n° 8246 suède : réveil d’un pays...

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qué qu’ils voteraient contre tout bud- get maintenant la politique d’immi- gration actuelle. L’immigration au cœur de la crise Un sujet capital pour les Démo- crates de Suède qui ont fait campagne sur ce thème, mais aussi pour le royaume qui croule littéralement sous le poids de l’immigration et est en proie à un communautarisme crois- sant. Rappelons que dans ce pays de 9,5 millions d’habitants, les étrangers et descendants d’immigrés représentent en effet quelque 15 % de la popula- tion. Conséquence d’une politique d’asile particulièrement laxiste, la Suède est aujourd’hui submergée et assiste à la formation sur son sol de vé- ritables enclaves étrangères. Sur le départ deux mois à peine après avoir été élu, Stefan Löfven, un tantinet vexé, a expliqué mercredi que le gouvernement se contenterait de gérer les affaires courantes jusqu’au 22 mars et qu’il ne prendrait « pas l’ini- tiative de nouvelles négociations » avec l’opposition de centre droit, à la- quelle il a reproché de laisser « les Dé- mocrates de Suède dicter leurs condi- tions dans la politique suédoise ». FRANCK DELÉTRAZ [email protected] A près leur percée électorale his- torique du mois de septembre (Présent du 20 septembre), les Démocrates de Suède, en refusant de voter le projet de budget du Premier ministre social-démocrate tant que les mesures sur l’immigration qu’il con- tient ne seront pas revues, ont réussi cette semaine à contraindre Stefan Löfven à proposer des législatives an- ticipées. Première crise majeure depuis 1958 Souvenez-vous : c’était il y a deux mois. La formation emmenée par Jimmie Akesson effectuait une percée historique lors des élections législa- tives, obtenant 12,9 % des voix, contre 5,7 % quatre ans auparavant, et s’imposait comme la troisième force politique du royaume avec 49 députés au Parlement. A l’époque, Jimmie Akesson avait averti : « Nous sommes tout à fait les maîtres du jeu maintenant (…) Il est évident que les autres partis devront désormais nous prendre en considération. » Et les Dé- mocrates de Suède n’ont pas tardé à le démontrer. Mercredi, en effet, le Premier mi- nistre Stefan Löfven, privé de majo- rité absolue depuis sa victoire en sep- tembre, annonçait la tenue d’élections législatives anticipées le 22 mars pro- chain afin de sortir de la plus grave crise politique que la Suède ait connue depuis 1958. En cause ? L’adoption par le Parle- ment, un peu plus tôt dans la journée, du projet de budget de la coalition d’opposition de centre-droit Alliance (conservateurs, centre agrarien, libé- raux et chrétiens-démocrates) grâce au soutien des Démocrates de Suède. La veille, ceux-ci avaient en effet indi- SAMEDI 6 DÉCEMBRE 2014 - 2,50 N° 8246 Belgique•Luxembourg•Italie : 2.70 € - Suisse : 3 CHF - Canada : 3.5 $ can - Dom avion : 2.60 € - Tom avion : 850 CFP www.present.fr À l’écoute de Radio Courtoisie P3 23e Fête du livre à Villepreux, entretien avec J.P. Maugendre P4 Crèche : nous nous battrons C’est le combat du moment. Un très fort symbole. Et bien plus que cela. Encouragé par le climat au pouvoir, les laïcards haineux de La Libre Pensée attaquent et per- sécutent en systématique. Ils veulent faire totalement in- terdire la Crèche des lieux publics en France. En atten- dant les lieux privés comme pour les feux de cheminée ? Après celle du Conseil général de Vendée que le tribunal administratif a obligé à démanteler, c’est la mairie de Béziers qui est dans le collimateur. Et demain qui ? « J’ai choisi les modalités. J’ai placé cette crèche dans le cadre de l’en- semble de la politique culturelle de la ville des fêtes de fin d’année. » Le cou- rageux Robert Ménard, ancien prési- dent de Reporters sans frontières, est déterminé à garder coûte que coûte la crèche de Noël installée dans le hall de sa mairie. Il a pourtant reçu une lettre du préfet lui demandant de « reconsi- dérer son projet » parce qu’il contre- vient aux principes de laïcité. Et les as- sociations laïques le pressent de retirer son « emblème religieux ». C’est le conseiller municipal Aimé Couquet (Front de gauche) appuyé par les communistes qui dès la fin oc- tobre par courrier a joué les délateurs auprès de la préfecture. Ces laïcs à deux vitesses qui hurlent contre les crèches mais se félicitent des menus sans porc ou de la viande halal dans les cantines scolaires. Entre autres. Ayatollahs de la laïcité L’association La Libre Pensée, forte de sa première victoire, se dit toute puissante : « Si le Préfet de l’Hérault ne fait pas respecter la laïcité républi- caine, La Libre Pensée le fera déférer devant la juridiction administrative. Et gageons que les mêmes causes pro- duiront les mêmes effets. » Robert Ménard a qualifié de « gro- tesque » la décision d’interdire la crèche de Vendée et pointe un « deux poids deux mesures » dans l’applica- tion de la laïcité. « Quand la mairie de Paris organise une soirée festive pour le début du Ramadan, c’est considéré comme un événement culturel par Manuel Valls lui-même, et quand il s’agit d’une crèche on dit c’est reli- gieux», s’indigne-t-il, dénonçant les « ayatollahs de la laïcité ». « Quand j’ai inauguré la crèche, il y avait des représentants du culte mu- sulman, qui n’ont rien trouvé à re- dire », souligne-t-il. « Demain, je vais devoir enlever les guirlandes Joyeux Noël des rues de Bézierss ? Et puis, il va falloir revoir notre calendrier, qui commence à la naissance du Christ ? » Robert Ménard est très populaire à Bézierss et les habitants sont derrière lui dans cet acte de résistance. L’agita- tion sur les milieux sociaux bat son plein et déjà des jeunes se disent prêts à monter la garde autour des crèches. Attention, ces bobos gauchos laïcards vont finir par définitivement réveiller un peuple de France attaché à son identité chrétienne, sa légitimité et ses traditions. La Libre Pensée s’apprête à saisir à nouveau le préfet pour lui demander de « faire appliquer la loi d’ici à Noël ». « Y compris manu militari s’il le faut. » C’est tout à fait clair. Pour défendre la crèche, il faudra donc se battre ? Alors il faut qu’ils sa- chent que nous nous battrons. CAROLINE PARMENTIER [email protected] NKM, la bobo de Sarko Eu égard aux personnes en cause, il serait abusif de parler d’un combat de titans. Mais, dit-on, la bataille fut rude entre Laurent Wauquiez et Na- thalie Kosciusko-Morizet, dite NKM, pour savoir qui serait le n° 2 de Nicolas Sarkozy à l’UMP. Ce sera NKM. D’abord parce qu’elle a dit « preum’s ! » dans les media avant son concurrent, ensuite parce qu’elle est vice-présidente. Mais c’est sur- tout à la première raison qu’elle doit ce rang-là car Wauquiez, devenu, lui, secrétaire général prétend que cette fonction-clef fait de lui le vrai n° 2. Disons « 2 » et « 2 bis » pour mettre fin à la foire aux vanités. On comprend que l’ex-chef d’Etat ait voulu avoir NKM comme vice- présidente, c’est par souci d’homo- généité : il a perdu contre Hollande, elle a échoué devant Anne Hidalgo, ça crée des liens, c’est la fraternité des « losers ». Mais comment deux perdants pourront-ils faire un ga- gnant en 2017 ? La vice-présidente aura « une to- tale liberté de parole sur tous les su- jets ». Concrètement, cela signifie qu’elle pourra démentir le soir ce que le président aura affirmé le ma- tin. Il est pour l’exploitation du gaz de schiste, elle expliquera pourquoi elle est contre. S’il persévère à vou- loir abolir la loi Taubira, elle conti- nuera à prétendre que « ce n’est ni souhaitable ni possible ». Et nous ne disons rien du principe de précau- tion qu’elle veut conserver tel qu’il est et que Sarkozy entend remplacer par un « principe de responsabilité ». A Paris, lors des municipales, elle s’est alliée au MoDem, alliance que Sarkozy ne cesse de dénoncer comme contre nature quand elle sé- vit à Pau. Si Nathalie Kosciusko-Morizet n’était qu’une tête chercheuse soli- taire ses contestations ne prêteraient pas à conséquence, mais elle est, entre autres, en charge du pro- gramme du parti. Quel projet poli- tique pourra donc sortir de cette op- position entre le président et la vice- présidente, un cercle-carré, un aigle à deux têtes ? En réalité, NKM est pour lui une simple vitrine, une tête de gondole pour attirer le chaland centriste ou l’orphelin socialiste tenté par Alain Juppé. Bobo, écolo, gay friendly, en croisade contre « le front antinatio- nal », elle est parfaite pour ce rôle. Et puis, issue d’une grande dynastie bourgeoise, elle va au peuple comme ses ancêtres allaient s’encanailler dans des quartiers louches. Car elle prend le métro ! Elle en est ravie, c’est une délicieuse expérience : « Le métro est pour moi un lieu de charme, à la fois anonyme et fami- lier » puisqu’elle y vit « des moments de grâce » insoupçonnés des prolé- taires. Certes, elle n’y va pas souvent ou alors elle fraude, car elle pense que le ticket coûte 4 euros ! NKM ravie par le métro des humbles, c’est la Marquise de Sévi- gné découvrant, émerveillée, le tra- vail des paysans : « Savez-vous ce que c’est que faner ? Il faut que je vous l’explique : faner est la plus jolie chose du monde, c’est retourner du foin en batifolant dans une prairie ; dès qu’on en sait tant, on sait faner. » Telle est la bobo de Sarko, plus ridicule que précieuse. GUY ROUVRAIS [email protected] Suède : réveil d’un pays européen @present.fr

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Page 1: N° 8246 Suède : réveil d’un pays européensynthesenationale.hautetfort.com/media/02/00/3974972631.pdf · 2— PRÉSENT Samedi 6 décembre 2014 Saint Nicolas, Évêque de Myre,

qué qu’ils voteraient contre tout bud-get maintenant la politique d’immi-gration actuelle.

L’immigration au cœurde la crise

Un sujet capital pour les Démo-crates de Suède qui ont fait campagnesur ce thème, mais aussi pour leroyaume qui croule littéralement sousle poids de l’immigration et est en

proie à un communautarisme crois-sant. Rappelons que dans ce pays de 9,5

millions d’habitants, les étrangers etdescendants d’immigrés représententen effet quelque 15 % de la popula-tion. Conséquence d’une politiqued’asile particulièrement laxiste, laSuède est aujourd’hui submergée etassiste à la formation sur son sol de vé-ritables enclaves étrangères.Sur le départ deux mois à peine

après avoir été élu, Stefan Löfven, untantinet vexé, a expliqué mercredi quele gouvernement se contenterait degérer les affaires courantes jusqu’au 22mars et qu’il ne prendrait « pas l’ini-tiative de nouvelles négociations »avec l’opposition de centre droit, à la-quelle il a reproché de laisser « les Dé-mocrates de Suède dicter leurs condi-tions dans la politique suédoise ».

FRANCK DELÉ[email protected]

Après leur percée électorale his-torique du mois de septembre(Présent du 20 septembre), les

Démocrates de Suède, en refusant devoter le projet de budget du Premierministre social-démocrate tant que lesmesures sur l’immigration qu’il con -tient ne seront pas revues, ont réussicette semaine à contraindre StefanLöfven à proposer des législatives an-ticipées.

Première crise majeuredepuis 1958

Souvenez-vous : c’était il y a deuxmois. La formation emmenée parJimmie Akesson effectuait une percéehistorique lors des élections législa-tives, obtenant 12,9 % des voix,contre 5,7 % quatre ans auparavant,et s’imposait comme la troisièmeforce politique du royaume avec 49députés au Parlement. A l’époque,

Jimmie Akesson avait averti : « Noussommes tout à fait les maîtres du jeumaintenant (…) Il est évident que lesautres partis devront désormais nousprendre en considération. » Et les Dé-mocrates de Suède n’ont pas tardé à ledémontrer.

Mercredi, en effet, le Premier mi-nistre Stefan Löfven, privé de majo-rité absolue depuis sa victoire en sep-tembre, annonçait la tenue d’électionslégislatives anticipées le 22 mars pro-chain afin de sortir de la plus gravecrise politique que la Suède aitconnue depuis 1958.

