connaissance de chacun des modules ou n’en utiliser qu’un lorsque l’accent est mis sur un domaine particulier de la santé mentale. Par exemple, ceux qui souhaitent se pencher sur la législation en matière de santé mentale pourront trouver utile le module intitulé Législation, droits de l’homme et santé mentale.

− Ils peuvent servir à la formation en matière de santé mentale des décideurs, des res-ponsables de la planification et de quiconque s’occupe de l’organisation, de la prestation et du financement des services. Ils peuvent aussi servir au niveau universitaire. Les asso-ciations professionnelles peuvent utiliser ces modules en tant qu’éléments didactiques pour la formation des personnes travaillant dans le secteur de la santé mentale.

− Ils peuvent servir de cadre aux activités de consultance technique menées par toutes sortes d’organisations internationales et nationales auprès de pays soucieux de réformer leurs politiques et/ou services de santé mentale.

− Ils peuvent aussi être des outils de sensibilisation pour les organisations de soutien des usagers et des familles et les organismes de sensibilisation. L’information qu’ils donnent éduque le public et peut stimuler l’intérêt des politiques, des faiseurs d’opinion, des divers professionnels de la santé et du grand public pour les troubles mentaux et les services de santé mentale.

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Page 17: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Présentation des modules

On trouvera clairement indiqués dans chaque module les objectifs et le public visés. Ils sont présentés de façon progressive pour faciliter l’utilisation et la mise en œuvre des conseils donnés. Il ne s’agit pas de suivre ces conseils à la lettre, ni de les interpréter de façon rigide. Les pays sont au contraire encouragés à les adapter à leurs besoins et leur situation propres. Des exemples concrets provenant de divers pays sont utilisés au fil des modules.

De nombreuses références renvoient d’un module à l’autre. Le lecteur d’un module peut amener à en consulter un autre (comme indiqué dans le texte) s’il souhaite des indications complémentaires.

Tous les modules doivent être étudiés à la lumière de la politique de l’OMS, qui est de dispenser la plupart des soins de santé mentale dans les services de santé généraux et en milieu communautaire. La santé mentale est nécessairement une question intersecto-rielle qui met en jeu les secteurs de l’éducation, de l’emploi, du logement, des services sociaux et de la justice pénale. Il est également important d’avoir des consultations avec les organisations de soutien des usagers et des familles pour élaborer les politiques et dispenser les services.

Dr Michelle Funk Dr Benedetto Saraceno

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Page 18: Ressources humaines et formation pour la santé mentale
Page 19: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

RESSOURCES HUMAINES ET

FORMATION POUR LA SANTÉ MENTALE

Page 20: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Résumé d’orientation

1. Introduction

Les ressources humaines (RH) sont ce que les services de santé mentale ont de plus précieux. De tels services se basent sur les compétences et la motivation de leur person-nel pour promouvoir la santé mentale, prévenir les troubles mentaux et fournir des soins aux personnes atteintes de tels troubles. Dans de nombreux services de santé mentale, la majeure partie du budget annuel consiste en des dépenses de personnel. Cependant, on rencontre souvent des difficultés importantes dans la planification et la formation des ressources humaines pour les soins en santé mentale.

De nombreux pays ont trop peu de personnel formé et disponible, ou ils ont des problè-mes de répartition au sein du pays ou des régions (c’est-à-dire trop peu de personnel dans les régions rurales ou trop de personnel dans les grandes institutions), les compé-tences du personnel sont parfois surannées ou inadaptées aux besoins des populations, le personnel disponible n’est pas toujours utilisé de manière adéquate, et de nombreux membres du personnel sont parfois improductifs ou démoralisés.

Les pays peuvent adopter différentes lignes de conduite pour répondre à ces difficultés :

Il convient de développer une politique adéquate des RH pour la santé mentale afin de fournir un cadre cohérent au développement de la main-d’œuvre.La politique doit être directement liée à la planification des RH, en consultation avec des directeurs de programmes de santé et des institutions de formation.Une méthode systématique est nécessaire pour calculer les effectifs requis et pour déterminer le mélange de compétences nécessaires au sein d’une organisation de services déterminée.Des stratégies de gestion adéquates sont requises pour diriger, motiver, recruter, déployer et fidéliser un personnel souvent trop peu nombreux.Il convient de contrôler et d’améliorer la formation pour le personnel du secteur de la santé mentale en fonction de pratiques fondées sur des preuves ainsi que des besoins de la population.Une fois que le personnel est qualifié, il faut développer l’éducation, la formation continue et la supervision afin de fournir des soins de grande qualité et répondant aux besoins des usagers.

Ce module a pour but de fournir un guide pratique pour chacune de ces lignes de condui-te afin d’aider les pays à développer leurs ressources humaines. En raison des différen-ces entre les pays, ce module ne peut pas fournir de normes précises (p. ex. les effectifs nécessaires par unité de population). En revanche, il fournit des outils de planification et de formation afin d’aider les pays à calculer leurs propres besoins en personnel et à for-mer leurs agents de santé et de santé mentale en fonction de leurs propres besoins.

Ces outils de planification se basent sur la pyramide cadre définie par l’OMS pour un mélange optimal de services. Ce cadre est utilisé comme modèle tout au long de ce module. Une analyse de la situation des effectifs actuels est fournie pour chaque niveau de services de la pyramide ; pour l’évaluation des besoins, ceux-ci sont établis confor-mément au cadre des services ; enfin, les exigences de formation pour chaque niveau de services sont indiquées dans la partie portant sur la formation.

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Page 21: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

2. Ressources humaines : politique et modèles de soins

2.1 L’importance d’un cadre politique

Une politique nationale claire est nécessaire pour développer les RH en santé mentale. La politique des RH doit présenter les valeurs et les objectifs sur lesquels se base le développement de la main-d’œuvre en santé mentale. Elle doit également fournir un cadre cohérent pour la planification, la formation et le développement des RH en santé mentale. Une fois un tel cadre politique en place, les pays peuvent planifier leurs RH de manière systématique. En revanche, sans un tel cadre et sans la volonté politique de sou-tenir celui-ci, les efforts sont au mieux fragmentés et les plans n’obtiennent pas le soutien politique et financier dont ils ont tant besoin. Les étapes essentielles requises pour déve-lopper une politique de santé mentale sont exposées dans le module : Politiques, plans et programmes de santé mentale. De nombreuses questions clés devant être abordées en politique des RH pour la santé mentale sont traitées ci-après.

2.2 Changer les modèles de soins

2.2.1 Les communautés en point de mire et la désinstitutionnalisation

Au cours des 50 dernières années, les soins en santé mentale ont connu des modifica-tions profondes dans de nombreux pays. Une modification essentielle a été la mise en place de soins communautaires. Du point de vue des RH, ces modifications ont eu des conséquences importantes. Elles ont nécessité :

une réaffectation de personnel du milieu hospitalier au milieu communautaire ;parmi le personnel, le développement de nouvelles compétences de travail en milieu communautaire et un nouvel accent mis sur la guérison et la rééducation en milieu hospitalier ;la formation d’une plus vaste gamme d’agents de santé mentale (pour les soins com-munautaires informels et pour les soins primaires) ;la réforme de modèles de formation correspondants, conformément aux soins s’ap-puyant sur de nouvelles preuves.

2.2.2 Intégration à la santé en général

En rapport avec ces évolutions, l’accent a de plus en plus été mis sur l’intégration de la santé mentale aux soins généraux de santé. Dans les pays en développement, qui souffrent d’une pénurie aiguë de professionnels de la santé mentale, la prestation de services de santé mentale dans le cadre des soins de santé généraux est la stratégie la plus viable si l’on veut faciliter aux populations mal desservies l’accès aux services de santé mentale. En outre, les troubles mentaux et les problèmes de santé physiques sont souvent étroitement liés et ont des interactions.

Ceci a également de nombreuses implications pour les ressources humaines, essentiel-lement les suivantes :

le personnel de santé en général doit recevoir une formation de base pour acquérir des compétences en santé mentale afin de pouvoir détecter les troubles mentaux, fournir des soins de base et recourir à des services spécialisés pour les cas complexes ;les spécialistes de la santé mentale doivent être équipés de manière à travailler en collaboration avec les agents de santé générale et ils doivent fournir un soutien et une supervision.

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3

Page 22: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

2.2.3 Approches multidisciplinaires

Le développement d’une main-d’œuvre de santé mentale nécessite la coordination de nombreuses disciplines professionnelles et non professionnelles. Le travail en équipe est une compétence de base nécessaire pour toutes les catégories d’agents de santé men-tale. Le personnel doit être en mesure de travailler :

dans différents milieux tels que communautés, établissements de soins en résidence et hôpitaux ;avec différents organismes, pour lier les usagers des services à d’autres services légaux ou autres ;avec différents modèles d’achat et d’offre de services ;dans des équipes multidisciplinaires et multi-organismes ;par-delà les niveaux de services (par exemple en assurant la liaison entre les soins primaires et les services spécialisés) ;d’une manière apte à maintenir leurs compétences et leur enthousiasme, même face à des pressions diverses et à des exigences contradictoires.

2.2.4 Collaboration intersectorielle

Outre les approches multidisciplinaires au sein du secteur de la santé, une coopération avec d’autres secteurs est souhaitable. Les personnes souffrant de troubles mentaux ont des besoins divers en rapport avec la santé, l’assistance sociale, l’emploi, la justice et l’éducation. Par conséquent, la promotion de la santé mentale au sein d’un pays couvre une vaste gamme de secteurs et d’intervenants, et n’est pas limitée aux activités du ministère de la santé.

C’est pourquoi il convient de développer la main-d’œuvre en santé mentale de manière intersectorielle, la planification des RH tenant compte des besoins en formation sur la santé mentale pour les enseignants, les travailleurs sociaux, les agents de police, le personnel des prisons et autres. La clé du développement d’une politique intersectorielle des RH est la convergence entre le gouvernement et les institutions de formation (telles que les universités) au sujet du type et du nombre d’agents de santé mentale formés. Sans cette convergence, une politique des RH est probablement vouée à l’échec. Il est important pour les pays d’établir un organisme clairement responsable de la coordination entre les nombreux secteurs impliqués dans le développement de la main-d’œuvre en santé mentale.

2.2.5 Changer le rôle du personnel

Le passage de soins hospitaliers à des soins communautaires et le nouvel accent mis sur des approches multidisciplinaires et intersectorielles signifie inévitablement que le rôle du personnel se modifie. Ceci est une question essentielle de toute réforme de la santé men-tale. Les professionnels peuvent avoir peur de perdre leur identité professionnelle, leur statut, leurs revenus, leur environnement et leur mode de travail habituels. C’est pourquoi de nombreux professionnels opposent une résistance aux réformes. Ces changements de rôles représentent un défi aussi bien pour la direction que pour les agents de santé.

Dans certains milieux, la pénurie de praticiens qualifiés a conduit à des changements de rôles concrets et imprévus. Par exemple, dans de nombreux pays en développement, bien que la législation ne l’autorise pas, les infirmières prescrivent les médicaments aux usagers des services parce qu’il n’y a pas de médecins ou parce que les rares médecins n’ont pas le temps de voir les usagers.

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2.2.6 Stigmatisation et discrimination

Les personnes souffrant de troubles mentaux font face à la stigmatisation et à la discri-mination dans tous les secteurs de la société, y compris parfois de la part des agents de santé. Il faut donc que la planification et la formation des RH abordent les questions de stigmatisation et de discrimination. Ceci doit comprendre des formations pour apprendre aux agents de santé mentale à lutter contre la stigmatisation dans leur propre secteur, au sein de la main-d’œuvre de santé et dans d’autres secteurs de la société.

2.3 Évaluation

Dans le cadre du processus de développement de la main-d’œuvre, il est important d’établir des mécanismes d’évaluation de cette main-d’œuvre. Quelles sont les interac-tions entre les principaux intervenants, les institutions, les groupes d’intérêt et les proces-sus politiques, et quels sont les effets de ces interactions ? Les services fournis sont-ils efficients, efficaces, équitables et accessibles ? En effet, le but du développement de RH pour la santé mentale n’est pas simplement de former une main-d’œuvre, mais surtout d’améliorer la santé mentale de la population desservie.

3. Planification : quelles sont les ressources humaines nécessaires pour la santé mentale ?

De combien de personnes et de quelles compétences a-t-on besoin pour fournir des ser-vices en santé mentale ? Il n’existe pas de norme absolue ou globale indiquant le nombre d’agents de santé mentale par unité de population. Les pays et les régions doivent déter-miner les effectifs nécessaires en fonction de leurs propres besoins et ressources. Cette partie fournit un guide étape par étape pour aider les pays dans cette tâche. La planification de RH a normalement une forme cyclique. Le cycle de planification commence par une analyse de la situation actuelle des RH, suivie d’une évaluation des besoins. Ensuite, on définit les objectifs sur la base des informations rassemblées lors de l’analyse de la situation et de l’évaluation des besoins. Puis, on met en œuvre les objectifs par le biais de la gestion, de la formation et de la supervision. La mise en œuvre conduit à une nouvelle analyse de la situation, les besoins et les objectifs étant réévalués en un cycle continu.

Étape 1. Analyse de la situation

Tâche 1 : Contrôler la politique actuelle des RH

Pour réussir, la planification de RH doit être marquée par la politique actuelle et ses impli-cations pour le développement des RH. La première tâche des planificateurs dans toute analyse de situation est donc de passer en revue la politique de santé mentale existante eu égard aux RH.

Tâche 2 : Évaluer les effectifs actuels du personnel

Le cadre politique actuel en tête, il faut alors évaluer les effectifs actuels du personnel de santé en général et de santé mentale en particulier : quelles sont les ressources humaines actuellement disponibles pour fournir des soins à la population dans le domaine de la santé mentale ? Pour estimer les effectifs existants dans le secteur de la santé mentale, les planificateurs doivent examiner les effectifs actuels dans toutes les disciplines et à tous les niveaux de services.

Plusieurs variables doivent être prises en considération pour estimer avec précision les effectifs actuels dans le secteur de la santé mentale :

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nombre de personnes du secteur de la santé mentale et de la santé en général actuel-lement employées dans le secteur public de la santé ;nombre de personnes du secteur de la santé mentale et de la santé en général actuel-lement non employées dans le secteur public de la santé ;immigration et émigration ;décès et retraites ;événements de la vie ;formation de nouveau personnel et pourcentage entrant dans la vie active dans le secteur de la santé mentale ;facteurs financiers, politiques et culturels ;modifications de la productivité ;compétences ;

Tâche 3 : Évaluer l’utilisation des services

Dans l’analyse de la situation, la dernière tâche est d’examiner dans quelle mesure les services de santé mentale sont actuellement utilisés. Cette information est importante pour les planificateurs car elle leur permet de voir dans quels domaines le personnel ne peut pas suffire à la demande de la population (effectifs donc insuffisants, se traduisant par exemple par des délais d’attente démesurés), et dans quels domaines le personnel est trop nombreux par rapport à la demande (sureffectifs).

Étape 2. Évaluation des besoins

L’évaluation des besoins est un élément essentiel pour compléter les données portant sur les services existants et ayant été collectées à la phase d’analyse de la situation. L’analyse de la situation fournit uniquement un ordre de grandeur de l’utilisation actuelle des services et des réserves de personnel. L’évaluation des besoins, quant à elle, permet aux planificateurs de comprendre quel type de personnel est nécessaire pour répondre aux besoins de la communauté en matière de services et de soins de santé mentale. Les besoins en santé mentale sont souvent dissimulés dans la communauté, de sorte que les services existants n’y répondent pas.

Si la planification des RH continuait à se baser uniquement sur l’offre (ce qui est fréquem-ment le cas), les modèles historiques de financement et de planification des services, et non les besoins réels de la communauté, fourniraient la base des ressources humaines. Afin d’estimer le personnel sur la base d’une évaluation des besoins, il peut être nécessaire de rassembler des informateurs clés ou un groupe d’experts, lesquels recommanderont des services ainsi que les fonctions et compétences nécessaires pour fournir ces services.

Tâche 1 : Estimer les besoins

La première tâche consiste à estimer les besoins en soins de la communauté. Pour plus de détails sur la manière d’accomplir cette tâche, voir le module : Planification et bud-gétisation pour l’offre de services de santé mentale. En résumé, les activités nécessaires sont les suivantes :

(i) Établir la prévalence ou l’incidence des affections mentales prioritaires. Ces affec-tions doivent être identifiées dans la politique existante ou dans le plan stratégique existant. Ou encore, dans le cas de la promotion de la santé mentale, identifier le groupe cible devant faire l’objet du programme de promotion de la santé men-tale.

(ii) Lorsque cela s’avère nécessaire, faire des rectifications selon les variables de la population locale.

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(iii) Identifier le nombre de cas attendus (ou le nombre de personnes cibles dans le cas d’un programme de promotion de la santé mentale) par an.

Tâche 2 : Cartographier les services nécessaires pour les besoins identifiés : la pyramide cadre pour les services définie par l’OMS.

À partir des besoins estimés dans le domaine de la santé mentale, il est possible d’es-timer les services requis pour répondre à ces besoins. Il est important de déterminer quels sont les services nécessaires et comment ils doivent être organisés en esquissant le profil des services dans lesquels le personnel doit être placé. La pyramide cadre pour l’organisation des services définie par l’OMS peut servir de modèle pour déterminer quels services doivent être fournis à chaque niveau.

Tâche 3 : Identifier le personnel nécessaire à chaque niveau de services.

La tâche suivante consiste à identifier le type de personnel nécessaire à chaque niveau de services. Pour planifier systématiquement pour tous les services de santé mentale, il faut identifier les fonctions et les compétences requises pour chaque niveau de service représenté dans la pyramide cadre de l’OMS. En bref, il faut déterminer quelles fonctions sont nécessaires pour chaque service proposé, et comment le personnel doit être équipé pour remplir ces fonctions.

Tâche 4 : Estimer les effectifs nécessaire à chaque niveau de services.

En se basant sur une large esquisse des fonctions, des compétences et des types de personnel nécessaires à chaque niveau de services, on peut alors estimer le nombre de personnes. Les besoins identifiés à la tâche 1 peuvent être convertis en charge de travail en estimant le nombre de personnes qui utiliseront les services de santé mentale néces-saires pendant une période déterminée. Une fois que la charge de travail attendue a été identifiée, les effectifs nécessaires peuvent être calculés.

Étape 3. Définition des objectifs

Tâche 1 : Comparer les effectifs et les besoins

Après avoir calculé les effectifs actuels et estimé les besoins en effectifs, il est possible de définir les objectifs. Pour définir les objectifs, il faut comparer les deux blocs d’infor-mations qui ont été collectés auparavant (à savoir les effectifs et les besoins). Il y a deux méthodes permettant d’effectuer cette comparaison : calcul de différence et taux.

Tâche 2 : Adapter les objectifs en fonction de l’utilisation : des ressources humaines « croissantes »

Lors de la comparaison entre les effectifs et les besoins, il est probable qu’un fossé important apparaîtra entre les effectifs actuellement disponibles et l’estimation du per-sonnel nécessaire pour répondre aux besoins de la population. Il se peut également que les estimations des effectifs basées sur l’évaluation des besoins ne correspondent pas à l’utilisation réelle des services. Par conséquent, il est décisif d’avoir une méthode permettant de classer les objectifs en tenant compte de l’utilisation des services et des nécessités budgétaires. La méthode proposée à cet effet dans le module Planification et budgétisation est d’éta-blir une liste d’options et de définir des priorités selon certains critères. Une aide sup-plémentaire peut être fournie aux planificateurs sous la forme de mesures de l’utilisation des services, ce qui permet de rectifier les objectifs annuels d’effectifs. Sur cette base, un classement des objectifs peut être défini en fonction des budgets disponibles et de

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l’utilisation des services, le but général étant de développer des ressources humaines qui répondent aux besoins de la population.

Après avoir calculé la différence entre les effectifs actuels et les besoins, et défini des priorités pour le développement des RH à la lumière de la politique actuelle, de l’utilisation des services et des budgets disponibles, il convient d’adopter une ligne de conduite spé-cifique. Celle-ci peut être orientée soit vers les effectifs disponibles, soit vers les besoins en effectifs.

Pour ce qui est d’une main-d’œuvre « croissante », il est important de se rappeler qu’il ne s’agira peut-être pas simplement d’augmenter le nombre de personnes, mais aussi de redistribuer le personnel existant et de développer de nouvelles compétences. Par exem-ple, si l’on veut passer de modèles institutionnalisés à des modèles communautaires, il se peut que la main-d’œuvre existante ait besoin d’une formation complémentaire. Il ne faut pas partir du principe que les compétences nécessaires seront les mêmes.

Étape 4. Mise en œuvre

Une fois que les objectifs en matière de personnel ont été définis, leur mise en œuvre nécessite une gestion et une formation efficaces des ressources humaines. Ces domai-nes seront abordés séparément (parties 4 et 5) afin de mieux les souligner.

4. Gestion des ressources humaines

4.1 Direction, motivation et burn-out

Diriger suppose la capacité à cultiver une vision et des valeurs partagées par d’autres, à lancer et encadrer des activités au sein d’un groupe ou d’une organisation et à inspirer et conserver la confiance. Cette fonction est tout aussi importante en santé mentale que dans n’importe quel autre domaine des services de santé. Une direction disposant d’une formation officielle est rare dans les systèmes de santé, et de nombreuses personnes ayant un potentiel de direction ne sont ni formées, ni expérimentées.

On a besoin de personnel motivé, et ce pour des raisons financières, cliniques et huma-nitaires. Une main-d’œuvre motivée est plus rentable car plus efficiente (plus de travail accompli pour le même prix) et plus efficace (le travail accompli donne de meilleurs résultats pour les usagers des services). Un personnel motivé a plus de chances d’être satisfait de son travail, de garder son poste et donc de créer une plus grande stabilité à long terme pour les services.

Le moral du personnel et le burn-out sont des sujets importants pour la planification de services de santé mentale. Le burn-out est un problème qui touche en particulier le personnel dans le secteur de la santé mentale en raison de facteurs spécifiques à ce domaine. Néanmoins, pour de nombreuses personnes, le stress causé par le travail dans le secteur de la santé mentale peut être un défi intéressant et gratifiant car les cliniciens voient les progrès accomplis par leurs patients et par l’efficacité des services. 4.2 Disponibilité de la main-d’œuvre

4.2.1 Recrutement et fidélisation

Un aspect essentiel de la gestion des RH est la capacité d’un service à attirer du per-sonnel qualifié et à garder ces personnes de manière durable. On peut esquisser trois principales stratégies :

attirer et fidéliser •

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diriger et inspirerappuyer et soutenir

4.2.2 Déploiement

Un problème récurrent de la gestion des RH dans les services de santé mentale est le déploiement de personnel dans des régions du pays reculées, rurales ou peu appréciées pour une raison ou pour une autre. Diverses incitations sont utilisées pour encourager le déploiement de personnel dans ces régions où les besoins sont souvent importants. Il s’agit par exemple d’incitations légales, professionnelles, financières, d’éducation ou de gestion.

4.2.3 Engager des prestataires du secteur privé

Les planificateurs des RH dans le secteur de la santé mentale doivent développer une politique en relation avec les prestataires du secteur privé. Dans bien des pays, les limi-tes entre le secteur « public » et le secteur « privé » sont de plus en plus floues. Ceci est vrai de la manière dont les services sont financés, de la manière dont ils sont utilisés et de la manière dont les prestataires travaillent. Par conséquent, il est primordial pour les planificateurs des RH et les décideurs du secteur public de développer une approche pragmatique et complète, ayant pour but de construire des partenariats entre des sec-teurs officiellement appelés « public » et « privé ».

4.2.4 Utiliser des non-professionnels pour les soins de santé mentale

Dans les années 1960 et 1970, une tendance à utiliser des non-professionnels pour dis-penser les soins de santé mentale est apparue, tendance appelée déprofessionnalisation. Les non-professionnels fournissent souvent des soins efficaces parce qu’ils connaissent mieux la communauté, la langue et les coutumes. Bien souvent, les usagers des services s’identifient plus facilement à eux pour former des alliances thérapeutiques. Il est impor-tant d’assurer que les intervenants non-professionnels aient des compétences adéqua-tes, et que des professionnels puissent être consultés en cas de besoin, par exemple pour s’occuper de cas complexes, fournir une supervision et une consultation de liaison. Si on veut former et employer de la main-d’œuvre non-professionnelle, des consultations avec le personnel professionnel sont nécessaires afin d’éviter le sentiment que le person-nel non-professionnel mine le personnel professionnel, fait baisser le niveau des soins et sert de main-d’œuvre à bon marché.

4.2.5 Développer des partenariats avec les organisations non-gouvernementales

Les organisations non-gouvernementales (ONG) jouent souvent un rôle important dans la promotion de la santé mentale, la prévention et le traitement. Pour les planificateurs des RH en santé mentale, les ONG peuvent fournir des ressources utiles en termes de compétences et de connaissances pour la formation et la supervision du personnel dans le secteur public, pour le conseil en planification de services et pour la liaison sur diffé-rents aspects de l’offre de services (p. ex. services dans le domaine des traumatismes). Cependant, les ONG doivent être régulées pour ce qui est de leurs pratiques de travail et des services qu’elles fournissent. 4.2.6 Utiliser des opportunités stratégiques pour développer les RH

Le développement des RH est généralement un processus politique complexe qui a besoin d’opportunités stratégiques pour développer la santé mentale. Des innovations récentes dans le développement des RH en santé mentale illustrent le besoin de s’adap-ter stratégiquement aux préoccupations politiques actuelles.

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4.3 Pratiques de travail

Les pratiques de travail pour les agents de santé mentale doivent être conformes à la législation en vigueur et aux règlements valables pour le reste du secteur de la santé et pour la population générale d’un pays. Lors du développement de toutes pratiques de travail, les droits des agents de santé mentale doivent être respectés. Par exemple, une parité doit être établie entre les salaires et les conditions de travail des agents de santé mentale et des autres agents de santé.

5. Éducation et formation

L’éducation et la formation du personnel du secteur de la santé mentale doivent découler logiquement des objectifs définis lors de la planification des RH. La formation en santé mentale doit avoir pour but de servir les besoins en santé mentale d’une société en produisant du personnel en mesure de délivrer des soins de manière compétente et en accord avec les objectifs de la politique et de la planification des RH.

Ceci suppose une coordination et le développement de politiques cohérentes entre le secteur qui fournit les soins et le secteur qui fournit la formation. Dans de nombreux pays, ceci implique une étroite collaboration entre les départements de l’éducation et de la santé. Les principales institutions de formation doivent participer activement à la four-niture des soins en santé mentale dans tous les milieux (communautés, établissements de soins en résidence, hôpitaux). Bref, il faut un partenariat ouvert et constructif entre les planificateurs et les prestataires de formations.

Par conséquent, cette partie utilise la pyramide pour l’organisation des services définie par l’OMS en tant que cadre pour examiner l’éducation et la formation des ressources humaines. La formation doit être étroitement liée aux niveaux de services, à leurs fonc-tions et aux compétences requises pour dispenser tout service. Pour chaque niveau de la pyramide, cette partie décrit :

les fonctions du niveau de servicesles compétences requises pour les différents agents de santé et de santé mentale.

5.1 Fonctions des services et exigences de formation pour obtenir un mélange optimal de services de santé mentale

5.1.1 Services de santé mentale communautaires informels

Les membres des communautés locales qui ne sont pas des professionnels de la santé ou de la santé mentale fournissent divers services. Exemples de personnes travaillant à ce niveau d’offre de services : bénévoles profanes, agents communautaires, personnel des organi-sations de sensibilisation, coordinateurs de groupes d’entraide/d’usagers, agents de l’aide humanitaire, tradipraticiens, autres professionnels tels qu’enseignants et agents de police.

(i) Fonctions

Il est important de souligner que les personnes fournissant des services de santé mentale communautaires informels ne sauraient former le cœur des prestations de santé mentale. Les pays seraient mal avisés de dépendre uniquement de leurs services. Cependant, ces personnes peuvent compléter les services officiels de santé mentale et constituer des alliés précieux. Quelques fonctions importantes remplies par les services informels :

soins de soutien y compris conseil et entraide

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aide pour des activités de la vie quotidienne et pour la réintégration à la communautésensibilisation aux droits des personnes souffrant de troubles mentauxservices de prévention et de promotion de la santésoutien pratiquesoutien de criseidentification de problèmes de santé mentale et recours à des services de santé.

(ii) Compétences requises

Par définition, les membres des communautés locales impliqués dans les soins commu-nautaires informels ne sont pas censés avoir une formation officielle en santé mentale. En outre, comme ils constituent un groupe hétérogène, il n’est pas possible de définir des critères de compétences minimales qui seraient obligatoires. Il serait plus utile de réflé-chir à des compétences discrètes permettant à ces personnes de fournir une aide plus efficace aux personnes souffrant de troubles mentaux dans la communauté.

Quelques compétences utiles :

une compréhension de base des troubles mentauxdes compétences de conseil de baseune aptitude à sensibiliser.

5.1.2 Services de santé mentale fournis par les soins de santé primaires

Pour les pays disposant de RH limitées dans le domaine de la santé mentale, le fait de fournir les services de santé mentale par le biais des soins de santé primaires est l’une des voies les plus efficaces et viables pour améliorer l’accès aux soins de santé mentale. Les professionnels travaillant à ce niveau sont par exemple les médecins généralistes, les infirmières en soins généraux, les sages-femmes, les aides-soignants et les agents de santé communautaires.

(i) Fonctions

identification des troubles mentauxfourniture de médicaments de base et d’interventions psychosocialesrecours à des services spécialisés de santé mentalepsychopédagogie familiale et communautaireintervention de criseprévention des troubles mentaux et promotion de la santé mentale.

(ii) Compétences requises

diagnostic et traitement des troubles mentauxconseil, soutien et psychopédagogiesensibilisationintervention de crisepromotion de la santé mentale et prévention des troubles mentaux.

5.1.3 Services de santé mentale fournis par les hôpitaux généraux

L’intégration des services de santé mentale aux services de santé généraux suppose obligatoirement l’intégration de ces services dans les hôpitaux généraux. Ainsi, ceux-ci peuvent fournir des soins secondaires aux patients des communautés et des services à ceux qui sont admis pour des troubles physiques mais ont également besoin d’inter-ventions de santé mentale. En outre, ils offrent une excellente possibilité de réduire la stigmatisation qui découle du fait d’aller se faire soigner en « asile de fous ».

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Quelques exemples de professionnels travaillant à ce niveau : médecins hospitaliers s’in-téressant particulièrement à la psychiatrie, psychiatres hospitaliers, infirmières en soins généraux travaillant dans des services de soins généraux ou de soins psychiatriques, infirmières en psychiatrie travaillant dans des services de psychiatrie, psychiatres et/ou infirmières en psychiatrie fournissant des services de consultation de liaison, travailleurs sociaux généraux et travailleurs sociaux en psychiatrie, ergothérapeutes, psychologues et autres agents de santé hospitaliers (p. ex. aides-soignants).

(i) Fonctions

soins de santé mentale et traitement des patients hospitalisés et ambulatoiresservices de consultation de liaison avec d’autres secteurs médicauxéducation et formationlien avec les soins de santé primaires et tertiairesrecherche.

(ii) Compétences requises

diagnostic et traitementformation et supervisionsensibilisationconnaissance de la législation en rapport avec la santé mentaleadministration et gestionrecherche.

5.1.4 Services de santé mentale communautaires formels

Les services de santé mentale communautaires formels couvrent une vaste gamme de milieux et différents niveaux de soins fournis par des professionnels et para-profession-nels de la santé mentale. Il s’agit par exemple de services de rééducation communautai-res, de programmes hospitaliers de réorientation, d’équipes de crise mobiles, de services supervisés thérapeutiques et en établissements de soins en résidence, de services d’aide et de soutien à domicile. Quelques exemples de professionnels travaillant à ce niveau : psychiatres, infirmières communautaires en psychiatrie, psychologues, travailleurs sociaux en psychiatrie, ergothérapeutes et agents communautaires en psychiatrie.

(i) Fonctions

rééducation et traitement communautairesservices en établissements de soins en résidenceservices d’intervention de criseéducation et formationcoopération avec d’autres prestataires de services communautaires et hospitaliersrecherche.

(ii) Compétences requises

diagnostic et traitementformation et supervisionconnaissance de la législation correspondante, y compris législation relative à la santé mentalesensibilisation et négociationadministration et gestionrecherche.

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5.1.5 Établissements pour séjours de longue durée et services de santé mentale spécialisés

Il s’agit généralement d’établissements hospitaliers spécialisés proposant divers services dans des unités en hôpital et dans des milieux cliniques ambulatoires spécialisés. Il s’agit par exemple d’établissements de séjour de longue durée, d’unités de moyenne et haute sécurité, d’unités spécialisées pour le traitement de certains troubles et pour la rééduca-tion correspondante (p. ex. unités de troubles des conduites alimentaires), de cliniques ou d’unités spécialisées dans certains groupes de population (p. ex. enfants et adoles-cents, personnes âgées), et d’unités de soins de répit. Il est important de se rappeler que de telles unités spécialisées ne sont pas les fournisseurs de soins de premier recours ; elles sont généralement des centres de recours pour les soins tertiaires. Il ne faut pas les confondre avec les « asiles de fous » surannés de type carcéral.

Quelques exemples de professionnels travaillant à ce niveau : psychiatres, infirmières en santé mentale, psychologues, travailleurs sociaux en psychiatrie et ergothérapeutes, généralement spécialisés dans les services fournis, p. ex. médecine légale, enfants et adolescents ou troubles des conduites alimentaires.

(i) Fonctions

Les fonctions exactes de ces services dépendent du domaine de spécialisation ; ainsi, les professionnels travaillant dans un institut médico-légal auront des fonctions et des rôles très différents de ceux travaillant dans une unité pour les enfants et les adolescents. C’est pourquoi il est difficile d’énumérer une liste de fonctions communes. Disons simplement que les fonctions de ces services comprennent presque toutes les fonctions des servi-ces de santé mentale des hôpitaux généraux et des services communautaires, plus les fonctions spécifiques à la spécialisation du service en question.

(ii) Compétences requises

Les professionnels travaillant à ce niveau d’offre de services doivent avoir des compé-tences spécialisées dans leur domaine particulier, p. ex. médecine légale ou santé des enfants et des adolescents. En outre, ils doivent avoir des compétences décrites aux niveaux précédents, par exemple : connaissance de la législation correspondante, com-pétences pédagogiques, compétences d’administration et de gestion, compétences de sensibilisation, compétences de recherche.

Tous les professionnels travaillant à ces différents niveaux spécialisés n’ont pas besoin d’avoir toutes les compétences susmentionnées. Par exemple, les psychiatres légistes peuvent avoir des compétences de prescription de médicaments ou de détermination de l’aptitude à passer en jugement. Les psychologues légaux, quant à eux, peuvent avoir des compétences en évaluation du risque et gestion de la colère.

5.2 Développement des programmes d’enseignement

Dans de nombreux pays, il faudra modifier les programmes d’enseignement et de formation en santé mentale pour atteindre les objectifs de formation. Il y a souvent un décalage, les pratiques cliniques évoluant plus vite que les cours de formation, dont les programmes ont tendance à changer plus lentement. Il est donc nécessaire de mettre à jour les programmes lorsqu’ils sont surannés ou ne coïncident plus avec les nouveaux modèles de soins communautaires. Pour répondre à ce décalage, il faut prévoir une for-mation fondée sur des preuves afin de préparer de manière aussi adéquate et efficiente que possible des agents compétents pour fournir les services de santé mentale. Une formation fondée sur les preuves signifie que la formation doit être réalisée sur la base des meilleures preuves disponibles relatives à une certaine pratique ou intervention, par exemple l’utilisation des médicaments et interventions psychosociales les plus rentables

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ou le développement de soins communautaires. Les trois principes essentiels du développement de programmes d’enseignement sont les suivants :

évaluer la formation actuellement fournieévaluer les besoins futurs pour lesquels une formation est dispenséedéfinir des objectifs pour transformer la formation actuelle conformément aux besoins futurs.

5.3 Éducation, formation continue et supervision

L’éducation et la formation continue sont dans l’intérêt, aussi bien des services de santé mentale que du personnel. Pour les services, elles assurent des soins modernes, confor-mes aux preuves disponibles pour les interventions les plus efficaces. Pour les membres du personnel, elles assurent que leur travail reste intéressant et que leur vie profes-sionnelle puisse suivre une trajectoire d’évolution professionnelle au fil de leur carrière. L’apprentissage tout au long de la vie est essentiel au maintien de l’aptitude pratique et a un impact important sur la qualité du travail et la sécurité des patients.

Pour que l’éducation et la formation continue fonctionnent efficacement, tous les ser-vices de santé mentale doivent développer une politique solide et un plan efficace de développement du personnel. La première étape de développement de l’éducation et de la formation continue consiste à établir les principes qui sous-tendent le développement du personnel ainsi qu’un plan de mise en œuvre. Le plan d’éducation et de formation continue doit couvrir :

un relevé des besoins en formation pour le personnel existantdes objectifs pour les programmes de formation spécifiquesune supervision.

La supervision comprend des qualités de gestion, de direction et le transfert d’informa-tions techniques. Le but de la supervision est de promouvoir une amélioration perma-nente des soins dispensés par les agents de santé mentale. Toute personne impliquée dans la fourniture de soins de santé mentale doit participer à une supervision régulière. La supervision est un processus continu, réalisé dans toute une gamme de milieux de santé mentale.

5.4 Approches de formation

Les évolutions récentes de la formation dans le domaine de la santé mentale montrent un déplacement des méthodes traditionnelles didactiques ou sous forme de cours magistral vers des méthodes d’apprentissage actives, orientées vers les problématiques et cen-trées sur les étudiants. Ceci implique des modifications dans l’orientation des formations orientées vers les résultats, des possibilités d’apprentissage multidisciplinaires et une approche des études de santé mentale intégrée et orientée vers le système, comprenant également des éléments bio-psychosociaux.

Les réformes de la formation en santé mentale doivent donc se tenir au fait de ces évolu-tions et des preuves relatives à la rentabilité des méthodes de formation. Le choix d’une méthode spécifique dépend des objectifs de la formation, du matériel de formation, des élèves, de l’environnement et des ressources disponibles.

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6. Conclusion

Ce module fournit des directives pour le développement d’une politique, la planification, la gestion et la formation des RH. Il s’adresse à des pays disposant de différents scé-narios de ressources – de ceux ayant des services de santé mentale minimaux jusqu’à ceux ayant des services relativement bien équipés en ressources. Au bout du compte, les outils présentés dans ce module doivent être adaptés aux circonstances et besoins particuliers du pays concerné. Quelles que soient les ressources disponibles, les services de santé mentale doivent développer une perspective à long terme en investissant dans ce qui est leur atout majeur : le personnel.

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Objectifs et public ciblé

Ce module a pour but de :

fournir un guide pratique pour la planification, la gestion et la formation des personnes travaillant dans le secteur de la santé mentale d’un pays ou d’une région ;aider les pays à planifier leur main-d’œuvre d’une manière appropriée à leurs propres besoins dans le domaine de la santé mentale.

Le public ciblé comprend :

les décideursles planificateursles responsables de la gestion des ressources humainesles éducateurs et formateurs en santéles prestataires de servicesles agents de santé mentaleles agents de santé généraleles prestataires informels de services de santéles usagers des servicesles familles des usagers des servicesles groupes de sensibilisation.

Ampleur du module

Ce module fournit un guide pratique sur des sujets clés de la politique, de la planifica-tion et de la formation pour les ressources humaines (RH), ainsi que des exemples de différents pays à titre d’illustration. Ce module n’est pas censé être suivi à la lettre ou de manière rigide ; il s’agit plutôt de l’adapter en fonction du contexte unique de chaque sys-tème de soins national ou régional. Une planification des ressources humaines utilisant les méthodes proposées dans ce module doit être comprise au sein du cadre politique et des plans stratégiques s’appliquant au système de soins dans son ensemble. Pour optimiser le soutien politique et administratif, il convient d’aligner la planification des RH sur ce cadre plus vaste.

Dans un domaine aussi complexe que les RH pour la santé mentale, il n’est pas réaliste de chercher à fournir un guide précis pour tous les aspects. Lorsque des informations plus détaillées sont nécessaires, le lecteur est renvoyé à d’autres ouvrages cités dans le texte. Les domaines suivants ne sont pas couverts par ce module :

Guide spécifique sur la sensibilisation et la pression pour la santé mentale, p. ex. straté-gies pour convaincre les administrateurs de la santé que la formation en santé mentale est importante et nécessaire. Une aide à l’argumentation en faveur de la santé mentale est fournie, mais les stratégies spécifiques pour la pression et les tâches politiques sont couvertes en détail dans d’autres modules du Guide de l’OMS, à savoir dans Sensibilisation à la santé mentale, Politiques, plans et programmes de santé mentale et Planification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentale.Analyse des mécanismes actuels de planification et de budgétisation, y compris le processus de transformation des plans en réalités budgétaires. Cet aspect est abordé de manière relativement détaillée dans le module Planification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentale.Formules de calcul des coûts des ressources humaines, lesquelles sont abordées dans le module Planification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentale.Contenus détaillés de programmes de formation en santé mentale (p. ex. programmes de formation en santé mentale pour les infirmières en soins primaires).

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Ce module fournit en revanche des méthodes grâce auxquelles les pays peuvent évaluer leurs propres besoins en formation et élaborer leurs propres programmes. Les domai-nes abordés contiennent des principes généraux de formation en santé mentale, des compétences clés souhaitables aux différents niveaux de service, ainsi que l’éducation, la formation continue et la supervision. Des ressources pouvant être utilisées pour les programmes de formation sont indiquées en annexe, ainsi que des directives de réforme des institutions de formation.

En cas de questions spécifiques auxquelles ce module ne répondrait pas de manière exhaustive, ou si une assistance technique est nécessaire pour appliquer l’une des sug-gestions aux circonstances spécifiques d’un pays, nous suggérons de prendre contact avec l’OMS (cf. page ii pour les détails de contact).

Ce module est destiné à être utilisé conjointement avec d’autres modules du Guide OMS des politiques et des services de santé mentale. Ces modules fournissent un cadre éventuellement nécessaire pour de plus vastes réformes de la politique et des services. Il est fréquemment fait référence à ces autres modules au fil du texte. Les modules sont disponibles à l’adresse Internet suivante : http://www.who.int/mental_health/policy/en/.

Qui doit prendre la responsabilité de la planification des RH pour la santé mentale ?

Ceci dépend des caractéristiques organisationnelles spécifiques du ministère de la santé (ou organisation gouvernementale équivalente) ainsi que de la taille de la région ou du pays à desservir. Dans un district local, au moins une personne, de préférence une équipe de deux ou trois, doit assumer la responsabilité de cette planification. Ces personnes doivent assurer la liaison avec toute une gamme d’autres intervenants tout au long de cette entreprise. Pour une région ou un pays plus vaste, on aura besoin d’une équipe plus nombreuse. Cependant, il est important qu’une équipe désignée assume la responsabilité et la direction de ce processus de planification. Ce rôle de direction peut exiger la coordination de plusieurs secteurs différents. Des compétences de collecte d’informations, de consultation, de gestion, de planification et de rédaction de rapports seront également nécessaires.

En outre, l’établissement d’un lien fonctionnel entre le ministère de la santé, lequel est responsable de la planification des RH, et les responsables de la formation contribuera à assurer que les formations répondent aux besoins politiques identifiés, que les pro-grammes de formations soient durables et que la formation en santé mentale soit liée à d’autres programmes de formation dans des secteurs de santé autres que mentale.

Quelle est la durée nécessaire pour mettre en œuvre les étapes suggérées dans ce module ?

Ceci dépend de la disponibilité des informations nécessaires à la planification, de l’am-pleur du processus de consultation entrepris, et de l’ampleur du développement (p. ex. la planification est-elle destinée à un pays, à une région ou à un service de santé mentale isolé ; est-elle destinée à tous les agents de santé mentale ou à un seul groupe professionnel ?). On peut estimer que les trois premières étapes du cycle de planification tel qu’il est décrit dans ce module (analyse de la situation, évaluation des besoins et définition des objectifs) prendront 6 à 12 mois. La quatrième étape (mise en œuvre) est un processus continu, l’évaluation initiale peut avoir lieu au bout d’un an, mais des modi-fications importantes prendront probablement entre trois et cinq ans. La planification des ressources humaines doit adopter une perspective à long terme, vu le temps qu’il faut pour former une personne. Par exemple, dans certains pays, il y a trois horizons de pla-nification différents – 10 ans, 5 ans et 3 ans – et un plan opérationnel annuel. Les délais doivent être adaptés aux cycles de planification du pays.

