mieux les comprendre pour mieux les integrer
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I.U.F.M Académie de Montpellier Site de MontpellierElodie BOURGEYAnne-Laure FRAUDETTRANSCRIPT
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I.U.F.M Elodie BOURGEY Académie de Montpellier Anne-Laure FRAUDET Site de Montpellier
MIEUX LES COMPRENDRE POUR MIEUX LES INTEGRER
Etudes des différents paramètres en jeu et
apports d’outils spécifiques pour l’enseignant Tuteur : Marie-Claude LELIEVRE Assesseur : Martine DREYFUS Année : 2005-2006
Mis en forme : Bordure :Haut: (Simple, Automatique, 0,5 pt Épaisseur du trait, Parrapport au texte : 24 ptEspacement des bordures : ),Bas: (Simple, Automatique, 0,5 pt Épaisseur du trait, Parrapport au texte : 11 ptEspacement des bordures : )
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Mention et opinion motivée du jury
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Supprimé : ¶
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REMERCIEMENTS
Nous tenons à remercier
Madame Clarisse DECROIX du CASNAV de Montpellier pour ses conseils et
son soutien, notamment à travers tous les prêts bibliographiques et la documentation fournie insérée en annexe,
Monsieur Vincent LAURENCE, IMF à Montpellier pour son accueil convivial
et formateur, ainsi que ses élèves,
Madame Eliette CADENAT, membre de l’association A.V.E.C pour son accueil et les informations qu’elle a pu nous donner
sur le fonctionnement de l’association,
Madame Fatna NESSARIR pour son aide précieuse dans la traduction du turc.
Nous remercions également Madame Marie-Claude LELIEVRE, notre tutrice, pour ses aides notionnelles et méthodologiques…
… et les élèves nouvellement arrivés que nous avons rencontrés, pour leur accueil et leurs réponses.
Supprimé : s
Supprimé : .
Supprimé :
3
RESUMÉ
Le document proposé se veut être un mémoire pratique facilitant les démarches de
l’enseignant dans le cadre de l’accueil d’enfants migrants. Il ne s’identifie pas à une étude
linguistique précise, mais a pour but de proposer une vision plus large de ce qui influe sur
l’intégration de ces enfants. Ces élèves, anciennement appelés « primo arrivants », nous ont
interpellé par un fort désir d’apprendre souvent mêlé d’une grande détresse. Le besoin s’est
fait sentir pour l’une comme pour l’autre de trouver des solutions pour ceux que l’on appelle
désormais « ENA » (Enfants Nouvellement Arrivés en France).
Comment se mettre à leur place ? Comment engager la discussion avec eux ? Que leur
propose l’institution ? Quel est le rôle de l’enseignant ? Que peut-on leur proposer pour qu’ils
puissent trouver leur place dans la classe ? Le champ de la problématique étant large mais
reflétant l’essentiel des difficultés qui se posent, nous avons choisi de travailler conjointement
de manière à approfondir l’ensemble de ces interrogations.
ABSTRACT
This document is a tool for teachers to help them favour inclusion of pupils with
community languages in their classes when they will become immigrated pupils. This
dissertation is not based on a linguistic study but is meant to include a very large view of
parameters which influence the integration of these children. They were previously named
« primo arrivants ». We are moved by their desire to learn on the one hand, and their distress
on the other hand. Thus we felt the urge to find solutions for these pupils, who are nowadays
called « ENA » (Enfants Nouvellement Arrivés en France).
If we were them, how would we react ? How can we prompt the discussion ? What
does the French institution school propose ? Which role does the teacher have ? What can we
offer them to find their place in the classroom ? We consider that the issue is very large and
raises several difficulties, that is why we decided to work together.
MOTS CLÉS
Intégration, ENA, interculturel, projet de migration, outils, CRI, turc, comparons nos langues.
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SOMMAIRE
INTRODUCTION……………………………………………………………………….. 6 PREMIERE PARTIE : « LE CHOC DE L’ARRIVÉE »
1- Contexte familial : inégalités des situations………………………………......... 7 2- Contexte personnel a- Choc culturel ……………………………………………………………….…... 7
b- Un éloignement généralisé……………………………………………………... 8
3- Contexte scolaire ……………………………………………………………....... 8
4- Contexte linguistique……………………………………………………………. 9
DEUXIÈME PARTIE : LE RÔLE SPÉCIFIQUE DE L’ÉCOLE
1- Les structures d’accueil a- La scolarisation en classe ordinaire…..………………………………………... 12 b- La scolarisation en classe ordinaire et parallèlement en classe CRI…………… 12 c- Le rôle du C.A.S.N.A.V……………………………………………………….. 17
2- Démarche personnelle de l’enseignant
a- Accueil de la famille…………………………………………………………... 19 b- Prise de contact avec l’enfant………………………………………………….. 20 c- Aménagement de la classe……………………………………………………... 20 d- Réflexion pédagogique…………………………………………………….…… 21 3- Démarche de toute une équipe pédagogique………………………………….... 21
TROISIÈME PARTIE : MISE EN PLACE DE PRATIQUES PÉDAGOGIQUES
1- Pistes de réflexion a- Outils pratiques..………………………………………………………….….…... 23 b- Activités……………………………………………………………………..…... 25
2- Mise en application a- Passation des consignes…………………………………………………….…... 26 b- Réinvestissement des apprentissages du CRI…………………………………… 27 c- La place du jeu dans les apprentissages………………………………….….…. 28 d- Utilisation des acquis culturels de l’élève…………..……………….……….…. 29
CONCLUSION…………………………………………………………………….…….. 38 BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………………. 39 TABLE DES ANNEXES...........................………………………………………………. 41 ANNEXES………………………………………………………………………………… 43
Mis en forme : Police :11 pt
Mis en forme : NonSurlignage
Mis en forme : NonSurlignage
Mis en forme : Tabulations :15,56 cm,Gauche
Mis en forme : Police :10 pt,Non Surlignage
Mis en forme : NonSurlignage
Mis en forme : NonSurlignage
Mis en forme : NonSurlignage
Mis en forme : Police :NonGras, Non Surlignage
Mis en forme : NonSurlignage
Mis en forme : Police :10 pt
Mis en forme : Police :11 pt
Mis en forme : NonSurlignage
Supprimé : ¶
Supprimé : …………………. ..……………….…………
Supprimé : …………………
Supprimé :
Supprimé :
Supprimé : et la classe CRI…………………………………………….
Supprimé : .
Supprimé : .
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« Tout au long du siècle écoulé en effet, l'école a accueilli des enfants venus de
l'étranger et a joué un rôle essentiel dans la formation personnelle et l'intégration sociale de
nombre d'entre eux. […] Il faut l'affirmer nettement : si l'école a effectivement pu jouer ce
rôle et si elle peut et doit, aujourd'hui encore, continuer à l'assurer, ce n'est pas par une sorte
de réflexe mécanique mais par effet de volonté : parce que les professeurs croyaient et croient
toujours en la nécessité de cette intégration culturelle et sociale. »
Extrait du discours d’ouverture de Mr Jack Lang, ancien ministre de l’éducation nationale,
aux journées nationales d’étude et de réflexion sur la scolarisation des élèves nouvellement arrivés en
France - 29 mai 2001
Supprimé : ¶
Supprimé : ¶
Supprimé : France
Supprimé : -
6
INTRODUCTION
Lors de nos stages respectifs, notamment celui effectué en collège, nous avons constaté
qu’un nombre important d’enfants étrangers arrive chaque année en France et donc à l’école.
Il s’est posé à nous comme une évidence de rencontrer certains de ces élèves pour mieux
comprendre leurs difficultés afin de leur venir en aide dans l’apprentissage de notre langue et
plus généralement dans leur intégration scolaire et sociale.
Ce mémoire a pour ambition de montrer les difficultés de tous ordres que peuvent
rencontrer des élèves nouvellement arrivés en France, mais aussi de proposer des pistes à tout
enseignant susceptible de les accueillir dans leur classe. Notre propos est de tenter de
répondre à la question « Comment mettre en œuvre tous les paramètres pour une intégration
réussie ? »
Nous avons, dans un premier temps, tenter d’analyser les difficultés sociales, culturelles et
scolaires qui se posent à ces enfants lors de leur arrivée. Puis, nous avons essayé de nous
confronter aux problèmes que rencontrent les enseignants, à mettre en place des
apprentissages spécifiques alors que les bases de la communication ne sont pas acquises.
Enfin, notre réflexion nous a amené à dégager des pistes de travail dont certaines ont été
mises en place en classe.
Cette étude réalisée en binôme nous a permis d’élargir nos champs d’actions et donc notre
réflexion sur ce sujet aux difficultés multiples. L’observation mutuelle a été une grande
source de motivation et nous a ainsi permis de développer l’analyse critique de pratiques
pédagogiques.
Comme nous avons réalisé ce mémoire en binôme, nous préciserons, lorsque cela est
nécessaire, qui signe tel ou tel passage en y apposant nos initiales (ALF pour Anne-Laure
Fraudet et EB pour Elodie Bourgey).
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Supprimé : de façon
Supprimé : à
Supprimé : sa
Supprimé :
Supprimé : de tels élèves
Supprimé :
Supprimé :
Supprimé : qui en a découlée
Supprimé : ¶
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PREMIÈRE PARTIE : « LE CHOC DE L’ARRIVÉE »
Les composantes du projet d’immigration des familles qui arrivent de pays étrangers ont des
conséquences sur leur intégration. En effet l’origine du départ, le ressenti personnel qui en découle, la
confrontation à un nouveau système éducatif et l’éloignement de la langue du pays d’accueil sont les
premiers paramètres auxquels se confronte tout enfant arrivant sur notre sol.
1- Contexte familial : inégalités des situations
Les enfants ne sont pas tous égaux au regard des conditions famililales lors de leur arrivée
en France : certains viennent avec un réel projet familial (tous les membres de la famille sont
présents et au moins un des parents exerce une activité professionnelle sur le territoire),
d’autres sont là uniquement pour bénéficier d’un enseignement qu’ils estiment de meilleure
qualité que celui de leur pays (une partie de la famille reste souvent dans le pays d’origine).
De plus, la durée du séjour peut varier de quelques mois à l’installation définitive.
Lors de nos observations (stage collège et classe CRI), nous avons rencontré ces trois
situations différentes :
- un enfant chinois scolarisé pour un an dans le cadre d’une mutation professionnelle du père,
- une enfant marocaine venue rejoindre son père pour bénéficier d’une scolarisation française,
- deux enfants turques venues vivre en France avec toute leur famille. (ALF : j’ai eu
l’occasion de suivre en stage de pratique accompagnée l’aînée, à laquelle je ferai référence
ultérieurement.)
Ceux qui viennent en France dans le but de bénéficier d’une scolarisation française se
retrouvent souvent sous l’autorité paternelle, qui se traduit par une séparation physique de leur
mère restée au pays ; cette situation affective peut alors être très difficile à vivre.
2- Contexte personnel
a- Le choc culturel
Les cultures des pays d’origine et des pays d’accueil sont parfois très éloignées et
entraînent une perte de repères chez l’enfant.
Supprimé : ¶¶¶
Supprimé : ,
Supprimé :
Supprimé : différentes
Supprimé : :
Supprimé : profiter
Supprimé : s’installer
Supprimé :
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EB : La personne qui arrive dans un nouveau pays peut éprouver un mal être et avoir
l’impression de ne plus trouver sa place dans la société. Je me suis retrouvée dans cet état
d’esprit lors de mon stage de trois semaines au Sénégal. Le premier grand changement fut
bien évidemment la langue même si, en ce qui concerne ce pays, la langue officielle est le
français. Je reviendrai sur ce point ci-après (cf. 4 : le contexte linguistique). Une autre grande
difficulté a été de s’adapter au mode de vie sénégalais totalement différent du nôtre. Le fait de
modifier son alimentation et de vivre avec des coutumes qui vous sont encore inconnues,
marque la séparation avec son pays d’origine. Certes, il est possible de continuer à vivre
comme dans son pays mais cela rendra l’intégration plus longue et plus difficile. Un point non
négligeable en France est la laïcité de l’école et le respect des choix religieux de chacun, ce
qui n’est pas le cas au Sénégal où l’on enseigne la religion à l’école. Les libertés religieuses
sont alors compromises.
La différence physique liée à la couleur de la peau rappelle la non appartenance à la
population locale. Le regard des gens peut s’avérer déstabilisant et l’on souhaite que ces
regards cessent afin de se sentir accepté. Tous ces changements peuvent entraîner des
modifications de comportements ; pour certains cela va passer par la fuite physique ou
morale, par le repli sur soi, par la perte de moyens, et pour d’autres, par l’agressivité ou bien
encore la provocation.
On peut alors comprendre que, pour un enfant, cette situation soit encore plus dure à vivre et
nécessite un soutien de son entourage.
b- Un éloignement généralisé
Les enfants perdent non seulement leur terre d’origine mais aussi leurs amis, leur
environnement proche, leur quotidien, leur passé…
Il est plus facile pour les enfants d’accepter tous ces changements lorsqu’ils ont la
possibilité de retourner dans leur pays pendant les vacances par exemple. Ces enfants auront à
choisir à l’âge adulte entre terre d’accueil et terre d’origine.