En cause ? L’adoption par le Parle-ment, un peu plus tôt dans la journée,du projet de budget de la coalitiond’opposition de centre-droit Alliance(conservateurs, centre agrarien, libé-raux et chrétiens-démocrates) grâceau soutien des Démocrates de Suède.La veille, ceux-ci avaient en effet indi-

SAMEDI 6 DÉCEMBRE 2014 - 2,50 € N° 8246 Belgique•Luxembourg•Italie : 2.70 € - Suisse : 3 CHF - Canada : 3.5 $ can - Dom avion : 2.60 € - Tom avion : 850 CFP www.present.fr

À l’écoute de Radio Courtoisie P323e Fête du livre à Villepreux,

entretien avec J.P. Maugendre P4

Crèche : nousnous battronsC’est le combat du moment. Un très fort symbole. Et

bien plus que cela. Encouragé par le climat au pouvoir,les laïcards haineux de La Libre Pensée attaquent et per-sécutent en systématique. Ils veulent faire totalement in-terdire la Crèche des lieux publics en France. En atten-dant les lieux privés comme pour les feux de cheminée ?Après celle du Conseil général de Vendée que le tribunaladministratif a obligé à démanteler, c’est la mairie deBéziers qui est dans le collimateur. Et demain qui ?

« J’ai choisi les modalités. J’ai placécette crèche dans le cadre de l’en-semble de la politique culturelle de laville des fêtes de fin d’année. » Le cou-rageux Robert Ménard, ancien prési-dent de Reporters sans frontières, estdéterminé à garder coûte que coûte lacrèche de Noël installée dans le hall desa mairie. Il a pourtant reçu une lettredu préfet lui demandant de « reconsi-dérer son projet » parce qu’il contre-vient aux principes de laïcité. Et les as-sociations laïques le pressent de retirerson « emblème religieux ». C’est le conseiller municipal Aimé

Couquet (Front de gauche) appuyépar les communistes qui dès la fin oc-tobre par courrier a joué les délateursauprès de la préfecture. Ces laïcs àdeux vitesses qui hurlent contre lescrèches mais se félicitent des menussans porc ou de la viande halal dansles cantines scolaires. Entre autres.

Ayatollahs de la laïcitéL’association La Libre Pensée, forte

de sa première victoire, se dit toutepuissante : « Si le Préfet de l’Héraultne fait pas respecter la laïcité républi-caine, La Libre Pensée le fera déférerdevant la juridiction administrative.Et gageons que les mêmes causes pro-duiront les mêmes effets. »Robert Ménard a qualifié de « gro-

tesque » la décision d’interdire lacrèche de Vendée et pointe un « deuxpoids deux mesures » dans l’applica-

tion de la laïcité. « Quand la mairie deParis organise une soirée festive pourle début du Ramadan, c’est considérécomme un événement culturel parManuel Valls lui-même, et quand ils’agit d’une crèche on dit “c’est reli-gieux” », s’indigne-t-il, dénonçant les« ayatollahs de la laïcité ».« Quand j’ai inauguré la crèche, il y

avait des représentants du culte mu-sulman, qui n’ont rien trouvé à re-dire », souligne-t-il. « Demain, je vaisdevoir enlever les guirlandes JoyeuxNoël des rues de Bézierss ? Et puis, ilva falloir revoir notre calendrier, quicommence à la naissance du Christ ? »Robert Ménard est très populaire àBézierss et les habitants sont derrièrelui dans cet acte de résistance. L’agita-tion sur les milieux sociaux bat sonplein et déjà des jeunes se disent prêtsà monter la garde autour des crèches.Attention, ces bobos gauchos laïcardsvont finir par définitivement réveillerun peuple de France attaché à sonidentité chrétienne, sa légitimité et sestraditions.La Libre Pensée s’apprête à saisir à

nouveau le préfet pour lui demanderde « faire appliquer la loi d’ici àNoël ». « Y compris manu militaris’il le faut. » C’est tout à fait clair.Pour défendre la crèche, il faudradonc se battre ? Alors il faut qu’ils sa-chent que nous nous battrons.

CAROLINE [email protected]

NKM, la bobo de SarkoEu égard aux personnes en cause,

il serait abusif de parler d’un combatde titans. Mais, dit-on, la bataille futrude entre Laurent Wauquiez et Na-thalie Kosciusko-Morizet, diteNKM, pour savoir qui serait le n° 2de Nicolas Sarkozy à l’UMP. Ce seraNKM. D’abord parce qu’elle a dit« preum’s ! » dans les media avantson concurrent, ensuite parce qu’elleest vice-présidente. Mais c’est sur-tout à la première raison qu’elle doitce rang-là car Wauquiez, devenu,lui, secrétaire général prétend quecette fonction-clef fait de lui le vrain° 2. Disons « 2 » et « 2 bis » pourmettre fin à la foire aux vanités.On comprend que l’ex-chef d’Etat

ait voulu avoir NKM comme vice-présidente, c’est par souci d’homo-généité : il a perdu contre Hollande,elle a échoué devant Anne Hidalgo,ça crée des liens, c’est la fraternitédes « losers ». Mais comment deuxperdants pourront-ils faire un ga-gnant en 2017 ?La vice-présidente aura « une to-

tale liberté de parole sur tous les su-jets ». Concrètement, cela signifiequ’elle pourra démentir le soir ceque le président aura affirmé le ma-tin. Il est pour l’exploitation du gazde schiste, elle expliquera pourquoielle est contre. S’il persévère à vou-loir abolir la loi Taubira, elle conti-nuera à prétendre que « ce n’est nisouhaitable ni possible ». Et nous nedisons rien du principe de précau-tion qu’elle veut conserver tel qu’ilest et que Sarkozy entend remplacerpar un « principe de responsabilité ».A Paris, lors des municipales, elles’est alliée au MoDem, alliance que

Sarkozy ne cesse de dénoncercomme contre nature quand elle sé-vit à Pau.

Si Nathalie Kosciusko-Morizetn’était qu’une tête chercheuse soli-taire ses contestations ne prêteraientpas à conséquence, mais elle est,entre autres, en charge du pro-gramme du parti. Quel projet poli-tique pourra donc sortir de cette op-position entre le président et la vice-présidente, un cercle-carré, un aigleà deux têtes ?

En réalité, NKM est pour lui unesimple vitrine, une tête de gondolepour attirer le chaland centriste oul’orphelin socialiste tenté par AlainJuppé. Bobo, écolo, gay friendly, encroisade contre « le front antinatio-nal », elle est parfaite pour ce rôle. Etpuis, issue d’une grande dynastiebourgeoise, elle va au peuple commeses ancêtres allaient s’encanailler

dans des quartiers louches. Car elleprend le métro ! Elle en est ravie,c’est une délicieuse expérience : « Lemétro est pour moi un lieu decharme, à la fois anonyme et fami-lier » puisqu’elle y vit « des momentsde grâce » insoupçonnés des prolé-taires. Certes, elle n’y va pas souventou alors elle fraude, car elle penseque le ticket coûte 4 euros !NKM ravie par le métro des

humbles, c’est la Marquise de Sévi-gné découvrant, émerveillée, le tra-vail des paysans : « Savez-vous ce quec’est que faner ? Il faut que je vousl’explique : faner est la plus joliechose du monde, c’est retourner dufoin en batifolant dans une prairie ;dès qu’on en sait tant, on saitfaner. » Telle est la bobo de Sarko,plus ridicule que précieuse.

GUY [email protected]

Suède : réveil d’un pays européen

@present.fr

Page 2: N° 8246 Suède : réveil d’un pays européensynthesenationale.hautetfort.com/media/02/00/3974972631.pdf · 2— PRÉSENT Samedi 6 décembre 2014 Saint Nicolas, Évêque de Myre,

2 — PRÉSENT Samedi 6 décembre 2014 www.present.fr

Saint Nicolas, Évêque de Myre, (270-341)De saint Nicolas, les futures

mères sollicitent pour leurs enfantsune naissance heureuse et la grâcedu baptême. Il a été choisi aussicomme protecteur par un grandnombre de corporations, marins,pêcheurs, pèlerins… les victimes devols ou d’erreurs judiciaires se récla-ment de sa tutelle. Pour les tonne-liers, il est le saint qui fit sortir vi-vants d’un tonneau « trois petits en-fants qui s’en allaient glaner auxchamps », comme il est dit dans lacélèbre complainte, et qu’un bou-cher avait égorgés « coupés en me-nus morceaux et mis au saloircomme pourceaux ». Ce derniermiracle, le plus populaire de tous, avalu à saint Nicolas le gracieux pa-tronage de la jeunesse. « Qu’ainsi leslouanges de Nicolas soient chantéesen cette assemblée ; car quiconquele prie de cœur met le vice en fuiteet s’en retourne guéri. Ainsi soit-il. »

AB [email protected]

Objectif d’un pouvoir subversif

Retirer la légitime défense aux policiers blancsLa question mérite désormais

d’être posée à l’échelle nationale afinque, par elle, les pouvoirs publics sesentent les premiers visés : cherche-t-on plus ou moins officiellement à reti-rer aux policiers blancs responsablesde la mort de suspects noirs, leprincipe, vieux comme leschemins, de la légitimedéfense ? En d’autrestermes, l’objectif pour-suivi par les autorités fé-dérales ne serait-il pasde décourager les poli-ciers blancs d’interpellerun individu en infractionà partir du moment oùcelui-ci est noir ? Cette double question

lancée à un représentant del’Etat ne susciterait qu’un re-jet méprisant et même offusqué.Comment imaginer, répondrait celui-là la main sur le cœur, au pays oùtoutes les situations possibles et ima-ginables sont placées sous le signe dela loi, que l’on puisse un jour établirune distinction raciale au sein mêmede la police pour faire en sorte qu’ilexiste deux types de conduite chez lesgardiens de l’ordre selon la couleur deleur peau ? Cette prévisible indigna-tion serait impuissante à rendre in-congrue la double interrogation expo-sée plus haut. Persistons donc dans l’anticonfor-

misme et même la provocation : despreuves existent pour soutenir que lalégitime défense accordée jusqu’iciaux policiers blancs – comme auxautres – est en réel danger. A la suitede bien des affaires du même genre,deux très récentes, à New York etdans le Missouri, montrent que les

choses pourraient bouger. Et pasdans le bon sens.Le 17 juillet dernier, à New York –

exactement à Staten Island, un des« arrondissements » de la mégapolecomme Manhattan ou le Bronx – Da-

niel Pantaleo, un Blanc de 29ans appartenant au com-missariat de police local,remarque près de lagare du ferry un indi-vidu noir, Eric Garner,43 ans, en train devendre à la sauvette descigarettes détaxées, cequi est strictement in-terdit. Garner setrouve promptementinterpellé, refuse de re-connaître son forfait,discute en élevant la voix

pour tenter d’appuyer ses argu-ments mais sans esquisser la moindrevelléité de fuite. Au bout d’une mi-nute, une brève lutte s’engage aucours de laquelle le professionnalisme,l’entraînement et la jeunesse du poli-cier ont très vite le dessus. Garner estmaîtrisé. Il est maintenu dans l’im-possibilité de faire un geste par une cléenseignée dans toutes les académies

de police, qui consiste à se glisser der-rière le suspect et à lui passer unavant-bras sous le cou tout en l’empê-chant de desserrer l’étreinte avec sesmains. Le policier a-t-il trop serré ?Garner avait-il un système respira-toire déficient ? Ces questions n’ontpas encore reçu de réponses convain-cantes. Toujours est-il que Garnermeurt à son arrivée à l’hôpital. Onavait fouillé ses poches : il était sansarme. Le policier est mis aussitôt enexamen. On lui retire son badge etson pistolet tandis que la lourde ma-chine de la justice se met en mouve-ment.

