methode d equitation baucher 1874

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METHODE D'ÉQUITATION BASEE SUR DE NOUVEAUX PRINCIPES F. BAUCHER QUATORZIEME EDITION BEVUE ET AUGMENTEE Atbc portrait de l'Auteur et 16 planches. PARIS LIBRAIRIE MILITAIRE DE J. DUMAINE LIBRAIRE-ÉDITEUR RUE ET PASSAGE DAUPHINE, 30 1874

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  • METHODE

    D'QUITATIONBASEE SUR DE NOUVEAUX PRINCIPES

    F. BAUCHER

    QUATORZIEME EDITIONBEVUE ET AUGMENTEE

    Atbc portrait de l'Auteur et 16 planches.

    PARISLIBRAIRIE MILITAIRE DE J. DUMAINE

    LIBRAIRE-DITEURRUE ET PASSAGE DAUPHINE, 30

    1874

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  • METHODE

    D'QUITATION

  • Paris. Imprimerie J. Dumaine, rue Christine, 2.

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  • MTHODE

    D'QUITATIONBASE SUR DE NOUVEAUX PRINCIPES

    PAR

    F. BAUGHER

    QUATORZIME DITIONREVUE ET AUGMENTE

    Atbc portrait de l'Auteur et 16 planches.

    PARISLIBRAIRIE MILITAIRE DE J. DUMAINE

    LIBRAIRE-DITEURRUE ET PASSAGE DAUPHINE, 30

    1874

  • PREFACE

    L'homme a reu du Crateur une intelligence su-prieure celle des animaux, non pour les asservir ses caprices et leur infliger des mauvais traitements,

    mais pour en recevoir tous les services qu'il est en

    droit de leur demander. Le cheval, ce noble ani-mal, est peut-tre celui dont l'homme a le plusabus, et les moyens dont on s'est servi pour le

    soumettre trahissent l'ignorance autant que la bru-

    talit. Ds ma jeunesse j'aimai le cheval, et, frappde l'incertitude des principes noncs par tous les

    auteurs qui ont crit sur l'quitation, je cherchai ouvrir une voie nouvelle et sre tous ceux qui

    s'occupent de l'ducation du cheval. En 1830 jefis paratre le Dictionnaire raisonn cquitation. La

    faveur du public me rcompensa de mes laborieuses1

  • recherches, et m'encouragea persvrer clans mes

    efforts. Quelques annes plus tard parut ma nou-velle Mthode, qui souleva dans le monde questre,d'une part un grand enthousiasme, de la part de

    quelques-uns une critique passionne trop passion-

    ne pour tre impartiale. Treize ditions se succ-drent en vingt-cinq ans, mes ouvrages furent tra-

    duits dans plusieurs langues, et partout les amateurs

    et les officiers intelligents adoptrent mes principes.

    J'ai dj dit les causes qui avaient empch ma m-thode d'tre introduite dans la cavalerie franaise,

    malgr l'avis presque unanime de MM. les officiersconsults.

    Que ma plume se taise sur ce triste pass!Ma Mthode permettait de donner tous les

    chevaux l'quilibre du deuxime genre, et les vingt-six chevaux que j'ai monts en public en ont tla preuve incontestable. Avec mes dernires inno-

    vations, je donne non-seulement une plus grandefacilit pour obtenir sur tous les chevaux cet qui-

    libre du deuxime genre, je donne encore lesmoyens infaillibles d'obtenir chez tous les chevaux

    une lgret constante, signe d'un quilibre parfait.

    C'est cet quilibre que j'appelle quilibre du pre-mier genre.

    Le premier quilibre suffit tous les besoins dela cavalerie et de l'quitation ordinaire.

    L'quilibre parfait, ou quilibre du premier

  • 3

    genre, ne pourra tre donn au cheval que parl'lite des cavaliers. Ce sera l'equitation transcen-dantale. En posie, dans les arts, dans les sciences,il n'est pas permis tout le monde d'aller Corinthe !

  • DERNIRES INNOVATIONS

    Depuis quarante ans que je m'occupe de l'art dedresser les chevaux, j'ai toujours compris quel'unique problme rsoudre par l'cuyer tait deparfaire l'quilibre naturel du cheval, et les re-cherches de toute ma vie n'ont eu d'autre but quede rendre plus facile la solution du problme. Cha-cune des treize ditions de la mthode renferme unnouveau progrs qui simplifie le travail de l'cuyer.A tous les instruments de torture employs prc-demment, je substituai d'abord le mors qui portemon nom

    ; plus tard, je le remplaai par un morsplus doux encore, aux branches plus courtes et sansgourmette ; enfin, aujourd'hui je ne me sers plusque d'un simple bridon. Qu'on n'aille pas croireque ce bridon, nouveau par sa disposition, possdeune vertu magique qui dispense de l'tude de lascience; ce serait une grave erreur! Ce nouveaubridon dmontre le perfectionnement de ma m-thode, l'efficacit des moyens qu'elle prescrit, puis-que avec ce simple frein je puis dompter le cheval

  • 6

    le plus fougueux et le soumettre ma volont.

    Quelque simples que soient les nouveaux moyensque j'indique, ils ne peuvent tre bien compris dansleurs dtails et dans leur ensemble que par uncuyer habile.

    Je dirai donc aux jeunes cavaliers : adressez-vous un professeur imbu de tous mes principes etfamiliaris avec la pratique de ma mthode, luiseul pourra vous rendre facile et sre la route

    parcourir, en vous indiquant ces nuances diverses,

    ces effets multiples de mains et de jambes, ce je nesais quoi que le sentiment peroit, que l'il duprofesseur saisit, mais que l'auteur ne peut crire.Acqurez ainsi la science, apprenez vous servirde ce nouveau bridon, et vous obtiendrez des rsul-

    tats inesprs ; une fois le cheval dress, vous pour-

    rez, si tel est votre bon plaisir, employer la pro-menade le mors que vous prfrez.

    u cSieval es litsert.

    Il n'est personne qui n'ait vu un cheval courant

    en libert dans la prairie. Quelle souplesse, qu'elle

    lgret dans tous ses mouvements! Prenez ce che-

    val, mettez-lui une selle, une bride et cherchez

    l'astreindre votre volont, quelle mtamorphose!

  • Ce cheval qui, en tat de libert, planait au-dessus

    du sol, se trane pniblement, et s'arrte entre vos

    jambes. Pourquoi? Le cheval libre, matre absolude ses forces, dispose son poids comme il l'entend,

    pour excuter ces mouvements si gracieux que nous

    admirons. Ds qu'il est mont par l'homme, il se

    sent gn, paralys dans sa libert; il est forc d'ab-

    diquer sa volont, et il n'est pas encore capable de

    comprendre celle du cavalier. Il existe alors entre

    ces deux volonts un tat transitoire d'incertitude

    qui explique de la part du cheval ces rsistances

    qui dgnrent en dfense sous son cavalier inex-

    priment. Gomment dtruire ces rsistances avant-

    coureurs de la dfense, si le cavalier ignore que la

    cause de toutes les rsistances rside dans le mau-

    vais quilibre du cheval, par suite du dsaccord qui

    existe entre l'avant et l'arrire-main? Les transla-

    tions de poids ne sont faciles qu'autant que le

    cheval demeure droit, c'est--dire que les jambesde derrire soient sur la mme ligne que celle dedevant. Avec le cheval ainsi dispos, la force mo-

    trice peut agir avec galit et simultanit de

    contraction et de dtente. L'effet sera transmis

    de l'arrire-main l'avant-main sans dcomposi-tion de force, et le cheval prendra facilement la

    position utile au mouvement demand. Supposez,au contraire, le cheval ayant la croupe en dehors de

    la ligne des paules, aussitt cesse la juste rparti-

  • 8

    tion du poids, parce que telle partie est trop sur-

    charge, telle autre trop allge; les contractions

    musculaires ne sont plus justes, l'instrument n'est

    plus d'accord, et, au moindre changement de direc-

    tion, la croupe vient faire arc-boutant aux paules,

    et le cheval rsiste. Si le cavalier ne se hte

    de dtruire la cause de ses rsistances en mettant

    son cheval droit, il n'arrivera jamais la lgretparfaite et constante.

    Du sentiment.

    La routine traditionnelle veut que tout cavalier

    qui monte dans le mange suive la piste prs dumur. Je prfre le voir se tracer une piste un

    mtre de distance du mur, afin de m'assurer s'il sait

    maintenir son cheval droit, sans le secours d'un

    guide-ne. De cette manire, le cavalier acquerra,

    outre le sentiment des lignes, ce juste accord quilui permettra de discerner plus facilement la nature

    des contractions, bonnes, si la lgret en est la

    consquence, mauvaise, lorsque les rsistances

    du cheval augmentent au lieu de diminuer. Celui

    qui n'a pas le sentiment des contractions est inca-

    pable de juger la position du cheval, je veux direde sentir si la distribution de son poids est conve-

  • 9

    nable, si la force est harmonise par rapport aumouvement excuter. Il ne peut donc ni prparerla position (1) ni la corriger, ni, par consquent,atteindre le but qu'il s'est propos, amliorer l'qui-libre naturel du cheval en le rendant lger dans tous sesmouvements. Le sentiment se dveloppe par l'exer-cice; l'essentiel est de suivre la progression que

    j'indique et de se pntrer de la vrit du principedont un seul mot exprime les consquences : qui-libre ou lgret.

    De la bouche du cheval.

    Le langage a t donn l'homme pour dissimu-ler sa pense, a dit le prince de Talleyrand. Plus

    loyal que l'homme, le cheval ne peut pas dissimuler

    ses impressions. Est-il content de son cavalier, il

    lui tmoigne sa satisfaction par la mobilit moel-

    leuse de sa mchoire. Surprend-il une faute, un

    oubli (le meilleur cavalier peut se tromper), l'amifidle semble s'attrister; il perd sa lgret, sonenjouement; si le cavalier comprend cet avis donn

    (1) On entend par position la disposition du poids et de laforce du cheval par rapport chaque mouvement qu'il doitexcuter.

  • 10

    voix basse, s'il rpare sa faute, le cheval se hte de

    reprendre son air de gaiet, et, par la mobilit desa mchoire, remercie son matre d'avoir coutl'humble remontrance de son serviteur. Mais lafaute s'aggrave-t-elle, l'ignorance et la vanit d-daignent-elles d'couter les reproches discrets quilui sont adresss, alors le cheval retire sa confiance

    ce matre dont il n'est pas compris ; il cesse toutchange de penses et proteste par le mutisme con-tre l'ignorance de son cavalier. On peut contraindreun esclave marcher, on ne peut l'obliger vous

    tmoigner sa satisfaction.J'ai dit que toutes les rsistances du cheval pro-

    viennent de son mauvais quilibre. A qui la faute?Au cavalier ! toujours au cavalier!

    Le professeur.

