mémoire du toxicologie toxicité des fibres minérales artificielles dr fremiot thierry 19.08.2006

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Page 1 UNIVERSITE VICTOR SEGALEN BORDEAUX II UFR DES SCIENCES PHARMACEUTIQUES LABORATOIRE DE TOXICOLOGIE ET D’HYGIENE APPLIQUEE DU Pr E.E. CREPPY MEMOIRE POUR L’OBTENTION DU DIPLOME UNIVERSITAIRE DE TOXICOLOGIE ET HYGIENE INDUSTRIELLE ANNEE 2005-2006 TOXICITE DES FIBRES MINERALES ARTIFICIELLES (FMA) Présenté par le Dr Thierry FREMIOT

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UNIVERSITE VICTOR SEGALEN BORDEAUX II

UFR DES SCIENCES PHARMACEUTIQUES LABORATOIRE DE TOXICOLOGIE ET D’HYGIENE

APPLIQUEE DU Pr E.E. CREPPY

MEMOIRE POUR L’OBTENTION DU DIPLOME UNIVERSITAIRE DE TOXICOLOGIE ET HYGIENE

INDUSTRIELLE ANNEE 2005-2006

TOXICITE DES FIBRES MINERALES ARTIFICIELLES (FMA)

Présenté par le Dr Thierry FREMIOT

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SOMMAIRE

1 INTRODUCTION : page 2 1-1 Généralités : page 2

1-2 Classification, Production, Utilisation : page 2 1-3 Effets sur la santé : page 8

2 PATHOLOGIES LIEES À L’AMIANTE ET À D’AUTRES FIBRES MINERALES NATURELLES : page 10 2-1 Ce que l’on sait sur l’amiante : page 10 2-1-1 Pathologies bénignes : page 13 2-1-2 Pathologies malignes : page 14 2-1-3 Mécanismes de toxicité de l’amiante : page 16 2-2 Ce que l’on sait sur les autres fibres naturelles : page 26

3 TOXICOLOGIE DES FIBRES MINERALES ARTIFICIELLES : page 25 3-1 Effets des FMA sur la santé : page 28 3-1-1 Atteinte cutanée : page 29 3-1-2 Autres pathologies non pulmonaires : page 29 3-1-3 Atteintes thoraciques : page 30 3-2 Effets in vivo des FMA : page 40 3-3 Effets in vitro des FMA : page 46 3-3-1 Réactivité physico-chimique des FMA : page 48

4 LEGISLATION ET MESURES DE PREVENTION : page 56 4-1 Réglementation : page 56 4-2 Prévention : page 63

5 CONCLUSION : page 67

6 GLOSSAIRE : page 68

7 BIBLIOGRAPHIE : page 70

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I INTRODUCTION 1-1 Généralités Les fibres minérales artificielles sont commercialisées depuis le début du XXème siècle. En 2001 on a estimé que plus de 9 millions de tonnes de fibres minérales artificielles (FMA), (man-made vitreous fibres-MMVF) .ont été produites sur terre (IARC 2001). Le recul de l’amiante du fait de ses effets délétères sur la santé, en particulier par la survenue de cancer (mésothéliomes et cancer bronchiques) a contribué à l’essor de l’utilisation des FMA dans des utilisations principales d’isolation thermique, acoustique et électrique. Ces FMA ont-elles un potentiel cancérogène pour l’homme ? Et d’autres pathologies sont elle connues ou à craindre ? Doit on craindre ce que certains appellent l’effet fibres (G2SAT, 1997) ? Que se passe-t-il réellement au niveau moléculaire in vivo ? 1-2 Classification, Production, Utilisation La famille des FMA correspond à un sous-ensemble des fibres minérales artificielles (Nomenclature Committee of TIMA, 1991). Les fibres minérales artificielles se différencient des fibres naturelles minérales de par leur origine. Et les fibres artificielles se différencient des fibres organiques. La Classification simplifiée des matériaux fibreux est indiquée dans le tableau 1 (Nomenclature Committee of TIMA, 1991) Les FMA, correspondant donc à une appellation générique, sont fabriquées (man-made) à partir de matériaux fibreux inorganiques : verre, roche, laitiers, minéraux et oxydes inorganiques traités, ce qui explique en partie la variabilité de composition chimique du produit final. La fibre est un solide qui s’est formé naturellement ou artificiellement selon un axe allongé et les hygiénistes industriels ont définis les fibres comme des particules dont le rapport longueur/diamètre est supérieur ou égal à 3. Les FMA ont une structure amorphe et sont fabriquées selon différents procédés basés sur la fusion d’oxydes inorganiques en une fine coulée à très hautes températures. La plus grande partie des FMA commercialisées sont à base de sable apportant de la silice et contiennent des quantités variables d’autres espèces d’oxydes inorganiques qui sont essentiellement de l’alumine, du

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bore, du fer, du zirconium, des oxydes alcalins (Na2O, K2O) et des oxydes alcalino-terreux (CaO, MgO). Ces composants additionnels sont soit des constituants naturels des matières premières utilisées lors de la fabrication des FMA, soit des constituants ajoutés pour améliorer le process de fabrication ou améliorer les qualités de la FMA produite. La composition des FMA est donc variable et non immuable. Tableau 1 – Classification simplifiée des matériaux fibreux (d’après Nomenclature Committee of TIMA, 1991)

Amiantes : serpentines (chrysotile) et amphiboles (amosite, crocidolite, antophyllite, trémolite/actinolite) Wollastonite Attapulgite Sépiolite Vermiculite

Inorganiques (ou minérales)

Zéolite (érionite) Végétales : coton, cellulose

Fibres naturelles

Organiques Animal : laine Métalliques : laine d’acier Non métalliques cristallines ou partiellement cristallines : carbone, oxyde de zirconium, alumine, carbure de silicium, céramiques

Inorganiques

Non métalliques vitreuses (FMA ou MMVF) : filament continu de verre, laine de verre, laine de roche, laine de laitier, microfibres de verre, fibres céramiques réfractaires

Fibres artificielles

Organiques Polyvinylalcool (PVA), polypropylène, polyéthylène, plyamide, polyaramide, polyester, polyacrylonitrile

Le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC/IARC) dans une monographie de 2002 classe les fibres en fonction des matériaux bruts utilisés pour leur fabrication, du processus de production et/ou de l’application du produit final.

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On trouvera ci-dessous cette classification ainsi que celle de De Vuyst (1995) qui donne les principales utilisations des différentes FMA et la composition chimique typique de différentes FMA (IARC, 2001). Tableau 2 : Catégories de FMA (monographie du CIRC, 2001) Filaments Filaments continus de verre

Laines de verre : laines d’isolation et laines à usage spécial Laines de roche Laines de laitier Fibres céramiques réfractaires

Laines

Autres fibres

Tableau 3 : Classification des FMA (De Vuyst, 1995)

Type de fibre Diamètre moyen

des fibres en µm Principales utilisations

Filament continu de verre (FCV)

5 à 16 Matériaux de renforcement de plastiques et ciments Papier/Caoutchouc/Textiles Isolation électrique

Laine de verre (LV) Laine de roche (LR) Laine de laitier (LL)

4 à 6 4 à 6 3 à 8

Isolation thermique Isolation acoustique Protection anti-incendie (laine de roche et laitier) Dispositifs de ventilation/air conditionné Support de culture (horticulture)

Fibres céramiques réfractaires (FCR)

1.2 à 3.5 Isolation de fours industriels Isolation thermique

Microfibres de verre (MFV)

0.1 à 3 Isolation thermique à haute efficacité (aéronautique, aérospatiale) Isolation acoustique haute efficacité Filtration Batteries

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L’utilisation des FMA détaillée dans le tableau 3 peut être résumée comme ci-dessous :

� Filaments continus de verre : utilisation principale = renforcement de matériaux composites avec des résines thermoplastiques

� Laines de verre, laine de roche, laine de laitier : utilisation principale =

isolation thermique et acoustique

� Fibres céramiques réfractaires : utilisation principale = isolation thermique à hautes températures

� Fibres nouvelles : utilisation principale = isolation thermique à hautes

températures en remplacement des FCR On retiendra l’utilisation spécifique des FCR en application industrielle pour l’isolation thermique de fours industriels, de hauts fourneaux, de moules de fonderie, de tuyauteries, de câbles, la fabrication de joints, et aussi des applications automobiles et aéronautiques et dans la protection contre l’incendie. Les FCR résistent jusqu’à 1260°C et même jusqu’à 1450°C pour les fibres contenant de la zircone. Leurs propriétés physico-chimiques particulières en font un matériau de choix pour l’isolation thermique à haute température. La composition chimique des FMA est variable et elle est détaillée dans le tableau 4. Des chercheurs ont proposé pour classer ces fibres, l’utilisation d’un coefficient basé sur la composition chimique de la fibre : KNB = somme des pourcentages en poids de Na2O, de CaO, de K2O, BaO et de MgO. Il aurait peut être été plus pertinent de prendre les masses molaires, plus représentatives du nombre relatif de molécules. Ce coefficient, proposé par l’Association des industries européennes des laines minérales d’isolation (EURIMA) a été adopté comme élément de base du classement de la dangerosité des FMA par l’Union Européenne, car étant un facteur prédictif de la solubilité des fibres, donc de leur biopersistance, biopersistance, on le verra qui semble corrélée avec le pouvoir pathogène potentiel à long terme des fibres.

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Tableau 4 : Compositions chimiques typiques de différentes FMA en

pourcentage de poids des divers éléments de la composition (monographie de l’IARC, 2001) Filaments

continus de verre (FCV)

Laines de verre (LV)

Laines de roche (LR)

Laines de laitier (LL)

Fibres céramiques réfractaires (FCR)

Laines silicates alcalino-terreux

Laines à forte teneur alumine faible teneur silice

Fibres isolation

Fibres usage spécial

SiO2 52-75 55-70 54-69 43-50 38-52 47-54 50-82 33-43

Al2O3 0-30 0-7 3-15 6-15 5-16 35-51 <2 18-24

CaO 0-25 5-13 0-21 10-25 20-43 <1

MgO 0-10 0-5 0-4.5 6-16 4-14 <1

BaO 0-1 0-3 0-5.5

ZnO 0-5 0-4.5

Na2O 13-18 0-16 1-3.5 0-1 <1

K2O 0-2.5 0-15 0.5-2 0.3-2 <1

B2O3 0-24 0-12 4-11 <1 <1 <1

Fe2O3 0-5 0-5 0-0.4 0-5 0-1 <1

FeO 3-8 3-9

TiO2 0-12 0-0.5 0-8 0.5-3.5

0.3-1 0-2 0.5-3

ZrO2 0-18 0-4 0-17 0-6

P2O5 <1 0-0.5

F2 0-5 0-1.5 0-2

S 0-2

SO3 0-0.5

Li2O 0-1.5 0-0.5

(en gras les éléments du KNB, coefficient utilisé pour la classification européenne) Comme on l’avait déjà indiqué, les compositions différent considérablement car chaque type de fibre est conçu pour une utilisation donnée avec un cahier des charges de performances spécifique : résistivité électrique, résistance aux agents chimiques, aux températures élevées, à l’humidité, à la fatigue … Les industriels ont donc conçus des fibres avec des compositions variables selon l’utilisation recherchée. On signalera que les industriels ont développé des nouvelles FMA : les fibres en silicates alcalino-terreux ou fibres AES (alkaline earth silicate) commercialisées

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depuis 1991 seulement (avant dernière colonne du tableau), apparentées aux FCR, mais présentant des différences notables (en particulier sur la biopersistance pulmonaire sur laquelle nous reviendrons plus loin). Egalement introduction dans les années 1990 de la laine de roche à forte teneur en alumine et faible teneur en silice (laines HT : dernière colonne du tableau), la richesse en aluminium apportant à ces laines des propriétés de résistance à des températures supérieures à 1000°C. Et toutes ces FMA peuvent contenir des additifs autres :

� liants (qui protégeront les filaments de l’abrasion ou bien permettront le maintien des fibres…), qui peut être un liant organique, en général une résine phénol-formaldéhyde, en quantité variable selon la FMA considérée

� revêtement en fonction de l’utilisation finale (films d’acétate de polyvinyle, de polyuréthane, d’amidon, de résines époxy, d’agents de couplage comme les organosilanes, des modificateurs de pH comme l’acide acétique, l’acide chlorhydrique, les sels d’ammonium, des lubrifiants par exemple huiles minérales et des surfactants

� huiles minérales (ou autres lubrifiants) pour réduire la formation de poussière lors de la transformation

� agents antistatiques, stabilisateurs….. Sur le plan européen, la Directive européenne 97/69/CE du 5 décembre 1997 (transposée par l’arrêté du 28 août 1998 et sa circulaire DRT99/10 du 13 août 1999) a donné une définition des principaux groupes de FMA. Cette classification est importante car selon les compositions les fibres sont classées dans les différents groupes de cancérogénicité. Sont considérées comme FCR des fibres artificielles vitreuses à orientation aléatoire, dont la composition chimique correspond à un contenu en oxydes alcalins et alcalino-terreux inférieur ou égal à 18% (selon le coefficient KNB = somme des pourcentages de Na2O, de CaO, de K2O, BaO et de MgO). Les FCR sont des verres de silice-alumine et non des silicates d’alcalins et d’alcalino-terreux et c’est l’absence de ces éléments et essentiellement du Ca et du Na qui confère à ces matériaux leur caractère réfractaire (tenue au delà de 1000°C) et leur très faible solubilité en milieu aqueux. Certaines FCR contiennent également des oxydes de zirconium, de chrome et de fer. Dans ce groupe sont également classées les fibres à usage spécial (special purpose fibre), soit les microfibres, dont la composition n’est pas très différente de celle des fibres de verre, mais

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dont le diamètre moyen est plus fin, inférieur à 1 micron. A noter que ces microfibres ont un contenu d’alcalins et alcalino-terreux supérieur à 18%. Ces microfibres sont utilisées en filtration et en applications aérospatiales. Sont considérées comme des laines minérales par la même directive européenne des silicates ou silico-aluminates vitreux, avec fibres à orientation aléatoire et une composition chimique où la somme des oxydes alcalins et alcalino-terreux (le KNB) dépasse les 18%. Il existe 3 types de laine, laine de roche, de verre et de laitier qui différent par leur composition chimique, de par les matières premières utilisées et les technologies de fabrication utilisées. Pour la laine de roche la matière première est une roche, le basalte, additionnée de 10 à 20% de laitier de hauts fourneaux. Pour la laine de verre la matière première est du sable avec divers additifs. Pour la laine de laitier la matière première est un laitier. Les usages sont différents pour ces 3 laines. Les filaments continus sont des fibres de verre obtenues avec une technique différente permettant d’obtenir des fibres parallèles de diamètre supérieur à 4 microns. Nous ne rentrerons pas dans le détail des compositions et des utilisations des différentes FMA. Il faudrait distinguer par exemple les 4 types de filaments continus de verre (E,C,R et AR)…. La thèse de Dika Nguea Hermine (2005) résume très bien ce point. 1-3 Effets sur la santé des FMA Les effets sur la santé des FMA sont importants à déterminer. Ces fibres remplacent l’amiante. L’amiante c’est actuellement un scandale sanitaire, ce sont des milliers de cas de mésothéliomes et de cancers du poumon en France, la plupart étant à venir. Les questions que l’on doit se poser sont :

� les FMA ont-elles ou bien n’ont-elles pas le même potentiel fibrosant pulmonaire ? cancérogène pour le poumon ? la plèvre ?

� Et les arguments qui ont permis de les classer sont ils suffisants ? Insuffisants ?

� Leurs dangers ont-ils été sous-estimés ? Surestimés ? � Quel est l’action au niveau moléculaire in vivo de ces fibres ?

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C’est ce que nous allons essayer de voir à la lecture des différents et nombreux travaux qui leur ont été consacrés, dont les résultats diffèrent selon les auteurs et dont l’interprétation varient également selon les experts qui les ont étudiées.

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II PATHOLOGIES LIEES A L’AMIANTE ET A D’AUTRES FIBRES MINERALES NATURELLES Chronologiquement ce sont les amiantes qui ont montrés les premières leur carcinogénicité. On rappellera donc les pathologies respiratoires liées à l’amiante. Ensuite on fera un état des lieux sur ce que l’on sait déjà sur les FMA. Il faut de suite considérer que l’amiante a montré sa cancérogénicité en premier, suite à des études épidémiologiques alors que, pour les FMA, ce sont les études expérimentales surtout qui recherchent le potentiel pathologique, en particulier cancérogène.

Chrysotile fibres d’amiante en microscopie electronique 2-1 Ce que l’on sait sur l’amiante L'amiante est bon marché, ne brûle pas, résiste aux produits chimiques agressifs, et est un bon isolant contre la chaleur, les sons et l'électricité. De plus, les fibres d'amiante tissées résistent mieux à la traction que l'acier. Il n'est donc pas étonnant qu’il y ait eu un tel engouement pour ce produit naturel, facilement extractible (mines à ciel ouvert) et peu onéreux. L'amiante a été utilisé en grandes quantités des années 50 aux années 80 mais est connue et utilisée depuis l’antiquité. La ville d’Asbeste, au Québec, lui doit son nom du fait de son exploitation à ciel ouvert (du grec Asbestos : inextinguible). Le terme d’amiante (du grec : incorruptible) désigne plutôt l’amiante blanc ou chrysotile. La composition chimique de l'amiante n'a rien d' « inquiétant ». Le terme «amiante» désigne une série de minéraux naturels des groupes des amphiboles et des serpentines. La majeure partie de ces minéraux est extraite au Canada, en Russie, en Chine et au Kazakhstan, principalement dans des carrières à ciel ouvert. Comme environ 25% des minéraux et 90% de l’écorce terrestre, les amiantes sont des silicates (on ne considère plus les silicates comme des sels d’acides

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siliciques, mais comme des assemblages de tétraèdres quasi réguliers (Si, AlO4), dont les centres sont occupés par des ions silicium ou aluminium, et les sommets par des ions oxygène.). L’unité de base, SiO2, extrêmement stable est de structure tétraédrique avec un atome de silicium au centre et quatre atomes d’oxygène sur chacun des quatre sommets. Les silicates sont classés selon le mode s’assemblage de ces tétraèdres :

les silicates en ruban sont formés par l’association de 2 chaînes de tétraèdres liées par 2 de leurs sommets : ce sont les amphiboles

les silicates en feuillets ou phyllosilicates sont formés de tétraèdres liés par 3 oxygènes de leurs sommets : ce sont les serpentines dont le chrysotile.