3- Contexte scolaire
L’âge d’arrivée conditionne la vitesse d’entrée dans la langue : plus un enfant arrivera
jeune, plus vite il maîtrisera la langue française car il sera immergé dès son arrivée dans un
« bain de langage ». Supprimé : «
Supprimé : »
9
Les rythmes scolaires peuvent être très différents selon les pays d’origine : dans beaucoup
d’entre eux, l’école se termine plus tôt et laisse l’après-midi libre pour d’autres activités
(Allemagne, Turquie, Angleterre). La ponctualité n’est pas soumise aux mêmes exigences.
E.B : Au Sénégal, les élèves bénéficient d’enseignements d’éducation sanitaire et morale,
d’arabe et de religion. Un enfant qui viendrait en France ne retrouverait pas ces disciplines
dans notre enseignement et rencontrerait une organisation disciplinaire totalement différente.
Les disciplines enseignées font référence à la culture d’un pays et sont donc sources de
repères pour l’élève.
Le regard porté sur les ENA conditionne également une partie de leur réussite. Il n’est pas
toujours facile pour ces enfants de se confronter aux représentations des élèves de leur classe
qui peuvent les considérer comme des enfants « anormaux ».
L’enfant doit apprendre un nouveau métier d’élève : sa place et les interactions avec
l’enseignant et les élèves peuvent être modifiés.
4- Contexte linguistique
Il existe de nombreuses définitions d’une langue. Nous avons choisi de retenir celle
proposée par Elisabeth BAUTIER, tirée de Question de Langue : « Une langue c’est une
syntaxe et c’est surtout une façon de s’en servir qui correspond à une culture, un ensemble de
valeurs et d’habitudes sociales et cognitives ».
Il est évident que la langue est la difficulté principale pour ces enfants. Sans entrer dans
l’apprentissage de la langue de scolarisation, cela pose déjà un problème du point de vue de la
communication instantanée. Les enfants se trouvent dans l’impossibilité d’exprimer leurs
besoins, leurs douleurs, leurs sentiments... Le risque non négligeable est de voir ces enfants se
renfermer sur eux-mêmes et donc de bloquer l’intégration au sens large.
E.B : Au Sénégal, bien que la langue officielle soit le français, l’ensemble de la population
parle le Wolof, dialecte le plus répandu dans le pays. En fait, les élèves n’apprennent le
français qu’à l’âge de 6 ans, dès leur entrée à l’école élémentaire. Mon incompréhension du
dialecte national a rendu les échanges difficiles et sa connaissance aurait pu s’avérer une aide
précieuse autant d’un point de vue personnel que professionnel. On ressent vite le besoin
d’apprendre des éléments fonctionnels de communication qui ne sont pas toujours ceux que
Mis en forme : Police :Italique
Supprimé : «
Supprimé : »
Supprimé :
Supprimé :
10
l’on pense être les plus importants a priori. Cela revient à apprendre une langue étrangère,
bien qu’en étant sur place, les besoins ne soient pas les mêmes.
Au sein de la classe, ne pouvant pas traduire en Wolof ce que les élèves ne comprenaient
pas, j’ai adopté des stratégies telles que la répétition, la reformulation, le mime ou bien encore
le dessin. Je me suis retrouvé dans cette situation lors d’une séance de vocabulaire menée
dans une classe de CE1 à Dakar. L’objectif de la séance était d’enrichir leur répertoire de
mots en leur faisant découvrir deux mots nouveaux. Pour donner du sens à cet apprentissage,
j’ai souhaité partir de la lecture d’un texte dans lequel apparaissaient les mots à étudier. Au
moment de l’explication du texte, je me suis rendue compte que la majorité des élèves
n’avaient pas compris le texte proposé (bien que tiré d’un bibliobus pour des CP/CE1), et
qu’il m’allait être très difficile de leur expliquer les mots prévus. Deux raisons me semblent
expliquer cette situation : premièrement, la lecture magistrale de livres et d’albums ne
correspondent pas à des habitudes de travail et deuxièmement, le texte que je leur avais
proposé ne faisait pas référence à des éléments de leur quotidien (ex : toboggan, pompier). Je
me suis donc servie des illustrations présentes dans le texte pour expliquer ce que voulait dire
chaque mot et j’ai demandé lorsque c’était possible aux élèves qui avaient compris de le
reformuler en Wolof.
Cette mise en activité m’a alors montré à quel point le rôle de l’enseignant est
fondamental (cf. deuxième partie : le rôle de l’école). Il se doit de faciliter la compréhension
des élèves nouvellement arrivés, en usant de stratégies, afin qu’ils entrent au plus vite dans les
apprentissages.
L’entrée dans notre langue orale et écrite est plus ou moins facilitée selon le pays dont est
originaire l’enfant. Certains alphabets comme l’alphabet turc sont relativement proches du
nôtre, ce qui n’est pas le cas pour d’autres systèmes d’écriture comme le chinois et le
marocain qui présentent un codage de l’écrit totalement éloigné de celui du français (cf.
annexe 1). En effet, en ce qui concerne la langue orale, les difficultés viennent de phonèmes
qui n’existent pas dans la langue maternelle ; pour l’écrit il s’agit de se confronter au codage
grapho-phonologique qui s’avère complexe en français. Dans notre langue cette
correspondance n’est pas unique, un même son pouvant être transcrit par différentes graphies
(par exemple le son [o] peut s’écrire « o », « au », « eau ») et inversement (la graphie « ent »
peut se prononcer [ã] ou [ə]). Il faut donc prendre en compte le contexte et savoir s’il s’agit
d’un verbe, d’un adverbe ou d’un nom. L’italien est une langue pour laquelle cette difficulté
Supprimé : t
Supprimé : ,
Supprimé : ,
Supprimé : a
Supprimé :
Supprimé : .
11
n’existe pas, du fait d’une corrélation unique entre phonies et graphies. Ceci est également
vrai pour l’espagnol mais à des degrés moindres.
En conséquence, au moment de leur arrivée, les immigrés se réfugient souvent dans une
langue de survie hybride (que l’on appelle sabir) où les deux langues sont en porte à faux, ce
qui ne favorise pas l’intégration. Il semblerait préférable pour ces enfants de continuer à parler
leur langue maternelle à la maison et d’apprendre un français correct à l’école. Ainsi aucune
des langues n’est perdue au profit de l’autre et leurs structures grammaticales restent
correctes. Cependant, certaines familles considèrent que leur intégration nécessite l’abandon
total de leur langue d’origine, ceci reste un choix très personnel.
Un autre paramètre est celui de l’existence, dans le pays d’origine d’une langue de
scolarisation, différente de la langue parlée à la maison. Le jonglage entre plusieurs langues
développe des compétences facilitantes pour l’apprentissage d’une nouvelle langue.
Le français devient pour les ENA ce que l’on appelle une langue seconde : d’une part, le
français est appris par les élèves dans le contexte de la langue du pays d’accueil, pour devenir
plus tard composante d’un plurilinguisme, voire langue principale ; d’autre part, le français
est langue d’apprentissage et de scolarisation.
En conclusion, ces différents facteurs ont un impact qu’il est nécessaire de prendre en compte dans la
nouvelle vie des ENA. Si les conditions familiales et personnelles forment un soutien stable pour l’élève,
celui-ci va pouvoir concentrer son attention sur l’apprentissage de son nouveau métier d’élève.
Supprimé : degrés
Supprimé : ,
12
DEUXIÈME PARTIE : LE RÔLE DE L’ÉCOLE
L’école est un lieu déterminant pour l’intégration sociale, culturelle et à terme professionnelle des
enfants et des adolescents nouvellement arrivés en France. Les ENA sont soumis de la même manière que les
autres élèves à l’obligation scolaire quelle que soit leur situation administrative, celle-ci étant laissée à
l’observation des services compétents. Bien que l’enseignant soit directement confronté à l’ENA dans sa
classe, il s’agit d’une problématique qui concerne l’ensemble de l’équipe éducative si l’on souhaite cimenter la
réussite scolaire. Il existe différents types de structures d’accueil et de scolarisation.
1- Les structures d’accueil
a- La scolarisation en classe ordinaire
Les enfants sont constamment présents dans la classe et suivent l’enseignement prévu par
le maître. Le bain de langue est permanent, le titulaire est le seul interlocuteur de l’enfant pour
lequel il se doit d’adapter les apprentissages.
b- La scolarisation en classe ordinaire et parallèlement en classe CRI (Cour de
Rattrapage Intégré)
Les enfants peuvent prétendre à 12h hebdomadaires de suivi CRI qui viennent en
complément d’une intégration dans une classe ordinaire. Ce temps spécifique a pour but
l’apprentissage du français langue seconde et peut être diminué progressivement lorsque le
besoin s’en fait ressentir par les enseignants. Les élèves y sont accueillis pour une durée d’un
à deux ans dans certains cas car le CRI est un outil, la priorité restant l’intégration en classe
ordinaire.
La classe CRI a pour priorité de travailler des objectifs langagiers :
- maîtriser le langage et la langue française,
- se sentir chez soi dans la langue nationale,
- communiquer, maîtriser le langage de l’évocation.
Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶
Supprimé : F
13
• Fonctionnement d’après l’observation d’une classe CRI (Ecole Condorcet) :
L’accueil des enfants se réalise tous les après-midi dans une classe qui leur appartient et
qu’ils personnalisent. L’emploi du temps de la classe ordinaire demande alors à l’enseignant
une adaptation et une réflexion sur les disciplines dont l’enfant peut tirer un réel bénéfice.
L’enseignant CRI dispose de toutes ses matinées pour aider ses collègues des classes
ordinaires. Cependant ceci est rendu difficile par le dispositif qui veut que la classe CRI
regroupe les ENA de plusieurs écoles plus ou moins éloignées. En ce qui concerne la classe
CRI de l’école Condorcet que nous avons visitée, il y avait dix enfants qui venaient de huit
écoles différentes issues de la même circonscription (le nombre des écoles varie en fonction
des années) : Louis Blanc, Condorcet, Sigmund Freud, Lamartine, Jean Moulin, Périclès,
Pottier, Sibelius. La zone ainsi couverte s’étend sur environ trois à cinq kilomètres, ce qui
nécessite la mise en place de transports adaptés (parents, transports en commun…), dont la
charge financière est laissée aux parents.
Un cahier de classe CRI contenant les évaluations permet de faire le lien entre les enseignants
des deux classes, la famille et l’enfant. Il doit être signé par tous chaque quinzaine.
ALF : De ce que j’ai pu voir, l’aménagement de l’emploi du temps de la classe ordinaire n’est
pas une chose facile. Quelles disciplines peuvent être de réelles sources d’apprentissage pour
ces enfants ?
Lors d’un stage de pratique accompagnée, j’ai eu la chance de rencontrer une fillette
arrivée de Turquie à la fin de l’année scolaire précédente (mai 2005). Elle avait suivi un
cursus scolaire classique dans son pays et à la suite d’évaluations réalisées par le CASNAV
elle avait pu être affectée en CM1, niveau qui correspondait à sa classe d’âge (cf. annexe 2).
Cette décision avait pu être prise grâce à l’acceptation des différents partenaires : famille,
enseignants de la classe ordinaire et de la classe CRI, sous la médiation du CASNAV qui a
notamment permis l’intervention d’une traductrice turque. Les tests d’évaluation consistaient
en exercices de mathématiques et de français et montraient de réelles compétences en langue
maternelle (turque) : 16/20 au test de lecture cycle III (cf. annexe 3) et 18/20 aux évaluations
de mathématiques (niveau fin CE2). Lors de mon stage (janvier 2006), la fillette fréquentait
une classe de CM2 organisée en cours double CM1/CM2. Elle comprenait la plupart des
énoncés oraux bien qu’elle ressentait encore des difficultés à s’exprimer en français. Elle était
prise en charge tous les après-midi dans la classe CRI où nous nous sommes rendues par la
Mis en forme : Police :NonItalique
Supprimé : ¶¶
Supprimé :
Supprimé : ,
Supprimé : Lors d’un stage de pratique accompagnée, j’ai eu la chance de rencontrer Ilknhur, une fillette arrivée de Turquie à la fin de l’année scolaire précédente
Supprimé :
14
suite et suivait donc sa classe tous les matins; elle assistait également à l’étude qui se déroulait
avant la classe de 8h à 9h.
Une réflexion s’impose sur le choix des activités pouvant être suivies, de la manière la plus
riche, par cette enfant :
- La littérature et l’ORL (Observation Réfléchie de la Langue) en dispositifs aménagés
permettent à l’enfant de consolider et d’élargir les apprentissages amorcés en classe CRI.
La fillette adorait la lecture et les histoires, et participait activement dès qu’elle le pouvait
en littérature. D’autre part, j’ai noté chez tous les ENA rencontrés un réel désir de bien
écrire et j’ai pu observer une bonne participation écrite dans des situations d’exercices
guidés (j’envisage plus loin le cas de la production d’écrit) ;
- Les mathématiques font partie d’un autre code plus universel et ne posent pas de
difficultés spécifiques. J’ai mené une séquence sur la division qui n’a pas posé plus de
difficultés pour cette enfant, au contraire, le calcul a un côté cartésien rassurant. Je savais
qu’elle n’avait pas amorcé l’apprentissage de la division dans son pays, et j’ai pu observer
qu’elle affectionnait les mises en activité de type « révision des tables de multiplications »
qui débutaient mes séances sur la division.