    Plus les formules de la science se simplifient,

    plus important devient le rle du professeur ins-truit, charg de transmettre fidlement la pensede l'auteur, de la faire appliquer et de dmontrerla vrit de ses principes. J'cris qu'il faut avoir le

    cheval droit, et j'en dis la raison ; mais qui indiquera

    l'lve que son cheval est ou n'est pas droit? Je

    parle des effets de main, de jambes et d'perons

  • _ m _

    employs tantt sparment, tantt simultanment.Qui dira au cavalier qui se sera tromp dans l'em-ploi de ces aides la cause de son erreur? Qui l'aiderar la rparer et prvenir ainsi les consquencesgraves qui en rsulteraient? Je dis qu'il faut dtruire

    toutes les causes de rsistances du cheval ; mais quiindiquera l'lve les moyens justes, opportuns,qu'il devra employer, le degr de force dont il devrase servir? Qui dveloppera le sentiment de l'lvepar des conseils donns propos? Le professeur.Mais je parle du professeur lev mon cole,imbu de mes perfectionnements, car lui seul pourrales transmettre fidlement et donner les moyens deles appliquer toujours d'une manire juste, exacte.Je donne les principes, ils sont vrais

    ;j'indique les

    moyens, ils sont exacts; je fais connatre la pro-gression des exercices, ils sont essentiellement

    abrviateurs. Mais, vouloir crire l'application, ce

    serait tomber dans la faute de mes devanciers, enconfondant deux choses bien distinctes, la scienceet l'art. Si l'auteur est la pense qui conoit, lascience qui formule, l'habile professeur sera la

    parole qui transmet, l'ii qui observe, la main quifait agir.

  • RSUM

    DES RAPPORTS OFFICIELS

    EN FAVEUR DE LA MTHODE.

    Dans les dix premires ditions de ma Mthode,j'ai publi, en entier, les divers rapports officiels

    de MM. les gnraux et officiers de cavalerie qui se

    sont occups de mon systme au point de vue mili-

    taire. J'ai jug ncessaire de ne donner, dans cettedition, qu'un rsum succinct de toutes ces pices,

    afin de pouvoir publier mes ides nouvelles sans

    rien changer au format du livre.

    Mes lecteurs me sauront gr, sans doute, de rem-

    placer ainsi ces rapports logieux qui m'taient

    prcieux lors de l'apparition de mon ouvrage, tant

    par la spcialit et le talent de leurs rdacteurs que

    par l'impartialit qui les a dicts.

    Je saisis cette occasion d'exprimer MM. les

    officiers de l'arme ma profonde reconnaissance

    pour leur juste apprciation de ma Mthode et le

  • - i'A _

    zle qu'ils ont dploy son lude. Je me tiendrai

    toujours trs-honor de leur haute approbation.L'intrt seul du public a pu me dterminer re-

    trancher de mon livre leurs remarquables crits.

    Je prie ceux de mes lecteurs qui voudraient lire

    ces rapports en entier de se reporter aux ditions

    prcdentes.

    Je passerai sous silence quelques lettres qui ont

    prcd la mission qui m'a t confie de faire tu-dier mon systme dans les corps de troupes cheval.

    Rapport de M. de Noval, chef d'escadrons, commun-

    dant cole de Saumur.

    Analyse des exercices journaliers. Progrsconstats, jour par jour, jusqu' parfaite ducationobtenue en treize jours pour quarante chevaux.

    M. de Novital continue :

    Les adversaires de M. Baucher veulent lui

    donner le cachet d'une imitation des Pignatel,

    Pluvinel, Newcastle, etc.; mais ces clbres

    cuyers, tout en prchant l'assouplissement, l'-

    quilibre, ont-ils enseign une thorie aussi lucide,

    aussi juste, aussi bien raisonne que celle de

    M. Baucher? Non.

    La mthode de M. Baucher doit faire cole,

  • ~ u

    parce qu'elle s'appuie sur des principes vrais,

  • 45

    Rapport du gnral marquis Oudinot au Ministre de

    la guerre.

    Constatation des heureux rsultats obtenus par la

    mthode. Les principes de M. Baucher sont ungrand et incontestable progrs. Conclut ce que

    les corps de troupes envoient des instructeurs s'ini-

    tier la mthode.

    6 avril 1842.

    Rapport du chef d'escadron Grenier, charg du com-

    mandement des officiers envoys Paris pour tudierla Mthode.

    Vingt-deux officiers ont reu les leons de M. Bau-

    cher lui-mme. Approbation entire des prin-cipes et de leurs dmonstrations pratique et orale. C'est surtout l'cole de cavalerie que la mthodedoit tre connue.

    Versailles, 24 juillet 4842.

    Rapport demand par le colonel prsident de la commis-sion charge d'tudier le dressage des jeunes chevauxd'aprs la mthode Baucher, et rdig 'par M. De-

    sondes, lieutenant au 9 e cuirassiers.

    Ce rapport suit jour par jour l'ducation d'uncheval dsign.

  • 16

    Constatation des progrs simultans du cavalier

    et du cheval.

    La Mthode, par l'excellence de ces principes,

    remdie la mauvaise conformation du cheval.

    Elle est appele diminuer les proportions effrayan-

    tes des pertes de chevaux.

    Enfin, dit M. Desondes, la plus heureuse des in-

    novations doit amener une rvolution dans la cava-

    lerie.

    15,juillet! 842.

    Rapport du commandant de l'Ecole royale de cavalerie

    de Saumur.

    Je me rsume en disant que la nouvelle

    mthode doit tre un grand bien, une amliora- tion incontestable pour la cavalerie.

    Je fais donc des vux pour son adoption et sa

    prompte introduction dans l'arme.

    Saumur, 6 aot 1842.

    Rapport sur l'essai de la nouvelle mthode fait an camp

    de Lunvilk, par M. Baucher fils.

    La sollicitude claire de M. le Ministre de

    la guerre pour l'arme est un sr garant que cette

    mthode trouvera en lui un puissant prolecteur,

    et que toutes les troupes cheval pourront bientt

  • 17

    mettre profit les importants avantages que pro-

    cura son application.

    Les Membres de la Commission :

    Capitaines de JUNIAC, de CHOISEUL, GROSJEAN;lieutenant-colonel HERMET

    ;gnral GUSLER.

    Outre tous ces rapports, j'ai reu l'adhsion de la

    plus grande partie des officiers de cavalerie. Quatre-

    vingt-trois colonels ou capitaines, sur cent deux,

    approuvent mon systme.

  • NOUVEAUX MOYENS D'OBTENIR UNE BONNE

    POSITION DU CAVALIER (1).

    On trouvera sans doute tonnant que, dans lespremires ditions, promptement puises, de cet

    ouvrage ayant pour objet l'ducation du cheval, jen'aie pas commenc par parler de la position du ca-valier. En effet, cette partie si importante de l'qui-tation a toujours t la base des crits classiques.

    Ce n'est pas sans motifs, cependant, que j'ai dif-

    fr jusqu' prsent de traiter cette question. Si jen'avais eu rien de nouveau dire, j'aurais pu, ainsi

    que cela se pratique, consulter les vieux auteurs, et,

    l'aide de quelques transpositions de phrases, de

    quelques changement de mots, lancer dans le monde

    (1) Ces prceptes s'adressent plus spcialement aux cavaliersmilitaires ; mais, avec quelques lgres modifications, faciles saisir, ils peuvent galement s'appliquer l'quitalion civile.

  • 19

    questre une inutilit de plus. Mais j'avais d'autresides

    ;je voulais une refonte complte. Mon systme

    pour arriver donner une bonne position au cava-lier tant aussi une innovation, j'ai craint quetant de choses nouvelles la fois n'effrayassent lesamateurs, mme les mieux intentionns, et qu'ellesne donnassent prise mes adversaires. On n'auraitpas manqu de proclamer que mes moyens d'actionsur le cheval taient impraticables, ou qu'ils nepouvaient tre appliqus qu'avec le secours d'uneposition plus impraticable encore. Or, j'ai prouv lecontraire : d'aprs mon systme, des chevaux ont tdresss par la troupe, quelle que ft la position deshommes cheval. Pour donner plus de force cettemthode, pour la rendre plus facile comprendre,j'ai d l'isoler d'abord de tous autres accessoires,et garder le silence sur les nouveaux principes quiont rapport la position du cavalier. Je me rser-vais de ne mettre ces derniers au jour qu'aprs larussite incontestable des essais officiels. Au moyende ces principes, ajouts ceux que j'ai publis surl'art de dresser les chevaux, j'abrge galement letravail du cavalier, j'tablis un systme prcis etcomplet sur ces deux parties importantes, mais jus-qu' ce jour confuses, de l'quitation.En suivant mes nouvelles indications, relative-

    ment la position de l'homme cheval, on arriverapromptement un rsultat certain ; elles sont aussi

  • 20

    faciles comprendre qu' dmontrer : deux phrases

    suffisent pour tout expliquer au cavalier. Il est del

    plus grande importance, pour l'intelligence et les pro-

    grs de l'lve, que l'instructeur soit court, clair et

    persuasif ; celui-ci doit donc viter d'tourdir ses

    recrues par des dveloppements thoriques trop pro-

    longs. Quelques mots, expliqus avec -propos,

    favoriseront et dirigeront beaucoup plus vite la com-

    prhension. L'observation silencieuse est souvent un

    des caractres distinctifs du bon professeur. Aprs

    qu'on s'est assur que le principe pos a t bien

    compris, il faut laisser l'lve studieux exercer lui-

    mme son mcanisme : c'est ainsi seulement qu'ilparviendra trouver les effets de tact, qui ne s'ob-

    tiennent que par la pratique. Tout ce qui tient au

    sentiment s'acquiert, mais ne se dmontre pas.

    Position du cavalier.

    Le cavalier donnera toute l'extension possible au

    buste, de manire que chaque partie repose sur celle

    qui lui est infrieurement adhrente, afin d'aug-

    menter l'appui des fesses sur la selle ; les bras

    tomberont sans force sur les cts ; les cuisses et les

    genoux devront trouver, par leur face interne, au-

    tant de points de contact que possible avec la selle,

    les pieds suivront naturellement le mouvement des

    jambes.

  • On comprend clans ces quelques lignes combienest simple la position du cavalier.

    Les moyens que j'indique pour obtenir, en peude temps, une bonne position lvent toutes les dif-ficults que prsentait la route trace par nos de-

    vanciers. L'lve ne comprenait presque rien au long

    catchisme rcit haute voix par l'instructeur, de-

    puis la premire phrase jusqu' la dernire; en con-squence, il ne pouvait pas l'excuter. Ici, c'est par

    quelques mots que nous rendons toutes ces phrases,

    et ces mots sont comprhensibles pour le cavalier

    qui suit mon travail d'assouplissement. Ce travail le

    rendra adroit et, par suite, intelligent; un mois ne

    sera pas coul sans que le conscrit le plus lourd et

    le plus maladroit ne soit en tat d'tre bien plac.

    L

  • qu'il passera dans la main gauche, le plus prs pos-sible de leurs racines, sans qu'ils soient tortillsdans la main ; il saisira le pommeau de la selle avecla main droite, les quatre doigts en dedans, le pouceen dehors; puis, aprs avoir ploy lgrement lesjarrets, il s'enlvera sur les poignets. Une fois laceinture la hauteur du garrot, il passera la jambedroite par-dessus la croupe sans la toucher et semettra lgrement en selle. Ce mouvement de vol-tige tant d'une trs-grande utilit pour l'agilit ducavalier, on le lui fera recommercer huit ou dix

    fois, avant de le laisser s'asseoir sur la selle. Bientt

    la rptition de ce travail lui donnera la mesure de

    ce qu'il peut faire au moyen de la force bien enten-due de ses bras et de ses reins.