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1. Introduction

Les ressources humaines (RH) sont ce que les services de santé mentale ont de plus pré-cieux. Dans de nombreux services de santé mentale, la majeure partie du budget annuel consiste en dépenses de personnel (Thornicroft & Tansella, 1999). Les services de santé mentale se basent sur les compétences et la motivation de leur personnel pour promou-voir la santé mentale, prévenir les troubles mentaux et fournir des soins aux personnes atteintes de tels troubles.

Cependant, on rencontre souvent des difficultés importantes dans la planification et la formation du personnel pour les soins en santé mentale. De nombreux pays ont peu de RH formées et disponibles et sont souvent confrontés à des problèmes de répartition au sein du pays ou de régions (c’est-à-dire trop peu de personnel dans les régions rurales ou trop de personnel dans les grandes institutions). En outre, les compétences du personnel sont parfois surannées ou ne répondent pas aux besoins de la population. De plus, le personnel disponible n’est pas toujours utilisé de manière adéquate et le personnel est souvent improductif ou démoralisé.

Comment se fait-il que la planification des RH soit si mauvaise ? Ceci a plusieurs raisons, notamment : l’absence d’un organisme adéquat responsable de cette planification ; l’absence de compétences et de ressources pour la planification des RH ; l’absence de données précises ou utilisables pour la planification ; les longues périodes de formation pour le personnel (de sorte que la décision de former plus de personnel met du temps à avoir un impact sur les services) ; les coûts élevés de formation des professionnels en santé mentale ; des institutions de formation éloignées des services et des besoins de la population ; le sentiment des autorités de santé générales que la santé mentale n’est pas une priorité ; la stigmatisation frappant le travail dans le secteur de la santé mentale ; dans certains pays en développement, la migration des personnes qualifiées en santé mentale vers les pays développés (« brain drain ») ; des attitudes professionnelles de nature à entraver certains aspects du développement des RH (Green, 1999).

Les pays peuvent adopter différentes lignes de conduite pour répondre à ces difficultés :

Développer une politique adéquate pour les ressources humaines en santé mentale de manière à fournir un cadre cohérent pour le développement de la main-d’œuvre.Lier directement la politique à la planification des RH, en consultation avec des direc-teurs de programmes de santé et des institutions de formation.Utiliser une méthode systématique pour calculer combien de professionnels de santé mentale sont nécessaires et quel mélange de compétences est requis au sein d’une organisation déterminée de services.Adopter des stratégies de gestion adéquates pour diriger, motiver, recruter, déployer et fidéliser un personnel souvent trop peu nombreux.Contrôler la formation pour le personnel du secteur de la santé mentale et amélio-rer cette formation en fonction de pratiques fondées sur des preuves ainsi que des besoins de la population.Une fois que le personnel est qualifié, développer l’éducation, la formation continue et la supervision afin de fournir des soins de grande qualité et répondant aux besoins des usagers.

Ce module a pour but de fournir un guide pratique pour chacune de ces lignes de conduite. En raison des différences entre les pays, ce module ne peut pas proposer de normes spécifiques (p. ex. les effectifs nécessaires par unité de population). En revanche, il fournit des outils de planification et de formation destinés à aider les pays à calculer leurs propres besoins en personnel et à former les agents de santé mentale conformé-ment à leurs besoins spécifiques.

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Les ressources humaines sont ce que les services de santé mentale ont de plus précieux...

…Cependant, on rencontre souvent des difficultés importantes dans la plani-fication et la formation du personnel.

Les pays peuvent adop-ter différentes lignes de conduite pour répondre à ces difficultés.

Ce module a pour but de fournir un guide pratique pour la planification et la formation des ressources humaines en santé mentale.

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La planification des RH pour la santé mentale doit être entreprise au sein d’un cadre de services clairement défini.

Dans certains pays, il se peut que le modèle de soins en santé mentale doive être fon-damentalement réévalué. Dans de nombreux pays, en particulier dans les pays en déve-loppement, la planification des RH se base encore sur un modèle post-colonial suranné des soins en santé mentale. Par conséquent, le modèle de soins doit être modifié en même temps que l’on aborde la formation des RH en santé mentale et les priorités de planification.

L’encadré 1 fournit une liste de recommandations de l’OMS pour les pays dans le domaine de la santé mentale.

Encadré 1. Dix recommandations pour la santé mentale (OMS, 2001a)

1. Traiter les troubles au niveau des soins primaires2. Assurer la disponibilité des psychotropes3. Soigner au sein de la communauté4. Éduquer le grand public5. Associer les communautés, les familles et les usagers6. Adopter des politiques, des programmes et une législation au niveau national7. Développer les ressources humaines8. Établir des liens avec d’autres secteurs9. Surveiller la santé mentale des communautés10. Soutenir la recherche

Il est important de disposer d’un cadre clairement défini pour organiser des services de santé mentale basés sur ces recommandations. L’OMS a élaboré un cadre sous forme d’une pyramide (figure 1) qui illustre un mélange optimal de services. Les servi-ces prédominants doivent être la gestion de l’entraide, les services de santé mentale communautaires informels et les services de santé mentale communautaires fournis par le personnel de soins primaires. Ensuite, on doit trouver les services psychiatriques en place dans les hôpitaux généraux, les services de santé mentale communautaires formels et enfin les services de santé mentale spécialisés. L’accent mis sur la fourniture de soins de santé mentale par le biais de services basés dans les hôpitaux généraux ou de services communautaires doit être déterminé par les forces du système de santé (ou de santé mentale) existant ainsi que par des variables culturelles et socio-économiques. Ce module n’aborde pas la question de l’entraide, le développement de la main-d’œu-vre commençant au niveau des soins communautaires informels pour se poursuivre en montant dans la pyramide.

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L’OMS a élaboré un cadre illustrant un mélange opti-mal de services de santé mentale.

La pyramide cadre de l’OMS est utilisée comme modèle tout au long de ce module.

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Entraide

Soins communautaires informels

Services de santé mentale fournis par les soins de santé primaires

Établissements pour séjours

de longue durée et services spécialisés

Services communautaires

de santé mentale

Services psychiatriques dans les hôpitaux généraux

QUANTITÉ DE SERVICES NÉCESSAIRE

FRÉ

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EN

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S

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ÛT

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bas

élevé

élevé

bas

Figure 1. Mélange optimal de services de santé mentale : la pyramide cadre défi-nie par l’OMS

Cette pyramide cadre de l’OMS est utilisée comme modèle tout au long de ce module. L’analyse de la situation du personnel actuellement disponible est située à chaque niveau de services de la pyramide. Pour l’évaluation des besoins, les besoins en personnel sont considérés en termes de cadre de services, tandis que les exigences de formation pour chaque niveau de services sont décrites dans la partie portant sur la formation. Pour plus de détails sur chacun de ces niveaux de services et sur les soins nécessaires, voir le module Organisation des services de santé mentale.

Points essentiels : Introduction

Les ressources humaines sont ce que les services de santé mentale ont de plus précieux.Cependant, on rencontre souvent des difficultés importantes dans la planification et la formation des ressources humaines pour les soins en santé mentale.Les pays peuvent adopter différentes lignes de conduite pour répondre à ces difficultés :– développer une politique des RH pour la santé mentale– planifier les RH en se basant sur la politique et les besoins en services– développer des stratégies de gestion adéquates– former le personnel conformément à la politique et aux objectifs de planification– mettre en place une éducation, une formation continue et une supervisionCe module a pour but de fournir un guide pratique pour chacune de ces lignes de conduite afin d’aider les pays à développer leurs ressources humaines pour la santé mentale.Pour utiliser ce module, il est important de disposer d’un cadre clair pour l’organisa-tion des services de santé mentale. La pyramide cadre de l’OMS sur l’organisation des services en santé mentale est utilisée tout au long de ce module comme modèle pour la planification des RH et la formation.

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2. Ressources humaines : politique et modèles de soins

2.1 L’importance d’un cadre politique

Une politique nationale claire est nécessaire pour développer des RH en santé mentale. Une politique des RH doit définir les valeurs et les objectifs sur lesquels se base le déve-loppement de la main-d’œuvre en santé mentale. Elle doit également fournir un cadre cohérent au sein duquel le pays peut planifier, former et développer ses ressources humaines pour la santé mentale. En outre, elle doit fournir un outil assurant la trans-parence et encourager l’amélioration permanente de la qualité des soins. Un tel cadre politique étant en place, un pays peut alors planifier ses RH de manière systématique. En revanche, en l’absence d’un tel cadre et de la volonté politique de le soutenir, les efforts seront au mieux fragmentés et les plans n’obtiendront pas le soutien politique et financier dont ils ont tant besoin.

La politique de l’OMS sur les ressources humaines pour la santé mentale est clairement formulée (OMS, 2001a) :

Les pays doivent développer une main-d’œuvre capable de fournir des interventions de promotion de la santé mentale, de prévention, de traitement et de réinsertion fon-dées sur des preuves.Le personnel doit être équipé de manière à pouvoir fournir des services communau-taires intégrés aux soins de santé générale.Il faut renforcer et améliorer les programmes de formation, aussi bien pour les agents de santé mentale spécialisés que pour les agents de santé générale, et ce à tous les niveaux de services.Les professionnels de différentes disciplines doivent travailler au sein d’équipes com-munes afin de fournir des soins homogènes pour les multiples besoins des personnes souffrant de troubles mentaux.Le développement des ressources humaines et la formation doivent aborder le pro-blème de la stigmatisation en santé mentale et faire respecter les droits des person-nes souffrant de troubles mentaux.

Cette orientation politique forme la base de la planification des RH et de la formation. Il convient que les pays adaptent cette politique à leurs propres circonstances et besoins. Par exemple, certains pays peuvent aborder la politique des RH pour la santé mentale en tant que partie d’une politique des RH plus large pour le système de santé dans son ensemble. D’autres pays peuvent souhaiter aborder les RH en tant que partie de leur politique de santé mentale.

Les étapes essentielles requises pour développer une politique de santé mentale sont exposées dans le module Politiques, plans et programmes de santé mentale, disponible à l’adresse : www.who.int/mental_health/resources/en/Policy_plans.pdf.

De nombreuses questions clés devant être abordées en politique des RH pour la santé mentale sont traitées ci-après.

2.2 Changer les modèles de soins

2.2.1 Les communautés en point de mire et la désinstitutionnalisation

Au cours des 50 dernières années, les soins en santé mentale ont connu des modifica-tions profondes dans de nombreux pays. Une modification essentielle a été la mise en place de soins communautaires. Ceci a essentiellement été rendu possible par des inno-

Pour planifier efficacement les RH, il faut poser les bases sous forme d’une politique adéquate.

L’OMS a clairement formulé sa politique sur les RH pour la santé mentale.

Cette orientation politique forme la base de la pla-nification des RH et de la formation.

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vations dans le secteur des interventions thérapeutiques, ce qui a permis aux personnes souffrant de troubles mentaux de recevoir des soins rentables au sein des communautés. En outre, la croissance du mouvement pour les droits de l’homme a attiré l’attention sur des violations graves de droits fondamentaux, y compris violations des droits des per-sonnes souffrant de troubles mentaux dans les « asiles de fous ». La recherche a de plus montré que les asiles ont peu d’effet thérapeutique, et qu’ils exacerbent même parfois les troubles mentaux. Le discrédit dans lequel des considérations humanitaires et cliniques ont fait tomber les asiles de fous a conduit à réduire le nombre de patients chroniques dans les hôpitaux psychiatriques, à dégraisser ou fermer certains hôpitaux, et à dévelop-per des services de santé mentale communautaires pour les remplacer, processus connu sous le nom de désinstitutionnalisation.

Ce passage à des soins communautaires a eu lieu de différentes manières selon les pays. Cependant, on entend souvent dire que dans les pays développés, la fermeture des institutions ne s’est pas accompagnée du développement de services communau-taires appropriés (OMS, 2001a). Dans les pays en développement, les services de santé mentale ont dû se débattre avec les asiles hérités de la période coloniale et fournissant peu de services (OMS, 2003).

Du point de vue des RH, ces modifications ont eu des conséquences importantes. En particulier :

le personnel a dû être réaffecté des milieux hospitaliers aux milieux communautaires ;le personnel a dû développer de nouvelles compétences pour le travail en milieu communautaire ;le personnel a dû développer de nouvelles compétences de promotion de la guérison et de la rééducation en milieu hospitalier ;il a fallu développer un plus large éventail d’agents de santé mentale (pour les soins communautaires informels et pour les soins primaires) ;les modèles de formation correspondants ont nécessité des réformes, conformément aux soins nouveaux, s’appuyant sur des preuves.

2.2.2 Intégration à la santé en général

En rapport avec ces évolutions, l’accent a de plus en plus été mis sur l’intégration des soins de santé mentale aux soins de santé généraux. Dans les pays en développement, qui souffrent d’une pénurie aiguë de professionnels de la santé mentale, la prestation de services de santé mentale dans le cadre des soins de santé généraux est la stratégie la plus viable si l’on veut faciliter aux populations mal desservies l’accès aux services de santé mentale. En outre, les troubles mentaux et les problèmes de santé physiques sont souvent étroitement liés et ont des interactions. Par exemple, les personnes atteintes de troubles mentaux courants comme la dépression et l’anxiété se présentent souvent aux services de soins de santé généraux avec des symptômes somatiques.

Un service intégré encourage le diagnostic précoce et le traitement des troubles mentaux et réduit ainsi les incapacités. Ceci fait aussi reculer la stigmatisation qui frappe ceux qui cherchent de l’aide auprès de services de santé mentale indépendants. D’autres avanta-ges potentiels sont par exemple la possibilité de fournir des soins au sein de la commu-nauté, ou la possibilité d’implication de la communauté dans les soins (OMS, 2003).

Le fait d’intégrer les services a de nombreuses conséquences pour le développement des RH, notamment :

Le personnel de santé en général doit recevoir une formation de base pour acquérir des compétences en santé mentale afin de pouvoir dépister les troubles mentaux, fournir des soins de base et recourir à des services spécialisés pour les cas complexes.

••

Au cours des 50 dernières années, les soins en santé mentale ont connu des modifications profondes en direction de soins commu-nautaires.

Ce processus a eu lieu de différentes manières selon les pays.

Le passage aux soins communautaires a diverses conséquences pour les res-sources humaines.

Les services de santé men-tale sont de plus en plus souvent intégrés aux soins de santé généraux.

Cette intégration requiert une formation adéquate pour le personnel général et les spécialistes.

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Page 42: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Les spécialistes de santé mentale ont besoin de formation pour travailler en coopération avec les agents de santé générale, ainsi que pour leur fournir supervision et soutien.

Il y a différents modèles qui intègrent les services de santé mentale dans les soins de santé généraux. Ceci est présenté plus en détails dans le module Organisation des ser-vices de santé mentale.

2.2.3 Approches multidisciplinaires

Le développement d’une main-d’œuvre de santé mentale nécessite la coordination de diverses disciplines professionnelles et non professionnelles. Les personnes souffrant de troubles mentaux ayant des besoins divers, il est important que les agents de santé men-tale travaillent en équipes ou, tout au moins, soient en contact permanent et consultent d’autres spécialistes de la santé mentale. Un élément essentiel de la formation consiste donc à encourager ce travail en équipe, ceci étant une compétence fondamentale requise pour toutes les catégories d’agents de santé mentale.

Le personnel doit être disposé à travailler :

dans différents milieux tels que communautés, établissements de soins en résidence et hôpitaux ;avec différents organismes, pour lier les usagers des services à d’autres services légaux ou autres ;avec différents modèles d’achat et d’offre de services ;dans des équipes multidisciplinaires et multi-organismes ;par-delà les niveaux de services (par exemple en assurant la liaison entre les soins primaires et les services spécialisés) ;d’une manière apte à maintenir leurs compétences et leur enthousiasme, face à des pressions diverses et à des exigences contradictoires. (The Sainsbury Centre for Mental Health, 1997)

Les disciplines doivent se recouper suffisamment pour permettre une communication sur des préoccupations communes de santé mentale, mais ne pas se recouper tant qu’il y ait des doublons dans les rôles ou des rivalités entre les groupes professionnels. Certaines compétences de traitement peuvent être assez facilement partagées entre les disciplines traditionnelles, mais pas toutes.

Les planificateurs peuvent aborder cette question clé en planifiant les besoins en forma-tion de manière complète, selon le mélange de compétences requis, plutôt que de plani-fier séparément pour chaque discipline. Ceci requiert une communication ouverte entre les différentes disciplines (p. ex. psychiatres et psychologues, infirmières et ergothéra-peutes) pour la conception des programmes de formation. Les disciplines spécifiques doivent comprendre clairement le rôle des autres disciplines apparentées.

Le contact avec d’autres disciplines pendant les programmes de formation est aussi un élément qui favorise la coopération entre les disciplines. Par exemple, les psychologues cliniciens doivent être au courant du rôle joué par l’ergothérapeute ou le psychiatre. Une éthique de travail en équipe et un style de travail multidisciplinaire doivent être soulignés pour toutes les disciplines.

2.2.4 Collaboration intersectorielle

Outre les approches multidisciplinaires au sein du secteur de la santé, on a besoin éga-lement d’une coopération avec d’autres secteurs. Les personnes souffrant de troubles mentaux ont des besoins divers en rapport avec la santé, l’assistance sociale, l’emploi, la justice et l’éducation. Par conséquent, la promotion de la santé mentale au sein d’un

•••

Le développement d’une main-d’œuvre de santé men-tale nécessite une approche multidisciplinaire.

La politique des RH doit être développée de manière intersectorielle. Elle doit inclure des plans destinés à fournir une formation en santé mentale aux ensei-gnants, aux travailleurs sociaux, aux agents de police et aux gardiens de prisons.

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Page 43: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

pays doit couvrir une vaste gamme de secteurs et d’ intervenants, et non être limitée aux activités du ministère de la santé.

C’est pourquoi il convient de développer la main-d’œuvre de santé mentale de manière intersectorielle. Ceci doit comprendre des plans destinés à fournir une formation en santé mentale aux enseignants, aux travailleurs sociaux, aux agents de police et aux gardiens de prisons. Par exemple, il est essentiel de former le personnel de « premier contact » des écoles, de la police et des prisons aux soins primaires de santé mentale car il y a de grandes chances que ce personnel entre en contact avec des personnes atteintes de troubles mentaux.

De plus, si le personnel de premier contact est suffisamment formé, les soins décentrali-sés seront plus faciles à mettre en œuvre et à gérer. Pour soutenir ce personnel, on aura besoin d’un réseau de traitement sensible (ou système de consultation de liaison). Par exemple, à la suite d’une initiative à Trinité-et-Tobago, le personnel de premier contact a introduit un programme dans l’une des prisons du pays (Rampersad Parasram, Ministère de la Santé, Port of Spain, Trinité-et-Tobago, communication personnelle).

L’une des clés du développement d’une politique des RH intersectorielle est l’accord entre le gouvernement et les institutions de formation (universités p. ex.) sur le type et le nombre d’agents de santé mentale qu’il faut former. De plus, les décideurs doivent être conscients des conflits d’intérêts potentiels et des tensions qui peuvent apparaître entre les différents intervenants (institutions de formation, ministère de la santé, prestataires privés, organismes de financement des soins). Par exemple, les soins de santé privés étant en pleine expansion dans de nombreux pays, il se peut que les universités aient ten-dance à former les professionnels de la santé mentale dans l’optique de cabinets privés en milieu urbain. En même temps, il se peut au contraire que la politique du ministère de la santé nécessite du personnel formé à fournir des soins de santé mentale communau-taires dans des régions rurales reculées.

C’est pourquoi il est important pour les pays d’établir un organisme clairement respon-sable de la coordination entre les nombreux secteurs impliqués dans le développement de la main-d’œuvre en santé mentale. Un tel organisme doit représenter toute la gamme d’intervenants concernés par le développement des RH et la formation. Par exemple, en Slovénie en 2002, l’Association Slovène de Santé Mentale (SENT) et l’agence du gouver-nement pour les malades et les handicapés ont organisé une conférence sur la réinsertion psychosociale communautaire, ce qui a débouché sur la mise en place d’un organisme de planification – le Conseil national pour la santé mentale. Cet organisme se compose d’un groupe d’experts en psychiatrie et médecine générale ainsi que de représentants des ministères de la santé, de l’éducation et du travail, de représentants des ONG, de représentants des usagers et des soignants. Ce groupe a lancé sous sa responsabi-lité une réforme de la santé mentale en Slovénie (Vesna Svab, Présidente, Association Slovène de Santé Mentale (SENT), Ljubljana, Slovénie, communication personnelle).

Certains pays n’ont pas forcément d’institution d’enseignement pouvant participer à la coordination intersectorielle. Dans ce cas, un groupe de formation en santé mentale peut être mis en place au sein du ministère de la santé pour remplir cette fonction. Par exemple, à Grenade, un tel groupe de formation a été établi au sein du ministère, sous la direction générale du ministre de la santé et du secrétaire permanent (Stan Kutcher, Co-doyen, Centre de Recherche Clinique, Université Dalhousie, Halifax, Nouvelle-Écosse, Canada, communication personnelle).

2.2.5 Changer le rôle du personnel

Le passage de soins hospitaliers à des soins communautaires et le nouvel accent mis sur des approches multidisciplinaires et intersectorielles signifie inévitablement que le rôle du

Il faut aborder les conflits potentiels entre différents intervenants.

Il est important pour les pays d’établir un organisme clairement responsable de la coordination entre les nom-breux secteurs impliqués dans le développement de la main-d’œuvre en santé mentale.

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Page 44: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

personnel se modifie. Ceci est une question essentielle de toute réforme de la santé men-tale. Les professionnels peuvent avoir peur de perdre leur identité professionnelle, leur statut, leurs revenus, leur environnement et leur mode de travail habituels. C’est pourquoi de nombreux professionnels opposent une résistance aux réformes.

Ces changements de rôles représentent un défi aussi bien pour la direction que pour les agents de santé. Pour la direction, le défi consiste à entrer activement en communication avec les agents de santé, à écouter ce dont ils ont besoin et à présenter les arguments en faveur d’une réforme des services et de nouvelles méthodes fondées sur des preuves. Pour les agents de santé, le défi consiste à développer de nouvelles compétences en milieu communautaire, à travailler de manière souple avec d’autres disciplines et au-delà des secteurs classiques, à accepter le changement comme une chance d’apprentissage et de développement personnel et professionnel. Ces questions sont abordées plus en détail dans la partie 4 ci-dessous, portant sur la gestion des RH.

Dans certains milieux, la pénurie de praticiens qualifiés a conduit à des changements de rôles concrets et imprévus. Dans de nombreux pays en développement, bien que la législa-tion ne l’autorise pas, les infirmières prescrivent les médicaments aux usagers des services parce qu’il n’y a pas de médecins ou parce que les rares médecins n’ont pas le temps de voir les usagers. Dans d’autres milieux, les infirmières communautaires formées prescrivent non seulement les médicaments, mais en assurent aussi le contrôle (Stan Kutcher, com-munication personnelle). Dans certains États des États-Unis, les infirmières ont le droit de prescrire des médicaments de manière autonome (Ivey, Scheffler & Zazzali, 1998).

Les pays doivent développer des normes réalistes pour gérer la manière dont les ordonnances sont délivrées. Si nécessaire, ils doivent également introduire une loi en la matière. Du fait que les médicaments psychotropes peuvent avoir des effets secondaires importants, dans certains cas même être mortels, il faut attacher une grande attention à la formation adéquate des personnes qui, à part les médecins, sont autorisées à prescrire des médicaments. Il est important d’assurer que le nombre croissant d’infirmières qui rédigent des ordonnances et remplissent d’autres rôles de premier plan reçoivent une formation initiale adaptée, une formation continue, ainsi que des possibilités de consulter et de recourir à des médecins ou autres prestataires de santé.

Un exemple de gestion réussie de cette question est le Ghana, où les infirmières formées sont habilitées à prescrire certains types de médicaments. Ceci a été approuvé par les médecins des régions où il y a peu de spécialistes qualifiés. Des éléments essentiels de cette démarche sont la formation dispensée à ces infirmières et leur habilitation officielle (J.B. Asare, Directeur en Santé Mentale, Ministère de la Santé, Accra, Ghana, communi-cation personnelle).

2.2.6 Stigmatisation

Les personnes souffrant de troubles mentaux font face à la stigmatisation et à la discrimi-nation dans tous les secteurs de la société, y compris de la part des agents de santé. Il faut donc que la planification et la formation des RH abordent les questions de stigmatisation et de discrimination. Ceci doit comprendre des formations pour apprendre aux agents de santé mentale à lutter contre leurs propres tendances à stigmatiser, ainsi que contre celles d’autres membres de la main-d’œuvre de la santé et d’autres secteurs de la société.

Par exemple, une enquête nationale parmi les usagers et les soignants réalisée en Australie par le groupe de sensibilisation SANE a révélé que l’attitude irrespectueuse des professionnels de la santé mentale était un problème majeur. L’une des raisons était peut-être que bon nombre de membres du personnel avaient été formés dans de grands hôpitaux psychiatriques où de nombreuses personnes étaient atteintes de maladies chro-niques graves et étaient traitées comme des « cas » plutôt que comme des personnes

Les modifications des modèles de soins signifient que le rôle du personnel change.

Une politique claire est requise au sujet du droit à délivrer des ordonnances pour des groupes profes-sionnels spécifiques.

Les personnes souffrant de troubles mentaux font face à la stigmatisation et à la discrimination dans tous les secteurs de la société, y compris de la part des agents de santé.

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Page 45: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

ayant le droit d’être respectées. Un aspect essentiel de la formation est d’aborder les attitudes des membres du personnel pour obtenir qu’ils traitent les personnes atteintes de troubles mentaux véritablement comme des êtres humains dignes du même respect que les autres. Il faut également faire prendre conscience au personnel des normes internationales et locales des droits de l’homme en rapport avec la santé mentale (voir le module Législation, droits de l’homme et santé mentale).

La stigmatisation est une question particulièrement importante pour le personnel qui ne travaille pas dans le secteur de la santé mentale (médecins généralistes, infirmières, agents de police, travailleurs sociaux). Bien souvent, ils sont le premier contact pour les personnes atteintes de troubles mentaux dans les services de santé généraux. Des attitudes qui stig-matisent les personnes atteintes de troubles mentaux à ce niveau critique de services peu-vent représenter des obstacles qui les empêchent d’obtenir les soins dont ils ont besoin.

2.3 Évaluation

Dans le cadre du processus de développement de la main-d’œuvre, il est important d’établir des mécanismes d’évaluation de cette main-d’œuvre. Quelles sont les inte-ractions entre les principaux intervenants, les institutions, les groupes d’intérêt et les processus politiques, et quels sont les effets de ces interactions ? Les services fournis sont-ils efficients, efficaces, équitables et accessibles ? (voir le module Les politiques et les services de santé mentale : recherche et évaluation) En effet, le but du développement de RH pour la santé mentale n’est pas simplement de former une main-d’œuvre, mais surtout d’améliorer la santé mentale de la population desservie.

La partie suivante porte sur la planification des RH et doit être lue dans le contexte des orientations politiques correspondantes du pays. La planification n’a pas lieu dans le vide, elle est généralement conditionnée par des considérations politiques et économiques. Par exemple, une évaluation des effectifs existants et nécessaires est toujours marquée par le contexte politique et par les préoccupations du gouvernement ou de l’organisme de planification responsable du développement dans le secteur de la santé mentale. Le plan des RH doit se baser sur la plate-forme de fourniture des services et sur les lots de soins devant être délivrés à chaque niveau. C’est dans ce cadre que les outils de planifi-cation présentés à la partie 3 ont été élaborés.

Points essentiels : Questions de ressources humaines pour la santé mentale

Une politique nationale claire est nécessaire pour développer des RH en santé mentale.Au cours des 50 dernières années, les soins en santé mentale ont connu des modifi-cations profondes, principalement en direction de soins communautaires.Les services de santé mentale sont de plus en plus souvent intégrés aux soins de santé généraux.Ces modifications ont nécessité une réaffectation de personnel des milieux hospita-liers aux milieux communautaires, une modification du rôle du personnel et de nou-velles compétences.De plus en plus souvent, les agents de santé doivent travailler dans des milieux mul-tidisciplinaires.Leur travail englobe également plusieurs secteurs, par exemple la santé, l’éducation, la justice, le logement et les services sociaux.Les modifications du rôle du personnel représentent un défi pour la direction et pour les agents de santé (ceux-ci doivent p. ex. être formés à prescrire des médicaments).La planification et la formation doivent aborder le problème de la stigmatisation et de la discrimination.L’évaluation doit faire partie intégrante de la politique des RH, de la planification et de la formation.

••

Il faut développer des méthodes permettant d’éva-luer la mise en œuvre de la politique des RH.

La planification n’a pas lieu dans le vide ; elle doit tenir compte de l’environnement politique.

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Page 46: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

3. Planifi er les ressources humaines pour les soins en santé mentale

De combien de personnes et de quelles compétences a-t-on besoin pour fournir des services en santé mentale ? Il n’existe pas de norme absolue ou globale indiquant le nombre d’agents de santé mentale nécessaires par unité de population (Egger, Lipson & Adams, 2000). Les pays et les régions doivent déterminer et planifier les effectifs qu’ils considèrent nécessaires en fonction de leurs propres besoins et ressources. Cette partie fournit un guide étape par étape pour aider les pays dans cette tâche.

La planification des RH a normalement une forme cyclique (figure 2). Le cycle de planifi-cation commence par une analyse de la situation actuelle des RH. Ensuite, une évaluation des besoins a lieu. Enfin, des objectifs sont définis sur la base des informations collectées lors de l’analyse de la situation et de l’évaluation des besoins. Ces objectifs sont mis en œuvre par le biais de la gestion, de la formation et de la supervision. La mise en œuvre conduit à une nouvelle analyse de la situation, les besoins et les objectifs étant réévalués en un cycle continu.

Figure 2. Le cycle de planification des RH : étapes de planification des ressour-ces humaines pour les services de santé mentale

Cette partie présente des outils destinés à aider les pays à planifier les RH conformément à leurs besoins spécifiques.

La planification des RH a une forme cyclique.

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Étape 1.

Analyse de la situation

Étape 2.

Évaluation des besoins

Étape 4.

Mise en œuvre

Étape 3.

Définition des objectifs

Page 47: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Avant de continuer étape par étape, il convient de clarifier certains concepts clés du cycle de planification.

Étape 1. Analyse de la situation

L’objectif de l’analyse de la situation est de déterminer les effectifs actuels du personnel (c’est-à-dire les ressources humaines actuellement disponibles pour dispenser des soins de santé mentale à la population). D’autres informations devant être réunies à ce stade concernent la politique actuelle dans le domaine de la santé mentale, l’organisation des services de santé mentale et leur taux d’utilisation. Toutes ces informations ont un impact non négligeable sur la situation actuelle de la main-d’œuvre et doivent donc faire partie de l’analyse de la situation.

Étape 2. Évaluation des besoins

L’objectif de l’évaluation des besoins est de déterminer quels sont les besoins en per-sonnel par rapport à la population générale. Quel type de personnel est nécessaire pour soigner le nombre de personnes dont on estime qu’elles sont atteintes de troubles mentaux dans la population ? Par le passé, la planification des RH pour les services de santé généraux a utilisé une méthode d’« offre et demande » (Green, 1999, Shipp, 1998). Ceci implique une estimation des effectifs actuels et une comparaison avec la demande en personnel (définie par le besoin de soins exprimés dans une population donnée), et la recherche de moyens de répondre à la différence entre l’offre et la demande.

Cependant, en planification pour la santé mentale, la méthode de l’offre et de la demande ne peut pas répondre de manière adéquate aux besoins de la population car de nom-breux besoins en santé mentale sont invisibles. Par exemple, les personnes déprimées ont rarement conscience d’être déprimées et consultent rarement un service de santé mentale pour se faire soigner (Goldberg & Gater, 1996). Plus souvent, ces personnes ont peur de faire appel à des services de santé mentale en raison de la stigmatisation liée à ces services. Ou encore, elles consultent des services de santé généraux pour des affec-tions somatiques, ou adoptent des comportements dangereux ou anti-sociaux. Un autre exemple est celui des besoins des jeunes mères juste après l’accouchement. D’après des enquêtes épidémiologiques (mesures des besoins), il semble que 10% des accouchées souffrent d’une dépression du post-partum (« baby blues »). Ceci étant mal compris par la population en général, elles s’adressent rarement au personnel de santé et leur situation n’est souvent pas diagnostiquée (elles ne « demandent » pas de services). Une mesure de la demande est donc inadéquate à elle seule. C’est pourquoi l’évaluation des besoins est une composante essentielle de la planification des RH pour la santé mentale.

Étape 3. Définition des objectifs

Sur la base des informations collectées à l’étape 1 (situation actuelle) et à l’étape 2 (éva-luation des besoins), on définit des priorités et des objectifs. Ces objectifs doivent être adaptés à la lumière des contraintes budgétaires et de l’utilisation des services de santé mentale. Les objectifs sont donc basés sur différentes informations, y compris la politique actuelle, les effectifs, l’utilisation et les besoins. Au bout du compte, la planification se base sur ces multiples sources d’information.

Étape 4. Mise en œuvre

La mise en œuvre de la politique et des objectifs de planification a alors lieu par le biais de la gestion des RH et de la formation. En raison de l’importance de ces thématiques, la gestion des RH est décrite en détail dans la partie 4, qui porte sur la gestion des res-sources humaines, et dans la partie 5, qui porte sur la formation.

Un certain nombre de concepts clés du cycle de planification doivent être clarifiés.

En planification pour la santé mentale, la méthode de l’of-fre et de la demande ne peut pas répondre de manière adéquate aux besoins de la population car de nombreux besoins en santé mentale sont invisibles.

Les objectifs doivent être marqués par la politique, l’offre, la demande et les besoins.

29

Page 48: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Cette méthode peut être utilisée pour planifier les ressources humaines dans différents milieux – pas seulement au sein des services de santé. Par exemple, on peut utiliser cette méthode pour calculer le nombre d’enseignants ou d’agents de police nécessaires pour le conseil et la promotion de la santé mentale. Ceci est particulièrement important parce qu’en général, tout un éventail d’organismes et de secteurs dispensent des services de santé mentale. Il est donc nécessaire de planifier de manière systématique et coordonnée pour tous ces secteurs.

Comment naviguer dans le cycle de planification :

Dans le coin supérieur droit de chaque page, un petit symbole avec un angle coloré vous indique où vous vous trouvez dans le cycle de planification. Par exemple :

vous indique que vous êtes à l’étape 1.

Ces étapes n’ont pas besoin d’être respectées de manière stricte ; les pays peuvent les adapter et en modifier l’ordre en fonction de leurs propres besoins et priorités. Par exemple, pour certains pays, il peut être important de réaliser une évaluation des besoins (étape 2) avant d’étudier la situation actuelle (étape 1). Il convient de souligner que la planification est un processus continu et de longue durée. Les pays peuvent commencer leur processus de planification et de réformes sans obligatoirement passer par chaque étape de ce module.

3.1 Étape 1. Analyse de la situation

3.1.1 Tâche 1 : Contrôler la politique actuelle des RH

Pour être efficace, la planification des RH doit être conforme à la politique actuelle (Egger, Lipson & Adams, 2000). La première tâche des planificateurs dans toute analyse de situation est donc de passer en revue la politique de santé mentale existante et ses implications pour le développement des RH.

À titre indicatif, ceci peut nécessiter de répondre aux questions suivantes :

Quelle est la politique nationale actuelle dans le domaine de la santé mentale ?Y a-t-il d’autres politiques en rapport avec la planification des RH pour la santé men-tale ?Quelles sont les implications de la politique actuelle pour le développement des RH ?Quelles stratégies ont le plus de chances de réussir à la lumière de la politique actuelle ?Quels sont les facteurs de nature à faciliter le développement des RH pour la santé mentale ?

En intégrant la politique actuelle dans la planification stratégique, les plans ont de meilleu-res chances d’obtenir le soutien politique et financier dont ils ont besoin pour atteindre leurs objectifs. En outre, une planification n’ayant pas conscience des questions politi-ques clés risque de déboucher sur une main-d’œuvre coupée de la politique actuelle.

En Afrique du Sud, suite à la publication de la nouvelle politique de santé mentale en 1997 (Département de la Santé, 1997), le Département national de la Santé a commencé à analyser les ressources en services de santé mentale existantes (y compris le personnel disponible) dans toutes les provinces (Lund & Flisher, 2002a; 2002b). Le but de cette ana-lyse était de réformer les services de santé mentale et de développer de vastes soins de

••

••

Ces étapes n’ont pas besoin d’être respectées de manière stricte ; les pays peuvent les adapter en fonction de leurs propres besoins et priorités.

La première tâche des pla-nificateurs est de s’informer de la politique actuelle et de ses implications pour le développement des RH.

30

Page 49: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

santé mentale communautaires en accord avec la nouvelle politique. Cet exemple illustre une analyse de situation clairement en concordance avec une réforme politique.

3.1.2 Tâche 2 : Évaluer les effectifs actuels du personnel

Le cadre politique existant en tête, on passera à la tâche suivante qui est d’évaluer les effectifs disponibles, tant dans les soins en santé mentale que dans les soins généraux (car les agents de santé généraux peuvent passer une partie de leur temps à fournir des soins de santé mentale au sein d’un service intégré). En d’autres termes, quelles sont les ressources humaines actuellement disponibles pour fournir à la population des soins en santé mentale ?

Un évaluation des effectifs actuels requiert de passer en revue les effectifs dans toutes les disciplines et à tous les niveaux de services. Dans ce contexte, il est important de connaître l’organisation des services.

La pyramide cadre de l’OMS, décrite dans l’introduction de ce module, peut servir de modèle pour cartographier les effectifs actuels (figure 3). La large perspective des effectifs fournie par ce cadre permet d’identifier les pénuries à des niveaux de services spécifiques. Ainsi, les lacunes actuelles dans la fourniture des services apparaissent rapidement.

Figure 3. Évaluation des effectifs actuels à tous les niveaux de services

La prochaine tâche consiste à identifier les ressources humaines actuellement dis-ponibles.

La pyramide cadre de l’OMS peut servir de modèle pour cartographier les effectifs actuels.

31

Entraide

Soins communautaires informels

Services de santé mentale fournis par les soins de santé primaires

Services communautaires de santé mentale

Services psychiatriques dans les hôpitaux généraux

Combien de personnel disposant de quelles compétences est dispo-nible à chaque niveau de services ?

Établissements pour séjours

de longue durée et services spécialisés

Page 50: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Variables ayant une influence sur les effectifs disponibles : Combien d’agents de santé et ayant quelles compétences ?

Les effectifs disponibles à chacun des niveaux de services indiqués ci-dessus dépendent de différentes variables (illustrées à la figure 4). Chacune de ces variables doit être ana-lysée pour permettre une évaluation précise des effectifs actuellement disponibles dans le secteur de la santé mentale.

Figure 4. Variables ayant une influence sur les effectifs disponibles dans le sec-teur de la santé mentale et de la santé générale

Plusieurs variables condi-tionnent les effectifs dispo-nibles dans le domaine de la santé mentale.

32

Événements de la vie

Départs en retraite

Immigration

Emigration

Nombre actuel d’agents

employés dans le sec-

teur de santé publique

X

productivité et compé-

tences

Facteurs financiers, politiques

et culturels

Personnel de santé mentale et de santé générale travaillant

dans d’autres secteurs ou au chômage

Décès

Formation

Source : d’après Green, 1999.

Page 51: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

(i) Personnel du secteur de la santé mentale et de la santé en général actuellement employé dans le secteur public de la santé

Les renseignements sur le personnel actuellement employé dans le secteur public de la santé sont généralement accessibles dans les rapports des services de santé ou les registres du personnel. Dans le cas contraire, une solution à court terme consiste à réaliser une enquête sur le personnel dans le secteur de la santé mentale et de la santé générale. À plus long terme, des systèmes d’information relatifs au personnel doivent être développés pour permettre une surveillance continue des effectifs employés.

Dans bien des cas, les services de santé mentale ne sont pas dispensés par des spé-cialistes (psychiatres et infirmières spécialisées), mais par des agents de santé générale, qui ne passent éventuellement qu’une partie de leur temps à traiter les troubles mentaux. Dans d’autres cas, il se peut que le personnel de santé mentale travaille à temps partiel. Par conséquent, il convient de faire le compte des effectifs en équivalent temps plein (ETP). Cette méthode permet de compter le nombre de personnes disponibles pour four-nir des services de santé mentale à temps plein. Par exemple, si une infirmière en soins de santé primaires passe 20% de son temps à dispenser des soins de santé mentale (y compris le temps passé en consultation avec les usagers des services, à remplir des dossiers, à rédiger des rapports et en supervision), elle représente alors 0,2 agent de santé mentale ETP. En d’autres termes, cinq agents de ce type pourraient être considérés comme un agent de santé mentale ETP.

L’évaluation du nombre d’agents de santé générale ETP qui dispensent des services de santé mentale est importante car le personnel de santé générale peut dispenser de nom-breux services de santé mentale. Par exemple, un agent de santé communautaire peut recevoir une formation en santé mentale pour identifier les cas, évaluer les urgences et réaliser un suivi des cas chroniques. Dans de nombreux pays, cette approche peut être très utile parce qu’elle intègre les soins de santé mentale au système de soins primaires et qu’elle est rentable. En outre, on manque généralement de personnel spécialisé en santé mentale.

(ii) Personnel du secteur de la santé mentale et de la santé en général actuellement non employé dans le secteur public de la santé

Un autre élément important est le nombre d’agents de santé mentale et de santé générale qui ne sont actuellement pas employés dans le secteur public de la santé. Il s’agit-là de deux groupes :

ceux actuellement employés dans d’autres secteurs, p. ex. le secteur privé, les ONG, les services sociaux, l’éducation, l’armée et la police ;ceux qui ne sont actuellement pas employés dans le métier qu’ils ont appris (p. ex. une infirmière en psychiatrie diplômée travaillant dans l’informatique).

Pour prévoir les glissements probables à l’avenir vers le secteur public de la santé et hors de celui-ci, il est utile d’observer les modèles du passé. Ces modèles peuvent changer avec le temps, en fonction de facteurs tels que les salaires, les conditions de travail, les normes de soins et la formation.

(iii) Immigration et émigration

L’immigration et l’émigration peuvent être des considérations importantes pour la plani-fication des RH. Dans de nombreux pays, les agents de santé mentale quittent le pays pour travailler ailleurs, attirés par de meilleurs salaires ou de meilleures conditions de travail et de vie. Pour évaluer les effectifs actuellement disponibles et les tendances pro-bables pour l’avenir, les planificateurs doivent établir combien de membres du personnel

Les renseignements sur le personnel actuellement employé dans le secteur public de la santé sont géné-ralement accessibles dans les rapports des services de santé ou les registres du personnel.

Un autre élément important est le nombre d’agents de santé mentale et de santé générale qui ne sont actuel-lement pas employés dans le secteur public de la santé.

Dans de nombreux pays, les agents de santé men-tale quittent le pays pour travailler ailleurs, attirés par de meilleurs salaires ou de meilleures conditions de travail et de vie. Pour la planification et la forma-tion futures, il est utile de comprendre les facteurs qui influencent ces tendances.

33

Page 52: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

immigrent et émigrent chaque année. Pour la planification et la formation futures, il est utile de comprendre les facteurs qui influencent ces tendances. Par exemple, le Conseil International des Infirmières a entrepris une vaste étude sur les migrations des infirmières. Celle-ci a identifié des facteurs qui « poussent » et des facteurs qui « tirent », influençant les mouvements des infirmières. Les facteurs qui poussent sont par exemple des rému-nérations et des conditions de travail médiocres, l’impact du VIH/sida sur le système de santé de certains pays, et le manque de sécurité personnelle dans les pays en conflit ou économiquement instables. Les facteurs qui tirent sont par exemple de meilleures rémunérations ainsi que de meilleures conditions de travail et de vie (Buchan, Parkin & Sochalski, 2003).