J’ai appris par la suite qu’elle aimait particulièrement les mathématiques et que son père
maçon l’aidait parfois dans ce domaine ;
- Les disciplines comme les arts visuels, l’éducation musicale et l’EPS sont de bons
moyens d’engager l’enfant dans des tâches où la barrière de la langue ne se matérialise
que peu. Il est alors facile de réinvestir des compétences acquises dans leur pays d’origine.
J’ai pu noté une participation active et réfléchie en situation de hand-ball, il m’a été facile
d’expliquer les consignes en joignant le geste à la parole. Les autres élèves ont pu
également plus facilement aider sa compréhension. Ces disciplines peuvent également se
révéler d’excellents supports d’apprentissage de lexique ; je détaillerai par la suite une
séance d’arts visuels entrant dans ce cadre ;
- Une langue étrangère peut paraître superflue mais son acquisition est possible car
l’enfant est entrée dans une logique d’apprentissage de la langue. Cependant, des
mélanges peuvent parasiter l’acquisition du français langue seconde ;
- Les plus grandes difficultés que j’ai rencontrées se sont manifestées en histoire (moins en
géographie), sciences et production d’écrit. En histoire, la période abordée était celle du
siècle des lumières et je travaillais plus particulièrement sur les idées des philosophes de
l’époque. Peu de textes de cette époque sont facilement accessibles et ceux proposés
Mis en forme : Avec puces +Niveau : 1 + Alignement : 0cm + Tabulation après : 0,63cm + Retrait : 0,63 cm
Supprimé : ,
15
posent déjà des difficultés à tous les élèves. Il m’est désormais évident que cet apprentissage
ne présente pas d’accès pour un ENA. C’est une discipline dont les apprentissages peuvent se
faire plus tard et qui ne représente pas une priorité pour ces enfants. Ce temps peut permettre
un moment de différenciation, ou se faire lorsque l’enfant est en classe CRI. Pour les sciences,
bien que l’intérêt de la fillette était important, elle butait sans arrêt sur un vocabulaire très
spécifique difficile (ici travail sur la circulation sanguine). En matière de production d’écrit, la
difficulté est importante mais peut se contourner et s’adapter. Le dessin est un bon moyen
d’expression qui peut servir de support à une dictée à l’adulte. Le plus difficile reste la
production autonome, mais l’important est de toujours donner des moyens d’expression à ces
enfants.
Dans un second temps, il faut aussi tenir compte de la réalité de la classe (intervenants
extérieurs, emploi du temps d’occupation des locaux spécifiques en arts visuel ou en EPS et
décloisonnements). C’est ainsi que malgré une réflexion de l’enseignant titulaire sur les
activités en elles-mêmes, la fillette suivait les cours d’histoire (dépendants d’un
décloisonnement en demi groupe avec une intervenante en allemand le matin) alors qu’elle
suivait peu d’EPS, d’arts visuels ou d’éducation musicale qui semblent pourtant être de bons
moyens d’extériorisation pertinents pour ces élèves. Ils permettent de créer des liens avec les
autres enfants dans un contexte scolaire plus souple. En effet, il est alors plus facile
d’accompagner les actions par la parole (en EPS, en arts visuels et en musique) et ainsi de
créer un bain de langage en situation. L’éducation musicale et les arts visuels peuvent
favoriser des échanges culturels importants entre l’ ENA et ses camarades par le biais des
artistes et de leurs œuvres.
• Méthodes d’apprentissage :
L’enseignante que nous avons rencontrée fonde son enseignement autour de 3 axes :
- le français langue seconde,
- le français langue de scolarisation,
- les aspects culturels et interculturels.
Ces axes permettent aux enfants de trouver leur place dans le groupe, en effet, ceux-ci ont
besoin de parler d’eux (se présenter aux autres), de se repérer dans l’espace et dans le temps,
d’apprendre le code, de raconter, de donner leur avis et leur point de vue.
Supprimé :
Supprimé : ,
16
L’enseignante de cette classe propose des rituels, un peu comme en maternelle, afin que
les élèves prennent des repères. Elle commence par une phase d’oralisation dans le but de
faire fonctionner le lexique et utilise des jeux de rôle qui donnent du sens. Elle a recours à des
albums accessibles pour tous, étant donné l’écart d’âge qu’il peut y avoir entre les enfants
(comme dans une classe unique) et accorde de l’importance à la prise d’indices (similitudes
des premières de couverture, mises en page spécifiques au type d’écrit) aidant à la
compréhension.
Elle sollicite les enfants pour qu’ils apportent des livres dans leur langue maternelle afin
qu’ils ne soient pas seulement que des apprenants, mais qu’ils se sentent aussi capables de
nous apprendre des choses. Ceci permet de créer des passerelles avec la classe de référence et
plus particulièrement les autres élèves, afin de changer l’image qu’ils peuvent avoir d’un
ENA.
• Outils
Plusieurs outils sont utilisés, notamment :
- des imagiers,
- des dictionnaires illustrés (ex : « Mes 100 premiers mots à lire » fichier RETZ de
Guirao et Marschal),
- des contes internationaux en plusieurs langues (ex : Le petit chaperon rouge),
- des consignes illustrées indispensables en début d’année dans les deux classes avec
un souci d’unicité du code (cf. annexe 4).
• Particularités
Les élèves se retrouvent et ont un vécu commun (la migration), leur faible nombre
(maximum 15 élèves) engendre une grande proximité entre eux et avec l’enseignant qui
favorise le climat de confiance et donc l’entrée dans les apprentissages.
Ce poste demande un réel investissement de l’enseignant : il faut faire preuve de
compréhension, de sincérité et donner envie (théâtralisation importante).
Mis en forme : Police :NonItalique
Mis en forme : Tabulations :0,95 cm,Gauche + 1,59cm,Gauche
Supprimé :
Supprimé : ¶
Supprimé :
Supprimé :
17
c- Le rôle du Centre Académique pour la Scolarisation des enfants Nouveaux
Arrivants et des enfants du Voyage (CASNAV)
Il s’agit d’une structure mise en place en 1975 sous la forme de CEFISEM (Centre de
Formation et d’Information pour la Scolarisation des Enfants Migrants), devenue en 2002 des
CASNAV de manière à mieux identifier les publics concernés.
Les missions principales d’un CASNAV sont :
- de faciliter l’adaptation de ces jeunes au système français d’éducation en développant des
aides adaptées à leur arrivée ;
- d’assurer leur intégration dans le cursus ordinaire.
Pour cela, le CASNAV est chargé d’établir le dossier d’accueil et d’évaluation qui
consiste notamment en une évaluation correspondant à la classe d’âge de l’écolier, rédigée par
celui-ci dans sa langue, afin d’analyser ses compétences en mathématiques et en
lecture/littérature. Le profil scolaire établi permet d’affecter l’élève dans le niveau de classe
lui correspondant le mieux. Le dossier est alors remis à l’enseignant pour lui permettre
d’organiser les apprentissages de l’élève, une copie étant conservée par le CASNAV.
Cette structure a également un rôle d’accompagnement des enseignants et plus largement
de l’école concernée. La plupart du temps une réunion est organisée à l’issue de l’évaluation
de l’enfant, durant laquelle l’équipe enseignante, les parents et le responsable du CASNAV
accompagné le cas échéant d’un traducteur, construisent le projet d’intégration de l’élève.
C’est à ce moment là que s’établit le lien entre les différents partenaires éducatifs et
qu’intervient l’échange de documentations pédagogiques (cf. annexe 5).
ALF : En réalité, sur le terrain tout n’est pas si facile. L’enseignant de la classe dans laquelle
j’ai fait mon stage n’avait pas connaissance de l’existence de ce dossier et ne pouvait, par
conséquent, s’appuyer sur les informations spécifiques qu’il propose. C’est l’enseignante du
CRI qui possède et utilise le document. On entrevoit ici une difficulté importante,
l’enseignante du CRI n’a pas le temps matériel de rencontrer les enseignants de tous ses
élèves pour leur exposer ce qu’elle propose quotidiennement et parler plus spécifiquement de
l’enfant. Inversement, l’enseignant de la classe titulaire doit prendre en compte tous ses élèves
et leurs besoin spécifiques ce qui sous-entend souvent des réunions entre collègues et avec les
familles. Des rencontres manquent pour harmoniser et diversifier les offres faites à ces
Supprimé : ¶¶¶¶
Supprimé :
Supprimé : ,
18
enfants. La mise en place d’un carnet de liaison où chacun des enseignants peut noter ce qu’il
propose à l’enfant et poser des questions semble être un bon outil. En effet, c’est par
l’information que des liens pourront se tisser entre les partenaires éducatifs mais aussi entre
les apprentissages. Il est évident que les situations vécues dans les deux classes se recoupent
parfois et que c’est justement ce cas qui semble exploitable avec l’enfant. Il lui serait sans
doute plus facile d’aborder en classe ordinaire une notion dont la trame ou le vocabulaire est
travaillé en parallèle en classe CRI, lui permettant ainsi de participer, de montrer que l’enfant
connaît des choses, qu’il apprend et qu’il progresse. Une communication quelle qu’elle soit
entre les enseignants d’un ENA m’apparaît décisive pour sa réussite. Les deux contextes
scolaires sont différents et l’enfant y évolue donc différemment avec plus ou moins de
confiance et en se dévoilant de différentes façons. Un regard sur ses comportements peut être
révélateur de besoins spécifiques, de difficultés récurrentes ou bien dépassées dans un des
deux contextes.
J’ai pu remarquer que la jeune turque d’un naturel réservé en classe ordinaire était bien plus
émancipée en classe CRI. Elle se sentait sans doute en sécurité, rassurée par l’ambiance
« cocon » de cette classe, mais aussi par le public présent : tous les enfants viennent d’arriver
en France et sont confrontés aux mêmes difficultés qu’elle. Sans la visite de cette classe, je
n’aurais jamais pu avoir ce regard sur son comportement et c’est pourtant ce qui se passe pour
les enseignants de l’enfant qui n’ont pas le temps matériel d’échanger leurs remarques. Il me
semble essentiel de créer ce contact pour mener à bien le projet d’intégration de tout ENA.
A la lumière de cette difficulté, j’ai demandé à l’enseignant de la classe ordinaire ce dont il
pensait avoir besoin, qui lui faisait actuellement défaut pour avancer avec l’enfant :
- une copie du dossier d’évaluation,
- des échanges avec l’enseignante CRI (autres que les simples résultats de ses évaluations),
- une copie de la grille des premières consignes, utilisée au CRI (par souci d’unicité).
Les concertations entre les différents partenaires éducatifs permettent d’organiser le projet scolaire de
l’élève (quota horaire de la fréquentation des deux classes). Cependant, ce projet est en constante évolution
durant l’année en fonction des besoins de l’élève et de son avancée dans les apprentissages.
19
2- Démarche personnelle de l’enseignant
L’enseignant de la classe ordinaire représente pour l’enfant un référent stable de la société d’accueil.
Constituant un relais indispensable, il doit s’interroger sur une nouvelle problématique : quel rôle doit-il
jouer ?
a- Accueil de la famille
La première démarche qui semble essentielle est une prise de contact avec la famille. Il
faut alors s’interroger sur la nécessité de recourir à un interprète pour faciliter ce moment
d’échange. En effet les parents peuvent ressentir diverses appréhensions face à l’intégration
de leur enfant :
- Comment va t-il être accueilli ?
- Va t-on lui proposer un apprentissage adapté ?
- Va t-il pouvoir poursuivre son cursus scolaire comme il l’aurait fait dans son pays
d’origine ?
C’est l’occasion également de présenter aux parents le système scolaire français et les
locaux dans lesquels leur enfant va évoluer toute l’année. Cet entretien va aussi permettre de
définir un référent familial qui pourra comprendre et transmettre les informations venant de
l’école au sein de la famille. Nous avons pu remarquer que c’est souvent un grand frère ou
une grande sœur également scolarisé qui fait office d’intermédiaire, ceci étant dû à la barrière
linguistique rencontrée par les parents. Un médiateur social invité, peut alors proposer le
recours à des associations offrant différents services :
- un enseignement de la langue pour adulte (ALF : La maman de la fillette que j’ai suivie
prenait justement des cours de français et commençait à suivre les devoirs de sa fille) ;
- une aide aux devoirs, tant que les parents ne peuvent le faire. (EB : Au Sénégal ce sont les
enseignants qui proposent généralement ces aides aux devoirs, ils font cela bénévolement
après les cours de 18h à 21h) ;
- des activités culturelles (découverte de la ville, du quartier), sportives …
Nous avons rencontré un intervenant d’une de ces associations (association A.V.E.C.)
pour en savoir davantage sur ce qui est proposé aux familles nouvellement arrivées en France
(cf. annexe 6).
Supprimé : ¶¶¶¶¶
20
b- Prise de contact avec l’enfant
ALF : La prise de contact avec l’enfant me semble une étape délicate dont la réussite est
fondamentale pour la suite. Il est important que l’enfant ait confiance en son enseignant, qu’il
sache qu’il sera là pour l’accompagner, en lui donnant le temps, en le guidant, mais sans
négliger les aspects scolaires.
Lors de mon stage je me suis rendue compte que le temps et la confiance sont des alliés non
négligeables. J’ai choisi de discuter avec la fillette tout d’abord à l’étude du matin, pour
prendre contact en douceur. De façon très brève au début, il n’y a eu qu’un « bonjour » mais
qui à moi me semblait important ; en effet j’intervenais dans cette classe pour 15 jours
seulement, elle ne m’avait jamais vue et je ne voulais pas qu’elle se sente observée à la loupe.