Quatre mois et demi après ces évé-nements – plus exactement mercredidernier – le grand jury de Staten Is-land (six Blancs, trois Noirs, trois His-paniques) rend un verdict d’acquitte-ment. Il n’est retenu aucune chargecontre le policier qui bénéficie doncdu principe de la légitime défense,dans la mesure où il a répondu à laforce qu’on lui opposait par une forceproportionnelle et réglementaire. A laminute même où ce jugement futconnu du grand public, des dizainesde rues de New York se soulevèrent enlaissant couler comme des torrentsdes milliers de protestataires – noirs à95 % – qui convergèrent vers CentralStation, la principale gare deBig Apple, afin d’y constituer unemasse humaine étendue à même le solen signe de sourde révolte. Les cris, lesslogans, les pancartes allaient tous

dans le même sens : ce jugement estun scandale. La justice est raciste. Lepolicier est coupable. Il a indirecte-ment tué un Noir parce qu’il étaitnoir. Le système tout entier est cor-rompu. Pendant des heures, les foulesont coulé à New York mais aussi àChicago, Denver, Los Angeles, Balti-more sans rien piller, ni détruire, nibrûler. A l’inverse de ce qui s’étaitpassé à Ferguson.Pour une affaire à peu près sem-

blable, Ferguson, une ville de 21 000habitants dans l’Etat du Missouri, avécu la semaine dernière une nuitd’incendies et de vandalisme. Làaussi, la victime est un Noir nonarmé. Là aussi, le policier est unBlanc. Là aussi, il a utilisé la forcepour se rendre maître d’une menace.Et là aussi, des foules aux mêmes ca-ractéristiques, aux mêmes slogans,aux mêmes accusations, défilèrentpour hurler leur haine des Blancs, dusystème blanc, de la justice blanche.Mais à Ferguson, ces cortèges trans-formèrent certains quartiers de la villeen torches dont les dégâts se chiffrè-rent à plusieurs dizaines de millionsde dollars. En plus de la haine expri-mée avec à peu près la même force, un

autre élément rapproche New York deFerguson : l’attitude des autorités.Même démagogie, même intoxi-

cation, même irresponsabilité. Aussibien après l’affaire de Staten Islandqu’après celle du Missouri, le prési-dent Barack Obama se surpassa dansla flatterie et dans le racisme à reboursen parlant de la « frustration dupeuple africain-américain devant lapolice et la justice ». Une frustrationqui, a-t-il souligné, rejoint « la ségré-gation contre les Noirs il y a trois gé-nérations ». Démonétiser des institu-tions qui ont assuré jusqu’ici, qu’onl’admette ou non, la paix civile, s’ap-parente à une dangereuse entreprisede démolition – à un calcul subversif.Frileux et soumis, l’establishment asuivi Obama dans la condamnationde deux verdicts rendus en pleine lé-galité.

Une condamnation aux consé-quences incalculables, dignes d’ap-prentis sorciers. Il était plus facile dejouer sur ce registre que de rappeler àhaute voix, courageusement, ces deuxtrès simples vérités sorties de statis-tiques que la presse aux ordres se gardebien de publier : sur les 10 000 Noirsenviron tués chaque année par balles,93 % le sont par des balles tirées pard’autres Noirs ; et sur les 400 Noirstués chaque année par la police, seuls25 % le sont par des policiers blancs.

CHRISTIAN [email protected]

Démonétiser des institutions qui ont assuré jusqu’ici la paix civile

s’apparente à une dangereuse entreprise de démolition

“”

De notre correspondant permanent aux états-Unis

L’ombre jaune plane sur Toulouse

Les nombreuses levées de bou-cliers d’élus et responsables poli-tiques, ardents défenseurs d’un can-didat national, n’ont pas eu le der-nier mot : une part du capital del’aéroport de Toulouse-Blagnactombe dans le giron du consortiumchinois Symbiose, composé deShandong Hi-Speed et de Fried-mann Pacific Asset Management,un fonds d’investissement de Hong Kong.

Hong Kong sur Garonne

Fait rare, plutôt que choisir Vinciassocié à la Caisse des Dépôts et Aé-roports de Paris associé à Predica(groupe Crédit Agricole) qui figu-raient parmi les principaux préten-dants, le gouvernement français afait le choix d’un investisseur étran-ger, jugeant que l’offre chinoise étaitla meilleure, non seulement entermes de prix mais également sur leplan social. Soit une cession du 4e aéroport de

France au consortium Symbiose à49,99 % du capital qui devrait rap-porter plus de 300 millions d’euros à

l’Etat. Une ouverture de capital danslaquelle « les collectivités locales etl’Etat français restent toutefois ma-joritaires avec 50,01 % » précise fiè-rement le ministre de l’EconomieEmmanuel Macron en ajoutant« qu’il ne s’agit pas d’une privatisa-tion mais bien d’une ouverture decapital ». Le gouvernement a beau arguer

que non seulement il ne vend pasl’infrastructure, qui reste sa pro-priété (Bercy assure n’avoir aucuneintention de céder les 10,01 % quilui resteront une fois que la cessionsera finalisée), et qu’il garde la mainà la fois par les concessions qu’il ac-corde et en tant que régulateur dusecteur, il n’empêche que l’ombrejaune plane désormais sur Toulouse-Blagnac. Bref, il faut faire rentrer de l’ar-

gent dans les caisses de l’Etat. Peuimporte d’où vient l’argent. En re-vanche, quand le Front national em-prunte à la Russie, c’est une autrechanson.

PIERRE MALPOUGE

[email protected]

Question bien-pensance, FleurPellerin et Anne Hidalgo ont ajoutéleur pierre à l’édifice en disant toutle bien qu’elles pensaient du très dé-magogique spectacle Exhibit B duSud-Africain blanc Brett Bailey, pro-grammé au théâtre Gérard-Philippede Saint-Denis. Elles ont même pro-voqué le feu nucléaire dans le petitmonde de l’antiracisme militant.Exhibit B, déjà annulé en Grande-Bretagne sous la pression d’extré-mistes noirs, plonge le spectateurdans l’histoire coloniale à traversdouze tableaux faisant le énièmeprocès de la colonisation et de l’es-clavage. La « performance » utilise toutes

les ficelles de l’antiracisme et son au-teur en rajoute dans la repentanceavec toute une série de clichés : « desNoirs enchaînés dans des positionsdégradantes », une « Vénus hotten-tote », autant de scènes qui neconviennent pas à un collectif dé-nonçant la « négrophobie » (sic) duspectacle et multiplient les manifes-tations violentes devant le théâtre.

Ils flétrissent le caractère « raciste »du spectacle et plus particulièrementl’utilisation dévoyée de l’argent« blanc » qui priverait les acteursnoirs de subsides. Cet emblème de la repentance

blanche provoque en tout cas un dé-bat passionné. Notamment, celuiqui a eu lieu, dans l’émission de Fré-déric Taddei, « Ce soir ou jamais »où la chanteuse Bams a fini parcomparer Exhibit B à… Mein Kampflaissant les autres invités interdits ! Sur Slate, la comédienne et mili-

tante antiraciste Amandine Gaysigne une tribune que tous les te-nants de la repentance, en tête des-quels Brett Bailey, devraient lire :« Le monopole de la parole blanche surles questions coloniales et raciales re-présente une violence symbolique d’au-tant plus prégnante qu’elle s’exercedans un territoire avec une forte popu-lation noire, comme celui de Saint-Denis. »Ce spectacle était chaudement

soutenu par les ligues de vertu tradi-tionnelles que sont le MRAP, la LI-CRA, la CIMADE ou la LDH.L’affaire montre, s’il en était besoin,les limites et les ambiguïtés de l’anti-racisme, toujours alimenté par ceux-là mêmes qui veulent imposer à leurprofit une vision instrumentalisée del’histoire à leur profit et continuerainsi à exercer leur métier de profes-sionnels de l’antiracisme.Comble de l’ironie, Agnès Tri-

coire, avocat de la Ligue des droitsde l’homme, reproche aux manifes-tants « anti-Bailey » d’utiliser « lesmêmes moyens obscurantistes quel’extrême-droite catholique » ! Laboucle est bouclée.

Françoise [email protected]

Sa relaxe jeudi par la cour d’appelde Dijon sonne pour Emmanuel Gi-boulot comme une « victoire de lamobilisation citoyenne ».

Viticulteur bio, poursuivi pouravoir refusé de traiter ses vignes qu’ilexploite en Côte-de-Beaune etHaute-Côte de Nuit à l’aide de pesti-cides, est ressorti blanchi du tribunalcorrectionnel de Dijon qui, en pre-mière instance, en avril dernier,l’avait condamné à une amende de1 000 euros, dont la moitié avec sur-sis (convoqué par la justice, il encou-

rait six mois d’emprisonnement et30 000 euros d’amende).

Les raisins de la colère L’affaire avait débuté au printemps

2013, quand la découverte près deBeaune de foyers de flavescence do-rée – maladie mortelle de la vignequi était apparue en 1949 en Arma-gnac – avait conduit le préfet à im-poser de traiter tous les vignobles dudépartement contre la cicadelle, l’in-secte qui répand la maladie. Viticul-teur en biodynamie depuis les années1970, Emmanuel Giboulot s’était re-

fusé à traiter les dix hectares qu’il ex-ploite.

Erigé en symbole par certains éco-logistes, le viticulteur s’est félicitéd’avoir provoqué « le débat » autourde son affaire.

« C’est le reflet d’une probléma-tique de fond dans la société : la pro-blématique “flavescence” a mis enavant ce problème des pesticides etc’est le début d’un combat », a-t-il dé-claré à la sortie du tribunal.

P.M.

Antiracisme : explosion en vol

Relaxe pour le vin bio

Page 3: N° 8246 Suède : réveil d’un pays européensynthesenationale.hautetfort.com/media/02/00/3974972631.pdf · 2— PRÉSENT Samedi 6 décembre 2014 Saint Nicolas, Évêque de Myre,

L’enfance blessée ! Dans sa famillefoldingue, Aria (Giulia Salerno), ga-mine de 9 ans, a du mal à trouver saplace.Entre ses parents artistes égocen-

triques séparés – sa mère (CharlotteGainsbourg), pianiste fofolle quichange de compagnon comme dechemise, son père (Gabriel Garko),acteur de seconde zone en costardsde gigolo portoricain plus supersti-tieux qu’une vieille douairière – etses demi-sœurs qui la mettent àl’écart, elle est la mal-aimée du clan.Du clan mais aussi de la plupart deses copains et copines de classe.

Entre disputes et humiliations,ballotée de l’un à l’autre de ses géni-teurs, Aria erre comme une âme enpeine dans les rues de Rome, avecson sac à dos et son chat noir, Dac.Tout ce qu’elle demande, c’est d’êtreaimée. Mais voilà : elle a beau toutmettre en œuvre pour y parvenir,rien n’y fait. Elle est et restera unegamine en souffrance. Jusqu’à l’iné-luctable…

Un enfant dans l’impasse ! En ré-férence à L’Incompris (1966) deLuigi Commencini, film dans lequelun jeune garçon souffre de l’indiffé-rence de son père (on en voit

d’ailleurs un bref extrait dans lefilm), Asia Argento – fille de DarioArgento, spécialiste du giallo (filmde terreur italien aux scènes ba-roques) dans les années 1970-1990 – signe une comédie drama-tique sur les tribulations d’une ga-mine en mal d’amour, sur les enfantsdu divorce et sur le douloureux pas-sage à l’adolescence.Au final, certes il y a de la sensibi-

lité, mais l’ensemble foutraque et ca-

cophonique, moins rythmé qu’unecourse de chars dans le Colisée, res-semble à un collage de scènes et à ungloubi-boulga qui manquerait delien. Seule la petite Giulia Salerno,fillette désarmante, parvient à voustenir en éveil et à éviter que vos pau-pières deviennent lourdes, troplourdes.

PIERRE [email protected]

Samedi 6 décembre 2014 PRÉSENT — 3

Depuis la fin des années 60 et lasortie au cinéma du dessinanimé Astérix le Gaulois, les enfantsde France ont pu se réjouir des diffé-rentes adaptations des aventures dupetit héros et de son village d’irré-ductibles.

Alexandre Astier, connu pour sasérie historique décalée « Kaame-lott » sur le Roi Arthur a relancé lamachine cette année avec Astérix : LeDomaine des dieux adapté de l’albuméponyme. Si le style dessin animé afait place aux images de synthèse en3D, la ressemblance des personnageset des décors avec la BD est toujoursgarantie.

Pour enfin parvenir à éradiquer levillage qui lui résiste, Jules Césarmet en place un nouveau strata-gème. Au lieu d’envoyer se battre envain ses légions, il décide deconstruire une cité romaine dans laforêt voisine qui prendra le nom de« Domaine des dieux ». César saitque les Gaulois ne s’en prennent pasaux civils, et seront donc envahis pe-

tit à petit et noyés dans la masse. Unscénario très contemporain.Cet épisode n’est pas de la qualité

des précédents, ayant quelques lon-gueurs et un humour moindre. Lesesclaves volent, eux, la vedette auxRomains, le comique de situation lesconcernant étant bien plus subtile.Notons qu’Astérix emprunte pour ladernière fois la voix de l’immense

Roger Carel. Le film a cependant lemérite de ne trahir ni l’esprit nil’univers créés par Albert Uderzo etRené Goscinny il y a 55 ans déjà.Les enfants passeront un bon mo-ment et le mythe « Astérix » perdu-rera, par Toutatis !