(iv) Décès et retraites

La perte de personnel en raison de décès et de départs en retraite est prévisible sur la base de données passées et du profil d’âge du personnel. Cependant, il est important de rassembler régulièrement des données précises car des changements risquent de se produire. Par exemple, au Royaume-Uni, supposant un niveau de départs en retraite raisonnable et un nombre raisonnable de jeunes entrant dans les écoles d’infirmières, on pourrait supposer que le profil d’âge reste relativement stable. Or, ce n’est pas le cas. L’âge moyen d’une infirmière travaillant dans le service national de santé (NHS) est actuellement d’environ 40 ans, alors qu’il y a 10 ans, il était d’environ 30 ans. La moitié des infirmières du Royaume-Uni ont maintenant plus de 40 ans et 25% ont plus de 50 ans (Malcolm Philip, Sainsbury Centre for Mental Health, Royaume-Uni, communication personnelle). Dans certains pays, le VIH/sida a eu un impact considérable sur la main-d’œuvre des soins de santé. Par conséquent, dans tout service de santé mentale, il faut surveiller de près les pertes de personnel par décès ou départs en retraite.

(v) Événements de la vie

Un autre facteur qui influence les effectifs de manière relativement constante sont les « événements de la vie » pouvant affecter la capacité à travailler. Il s’agit par exemple de la maternité, des maladies, de l’éducation des enfants, de la vieillesse, des soins aux personnes âgées, du stress et des deuils. L’existence de structures de soutien et de ressources permettant de gérer ces événements de la vie peut avoir une influence. Par exemple, la présence ou l’absence d’établissements sanitaires et scolaires pour les familles des agents de santé mentale dans les régions rurales peut influencer la décision de ces agents de vivre et travailler ou non dans ces régions.

L’influence des événements de la vie sur la main-d’œuvre peut être établie en examinant les registres du nombre de personnes ayant démissionné, pris des congés ou étant par-ties en retraite anticipée pour de telles raisons. Une fois encore, les données du passé peuvent être utilisées pour prévoir l’avenir, mais des données actuelles et précises doi-vent également être collectées.

(vi) Formation de nouveau personnel et pourcentage entrant dans la vie active dans le secteur de la santé mentale

Un élément important est le nombre de personnes qualifiées dont on peut prévoir qu’elles entreront sur le marché du travail chaque année après formation. Cette information doit pouvoir être obtenue auprès des institutions de formation (écoles d’infirmières, universités) du pays. Cette information doit comprendre la place de la formation en santé mentale dans les institutions de formation des agents de santé généraux (c’est-à-dire quelle est la formation en santé mentale que reçoivent les infir-mières dans le cadre de leur formation). Les informations sur les formations en dehors du pays peuvent être plus difficiles à obtenir, quoiqu’elles puissent être disponibles auprès d’institutions attribuant des bourses. Cette dernière catégorie représente pro-

La perte de personnel en rai-son de décès et de départs en retraite est prévisible sur la base de données passées et du profil d’âge du per-sonnel.

Certains « événements de la vie » peuvent affecter la capacité du personnel à travailler.

Un élément important est le nombre de personnes qualifiées dont on peut pré-voir qu’elles entreront sur le marché du travail chaque année après formation.

34

Page 53: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

bablement un petit nombre de personnes, et concerne généralement une formation spécialisée.

Il faut compléter les informations sur le nombre de personnes sortant d’institutions de formation chaque année avec un diplôme par le nombre dont on suppose qu’elles seront employées dans le domaine de la santé mentale. Pour diverses raisons, des personnes récemment formées peuvent choisir de ne pas travailler immédiatement dans leur nou-veau métier et ceci doit être pris en compte.

(vii) Facteurs financiers, politiques et culturels

Les avantages financiers dont profite le personnel peuvent avoir une influence décisive sur les effectifs disponibles. Les emplois bien rémunérés sont en principe plus attirants, de même que les régions économiquement prospères et ayant un niveau de vie élevé. Ceci a un impact majeur sur la répartition du personnel au sein d’un pays et entre les pays. Le mécanisme de financement du personnel en santé mentale a également une influence importante sur les effectifs. Par exemple, si les services de santé mentale sont mal financés dans le secteur public, le personnel qualifié aura tendance à chercher des emplois dans le secteur privé et à fournir des services uniquement aux couches aisées de la population qui peuvent s’offrir de payer les services elles-mêmes ou disposent d’une assurance privée.

L’environnement politique a lui aussi un impact significatif sur les effectifs. Par exemple, en Indonésie, suite à l’introduction d’une politique de décentralisation en 2001, 70% des gouvernements des provinces n’ont pas attribué de budgets de développement et de fonctionnement aux hôpitaux psychiatriques publics pour l’années fiscale 2001. Et ce dans un contexte où la plupart des agents de santé mentale travaillent dans les hôpitaux psychiatriques publics. Suite à cela, le recrutement et le maintien de personnel en santé mentale est devenu extrêmement difficile.

De même, l’environnement culturel, et particulièrement la manière dont le public perçoit les troubles mentaux, a un impact sur les effectifs. Une grave stigmatisation des troubles mentaux dans certaines cultures a une influence sur le nombre de personnes prêtes à rechercher un emploi dans le secteur de la santé mentale.

(viii) Modifications de la productivité

Les effectifs réellement disponibles dépendent non seulement du nombre de personnes, mais aussi de leur productivité. Si le personnel peut être déployé de manière plus effi-ciente, il est possible d’augmenter les effectifs réels. De nombreux facteurs affectent la productivité du personnel, notamment :

disponibilité d’équipements,disponibilité de médicaments,relations au sein du personnel (au sein de la discipline et avec d’autres disciplines),motivation du personnel,milieu organisationnel,capacité des dirigeants à soutenir et superviser,direction parmi les chefs et les agents de santé,reconnaissance des usagers des services ou des communautés desservies,conditions de travail, y compris gratifications financières et autres.

Ainsi, pour calculer les effectifs actuels, les planificateurs des RH doivent non seulement examiner le nombre de personnes disponibles, mais aussi tenir compte des facteurs qui influencent la productivité.

•••••••••

Les avantages financiers dont bénéficie le personnel peuvent avoir une influence décisive sur les effectifs disponibles.

Les effectifs réellement disponibles dépendent non seulement du nombre de personnes, mais aussi de leur productivité.

35

Page 54: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

(ix) Compétences

La dernière variable qui influence les effectifs réels est la compétence existante et le mélange de compétences au sein du personnel.

Les compétences reflètent : les connaissances, la compréhension et la capacité de jugement,une gamme d’aptitudes cognitives, techniques et inter-personnelles,une gamme de qualités et attitudes personnelles.

La compétence est « …un niveau de performance démontrant la mise en œuvre efficace des connaissances, des aptitudes et de la gestion » (Conseil International des Infirmières, 1997 : 44 ; voir également The Sainsbury Centre for Mental Health, 2001). Dans la pra-tique, le concept de compétence est utilisé de différentes manières suivant le corps de métier, le pays et le milieu de santé. Dans ce module, ce terme est utilisé au sens large pour désigner les composants de la compétence tels que connaissances, aptitudes et attitudes.

Pour déterminer les compétences en santé mentale actuellement disponibles au sein d’un service de santé, il peut être nécessaire de réaliser un audit des compétences du personnel existant. Dans certaines situations, ceci n’est pas forcément nécessaire parce que les données relatives aux compétences sont collectées régulièrement. Mais généra-lement, un tel audit est nécessaire.

Un audit des compétences est une tâche complexe. Les planificateurs doivent tenir compte aussi bien du nombre de membres du personnel que des compétences dont les différentes catégories de personnel disposent actuellement. Des sources d’information sont à cet égard les responsables des RH, lesquels doivent être en mesure de fournir des données sur les compétences du personnel dans leur région. Un questionnaire distribué à des responsables importants des RH représente une méthode pour obtenir ces don-nées. Ces données peuvent être complétées par des informations issues d’enquêtes de satisfaction auprès des usagers, ce qui permet d’évaluer les compétences du personnel du point de vue des usagers. Parfois, il peut être nécessaire d’observer directement le type ou le niveau de soins de santé mentale dispensés par toute une gamme d’agents de santé dans différents milieux.

S’il est difficile d’obtenir ces données, une autre approche consiste à étudier les auto-risations des agents à effectuer certaines tâches. Par exemple, l’inscription au registre professionnel, un médecin étant habilité à prescrire des médicaments, ou une infirmière à réaliser une auscultation. Les agents de santé mentale doivent éventuellement suivre un cours de conseil et participer à une supervision avant d’être autorisés à conseiller.

Ces deux approches ne s’excluent pas mutuellement. Les planificateurs peuvent définir les exigences de base requises pour l’autorisation des agents à remplir certains rôles, puis évaluer quelques compétences de base (par exemple la réalisation d’examens de l’état mental ou le calcul de médicaments par les infirmières).

Ces compétences doivent être comprises dans le contexte du cadre actuel des services de santé mentale. Les planificateurs des RH doivent être conscients de la manière dont les services de santé mentale sont organisés dans leur pays ou leur région. Ceci signifie qu’ils doivent comprendre où le personnel et les compétences se concentrent actuelle-ment au sein de la pyramide d’organisation des services (illustrée à la figure 3 ci-dessus). À l’aide de ce cadre de services, il est possible de cartographier clairement les compéten-ces actuelles du personnel. Le tableau 1 fournit un exemple d’un audit de compétences pour chaque niveau de services.

•••

La dernière variable qui influence les effectifs réels est la compétence existante et le mélange de compéten-ces au sein du personnel.

Les compétences reflètent le savoir, les aptitudes et les qualités et attitudes person-nelles.

Diverses méthodes peuvent être employées pour évaluer les compétences de la main-d’œuvre.

Les compétences doivent être comprises dans le contexte du cadre actuel des services de santé mentale.

36

Page 55: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Tableau 1. Exemple : Audit des compétences de santé mentale de la main-d’œu-vre actuelle*

37

* N.B. : les disciplines et compétences mentionnées dans ce tableau le sont à titre d’exemples, elles ne sont pas exhaustives.

Niveau

de service

Exemples de

compétences actuelles

E x e m p l e s

d’agents

Compétences supplémentaires

éventuellement requises

Soins commu-

nautaires infor-

mels (p. ex. éco-

les ou système

judiciaire)

Aptitude à la communi-

cation

Connaissances dans le

développement de l’en-

fant

Soutien familial

Enseignants Compréhension de la santé men-

tale de l’enfant et de l’adolescent

Recours à des services de santé

mentale

Identification d’éventuels troubles

mentaux

Communication

Gestion de crises

Connaissances de la loi

Agents de police Compréhension des troubles

mentaux

Connaissances relatives à la stig-

matisation

Droits des personnes atteintes de

troubles mentaux

Discernement d’une psychose

aiguë

Soins de santé

primaires

Évaluation physique

Promotion de la santé

Conseil et soutien

Infirmières Évaluation de santé mentale

Surveillance des médicaments

psychotropes

Soutien familial

Évaluation physique

Prescription de médica-

ments

Communication

Médecins Évaluation de santé mentale

Traitement des troubles mentaux

les plus courants

Soutien familial

Santé mentale

communautaire

Évaluation

Pharmacothérapie

Psychothérapie

Administration et gestion

Psychiatres Supervision et consultation

secondaire

Recherche et évaluation

Évaluation psychologi-

que

Psychothérapie

Psychologues Intervention de crise

Suivi à domicile

Unités psychia-

triques dans les

hôpitaux géné-

raux

Évaluation

Surveillance des médica-

ments psychotropes

Gestion d’une unité

Infirmières en

santé mentale

Connaissances relatives à la stig-

matisation

Rééducation

Questions de droit

Psychothérapie courte

Éducation familiale

Services de

santé mentale

spécialisés

Évaluation

Questions de droit

Traitement des troubles

mentaux

Psychiatres légis-

tes

Connaissances relatives à la stig-

matisation

Aptitude à la recherche

Formation de professionnels

non médicaux (p. ex. agents de

police)

Page 56: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Les informations obtenues dans le cadre de l’audit des compétences doivent être rete-nues pour comparaison avec l’évaluation des besoins (étape 2) et pour une éventuelle utilisation en tant que base pour définir les objectifs et le contenu des programmes de formation. Ainsi, les lacunes de compétences peuvent être abordées par le biais de la formation en santé mentale des futurs agents de santé et par la fourniture permanente d’éducation en santé mentale pour les agents de santé existants (voir ci-dessous la partie 5 sur la formation).

Quelles sources d’information peuvent-elles être utilisées pour calculer les effectifs ?

Il peut être difficile d’obtenir des informations sur les variables affectant les effectifs. Le tableau 2 formule quelques suggestions de sources éventuelles d’information.

Les disciplines ayant un vaste niveau d’emploi, par exemple les soins infirmiers, dis-posent probablement de processus de planification, de systèmes d’information et de mécanismes d’évaluation des effectifs disponibles. Dans la mesure du possible, il est judicieux d’utiliser les systèmes existants. Par exemple, dans certains pays, il se peut que des organismes gouvernementaux produisent des informations sur le marché du travail, sur les effectifs des services de soins et des services sociaux pouvant être une bonne source d’information.

Cependant, dans d’autres pays ayant des systèmes d’information sous-développés, il peut être difficile d’accéder à ces informations. Dans ce cas, il est important de se

Les informations obtenues dans le cadre de l’audit des compétences doivent être retenues pour la détermina-tion ultérieure des objectifs et pour la formation.

Il convient d’utiliser autant que possible les systèmes d’information existants.

38

Tableau 2. Sources éventuelles d’information sur les variables affectant les effectifs

Source : d’après Green, 1999.

Source

Dossiers du personnel, enquêtes, registres profes-

sionnels

Registres des associations professionnelles, dossiers

du personnel d’autres secteurs (p. ex. éducation,

logement, ONG)

Rapports des affaires étrangères

Rapports des affaires étrangères

Dossiers des établissements de formation, ministère

de l’éducation

Dossiers du personnel, taux de mortalité national

spécifique à l’âge

Dossiers du personnel

Rapports d’enquêtes

Audits d’emploi, tableaux de service, fourniture en

médicaments et équipements, entretiens

Audit de compétences, dossiers du personnel,

mécanismes d’accréditation (c’est-à-dire associations

professionnelles)

Données

Personnel actuellement

employé

Autres secteurs

Émigration

Immigration

Rendement de la formation

Décès

Départs en retraite

Mutations

Productivité

Compétences

Page 57: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

baser sur les meilleures données disponibles, et dans la mesure du possible, de s’effor-cer d’établir des systèmes d’information pour collecter et analyser ces données (voir le module Systèmes d’information sur la santé mentale et indicateurs).

Dans de nombreux pays, il peut être plus simple de dénombrer les effectifs disponibles à chaque niveau de service que d’évaluer leurs compétences. Dans ce cas, il peut être utile de séparer la tâche de dénombrage de celle d’évaluation des compétences. La première tâche est relativement facile à accomplir, la deuxième peut nécessiter une enquête à part ou des recherches plus approfondies sur les activités du personnel.

Un contrôle des disciplines actuelles doit inclure non seulement le personnel clinique, mais aussi le personnel de planification, de gestion, de formation, d’élaboration des politiques, d’évaluation des services et d’élaboration des programmes. Ceci comprend des dirigeants, des épidémiologistes, des professionnels de la santé mentale des per-sonnes âgées, des économistes, des spécialistes en techniques de l’information, des spécialistes de gestion et des chercheurs (Mosley, 1994). Il faut également prendre en compte des fournisseurs de services faisant partie des soins de santé généraux (p. ex. les pharmaciens) ou fournissant un soutien (p. ex. les administrateurs et gestionnaires d’informations). En outre, dans certains pays où les usagers de services ou les usagers sont employés en tant que « conseillers en consommation », conseillers pour les pairs, ou défenseurs des usagers, il faut les inclure également dans la liste. Cette liste est essen-tielle pour évaluer pleinement les effectifs actuels de clinique, de gestion, de planification et de soutien.

Une analyse des facteurs qui affectent les effectifs peut aboutir à des résultats différents en fonction de la région au sein d’un même pays. C’est pourquoi une analyse régionale des effectifs est souvent un complément utile aux données nationales.

Le tableau 3 fournit une illustration du calcul des effectifs actuels dans une région, pre-nant en compte certaines des variables mentionnées ci-dessus.

Le contrôle des effectifs actuels ne doit pas tenir compte uniquement du per-sonnel clinique.

Une analyse régionale des effectifs est souvent un complément utile aux don-nées nationales.

39

Page 58: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Tableau 3. Exemple : Déterminer les effectifs actuellement disponibles pour les soins de santé mentale

Niveau de service Discipline* Actuellement Émigration** employés

Soins communautaires Agents de police, enseignants 0 informels ou gardiens de prison formés

Soins de santé Agents de santé 20 0 primaires communautaires****

Infirmières en soins de santé primaires 12 0

Médecins généralistes 2 0

Soins communautaires Infirmières en santé mentale 5 -1

formels Psychiatres 0.5 -0.2

Psychologues 0.3

Ergothérapeutes 0.6 0

Travailleurs sociaux 1.5 0

Unités psychiatriques Infirmières en santé mentale 5 -2

dans les hôpitaux généraux Psychiatres 0.4 -0.2

Travailleurs sociaux 2 0

Services de santé Psychiatres 0.5 -0.2

mentale spécialisés Psychologues 0.3 -0.1

Pharmaciens 0.1 0

Unité centrale Administrateurs 3 0

de planification Gestionnaires d’information 1 0

Total 54.2 -3.8

* Les effectifs sont indiqués en équivalent temps plein (ETP).** Les chiffres additionnés ou soustraits pour l’émigration, l’immigration, les décès, etc. sont calculés pour une année, ce qu*** Les effectifs prévus sont calculés pour un an à partir de l’instant présent, en tenant compte de toutes les variables idendoit être interprété à la lumière d’autres informations relatives à la productivité et aux compétences du personnel.**** Y compris les soignants à domicile.N.B. : Il s’agit d’exemples de chiffres, et non de recommandations officielles de l’OMS.

40

Page 59: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

41

Immigration Décès/départs en retraite Formation (prévue) Effectifs prévus*** événements de la vie

0

0 -2 +5 23

0 -2 +3 13

0 -0.1 +0.5 2.4

0 -0.5 +1 4.5

0 -0.1 +0.2 0.4

-0.1 0 -0.1 +0.2 0.3

+0.1 -0.2 +0.2 0.7

0 -0.3 0.5 1.7

0 -1 +2 4

0 -0.1 +0.2 0.3

0 -0.3 0.5 2.2

0 -0.1 +0.2 0.4

0 -0.1 +0.2 0.3

0 -0.1 +0.1 0.1

0 -0.5 +1 3.5

0 -0.2 +0.5 1.3

+0.1 -7.7 +15.3 58.1

ui permet de calculer les effectifs annuels.ntifiées (c’est-à-dire le nombre de nouveaux membres du personnel formés au cours d’une année). Ce chiffre

Page 60: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

3.1.3 Tâche 3 : Évaluer l’utilisation des services

Dans l’analyse de la situation, la dernière tâche est d’examiner dans quelle mesure les services de santé mentale sont actuellement utilisés. Cette information est importante pour les planificateurs car elle leur permet de voir dans quels domaines le personnel ne peut pas suffire à la demande de la population (effectifs donc insuffisants, se traduisant par exemple par des délais d’attente démesurés), et dans quels domaines le personnel est trop nombreux par rapport à la demande (sureffectifs).

Ces informations peuvent être collectées dans le cadre de la surveillance de routine des services, par exemple par le biais de systèmes d’information existants. Si ces systèmes d’information ne fournissent pas les informations requises, il faut éventuellement réaliser une enquête. Des indicateurs d’utilisation utiles sont notamment :

les admissionsle taux d’occupation des litsla durée moyenne de séjour (DMS)les consultations externesles usagers de services ayant un dossier socialles places occupées dans les services de jourle nombre de ménages ayant des soins à domicilele nombre de participants à des programmes de prévention des troubles mentaux ou de promotion de la santé mentale.

Les définitions et formules correspondant à chacun de ces indicateurs ainsi qu’un rapport plus détaillé des méthodes d’évaluation de l’utilisation des services se trouvent dans le module Planification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentale.

En raison de la nature intersectorielle de l’offre de services de santé mentale, ces indi-cateurs collectés au sein du secteur de la santé doivent éventuellement être complétés par des indicateurs d’utilisation dans d’autres secteurs. Il s’agit par exemple du nombre d’usagers de services de santé mentale dans les foyers pour les sans-abris ou dans les prisons, ou du nombre d’enfants recevant des soins de santé mentale dans les écoles.

Ces informations peuvent être utilisées en même temps que toute une gamme d’autres informations sur la politique, les effectifs et les besoins pour déterminer les objectifs des RH (voir étape 3).

Le tableau 4 fournit un exemple de contrôle des services de santé mentale du secteur public en Afrique du Sud (Flisher et al., 1998).

••••••••

La tâche suivante consiste à passer en revue l’utilisation actuelle des services de santé mentale.

Divers indicateurs peuvent être utilisés.

Les indicateurs des services de santé doivent éventuelle-ment être complétés par des indicateurs d’utilisation dans d’autres secteurs tels que les prisons ou les écoles.

42

Page 61: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Tableau 4. Exemple : Indicateurs de l’utilisation actuelle des services de santé mentale du secteur public en Afrique du Sud

Indicateur Moyenne nationale (variations selon les provinces)Taux annuel d’admissions 150 (33-300)pour 100 000 hbtsTaux d’occupation des lits* 83% (63%-109%)Durée moyenne de séjour (jours) Hôpitaux psychiatriques : 219 (60-3 650)(DMS) Hôpitaux régionaux généraux : 11 (1,5-28) Hôpitaux généraux de district : 7 (1,5-14)Consultations externes annuelles 3 427 (1 215-5 490)pour 100 000 hbtsVisites quotidiennes de patients 13 (5-21)pour 100 000 hbtsRapport communauté/hôpital 66% (44%-93%(utilisation des services)* Dans cette enquête, l’occupation des lits n’a pas été divisée entre établissements de soins aigus et établissements pour séjours de longue durée.

N.B. : Les définitions et formules pour les indicateurs contenus dans le tableau sont fournies dans le module Planification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentale.

Points essentiels : Étape 1. Analyse de la situation

Tâche 1 : Contrôler la politique actuelle des RH

Les planificateurs doivent être au courant des politiques actuelles et de leurs implications pour le développement des RH.

Tâche 2 : Évaluer les effectifs actuels du personnel

Pour estimer les effectifs actuels, les planificateurs doivent examiner ceux-ci dans toutes les disciplines et tous les milieux de services. Les effectifs disponibles dépendent de plu-sieurs variables :

Personnel du secteur de la santé mentale et de la santé en général actuellement employé dans le secteur public de la santéPersonnel du secteur de la santé mentale et de la santé en général actuellement non employé dans le secteur public de la santéImmigration et émigrationDécès et retraitesÉvénements de la vieFormation de nouveau personnel et pourcentage entrant dans la vie active dans des services de santé mentaleFacteurs financiers, politiques et culturelsModifications de la productivitéCompétences

Tâche 3 : Évaluer l’utilisation des services

Dans l’analyse de la situation, la dernière tâche est d’examiner dans quelle mesure les services de santé mentale sont actuellement utilisés. Cette information est importante car elle indique aux planificateurs dans quels domaines les effectifs ne sont pas en mesure de répondre aux demandes exprimées par la population.

••••

•••

43

Page 62: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

3.2 Étape 2. Évaluation des besoins

L’évaluation des besoins est un élément essentiel pour compléter les données portant sur les services existants et ayant été collectées à la phase d’analyse de la situation. Bien que l’analyse de la situation fournisse des chiffres sur les effectifs actuels, l’évaluation des besoins est nécessaire pour aider les planificateurs à évaluer quel personnel sera nécessaire pour répondre à l’avenir aux besoins de la communauté dans le domaine de la santé mentale.

Si la planification des RH se base, comme c’est souvent le cas, uniquement sur l’offre, le nombre de membres du personnel disponibles reflète le statu quo. Ceci signifie que des modèles historiques de financement et de planification des services, et non les besoins actuels de la communauté dans le domaine de la santé mentale, servent de base à la planification des ressources humaines. Comme mentionné précédemment, les besoins en santé mentale sont souvent dissimulés dans la communauté, de sorte que les services existants n’y répondent pas. Par conséquent, le fait de mesurer l’utili-sation actuelle des services ne suffit pas à évaluer les besoins.

Par exemple, en Roumanie, une sur-utilisation des lits hospitaliers était largement due à un manque relatif d’autres services de soins communautaires et d’assistance sociale. Une planification basée uniquement sur l’utilisation actuelle des lits peut conduire à penser que plus de personnel est nécessaire, alors qu’en réalité, il se peut que le système de services doive être réorganisé dans son ensemble et plus de services fournis dans les communautés (Bogdana Tudorache, Présidente de la Ligue Roumaine pour la Santé Mentale, Bucarest, Roumanie, communication personnelle). De même, en Slovénie, le personnel actuellement disponible ne peut pas être calculé selon des situations régionales car la majorité du per-sonnel de santé mentale se concentre dans les institutions. Par conséquent, une réforme du système dans son ensemble est requise, la planification devant se baser sur les besoins et non sur les effectifs disponibles uniquement (Vesna Svab, Présidente, Association Slovène de Santé Mentale (SENT), communication personnelle).

La conduite d’une évaluation des besoins comprend plusieurs tâches. Tout d’abord, il faut identifier les besoins en services au sein de la communauté. Sur cette base, il est possible d’estimer quels sont les services nécessaires pour répondre aux besoins qui ont été identi-fiés. Les fonctions et compétences nécessaires pour fournir ces services peuvent alors être identifiées. À partir des compétences requises, il est possible d’estimer le personnel dont on a besoin. La figure 5 illustre ce processus.

Figure 5. Estimation des effectifs sur la base des besoins en services

Source : d’après Green, 1999.

L’évaluation des besoins est un élément essentiel pour compléter les données portant sur les services exis-tants et ayant été collectées à la phase d’analyse de la situation.

Une évaluation des besoins est nécessaire parce que de nombreux besoins en santé mentale sont dissimulés et ne sont pas couverts par les services existants.

Une évaluation des besoins peut également montrer qu’une restructuration des services s’impose.

44

Besoins en santé mentale

Services

Fonctions

Compétences

Effectifs et type de personnel

Page 63: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Afin d’estimer le personnel par cette méthode, il peut être nécessaire de rassembler des informateurs clés ou un groupe d’experts, lesquels recommanderont des services ainsi que les fonctions et compétences nécessaires pour fournir ces services. Ces services doivent correspondre aux meilleures preuves sur la rentabilité des soins. Par conséquent, le groupe d’experts doit être parfaitement au courant des recherches récentes sur les pratiques fondées sur les preuves dans le domaine du traitement et de la gestion des troubles mentaux. En outre, le groupe doit comprendre des usagers de services.

3.2.1 Tâche 1 : Estimer les besoins

La première tâche est d’estimer les besoins en soins au sein d’une communauté consi-dérée comme un type de source. Pour plus de détails sur la manière de réaliser cette tâche, veuillez consulter le module Planification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentale.

En résumé, trois activités sont nécessaires :

Établir la prévalence ou l’incidence des affections mentales prioritaires. Les affections prioritaires doivent être identifiées à partir de la politique existante ou du plan straté-gique existant. Ou encore, dans le cas de la promotion de la santé mentale, établir le groupe cible devant faire l’objet du programme de promotion de la santé mentale.Lorsque cela s’avère nécessaire, faire des rectifications selon les variables de la population locale.Identifier le nombre de cas attendus (ou le nombre de personnes cibles dans le cas d’un programme de promotion de la santé mentale) par an.

Pour obtenir un chiffre des besoins en services de santé mentale, il convient de collecter des informations à partir de sources autres que les services existants. Plusieurs sources peuvent être envisagées :

Les enquêtes épidémiologiques portant sur l’ampleur des troubles mentaux dans la communauté sont un type de source. Si des données épidémiologiques ne sont pas disponibles, on peut adapter des données provenant d’autres secteurs (pour une explication de cette méthode, voir le module Planification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentale).Si des données comparables ne sont pas disponibles, on peut utiliser des estimations aussi bonnes que possible en se basant sur d’autres sources d’information locales ainsi que des avis d’experts. Pour ces méthodes d’évaluation rapide, il convient d’uti-liser des données qualitatives.Dans le cas de la promotion de la santé mentale, on peut utiliser des données de population relatives au nombre et aux caractéristiques démographiques des person-nes pouvant bénéficier de la promotion de la santé mentale (p. ex. dans les écoles et les prisons).Il convient de réaliser des estimations des groupes vulnérables (p. ex. du nombre de personnes affectées par des catastrophes naturelles ou des conflits).

Le « besoin » est également un concept culturel, de sorte qu’il faut établir le rôle à jouer par un programme/service de santé mentale dans chaque pays ou région. Les questions de culture et d’évaluation des besoins sont discutées plus en détail dans le module Planification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentale (voir également Patel, 2000 ; Swartz, 1998).

Cette évaluation des besoins sera probablement réalisée dans le contexte d’une plani-fication plus vaste de services (à savoir planification des lits, de l’infrastructure et des médicaments). Les planificateurs des ressources humaines doivent donc se servir de ces informations dans la mesure du possible.

Il peut être nécessaire de rassembler un groupe d’informateurs clés ou d’experts, lesquels recom-manderont des services ainsi que les fonctions et compétences nécessaires pour fournir ces services.

La première tâche consiste à se servir des meilleures données disponibles pour estimer les besoins en santé mentale de la communauté.

45

Page 64: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Encadré 2. Exemple : Évaluation des besoins se basant sur des données épidé-miologiques pour planifier les services en Australie

À la fin des années 1990, le gouvernement australien a mandaté une enquête nationale sur la santé mentale et le bien-être (Henderson, Andrews & Hall, 2000). Une équipe de chercheurs universitaires a travaillé en collaboration avec l’office australien des statisti-ques pour étudier la prévalence des troubles mentaux ainsi que les caractéristiques des personnes touchées – niveau de revenus, éducation, type de logement, services sanitai-res et communautaires utilisés. L’Institut australien de la Santé et de l’Assistance sociale a également conduit une vaste étude des besoins non satisfaits en services d’assistance sociale, les personnes atteintes de troubles mentaux formant l’un des principaux groupes ayant besoin d’un tel soutien. Cette vaste recherche s’est avérée être un outil précieux pour évaluer les besoins et planifier les services de santé mentale en Australie.

3.2.2 Tâche 2 : Cartographier les services nécessaires pour les besoins identifiés : la pyramide cadre pour les services définie par l’OMS

À partir des besoins en santé mentale estimés, on peut estimer les services nécessai-res pour répondre à ces besoins. Le recrutement n’a pas lieu dans le vide ; il est donc essentiel de tracer les grandes lignes du cadre d’organisation des services ou le profil des services dans lesquels le personnel doit être mis en place. Bref, quels sont les services nécessaires et comment doivent-ils être organisés ?

La pyramide cadre de l’OMS pour les services (présentée dans l’introduction de ce module, figure 1) peut être utilisée comme modèle pour calculer quels services doivent être fournis à chaque niveau de services. Ceci fera probablement partie d’une planification plus vaste des services. Pour plus de détails sur les tâches nécessaires, voir les modules Organisation des services de santé mentale et Planification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentale.

3.2.3 Tâche 3 : Identifier le personnel nécessaire à chaque niveau de services

La prochaine tâche consiste à identifier le personnel nécessaire à chaque niveau de services. Pour planifier systématiquement pour tous les services de santé mentale, il faut identifier les fonctions et les compétences requises pour chaque niveau de service représenté dans la pyramide cadre de l’OMS (figure 1). En bref, quelles sont les fonctions nécessaires pour cha-que service, et comment le personnel doit-il être équipé pour remplir ces fonctions ?

Les fonctions et compétences spécifiques pour chaque niveau de services de la pyra-mide de l’OMS sont décrites dans la partie 5 portant sur la formation.

Par exemple, dans les soins de santé primaires, des fonctions importantes consistent à iden-tifier et à gérer les troubles mentaux. Les compétences requises à cet effet sont par exemple la capacité à poser un diagnostic (connaissance des symptômes et de l’évolution) et à fournir un traitement (connaissance des médicaments et aptitude à les fournir, approches psycho-sociales de traitement et de soutien), et ce pour toute une gamme de troubles mentaux. Des agents et professionnels de santé primaire différents (médecins généralistes, infirmières) peuvent remplir différentes fonctions à chaque niveau et ont donc besoin de compétences différentes. L’élément décisif est que dans le contexte de chaque niveau de services, les compétences adéquates doivent être disponibles pour assurer les fonctions du service.

Pour illustrer plus précisément ce processus, la figure 6 fournit un exemple plus détaillé de la méthode d’estimation des besoins en personnel de santé mentale au niveau des soins de santé primaires. Dans la partie A de cet exemple, les besoins en services sont identifiés et les fonctions et compétences requises pour répondre à ces besoins sont décrites. Dans la partie B, le personnel actuellement disponible et disposant des compétences adéquates est décrit, ainsi que les lacunes dans le personnel et donc les besoins en formation.

À partir des besoins en santé mentale estimés, on peut estimer les services nécessaires pour répondre à ces besoins.

La pyramide cadre de l’OMS pour les services peut servir à identifier un mélange de services optimal.

Pour planifier systématique-ment pour tous les services de santé mentale, il faut identifier les fonctions et les compétences requises pour chaque niveau de service représenté dans la pyramide cadre de l’OMS.

46

Page 65: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Figure 6. Exemple : Estimation du personnel à partir des besoins en services, appliquée aux cliniques de soins de santé primaires

Partie A

Besoin : Détecter et gérer les troubles mentaux au niveau des soins primaires. Chiffres identifiés à partir d’une enquête dans une communauté locale : la clinique prévoit d’effectuer 7 nouvelles évaluations et 30 contacts de suivi de routine par jour.

Fonctions :

Compétences :

Partie B

Compétences, personnel et formation

47

Identifier les troubles mentauxFournir des médicaments de base et des interventions psycho-thérapeutiquesRecours à des services spécialisés de santé mentalePsychopédagogie familiale et communautaireIntervention de crisePromotion de la santé mentale et prévention des troubles mentaux

••

••••

Diagnostic Prescription Recours Communication

Tâches Conseil Intervention Connaissanceadministratives de crise des médicaments SM

Psychopédagogie Soutien Sensibilisation Prévention et promotion

Compétences Personnel actuel Nouveau personnel éventuel (ou for-mation du personnel disponible)

Soutien ISSP Non requis

Communication ISSP Non requis

Tâches admin. ISSP Non requis

Connaissance des médicaments, SM

Non disponible ICSM ou ISSP avec formation SM

Diagnostic Non disponible ICSM ou ISSP avec formation SM

Recours Non disponible ICSM ou ISSP avec formation SM

Page 66: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Compétences, personnel et formation

SM – santé mentaleISSP – infirmière en soins de santé primairesICSM – infirmière communautaire en santé mentaleMG – médecin généraliste* N.B. : la liste de fonctions et compétences n’est pas exhaustive, elle sert uniquement d’illustration. Source : d’après Green, 1999.

Cette approche présente plusieurs avantages :

Les besoins en personnel sont identifiés dans le contexte d’un large cadre de services répondant à l’éventail des besoins en santé mentale de la populationLes besoins en personnel sont estimés sur la base des besoins de la population plu-tôt qu’uniquement sur la base des effectifs actuels. De ce fait, la main-d’œuvre sera mieux appropriée à répondre aux besoins de la population.Les services particuliers ne sont pas assimilés immédiatement à des disciplines par-ticulières. On dispose ainsi d’une marge de manœuvre pour effectuer des remplace-ments et un usage créatif du personnel.Les services peuvent donc être planifiés de manière complète, selon le mélange de compétences requis, plutôt que de planifier séparément pour chaque discipline.Si des compétences ne sont pas couvertes par le personnel existant, on peut identifier les besoins en formation.Il est possible d’exposer clairement aux personnes en charge du budget ou aux organismes de financement comment les estimations des besoins en personnel sont réalisées. Il s’agit donc d’une méthode de planification rationnelle et transparente.

Pour esquisser le profil du personnel requis, il est important que les planificateurs ne se limitent pas aux profils existants. Dans certains milieux, ceux-ci peuvent ne pas convenir et il peut être nécessaire de créer de nouveaux métiers de la santé mentale. Par exemple, en Nouvelle-Zélande, une nouvelle catégorie d’agents – agent communautaire de soutien en santé mentale – a été créée, et, au bout de moins de 10 ans, 921 de ces agents étaient en service. Ceci répondait aux besoins en professionnels de la santé mentale rentables et proches de la communauté, capables de travailler en collaboration avec les profession-nels déjà en place. L’agent communautaire de soutien en santé mentale aide les usagers des services de santé mentale à trouver un logement, un emploi et à rétablir des réseaux sociaux qui les aident dans leur convalescence. Ces services de soutien non cliniques comblent une lacune entre les services médicaux et les services sociaux. Les services sociaux ne savent pas toujours bien comment soutenir la convalescence des personnes atteintes d’une maladie mentale. L’agent communautaire en santé mentale aide à répon-dre aux besoins des usagers des services de santé mentale dans le cadre d’un vaste plan de convalescence (Todd Krieble, Ministère de la Santé, Wellington, Nouvelle-Zélande, communication personnelle).

L’approche consistant à esti-mer le personnel à partir des besoins en services présente plusieurs avantages.

Il est important que les planificateurs ne se limitent pas aux profils de person-nel existants. De nouvelles catégories peuvent être nécessaires.

48

Psychopédagogie Non disponible ICSM ou ISSP avec formation SM

Intervention de crise Non disponible ICSM ou ISSP avec formation SM

Sensibilisation Non disponible ICSM ou ISSP avec formation SM

Conseil Non disponible ICSM ou ISSP avec formation SM

Prévention et promotion

Non disponible ICSM ou ISSP avec formation SM

Prescription Non disponible MG ou ICSM

Page 67: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Un exemple similaire en Chine concerne la création d’une nouvelle catégorie de tra-vailleurs sociaux psychiatriques. Ceci a impliqué un long processus politique de mise en place de programmes de formation et d’obtention d’une reconnaissance de la part de l’Office du personnel pour cette catégorie d’agents (avec les catégories d’avancement et de salaire correspondantes) (Michael Philips, Beijing Huilongguan Hospital, Chine, com-munication personnelle).

Dans d’autres pays, selon la tradition, les soins sont dispensés par les médecins et les infirmières, et les profils doivent être étendus afin de comprendre les psychologues, les travailleurs sociaux et les ergothérapeutes. Cependant, dans de nombreux pays qui ne disposent pas des ressources pour développer ces nouvelles catégories professionnelles, il faut fournir les compétences en santé mentale à la main-d’œuvre existante. L’exemple de la figure 6 ci-dessus illustre comment ceci peut avoir lieu en formant les agents de soins primaires existants pour leur faire acquérir des compétences de base en santé mentale.

Dans ce processus, il est important d’identifier les rôles des différentes disciplines pour assurer que ces rôles se complètent sans trop se chevaucher. Comme indiqué dans la partie 2 ci-dessus, le rôle des équipes et le développement de la main-d’œuvre pour obtenir des équipes multidisciplinaires efficaces est un aspect essentiel du remaniement de la main-d’œuvre (The Sainsbury Centre for Mental Health, 1997).

3.2.4 Tâche 4 : Estimer les effectifs nécessaires à chaque niveau de services

Une fois que l’on dispose d’une large esquisse des fonctions, des compétences et du personnel nécessaires à chaque niveau de services, on peut alors estimer les effectifs. Les besoins identifiés lors de la tâche 1 peuvent être convertis en charge de travail en estimant le nombre de personnes dont on prévoit qu’elles utiliseront les services de santé mentale nécessaires pendant une période donnée (pour plus de détails, voir le module Planification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentale).

Une fois la charge de travail prévue identifiée, les effectifs nécessaires peuvent être cal-culés à l’aide de la formule suivante (d’après Shipp, 1998) :

La charge de travail standard (dénominateur) peut être estimée de la façon suivante. Tout établissement de santé mentale (clinique, clinique de jour, unité en hôpital) a son propre modèle de travail. La charge de travail demande des efforts pouvant être mesurés, soit en temps (p. ex. temps mis à réaliser une évaluation), soit en nombre d’activités réalisées (p. ex. nombre d’usagers de services vus au cours d’une journée). Pour chaque type de charge de travail, on peut définir une norme d’activité. Il s’agit d’une unité de temps ou d’un taux pour chaque catégorie de personnel (Shipp, 1998).

Cette norme d’activité varie en fonction du type d’activité (hôpital, clinique ambulatoire), des catégories de personnel impliquées (infirmières, psychiatres, ergothérapeutes) et du type d’établissement (soins primaires, secondaires ou tertiaires). On peut ensuite conver-tir la norme en un équivalent de charge de travail annuelle en calculant combien de travail peut être accompli par un membre du personnel pendant un an, celui-ci travaillant selon des normes de qualité professionnelles déterminées et en utilisant des compétences déterminées, le calcul tenant compte de facteurs tels que congés, absences pour cause de maladie, formation, supervision, tâches administratives et trajets.

Les effectifs peuvent être estimés sur la base de l’éva-luation des besoins.

Pour chaque type de charge de travail, on peut définir une norme d’activité.

La norme d’activité peut être convertie en un équivalent de charge de travail annuel-le, appelée charge de travail standard.

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Charge de travail prévue dans l’établissement (à partir des besoins)

Charge de travail standard (pour un membre du personnel)

= effectifs requis

Page 68: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Pour calculer ce chiffre, toute une gamme d’informations entrent en ligne de compte. Des facteurs relatifs au personnel et à l’organisation affectent les calculs de la charge de travail. Par exemple, le personnel inexpérimenté accomplit généralement une charge de travail inférieure à celle du personnel expérimenté. Dans certains services, par exemple les programmes hospitaliers, il peut y avoir des stratégies de calcul de la charge de tra-vail, tandis que cette tâche est plus difficile dans d’autres services. En outre, il peut y avoir des conventions collectives définissant des effectifs minimaux.

L’équivalent de charge de travail annuelle est appelé charge de travail standard. C’est le dénominateur employé dans la formule ci-dessus.

Le numérateur (charge de travail prévue) peut être estimé à partir du nombre de person-nes dont on prévoit qu’elles utiliseront le service en question, conformément à l’estima-tion des besoins de la tâche 1.

En combinant ces deux sources d’information en utilisant cette formule, on obtient les estimations des effectifs requis pour un établissement précis. La charge de travail peut être rectifiée en fonction des circonstances particulières de l’établissement. Par exemple, les usagers de services admis dans un établissement hospitalier psychiatrique tertiaire auront probablement besoin d’une quantité de temps du personnel différente des usa-gers de services admis dans un établissement hospitalier général de district.

Il n’est pas nécessaire de rectifier les normes d’activité pour des endroits différents si les tâches sont identiques. Par exemple, le même nombre d’évaluations en milieu de soins primaires peut être réalisé dans la région A et dans la région B. Ainsi, les normes de charge de travail (et la qualité des soins) peuvent être maintenus dans un pays donné. Si une variation est prévisible au sein d’un pays et qu’il faut rectifier les normes, la norme d’activité peut être définie au niveau régional.

Si nécessaire, cette méthode peut être étendue aux organisations bénévoles et aux prestataires privés, ce qui permet une réglementation et une planification des ressources humaines plus vaste, au-delà des secteurs. Par exemple, les activités des conseillers dans le domaine du VIH dans les ONG peuvent être standardisées dans une région don-née pour permettre une coordination de différents organismes travaillant dans la région (ceux-ci participant pleinement à ce processus). Cette méthode peut également être adaptée pour estimer les effectifs selon les plans de développement des services pour l’avenir (c’est-à-dire une augmentation prévue de la charge de travail).

Les résultats de cette estimation doivent éventuellement être adaptés aux circonstances spécifiques du service de santé. Un exemple en est le calcul des effectifs nécessaires au sein d’un milieu de soins primaires intégré : si les besoins sont calculés pour les agents de soins de santé primaires qui passent seulement une partie de leur temps à réaliser des tâches de santé mentale, il peut être approprié de réaliser une estimation proportionnelle. Ainsi, si on estime que six infirmières de soins primaires équivalent temps plein sont nécessaires pour la santé mentale dans un district, on peut adapter ce chiffre et recom-mander 30 infirmières de soins primaires pour ce district, chacune d’entre elles passant 20% de son temps à des activités en rapport avec la santé mentale.

Au cours de ce processus, il est essentiel de mentionner explicitement les hypothèses utilisées pour l’estimation des besoins de manière à indiquer clairement de quoi décou-lent les recommandations. Un processus de consultation complet est un moyen impor-tant pour assurer la transparence de ce processus (pour une explication plus détaillée des indicateurs de charge de travail pour les besoins en personnel, voir Shipp, 1998).