    Travail en selle.

    Ce travail doit se faire en place ; on choisira de prfrence un chevalvieux et froid. (Les rnes noues tomberont sur le col.)

    Une fois l'lve cheval, l'instructeur examinerasa position naturelle, afin d'exercer plus frquem-ment les parties qui ont de la tendance l'affaisse-

    ment ou la roideur. C'est par le buste que l'ins-

    tructeur commencera la leon. 11 fera servir

    redresser le haut du corps les flexions des reins quiportent la ceinture en avant ; on tiendra pendant

  • 23

    quelque temps dans cette position le cavalier dont les

    reins sont mous, sans avoir gard la roideur qu'elle

    entranera les premires fois. C'est par la force que

    l'lve arrivera tre liant, et non par l'abandon

    tant et si inutilement recommand. Un mouvement

    obtenu d'abord par de grands efforts n'en nces-

    sitera plus au bout de quelque temps, parce qu'il y

    aura adresse, et que, dans ce cas, l'adresse n'est

    que le rsultat des forces combines et employes

    propos. Ce que l'on fait primitivement avec dix

    kilogrammes de forces se rduit ensuite sept,

    cinq et deux. L'adresse sera la force rduite

    deux kilogrammes. Si l'on commenait par une

    force moindre, on n'arriverait pas ce rsultat. On

    renouvellera donc souvent les flexions de reins en

    laissant parfois l'lve se relcher compltement,

    afin de lui faire bien saisir l'emploi de force qui

    donnera prmptement une bonne position au buste.

    Le corps tant bien plac, l'instructeur passera 1

    la leon du bras, laquelle consiste le mouvoir

    dans tous les sens, d'abord ploy et ensuite tendu;

    2 la leon de la tte; celle-ci devra tourner

    droite et gauche sans que ses mouvements ragis-

    sent sur les paules.

    Ds que la leon du buste, des bras et de la tte

    donnera un rsultat satisfaisant, ce qui doit arriver

    au bout de quatre jours (huit leons), on passera

    celle des jambes.

  • 04

    L'lve loignera, autant que possible, des quar-

    tiers de la selle l'une des deux cuisses ; il la rap-prochera ensuite avec un mouvement de rotation

    de dehors en dedans, afin de la rendre adhrente

    la selle par le plus de points de contact possible.

    L'instructeur veillera ce que la cuisse ne retombe

    pas lourdement ; elle doit reprendre sa position par

    un mouvement lentement progressif et sans se-cousses. 11 devra, en outre, pendant la premireleon, prendre la jambe de l'lve et la diriger pourbien lui faire comprendre la manire d'oprer cedplacement. Il vitera ainsi la fatigue et obtiendrade plus prompts rsultats.

    Ce genre d'exercice ncessite de frquents repos;

    il y aurait inconvnient prolonger la dure dutravail au del des forces de l'lve. Les mouve-

    ments d'adduction (qui rendent la cuisse adhrente

    la selle) et ceux d'abduction (qui loignent) deve-

    nant plus faciles, les cuisses auront acquis un liant

    qui permettra de les fixer la selle dans une bonne

    position. On passera alors la flexion des jambes.

    FexoM des jambes.

    L'instructeur veillera ce que les genoux conser-

    vent toujours leur adhrence parfaite avec la selle.Les jambes se mobiliseront comme le pendule d'une

  • 25

    horloge, c'est- dire que l'lve les remontera jus-qu' toucher le troussequin de la selle avec les

    talons- Ces flexions rptes rendront les jambespromptement souples, liantes, et leur mouvement

    indpendant de celui des cuisses. On continuera les

    flexions de jambes et de cuisses pendant quatrejours (huit leons). Pour rendre chacun de ces mou-vements plus correct et plus facile, on y consacrera

    huit jours (ou quatorze leons). Les quatorze jours(trente leons) qui resteront pour complter le mois

    continueront tre employs au travail d'assouplis-

    sement en place; seulement, pour que l'lve ap-

    prenne combiner la force de ses bras et celle

    de ses reins, on lui fera tenir progressivement des

    poids de 2 5 kilogrammes bras tendu. On com-mencera cet exercice par la position la moins fati-

    gante, le bras ploy, la main prs de l'paule, et

    on poussera cette flexion la plus grande extension

    du bras. Le buste ne devra pas se ressentir de ce

    travail et restera maintenu dans la mme position.

    Des genoux.

    La force de pression des genoux se jugera, etmme s'obtiendra l'aide du moyen que je vaisindiquer. Ce moyen, qui de prime abord semblera

    peut-tre futile, amnera cependant de trs-grands

  • 26

    rsultats. L'instructeur prendra un morceau de cuir

    de l'paisseur de cinq millimtres et long de cin-

    quante centimtres ; il placera l'une des extrmits

    de ce cuir entre le genoux et le quartier de la selle.

    L'lve fera usage de la force de ses genoux pour

    ne pas le laisser glisser, tandis que l'instructeur le

    tirera lentement et progressivement de son ct, Ce

    procd servira de dynamomtre pour juger des pro-grs de la force. Quelques paroles encourageantes

    places propos stimuleront l'amour-propre de

    chaque lve.

    On veillera avec le plus grand soin ce que cha-que force qui agit sparment n'en mette pas d'au-

    tres en jeu, c'est--dire que le mouvement des bras

    n'influe jamais sur leurs paules; il devra en trede mme pour les cuisses, par rapport au tronc;pour les jambes par rapport aux cuisses, etc., etc. Ledplacement et l'assouplissement de chaque partie

    isole une fois obtenus, on dplacera momentan-ment le haut du corps, afin d'apprendre au cavalier

    se remettre en selle lui-mme. Voici comment on

    s'y prendra : l'instructeur, plac sur le ct, pous-

    sera l'lve par la hanche, de manire que sonassiette se trouve porte en dehors du sige de la

    selle. Avant d'oprer un nouveau dplacement,

    l'instructeur laissera l'lve se remettre en selle,

    en ayant soin de veiller ce que, pour reprendre

    son assiette, il ne fasse usage que des hanches et

  • 27

    des genoux, afin de ne se servir que des parties les

    plus rapproches de l'assiette. En effet, le secours

    des paules influerait bientt sur la main, et celle-

    ci sur le cheval; le secours des jambes pourraitavoir de plus graves inconvnients encore. En unmot, dans tous les dplacements, on enseignera

    l'lve ne pas avoir recours, pour diriger, aux

    forces qui maintiennent cheval; ne pas em-

    ployer, pour s'y maintenir, celles qui dirigent.

    A l'aide de cette gymnastique questre justenentcombine, on arrive, au bout d'un mois, faire

    excuter facilement tous les conscrits les exer-

    cices qui semblaient les plus contraires leur orga-

    nisation physique.

    L'lve ayant franchi les preuves prliminaires,

    attendra avec impatience les premiers mouvements

    du cheval pour s'y livrer avec l'aisance d'un cava-lier dj expriment.

    Quinze jours (trente leons) seront consacrs aupas, au trot et mme au galop. Ici l'lve doit uni-quement chercher suivre les mouvements ducheval; en consquence, l'instructeur l'obligera

    ne s'occuper que de sa position et non des moyens

    de direction donner au cheval. On exigera seule-ment que le cavalier marche d'abord droit devantlui, puis en tous sens, une rne de bridon dans

    chaque main. Au bout de quatre jours (huit leons),on pourra lui faire prendre la bride dans la main

  • 28

    gauche. On s'attachera ce que la main droite, quise trouve libre, reste ct de la gauche, afin que

    le cavalier prenne de bonne heure l'habitude d'treplac carrment (les paules sur la mme ligne) ; lecheval trottera galement droite et gauche.Lorsque l'assiette sera bien consolide toutes lesallures, l'instructeur expliquera d'une maniresimple les rapports qui existent entre les poignets et

    les jambes, ainsi que leurs effets spars (1).

    ducation du cheval.

    Ici le cavalier commencera l'ducation du cheval,en suivant la progression que j'ai indique et quel'on trouvera ci-aprs. On fera comprendre l'lvetout ce qu'elle a de rationnel, et par quelle liaison

    intime se suivent, dans leurs rapports, l'ducation

    de l'homme et celle du cheval. Au bo\it de quatremois peine, le cavalier pourra passer l'cole depeloton ; les commandements ne seront plus qu'uneaffaire de mmoire ; il lui suffira d'entendre pourexcuter, car il sera matre de son cheval.

    J'espre que la cavalerie comprendra (commeelle a dj compris mon mode d'ducation du

    (1) Voir les principes pour l'ducation du cheval.

  • cheval) tout l'avantage des moyens que j'indique pourtirer le plus large parti possible du peu de temps

    que chaque soldat reste sous les drapeaux.

    J'ai galement la conviction que l'emploi de ces

    moyens rendra prompte et parfaite l'ducation des

    hommes et des chevaux.

    RSUM ET PROGRESSION.Jours. Leons.

    1 Flexion des reins pour servir l'extension dubuste 4 8

    2 Rotation, extension des cuisses et flexion desjambes 4 8

    3 Exercice gnral et successif de toutes lesparties 8 14

    4 Dplacement du tronc, exercice des genoux etdes bras avec des poids dans les mains. . . 14 28

    5 Position du cavalier sur le cheval au pas, autrot et au galop, pour faonner et fixer l'as-

    siette ces diffrentes allures 15 306 ducation du cheval par le cavalier 50 100

    Total 95 188

  • II

    DE L'QUILIBRE DU CHEVAL.

    L'harmonie du poids et des forces du cheval donne l'quilibre de laL'quilibre de la masse produit l'harmonie des mouvements.

    BAUCHER.

    Tout tre organis, pour conserver la libert et

    la sret de ses mouvements, est astreint observer

    la loi de l'quilibre. Le cheval mont, plus que toutautre animal, est soumis cette loi, car non-seule-

    ment il doit calculer ses mouvements par rapport

    sa propre masse, mais le poids additionnel de soncavalier tend dranger constamment son quilibrenaturel.

    L'importance majeure d'quilibrer le cheval a tvivement sentie par le monde questre : aussi toutcuyer se pique d'honneur et veut trouver le secretde ce nud gordien.

    Dans notre xixe sicle, o toutes choses doiventtre traites scientifiquement, il est tout naturel

    qu'on ait demand la science le secret de l'qui-

  • 31

    libre. La science a rpondu par un problme :

    Pour quilibrer votre cheval, cherchez son centre

    de gravit.

    Cette rponse n'a pas manqu d'exciter une nobleardeur. Tout le monde s'est mis l'uvre. Oncherche le centre de gravit partout, toujours

    ,

    mais on ne le trouve pas. Des contradictions sansnombre surgissent chaque jour, les discussions s'en-veniment, les traits d'quitation tournent au pam-phlet, les dcouvertes restent nulles et le centre degravit continue se promener dans le domainedont on l'a fait seigneur et matre. Un si grandpersonnage devrait cependant n'tre pas introu-

    vable, eu gard aux limites restreintes qui le ren-

    ferment.

    Combien d'cuyers ont us leur persvrance cette vaine recherche ! Mais aussi, qui n'aurait voulu

    connatre la solution d'un problme qui, d'un seulcoup, tranchait les difficults de l'quitation en

    donnant l'quilibre du cheval ?