Alexandre [email protected]

L’Incomprise

L’enfant du désordre

Les revues sont de la revue� José Antonio-Francisco FrancoLe Cercle franco-hispanique, créé par

notre ami Olivier Grimaldi qui nous a ré-cemment quittés, publie les homéliesprononcées lors des messes du 20 N (le20 novembre) à Paris : date anniversairede la mort de José Antonio (fusillé par lesRouges un 20 novembre, en 1936) et decelle de Franco (disparu un 20 no-vembre, en 1975).Ces sermons sont autant d’occasions

de répondre aux mensonges politiqueset historiques qui, régulièrement, refontsurface. Admirable Cercle franco-hispa-nique qui entretient les valeurs com-munes à nos deux pays menacés par lesmêmes ennemis. Ce 20 N à Paris est unouvrage salutaire et courageux. Et unbeau cadeau de Noël à faire ou à sefaire.Cercle franco-hispanique, 4 bis, rue

Caillaux, 75013 Paris.

� La Malle aux Mille TrésorsMaintenant que cette chronique est

programmée un jour où nous paraissons« en couleurs », vous pourrez mieux ap-précier la superbe couverture – un ca-maïeu de verts – de décembre. Editoria-liste de La Malle aux Mille Trésors, JulieClédor écrit : « Il y a dans ce numéro debien belles choses. La nature, mais aussil’Histoire et les histoires nous offrentgénéreusement de quoi nous émer-veiller. » Ce n’est pas une publicitémensongère ! A retenir une bio du PèreLéon Bourjade, officier aviateur et mis-sionnaire qui fut un des héros de laGrande Guerre.La Malle aux Mille Trésors, BP 26,

56220 Malansac.

� Mémoire ViveMémoire Vive est la revue du CDHA

(Centre de documentation historique del’Algérie). Et c’est une mine ! Ce numéroest plus spécialement consacré au savoir-faire pied-noir. Directeur de MémoireVive, Joseph Pérez écrit : « L’heure (…)n’est pas à entretenir les regrets sur l’in-différence de descendants, nos fils etfilles, que ces histoires-là n’ont pas en-core interpellés. L’urgence est dans laprise de conscience et dans l’engage-ment à faire. Nos trésors cachés appel-lent à leur sauvegarde. »D’où, dans ce numéro, une riche ex-

ploitations d’archives familiales, nota-riées, professionnelles. Des « petites »histoires qui, mises bout à bout,contribuent à écrire la grande. Mémoire Vive, Maison du Maréchal-

Juin, 20, avenue de Tübingen, 13090 Aix-en-Provence.

� Cahiers d’Histoire du nationalismeLe dernier numéro des Cahiers d’His-

toire du nationalisme, revue de synthèsenationale, est consacré à Jacques Doriotet au PPF (Parti populaire français).Etonnant destin, incroyable trajec-

toire de cet homme venu du Parti com-muniste dont il fut un des leaders lesplus acharnés. Maire de Saint-Denis en1931, il commença à prendre ses dis-tances avec la ligne du parti en 1934.Tout en lançant à Saint-Denis, carl’homme reste un féroce bolcho, unComité de vigilance antifasciste. Excludu parti par Thorez, il fonde le PPF quis’embarquera dans l’aventure de la Col-laboration. Une aventure qui s’achè-vera pour lui le 22 février 1945 : cejour-là, sa voiture est mitraillée. Le« Grand Jacques » vient de terminer une vie peu banale sur une route alle-mande.Synthèse nationale, 116, rue de Charenton, 75012 Paris.

ALAIN SANDERS

[email protected]

Asterix

Le Domaine des dieux

Aria, petite fille perdue sans collier

Astérix et ses amis passent à la 3D.

Le professeur Xavier Martin,dont on connaît les ouvrages, enparle de façon passionnante. Sonpassage en tant qu’invité des mar-dis de la mémoire d’Anne Colinet Dominique Paoli, le 25 no-vembre dernier, a d’ailleurs suscitéde nombreuses réactions d’audi-teurs. Xavier Martin continue sonétude des écrivains des « Lu-mières » en publiant Naissance du

sous-homme au cœur des Lumières, avec un sous-titre trèsprometteur : « Les races, les femmes, le peuple ». En troismots tout est dit : les philosophes n’ont que mépris, voirehaine pour les peuples exotiques, les femmes, les paysanset le petit peuple des villes que Voltaire appelait les« gueux ». Oui mais, une fois supprimés tous ces gens, ilne reste plus… que les philosophes, c’est pratique ! Lahaine de Voltaire pour les juifs était relativement connue

mais savait-on qu’à la fin de sa vie, il proposait la dépéna-lisation du viol ? N’oublions pas que Voltaire, malgré sahaine de la religion, était un partisan acharné de l’instruc-tion religieuse du peuple sans quoi, disait-il, « mes pay-sans me voleront mon vin et mon blé » !N’oublions pas non plus que ces « philosophes » ont

été une source d’inspiration pour les grands criminels del’histoire : Robespierre, Pol Pot et tant d’autres.Les dégâts subsistent malheureusement de nos jours

car le refus de l’essence de l’homme explique probable-ment l’irrespect du caractère sacré de l’espèce humaineen bioéthique contemporaine. Ces personnages sontbien peu reluisants mais il faut les lire malgré tout pourtémoigner, auprès de tous ceux qui nous les présententcomme les grands génies du XVIIIe siècle. Ou au moinslire Xavier Martin !

Anne [email protected]

A l’écoute de Radio Courtoisie

Photo Philippe Vilgier

Le professeur Xavier Martin.

Page 4: N° 8246 Suède : réveil d’un pays européensynthesenationale.hautetfort.com/media/02/00/3974972631.pdf · 2— PRÉSENT Samedi 6 décembre 2014 Saint Nicolas, Évêque de Myre,

4 — PRÉSENT Samedi 6 décembre 2014 www.present.fr

Directeur (1981-2013) : Jean Madiran (†). SARL PRÉSenT pour 99 ans au capital de 135 555 euros, sise 5 rue d’Amboise,75002 Paris. Gérant : Zita de Lussy. Imprimerie RPn - 93190 Livry-Gargan. Dépôt légal : 4e trimestre 2014. CPPAP : 0518C 83178 - ISSn : 07.50.32.53. Directeur de la publication : Zita de Lussy. Rédacteur en chef : Samuel Martin. Directeur du

jour : Anne Le Pape.

AbonnementsLa formule la plus pratique, le prélèvement mensuel : 27,50 € par mois

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ciels s’imaginent avoir des clartés surtout parce qu’ils zappent, ou buti-nent, de site en site. Incapable de seconcentrer, de prendre de la hauteuret du recul, l’esprit humain est ainsiemporté par les tourbillons de lamode, submergé par les flots del’émotivité, ballotté au gré des ventsdominants de l’instant présent.Que penserait Voltaire de notre

époque, lui qui écrivait : « Celui quilit sans crayon à la main dort. » Au-jourd’hui, les zappeurs exclusifs nese contentent pas de dormir, ils ron-flent bruyamment.

Dans son précieux ouvrage Lesdéshérités ou l’urgence de transmettre,François-Xavier Bellamy rappellefort opportunément qu’en latin lemême mot : « liber » signifie à la foisl’adjectif qualificatif libre et le sub-stantif livre. Le livre n’est pas arme d’oppres-

sion ou pensum abrutissant, maisinstrument de liberté. Pour vivrelibre, lisez !

Propos recueillis par Samuel [email protected]

— La 23e fête du Livre rassemblequelques conférenciers de prestige :Mgr Schneider, Eric Zemmour, Phi-lippe de Villiers… Comment réunit-on un tel « plateau » ?

— Il me semble que la réussite re-pose sur plusieurs éléments. Toutd’abord il faut connaître avant l’étéles livres qui paraîtront à l’automneet prendre dès ce moment contactavec leurs auteurs et éditeurs. En-suite nous bénéficions d’une noto-riété liée à l’ancienneté de notre fêtedu livre, à sa fréquentation et au cli-mat général qui y règne. En effet ilne s’agit pas uniquement d’uneusine à vendre des livres mais d’unejournée que nous souhaitons fami-liale et conviviale, avec la possibilitéd’assister à la messe et de se restaurersur place dans l’amitié française etl’espérance chrétienne. Notons qu’àpartir de 14 heures est ouverte unegarderie, afin de faciliter l’accès desfamilles, qui bénéficient égalementd’un forfait d’entrée familial à15 euros.

— Qu’ont en commun la centained’auteurs très divers qui signentleurs livres à la Fête du Livre ?— Tous nous semblent participer,

selon des modalités diverses, àl’œuvre de réforme intellectuelle etmorale à laquelle nous sommes atta-chés, ce qui n’exclut pas qu’une large

place soit également faite aux livrespour enfants et aux lectures récréa-tives. Très concrètement, les ou-vrages des auteurs présents représen-tent 450 titres différents et4 500 exemplaires, la librairie géné-rale 160 titres et 1 000 exemplaires,la librairie Jeunesse 300 titres et1 500 exemplaires. A cela, ilconvient d’adjoindre une librairied’occasion.— La fête de Renaissance catho-

lique est, avec la Journée de la Cour-toisie et les Journées chouannes, l’undes grands événements littéraires etde diffusion de livres de notre fa-mille d’esprit de l’année. Quelle estla particularité de votre journée ?— Il est toujours difficile, et par-

fois prétentieux, de se comparer auxautres. Radio Courtoisie est la radiode « toutes les droites ». Ce n’est pasnotre positionnement. Nous noussentons bien peu d’affinités avec unedroite néopaïenne pour laquelle leChrist est un dangereux agitateurgauchiste, pas plus que nous n’avonsde complaisances envers une droitelibérale pour qui l’avortement estl’horizon indépassable de la libéra-tion de la femme. Nos auteurs sontunis, me semble-il, dans la diversitédes sujets qu’ils abordent, par uncommun amour de la France, de sonhistoire et de ses traditions, et doncpar la reconnaissance de ce que

notre pays doit au christianisme.Au-delà des quelques « vedettes »que vous avez mentionnées, je sou-haiterais rendre hommage auxautres auteurs présents, plus obscursou également illustres, qui donnentson rayonnement à notre événementet contribuent, chacun à sa place, àfaire connaître le vrai, admirer lebeau et pratiquer le bien.

Concernant la Journée chouanne,je ne suis pas certain que les organi-sateurs et le public accepteraient departiciper à une messe célébrée selonla forme extraordinaire parMgr Schneider, évêque auxiliaired’Astana au Kazakhstan, ni d’écou-ter une conférence prononcée parEric Zemmour qui, s’il partage notreamour de la France, ne partage pasnotre foi.

— En tant qu’organisateur d’unefête du livre, constatez-vous que lesjeunes ne lisent plus, ou est-ce uneidée fausse ?— Je crains qu’effectivement il ne

s’agisse pas d’une idée fausse. Lesjeunes générations lisent moins queleurs parents qui déjà, eux-mêmes,regardaient trop la télévision. Letemps de lecture des jeunes, et desmoins jeunes, est vampirisé parl’usage et la consultation abusived’internet. Tout le monde l’observeautour de soi. Des esprits superfi-

Entretien avec Jean-Pierre MaugendreC’est, comme chaque année, le grand

rendez-vous des amoureux du livre etdes idées : la 23e Fête du Livre se tien-dra dimanche à Villepreux. Parmi lesnombreux auteurs, ceux de “Présent” : Francis Bergeron, Thierry Bouzard,

Anne Brassié, Custos, Rémi Fontaine,

Anne Le Pape, Paul-André Maur, Ar-naud Raffard de Brienne, Jean-ClaudeRolinat, Alain Sanders, Nicolas Tand-ler…Le journal aura aussi son propre

stand, où nos lecteurs sont fortementconviés à passer !

Un Noël pour les enfants syriensCréée en 2013 au lendemain de l’entrée des ji-

hadistes à Maaloula, qui criaient « On va libérerMaaloula des Croisés », l’association Chrétiens deSyrie pour la paix lance une collecte de produits depremière nécessité, mais aussi de jouets, de vête-ments, de couvertures et de dons en argent pouraider les enfants syriens, orphelins ou non, et leurredonner un peu de joie de vivre. A sa tête,Roueida Khoury, qui répond à nos questions.— Après quatre années de guerre, quelle est la situa-

tion exacte de votre pays ?— Toutes les ressources de notre pays sont épuisées et

la situation sanitaire est très délicate. L’aide extérieureapportée à nos compatriotes est très disparate selon lesrégions. En fait, la Syrie manque de tout : eau, gaz, élec-tricité. Et ne parlons pas de l’inflation. Cette année, parexemple, les prix ont été multipliés par dix. Les matièrespremières sont chères et nous sommes souvent obligés deles acheter au Liban, ce qui fait grimper particulièrementles coûts. Concrètement, un don de 10 €, soit 2 300livres syriennes, permet de nourrir plusieurs enfants.— De quoi souffrent vos petits compatriotes ?— D’abord et avant tout, ils souffrent de malnutri-

tion. Mais nombre d’entre eux ont été blessés lors d’at-taques de la rébellion syrienne. Certains ont développéde graves maladies de peau. D’autres sont paralysés à lasuite de blessures causées par les bombardements terro-ristes. Enfin, des vaccins périmés donnés par la Turquieont provoqué récemment la mort de 60 enfants à Raka.Qu’il s’agisse des orphelinats ou des couvents hébergeantdes orphelins ou des enfants confiés par leurs parents

contraints d’abandon-ner leurs enfants parmanque de travail,nous manquons sur-tout de lait et de pro-duits de première né-cessité. — Quelles sont les

conséquences réelles del’embargo ?