L’exemple de l’encadré 3 fournit une illustration de cette méthode d’évaluation des besoins. Une fois encore, cet exemple est appliqué uniquement à un niveau de services

La charge de travail stan-dard doit être comparée avec la charge de travail nécessaire estimée pour répondre aux besoins de la population.

Si nécessaire, cette méthode peut être étendue aux orga-nisations bénévoles et aux prestataires privés, ce qui permet une réglementation et une planification des ressources humaines plus vaste, au-delà des secteurs.

50

Page 69: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

(niveau des soins de santé primaires). Pour appliquer cette méthode à l’ensemble des besoins en santé mentale d’une population, on peut faire des calculs similaires pour tous les niveaux de services mentionnés dans la pyramide de l’OMS (figure 1).

Encadré 3. Exemple : Estimation des effectifs en santé mentale nécessaires dans les cliniques de soins primaires

Source : d’après Shipp, 1998.

* La charge de travail prévue comprend le nombre de personnes dont on prévoit qu’elles se rendront à la clinique sur la base d’une enquête sur la prévalence annuelle de troubles mentaux graves identifiés pendant un an (estimation : 30 nouvelles évaluations et 12 usagers des services pour gestion de routine des médicaments par jour, en supposant 264 jours de travail par an). La charge de travail standard est estimée en tant que cas par an, y compris le temps passé à des activités telles qu’administration, formation continue, supervision et congés (voir le texte pour des explications plus détaillées).

** Infirmières SSP = infirmières en soins de santé primaires (équivalent temps plein). *** ASC = agents de santé communautaires (équivalent temps plein). Les données

provenant des cliniques permettent de supposer que les ASC passent environ deux fois plus de temps par usager que les infirmières, leurs activités supplémen-taires comprenant les visites à domicile, l’éducation familiale et la liaison avec d’autres secteurs (police, services sociaux et ONG, p. ex.).

N.B. : Il s’agit d’exemples de chiffres, et non de recommandations officielles de l’OMS.

51

Province : X

District : Y

Année : 2003

Charge de travail prévue*

Charge de travail standard

In f i rmières SSP**nécessaires

Charge de travail prévue*

Charge de travail standard

A S C * * * nécessai-res

N o u v e l l e s évaluations

N o u v e l l e s évaluations

7 920 /2 250 = 3,5 7 920 /1 125 = 7,0

Gestion de routine des m é d i c a -ments

Gestion de routine des m é d i c a -ments

3 168 /700 = 4,5 3 168 /350 = 9,0

Page 70: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Points essentiels : Étape 2. Évaluation des besoins

Tâche 1 : Estimer les besoins

La première tâche consiste à estimer les besoins en soins de la communauté, par exem-ple combien de personnes, présentant quels types de troubles, auront besoin de soins au cours d’une année moyenne ?

Tâche 2 : Cartographier les services nécessaires pour les besoins identifiés

À partir des besoins en santé mentale estimés, on peut estimer les services nécessaires pour répondre à ces besoins. Le cadre de ces services peut être cartographié à l’aide de la pyramide de l’OMS. Ceci recouvre :

les services de santé mentale communautaires informels,les services de santé mentale fournis par les soins de santé primaires,les services de santé mentale fournis par les hôpitaux généraux,les services de santé mentale communautaires formels,les établissements hospitaliers pour séjours de longue durée et les services de santé mentale spécialisés.

Tâche 3 : Identifier le personnel nécessaire à chaque niveau de services

La tâche suivante consiste à identifier le personnel nécessaire, en termes de fonctions et de compétences, pour dispenser les services à chaque niveau (ceci est expliqué en détail dans la partie 5 portant sur la formation).

Tâche 4 : Estimer les effectifs nécessaires à chaque niveau de services

Une fois que l’on dispose d’une large esquisse des fonctions, des compétences et du personnel nécessaires à chaque niveau de services, il faut alors estimer les effectifs. Les besoins identifiés à la tâche 1 peuvent être convertis en charge de travail en estimant le nombre de personnes qui utiliseront les services de santé mentale nécessaires pendant une période déterminée. Une fois que l’on a identifié la charge de travail prévue pour un service et la charge de travail standard par membre du personnel, on peut calculer les effectifs nécessaires.

•••••

52

Page 71: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

3.3 Étape 3. Définition des objectifs

3.3.1 Tâche 1 : Comparer les effectifs et les besoins

Après avoir calculé les effectifs actuels et estimé les besoins en effectifs, il est possible de définir les objectifs. Pour définir les objectifs, il faut comparer les deux blocs d’infor-mations qui ont été collectés auparavant (à savoir les effectifs et les besoins). La compa-raison peut être effectuée en utilisant deux méthodes de calcul (d’après Shipp, 1998) :

la différence,le rapport.

La différence entre les besoins et les effectifs actuels indique le nombre de nouveaux membres du personnel requis pour répondre aux exigences pour l’établissement (diffé-rence = effectifs moins besoins). Par exemple, si les effectifs indiquent qu’il y a 12 infir-mières ETP qui dispensent des soins de santé mentale dans une région et si les besoins indiquent que 15 infirmières ETP sont nécessaires, on aura besoin de 3 nouveaux mem-bres du personnel ETP pour répondre aux exigences pour ce service.

Le rapport est calculé en divisant le niveau actuel de personnel par le personnel néces-saire (rapport = effectifs/besoins). Par exemple, si les besoins en personnel (8 infirmières) dépassent les effectifs actuels (6 infirmières), on peut établir un rapport (6/8) = 0,75 ou 75%. Ceci est une adaptation du rapport des indicateurs de charge de travail pour les besoins en effectifs (Shipp, 1998). Si le rapport est de 1,0, il y a juste assez de personnel pour l’établissement ; si le rapport est <1,0, il n’y a pas assez de personnel, et s’il est >1,0, l’établissement a trop de personnel.

La méthode du rapport est utile pour comparer les besoins en personnel entre les régions ou les districts car des rapports élevés indiquent probablement un niveau plus élevé de fourniture de ressources humaines. C’est un moyen pratique pour évaluer quel établisse-ment ou quelle région doit profiter en priorité des ressources allouées. Par exemple, un manque de 3 infirmières dans une clinique ayant besoin de 10 infirmières représente un rapport de 0,7 (ou 70%). Un manque de 7 infirmières dans un hôpital ayant besoin de 70 infirmières représente un rapport de 0,9 (ou 90%). Ceci indique que les infirmières de la clinique sont soumises à une charge de travail bien supérieure (30% de sous-effectifs) que celles de l’hôpital (10% de sous-effectifs). Normalement, on penserait qu’un manque de 7 infirmières doit être réglé de manière plus urgente, mais un coup d’œil au rapport indique que les besoins sont plus importants ailleurs. La même méthode peut être utilisée pour déterminer les sureffectifs dans certaines régions.

Cette méthode présente certaines limites :

Elle dépend de la précision des statistiques existantes sur les services et de l’évalua-tion des besoins (ceci peut être résolu en améliorant la précision ; voir les modules : Planification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentale et Systèmes d’information sur la santé mentale et indicateurs).Il peut y avoir des chevauchements entre les catégories de personnel dans certaines activités (charge de travail). Ceci peut être résolu en affectant les activités aux caté-gories de personnel de manière proportionnelle (p. ex. 60:40).La charge de travail est généralement calculée rétrospectivement et peut être dépas-sée. Ceci peut être résolu en mettant régulièrement à jour les données de charge de travail ; un soutien est apporté par le fait que la charge de travail ne change proba-blement pas rapidement – on peut ajouter des modifications sous forme de pourcen-tages si nécessaire.La charge de travail peut être affectée par la fourniture de technologies et de médi-caments. Par exemple, un manque de médicaments psychotropes peut affecter la

••

La prochaine tâche consiste à comparer l’offre et la demande. Ceci peut être réa-lisé en calculant la différence et le rapport.

La méthode du rapport pré-sente certaines limites.

53

Page 72: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

nature du travail pouvant être accompli par le personnel clinique. Ceci peut être résolu en tenant compte de cet aspect dans les estimations des effectifs – si on prévoit une amélioration/augmentation des fournitures en médicaments, on peut rectifier l’estima-tion de la charge de travail en conséquence. Par exemple, une fourniture sans failles de médicaments peut modifier les besoins en travail de rééducation.

3.3.2 Tâche 2 : Adapter les objectifs en fonction de l’utilisation : des ressources humaines « croissantes »

Lors de la comparaison entre l’offre et la demande, il est probable qu’un fossé important apparaîtra entre les effectifs actuellement disponibles et l’estimation du personnel néces-saire pour répondre aux besoins de la population. Il se peut également que les estima-tions des effectifs basées sur l’évaluation des besoins ne correspondent pas à l’utilisation réelle des services, comme ceci s’est produit en Australie (Andrews & Henderson, 2000). Par conséquent, il faut utiliser une méthode permettant de classer les objectifs en tenant compte de l’utilisation des services et des réalités budgétaires.

La méthode proposée à cet effet consiste à établir une liste d’options et à définir des priorités conformément à certains critères (voir le module Planification et budgétisation pour l’ offre de services de santé mentale pour une description de cette méthode et une liste de critères).

Une aide supplémentaire peut être fournie aux planificateurs sous la forme de mesures de l’utilisation des services, ce qui permet de rectifier les objectifs annuels d’effectifs. Sur cette base, un classement des objectifs peut être défini en fonction des budgets dispo-nibles et de l’utilisation des services, le but général étant de développer des ressources humaines pour répondre aux besoins de la population (voir figure 7).

Il y a souvent des tensions entre les besoins et l’utilisation dans la planification en santé men-tale. Cette méthode permet aux planificateurs de définir les objectifs en fonction des besoins tout en rectifiant les objectifs selon l’utilisation actuelle, la main-d’œuvre faisant l’objet d’une « croissance » pour qu’elle reste au niveau d’une utilisation elle-même croissante.

Pour pouvoir se servir des calculs d’utilisation des services de santé mentale, il faut col-lecter régulièrement des données précises à ce sujet (voir étape 1, Analyse de la situation : tâche 3 ci-dessus, pour voir quels indicateurs peuvent être utilisés pour calculer le taux d’utilisation).

Figure 7. Ressources humaines « croissantes » : rectification des objectifs dans le temps, en fonction de l’utilisation.

* Les chiffres de 1% et 15% représentent la proportion de la population couverte par le personnel de santé mentale. Ces chiffres sont indiqués à titre d’exemples et ne sont pas des recommandations de l’OMS.

Un classement des objectifs peut être défini en fonction des budgets disponibles et de l’utilisation des services.

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Offre1%*

Demande15%*

Taux d’utilisation pris en compte pour rectifier les objectifs

Page 73: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Pour illustrer ce processus de manière plus concrète, la figure 8 fournit un exemple de chiffres d’effectifs issus des services de santé mentale d’Afrique du Sud, avec des recti-fications apportées en fonction de l’augmentation prévue de l’utilisation.

Figure 8. Exemple : De l’offre à la demande, sur la base de données des services de santé mentale d’Afrique du Sud

* Chiffres d’effectifs de Lund & Flisher, 2002b.** Chiffres des besoins de Flisher et al., 1998.

Après avoir calculé la différence entre les effectifs actuels et les besoins, et défini des priorités pour le développement des RH à la lumière de la politique actuelle, de l’utilisation des services et des budgets disponibles, on peut alors adopter une ligne de conduite spécifique.

Celle-ci peut être orientée soit vers les effectifs disponibles (Green, 1999), soit vers les besoins en effectifs. Voici quelques exemples de lignes de conduite pouvant être adop-tées par les pays.

(i) Définir des objectifs pour les effectifs

Changer les effectifs des programmes de formation (vers le haut ou vers le bas), par exemple en définissant des quotas pour les universités ou les institutions de formation en fonction des besoins en effectifs prévus. Des projections peuvent être réalisées à l’aide des prévisions des besoins, telles qu’elles ont été réalisées à l’aide des estima-tions ci-dessus. Ces quotas doivent être définis en concertation avec les institutions de formation concernées.Changer le contenu des programmes de formation pour produire des compétences adéquates (voir la partie 5 ci-dessous portant sur la formation).Développer et fournir de nouveaux programmes de formation en santé mentale pou-vant être intégrés aux services actuels de soins de santé.Clarifier les compétences en santé mentale souhaitées pour tous les professionnels de la santé, conformément à leurs rôles (p. ex. les infirmières des services des urgences ou des accidents doivent savoir s’y prendre avec les personnes psychotiques violentes).Identifier les régions dans lesquelles le personnel peut être utilisé de manière plus efficiente.Identifier de nouveaux rôles professionnels permettant d’utiliser le personnel de manière plus adéquate en modifiant l’organisation des services. Par exemple, déve-lopper de nouveaux rôles de soins communautaires, clarifier les rôles des bénévoles ou renforcer le rôle du secteur bénévole.

Des lignes de conduite spécifiques peuvent être adoptées en direction de l’offre ou de la demande en personnel.

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50

40

30

20

10

0

Effectifs actuels*

Utilisation actuelle

Utilisation (année 5)

Utilisation (année 10)

Besoin**

Per

sonn

el p

our

100

000

hab

itant

s

Page 74: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Identifier de nouvelles catégories d’agents de santé mentale, par exemple agents communautaires de soutien en santé mentale.Recruter ou engager du personnel de santé mentale ne travaillant actuellement pas dans le secteur public, y compris en offrant des incitations pour attirer le personnel du secteur privé vers le secteur public. Les incitations financières peuvent être des presta-tions sociales ou la sécurité du salaire, même si ces salaires ne sont pas très élevés.Établir des objectifs de fidélisation du personnel de santé mentale actuel (c’est-à-dire viser à réduire le pourcentage de personnel perdu chaque année).Introduire des incitations pour le personnel de santé mentale à travailler dans des régions mal desservies, par exemple les régions rurales. Par exemple, en Afrique du Sud, les psychologues cliniques doivent effectuer une année de services communau-taires aussitôt après obtention de leur diplôme. Le fait d’amener le personnel dans ces régions en cours de formation ou sous la forme de services communautaires peut montrer à ce personnel les avantages potentiels du travail dans ces régions.Assurer que les postes de santé générale comportant des éléments de santé mentale fassent l’objet d’annonces et de descriptions précises, incluant les éléments de santé mentale.Changer la politique du personnel pour améliorer la fidélisation du personnel.

(ii) Définir des objectifs pour les besoins

Changer les objectifs des services (vers le haut ou vers le bas), et donc les besoins en personnel.Changer le mélange de compétences requis en changeant la manière dont les servi-ces sont fournis (p. ex. en utilisant les agents de soins primaires pour gérer la santé mentale au niveau primaire et en réservant les problèmes complexes au personnel spécialisé).

(iii) Croissance et changement

Pour ce qui est d’une main-d’œuvre « croissante », il est important de se rappeler qu’il ne s’agira peut-être pas simplement d’augmenter le nombre de personnes qualifiées, mais aussi de redistribuer le personnel existant et de développer de nouvelles compétences. Par exemple, si l’on veut passer de modèles institutionnalisés à des modèles communau-taires, il se peut que la main-d’œuvre existante ait besoin d’une formation complémentai-re. Il ne faut pas partir du principe que les compétences nécessaires seront les mêmes.

La croissance et le changement peuvent être facilités par de nouvelles combinaisons de professionnels, de personnel de soutien et de membres des communautés locales, par exemple tradipraticiens. Ainsi, la « croissance » de la main-d’œuvre peut signifier, non pas « plus de personnel » mais « du personnel travaillant autrement ».

La planification doit également tenir compte des conséquences involontaires de certai-nes interventions. En essayant de développer la main-d’œuvre dans une région, on peut provoquer une pénurie dans une autre. Par exemple, si on insiste sur la formation et l’incitation du personnel à travailler en milieu communautaire, on peut créer ou aggraver des pénuries en milieu hospitalier.

Dans ce contexte, il peut être utile de se servir de projets pilotes et de réaliser des peti-tes innovations. De nouveaux modèles peuvent être plus faciles à gérer s’ils sont mis en œuvre à petite échelle et évalués soigneusement, de sorte que les questions de barrières et de faisabilité sont identifiées avant de passer à une réforme profonde de la structure d’un service dans son ensemble.

Les recherches de l’OMS ont montré l’importance d’élaborer des stratégies des RH cor-respondant à la situation particulière du pays (Egger, Lipson & Adams, 2000). En bref, la

La « croissance » de la main-d’œuvre peut ne pas signifier simplement d’augmenter les effectifs, mais aussi de redistribuer le personnel existant et de développer de nouvelles compétences.

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Page 75: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

solution doit être adaptée au problème (tableau 5). Ces stratégies ont été utilisées par des pays pour la réforme de leur politique des RH pour la santé générale et il se peut qu’elles requièrent un soutien politique et financier important (OMS, 2000).

Tableau 5. Trouver des solutions adaptées au problème

Problème Solution

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D i s t r i b u t i o n inégale du per-sonnel

P e r s o n n e l insuffisant en quantité

Motivation du personnel faible

Personnel quit-tant le secteur public pour tra-vailler dans le secteur privé

✔ Éduquer et former du personnel adéquat✔ Fournir des formations complémentaires en compétences de santé mentale pour le personnel de santé générale✔ Contrôler le mélange de compétences de la main-d’œuvre existante✔ Réformer les programmes de formation pour obtenir une adéquation plus efficiente des compétences avec les besoins✔ Renforcer et soutenir le travail d’équipe en établissant une liste de priorités locales pour l’équipe✔ Identifier de nouvelles catégories d’agents de santé men-tale, par exemple agents communautaires de soutien en santé mentale✔ Impliquer et former les membres de la famille, les usagers et les bénévoles en tant qu’« experts locaux » pour des activités de soutien ou de contact spécifiques (tout en prenant soin de ne pas remplacer les agents de santé mentale professionnels par ces bénévoles)

✔ Utilisation plus efficiente du personnel disponible✔ Créer des mécanismes et des incitations pour redistribuer le personnel✔ Utiliser du personnel aux aptitudes multiples✔ Améliorer l’adéquation des compétences aux fonctions

✔ Améliorer les conditions salariales ✔ Établir des structures de carrière/d’avancement✔ Introduire des incitations ✔ Améliorer les conditions de travail✔ Investir dans la formation à la gestion✔ Mettre sur pied des structures de supervision et de soutien✔ Mettre sur pied une direction apportant un soutien✔ Impliquer les dirigeants locaux dans des stratégies spécifi-ques orientées vers des objectifs partagés et novateurs✔ Conditionner au moins une partie des incitations pour les membres de l’équipe locale aux objectifs atteints

✔ Engager des prestataires privés pour des tâches cliniques ou le développement de services spécifiques✔ Améliorer les salaires et les conditions de travail dans le sec-teur public (en particulier les prestations sociales)✔ Introduire des plans d’apprentissage tout au long de la car-rière pour les employés du secteur public✔ Réguler les prestataires privés✔ Fournir des contrats souples permettant un partenariat entre les secteurs public et privé

Page 76: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Le mélange de compétences précis et le nombre de membres du personnel requis dans un pays dépend également de tout un éventail de variables ne pouvant pas être quantifiées. Il s’agit par exemple de facteurs sociaux et culturels ainsi que de la percep-tion que la population locale a des besoins en soins de santé mentale. Par exemple, au Cambodge, des efforts ont été entrepris pour coordonner un programme de santé men-tale communautaire avec des tradipraticiens (Somasundaram et al., 1999). Au Nigeria, de nombreux gouvernements d’États reconnaissent aujourd’hui les tradipraticiens dans les soins de santé générale, y compris santé mentale (O. Odejide, Directeur, Post Graduate Institute for Medical Research and Training, University of Ibadan College of Medicine, Nigeria, communication personnelle). Dans d’autres milieux, les profanes peuvent jouer un rôle crucial en tant que conseillers dans le domaine des soins de santé mentale. Les calculs des effectifs adéquats doivent donc être rectifiés en tenant compte du rôle com-plémentaire des tradipraticiens et des conseillers profanes dans la fourniture de soins.

Points essentiels : Étape 3. Définition des objectifs

Tâche 1 : Comparer les effectifs et les besoins

Après avoir calculé les effectifs actuels et estimé les besoins en effectifs, il est possible de définir les objectifs. Pour définir les objectifs, il faut comparer les deux blocs d’infor-mations qui ont été collectés auparavant (à savoir les effectifs et les besoins).

Tâche 2 : Adapter les objectifs en fonction de l’utilisation : des ressources humaines « croissantes »

Lors de la comparaison entre l’offre et la demande, il est probable qu’un fossé important apparaîtra entre les effectifs actuellement disponibles et l’estimation du personnel néces-saire pour répondre aux besoins de la population. Par conséquent, il faut adopter une méthode permettant de classer les objectifs en tenant compte de l’utilisation des services et des réalités budgétaires.

Après avoir calculé la différence entre les effectifs actuels et les besoins, et défini des priorités pour le développement des RH à la lumière de la politique actuelle, de l’utilisation des services et des budgets alloués, il est possible d’adopter une ligne de conduite spé-cifique. Celle-ci peut être orientée soit vers les effectifs disponibles, soit vers les besoins en effectifs. On peut identifier différents objectifs et stratégies potentiels.

3.4 Étape 4. Mise en œuvre

Une fois que les objectifs en matière de personnel ont été définis, leur mise en œuvre nécessite une gestion et une formation efficaces des RH. En raison de leur importance, ces sujets sont abordés à part dans les parties 4 et 5.

Vous trouverez les détails de la mise en œuvre des plans pour les services de santé mentale dans le module Planification et budgétisation pour l’offre de services de santé mentale.

Tout un éventail de variables ne pouvant pas être quanti-fiées peut également affecter les effectifs et le mélange de compétences nécessaires.

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Page 77: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

4. Gestion des ressources humaines

4.1 Direction, motivation et burn-out

Diriger suppose la capacité à cultiver une vision et des valeurs partagées par d’autres, à lancer et encadrer des activités au sein d’un groupe ou d’une organisation et à inspirer et conserver la confiance.

La direction est tout aussi importante pour le secteur de la santé mentale que pour tout autre aspect des services de santé (International Mental Health Leadership Programme, www.cimh.unimelb.edu.au/imhlp. Une direction disposant d’une formation officielle est rare dans les systèmes de santé, et de nombreuses personnes ayant un potentiel de direction ne sont ni formées, ni expérimentées (OMS, 1993).

Voici quelques qualités devant être développées par les dirigeants :

une bonne compréhension de la vision du service de santé mentale et des aspects de santé mentale de la politique de la santé ;une capacité à développer et communiquer cette vision, y compris la capacité à mobi-liser des ressources et générer une bonne volonté politique ;la capacité à identifier les questions critiques qui affectent la réalisation des objectifs des services ;une confiance issue de la certitude de disposer des compétences et de l’expérience requises ;la capacité à motiver autrui et à mobiliser l’engagement au service des objectifs ;la capacité à travailler en équipe ou indépendamment avec une supervision limitée ;la capacité à déléguer les responsabilités ;une bonne aptitude à écouter et le respect de l’autonomie d’autrui ;une ouverture d’esprit et une orientation vers la communauté.

Les actions requises pour développer la direction dans les services de santé mentale sont notamment :

la détection du potentiel de direction présent dans le personnel ;la formation de dirigeants (OMS, 1993) ;la mise en place de dirigeants à des postes où leurs aptitudes de direction peuvent être utilisées pour le bien des services ;l’évaluation continue des dirigeants dans ce rôle.

On a besoin de personnel motivé, et ceci a des implications financières, cliniques et humanitaires. Une main-d’œuvre motivée est plus efficiente (plus de travail accompli pour le même prix) et plus efficace (le travail accompli donne de meilleurs résultats pour les usagers des services). Un personnel motivé a plus de chances d’être satisfait de son travail, de rester à son poste et donc de créer une plus grande stabilité à long terme pour les services.

La motivation influence aussi la capacité à s’adapter aux changements ou à prendre l’ini-tiative de changements adéquats dans une organisation. Un personnel motivé a plus de chances de s’adapter aux changements et de fournir des services correspondant aux preu-ves d’efficacité des soins toujours renouvelées. Les interventions fondées sur des preuves ont quant à elles plus de chances d’améliorer les résultats, ce qui améliore la motivation. Au niveau gestionnaire, un personnel motivé a moins besoin de direction et de supervision, prend plus volontiers des responsabilités et est plus enclin à demander des réactions à ses performances. Enfin, un personnel motivé a plus de chances de se sentir personnellement satisfait et de voir ses besoins et ses droits pris en compte (OMS, 1993).

•••••

•••

La direction est tout aussi importante en santé mentale que dans tout autre aspect des services de santé.

Les dirigeants doivent bien comprendre la vision des services de santé mentale. Ils doivent également savoir communiquer et développer cette vision.

Une bonne motivation du personnel apporte des avan-tages financiers, cliniques et humanitaires.

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Page 78: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Différents facteurs sont associés à une meilleure motivation du personnel (OMS, 1993) :

marge de réussite et de succèsreconnaissance des succèsbonnes relations avec les collèguesidentification au groupe ou sens d’appartenancepossibilités de croissance personnellepossibilités de résoudre les problèmesdirection engagée dans le groupe ou l’équipeautonomie et auto-régulationréduction des hiérarchies et bureaucraties inutilestransparence et traçabilité des plans des servicesparticipation à la prise de décisionssécurité de l’emploiamélioration des conditions de vie et de la sécurité généraledéveloppement professionnel continusoutien émotionnel et psychologique structuré

Quelles sont les implications de ces facteurs pour la motivation dans les services de santé mentale ? Une organisation qui s’efforce de motiver la main-d’œuvre doit fournir autant de gratifications financières et de sécurité que possible, fournir un environnement qui encou-rage le travail en équipe et l’amitié, offrir des occasions de statut et de reconnaissance à un stade précoce de la carrière, offrir au personnel sécurité et soutien pendant la grossesse et le congé parental, assurer des occasions d’explorer de nouvelles pistes plus tard dans la carrière, et contrôler en permanence son adéquation avec les membres du personnel afin d’assurer que leurs besoins sont remplis (OMS, 1993).

Le Ghana est un exemple d’amélioration de la motivation du personnel en dépit de res-sources limitées. Bien qu’il ait été difficile d’augmenter les salaires du personnel de santé mentale par rapport à ceux du personnel de santé générale, dans certains cas, il a été possible de fournir un logement gratuit et un avancement plus rapide dans le secteur de la santé mentale. Ceci a non seulement amélioré la motivation, mais aussi attiré du personnel (J.B. Asare, Chef psychiatre, communication personnelle).

Le moral du personnel et le burn-out sont des sujets importants à prendre en compte pour la planification dans les services de santé mentale. Le burn-out est un problème qui touche en particulier le personnel dans le secteur de la santé mentale en raison de facteurs spécifi-ques à ce domaine : ce personnel a souvent affaire à des usagers dont le comportement est étrange ou insolite ; il y a parfois des menaces verbales ou physiques de la part des usagers ; une agression physique peut également avoir lieu ; dans les services disposant de peu de ressources, des unités négligées, le manque de médicaments nécessaires, des conditions sanitaires médiocres et une surpopulation peuvent contribuer à saper le moral du personnel ; de nombreuses personnes atteintes de troubles mentaux sont très exigeantes vis-à-vis des cliniciens et accusent parfois ceux qui veulent les aider ; bien souvent, les personnes atteintes de troubles mentaux graves et chroniques font des progrès lents et offrent peu de gratifications au personnel – de fait, les cliniciens sont généralement en contact avec les usagers des services en période de crise ou de difficultés (Thornicroft & Tansella, 1999). Ceci s’applique tout particulièrement aux membres du personnel se trouvant à un «bas» échelon de la hiérarchie – ce sont eux qui ont généralement le plus de contacts directs avec les usagers et le moins de possibilités d’influencer la nature et l’organisation de leur travail.

Par exemple, l’expérience d’une agression physique a un impact important si le personnel n’a pas été formé à évaluer les risques et à intervenir dans une situation potentiellement dangereuse. Le moral du personnel peut être affecté par l’environnement social général, en particulier dans les pays fortement atteints par le VIH/sida et en raison de l’insécurité

•••••••••••••••

Il y a divers facteurs asso-ciés à l’amélioration de la motivation du personnel.

Un service voulant améliorer la motivation du personnel doit établir des conditions en ce sens.

Le burn-out est un problème qui touche en particulier le personnel dans le secteur de la santé mentale en raison de facteurs spécifiques à ce domaine.

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Page 79: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Obstacles

Caractéristiques du burn-out du personnel (Mosher & Burti, 1989, cité dans Thornicroft & Tansella, 1999) :

Manque d’énergieManque d’intérêt pour les clientsLes clients sont ressentis comme frus-trants, désespérants, incurablesFort taux d’absentéismeFréquents renouvellements du person-nelDémoralisation

Causes du burn-out du personnel :

1. Milieu trop hiérarchique2. Trop de règles introduites de l’exté-

rieur, pas d’autorité et de responsa-bilité locales

3. Groupe de travail trop nombreux ou manquant de cohésion

4. Trop de clients, sentiment d’être débordé

5. Trop peu de stimulation6. Trop de routine

•••

••

Solutions

Caractéristiques du travail (Rosen, 1999, cité dans Thornicroft & Tansella, 1999) :

1. Possibilités de contrôle2. Occasions de mettre ses talents à

profit3. Diversité4. Clarté de l’environnement (y compris

réactions régulières, prévisibilité des actions d’autrui et clarté du rôle attendu)

5. Gratifications financières6. Sécurité physique7. Possibilités de contact inter-person-

nels8. Position sociale valorisée

découlant de conflits civils et de violence. Il faut être prudent lorsqu’on embauche des employés ayant eux-mêmes été victimes d’expériences traumatisantes et n’ayant pas résolu leurs problèmes émotionnels et psychologiques. Ces problèmes risquent de s’ajou-ter aux expériences stressantes qui résultent des soins aux personnes atteintes de troubles mentaux.

Néanmoins, pour de nombreuses personnes, le stress causé par le travail dans le secteur de la santé mentale peut être un défi intéressant et gratifiant car les cliniciens voient les progrès accomplis par leurs clients et par l’efficacité de leurs services. Par exemple, le personnel d’équipes de santé mentale communautaires urbaines aux États-Unis fait l’expé-rience de l’épuisement émotionnel et de la dépersonnalisation, mais le sentiment personnel de réussite et la satisfaction professionnelle restent élevés (Oliver & Kuipers, 1996).

Des stratégies de gestion de la stigmatisation et d’amélioration de l’attitude du personnel vis-à-vis des usagers peuvent aussi améliorer le moral. Par exemple, en adoptant une approche centrée sur la guérison et en bannissant les termes négatifs, le personnel gagne en optimisme vis-à-vis de son travail et des résultats pouvant être obtenus pour les usa-gers. Lorsque les usagers guérissent et restent en bonne santé, le personnel est enclin à avoir une bonne opinion de son travail.

Dans certains cas, il peut être nécessaire de rectifier les ambitions du personnel en fonction du milieu. Par exemple, on ne peut pas exiger du personnel qui travaille avec des person-nes atteintes de troubles chroniques graves les mêmes taux de guérison que du personnel qui travaille avec des cas moins graves. Le fait d’encourager le personnel à adapter ses ambitions à la réalité de l’environnement de travail peut réduire le risque de burn-out. Les obstacles et les solutions pour le burn-out sont présentés dans le tableau 6.

Tableau 6. Obstacles et solutions pour le burn-out

Le stress peut être un défi offrant des occasions de satisfaction personnelle et professionnelle.

61

Page 80: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

4.2 Disponibilité de la main-d’œuvre

4.2.1 Recrutement et fidélisation

Un aspect essentiel de la gestion des RH est la capacité d’un service à attirer du person-nel qualifié et à garder ces personnes de manière durable. En gros, on peut esquisser trois stratégies (The Sainsbury Centre for Mental Health, 2000) :

Attirer et fidéliser. S’assurer que la stratégie des RH est au cœur d’une stratégie organisationnelle plus vaste. Comme pour la politique des RH, la cohérence avec la stratégie organisationnelle plus vaste aide à assurer le soutien politique et financier nécessaire à un recrutement adéquat. Le fait d’attirer du personnel requiert aussi des stratégies de recrutement efficaces. Ceci peut inclure de lutter contre la stigmatisation qui frappe le travail dans le secteur de la santé mentale. Des stratégies réussies en Nouvelle-Zélande ont par exemple consisté en une campagne de marketing pour la santé mentale en tant que secteur de la santé présentant des défis et des gratifica-tions, et en des programmes particuliers offrant une passerelle aux infirmières diplô-mées pour les attirer dans le secteur de la santé mentale (Todd Krieble, Ministère de la Santé, Wellington, Nouvelle-Zélande, communication personnelle).

Pour aider au recrutement, il faut que les exigences d’un poste soient clairement défi-nies dans la description. Ceci doit comprendre une liste des qualités professionnelles et personnelles souhaitées, par exemple prestataire de soins, décideur, gestionnaire, responsable de la communication, dirigeant communautaire, enseignant, prestataire de supervision ; ainsi qu’une description des bonnes pratiques et des normes de soins. Une bonne description d’emploi clarifie les exigences du poste et permet d’évaluer dans quelle mesure le candidat peut y répondre.

Diriger et inspirer. La promotion d’une direction et d’une gestion de haute qualité a de grandes chances de contribuer au recrutement et à la fidélisation d’une main-d’œuvre motivée (voir plus haut le paragraphe sur la direction).

Appuyer et soutenir. La main-d’œuvre en santé mentale sera soutenue si elle béné-ficie d’un appui actif, par exemple sous la forme du développement et de la mise en œuvre d’une stratégie de promotion de la santé mentale pour le personnel et d’une amélioration de la motivation (voir plus haut le paragraphe sur la motivation).

La fidélisation est une stratégie rentable qu’il convient de souligner. Diviser par deux un pourcentage de pertes annuelles de 20% peut être plus avantageux au niveau des effectifs réels que d’essayer de former autant de personnel en un an. Le personnel quittant un emploi est souvent expérimenté et remplit une fonction particulière au sein d’une équipe, de sorte qu’il est difficile de le remplacer par quelqu’un qui vient d’être formé. En Nouvelle-Zélande par exemple, la planification des RH pour les services de santé mentale met l’accent sur la fidélisation du personnel existant, le contexte étant que le nombre de jeunes en formation est suffisant mais qu’il est difficile de fidéliser le personnel dans les services (Todd Krieble, Ministère de la Santé, Nouvelle-Zélande, communication personnelle).

Quelques stratégies de fidélisation :

améliorer la rémunération,emplois sur mesure (adaptation de la description des emplois aux besoins de catégo-ries d’employés ainsi que d’employés individuels),fourniture de formation continue et de possibilités de développer ses talents,amélioration des liens sociaux parmi le personnel, par exemple par le biais de réunions sociales telles que clubs sportifs de manière à générer des loyautés, non seulement vis-à-vis du service, mais aussi vis-à-vis des collègues,

••

••

Un service doit être capable d’attirer du personnel quali-fié et de le fidéliser.

La fidélisation est une straté-gie rentable et essentielle.

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Page 81: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

recrutement de personnes ayant des liens avec la communauté, par exemple en recrutant des agents de santé communautaire originaires de la communauté qu’ils desservent. (Cappelli, 2000).

Pour améliorer la fidélisation dans les pays en développement, il est fortement recom-mandé de fournir la formation spécialisée au sein du pays plutôt que d’envoyer les étu-diants dans les pays développés. En plus d’être plus rentable, cette méthode a l’avantage de fournir une formation correspondant au contexte. Par le biais d’une aide internationale, il est possible d’établir des programmes de formation au sein de pays ne disposant pas de programmes de formation en santé mentale déjà établis. Par exemple, au Cambodge, depuis 1994, le Ministère de la Santé, l’Université d’Oslo et l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) fournissent des programmes de formation pour les agents de santé mentale. Jusqu’à présent, 20 psychiatres et 20 infirmières spécialisées en santé mentale ont été formées dans le pays. Six internes en psychiatrie et neuf infirmières ont participé aux programmes de formation en 2003. La formation a une orientation interna-tionale et le personnel enseignant a été recruté essentiellement dans d’autres pays de la région. Le programme destiné aux psychiatres dure trois ans, les infirmières en santé mentale sont formées pendant un an et demi (Hauff, 1996).

Si les compétences et ressources financières nécessaires pour une formation spécialisée ne sont pas disponibles, il peut être plus rentable d’envoyer les candidats en formation à l’étranger. Au cours de ce processus, il est essentiel d’empêcher le « brain drain » en mettant en place des incitations intéressantes sur place afin que les spécialistes qualifiés reviennent dans leur pays d’origine. Par exemple, à Trinité-et-Tobago, un programme d’échange a été organisé entre le Ministère de la Santé et des universités étrangères pour la formation des psychiatres (Rampersad Parasram, communication personnelle).

Une fois une certaine expérience accumulée dans un pays, il devient préférable d’élabo-rer une formation spécialisée sur place. Ceci peut être facilité en revalorisant les aptitudes de membres clés du personnel en reliant leur formation à une formation fournie par des experts externes engagés dans un programme de développement continu. Par exemple, à Grenade, des consultants de l’Université Dalhousie au Canada ont développé un nou-veau modèle de formation en santé mentale pour les professionnels de la santé travaillant dans des pays à revenus bas et moyens (Stan Kutcher, communication personnelle) (voir annexe 3 pour plus de détails).

4.2.2 Déploiement

Un problème récurrent de la gestion des RH dans les services de santé mentale est le déploiement de personnel dans des régions du pays reculées, rurales ou peu appréciées pour une raison ou pour une autre. Diverses obligations et incitations sont utilisées pour encourager le déploiement de personnel dans ces régions où les besoins sont souvent importants (OMS, 1993). Par exemple :

Des stratégies légales, telles qu’une obligation pour tous les agents de santé mentale de travailler dans certaines régions pendant un certain temps (p. ex. service commu-nautaire d’un an juste après obtention du diplôme en Afrique du Sud pour les méde-cins et les psychologues cliniques).Des stratégies professionnelles, telles que des possibilités de formation post-diplôme offertes uniquement après un service dans une région impopulaire ; jumelage de pos-tes prisés avec des postes moins prisés et rotation ; reconnaissance particulière et meilleures possibilités d’avancement pour le travail dans les régions moins prisées ; dispense de service militaire pour ceux qui travaillent dans des services de santé mentale dans des régions moins prisées.Des stratégies financières, telles que salaires plus élevés pour les postes moins prisés ; avantages particuliers, p. ex. voiture, allocation pour le logement ou pour l’éducation

Dans les pays en dévelop-pement, il est fortement recommandé de fournir la formation spécialisée au sein du pays plutôt que d’envoyer les étudiants dans les pays développés.

La formation spécialisée dans les pays en dévelop-pement doit prévoir des incitations afin de limiter le « brain drain ».

Différentes incitations peu-vent être introduites pour remédier aux problèmes de répartition du personnel au sein d’un pays.

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des enfants, retraite plus élevée ou meilleur logement dans les régions rurales.Des stratégies éducatives, telles que préparation du personnel au cours de la formation à un travail dans une région rurale reculée disposant de très peu de technique mais de beaucoup d’indépendance ; fourniture de possibilités d’éducation aux personnes originaires de régions rurales reculées (p. ex. bourses) qui restent plus facilement dans ces régions une fois diplômées ; formation spéciale pour le personnel travaillant déjà dans ces régions, p. ex. réunions de membres du personnel pour échanges d’ex-périences et formations ; formation comprenant une préparation au travail avec des collègues moins qualifiés tels qu’agents de santé des villages, soignants à domicile ou tradipraticiens ; fourniture de possibilités de soutien continu et de supervision par des institutions universitaires.Des stratégies de gestion, par exemple de « personnel volant » pour les cliniques éloi-gnées, les agents de santé mentale rendant régulièrement visite aux communautés (p. ex. une fois par mois). Une utilisation croissante de la technologie rend possible la télépsychiatrie. Pour les régions où il est difficile d’attirer des psychiatres, l’utilisation de la télépsychiatrie peut être un moyen rentable d’évaluer les usagers des services, de se concerter avec les prestataires de soins primaires et/ou de fournir une éduca-tion et une formation.

Les gestionnaires des RH dans le domaine de la santé mentale doivent sélectionner la stratégie la plus appropriée et la plus faisable pour leur situation particulière.

Par exemple, au Ghana, un moyen efficace d’attirer du personnel de santé mentale dans les régions reculées a été de mettre en œuvre la politique de décentralisation du gouver-nement. Les autorités politiques et institutions de districts sélectionnent du personnel ou des bacheliers de leur région pour les former en tant qu’agents de santé mentale dans le district. Comme ils vivent dans ces régions et en partagent les caractéristiques culturelles, ils y reviennent généralement après leur formation et y restent un certain temps pour tra-vailler. Ceci est préférable à un redéploiement d’agents de santé mentale urbains qui, bien souvent, préfèrent démissionner plutôt que de partir dans une région rurale reculée. Un soutien spécialisé périodique pour les régions défavorisées est également avantageux pour remonter le moral du personnel qui y travaille (J.B. Asare, communication personnelle).

Le déploiement de personnel bien formé dans les régions mal desservies est un proces-sus continu et non une tâche pouvant être réglée une fois pour toutes. Les pays doivent développer des systèmes permettant de pratiquer un déploiement efficace du personnel à long terme. Par exemple :

contrôle annuel de la répartition du personnel au sein d’une région/du pays ;évaluation de la rentabilité de différentes stratégies de déploiement du personnel (comme décrit plus haut) ;soutien continu, supervision et structures de formation pour le personnel travaillant dans des régions rurales reculées.

4.2.3 Engager des prestataires du secteur privé

Les planificateurs des RH dans le secteur de la santé mentale doivent développer une politique en rapport avec les prestataires du secteur privé. Dans bien des pays, les limi-tes entre le secteur « public » et le secteur « privé » sont de plus en plus floues. Ceci est vrai du financement des services, les services « publics » passant souvent des contrats avec le secteur privé. C’est aussi vrai de la manière dont ils sont utilisés puisque certains usagers de services font appel à toute une gamme de prestataires publics et privés d’as-surances pour assurer leurs besoins. Et cela s’applique également à la manière dont les prestataires de services travaillent, de nombreux employés du secteur public complétant leurs revenus dans le privé.

••

Le déploiement de personnel bien formé dans les régions mal desservies est un pro-cessus continu.

Les limites entre le secteur « public » et le secteur « privé » sont de plus en plus floues.

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Par conséquent, il est primordial pour les planificateurs des RH et les décideurs du secteur public de développer une approche pragmatique et complète, ayant pour but de construire des partenariats entre des secteurs officiellement appelés « public » et « privé ». Par exemple, dans un pays ayant un système de soins essentiellement privé, ceci peut représenter une menace pour le secteur public car le privé attire ses employés par des perspectives de salaires plus élevés et de meilleures conditions de travail. Cependant, il peut y avoir des aspects positifs. Il est possible de passer des contrats avec le secteur privé pour que celui-ci fournisse des services spécifiques (formation de prestataires du secteur public, formation des étudiants, sessions cliniques ambulatoires). D’autres avantages peuvent être que le secteur public paye uniquement pour les services rendus et n’a pas besoin d’assurer les salaires, les prestations sociales, les impôts et, dans certains cas, les établissements.

À Trinité-et-Tobago, la majorité des psychologues travaillent dans le secteur privé, d’où une pénurie problématique dans le secteur public. Pour remédier à ce problème, une initiative d’autorités sanitaires régionales a été d’embaucher des psychologues du privé pour des sessions (c’est-à-dire par le biais de contrats à temps partiel pour réaliser cer-taines tâches précises telles que consultations avec les usagers de services). Une telle approche peut s’avérer utile car une petite île ou un pays en développement n’a pas forcément les moyens d’embaucher un grand nombre de professionnels de haut niveau (Rampersad Parasram, communication personnelle).

Il faut également réguler les prestations du secteur privé et les flux de personnel, en parti-culier dans le cas de partenariats entre le secteur public et le secteur privé (voir le module Financement de la santé mentale).

4.2.4 Utiliser des non-professionnels pour les soins de santé mentale

Pendant les années 1960 et 1970 aux États-Unis, une tendance à faire appel à des non-professionnels pour dispenser les soins de santé mentale est apparue, appelée « dépro-fessionnalisation » (Ivey, Scheffler & Zazzali, 1998). Les agents non-professionnels ont souvent une connaissance plus directe de la communauté, de la langue et des coutumes. En outre, bien souvent, les usagers des services s’identifient plus facilement à eux pour former des alliances thérapeutiques. Des exemples en sont les conseillers religieux, les agents communautaires, les membres de la famille (Association mondiale de la schizoph-rénie et des maladies apparentées, 2001) et les tradipraticiens. Il est important d’assurer que les intervenants non-professionnels aient des compétences adéquates, et que des professionnels puissent être consultés en cas de besoin, par exemple pour s’occuper de cas complexes, fournir une supervision et une consultation de liaison.