Environ 30 silicates minéraux peuvent se cristalliser naturellement sous forme fibreuse. On ne qualifie, par usage, d’amiante ou d’asbeste que 6 d’entre eux : le chrysotile, ou asbeste blanc principal représentant des serpentines et les amphiboles fibreux qui sont : l’amosite (Etats-Unis surtout), l’antophyllite (surtout en Finlande), la crocidolite (Asbeste bleu surtout en Afrique et en Grande Bretagne) et le groupe actinolite-trémolite (souvent associé au talc).

Le chrysotile est un silicate de formule : (Si05)n. Sur une des faces vient se fixer un feuillet de brucite de structure (MgOH2)n. Lors de l’accolement des 2 feuillets, la différence de dimension des 2 réseaux induit un enroulement du cristal et la fibrille de base constituée forme un cylindre creux. Les fibres de chrysotile sont constituées d’une multitude de fibrilles disposées concentriquement dans le sens de l’axe de la fibre. Les amphiboles ont un cristal de base plus simple, constitué d’une double chaîne de Si04. Les différents amphiboles se différencient en fonction des cations qui lient les rubans : Mg et Fe pour l’anthophyllite et l’amosite,

Ca, Mg et Fe pour l’actinolite et le trémolite Na et Fe pour le crocidolite

La composition chimique des échantillons de l’UICC montre qu’il y a une nette variabilité au sein des amphiboles (substitution par Mg, Al…) comme du chrysotile (Fe et Al). La contamination des asbestes par des métaux rares, potentiellement cancérigènes doit retenir notre attention : nickel, chrome (0,1% dans le chrysotile et l’antophyllite), manganèse (1,5% dans l’amosite). Et toutes les substitutions sont possibles dans le chrysotile au niveau du magnésium de la couche de brucite.

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De surcroît, la présence de benzo-(a)-pyrène, qui est un hydrocarbure polycyclique aromatique (HPA) cancérigène bien connu a été mis en évidence dans le chrysotile et surtout les amphiboles. La stabilité du chrysotile est limitée et in vitro, la lixiviation (action des solutions acides faibles), certains agents mouillants et, à un moindre degré l’eau, entraînent une dissolution du magnésium de la couche de brucite ce qui a pour effet d’accroître la surface de contact avec le milieu environnant. Un phénomène identique survient in vivo ce qui peut expliquer la dissolution progressive des fibres lors d’un contact prolongé ainsi que l’absorption à leur contact des divers composants biologiques (protéines et fer). Au contraire, pour les amphiboles, la surface, semblable à la silice, est moins importante que celle du chrysotile et moins polarisée. De fait les potentialités d’absorption des amphiboles sont moins élevées que celles du chrysotile, d’où une plus grande biopersistance (Boutin et al, 1984). Monchaux (Monchaux et al., 2000) a montré chez le rat qu’une lixiviation acide du chrysotile entraînait une perte de tout ou partie de son potentiel carcinogène après inoculation intrapleurale, alors qu’au contraire, les amphiboles, résistants aux acides, conservaient leur potentiel cancérogène. De plus les fibres d’amiante, surtout de chrysotile peuvent subir des clivages longitudinaux importants dans la genèse des fibres. Depuis déjà plusieurs décennies on pouvait prévoir les désastres liés à l’utilisation sans précautions de l’amiante. Les propriétés toxiques de l’amiante pour le poumon ont été mises en évidence dés 1900 pour la fibrose* (*définition dans le glossaire) pathologie liée aux fortes expositions, mais plus tard, en 1960 pour le mésothéliome* (Wagner et al., 1960). Depuis, ce sujet a fait couler beaucoup d’encre et de nombreuses études, monographies, expertises (Expertise collective INSERM, 1996…), conférence de consensus (Conférence de Consensus, 1999), et autres (Nebut et al., 1984 ; Hirsch, 1986 ; Brochard et al., 1995 ; Boutin et Viallat, 1996 ; De Vuyst et al., 2000 ; Monnet et al., 2000 ; De Vuyst et al., 2001…) ont fait le point sur les connaissances tant expérimentales qu’épidémiologiques. L’amiante est responsable de pathologies bénignes et malignes (Nebut et al., 1984 ; Hirsch , 1986 ; Brochard et al., 1995 ; Boutin et Viallat, 1996 ; Conférence de consensus, 1999 ; De Vuyst et al., 2000 ; Monnet et al., 2000 ; De Vuyst et al., 2001…).

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2-1-1 Pathologies bénignes :

� Asbestose : fibrose interstitielle pulmonaire secondaire à l’exposition prolongée et intense à l’amiante, une dose minimum cumulée de 25 fibres/ml X années semblant nécessaire à sa survenue et à sa détection.. C’est une pathologie cliniquement, radiologiquement et fonctionnellement proche de la fibrose pulmonaire idiopathique* et des fibroses pulmonaires secondaires à certaines maladies systémiques ce qui peut poser des problèmes de diagnostic différentiel. Bien que d’évolutivité faible, cette fibrose expose au risque de survenue d’une insuffisance respiratoire. L’évolutivité de la fibrose, qui n’est pas réversible, est sans doute favorisée par le tabagisme. C’est un témoin important puisque celui d’une exposition intense.

� Pathologies pleurales bénignes qui regroupent :

� Pleurésie asbestosique bénigne, qui est un épanchement pleural, souvent récidivant, éventuellement bilatéral, seule pathologie due à l’amiante pouvant survenir dans les 10 premières années d’exposition, le délai d’apparition variant de 1 à 50 ans et qui peut évoluer vers une fibrose pleurale diffuse et s’accompagner de lésions pulmonaires rétractiles (atélectasie ronde et bandes parenchymateuses en « pied de corneille »)

� Plaques pleurales qui sont des épaississements fibrohyalins circonscrite de la plèvre pariétale, manifestation la plus fréquente de l’exposition à l’amiante, tant professionnelle qu’environnementale, en faisant un important stigmate d’exposition. Leur prévalence est fonction du délai depuis le début de l’exposition. Leur présence ne semble pas indiquer un niveau d’exposition particulier, ni constituer un facteur de risque supplémentaire d’asbestose, de cancer broncho-pulmonaire ou de mésothéliome. Leur évolutivité est lente ou nulle. Il n’existe aucun traitement.

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� Epaississement pleural diffus qui consiste en une fibrose de la plèvre viscérale avec symphyse entre les 2 feuillets de la plèvre. Il peut être la séquelle d’une pleurésie asbéstosique bénigne. Il n’est pas spécifique de l’exposition à l’amainte.

2-1-2 Pathologies malignes :

Mésothéliome Le mésothéliome est une tumeur maligne primitive développée à partir des séreuses, précisément à partir du mésothélium (mésothélium = endothélium des séreuses) : plèvre, péritoine, péricarde voire vaginale testiculaire. C’est le mésothéliome pleural qui est de loin le plus représenté. De par l’inhalation, la plèvre est la séreuse la plus facilement atteinte (par contre le péritoine sert pour les expérimentations animales, on y reviendra par la suite). Il s’agit d’une tumeur rare (incidence annuelle 1 à 5/million chez la femme et 2 à 50/million chez l’homme), qui n’a pas de rapport avec l’intoxication tabagique. Par contre l’exposition à l’amiante est retrouvée comme facteur étiologique dans 70 à 80% des cas avec un temps de latence en moyenne de 35 ans. Pour Hillerdal (Hillerdal, 1999) le temps de latence, qui est corrélé à la dose inhalée, est en moyenne de 29.6 ans chez les travailleurs de l’isolation et de 51.7 ans chez les femmes exposées uniquement en domestique. Si l’on fait un détail des différentes amiantes, la crocidolite et l’amosite (amphiboles) sont plus souvent en cause que le chrysotile (serpentine). En dehors des cas professionnels, des cas d’origine environnementale sont décrits en particulier pour la France en Corse (Boutin et al., 1984) et en Nouvelle-Calédonie (Commesse, 1996) ainsi qu’en Grèce, en Turquie et en Finlande. Dans ces cas environnementaux c’est la trémolite (amphibole) qui est incriminée, sauf en Finlande ou il s’agit de l’antophyllite (amphibole). Les autres causes identifiées chez l’homme sont :

� l’exposition à l’érionite (zéolite fibreuse) autre fibre naturelle avec une incidence très élevée chez les habitants de 2 villages turcs de Cappadoce, incidence bien plus élevée que celle des industries d’amiante les plus polluantes, et 400 fois plus élevée que celle observée dans les pays industrialisés (et avec une fréquence identique chez l’homme et la femme, ce qui a fait incriminer un facteur environnemental : les poussières fibreuses d’érionite).

� l’exposition aux radiations ionisantes.

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On notera que dés les années 1970-80 (Bignon et al., 1979 ; Nebut et al., 1984 ; Hirsch, 1984), devant un pourcentage de 20 à 30% de mésothéliomes survenus sans exposition à l’amiante, certains auteurs s’interrogeaient sur d’autres facteurs étiologiques, en particulier les autres fibres (fibres de verre, attapulgite…)

• Cancer bronchique La mortalité par cancer broncho-pulmonaire (CBP) est plus élevée chez les travailleurs exposés à l’amiante que parmi la population générale. La relation entre cancer broncho-pulmonaire et amiante est connue depuis 1955 (Doll, 1955). La part du risque total de CBP attribuable à l’amiante varie dans les différentes études en fonction de la prévalence des expositions professionnelles à l’amiante et du mode d’évaluation de ces expositions dans les populations considérées (Ameille et al., 2000). L’amiante est le facteur étiologique professionnel principal des CBP et représenterait la moitié, au moins de ceux-ci (entre 5 et 7% des CBP pour les études les plus récentes). Le pourcentage des CBP attribuable à une exposition professionnelle (c’est à dire le pourcentage de cancer qui ne serait pas survenu sans exposition professionnelle) a été estimé en 1981 par Doll et Peto à 15% chez l’homme et 5% chez la femme. Plus récemment, plusieurs études donnent des estimations concordantes de 9 à 10% d’étiologie professionnelle au CBP, ce qui donne pour la France, qui compte environ 2500 décès annuels pour cette pathologie, 2000 à 2500 cas annuels de CBP professionnels, dont la moitié attribuables à l’amiante. Ce risque est par ailleurs encore plus important s’il y a conjointement tabagisme (risque relatif de 1 pour les non-fumeurs non-exposés, risque de 5 pour les exposés non-fumeurs, 10 pour fumeurs non-exposés, 50 pour les fumeurs exposés..). Tous les types de cancer et toutes les localisations sont représentés ce qui ne permet pas d’attribuer un type de cancer bronchique particulier à l’amiante. De nombreuses études de cohorte ont été revues récemment par l’expertise Inserm (Expertise Inserm, 1996) et il est bien établi qu’il existe une relation linéaire entre l’exposition cumulée (exprimée en fibres/ml X années) et le risque relatif de mortalité par cancer bronchique, mais avec des pentes dose-effet très variables. Les groupes d’experts ont également retenu que dans des populations avec des expositions comparables, les sujets porteurs de plaques pleurales

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n’ont pas un risque supérieur de développer un cancer bronchique, mais que par contre, à l’instar des fibroses idiopathiques ou secondaires à certaines maladies systémiques, il y a une relation entre la sévérité de l’asbestose et la survenue de cancer bronchique. Mais il n’est pas obligatoire d’avoir une asbestose pour développer un cancer bronchique et les experts ont recommandé une reconnaissance médico-légale des cancers avec exposition importante à l’amiante, même en l’absence d’asbestose (tableau 30 bis des maladies professionnelles du Régime Général). Cette recommandation n’existe pas, par contre, pour les mineurs de fer, le cancer pulmonaire n’étant reconnu que s’il y a sidérose tableau de maladies professionnelles 44 bis du Régime Général ni pour les mineurs atteints de silicose alors que le CIRC a reconnu comme cancérogène catégorie 1 en 1997 (IARC, Vol. 68, 1997), après un classement initial en catégorie 2A en 1987, le quartz et la cristoballite…on peut s’interroger sur ces disparités, peut être plus du à la pression médiatique qu’à des connaissances scientifiques (Poussières minérales et santé, publication INERIS, 2002).

Parmi les cancers professionnels, l’amiante est à l’origine du plus grand nombre de décès par cancer, responsable de la majorité des mésothéliomes et de 5 à 7% des cancers du poumon. En France on estime en 1996 que le nombre de décès qui lui est attribué est de plus de 2000 dont 750 pour les mésothéliomes et 1200 pour les cancers du poumon (les autres décès sont surtout dus aux insuffisances respiratoires terminales liées à l’asbestose).

Le nombre de mésothéliomes dans l’Europe de l’Ouest de 1995 à 2029 dépassera donc sans doute nettement les 300.000. Aux décès par mésothéliomes s’ajouteront au moins autant de décès par cancer du poumon dû à l’amiante (hypothèse basse), et les décès par asbestose (non pris en compte). Au total, le bilan sur 35 ans dépassera sans doute 600.000 décès.

Par ailleurs il est maintenant admis que le nombre de cancers reconnus comme étant dus à l’exposition à l’amiante est en fait largement inférieur à la réalité.

2-1-3 Mécanismes de toxicité de l’amiante :

L’amiante pénètre dans l’organisme par inhalation. L’amiante (ou asbeste) est un terme générique qui désigne 6 variétés de silicates fibreux naturels (tableau 1). Les variétés les plus utilisées sont le chrysotile (90%), la crocidolite et l’amosite.

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Initialement, chez les sujets ayant eu une exposition à l’amiante, c’est par la découverte en microscopie optique (MO) de corps asbestosiques (CA) dans les crachats, le liquide de lavage broncho-alvéolaire (LBA) ou le tissu pulmonaire que l’on a pu authentifier la rétention pulmonaires des fibres. Outre le rattachement d’une pathologie à cette exposition cette découverte a amené à se poser la question des mécanismes de toxicité de l’amiante, et de différences de toxicité selon les différentes fibres (serpentines versus amphiboles). La recherche de CA a bénéficié d’une harmonisation avec consensus concernant les aspects techniques. Les résultats des analyses sont exprimés en nombre de CA/ml de liquide de LBA ou par gramme de tissu sec. L’apport de la microscopie électronique (ME) a permis la reconnaissance des fibres (chrysotile et différentes variétés d’amphiboles, tableau 1).

Pour les analyses en MO toutes les équipes ont adopté un seuil de positivité à 1 CA/ml pour le LBA et 1000 CA/g de poumon sec pour les fragments de tissu pulmonaire. Il faut retenir que la pollution par les fibres d’amiante est ubiquitaire (on en retrouve même dans des échantillons de glace du Groenland) et que donc on retrouvera des fibres dans le liquide de LBA et les échantillons de tissu pulmonaire de tous les habitants de cette planète.

Caractéristiques dimensionnelles :

Les paramètres de toxicité des fibres d’amiante amènent à la notion de fibre. Par définition une fibre est une particule allongée, à bords parallèles, et dont le rapport longueur/diamètre est supérieur ou égal à 3.

Pour l’OMS (OMS, 1996) une fibre est désignée comme telle lorsqu’elle présente une longueur supérieure à 5 µm, un rapport longueur/diamètre supérieur à 3 et un diamètre inférieur à 3 µm.

Selon les règles B du NIOSH (NIOSH, 1994), une fibre est une particule de longueur supérieure à 5 µm, de rapport longueur/diamètre supérieur ou égal à 5 et de diamètre inférieur à 3 µm.

La méthode de référence pour compter des fibres dans l’air atmosphérique c’est la microscopie optique en contraste de phase (norme AFNOR X 43-269, 1991). Des appareils de comptage, qui permettent une réponse beaucoup plus rapide sont utilisés. En France on retiendra le FM-7400 (Schaeffer-Techniques®) et

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le Fibrecheck FG-2 (Extramiante®). Un article récent fait la comparaison (Kauffer et al., 2004)

Par ailleurs d’autres techniques sont nécessaires pour différencier les fibres que ce soit les fibres d’amiante, les FMA ou les autres fibres contaminantes (cellulose, textiles organiques, gypse…).

Pour que ces fibres puissent générer des pathologies au niveau du poumon profond il faut qu’elles puissent être inhalées, déposées et retenues à ce niveau. Ce caractère de respirabilité des fibres, leur permettant d’atteindre le poumon profond dépend essentiellement de la dimension des fibres (ou des particules). La condition principale de respirabilité des fibres c’est d’avoir un diamètre physique inférieur à 3 µm, ce qui correspond à un diamètre aérodynamique inférieur à 10 µm. Le diamètre aérodynamique c’est, pour une particule, le diamètre de la sphère de masse volumique 103 kg/m3 dont la vitesse limite de chute en air calme est identique à celle de la particule dans les mêmes conditions de pression, température et humidité relative. Il dépend notablement de la forme de la particule et de sa densité. Le comportement des particules inhalées est en effet généralement décrit en fonction de leur « diamètre aérodynamique équivalent ». Cette définition évite les complications dues aux différences de forme et de densité des particules. Pour les fibres (asbeste et silicates) on admet en approximation que le diamètre aérodynamique est égal à 3 fois le diamètre physique. Les fibres, dans l’air inspiré vont s’orienter longitudinalement par rapport au flux et ce diamètre va influer sur le site de déposition des fibres.