— L’embargo tue le pays économique mais aussi lepays politique. Par exemple, le matériel de nombreusesusines d’Alep a été volé par les jihadistes pour le compted’entreprises turques, qu’il s’agisse d’entreprises textiles,de laboratoires pharmaceutiques ou d’usines fabriquantdu savon. Des machines ont été démontées, des outilsvolés et beaucoup ont pris le chemin de la Turquie.Même chose du côté de Homs ou de Damas. Ducôté agricole, tout ce qui est sous le contrôle des jiha-distes est systématiquement détruit ou détourné à leurprofit (blé, coton, huile d’olive). Nous entamons le qua-trième hiver de guerre et les économies des Syriens ontfondu comme neige au soleil. C’est la raison pour la-quelle nous lançons cette opération pour ceux qui ontperdu leur maison et leur travail.— Et le sort des femmes dans cette tragédie ?— Celles qui travaillaient ne peuvent plus se rendre à

leur travail, vu le manque de conditions de sécurité.Dans certaines zones où sévit la rébellion, elles ne peu-vent plus se déplacer seules, car la loi jihadiste les en em-pêche. Bien sûr, la situation est différente à Damas oùfonctionnent encore les institutions de l’Etat. Quant ànos compatriotes qui partent pour le Liban, les autoritésde Beyrouth n’acceptent plus les flots de réfugiés et lesTurcs tirent sur nos compatriotes qui, tiraillés par lafaim, ont récemment dérobé de la nourriture à la rébel-lion. Nous avons un exode de 6 à 7 millions de per-sonnes à l’intérieur de la Syrie, ce qui appauvrit encoreplus certaines zones. Les gens se disputent des bon-bonnes de gaz pour se faire à manger ou se réchauffer etje crains le pire pour mes compatriotes cet hiver, car lefroid s’est déjà installé.Une ONG ne peut plus faire face à la situation causée

par les terroristes des barbares islamistes. Il faut aider lescommunautés religieuses et laïques en charge de tous cesorphelins à rémunérer celles et ceux qui sont là pour as-surer leur éducation. Les roquettes qui tombent, les bon-bonnes de gaz qui explosent, les voitures piégées quiprennent feu, tout cela terrorise les enfants qui sont bles-sés physiquement et traumatisés psychiquement. Je re-mercie d’avance vos lecteurs pour leur aide.

Propos recueillis par Françoise Monestier

Chrétiens de Syriepour la paix (CSPPAIX)Chèques à l’ordre de CSPPAIX.

Chez Roueida Khoury- 5 rue Ru-bens - 75005 PARIS. Les dons ennature doivent être déposés à cetteadresse avant le 11 décembre 2014,date de départ du convoi.

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Samedi 6 décembre 2014 PRÉSENT — 5

ZEMMOUR ouvre son livre sur « laFrance, homme malade de l’Europe »,et l’achève par l’issue fatale : « La Fran-

ce se meurt, la France est morte. » Il est pour-tant tonique, ce livre. Peut-être parce que,quand on est venu à bout de ces 528 pages deréflexion foisonnante qui, pour raconter « lesquarante Piteuses », se nourrit de tout, ciné-ma, séries télévisées, chansons, foot, avec desembardées volontaires dans l’histoire et dansl’actualité, on saisit avec lui, grâce à lui, le filrouge, le fil d’Ariane, qui relie des événementsque nous avons vécus éclatés, sans toujours encomprendre la cohérence.Et cette compréhension est le choc qui pro-

voque le sursaut. Zemmour n’est pas de ceuxqui déplorent les effets dont ils chérissent lescauses. Posant un diagnostic, il remonte auxcauses et passe à d’autres le relais, leur donnantles armes du redressement et de la renaissance.

La mort du pèreL’avant-dernière page concentre le diagnos-

tic : « Nous avons aboli les frontières, nousavons renoncé à notre souveraineté, nos élitespolitiques ont interdit à l’Europe de se référerà ses racines chrétiennes. Cette triple apostasiea détruit le pacte millénaire de la France avecson histoire. »C’est donc avec elle qu’il faut renouer. Il

n’est pas indifférent qu’il dédie son livre à sonpère, qu’il ait choisi pour son premier chapitrele mot d’un révolutionnaire : « L’histoire n’estpas notre code », et pour son dernier un versetd’Ezéchiel : « Les pères ont mangé des raisinstrop verts, les dents des enfants ont été aga-cées. » Zemmour n’est pas essentiellementpolémiste, il est historien et, quand l’histoireprend des allures apocalyptiques, il use duvocabulaire théologique : l’apostasie n’est pasun simple reniement, mais l’abandon publicd’une religion inhérente à un être ou unenation, au profit d’une autre.On peut s’étonner et se scandaliser qu’il

ouvre son livre sur « la mort du père de lanation » c’est-à-dire, pour lui, la mort deDe Gaulle, et qu’il écrive avec PhilippeMuray, « De Gaulle a été le dernier père, etaprès lui viendrait le temps des papas-pous-settes ».De Gaulle parjure ? Zemmour justifie le

nécessaire machiavélisme du prince. Pour lui,« De Gaulle était émule de Machiavel et deRichelieu : il ne connaissait que les rapportsentre Etats, les souverainetés nationales et larealpolitik. Il ignorait les régimes et ne faisaitpas de morale au nom des droits de l’hom-me ». Provocateur sans doute, mais cette pro-vocation-là ne lui sera pas reprochée par lesmédias, il écrit : « De Gaulle est un enfant deMaurras, (…) héritier des maurrassiens anti-colonisateurs du XIXe siècle qui n’ont jamaiscru aux mythes émancipateurs de la gauchecolonisatrice. » Sa volonté d’indépendance lepoussa à quitter l’OTAN, à se libérer du« protectorat américain » et « à se lancer dansune politique d’alliances tous azimuts, avecl’URSS, l’Europe de l’Est (Roumanie), jus-

qu’en Amérique du Sud (“Mexicanos con fran-cos mano en la mano”) ou en Amérique duNord (“Vive le Québec libre”). Ce fut le som-met de la volonté gaullienne d’indépendancenationale ». Zemmour y voit une mise enœuvre tardive de la « France seule », qui n’eutguère de lendemain.

Je sais bien que certains lecteurs arrêterontlà leur lecture. Mais cet aspect de sa pensée estsi essentiel qu’on ne peut l’occulter. Quand ilcite De Gaulle : « Il y a d’abord la France,ensuite l’Etat, enfin le droit », c’est pour illus-trer ce renversement, cette « pyramide retour-née – d’abord le droit, ensuite l’Etat, enfin laFrance », que constitua, en 1971 et 1974, « larévolution des juges », qui soumit toute loinouvelle au bon vouloir du Conseil constitu-tionnel : « La politique était saisie par le droit,qui ne la lâcherait plus. »

A ce renversement contribua, en 1972, laloi Pleven qui, en élargissant démesurément lanotion de « discrimination », supprima laliberté d’expression, et dont la descendance seretrouve dans les lois Gayssot, Taubira,Perben : « La loi donne au juge le droit et ledevoir de sonder les cœurs et les âmes, de fairel’archéologie des pensées et des arrière-pen-sées. » A l’époque d’une immigration maghré-bine massive, la loi Pleven annonçait « la dis-solution programmée de la nation dans unmagma planétaire ».

Dessaisissement du politiqueLes traités européens, de 1992 à 2007, ont

accéléré ce dessaisissement par l’Etat du poli-tique : « La construction européenne s’élevacomme un mur entre une représentation sanspouvoir (les gouvernements des Etats) et unpouvoir sans représentation (les technocrates,les juges et les lobbies à Bruxelles). » Cettedésappropriation, Zemmour la traque dans lesmots : « gouvernance », empruntée au voca-bulaire des entreprises, est préférée à « gouver-nement », « responsabilités » à « pouvoir ». Ilillustre son propos par les priorités de Chiracen 2002 : « la lutte contre le cancer, l’insécuri-té routière et l’insertion des handicapés : desobjectifs dignes d’un président de Conseilgénéral ». Les vrais gouvernants ne sont plusles chefs d’Etat : « Le commissaire, le juge et lebanquier revêtirent la pourpre des cardi-naux. »

Zemmour, amoureux de la France qu’il areçue comme un don plus que comme unhéritage – il est juif berbère – constate qu’ellen’est plus maîtresse d’elle-même. La libertétotale, à l’intérieur de l’Union européenne,des mouvements de capitaux, de marchan-dises et d’hommes, signe l’effacement de laFrance : « Américanisation et libéralisationsont les deux mamelles du monde qui s’an-nonce. L’Europe en est le cheval de Troie. »

Chaque étape de la « construction euro-péenne » entraîne la suivante, en un engrena-ge infernal : du marché commun au marchéunique à la monnaie unique aux règles budgé-taire communes.

Mais, remarque Zemmour, les idéologuescatholiques libre-échangistes, avec à leur têteJacques Delors, qui avaient « rêvé d’un mondedébarrassé du politique », « porteur de paix etde justice », n’imaginaient pas que le libéralis-me économique pouvait être associé à latyrannie politique. Or, l’exemple de la Chinecommuniste illustre « cette alliance inédite…d’une efficacité redoutable, à la grande joiedes multinationales occidentales qui exploi-tent sans vergogne les millions d’esclaves mis àleur disposition ».

De la haine de soi à l’islamisation

Du libéralisme qui implique dessaisisse-ment de l’Etat découle, selon Zemmour, laféminisation de la société, l’islamisation, l’as-sistanat. Mais alors que la Grande-Bretagne etl’Allemagne avaient compensé les effets nocifsdu libéralisme par un nationalisme sans hon-te, « la France est le seul pays au monde àcumuler des systèmes sociaux aux philoso-phies différentes : assurance sociale bismarc-kienne, étatisme beveridgien, assistanat libé-ral. Les couches s’accumulent épaisses,étouffantes, financées à coup d’endettementpublic ».A quoi s’ajoute l’autoflagellation française.

Zemmour cite Christopher Soames, ancienvice-président britannique de la Commissioneuropéenne : « Dans une organisation interna-tionale il faut toujours mettre un Français, carils sont les seuls à ne pas défendre les intérêtsde leur pays. » D’où le choix de Moscovici ?La France affaiblie, non gouvernée, ingou-

vernable, à laquelle « nos dirigeants devenusdes prêtres » ont promis l’Europe « comme unGraal qui se gagne par d’innombrables sacri-

fices », devient terre d’élection pour un islamqui colonise son ancien colonisateur, au pointque Zemmour évoque « la naissance balbu-tiante mais vigoureuse et redoutable d’un Darel-islam français » ; avalisant la thèse du GrandRemplacement et la substitution d’une histoi-re à une autre : « Pour intégrer l’islam, il fau-drait que la France renonce à mille ans d’his-toire. »

D’autres horizonsDe ce livre riche, trop riche, on peut faire

plusieurs lectures. Lecture historique : Zem-mour compare Gorbatchev à Louis XVI, Chi-rac à Louis XVIII, fait de Sarkozy et de Hol-lande respectivement un Bonaparte decarnaval et un Mitterrand de carnaval. Dansl’Europe allemande, il voit la naissance d’un« Saint Empire américano-germanique », etl’on peut déplorer qu’il identifie la réunifica-tion allemande – et donc la chute du mur – àune « catastrophe géopolitique » parce qu’ellerenforce l’Allemagne au détriment d’uneFrance qui seule lui importe. Pour lui, la poli-tique est indépendante de la morale, et celaaussi explique son gaullisme.

Plus réjouissante est sa galerie de portraitsau vitriol : Louis Schweitzer ou « la nouvelletrahison des clercs », BHL ou « L’idéologiepour les nuls », José Bové ou « la trahisond’Astérix », les « bobos prédateurs aux parolesde miel ».

Cette allégresse de plume pimente un bilanaccablant ; elle est aussi révélatrice d’une pen-sée qui n’est pas désespérée. Zemmour évoqueles révoltes populaires, les ovations pour lesfilms qui rappellent la défunte France d’hier –enracinée pour Bienvenue chez les Chtis, assi-milatrice dans Qu’est-ce qu’on a fait au BonDieu ?