Si on veut former et employer de la main-d’œuvre non-professionnelle, des consultations avec le personnel professionnel sont nécessaires afin d’éviter le sentiment que le person-nel non-professionnel mine le personnel professionnel, fait baisser le niveau des soins et sert de main-d’œuvre à bon marché. Ceci peut être réalisé en créant des liens formels entre les groupes professionnels et non professionnels. Une stratégie importante est le soutien et la supervision des non-professionnels par des professionnels.

Au Ghana, l’exode des professionnels de santé mentale dépassait les recrutements. L’accès aux soins de santé mentale était problématique. Par conséquent, il a fallu former des bénévoles. À cet effet, un projet pilote a démarré en 1999 pour trois ans par le biais du projet de l’OMS « Nations for Mental Health ». Les bénévoles sélectionnés par leurs communautés ont été formés à identifier les personnes atteintes de troubles mentaux dans leurs villages. Ils recouraient alors pour ces cas à des prestataires formés à traiter les cas simples – essentiellement des infirmières, auxiliaires médicales et sages-femmes. Une infirmière communautaire en santé mentale rendait visite aux établissements et offrait un soutien. Les bénévoles, qui vivaient dans les communautés, rendaient visite aux

Les planificateurs des RH dans le secteur public doi-vent construire des partena-riats entre le secteur public et le secteur privé.

Les services du secteur privé représentent à la fois une menace et une chance pour la main-d’œuvre du secteur public.

Les non-professionnels sont une ressource précieuse pour les soins de santé mentale.

Pour utiliser des non-professionnels dans les soins de santé mentale, la consultation est un élément essentiel.

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patients et rendaient compte des cas de rechutes. Le gouvernement a maintenant adopté le projet et l’a étendu à d’autres districts (J.B. Asare, communication personnelle).

À Trinité-et-Tobago, une initiative réussie a consisté à nommer des alcooliques guéris en tant qu’agents de rééducation de l’alcoolisme (ARO). Ces nominations ont eu lieu après une formation approfondie. La force des ARO est leur expérience personnelle, leur enga-gement et leur empathie (Rampersad Parasram, communication personnelle).

Dans le township de KwaZakhele, Port Elizabeth, Afrique du Sud, des bénévoles commu-nautaires ont été formés à aider les usagers de services à rester en contact avec les ser-vices de santé mentale débordés. Les bénévoles contactent les personnes qui ont quitté les services et les encouragent à revenir. En effet, les infirmières professionnelles n’ont pas le temps de rendre visite aux communautés. Du matériel de formation et des cours ont été développés, avec la participation et l’approbation de la communauté, en partena-riat entre les organisations communautaires, l’Université de Port Elizabeth et l’Université de Manchester (David Richards, Professeur de santé mentale, Département des Sciences de la Santé, Université de York, Royaume-Uni, communication personnelle). Voir la partie 5 portant sur la formation pour plus de détails sur le matériel de formation utilisé dans ce programme.

4.2.5 Développer des partenariats avec les ONG

Les organisations non-gouvernementales jouent souvent un rôle important dans la pro-motion de la santé mentale, la prévention et le traitement. Pour les planificateurs des RH en santé mentale, les ONG peuvent fournir des ressources utiles en termes de compéten-ces et de connaissances pour la formation et la supervision du personnel dans le secteur public, pour le conseil en planification de services et pour la liaison sur différents aspects de l’offre de services (p. ex. services dans le domaine des traumatismes). Cependant, les ONG doivent être régulées pour ce qui est de leurs pratiques de travail et des services qu’elles fournissent.

En Slovénie, une ONG (l’Association Slovène de Santé Mentale SENT) a pris l’initiative d’un programme de formation pour les usagers de services, leurs familles et les presta-taires de services, couvrant une éducation de base sur la santé mentale et les troubles mentaux, la gestion des soins, l’entraide, les droits de l’homme et les droits des usagers de services de santé mentale, les procédures légales, le travail en équipe et le travail mul-tidisciplinaire, les aptitudes sociales et la rééducation professionnelle. Ceci a élargi la sen-sibilité du public pour la santé mentale et amélioré la communication entre les usagers, les familles et les prestataires de services (Vesna Svab, communication personnelle).

En République Unie de Tanzanie, certaines ONG religieuses dirigent des services de réé-ducation. Un bon exemple en est le Lutindi Lutheran Church Mental Health Rehabilitation Centre, qui est devenu peu à peu un excellent établissement de rééducation. Des pro-fanes de différents secteurs le dirigent avec l’aide d’infirmières expérimentées dans le domaine de la santé mentale. Il s’agit d’un établissement de 100 lits qui organise diverses activités de rééducation telles que l’agriculture, l’élevage, diverses activités d’artisanat ainsi que l’alphabétisation. Le centre est un établissement offrant des ressources pour former le personnel en milieu soignant à la direction de services de rééducation rentables. Il s’agit d’une forme idéale de formation pratique (Joseph Mbatia, Ministère de la Santé, Dar es Salaam, République Unie de Tanzanie, communication personnelle).

Les ressources humaines sont souvent développées par les ONG à l’aide de méthodes peu onéreuses et de ressources disponibles sur place. Un exemple en est celui d’As-hagram, une ONG qui travaille en Inde rurale et forme des jeunes non diplômés en tant qu’agents de santé mentale pour fournir des services de rééducation à des personnes atteintes de troubles mentaux graves (Chatterjee et al., 2003).

Les ONG peuvent fournir des ressources précieuses en termes de compétences pour l’ offre de services, la consultation, la formation et la supervision.

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4.2.6 Utiliser des opportunités stratégiques pour développer les RH

Le développement des ressources humaines est généralement un processus politique complexe qui doit saisir des opportunités stratégiques pour développer les soins de santé mentale (Freeman, 2000 ; Walt, 1994). Des innovations récentes dans le dévelop-pement des RH en santé mentale illustrent le besoin de s’adapter stratégiquement aux préoccupations politiques actuelles. Par exemple, en Afrique du Sud, où les ressources financières sont limitées pour le personnel de santé mentale travaillant dans le secteur public, une stratégie nationale de prévention de la criminalité a fourni une occasion de développer et de former du personnel de santé générale et des enseignants pour leur transmettre des compétences en santé mentale. Cette initiative a fourni les moyens de former des agents de santé générale pour « l’émancipation des victimes », y compris une formation au conseil pour les professionnels de santé. Ceci a aussi conduit à la mise en place de « centres de recours contre la violence » dans certaines régions défavorisées (centres de crise pour les problèmes émotionnels), à la création de programmes de pré-vention de la violence dans les écoles (formation des enseignants à promouvoir la santé mentale dans les écoles), et au développement de programmes de liaison mère-enfant pour prévenir la violence dans les communautés pauvres (Freeman, 2000).

Ceci est un exemple clair de l’adaptation des stratégies de RH au contexte politique et économique dans lequel la santé mentale doit être développée. Il est aussi particulière-ment adapté à la santé mentale parce que de nombreuses personnes atteintes de trou-bles mentaux ne se rendent pas dans les services de santé mais peuvent être détectées dans les écoles ou dans le système judiciaire.

4.3 Pratiques de travail

Les pratiques de travail pour les agents de santé mentale doivent se conformer à la légis-lation en vigueur et aux règlements valables d’une manière générale dans le pays. Lors du développement des pratiques de travail, les droits des agents de santé mentale doivent être respectés. Par exemple, une parité doit être établie entre les salaires et les conditions de travail des agents de santé mentale et des autres agents de santé.

Dans les services de santé mentale de certains pays, il peut s’avérer nécessaire de réviser les pratiques de travail existantes. Le but d’un tel contrôle est d’assurer que les pratiques de travail actuelles respectent les droits des agents de santé mentale et coïncident avec les pratiques de travail du pays dans les autres secteurs.

Lors d’un tel contrôle des pratiques de travail dans le domaine de la santé mentale, les secteurs suivants devront être pris en compte :

sélection du personnelaction affirmativeintégrationdéploiementsyndicalismedisciplinegestion des conflitsautorisations

Ces questions sont abordées plus en détail dans le guide de l’OMS sur la gestion des res-sources humaines pour la santé (Training Manual on Management of Human Resources for Health, OMS, 1993).

••••••••

Le développement des ressources humaines est généralement un processus politique complexe qui doit saisir les opportunités stra-tégiques pour développer les soins de santé mentale.

Les pratiques de travail pour les agents de santé mentale doivent être conformes à la législation et aux règlements en vigueur.

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Points essentiels : Gestion des ressources humaines

La direction est tout aussi importante en santé mentale que dans tout autre aspect des services de santé.La motivation du personnel présente des avantages financiers, cliniques et humani-taires.Le moral du personnel et le burn-out doivent être pris en compte lors de la planifi-cation des RH pour les services de santé mentale. Le burn-out est un problème qui touche en particulier le personnel dans le secteur de la santé mentale en raison de facteurs spécifiques à ce domaine.Un aspect essentiel de la gestion des RH est la capacité d’un service à attirer du personnel qualifié et à le fidéliser durablement.Un problème récurrent de la gestion des RH dans les services de santé mentale est la recherche de personnel prêt à travailler dans des régions du pays reculées, rurales ou peu appréciées pour une raison ou pour une autre. Diverses incitations peuvent être utilisées pour encourager le déploiement de personnel dans ces régions où les besoins sont souvent importants.Les planificateurs des ressources humaines dans le secteur de la santé mentale doivent développer une politique en relation avec les prestataires du secteur privé et travailler en partenariat avec ceux-ci.Il y a diverses possibilités d’impliquer des prestataires non professionnels dans le secteur de la santé mentale.Le développement des ressources humaines est généralement un processus politique complexe qui doit saisir des opportunités stratégiques pour développer les soins de santé mentale.Les pratiques de travail pour les agents de santé mentale doivent être conformes à la législation en vigueur et aux règlements valables pour le reste du secteur de la santé et pour la population générale d’un pays.

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5. Éducation et formation

L’éducation et la formation du personnel du secteur de la santé mentale doivent découler logiquement des objectifs définis lors de la planification des RH (Green, 1999). La forma-tion doit avoir pour but de servir les besoins en santé mentale d’une société en produisant du personnel en mesure de délivrer des soins de manière compétente et en accord avec les objectifs de la politique et de la planification des RH (Boelen et al., 1995).

Ceci suppose une coordination et le développement de politiques cohérentes entre le secteur qui fournit les soins et le secteur qui fournit la formation (OMS, 1995). Dans de nombreux pays, ceci implique une étroite collaboration entre les départements de l’éducation et de la santé. Les principales institutions de formation doivent participer activement à la fourniture des soins en santé mentale dans tous les milieux (communau-tés, établissements de soins en résidence, hôpitaux). Le risque d’un décalage important entre l’éducation, la formation, les milieux réels et les milieux du travail quotidien est plus important en périodes de transformation rapide du système de santé mentale. Une attention particulière doit alors être accordée aux liens entre les institutions de formation et les services. Dans les petits pays à faibles revenus ne disposant pas d’institutions de formation, il peut s’avérer nécessaire que le Ministère de la Santé établisse une équipe de formation et la développe peu à peu. Les membres de cette équipe doivent refléter les compétences et les rôles nécessaires et être intégrés au système de soins.

Bref, il faut un partenariat ouvert et constructif entre les planificateurs et les prestataires de formations. La conception des programmes de formation doit se baser sur les com-pétences cibles requises pour la main-d’œuvre en santé mentale, telles qu’elles ont été esquissées lors de la définition des objectifs (processus décrit plus haut). Par conséquent, cette partie utilise la pyramide pour l’organisation des services définie par l’OMS (figure 1) en tant que cadre pour examiner l’éducation et la formation des RH. La formation doit être étroitement liée aux niveaux de services, à leurs fonctions et aux compétences requises pour dispenser tout service. Pour chaque niveau de la pyramide d’organisation des services, cette partie décrit :

les fonctions du niveau de services,les compétences requises pour les différents agents de santé et de santé mentale,des exemples de programmes de formation utiles, de stratégies d’enseignement et de ressources.

Cette partie fournit des exemples de compétences générales requises à différents niveaux d’offre de services, mais pas pour chaque catégorie d’agents de santé ou de professionnels à chaque niveau de services. De tels détails ne peuvent pas être fournis pour tous les pays du monde. Et ce pour deux raisons : premièrement, ce serait trop prescriptif et ne correspondrait pas forcément aux besoins de tous les pays ; deuxième-ment, cela ne couvrirait pas la large gamme d’ offre de services dans les différents pays. Il est recommandé d’effectuer une analyse détaillée des compétences requises pour chaque professionnel aux différents niveaux de services dans le pays, où les informations nécessaires à cet effet sont disponibles.

Deux autres points méritent d’être soulignés :

(i) Les services, les fonctions des services et les professionnels indiqués pour chaque niveau de services varient selon le pays. Ainsi, des exemples de programmes de for-mation et de stratégies d’enseignement présentés dans cette partie ne représentent pas une liste exhaustive de tous les programmes et de toutes les stratégies possibles. Ils sont mentionnés uniquement à titre d’exemples.

•••

La formation du person-nel de santé mentale doit correspondre aux objectifs définis par la planification des RH.

Il faut un partenariat ouvert et constructif entre les plani-ficateurs et les prestataires de formations.

Dans cette partie, les exigen-ces de formation sont défi-nies pour chaque niveau de la pyramide d’organisation des services de l’OMS.

Les services, les fonctions des services et les pro-fessionnels indiqués pour chaque niveau de services varient selon le pays.

Différents professionnels travaillant à chaque niveau de services n’ont pas tous les mêmes compétences et n’ont pas non plus besoin des mêmes compétences.

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(ii) Différents professionnels travaillant à chaque niveau de services n’ont pas tous les mêmes compétences et n’ont pas non plus besoin des mêmes compétences. Par exemple, les professionnels du niveau de services de santé primaires comprennent des médecins, des infirmières, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux. Les compétences esquissées ci-dessous se rapportent au niveau de services plutôt qu’aux professionnels individuels. Différents pays peuvent utiliser différents modèles. Par exemple, certains pays peuvent avoir besoin de professionnels disposant tous d’une base minimale de toutes les compétences esquissées ci-dessous, et de seule-ment quelques professionnels travaillant à un certain niveau ayant un niveau supérieur d’une compétence particulière. D’autres pays peuvent avoir besoin de groupes de professionnels ayant uniquement des compétences spécifiques à leur groupe et pas d’autres compétences, tout en assurant un mélange adéquat de professionnels des différents groupes à chaque niveau de services de sorte que toutes les compétences nécessaires seront disponibles à chaque niveau.

5.1 Fonctions des services et exigences de formation pour obtenir un mélange optimal de services de santé mentale

5.1.1 Services de santé mentale communautaires informels

Les membres des communautés locales qui ne sont pas des professionnels de la santé ou de la santé mentale fournissent divers services. Exemples de personnes travaillant à ce niveau d’offre de services : bénévoles profanes, agents communautaires, personnel des organisations de sensibilisation, coordinateurs de groupes d’entraide/d’usagers, agents de l’aide humanitaire, tradipraticiens, autres professionnels tels qu’enseignants et agents de police.

Ces prestataires de soins communautaires informels ont souvent peu ou pas de forma-tion officielle dans le domaine de la santé mentale, mais dans de nombreux pays en déve-loppement, ils sont les principaux prestataires de soins de santé mentale. En général, ils sont faciles d’accès et bien acceptés dans les communautés locales. Ils peuvent aider à intégrer les personnes atteintes de troubles mentaux dans la communauté et jouer ainsi un rôle de soutien important pour les services de santé mentale formels.

(i) Fonctions

Il est important de souligner qu’il est peu probable que les prestataires de services de santé mentale communautaires informels forment le cœur de l’offre de services de santé mentale. En fait, les pays n’ont pas intérêt à se baser uniquement sur leurs services. Cependant, ces personnes peuvent compléter les services officiels de santé mentale et constituer des alliés précieux.

Quelques fonctions importantes remplies par les services informels :

Soins de soutien, y compris conseil et entraide. Ils peuvent fournir le conseil de base pour les problèmes de santé mentale brefs et aigus. Ceci comprend un conseil de soutien individuel, le soutien familial, ainsi que des conseils en groupe pour les personnes atteintes de troubles mentaux et leurs familles. Ils peuvent jouer un rôle important en catalysant la mise en place de groupes d’entraide et de groupes de soutien pour les individus, les soignants et les familles. Ils peuvent également fournir des services de jour pour les personnes atteintes de troubles mentaux.

Aide pour des activités de la vie quotidienne et pour la réintégration à la communauté. De nombreuses personnes atteintes de troubles mentaux ont du mal à accéder aux services nécessaires à la vie dans une communauté. Par exemple, nombre de person-nes atteintes de maladies mentales chroniques graves ont beaucoup de mal à faire

Les membres des commu-nautés locales qui ne sont pas des professionnels de la santé ou de la santé mentale fournissent divers services.

Les pays n’ont pas intérêt à se baser uniquement sur les prestataires de services de santé mentale communau-taires informels.

Les services informels peu-vent compléter les services de santé mentale officiels et remplir des fonctions impor-tantes.

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leurs achats, à utiliser les transports en communs, à obtenir leurs allocations, et bien d’autres choses encore. Les services informels peuvent jouer un rôle important d’aide pour ces personnes dans ces activités, leur apportant ainsi un soutien à la réintégra-tion dans la communauté.

Sensibilisation aux droits des personnes souffrant de troubles mentaux. Les services informels peuvent jouer un rôle de sensibilisation important. Par exemple, ils peuvent éduquer les individus et les familles sur des questions de santé mentale et de direc-tion, aider les individus et leurs familles à former leurs propres organisations et partici-per au développement, à la planification, à l’évaluation et à la surveillance des services de santé mentale. Ils peuvent également contribuer au développement de politiques et de législations relatives à la santé mentale. D’autres actions de sensibilisation sont par exemple des programmes de prise de conscience, des campagnes d’information, l’éducation et la formation.

Services de prévention et de promotion de la santé. De tels services sont par exem-ple des enseignants fournissant des interventions de santé mentale dans les écoles, des programmes de prévention de l’abus d’alcool et de drogues, des interventions destinées à réduire la violence domestique. Dans la plupart des pays, des membres des communautés qui ne sont pas forcément des professionnels de la santé mentale fournissent ces services et, bien souvent, ces interventions font partie d’interventions sanitaires et/ou sociales plus vastes.

Soutien pratique. Dans de nombreuses communautés, les profanes fournissent le soutien pratique de base, par exemple des logements communautaires pour les personnes atteintes de troubles mentaux, des possibilités d’emploi dans des ateliers protégés et dans des emplois ouverts, des abris pour les femmes victimes de mauvais traitements et de violence domestique.

Soutien de crise. Les services informels peuvent jouer un rôle précieux dans l’inter-vention de crise, par exemple le conseil dans des cas d’urgence humanitaire, la mise en place et le fonctionnement de lignes téléphoniques de crise, le soutien de crise et l’aide pour les familles en détresse, le conseil de soutien aux femmes victimes de violence domestique.

Identification de problèmes de santé mentale et recours à des services de santé. Lorsque les prestataires de services informels sont en mesure d’identifier les person-nes atteintes de problèmes mentaux mais n’ont pas les compétences requises pour résoudre ces problèmes, une fonction clé consiste à recourir pour ces personnes à un service compétent et équipé pour traiter ce genre de problèmes.

(ii) Compétences requises

Par définition, les membres des communautés locales impliqués dans les soins commu-nautaires informels ne sont pas censés avoir une formation officielle en santé mentale. En outre, il s’agit d’un groupe hétérogène comprenant des profanes et des membres de la famille n’ayant éventuellement aucune formation en santé mentale, des tradipra-ticiens ayant éventuellement une formation à des systèmes de soins indigènes, des professionnels d’autres domaines tels qu’activistes pour les droits de l’homme, avocats, enseignants, agents de police, lesquels peuvent être impliqués dans nombre de fonc-tions décrites ci-dessus. Par conséquent, il n’est pas possible de prescrire des critères minimaux de compétences pour les personnes impliquées dans la fourniture de soins informels. Il est plus utile de réfléchir à des compétences discrètes permettant à ces personnes de fournir une aide plus efficace aux personnes souffrant de troubles mentaux dans la communauté.

Ce groupe hétérogène peut avoir tout une gamme de compétences et il n’est pas possible de prescrire des critères minimaux de com-pétences.

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Page 91: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Les compétences utiles à ce niveau de services communautaires informels sont par exemple :

Une compréhension de base des troubles mentaux. Ceci comprend une compréhen-sion des symptômes des troubles mentaux et comment ceux-ci affectent le com-portement des personnes touchées. Ceci nécessite également une compréhension des besoins en traitement, y compris interventions médicales et psychosociales. De plus, il est utile d’avoir une compréhension des besoins des personnes atteintes de troubles mentaux en soins continus, du rôle des facteurs psychologiques et environ-nementaux dans les rechutes, et des effets des troubles mentaux sur la capacité des personnes à gérer les activités de la vie quotidienne et à gérer la stigmatisation et la discrimination.

Des compétences de conseil de base. Ceci comprend une aptitude à écouter et à communiquer, en particulier une capacité d’écoute empathique. Il convient de fournir une formation pour des compétences de base telles que la nécessité de maintenir la confidentialité, la gestion des conflits d’intérêts qui peuvent apparaître quand on a affaire aux personnes touchées et à leurs familles, le maintien d’une position neutre et la gestion d’émotions éprouvantes. Le but est d’aider les prestataires de soins communautaires informels à fournir des interventions de conseil de soutien de base. Ils n’ont pas forcément besoin d’être formés à des techniques spécifiques de psychothérapie, même si, dans certains cas, ils peuvent être supervisés par des professionnels formés.

Sensibilisation. Ceci est particulièrement utile parce que les prestataires de soins communautaires informels sont les mieux placés pour s’engager pour les personnes atteintes de troubles mentaux auprès de prestataires de services professionnels (y compris prestataires de soins de santé générale et de santé mentale) ainsi que d’institutions. Il peut être nécessaire de les mettre au courant du cadre légal et des droits des personnes atteintes de troubles mentaux, ainsi que de les former à une communication efficace en public et à la négociation pour les aider dans leur travail de sensibilisation.

Encadré 4. Services de santé mentale communautaires informels : Exemples de programmes de formation, de stratégies et de ressources

AFRIQUE DU SUD

Aide aux personnes atteintes de maladies mentales : programme de formation en santé mentale pour les agents de santé communautaires

Un système de suivi à domicile pour les personnes ayant perdu le contact avec les servi-ces a été développé avec des bénévoles et des professionnels de santé mentale clinique dans la communauté de KwaZakhele, qui fait partie de la Nelson Mandela Metropolitan Municipality, dans la province du Cap-Est en Afrique du Sud. KwaZakhele a plus d’un demi-million d’habitants, les taux de pauvreté et de chômage y sont très élevés et l’accès aux services de santé mentale d’État y est limité. À l’aide de matériel pédagogique et d’enseignants fournis par l’Université de Manchester (Royaume-Uni) et l’Université de Port Elizabeth (Afrique du Sud), des bénévoles ont été formés à comprendre les caractéristiques principales de troubles mentaux courants et graves, à estimer le rôle des traitements de santé mentale, et à développer des aptitudes à communiquer efficacement avec les per-sonnes atteintes de troubles mentaux. Du matériel pédagogique a été élaboré selon une approche de « formation des formateurs », sous la direction des profanes, de manière à per-mettre aux bénévoles initialement formés de former à leur tour d’autres bénévoles. Le cours se compose de huit modules sur différents sujets relatifs à la santé mentale, par exemple

Cependant, il est possible d’identifier une liste de com-pétences utiles.

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Page 92: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

comment aider les personnes à suivre leur traitement médicamenteux, quelles sont les autres manières de gérer les problèmes de santé mentale, ou comment retrouver les per-sonnes qui quittent les services de santé mentale. Les modules peuvent être combinés de diverses manières pour préparer des cours pour différents groupes cibles. Par exemple, un cours d’introduction à des connaissances de base en santé mentale et à la communication avec les personnes atteintes de troubles mentaux peut être réalisé à l’aide de trois modules seulement. Chaque module comprend un cours d’une durée d’environ trois heures. Les instructions sont faciles à suivre et chaque module contient tout le matériel nécessaire. Ce matériel se présente de telle sorte que n’importe qui puisse l’utiliser pour former d’autres personnes. À la suite de la formation, les bénévoles ont mis en place le système de suivi à domicile en collaboration avec les services de santé mentale de KwaZakhele. Au cours d’une évaluation préliminaire, les bénévoles ont pu retrouver 85% des patients qui avaient perdu le contact avec les services. Sur ceux-ci, 58% sont retournés à la clinique pour leurs rendez-vous, tandis que d’autres résultats (déménagements, décès, séjours hospitaliers) ont été détectés pour le reste.

Ces modules sont disponibles sur le site Internet de l’OMS sous : http://www.who.int/mental_health/policy/education/en/

AFRIQUE DU SUD

Training Manual for South African Police Services (Manuel de formation pour les services de police d’Afrique du Sud), élaboré par le National Directorate of Mental Health and Substance Abuse, Département de la Santé, Afrique du Sud. Ces directives ont été éla-borées pour aider les agents de police à gérer les situations dans lesquelles ils doivent aider ou ont affaire à une personne atteinte de troubles mentaux. Le manuel contient des informations sur les troubles mentaux, une esquisse des services de santé mentale d’Afri-que du Sud et des scénarios de formation. En particulier, le manuel fournit un guide pour gérer des situations pratiques avec une personne pouvant avoir une maladie mentale, pour gérer une personne ayant une maladie mentale et étant violente ou potentiellement violente, et une formation à des techniques de désescalade et de contrainte. Ce manuel est disponible sur le site Internet de l’OMS sous : http://www.who.int/mental_health/policy/education/en/

ROYAUME-UNI

Disability Alliance, Training Programme in Benefits and Mental Health (Alliance sur le handicap, programme de formation sur les prestations de santé mentale). Le but de ce cours est de faire prendre conscience aux participants des questions de santé mentale et comment celles-ci affectent les personnes qui demandent des prestations sociales. On leur enseigne comment conduire un entretien et aider les clients à se servir du sys-tème pour faire des demandes avec succès. Le cours s’adresse aux bénévoles et aux employés des centres de conseil ayant déjà une certaine connaissance du système d’assurances sociales. Pour plus d’information, voir le site Internet suivant : http://www.disabilityalliance.org

GHANA

Psychiatric Notes for Volunteer Community Workers (Notes de psychiatrie pour les agents communautaires bénévoles). Ces notes, élaborées par l’unité de santé mentale du Ministère de la Santé du Ghana, font partie du Nations for Health Project et sont destinées à aider les bénévoles qui travaillent avec des personnes atteintes de troubles mentaux. Les notes sont divisées en six chapitres et couvrent les symptômes de troubles mentaux, les troubles mentaux courants tels que dépression, psychose, abus d’alcool et de drogues, épilepsie, la gestion de ceux-ci, la gestion du stress et les questions d’éthi-

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Page 93: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

que relatives à la santé mentale communautaire. Ces notes sont disponibles sur le site Internet de l’OMS sous : http://www.who.int/mental_health/policy/education/en/

N.B. : Ces exemples sont présentés à titre d’illustration et ne sont pas des recomman-dations de l’OMS.

5.1.2 Services de santé mentale fournis par les soins de santé primaires

Pour les pays disposant de ressources humaines limitées dans le domaine de la santé mentale, le fait de fournir les services de santé mentale par le biais des soins primaires est l’une des voies les plus efficaces et viables pour améliorer l’accès aux soins de santé mentale. Dans la plupart des pays, les services de santé primaires sont beaucoup mieux développés et atteignent une part beaucoup plus importante de la population que les services de santé mentale. Il n’est donc pas surprenant que, dans bien des pays, les ini-tiatives destinées à améliorer l’accès aux soins de santé mentale se soient tout d’abord concentrées sur l’offre de services de santé mentale par le biais des soins primaires. Les professionnels travaillant à ce niveau sont par exemple les médecins généralistes, les infirmières en soins généraux, les sages-femmes, les aides-soignantes et les agents de santé communautaire.

(i) Fonctions

Identifier les troubles mentaux. Il y a un lien significatif entre les troubles mentaux et physiques. C’est l’occasion pour les services de soins de santé primaires d’identifier les troubles mentaux lorsque quelqu’un demande de l’aide pour un problème physique.

Fournir des médicaments de base et des interventions psychosociales. Les services de soins primaires peuvent fournir des interventions rentables pour des troubles men-taux courants et graves. En particulier, les personnes atteintes de troubles mentaux chroniques stables, habitant dans la communauté et ayant un besoin continu de médicaments psychotropes et d’interventions psychosociales peuvent être aidées par les services de soins primaires au lieu de devoir se rendre en permanence dans des services spécialisés. De nombreuses personnes atteintes de troubles men-taux chroniques graves ont du mal à adhérer au traitement prescrit et risquent par conséquent des rechutes répétées. Les services de soins primaires peuvent fournir les médicaments de manière supervisée et soutenir ces personnes en surveillant les symptômes et le fonctionnement, ce qui permet de prévenir les rechutes et d’amé-liorer les résultats à long terme. Ceci présente deux avantages : premièrement, c’est une méthode plus facile pour les patients car les services de soins primaires sont généralement plus facilement accessibles du point de vue géographique, et moins coûteuse. Deuxièmement, cette méthode réduit la charge qui pèse sur les services de santé mentale spécialisés, lesquels peuvent être utilisés plus judicieusement pour les traitements spécialisés, la supervision et les activités de formation.

Recours à des services spécialisés de santé mentale. Les services de soins de santé primaires peuvent servir autant de porte d’entrée que de point de recours pour les soins de santé mentale. Après avoir effectué une identification préliminaire et un pre-mier traitement des problèmes qui se présentent, ils peuvent recourir aux services spécialisés compétents. Ceci présente plusieurs avantages : les personnes évitent des consultations inutiles dans des services spécialisés, généralement moins accessi-bles et présentant des coûts directs ou indirects de traitement plus élevés. Lorsqu’un recours à un service spécialisé s’avère nécessaire, les personnes concernées ont plus de chance d’être envoyées directement au service compétent ce qui économise du temps et de l’argent. Les services de santé en profitent également car eux-mêmes perdent moins de temps et de ressources financières et humaines à faire le tri. Par conséquent, il est très important de mettre en place un système de recours et de

Pour les pays disposant de ressources humaines limitées dans le domaine de la santé mentale, le fait de fournir les services de santé mentale par le biais des soins primaires est l’une des voies les plus efficaces et viables pour améliorer l’accès aux soins de santé mentale.

Les services de soins de santé primaires peuvent remplir diverses fonctions relatives aux soins de santé mentale.

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Page 94: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

liaison clairs et fonctionnels pour relier les services de soins de santé primaires avec les services de santé mentale.

Psychopédagogie familiale et communautaire. Il est démontré que les patients adhèrent mieux aux schémas thérapeutiques s’ils comprennent leur maladie et le traitement. La connaissance des symptômes, de l’histoire naturelle d’une maladie et des traitements existants améliore les résultats (Craighead et al., 1998). Les services de soins de santé primaires sont bien placés pour dispenser une psychopédagogie familiale simple, autant dans le cadre du travail clinique de routine que pendant des interventions spécifiques pour certains troubles.

Intervention de crise. Les services de soins de santé primaires sont les mieux placés pour fournir des interventions de crise parce qu’ils sont généralement le premier contact de la personne avec les services de santé. L’intervention de crise peut empê-cher le développement de symptômes graves et d’épisodes de maladie ainsi que la détérioration de troubles préexistants. Les services de soins primaires peuvent fournir aussi bien des services d’intervention de crise basés dans une clinique qu’ambulatoi-res. Ils sont bien placés également pour impliquer le cas échéant les services de soins de santé mentale secondaires.

Prévention des troubles mentaux et promotion de la santé mentale. Il s’agit-là d’une fonction essentielle des services de soins primaires. La prévention du suicide est un domaine particulièrement important, pour lequel l’OMS a élaboré un guide (OMS, 2004a). Un exemple de promotion de la santé mentale consiste à renforcer les liens communautaires en établissant des services de soutien pour les personnes margina-lisées (OMS, 2004b).

(ii) Compétences requises

Diagnostic et traitement des troubles mentaux. Le personnel de soins primaires doit avoir connaissance des symptômes et de l’évolution des principaux troubles mentaux ainsi que des médicaments psychotropes disponibles (en particulier de ceux qui sont disponibles au niveau des soins primaires) et de leurs éventuels effets secondaires. En outre, ce personnel doit avoir des connaissances en évaluation et surveillance de l’état de santé mentale des individus et en diagnostic des troubles mentaux ; en éva-luation et surveillance de la réponse au traitement ; en évaluation et surveillance des effets secondaires des médicaments ; en évaluation de la sécurité (p. ex. évaluation du risque de suicide) ; et en gestion des questions de sécurité (p. ex. gestion de la violence réelle ou potentielle). Ce personnel doit aussi disposer de compétences en évaluation fonctionnelle des personnes atteintes de troubles mentaux.

Conseil, soutien et psychopédagogie. Le personnel doit avoir des compétences en psychopédagogie pour les patients et les familles, ainsi que des compétences de base en conseil de soutien et soutien émotionnel pour les individus et les familles en détresse en raison de troubles mentaux.

Sensibilisation. Le personnel doit disposer de connaissances et d’aptitudes à traiter les problèmes de stigmatisation et de discrimination auxquels les personnes atteintes de troubles mentaux sont confrontées dans la communauté. Il doit comprendre les droits de l’homme et les droits légaux des personnes atteintes de troubles mentaux dans leur pays. Pour être de bons agents de sensibilisation, les membres du person-nel de soins primaires doivent avoir des compétences à entrer en dialogue avec la communauté et les familles sur les droits des personnes atteintes de troubles men-taux, ainsi qu’à promouvoir ces droits et assurer leur respect.

Compétences d’intervention de crise. À ce niveau, il est important d’avoir des

Diverses compétences peuvent être identifiées pour différents agents de soins primaires.

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Page 95: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

connaissances théoriques de base des différents modèles d’intervention de crise ainsi que les connaissances et les compétences permettant d’évaluer le type de crise et sa gravité. Il est également important de savoir réaliser les interventions thérapeuti-ques nécessaires, y compris conseil de soutien, usage de médicaments d’urgence et recours à l’hôpital le cas échéant.

Promotion de la santé mentale et prévention des troubles mentaux. Le personnel de santé primaire doit être équipé pour identifier les facteurs de risque et les facteurs de protection les plus courants dans sa communauté, et pour dispenser des inter-ventions de santé mentale dont on sait qu’elles permettent de promouvoir la santé mentale ou de prévenir les troubles au niveau des soins de santé primaires (OMS, 2004a ; 2004b).

Les agents de santé travaillant au niveau des soins primaires ne sont pas censés avoir toutes les compétences mentionnées. Par exemple, les médecins généralistes sont éventuellement censés avoir les compétences à prescrire et surveiller les médicaments psychotropes, tandis que les infirmières n’ont peut-être besoin que des compétences requises pour surveiller et gérer la prise des médicaments psychotropes.

Encadré 5. Services de santé mentale fournis par les soins de santé primaires : Exemples de programmes de formation, de stratégies et de ressources

WHO Primary Health Care Training Kit (Kit de formation de l’OMS pour les soins primai-res)Ce kit de formation a été élaboré pour aider les médecins de soins primaires à diagnosti-quer et traiter les troubles mentaux les plus fréquents. L’objectif principal de cette initia-tive pédagogique n’est pas de remplacer les spécialistes, mais d’étendre les compéten-ces des médecins de soins primaires et d’améliorer la coopération et la communication entre les prestataires de soins primaires et les services de santé mentale spécialisés. Le kit contient des guides d’évaluation des troubles mentaux, des fiches d’information, des dépliants d’information pour les patients, des questionnaires et une disquette. Il couvre six troubles courants : dépression, anxiété, abus d’alcool, fatigue chronique, troubles du sommeil et symptômes somatiques inexpliqués.

Training Manual for Mental Health and Human Service Workers in Major Disasters (Manuel de formation pour les agents de santé mentale et de services humanitaires en cas de catastrophes).Ce manuel a été élaboré par le Département de la Santé et des Services Humanitaires, Administration de la toxicomanie et des services de santé mentale, Centre des services de santé mentale, États-Unis. Son principal objectif est de présenter un aperçu d’in-formations essentielles telles que : comment les catastrophes affectent les enfants, les adultes et les personnes âgées, l’importance de dessiner des programmes sur mesure pour la communauté, une description des interventions de santé mentale efficaces en cas de catastrophe, des stratégies de prévention et de gestion du stress du personnel. Un autre objectif est d’aider avec efficience les administrateurs et planificateurs de santé mentale ainsi que les formateurs dans le domaine de la santé mentale en rapport avec les catastrophes à élaborer les composantes de formation de leurs propres projets de conseil de crise. Pour plus d’informations, voir : http://www.mentalhealth.samhsa.gov/publications/allpubs/

N.B. : Ces exemples sont présentés à titre d’illustration et ne sont pas des recommanda-tions de l’OMS.

Tous les agents de santé travaillant au niveau des soins primaires n’ont pas besoin d’avoir toutes les compétences mentionnées.

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Page 96: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

5.1.3 Services de santé mentale fournis par les hôpitaux généraux

L’intégration des services de santé mentale aux services de santé généraux suppose obligatoirement l’intégration de ces services dans les hôpitaux généraux. Ainsi, ceux-ci peuvent fournir des soins secondaires aux patients des communautés, ainsi que des trai-tements à ceux qui sont admis pour des troubles physiques mais ont également besoin d’interventions de santé mentale. Ils offrent une excellente possibilité de réduire la stig-matisation qui découle du fait d’aller se faire soigner dans un « asile de fous » à part.

Quelques exemples de professionnels travaillant à ce niveau : médecins hospitaliers s’in-téressant particulièrement à la psychiatrie, psychiatres hospitaliers, infirmières en soins généraux travaillant dans des services de soins généraux ou de soins psychiatriques, infirmières en psychiatrie travaillant dans des services de psychiatrie, psychiatres et/ou infirmières en psychiatrie fournissant des services de consultation de liaison, travailleurs sociaux généraux et travailleurs sociaux en psychiatrie, ergothérapeutes, psychologues et autres agents de santé hospitaliers (p. ex. aides-soignantes).

(i) Fonctions

Soins de santé mentale et traitement des patients hospitalisés et ambulatoires. Ces services peuvent fournir des soins hospitaliers de courte durée pour les troubles men-taux aigus ainsi que des soins hospitaliers pour la gestion de crises aiguës requérant une hospitalisation brève. Les traitements hospitaliers peuvent être fournis aux per-sonnes venant volontairement ainsi qu’à celles nécessitant une admission involontaire pour évaluation et traitement.

De nombreux hôpitaux généraux ont des services ambulatoires dans le cadre des-quels des spécialistes de santé mentale offrent des consultations régulières. Les per-sonnes qui font appel à ces services sont par exemple celles qui ont été libérées dans leur communauté après un séjour en hôpital, celles qui ont été envoyées par du per-sonnel de soins primaires pour avis spécialisé, celles atteintes de troubles mentaux chroniques et vivant dans leur communauté (en accueil thérapeutique/famille/foyer de séjour de longue durée) et qui nécessitent un contrôle régulier et une supervision de leur traitement médicamenteux.

Services de consultation de liaison avec d’autres secteurs médicaux. Les services de consultation de liaison fournissent une bonne occasion d’éduquer et de former le personnel de santé générale aux questions de santé mentale. Ils aident également à surmonter la séparation artificielle entre les troubles physiques et mentaux. Les trou-bles physiques peuvent avoir des implications mentales et le risque pour les person-nes atteintes de troubles mentaux d’être atteintes de troubles physiques est le même, sinon supérieur à celui de la population générale.

Éducation et formation. Dans la plupart des pays, les hôpitaux généraux sont la principale base de formation de tous les professionnels de la santé. Ils fournissent par conséquent une possibilité d’intégrer l’éducation et la formation en santé men-tale à l’éducation et à la formation de santé générale. Les unités psychiatriques des hôpitaux généraux peuvent servir de centres de formation pour les professionnels en santé mentale tels que psychiatres, psychologues, infirmières en santé mentale et travailleurs sociaux en psychiatrie.

Lien avec les soins de santé primaires et tertiaires. Les services de santé mentale des hôpitaux généraux peuvent fournir une supervision et soutenir le personnel de soins primaires qui dispense des interventions de santé mentale dans les communautés locales. Comme mentionné plus haut, un système de recours des soins primaires aux soins de santé mentale des hôpitaux généraux fonctionnel et bien développé est

L’intégration des services de santé mentale aux services de santé généraux suppose obligatoirement l’intégration de ces services dans les hôpitaux généraux.

Plusieurs fonctions peuvent être remplies par les servi-ces de santé mentale dans les hôpitaux généraux.

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Page 97: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

nécessaire pour soutenir le personnel des soins primaires dans ses interventions de santé mentale. Le personnel de soins primaires doit savoir qu’il peut s’adresser à des spécialistes lorsque ceci s’avère nécessaire, en particulier lorsque des urgences se présentent dans le domaine de la santé mentale. Un système de recours et de liaison bien développé aide également à raccourcir les délais d’attente d’aide spécialisée, à empêcher les doublons dans les services – lesquels ont pour effet que l’utilisation des maigres ressources est inefficiente – et à combler les lacunes dans l’offre de services de santé mentale.

Les services de santé mentale des hôpitaux généraux peuvent aussi servir de centres de recours aux soins de santé mentale tertiaires pour les personnes ayant besoin d’une intervention spécialisée, telle qu’établissements communautaires de long séjour et services hospitaliers spécialisés, p. ex. médico-légaux ou pour les enfants et les adolescents. Les services de santé mentale des hôpitaux généraux sont par consé-quent une voie clé pour la fourniture de soins de santé mentale homogènes – depuis les soins primaires jusqu’aux soins tertiaires spécialisés.

Recherche. Les unités de santé mentale des hôpitaux généraux peuvent accueillir la recherche clinique ou relative aux services car ils peuvent accéder aux ressources institutionnelles (p. ex. bibliothèques et informations de santé électroniques) et aux ressources humaines (p. ex. statisticiens) nécessaires pour réaliser de telles recher-ches.

(ii) Compétences requises

Compétences en diagnostic et en traitement. Les professionnels de ce niveau de services doivent avoir des compétences spécialisées dans le diagnostic des troubles mentaux courants et graves, et des compétences spécialisées dans l’usage de traite-ments psycho-pharmaceutiques. Ils doivent être en mesure de comprendre les liens et les recoupements entre les troubles physiques et mentaux. Ils doivent également pouvoir faire des interventions psychothérapeutiques spécialisées, en particulier employer des techniques de psychothérapie de courte durée.

Formation et supervision. Les professionnels de ce niveau doivent pouvoir former et superviser. Normalement, ils doivent superviser et former le personnel de soins de santé primaires ainsi que les personnes travaillant au niveau des soins informels. Ils doivent également former et superviser les cliniciens et les professionnels à travailler au niveau de soins des hôpitaux généraux. De plus, dans de nombreux pays, les professionnels travaillant dans les hôpitaux généraux sont impliqués dans l’enseigne-ment et la formation des étudiants en médecine, en psychologie et en travail social au premier cycle d’études.

Sensibilisation. Les professionnels des hôpitaux généraux doivent être capables de négocier avec les familles et les communautés. En outre, ils doivent disposer de compétences en sensibilisation pour les personnes atteintes de troubles mentaux au niveau des décideurs, des planificateurs et des représentants du gouvernement. Ils sont censés participer à des organes de décision politique et jouer un rôle de conseillers pour les organismes locaux et régionaux de planification. Ceux-ci offrent d’excellentes occasions de sensibiliser à des initiatives politiques et d’essayer d’as-surer des services de santé mentale meilleurs et mieux équipés.

Connaissance de la législation portant sur la santé mentale ou liée indirectement à la santé mentale. Les professionnels de ce niveau doivent parfaitement comprendre la législation locale relative à la santé mentale et les procédures de mise en œuvre de la législation dans la pratique clinique. Ils doivent également avoir connaissance d’autres lois concernant les personnes atteintes de troubles mentaux, par exemple lois sur le

Plusieurs compétences peu-vent être nécessaires pour le personnel dispensant des services de santé mentale dans les hôpitaux généraux.