Petit à petit nous avons discuté plus longuement, je lui ai proposé de lui expliquer ce que nous
avions fait avec ses camarades lorsqu’elle était au CRI les après-midi. Ceci m’a confronté à la
difficulté du choix des mots justes pour qu’elle comprenne le plus aisément possible.
J’accordais beaucoup d’importance au fait de ne pas lui imposer mon aide lorsqu’elle ne la
souhaitait pas, mais je m’assurais qu’elle puisse participer sans trop de problèmes aux séances
que je menais, soit en lui proposant une explication différente avec un dessin par exemple,
soit en lui proposant l’aide d’un camarade. Je me suis rapidement rendue compte qu’elle
venait me solliciter spontanément pour avoir des précisions de consigne ou tout autre
demande d’ailleurs, ce qu’elle faisait beaucoup moins au contact d’une autre stagiaire
présente en même temps que moi dans la classe. A la fin du stage, j’ai pu lui demander
facilement de répondre à quelques questions sur son ressenti dans la classe et elle y a répondu
sans gêne (cf. annexe 7).
Je pense vraiment qu’une relation de confiance doit s’établir avec l’ENA pour qu’il puisse
s’intégrer et s’épanouir dans sa classe. L’enseignant doit avoir confiance en ses capacités,
même s’il ne les mesure pas au début, pour que ce dernier puisse se sentir suffisamment en
sécurité et s’autoriser toutes les questions et les remarques dont il a besoin.
c- Aménagement de la classe
Il faut réfléchir au placement de l’élève dans la classe (devant, derrière, au milieu, seul,
avec un tuteur, proche de l’enseignant).
Supprimé :
Supprimé : assez
21
Dans le cadre de tutorat, il est important de mettre en place un système de rotation basé sur un
calendrier négocié avec la classe, afin de ne lasser personne. Les enfants peuvent alors
s’impliquer davantage dans leur rôle.
Un emploi du temps clair et explicité (code couleur, par exemple) doit être remis à l’élève
pour faciliter son quotidien dans la classe.
d- Réflexion pédagogique
Il nous semble évident de ne pas avoir les mêmes exigences en matière de connaissances
pour ces élèves. Une progression thématique et disciplinaire est possible et doit être adaptée
(lexique, syntaxe, contenus, niveau de formulation). Il est important que l’enfant acquière des
compétences de difficultés croissantes en fonction de ses acquis et tire donc un réel bénéfice
de l’école.
L’adaptation de tous les enseignements semble irréaliste et se traduit essentiellement par une
différenciation des évaluations en terme de contenus et d’exigences.
L’enseignant a donc inévitablement un rôle très important à jouer en proposant une démarche
pédagogique spécifique, mais surtout en s’impliquant personnellement dans l’accueil et l’écoute attentive de
ce nouveau venu.
3- Démarche de toute une équipe pédagogique
Un enseignant n’est pas seul face aux difficultés rencontrées lors de l’accueil d’un ENA.
En début d’année, les écoles reçoivent une lettre d’information concernant l’accueil et la
scolarisation des ENA. Cette dernière fait référence à différentes circulaires précisant : les
modalités d’inscription et de scolarisation des élèves de nationalité étrangère (circulaire 2002-
063 du 20/03/02), l’organisation de la scolarité des élèves nouvellement arrivés en France
sans maîtrise suffisante de la langue française ou des apprentissages (circulaire 2002-100 du
25/04/02) et sur les missions des Centres Académiques pour la Scolarisation des Nouveaux
Arrivants et des enfants du Voyage ou CASNAV (circulaire 2002-102 du 25/04/02). Les
directeurs des écoles concernées ont pour mission de renseigner et de transmettre au
CASNAV, à chaque début d’année, une fiche récapitulative « recensement des ENA »
permettant de dénombrer les enfants arrivés depuis le début de l’année civile (réalisation
22
d’une enquête départementale). Pour toute inscription réalisée après ce recensement, les
directeurs doivent envoyer au CASNAV une fiche de liaison individuelle de manière à
régulariser les statistiques (cf. annexe 8).
Rapidement, le directeur de l’école peut proposer à la demande de l’enseignant de la classe,
un bilan médical réalisé par le médecin scolaire afin de déceler d’éventuels troubles auditifs
ou visuels, mais aussi de s’assurer des vaccinations effectuées.
Il est important que toute l’équipe pédagogique participe à l’intégration de ces élèves.
Cette démarche facilitera le passage de l’élève dans les différentes classes de l’école. Les
heures de concertation des conseils sont des moments privilégiés pour aborder les
aménagements possibles et nécessaires au sein de l’école ainsi que les difficultés rencontrées
par les enseignants des classes d’accueil. Lorsque l’école accueille plusieurs ENA il est
possible et même souhaitable que les enseignants travaillent de concert à leur intégration, en
proposant notamment un décloisonnement de certaines activités souvent inabordables au sein
du grand groupe (histoire, sciences, ou production d’écrit par exemple) et des moments de
travail plus spécifique aux apprentissages du FLS.
La répartition des lieux spécifiques (BCD, salle informatique, plateau sportif…) doit être
pensée en relation avec la présence de ces enfants dans l’école (cf. adaptation de l’emploi du
temps).
Tous ces partenaires ont pour mission commune la réussite de l’intégration de l’enfant, ce qui nécessite
donc concertations, implications et échanges professionnels dont le but ultime est l’épanouissement
personnel et scolaire de l’enfant.
Supprimé :
23
TROISIÈME PARTIE : MISE EN PLACE DE PRATIQUES PÉDAGOGIQUES Cette partie a pour objectif de proposer des outils pratiques pouvant être mis en place dans la classe afin
d’accueillir un ENA, ainsi que des pistes de travail permettant une adaptation des apprentissages à
différents moments de l’année.
1- Pistes de réflexion
a- Outils pratiques
Le premier axe de travail consiste en la mise en place d’éléments fonctionnels de
communication. Il faut faciliter son entrée dans la vie de la classe et dans les apprentissages
dès son arrivée. Nous avons vu lors de notre visite de la classe CRI, l’utilisation d’une grille
de premières consignes (mots, en vis-à-vis de pictogrammes), qui permet à l’enfant d’entrer
facilement dans les tâches scolaires. Plus particulièrement, c’est une aide à la lecture et à la
mémorisation qui disparaîtra au fil du temps.
Il nous semble intéressant d’étendre ce dispositif aux situations quotidiennes de vie de la
classe et de proposer ainsi un moyen de « parler de soi ». En effet, nous avons remarqué un
manque, au niveau des besoins d’ordre plus généraux (avoir soif, faim, mal quelque part). De
plus, il s’agit d’un autre mode d’apprentissage du lexique qui pourra aisément être réinvesti
en dehors de la classe et qui correspond à l’essentiel des besoins de communication
instantanée.
Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶
Supprimé : ,
Supprimé : ,
24
Suite à ce constat, nous avons imaginé une grille répondant à ces besoins :
Un second axe de travail peut consister en l’utilisation du logiciel « ATOUTCRI » diffusé
par le CASNAV. Ce support multimédia propose à la fois des évaluations de compétences en
mathématiques et en français mais aussi des parcours progressifs vers l’apprentissage de la
langue. Il se base notamment sur des supports sonores qui permettent un travail de l’oral en
autonomie. Cet outil va permettre à l’enseignant de placer l’enfant, dès son arrivée, sur des
activités adaptées ayant fait l’objet d’une recherche approfondie.
Je suis content(e)
Je suis triste
Je suis malade
J’ai compris
Je ne comprends pas
Je me suis disputé(e)
J’ai faim/soif
Je voudrais aller aux toilettes
Je suis fatigué(e)
?
Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶
25
b- Activités
Un travail concernant la conception que l’on peut avoir de l’outil « manuel » est
envisageable. Nous avons parfois le tort de considérer comme acquises la connaissance et
l’utilisation de cet outil. Dans certains pays les manuels sont peu présents. E.B : C’est le cas
au Sénégal, les livres sont peu utilisés au quotidien ; ils ne font pas partie du matériel de base
de l’élève. Leur fonctionnement nécessite un apprentissage :
- organisation en double page,
- sens de lecture,
- sommaire,
- 1° et 4° de couverture,
- type d’écrit et sélection de l’information.
Une activité qui nous a semblé intéressante (proposé par Danielle BOYSON-FRADET
dans Question de Langue) consiste en l’étude approfondie de l’objet « manuel scolaire ».
Comme l’écrit Danielle BOYSON-FRADET : « une double page de manuel se présente
toujours sous forme d’un écrit pluricodé, éclaté, dont la lecture ne peut s’effectuer de manière
linéaire ».
Il n’est pas inutile de travailler la méthodologie du manuel, sachant qu’elle reste souvent
identique tout au long de celui-ci et qu’elle présentera nécessairement des similitudes de
structure avec tout autre manuel. Une activité peut donc consister en la reconstitution d’une
double page « puzzle » sur un thème précis, de manière à inventorier les relations existantes
entre les éléments de la page (photos, textes, enquêtes, reportages, documentaires…). Ce type
d’activité peut être prolongé par la création d’une double page de manière plus autonome,
pour rendre compte de recherches ou pour servir de support à un exposé oral. Ce travail peut
également représenter une aide importante pour certains élèves en difficultés, notamment
lorsque la lecture reste coûteuse. Il sera ainsi possible de développer des stratégies de lecture,
correspondant à ce type d’écrit, qu’ils seront amenés à rencontrer tout au long de l’année.
Toute la classe pourra alors en tirer un réel bénéfice, y compris l’enseignant qui gagnera un
temps précieux par la suite lorsqu’il choisira d’utiliser un manuel.
Lors de séances de production d’écrit en début d’année, nous pensons possible d’utiliser
des « cartes images » comme aide à la communication. Ces cartes peuvent être de plusieurs
types (personnages, lieux, actions, moyens) en lien avec une histoire lue en classe. Ce support
peut permettre l’écriture en dictée à l’adulte de la suite du texte, en diminuant les opérations
Supprimé : ¶
Supprimé : e dit
Supprimé :
Supprimé : Il est donc possible que t
Supprimé : ,
Supprimé : ,
26
cognitives effectuées par l’enfant. Il est aussi possible de travailler sur la structure du récit
(schéma narratif).
Il peut être intéressant de construire avec l’enfant un dictionnaire illustré lui permettant de
stocker les mots nouveaux qu’il rencontre quotidiennement, ainsi que de demander du
vocabulaire par l’intermédiaire du dessin. Une structuration par thème ou par ordre
alphabétique peut apparaître. Cet outil constitue à la fois un élément rassurant, mais aussi une
trace du parcours et des progrès réalisés.
Il est possible d’inviter les parents de l’enfant à suivre une demi-journée de classe de
manière à renforcer le lien avec la famille. Parents et enfant pourront ensuite discuter dans
leur langue de la vie de la classe. Les parents comprendront sans doute mieux ce que vit leur
enfant et auront une autre vision de ces moments, traditionnellement racontés par l’enfant.
La journée doit être ponctuée de moments calmes où l’enfant se ressource et prend du
temps pour « souffler ». En effet, ces temps de classe demandent à l’enfant une concentration
soutenue, notamment par l’effort de compréhension dû à la langue. Toutes les activités qui lui
sont proposées génèrent une fatigue intellectuelle qu’il est nécessaire de prendre en compte.
2- Mise en application
a- Passation des consignes
EB : L’enseignant peut au moment de formuler ses consignes, utiliser le mime ou le dessin
pour faciliter la compréhension de l’ENA. Cette démarche peut ainsi être bénéfique à d’autres
élèves de la classe qui seraient en difficultés au moment de l’énoncé des consignes orales.
L’enseignant peut s’assurer de plusieurs façons que l’enfant ait bien compris le travail
demandé ; il peut lui demander de reformuler la tâche avec ses propres mots, ou bien encore
lui proposer de montrer les principales actions à travers un imagier dont il aurait l’habitude de
se servir.
27
b- Réinvestissement des apprentissages du CRI
ALF : Lors de mon stage, j’ai mené une séance d’arts plastiques qui a permis, sans le savoir,
un réinvestissement des activités de la classe CRI et qui a facilité l’appropriation de l’activité
par la fillette turque. Il s’agissait d’une séquence sur le portrait en lien avec le livre de
littérature qui venait d’être lu par la classe. Les premières séances avaient permis de travailler
la notion même de portrait et la représentation des sentiments à travers différentes techniques.
La séance proposée partait d’œuvres d’artistes qui avaient travaillé le portrait « autrement ». Il
y avait trois techniques à explorer : le minimalisme (de simples traits noirs sobres pour créer
un portrait minimal mais expressif), le portrait paysage (des éléments de paysages utilisés
pour créer un portrait) et le détournement du visage (ré agencer les parties d’un visage pour
créer un portrait où plus rien n’est à sa place, où la structure du visage est repensée). Les
enfants choisissaient l’atelier qu’ils souhaitaient et réalisaient, par découpage collage, un
portrait en utilisant la technique de l’artiste de référence. La fillette s’est spontanément
tournée vers le ré agencement du visage et est entrée dans l’activité sans aucune difficulté.