Le mariage a été transformé en « contrat àdurée déterminée indexée sur les sentiments »préparant sa parodie, le « mariagehomosexuel », qui est « l’ambition non de sin-ger le réel, mais de le contester, de le nier, dese substituer à lui ». L’art contemporain estl’héritier de Malevitch : « ce que je veux, c’estla négation de ce qui nous précède », queZemmour interprète comme un « nihilismeéradicateur » qui traduit « un refus d’hériter »et un « ultime moyen de salir et saccager toutetrace du passé ».

Mais les manifestations des rues, les boude-ries du public, ses engouements intempestifs,ses suffrages politiquement incorrects tradui-sent, dans le peuple français, la volonté d’unretour au réel, d’une réappropriation de sonhistoire et le rejet des « élites » qui prétendentconfisquer la parole du peuple et lui dicterconduite et pensée. Zemmour s’assume réac-tionnaire et populiste. Tout se passe commes’il voulait convertir des rébellions inorga-niques en mouvement cohérent d’une Francequi s’aime à nouveau. Car son livre évoquemoins un suicide qu’un « meurtre déguisé ensuicide ».

C’est le livre-programme d’un homme quireconnaît faire « de la politique gramscienneen menant un combat d’idées dans le cadred’une lutte pour l’hégémonie intellectuelle ».

A d’autres de s’en inspirer, sans doute est-cele souhait de Zemmour, qui sait, commeMaurras, qu’« en politique le désespoir est unesottise absolue ».

DANIÈLE [email protected]

Une étude magistrale

sur l’effacement du politique

Éric Zemmour.

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6 — PRÉSENT Samedi 6 décembre 2014 www.present.fr

Qui suis-je ?

MARCEL AYMÉ

SELON ROGER NIMIER,Gaston Gallimard mettaitMarcel Aymé et Jacques Per-

ret au-dessus de tous les autresécrivains, parce que ces deux-là lefaisaient rire. Il n’est pas impos-sible que Nimier ait tout simple-ment inventé ces propos de l’édi-teur. Une chose est sûre : Nimier,lui, appréciait énormément cesdeux écrivains. Et à très justetitre.Depuis une trentaine d’années,

un professeur de lettres, MichelLécureur, s’intéresse, lui aussi, àMarcel Aymé. Il vient de luiconsacrer une biographie dans lacollection « Qui suis-je ? » dechez Pardès. Ce n’est d’ailleurspas son premier ouvrage sur lesujet, car on doit déjà à Lécureurun essai sur La Comédie humainede Marcel Aymé (1985) et unepremière biographie, plus consis-tante, parue en 1997. A qui pos-sède ces deux livres et l’essai de

Pol Vandromme (qui sont des« basics »), le nouvel opus deMichel Lécureur ne peut évidem-ment rien apprendre de nouveau.Néanmoins, le mérite des « Qui

suis-je ? » est ailleurs, vous lesavez. Robert Le Blanc l’a rappelédans Présent du 15 novembre2014 : il est très pratique, pourtout amateur de littérature, deposséder ces « Qui suis-je ? », carils synthétisent la vie de l’auteuren une centaine de pages. Ils pos-sèdent en outre de précieusesannexes : une chronologie, desjugements d’époque ou d’aujour-d’hui, une bibliographie en prin-cipe complète et une liste, elleaussi exhaustive, de publicationsconsacrées à l’écrivain raconté.Dans le cas de Marcel Aymé, ontrouve en outre une précieuse fil-mographie, car les livres et lesnouvelles de Marcel Aymé ontdonné lieu à de nombreux films àsuccès (mais curieusement, sauf

erreur, je n’y ai pas vu La Vouivre,le film de Georges Wilson tournédans la vallée de la Creuse, en1989).

Autre mérite de cette collec-tion, relevé par Robert Le Blanc,dans ce même article déjà cité :

une iconographie de qualité. De40 à 100 photos et dessins parvolume.

Rappelons que Marcel Aymén’est pas né avec une cuillère d’ar-gent dans la bouche. Il était lecadet d’une famille de six enfants.Ses parents meurent alors qu’il esttrès jeune. Il va être ballotté entredes grands-parents, des tantes etdes amis de la famille, avec unefratrie dispersée. Ses études neseront qu’amorcées. Qui plus est,de santé très fragile, Marcel Ayméva passer de longues périodes àl’hôpital. C’est là, d’ailleurs, qu’ilécrit son premier livre, Brûlebois(1926), qui va le lancer dans lemonde littéraire. En 1933, c’estLa Jument verte et le succès, unsuccès qui ne se démentira plusjusqu’à sa mort, en 1967, à l’âgede 65 ans.

Que dire encore de MarcelAymé ? Il ne voyagea pratique-

ment pas, n’habita guère que surla butte Montmartre, même s’ilest resté fidèle à ses racines juras-siennes. Comme il est resté fidèleà ses amitiés : Céline, Arletty,Gen Paul, Nimier, Brasillach.Comme il est resté fidèle à sonrefus des honneurs.Sa bibliographie comporte dix-

sept romans, cinq essais, dontLe Confort intellectuel qui luivalut la haine de la gauche, et unevingtaine de pièces de théâtre.Un dernier mot sur le petit

livre de Michel Lécureur : le por-trait de Marcel Aymé qui figureen illustration de couverture estdû au peintre Guy Vignoht (huilesur toile, 1990). Vignoht était untalentueux ami de Présent.

FRANCIS [email protected]

Aymé, coll. « Qui suis-je ? », Ed.Pardès, 124 p., 2014.

— « Un chant d’amour et deréalité qui apprend à aimer leschoses et les êtres pour ce qu’ilssont. » Ces mots de Marcel Ayméconcernent l’œuvre de Monther-lant. En quoi sont-ils tout aussijustes pour sa propre oeuvre ?— Cette définition s’applique

parfaitement à l’œuvre de MarcelAymé, car on y devine un auteurqui regarde et présente sans cesseles choses et les hommes avec bien-veillance, indulgence et amour.L’être le plus abject ne l’est jamaistotalement car Marcel Aymé aimel’humanité. Ainsi le notaire duMoulin de la Sourdine n’est pas sansdégager une certaine sympathie, demême que Dermuche, cette bruteépaisse (Le Vin de Paris), assassind’un couple de retraités qui, parailleurs, est sensible aux notesd’une boîte à musique.— Qu’il traverse des périodes de

grande popularité ou de réelle soli-tude, Marcel Aymé semble inva-riable : discret, le cuir épais, géné-ralement bienveillant. Quel était lefond de son caractère ?— Il ne faut pas se méprendre.

Si Aymé souriait volontiers descompliments qu’on lui adressaitpendant ses périodes de grandepopularité il souffrait, en revanche,des attaques dont il était l’objet.Cherchant sans cesse à être enaccord avec sa conscience, il ressen-tait d’autant plus vivement les cri-tiques, car elles lui semblaientinjustifiées. Il va de soi qu’il n’esti-mait pas avoir raison en touteschoses, mais il ne comprenait paspourquoi on lui refusait la libertéde penser autrement.

— Vous écrivez, page 45 : « Onne pardonnera jamais à cet écri-vain de se vouloir inclassable. Il ena pâti jusqu’à sa mort et en souffreencore aujourd’hui. » Pouvez-vousdévelopper cette idée ?

— Il est bien connu qu’au paysde Descartes, on aime avant toutpouvoir classer les gens en catégo-ries bien définies et ceux, commeAymé, qui s’y dérobent, ne sontguère appréciés. Ils dérangent et,pour avoir à cacher sa difficulté àles présenter, on préfère les oublier.Marcel Aymé appartient à ces gensqui analysent chaque situationavant de la juger et cherche ensuiteà définir leur attitude en leur âmeet conscience, sans répéter bête-ment le credo d’une clique ou

d’une autre. Il s’ensuit qu’il ne peutêtre réclamé par personne, exceptéceux qui traversent l’existence à samanière. Ils sont tellement gênantspour les analyses intellectuellesqu’on les rassemble dans une caté-gorie dite des « anarchistes de droi-te », mais cette étiquette ne veutrien dire. On ferait mieux de parlerd’esprits libertaires.

— Aymé aura réussi à se faireattaquer à gauche pour son pacifis-me et sa défense fidèle de certainsauteurs maudits (Brasillach, Bar-dèche, Céline), à droite pour les

gauloiseries dont il ponctuera sonœuvre puis, plus tard, pour sonanti-américanisme. Belle prouesse !— Effectivement, ni la gauche ni

la droite ne peuvent réclamer Mar-cel Aymé. Même après avoir étéfidèle à Brasillach et à Bardèche,lors de leurs procès, et avoir ainsirejoint les rangs de la droite, il s’enest distingué en affirmant sesconvictions en faveur d’une Algériealgérienne et non pas française.Quant à la gauche, elle a été déçuede voir un collaborateur commeMaxime Loin, dans Uranus, pré-senté sous un jour un peu sympa-thique, alors que certains militantscommunistes y étaient dépeintscomme étroits et bornés.

— Vous faites un sort à l’imaged’écrivain collaborateur qui lui aété collée par les autorités « épura-trices » de l’après-guerre. Le moinsque l’on puisse dire est que lescharges étaient minces…— Il est exact que les lecteurs et

analystes de bonne foi qui étudientattentivement les écrits et attitudesde Marcel Aymé pendant l’Occu-pation ne trouvent aucune critiqueà lui adresser, si ce n’est d’avoirlaissé sa signature paraître dans lesjournaux de la Collaboration. Offi-ciellement d’ailleurs, il n’a pas étéinscrit sur les listes noires d’écri-vains mis à l’index après-guerre. Ila seulement été l’objet d’un blâmesans affichage, pour avoir venduun scénario, médiocre d’ailleurs, àla Continental Films, entreprise àcapitaux allemands. Notons aussiqu’il a reçu plusieurs petits cer-cueils par la poste, ce qui signifiebien qu’il était coupable dans cer-tains esprits et que, du moins pourceux-ci, les charges contre luin’étaient pas si minces.

— Si Aymé fut un auteur lu etmême très populaire, il est encoresouvent présenté par une certaine

intelligentsia comme un auteur de« second rang ». Cela ne tient-ilpas à la grande sobriété de son sty-le, qui cherchait le mot juste et nonla phrase verbeuse ?— C’est possible. Mais sa phra-

se, dans sa grande sobriété, est tou-jours un enchantement, alors quebeaucoup de proses qui se veulentsimples sont insipides. En fait, jecrois surtout que Marcel Aymé estconsidéré comme secondaire parcertains car ils n’y trouvent pasmatière à études complexes, desti-nées à briller devant des auditeurs,des téléspectateurs ou des lecteurs.Or le style, le témoignage social ethistorique, ainsi que l’observationhumaine, sont pourtant desdomaines d’une exceptionnellerichesse dans l’œuvre de MarcelAymé. Mais évidemment quand,en pleine guerre, un auteur faitdire au dernier d’une file d’attentedevant une épicerie : « Moi, dit leJuif, je suis juif. », il n’y a rien àajouter.— N’est-il pas, en cela, frappé

du même châtiment que Giono ?Quels rapprochements peut-on éta-blir entre les deux hommes et entreleurs œuvres ?— Je ne connais pas dans le

détail la vie et l’œuvre de Gionopour établir un parallèle précisentre ces deux auteurs. Mais, apriori, il me semble que le pacifis-me de Giono était plus fort quecelui de Marcel Aymé, ce qui l’apoussé à des prises de positioninadmissibles pour beaucoup. Mar-cel Aymé, lui, frère d’un généralqu’il admirait, n’a pas refusé de fai-re son service militaire et, s’iln’avait pas été réformé en 1939, il

aurait, j’en suis sûr, « fait sondevoir », comme on dit.— Nous serions également tentés

de le rapprocher de Blondin. N’ont-ils pas tous deux mêlé romans,théâtre et journalisme ? N’ont-ilspas tous deux plongé leur plumedans une encre politique, comme àregret, mais avec beaucoup detalent et de sens polémique ?— Antoine Blondin vouait une

grande admiration à Aymé, sonaîné. Tous deux avaient le don del’écriture et une grande liberté depenser. Mais Marcel Aymé étaitavant tout un grand classique quitravaillait sans relâche, alors queBlondin s’est laissé aller très vite àla facilité et à la destruction parl’alcool. A ce propos, savez-vousque Marcel Aymé passait régler lesardoises de Blondin, mais pas dansleur totalité, pour que l’intéresséne s’en aperçoive pas ? Quelle élé-gance !— Finalement, quels voisins lit-

téraires choisiriez-vous pour Aymé ?— Rabelais, Montaigne, Molière,

La Bruyère, Voltaire, Nimier, Vialat-te, Jacques Perret, Alphonse Bou-dard, Didier Van Cauwelaert.— Par quelle porte doit-on péné-

trer dans son œuvre ? Quels trésorscachés doivent être explorés ?— Les œuvres les moins

connues : Le Trou de la serrure,La Fabrique, Le Nain, Derrière chezMartin, Maison basse, Brûlebois,Le Moulin de la Sourdine.