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Page 98: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

handicap et la sécurité sociale, afin d’assurer au mieux les prestations sociales aux-quelles ces personnes ont droit. Une bonne connaissance de la législation aide égale-ment à pratiquer une sensibilisation efficace auprès des décideurs et des législateurs, par exemple dans le but de changer des lois existantes afin d’améliorer les droits des personnes atteintes de troubles mentaux.

Compétences administratives et gestionnaires. La capacité à diriger et à gérer des équipes et à participer à la gestion et au développement des ressources humaines est importante à ce niveau. Dans de nombreux pays, les professionnels de ce niveau sont impliqués dans des fonctions administratives telles que direction d’un département et/ou d’une institution, participation au processus d’allocation des budgets et gestion de budgets. Par conséquent, des connaissances de base et une compréhension de ces fonctions et processus administratifs sont nécessaires.

Compétences de recherche. Des compétences de recherche de base, telles que rédaction et élaboration de protocoles, élaboration d’une étude, mise en œuvre de protocoles de recherche, analyse des résultats (y compris analyse statistique de base), rédaction d’articles sur les études pour publication, sont autant de compéten-ces dont les professionnels de ce niveau ont besoin pour participer efficacement à la recherche clinique et sur les services.

Un exemple de la distribution des compétences parmi les professionnels et agents de santé mentale des hôpitaux généraux : les psychologues peuvent savoir effectuer des interventions psychothérapeutiques de courte durée, les travailleurs sociaux peuvent savoir conseiller et aider à accéder à d’autres services et prestations sociales.

Encadré 6. Services de santé mentale fournis par les hôpitaux généraux : Exemples de programmes de formation, de stratégies et de ressources

The Clinical Research Unit for Anxiety and Depression (CRUfAD, Unité de recherche cli-nique sur l’anxiété et la dépression) Il s’agit d’un groupe de chercheurs et d’universitaires qui s’occupent de l’anxiété et de la dépression. Il travaille en association avec la University of New South Wales School of Psychiatry. Le site Internet de la CRUfAD a des parties portant sur l’entraide pour les personnes atteintes de troubles anxieux et dépressifs, ainsi que sur le soutien clinique. La partie portant sur le soutien clinique décrit différents troubles en rapport avec l’anxiété et la dépression, propose des manuels de traitement (lesquels peuvent être téléchargés gratuitement) pour divers troubles de ce type, ainsi que des ressources de formation et d’utilisation de thérapies comportementales cognitives. Pour plus d’informations, voir : http://www.crufad.org

What Professionals Need to Know About Families : training modules (Ce que les profes-sionnels doivent savoir sur les familles : modules de formation). Le Center for Psychiatric Rehabilitation de l’Université de Boston a élaboré une série de cinq modules – chacun comportant un manuel du formateur et un manuel du participant ainsi qu’une présentation graphique électronique – le tout sur un même CD. Le CD est destiné aux membres des familles ou aux professionnels participant à une formation avec les familles et apprend aux professionnels à travailler plus efficacement avec les familles des personnes atteintes de troubles mentaux. Les modules comprennent des lectures recommandées pour les formateurs et les participants, des contenus de formation et des directives, des exercices pour les participants, un exemple de contrat pour les partici-pants ainsi qu’une évaluation pré-formation et post-formation. Les modules couvrent les domaines suivants : expériences des familles avec un membre de la famille atteint d’un handicap psychiatrique, modification des rôles au sein de la famille, besoins des familles et des praticiens en information, aptitudes et soutien, coopération famille/professionnels

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Page 99: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

et usagers, rôle de la famille dans le processus de guérison. Pour plus d’informations, voir : http://www.bu.edu/cpr/catalog/multimedia/families.html

N.B. : Ces exemples sont présentés à titre d’illustration et ne sont pas des recomman-dations de l’OMS.

5.1.4 Services de santé mentale communautaires formels

Les services de santé mentale communautaires formels couvrent une vaste gamme de milieux et différents niveaux de soins fournis par des professionnels et para-profession-nels de la santé mentale. Il s’agit par exemple de services de rééducation communautai-res, de programmes hospitaliers de réorientation, d’équipes de crise mobiles, de services supervisés thérapeutiques et en établissements de soins en résidence, de services d’aide et de soutien à domicile. De nombreux pays n’ont pas ce type de services, et ce pour deux raisons : pas d’accent mis sur les soins communautaires, pas de ressources humai-nes formées à dispenser de tels services.

Quelques exemples de professionnels travaillant à ce niveau : psychiatres, infirmières communautaires en psychiatrie, psychologues, travailleurs sociaux en psychiatrie, ergo-thérapeutes et agents communautaires en psychiatrie.

(i) Fonctions

Rééducation et traitement communautaires. Le but de ces programmes est d’aider les personnes atteintes de troubles mentaux à vivre leur vie entièrement dans la communauté. Il existe de nombreux modèles d’ offre de services communautaires, p. ex. gestion des cas, soutien intensif à domicile ou services de suivi à domicile. Tous ces modèles présentent des forces et des faiblesses et le choix d’un modèle dans un pays dépend de divers facteurs, p. ex. du contexte socioculturel, de l’organisation des services de santé et de la disponibilité de ressources humaines et financières.

Services en établissements de soins en résidence. Dans de nombreux pays, les services de santé mentale communautaires sont également impliqués dans l’ offre de services en établissements thérapeutiques et de soins en résidence, soit indépen-damment, soit en collaboration avec d’autres services, p. ex. services sociaux ou ser-vices du logement. Ceci diffère d’un pays à l’autre et dépend du contexte particulier de la fourniture de prestations sociales et de soins de santé.

Services d’intervention de crise. Ces services doivent être fournis en association avec les prestataires de soins primaires, lesquels sont généralement la première « escale » d’une personne en situation de crise. Ceci nécessite un bon système de recours et de lien aux services de santé primaires ainsi qu’aux services de santé mentale des hôpitaux généraux. Dans certains pays, les équipes communautaires de santé mentale fournissent également des services intensifs d’intervention de crise à domicile par le biais d’équipes mobiles et de suivi à domicile. Dans d’autres pays, les programmes hospitaliers de réorientation tentent d’éviter une admission hospitalière pour les personnes en situation de crise en les envoyant dans d’autres établissement communautaires tels que foyers protégés.

Éducation et formation. Les services de santé mentale communautaires sont géné-ralement impliqués dans l’éducation et la formation du personnel pour leurs propres services et pour les soins de santé primaires ainsi que dans la formation des profes-sionnels de santé mentale des hôpitaux généraux.

Coopération avec d’autres prestataires de services communautaires et hospitaliers. Les services de santé communautaires doivent développer une bonne coopération

Les services de santé mentale communautaires formels couvrent une vaste gamme de milieux et diffé-rents niveaux de soins four-nis par des professionnels et para-professionnels de la santé mentale.

Différentes fonctions peu-vent être identifiées pour les services de santé mentale communautaires formels.

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Page 100: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

intersectorielle car les personnes atteintes de troubles mentaux ont des besoins com-plexes qui dépassent les limites des secteurs de services. La coopération est impor-tante au sein du secteur de la santé (coopération intrasectorielle) et en dehors du secteur de la santé (coopération intersectorielle). Le module Organisation des services fournit plus de détails sur la coopération au sein et entre les secteurs (p. 51-52).

Recherche. Les services communautaires de santé mentale doivent participer à la recherche, en particulier à la recherche portant sur l offre de services, p. ex. sur l’ef-ficacité de différents modèles d’ offre de services. Comme ils ont des connaissances de première main sur l’offre de services communautaires, ils peuvent contribuer à déterminer les priorités de recherche et à délimiter le cadre des questions.

(ii) Compétences requises

Compétences cliniques. Les professionnels travaillant à ce niveau ont besoin de tou-tes les compétences requises pour les professionnels travaillant au niveau précédent (services psychiatriques dans les hôpitaux généraux). De plus, ils ont besoin de com-pétences spécialisées dans l’élaboration et la mise en œuvre de plans de traitement communautaires et dans l’offre de services à domicile. Ils doivent être en mesure d’élaborer et de mettre en œuvre la gestion des cas, le soutien intensif à domicile et les services de suivi à domicile pour certains groupes particuliers.

Connaissance de la législation correspondante, y compris législation relative à la santé mentale. Les professionnels doivent connaître la législation qui concerne les personnes atteintes de troubles mentaux et vivant dans la communauté. Il s’agit de la législation portant sur la santé mentale ainsi que sur d’autres domaines, p. ex. les droits aux prestations sociales, l’emploi, le logement ou l’éducation. Ils doivent connaître les droits des personnes atteintes de troubles mentaux et savoir utiliser la législation pour promouvoir le respect de ces droits.

Compétences de sensibilisation et de négociation. En plus des compétences de sen-sibilisation décrites pour les groupes professionnels précédents, les professionnels des services communautaires de santé mentale doivent avoir de bonnes aptitudes à la négociation car ils doivent traiter avec d’autres secteurs et intervenants des com-munautés dont les intérêts sont en concurrence avec les leurs.

Compétences administratives et gestionnaires. Celles-ci sont similaires à celles dont ont besoin les professionnels travaillant dans les services de santé mentale des hôpi-taux généraux.

Compétences de recherche. Celles-ci sont similaires à celles dont ont besoin les pro-fessionnels travaillant dans les services de santé mentale des hôpitaux généraux.

Compétences en formation et supervision. Celles-ci sont elles aussi similaires à celles dont ont besoin les professionnels travaillant dans les services de santé mentale des hôpitaux généraux.

Divers groupes de professionnels travaillant dans les services de santé mentale commu-nautaires formels ont besoin de compétences différentes. Ainsi les ergothérapeutes peu-vent-ils avoir besoin de compétences en évaluation fonctionnelle et rééducation, tandis que les travailleurs sociaux peuvent avoir besoin de compétences en conseil et aide à l’accès à d’autres services et prestations sociales.

Différentes compétences peuvent être identifiées pour le personnel dispensant des services de santé mentale communautaires formels.

Divers groupes de profes-sionnels travaillant dans les services de santé mentale communautaires formels ont besoin de compétences différentes.

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Page 101: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Encadré 7. Services de santé mentale communautaires formels : Exemples de programmes de formation, de stratégies et de ressources

International Mental Health Leadership Program (iMHLP, Programme international de direction en santé mentale) L’iMHLP est une initiative de coopération entre le Centre for International Mental Health de l’Université de Melbourne (Australie) et le Department of Social Medicine, Harvard Medical School (États-Unis). Il a été établi en 2001 pour développer et maintenir un réseau international de dirigeants pour le développement des politiques et des services de santé mentale. En se basant sur les forces de chaque institution, l’initiative invite les jeunes psychiatres et autres professionnels de la santé mentale ayant montré un poten-tiel de direction à devenir des « fellows » de l’iMHLP. Les fellows suivent un programme intensif d’un an destiné à développer leurs compétences de direction et de recherche par le biais de formations, de l’intervention de mentors et de la supervision de projets. L’initiative offre également une possibilité de faire partie d’un réseau en pleine croissance voué à apporter une réponse efficace aux besoins divers et changeants des communau-tés régionales. Pour plus d’informations, voir : http://www.cimh.unimelb.edu.au

Mental Health Foundation (Fondation de la santé mentale, Royaume-Uni)Cette fondation propose plusieurs programmes de formation pour le personnel travaillant avec des personnes atteintes de troubles mentaux. Parmi ces programmes :

Un certificat de niveau 2 en santé mentale fournissant une introduction pour les débu-tants. Il est destiné à compléter ou à fournir un cadre aux programmes d’introduction existants au niveau des employeurs.Un certificat de niveau 3 en soins de santé mentale communautaires, qui couvre les connaissances, aptitudes et attitudes clés requises pour les praticiens afin de dis-penser des services efficaces et sûrs, orientés vers le client, et pour l’ensemble des services de santé mentale du Royaume-Uni.Strategies for Living: Trainers’ Information Pack: Learning the Lessons - Using the Lessons (Stratégies de vie : lot d’information pour le formateur : apprendre les leçons – utiliser les leçons). La Mental Health Foundation a élaboré des ateliers d’une jour-née et d’une demi-journée pour les personnes travaillant dans le secteur de la santé mentale, les usagers de services et les survivants, les soignants et autres personnes intéressées ou désireuses d’améliorer les services de santé mentale. Ce lot d’informa-tion a pour but de diffuser les messages clés du projet de recherche « Strategies for Living » dans les services de santé mentale en général. Pour plus d’informations, voir : http://www.mentalhealth.org.uk/

The Sainsbury Centre for Mental Health (Royaume-Uni) Ce Centre fournit divers programmes de formation. L’approche souligne l’application pra-tique d’aptitudes multidisciplinaires centrales. À cet effet, la formation est proposée à des équipes complètes dans leur milieu de travail habituel et relie le programme à une planifi-cation de développement organisationnel plus vaste. Ceci encourage d’une part le partage des idées entre les disciplines, et améliore d’autre part la probabilité que les nouvelles aptitudes soient mises à profit, soutenues et maintenues par l’organisation. Les usagers des services et les soignants sont très importants pour ce qui est de l’efficacité du travail. Ils participent au développement des programmes, aux groupes de conseil et à la formation. Le Sainsbury Centre travaille avec des confédérations régionales impliquées dans le déve-loppement de la main-d’œuvre, avec le National Institute for Mental Health du Royaume-Uni, avec des centres de développement régional et des prestataires d’enseignement supérieur pour élaborer des programmes de formation locaux viables. Les domaines clés de la formation sont p. ex. les soins aigus en santé mentale, le suivi à domicile, les soins communautaires, la résolution de crises/le traitement à domicile, le double diagnostic, les interventions précoces et la direction. Pour plus d’informations, voir : www.scmh.org.uk

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The Fogarty Training Program in International Mental Health (Programme de formation Fogarty en santé mentale internationale) Il s’agit d’une coopération entre le Department of Social Medicine, Harvard Medical School (États-Unis) et la Chinese University of Hong Kong (Chine). Le projet a pour but d’aborder les problèmes de santé mentale et troubles neuropsychiatriques extrêmement répandus en Chine et dans la région. Ce programme forme un groupe prometteur de chercheurs en santé mentale et en services de santé mentale. Il met l’accent sur un paradigme de « recherche sur la culture et les services de santé mentale » – approche interdisciplinaire qui combine l’anthropologie médicale, la psychiatrie sociale et culturelle et la recherche sur les services de santé mentale qui s’est développée au cours des 20 dernières années dans le cadre du Harvard Medical Anthropology Programme. Pour plus d’informations, voir : http://www.hms.harvard.edu

Formation en rééducationLe Centre for Psychiatric Rehabilitation de l’Université de Boston (États-Unis) a toute une série de protocoles et d’activités qui guident les praticiens dans le processus de réédu-cation psychiatrique. Ils sont disponibles sous : http://www.bu.edu/cpr/catalog

Former les formateurs Training for Trainers (Formation des formateurs) : développé par le Hamlet Trust et la Mental Health Foundation, financé par le Community Fund et le Département de la Santé du Royaume-Uni, « Training for Trainers » est une nouvelle ressource de formation novatrice. Il s’agit d’un guide pratique centré sur la formation d’un nombre croissants de personnes qui doivent pouvoir devenir des formateurs en santé mentale. Pour plus d’in-formations sur ce cours, voir le site Internet du réseau des formateurs en santé mentale sous : www.mhtn.org

Site Internet du réseau des formateurs en santé mentale : ce site Internet, développé par la Mental Health Foundation avec le soutien de Pavilion et du Département anglais de la Santé, est destiné à soutenir les formateurs en santé mentale qui dispensent les cours et formations de santé mentale dans divers milieux de services et d’éducation. Pour plus d’informations, voir : www.mhtn.org

N.B. : Ces exemples sont présentés à titre d’illustration et ne sont pas des recommanda-tions de l’OMS.

5.1.5 Établissements pour séjours de longue durée et services de santé mentale spécia-lisés

Il s’agit généralement de services situés dans des hôpitaux spécialisés et proposant divers services dans des unités en hôpital ou dans des cliniques ambulatoires spécia-lisées. Il s’agit par exemple d’établissements de séjour de longue durée, d’unités de moyenne et haute sécurité, d’unités spécialisées pour le traitement de certains troubles et pour la rééducation correspondante (p. ex. unités de troubles des conduites alimentaires), de cliniques ou d’unités spécialisées dans certains groupes de population (p. ex. enfants et adolescents, personnes âgées), et d’unités de soins de répit.

Exemples de professionnels travaillant à ce niveau : psychiatres, infirmières en santé mentale, psychologues, travailleurs sociaux en psychiatrie et ergothérapeutes, générale-ment spécialisés dans les services fournis, p. ex. médecine légale, enfants et adolescents ou troubles des conduites alimentaires.

Les établissements de séjour de longue durée et les services de santé mentale spécialisés sont généralement des services situés dans des hôpitaux spécialisés. Ils offrent divers services dans des unités en hôpital et dans des cliniques ambulatoires spécialisées.

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Page 103: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

(i) Fonctions

Il est important de se rappeler que de telles unités spécialisées ne sont pas les fournis-seurs de soins de premier recours ; elles sont généralement des centres de recours pour les soins tertiaires. Il ne faut pas les confondre avec les « asiles de fous » surannés de type carcéral. En principe, elles ont besoin d’un personnel très bien formé et très quali-fié. Leur succès dépend de la qualité du personnel et de l’infrastructure disponible. Par conséquent, de tels services sont souvent inexistants ou inappropriés dans bien des pays en développement ayant des ressources limitées.

Les fonctions exactes de ces services dépendent du domaine de spécialisation ; ainsi, les professionnels travaillant dans une unité médico-légale auront des fonctions et des rôles très différents de ceux travaillant dans une unité pour les enfants et les adolescents. C’est pourquoi il est difficile d’énumérer une liste de fonctions communes. Disons simplement que les fonctions de ces services comprennent presque toutes les fonctions des servi-ces de santé mentale des hôpitaux généraux et des services communautaires, plus les fonctions spécifiques à la spécialisation du service en question.

(ii) Compétences requises

Les professionnels travaillant à ce niveau d’offre de services doivent avoir des compéten-ces spécifiques à leur domaine de spécialisation. Par exemple, ceux qui travaillent dans des unités pour les enfants et les adolescents ont besoin de compétences spécialisées dans ce domaine. Ceux qui travaillent dans des unités médico-légales ont besoin de compétences spécialisées en santé mentale médico-légale. En outre, ils doivent avoir des compétences décrites aux niveaux précédents, telles que connaissance de la législation correspondante, compétences en éducation et formation, en administration et gestion, en sensibilisation et recherche.

Tous les professionnels travaillant à ce niveau n’ont pas besoin d’avoir toutes les compé-tences mentionnées pour les niveaux précédents. Par exemple, les psychiatres légistes peuvent avoir besoin de compétences de prescription de médicaments ou de détermina-tion de l’aptitude à passer en jugement. Les psychologues légaux, quant à eux, peuvent avoir besoin de compétences en évaluation du risque et gestion de la colère.

Encadré 8. Établissements pour séjours de longue durée et services de santé mentale spécialisés : Exemples de programmes de formation, de stratégies et de ressources

Les programmes de formation pour les services spécialisés sont normalement fournis par les institutions universitaires. Comme ils sont généralement très spécialisés, nous mentionnerons ici un seul exemple pour illustration.

Formation spécialisée en santé mentale de l’enfantLe programme de formation « International Child Mental Health Training Programme » du Department of Psychiatry, Children’s Hospital, Boston, et du Department of Social Medicine, Harvard Medical School (États-Unis), est un programme interdisciplinaire de formation pour les médecins, les psychologues, les travailleurs sociaux et les prestataires de services de santé aux concepts de base et avancés de la santé mentale de l’enfant. L’objectif est de développer un ensemble de personnes formées, en particulier originai-res de pays en développement, capables d’aider à élaborer des politiques pour la santé mentale de l’enfant, à encourager des programmes cliniques pour la santé mentale de l’enfant, et à sensibiliser à la santé mentale de l’enfant. Pour plus d’informations, voir : http://www.hms.harvard.edu/dsm N.B. : Cet exemple est présenté à titre d’illustration et n’est pas une recommandation de l’OMS.

Ces unités spécialisées ne sont pas des prestataires de soins de premier recours ; elles sont généralement des centres de recours pour les soins tertiaires.

Les fonctions exactes de ces services dépendent de la spécialisation de l’unité.

Les professionnels tra-vaillant à ce niveau d’ offre de services doivent avoir des compétences spéci-fiques à leur domaine de spécialisation.

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Page 104: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

5.2 Développement des programmes d’enseignement

Dans de nombreux pays, il faudra modifier les programmes d’enseignement et de forma-tion en santé mentale pour atteindre les objectifs de formation. Il y a souvent un décalage de phase, la pratique clinique changeant plus vite que les programmes des cours de formation (Thornicroft & Tansella, 1999). Par conséquent, les programmes surannés ou ne correspondant pas aux nouveaux modèles de soins communautaires doivent être mis à jour.

Il faut prévoir une formation fondée sur des preuves afin de préparer de manière aussi adéquate et efficiente que possible des agents compétents pour fournir les services de santé mentale. Ceci signifie que la formation doit être fondée sur les meilleures preuves disponibles pour une pratique ou intervention particulière. Par exemple, il faut enseigner au personnel quels sont les médicaments et interventions psychosociales les plus renta-bles et quelle est l’évolution des soins communautaires (Gorman & Nathan, 2002 ; OMS, 2001a).

Les trois principes essentiels du développement de programmes d’enseignement sont les suivants :

évaluer la formation actuellement fournie,évaluer les besoins futurs pour lesquels une formation doit être dispensée,définir des objectifs pour transformer la formation actuelle conformément aux besoins futurs.

Le développement de programmes de formation en santé mentale peut avoir lieu suivant les étapes décrites dans le tableau 7 (pour plus de détails sur ces étapes et des exem-ples, voir annexe 2).

Tableau 7. Étapes de développement de programmes de santé mentale

Stade 1. Étapes préalables

Étape 1 : Planifier le programme conformément aux besoins actuels et futurs en santé mentaleÉtape 2 : Consulter touts les intervenants Étape 3 : Développer un profil du « futur agent de santé mentale » Étape 4 : (a) S’il n’y a aucun programme existant, obtenir et adapter un programme de santé mentale adéquat ; (b) S’il y a déjà un programme, évaluer son utilité. Étape 5 : (a) S’il n’y a aucun système existant pour l’évaluation des étudiants, développer ou adapter un système d’évaluation adéquat ; (b) S’il y a déjà un système d’évaluation des étudiants, l’évaluer Étape 6 : (a) S’il n’y a ni faculté ni personnel en place, créer une faculté viable en utilisant un modèle de groupe de formation adéquat ; (b) S’il y a déjà une faculté et du personnel, les contrôler Étape 7 : Évaluer les structures organisationnelles et le système de récompenses Étape 8 : Estimer les chances de succès des modifications et préparer des dirigeants adéquats

Stade 2. Étapes de développement et mise en œuvre précoce

Étape 1 : Rechercher un soutien financier Étape 2 : Collecter du matériel pour développer le nouveau programme Étape 3 : Développer un plan organisationnel

•••

Dans de nombreux pays, il faudra modifier les program-mes d’enseignement et de formation en santé mentale pour atteindre les objectifs de formation.

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Page 105: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

L’éducation et la formation continue sont dans l’intérêt, aussi bien des services de santé mentale que du per-sonnel.

Stade 3. Étapes de mise en œuvre complète

Étape 1 : Développer un calendrier de formation Étape 2 : Établir une structure adéquate de gouvernance du programme Étape 3 : Établir un plan d’évaluation continue à court et à long terme Étape 4 : Participer aux programmes communautaires de santé mentale et à la recherche sur les services de santé mentale

5.3 Éducation, formation continue et supervision

L’éducation et la formation continue sont dans l’intérêt, aussi bien des services de santé mentale que du personnel. Pour les services, elles assurent des soins qui restent moder-nes et conformes aux preuves disponibles pour les interventions les plus efficaces. Pour les membres du personnel, elles assurent que leur travail reste intéressant et que leur vie professionnelle puisse suivre une trajectoire d’évolution professionnelle au fil de leur carrière. L’apprentissage tout au long de la vie est essentiel au maintien de l’aptitude pratique et a un impact important sur la qualité du travail et la sécurité des patients.

Les connaissances dans le domaine de la santé mentale se modifient et se multiplient, ce qui signifie que les agents de santé mentale doivent avoir de plus en plus de connais-sances par rapport à ce qu’ils devaient savoir lors de leur formation initiale (figure 9). Ce fossé s’agrandit de plus en plus vite à mesure que de nouvelles interventions sont éla-borées pour évaluer, traiter et gérer les problèmes de santé mentale. Ce fossé continue à augmenter s’il n’y a pas de formation continue après obtention du diplôme : les gens oublient ce qu’ils ont appris au départ et des lacunes se développent dans la mémoire. Le fossé de connaissances et les lacunes de mémoire ont pour effet qu’un fossé de plus en plus large se creuse dans les connaissances et les aptitudes. L’éducation et la formation continue sont le meilleur moyen de combler ce fossé.

Figure 9. Pourquoi la formation continue est nécessaire pour tous les agents de santé mentale

Source : d’après OMS, 1993.

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Croissance des technologies et

des interven-tions

Fossé de connaissances nouvelles

C o n n a i s s a n c e s oubliées

Fossé total en croissance conti-nue

Lacunes de mémoire

Connaissances

Temps

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Le fossé de connaissances se rapporte non seulement au contenu du corpus de connais-sances, mais aussi à la manière dont on acquiert, organise et applique les connaissances. La formation continue est donc nécessaire, non seulement pour fournir au personnel de nouvelles connaissances (p. ex. nouvelles interventions thérapeutiques), mais aussi pour que le personnel reste en contact avec les méthodes d’acquisition de nouvelles connais-sances (Internet par exemple).

Pour que l’éducation et la formation continue fonctionnent efficacement, tous les services de santé mentale doivent développer une politique solide et une méthode efficace de développement du personnel.

5.3.1 Développer une politique et un plan d’éducation et de formation continue

La première étape de développement de l’éducation et de la formation continue consiste à établir les principes qui devront sous-tendre le développement du personnel ainsi qu’un plan de mise en œuvre. Cette politique doit comprendre les éléments suivants (OMS, 1993) :

Engagement du service dans le développement continu du personnel, y compris car-tographie des plans de carrière.Auto-développement en tant que responsabilité de chacun au sein du service, guidé et soutenu par un responsable de gestion ou de supervision.Engagement du service à la reconnaissance de l’amélioration des performances et à la fourniture d’une reconnaissance et de récompenses adéquates.Lien de l’éducation et de la formation continue à l’accréditation des professionnels, de sorte que les professionnels doivent suivre une formation continue pour conserver leur autorisation d’exercer. Ceci peut être lié à des mesures d’amélioration de la qualité (voir le module Amélioration de la qualité).Engagement à utiliser de nouvelles compétences pour la fourniture ou l’organisation des services.Affirmations claires concernant les responsabilités de mise en œuvre et de contrôle des plans d’éducation et de formation continue.Affirmations claires relatives aux canaux de communication pour les plans de forma-tion continue.Méthodes d’évaluation et d’estimation.Politique de congés payés et non payés pour les cours ayant lieu pendant le temps de travail.Encouragement d’un environnement favorable au développement du personnel, assurant que tous les gestionnaires s’engagent pour une éducation et une formation continue en tant que processus permanent.Dans la mesure du possible, encouragement de formations intersectorielles, par exemple en utilisant des agents de santé mentale pour former les enseignants, la police ou le personnel judiciaire.

Plan d’éducation et de formation continue

Le plan d’éducation et de formation continue doit comprendre :

(i) un relevé des besoins en formation pour le personnel existant(ii) des objectifs pour des programmes de formation spécifiques (dates et activités)

(i) Relevé des besoins en formation

Il est possible d’effectuer un relevé des besoins en formation (voir tableau 8 ci-dessous) dans le cadre du relevé des effectifs actuels (voir Analyse de la situation, étape 1, ci-des-sus). Celui-ci doit inclure les éléments suivants :

••

Tout service de santé mentale doit élaborer une politique et un plan de développement efficace du personnel.

La première étape consiste à établir les principes selon lesquels le développement du personnel sera pratiqué.

Un relevé des besoins en formation est essentiel à une planification adéquate de l’éducation et de la forma-tion continue.

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Page 107: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Pour chaque niveau de services de la pyramide des services de santé mentale, une brève description de la formation post-diplôme existante.Ceci doit être évalué à la lumière des besoins présents et futurs. Par exemple, quelles sont les compétences requises dans ce service ou dans cette équipe pour répondre aux fonctions du service (telles qu’elles sont décrites à la partie 5.1) ?La formation requise pour développer ces compétences doit alors être identifiée de la même manière que lors du protocole de réforme de la formation (décrit ci-dessus).Ensuite, les fossés entre la formation post-diplôme existante et la formation néces-saire doivent être identifiés.Enfin, il est possible de définir des objectifs sur la manière de combler les fossés. Ceci comprend la détermination des délais, la définition des responsables de la formation au sein du service, des qualifications dont ils auront besoin pour conduire la forma-tion, ainsi que du lieu de formation.

Un élément important du relevé des besoins en formation est une consultation avec le personnel au sujet des besoins en formation que celui-ci ressent. La participation active est un élément critique, non seulement pour identifier les priorités de formation, mais aussi pour assurer que la formation sera dispensée avec succès et aura un impact positif. Obliger le personnel à assister à des cours de formation contre sa volonté est probléma-tique et peut constituer un gâchis de ressources précieuses. Par exemple, le personnel psychiatrique spécialisé et le personnel de santé générale ont souvent une estimation différente quant à la formation en santé mentale dont ce dernier a besoin. Certaines études ont montré que les médecins de soins primaires veulent souvent améliorer leurs connaissances dans le domaine de la somatisation, des problèmes psychosexuels, des personnes présentant des comportement difficiles et de la gestion du stress, tandis que les psychiatres insistent sur la nécessité d’améliorer leurs connaissances des critères de diagnostic de troubles tels que la schizophrénie, les troubles bipolaires et la dépression (Hodges, Inch & Silver, 2001).

Pour le relevé des besoins en éducation et formation continue, il est crucial d’opérer un relevé des méthodes de formation. L’une des principales variables pour une formation continue efficace est la participation active des apprenants. Plus de trente ans de recher-che en Amérique du Nord ont montré qu’un fort degré d’implication des médecins de soins primaires résultant de leur apprentissage psychiatrique est nécessaire pour amener des changements. Des conférences d’une journée composées de long cours magistraux ont un impact minime par rapport à des programmes interactifs longitudinaux offrant des occasions de mettre en pratique les connaissances et les aptitudes (Hodges, Inch & Silver, 2001).

Le relevé des besoins en formation doit également identifier les partenaires de l’éducation et de la formation continue. Un exemple en est une coopération avec les associations professionnelles, lesquelles peuvent souvent collecter des fonds avec le soutien du sec-teur pharmaceutique. En attirant le secteur médical privé vers l’éducation et la formation continue par le biais des associations professionnelles, les planificateurs peuvent attein-dre deux objectifs : accession à ces ressources et inclusion du secteur privé dans un programme efficace d’éducation et de formation continue.

Une culture d’apprentissage tout au long de la vie peut être développée en mettant en place des incitations à la formation continue pour les agents de santé mentale. Celles-ci sont par exemple des récompenses pour la participation aux cours de formation conti-nue, ou un système de points devant être acquis au cours d’une année moyenne pour conserver son autorisation à exercer. L’accréditation des programmes de formation comptant pour l’acquisition de points fait partie d’une incitation de ce type.

Le relevé des besoins en formation doit être basé sur une consultation approfon-die.

Pour le relevé des besoins en éducation et formation continue, il est crucial d’opé-rer un relevé des méthodes de formation.

Une culture d’apprentissage tout au long de la vie peut être soutenue par des inci-tations.

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Page 109: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

(ii) Objectifs de l’éducation et de la formation continue

Sur la base de deux sources de données – résultats du relevé des besoins en formation et objectifs du développement des RH (à partir de la planification antérieure) –, il est possible d’identifier les objectifs de l’éducation et de la formation continue pour le service.

Sur cette base, on peut établir une liste des engagements à la formation qui seront hono-rés dans le cadre de l’année fiscale en cours et de la prochaine. Il convient d’identifier des indicateurs fournissant une mesure du degré auquel ces engagements de formation ont été atteints.

Un exemple d’objectifs de formation consiste à former les agents de soins primaires à dépister et gérer les troubles mentaux. Les objectifs de formation peuvent être par exemple :

nombre d’agents de soins primaires à former,période de la formation,contenu du programme de formation,méthodes de formation (p. ex. séminaires, stages cliniques, lectures), méthodes d’évaluation des apprenants,méthodes d’évaluation du succès du programme de formation (p. ex. taux de dépistage des problèmes de santé mentale avant et après la formation, nombre de problèmes de santé mentale correctement traités avant et après la formation, impact de la formation sur les résultats dans la communauté, p. ex. sur les taux de suicide) (voir encadré 9).

Un plan d’éducation et de formation continue doit également reconnaître l’importance de la supervision, sujet abordé dans la sous-partie 5.3.2 ci-dessous.

Encadré 9. Exemple : Avantages de la formation en santé mentale pour les médecins généralistes

La formation des médecins généralistes à des compétences de santé mentale s’est avéré présenter des avantages nets. En Suède, les formations réussies ont conduit à une diminution du nombre d’hospitalisations et à une baisse du taux de suicides dans la population desservie par les médecins généralistes formés (Rutz, Walinder & Eberhard, 1989). Cependant, la baisse du taux de suicides ne s’est pas maintenue sur la période de contrôle de suivi de trois ans, ce qui semble indiquer des besoins en suivi de formation, supervision et/ou soutien (Rutz, von Knorring & Walinder, 1992).

Encadré 10. Exemples : Développement d’un système de formation continue

Exemple 1 : Développement d’un programme d’éducation et de formation conti-nue pour les services de santé mentale en Égypte

En Égypte, un système de formation continue a été lancé pour les services de santé mentale, devant être étendu ultérieurement à d’autres services. Plus de 1 000 personnes étaient impliquées dans le programme pilote. Auparavant, il n’y avait pas de système de développement des RH ou de formation continue pour la santé mentale dans le pays.

Stades du processus de développement :

1. Une analyse de la situation a été effectuée au sujet des systèmes et pratiques de gestion, des effectifs dans différentes catégories de personnel, des descriptions d’emplois, de l’arrière-plan de formation et des besoins en formation.

2. Un comité de formation multi-professionnel a été établi, dans lequel toutes les catégories de personnel étaient représentées. Le comité faisait ses rapports au directeur du service.

••••••

Les objectifs de formation peuvent alors être identifiés pour l’année fiscale en cours et la suivante.

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Page 110: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

3. Les tâches et les responsabilités du comité ont été définies.4. Les pratiques de travail du comité ont été définies.5. Le comité a développé des aptitudes au travail d’équipe.6. Les membres du comité ont été formés pour devenir eux-mêmes des formateurs.7. Un plan de formation a été élaboré et les membres du comité ont dû suivre les

étapes suivantes :

(i) analyser les changements contextuels dans le service ;(ii) clarifier les exigences des emplois conformément aux descriptions des emplois, à la mission et au(x) but(s) du service ;(iii) étudier les exigences en personnel sur la base des données relatives aux apti-tudes actuelles et aux nouvelles aptitudes nécessaires ;(iv) définir des priorités au niveau des besoins en formation ;(v) faire des esquisses de contenus pour la formation ;(vi) évaluer les coûts de la formation ;(vii) préparer un calendrier de formation ;(viii) réaliser des plans de suivi pour différents cursus de formation.

Après avoir développé le plan de formation, les stades suivants étaient :

1. Mise en œuvre de la formation2. Suivi de la formation3. Évaluation du système de formation continue

Source : Ahmed Mohamed Heshmat, Conseiller technique en chef, Programme de santé mentale, Ministère de la Santé, Le Caire, Égypte, communication personnelle.

Exemple 2 : Développement d’un système d’éducation et de formation continue pour un hôpital psychiatrique en Slovénie

L’hôpital psychiatrique central de Slovénie emploie environ 60 agents de santé mentale qui utilisent principalement l’ergothérapie et des techniques psychothérapeutiques pour leur travail avec des patients atteints de troubles mentaux graves. La majeure partie du travail est réalisé en groupes et ne se fonde sur aucune base théorique ou factuelle claire. Bien que ces thérapeutes contribuent à améliorer l’atmosphère de l’unité et, éventuelle-ment, l’adhésion au traitement, il n’y a aucune preuve fiable que leur travail contribue à atteindre les résultats ou les objectifs de rééducation. Les pratiques thérapeutiques étant traditionnelles, il est difficile d’amener un passage à des approches plus orientées vers les résultats. Ce groupe d’agents n’est pas intéressé par l’acquisition de nouvelles aptitu-des ou la mise à jour de l’approche et il y a peu d’argent disponible pour leur fournir une formation. Il est donc difficile de s’attaquer à leur approche thérapeutique surannée.

Diverses solutions semblent possibles face à cette impasse :Négocier avec les agents de santé de santé mentale qui sont prêts à mettre à jour leurs aptitudes.Développer une politique exigeant la participation à des cours et stages de formation continue pour tous les agents de santé mentale pour conserver l’autorisation d’exer-cer leur profession.Organiser des échanges avec des établissements similaires dans le pays ou dans les pays voisins pour partager les aptitudes et les expériences.Fournir des possibilités d’avancement ou des incitations positives pour les agents de santé mentale qui acceptent de mettre à jour leurs aptitudes.Offrir une série de séminaires sur les approches fondées sur des preuves en ergothé-rapie et en psychothérapie de groupe.Établir des groupes de lecture continue et de supervision par les pairs.

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Page 111: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Source : Vesna Svab, Présidente, Association Slovène de Santé Mentale (SENT), Ljubljana, Slovénie, communication personnelle.

5.3.2 Supervision

La supervision est « l’ensemble des mesures visant à s’assurer que le personnel accom-plit ses tâches avec efficacité et devient plus performant dans son travail » (Flahault, Piot & Franklin, 1988). La supervision comprend par conséquent des qualités de gestion, de direction et la transmission d’informations techniques.

(i) Pourquoi a-t-on besoin de supervision ?

Le but de la supervision est de promouvoir une amélioration permanente des soins dis-pensés par les agents de santé mentale. Ceci comprend plusieurs aspects (Flahault, Piot & Franklin, 1988) :

1. Assurer que le personnel et la gestion sont d’accord sur les objectifs du service.2. Assurer qu’en cas de difficultés, le personnel est en mesure de s’y adapter et de les

surmonter.3. Développer la motivation du personnel.4. Aider le personnel à améliorer ses performances et à développer les compétences

nécessaires.5. Fournir un soutien émotionnel au personnel car qui s’occupe des besoins en santé

mentale d’autrui a souvent besoin à son tour de soutien émotionnel.6. Améliorer la coordination entre les secteurs et les organes de fourniture des services.

S’il y a un accord général, que les difficultés sont maîtrisées, que la motivation est bonne ainsi que les performances et les compétences, le personnel a plus de chances de se sentir satisfait de son travail et gratifié par celui-ci.

(ii) Qui a besoin de supervision ?

Toute personne impliquée dans la fourniture de soins de santé mentale a besoin d’une forme ou d’une autre de supervision régulière. Pour un agent de santé mentale, la super-vision peut être fournie par un supérieur hiérarchique direct ou par les pairs. À son tour, l’agent de santé mentale peut fournir une supervision à des membres du personnel plus jeunes ou moins expérimentés.

Il est de la responsabilité de tous les agents de santé mentale d’obtenir une supervision, et, le cas échéant, d’en fournir une à autrui. La supervision doit également faire partie de la politique des RH des services de santé mentale.

(iii) Quelles sont les activités comprises dans la supervision ?

La supervision est un processus continu, réalisé dans toute une gamme de milieux de santé mentale. Elle peut comprendre la supervision du travail clinique (p. ex. discussion des cas difficiles), supervision des pairs dans un contexte de réunions d’équipe, ou ges-tion du service (p. ex. discussion des listes d’attente). Pour un exemple de supervision en soins de santé primaires en Afrique du Sud, voir le Supervisor’s Manual du Département de la Santé du Cap-Est, disponible sous : www.equityproject.co.za.

Pour que celle-ci soit efficace, les cliniciens et les gestionnaires doivent prévoir des horai-res réguliers pour la supervision. En outre, il peut y avoir des activités de supervision au cas par cas, organisées dans des buts précis (p. ex. pour passer en revue les processus de recours). Le tableau 9 esquisse les trois grands stades des activités de supervision.

La supervision comprend la gestion, la direction et la transmission d’informations techniques.

La supervision encourage une amélioration perma-nente des soins.

Toute personne impliquée dans la fourniture de soins de santé mentale doit par-ticiper à une supervision régulière.

La supervision est un processus continu qui comprend toute une gamme d’activités.

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Tableau 9. Stades, objectifs et activités de supervision

Source : d’après Flahault, Piot & Franklin, 1988.

(iv) Styles de supervision

Une supervision efficace dépend d’une part des connaissances transmises, d’autre part du style de supervision. En gros, il y a trois grands styles : autocratique (le superviseur dit à la personne supervisée de faire comme on lui dit), anarchique (le superviseur dit à la personne supervisée de faire comme elle veut), et consultatif (le superviseur propose de se mettre d’accord sur la marche à suivre) (Flahault, Piot & Franklin, 1988).

Le style consultatif est celui qui est préférable et qui a le plus de chances de conduire à un personnel coopératif et motivé. La supervision est une bonne occasion d’enseigner en donnant l’exemple dans le milieu de la santé mentale. Un superviseur capable de faire preuve de soutien, d’aptitudes à la réflexion et à l’écoute dans le cadre de la supervision a de bonnes chances d’apprendre à ceux qu’il supervise comment s’occuper efficacement des personnes desservies en appliquant les mêmes principes.

Certains domaines peuvent nécessiter un style de supervision plus autocratique, par exemple, si la gestion d’un usager du service soulève des inquiétudes éthiques. Inversement, une attitude plus anarchique de laissez-faire peut être utile par exemple pour la supervision de personnel expérimenté et hautement qualifié.

Dans le contexte d’équipes de soins à long terme, l’un des objectifs de la supervision clinique est le développement commun d’aptitudes de gestion de l’émotion, en particu-lier des aptitudes permettant de supporter de manière adéquate l’agressivité, l’anxiété, la tristesse, l’impuissance et l’euphorie. Dans cette optique, la formation à la gestion des

Un style de supervision adé-quat est essentiel.

La supervision est une bonne occasion d’enseigner en donnant l’exemple dans le milieu de la santé men-tale.

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Stades Objectifs Activités

Stade 1 Préparation de la supervision

Définir des buts et des priorités pour la supervision (p. ex. examen régulier de la charge en cas, aide dans les cas difficiles, développement continu de compétences cliniques)Préparer un calendrier de supervision (p. ex. une fois par quinzaine pendant une heure).

Stade 2 Réalisation de la supervision

Établir le contact avec les personnes recevant une supervision.Examiner les objectifs et les normes.Observer les agents lors de l’exécution de leurs tâches.Fournir une réaction et discuter les tâches obser-vées.Discuter toute autre question ou souci important.

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Stade 3 Suivi de la super-vision

Formaliser les réactions sous forme de rapports et d’évaluations.Organiser des programmes de formation si néces-saire.Modifier l’organisation ou le soutien logistique si nécessaire.Réorganiser les emplois du temps, les buts et les priorités si nécessaire.

Page 113: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

émotions est l’une des principales activités de supervision. Par exemple, une infirmière en santé mentale confrontée à un usager très déprimé lors d’une visite à domicile peut se sentir triste et découragée pour ce qui est de ses possibilités à venir en aide à cet usager. Dans ce cas, une discussion du cas avec l’équipe et la supervision par les pairs peut améliorer la compréhension que l’infirmière a de l’état de l’usager, lui révéler différentes options d’interventions efficaces et lui montrer des stratégies émotionnelles pour gérer la situation. Ces stratégies sont par exemple la tolérance et la normalisation de sentiments de tristesse appropriés, des rappels de réussites (aussi bien réalisées par l’usager que par l’infirmière concernée), et l’utilisation d’autres mécanismes de soutien comme par exemple une relation apportant un soutien, des activités de loisir ou d’autres expériences de succès au travail. Pour un agent de santé mentale travaillant en équipe, la supervision est un moyen essentiel de modifier l’expérience émotionnelle.