    La science avait parl ; comme tout le monde,je crus son oracle.

    Me voil donc livr, pendant des annes entires,

    des recherches journalires.Rsultats nuls ! Ceux de la veille taient contre-

    dits par ceux du lendemain.Fallait-il donc, cependant, parce qu'il plaisait au

    centre de gravit de voyager incognito, laisser le

  • cheval et son cavalier exposs aux dangers qu'en-trane le dfaut d'quilibre !

    Pour m'aider dans mes recherches, je m'adres-

    sais aux cuyers-auteurs. Ils mettaient une grande

    rudition m'expliquer le dplacement du centre

    de gravit, quand, par exemple, une jambe se porteen avant, suivie de la jambe diagonalement oppose;ou bien quand le rassembler s'opre, ou quand lecheval se cabre, rue, etc.

    Il est l, disait l'un ; non, je le vois de ce ct,disait l'autre ; et ces vaines discussions se continuent

    encore parce que l'on ne veut pas remonter aux

    causes premires, et que les effets absorbent l'atten-

    tion gnrale.

    On tudie la manire d'tre du centre de gravit.Pourquoi? Je l'ignore. En saine pratique, n'avons-nous pas le poids du cheval rpartir et sa force coordonner? N'avons-nous pas combiner lesforces opposes du cavalier (main et jambes)? Sinous nous rendons compte des effets de ces divers

    agents, et si nous en tirons le parti convenable,

    nous arriverons notre quilibre, sans avoir nous

    proccuper du centre de gravit.

    Messieurs les thoriciens, prparez vos anathmes!

    je vais porter une main profane sur le dieu de vosrves et briser votre idole, aprs avoir, il est vrai,

    dans mon ignorance, brl sur son autel un inutile

    encens.

  • Votre centre de gravit ne donne, n'entrane, ni

    ne produit rien.

    11 existe incontestablement, mais l'tat de pas-

    sivet.

    Vous voulez l'riger en cause, il n'est qu'effet.

    Quelle que soit votre opinion son gard, il fonc-

    tionnera toujours dans le mme ordre : bien, sivotre mouvement est juste ; mal, si votre mouvement

    est irrgulier.

    Pourquoi donc, propos d'quitation, avoir sans

    cesse la bouche des mots scientifiques, sonores il

    est vrai, mais vides de sens et propres, tout au plus,

    retarder les progrs de l'art, par l'obscurit qu'ils

    rpandent sur les thories?

    Tenez, messieurs, abandonnez simplement le

    centre de gravit aux influences qui le gouvernent,

    et cessez les discussions qu'il excite depuis trop

    longtemps. Au lieu d'enfourcher un nuage pour che-

    vaucher la recherche d'une ide aussi introuvable

    qu'inutile, montez un vrai cheval, et probablement

    vous approuverez les principes que je vais appli-

    quer l'obtention et au maintien de l'quilibre du

    cheval

    .

  • III

    DE L'EMPLOI RAISONNE DES FORCES DU CHEVAL.

    Le cheval, comme tous les tres organiss, est

    dou d'un poids et d'une force qui lui sont propres.Le poids, inhrent la matire constitutive de l'ani-

    mal, rend sa masse inerte et tend la fixer au sol.

    La force, au contraire, par la facult qu'elle lui

    donne de mobiliser ce poids, de le transfrer de

    l'une l'autre de ses parties, communique le mou-vement, en dtermine la vitesse, la direction et

    constitue l'quilibre.

    Pour rendre cette vrit palpable, supposons un

    cheval au repos. Son corps sera dans un parfait

    quilibre, si chacun de ses membres supporte exac-tement la part du poids qui lui est dvolue dans

    cette position. S'il veut se porter en avant au pas,

    il devra pralablement transfrer, sur les jambesqui resteront fixes au sol, le poids que supporte

    celle qu'il en dtachera la premire. Il en sera de

  • 35

    mme pour les autres allures, la translation s'op-rant au trot, d'une diagonale l'autre; au galop,

    de l'avant l'arrire-main, et rciproquement. Il ne

    faut donc jamais confondre les manires d'tre dupoids et de la force. Le poids n'est que passif, la

    force dterminante est active. C'est en reportant le

    poids sur telles ou telles extrmits que la force les

    mobilise ou les fixe. La lenteur ou la vitesse des

    translations dtermine les diffrentes allures, qui

    sont elles-mmes justes ou fausses, gales ou in-

    gales, suivant que ces translations s'excutent avec

    justesse ou irrgularit.

    On comprend que cette puissance motrice se sub-divise l'infini, puisqu'elle est rpartie sur tous les

    muscles de l'animal. Quand ce dernier en dterminelui-mme l'emploi, je les appelle instinctives

    ;je les

    nomme transmises (1) lorsque le cavalier en coor-

    (1) Plusieurs pamphltaires trs-rudits et profonds anatomistesont beaucoup discut sur cette expression ; forces transmises,n'ayant, disaient-ils agrablement, rien trouv de semblable dansles chevaux qu'ils avaient corchs l'cole d'Alfort. On recon-natra sans doute avec moi que cette bouffonnerie est fort con-cluante.

    Pour parler srieusement, je dclare qu'en employant l'expres-sion transmises, je ne prtends pas crer des forces en principe,mais seulement en fait. Je parviens diriger et utiliser desforces qui, par suite de contractions et de rsistances, demeuraientcompltement inertes, et qui seraient consquemment comme sielles n'taient pas. N'est-ce point l une espce de transmission ?

  • 36

    donne l'emploi. Dans le premier cas, l'homme, do-

    min par son cheval, reste le jouet de ses caprices ;dans le second, au contraire, il en fait un instru-

    ment docile, soumis toutes les impulsions de sa

    volont. Le cheval, ds qu'il est mont, ne doit donc

    plus agir que par des forces transmises ou harmoni-

    ses. L'application constante de ce principe constitue

    le vrai talent de l'cuyer.

    Mais un tel rsultat ne peut s'obtenir instantan-

    ment. Le jeune cheval, habitu rgler lui-mme,dans sa libert, l'emploi de ses ressorts, se soumet-

    tra d'abord avec peine l'influence trangre qui

    viendra en disposer sans intelligence. Une lutte

    s'engagera ncessairement entre le cheval et le cava-

    lier ; celui-ci sera vaincu s'il ne possde l'nergie,

    la persvrance et surtout les connaissances nces-

    saires pour arriver ses fins. Les forces de

    l'animal tant l'lment sur lequel l'cuyer doit

    agir principalement, pour les dominer d'abord et

    les diriger ensuite, c'est sur elles avant tout qu'il

    lui importe de fixer son attention. Il recherchera

    quelles sont les parties o elles se contractent le

    plus pour la rsistance, les causes physiques qui

    peuvent occasionner ces contractions. Ds qu'il

    saura quoi s'en tenir sur ce point, il n'emploiera

    envers son lve que des procds en rapport avec

    la nature de ce dernier, et les progrs seront alors

    rapides.

  • 37

    Malheureusement, on chercherait en vain dans

    les auteurs anciens et modernes qui ont crit surl'quitation, je ne dirai pas des principes rationnels,

    mais mme des donnes quelconques sur ce qui serattache l'emploi raisonn des forces du cheval.

    Tous ont bien parl de rsistances, d'oppositions,

    d'quilibre, mais aucun n'a su nous dire ce qui

    cause ces rsistances, comment on peut les com-

    battre, les dtruire, et obtenir cette lgret, cet

    quilibre, qu'il nous recommande si instamment.C'est cette grave lacune qui a jet sur les principes

    de l'quitation tant de doutes et d'obscurit ; c'est

    elle qui a rendu cet art stationnaire pendant silongtemps; c'est cette grave lacune, enfin, que jecrois tre parvenu combler.

    Et d'abord, je pose en principe que toutes lesrsistances des jeunes chevaux proviennent, enpremier lieu, d'une cause physique, et que cettecause ne devient morale que par la maladresse,

    l'ignorance ou la brutalit du cavalier. En effet,outre la roideur naturelle, commune tous ces

    animaux, chacun d'eux a une conformation parti-culire dont le plus ou le moins de perfectionconstitue le degr d'harmonie existant entre le poids

    et les forces. Le dfaut de cette harmonie occa-sionne l'imperfection des allures, la difficult des

    mouvements, en un mot, tous les obstacles qui s'op-

    posent une bonne ducation. A l'tat libre, quelle

  • 38

    que soit la mauvaise structure du cheval, l'instinctseul lui suffira pour disposer ses forces de manire

    maintenir son quilibre; mais il est des mouve-

    ments qui lui sont impossibles, jusqu' ce qu'untravail prparatoire l'ait mis mme de suppleraux dfectuosits de son organisation par un emploi

    mieux combin de sa puissance motrice (1). Lecheval n'excute un mouvement avec lgret qu'

    la suite d'une position donne; s'il est des forces

    qui s'opposent cette position, il faut donc les an-

    nuler d'abord pour les remplacer par celles qui

    pourront, seules, la dterminer.

    (1) J'engage beaucoup les amateurs dsireux de suivre mesprceptes dans tout ce qu'ils ont de naturel et de mthodique, bien prendre garde d'y mler des moyens pratiques qui y sonttrangers et contraires. Dans le nombre de ces grotesques inven-tions se trouve plac le jockey anglais ou l'homme de bois, auquelde graves auteurs ont attribu des proprits que la saine quita-tion rprouve ; en effet, la force permanente du bridon dans labouche du cheval est une gne et non pas un avis ; elle luiapprend revenir sur lui-mme en s'acculant, pour en viter lasujtion. A l'aide de cette force brutale, il connatra de bonneheure comment il peut se soustraire aux effets de main du cavalier.

    C'est cheval, et par de justes et progressives oppositions demain et de jambes, que l'on obtiendra des rsultats prompts etinfaillibles, rsultats qui seront tous en faveur du mcanisme et del'intelligence du cavalier. Si le cheval prsentait quelques diffi-cults dangereuses, un second cavalier, l'aide du caveon, pro-duirait une action suffisante sur le moral du cheval, pour donnerle temps celui qui le monte d'agir physiquement, afin de dispo-ser la masse dans le sens du mouvement qu'on veut exiger. Mais,on le voit, il faut une intelligence pour parler intelligiblement aucheval, et non pas une machine fonctionnant brutalement.

  • 39

    Or, je le demande, si, avant d'avoir surmont cespremiers obstacles, le cavalier vient y ajouter lepoids de son propre corps et ses exigences mala-

    droites, l'animal n'prouvera-t-il pas une difficult

    plus grande encore pour excuter certains mouve-

    ments? Les efforts qu'on fera pour l'y astreindre,

    tant contraires sa nature, ne devront-ils pas sebriser contre cet obstacle insurmontable? Il rsisteranaturellement, et avec d'autant plus d'avantage, que

    la mauvaise rpartition de son poids et de ses forces

    suffira pour annuler l'action du cavalier. La rsis-

    tance mane donc ici d'une cause physique; cettecause devient morale ds l'instant o, la lutte secontinuant avec les mmes procds, le cheval com-mence combiner lui-mme les moyens de se sous-traire au supplice qu'on lui impose, lorsqu'on veut

    ainsi forcer des ressorts qu'on n'a pas assouplis d'a-

    vance.