Propos recueillis par Pierre Saint-Servant

[email protected]

Entretien avec Michel Lécureur

Lire et relire Marcel Aymé

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LA GRANDE NAGEUSE. Ro-man limpide, fluide. Normala priori pour un récit qui se

place sous l’égide de l’Océan. Oli-vier Frébourg est membre des Ecri-vains de Marine depuis 2004(groupe littéraire fondé par Jean-François Deniau). Lui-même navi-gateur émérite. Son premier livreparut en 1989 : Roger Nimier, trafi-quant d’insolence. Suivra un premierroman qui aura gardé toute sa fraî-cheur Maison basse. On y retrouvedéjà la complexité des rapportshomme-femme. Le passage à l’âgeadulte. La difficulté de s’engager.Les mensonges à soi, aux autres. Lespleen. La gravité, la joie, la tempêtese rencontrent en mer mais aussidans un verre. A l’instar d’Unhomme à la mer, fragments de vieroulés comme des galets par la meret l’alcool, où l’auteur se grime enpersonnage baudelairien allongé surle môle de la vie. Quiberon y pointedéjà le bout de son nez. La Bretagnesera le paysage de ses dix-huit ans.La plage de Port-Haliguen. La baieavec ses deux bras est une mère pro-tectrice. Mais un jour il faudra biens’éloigner, s’enfoncer dans les défer-lantes. Les cours de voile, la barrequ’il fallait passer pour accéder à laliberté et à la vie d’homme, seulmaître après Dieu. Unique vérité, lamer ; s’y abandonner.Mais que se cache-t-il sous l’eau ?

Dans les abîmes ? De grands si-lences où le temps n’a pas de prise.L’homme pas davantage. La merc’est le dénuement, alors lorsque lenarrateur épouse une naïade…mais ici l’amour n’est qu’un pré-texte. Si ce n’est la femme qui tou-jours nous échappe, passager clan-destin. Attirée par le beau, indiffé-rente au réel, au quotidien, à l’ac-tion.Non, passées les brumes des pre-

miers paragraphes se dégage unepresqu’île objet de toutes les atten-tions de l’auteur. Quiberon, ce nezdans la mer à la douceur d’uneconque, est le véritable pivot du ro-man. Découverte des sens entreciel et mer. Qu’est-ce que la vie ?

Enfermement dans la peinture oupar apnée. Chacun puise au fondde lui sa résurrection et ses dou-leurs, insatisfactions, démissions.Univers onirique, pudique. Letemps n’y a pas de prise. Histoireuniverselle de deux êtres. Unhomme, une femme. Ils s’apprivoi-sent au sein d’une côte sauvageavec ses genêts, ses bruyères, ses ro-chers aux formes humaines.L’ombre d’Huguenin aussi, certai-nement. Joie, insouciance. Croient

se lier l’une à l’autre. Mais restenten surface. La mer comme fron-tière de leurs deux mondes désor-mais dissociés. Le roman seconstruit par vagues successives.Lente séparation, silences. Mélan-colie. Sauvagerie maritime. « La littérature, ce feu, cette pour-

suite d’un absolu jamais satisfait, cerefus du monde tel qu’il est. » L’au-teur en a été récompensé par leprix Freustié 2014 (Jean Freustiéaurait eu cent ans cette année. Acette occasion, les éditions LaTable ronde rééditent Isabelle ouL’arrière saison).

Patrick Wagner� Olivier Frébourg, La Grande Na-geuse, Editions Mercure de France,154 pages, 15,50 euros.

Samedi 6 décembre 2014 PRÉSENT — 7

� Pièce de Michel Pascal, avec JustineThibaudat et Marie Lussignol en alter-nance. Benoît Saint Hilaire présentecette pièce en accord avec Niwis Produc-tion.La comédienne a investi son texte

avec ferveur, enthousiasme et jubila-tion. Elle dynamise la deuxième pièceque cet auteur a écrite concernantcette jeune fille dont il est éperdumentamoureux. Et il n’est pas le seul. Trèsvite après sa mort, elle a suscité un en-gouement extraordinaire qui n’a pascessé depuis. Rapidement canoniséepar une Eglise aux normes alors trèsexigeantes, son culte ne se dément pas

suscitant dévotions, grâces et miracles.Parmi ces derniers, certains officielle-ment reconnus, d’autres, beaucoupplus nombreux, restant ignorés.Née mademoiselle Martin dans une

famille atypique qu’aujourd’hui onpourrait qualifier de « caste » tant sesmembres vivaient dans une certainesymbiose à la fois assez éloignée dumonde réel, et pourtant très présente àce que l’on pourrait appeler « le siècle ».Entre ciel et terre pourrait-on dire.

Une spiritualitéSourire d’enfant aux lèvres, l’air mu-

tin et ravi, selon les photos dites « offi-cielles » prises de face comme àl’époque, Michel Pascal la voit plutôt« de biais », sous un angle singulier quirévèle d’autres perspectives. Il est sen-sible à son pas de nonne aux sandalesdouces mais résistantes, à ses cheveuxde gamine peut-être légèrement bou-clés comme ceux de ses sœurs, elles-mêmes toutes nonnes, bien sûr. Ad’autres détails aussi, petits mais révé-lateurs qui, habilement utilisés et bien

mis en valeur dans la pièce, campentau final un personnage assez différentde l’imagerie habituelle.

La fascination qu’a suscitée Thérèseau siècle dernier et qu’elle suscite tou-jours est surprenante et révélatriceaussi de l’évolution du culte dont ellefait l’objet. L’aspect dévotionnel et po-pulaire de celui-ci s’estompe aujour-d’hui quelque peu (disons peut-êtreplus justement qu’il évolue) au béné-fice d’une spiritualité paradoxalementplus concrète, d’une théologie toute àla dimension de la Sainte : d’une mer-

veilleuse simplicité, d’une humilitéconfondante et d’une fermeté éton-nante. Ce que fait bien sentir la pièce.

Une petite sœur Thérèse aux anti-podes de celle que l’on nous donne àvoir dans presque toutes nos églises en-tourée d’une multitude de cierges : sta-tue immense et corps raide, au visagede poupée Barbie, d’un goût discu-table. Espiègle comme elle l’était, elledoit en pouffer de rire là-haut, elle quin’aura peut-être jamais eu le temps depratiquer la dérision de l’adulte qu’ellesavait ne jamais devenir.

Mais pourquoi l’universelle ? Toutsimplement parce que la petite saintepeut à tout moment être rencontréepar quiconque, même si parfois on laprend pour ce qu’elle n’est pas.

CLAUDE D’[email protected]

� Eglise Notre Dame des Champs : 27,rue du Montparnasse, Paris VIe.Infos et réservations : www.thereseluni-

verselle.net et au 07 82 92 18 82. Lundi etmardi à 17 h et 20 h 30, mercredi à 20 h30, jeudi, vendredi à 14 h 30 et 20 h 30,samedi à 20 h 30, dimanche à 16 h 30.

La chronique théâtrale

Thérèse l’universelle

La chronique de Livr’arbitres

Olivier Frébourg ou les silences de la mer

Saint Pompon, le 6 décembreMa Sardine,Tu ne m’as pas répondu la semai-

ne dernière, ou ta lettre s’est per-due. Que penses-tu de cet ex-champion de tennis, qui s’étaitlancé dans la chanson, et qui,voyant que les ventes dégringolent,et que les salles de concert sontvides, est allé dézinguer le capitainede l’équipe de France de tennis,suggérant que tout irait mieux s’ilpouvait prendre sa place ? C’est élé-gant n’est-ce pas ?Ah l’élégance, c’est tout un art.

Regarde comme notre ex-prési-dent, réélu à la tête de son parti,raccompagne gentiment, sous l’œildes caméras, ceux qui viennent levoir ? Pense-t-il que ça doit en ficheplein la vue au bonhomme Hollan-de, qui l’avait lâché sur le pas de laporte de l’Elysée ?Bien sûr, s’il n’y avait pas l’élé-

gance, on pourrait entendre lecommentateur : Oui, j’aperçois

Nicolas Sarkozy qui tord le kiki deson ancien Premier ministre, tout enlui assénant des coups de genoux dansles choses, etc. … Ça serait beau-coup plus amusant, plus franc –mais ça ne serait pas élégant.

Notre Pape aussi pense trop, mesemble-t-il, aux caméras. Pendantque des chrétiens se font égorger,crucifier, brûler vifs, lui va dansune mosquée prier en direction dela Mecque. C’est qu’il pense trop àl’image qu’il va donner. Il me rap-pelle ce sketch d’un film italien, oùl’on voit un homme, chez le coif-feur, se faire manucurer. Il est raséde frais. Ses cheveux ondulent avecclasse. Il est très attentif, et donnedes conseils au personnel. Sur leplan suivant, on voit son visage,au-dessus d’un livre qu’il tientd’une main délicatement posée,bien en évidence. Il vérifie sa coif-fure et commence : En ce troisièmedimanche après la Pentecôte… C’estle prêtre qui passe à la télé pour le

Jour du Seigneur local. Vanitasvanitatum…Pour rester dans l’élégance, mais

dans un tout autre domaine, je suisallée l’autre jour à la Superette, cel-le qui est tenue par les Guidon –monsieur Guidon a une superbemoustache, sa femme aussi. Et là, que vois-je ? Un de ces

rouleaux, indispensables, la dou-ceur là où on en a le plus besoin, tuvois ce que je veux dire ? Et j’envois un, appelé « Fraîcheur duMatin »… Je suppose qu’ils ont dûse donner bien du mal. Fraîcheurdu Matin… en lisant ça, ne penses-tu pas : Vivement demain matin !Comme la nuit va être longue,n’est-ce pas ? Je pense qu’ils n’en resteront pas

là, pourquoi se contenter dumatin ? Je propose « Douceur duSoir », « Matin d’automne », et,plus viril, « Bûcheron fougueux »,ou « Lancier du Bengale ».Plus de place, je t’embrasse !

La geste de Surcouf a pas-sionné Jean de La Varende.Cela est perceptible dans lesnombreux textes qu’il a consa-crés au corsaire malouin. Onrêve du livre qu’il aurait écritsur ce personnage extraordinai-re… A dé faut, on trouve lestextes en questions enfin réunisen volume par Patrick Delon,de l’association « Présence de LaVarende ».Qu’il soit en course dans

l’océan Indien ou qu’il vive enbourgeois à Saint-Malo, Surcoufest un personnage de l’ancientemps, magnanime et téméraire,rusé et franc, que la Fortune favo-risa plus que d’autres parce qu’ilétait, plus qu’un autre, audacieux.« C’est l’archétype du marin fran-çais, écrit La Varende : non pas dugénéral, du stratège, mais bien du

matelot, de l’homme de merspécifiquement de chez nous,dans sa verve, sa témérité, sagaieté, et aussi sa générosité. Dèsqu’il dépose ses armes, cebatailleur redevient intelligent etsensible. “Légèreté française”,disent nos ennemis… Peut-être,mais sans doute, plus sûrement,terme de cette éducation aristo-cratique dont tous faisaientpreuve, du haut en bas de lasociété, et qui répudie la hainecomme la plus grave des inélé-gances. » Un livre qui sent lamer et la poudre !

Guy Denaere� Jean de La Varende, Surcouf.Préface de l’amiral de La Motte.Avant-propos de Patrick Delon.Illustrations de Daniel Lordey. ViaRomana, 112 pages, 15 euros.

Tous les samedis, la Boîte à SardineUne dame entre deux âges, « Tantine », correspond avec sa nièce, « Sardine ». Elle demeure à Saint-

Pompon, en Dordogne, et sa nièce à Goupillières, dans les Yvelines. Elles échangent des lettres (Tantinen’est pas connectée), qui se retrouvent à leur insu dans nos colonnes et dont le contenu n’engage qu’elles. Tous les quinze jours dans Présent, la chronique de Livr’Arbitres,

revue littéraire apériodique. www.livr-arbitres.com

La Varende et Surcouf

LES CARNETS RENÉ BENJAMINNotre ami Xavier Soleil, spécialiste de René Benjamin, nous informe de la suspension de la parution des Cahiers René Ben-

jamin. Ils sont relayés par les Carnets René Benjamin, diffusés sur internet en libre accès à l’adresse suivante :— xaviersoleil.free.fr/carnets-rene-benjamin.htmlQuatre numéros sont déjà en ligne :— Carnet n° 1 (juin 2014) : René Benjamin et Claude-Henri Grignon— Carnet n° 2 (août 2014) : Table des noms cités dans les Carnets de Guerre ou « Les Cercles de l’Enfer »— Carnet n°3 (octobre 2014) : Trois conférences de René Benjamin— Carnet n°4 (décembre 2014) : L’année Benjamin suivi de René Benjamin politique, par Xavier Soleil.