J’ai su par la suite, que cette semaine-là, le vocabulaire du visage avait été travaillé en classe
CRI et il est vrai que je n’avais pas rencontré de problème de compréhension en lui disant que
les oreilles pouvaient devenir des yeux, la bouche une moustache…, pourtant cette activité
demandait une capacité de déconstruction non négligeable. A la suite du travail de production,
j’avais demandé aux élèves de donner un titre à leurs portraits et je me suis rendue compte,
par la pertinence du titre choisi par la fillette, du degré d’appropriation atteint.
Supprimé : ¶¶¶¶
Supprimé : ,
28
Je pense que ceci est largement dû au travail mené en amont au CRI, ce qui nous montre
ainsi à quel point une communication entre les enseignants des ENA est essentielle. Il me
semble que la classe CRI peut préparer l’enfant à certaines séquences d’apprentissages en
abordant le vocabulaire, le contexte et tout ce qui s’y prête, de manière à faciliter la
compréhension du travail en classe ordinaire. Cette première sensibilisation permet ainsi à
l’enfant de développer des compétences plus spécifiques (niveau disciplinaire) et d’être un
peu plus « comme les autres » face à une nouvelle notion.
c- La place du jeu dans les apprentissages
L’utilisation de supports plus ludiques, comme les jeux de loto, de mémory, et plus
généralement tous les jeux de société, est l’occasion d’apprendre du lexique, des nombres, des
règles de jeu. Ces situations peuvent également permettre une mise en comparaison des jeux
traditionnels des deux pays. De premiers échanges interculturels se développent.
ALF : Dans la classe de CM1/CM2 que j’ai suivie en stage de pratique accompagnée,
l’enseignant utilisait des défis pour motiver ses élèves. Ces défis pouvaient concerner
différentes disciplines à partir du moment où la notion travaillée se prêtait à ce type
d’exercice.
Les enfants sont répartis en 4 équipes de cinq à six élèves, et gagnent des points au gré de la
réussite des défis, ils peuvent en perdre lorsque leur travail est parasité par des bavardages,
des somnolences. A la fin de chaque période, un bilan est fait, et l’équipe gagnante « reçoit la
gloire » d’être celle qui a le mieux travaillé durant toute la période. Pour l’enseignant, ce
dispositif a un double objectif, motiver les élèves par le jeu et évaluer individuellement ceux
qui participent au défi.
A titre d’exemple je vais détailler un défi auquel la fillette turque a accepté de participer et
qui lui a permis non seulement de rapporter des points à son équipe, mais surtout de montrer
qu’elle savait des choses et qu’elle était capable d’appartenir réellement au groupe.
Il s’agissait d’une séquence sur la division et le défi prenait place en fin de séance, séance
durant laquelle les élèves avaient travaillé sur la potence (technique opératoire de la division)
comme outil d’écriture d’un partage équitable.
Un élève de chaque équipe est invité au tableau pour participer au défi final qui consiste en la
résolution d’une division. Les quatre élèves sélectionnés doivent résoudre l’opération
individuellement le plus rapidement possible, le premier ayant fini pouvant rapporter le plus
29
haut score à son équipe (les élèves sont ordonnés selon leur rapidité d’exécution). Pendant ce
temps, les autres élèves de la classe résolvent la même opération sur le cahier de brouillon, de
manière à participer à la validation de ce qui a été produit au tableau. Lorsque les quatre
participants ont terminé, les opérations sont observées, seules celles qui sont réussies
rapportent des points : 3 points pour le plus rapide, 2 points pour le second, 1 point pour le
troisième et 0 point pour le dernier.
Cette situation motivait beaucoup les élèves mais leurs réactions variaient suivant l’élève
choisi pour participer au défi. En effet l’enseignant désignait parfois les « joueurs » de
manière à ce que tous passent mais aussi à équilibrer les niveaux. Lorsque la fillette turque est
passée, peu d’élèves s’attendaient à ce qu’elle réussisse l’opération et encore moins à ce
qu’elle apporte des points, pourtant ce fut le cas (elle remporta 2 points) et cette activité a
réellement légitimé sa place dans le groupe et dans la classe, à cet instant. Même si la plupart
des élèves s’entendent bien avec cette camarade, ils ne la considèrent pas encore tous comme
« un pair » et là est toute la difficulté : il faut prendre en compte ses spécificités, ses besoins
particuliers et en même temps lui donner une place aussi ordinaire que celle des autres élèves.
Je pense que ce type d’activité pour des notions bien comprises peut participer à l’intégration
d’un enfant nouvellement arrivé en France.
d- Utilisation des acquis culturels de l’élève
Contexte :
Nous avons choisi de travailler autour des acquis culturels de l’ENA à travers la mise en
place de deux séances faisant appel à ses connaissances en langue maternelle. Notre objectif
principal était de montrer aux autres élèves les difficultés que pouvait rencontrer chaque jour
l’ENA. Comprendre un langage oral différent du sien nécessite une grande concentration et
est source de fatigue ; entrer dans le langage écrit demande une mise en hypothèse constante.
Notre hypothèse de travail passait par l’utilisation de la culture de l’ENA de manière à la
valoriser vis-à-vis de ses camarades pour lui donner confiance en elle. Les aboutissements
d’une telle activité doivent permettre :
⋅ d’enrichir la classe,
⋅ d’intégrer l’élève par sa différence,
30
⋅ de parler et d’accepter la différence,
⋅ de s’ouvrir au monde et à sa diversité,
⋅ de motiver l’élève à communiquer et à faire passer ses propres connaissances.
Dans ce but, nous avons choisi de proposer deux séances (cf. annexe 9) qui permettaient
d’inverser les rôles, les élèves étaient face à un écrit en langue étrangère inconnue, alors que
l’ENA se retrouvait face à sa langue maternelle. Le support utilisé était un poème turc
d’Üzeyir Lokman ÇAYCI , intitulé « LE SOLEIL EST NE POUR LA TRISTESSE » (cf. annexe 10).
Le dispositif choisi visait plusieurs objectifs, à savoir :
- en littérature (lire, dire, écrire) : étudier un poème pour « écrire à la manière de »
collectivement ;
- en ORL : comparer des systèmes linguistiques en établissant des correspondances entre
les mots des deux langues ;
- en éducation civique : réaliser une production interculturelle en français et en turc de
manière à mélanger nos cultures et nos connaissances.
La langue turque actuelle a fait l’objet d’une réforme importante sous l’impulsion d’une
politique de laïcisation menée par son dirigeant Mustafa Kemal Atatürk, dans les années 1920
(cf. annexe 11). C’est ainsi qu’un nouvel alphabet, dérivé de l’alphabet latin, a remplacé le
codage arabe. Cette réforme s’est accompagnée d’autres mesures visant à moderniser et
entretenir la langue turque originelle. La grammaire turque présente certaines ressemblances
avec la grammaire allemande : elle fonctionne avec un système de déclinaisons et renvoie le
verbe en fin de phrase ; les compléments sont en début de phrase et les prépositions sont
essentiellement en dernières positions dans la phrase. Certaines autres spécificités sont mises
en évidence lorsqu’on compare une phrase turque et sa traduction française :
- l’emploi des pronoms personnels n’est pas nécessaire, ils sont parfois utilisés pour
préciser le sujet ;
- la négation, la possession et les conjugaisons sont marquées par des suffixes
spécifiques sur les noms ou les verbes ;
- il n’y a pas de genre et donc pas de déterminant.
31
Cette analyse permet de se rendre compte des difficultés pouvant être rencontrées par un
enfant turc devant apprendre le français ; les principaux écueils viennent de l’ordre des mots,
totalement inversé, et de l’absence de genre.
Remarques personnelles sur le déroulement de la séance 1 :
ALF : Lors de la distribution du texte, les enfants étaient plutôt intrigués et leur première
réflexion fut : « on ne peut pas répondre aux questions, on ne comprend pas ». Il a fallu
expliquer qu’il s’agissait d’une énigme et qu’il y avait pleins d’indices dans le texte, pour que
les enfants s’engagent dans la tâche. J’avais volontairement choisi de passer par une phase
écrite de recherche, de manière à canaliser les élèves de cette classe relativement vivante.
Certains enfants ont cru qu’il s’agissait d’un texte allemand - il est vrai que c’est la langue
étrangère étudiée par la classe - ils ont pu y voir les ressemblances de sonorités de certains
suffixes (on trouve beaucoup de « den » en allemand et il y en avait dans le texte).
Tout au long de la séance il y a eu beaucoup d’interactions entre l’enfant turque et ses
camarades, des questions, des remarques. Le recours constant aux connaissances de l’ENA,
pour la validation des hypothèses, lui a donné envie de participer activement à l’oral, ce qui
n’est pas la chose la plus facile pour elle. Au début de la recherche d’autres traductions, les
enfants n’ont pas pensé directement à leurs langues maternelles (les enfants de cette classe
sont de différentes origines et certains ont un de leurs parents d’origine étrangère). Habitués à
évoluer dans un contexte scolaire, il semble qu’ils pensaient à des langues plus
traditionnellement étudiées à l’école, comme l’anglais ou l’allemand.
A un moment, un enfant m’a timidement demandé : « vous le voulez bien en arabe ? », et
l’écriture de cette traduction a déclenché tout le reste de l’activité. Tous avaient envie de
proposer une langue et ceux qui ne pouvaient proposer que quelques mots ont vraiment eu
besoin que je les note aussi au tableau.
Mis en forme : Couleur depolice : Violet
Mis en forme : Couleur depolice : Violet
Mis en forme : Couleur depolice : Violet
Mis en forme : Couleur depolice : Violet
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Supprimé : ,
Supprimé : ,
Supprimé : ,
32
C’est ainsi que j’ai obtenu 3 langues supplémentaires à comparer et que j’ai réalisé une
affiche bilan :
Comparons nos langues
Français : J’aimerais changer la place des choses.
Turc : Yerlerini dégistirmeyi seviyorum.
Arabe (sons) : Ana bari nbédil elblassa ndiel lahouayige.
Wolof : Bege ma changer se balle bie.
Guinéen : Bè gnala ni bola djain na la djain.
Nos langues ne fonctionnent pas de la même manière :
1) En ce qui concerne l’ordre des mots dans la phrase : en turc le verbe est à la fin, alors
que dans les autres langues il est au début. Dans certaines langues (arabe et guinéen) il y a
des mots supplémentaires pour préciser le sens de la phrase ;
2) En ce qui concerne la longueur des phrases : en turc les phrases sont plus courtes qu’en
français, wolof et guinéen, alors qu’en arabe elles sont plus longues ;
3) En ce qui concerne les déterminants : en turc et en guinéen il n’y a pas de déterminant,
mais en guinéen, le genre est marqué par des suffixes alors qu’en turc il n’y a pas de
genre.
Analyse de la séance :
La séance s’est avérée être très enrichissante tant du point de vue linguistique que du point
de vue culturel. Les élèves sont entrés avec enthousiasme dans l’activité et ont montré une
réelle écoute à l’égard de l’ENA.
Dès la distribution du poème il y a eu une véritable mise en hypothèse motivée par l’enjeu
énigmatique du support, ils avaient perçu qu’il s’agissait d’une autre langue sans pour autant
l’identifier et la comprendre. L’identification de la langue est cependant rapidement apparue
au sein de l’îlot auquel appartenait l’ENA, pour peu à peu se propager au reste de la classe.
Mis en forme : Police :10 pt
Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶
Supprimé :
Supprimé :
Supprimé :
33
Cette anticipation n’a pas réduit la motivation des élèves, au contraire ils étaient friands de
questions sur la langue.
La prise d’indices du début de la séance (« qu’est ce que ce texte ? ») a montré un
réinvestissement des connaissances des élèves en poésie et a facilité leur entrée dans le texte
permettant ainsi l’étude plus spécifique des aspects linguistiques. Après la distribution du
texte en français, lorsqu’il a été question d’établir des correspondances entre les deux langues,
les élèves se sont appuyés sur le fonctionnement du français pour identifier les différents
éléments de la phrase de référence. Par exemple, en ce qui concerne le verbe, les enfants
restaient sur les premiers mots de la phrase turque, ils essayaient de découper le premier mot
(cas possible de fusion entre le pronom personnel et le verbe) mais ils ne pensaient pas à
proposer le dernier.
Phrase de référence :
J’aimerais changer la place des choses. verbe conj.
Yerlerini dégistirmeyi seviyorum. verbe conj.
De cette analyse syntaxique ont découlé plusieurs observations : l’ordre des mots est
différent dans les deux langues, il n’y a pas de déterminant devant les noms communs en turc
ce qui diminue le nombre de mots et donc la longueur des phrases en général.