    Quand les choses en sont l, elles ne peuventqu'empirer. Le cavalier, dgot bientt de l'im-puissance de ses efforts, rejettera sur le cheval laresponsabilit de sa propre ignorance ; il fltrira dunom de rosse un animal qui possdait peut-tre de

    brillantes ressources, et dont, avec plus de discer-

    nement et de science, il aurait pu faire une mon-ture dont le caractre serait aussi docile et soumisque les allures seraient gracieuses et agrables. J'ai

    remarqu souvent que les chevaux rputs indomp-

  • 40

    tables sont ceux qui dveloppent le plus d'nergie

    et de vigueur, ds qu'on a su remdier aux incon-vnients physiques qui paralysaient leur essor.

    Quant ceux que, malgr' leur mauvaise conforma-tion, on finit par soumettre un semblant d'obis-

    sance, il faut en rendre grce la mollesse seule de

    leur nature ; s'ils veulent bien s'astreindre quel-

    ques exercices des plus simples, c'est condition

    qu'on n'exigera pas davantage, car ils retrouveraient

    bien vite leur nergie pour rsister des prten-

    tions plus leves. Le cavalier pourra donc les faire

    marcher aux diffrentes allures; mais quel dcousu,

    quelle roideur, quel disgracieux 'dans leurs mouve-

    ments, et quel ridicule de semblables coursiers ne

    jettent-ils pas sur le malheureux qu'ils ballottent et

    entranent ainsi leur gr, bien plus qu'ils ne se

    laissent diriger par lui ! Cet tat de choses est tout

    naturel, puisqu'on n'a pas dtruit les causes pre-

    mires qui le produisent ; la mauvaise rpartition du

    poids et des forces et la roideur qu'elle entrane sa

    suite.

    Mais, va-t-on m'objecter, puisque vous recon-naissez que ces difficults tiennent la conformation

    du cheval, comment est-il possible d'y remdier?

    Vous n'avez probablement pas la prtention de

    changer la structure de l'animal et corriger la na-

    ture? Non sans doute; mais tout en convenant qu'il

    est impossible de donner plus d'ampleur une poi-

  • 41

    trine troite, d'allonger une encolure trop courte,

    d'abaisser une croupe leve, de raccourcir et

    d'toffer des reins longs, faibles efr troits, je n'en

    soutiens pas moins que si je dtruis les contractions

    diverses occasionnes par ces vices physiques, si

    j'assouplis les muscles, si je me rends matre des

    forces au point d'en disposer volont, il me sera

    facile de prvenir ces rsistances, de donner plus de

    ressort aux parties faibles, de modrer celles qui sont

    trop vigoureuses, et de suppler ainsi aux mauvais

    effets d'une nature imparfaite, en tablissant, dans

    l'quilibre du cheval, une juste rpartition du poids

    et des forces.

    De pareils rsultats, je ne crains pas de le dire,

    furent et demeurent interdits jamais aux ancien-nes coles. Mais si la science de ceux qui professent

    d'aprs les vieux errements vient toujours se brisercontre le grand nombre des chevaux dfectueux, onrencontre des chevaux qui, par la perfection de leur

    organisation et la facilit d'ducation qui en rsulte,

    contribuent puissamment perptuer les routines

    impuissantes, si funestes aux progrs de l'quita-

    tion. Un cheval bien constitu est celui dont toutes

    les parties, rgulirement harmonises, amnentl'quilibre parfait de l'ensemble. Il serait aussi dif-

    ficile pareil sujet de sortir de cet quilibre naturel,

    pour prendre une mauvaise position et se dfendre,

    qu'il est pnible d'abord, au cheval mal conform.

  • 42

    d'acqurir cette juste rpartition du poids et des

    forces sans laquelle on ne peut esprer aucune rgu-

    larit de mouvements.

    C'est dans l'ducation de ces derniers animaux

    seulement que consistent les vritables difficults

    de l'quitation. Chez les premiers , le dressage

    doit tre, pour ainsi dire, instantan, puisque, tous

    les ressorts tant leur place, il ne reste plus

    qu' les faire mouvoir; ce rsultat s'obtient toujours

    avec ma mthode. Les anciens principes, cependant,

    exigent deux et trois ans pour y parvenir; et lorsqu'

    force de ttonnements et d'incertitudes, l'cuyer

    dou de quelque intelligence et de quelque pratique

    finit par habituer le cheval obir aux impressions

    qui lui sont communiques, il croit avoir surmontde grandes difficults, et attribue son savoir-faire

    un rsultat que l'application de bons principes au-

    rait procur en quelques jours. Puis, comme l'ani-

    mal continue dployer dans tous ses mouvements

    la grce et la lgret naturelles sa belle confor-

    mation, le cavalier ne se fait nul scrupule de s'en

    approprier le mrite, se montrant alors aussi pr-

    somptueux qu'il est injuste, lorsqu'il veut rendre le

    cheval mal constitu responsable de l'inefficacit de

    ses efforts.

    Si nous admettons une fois ces vrits :

    Que l'ducation du cheval consiste dans la domi-

  • 43

    nation complte de ses forces et dans la juste rpar-

    tition de son poids;

    Qu'on ne peut disposer des forces qu'en annulanttoutes les rsistances,

    Et que les rsistances ont leur source dans les

    contractions occasionnes par les vices physiques,

    Il ne s'agira plus que de rechercher les parties os'oprent ces contractions, afin d'essayer de les

    combattre et de les faire disparatre en provoquant

    un quilibre convenable du poids et des forces.

    De longues et consciencieuses observations m'ont

    dmontr que, quel que soit le vice de conforma-tion qui s'oppose dans le cheval la juste rparti-tion des forces, c'est toujours sur la mchoire ques'en fait ressentir l'effet le plus immdiat. Pas de

    faux mouvements, pas de rsistance qui ne soient

    prcds par la contraction de cette partie de l'ani-mal ; et comme l'encolure est intimement lie lamchoire, la roideur de l'une se communique in-stantanment l'autre. Ces deux points sont l'arc-boutant sur lequel s'appuie le cheval pour annuler

    tous les efforts du cavalier. On conoit facilementl'obstacle immense qu'ils doivent prsenter, puisquela tte et l'encolure tant les deux leviers princi-

    paux par lesquels on place et dirige l'animal, il est

    impossible de rien obtenir de lui tant qu'on ne sera

    pas entirement matre de ces premiers et indispen-

    sables moyens d'action. A l'arrire-main, les parties

  • _ 44

    o les forces se contractent le plus pour les rsis-

    tances sont les reins et la croupe (les hanches).

    Les contractions de ces deux extrmits opposes

    sont mutuellement les unes pour les autres cause et

    effet, c'est--dire quelaroideur de la mchoire et de

    l'encolure amne celle des hanches, et rciproque-ment. On peut donc les combattre l'une par l'autre;et ds qu'on aura russi les annuler, ds qu'on aura

    ainsi rtabli l'quilibre et l'harmonie entre l'avant

    et l'arrire-main, l'ducation du cheval sera moi-

    ti faite. Je vais indiquer par quels moyens on yparviendra infailliblement.

  • IY

    TRAVAIL A PIED.

    MOBILISATION DU CHEVAL, AU MOYEN DES FORCES INSTINCTIVES,

    POUR OBTENIR L'QUILIBRE DU POIDS.

    EMPLOI DE LA CRAVACHE POUR APPRENDRE AU CHEVAL A VENIR A L HOMME,

    LE RENDRE SAGE AU MONTOIR , ETC.

    Ds le dbut de l'ducation du cheval, il est essen-

    tiel de lui donner une premire leon d'assujettisse-

    ment et de lui faire connatre toute la puissance de

    l'homme. Ce premier acte de soumission, qui pour-

    rait paratre sans importance, servira promptement

    le rendre calme, confiant, rprimer tous les mou-

    vements qui dtourneraient son attention et retar-

    deraient son ducation.

    Quelques leons d'une demi-heure suffiront pour

    obtenir ce rsultat chez tous les chevaux ; le plaisir

    que l'on prouvera jouer ainsi avec le cheval por-

    tera naturellement le cavalier continuer cet exer-

  • 46

    cice autant qu'il sera ncessaire, et le rendre

    aussi instructif pour le cheval qu'utile pour lui-mme.

    Yoici comment on s'y prendra : le cavalier s'appro-

    chera du cheval, sa cravache sous le bras, sans brus-querie ni timidit ; il lui parlera sans trop lever la

    voix, et le flattera de la main sur le chanfreinou sur l'encolure, puis, avec la main gauche, ilsaisira les rnes de la bride, 16 centimtres des

    branches du mors, en soutenant le poignet avec assezd'nergie pour prsenter autant de force que possible

    dans les instants de rsistance du cheval. La cravachesera tenue de la main droite, la pointe vers la terre,puis on l'lvera lentement jusqu' la hauteur du poi-trail pour en frapper dlicatement cette partie une

    seconde d'intervalle. Le premier mouvement naturel

    du cheval sera de reculer pour viter les attouchementsde la cravache. Le cavalier suivra ce mouvement

    rtrograde sans discontinuer toutefois la tension

    des rnes de la bride, ni les petits coups de cra-

    vache sur le poitrail. Le cavalier devra rester matre

    de ses impressions, afin qu'il n'y ait dans ses mouve-

    ments et dans son regard aucun indice de colre ni de

    faiblesse. Fatigu de ces effets de contrainte, lecheval cherchera bientt par un autre mouvement viter la sujtion, et c'est en se portant en avant qu'il

    y parviendra ; le cavalier saisira ce second mouve-ment instinctif pour l'arrter et flatter l'animal dugeste et de la voix. La rptition de cet exercice

  • m

    donnera des rsultats surprenants, mme la pre-mire leon. Le cheval, ayant bien compris le moyen

    l'aide duquel il peut viter la cravache, n'en atten-

    dra pas le contact, il le prviendra en s'avanant de

    suite au moindre geste. Ce travail, d'ailleurs trs-

    rcratif, servira de plus rendre le cheval sage au

    montoir, abrgera de beaucoup son ducation, et

    acclrera le dveloppement de son intelligence.

    Dans le cas o, par suite de sa nature inquite ou

    sauvage, le cheval se livrerait des mouvements

    dsordonns, on devrait avoir recours au caveon,

    comme moyen de rpression, et l'employer par pe-

    tites saccades. Quand le cheval se portera franche-ment en avant l'action de la cravache, le moment

    sera venu de faire une lgre opposition avec la

    main de la bride, afin d'obtenir un effet de rame-ner, sans discontinuer l'allure du pas.

    On commencera aussi quelques temps de reculer,qu'on alternera avec les mouvements en avant, jus-qu' disparition complte des rsistances.

    Cet exercice est trs-important pour dplacer,

    par les forces purement instinctives, d'abord, mais

    que nous rgulariserons ensuite, le poids qui se

    fixerait trop sur l'arrire ou sur l'avant-main.

    Faisons une remarque sur laquelle nous revien-

    drons plus tard.