Les fibres les plus petites, de diamètre physique inférieur à 0,5 µm sont soumises au mouvement Brownien causé par l’impact répété des molécules gazeuses. C’est le phénomène de diffusion. La sédimentation, ou dépôt gravitationnel, quand elle dépasse la somme de la flottabilité de la particule et de la résistance à la chute liée à l’air environnant va concerner les particules de diamètre supérieur à 0,5 µm. La probabilité pour qu’une particule soit déposée par gravitation augmente avec son diamètre. Elle joue un rôle important dans le dépôt des particules dans les parties distales des bronches et dans les alvéoles. L’impaction par inertie, qui se produit au niveau des changements de direction des flux soit, du fait de l’anatomie de l’arbre respiratoire au niveau du naso-pharynx et des bifurcations bronchiques, va concerner les particules de diamètre aérodynamique entre 3 et 20 µm, en tout cas supérieur à 3 .

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L’interception consiste en la rencontre accidentelle, non liée à l’inertie des particules, avec la paroi des voies respiratoires. Ce mécanisme est important pour le dépôt des fibres. Cette interception se fait préférentiellement au niveau des bifurcations des voies aériennes (Martinet, 1995). Une fois en contact avec les parois humides des voies respiratoires, les particules sont définitivement éliminées du flux aérien et définitivement déposées dans les voies respiratoires. Ces caractéristiques dimensionnelles sont par ailleurs très importantes dans la carcinogenèse. Les études basées sur les injections intrapleurales et intrapéritéonéales ont montré que les fibres les plus cancérigènes pour le mésothélium sont longues de plus de 8 µm et ont un diamètre inférieur à 0,25 µm. Wagner (Wagner et al., 1985) a montré, en utilisant des fibres de zéolite (fibres volcaniques au potentiel cancérogène extrême chez l’homme, l’érionite en faisant partie) de longueur calibrée par inhalation, chez le rat, que la réponse carcinogène était supprimée avec des fibres courtes de ce minéral. Il existe donc une longueur critique des fibres à partir de laquelle apparaît un risque de transformation maligne des cellules cibles chez le rat, ce qui a été démontré (Yegles, 1995) in vitro avec des cellules mésothéliales pleurales de rat, la production d’anaphases/télophases anormales dépendant de la présence de fibres de longueur supérieur à 8 µm et de diamètre inférieur à 0,25 µm. En fait, toutes les fibres, naturelles ou synthétiques, à l’exception des FCV, ont une large distribution de leur diamètre, ce qui implique en général la présence de fibres de diamètre inférieur à 3 µm, donc respirables dans l’aérosol induit en milieu professionnel ou dans l’environnement, habitat en particulier. Ce qui est primordial, c’est de déterminer le pourcentage de fibres respirables par l’homme (Expertise collective INSERM, 1999). Devenir des fibres inhalées :

La rétention des particules inhalées chez l’homme se fait de façon dynamique et atteint un niveau d’équilibre dépendant des vitesses relatives de déposition et d’élimination. Les fibres qui se déposent sur le mucus recouvrant trachée et bronches, sont éliminées vers le pharynx par l’ « escalator muco-ciliaire* » pour plus de 90%. Les fibres déposées dans le poumon profond, en particulier au niveau alvéolaire, sont phagocytées par les macrophages alvéolaires à fin d’épuration. Les corps asbestosiques sont des fibres d’amiante généralement

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longues (10 à 50 microns, parfois plus) phagocytées par les macrophages et revêtues d’une gaine protéino-ferrugineuse, d’un fourreau à base de ferritine et d’hémosidérine imprégnant un film initial de mucopolysaccharides et consolidé par un matériel calcique. Les CA sont généralement segmentés et renflés à leurs deux extrémités. Il faut plusieurs semaines (1 à 2 mois en général) pour qu’une fibre inhalée se transforme en CA. Toutes les fibres d’amiante peuvent donner des CA mais surtout les amphiboles, plus rarement le chrysotile. En microscopie optique seuls sont visibles les CA de plus de 5 micron de longueur et 0,3 micron de diamètre, toutes les autres échappant à l’examen optique. Il faut distinguer les corps pseudo-asbestosiques qui sont en général plus irrégulier, plus massifs, plus épais que les CA. Ils sont centrés autour d’une fibre de charbon, céramique, silicate d’alumine, voire d’une fibre de verre ou d’autre FMA. Si l’on n’est pas certain de la nature de la fibre centrale il est conseillé d’utiliser le terme de corps ferrugineux (Boutin et al. 1984).

Ce sont donc surtout les fibres les plus longues, de plus de 10 µm, qui, ne pouvant pas être complètement phagocytées par les macrophages, entraînent la formation de cellules géantes et sont transformées en CA. Le CA est un témoin de rétention endoalvéolaire d’amiante. Les macrophages activés libèrent des radicaux oxydants, des cytokines, …Les facteurs de croissance de fibroblastes vont permettre éventuellement à une fibrose de s’installer (asbestose). La migration de fibres d’amiante vers la plèvre, en particulier pariétale va jouer un rôle déterminant dans la survenue des pathologies pleurales bénignes comme malignes. Cette translocation peut suivre 3 voies : transpleurale directe, lymphatique rétrograde et hématogène. Ces 3 voies peuvent survenir conjointement. Les examens autopsiques ont mis en évidence cette accumulation dans certaines zones de la plèvre pariétale, révélées par leur coloration anthracosiques (black spots) et les analyses minéralogiques ont mis en évidence des fibres d’amiante (et d’autres particules inhalées : charbon, suies, métaux, silicates..). Ces black spots pourraient être le point de départ des plaques pleurales et des mésothéliomes, de longues fibres d’amphibole y ayant été détectées (Boutin et al., 1996). Dose : L’asbestose est associée à des concentrations élevées de fibres dans le tissu pulmonaire résultant d’expositions intenses et/ou prolongées. Par contre, les anomalies pleurales, bénignes comme malignes, sont souvent associées à des doses cumulées faibles, en rapport avec des expositions indirectes, environnementales, voire domestiques (Hillerdal, 1999). Ce fait est important, tendant à montrer qu’il n’y a pas de dose seuil en dessous de laquelle il n’y aurait pas de risques de développer un mésothéliome en cas d’exposition à

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l’amiante. Dans la même revue récente (Hillerdal, 1999), il est souligné que le bruit de fond de mésothéliomes en l’absence d’exposition à l’amiante est sans doute inférieur au taux de 1 à 2 cas par million qui est toujours cité, taux à mettre sur le compte de la contamination ubiquitaire par les fibres. Des cas de mésothéliomes ont été rapporté chez des enfants et le passage transplacentaire des fibres d’amiantes est reconnu, retrouvé même, chez des enfants mort-nés. Ceci peut être un argument pour l’absence de dose seuil et des temps de latence très court dans la survenue de ce cancer pleural. Et d’ailleurs, on a pu observer des mésothéliomes chez des ouvriers, après moins de 3 mois de travail dans des mines de crocidolite en Australie (Sabouraud et al., 1993)). Le débit de dose est également à prendre en compte. Les expositions intermittentes en pics permettent une épuration muco-ciliaire plus efficace et la fibrose pulmonaire leur est moins souvent associée qu’aux expositions continues et importantes. Par contre, ces expositions en pics sont plus souvent responsables de pathologies pleurales (facilitation de la translocation par saturation transitoire de certains mécanismes d’épuration pulmonaire probablement). Age de début d’exposition : Il est admis que le risque est accru de voir survenir un mésothéliome en cas d’exposition dans le jeune âge. Ceci peut partiellement expliquer l’incidence très élevée des mésothéliomes dans les expositions environnementales. Type de fibres : Les données épidémiologiques révèlent une incidence plus élevée du mésothéliome chez les travailleurs exposés aux amphiboles ou au mélange amphibole/chrysotile par rapport à ceux exposés au chrysotile seul. Cette différence est attribuée par les auteurs aux caractéristiques dimensionnelles et à la biopersistance des fibres. La biopersistance qui correspond à la capacité des fibres à persister dans le tissu pulmonaire et à conserver leur caractéristiques physiques et chimiques

dans le temps, est définie comme la durée de rétention des fibres dans le poumon et est dépendante de plusieurs facteurs dont, pour ceux

actuellement connus, la résistance aux mécanismes d’épuration, les modifications physiques et les modifications chimiques qui interviennent dans le tissu pulmonaire. De fait la biopersistance des fibres de chrysotile est

inférieure à celle des amphiboles.

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Tabagisme : On l’a vu, le tabagisme agit en synergie avec l’amiante pour la survenue du cancer bronchique. Par contre il n’intervient pas dans la survenue des mésothéliomes. Autres facteurs moins bien étudié : Si les nombreuses études expérimentales in vitro et sur les animaux ont permis de focaliser les propriétés toxicologiques de l’amiante sur un ensemble de facteurs plus ou moins interdépendants, essentiellement on l’a vu longueur et diamètre des fibres et notion de biopersistance, d’autres paramètres jouent un rôle comme par exemple :

les propriétés de surface dont la réactivité la présence de fer disponible à l’état ferreux, d’oxydation +2, qui

conditionne l’apparition lors du processus de lixiviation ou de dissolution de la fibre d’espèces réactives de l’oxygène à l’origine d’une forte agression oxydante

la dissolution de certaines espèces minérales (relargage de magnésium en milieu acide pour le chrysotile…).

La présence de métaux contaminants potentiellement cancérogènes comme le nickel, le chrome, le manganèse et la présence d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HPA) comme le benzo(a)pyrène

….. Le mécanisme de la cancérogenèse qui est très complexe ne peut se résumer à de simples notions de taille et diamètre. D’autres éléments, comme en particulier les molécules présentes dans la composition des fibres, les molécules formées in situ ou émises par les cellules impliquées dans les mécanismes d’épuration, les mécanismes inflammatoires, la présence des espèces réactives d’oxygène et des facteurs génétiques individuels sont impliqués. Il a été démontré que la présence de particules non fibreuses (quartz, dioxyde de Titane, poussières d’usine…) dans un aérosol de fibres d’amiante pouvait potentialiser l’effet cancérigène des fibres inhalées (Davis JMG, 1996). On incrimine également la surcharge en particules du poumon qui agirait en synergie avec les carcinogènes connus (saturation des mécanismes d’épuration ? autres mécanismes ?). Il y a encore du champ pour la recherche, ce qui permettrait d’éclaircir ce que l’on appelle globalement par méconnaissance « l’effet fibre ». Sur le plan physiopathologique, il faut aussi prendre en compte la susceptibilité individuelle génétique et les divers paramètres de l’oncogenèse, qui interviennent pour toutes les pathologies néoplasiques, que l’origine soit professionnelle ou non.

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Les études in vitro ont montré que les fibres d’amiante, sur les chromosomes, avaient des effets clastogènes qui dépendaient de la dimension des fibres, les fibres les plus longues, dans les limites de dimensions compatibles avec une internalisation par les cellules, étant plus toxiques que les fibres courtes. La transformation maligne de l’épithélium bronchique est un processus qui suit plusieurs étapes avec une accumulation de lésions géniques activant les oncogènes et/ou inactivant les gènes suppresseurs de tumeurs. L’activation d’un allèle d’un proto-oncogène, gène présent à l’état normal pour réguler la croissance et la différenciation cellulaire peut aboutir à un oncogène responsable alors d’une prolifération cellulaire anormale. Plusieurs oncogènes ont été identifiés comme intervenant dans la cancérisation bronchique : Ki-ras codant pour la proteine P21, c-myc, N-myc et L-myc, C-erb-2. Les 2 principaux gènes suppresseurs de tumeurs sont le gène RB (RétinoBlastome) et le gène de la proteine p53. Pour l’amiante des études ont montré qu’il y avait des éléments suggérant que les patients fortement exposés à l’amiante avait une probabilité augmentée de mutation de Ki-ras et plus précisément de mutation du codon 12 de Ki-ras pour des sujets opérés d’un adénocarcinome bronchique (qui est une des formes histologiques de CBP avec les carcinomes malpighiens et les anaplasiques à petites cellules dites « à grains d’avoine ») et que cela est indépendant de l’existence d’une fibrose parenchymateuse, ce qui va dans le sens des études épidémiologiques (Ameille et al., 2000). Par contre les études sont contradictoires concernant le lien entre exposition à l’amiante et mutations de p53, sachant par ailleurs que les mutations de p53 aboutissant à la formation d’une protéine anormale, sont présentes dans environ 70% des tumeurs bronchiques et dans les états prénéoplasiques, la fréquence augmentant avec l’importance de la dysplasie (Ameille et al., 2000). Dans les mésothéliomes, les principaux gènes impliqués sont les gènes des protéines p16, p15 et le gène nf2 (neurofibromatose). Le gène p53 est rarement muté dans des tumeurs ou des lignées cellulaires de mésothéliome bien que la protéine p53 soit détectée dans 25 à 70% des biopsies. Il n’existe aucune altération chromosomique spécifique du mésothéliome. Au niveau immunitaire des dysfonctions sont notées chez les patients atteints de mésothéliome, en rapport direct avec l’effet de l’amiante sur certaines cellules immunes et du fait de la production par les cellules tumorales de TGFβ qui possède une activité immunosuppressive.

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En tout cas l’amiante est classée cancérogène certain pour l’homme groupe 1 par le CIRC et groupe 1 pour la CEE avec la phrase R45 : peut causer le cancer. 2-2 Ce que l’on sait sur les autres fibres minérales naturelles : Pour les autres fibres minérales naturelles, qui répondent donc à la définition des fibres, on retiendra surtout la toxicité de l’érionite, variété de zéolite fibreuse, responsable d’une incidence de mésothéliomes importante dans 2 villages de la Cappadoce. Cette érionite donne des corps semblables aux CA typiques, des corps ferrugineux, et, seule l’analyse fine de la fibre centrale en microscopie électronique à transmission analytique (META), permet de la distinguer de l’amiante. D’ailleurs, pour certains, la puissance carcinogène exceptionnelle de l’érionite, liée en partie seulement à la structure fibreuse, serait due à la fixation d’ions ferreux sur les fibres (Eborn et Aust, 1995). Et à coté de l’érionite, de nombreuses particules minérales peuvent se comporter comme des fibres. Citons en particulier l’attapulgite, le talc (silicate de magnésium), et de nombreux autres silicates : wollastonite (silicate de calcium), sillimanite (silicate d’aluminium), mika, kaolin. Le charbon peut parfois répondre à la définition de fibre donnant des corps ferrugineux (CF). On citera également : pectolite, pyrophillite, anhydrite, zoisite, épidote et psitacite, magnésite, aragonite et calcite, sélénite, gedtite, diopside, enstatite, augite, acmite-aegirite . C’est la META également qui permet l’identification de toutes ces fibres. Pour toutes ces fibres on a peu de données. Bignon (Bignon et al., 2000) a fait une revue des connaissances sur ce sujet. On pense que la Wollastonite n’est pas cancérigène. Les fibres de sépiolite et d’attapulgite (palygorskite) par contre semblent donner des tumeurs péritonéales après injection, mais uniquement pour les fibres longues (mais on sait que plus les fibres sont longues plus elles sont nocives, ce n’est donc pas étonnant). L’IARC a classé dans le groupe 2B les fibres de palygorskite longues de plus de 5 microns, les fibres plus courtes de palygorskite et les fibres de sépiolite ne pouvant être classées ont été mises dans le groupe 3 comme la wollastonite et les zéolites autres que l’érionite et la poussière de charbon (IARC, vol 68, 1997). Les experts insistent sur la plus grande dangerosité en terme de cancérogenèse de fibres inhalables les plus longues et des incertitudes persistent encore.

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En pratique, on ne sait encore que peu de choses de façon certaine sur ces autres fibres, sauf pour l’érionite, du fait de l’importante pollution environnementale, qui représente un « modèle expérimental » de genèse de mésothéliomes. Cela doit engager à rester prudent quant à l’utilisation d’autres fibres que l’amiante, qu’elles soient naturelles ou artificielles.

3 TOXICOLOGIE DES FIBRES MINERALES ARTIFICIELLES Les FMA utilisés principalement dans l’isolation (phonique, thermique) ont vu leur développement progresser avec la diminution et/ou la suppression de l’amiante. La croissance démographique, le prix des énergies fossiles, la lutte contre l’effet de serre vont dans le sens d’une isolation thermique la plus optimale possible. Ces matériaux isolants sont donc incontournables. Mais ces fibres, pour plus de la moitié produites en Europe (depuis 1960) et en Amérique du Nord, inquiètent les toxicologues. L’ « effet fibre » fait peur et personne n’a envie de voir survenir des fibroses, des mésothéliomes et des cancers bronchiques à l’instar de ce qui se passe et s’est passé avec l’amiante. De nombreuses similitudes structurales inquiètent. Et, à la différence de l’amiante, dont la toxicité n’est plus à prouver, il faut, pour les FMA, faire des études toxicologiques pour obtenir des données rapidement. La longue période de latence de survenue des pathologies cancéreuses ou fibreuses laisse planer le doute de la survenue d‘une nouvelle « épidémie » de fibrose, de mésothéliomes et de cancers bronchiques, dus aux FMA cette fois. Et des nouvelles fibroses dues aux FMA vont-t-elles remplacer l’asbestose et la silicose ? Alors même que la silicose va disparaître du fait de la fermeture des mines de charbon en France depuis 2003. Certains pensent même déjà que l’amiante, désignée coupable, a peut être été accusée à tort, alors que, jouant en fait un rôle d’écran, elle a dissimulé le rôle des FCR dans des fibroses, cancers et mésothéliomes, car, en fait, la grande majorité des personnes exposées l’a été à l’amiante comme aux FCR (Pézerat, 2005). De nombreux travaux ont été réalisés ou sont en cours sur les FMA. Des expertises (expertise Inserm 1999) ont déjà donné des conclusions, mais, ces conclusions sont critiquées par certains auteurs (Pézerat, 1998).