Lors de la recherche d’autres traductions, trois langues étrangères ont été proposées par
les élèves (l’arabe, le wolof et le guinéen), ces langues étant essentiellement « parlées » au
sein du foyer familial. Les enfants étant arrivés en France avant l’âge de 5 ans, l’écriture de la
phrase en arabe n’a pu s’effectuer que phonétiquement alors que pour les deux autres
traductions, l’alphabet étant le même, le codage en a été facilité. Lorsqu’il a été question de
mettre par écrit la phrase arabe, des conventions ont dû être adoptées : la phrase a été écrite de
gauche à droite et les mots ont été écrits « comme on les entendait ». A ce moment là, les
enfants se sont rendus compte de mes difficultés à écrire des sons que je n’avais pas
l’habitude d’entendre. Ce fut l’occasion de parler avec les élèves du « crible phonologique »,
sans pour autant le nommer : les nouveaux-nés ont la capacité d’entendre la totalité des sons
de toutes les langues du monde mais peu à peu un crible se met en place du fait de l’écoute
exclusive de la langue maternelle ; ce qui explique que par la suite, nous n’entendions plus
que les sons de notre langue. « Mais si [nous] entendons parler une autre langue, nous
employons involontairement pour l’analyse…le « crible phonologique » de notre langue
maternelle qui nous est familier. Et comme ce crible ne convient pas pour la langue étrangère
34
entendue, il se produit de nombreuses erreurs et incompréhensions. Les sons de la langue
étrangère reçoivent une interprétation phonologique inexacte, puisqu’on les fait passer par le
« crible phonologique » de sa propre langue », (d’après TROUBETZKOY dans Principes de
Phonologie).
Dans un premier temps, l’élève qui dictait ne comprenait pas pourquoi je ne transcrivais pas
exactement ce qu’il disait malgré le soin qu’il apportait à son articulation ; dans un second
temps ils en ont conclu que cela venait du manque d’habitude à entendre ces sonorités. Les
élèves ont compris les difficultés que rencontrait l’ENA dans le choix du genre des noms car
pour elle les déterminants sont absents de sa grammaire.
A l’issue de cette séance, les élèves ont mieux cerné toutes les difficultés de
l’apprentissage d’une langue avec tout ce que cela peut comporter comme codage spécifique,
ils ont également vu que l’ENA avait des compétences dans sa langue maternelle en lecture
mais aussi en écriture. Des frustrations se sont fait sentir chez certains élèves qui n’ont pu
proposer une traduction complète, bien qu’un de leurs parents parle une seconde langue à la
maison (italien, espagnol et allemand). Des mots ont dû être traduits pour permettre à ses
élèves d’assouvir leur désir de faire partager leurs connaissances.
Remarques personnelles sur le déroulement de la séance 2 :
E.B : Pour commencer, j’ai demandé aux enfants ce qu’ils avaient retenu de la dernière
séance. Plusieurs élèves ont pris la parole spontanément : « on a écrit une phrase dans
plusieurs langues », « on a appris des mots dans différentes langues », « on a lu un poème
turc »… C’est à ce moment-là, que des élèves qui s’étaient renseignés auprès de leur famille,
ont voulu modifier des éléments dans les phrases qui avaient été inscrites au tableau.
J’ai proposé ensuite, à certains de lire le poème turc. Plusieurs élèves se sont prêtés au jeu,
la lecture du poème s’est faite entièrement sans véritablement poser de problème. Cette
situation les a fait cependant beaucoup rire car ils se doutaient, après les quelques mots lus par
l’ENA lors de la première séance, que leur prononciation n’était pas exacte. Ceci a été
confirmé lorsque cette dernière a effectué ensuite une lecture magistrale du poème.
Cette activité autour d’une autre langue s’est finalisée par l’élaboration collective d’un
poème traduit en turc. Après l’analyse du poème initial, les élèves rassemblés en quatre
groupes ont dû élaborer une strophe du nouveau poème. Chaque strophe devait reprendre la
structure répétitive du poème de départ, et pour faciliter leur mise en activité, étant donné que
nous n’avions que deux séances pour mener à bien notre projet, j’ai imposé l’amorce des trois
Mis en forme : Retrait :Première ligne : 0 cm
Supprimé :
Supprimé : 2:
35
vers. Ils étaient cependant libres de choisir le nombre de pieds par vers et la présence ou non
de rimes. Un élève de chaque groupe est venu au tableau lire ce qui avait été écrit. Après
chaque passage, les autres élèves de la classe donnaient leurs avis sur la cohérence du texte et
sur le respect des consignes. Le choix de l’ordre des strophes s’est fait collectivement en
fonction du contenu et de leur ressenti.
Pour voir la vie en rose
Ah si l’on pouvait
Changer
La place de certaines choses…
Comme les fleurs moroses
En parfum de roses
Pour que la vie soit plus rose.
Ah si l’on pouvait
Changer
La place de certaines choses…
Comme la guerre dévastatrice et tueuse
En parfum d’amour
Pour un monde meilleur et plein de paix.
Ah si l’on pouvait
Changer
La place de certaines choses…
Comme les animaux maltraités
En animaux heureux
Pour qu’ils soient libres de se promener dans la forêt.
Ah si l’on pouvait
Changer
La place de certaines choses…
Comme les visages pleins de haine
En pétales de roses
Pour rendre les gens plus gais.
Les élèves de la classe de CM1/CM2
Solmuş çok çiçek için
Keşke yerini
Değiştire bilseydik
Bazi şeylerin
Solmuş çiçekler gibi
Gül kokulu
Solmuş çok çiçek için.
Keşke yerini
Değiştire bilseydik
Bazi şeylerin
Yikici ve öldürücü savaşlar gibi
Sevgi kokulu
Güzel bir dünya ve bariş için
Keşke yerini
Değiştire bilseydik
Bazi şeylerin
Bakimsiz hayvanlar gibi
Mutlu hayvanlar
Özgürce ormanda dolaşmak gibi
Keşke yerini
Değiştire bilseydik
Bazi şeylerin
Sevimsiz yüzler gibi
Yapraksiz gül gibi
Insalara mutluluğu gerivermek için
36
Pendant ce temps, l’ENA est partie avec Anne-Laure traduire le début du poème en turc. Il
a été difficile de lui expliquer certains mots en français et il a fallu recourir à l’utilisation d’un
imagier ainsi que d’un traducteur de mots turc en ligne, rendu possible par la présence d’un
ordinateur relié à Internet dans la classe.
L’ENA a pratiquement pu traduire le poème dans sa globalité et l’a lu à ses camarades.
Pour finir de compléter le poème ainsi obtenu et s’assurer de l’exactitude de son contenu,
nous avons fait appel à une traductrice turque.
Je leur ai ensuite distribué un questionnaire écrit (cf. annexe 12), de manière à voir ce que
les enfants avaient retenu de ces deux séances, et afin qu’ils évoquent pour certains, et
s’interrogent pour d’autres, sur les difficultés que pouvait vivre un élève arrivant sur notre sol.
Pour finir, un rappel sur les spécificités de cette langue a été fait, avec l’appui de l’affiche
récapitulative élaborée lors de la séance précédente.
Analyse de la séance 2 :
La seconde séance qui s’est déroulée une semaine plus tard, a été l’occasion de demander
aux élèves ce qu’ils avaient retenu de leurs découvertes. Aussitôt, des élèves sont intervenus
pour dire qu’ils s’étaient renseignés auprès de leurs parents, sur l’écriture ou la traduction de
certains de mots. Ainsi, des corrections ont pu être apportées dans l’écriture du verbe
conjugué en Wolof et de nouvelles traductions, comme l’italien, sont apparues. Nous avons
pris conscience, à travers cette attitude, de l’impact qu’avait engendré l’activité proposée et de
l’enthousiasme qu’elle avait suscité chez les élèves.
Les tentatives de lecture du poème turc par différents élèves de la classe leur ont permis
de se confronter aux difficultés de cette tâche. Bien que le turc possède le même système
alphabétique que le nôtre, les élèves ont vite constaté qu’il contenait des signes absents de
notre alphabet ou présents sur d’autres lettres. C’est le cas des trémas sur le « u », que l’on ne
retrouve pas sur cette lettre dans notre langue et qui vont permettre en turc, de distinguer le
son [u] du son [y]. Par exemple le mot « kuslarin », qui signifie « oiseau » doit se lire
« kouslarin ». Après avoir mis en évidence quelques erreurs, l’ENA a proposé une lecture du
poème qui fut l’occasion d’écouter les sonorités spécifiques à cette langue. Ce moment a été
marqué par une grande qualité d’écoute de la part de ses pairs.
L’écriture des strophes du poème s’est bien déroulée et a permis de mener à bien le projet
d’écriture collective. L’envie s’est fait ressentir dans les différents groupes, de parler des
valeurs universelles de paix et d’espoir. Le contenu du poème de départ et l’étude d’une autre
37
langue et donc d’une autre culture ont certainement contribué à cette rédaction. Les enfants se
sont rassemblés à travers des idées, quelles que soient leurs origines.
Le questionnaire distribué en fin de séance, a été l’occasion pour les enfants de mettre en
mots leur ressenti face à l’activité mais également de se projeter plus loin, en se mettant à la
place de l’ENA. Les élèves ont estimé que l’apprentissage du français (parler et comprendre)
et le fait de devoir quitter ses proches seraient particulièrement difficiles pour eux. L’ENA a
précisé dans son questionnaire qu’elle avait emporté des livres turcs, ce qui laisse penser
qu’ils répondent à un réel besoin d’y retrouver sa langue et sa culture.
La volonté des élèves d’apprendre le poème réalisé en turc, a traduit leur enthousiasme
face à l’activité et a confirmé notre hypothèse qui consistait à mettre en avant les compétences
de l’élève nouvellement arrivée en France, par la découverte d’une langue étrangère.
Synthèse :
Les objectifs visés par ces séances ont pu être atteints, les élèves ont développé une réelle
empathie vis-à-vis de leur camarade. A travers plusieurs activités (lecture du poème,
traduction des phrases, création des strophes), ils ont touché du doigt les efforts que doit
fournir chaque jour l’ENA pour participer à la classe et se faire accepter. Ce dispositif a été
d’autant plus enrichissant du fait de la multiplicité des cultures en présence dans cette classe
et son impact en a été d’autant plus fort, beaucoup d’élèves avaient vécu cette situation
(anciens ENA) et se sentaient concernés.
Prolongements possibles :
Il aurait été possible de poursuivre le travail débuté par différentes activités :
- traduire le poème dans d’autres langues, - s’enregistrer en lisant dans une langue différente de la sienne, - écouter des poèmes dits dans d’autres langues, - réaliser une exposition sur différents pays en travaillant autour de leurs spécificités
culturelles (langue, gastronomie, situation géographique, système scolaire, art…).
Toutes ces pistes de travail ne constituent en aucun cas une liste exhaustive de ce qu’il est possible de
mettre en place lorsqu’on accueille un ENA, cependant elles montrent les éléments essentiels qui doivent être
pris en compte pour faciliter son intégration dans la classe. Les maîtres mots sont « jeu », « échanges »,
« interculturalité » et « passerelles dans les apprentissages ».
Supprimé : ’Ilknhur
Supprimé :
38
CONCLUSION
A travers ce mémoire, nous avons souhaité analyser tous les paramètres pouvant
intervenir dans l’intégration scolaire et sociale d’un élève nouvellement arrivé en France. Il
nous semble avéré que le futur de ces enfants soit conditionné par l’ensemble de ces facteurs.
Pour entrer dans les apprentissages un enfant doit être « libéré » des soucis extérieurs liés à sa
migration, c’est pourquoi il faut tenir compte de son vécu personnel, de manière à lui offrir un
espace de confiance, d’acceptation et d’individualité adapté.
Le rôle de l’enseignant et le regard qu’il porte sur cet enfant sont primordiaux. Bien que
toute l’équipe éducative soit impliquée, il reste la personne de référence au contact de laquelle
l’enfant progresse. Il n’est pas surprenant que les enseignants éprouvent des inquiétudes et se
sentent démunis face à l’accueil de ces enfants, cependant il existe de la documentation
pédagogique permettant d’organiser rapidement une première structuration des
apprentissages.
De plus, tout ce qui est mis en place en classe va être source de multiples interactions
intenses et riches. Cette arrivée inopinée va apporter un épanouissement de grande qualité à
l’ensemble de la classe, aussi bien aux élèves qu’à l’enseignant. Des valeurs essentielles de
notre école et de notre citoyenneté prennent place dans la classe : tolérance, acceptation de la
différence, entraide, échanges culturels…Il se développe ainsi une curiosité et une ouverture
aux autres qui permettent aux enfants d’apprendre à vivre ensemble.