    Le poids du cheval surcharge naturellement la

    partie antrieure du corps; c'est pour cela qu'en

  • 48

    vertu du principe qui oppose les forces au poids

    dans l'ordre naturel, la nature a donn une si grandepuissance aux muscles postrieurs du cheval qui

    doivent, aux diffrentes allures et surtout au galop,

    non-seulement recevoir le poids de l'avant-main,

    mais encore projeter toute la masse en avant. Dans

    le reculer, cette distribution du poids induit souvent

    en erreur le cavalier inexpriment. Il s'imagine

    que le mouvement rtrograde est produit par le d-

    placement total du poids par les forces, tandis qu'iln'est d qu'au reflux des forces impulsives, qui,refoules par une opposition de main, n'ont entran

    avec elles qu'une partie du poids. Aussi, bien que le

    cheval recule, l'avant-main se trouve souvent sur-

    charg d :un poids comparativement norme. D'oil suit que le mouvement est irrgulier, jusqu' ceque l'cuyer, revenu de son erreur, ait su allger

    l'avant-main de manire quilibrer le poids et lesforces. Les moyens d'atteindre ce but seront don-

    ns ultrieurement. Alors nous appellerons l'atten-

    tion du lecteur sur l'emploi des aides, que la prati-que seule peut rendre judicieux.

    Les exercices prcdents l'aide de la cravache,

    tels que : porter le cheval en avant, les commen-

    cements de ramener et de reculer, seront suivis,

    toujours l'aide de la cravache, soit des pas dect, soit des pirouettes ordinaires ou renverses.

    Pour les pas de ct, la main, en se soutenant,

  • 49

    facilite le mouvement des paules dans le sens in-diqu par la cravache. Dans le cas de rsistanceprovenant de la croupe, le cavalier en triompheraitpar une opposition de la main qui ne reprendrait saposition que lorsque le mouvement serait com-menc.

    Dans les pirouettes renverses, la main se main-tiendra pour forcer la croupe obir la cravache,et la faire tourner autour des jambes du cheval,dont l'une doit lui servir de pivot.

    Dans les pirouettes ordinaires, la cravache agirasur la croupe, pour la fixer et fournir aux jambesantrieures, mobilises par la main, le pivot nces-saire leur mouvement de rotation.

    Ces divers exercices disposeront le cheval auxmouvements qu'il devra excuter avec son cavalieren selle.

    Bien entendu que dans le cours de l'ducation ducheval, il faudra revenir souvent ces exercices

    prliminaires, afin qu'il ne perde pas le fruit de sesleons prcdentes.

  • DE L'ASSOUPLISSEMENT.

    Les nouveaux principes de ma mthode ne peu-vent tre pratiqus que par les hommes verss dansl'art de l'quitation, et qui joignent une assietteassure une assez grande habitude du cheval pourcomprendre tout ce qui se rattache son mcanisme.

    Je ne reviendrai donc pas sur les procds lmen-

    taires ; c'est l'instructeur juger si son lve pos-sde un degr convenable de solidit, s'il est suffi-

    samment en rapport d'enveloppe avec son cheval;

    car, en mme temps qu'une bonne position produitcette identification, elle favorise le jeu facile et r-gulier des extrmits du cavalier.

    Mon but ici est de traiter principalement de l'du-

    cation du cheval ; mais cette ducation est trop in-

    timement lie celle du cavalier, pour qu'il soit

    possible de faire progresser l'une sans l'autre. En

    expliquant les procds qui devront amener la per-

    fection chez l'animal, j'apprendrai ncessairement

  • SI

    l'cuyer les appliquer lui-mme ; il ne tiendraqu' lui de professer demain ce que je lui dmontreaujourd'hui.

    Nous connaissons maintenant quelles sont lesparties du cheval qui se contractent le plus pour lesrsistances, et nous sentons la ncessit de les assou-

    plir. Chercherons-nous ds lors les attaquer, les

    exercer toutes ensemble, pour les soumettre dumme coup? Non, sans doute, ce serait retomberdans les anciens errements, et nous sommes con-vaincu de leur inefficacit. L'animal est dou d'unepuissance musculaire infiniment suprieure lantre ; ses forces instinctives pouvant en outre se

    soutenir les unes par les autres, nous serons invi-

    tablement vaincus si nous les surexcitons toutes

    la fois. Puisque les contractions ont leur sige dansdes parties spares, sachons profiter de cette divi-

    sion pour les combattre successivement, l'exemple

    de ces gnraux habiles qui dtruisent en dtail desforces auxquelles ils n'auraient pu rsister en

    masse.

    Du reste, quels que puissent tre l'ge, les dispo-sitions et la structure du cheval, mes procds, endbutant, seront toujours les mmes. Les rsultatsseulement seront plus ou moins prompts et faciles,suivant le degr de perfection de sa nature et l'in-fluence de la main laquelle il aura pu tre soumisantrieurement. L'assouplissement, qui, chez un

  • 52

    cheval bien constitu, n'aura d'autre but que de

    prparer ses forces cder nos moyens d'action,

    devra de plus rtablir le calme et la confiance, s'il

    s'agit d'un cheval mal men, et faire disparatre,

    dans une conformation dfectueuse, les contractions,

    causes des rsistances et de l'opposition un qui-

    libre parfait. Les difficults surmonter seront en

    raison de cette complication d'obstacles, qui tous

    disparatront bien vite, moyennant un peu de per-

    svrance de notre part. Dans la progression que

    nous allons suivre pour soumettre l'assouplissement

    les diverses parties de l'animal, nous commencerons

    naturellement par les plus importantes, c'est--dire

    par la mchoire et l'encolure.

    La tte et l'encolure du cheval sont la fois le

    gouvernail de l'animal et la boussole du cavalier.

    Par elles il dirige l'animal; par elles aussi il peut

    juger de la rgularit, de la justesse de son mouve-ment; pas d'quilibre, pas de lgret, si la tte et

    l'encolure ne sont aises, liantes et gracieuses. Nulle

    lgance, nulle facilit dans l'ensemble, ds que ces

    deux parties se rendissent. Prcdant le corps dans

    toutes ses impulsions, ellesdoivent prparer d'avance,

    indiquer par leur attitude les positions prendre,

    les mouvements excuter. Nulle domination n'est

    permise au cavalier tant qu'elles restent contractes

    et rebelles ; une fois qu'elles sont flexibles et ma-

    niables, il dispose de l'animal son gr. Si la tte

  • 53

    et l'encolure n'entament pas les premires les chan-gements de direction, si, dans les marches circu-laires, elles ne se maintiennent pas inclines sur laligne courbe, afin de surcharger plus ou moins lesextrmits en raison du mouvement, si pour le re-culer elles ne se replient pas sur elles-mmes, et sileur lgret n'est pas toujours en rapport avec lesdiffrentes allures qu'on voudra prendre, le chevalsera libre d'excuter ou non ces mouvements,

    puisqu'il restera matre de l'emploi de ses forces.

  • Y

    DE LA BOUCHE DU CHEVAL ET DU MORS.

    J'ai dj trait ce sujet assez longuement dans

    mon Dictionnaire raisonn d'Equitation ; mais comme

    je dveloppe ici un expos complet de ma mthode,

    je crois ncessaire d'y revenir en quelques mots.

    Je suis encore me demander comment on a pu

    attribuer si longtemps la seule diffrence de con-

    formation des barres ces dispositions contraires des

    chevaux qui les rendent si lgers ou si lourds la

    main. Comment a-t-onpu croire que, suivant qu'un

    cheval a une ou deux lignes de chair de plus ou de

    moins entre le mors et l'os de la mchoire infrieure,

    il cde la plus lgre impulsion de la main, ou

    s'emporte, malgr les efforts des deux bras les plus

    vigoureux? C'est cependant en s'appuyant sur cette

    inconcevable erreur qu'on s'est mis forger des

    mors de formes bizarres et si varies, vrais instru-

    ments de supplice, dont l'effet ne pouvait qu'aug-

  • menter les inconvnients auxquels on cherchait

    remdier.

    Si on avait voulu remonter un peu la source des

    rsistances, on aurait reconnu bientt que la roi-

    deur de la mchoire ne provient pas de la diff-

    rence de conformation des barres, mais bien du

    mauvais quilibre du cheval. C'est donc en vain que

    nous nous suspendrons aux rnes et que nous pla-

    cerons dans la bouche du cheval un instrument plusou moins meurtrier ; il restera insensible nosefforts tant que nous ne lui aurons pas donn cettelgret qui peut seule le mettre mme de cder.

    Je pose donc en principe qu'il n'existe point de

    diffrence de sensibilit dans la bouche des che-

    vaux;que tous prsentent la mme lgret dans la

    position du ramener, et les mmes rsistances mesure qu'ils s'loignent de cette position impor-

    tante. Il est des chevaux lourds la main ; maiscette rsistance provient de la longueur ou de la fai-

    blesse des reins, de la croupe troite, des hanches

    courtes, des cuisses grles, des jarrets droits, ou

    enfin (point important) d'une croupe trop haute outrop basse par rapport au garrot ; telles sont les v-ritables causes des rsistances ; le serrement de la

    mchoire, la contraction de l'encolure, ne sont que

    les effets.

    Je n'admets, par consquent, qu'une seule espce

  • 56

    de mors, et voici la forme et les dimensions que je

    lui donne pour le rendre aussi simple que doux :

    Branche droite de la longueur de 16 centimtres,

    partir de l'il du mors jusqu' l'extrmit desbranches ; circonfrence du canon, 6 centimtres ;la libert de la langue, 4 centimtres peu prs de

    largeur dans sa partie infrieure, et 2 centimtres

    dans la partie infrieure. Il est bien entendu que la

    largeur seule devra varier suivant la bouche du

    cheval.

    J'affirme qu'un pareil mors suffira pour soumettre

    l'obissance la plus passive tous les chevaux qu'on

    y aura prpars par l'assouplissement ; et je n'ai pas

    besoin d'ajouter que, puisque je nie l'utilit des morsdurs, je repousse, par la mme raison, tous lesmoyens en dehors des ressources du cavalier, tels

    que martingales, piliers, etc. (1).

    (1) Voir, dans le Dictionnaire raisonn d'quitation, les motsMors, Barres et Martingales.

  • YII

    ASSOUPLISSEMENT DE LA MACHOIRE

    ET DE L'ENCOLURE.

    Les flexions de la mchoire, ainsi que les deux

    flexions de l'encolure qui vont suivre, s'excutent

    en place, le cavalier restant pied. Le cheval sera

    amen sur le terrain, sell et brid, les rnes passessur l'encolure. Le cavalier vrifiera d'abord si le

    mors est bien plac et si la gourmette est attache

    de manire qu'il puisse introduire facilement sondoigt entre les mailles et la barbe. Puis, regardant

    l'animal avec bienveillance, il viendra se placer en

    avant de son encolure, prs de la tte, le corps droit

    et ferme, les pieds un peu carts pour assurer sa

    base et tre prt lutter avec avantage contre toutes

    les rsistances.

    Premire flexion de la mchoire.

    Pour excuter cette flexion, le cavalier, plac duct montoir, prendra avec la main droite la rne

  • 58

    gauche de la bride dix-sept centimtres de la

    bouche, et avec la main gauche la rne gauche du

    filet. Ces deux forces doivent agir en sens opposs.