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Les experts du CIRC, ont rectifié le classement des ces FMA (IARC, 2001) initialement effectué en 1988 (IARC, 1988) et si certaines FMA sont dans le groupe 2B (FCR et certaines FV), d’autres, classées initialement dans ce groupe, sont maintenant dans le groupe 3 (LV et LR). (tableau 5)

(rappel des groupes de cancérogénicité de l’IARC groupe 1 : l’agent est cancérogène pour l’homme groupe 2A : l’agent est probablement cancérogène pour l’homme groupe 2B : l’agent est peut-être cancérigène pour l’homme groupe 3 : l’agent est inclassable quant à sa cancérogénicité pour l’homme groupe 4 : l’agent n’est probablement pas cancérogène pour l’homme)

La CEE a classé les FCR et les fibres à usage spécial carcinogènes catégorie 2 avec la phrase R 49 : peut causer le cancer par inhalation, depuis la 23ème ATP (http://ecb.jrc.it/classification-labelling/). Elle a également classé les laines minérales carcinogènes catégorie 3 avec la phrase R40 : cancérogène suspecté, preuves insuffisantes. (rappel des groupes de cancérogénicité de la CEE catégorie 1 : substances que l’on sait être cancérogènes pour l’homme. On dispose de suffisamment d’éléments pour établir l’existence d’une relation de cause à effet entre l’exposition de l’homme à de telles substances et l’apparition d’un cancer catégorie 2 : substances devant être assimilées à des substances cancérogènes pour l’homme. On dispose de suffisamment d’éléments pour justifier une forte présomption que l’exposition de l’homme à de telles substances peut provoquer un cancer. Cette présomption est généralement fondée sur : -des études appropriées à long terme sur l’animal -d’autres informations appropriées catégorie 3 : substances préoccupantes pour l’homme en raison d’effets cancérogènes possibles mais pour lesquelles les informations disponibles ne permettent pas une évaluation satisfaisante (preuves insuffisantes). Il existe des informations issues d’études adéquates chez les animaux, mais elles sont insuffisantes pour classer la catégorie dans la catégorie 2) Cela prouve que des incertitudes persistent. Et l’enjeu sanitaire est important. Important pour les salariés des usines de production mais aussi pour tous les

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utilisateurs de FMA qui mettent en œuvre ces produits pour leurs propriétés d’isolation car il est bien démontré que les valeurs d’empoussièrement, donc d’exposition aux fibres, sont, dans ce dernier cas, supérieures à celles de la production…Le bricoleur du dimanche qui isole sa maison est donc exposé, et a des concentrations importantes, et l’artisan qui travaille dans l’isolation dans le bâtiment l’est encore bien plus en terme de durée. Bref, toute fibre proposée comme substitut de l’amiante doit être considérée, sauf preuve du contraire comme pouvant générer les mêmes pathologies que l’amiante.

� Qu’en est-il des données épidémiologiques, des recherches pour ces FMA ?

� Et qu’en conclure ? Vers quelles directions doivent s’orienter les recherches ? Quelles modifications devrait-on apporter à ces FMA, si cela est possible, pour diminuer leur toxicité ?

� Certaines FMA doivent elles être substituées ? Lesquelles et pourquoi ?

� Quelles sont les mesures de prévention qu’il est possible et nécessaire de mettre en œuvre ?

De nombreuses questions sont en suspens. 3.1 Effets des FMA sur la santé. Ce que l’on sait concernant les effets potentiels des FMA sur la santé provient d’études de cohorte de travailleurs de l’industrie de production, avec globalement des niveaux moyens d’exposition faibles bien qu’il persiste de nombreuses incertitudes sur les niveaux d’exposition antérieurs à 1987. Les niveaux d’exposition dans le secteur industriel sont faibles et nettement inférieurs à ce que l’on connaît pour les cohortes de travailleurs de la production d’amiante. Avant d’aborder les problèmes pulmonaires, on prendra en compte les atteintes extra-pulmonaires.

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3.1.1-Atteintes cutanées : C’est une plainte quasi constante des manipulateurs : les dermites. Dermites irritatives : Ces dermites ont les localisations des dermites aéroportées, sur les zones découvertes. Elles se caractérisent par un prurit important. Leur incidence est élevée puisque on estime que plus de la moitié des ouvriers de production ou du secteur BTP présente ou a présenté des manifestations dermatologiques. C’est une plainte constante des travailleurs de ces secteurs lors des consultations de surveillance en médecine du travail. Ces manifestations disparaissent habituellement après quelques semaines malgré la poursuite de l’exposition mais, pour certains, elles peuvent persister ou récidiver. Une adaptation du poste peut être nécessaire voire une éviction. Dermites allergiques : Ces manifestations allergiques sont attribuées aux additifs. On incriminera surtout les résines époxy dont on connaît le grand caractère sensibilisant. On retrouve une étude récente Finlandaise (Jolanki et al., 2002) qui a analysé les dermatoses irritatives du Registre Finlandais des Pathologies Professionnelles, entre 1990 et 1999. Mais il y a une sous déclaration de ces pathologies. Les ouvriers employés aux travaux d’isolation sont les plus exposés mais les autres ouvriers du bâtiment, comme les charpentiers, sont également touchés. Les dermatoses dues aux FMA représentent, dans cette étude, 20% de toutes les dermatoses professionnelles des ouvriers du secteur de l’isolation. Du fait de ces effets cutanés, les FMA sont étiquetées avec la phrase R38 Irritant pour la peau par la CEE depuis la 23ème Adaptation au Progrès Technique (23ème ATP) 3.1.2-Autres pathologies non pleuro pulmonaires : Les études diverses ne trouvent pas d’excès convaincants d’autres pathologies, en particulier cancéreuses (Baan et Grosse, 2004). On notera malgré tout qu’il est rapporté par certains auteurs, un SMR augmenté, de leur avis de façon non significative et portant sur un nombre faible de décès, pour les cancers du rectum et des voies aérodigestives supérieures (Expertise INSERM, 1999 ; De Vuyst et al., 2000).

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Ceci doit amener à être prudent et à considérer que la biosolubilité des fibres, peut éventuellement exposer d’autres sites que le poumon et la plèvre aux produits de dissolution, éventuellement toxiques, et pourquoi pas à un risque de survenue de pathologie néoplasique. Nous reviendrons sur ce point plus tard. Une étude européenne de 1999 (Sali et al., 1999) portant sur une large cohorte (11 373 ouvriers), trouve un risque plus important de mortalité par pathologies coronariennes et par maladies rénales non néoplasiques (pour LL et LR) chez les ouvriers les plus anciens et le plus longtemps exposés. Ces faits peuvent être expliqués, pour les atteintes cardiaques, par les effets délétères du monoxyde de carbone, du surmenage physique et de la chaleur (éléments plus présents dans les premières années de la mise en place du process de fabrication). Et pour les atteintes rénales, le rôle est connu de la silice tant cristalline qu’amorphe dans la survenue de ces pathologies. La silice cristalline n’est pas présente dans les FMA, qui sont amorphe, contenant de la silice vitreuse. Il apparaît nécessaire d’effectuer d’autres études. Le rapport de l’INSERM (1999) retient également un excès de décès par néphrite ou néphrose observé dans une cohorte américaine de travailleurs de la production de LR et LL, intéressant à noter car un effet direct de l’exposition aux fibres, composées de silicate est plausible. Par ailleurs l’exposition à des métaux néphrotoxiques (plomb, cadmium, arsenic) a également été rapportée dans certaines usines. Ces métaux se trouvent fréquemment dans les fibres. 3.1.3-Atteintes thoraciques : On précisera déjà les données sur les pathologies non malignes, puis sur les pathologies malignes. Maladies respiratoires non malignes

o Fibrose pulmonaire (pneumoconiose*) A l’instar de la silicose, les informations sur cette pathologie proviennent d’études de morbidité radiologiques et reposent sur l’évaluation du pourcentage d’individus porteurs de petites opacités suivant la classification du Bureau International du Travail (BIT). On rappellera que le BIT a défini des règles universellement reconnues et utilisées pour classifier les pathologies fibrosantes pulmonaires. Le lecteur intéressé pourra consulter la classification du BIT (Bureau international du Travail, 1980) l’article de Leroux dans l’EMC (Leroux, 1982) et pour avoir l’apport de la tomodensitométrie l’article de Grenier (Grenier, 1996). Les clichés sont interprétés par rapport aux clichés de référence du BIT.

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Par ailleurs on ne peut pas se baser sur des études de mortalité, car les fibroses peu évoluées ne conduisant pas au décès, elles ne sont alors pas mentionnées sur le certificat de décès soit par méconnaissance soit car n’étant pas la cause de celui-ci. En conséquence l’étude des certificats de décès ne pourrait apporter qu’une sous-estimation de cette pathologie. En reprenant les éléments collectés par l’expertise de l’INSERM (INSERM, 1999) : Pour la LV, pas d’anomalies retenues Pour la LR et la LL, pas d’anomalies retenues Pour les FCR, pas d’anomalies retenues Pour les FCV, pas d’étude publiée à ce jour. Les critiques et réserves que l’on peut émettre pour ces études concernent :

les faibles niveaux d’exposition cumulée de l’industrie de fabrication le manque de recul avec des durées moyennes d’exposition faibles

(inférieures à 5 f/ml x années alors que les expositions cumulées à l’amiante associées à un excès d’asbestose détectable radiologiquement sont de l’ordre de 25 f/ml x années). Les fibroses ne surviennent, sauf exception, qu’après une latence d’au moins 10 ans

pas de possibilité d’évaluer de façon fiable les concentrations en fibres et en poussières pour les études avec des expositions avant 1987, alors que l’on suppose que ces expositions étaient plus élevées (environ 2 fois plus entre 1972 et 1986 et 3 fois plus avant 1971, par rapport à 1987)

l’effet de sélection dit « du travailleur sain » : les salariés en moins bonne santé sont susceptibles de quitter leur métier, ou d’y rester mais en changeant pour des emplois moins exposés, et donc d’échapper à l’étude

et la perte de vue des salariés ayant quitté leur emploi, pour d’autres raisons que des raisons de santé

l’absence d’études utilisant la tomodensitométrie qui est pourtant l’examen de référence pour le diagnostic des pneumoconioses, surtout au stade débutant

le fait que les images de type petites opacités irrégulières à des stades peu évoluées ne sont en rien pathognomoniques d’une

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pneumoconiose, pouvant être liées au tabagisme, à de l’emphysème et/ou à l’âge

dans les groupes étudiés, l’existence de sujets exposés à l’amiante et à la silice ou à d’autres poussières potentiellement fibrosantes.

En conclusion, pour les experts de l’INSERM, les études publiées jusqu’en 1997, par radiographies standard, ne mettent pas en évidence de fibrose pulmonaire associée à l’exposition aux laines minérales artificielles (LV, LA et LR) ou aux FCR dans les activités de production. Pour d’autres études les conclusions sont concordantes (Hansen et al., 1999 ; De Vuyst et al., 2000 ; Hansen et al., 2002). Par contre, une étude de 2000 (Cowie et al., 2000), qui a repris avec 10 ans de plus de suivi la première enquête européenne, concernant l’exposition aux FCR, trouve une relation entre des anomalies radiologiques (petites opacités) et exposition aux FMA dans les périodes les plus anciennes et les plus récentes (mais pas dans les périodes intermédiaires ce qui n’est pas sans poser des problèmes de compréhension), mais « diverses raisons portent à douter fortement que cela soit véritablement l’effet des fibres ». Radiologiquement il n’y a aucun signe évident de fibrose.

o Pleurésies, plaques pleurales :

Les études publiées jusqu’en 1998 ne donnent pas d’éléments en faveur de la survenue de pathologies pleurales bénignes radiologiques en relation avec l’exposition aux FMA (De Vuyst et al., 2000). L’expertise INSERM conclue que les études radiologiques publiées jusqu’en 1997 ne mettent pas en évidence de relation entre exposition aux LV, LR et LL et existence de lésions pleurales bénignes radiologiques. Une étude de 1998 (Lockey et al., 1998) suggère la survenue de fibrose pleurale en relation avec l’exposition aux LV, LR et LL, à partir de radiographies standards mais qui demande une confirmation tomodensitométrique avant de tirer des conclusions définitives. Une étude (Cowie et al., 2000) pour les exposés aux FCR retrouve une relation entre exposition cumulée et douleur thoracique de type pleurétique pour un

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nombre faible de cas. Les symptômes pourraient être liés à des pleurésies, comme à des douleurs musculo-squelettiques de la paroi thoracique. Pour les FCR, des études américaines et européennes (Lockey et al., 1996 ; Cowie et al., 2000) montrent l’existence d’une association entre la présence de plaques pleurales et certains indices d’exposition aux FCR. Les études américaines sont plus affirmatives dans leurs conclusions pour la relation entre l’exposition aux FCR et la présence de plaques pleurales ainsi que la survenue de fibrose. Encore une fois, une des critiques majeures de tous ces travaux est l’absence de confirmation tomodensitométrique. Cet examen permettrait en effet de faire le distinguo entre pathologie pleurale authentique (épaississement, plaque, pleurésie) et image non pathologique (graisse sous-pleurale en particulier). Le temps de latence de survenue des pathologies pleurales est également mis en avant: si l’on se réfère à l’amiante il faut un délai de 15 à 20 ans après le début de l’exposition pour voir survenir ces pathologies ; si l’on admet la même physiopathologie pour les FMA, toute étude avec des temps de latence inférieurs ne permet pas de conclure. Et il est aussi noté que certaines études ne permettent pas d’éliminer une co-exposition antérieure ou actuelle FMA-amiante, ce qui ne permet pas d’incriminer un coupable à coup sûr en cas de découvertes de pathologies pleurales.

o Maladies respiratoires chroniques non spécifiques (MRCNS): On entend par ce terme, les maladies respiratoires non malignes (MRNM) incluant en particulier la bronchite chronique, obstructive ou non, l’asthme et l’emphysème. Les différentes études sont contradictoires, certaines trouvant une relation entre exposition aux FMA et survenue de MRCNS. Il en résulte que pour beaucoup il est actuellement impossible de conclure quant à l’existence ou à l’absence d’effet de l’exposition aux fibres de LV, LR et LL (Sali et al., 1999 ; De Vuyst et al., 2000 ; …..). On retiendra malgré tout que certaines études (De Vuyst et al., 1995 ; Trethowan et al., 1995 ; Cowie et al., 2001) mettent en avant une plus grande sensibilité des fumeurs à la survenue de MRCNS ce qui implique qu’il faut conseiller aux travailleurs exposés aux FMA, et en particulier aux FCR puisque ce sont avec ces fibres que l’on a observé ce fait, de ne pas fumer ou de stopper

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leur tabagisme. Dans ces études il existe un déclin pathologique des paramètres fonctionnels respiratoires uniquement chez les fumeurs. Cette diminution s’est même montrée équivalente à celle induite par l’âge. Pour l’expertise INSERM, les conclusions sont les mêmes et l’étude de Trethowan (Trethowan et al., 1995) a été retenue comme suggérant un effet facilitant de l’exposition aux FMR par rapport au tabac dans la survenue d’une obstruction des voies aériennes. L’étude de Cowie (Cowie et al., 2001) est venue conforter ce fait. Si l’on ne prend en compte que la toux et l’expectoration, il est noté par de nombreux auteurs que les FMA sont responsables de tels symptômes pouvant donner une bronchite chronique*. Un effet irritant des FMA au niveau respiratoire est incriminé, ce qui n’est pas étonnant si l’on se réfère aux problèmes dermatologiques. Et comme pour tout irritant chronique au niveau respiratoire, il est logique de penser qu’au bout d’un certain temps d’exposition, en particulier chez certains sujets prédisposés, et ce d’autant qu’il y a co-exposition à d’autres irritants respiratoires (professionnels ou non) et on pense surtout au tabac, les sujets exposés présenteront une atteinte de la fonction respiratoire qui ira de la simple toux irritative à l’insuffisance respiratoire par trouble ventilatoire obstructif, potentiellement létale. Cela va aussi dans le sens de la survenue éventuelle d’une pathologie fibrosante. Il faut noter également les effets délétères chez les sujets bronchopathes chroniques ou allergiques voire asthmatiques (plus de 10% de la population). C’est une plainte fréquente. On voit, par un phénomène d’hyperréactivité bronchique non spécifique (HRBNS), c’est à dire non allergique, une aggravation de l’état respiratoire chez ces salariés, surtout les asthmatiques exposés aux poussières contenant des FMA. L’un des facteurs confondants c’est la présence d’autres éléments dans les poussières, éléments allergisants connus (acariens, moisissures….), et éléments non allergisants. Mais cette aggravation de l’état respiratoire oblige parfois à changer le travailleur de métier après décision d’inaptitude pour raison médicale, avec tous les effets négatifs tant personnels que sociaux que cette décision entraîne.