Mis en forme : NonSurlignage
Supprimé : ,
Supprimé : b
Supprimé : ,
39
BIBLIOGRAPHIE 1. Extraits - BOYZON-FRADET Danielle, mars 1997, « Enseigner-apprendre la langue scolaire, un enjeu fondamental pour les enfants issus de l’immigration » dans Question de langue n° 108, Centre National de Documentation Pédagogique, p.70 à 73. - BAUTIER Elisabeth, mars 1997, « Usage identitaires du langage et apprentissage, quel rapport au langage, quel rapport à l’écrit ? » dans Question de langue n° 108, Centre National de Documentation Pédagogique, p.7. - DERUGUINE Nathalie et RAFONI Jean-Charles, 2003, « Evaluation-lecture en langue d’origine cycle II et III » dans Passerelles en quinze langues, Les cahiers Ville Ecole Intégration, SCEREN, Centre National de Documentation Pédagogique, p.105. - LAZARIDIS Marie, juin 2001, « La scolarisation des enfants de migrants : entre intégration républicaine et mesures spécifiques » dans Accueillir les migrants n°125, Centre National de Documentation Pédagogique, p.198. - TROUBETZKOY N.S, 1986, dans Principes de Phonologie, Klincksieck, Paris, p.54. 2. Ouvrages - Bulletin Officiel France. Ministère de l’Education Nationale, « Scolarisation des nouveaux arrivants et des enfants du voyage », 25.04.2002. Bulletin Officiel du Ministère de l’Education Nationale n°10 spécial du 25.04.2002. - CHARPENTIER Monique, (IA de Strasbourg) 1995, « Comparaison des systèmes France/Turquie » dans Mieux connaître pour mieux scolariser, ONISEP Alsace. 3. Documents électroniques, extraits de site Internet - LECLERC Jacques, 15 novembre 2005, « Turquie » dans L’aménagement linguistique dans le monde [en ligne], Québec, TLFQ, Université Laval. Le 25.01.2006. Disponible sur Internet : http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/asie/turquie-alphabet.htm - LECLERC Jacques, 15 novembre 2005, «La révolution linguistique de Mustafa Kemal Atatürk » dans L’aménagement linguistique dans le monde [en ligne], Québec, TLFQ, Université Laval. Le 25.04.2006. Disponible sur Internet : http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/asie/turquie-alphabet.htm - NEGRE Xavier, 3 décembre 2002, « L’alphabet arabe » dans Lexilogos, mots et merveilles des langues d’ici et d’ailleurs [en ligne], France, près de la Vieille Chapelle de la cité phocéenne Massalia. Le 24.01.2006. Disponible sur Internet : http://www.lexilogos.com/arabe_alphabet.htm
Mis en forme : NonSurlignage
Mis en forme : Soulignement
Supprimé :
Supprimé : date
Supprimé : ¶
40
- Association Chinois.org, dirigée par Danièle THERY, 16.01.2006. « Sinogrammes » dans Des clés pour la chine [en ligne], Biarritz, France. Le 25.01.2006. Disponible sur Internet : http://perso.numericable.fr/~jtheryjean37/dt.chine/public/pages/ideo.htm 4. Support multimédia - AUGER Nathalie, 2005, « Démarche d’apprentissage du français auprès d’enfants nouvellement arrivés (ENA) » dans Comparons nos langues [DVD], Montpellier, France SCEREN.
Supprimé : e
Supprimé : ¶
Supprimé :
Supprimé :
41
TABLE DES ANNEXES
Annexe 1 : Alphabets de différentes langues
Illustration 1° partie « Le choc de l’arrivée », contexte linguistique (4)
- Alphabet chinois
- Alphabet turc
- Alphabet arabe
Annexe 2 : Correspondance des classes en France et en Turquie
Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », les structures d’accueils (1 b)
Annexe 3 : Evaluation de compétences en lecture en langue d’origine, cycle 3
Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », les structures d’accueils (1 b)
Annexe 4 : Tableau des premières consignes
Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », les structures d’accueils (1 b)
Annexe 5 : Documentation pédagogique fournie par le CASNAV
Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », les structures d’accueils (1 c)
Annexe 6 : Rencontre avec un membre de l’association A.V.E.C.
Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », démarche personnelle de l’enseignant (2 a)
Annexe 7 : Questionnaire « prise de contact » avec l’ENA
Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », démarche personnelle de l’enseignant (2 b)
Annexe 8 : Fiche de liaison 2005/2006
Illustration 2° partie « Le rôle de l’école », démarche de toute une équipe pédagogique (3)
Annexe 9 : Poème turc traduit en français Illustration 3° partie « Mise en place de pratiques pédagogiques », mise en application (2 d)
42
Annexe 10 : Fiches de préparation
Illustration 3° partie « Mise en place de pratiques pédagogiques », mise en application (2 d)
Annexe 11 : La réforme de l’alphabet turc
Illustration 3° partie « Mise en place de pratiques pédagogiques », mise en application (2 d)
Annexe 12 : Questionnaire donné aux élèves à l’issue des séances interculturelles
Illustration 3° partie « Mise en place de pratiques pédagogiques », mise en application (2 d)
43
ANNEXE 1 : Alphabets de différentes langues
L’alphabet chinois
L’alphabet chinois n’est pas un alphabet au sens où nous l’entendons. L’écriture de la langue se fait à l’aide de signes que l’on appelle des sinogrammes, et dont la signification ne change pas, même si la prononciation peut varier suivant les régions. Il existe 50 000 sinogrammes qui s’écrivent à l’aide de 8 traits de base; ils sont répartis en 3 groupes :
-Les pictogrammes
Ce sont des dessins stylisés de la réalité.
Par exemple, le pictogramme « MU » évoque un arbre et ses branches, il signifie arbre.
Ils peuvent entrer dans la composition de signes plus complexes formant ainsi des clés ou
des radicaux, à la base de toutes les écritures et donnant des indications sur la « famille de mots ».
Par exemple, les mots liés aux arbres ou au bois comprendront en général cette clé : « LI » = Prunier « BAN » = Planche
- Les idéogrammes
Ils sont composés de plusieurs pictogrammes et traduisent une idée, un concept. « LIN » qui signifie Forêt s’écrit
-Les idéophonogrammes
Ils donnent une indication graphique du son.
Par exemple « Se laver les cheveux » qui n’a qu’un très lointain rapport avec les arbres, se prononce aussi « MU » et s’écrit
Un élève chinois arrivant en France doit donc faire face à un nouveau codage écrit très différent tant du point de vue du geste graphique, que du point de vue du concept lui-même. La notion de combinatoire de notre système n’est donc pas acquise auparavant. (Bibliographie : association Chinois.org, 16.01.2006)
44
L’alphabet turc L’alphabet Turc est composé de 29 lettres dont 6 voyelles avec un codage graphique identique au nôtre. Il présente de nombreuses correspondances avec l’alphabet français, il s’écrit cependant plus simplement, la plupart du temps comme il se prononce. Il existe quelques différences : - certaines lettres ne se prononcent pas comme la lettre homologue française ; - trois lettres françaises n’existent pas (q, w, x) leur phonie est assurée par d’autres lettres (k, v, ks) ; - certaines lettres possèdent un signe diacritique (tréma, cédille, « vague ») qui modifie leur prononciation classique.
Lettre turque Prononciation française Exemple Prononciation
a b c ç d
[a] [b] [dj] [tch] [d]
araba bir cicim çam doktor
araba bir djidjim tcham doctor
e f g ğ h
[é] [f] [g] allonge la voyelle précédente[h]
televizyon Fakir galip sağol lahana
télévisionn(e) fakir galip sa:aol lahana
i ι (i sans point) j k l
[i] [ë] dans peur[j] [k] [l]
iki rakι Jale topkapi lavabo
iki rake Jalé topkapeu lavabo
m n o ö p
[m] [n] [o] [eu] dans peu[p]
mimare nema otel döner pamuk
mimaré néma hôtel deunèr pamouk
r s ş t
[r] [s] [ch] [t]
radar sarik şişe tuz
radar sarik chiché touz
u ü v y z
[ou] [ü] dans flûte[v] [ill] [z]
pul Ürgüp vapur kuyum Zürafa
poul Urgup vapour kouilloum Zurafa
Un enfant Turc arrivant en France aura des facilités à entrer dans la lecture (aspect
combinatoire) et l’écrit (geste graphique, codage oral) mais aura plus de difficultés lors de l’oralisation à cause des différences de prononciations à mémoriser. Cependant de nombreuses compétences en lecture et écriture pourront être directement transférées de la langue maternelle. (Bibliographie : Leclerc Jacques, 15.11.2005)
Tableau mis en forme
Supprimé : .
Supprimé : .
45
L’alphabet arabe L’alphabet arabe comporte 28 lettres, mais il ne dispose, en réalité, que de quinze caractères. Il possède treize consonnes et trois voyelles différentes : les voyelles brèves, les voyelles doubles et les voyelles longues. Les principales différences avec le français: - l’arabe s’écrit de droite à gauche, - sept lettres n’existent pas (o, p, u, v, w, x, y),
- une même lettre peut s’écrire de différente façon selon sa place dans le mot :
Par exemple : la lettre ( a )
toute seule
au début du mot
au milieu du mot
à la fin du mot
Un enfant arabe, arrivant en France, aura des facilités à entrer dans la lecture (aspect
combinatoire, plusieurs graphèmes pour un phonème) mais il rencontrera des difficultés liées au sens de l’écriture et de la lecture (de la droite vers la gauche) et à l’absence de correspondance exacte entre les phonétiques romanes et arabes.
Lettre ر ذ د خ ح ج ث ت ب ا
Appellation Alif Baa’ Taa’ Thaa’ Jiim Haa’ Khaa’ Daal Dhaal Raa’
Phonétique [A] [B] [T] [Th] [J] [H] [Kh] [D] [Dh] [R]
Lettre ف غ ع ظ ط ض ص ش س ز
Appellation Zaay Siine Chiine Saad Daad Taa’ Dhaa’ ‘Aïn Ghaïn Faa’
Phonétique [Z] [S] [Ch] [Ss] [Dd] [Tt] [Dh] [‘A] [Gh] [F]
Lettre ء ي و ه ن م ل ك ق
Appellation Qaaf Kaaf Laam Miim Noun Haa’ Waawe Yaa’ Hamza
Phonétique [Q] [K] [L] [M] [N] [H] [W] [Y] [A] Mis en forme : Couleur depolice : Automatique
Supprimé : :
46
ANNEXE 2 : Correspondance des classes en France et en Turquie
47
ANNEXE 3 : Evaluation de compétences en lecture en langue d’origine, cycle 3
48
ANNEXE 4 : Tableau des premières consignes
49
ANNEXE 5 : Documentation pédagogique fournie par le CASNAV
50
51
52
53
ANNEXE 6 : RENCONTRE AVEC UN MEMBRE DE L’ASSOCIATION A.V.E.C (Association Vivre Ensemble dans le quartier des Cévennes)
L’association A.V.E.C. du quartier des Cévennes, propose différentes aides aux
familles arrivant de l’étranger et qui ont donc des besoins spécifiques et immédiats. Nous avons rencontré Mme Eliette CADENAT, travaillant au sein de cette association.
Quels sont les types de prestations proposés par l’association ? Il existe plusieurs aides diversifiées, destinées aux adultes et aux enfants : - accompagnement scolaire, - activités de loisirs type « centre aéré » les mercredi, samedi et vacances scolaires, - alphabétisation, - français langue étrangère (F.L.E.), - accueil au sens large : aide aux démarches administratives (remplissage des
formulaires), accompagnement dans les diverses administrations concernées (mairie, préfecture, sécurité sociale), accompagnement auprès de professionnels (assistantes sociales, avocats).
Par quel biais les familles sont-elles informées de l’existence de l’association ?
Lors de l’arrivée des familles sur le sol français, il existe un centre d’accueil qui informe les migrants des associations proches de leur domicile ; il existe plusieurs associations disséminées au sein des quartiers de la ville. Cependant, A.V.E.C. se fait essentiellement connaître par des affiches publicitaires et « le bouche à oreille ». Quelles sont les principales attentes des personnes qui viennent à l’association ?
La principale aide concerne l’apprentissage de la langue française, mais beaucoup de familles demandent également l’aide aux élèves en difficulté : elles ne sont pas capables de suivre la scolarité (aide aux devoirs) de leurs enfants en français. Y a-t-il un lien entre l’association et l’école des enfants qui suivent l’accompagnement scolaire ?
Oui, un membre de l’association accompagné des parents peut être amené à rencontrer le ou les enseignants d’un enfant en difficulté, de manière à comprendre ses besoins et à savoir comment l’aider au mieux. Ce fut le cas, il y a peu de temps, pour un collégien dont la rencontre avec le principal de son établissement a permis de débloquer une situation. Quels sont les tarifs de ces prestations ?
L’association fonctionne en partie grâce aux subventions de la mairie et du département et en partie grâce aux montants des adhésions. La participation individuelle est versée pour l’année ; à titre d’exemple, la cotisation annuelle pour les cours d’alphabétisation est de 20 euros ; pour le français langue étrangère, elle est de 30 euros et pour l’accompagnement scolaire, il faut compter 8 euros par enfant. Les sorties proposées dans le cadre des vacances scolaires sont soumises à une participation effective. Qui fréquente les différentes activités ?
Les cours d’alphabétisation sont donnés exclusivement aux femmes qui ne souhaitent pas la présence des hommes pour cet apprentissage. Les cours de F.L.E sont quant à eux mixtes.
Supprimé : €00
Supprimé : , celle
Supprimé :
Supprimé : de
Supprimé : €00
Supprimé : celle
Supprimé : de
Supprimé : €00
54
ANNEXE 7 : Questionnaire « prise de contact » avec l’ENA
55
ANNEXE 8 : Fiche de liaison 2005/2006
56
ANNEXE 9 : Fiches de préparation
Comparons nos langues Place dans les Instructions Officielles : Deux domaines sont concernés :
- Littérature : écrire un texte poétique à partir de la littérature (dire, lire, écrire), - Education civique : s’ouvrir au monde en apprenant l’existence d’une communauté de
langues et de cultures.
Séance 1
Objectifs :
- L : dégager la structure récurrente du poème, - EC : comparer des langues pour découvrir l’existence de différents systèmes
linguistiques. → Compétences : - s’appuyer sur ses connaissances en français pour reconnaître un type d’écrit (ici un
poème à partir de la mise en page, du titre, de l’auteur et de la structure répétitive) écrit dans une autre langue,
- associer des mots qui veulent dire la même chose dans différentes langues (français, turc et arabe),
- utiliser ses observations pour analyser la syntaxe spécifique aux trois langues : utilisation des déterminants et genre des noms, place du verbe dans la phrase.