    Si elles sont bien proportionnes la rsistance du

    cheval, elles amneront bientt la mobilit de la

    mchoire. La flexion droite s'excutera d'aprs

    les mmes principes et par les moyens inverses, lecavalier ayant soin de passer alternativement de l'une

    l'autre. Si la rsistance du cheval provient de la

    contraction trop grande des muscles releveurs, il

    faut opposer une force de haut en bas, jusqu' par-

    faite cession de la part du cheval, et vice versa. Il

    doit en tre ainsi pour toutes les flexions; il faut

    combattre les rsistances par la force qui leur est

    directement oppose.

    Quelquefois, le cheval recule par impatience ou

    par la maladresse du cavalier ; on n'en continue pas

    moins l'opposition des mains, lesquelles, dans ce

    cas, se portent en avant afin d'attirer le cheval et

    de faire opposition la force qui produit l'accule-

    ment. Si l'on a pratiqu compltement le travail

    prcdent, il sera facile, l'aide de la cravache,

    d'arrter le mouvement rtrograde qui est un puis-

    sant obstacle toute espce de flexions (Planche 1).

    I>dixime flexion.

    La deuxime flexion s'excute en prenant les deux

    rnes de la bride avec la main droite et les deux

  • Pa.

    PLANCHE 2

    PLANCHE 3

    LitkJJeccjuet

  • 59

    rnes du filet avec la gauche. En procdant comme

    pour la premire flexion, et si celle-ci a t bien

    faite, on obtient presque instantanment la mobilit

    de la mchoire. Sur quelques chevaux, la mchoire

    infrieure se dtache momentanment pour se refer-mer aussitt avec bruit. Cette espce de tic nerveux,

    de grincement de dents, doit tre combattu avec

    soin, car il finirait par augmenter la rsistance et

    s'opposerait la lgret (Planches 2 et 3).

    Troisime flexion.

    Le cavalier saisit, par exemple, la rne droite du

    filet avec la main gauche et la rne gauche avec la

    main droite dix-sept centimtres, puis il croise les

    deux rnes sous le menton de manire exercer une

    pression assez forte sur la barbe. Si la rsistance se

    prolongeait, le cavalier la ferait bien vite cesser par

    un frmissement rapide des poignets (Planche 4) (1).

    On comprendra facilement l'importance de ces

    flexions de mchoire. Elles ont pour rsultat de pr-

    parer le cheval cder aux plus lgres pressions

    du filet ou du mors, d'assouplir directement les

    muscles qui joignent la tte l'encolure. La tte de-

    vant prcder et dterminer les diverses attitudes

    (1) Les vibrations de mains peuvent tre employes dans toutes

    les flexions.

  • 60

    de l'encolure, il est indispensable que cette dernire

    partie soit toujours assujettie la premire. Gelan'aurait lieu qu'imparfaitement avec la flexibilit

    seule de l'encolure, puisque ce serait alors celle-ci

    qui dterminerait l'obissance de la tte en l'entra-

    nant dans son mouvement. L'opposition des mains

    s'engagera sans -coup, pour ne cesser qu' parfaite

    obissance du cheval, moins cependant qu'il ne

    s'accule ; elle diminuera ou augmentera son effet en

    proportion de la rsistance, de manire la dominer

    toujours sans trop la forcer. Le cheval, qui d'abordrsistera, finira par considrer la main de l'homme

    comme un rgulateur irrsistible, et il s'habituera

    si bien obir, qu'on obtiendra bientt, par une

    simple pression de rne, ce qui, dans le principe,

    exigeait une grande force.

  • Pape 61

    cster Levilly del

  • 61

    ASSOUPLISSEMENT DE L'ENCOLURE.

    Premire flexion latrale.

    Le cavalier se place comme pour les flexions de

    mchoire ; il saisira la rne droite de la bride avec

    la main droite seize centimtres de la branche du

    mors et la rne gauche avec la main gauche, dixcentimtres seulement de la branche gauche. Il rap-

    prochera ensuite la main droite de son corps enloignant la gauche de manire contourner lemors dans la bouche du cheval. Gomme pour lesflexions de mchoire, la force qu'il emploiera devra

    tre gradue et proportionne la rsistance seule

    de la mchoire et de l'encolure, afin de ne pas in-

    fluer sur l'aplomb qui donne l'immobilit au corps

    du cheval (Planche 5)

    .

    La flexion doit s'obtenir, non par un mouvement

    brusque de la tte, mais par petites cessions succes-

    sives. La main gauche suit tout naturellement lemouvement de la tte, et, lorsque celle-ci se trouve

    prs de l'paule droite, les deux rnes galement

    tendues maintiennent la tte oblique et verticale

    jusqu' ce qu'elle se soutienne d'elle-mme danscette position (Planche 6). Le cheval, en mchantson mors, constatera la mise en main ainsi que saparfaite soumission. Le cavalier, pour le rcom-

  • 62

    penser, fera cesser immdiatement la tension des

    rnes et lui permettra, aprs quelques secondes,

    de reprendre sa position naturelle. Mmes principeset moyens inverses pour la flexion gauche.

    Deuxime flexion.

    1 Le cavalier saisira la rne droite du filet, qu'il

    tendra en l'appuyant sur l'encolure, pour tablir un

    point intermdiaire entre la force qu'il emploie et

    la rsistance que prsentera le cheval ; il soutiendra

    la rne gauche avec la main gauche trente-trois

    centimtres du mors. Ds que le cheval cherchera viter la tension constante del rne droite en incli-

    nant sa tte droite, le cavalier laissera glisser la

    rne gauche, afin de ne prsenter aucune opposition

    la flexion de l'encolure. Cette rne gauche devra

    se soutenir par une succession de petites tensions

    spontanes, chaque fois que le cheval cherchera se

    soustraire, par la croupe, l'effet de la rne droite

    (Planche 7.)2 Lorsque la tte et l'encolure auront complte-

    ment cd droite, le cavalier donnera une gale

    tension aux deux rnes pour placer la tte vertica-

    lement. Le liant et la lgret suivront bientt cette

    position, et aussitt que le cheval constatera l'ab-

    sence de toute roideur par' l'action de mcher son

    frein, le cavalier fera cesser la tension des rnes,

  • Page 62.

    PLANCHE 7.

    PLANCHE 8.

    pp Levilly del. 1/dh.Becquetfrres

    .

  • Pae 63

    .

    PLANCHE 9.

    Hoster Levilly el.

  • 63

    en prenant garde que la tte ne profite de ce mo-

    ment d'abandon pour se dplacer brusquement.

    Dans ce cas, il suffirait pour la contenir d'un lger

    soutien de la rne droite. Aprs avoir maintenu lecheval quelques secondes dans cette attitude, on le

    remettra en place en soutenant un peu la rne

    gauche. L'important est que l'animal, dans tous ses

    mouvements, ne prenne de lui-mme aucune ini-tiative (Planche 8).

    La flexion de l'encolure gauche s'excutera

    d'aprs les mmes principes et par les moyens in-verses. Le cavalier pourra rpter avec les rnes de la

    bride ce qu'il aura fait d'abord avec celle du filet;

    cependant le filet devra toujours tre employ enpremier lieu, son effet tant moins puissant et plus

    direct. Si les flexions pied ont t bien faites, si

    elles ne laissent rien dsirer, celles cheval s'ob-

    tiendront facilement. Ces premiers exercices sont

    d'une grande importance, et le temps que l'on yconsacre abrge considrablement la dure des le-

    ons qui doivent suivre.

    Le cavalier doit scrupuleusement s'attacher faire

    flchir la mchoire avant l'encolure, de manire que

    cette dernire soutienne la tte et la suive, sans la

    devancer jamais.En principe, il n'y a pas d'encolure rsistante

    avec une mchoire moelleusement mobile.

    C'est presque toujours l'oppos quand la flexion

  • 64

    de l'encolure prcde celle de la mchoire. Les dents

    restent serres ou ne se dtachent qu'imparfaite-

    ment.

    La rsistance est toujours en raison directe dumutisme du cheval (1).

    Dans les flexions directes ou latrales, le cheval

    prsente encore une rsistance qu'il est difficile de

    dtruire, si l'on n'en connat la cause. C'est en fai-

    sant des forces que l'animal renouvelle ces luttes,

    que le cavalier n'annule qu'imparfaitement et aprs

    de longs efforts. J'entends par faire des forces, l'ac-

    tion du cheval qui contracte sa mchoire infrieure

    d'un ct ou de l'autre. Exemple : si l'on porte la

    tte du cheval droite, la mchoire infrieure se

    portera plus droite que la mchoire suprieure. 11

    faudra donc la ramener gauche pour obtenir sa

    vraie mobilit et une lgret complte.

    Ces exercices et les suivants sont faciles ex-

    cuter si le cavalier met scrupuleusement en pratique

    les moyens que j'indique et s'il suit en tout pointla gradation qui en assure le succs.

    (1) Ce mot, qui, sous le point de vue technique, ne manquepas de cachet, appartient un cuyer qui a parfaitement profitde quelques leons que je lui ai donnes. M. Cinizelli, aprs avoirreu les flicitations du roi de Sardaigne, fut, un jour, invit visiter le mange royal. Il formula ainsi son opinion sur les tra-vaux excuts devant lui : C'est trs-bien, mais vos chevaux sont muets. Ce mot, dans la bouche de l'cuyer, faisait toutsimplement allusion l'immobilit de la mchoire des chevaux.

  • Flexion directe ou ramener.

    On alternera les flexions latrales avec la flexiondirecte ou mise en main. Outre les moyens indiqus

    pour les flexions de mchoire , la flexion directe

    s'obtiendra encore avec la rne droite du bridon

    appuye sur l'encolure et tenue dans la main droite.Avec la main gauche, on prendra la rne du mmect trois centimtres de la bouche. Les deux

    rnes seront tendues graduellement, et leur action

    amnera le cheval a cder compltement de lamchoire et de l'encolure. (Voy. Planche 9.)

    Si l'encolure flchissait avant la mchoire, il fau-

    drait opposer une force spontane de la main, pour

    empcher cette flexion dfectueuse et prmature.Quelques jours de cet exercice assureront la

    lgret de la mchoire et de l'encolure.

    Il est indispensable que le cavalier se rende

    compte de la disposition du poids et des forces de sa

    monture ; car leur mauvaise rpartition retarderait

    le progrs de l'ducation.

    Supposons donc que, le cheval tant en place, le

    poids soit trop port sur l'avant-main. Dans ce cas,

    les rsistances seraient normes et presque insur-montables, si, au pralable, on ne forait le poids

    se reporter sur l'arrire-main par une pression sou-

    tenue du mors, ce qui se ferait sans chercher

  • G6

    obtenir aucune flexion. Par ce mouvement, le poids

    se combine tellement avec les forces, que l'on obtient

    aussitt toute la lgret dsirable. Si, au contraire,

    les forces taient toutes diriges sur l'arrire-main,

    ce qui provoquerait un mouvement de recul, il fau-

    drait attirer le cheval en avant, aprs s'tre assur,

    toutefois, en forant le reculer, si, malgr le mou-

    vement rtrograde, le poids n'est pas trop port sur

    le devant.