5.4 Approches de formation

Les évolutions récentes de la formation dans le domaine de la santé mentale montrent un déplacement des méthodes traditionnelles didactiques ou sous forme de cours magis-tral vers des méthodes d’apprentissage plus actives, orientées vers les problématiques et centrées sur les étudiants. Les formations sont plus orientées vers les résultats, vers des possibilités d’apprentissage multidisciplinaires et une approche des études de santé mentale intégrée et orientée vers le système, comprenant également des éléments bio-psychosociaux.

Les réformes de la formation en santé mentale doivent donc se tenir au fait de ces évo-lutions et aussi bien les planificateurs que les formateurs doivent être conscients des preuves les plus récentes relatives à la rentabilité des méthodes de formation. Dans l’idéal, la formation en santé mentale doit employer une combinaison de méthodes de formation, p. ex. cours didactiques, jeux de rôles, expérience pratique, formation sur le terrain et supervision.

Le choix des méthodes spécifiques dépend des objectifs de la formation, du matériel de formation, des étudiants, de l’environnement et des ressources disponibles. Les métho-des doivent être adaptées aux objectifs spécifiques de la formation. Par exemple, pour améliorer les compétences en santé mentale en milieu de soins primaires, il est essentiel d’intégrer au programme de formation un élément d’expérience pratique supervisée en milieu de soins primaires.

Ce module ne peut pas explorer toutes les approches employées en formation de santé mentale. Cependant, l’encadré 11 expose un certain nombre de méthodes clés (Gage, Bisch & Orley, 1990), ainsi que les avantages et inconvénients de chacune d’entre elles.

Encadré 11. Exemples de méthodes de formation en santé mentale

Cours magistraux : un enseignant présente par oral des concepts ou aptitudes aux étudiants rassemblés, lesquels doivent prendre des notes.

Avantages :Le contenu du cours (faits, concepts, aptitudes) peut être transmis à un groupe rela-tivement nombreux par un seul enseignant.Les étudiants peuvent être encouragés à apprendre le contenu du fait qu’ils prennent des notes.L’enseignant peut modifier le rythme et les explications en fonction des réactions de son auditoire.Le rassemblement d’un groupe relativement nombreux suivant la même formation peut présenter des avantages pour ce qui est d’améliorer le moral.

Les tendances récentes en formation indiquent un déplacement des méthodes didactiques vers des métho-des d’apprentissage actives, orientées vers les problé-matiques et centrées sur les étudiants.

Le choix des méthodes spécifiques dépend des objectifs de la formation, du matériel de formation, des étudiants, de l’environ-nement et des ressources disponibles.

Différentes approches peu-vent être utilisées pour la formation en santé mentale.

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Inconvénients :Les méthodes d’apprentissage sont relativement passives (les étudiants n’ont pas besoin de travailler activement avec le matériel).Il est difficile d’évaluer dans quelle mesure les étudiants apprennent le contenu.Les possibilités d’acquérir des aptitudes pratiques (p. ex. évaluation en santé mentale) dans le cadre d’un cours magistral sont limitées.

Jeu de rôles/simulation : les étudiants doivent représenter ou jouer un rôle dans une situation de soins simulée.

Avantages :Les étudiants acquièrent une expérience pratique d’application d’une aptitude ou de connaissances spécifiques.La simulation permet de réduire les conséquences négatives des erreurs.Les étudiants peuvent apprendre par le biais des modèles de rôles présentés par l’enseignant et les collègues.Cette méthode peut assurer que l’éducation corresponde aux usagers d’un service dans une région particulière.

Inconvénients :Cette méthode ne permet pas forcément d’expliquer des concepts complexes ou de mémoriser de grands volumes d’information.Elle peut présenter des exemples de mauvaises pratiques.

Apprentissage personnel : les étudiants utilisent du matériel existant (p. ex. leçons pré-parées, lots d’apprentissage) fournissant des questions auxquelles il faut répondre, des réponses et des tests, de sorte qu’ils apprennent avec un minimum d’encadrement.

Avantages :Les étudiants peuvent travailler à leur rythme et sont responsables de leur apprentis-sage.Peu d’enseignants sont nécessaires et donc peu de ressources.Les étudiants voient tout de suite la réponse au travail accompli.Il s’agit d’aptitudes importantes pour l’apprentissage tout au long de la vie.

Inconvénients :Cette méthode se base trop fortement sur la motivation des étudiants.L’évaluation directe par un enseignant est limitée.

Enregistrements de processus : les étudiants utilisent des enregistrements audio-visuels ou écrits (journaux de bord, carnets de notes) pour décrire et analyser le proces-sus des interactions interpersonnelles et reçoivent une réaction de l’enseignant.

Avantages :Peu d’enseignants sont nécessaires et donc peu de ressources.Les étudiants sont responsables de leur apprentissage.

Inconvénients :La technique requise n’est pas forcément disponible partout.L’évaluation effectuée par l’enseignant est limitée car les étudiants peuvent utiliser uniquement ces extraits.Ceux-ci représentent des niveaux de compétences supérieurs.

Démonstration ou observation en milieu clinique : l’enseignant utilise ou les étudiants observent des exemples d’activités réelles pour illustrer des concepts ou aptitudes spé-cifiques.

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Avantages :Les étudiants acquièrent une expérience pratique d’application d’une aptitude ou de connaissances spécifiques.Ils peuvent observer des praticiens expérimentés qui peuvent servir de modèles pour les attitudes à adopter « au chevet du patient ».

Inconvénients :Il peut y avoir des conséquences négatives si les étudiants font des erreurs.Les exemples de bonne pratique dépendent de la qualité et/ou de l’expérience de l’enseignant.Pour les usagers du service, ceci peut présenter un désagrément et une perte de temps.

Pratique clinique supervisée : les étudiants doivent mettre en application les concepts et aptitudes dans des situations réelles qui leur sont attribuées. Ces applications pra-tiques sont supervisées directement par l’enseignant, ou encore, les étudiants font un rapport à l’enseignant pour obtenir une réaction.

Avantages :Les étudiants acquièrent une expérience pratique d’application d’une aptitude ou de connaissances spécifiques.Ils peuvent mettre en pratique des aptitudes spécifiques dans un environnement qui les soutient.

Inconvénients :Il peut y avoir des conséquences négatives si les étudiants font des erreurs.Cette méthode ne permet pas forcément d’expliquer des concepts complexes ou de mémoriser de grands volumes d’information.

Deux approches de formation intéressantes pour la formation en santé mentale, en par-ticulier lorsque les ressources sont limitées, sont l’enseignement ouvert ou à distance, et la formation des formateurs.

Dans le cadre de l’enseignement ouvert ou à distance, les étudiants pratiquent un apprentissage personnel avec un soutien via Internet ou téléphone et des réunions ou séminaires périodiques avec les enseignants et les autres étudiants. Des innovations récentes sont par exemple le matériel d’apprentissage interactif tel que CD-ROM ou groupes de discussions sur Internet. Les avantages de cette approche sont les suivants : les programmes peuvent atteindre un grand nombre d’étudiants ; les étudiants peuvent participer même s’ils n’ont pas d’accès direct aux institutions d’enseignement ; des experts externes qui ne seraient pas disponibles autrement peuvent être impliqués dans l’enseignement ; la technique peut faciliter l’interaction entre les étudiants (p. ex. par le biais de « chat rooms » et de forums sur Internet). Les inconvénients sont les suivants : ces méthodes se basent largement sur la motivation des étudiants ; la possibilité d’ensei-gner à distance des aptitudes cliniques pratiques est limitée ; les méthodes nécessitent un accès des étudiants aux techniques correspondantes ; les étudiants risquent de se sentir isolés et démotivés s’ils n’ont pas de contact physique avec les enseignants et les autres étudiants.

Dans les méthode de formation des formateurs : (i) les formateurs suivent un enseigne-ment portant sur des domaines spécifiques, p. ex. des aptitudes cliniques de santé men-tale dans les soins de santé primaires ; (ii) ils apprennent à enseigner ces domaines et leur enseignement est évalué par le biais d’une observation directe ; (iii) les étudiants peuvent recevoir un enseignement qui relie la formation aux soins cliniques par l’utilisation d’outils communs (Kutcher et al., 2004). Avantages : un noyau de formateurs est formé ; l’appro-

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Deux approches de forma-tion particulièrement intéres-santes pour la formation en santé mentale, en particulier lorsque les ressources sont limitées, sont l’enseigne-ment ouvert ou à distance, et la formation des forma-teurs.

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che se base sur les besoins ; on peut définir des compétences cibles spécifiques ; les formateurs et les étudiants peuvent être intégrés au système de santé ; les ressources nécessaires sont faibles ; cette méthode peut être viable au niveau local. Inconvénients : il se peut que des experts externes soient nécessaires pour lancer le processus initial de formation (voir annexe 3 pour plus de détails).

Points essentiels : Éducation et formation

L’éducation et la formation du personnel du secteur de la santé mentale doivent découler logiquement des objectifs définis lors de la planification des RH.Les fonctions et compétences peuvent être identifiées pour chacun des niveaux suivants de services dans l’optique du développement de programmes de formation adéquats :– Services de santé mentale communautaires informels – Services de santé mentale fournis par les soins de santé primaires– Services de santé mentale fournis par les hôpitaux généraux – Services de santé mentale communautaires formels – Établissements hospitaliers pour séjours de longue durée et services de santé

mentale spécialisés Le développement des programmes doit se maintenir au niveau de la planification des services et des soins fondés sur des preuves.Les approches de formation doivent également être réformées en fonction de la pra-tique fondée sur des preuves.Des mécanismes d’éducation, de formation continue et de supervision doivent être établis et soutenus.

6. Conclusion

Ce module fournit des directives pour le développement d’une politique, la planification, la gestion et la formation des RH. Il aborde des questions auxquelles de nombreux pays sont confrontés : que ce soit ceux disposant de très peu de services de santé mentale ou ceux ayant des services aux ressources relativement bonnes. Au bout du compte, les outils présentés dans ce module doivent être adaptés aux circonstances et besoins particuliers du pays concerné.

Quelles que soient les ressources disponibles, les services de santé mentale doivent développer une perspective à long terme en investissant dans ce qui est leur atout majeur : le personnel.

« Lorsqu’on réduit les budgets, il est courant de réduire en premier le budget de for-mation. L’équivalent consisterait à stopper tout entretien de routine sur un avion de ligne. L’avion continuerait à voler pendant un certain temps, mais le risque de besoins en réparations importantes et même de catastrophe augmenterait peu à peu… Si l’équipe de santé mentale est considérée comme un atout, les investissements dans un entretien léger fréquent et planifié seront probablement plus rentables à long terme. » (Thornicroft & Tansella, 1999 :156)

Les services de santé men-tale doivent développer une perspective à long terme en investissant dans ce qui est leur atout majeur : le personnel.

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Annexe 1. Ressources pour les programmes de formation

Les ressources suivantes peuvent être utilisées comme sources de matériel pour de nou-veaux programmes (les références complètes correspondant aux citations sont fournies dans la liste de références).

A Guide to Treatments that Work, Gorman JM & Nathan P (2002).

What Professionals Need to Know about Families. Centre For Psychiatric Rehabilitation, Boston University (États-Unis). Pour plus d’information, voir le site Internet suivant : http://www.bu.edu/cpr/catalog/multimedia/families.html. Le Centre a également une collection de protocoles et d’activités qui guident le praticien à travers le processus de rééducation psychiatrique. Ils sont disponibles sous : http://www.bu.edu/cpr/ catalog/training/practitioner/index.html.

The Clinical Research Unit for Anxiety and Depression (CRUfAD, Unité de recher-che clinique sur l’anxiété et la dépression). Il s’agit d’un groupe de chercheurs et d’universitaires qui s’occupent de l’anxiété et de la dépression. Il travaille en associa-tion avec la University of New South Wales School of Psychiatry (Australie), laquelle est un centre collaborateur de l’OMS. Pour plus d’information, voir le site Internet suivant : http://www.crufad.com/cru_index.htm

Training Programme in Benefits and Mental Health, Disability Alliance (Programme de formation sur les prestations de santé mentale, Alliance sur le handicap, Royaume-Uni). Pour plus d’information, voir le site Internet suivant : http://www.disabilityal-liance.org/train17.htm

The Fogarty Training Program in International Mental Health (Programme de formation Fogarty en santé mentale internationale). Il s’agit d’une coopération entre le Department of Social Medicine, Harvard Medical School (États-Unis) et la Chinese University of Hong Kong (Chine). Pour plus d’information, voir le site Internet suivant : http://www.hms.harvard.edu/dsm/WorkFiles/html/education/postdoc/ International Fogarty.html

Helping People with Mental Illness (Aide aux personnes atteintes de maladies mentales). Programme de formation en santé mentale pour les agents de santé communautaires, KwaZakhele, Cap-Est, Afrique du Sud. Celui-ci a été élaboré par l’Université de Manchester (Royaume-Uni) et l’Université de Port Elizabeth (Afrique du Sud). Les modules de formation sont disponibles sur le site Internet de l’OMS sous : http://www.who.int/mental_health/policy/education/en/

International Mental Health Leadership Program (iMHLP, Programme international de direction en santé mentale). Il s’agit d’une initiative de coopération entre le Centre for International Mental Health de l’Université de Melbourne (Australie) et le Department of Social Medicine, Harvard Medical School (États-Unis). Pour plus d’information, voir le site Internet suivant : http://www.cimh.unimelb.edu.au/ imhlp/index.html

The International Child Mental Health Training Programme (Programme de for-mation en santé mentale pédiatrique). Ce programme du Department of Psychiatry, Children’s Hospital, Boston, et du Department of Social Medicine, Harvard Medical School (États-Unis), est un programme interdisciplinaire de formation pour les méde-cins, les psychologues, les travailleurs sociaux et les prestataires de services de santé aux concepts de base et avancés de la santé mentale de l’enfant. Pour plus d’infor-mation, voir le site Internet suivant : http://www.hms.harvard.edu/dsm/WorkFiles/html/research/ mentalhealth/ ICMHP/Training_Brochure.pdf

Mental Health Foundation (Fondation de la santé mentale, Royaume-Uni). Cette fondation propose plusieurs programmes de formation pour le personnel travaillant avec des personnes atteintes de troubles mentaux. Pour plus d’information, voir le site Internet suivant : http://www.mentalhealth.org.uk/

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Page 118: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Site Internet du réseau des formateurs en santé mentale. Ce site Internet, déve-loppé par la Mental Health Foundation avec le soutien de Pavilion et du Département de la Santé (tous Royaume-Uni), est destiné à soutenir les formateurs en santé mentale qui dispensent les cours et formations de santé mentale dans divers milieux de services et d’éducation. Pour plus d’informations, voir : www.mhtn.org. Ce site Internet fournit également un lot de documents de formation pour les formateurs en santé mentale, élaboré par le Hamlet Trust et la Mental Health Foundation et financé par le Community Fund et le Département de la Santé (Royaume-Uni). Pour plus d’informations sur ce cours, voir le site Internet du réseau des formateurs en santé mentale sous : www.mhtn.org/training for trainers.htm

National Electronic Library for Mental Health (NeLMH, Bibliothèque électronique nationale de la santé mentale). Ce projet dirigé par le Centre for Evidence-Based Medicine à Oxford, Royaume-Uni, est financé par la National Electronic Library for Health et soutenu par le Centre for Evidence-Based Mental Health, Université d’Oxford, Départment de Psychiatrie, le Royal College of Psychiatrists et le centre collaborateur de l’OMS. La NeLMH travaille également en liaison étroite avec de nombreuses fondations importantes dans le domaine de la santé mentale. Pour plus d’informations, voir : www.nelmh.org

Psychiatric Notes for Volunteer Community Workers (Notes de psychiatrie pour les agents communautaires bénévoles, Ghana). Ces notes sont disponibles sur le site Internet de l’OMS sous : http://www.who.int/mental_health/policy/education/en/

The Sainsbury Centre for Mental Health, Royaume-Uni, fournit différents program-mes de formation et documents sur la santé mentale. Pour plus d’information, voir le site Internet suivant : www.scmh.org.uk. Voir également les publications suivantes du Centre : Pulling Together: The Future Roles and Training of Mental Health Staff (1997) ; et The Capable Practitioner (2001).

Substance Abuse Mental Health Service Administration Training Manual for Mental Health and Human Service Workers in Major Disasters. Ce manuel a été élaboré par le Département de la Santé et des Services Humanitaires, Administration de la toxicomanie et des services de santé mentale, Centre des services de santé mentale, États-Unis. Pour plus d’information, voir le site Internet suivant : http://www.mentalhealth.org/ publications/allpubs/

Training Manual for South African Police Services (Manuel de formation pour les services de police d’Afrique du Sud), élaboré par le National Directorate of Mental Health and Substance Abuse, Département de la Santé, Afrique du Sud. Ce manuel est disponible sur le site Internet de l’OMS, sous : http://www.who.int/mental_health/policy/education/en/

Where There Is No Psychiatrist, V. Patel (2003). Manuel de formation en santé men-tale et documents pour les agents de santé non spécialisés.

Publications de l’OMS, notamment : Annotated Directory of Mental Health Training Manuals (OMS, 1992), Directory of Training Courses in Mental Health in Africa (OMS, 1988), Integration of the Mental Health Component in General Nursing Education (Gage, Bisch & Orley, 1990), et Mental Disorders in Primary Care: A WHO Educational Package (OMS/MSA/MNH/EAC/98.1). Pour plus de détails sur le kit de formation de l’OMS pour les soins primaires, voir le site Internet suivant : http://www.who.int/msa/mnh/ems/primacare/edukit/index.htm

Pour un relevé des ressources humaines existant dans le monde pour la santé mentale, voir l’Atlas de l’OMS : Ressources consacrées à la santé mentale dans le monde (OMS, 2001b) ; (http://whqlibdoc.who.int/hq/2001/WHO_NMH_MSD_MDP_01.1_fre.pdf).

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Page 119: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Annexe 2. Formation en santé mentale : protocole de réforme1

Pour aider les pays à évaluer leurs programmes actuels de formation en santé mentale et à mettre en œuvre les modifications nécessaires, cette partie fournit un protocole de réforme de l’éducation en santé mentale.

Ce protocole est conçu pour différents milieux de formation, y compris universités (p. ex. facultés de soins infirmiers, de psychiatrie, de psychologie, d’ergothérapie et de travail social), facultés de médecine et écoles d’infirmières. Le terme « institution de formation en santé mentale » est donc utilisé pour renvoyer indifféremment à n’importe lequel de ces milieux. Ceci peut comprendre la formation en santé mentale tant des agents de santé généraux que des agents de santé spécialisés en santé mentale. Les agents de santé généraux passent éventuellement juste une partie de leur temps à dispenser des services de santé mentale, tandis que les spécialistes travaillent uniquement dans le domaine de la santé mentale. Ceci comprend également tous les aspects de promotion de la santé mentale, de prévention, de traitement et de rééducation.

Des besoins en formation en santé mentale peuvent également être identifiés pour d’autres groupes professionnels. Par exemple, les enseignants, les agents de police, les employés des prisons, les employeurs du secteur privé, les soignants à domicile et les usagers des services sont bien placés pour fournir des services de prévention et de promotion de la santé mentale à la population. Leurs besoins spécifiques en formation peuvent être évalués et modifiés en utilisant des principes similaires à ceux indiqués dans le protocole de réforme pour les institutions de formation en santé mentale. Les institu-tions de formation et les gouvernements centraux ou régionaux ont besoin de rester en contact étroit au cours de ce processus de réforme de la formation en santé mentale. La nature de ce lien varie fortement en fonction de l’organisation spécifique des différents pays. Par exemple, dans certains pays, les institutions de formation fonctionnent relati-vement indépendamment des départements de planification des RH du secteur public. Dans d’autres, la relation est plus étroite.

Il ne faut pas sous-estimer la difficulté de cette tâche. Dans de nombreux pays, il y a des conflits d’intérêt et des tensions entre ces intervenants. Les soins de santé privés étant dominants dans de nombreux pays, certaines universités ont par exemple tendance à former des professionnels de santé mentale pour les cabinets privés en milieu urbain. Ceci peut se trouver en contradiction avec la politique du Ministère de la Santé, lequel souhaite éventuellement mettre l’accent sur les besoins en santé mentale des popula-tions pauvres et rurales.

Dans d’autres pays, les associations professionnelles peuvent avoir un pouvoir important. Par exemple, au Royaume-Uni, le contrôle exercé par les associations professionnelles sur tous les aspects de la formation rendait le processus de modification de la formation de base complexe et lent. Par conséquent, les stratégies de réforme se sont concentrées sur la formation supérieure de troisième cycle, en vue d’influencer la formation supérieure de premier et deuxième cycle. Cette stratégie s’est avérée être un succès ; de nombreuses institutions d’éducation, sinon la plupart, réforment actuellement leurs programmes pour tenir compte des priorités définies dans le National Service Framework for Mental Health et le Capable Practitioner Framework (The Sainsbury Centre for Mental Health, 2001).

Les trois principes clés de ce protocole de réforme sont les suivants :

évaluer la formation actuellement fournie,évaluer les besoins futurs pour lesquels une formation doit être dispensée,définir des objectifs pour transformer la formation actuelle conformément aux besoins futurs.

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1 Ce protocole se base sur un protocole de réforme de l’éducation médicale et a été adapté pour la santé mentale (Boelen et al., 1995)

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Les institutions de formation en santé mentale peuvent définir leurs missions en antici-pant les caractéristiques essentielles du futur système de santé mentale ainsi que les aptitudes essentielles que les agents de santé mentale devront avoir dans ce système. Une telle prévision implique des transformations et une prise de risque, mais la réticence à s’adapter aux transformations prévisibles implique un risque encore plus important de former du personnel inadéquat ou superflu. La tâche de l’institution de formation est de « préparer les diplômés à fonctionner avec efficacité dans la société pour les trente ou quarante ans à venir » (Boelen et al., 1995:4).

Dans ce protocole, le processus de réforme de la formation en santé mentale dans un pays passe par trois stades, chacun comprenant plusieurs étapes (Boelen et al., 1995). Nous fournissons un exemple de « scénario » pour chaque stade afin d’illustrer le pro-cessus de réforme. Il est important de souligner que les pays ou les régions devront éventuellement adapter ce protocole en fonction de leur propre système de santé, de leurs institutions de formation et de leur contexte culturel. Certaines étapes peuvent être plus pertinentes que d’autres en fonction du pays. Par exemple, certaines étapes (4a, 5a et 6a) sont destinées aux pays ne disposant pas d’institutions de formation et de pro-grammes, tandis que d’autres étapes (4b, 5b et 6b) sont destinées aux pays disposant déjà d’institutions de formation et de programmes.

Stade 1. Étapes préalables

Étape 1 : Planifier le programme conformément aux besoins actuels et futurs en santé mentale

Étape 2 : Consulter touts les intervenantsÉtape 3 : Développer un profil du « futur agent de santé mentale »Étape 4 : (a) S’il n’y a aucun programme existant, obtenir et adapter un programme de

santé mentale adéquat ; (b) S’il y a déjà un programme, évaluer son utilité.Étape 5 : (a) S’il n’y a aucun système existant pour l’évaluation des étudiants, développer

ou adapter un système d’évaluation adéquat ; (b) S’il y a déjà un système d’évaluation des étudiants, l’évaluer.Étape 6 : (a) S’il n’y a ni faculté ni personnel en place, créer une faculté viable en utilisant

un modèle de groupe de formation adéquat ; (b) S’il y a déjà une faculté et du personnel, les contrôlerÉtape 7: Évaluer les structures organisationnelles et le système de récompensesÉtape 8: Estimer les chances de succès des modifications et préparer des dirigeants

adéquats

Stade 2. Étapes de développement et mise en œuvre précoce

Étape 1 : Rechercher un soutien financierÉtape 2 : Collecter du matériel pour développer le nouveau programmeÉtape 3 : Développer un plan organisationnel

Stade 3. Étapes de mise en œuvre complète

Étape 1 : Développer un calendrier de formationÉtape 2 : Établir une structure adéquate de gouvernance du programmeÉtape 3 : Établir un plan d’évaluation continue à court et à long termeÉtape 4 : Participer aux programmes communautaires de santé mentale et à la recher-

che sur les services de santé mentale

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Page 121: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Stade 1. Étapes préalables

Étape 1 : Planifier le programme conformément aux besoins actuels et futurs en santé mentale

Objectif : Collecter des données relatives à la situation et aux besoins en santé mentale de la population, ceci servant de base à une prise de décision rationnelle. Ceci assurera que les besoins présents et futures soient un facteur clé dans la détermination du conte-nu du programme. Ces données peuvent être collectées conjointement avec la politique de santé mentale et la planification des services (voir les modules Planification et bud-gétisation pour l’offre de services de santé mentale et Politiques, plans et programmes de santé mentale). Une seule enquête peut parfois couvrir l’évaluation des besoins pour plusieurs institutions ou régions au sein d’un pays, ou même pour l’ensemble du pays. Ceci dépend de l’échelle du pays et de la diversité au sein de celui-ci.

Tâches :Identifier les sources de données.Préparer un plan de collecte des données (qui, où, quand), ou coordonner une enquê-te avec des programmes de planification des services. (voir le module Planification et budgétisation)Développer et administrer une enquête si cela s’avère adéquat.Si une enquête ne peut pas être réalisée, collecter les informations disponibles auprès d’experts et de planificateurs au sujet des besoins prioritaires en santé mentale dans le pays et de la manière dont ceux-ci doivent contribuer à l’élaboration des program-mes.Collecter les informations et tirer des conclusions.

Commentaires :Ces données fournissent des preuves permettant de convaincre autrui que les réfor-mes sont nécessaires.Les sources de données peuvent être qualitatives ou quantitatives et peuvent utiliser des données démographiques ou épidémiologiques. Les méthodes peuvent être par exemple des enquêtes et des entretiens auprès des agents de santé mentale, d’autres prestataires de soins, d’enseignants et d’usagers de services.Certaines données peuvent être difficile à obtenir et il peut être nécessaire d’examiner différentes sources et différents types de données.

Signes de progrès :Les données de base ont été collectées et des conclusions ont été tirées.

Exemple : En Slovénie, cette approche a été adoptée dans le cadre d’un projet pilote dans le sud-ouest du pays. Des données ont été collectées au sujet de la situation épidémiolo-gique et des services de santé mentale dans cette région ayant 24 000 habitants. On se propose de mettre en œuvre les résultats de cette recherche dans les institutions de forma-tion. Cette action devant être conduite par le gouvernement, les rapports seront envoyés au Conseil national de la santé mentale, lequel comprend également un représentant du Ministère de l’Éducation. Cette personne sera responsable du transfert des résultats de l’enquête aux institutions de formation (Vesna Svab, communication personnelle).

Étape 2 : Consulter touts les intervenants

Objectif : Collaborer avec les autorités de santé locales, les groupes professionnels, les organisations communautaires, les groupes de familles, les usagers des services, les organisations de sensibilisation et les donateurs étrangers. Les institutions de formation en santé mentale doivent rester pertinentes et en contact avec les besoins des communautés pour ce qui est du personnel formé en santé mentale.

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Tâches :Identifier les personnes et les organisations de la communauté avec lesquelles il convient d’établir des liens de coopération.Partager avec ces groupes les informations au sujet des activités actuelles et prévues de l’institution de formation.Encourager des accords de coopération.

Commentaires :Indiquer quels types et combien d’agents de santé mentale formés peuvent travailler dans la communauté.Se renseigner sur les activités actuelles ou prévues dans la communauté auxquelles l’institution de formation peut s’associer.Développer un esprit de coopération et de soutien mutuel.Se préparer à rencontrer des résistances et des avis contradictoires parmi les diffé-rents intervenants.

Signes de progrès :Des débats sont lancés et poursuivis au sujet du lien entre l’institution de formation et les autres organisations du secteur de la santé et de la communauté au sens large.Des membres de la faculté de santé mentale participent à des comités d’autres grou-pes au sein du secteur de la santé mentale et de la communauté au sens large. Ceci permet de renforcer les liens entre les différents secteurs impliqués dans la formation en santé mentale.

Étape 3 : Développer un profil du « futur agent de santé mentale »

Objectif : Déterminer les caractéristiques essentielles du « futur agent de santé mentale », qu’il s’agisse d’une infirmière en santé mentale, d’une infirmière en soins de santé primai-res, d’un psychiatre, d’un psychologue, d’un travailleur social, d’un ergothérapeute ou d’un médecin généraliste. Ceci peut être déterminé à l’aide des informations collectées jusqu’à présent, en accord avec les exigences de la politique et des plans de santé mentale.

Par exemple, un tel agent de santé mentale peut devoir remplir différentes fonctions, y compris prestataire de soins, preneur de décisions, agent de communication, dirigeant communautaire et gestionnaire (Boelen et al., 1995).

Les caractéristiques spécifiques de l’agent de santé mentale dépend également de son niveau de spécialisation. Trop souvent, les agents de santé mentale sont formés au sein d’institutions spécialisées et gèrent des personnes atteintes de troubles graves en utilisant des médicaments. Plus tard, ils se retrouvent souvent dans des milieux de soins primaires dans lesquels la plupart des troubles sont légers et les médicaments ne sont pas toujours nécessaires. Dans ce contexte, il est extrêmement important de faire une distinction ente un agent de santé mentale spécialisé et un agent de santé mentale primaire.

Tâches :Après avoir identifié les besoins en santé mentale de la population (étape 1), identifier quels aspects de ces besoins seront sous la responsabilités de quels agents de santé mentale, que ce soit du point de vue de la prévention, de la promotion de la santé ou des soins curatifs. Ceci doit également se fonder sur l’évaluation des besoins réalisée précédemment dans ce module.Assurer au cours du développement du programme que le « produit fini » ou « futur agent de santé mentale » aura acquis les connaissances, aptitudes et attitudes requi-ses pour prendre les responsabilités qui ont été nouvellement identifiées. Ces respon-sabilités seront au cœur du profil du « futur agent de santé mentale ».Ceci peut nécessiter un dialogue avec d’autres institutions de formation au sujet des relations entre les groupes professionnels et de leurs rôles respectifs dans la four-

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niture de soins de santé mentale (p. ex. infirmières en soins primaires et infirmières en santé mentale, infirmières et médecins, psychiatres et psychologues, travailleurs sociaux et ergothérapeutes). Ceci peut également nécessiter un dialogue avec des institutions de formations d’autres professionnels tels qu’agents de police, ensei-gnants et personnel des prisons.

Commentaires :En définissant le produit fini, les institutions de formation peuvent déterminer com-ment orienter les étudiants à l’aide du programme pour qu’ils deviennent de futurs agents de santé mentale.La définition du futur agent de santé mentale doit être exprimée en termes de compor-tement (p. ex. « L’infirmière en soins de santé primaires doit être capable de… »).Les apports pour cette tâche doivent provenir d’un groupe représentatif d’ensei-gnants, d’agents de santé mentale et d’usagers des services.

Signes de progrès :Un profil du « futur agent de santé mentale » basé sur le comportement a été élaboré.

Exemple : Au Royaume-Uni, le Capable Practitioner Framework fournit une liste d’ap-titudes requises du praticien pour mettre en œuvre le National Service Framework for Mental Health. Ce cadre couvre cinq domaines : pratique éthique, connaissances en santé mentale et connaissance des services de santé mentale, processus de soins (y compris communication efficace et partenariats), interventions fondées sur des preuves, application de celles-ci à des milieux de services spécifiques. Ce cadre de compétences est destiné à être utilisé par les organes professionnels et les autorités pour cartographier des profils basés sur les compétences et devant être atteints pour chaque discipline du personnel. Il sert également de guide pour les organisations d’éducation et de formation pour ce qui est de l’éducation et de la formation requises aux niveaux pré- et post-diplôme (The Sainsbury Centre for Mental Health, 2001).

Étape 4a : S’il n’y a aucun programme existant, obtenir et adapter un programme de santé mentale adéquat

Objectif : Obtenir un programme de santé mentale pertinent, pouvant être utilisé ou adapté pour répondre aux compétences nécessaires en santé mentale, telles qu’elles ont été défi-nies dans l’évaluation des besoins. Des exemples sont fournis à l’annexe 1 de ce module.

Tâches :Identifier les professionnels de santé devant suivre une formation et les compétences devant être transmises.Identifier les composants du programme pouvant être utilisés pour répondre à ces besoins.Identifier les méthodes d’enseignement de ces compétences (p. ex. séminaires, jeux de rôles et/ou vidéos).

Commentaires :Dans certains cas, un programme disponible devra être modifié quelque peu pour répondre aux réalités spécifiques locales, régionales ou nationales. Par exemple, si la clozapine n’est pas disponible, il est superflu d’enseigner en détail la manière de l’utiliser. Si des mythes spécifiques sur les causes ou le traitement des maladies mentales sont fréquents dans la région, ceux-ci doivent être inclus dans le programme.

Signes de progrès :Le programme a été obtenu et les modifications éventuellement nécessaires ont été fai-tes.

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Étape 4b : S’il y a déjà un programme, évaluer son utilité

Objectif : Déterminer quelles parties du programme actuel de formation (contenu et méthodes) seront les mieux adaptées à la formation du « futur agent de santé mentale » et quelles parties devront être modifiées.

Tâches :Répondre aux questions suivantes :

À la lumière du besoin de produire un futur agent de santé mentale, quelles sont les parties du programme existant qui doivent rester inchangées ?Quels sont les aspects du programme qui sont acceptables mais susceptibles d’amé-lioration ?Quels sont les aspects du programme actuel inadéquats et devant être modifiés ? Par exemple, le lieu de formation est-il adéquat ? Bien souvent, les infirmières et médecins généralistes sont formés au sujet de la santé mentale dans des hôpitaux psychiatri-ques plutôt que dans des cliniques communautaires.

Commentaires :Dans certains cas, une approche radicale peut être nécessaire et il se peut que le programme actuel doive être entièrement remanié. Par exemple, un programme tradi-tionnel peut devoir être remplacé entièrement par un nouveau programme centré sur les problématiques, multidisciplinaire et basé sur les compétences.Dans d’autres cas, il se peut qu’on doive définir des priorités et modifier pas à pas le programme existant en se basant sur ce qui est faisable.Cette analyse doit être réalisée par un groupe représentant la faculté, les agents de santé mentale, les gestionnaires de services de santé mentale et les étudiants, avec un apport consultatif des usagers des services et d’autres organisations communau-taires pertinentes.Il peut y avoir des conflits au sein du groupe pour ce qui est de quels aspects du programme doivent être maintenus et lesquels doivent être supprimés. Le fait de modifier le contenu d’un programme peut avoir pour effet que le personnel existant se sent dévalué ainsi que son matériel d’enseignement. Une telle situation doit être gérée avec tact et fermeté.

Signes de progrès :Le programme actuel a été révisé et des suggestions de modification du contenu et de la méthode ont été faites.

Encadré A2.1. Exemple : Compétences clés dans un programme de santé men-tale destiné aux médecins et infirmières en soins primaires

Les compétences clés en santé mentale en milieu de soins primaires sont notamment (OMS, 1990) :

ÉvaluationConduite d’un entretienTechniques de base de conseil fondées sur les preuves (y compris écoute, réflexion, empathie et développement d’une relation thérapeutique de soutien)DiagnosticTraitement des cas adéquatsRecours aux niveaux secondaire et tertiaire pour les cas complexesÉducation des usagers de services au sujet de la santé mentale

La recherche a montré que les médecins en milieu de soins primaires qui utilisent un style d’entretien « ouvert » plutôt que « fermé », qui savent faire des commentaires positifs et utiliser des questions qui explorent les problèmes psychologiques sont plus susceptibles

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d’évaluer avec exactitude les troubles mentaux (Goldberg & Huxley, 1992). Le style « ouvert » (p. ex. « parlez-moi de cette douleur ») permet à l’usager du service de s’exprimer librement tandis qu’un style « fermé » (p. ex. « est-ce que cette douleur vous réveille la nuit ? ») limite la gamme de réponses possibles. La formation dans les facultés de médecine et les écoles d’infirmières doit donc comprendre une réaction aux performances en entretien afin que les étudiants acquièrent les aptitudes en communication correspondantes. Les enseignants ayant des compétences en santé mentale doivent fournir aux étudiants une expérience pratique d’entretiens avec les usagers des services (Goldberg & Gater, 1996).

Étape 5a : S’il n’y a aucun système existant pour l’évaluation des étudiants, déve-lopper ou adapter un système d’évaluation adéquat

Objectif : Créer un système d’évaluation des étudiants qui mesure les résultats souhaités de la formation, si nécessaire en adaptant les programmes d’autres milieux.

Tâches :Assurer la réalisation de tests pré- et post-formation.Assurer la réalisation de tests de suivi (six mois après la formation).Assurer la réalisation d’un audit de pratique sur l’utilisation des outils cliniques. Un audit clinique sur l’utilisation du matériel de formation est une bonne manière d’éva-luer l’impact de la formation sur les activités cliniques réelles.

Commentaires :Par exemple, chaque module de formation peut être précédé et suivi d’une évaluation écrite des informations présentées dans le module. L’évaluation écrite peut être répétée ultérieu-rement (p. ex. six mois plus tard) pour déterminer si les nouvelles connaissances ont été retenues. En outre, le programme peut contenir des outils cliniques pertinents censés être utilisés au quotidien par divers professionnels de santé dans les soins cliniques. En reliant les évaluations écrites à des audits de pratique, cette approche fournit un système d’éva-luation étroitement lié à la pratique quotidienne des soins cliniques et qui devrait pouvoir être bien accepté par les praticiens.

Signes de progrès :Le système d’évaluation est en place et les tests de suivi ainsi que les audits de pratique ont lieu.

Étape 5b : S’il y a déjà un système d’évaluation des étudiants, l’évaluer

Objectif : Déterminer quelles sont les parties du système d’évaluation des étudiants exis-tant pouvant être utilisées pour évaluer les connaissances, les aptitudes et les attitudes du « futur agent de santé mentale » et quelles sont les parties devant être adaptées.

Tâches :Répondre aux questions suivantes :> À la lumière du besoin de produire un futur agent de santé mentale, quelles sont les aspects du système actuel d’évaluation qui sont adéquats et doivent rester inchangés ?> Quels sont les aspects du système actuel d’évaluation qui sont acceptables mais sus-ceptibles d’amélioration ?> Quels sont les aspects du système actuel d’évaluation inadéquats et devant être modi-fiés ?

Commentaires :Le système d’évaluation des étudiants étant le principal déterminant de ce sur quoi ils concentreront leurs efforts, ce système représente un élément essentiel qui façonne le futur agent de santé mentale.

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Les tendances récentes en évaluation mettent l’accent sur :– une approche basée sur les résultats, à travers laquelle les étudiants sont évalués

en fonction de ce qu’ils devront faire après obtention de leur diplôme ;– une évaluation continue, les étudiants étant évalués tout au long de la formation à

l’aide de différentes méthodes, et non par un seul examen écrit en fin de formation. Dans cette approche, les résultats sont mesurés par une évaluation continue, dont les méthodes et les contenus se basent sur les résultats souhaités.

Signes de progrès :Le système actuel d’évaluation des étudiants est révisé et des suggestions sont faites pour sa modification.

Étape 6a : S’il n’y a ni faculté ni personnel en place, créer une faculté viable en utilisant un modèle de groupe de formation adéquat

Objectif : Créer une faculté viable en utilisant un groupe de formation. Dans l’idéal, ce groupe sera multidisciplinaire, comprenant des professionnels de santé aussi bien du sec-teur de la santé mentale que des soins primaires (psychiatres, médecins en soins primaires, infirmières en santé mentale, infirmières communautaires, travailleurs sociaux et psycholo-gues). Il peut être composé de 6 à 8 personnes ayant fait preuve de bonne aptitudes clini-ques, jouissant du respect de leurs pairs en tant que cliniciens et ayant envie d’enseigner. Autant que possible, certains membres du groupe seront liés à des institutions de santé (p. ex. hôpitaux) ou d’éducation (p. ex. écoles communautaires) existantes, ou directement au Ministère de la Santé. Ceci permettra au groupe de formateurs d’être intégré au système de soins infirmiers et de fournir des réactions continues aux décideurs et aux planificateurs au sujet du statut du programme de formation et du besoin en autre formation.

Tâches :Un groupe de formateurs doit être formé à dispenser le programme de formation.Ce groupe doit être intégré au système de soins infirmiers.

Commentaires :La formation du groupe de formateurs (GF) à dispenser le programme de formation en santé mentale est une opération qui demande beaucoup de temps. Les membres du GF doivent maîtriser le contenu des modules de formation, dont certains peuvent être nou-veaux pour eux. Il peut aussi y avoir différents niveaux de compétences parmi les membres du GF, lesquels doivent être abordés au cours de la formation de ceux-ci. Les membres du GF devront apprendre à enseigner à d’autres professionnels du secteur de la santé et à faire preuve de ces compétences sous observation.

Signes de progrès :Un groupe de formateurs a été formé et est intégré au système de santé.

Étape 6b : S’il y a déjà une faculté et du personnel, les contrôler

Objectif : Contrôler la capacité de la faculté existante et du personnel à former le « futur agent de santé mentale ». Ceci implique de déterminer quels autres membres du person-nels ou membres supplémentaires sont nécessaires pour former le futur agent de santé mentale qui répondra aux besoins de la population.

Tâches :Contrôler les compétences actuelles et potentielles de la faculté et du personnel actuels afin de déterminer s’ils ont les qualités nécessaires pour former les futurs agents de santé mentale.

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Commentaires :Les futurs agents de santé mentale peuvent avoir besoin d’enseignants et de super-viseurs qui ne sont pas disponibles actuellement au sein de la faculté de l’institution de formation.Si tel est le cas, la faculté existante devra suivre une formation pour remplir ce rôle, ou il faudra chercher à recruter des agents de santé mentale communautaires (dans le secteur public ou privé) pour dispenser cet enseignement et cette supervision.

Signes de progrès :Les lacunes de la faculté et du personnel actuels sont résolues et l’institution de formation est à même de former les futurs agents de santé mentale.

Étape 7 : Évaluer les structures organisationnelles et le système de récompenses

Objectif : Déterminer si l’organisation et le système de récompenses actuels peuvent assu-rer les transformations nécessaires au niveau du programme, de l’évaluation et de la faculté de sorte que les futurs agents de santé mentale puissent être formés.

Tâches :Identifier la structure de l’organisation en utilisant un organigramme.Identifier comment les décisions sont prises et quels sont les principaux centres de pouvoir au sein de l’organisation.Évaluer si l’organisation actuelle récompense les transformations et les améliorations dans la formation des futurs agents de santé mentale.

Commentaires :La structure organisationnelle doit permettre un flux optimal d’idées, des activités et des récompenses pour le personnel qui contribue aux transformations destinées à former les futurs agents de santé mentale.Des incitations positives et négatives à la modification existant parmi le personnel et les étudiants doivent être identifiées afin d’obtenir les résultats souhaités. Il peut y avoir de fortes incitations à maintenir le statu quo, lesquelles doivent être prises en compte lors de la planification de réformes.

Signes de progrès :L’évaluation du système de récompenses et de la structure organisationnelle a été réalisée et des modifications ont été proposées.

Étape 8 : Estimer les chances de succès des modifications et préparer des diri-geants adéquats

Objectif : Déterminer si les circonstances actuelles sont favorables au changement et encourager un climat de changement en identifiant des dirigeants appropriés pour le pro-cessus de réforme.

Tâches :Identifier une personne qui dirigera le processus de réforme. Il peut s’agir du doyen ou du directeur de l’institution de formation, mais plus souvent, il faudra nommer une personne dans ce but précis.Évaluer les occasions et les barrières au changement, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’institution de formation.Évaluer les qualités de direction des membres du personnel, leurs avis sur le change-ment et le degré de soutien d’autres membres du personnel.

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Commentaires :L’institution peut déterminer quels domaines fourniront des occasions de changement et quels domaines exigeront un effort particulier pour obtenir un changement.Il faut identifier les directeurs de départements clés et les doyens des facultés qui soutiennent les réformes souhaitées.

Signes de progrès :Une liste objective des forces en jeu pour et contre le changement a été dressée.Les chances de succès du changement ont été déterminées.Des dirigeants ont été identifiés et ont accepté de contribuer au processus de chan-gement ou d’en être le moteur.