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Maladies respiratoires malignes L’essentiel des préoccupations concernant les effets délétères potentiels des FMA c’est la survenue de cancer bronchique et/ou de mésothéliomes*. L’expertise INSERM (1999) et de très nombreuses études épidémiologiques ont été consacrées à ce problème (Saracci et al., 1984 ; De Vuyst et al., 1995 ; Boffeta et al., 1999 ; Consonni D, 1999; Bofetta et al., 2000 ; De Vuyst et al., 2000 ; Berrigan, 2002 ;…..) aboutissant à un classement de certaines FMA par le CIRC (IARC, 2002) et la CEE. Ces études concernent le suivi de cohortes de travailleurs exposés en Europe, au Canada et aux Etats Unis, et nous n’entrerons pas dans le détail de la description de ces cohortes qui demanderait trop de place. Pour plus de détails nous renvoyons le lecteur à l’expertise INSERM et aux articles correspondants. Nous nous intéresserons aux conclusions et aux critiques de ces études.

o Cancer bronchique :

En 1995, une étude des résultats (De Vuyst et al., 1995) des cohortes étudiées dans les états suscités retenait un excès de cancer chez les travailleurs exposés aux FMA, en particulier lors des phases les plus anciennes de production de LR. Mais durant cette période, plusieurs agents carcinogènes connus (arsenic, amiante, HPA) étaient également présents, ne permettant pas de déterminer si le risque de CBP était du aux FMA elles même. Il n’y avait pas d’augmentation de l’incidence des mésothéliomes chez les travailleurs exposés aux LV, LR et LL. Il n’était pas possible d’avoir des informations épidémiologiques pertinentes pour les FCR du fait de leur apparition récente en production industrielle et des faibles effectifs concernés et suivis.

Pour l’expertise INSERM (1999) : Globalement pour aucun des types des fibres et aucune localisation il n’a été possible de conclure de façon ferme, les résultats observés allant dans le sens d’un augmentation de risque attribuable à l’exposition aux fibres ne sont jamais suffisamment nets et cohérents. Les résultats négatifs ne peuvent être interprétés avec confiance comme une absence d’augmentation du risque du fait des limites des enquêtes réalisées. Bien que l’existence d’une augmentation du risque de cancer du poumon associé aux LR et LL et LV ne puisse être affirmée avec certitude, on peut cependant

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exclure avec confiance que cette augmentation de risque soit importante pour les niveaux d’exposition de l’ordre de grandeur de ceux qui ont été rapportés dans les études examinées dans ce rapport. De l’analyse des données épidémiologiques, il ressort donc des incertitudes majeures. Il existe malgré tout des arguments en faveur d’un risque accru de cancer du poumon essentiellement pour l’exposition aux fibres de LR et de LL et, dans une moindre mesure, à la LV. Pour les autres fibres et les autres localisations de cancer, il faut considérer que l’existence d’un risque n’est pas évaluable dans l’état des données épidémiologiques à la date du rapport (1999). Le recul est insuffisant concernant les FCR. Les experts soulignent avec insistance que les données disponibles ne peuvent permettre d’écarter l’existence d’un risque de cancer induit par l’exposition aux fibres de substitution de l’amiante. Il faut insister sur les limites des études réalisées :

� Puissance limitée et parfois très faible (effectif restreint des cohortes, exposition à des niveaux faibles ou très faibles, recul trop court en regard du temps de latence de survenue des pathologies, en particulier pour le mésothéliome).

� Hétérogénéité des cohortes � Absence ou disponibilité limitée de données individuelles concernant les

facteurs de confusion personnels et/ou professionnels � Absence de niveau d’intensité d’exposition aux fibres pour les périodes

effectivement prises en compte � L’essentiel des études épidémiologiques concerne les LV, LR et LL et à un

moindre degré les fibres de filaments continus

Pour les experts de l’INSERM il faut, en 1999, continuer la surveillance des cohortes du secteur de production des fibres de substitution. Et ils notent également les faibles niveaux d’exposition pour les populations étudiées dans le secteur de la production. On retrouve ces conclusions dans d’autres articles (De Vuyst et al., 2000 ; De Vuyst et al., 2001 ;…) en remarquant certains des auteurs faisaient partie du groupe des experts ou des personnalités audités de l’INSERM. Pour Ameille (Ameille et al., 2000), même s’il est rapporté un excès significatif de CBP chez les ouvriers de production de LV (SMR de l’ordre de 110 à 130) et

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de LR,LL (SMR de l’ordre de 120 à 150), sans argument en faveur d’un effet de confusion important du tabac, il n’est pas possible d’affirmer actuellement que l’exposition aux fibres de ces FMA est responsable de cet excès, même s’il a été conclu que cet excès de risque était plausible pour LR et LL. Et il n’existe pas d’information permettant d’évaluer l’effet des fibres chez les utilisateurs de produits finis à base de LV, LL et LR, ce qui impose d’être vigilant vis à vis de ces sujets, connaissant les expositions qui sont plus élevées dans ce cas en comparaison avec l’industrie de production. Il n’existe pas d’excès de mortalité par CBP chez les ouvriers de production de FCV. Aucune étude en 2000 n’avait été publiée concernant l’industrie de production des FCR. Mais le faible effectif concerné rend hypothétique la mise en évidence d’un excès de CBP chez l’homme à partir de telles cohortes dans l’industrie de production.

o Mésothéliome : Pour le cas du mésothéliome, les décès observés dans les cohortes de l’étude européenne (Boffeta et al., 1997) correspondent à un taux de mortalité d’environ 1.8 pour 100 000, taux qui est du même ordre de grandeur que les taux masculins de mortalité par mésothéliome observés dans les pays industrialisés d’Europe occidentale à cette époque. Ces taux reflètent l’exposition à l’amiante d’une partie de la population, sachant qu’en l’absence d’amiante, l’incidence de base des mésothéliomes est estimée à 1 à 2 cas par million et par an, ce chiffre étant surestimé selon l’avis de Hillerdal (Hillerdal, 1999). Et l’étude rétrospective des exposés a montré une exposition potentielle professionnelle à l’amiante. L’exposition « domestique » ne semble pas avoir été prise en compte. Dans une étude américaine, un seul décès a été observé par mésothéliome en 1982, avec une histoire mal documentée. En conclusion pour les experts de l’INSERM, aucune étude n’a pu, en 1999, clairement mettre en évidence un excès de mésothéliomes, mais pour une maladie aussi rare, les études n’ont cependant pas la puissance nécessaire pour détecter une augmentation modérée du risque. Et surtout, le recul n’est semble-t-il pas suffisant en supposant, ce qui apparaît logique, que les temps de latence sont du même ordre que ceux observés pour l’amiante, soit entre 30 et 50 ans. Pour d’autres auteurs (De Vuyst et al., 2000 ;…), on a les mêmes conclusions, qui insistent surtout sur 2 éléments :

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-le temps de latence d’apparition du mésothéliome (30 à 50 ans) qui peut éventuellement contribuer à expliquer l’absence d’excès objectivés à ce jour -les études n’ont peut être pas la puissance nécessaire pour mettre en évidence un risque faible de survenue de la maladie. Aucun cas de mésothéliome n’a été rapporté chez les travailleurs de la production de FCV. Aucune étude de mortalité ne permet d’évaluer le risque de mésothéliome dans l’industrie de production des FCR. Chez les salariés utilisateurs de laines minérales (LV,LR et LL) les données sont difficiles à interpréter du fait d’une coexposition très fréquente à l’amiante dans ces cohortes. Pour Monnet (Monnet et al., 2000), mêmes conclusions : -impossibilité de conclure pour les FCR en raison de la commercialisation récente de ces matériaux -discret excès de mésothéliome confirmé dans les cohortes européennes et américaines suivies exposées aux LV,LL et LR mais il n’est pas actuellement possible de dissocier cet excès d’une exposition antérieure éventuellement conjointe à l’amiante. Donc aucune conclusion formelle ne peut être apportée concernant le rôle des FMA dans la survenue de mésothéliome. Les experts de l’IARC ont étudié à 2 reprises les FMA (IARC, 1987 ; IARC, 2001). Le classement des fibres est détaillé dans le tableau 6 page 40. La CEE a classé les FCR dont le pourcentage pondéral d’oxydes alcalins et alcalino-terreux [Na2O]+[K2O]+[CaO]+[MgO]+[BaO] est inférieur à 18% et les fibres à usage spécial cancérogènes de catégorie 2 (substances devant être assimilées à des substances cancérogènes pour l’homme). Pour Pézerat (Pézerat, 1998 et 2005) : Pour les FCR, l’absence de recul et les temps de latence élevés des fibroses et des cancers font que l’épidémiologie a encore peu de choses à dire. On note cependant l’apparition de plaques pleurales dans une population exposée à ces fibres à des concentrations relativement faibles. Ces faits, comparés à ce que l’on connaît de l’amiante à savoir que l’apparition de plaques pleurales est un des effets apparaissant le plus rapidement et avec la plus forte fréquence, obligent à envisager des effets similaires avec les FCR. Cet argument est également retenu par d’autres auteurs (Dumortier et al., 2001)

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Une étude de 2005 (Brown, 2005), a étudié et fait la revue des effets des FCR et retient qu’aux Etats Unis, des salariés exposés ont un incidence augmentée de plaques pleurales. Cela va dans le sens des données de Pézerat. Si l’on étudie le liquide de LBA, on sait y trouver les corps asbestosiques. Il a été trouvé également des corps pseudo-asbestosiques, qui, après étude en microscopie électronique, se sont avérés être liés à des FCR, chez des salariés ayant été exposés à ce composé (Dumortier et al., 2001). De tels éléments vont dans le sens d’une biopersistance des FCR importantes, à comparer aux fibres d’amiante, argument supplémentaire pour penser que les FCR auront les mêmes effets que l’amiante au niveau du système respiratoire de l’homme. Il est à noter qu’il n’a jamais été trouvé de corps pseudo-asbestosiques avec les fibres de LV, LR et LL, ce qui va dans le sens d’une faible biopersistance pour ces fibres. On se trouve donc malgré tout, encore incapable de conclure formellement. L’enjeu est pourtant d’une importance capitale. On est surtout gêné par la latence de survenue de ces pathologies et surtout concernant les mésothéliomes. Et se pose le problème de l’exposition antérieure et/ou conjointe aux fibres d’amiante qui doit faire poser 2 questions : l’amiante est elle la seule responsable des pathologies observées, ou bien a-t-elle joué un rôle d’écran nous faisant ignorer un autre responsable ? Et est-ce que la séquence exposition à l’amiante puis aux FMA n’est pas un autre facteur influençant la survenue des pathologies, en particulier néoplasiques ? Et si l’on laisse les sujets sans protections adéquates, on assistera peut être d’ici quelques années à une nouvelle épidémie de mésothéliomes et de CBP et l’on ne pourra que compter les décès. Et il faudra plus de 50 ans pour revenir à une situation « normale », après un nouveau scandale sanitaire, des procès…et la recherche de nouveaux matériaux de remplacement (qui auront peut être des effets délétères sur la santé eux aussi…..souvent l’Histoire se répète…). Les études épidémiologiques se trouvant en défaut pour les diverses raisons et critiques déjà évoquées , les autres données pouvant nous aider pour essayer d’avoir une idée plus claire sur les dangers potentiels des FMA seront les résultats expérimentaux in vivo et in vitro. Et pour appréhender le coté physiopathologique, il faut étudier les fibres pour tenter un parallèle avec ce que l’on sait déjà concernant l’amiante et se tourner

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vers les données de la cancérogenèse des FMA (oncogènes, gènes suppresseurs de tumeurs) s’il y en a.

3.2 Données des effets in vivo des FMA : Depuis plusieurs décennies des recherches sur les FMA sont réalisées. Actuellement, la CEE à la charge de proposer un protocole fiable pour l’évaluation de la dangerosité des FMA. Des experts ont proposé un panel bien codifié de tests que l’on peut consulter sur le site de l’European Chemical Bureau (www.ecb.jrc.it) (où l’on trouve également l’étiquetage réglementaire de la CEE). De nombreuses études ont été faites, essentiellement chez le rat et le hamster, pour évaluer le pouvoir cancérogène et/ou fibrogène des FMA au niveau de l’appareil respiratoire. Ces études ont utilisés différentes voies d’administration des fibres : inhalation (corps entier ou nez seul), instillation intra-trachéale, injection intrapleurale ou intrapéritonéale. Des modèles d’inhalation sont développés avec une méthodologie bien précise pour permettre une reproductibilité des résultats et des comparaisons (Bernstein et al., 1995 ;…). Il faut d’emblée souligner que (Rapport du G2SAT, 1997 ; De Vuyst et al., 2000) : -les voies intrapleurale et intrapéritonéale sont des voies non physiologiques. Leur intérêt est d’étudier l’effet cancérigène intrinsèque potentiel des fibres au niveau mésothélial, par application directe d’une quantité suffisante de fibres (106 à 109) au niveau de la cellule cible mésothéliale elle-même, sans altérer le temps de survie des animaux. La translocation est ainsi shuntée, ainsi que tous les phénomènes d’épuration en amont. Ces modèles pour très sensibles qu’ils soient posent le problème de l’extrapolation à l’homme des résultats obtenus. -les études par instillation intratrachéale posent le problème de la variabilité de la déposition dans l’appareil pulmonaire. Ceci explique qu’il y ait de nombreux et divers protocoles différents. -l’inhalation avec étude des effets à long terme (plus de 24 mois chez les rongeurs) représente un modèle intéressant, proche de la réalité, prenant en compte tous les phénomènes qui entre en jeu lors de la pénétration de fibres dans l’appareil respiratoire (déposition, épuration, rétention, translocation). Mais il est nécessaire d’utiliser des fibres adaptées à la taille des voies respiratoires du rongeur, bien entendu plus petites que chez l’homme, ce qui n’a pas toujours été fait dans les premières études. Et de multiples paramètres expérimentaux doivent être pris en compte.

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-le rat exposé par inhalation a une incidence accrue de CBP et de

mésothéliomes pleuraux. C’est donc un modèle expérimental acceptable d’étude des effets des fibres tant d’amiante que de FMA (et autres fibres), sur le plan qualitatif avec l’avantage de temps de réponse relativement brefs et de coûts limités par rapport à l’utilisation des primates, plus proches anatomiquement de l’homme. Les critiques concernent les différences anatomiques, biologiques et physiologiques : certaines fibres susceptibles d’atteindre le poumon profond chez l’homme ne sont pas inhalables chez le rat (qui a des voies respiratoires beaucoup plus petites …), les branchements des bronches chez le rat sont asymétriques et les bronchioles terminales donnent directement dans des sacs alvéolaires, sans bronchioles respiratoires, à l’inverse de l’homme qui a un système de branchements relativement symétrique et un réseau développé de bronchioles respiratoires entre bronchioles terminales et sacs alvéolaires. De fait les dépôts et les lésions primitives chez l’homme se produisent aux intersections, alors que chez le rat les lésions surviennent aux bifurcations débouchant dans les sacs alvéolaires. Et le rat développe rarement des mésothéliomes. -chez le hamster, au contraire du rat, il y a une relative insensibilité aux lésions pulmonaires mais une facilitation dans la survenue des mésothéliomes. -le rat est nettement moins sensible aux effets de l’amiante que l’homme et ses mécanismes de réponse biologiques ne sont pas suffisamment proches des mécanismes humains pour permettre une transposition. Puisqu’il est moins sensible il faut, pour espérer avoir une augmentation significative de la survenue de tumeurs, exposer un assez grand nombre d’animaux. On retiendra que, chez l’animal, les résultats dépendront de 3 paramètres pour les FMA : la dose, la taille des fibres et la biopersistance des fibres (Brown, 2005), ce qui semble être une notion admise par tous. On reprendra à De Vuyst (De Vuyst et al., 2000) le tableau suivant qui fait la synthèse des études expérimentales (production de tumeurs) avec les FMA chez le rat et/ou le hamster d’après plusieurs études, dont certaines données avaient déjà fait l’objet de publication en 1995 (De Vuyst et al., 1995).

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Tableau 5 : synthèse des effets des FMA en expérimentation animale

(d’après De Vuyst et al.,1995) Injection

intrapéritonéale

Injection

intrapleurale

Instillation

intratrachéale

Inhalation

long terme

FCV - - ND ND

LV + - - -(a)

LR + - - -

LL - - ND -

FCR + ND - +

µµµµfibres de verre

+ + + -

+ : effet établi dans une ou plusieurs études ; - absence d’effet démontré ; ND : absence de données pertinentes permettant de formuler une évaluation ; (a) une méta-analyse prenant en compte l’ensemble des études réalisées avait fait conclure à un excès de tumeurs pour ce type de fibres chez le rat. Pour ces auteurs on peut retenir schématiquement que si un effet tumorigène a été observé avec des fibres de LV, LR, microfibres de verre et FCR après injection intrapéritonéale, les seules fibres ayant conduit à l’apparition de cancer après inhalation étaient certaines FCR, avec excès de CBP chez le rat et de mésothéliomes chez le hamster. Egalement survenue de fibrose après inhalation de fortes doses de fibres de LR chez le rat. Mais du fait de leur granulométrie différente, les doses, en terme de quantité totale de fibres, sont beaucoup plus basses que les doses utilisées pour les fibres d’amiante souvent employées comme témoin positif. Et une attention particulière a été apportée à la biopersistance des fibres qui serait un paramètre important de leur toxicité, la biopersistance intégrant les notions d’épuration et de dissolution. Ces conclusions rejoignent celles de l’expertise de l’INSERM (1999), qui retient surtout que les FCR ont clairement démontré un potentiel tumorigène de certains échantillons, pour les différentes voies, y compris l’inhalation. Pour Pézerat (Pézerat, 1998 et 2005) : En expérimentation animale, les données sont sans ambiguïté sur plusieurs espèces animales et par diverses voies d’exposition. Les FCR

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entraînent, à l’égal de l’amiante, des fibroses pulmonaires, des cancers du poumon et des mésothéliomes. Qui plus est, dans une comparaison en nombre de fibres inhalées chez le rat, la fibrose produite est plus accentuée avec les FCR qu’avec 50 fois plus de fibres de chrysotile. En inhalation toujours, le hamster présente un nombre « record » de mésothéliomes. On est donc en droit, avec ce que l’on sait sur l’homme et l’animal, d’affirmer la conviction quasi absolue que les FCR sont des matériaux à la fois cancérogènes et fibrosants chez l’homme ce qui signifie qu’il y aura apparition de ces pathologies dans les populations les plus exposées en milieu de travail.