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8 — PRÉSENT Samedi 6 décembre 2014 www.present.fr

L’âme de l’EuropeLors de son discours devant le Parlement européen le pape François voit l’avenir de l’Eu-

rope dans la « redécouverte du lien vital et inséparable » entre les institutions européenneset l’Eglise catholique, tout en préservant le principe de la laïcité des Etats. Pour sortir l’Eu-rope de la crise, il propose une reconnaissance de la transcendance et un recours aux valeursreligieuses. Y aurait-il derrière ce discours une conception saine et légitime de la laïcitéopposée au laïcisme moderne ? Si le chrétien est l’âme de l’Europe, n’est-ce pas un clind’œil à saint Thomas qui analyse les relations de l’Eglise et de l’Etat comme ceux de l’âmeet du corps ? Le Pape explique de manière plus précise dans son second discours l’apport duchristianisme « dans le cadre d’une relation correcte entre religion et société ». Il s’agit selonlui d’introduire des « rencontres sur la dimension religieuse du dialogue interculturel ».L’Eglise doit éclairer et soutenir l’Europe sur le dialogue interreligieux qu’elle a développéces dernières années. Or une saine et légitime conception de la laïcité ne semble pas compatible avec ce dia-

logue. Si le christianisme doit être l’âme d’une institution temporelle c’est dans un toutautre sens. Il ne s’agit pas seulement de reconnaître une transcendance des valeurs reli-gieuses et de favoriser le dialogue interreligieux. L’Eglise doit apporter à la société le Christ :Voie, Vérité et Vie. Les rapports intérieurs et vitaux des hommes en société ont « leur prin-cipe et leur origine, affirme Pie XII, dans la personne de Jésus-Christ (…) car le Fils deDieu, en se faisant homme et vrai homme, contracta de ce fait un nouveau rapport vitalavec le corps social de l’humanité ». L’optique du pape François est bien différente et c’estpour cette raison qu’il n’emploie jamais le nom de Jésus et qu’il ne parle pas de racines chré-tiennes, mais de racines religieuses. Car, selon lui, toute religion dès lors qu’elle reconnaîtune transcendance peut apporter quelque chose à la société. L’âme européenne semble assezfade, pourra-t-elle donner vie au corps de l’Europe ? Seule la vérité fait vivre. Non pas unevérité qui fait appel à la conscience, mais celle apportée par le Verbe incarné comme l’en-seigne l’Eglise depuis 2000 ans.

VÉRONIQUE LAFARGUE

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— Le mois dernier, un scandale a encoreéclaté à Pristina : Maria Bamieh, procureurbritannique auprès de la mission européenneau Kosovo, a révélé que deux juges de cetteinstance avait été achetés par les réseaux del’ancienne organisation terroriste UCK pourétouffer des affaires de meurtres. Votre livre,qui foisonne d’exemples de ce genre, est doncmalheureusement parfaitement d’actualité ?— Le Kosovo n’est pas bâti sur du roc et

encore moins du sable, mais sur de lapoudre. L’UE et les Etats-Unis se sontappuyés sur les terroristes de l’UCK pourcréer ce nouvel « Etat », et les membres del’UCK sont à tous les postes stratégiques enrelation quotidienne avec Washington etBruxelles. Les affaires de crime organisé foi-sonnent au Kosovo mais maintenant, noussavons qu’en matière de corruption le Koso-vo n’a pas de leçons à recevoir de l’UE.— La longue partie historique de votre

livre, passionnante et nécessaire pour com-prendre l’histoire actuelle de la Serbie etdonc du Kosovo, montre bien que les Serbesont souffert, au cours des siècles, des appétitsde l’empire turc puis de la domination otto-

mane, ceci parce qu’ils ont toujours refusé derenier leur foi chrétienne. Les Albanais enrevanche, convertis en masse à l’islam aucours du XVIIe siècle, ont déjà été installésen nombre par les Ottomans en Serbie. L’his-toire se répète donc ?— L’histoire, hélas ! se poursuit car, après

cinq siècles d’occupation ottomane, lesSerbes du Kosovo ont subi l’occupation fas-ciste, nazie puis le communisme et aujour-d’hui les armées de l’OTAN. Chacun de cesoccupants a toujours fait les yeux doux auxAlbanais contre les Serbes chrétiens qui, eux,ont la légitimité historique sur cette terre,mais ont toujours refusé de faire allégeance àune puissance étrangère.— Vous montrez bien, preuves à l’appui,

l’ambiguïté de la position des Etats-Unis, àqui d’une part un allié musulman peut êtreutile en Europe et pour qui, d’autre part, lesrichesses minières du Kosovo sont tentantes.Vous citez à l’occasion le nom de l’opérationqu’ils ont menée en Serbie en 1999 : « Angemiséricordieux ». Inconscience ou cynisme ?— Les Etats-Unis sont la plus puissante

nation militaire du monde avec plus de900 bases dans 150 pays. Leur budget mili-taire est supérieur à lui tout seul à celui desdix plus gros budgets militaires du mondejuste après le leur ! Il n’est plus possibled’évoquer une quelconque ambiguïté améri-caine. Les Etats-Unis suivent leur seul intérêtéconomique et géopolitique, Hollywood etles médias s’occupant de nous faire croireque ce sont des alliés et qu’ils sont là pournous aimer. Ils ont osé appeler leur opérationde bombardement de la Yougoslavie « AngeMiséricordieux » alors que plus de 2 000personnes, dont 500 civils, ont été tuées etce au détriment de la charte de l’ONU, desconventions d’Helsinki, de Genève ou deVienne. Les Etats-Unis et l’UE ont inventél’Etat fantoche du Kosovo. Cherchez dans leslivres d’histoire une quelconque référence àun peuple kosovar ou à une nation kosovare,vous n’en trouverez jamais. C’est une inven-tion américaine du Dr Frankenstein qui vatrès mal se terminer.— L’OTAN a choisi de soutenir les Alba-

nais au Kosovo. Vous citez un de ses buts :« Chercher à créer un Etat ethniquementpur. » Pourquoi ne pas avoir choisi les Serbesqui sont, eux, dans leur pays au Kosovo ?

— Parce qu’à l’époque, les Etats-Unisavaient tout fait pour démembrer la Yougo-slavie, qui restait un grand pays indépen-dant. Par la guerre, ils ont déstabilisé les Bal-kans, suscité l’ultra-nationalisme et détruit laYougoslavie. En contrepartie, ils ont inféodéplusieurs petits Etats comme la Croatie oul’Albanie. Ils ont également élargi les rangsde l’OTAN et poursuivi leur drang nach ostenvers la Russie. Ils ont voulu chasser touteinfluence russe dans la région et interdire àMoscou tout accès aux mers chaudes. C’estla théorie du containment, et l’encerclementde la Russie par les bases américaines et cellesde l’OTAN se poursuit. Pour les Etats-Unis,la Serbie est un allié des Russes, c’est doncelle l’ennemi à abattre.— Votre livre vaut presque un thriller,

mais il ne fait que dire la dure réalité : puri-fication ethnique, tentative de réécriture del’histoire, trafic d’organes humains, églises et

monastères chrétiens détruits tandis que lesmosquées se construisent… Mais le plusinquiétant est encore la situation démogra-phique du pays : récession chez les Serbes,explosion chez les Albanais. Tout n’est-il pasdit désormais ?— La natalité est l’arme la plus puissante

qu’un peuple puisse avoir. Malheureusementles Serbes, comme tous les peuples euro-péens, connaissent une nuit de la natalité quipeut se révéler suicidaire s’ils ne donnent pasnaissance à plus d’enfants très rapidement.Le taux des Albanais s’est approché de celuides Serbes mais au XXe siècle, il était beau-coup plus élevé, ce qui explique que les Alba-nais sont aujourd’hui un peuple plus jeune,plus dynamique, et ils en sont conscients. AuKosovo, aujourd’hui, il y a de plus en plus defamilles nombreuses serbes, il faut que cette

tendance se poursuive et qu’elle soit imitéepar le reste de la Serbie. On ne peut gagnerde combat sans combattants.

— Dans les solutions que vous proposez –car fort heureusement vous gardez espoir etvous cherchez des issues possibles – vous évo-quez la conversion des Albanais au christia-nisme. Y en a-t-il réellement, de façon signi-ficative ?— On ne peut vaincre sans espoir. Nous

savons que l’histoire regorge d’événementscomplètement improbables, inattendus etparfois, disons-le, tout simplement miracu-leux. Partant de là, tout est possible. Il nefaut pas parler de conversion des Albanaismais plutôt de reconversion, car ils ont étéun peuple chrétien bien avant de se conver-tir majoritairement à l’islam. Il y a encoreune très grande minorité d’Albanais enAlbanie qui sont chrétiens. Au Kosovo, les

Albanais sont presque tous musulmans,mais il y a quelques villages catholiques etdes histoires de reconversion au christianis-me ne sont pas rares. Les plus grands hérosalbanais sont les chrétiens Skanderbeg etMère Teresa. A une époque où l’islam radi-cal est en train de se répandre comme unfeu de brousse à travers les Balkans et l’Eu-rope, il est important que les chrétiensreprennent le terrain. Je suis persuadé qu’il ya chez de nombreux Albanais une volontéde renouer avec leurs racines chrétiennes.Leur reconversion ne guérirait pas toutes lesplaies du Kosovo, mais elle faciliterait le dia-logue et les espérances d’une issue pacifiqueà cette crise.

Propos recueillis par Anne Le [email protected]

De sa prison, Jean-Baptiste envoie ses dis-ciples demander au Christ : « Es-tu celui quivient ? » C’est un étrange nom dont Saint-Bap-tiste nomma Jésus. Il avait appris dans sa prisonles œuvres du Christ et il avait envoyé quelques-uns de ses disciples le lui demander précisément.Pourtant, Jean Baptiste n’avait-il pas vu le Saint-Esprit descendre comme une colombe et de-meurer sur le Christ alors qu’il baptisait à Bétha-nie au-delà du Jourdain ? N’avait-il pas dit« voici l’Agneau de Dieu, voici celui qui ôte lespéchés du monde » ?Cette question nous conduit précisément au

seuil du mystère du séjour du Christ dans sonhumanité sur notre terre. De sa prison, Jean-Baptiste conduit ses derniers disciples au Christ.Il est « l’après-dernier » des anciens de l’AncienTestament et « l’avant-premier » des chrétiens. Ilest la voix qui annonce Celui qui vient après lui,qui est au milieu de nous et dont nous ignoronsla présence, dont nous ignorons la venue. Sans doute, Jésus fut comme l’un d’entre

nous. Il allait et venait sur le sol de Palestine,passant de village en village, visitant les maisons,à la recherche des pécheurs, ses brebis égarées, àla recherche de ses amis. Lazare et ses sœurs sa-

vaient que Jésus allait venir et ils l’attendaient.Mais il venait aussi à d’autres, qui n’eussent ja-mais osé l’attendre… Matthieu, Zachée. Il ne venait pas comme un de nous parce qu’Il

est d’en haut comme Il le dit simplement à ceuxqui doutaient. Lorsque la Samaritaine retourneau village dire qui elle a rencontré, c’est lui quiest venu à elle, assis sur le bord du puits, fatiguéde la chercher. Sauver nos âmes, « c’est pour celaque je suis venu ». Par Amour éternel, il vient detoute éternité, et il suit depuis le sein du Père unsentier de lumière et de grâce vers nos cœurs.Le Christ est toujours présent. L’avènement

de Saint-Esprit est si réellement son avènementque nous ne pouvons nier qu’il est au milieu denous. Notre Sauveur est caché et sa lumière luitdans les ténèbres. Notre existence est un Avent :le Christ vient aux hommes comme personnen’est venu et l’immense détresse morale dumonde, dans les ténèbres, sans savoir qui elle at-tend, l’attend.

AB. V.B.

« Peuple de Sion, voici que le Seigneur vient pour sauver les nations »

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Nikola Mirkovic est l’auteur,aux éditions Picollec,

d’un passionnant ouvrage intitulé Le Martyre du Kosovo.

Franco-Serbe ayant subi les bombardements de l’Otan, il est activement engagé dansune organisation humanitaire

en faveur du Kosovo, Vostok (Est, en russe).

Les Serbes chrétiens chez eux au Kosovo

Photo : Nikola Mirkovic.

Un monastère détruit au Kosovo.