Encadré A2.2. Formation en santé mentale : protocole de réforme – Exemple de stade 1 : Étapes préalables

L’exemple de scénario suivant se sert du programme de formation des infirmières d’un pays fictif pour illustrer le processus de réforme de la formation en santé mentale. Dans cet exemple, le programme de formation comprend les infirmières de soins généraux et de soins de santé mentale. Le contrôle se concentre sur la formation des infirmières en soins généraux et en santé mentale.

Étape 1 : Planifier le programme conformément aux besoins actuels et futurs en santé mentale

Sur la base du Rapport sur la santé dans le monde 2001, on estime que les troubles men-taux constituent actuellement 12% de la charge mondiale de morbidité et que ce chiffre atteindra 15% d’ici 2020. Par conséquent, il y a un besoin urgent d’étendre les capacités de formation du programme pour les années à venir. Le département de planification du Ministère de la Santé du pays met la priorité sur les besoins en santé mentale suivants, sur la base des quelques données épidémiologiques disponibles et de consultations avec des experts : prévention et promotion de la santé mentale, maltraitance des enfants, femmes battues, victimes de conflits politiques, dépression, schizophrénie, déficit de l’attention/hyperactivité, démence et toxicomanies. Les données spécifiques relatives aux nombres de cas prévus par an et aux effectifs de personnel infirmier nécessaires ainsi qu’aux com-pétences requises ont été fournies par le département de planification.

Étape 2 : Consulter touts les intervenants

On demanda aux intervenants suivantes de faire des suggestions au sujet de la manière de réformer la formation actuelle des infirmières dans le domaine de la santé mentale :

Conseil professionnel des infirmièresDépartement de l’ÉducationConseil d’administration du programme de formationPersonnel enseignantReprésentants des étudiantsPlanificateurs en RH au sein du Département de la SantéOrganisations de sensibilisation représentant les usagers des services et les familles dans la communauté

Étape 3 : Développer un profil du « futur agent de santé mentale »

Sur la base de cette consultation et des besoins identifiés, le profil des futures infirmières compétentes fut esquissé. Celui-ci comprenait les aptitudes, connaissances et attitudes suivantes :

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Étape 4 : Évaluer l’utilité du programme actuel

L’examen du programme existant utilisé pour former les infirmières à certaines des apti-tudes, connaissances et attitudes mentionnées ci-dessus révéla des lacunes dans les domaines suivants :

Conseil par les infirmières en soins générauxDépistage et diagnostic des troubles mentaux en milieu de soins primaires par les infirmières en soins générauxInterventions fondées sur des preuves récentes par toutes les infirmièresTravail en équipe avec d’autres disciplines par toutes les infirmièresSupervision et consultation par les infirmières en santé mentale

En plus de ces lacunes dans le contenu des programmes, les méthodes d’enseignement suivantes nécessitaient une réforme :

Il n’y avait pas assez de formation en santé mentale pour les infirmières en milieu de soins primaires ; cette formation était le plus souvent proposée uniquement dans des institutions spécialisées. Par conséquent, il fallait les former à dépister et gérer les troubles mentaux au niveau des soins primaires.Les aptitudes à conseiller étaient enseignées de manière théorique. Il fallait renforcer une approche pratique, y compris formation orientée vers les problèmes, jeux de rôle et démonstration de styles de communication et d’écoute.

Étape 5 : Évaluer le système d’évaluation des étudiants

Le système d’évaluation actuel était basé sur des examens écrits à la fin de chaque année. Ceci encourageait un apprentissage par cœur, les étudiants étant testés sur leur capacité à retenir des informations plutôt que sur leurs aptitudes et attitudes. Il fut décidé de donner la préférence à un système d’évaluation continue qui permettrait d’évaluer les connaissances, les aptitudes et les attitudes des étudiants dans la pratique.

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Infirmière en santé mentaleToutes les aptitudes, connaissances et attitudes de l’infirmière en soins géné-raux.

En outre :Aptitudes spécialisées à évaluer et traiter des troubles mentaux gravesConnaissances spécialisées au sujet des troubles mentaux graves, y com-pris diagnostic, traitement fondé sur des preuves et options de gestionConnaissance des droits des person-nes souffrant de troubles mentauxConnaissances spécialisées de l’or-ganisation des services et des voies de recoursAptitude à la supervision et à la consultation pour soutenir les servi-ces de santé généraux Gestion des cas

Infirmière en soins générauxAptitudes :

ÉcouteCommunicationDiagnosticConseilTraitement des troubles mentaux sans gravitéRecours pour les cas complexesAdministration et gestion

Connaissances :Classification des troubles mentauxTraitement fondé sur les preuves et options de gestionConnaissance des droits des person-nes souffrant de troubles mentauxOrganisation des services

Attitudes :EmpathieSouplesseÉmancipation, accent mis sur les for-ces des usagers des servicesTravail coopératif en équipe avec d’autres disciplines

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Étape 6 : Contrôler la faculté et le personnel

Un contrôle de la faculté et du personnel révéla que le personnel existant n’était pas com-pétent à former les infirmières dans les domaines nouvellement identifiés. En particulier, certains membres du personnel de formation des infirmières de soins généraux n’étaient pas compétents dans le secteur de la santé mentale ; ils indiquèrent au contraire qu’ils ne considéraient pas la santé mentale comme étant une thématique prioritaire dans la forma-tion des infirmières. Un plan fut introduit pour mettre le personnel existant en contact avec quelques nouvelles méthodes de formation en santé mentale et pour recruter du personnel dans certains domaines pour lesquels le personnel existant ne disposait pas des connais-sances et aptitudes requises.

Étape 7 : Évaluer les structures organisationnelles et le système de récompenses

La structure organisationnelle s’avéra décourager l’innovation, le personnel enseignant étant rarement évalué ou récompensé pour ses aptitudes à enseigner ou ses résultats de recher-che. En outre, il y avait peu de marge de progression dans la carrière du personnel enseignant et le moral n’était pas bon. Les enseignants novateurs étaient souvent promus à des postes administratifs, de sorte que les aptitudes à enseigner ne se développaient pas.

Étape 8 : Estimer les chances de succès des modifications et préparer des diri-geants adéquats

Un poste temporaire fut créé comme fer de lance au processus de réforme. On y nomma une personne ayant de l’expérience dans le secteur de la formation en santé mentale et capable de recueillir le soutien de la majorité des intervenants au programme. On comptait sur de bonnes chances de réussite des réformes, tout en s’attendant à certai-nes résistances face à la réforme des méthodes d’enseignement et à la formation des formateurs en santé mentale. On identifia les membres du personnel enseignant faisant preuve d’ouverture face au changement et de capacité à communiquer la nouvelle vision à leurs pairs comme des dirigeants potentiels de la réforme.

Les forces favorables au changement identifiées étaient :un soutien de la santé mentale à un niveau élevé du Ministère de la Santé,le soutien des représentants des étudiants,le soutien du département de l’éducation.

Les forces opposées au changement étaient notamment :certains membres du personnel réticents à toute évaluation de leurs méthodes de formation ou à l’introduction de la thématique de la santé mentale dans leurs modules de formation.

Stade 2. Étapes de développement et mise en œuvre précoce

Une fois les informations collectées à la première phase d’évaluation, des étapes peuvent être mises en œuvre pour lancer la réforme de l’organisation de formation ou pour établir un groupe de formation si une telle organisation de formation n’existe pas.

Étape 1 : Rechercher un soutien financier

Objectif : Examiner toutes les sources potentielles de soutien financier, autant externes qu’internes, pour le développement et la formation des futurs agents de santé mentale.

Tâches :Examiner une éventuelle réallocation de ressources internes existantes.Examiner le soutien du gouvernement.Examiner le soutien des ONG et des donateurs étrangers.

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Page 131: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Commentaires :Un changement de priorités au sein de l’organisation de formation peut libérer certai-nes ressources financières.Des changements qui coïncident avec la politique des RH et les plans pour les servi-ces ont plus de chances d’obtenir des fonds du gouvernement.Les donateurs sont éventuellement plus intéressés par une formation novatrice cor-respondant aux plans de développement des RH dans d’autres domaines ou avec d’autres objectifs généraux.Les adeptes de la réforme peuvent devoir travailler avec des ressources financières limitées.

Signes de progrès :Les sources de soutien financier ont été identifiées et vérifiées.Des demandes de fonds pour la planification et la mise en œuvre ont été soumises.

Étape 2 : Collecter du matériel pour développer le nouveau programme

Objectif : Collecter du matériel de formation dans d’autres institutions de formation ayant des objectifs de formation similaires.

Tâches :Contacter d’autres institutions et organisations expérimentées dans la mise en œuvre de réformes et le développements de futurs agents de santé mentale, y compris l’OMS et les centres collaborateurs de l’OMS.Contacter des départements gouvernementaux et des ONG ayant déjà suivi un pro-cessus de réforme de l’éducation en santé mentale.

Commentaires :Des programmes, documents pédagogiques et protocoles de recherche pour les services de santé mentale ayant déjà été développés dans bien des milieux, ceux-ci peuvent être adoptés, de même que des formations novatrices utilisées dans d’autres pays – inutile de « réinventer la roue » dans ce domaine.Cependant, il convient d’adapter ce matériel aux conditions spécifiques de l’institution de formation concernée. Il faut s’attacher à mettre soigneusement à jour le matériel en fonction des preuves les plus récentes. De telles adaptations donnent à l’institution de formation le sentiment d’avoir le programme de formation en main, et augmentent les chances que la formation réponde aux besoins spécifiques du pays en question.

Signes de progrès :Un contact a été établi avec d’autres institutions de formation aptes à fournir une expérience et du matériel pertinents.Des plans ont été faits pour échanger le matériel, les compétences, les étudiants et le personnel.

Étape 3 : Développer un plan organisationnel

Objectif : Identifier les rôles et les responsabilités de tous ceux qui participeront au pro-cessus de transformation. S’il n’y a pas de lignes organisationnelles claires, utilisées pré-cédemment dans l’institution pour répondre aux besoins en formation en santé mentale, de telles lignes directrices devront être créées.

Tâches :Développer un nouveau diagramme organisationnel.Nommer des comités pour des tâches spécifiques et déterminer les délais.Identifier de nouvelles descriptions de postes et identifier les personnes dont les qua-lifications répondent à ces descriptions.

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Page 132: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Maintenir la communication avec tous les membres du personnel au cours du pro-cessus de transformation.Lors de la création d’une nouvelle ligne organisationnelle, s’assurer que l’on dispose d’un adepte de la formation ayant un rôle important dans le système de santé (p. ex. un planificateur en santé, un secrétaire d’État à la santé/ministre adjoint, haut fonc-tionnaire responsable de la santé mentale).S’assurer que les rôles et les responsabilités pour le programme de formation sont clairs et ont été compris par tous.S’assurer que la direction politique au sein du département de la santé soutient l’initia-tive et fournit la direction nécessaire pour le processus (autant que possible, s’assurer une participation active du Ministre de la Santé).Maintenir la communication avec les administrateurs et les agents de santé mentale, des secteurs de soins primaires et institutionnels, et assurer leur soutien continu aux transformations prévues.

Commentaires :Il est important d’accepter des sentiments d’incertitude et de confusion pendant le processus de transformation.Un plan organisationnel et une direction qui apporte un soutien aident à apaiser la confusion et à créer plus de sécurité et de clarté dans l’organisation.Une communication claire est essentielle tout au long du processus, y compris infor-mation du personnel au sujet du rôle qui lui est imparti et des objectifs des réformes, ainsi qu’une écoute des soucis du personnel au sujet du processus.Il est essentiel d’assurer qu’un soutien existe pour les réformes prévues, y compris au plus haut niveau du Ministère de la Santé. En outre, des décideurs importants au sein du ministère, du système de la santé mentale, du système des soins primaires et des institutions de soins doivent être impliqués activement et soutenir la réforme. Une communication participative continue avec les membres du personnel se trouvant en première ligne est également nécessaire pour les maintenir au courant, et, en retour, pour être mis au courant par leurs soins des progrès effectués. Un adepte du proces-sus et un comité de surveillance actif sont essentiels à la mise en œuvre des plans.

Signes de progrès :Un diagramme organisationnel a été élaboré.Des descriptions d’emploi ont été développées.Des personnes qualifiées pour les nouveaux postes ont été identifiées.

Encadré A2.3. Formation en santé mentale : protocole de réforme – Exemple de stade 2 : Étapes de développement et mise en œuvre précoce

Étape 1 : Rechercher un soutien financier

Un donateur international fut contacté pour obtenir un soutien financier pour un poste temporaire (deux ans) destiné à constituer le fer de lance du processus de réforme. En outre, des fonds furent fournis par le Département de l’Éducation pour détacher du personnel de formation d’une institution de formation centrale du pays pour quatre sémi-naires de deux semaines pour une remise à niveau des compétences du personnel de formation en santé mentale. La dynamique politique de réforme au sein du secteur de la santé mentale fut utilisée pour faire pression auprès du Ministère de la Santé et obtenir des fonds pour réformer le système d’évaluation du programme de formation. Ceci com-prenait des fonds pour des postes supplémentaires de services de santé dans les soins primaires de sorte que le personnel des soins primaires puisse consacrer une partie de son temps à superviser les étudiants dans ce milieu.

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Page 133: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Étape 2 : Collecter du matériel pour développer le nouveau programme

Une recherche dans la littérature et sur Internet fut réalisée pour trouver du matériel péda-gogique pouvant être adapté au programme de formation local. Le siège de l’OMS et les bureaux régionaux furent contactés pour leur demander des informations sur les ressour-ces disponibles et des contacts utiles. Un centre collaborateur de l’OMS dans le pays fournit une assistance technique pour ce processus ainsi que des suggestions au sujet du contenu et des méthodes pour le nouveau programme. Des visites d’autres programmes de formation des infirmières (l’un dans le pays et l’autre dans un pays voisin) furent orga-nisées pour collecter du matériel et établir des relations de travail pour l’avenir.

Étape 3 : Développer un plan organisationnel

Un groupe de travail fut mis en place sous la direction de l’employé temporaire. En consultation avec les intervenants dont la liste avait été établie précédemment, le groupe de travail proposa un nouveau plan organisationnel. Les principaux domaines de trans-formation étaient :

Lutte contre l’inefficacité administrative en rationalisant les processus, par exemple moins de répétitions de tâches et clarification des filières de responsabilités ;Systèmes de supervision et de soutien pour tout le personnel formateur, y compris contrôle des performance et récompenses pour les innovations ;Amélioration des canaux de communication pour le personnel et les étudiants, y com-pris processus de représentation et de plaintes ;Réforme du système d’évaluation des étudiants, y compris introduction de nouveaux stages en milieux de soins primaires et hôpitaux généraux.

Stade 3. Étapes de mise en œuvre complète

Une fois les bases de développement d’un programme adéquat mises en place, la mise en œuvre complète de la nouvelle formation des futurs agents de santé mentale peut démarrer.

Étape 1 : Développer un calendrier de formation

Objectif : Établir un calendrier détaillé de tous les composants du programme, y compris une liste des documents employés dans les différentes disciplines, pendant combien de temps, avec quelle expérience clinique et en adoptant quelles méthodes d’évaluation.

Tâches :Les comités établis précédemment pour des tâches spécifiques élaborent un plan d’action détaillé.Des copies du nouveau plan du programme sont distribuées à touts les intervenants concernés.

Commentaires :Le nouveau programme proposé est présenté aux étudiants, au personnel enseignant et administratif. Tous ont la possibilité d’exprimer leur avis.Autant que possible, on essaiera d’offrir des possibilités d’interaction entre les agents de santé mentale et on encouragera un enseignement interdisciplinaire. Ceci a des chances d’améliorer la compréhension du travail et du rôle des autres disciplines et d’encourager la coopération dans la vie professionnelle ultérieure.L’expérience clinique proposée lors de la formation doit être variée et comprendre aussi bien des milieux communautaires qu’hospitaliers, ainsi que des milieux non cliniques de soutien aux personnes atteintes de troubles mentaux (ceci offrant une occasion de voir ces personnes lorsqu’elles ne sont pas en situation de crise aiguë). Ces personnes ne doivent pas être considérées uniquement comme des « cas ».

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Page 134: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

Signes de progrès :Le nouveau calendrier du programme a été élaboré et distribué.

Encadré A2.4. Exemple : Programme de soins infirmiers en Pologne

Un nouveau programme général de soins infirmiers a été introduit en Pologne en 1993/94. La nouvelle orientation de la formation des infirmières a eu lieu dans le contexte d’une réforme plus vase du secteur de la santé, en particulier de l’accent mis par la Pologne sur les soins de santé primaires. La santé mentale est l’un des cinq principaux sujets dans le programme d’études des infirmières. L’ offre de services de santé mentale est donc considérée comme une aptitude essentielle pour les infirmières en soins primaires. La santé mentale est abordée dans le cadre de 60 heures théoriques et de 100 heures pra-tiques (à savoir trois semaines passées dans des cliniques et unités d’hôpitaux psychia-triques). Selon un commentaire, la compréhension biologique de la psychiatrie adoptée dans ces cours gagnerait à être élargie par un modèle bio-psychosocial. En plus de la formation en santé mentale des infirmières en soins généraux, une formation psychiatri-que spécialisée est prévue pour les infirmières en santé mentale en tant que diplôme de troisième cycle (Welch, 1995).

Étape 2 : Établir une structure adéquate de gouvernance du programme

Objectif : Établir une structure de gouvernance du programme qui dépasse les limites des départements.

Tâches : Établir un comité du « nouveau programme » reflétant les connaissances, les aptitudes et les attitudes requises pour former les futurs agents de santé mentale.

Commentaires :Le contenu, la durée des différents éléments et les méthodes d’enseignement du nouveau programme doivent refléter l’objectif de formation des futurs agents de santé mentale et non les conflits politiques au sein de l’organisation de formation.La structure du programme doit être interdépartementale ce qui exige une coopéra-tion active entre différents départements lors de l’élaboration du programme.

Signes de progrès :La structure de gouvernance a été élaborée et est clairement identifiable.

Étape 3 : Établir un plan d’évaluation continue à court et à long terme

Objectif : Évaluer le nouveau programme, à court et à long terme.

Tâches :Pour l’évaluation à court terme, développer les questions devant être posées dans 1 à 2 ans au sujet de la faisabilité et de l’efficacité du programme.Pour l’évaluation à long terme, une évaluation longitudinale des étudiants et des diplô-més doit être effectuée. Ceci comprend une évaluation de la mesure dans laquelle les diplômés correspondent à la vision du futur agent de santé mentale, ainsi qu’une évaluation de l’impact des nouveaux diplômés sur les résultats en santé mentale, en particulier sur la satisfaction des usagers. Par exemple, il faudra établir et maintenir des banques de données de formation pour suivre la formation du personnel (qui a bénéficié de quelle formation, quand, où ont-ils été mis en poste). Ceci est important car, bien souvent, le personnel est formé mais n’est pas employé à des postes exi-geant les compétences acquises. Ceci arrive particulièrement en cas de pénurie de personnel.

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Commentaires :Les réactions préliminaires peuvent être utilisées pour évaluer si le programme fonctionne bien, si les étudiants répondent au niveau requis ainsi que les coûts du programme.Une équipe d’évaluation externe peut apporter une assistance dans ce processus.Aussi bien l’évaluation à long terme qu’à court terme peuvent être utilisées pour réé-valuer et développer le programme en cours et l’institution de formation.

Signes de progrès :Des questions ont été développées et appliquées.Des données ont été collectées et analysées.Des modifications adéquates ont été apportées au programme.

Étape 4 : Participer aux programmes communautaires de santé mentale et à la recherche sur les services de santé mentale

Objectif : Établir des programmes de recherche et d’évaluation, lorsque ceci est adé-quat ; par exemple recherche basée sur la population pour évaluer les besoins en servi-ces de santé mentale ; systèmes d’éducation et de formation continue pour le personnel de santé mentale dans la communauté ; évaluation du dépistage et de la gestion des problèmes de santé mentale au niveau des soins primaires.

Tâches :Élaborer un programme ou un projet.Étudier sa pertinence pour la communauté locale et sa faisabilité financière.Rechercher des coopérations et des bonnes volontés parmi les prestataires de ser-vice et dans la communauté pour l’application de la recherche ou l’évaluation des résultats de la formation.

Commentaires :Les institutions de formation sont souvent bien placées pour effectuer de la recher-che. Par conséquent, un de leurs rôles essentiels, en complément de la formation, consiste à développer les capacités de recherche.La recherche peut être réalisée par les étudiants sous forme de projets de recherche représentant une partie essentielle du programme de formation, et par le personnel en tant que partie de la description de leur emploi.La participation de la communauté et la recherche sur les services de santé ont des chances de présenter des avantages pour l’enseignement du fait que les étudiants se trouvent exposés aux réalités de l’ offre de services, qu’ils entraînent leurs aptitudes de recherche et d’évaluation, et que le contact direct entre la communauté et l’institu-tion de formation permet de contribuer au développement des futurs programmes.

Signes de progrès :Plusieurs projets ou programmes ont été planifiés et mis en œuvre.La communauté et les prestataires de services demandent son aide à l’institution de formation pour leurs politiques de santé mentale et leur planification de services.

Des réformes importantes de la formation en santé mentale peuvent se heurter à une forte opposition (Egger, Lipson & Adams, 2000). En outre, des changements dans les programmes peuvent demander un certain temps de mise en œuvre. Pour citer un com-mentaire : « les stratégies efficaces de réforme des études de médecine seront plutôt évolutionnaires que révolutionnaires » (Mosley, 1994).

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Encadré A2.5. Formation en santé mentale : protocole de réforme – Exemple de stade 3 : Étapes de mise en œuvre complète

Étape 1 : Développer un calendrier de formation

Un calendrier de formation fut élaboré pour les quatre ans de formation des infirmières en soins généraux, décrivant les modules de santé mentale devant être enseignés chaque année. Dans certains modules du programme, ceci nécessitait un enseignement à part de la santé mentale, par exemple pour ce qui est des aptitudes à conseiller. Dans d’autres modules, tels que ceux portant sur les approches orientées vers les problématiques de l’évaluation et du diagnostic, la santé mentale fut intégrée aux modules de santé géné-rale. Dans le programme spécialisé de troisième cycle, des stages furent organisés dans différents milieux de santé mentale (depuis les soins primaires jusqu’aux institutions spé-cialisées, en passant par les hôpitaux généraux de soins secondaires). La supervision et l’évaluation des étudiants étaient réalisées en partie par les infirmières en santé mentale compétentes travaillant dans ces milieux. L’ensemble du programme était conçu pour produire des infirmières en santé mentale ayant toutes les compétences décrites au stade 1 pour une future infirmière en santé mentale.

Étape 2 : Établir une structure adéquate de gouvernance du programme

Un nouveau comité de programme fut établi pour surveiller la mise en œuvre du nouveau programme. En plus du fonctionnement normal du comité, des mécanismes furent mis en place pour assurer un dialogue avec d’autres intervenants, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du programme. Ceci comprenait des processus de réaction au sujet de la mise en œuvre ainsi que l’évaluation du nouveau programme.

Étape 3 : Établir un plan d’évaluation continue à court et à long terme

Un protocole d’évaluation fut développé pour le court terme afin d’évaluer le programme tous les ans pendant les trois prochaines années. Il comprenait des questions au sujet de la faisabilité et de l’efficacité du nouveau programme ainsi que les réactions du personnel et des étudiants aux modifications. Une évaluation à plus long terme fut planifiée et mise en attente de mise en œuvre. Celle-ci comprenait l’évaluation du fonctionnement des infirmières de santé générale diplômées et de leur rôle en tant qu’agents de santé men-tale, ainsi qu’une évaluation des infirmières spécialisées en santé mentale. À nouveau, on utilisa comme critères d’évaluation les aptitudes, connaissances et attitudes requises pour les futurs agents de santé mentale. Pour le long terme, on planifia conjointement avec le Ministère de la Santé une étude sur les résultats en santé mentale afin d’évaluer les modifications des pratiques de fourniture des services à la suite de la réforme de la formation des infirmières en soins généraux et des infirmières en santé mentale. Les implications de cette étude pour la formation future allaient être évaluées.

Étape 4 : Participer aux programmes communautaires de santé et à la recherche sur les services de santé

Des projets de recherche furent intégrés au nouveau programme pour les étudiants de 3ème et de 4ème année ainsi que pour les étudiants de troisième cycle. Les étudiants furent encouragés à poursuivre des sujets de recherche pertinents pour les besoins en santé mentale de la communauté locale. Une liste d’éventuels projets de recherche pour les étudiants fut établie par les services de santé locaux en consultation avec les ONG de la communauté. Les étudiants furent encouragés à travailler en groupes sur divers aspects d’un même projet. En outre, la recherche fut intégrée en tant que domaine d’évaluation des performances du personnel et un soutien administratif fut fourni pour les demandes de bourses. Ceci facilita la mise en place de liens plus solides entre

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les activités de formation, de recherche et d’ offre de services. Dans certains cas, des membres du personnel purent jouer un rôle de consultants auprès de projets spécifiques communautaires, par exemple pour l’évaluation de groupes de soutien familiaux pour les personnes atteintes de troubles mentaux graves.

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Annexe 3. Exemples de pays

Exemple 1. Réforme de la formation des agents de santé mentale en Chine

Jusqu’en 1998, les soins de santé mentale étaient organisés en Chine sous la direction du Département d’Administration Médicale du Ministère de la Santé. Ce département était principalement responsable de l’organisation et de l’administration des organisations médicales du pays et non du contrôle des maladies. À partir de 1998, dans le cadre de l’objectif de développement des soins en santé mentale, l’administration de ceux-ci fut transférée au Département de Contrôle des Maladies du Ministère de la Santé.

En 2000, une équipe spéciale fut mise en place au Ministère de la Santé, laquelle réalisa plusieurs études et aboutit à la conclusion que les ressources humaines étaient l’essentiel goulet d’étranglement pour le développement de soins de santé mentale adéquats pour la Chine et ses 1,3 milliards d’habitants. Le Ministère de la Santé établit par conséquent les objectifs suivants :

(i) Renforcer l’éducation sur la santé mentale pour les étudiants en médecine. Le but était d’apporter une conception plus claire de la santé mentale à près de 100 000 étudiants obtenant chaque année leur diplôme de médecine.

(ii) Renforcer la formation continue pour les 14 000 psychiatres du pays. La formation continue devait améliorer la qualité des services dispensés et développer la capa-cité à former d’autres agents de santé mentale adéquats.

(iii) Fournir une formation en santé mentale au personnel travaillant dans les hôpitaux généraux. Le but était d’améliorer le diagnostic et le traitement des troubles men-taux dans les hôpitaux généraux.

(iv) Offrir des connaissances de base en santé mentale aux enseignants des écoles primaires et secondaires dans le but de promouvoir la santé mentale chez les écoliers.

(v) Offrir une formation en santé mentale au personnel travaillant dans la prévention des épidémies. Il y a des plans visant à intégrer les services de santé mentale au travail de secours en cas de catastrophe.

(vi) Former des praticiens cliniques communautaires en vue de faire des soins de santé mentale un composant essentiel des soins de santé communautaires.

(vii) Fournir une formation au personnel médical en obstétrique et en pédiatrie. On espère qu’ils feront passer aux mères le message comme quoi la santé mentale est aussi importante que la santé physique et qu’ils encourageront la prochaine génération à faire appel aux services de santé mentale en cas de besoin.

L’obstacle à ces objectifs ambitieux est qu’il n’y a que 14 000 psychiatres profession-nels dans toute la Chine continentale, moins de la moitié d’entre eux étant titulaires d’un diplôme universitaire. En outre, les ressources de santé mentale limitées sont principale-ment concentrées dans les plus grandes villes. Pour atteindre ces objectifs, la formation de formateurs en santé mentale sera une priorité.

Depuis 2000, le Ministère de la Santé a lancé une séries de programmes quinquennaux de formation afin de renforcer les ressources humaines en santé mentale en Chine :

Un programme intitulé Projet Planter l’Espoir est ciblé sur les enseignants en psy-•

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chiatrie clinique travaillant dans des facultés de médecine dans différentes régions de Chine. En 2004, 69 enseignants clés originaires de 30 provinces avaient été formés à en former d’autres.Formation d’enseignants « graines » dans les hôpitaux généraux (parrainée par l’OMS).Formation d’enseignants dans les écoles primaires et secondaires.

En plus de la mise à niveau des connaissances dans le domaine de la santé mentale, un point encore plus important de la formation consiste à essayer de modifier l’approche des participants vis-à-vis de la santé mentale, d’une approche bio-psychiatrique convention-nelle à une approche visant à assurer la bonne santé mentale de tous.

À partir de 2002, le Ministère de la Santé va compléter l’établissement de systèmes de formation en santé mentale à divers niveaux de manière à maximiser l’utilisation des res-sources disponibles ainsi que le nombre de participants.

Les quatre principaux centres de santé mentale chinois constituent le niveau supérieur. Par le biais de communications et d’échanges internationaux et domestiques, ces quatre centres coopèrent pour élaborer les objectifs de formation et le matériel pédagogique et chacun est responsable de la formation dans 7 à 8 provinces. Ils augmenteront le nom-bre de groupes de participants chaque année et surveilleront mutuellement leur travail de formation. Le Ministère de la Santé est responsable de la supervision générale et veut maintenir le niveau de formation des quatre centres.

Les instituts de santé mentale des provinces constituent le second niveau du système de formation et sont responsables de la formation au sein des provinces. Les « enseignants graines » ayant bénéficié de la formation par le biais du Projet Planter l’Espoir devien-dront eux-mêmes les principaux formateurs. En mars 2002, ce niveau de formation a été pleinement lancé.

L’avantage d’un tel réseau de formation impliquant plusieurs niveaux est qu’il permet de maximiser l’utilisation des ressources en personnel qualifié et expérimenté disponible dans les quatre centres supérieurs. Ceci contribue à élever au plus vite le niveau d’en-seignement en santé mentale dans les facultés de médecine de l’ensemble du pays. Les « enseignants graines » retourneront dans leurs provinces et seront responsable de la sensibilisation à la santé mentale ainsi que de la formation du personnel en santé mentale local travaillant dans les hôpitaux psychiatriques, les hôpitaux généraux, les cliniques communautaires et les instituts de formation.

Source : MA Hong, Directeur adjoint, Centre National de la Santé Mentale, Chine, com-munication personnelle

Exemple 2. Planification et formation des ressources humaines en santé mentale en Jamaïque

1. Défis administratifs et budgétaires dans le développement de postes psychiatri-ques communautaires

Au début des années 1970, un programme de santé mentale communautaire a été mis en œuvre en Jamaïque pour remplacer l’hôpital psychiatrique de type carcéral qui avait été construit par l’administration coloniale britannique cent ans auparavant. Une poignée d’infirmières psychiatriques communautaires (appelées agents de santé mentale) et de psychiatres régionaux furent déployés sur l’île pour bâtir et mettre en œuvre un service communautaire de santé mentale. Ces professionnels en santé mentale étaient payés sur le budget central de l’hôpital psychiatrique. Trente ans plus tard, malgré la mise en œuvre d’un processus de réforme administrative important ayant régionalisé les prestations de

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soins, de nombreux postes des professionnels de santé mentale font encore partie du budget de l’hôpital psychiatrique central. Paradoxalement, 10% du budget de l’hôpital psychiatrique financent le programme de santé mentale communautaire sur l’ensemble de l’île, alors que ce service fournit des soins à plus de 90% des patients atteints de troubles mentaux graves dans le pays. Bien que de nouveaux postes en santé mentale aient été créés dans les administrations sanitaires régionales, le gros du budget de santé mentale continue à financer le seul hôpital psychiatrique de type carcéral. En dépit d’une analyse de la situation et d’un plan stratégique spécifique qui met clairement le doigt sur ce paradoxe et trace des programmes de transformation, ce système budgétaire inadé-quat continue à entraver le développement du service communautaire de santé mentale dans ce pays.

Source : Frederick Hickling, Directeur, Section of Psychiatry, Department of Community Health and Psychiatry, University of the West Indies, Kingston, Jamaïque, communication personnelle

2. La Section of Psychiatry de la University of the West Indies, Mona, Jamaïque

La formation en psychiatrie pour les étudiants en médecine de premier et deuxième cycle et pour les psychiatres de troisième cycle a été établie à la University of the West Indies (UWI) à Mona en 1965. Un module de formation et de services a été établi en 1972, lequel reflétait les mentalités de l’époque en psychiatrie communautaire. Cependant, même à l’époque, il y avait une dichotomie idéologique entre le modèle de psychiatrie communautaire pratiqué, basé sur le module de formation de l’UWI, et l’approche du service de santé mentale communautaire débutant dans le service de santé mentale du gouvernement. Ce dernier créait des circonscriptions hospitalières claires pour le pays et interdisait l’admission de patients de ces secteurs géographiques à l’hôpital Bellevue, le seul hôpital psychiatrique du pays, situé dans la capitale, Kingston. Le service psychiatri-que universitaire, de son côté, continuait à opérer sur la base d’un modèle encourageant le recours à l’hôpital psychiatrique pour les patients difficiles à traiter. Ceci faisait donc perdurer l’idéologie mettant toute une génération de médecins et psychiatres diplômés sortant de l’université sous l’emprise de l’hôpital psychiatrique de type carcéral. Trente ans plus tard, ce dilemme idéologique a créé une contradiction désagréable dans le développement d’un service de santé mentale pour l’ensemble de l’île car il y a un fossé opérationnel entre les médecins généralistes du pays et les praticiens en santé mentale.

Dans le but de surmonter cette contradiction, la Section of Psychiatry de l’UWI a établi un service de psychiatrie communautaire en 2001, lequel desservait une région géogra-phique spécifique et interdisait le transfert à l’hôpital psychiatrique des patients difficiles à traiter. Pour établir ce service, les processus de planification administrative et budgétaire nécessaires ont été mis en place à l’hôpital universitaire de l’UWI et les postes d’agents en santé mentale nécessaires ont été accordés dans le budget triennal démarrant en 2003. Cependant, en raison de coupes budgétaires en 2003, tous les nouveaux postes ont été gelés, de sorte que la mise en œuvre de ce service est tombée dans l’oubli et que celui-ci a dû se mettre en quête d’autres sources de financement pour pouvoir entrer en opération. Ce processus de réajustement a mis à jour des pratiques administratives dans lesquelles l’emploi actuel d’infirmières dans la Section of Psychiatry a peu à voir avec les postes officiellement alloués par le budget à cette Section.

Source : Frederick Hickling, Directeur, Section of Psychiatry, Department of Community Health and Psychiatry, University of the West Indies, Kingston, Jamaïque, communication personnelle.

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3. Alternative entrepreunariale au développement des ressources humaines à la Section of Psychiatry, University of the West Indies (UWI)

Afin de répondre aux besoins croissants au niveau de la santé mentale communautaire, la Section of Psychiatry de l’UWI s’est mise en quête de bourses pour de nouveaux services communautaires de santé mentale, en contournant les processus de planification et de budgétisation existants afin de fournir du nouveau personnel pour mettre en œuvre ces programmes. Deux nouveaux programmes d’activités psychothérapeutiques pour les enfants et les adolescents des communautés urbaines soumises à une grave violence ont ainsi été établis. D’autres initiatives communautaires ont été planifiées en utilisant cette méthode, lesquelles se concentrent sur une coopération avec des agences et organisations internationales de développement des RH. Par exemple, un mémorandum de compréhension entre l’Université Dalhousie au Canada et la University of the West Indies a permis de former deux psychiatres jamaïquains à la psychiatrie de l’enfance et de l’adolescence et d’établir un programme de formation pour les psychiatres de l’enfance et de l’adolescence en Jamaïque.

Source : Peter Lindley, Directeur suppléant, Practice Development and Training, Sainsbury Centre for Mental Health, Royaume-Uni, communication personnelle.

Exemple 3. Programmes de formation en santé mentale au Chili

1. Programme de maîtrise en santé publique, avec spécialisation en santé mentale (Université du Chili)

Ce programme de formation de troisième cycle d’une durée de deux ans pour les professionnels de la santé a été soutenu financièrement par la Pan American Health Organization (PAHO) et le Ministère chilien de la Santé afin d’aider à mettre en œuvre le premier Plan politique national de santé mentale (formulé en 1992). Le programme de formation a démarré en 1993 et s’est poursuivi pendant quatre ans. Son objectif principal était de former des professionnels de la santé en tant que dirigeants et gestionnaires d’initiatives de santé mentale pour la mise en œuvre du Plan politique national. En tout, 26 professionnels (psychiatres, psychologues, travailleurs sociaux et ergothérapeutes) ont bénéficié de la formation, entre 4 et 8 personnes rejoignant chaque année le programme. Environ 50% des professionnels formés travaillèrent au niveau des districts sanitaires et du Ministère de la Santé à la mise en œuvre des politiques et des plans, 30% travaillèrent dans des centres universitaires et contribuèrent à former des professionnels en santé mentale, tandis que 20% ne continuèrent pas à travailler dans le secteur dans lequel ils avaient été formés.

Ce programme s’est donc avéré utile pour former des personnes pour la mise en œuvre du premier Plan politique national de santé mentale, même si le taux de maintien des professionnels dans le système public a été faible.

Source : Alberto Minoletti, Ministère de la Santé, Santiago, Chili, communication person-nelle.

2. Formation psychiatrique avec accent sur les soins communautaires et la gestion des programmes locaux de santé mentale (Université de Santiago)

Cette formation de troisième cycle d’une durée de trois ans destinée aux médecins a été soutenue financièrement par le Ministère de la Santé. Son but était de développer un nouveau modèle de formation psychiatrique répondant aux exigences des nouvelles politiques de soins communautaires et de la décentralisation. Le programme se déroule depuis 1996, avec en moyenne cinq nouveaux étudiants par an et un peu plus de 20 diplômés. Tous les psychiatres formés travaillent dans le système public, lequel a adopté

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une approche communautaire. La plupart d’entre eux dirigent des programmes locaux. Les programmes ont une stratégie active de fidélisation du personnel, les directeurs des districts sanitaires nommant les candidats en fonction des besoins locaux et les candidats signant des contrats qui exigent d’eux de revenir travailler dans le district en question.

Ce programme est un succès pour ce qui est de la formation des psychiatres orientés vers la communauté sur la base des nouvelles politiques de santé mentale. Le taux de maintien dans le système public au niveau local est très élevé.

Source : Alberto Minoletti, Directeur, Unité de Santé Mentale, Ministère de la Santé, Chili, communication personnelle.

Exemple 4. Programme de formation en santé mentale : Grenade et Sainte-Lucie

Introduction

Au cours des deux dernières années, le Département de psychiatrie de l’Univer-sité Dalhousie (Canada) s’est activement engagé dans des initiatives de la région des Caraïbes destinées à renforcer le développement des soins en santé mentale. Ceci com-prenait des programmes de formation en soins psychiatriques aigus pour les infirmières en psychiatrie à Saint-Kitts-et-Nevis, une formation aux urgences psychiatriques pour les professionnels de la santé à la Trinité, des évaluations des besoins en santé mentale ainsi qu’une formation à la détection des besoins en formation en santé mentale à Grenade et Sainte-Lucie.

Ces activités coïncidaient avec les lignes directrices de la Pan American Health Organization (PAHO) basées sur l’« initiative pour la restructuration des soins psychia-triques » de 1990 contenue dans la résolution du conseil de direction de la PAHO sur la santé mentale (résolution CD43.R10). Plus récemment, la division de santé mentale de la PAHO a obtenu l’accord des ministres de la santé des pays des Caraïbes comme quoi la santé mentale sera une priorité pour la région, en particulier la formation en santé mentale pour les praticiens du secteur de la santé, la législation sur la santé mentale et la réforme des services de santé mentale.

Projet de formation en santé mentale

Le Département de psychiatrie de l’Université Dalhousie a créé un modèle novateur de formation en santé mentale pour les professionnels du secteur de la santé. Ce modèle a été développé pour soutenir une stratégie nationale de soins de santé mentale et pour promouvoir l’intégration des capacités de santé mentale dans les soins primaires en uti-lisant les services et prestataires de santé existants. La stratégie vise à développer des services de santé mentale basés sur les aptitudes et répondant aux besoins du système de santé, de la communauté et des patients. Le modèle assure que ces aptitudes puis-sent être développées et dispensées de manière à établir une base d’informations/de connaissances apte à évoluer avec le temps et intégrée au système de santé pour assu-rer viabilité et capacité à la croissance.

Les modèles de formation traditionnels, basés sur les professionnels et dirigés par les institutions, sont onéreux, longs, et non spécifiques aux besoins en santé mentale de la population. En outre, ils ne sont généralement pas intégrés aux systèmes de soins locaux et ne maximisent pas l’utilisation des ressources humaines disponibles. Le modèle développé par le Département de psychiatrie de l’Université Dalhousie est basé sur les besoins de la population, basé sur les aptitudes, intégré au système de santé et viable au niveau local. Ce modèle est efficace du point de vue économique et peut être rapide-ment développé, dispensé et intégré aux infrastructures de santé existantes. En bref, il

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s’agit d’un modèle qui identifie les aptitudes requises et forme les bonnes personnes à dispenser ces aptitudes aux personnes ayant besoin de services de santé mentale, et ce au bon moment et de manière adéquate.

Ce modèle de formation a été élaboré en coopération entre le Département de psychiatrie de l’Université Dalhousie, la Division de Santé Mentale de la PAHO et le Coordinateur de Projet des Caraïbes (CPC), Barbade, pour développer, dispenser et évaluer un program-me de formation en santé mentale basé sur les aptitudes et destiné aux professionnels de la santé de Grenade et Sainte-Lucie. Le programme de formation est un composant d’un modèle plus vaste de développement du système de santé mentale que le Département espère diriger aux Caraïbes, ceci dépendant du financement et des résultats du pro-gramme de formation. De plus amples informations sur ce modèle sont disponibles sur demande.

Les objectifs de ce programme pilote étaient les suivants :

(i) Développer et dispenser deux modèles spécifiques de formation en santé mentale à deux équipes de formation, l’une à Grenade, l’autre à Sainte-Lucie. Les modules ont été sélectionnés par des décideurs nationaux, en se basant sur les priorités définies lors de l’évaluation des besoins.

(ii) Évaluer les compétences des équipes de formation à dispenser ces modules aux professionnels de la santé locaux.

Deux équipes de formation (une de chaque pays), constituées de quatre ou cinq per-sonnes, ont été désignées par chaque pays pour bénéficier de la formation sous forme de modules élaborés par les enseignants de l’Université Dalhousie sur le modèle de « formation des formateurs ». Les modules de formation ont été dispensés à Grenade pour les deux équipes. Suite à la session de formation, chaque équipe de formation a été évaluée dans son propre pays quant à la transmission du programme à des personnes choisies au sein d’un district sanitaire spécifique. L’évaluation initiale a montré que le programme pilote avait été efficace pour ce qui est de renforcer les compétences dans les deux groupes de formateurs ainsi que parmi les professionnels de santé formés par les formateurs.

Source : Kutcher, Co-doyen, Université Dalhousie, Halifax, Canada, et Jose-Miguel Caldas De Almeida, Coordinateur Régional de Programme, Santé Mentale, OMS/PAHO, Washington DC, États-Unis, communication personnelle.

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Défi nitions

Agents de santé générale : infirmières en soins généraux et médecins généralistes qui, en plus de leurs autres responsabilités de soins, passent une partie de leur temps à dis-penser des soins de santé mentale dans un service intégré de santé générale.

Agents de santé mentale : personnes travaillant dans un secteur dispensant des ser-vices de santé mentale, p. ex. infirmières en santé mentale, psychiatres, psychologues, ergothérapeutes et travailleurs sociaux.2

Éducation : processus de transmission d’une instruction intellectuelle, morale et sociale (Pearsall, 1999).

Formation : processus d’enseignement d’une aptitude ou d’un type de comportement particulier par le biais d’une pratique et d’une instruction régulières (Pearsall, 1999).

Prestataire de services : organisation, équipe de santé mentale ou institution qui dis-pense des interventions de santé mentale à une population.

Soignant à domicile : membre de la famille, proche ou ami qui dispense des soins de santé mentale à domicile.

Supervision : ensemble des mesures visant à assurer que le personnel accomplit ses tâches avec efficacité et devient plus performant dans son travail (Flahault, Piot & Franklin, 1988).

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2 N.B. : L’usage du terme « agent de santé mentale » ne signifie pas nécessairement une recommandation en faveur du concept d’agent de santé mentale générique. Les identités professionnelles des disciplines spécifiques (p. ex. infirmiè-res, psychiatres, psychologues) restent pertinentes et sont respectées par l’OMS.

Page 145: Ressources humaines et formation pour la santé mentale

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