Pour les autres FMA, en matière de fibrose pulmonaire, la LR apparaît comme pouvant engendrer un risque, risque qui n’a pas été noté avec la LV et la LL dans les conditions où elles ont été utilisés.

En matière de cancer du poumon, en agrégeant les résultats obtenus, on obtient une puissance statistique permettant de conclure à des propriétés cancérigènes pour les LV et LR sans qu’il soit possible de faire une différence entre elles.

Ces expérimentations animales n’ont pas noté d’effet cancérogène au niveau de la plèvre mais dans des conditions expérimentales semblables, l’amiante ne donnait pas non plus de résultats probants.

L’apparition de fibroses avec la LR laisse penser que l’apparition plus nette d’un excès de CBP pour de plus fortes doses aurait été probable, puisque pour beaucoup de matériaux toxiques du poumon, la fibrose précède l’apparition de CBP.

Les méthodes en injection intrapéritonéale ont permis de classer les

fibres en terme de puissance d’induction de mésothéliome : En tête crocidolite et FCR, suivi de LR et chrysotile Suivi beaucoup plus loin par la LV Et enfin la LL qui ne donne pas de résultats considéré significatif Si l’on considère les seules laines minérales, l’injection d’un même nombre

de fibres donne chez le rat, en choisissant correctement la dose utilisée, la proportion suivante de tumeurs péritonéales :

84% avec un échantillon de LR 38% avec un échantillon de LV 5% avec un échantillon de LL, soit, dans ce dernier cas, un chiffre proche

de celui des expérimentations de contrôle sans fibre. Avec le temps de latence moyen nécessaire pour l’apparition de tumeurs

péritonéales on note : 54 semaines avec la LR

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105 semaines pour la LV Pézerat fait remarquer que la formation de mésothéliome après injection

directe dans les séreuses (plèvre, péritoine) ne signifie pas que les matériaux testés auront la capacité de générer également des mésothéliomes chez l’homme, rappelant également ce que nous avions déjà souligné à savoir que ce mode d’expérimentation chez l’animal court-circuite les possibilités d’épuration dans la translocation des fibres de l’arbre respiratoire vers la plèvre. On retrouve une critique intéressante de la voie péritonéale chez le rat dans l’article de Miller (Miller, 1999), qui résume bien les apports et limites de cette technique

En terme de conclusions sur les effets des FMA sur la santé : pour Pézerat, en première conclusion et sur la base de données de

l’épidémiologie et surtout des expérimentations animales, on est en droit de considérer en ce qui concerne les effets sur l’homme :

� que les FCR sont des matériaux à la fois fibrosants et cancérogènes pour l’homme

� que la LR est très probablement un agent fibrosant et un cancérogène du poumon

� que très probablement la LV a présenté et peut encore présenter les mêmes propriétés fibrosantes et cancérogènes, mais notablement atténuées par rapport à celles de la LR

� que la LL n’est probablement pas au niveau pulmonaire ni cancérigène ni fibrosante

� qu’en matière de mésothéliome on ne peut conclure aussi nettement et on peut seulement dire que si ce risque existe, il est relativement faible, sans différences entre les 3 laines.

Pézerat critique les conclusions du groupe d’expert de l’INSERM, argumentant que celui ci n’a pas voulu s’engager sur des propositions de mesures spécifiques pour les FCR, se contentant de recommandations et ne donnant en conclusion qu’ un risque plausible de CBP pour les LR-LL et non exclu pour la LV. Le groupe exprime clairement qu’aux niveaux d’exposition cumulée faibles des ouvriers de production de LV,LR et LL il n’est actuellement pas possible de conclure de façon ferme pour le risque de cancer associé à ces fibres elles-mêmes. Il est conforté dans cette affirmation par un addendum de 3 experts du groupe INSERM et non des moindres (Pairon JC, De Vuyst P et Dumortier P) qui ont

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voulu apporter un commentaire à annexer à la synthèse de l’expertise collective. Ces 3 auteurs pensent qu’il est légitime de préconiser une vigilance vis à vis de l’utilisation de ces fibres (LL, LV, LR et FCR), ceci devant se traduire par un abaissement des VLEP et une évaluation plus précise des expositions (ponctuelles et pondérées sur 8 heures) chez ces utilisateurs. Ces auteurs préconisent également l’encouragement d’efforts au niveau industriel pour le développement de fibres permettant une diminution des niveaux d’exposition. Des remarques sur la biopersistance des fibres sont également faites par ces 3 auteurs et par Jaurand MC. La monographie de 2001 du CIRC (IARC, 2001), qui a repris les données utilisées pour la monographie de 1987 (IARC, vol 43, 1987) et que l’on retrouve dans la revue de Baan (Baan et Grosse, 2004) permet de classer les fibres en fonction des données épidémiologiques chez l’homme et des données expérimentales chez l’animal. Le classement et son évolution depuis 1987 sont repris dans le tableau 6 ci-dessous. Tableau 6 : Evaluations par les Groupes de Travail des Monographies de l’IARC en 1987 et 2001 du risque cancérigène pour l’homme des FMA

Type de fibre

Evaluation 1987 Evaluation 2001

Homme Animal Classement Homme Animal Classement

LV Insuffisant Suffisant(a) 2B(d) - - - LV pour isolation

- - - Insuffisant Limité 3

LV « special-purpose”(c)

- - - Insuffisant Suffisant 2B

FCV Insuffisant Insuffisant 3 Insuffisant Insuffisant 3 LR Limité Limité 2B Insuffisant Limité 3 LL Limité Limité 2B Insuffisant Limité 3 FCR Insuffisant

(b) Suffisant 2B Insuffisant Suffisant 2B

(a) : évaluation globale pour la LV pour isolation et les autres types de LV . Ces catégories ont été évaluées séparément en 2001

(b) : pas de données disponibles pour le Groupe de Travail (c) : LV « special-purpose » = fibres à usage spécial c’est à dire les

µfibres (diamètre moyen inférieur à 1 µm) (d) : rappel des groupes de cancérogénicité du CIRC

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groupe 1 : l’agent est cancérogène pour l’homme groupe 2A : l’agent est probablement cancérogène pour l’homme groupe 2B : l’agent est peut-être cancérigène pour l’homme groupe 3 : l’agent est inclassable quant à sa cancérogénicité pour l’homme groupe 4 : l’agent n’est probablement pas cancérogène pour l’homme

3.3 Données des études in vitro des FMA

Elles portent sur divers types cellulaires, soit des modèles bactériens utilisés pour tester la toxicité des substances chimiques et développés pour comprendre les mécanismes d’action de l’amiante, soit des modèles plus spécifiques, utilisant des macrophages, des cellules mésothéliales ou des cellules épithéliales pulmonaires. Et également une deuxième voie d’étude utilise des tests acellulaires ou les fibres sont immergées dans un flux de liquide pulmonaire simulé à pH 4,5 (pour simuler l’intérieur des lysosomes des macrophages) ou à pH 7 (pour simuler le milieu pulmonaire extracellulaire), additionné d’un biocide pour éviter le développement de microorganismes (formaldéhyde habituellement, qui est aussi un cancérigène reconnu, groupe 1 de l’IARC…). Dans les études anciennes, sur la base d’absence de mutagénicité dans les tests classiques de mutagenèse, les fibres ont longtemps été considérées comme non carcinogènes. On a ensuite changé d’avis, et, à l’instar des fibres d’amiante, plusieurs auteurs ont montré que les effets clastogènes observés avec les FMA dépendaient de la dimension des fibres, les fibres longues, dans la limite de dimensions compatibles avec une internalisation cellulaire, étant plus toxiques que les fibres courtes. La production d’espèces actives de l’oxygène (ROS pour Reactive Oxygen Species) est également probablement l’une des étapes permettant aux fibres d’endommager l’ADN. Divers travaux de recherche ont été effectués pour déterminer si les fibres vitreuses produisaient des espèces radicalaires dérivées de l’oxygène et il a été constaté que c’était le plus souvent le radical hydroxyle OH°. Les méthodes récentes plus sensibles sont la détection directe par résonance paramagnétique électronique, ou indirecte par la mesure de l’hydroxylation des bases d’ADN (guanine) ou la détermination des changements de structure de l’ADN (cassures occasionnées dans des constructions plasmidiques).

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Il apparaît donc important de s’intéresser à la réactivité physico-chimique des FMA et nous allons essayer de résumer les connaissances sur le sujet. 3-3-1 Réactivité physico-chimique des FMA : Dans les paramètres à l’origine de la toxicité des FMA on retient principalement

� la respirabilité des fibres � l’effet fibre � la structure de la fibre � sa nature chimique � la réactivité de la cellule suite à l’exposition aux FMA

On ne reviendra pas sur la respirabilité des fibres, pour ce qui a été développé avec l’amiante. On retiendra que pour les FCR, la rétention est faible si la longueur des fibres est inférieure à 5 µm. Plus une fibre persiste dans le tractus respiratoire inférieur, plus elle entraîne d’effets potentiellement néfastes, surtout si elle a une longueur supérieure à 20 µm (elles sont trop grosses pour être éliminées du poumon par les macrophages alvéolaires). Le diamètre aérodynamique, qui prend en compte taille et forme de la fibre et, de fait le site de dépôt de la fibre est un élément important et l’IARC (IARC, 2002) considère comme acquis que les fibres respirables de diamètre aérodynamique inférieur ou égal à 3 µm sont les plus susceptibles d’induire des effets néfastes sur le poumon. Les fibres de plus de 5 µm de long et de moins de 1,5 µm de diamètre ont le plus grand potentiel pour atteindre les zones cibles du poumon et de la plèvre. On soulignera que les fibres minérales vitreuses dont font partie les FMA ne subissent aucun clivage longitudinal mais peuvent se casser transversalement alors que les fibres naturelles de structure cristalline, dont l’amiante, se scindent facilement en fibrilles élémentaires plus fines, dans l’aérosol, mais également au contact du fluide alvéolaire, ceci augmentant le nombre de fibres disponibles pour un effet pathogène. Une fois les fibres déposées au niveau du poumon profond, on va assister à une réaction inflammatoire, une alvéolite, avec intervention des macrophages alvéolaires. Les macrophages, après activation, migrent vers le site de déposition et phagocytent les fibres. Une fibre courte peut être entièrement internalisée, mais les fibres longues, de plus de 20 µm, sont phagocytées par plusieurs macrophages. Ce processus de phagocytose va entraîner une cascade d’événement dont la production par les macrophages de cytokines, d’espèces réactives de l’oxygène (ROS) et d’oxyde d’azote et de protéases. Une phagocytose contrariée va entretenir la réaction inflammatoire, au même titre

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que l’arrivée de nouvelles fibres, ce qui va majorer les phénomènes inflammatoires avec un afflux continu de cellules et la production en continu de cytokines, de ROS…C’est par ce phénomène que l’on va ensuite voir survenir une fibrose avec la présence de fibroblastes. En effet, avec la formation d’une nécrose tissulaire en réaction à la présence de composés réactifs libérés par le processus inflammatoire, on va voir survenir une prolifération cellulaire avec dépôt de collagène par les fibroblastes au niveau du poumon profond et en particulier de l’alvéole. Ce tissu cicatriciel qui se caractérise par une accumulation de collagène dans le tissu interstitiel, n’a plus les capacités des cellules pulmonaires alvéolaires (les pneumocytes membraneux en particulier qui forment la paroi de l’alvéole) et les échanges gazeux ne peuvent plus se faire. Le tissu pulmonaire perd également de son élasticité. On voit apparaître une fibrose pulmonaire, qui, si elle est étendue, entraînera une insuffisance respiratoire avec hypoxie et hypercapnie avec des effets délétères sur le cœur droit qui conduiront éventuellement au décès. Au niveau de la plèvre on a également des phénomènes de cicatrisation fibreuse qui vont se faire au niveau du feuillet pariétal. On verra alors survenir les atteintes à type de plaques pleurales (avec l’amiante on décrit également les pleurésies, les atélectasies rondes qui découlent des phénomènes cicatriciels pleuraux…). Le CBP serait une conséquence de la fibrose chronique qui résulte de l’irritation chronique du poumon par des fibres biopersistantes (et ce d’autant plus que leur inhalation sera répétée). Une deuxième voie de cancérisation serait une action génotoxique directe des fibres agissant conjointement avec la prolifération fibroblastique ce qui aboutirait à terme à la transformation néoplasique. Le mécanisme de cancérisation pleurale, après translocation des fibres au niveau de la plèvre suivrait les mêmes mécanismes (Kamp et Weitzmann, 1999). Des études ont montré que des fibres (amiante ou FMA) pouvaient avoir un potentiel génotoxique. Si l’amiante a été beaucoup étudiée, le nombre de travaux sur les FMA dans cette direction est encore limité et ce domaine demande de nombreuses études du fait du grand nombre de fibres disponibles sur le marché (ou à venir). Il a été noté toutefois un potentiel clastogène pour les FMA et une capacité à produire des cassures chromosomiques. Il n’a pas encore été possible d’établir un type d’activité en fonction de la fibre considérée. Comme pour l’amiante, plusieurs auteurs ont démontré que les effets clastogène, les lésions chromosomiques, dépendaient des dimensions des fibres, et que les fibres longues, dans la limite des possibilités d’internalisation cellulaire, étaient plus toxiques que les courtes. Il n’y a pas d’études sur l’action des FMA au niveau des protooncogènes, oncogènes et gènes répresseurs de tumeur contrairement à ce qui a été fait avec les fibres d’amiante.

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Pour des fibres de mêmes caractéristiques dimensionnelles, les facteurs chimiques et structuraux vont jouer sur la biosolubilité et sur la réactivité chimique de surface. Alors que l’effet fibre a intéressé les chercheurs depuis longtemps, les propriétés chimiques de surface, la réactivité chimique de surface de la fibre ont été récemment prises en compte, d’abord pour l’amiante puis pour les FMA. On sait que les FMA, contrairement aux fibres d’amiante (chrysotile), ne subissent pas de clivages longitudinaux, seules des cassures transversales pouvant survenir. A l’échelle moléculaire, en surface, selon la composition chimique de la FMA, on peut trouver différents sites de réactivité, fonction des éléments chimiques prédominants, en surface ou à proximité de celle-ci. Ont été décrits en surface des fibres (Fubini, 1994) :

� des sites acides ou basiques (présence de protons, de groupement hydroxyles…)

� des sites porteurs de liaisons hydrogènes faibles mais capables de générer d’autres réactions

� des charges localisées dues à des défauts de surface � des ions métalliques (en particulier des ions de métaux de transition

pouvant exister sous différents états d’oxydation, comme le Fe le Cr le Ni), faiblement coordinés donc capables de se lier facilement avec d’autres éléments ou molécule du milieu environnant. On notera que certains de ces métaux sont des cancérogènes connus (Cr, Ni).

[Il apparaît intéressant de souligner ici la présence de ces métaux cancérogènes connus, surtout Nickel et Chrome mais aussi le plomb, le cadmium. Ces métaux sont reconnus responsables de la survenue de cancers pulmonaires. On les trouve dans les fibres d’amiante comme dans les FMA. Il est probable que ces molécules jouent un rôle dans la cancérogenèse pulmonaire et peut être pleurale. Il y a sans doute là une voie de recherche à développer.] Ces différents sites de réactivité seront dépendants du traitement mécanique antérieur de la fibre, des traitements chimiques subis au cours de sa fabrication, des liants ajoutés, des impuretés présentes adsorbées en surface. Et ces

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caractéristiques ne sont pas mentionnées dans les publications concernant les échantillons et non communiqués par les fabricants. Fubini (Fubini, 1994) a montré que les FMA, qui sont pour la plupart des fibres vitreuses, peuvent présenter des propriétés voisines de celles du quartz ou de poussières vitreuses de silice. Des études ont permis d’identifier en surface des fibres des sites à liaisons incomplètes liés au silicium présent et des sites Fe3+ soit présents à l’origine soit provenant de l’oxydation des ions Fe2+ présents. Selon les sites à la surface des fibres, le milieu environnant ne jouera pas le même rôle. Il faut analyser ce qui se passe aux interfaces matériaux/tissus vivants. Des travaux soulignent que la surface d’un matériau dans un environnement X réagit avec les molécules présentes dans l’air, avec les molécules d’eau ou d’autres liquides, cela dans des temps très courts et toujours dans le sens de l’abaissement de l’énergie du système. Les molécules présentes en surface peuvent s’adsorber en surface, ou bien pour de petites molécules diffuser vers le solide, et, à l’inverse des molécules peuvent être désorbées dans le milieu biologique dans lequel la fibre se trouve. Il est également décrit des effets catalytiques de la fibre qui vont donner des modifications conformationnelles des protéines par exemple. Les interactions sont donc multiples, complexes et différentes possibilités peuvent coexister. Des études (Zoller et al., 2000….) montrent également la présence d’espèces radicalaires activées de l’oxygène (reactive oxygen species = ROS), pouvant être libérées de FMA (échantillons de laine de roche et de laine de laitier), de façon comparable à ce qui se passe pour le crocidolite tant en qualité qu’en quantité, et impliquant donc une toxicité (formation de radicaux OH°, formiate CO2-°, ferryl…). Il semblerait que l’on puisse conclure que certains échantillons de laine de roche et de laine de laitier sont beaucoup plus susceptibles de produire des ROS que les laines de verre en l’absence d’eau oxygénée et que ce sont surtout les FCR et la laine de roche qui ont une production en ROS équivalente à celle des amiantes, voire plus élevée, dans les conditions expérimentales. Pour certains (Brown et al., 2000) ce sont ces ROS qui sont responsables de la cancérogénicité et la mesure de la consommation d’antioxydants comme le GSH et l’acide ascorbique est un bon moyen d’appréhender la dangerosité des fibres. On a également signalé que des échantillons de LR et de LL peuvent entraîner l’hydroxylation de la deoxyguanosine pouvant ainsi modifier l’ADN. Cet effet semble plus faible avec les FCR et la LV.