Déroulement :
1. Rôle de l’enseignante : distribution du texte turc ► Activités des élèves : les élèves lisent individuellement et silencieusement le document. 2. Observation des questions écrites au tableau : - Qu’est ce que ce texte ? (ex : une recette de cuisine ? un conte ?...) - A quoi le vois-tu ? - Comment est-il écrit ? (code, signes, langue ?) - Que raconte-t-il ? (seule l’ENA aura la réponse attendue) ► Ils répondent au questionnaire individuellement sur le cahier de brouillon. 3. Mise en commun, réponse aux questions 4. Distribution de la traduction française
- validation des hypothèses de lecture « Retrouvez la traduction française d’un mot turc qui revient plusieurs fois dans le texte. » ► Comparer les textes pour établir des correspondances et dégager la structure répétitive.
15 min
10 min
Mis en forme : Non souligné
Mis en forme : Non souligné
Mis en forme : Non souligné
Supprimé : :
57
5. Ecriture d’une phrase relativement simple du poème (sujet/verbe/complément) au
tableau en français et en turc. ► Venir entourer au tableau d’une même couleur les couples de mots identiques Se rendre compte de certaines différences :
− position des mots dans la phrase. − absence de déterminant.
6. Demander si quelqu’un est capable de venir nous proposer une traduction dans une
autre langue (l’arabe est attendu étant donné l’origine des élèves de la classe) ► Ecriture de la phrase de référence en arabe au tableau Poursuite de la comparaison. 7. Synthèse : réalisation d’une affiche commune de classe contenant les points communs
et les différences des trois langues. ► Proposer ses idées, discuter. Matériel : - 23 photocopies du poème turc et traduit en français. - 1 transparent pour projeter au tableau. - questionnaire écrit au tableau. - une affiche pour la synthèse. ► cahier de brouillon. cahier de littérature (pour coller les poèmes). Support utilisé : - Poème turc d’Üzeyir Lokman ÇAYCI , traduit en français par Yakup YURT : « LE SOLEIL EST NÉ POUR LA TRISTESSE » Observations : - Hypothèses émises par les enfants : poésie ou chanson - Question orale posée spontanément par un enfant de la classe à l’ENA : « Est-ce qu’on lit le turc de droite à gauche, ou de gauche à droite ? » - Un silence total survient lorsque l’ENA écrit la phrase de référence au tableau. - D’autres enfants ont spontanément proposé la traduction dans leurs langues maternelles : l’arabe (transcrit phonétiquement à l’aide de notre alphabet), le wolof (dialecte sénégalais) et le guinéen (Nouvelle Guinée).
20 min
15 min
Mis en forme : Non souligné
Mis en forme : Non souligné
Mis en forme : Non souligné
Supprimé : p
Supprimé : :
Supprimé : Ilknhur
58
Séance 2 Objectifs :
- L : Ecriture collective d’un poème « à la manière de », en 2 langues, - EC : Participer à l’élaboration d’une production interculturelle.
Partager nos cultures, échanger nos connaissances.
→ Compétences : - s’engager dans une production collective - être capable de réinvestir les connaissances liées au type d’écrit (poème) - apporter ses connaissances en langue maternelle (ENA), pour traduire le poème construit
Déroulement : 1. Rappel : « De quoi vous souvenez-vous à propos du poème de la dernière fois ? Qu’avait-il de particulier ? » « Qu’aviez-vous fait lors de la dernière séance ? » ► Rappel de la structure répétitive, du nom de l’auteur, du titre du poème, de la langue. Rappel de la phrase qui a été traduite dans différentes langues (en turc, en arabe de manière phonétique, en wolof et en guinéen). 2. Lecture silencieuse puis à haute voix du poème turc. ► Des élèves s’essaient à la lecture pour se rendre compte des difficultés liées à la prononciation. ► L’ENA valide (car elle est la seule à connaître le turc) et lit le poème.
3. Contenu du poème « De quoi parle t-il ? » L’explication du contenu n’ayant pas été évoquée lors de la première séance, elle est abordée ici car nécessaire pour la suite du travail. ► Le message transmis par l’auteur: changer les choses pour améliorer la vision du monde. 4. Lancement du projet de la production collective Présentation de la structure répétitive commune à chaque strophe : Ah si l’on pouvait Changer La place des choses et de l’amorce imposée sur 3 vers : Comme…………. En ……………… Pour ……………. Le choix du nombre de pieds par vers est libre. ► Ils peuvent collectivement proposer des exemples. 5. Ecriture du poème ► Par groupes de 4, les élèves élaborent une strophe du poème sur leur cahier de brouillon. élèves en difficultés : proposer des aides à l’écriture construites en amont.
10 min
25 min
10 min
Mis en forme : Non souligné
Mis en forme : Non souligné
Mis en forme : Non souligné
Supprimé : ¶¶¶
Supprimé : ?
Supprimé : :
59
6. Mise en commun Acceptation des productions des différents groupes (présence de la structure répétitive, respect de l’amorce, cohérence du texte). 7. Synthèse : distribution d’un questionnaire écrit :
- « Qu’avons-nous appris depuis le début du travail ? » - « Si tu étais à la place de l’ENA, qu’est-ce qui serait pour toi le plus difficile ? » - « Qu’est-ce que tu aimerais emporter avec toi, si tu devais quitter ton pays origine ? »
► Les élèves s’interrogent sur les difficultés d’arriver dans un nouveau pays et d’être confronté à l’apprentissage d’une nouvelle langue. ► En parallèle, l’ENA commence déjà la traduction du poème. 8. Conclusion collective Rappel des similitudes et des différences entre langue orale et langue écrite. ► l’ ENA nous donne son ressenti sur ses difficultés.
Pour terminer notre travail, nous ferons parvenir le poème dactylographié et traduit en turc à la classe.
Matériel : - 23 questionnaires écrits - 1 transparent pour projeter au tableau les deux poèmes ► cahier de brouillon
Observations :
- Les enfants étaient très demandeurs d’une lecture orale du poème turc par l’ENA, d’ailleurs cet instant a été marqué par un silence important et une totale écoute.
- Certains enfants s’étaient renseignés auprès de leurs parents pour avoir d’autres traductions, notamment en italien.
10 min
5 min
Mis en forme : Non souligné
Mis en forme : Non souligné
Supprimé : ?
Supprimé : ?
Supprimé : ?
60
ANNEXE 10 : Poème turc traduit en français
GÜNES ACILARA DOGDU
Keske yerini Degistirebilseydik Bazi seylerin... Karanfil tasiyan Bakislar gibi,
Kaynagindan akarak...
El degmeden Tüylerine Kuslarin.
Huzur dolu Sabahlara kosarak.
GUI kokularini
Tasisavdik Her yere... Gül yüzlü
Insanlardan ta~arak...
Keske yerini Degistirebilseydik Bazi seylerin...
Üzeyir Lokman ÇAYCI
LE SOLEIL EST NÉ POUR LA TRISTESSE
Ah si l'on pouvait
Changer La place de certaines choses...
Comme les regards Porteurs d'oeillets,
En coulant de source...
Sans toucher de la main Le plumage
Des oiseaux... En courant vers les matins
Pleins de paix.
Ah si l'on pouvait Diffuser partout
Les parfums de roses... En débordant des gens
A visages en rose...
Ah si l'on pouvait Changer
La place de certaines choses...
Üzeyir Lokman ÇAYCI Traduit par Yakup YURT
Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶¶
61
ANNEXE 11 : La réforme de l’alphabet turc
Après l'effondrement de l'Empire ottoman en 1918, Mustafa Kemal Atatürk prit le pouvoir
en Turquie en 1920 […] et entreprit une politique de modernisation et de laïcisation de l'État
[…]. L'un des volets de la politique de modernisation porta le nom turc de Dil Devrimi, c'est-
à-dire la « révolution linguistique ». Farouchement moderniste, Atatürk considérait comme
révolu l'époque des empires fondés sur une base religieuse et refusait la magistrature suprême
de l'islam sur son pays [...]. Mustafa Kemal considérait également que la réorganisation de
l'État turc devait passer par un changement linguistique radical. Or, l'histoire compte peu
d'exemples de ce genre où un gouvernement a entrepris des changements linguistiques d'une
aussi grande envergure dans un délai aussi court et, il faut le reconnaître, avec autant de
succès. Durant l'Empire ottoman, la langue turque avait subi l'influence massive de l'arabe
classique et du persan. L'élite dirigeante conduisait les affaires de l'Empire dans une langue
turque savante et envahie de mots arabes et persans, appelée «turc ottoman». L'arabe était
resté la principale langue de la religion et de la loi coranique, le persan était la langue des arts,
de la littérature (la Dîvan) et de la diplomatie. Le turc parlé par le peuple, synonyme de
«grossièreté» et de «rusticité», n'était réservé qu'à des fins administratives locales […].
Soulignons aussi que l'alphabet utilisé jusque là transcrivait assez mal la langue turque dans la
mesure où, par exemple, l'alphabet arabe ne permettait de noter que trois voyelles, alors que le
turc comptait huit voyelles brèves et trois longues. La plupart des lettrés étaient conscients de
la situation, mais il leur semblait impossible de pouvoir modifier un système graphique qui
avait servi à transcrire le Coran. Jusqu'en 1927, des discussions eurent lieu afin d'adapter
l'alphabet arabe à la langue du quotidien des Turcs (le turc) en lui ajoutant quelques signes
pour les voyelles.
En 1928, Mustafa Kemal mit tout son poids dans la balance et créa une «commission
linguistique» dont le mandat fut d'élaborer un alphabet turc adapté de l'alphabet latin et de
«purifier» le vocabulaire […]. Le but visé était d'élaborer un système d'écriture qui serait plus
turc et moins arabe (ou persan). Il fallait en faire une langue plus moderne et plus précise,
pratique et moins difficile à apprendre. En réalité, l'adoption de l'alphabet latin avait
également comme objectif d'insister sur le caractère moderne et de minimiser l'influence des
conservateurs religieux, responsables pour Atatürk, de la décadence de la Turquie.
Le 1er novembre 1928, […] la loi entrait immédiatement en vigueur dans toutes les écoles. Le
1er décembre de la même année, les journaux, revues, affiches, enseignes, cinémas, etc.,
Supprimé : ¶¶¶¶¶
62
devaient utiliser le nouvel alphabet. Devaient suivre dès le 1er janvier 1929 la correspondance
dans toute l'administration publique, les banques, les sociétés commerciales, les livres, etc.
Enfin, au 1er juin 1929, il ne restait plus que les actes de l'état civil, les documents du cadastre
[…]. Pendant ce temps, avec une craie et un tableau portatif, Mustafa Kemal parcourut tout le
pays en donnant lui-même des leçons d'écriture de l'alphabet latin moderne dans les écoles,
les places publiques… L'ancien alphabet disparut d'autant plus vite que l'enseignement de
l'arabe et du persan dans les écoles fut tout simplement interdit […].
Parallèlement, Mustafa Kemal procéda à une grande épuration des tournures arabo-
persanes et surtout du lexique envahi de mots arabes et persans […]. Il s'agissait de remplacer
le vocabulaire arabo-persan, d'une part (prioritairement), par un vocabulaire d'origine turque,
d'autre part, d'intégrer des mots provenant des langues occidentales […]. Le Parlement avait
adopté une loi obligeant les citoyens à prendre un nom d'origine turque: c'est alors que
Mustafa Kemal, afin de donner l'exemple, prit le patronyme d'Atatürk, le «Père des
Turcs». Le mot ottoman fut banni du vocabulaire officiel et fut remplacé par le mot turc
jusqu'alors dévalué et synonyme de «paysan» […]. Le turcologue Louis Bazin résume ainsi
ces modifications:
1) Suppression de mots anciens arabo-persans sortis de l'usage […]. 2) Création de néologismes par dérivation de mots turcs […]. 3) Création de néologismes par composition […]. 4) Emprunts aux langues occidentales […].
Les questions linguistiques continuent encore aujourd'hui de faire partie des «actualités
politiques» en Turquie. Depuis la mort d'Atatürk en 1938, chaque décennie amène ses
discussions, à savoir s'il faut favoriser un lexique plus traditionnel ou plus moderne. La
société d'études de la langue turque a perdu son statut semi-officiel en 1950 et plusieurs mots
arabes et persans ont recommencé à réapparaître dans les publications gouvernementales.
D'ailleurs, le domaine religieux n'a jamais été réellement affecté par la réforme linguistique.
Les publications religieuses ont continué d'employer un discours qui est encore aujourd'hui
lourdement arabe ou persan dans le vocabulaire et très persan dans la syntaxe. Depuis 1990,
l'apparition de mouvements religieux populaires a abouti à la réintroduction de nombreux
termes islamistes utilisés dans la langue turque […]. Toutefois, il faut admettre que cette
réforme linguistique a favorisé un rapprochement indéniable de l'oral et de l'écrit et, par voie
de conséquence, à l'élimination de l'analphabétisme. (Bibliographie: Leclerc Jacques, 15.11.2005)
63
ANNEXE 12 : Questionnaire donné aux élèves à l’issue des séances interculturelles
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Supprimé : ¶¶¶¶¶¶¶¶
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Mis en forme : Gauche
Supprimé : ¶
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Supprimé : ¶