    Observation. Les flexions pied, incompltement

    faites, non-seulement sont sans effet satisfaisant,

    mais encore elles portent le cheval plutt aux rsis-

    tances qu'aux concessions qui sont les premiers l-

    ments de son ducation . La prolongation des flexions

    qui s'obtiennent facilement aurait son danger. L'en-

    colure s'amollirait au lieu d'tre liante ; elle s'isole-

    rait du corps, avec lequel, au contraire, elle doit

    s'identifier,

    pour tablir entre eux une espce de

    solidarit qui fait ragir, sur toute la masse, un l-

    ger dplacement de la tte et provoque promptement

    tous les changements de position dsirables.

    Lorsque le cheval se soumettra tous ces exer-

    cices, sans rsistance, ce sera une preuve que l'assou-

    plissement a fait un grand pas et que l'ducation

    premire est en voie de progrs.

  • Y III

    EFFETS DE MAINS (RNES).

    Nous avons avanc comme rgle invariable que,

    lorsqu'on soumet le cheval, pour les premires fois,

    l'action du frein, il faut l'emboucher avec un

    mors de bride accompagn d'un filet. Ajoutonsqu'on devra recourir aux effets de ce dernier dans

    les commencements de l'ducation du cheval, parce

    que sa puissance, moins grande que celle de la

    bride, a une action plus directe pour faire cder

    l'encolure droite et gauche. En effet, pour le

    ramener, le filet ne reprsente qu'un levier de 3 e

    genre, tandis que le mors avec branches et gour-

    mette est un levier de 2e genre. Pour le ramener et

    les mouvements rtrogrades du corps, la puissance

    du mors est suprieure celle du filet ; mais pour

    les premiers dplacements de la tte du cheval et

    la rpression de rsistance venant du ct droit ou.

    du ct gauche, l'usage du filet amnera des rsul-

  • tats plus prompts, parce que, compos de deux

    pices, il a un effet local qui agit sur un des cts

    de la bouche du cheval. Les mmes effets, avec lesrnes de bride spares, ne peuvent agir ni aussi

    directement ni aussi isolment sur l'une des deux

    barres; car la seule pice qui compose le mors agit

    ncessairement sur toute la mchoire et rend, par

    cela mme, l'intention du cavalier moins claire

    l'intelligence du cheval. De l hsitation et lenteur

    d'un ct, impatience et colre de l'autre, et sou-

    vent luttes regrettrables qui ne se terminent pas

    toujours l'avantage du cavalier.Je sais qu' la rigueur un cuyer peut se passer

    du filet, comme il peut aussi ne se servir que du filet

    pour dresser un cheval, mais ce n'est qu'une excep-

    tion qui justifie la rgle.

    On se servira donc, en commenant, des rnes

    du filet, une dans chaque main; les rnes de bride,

    runies dans la main gauche leur position nor-

    male, seront lgrement flottantes. La rne gauche

    du filet sera contenue entre le pouce et l'index de

    la main gauche; la rne droite, contenue entre lepouce et les trois premiers doigts, passera sur le

    petit doigt de la main droite. Ces dispositions faci-literont l'emploi du filet pour les inclinaisons d'en-colure.

    Si, dans les flexions, le cheval portait au vent,

    on passerait les rnes du filet dans la main droite,

  • pour que la main gauche, par une tension gale desdeux rnes de bride, exert une pression du morsqui dtruise la rsistance et ramne la tte dans laposition verticale. Cette attitude rendra le cheval

    plus soumis aux effets des rnes du filet.

    Cette premire flexion s'exercera, d'abord enplace, puis au pas.

    Ce travail, fait convenablement pied, deviendrafacile cheval.

    Tout exercice obtenu primitivement avec les

    rnes de filet, sera pratiqu ensuite avec les rnes

    de bride, pour amener la tte du cheval droite, gauche, ou dans la position verticale, et obtenir la

    mise en main. L'excution des flexions latrales

    avec les rnes de bride prouvera un progrs, puis-

    qu'elle s'obtiendra l'aide de moyens moins di-rects.

    11 est inutile de faire observer qu'avant de passer

    d'une flexion latrale une autre, il faut saisir l'ins-

    tant o la tte se trouve dans le prolongement de laligne des paules et de la croupe, afin de mettre le

    cheval en main, par une tension gale des deux

    rnes de la bride. Cette observation s'applique ga-lement toutes les flexions excutes aux diffrentes

    allures.

    Le travail d'arrire-main, ou commencement des

    pirouettes renverses, se pratiquera par la tension

    plus grande de la rne oppose au ct o marchera

  • 70

    la croupe. Si elle se porte gauche, la rne droite

    se soutiendra avec plus d'nergie (et vice versa), afin

    de matriser les rsistances que doivent faire natre

    des mouvements nouveaux pour l'animal. Aussitt

    que le cheval obira la jambe, on cessera l'actionisole d'une des rnes de filet ou de bride ; car ce

    moyen n'tant que le correctif des rsistances doit

    tre abandonn ds qu'il est sans but. Les rnesdeviennent alors inutiles comme force d'opposition

    et ne servent plus qu' maintenir l'attitude la plus

    convenable pour que le cheval demeure bien plac

    et gracieux dans ses mouvements.

    Pour les pirouettes ordinaires, droite, par

    exemple, on cartera la rne droite du filet, en

    modrant son action avec la gauche. La rne droitebranlera l'avant-main, l'autre fixera la croupe afin

    qu'elle serve de pivot. La main de la bride doitterminer tous les mouvements, pour habituer le

    cheval obir sa seule action.

    Observons en passant que l'emploi du filet n'est

    que prparatoire l'usage exclusif de la bride.

    Quand le cheval obira cet agent, la main de labride seule agira pour commencer ou pour finir

    les mouvements.

    Au pas, sur la piste, on rptera les mmesflexions latrales d'encolure, en cartant faiblement

    les rnes du filet d'abord et les rnes de la brideensuite.

  • 71

    Mme exercice pour les changements de direc-tion.

    Le cheval rpondant aux moindres tensions desrnes de filet ou de bride, on les remplacera par un

    nouvel effet de rnes, qui disposera ses forces pour

    rpartir le poids de la manire la plus favorable aumouvement.

    Il servira encore, par une juste opposition de lamain, corriger les carts de la croupe, et placer,

    point important, le cheval parfaitement droit ; c'est-

    -dire, la croupe sur la ligne des paules.

    Ce nouvel effet de rnes transportera le poids

    d'une partie sur l'autre sans dtruire l'harmonie

    des forces. Rsultat jusqu'alors inconnu.Prcdemment, en rtablissant l'quilibre du

    poids, on dtruisait souvent l'ensemble des forces;

    puis, en rtablissant l'quilibre des forces, on rame-

    nait le poids sa mauvaise disposition premire.

    N'est-ce pas l un travail sans fin ?

    Expliquons le moyen qui, malgr sa simplicit, varemdier ces ttonnements infructueux.

    Les premiers assouplissements ont mis l'animal

    mme de rpondre ce nouveau procd.Le cheval tant au pas, on sparera les rnes de

    la bride, une dans chaque main. Si l'on dbute parla rne droite, la main droite se portera gauche etappuiera la rne contre l'encolure. Celle-ci se con-

    tournera, la tte s'inclinera, et les paules du cheval

  • se porteront lgrement gauche. La pression op-

    portune des jambes dterminera au besoin la croupedans le sens du mouvement (les mmes rsultatss'obtiendront avec la rne gauche). La position

    propre ce changement de direction s'obtient, en

    partie, par des effets de rnes savamment pratiqus.

    Les mmes rsultats s'obtiendront galement toutesles allures, y compris le travail sur les hanches.

    Puis il arrivera un moment o l'ducation ducheval, plus complte, permettra de se dispenser

    mme du secours des jambes. (Descente de jam-bes.) Il est bien entendu que ces effets de rnes de

    bride spares, obtenus soit par cartement, tension

    ou pression sur l'encolure, ont pour but d'amener

    le cheval obir l'action seule de la main de labride.

    Aprs ces exercices, la main gauche seule suffira faire excuter les changements de direction. ceteffet, avant de se porter du ct dterminant, la

    main, en se contractant, fera sentir toute sa force

    d'opposition, sans se rapprocher du corps. Cet effet

    concentr de la puissance de la main demande qu'aupralable l'gale tension des rnes permette de sen-

    tir facilement la bouche du cheval ; il devra com-

    plter la lgret du cheval avant que celui-ci seconforme la nouvelle inclinaison. Ce temps bien

    compris, l'animal tournera la simple indication

    de la main, si, comme je l'ai dj recommand, on

  • 73

    saisit le moment o la tte passe par la ligne pro-longe de la croupe et des paules, pour oprer lamise en main avant de changer l'inclinaison d'unct ou d'un autre.

  • IX

    EFFETS DE JAMBES.

    Si je demandais au premier cavalier venu les

    moyens pour changer de direction, il me rpon-drait assurment : Si vous voulez tourner droite,portez la main droite et faites sentir la jambe dumme ct.

    C'est, en effet, le principe que tous les traits

    d'quitation, jusqu'au mien, ont donn comme leseul efficace pour ce mouvement. Mais tant d'er-

    reurs se sont riges en principes, que j'ai voulu

    m'assurer de l'exactitude de ce dernier.

    J'ai donc, pour tourner droite, par exemple,

    port la main droite et fait sentir la jambe dumme ct.

    Quelque lgret qu'et mon cheval sur la lignedroite et bien que j'eusse fait sentir la jambe indi-que, j'prouvais souvent une rsistance dont, long-temps, j'ai cherch la cause et les moyens de ladtruire.

  • 75

    L'exprience m'a dmontr que souvent, parsuite de l'action de la jambe droite, la croupe seportant gauche, empche, par sa mobilit, le

    poids de se fixer sur le point d'appui ncessaire au

    pivot de conversion et jette ainsi de l'irrgularit et

    de l'incertitude dans le mouvement.

    La rpression de cette rsistance exige naturel-

    lement, me suis-je dit, l'emploi de la jambe gauche.J'adoptai donc ce moyen comme correctif. Il me

    donna d'abord des rsultats surprenants, mais lapersistance de son emploi devint la source d'une

    autre rsistance.

    La croupe, porte trop droite par la pression

    de la jambe gauche, s'arc-boutait, pour ainsi dire,contre l'paule droite, et paralysait ses mouve-

    ments.

    Aprs de minutieuses observations, je conclus

    donc que l'emploi exclusif de l'une ou de l'autre

    jambe ne peut tre prescrit comme principe absoludans les changements de direction, puisque, destin

    prvenir, il provoque, au contraire, des rsis-

    tances.

    En effet, quand je veux placer le cheval pour lechangement de direction, j'ignore de quel ct vien-dra la rsistance, puisque la croupe peut se drober

    droite ou gauche; j'ignore mme s'il y aurarsistance. Il n'est donc pas rationnel de dtermi-

    ner, priori, l'emploi exclusif de l'une ou de l'autre

  • 76

    jambe, et le principe, reconnu faux, doit tre aban-donn.

    Revenons donc aux vrais principes de l'quila-

    tion :

    La main seule donne la position, les jambes don-nent l'impulsion.

    Si, d'aprs les prescriptions formelles de ma m-thode, vous avez dirig l'ducation de votre cheval

    de manire lui donner une juste rpartition du

    poids et des forces, le changement de direction lui

    deviendra aussi facile que la marche sur la ligne

    droite. Le cheval tant bien plac obira