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Le rôle du fer semble également primordial : le fer est présent dans ou à la surface des fibres. On le trouve essentiellement dans les LR et LL où la teneur en fer exprimée en Fe2O3 peut atteindre 6 à 7% voire 13%. En surface c’est le Fe III qui est présent, mais à l’intérieur de la fibre c’est le Fe II essentiellement, Fe II qui peut, lorsque la fibre est partiellement solubilisée, apparaître en surface et déclencher l’apparition de ROS. Le Fe III présent en surface peut aussi intervenir dans des réactions catalytiques ou avec des complexants ou des réducteurs présents dans le milieu environnant. Quant au Fer présent dans le milieu biologique, il peut se lier à des sites acides présents à la surface des fibres, quand elles sont insolubles ou peu solubles ce qui est le cas pour certaines FV, LR ou FCR et entraîner soit une réaction catalytique soit la formation de ROS. Des études sur les amiantes ont montré la formation de corps ferrugineux sur la fibre minérale et qu’il y avait possibilité d’absorption de fer sur des silicates. Une notion qui a été largement développée c’est la notion de biopersistance. La plus grande toxicité des fibres les plus biopersistantes repose sur l’hypothèse que plus longtemps une fibre peut exercer une action inflammatoire dans une zone sensible du poumon ou de la cage thoracique (on pense à la plèvre en particulier), plus grande est la probabilité que la zone atteinte soit le siège de la formation d’une tumeur. Une revue des méthodes d’évaluation de la biopersistance avait été faite par Mulhe (Muhle et Bellmann, 1995). Si l’entrée et le site final de déposition dans le poumon sont dépendants du diamètre aérodynamique, c’est, in fine, la biopersistance de la fibre qui est le facteur le plus important, et de cette biopersistance dépend l’accumulation des fibres (et de fait le dépassement des possibilités d’épuration et l’inflammation chronique). La biopersistance de particules est fonction de plusieurs paramètres et la demi-vie de rétention pulmonaire d’une fibre in vivo en est le reflet. Cette biopersistance dépend de l’élimination des fibres par les processus de clairance physiologique : translocation vers le larynx via l’escalator muco-ciliaire, avec intervention éventuelle des macrophages alvéolaires selon le site de déposition, passage dans l’interstitium via le système lymphatique, translocation vers la plèvre, passage sanguin, processus physico-chimiques de dissolution et de cassures. Les cassures des fibres longues incomplètement phagocytées en fragments plus courts peuvent diminuer significativement leur biopersistance.

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On a déjà souligné que la classification des FMA par la CEE est basée sur le coefficient KNB = somme des pourcentages de Na2O, de CaO, de K2O, BaO et de MgO. Ce coefficient a été adopté comme élément de base du classement de la dangerosité des FMA par l’Union Européenne, car étant un facteur prédictif de la solubilité des fibres, donc de leur biopersistance. Les études sur milieux acellulaires simulant l’environnement pulmonaire sont maintenant utilisées en particulier par les laboratoires de recherche industriels des entreprises productrices de FMA comme (Kamstrup, 1998 et 2004). On a défini une constante de vitesse de dissolution (kdis) qui est mesurée, représentant la quantité de fibres dissoutes par cm2 de surface et par heure, et des équations sont proposées pour les calculs. Plus le kdis est élevé, plus la fibre considérée se dissout rapidement. Plusieurs types d’amiantes reconnues cancérogènes ont un kdis inférieur à 1. Certains FMA ont des kdis qui vont de 300 à plus de 1000, ce qui veut dire que ces FMA se dissolvent 300 à 1000 fois plus rapidement que l’amiante. On distingue une dissolution congruente (tous les composants se dissolvent à la même vitesse), d’une dissolution non congruente (certains composants se dissolvent moins vite, occasionnant un résidu). On considère que plus le kdis est élevé, moins la fibre est dangereuse. Des recommandations vont dans le sens de recherche de fibres le moins possible biopersistantes, cette propriété étant alors synonyme de cancérogénicité moindre. Et de fait les industriels ont mis au point des nouvelles fibres, aux propriétés comparables à celles des fibres anciennes, mais plus biosolubles donc avec une biopersistance réduite au niveau pulmonaire, fibres qui diffèrent chimiquement en particulier des FCR, puisque c’est particulièrement pour le remplacement de celles-ci qu’elles ont été développées : ce sont les fibres en silicates alcalino-terreux ou fibres AES (Alkaline Earth Silicate) et les laines HT, laine de roche à forte teneur en alumine et faible teneur en silice. La biopersistance est dépendante principalement de la composition chimique des fibres. Les fibres dont la teneur en silicates alcalins et alcalino-terreux est la plus importante sont les plus solubles, les moins biopersistantes. C’est la teneur en Ca et Na qui est lié à la solubilité. C’est la base du coefficient KNB. Ceci explique, et nous l’avons déjà signalé, que les FCR sont les fibres les plus biopersistantes après les fibres d’amiante. Des travaux sont effectués et publiés pour tester la biosolubilité de nouvelles fibres par rapport aux anciennes et pour comparer les effets sur le poumon. On

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citera par exemple les travaux de l’équipe de Rockwool International (Kamstrup, 1998 et 2004, Guldberg et al., 2002). Pour ces auteurs, des études bien conduites sur la biopersistance des FMA peuvent être suffisantes pour prédire les effets pathologiques des nouvelles fibres développées. Des études ont été ainsi publiées sur les nouvelles fibres de laines à forte teneur alumine faible teneur silice (Kamstrup et al., 2004 ; Guldberg et al., 2004). Dans l’étude de Brown déjà citée (Brown et al., 2005) , la biopersistance des FCR est soulignée comme un élément clef de leur toxicité. Mais cette biopersistance prise comme marqueur de la toxicité des fibres est critiquée par certains. MC JAURAND, qui faisait partie des experts de l’INSERM a tenu à ajouter un commentaire aux conclusions de l’expertise, pour préciser que l’utilisation du paramètre biopersistance des fibres pour l’évaluation de la toxicité ne reposait pas sur des bases scientifiques solides, la proposition de la plus grande toxicité d’une fibre biopersistante reposant sur l’hypothèse de la pérennisation de la réaction inflammatoire n’étant qu’une notion intuitive. Il est estimé par certains (Moolgavkar et al., 2001) que quelle que soit la fibre, le potentiel carcinogène est équivalent, et uniquement dépendant de la biopersistance, selon le principe « a fibre is a fibre ». Le « poids » des longues fibres au niveau du poumon est l’élément principal du risque carcinogène. C’est la surcharge en fibres qui est l’élément principal avec le dépassement d’une dose maximale tolérée (MTD) (Turim et Brown, 2003). Ces auteurs ont proposé un modèle selon lequel le risque de cancer respiratoire est une fonction linéaire de la concentration d’exposition et de la demi-vie des fibres dans le poumon. En corollaire on peut se poser la question d’un effet de sommation des fibres. Les FMA, pour les plus biopersistantes, si l’on suit ce raisonnement, continueront à entretenir l’inflammation, et, chez un salarié antérieurement exposé à l’amiante, on aurait alors une augmentation du risque de survenue d’affections cancéreuses ? Il n’y a pas semble-t-il d’études qui vont dans ce sens. De la même façon on doit se méfier de la coexposition à d’autres cancérogènes pleuraux ou pulmonaires avérés professionnels ou culturels. Ceci est souligné par Fontaine (Fontaine et al., 2006) pour le cas particulier des FCR mais est à retenir pour toute fibre minérale à partir du moment ou elle est irritante. Une étude récente (Geiser et al., 2003), outre l’influence de la géométrie des voies aériennes et la taille des fibres, met en avant le rôle probable du surfactant dans la rétention des fibres chez le hamster. Une certaine tension de surface est nécessaire pour que les fibres viennent au contact intime des cellules de l’épithélium des voies respiratoires. Cette immersion totale est

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nécessaire pour obtenir un déplacement via le surfactant qui est à l’interface entre l’air et la phase liquide qui tapisse les voies respiratoires (surfactant à différencier de celui qui tapisse les alvéoles pulmonaires). Par ailleurs, par le biais de l’immersion, une clairance sanguine des fibres peut avoir lieu et donc, d’autres organes peuvent être atteints. Ceci expliquerait pour ces auteurs, ce que nous avions signalé comme pathologie extra-thoracique liée aux fibres, retrouvé par les études épidémiologiques : les atteintes rénales et cardiovasculaires (Sali et al., 1999 ; Expertise INSERM, 1999). Des travaux étudient la phagocytose des FMA par les macrophages alvéolaires du rat et du hamster (Dorger M et al., 2000 et 2001). Des études sont en cours et on citera, pour n’en citer qu’une, l’étude de l’INRS (Gate) dont le but est de déterminer le potentiel toxique et mutagène d’une fibre céramique réfractaire (FCR1a) sur les rats transgéniques Bigblue après exposition par inhalation, réalisée selon le protocole de l’European Chemicals Bureau (http://ecb.jrc.it/DOCUMENTS/Testing-Methods/mmmfweb.pdf), en mesurant la biopersistance pulmonaire et la translocation pleurale, les effets toxiques de fibres étant évalués par la réaction inflammatoire alvéolaire, la prolifération cellulaire dans les régions bronchiolo-alvéolaires et le pouvoir mutagène sur l’ADN pulmonaire. A l’inverse, du fait de la solubilité de ces fibres, si la biopersistance est faible, les produits de dissolution peuvent atteindre d’autres organes que le poumon et y générer une pathologie. Ce fait est retenu pour les atteintes rénales et cardiovasculaires mais on peut craindre d’autres pathologies non encore mises à jour, et pourquoi pas des pathologies cancéreuses. Les recherche actuelles s’orientent vers les modèles in vitro, acellulaires et cellulaires, pour diverses raisons dont, la diminution des expérimentations animales du fait de restrictions réglementaires et leur coût important, position recommandée par la CEE dans son projet REACH ( http://ecb.jrc.it/REACH/ ) . Par ailleurs, ces recherches doivent permettre des avancées dans la compréhension des mécanismes intimes de la toxicologie des FMA. La toxicité cellulaire directe des FMA est étudiée par le dosage du relargage par les érythrocytes de lactate deshydrogènase (LDH), témoin d’hémolyse et par l’augmentation de la production des ROS par les polynucléaires humains (Luoto et

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al., 1995 et 1997, Ruotsalainen M, 1999). Cette toxicité est étudiée comparativement à celle du quartz, du chrysotile, ou du dioxyde de titanium. La toxicité des différentes fibres est étudiée de façon comparative entre elles, en prenant comme référence les autres fibres citées. Sont étudiées les différences de toxicité de fibres de même composition mais de tailles différentes, par la mesure de production de certaines cytokines, connues pour intervenir de façon importante dans les phénomènes inflammatoires. Dans l’étude de Ye (Ye, 1999), ont été étudié les interactions entre les fibres de verre et la production de TNFα (le TNF est bien connu comme cytokine intervenant de façon importante dans des maladies chroniques inflammatoire comme la maladie de Crohn et les rhumatismes inflammatoires : PR, spondylarthrite ankylosante…) par des macrophages de souris. Il est montré que la production de TNFα est induite par les fibres de verre et que cette activation est associée avec l’activation de gènes promoteurs, et que la production de cette cytokine est favorisée par la présence de ROS (Ye et al., 1999 et 2001) Le macrophage humain est utilisé dans des études (Dika Nguea, 2005) pour tester la toxicité in vitro de diverses FMA. La cytotoxicité est évaluée par l’étude de la viabilité cellulaire et de l’apoptose. On compare les effets des différentes fibres en terme de toxicité sur le macrophage, une des premières cellules concernées lors des phénomènes d’épuration. La toxicité sur ce macrophage est prise comme point de repère pour la toxicité générale de la fibre. D’autres études sont en cours pour essayer de mettre à jour la mécanistique intime de la toxicité des FMA au niveau cellulaire et permettre de mettre en place des modèles cellulaires pour appréhender rapidement cette toxicité. On étudie les dommages induits sur l’ADN cellulaire par les différentes FMA en réalisant, après exposition, un test des comètes (Cavallo D, 2004) ou bien par mise en de l’induction de mutation sur les bases (Schurkes, 2004) Il y a encore beaucoup à faire pour connaître les mécanismes intimes menant à la cancérisation pulmonaire et pleurale secondaire à l’exposition aux FMA.

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4 LEGISLATION ET MESURES DE PREVENTION 4-1 Réglementation : La restriction et l’interdiction de l’amiante Le décret du 24 décembre 1996 a fixé l’interdiction totale d’importation et de mise sur le marché français de tout produit contenant de l’amiante à compter du 1er janvier 1997, assortie de quelques dérogations jusqu’à la fin 2001 pour les cas où il n’a pas été possible de trouver des substituts présentant moins de risques pour la santé. Le principe de substitution de l’amiante est basé sur une directive européenne qui impose la recherche, à chaque fois que cela est possible, pour les substances cancérogènes utilisées en milieu professionnel, de solutions de remplacement qui présentent les mêmes garanties techniques et un risque moindre pour la santé. La directive européenne du 26 juillet 1999 a fixé l’interdiction totale de mise sur le marché européen des fibres d’amiante de toutes natures (excepté les membranes d’électrolyse), à compter du 1er janvier 2005. La législation concernant les FMA Place donc aux fibres de substitutions. Mais il y a déjà une réglementation concernant ces fibres. Les fibres vitreuses artificielles de silicate à orientation aléatoire figurent dans la liste des substances dangereuses de la directive européenne

97/69/CE du 5 décembre 1997 (transposée par l’arrêté du 28 août 1998 et sa circulaire DRT 99/10 du 13 août 1999). Seules sont concernées les fibres de diamètre inférieur à 6 µµµµm (diamètre moyen géométrique pondéré

par la longueur moins 2 écarts types). Les FCR sont classées par la CEE cancérogène de catégorie 2 (substances devant être assimilées à des substances cancérogènes pour l’homme) en

fonction de leur teneur en oxydes alcalins et oxydes alcalino-terreux (pourcentage pondéral Na2O+K2O+CaO+MgO+BaO inférieur ou égal à 18%).

Cette directive introduit les laines minérales, les fibres céramiques réfractaires et les fibres à usage spécial dans la liste des substances dangereuses figurant à l’annexe I de la directive 67/548/CEE.

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On remarquera que cette directive ne prend en compte que la composition chimique et le diamètre des fibres. Et on peut se demander comment peut être calculé exactement le diamètre géométrique moyen. L’étiquetage des FCR et des préparations en contenant plus de 0.1% en poids est :

TOXIQUE

Phrases de risque R49 -peut causer le cancer par inhalation

R38-irritant pour la peau Conseils de prudence

S53-éviter l’exposition, se procurer des instructions spéciales avant l’utilisation S45-en cas d’accident ou de malaise, consulter immédiatement un médecin (si

possible lui montrer l’étiquette)

Les Fibres ou laines de verre, de roche et de laitier sont classées catégorie 3 et les préparations en contenant plus de 1% doivent avoir comme étiquetage :

nocif

R40 Effet cancérogène suspecté-preuves insuffisantes R38-irritant pour la peau

Ces laines sont définies comme ayant une somme d’oxydes alcalins et alcalino-terreux supérieure à 18%.

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La Directive 97/69/CE prévoit que la classification comme cancérogène d’une laine minérale précisément identifiée et dénommée ne doit pas s’appliquer s’il peut être établi que la substance remplit l’une des conditions suivantes : -un essai de biopersistance à court terme par inhalation a montré que les fibres d’une longueur supérieure à 20 µm ont une demi-vie pondérée inférieure à 10 jours -un essai de biopersistance à court terme par instillation trachéale a montré que les fibres d’une longueur supérieure à 20 µm ont une demi-vie pondérée inférieure à 40 jours -un essai intrapéritonéal approprié n’a montré aucune évidence d’excès de cancérogénicité -un essai à long terme par inhalation approprié a conduit à une absence d’effets pathogènes significatifs ou de modifications néoplasiques (nota Q) La classification comme cancérigène ne doit pas s’appliquer aux fibres dont le diamètre moyen géométrique pondéré par la longueur moins deux erreurs types est supérieur à 6 µm (nota R). (classification CMR de la CEE retrouvée dans : ED 976) [On notera que l’indice KNB ayant été considéré comme trop imparfait, les autorités allemandes ont proposé un autre indice chimique, le Ki, prédictif du potentiel cancérogène. Il est basé sur le pourcentage de tumeurs mésothéliales obtenues après injection intrapéritonéale des fibres testées chez le rat (test IP). Ki = CaO + MgO + Na2O + K2O + Br2O3 + BaO + 2(Al2O3) (exprimé en pourcentage de la masse). Les experts de l’Inserm (Expertise collective INSERM, 1999) ont critiqué cette approche simplificatrice d’une relation entre Ki et biopersistance des fibres sur les arguments suivants :

Signification du test IP chez le rat par rapport à l’inhalation chez l’homme ?

L’indice Ki ne prend pas en compte les facteurs géométriques des fibres Le facteur 2 pour Al2O3 n’a aucune base scientifique Pourquoi exprimer les concentrations en unités pondérales plutôt qu’en

unités molaires ? La liste des constituants possibles supposés être les compléments à 100%

des autres oxydes est incomplète, manquant en particulier : TiO2, ZrO2, P2O5, FeO, et SiO2]

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Arrêté du 28 août 1998 modifiant l’arrêté du 20 avril 1994 relatif à la déclaration, la classification, l’emballage et l’étiquetage des substances. Journal Officiel du 10 septembre 1998. Cet arrêté précise les règles d’étiquetage en particulier.

En France ces règles d’étiquetage s’appliquent à tous les produits contenant des FMA dés lors que leur utilisation peut entraîner une libération de fibres (par exemple pour les produits prédécoupés ou non mais pouvant faire l’objet de découpes et d’ajustement, pour les ciments pulvérulents (circulaire DRT 9/10 du 13 août 1999). La mise sur le marché de FMA ou de produits en contenant doit être accompagnée d’une fiche de données de sécurité (FDS) qui mentionnent les dangers (16 items réglementaires). Les filaments continus de verre ne relèvent pas de cette directive et ne font l’objet d’aucune classification harmonisée au niveau européen, les données étant encore insuffisantes. Pour les produits Cancérigènes-Mutagènes et/ou Reprotoxiques (CMR) (ED 976) il existe un décret de la CEE qui a été transcrit en droit français et qui a fait modifier le Code du Travail (CT). Ce décret 2001-97 du 1er février 2001 (articles R 231-56 du Code du Travail) précise les principes de prévention des risques pour les agents cancérogènes mutagènes et/ou toxiques pour la reproduction. Les FCR, les fibres à usage spécial étant considérées comme cancérigènes catégorie 2 ce décret s’applique donc pour elles et, en particulier il faut appliquer les mesures de prévention primaire qui sont le remplacement, la substitution de ces matériaux par des matériaux moins dangereux ou des procédés évitant leur mise en œuvre. Ce décret s’applique intégralement pour les FMA classées cancérogènes. On citera également le Décret 2003-1254 du 23 décembre 2003 relatif à la prévention du risque chimique, qui complète le décret CMR et qui modifie le Code du Travail, transposition en droit français de la Directive Européenne n° 98/24/CE du 7 avril 1998 « agents chimiques » et la Directive Européenne n° 1999/38/CE du 29 avril 1999 « agents cancérogènes et mutagènes ». Ce décret donne de nombreuses obligations concernant l’utilisation professionnelle des agents chimiques dangereux (ACD), dont les CMR qui impliquent, entre autre : -qu’il faut supprimer l’agent dangereux ou le substituer par un autre moins dangereux et que si la substitution est impossible qu’il faut appliquer des mesures spécifiques (conception adaptée des postes de travail et des équipements de production, application à la source des mesures de protection

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collective et d’organisation de travail, en dernier recours, mesures de protection individuelles -qu’il faut que l’employeur tienne une liste nominative des salariés exposés à ces produits -qu’il faut faire une formation et une information de ces salariés sur les dangers des produits utilisés, les mesures de prévention à appliquer -……. Nous renvoyons le lecteur intéressé aux articles du Code du Travail ( Articles R 231-54 à R 231-54-17 et articles R 231-56 à R 231-56-12 du Code du Travail et suivants). On rappellera également l’existence depuis 1984 de 2 décrets, le n° 84-1094 du 7 décembre 1984 et le n° 84-1093 du même jour, concernant l’aération et l’assainissement des locaux de travail Le cadre législatif existe donc. Mais il est loin d’être appliqué. On notera par ailleurs que la Plan National Santé Environnement 2004-2008, intitulé « franchir une nouvelle étape dans la prévention des risques sanitaires dus aux pollutions des milieux de vie », mis en place par 4 ministères (Santé et Protection sociale, Ecologie et Développement durable, Emploi Travail et Cohésion sociale et Recherche) prévoit dans ses objectifs une prévention des pathologies d’origine environnementale et notamment les cancers et en particulier, dans son paragraphe 2.2 il est noté : « 2.2 Renforcer les capacités d’évaluation des risques sanitaires des substances chimiques dangereuses. Afin d’évaluer les risques sanitaires présentés par plusieurs familles de substances dont certains de leurs composants font déjà l’objet de préoccupations : éthers de glycol, fibres minérales artificielles, pesticides, phtalates, hydrocarbures…les capacités d’expertise en France seront renforcées ainsi que les réseaux de toxicovigilance ». L’action 18 de ce plan est : limiter l’exposition de la population aux fibres minérales artificielles. L’action 23 : réduire les expositions professionnelles aux agents cancérogènes mutagènes et reprotoxiques, notamment celles concernant les poussières de bois, le benzène, le plomb et les FCR en renforçant et en modernisant les moyens de contrôle et les services de santé et sécurité au travail. Les FMA sont dans le « collimateur » de la prévention et jusqu’au niveau national….

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Valeurs Limites d’Exposition Professionnelles (VLEP) : Pour les FMA, contrairement à l’amiante, ce qui fait l’objet de demande pour certains (Pézerat, 1998 et 2005.), les VLEP sont indicatives et non contraignantes. Le ministère chargé du Travail a fixé des VLEP en l’occurrence des Valeurs Moyennes d’Exposition (VME) sur 8 heures. Tableau 7 : VLEP indicatives des FMA en France Produit de substitution VME Etiquetage/Classification Fibres de LV 1 fibre/cm3 R40-R38-Carcinogène catégorie 3 Fibres de LR 1 fibre/cm3 R40-R38-Carcinogène catégorie 3 Fibres de LL 1 fibre/cm3 R40-R38-Carcinogène catégorie 3 Fibres de FCV 1 fibre/cm3 Fibres de FCR 0,6 fibre/cm3 R49-R38-Carcinogène catégorie 2 Signification des phrases de risque R38 Irritant pour la peau R40 Effet cancérogène suspecté. Risque possible d'effets irréversibles R49 Peut provoquer le cancer par inhalation On rappellera que pour l’amiante, la VME est fixée à 0,1 fibre/cm3, et qu’elle est réglementaire. On a l’impression que 0,1 fibre/cm3, ce n’est rien. C’est une idée fausse. On considère que dans les conditions de repos, le volume courant, c’est à dire le volume d’air que l’on inspire à chaque inspiration, est égal à 0,4 à 0,6 litre. On considère également que la fréquence respiratoire de base est de 16 inspirations par minute. On va calculer le nombre de fibres inhalées pour 8 heures de travail et pour une semaine (de 35 heures…France oblige) par un salarié exposé pour

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cette VME de 0,1 fibre/cm3. Les résultats sont donnés dans le tableau 8 ci-dessous Tableau 8 : calcul du nombre de fibres inhalées en fonction du volume courant (VT) et d’une VME de 0.1 fibre/cm3

Temps d’exposition Pour un VT de 0,4 litre en cm3

Pour un VT de 0,6 litre en cm3

Nombre de fibres inhalées pour 0.1 f/cm3 VT=0.4 l VT=0.6l

1 minute 6400 9600 640 960 1 heure 384 000 576 000 38400 57600 8 heures 3 072 000 4 608 000 307 200 / 460 800 35 heures 13 440 000 20 160 000 1 344 000 /2 016 000 On voit bien qu’en 8 heures de travail, pour une VME de 0,1 fibre/cm3, on inhale quand même pour un volume courant*(VT = Tidal Volume) au repos entre 0.4 et 0.6 l, entre 300 000 et 450 000 fibres…. Avec un VME de 1 fibre/cm3, on multiplie par 10. Cela fait un nombre important de fibres. Et si la ventilation doit augmenter du fait d’efforts (avec une demande en oxygène accrue), on va augmenter encore le nombre de fibres inhalées (pendant l’effort, la ventilation va atteindre 60 à 70 litres/minute, selon la taille, le sexe, l’âge….les possibilités musculaires). Toutes ces fibres vont mettre à contribution de façon intense les possibilités d’épuration mécanique (escalator muco-ciliaire) et cellulaires (macrophages…) et parfois les déborder. Donc, contrairement à l’impression initiale, après calcul, 0,1 fibre/cm3, c’est au final beaucoup de fibres inhalées…même si toutes n’arriveront pas au niveau du poumon profond. Et 0,6 fibre/cm3 ça fait 6 fois plus et 1 fibre/cm3 ça fait 10 fois plus. Il est intéressant et même primordial de quantifier les niveaux d’exposition aux FMA tant dans les usines de production, qu’aux endroits ou elles sont utilisées. Il faut également penser à l’exposition domestique (Carter CM, 1999). Dans un travail de Kauffer (Kauffer et al., 1997) il est noté que les concentrations en

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nombre de fibres mesurées lors de la pose de matériaux d’isolation en laines minérales sont supérieures à celles mesurées dans les usines de production. L’expertise Inserm retient également que : -lors de travaux de calorifugeage avec des laines d’isolation en vrac dans un espace confiné, des niveaux d’exposition supérieurs à 1 fibre/ml peuvent être observés -… Et que donc, en prenant en compte l’ensemble des données actuellement disponibles, on peut raisonnablement estimer qu’une partie des utilisateurs de fibres minérales artificielles est actuellement soumise à des concentrations comparables à celles ayant prévalu dans l’industrie pendant les périodes de production anciennes et intermédiaires ou les valeurs étaient élevées. Il y a peu de données disponibles sur les niveaux de pollution par les FMA dans la population générale. Dans les quelques études retrouvées dont l’étude de l’Inserm et celle de Carter (Carter CM et al., 1999), les concentrations en fibres retrouvées dans l’air des bâtiments publics et privés montrent des valeurs basses, inférieures à 0,01 fibre/ml. On note malgré tout des valeurs qui sont un peu plus élevées lors de la mise en œuvre de travaux d’isolation. On peut donc se demander si les VLEP actuellement en cours, et uniquement indicatives, sont suffisantes pour assurer la sécurité des utilisateurs. On remarquera également qu’il n’y a pas de VLE (valeur limite sur 15

minutes, à ne jamais dépasser plus d’une fois par tranche de 4 heures) et il serait important de faire respecter la valeur limite de 0,1 fibre/cm3 sur 1 heure car la VME sur 8 heures ne prend pas en compte les pics

d’exposition qui entraînent une forte contamination en un temps court, (donc le débit de dose et la saturation des possibilité d’épuration), ceci impliquant

que le mesurage soit fait dans la période où l’empoussièrement est maximum. Déjà que ces valeurs ne sont qu’indicatives, on voit mal comment faire pratiquer de telles mesures sur l’heure la plus empoussiérée aux industriels

concernés……

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Des voix s’élèvent (Pézerat, 1998 et 2005) pour rappeler que : � il n’y a aucun justificatif scientifique à ces valeurs (toujours le problème

de l’effet seuil….) � les valeurs pour les FMA doivent devenir contraignantes � la valeur limite de 0,1 fibre/cm3 choisie par l’amiante est celle qu’implique

la méthode de mesure 4-2 Prévention : Il en découle qu’il faut pour les FMA :

� des mesures de prévention collectives et individuelles identiques à celles qui ont été retenues pour l’amiante (repérage, confinement des chantiers, équipements de protection individuels (EPI) adaptés, essai des EPI avant le chantier…),

� interdire ou réduire drastiquement l’utilisation des fibres en vrac et interdire la vente au grand public de produits susceptibles de libérer des FCR,

� les mêmes mesures de suivi médical (visite, radiographie initiale, réalisation d’EFR…)

� les mêmes mesures d’élimination des déchets (et d’inertion…). � Des VLEP contraignantes et, en plus de la VME, une valeur limite

d’exposition sur 1 heure Il semblerait également intéressant, au niveau des mesures de suivi médical, d’appliquer aux FMA ce qui a été décidé lors de la Conférence de Consensus sur l’amiante avec la réalisation en particulier de scanner thoracique en acquisition spiralée. Ces examens auraient à mon avis un double intérêt :

� bien sur la meilleure surveillance des salariés ayant été exposé aux FMA

� mais surtout, la réalisation d’un examen qui est la référence, le « gold standard » pour le suivi des affections thoraco-pulmonaires, chez tous les salariés exposés aux FMA.

On a déjà noté que, dans les critiques des différentes études réalisées, l’absence de réalisation de scanner thoracique est souvent mise en avant. La réalisation d’un tel examen à grande échelle, dés maintenant, pour tous les salariés exposés aux FMA, à l’instar de ce qui doit se faire pour l’exposition à l’amiante, permettrait sans doute d’affiner les données des études épidémiologiques et déjà de mieux cerner l’impact pulmonaire des FMA (si tant est que l’on puisse le séparer des effets de l’amiante souvent retrouvé en co-

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exposition). Et parmi les salariés exposés aux FMA, il faut prendre en compte les salariés de production mais aussi et surtout les utilisateurs du BTP, que l’on sait exposés à des concentrations supérieures.

Pour la reconnaissance et la réparation des maladies liées aux FMA, il faudrait élargir les tableaux 30 et 30bis des maladies professionnelles du Régime Général aux FMA. Le même auteur (Pézerat, 1998 et 2005) voudrait également que d’autres mesures réglementaires soient prises :

� Abaissement des VME à 0,5 fibre/cm3 pour la LV et LL � Abaissement de la VME à 0,2 fibre/cm3 pour la LR et pour toutes les

situations de travail où la nature de la laine est inconnue � Incitation forte pour une modification du conditionnement des laines dans

les rouleaux pour obtenir un confinement plus important des fibres dans une membrane, ce qui, outre l’impact respiratoire, résoudrait également partiellement le problème des affections dermatologiques.

D’autres (Pairon et al. 1999 ; Dumortier et al., 2001 ) vont dans ce sens en demandant une meilleure identification des salariés exposés aux FCR, une évaluation des niveaux d’exposition et la prise de mesures préventives pour minimiser l’exposition de ces salariés. Il faut également appliquer d’autres mesures :

le principe de substitution : dés lors que les FMA ne sont pas indispensables, il faut les remplacer par d’autres produits moins dangereux, et même, il faut interdire l’usage de certaines fibres sauf cas réglementairement fixés, en particulier pour les FCR, ce qui est souligné par Bignon (Bignon, 2000).

poursuivre les recherches sur des produits de substitution pour les fibres les plus dangereuses

faire évoluer les formulations des fibres vers les produits les moins dangereux

mais se méfier de la synergie d’action avec les produits non fibreux, ce qui pourrait, à l’instar de ce qui se passe avec l’amiante, potentialiser l’effet cancérogène des fibres inhalées

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Si on applique strictement les règles définies pour les FMA par la CEE et la France, on protège les salariés. Des recommandations ont été publiées (Catani J, 2003) Mais l’application de la réglementation souffre de nombreux manques que l’on a en partie développés : -ces mesures sont loin d’être appliquées et déjà elles sont loin d’être connues de tous, même si nul n’est censé ignorer la Loi. Il faut donc déjà fournir un effort considérable d’information et de formation auprès des employeurs et des salariés des secteurs concernés. L’inspection du travail et le médecins du travail doivent être les principaux acteurs de cette information sur le terrain et doivent ensuite être relayés sur ce terrain par la hiérarchie de l’entreprise qui prendra en charge la protection de ses salariés (ce n’est que l’application du Code du Travail). -ces mesures sont sans doute insuffisantes pour certains points. La classification des différentes FMA est sujette à critiques et on se souvient des remarques de Pézerat (Pézerat , 1998 et 2005). Il semble licite et nécessaire de classer au même niveau les FCR et les fibres d’amiante. Il faut donc appliquer aux FCR considérées, jusqu’à preuve du contraire, comme potentiellement aussi dangereuses que les fibres d’amiantes, des règles similaires à celles édictées pour l’utilisation et la manipulation de ce matériau. Il faut déjà limiter réglementairement l’utilisation des FCR aux usages ou elles ne peuvent pas être substituées par des matériaux de moindre nocivité. Et les FCR doivent être interdites d’utilisation pour le grand public. Il faut préconiser réglementairement l’utilisation des mêmes moyens de protections collectives et individuelles que pour l’amiante lors de l’utilisation des FCR (recourir à des techniques automatisées, travailler à l’humide, utiliser des outils à vitesse lente, capter les poussières à la source, proscrire les travaux de nettoyage à l’air comprimé, à la soufflette, si la découpe des matériaux est nécessaire elle doit être effectuée à l’extérieur du chantier, sous aspiration adéquate, avec les EPI nécessaires, utiliser les mêmes équipements de protection individuels (EPI) que pour l’amiante soit des combinaisons jetables, masque respiratoires adaptés….

-il faut les mêmes VLEP que pour l’amiante et veiller à ce que les niveaux d’exposition soient les plus bas possible ce qui nécessite la mise en place de mesures de contrôle de ces niveaux d’exposition fiables et régulièrement répétés.

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-il est nécessaire de bien classer les laines minérales dont la toxicité est différente, en faisant remarquer que la laine de roche (LR) est plus dangereuse que la laine de verre (LV) elle-même plus dangereuse que la laine de laitier (LL). Pour Pézerat (Pézerat, 1998 et 2005) ce fait impliquerait que la LR soit classée en cancérogène catégorie 2 (catégorie 3 actuellement), la LV reste en catégorie 3 et la LL soit classée parmi les composés non cancérigènes. Il faut impérativement développer des matériaux encore moins nocifs. Pour les fibres, tout le monde semble s’accorder à associer biosolubilité et innocuité mais encore faut il prouver que l’on ne va pas déplacer la toxicité sur d’autres sites de l’organisme par le fait de cette biosolubilité qui entraîne alors une distribution à distance par le flux sanguin, lymphatique…de différents composés de solubilisation. Ceci implique donc une poursuite de la recherche pour mieux cerner la mécanistique de la toxicité des fibres et mettre en place des tests fiables, in vitro, pour évaluer la toxicité des nouvelles fibres. Et il est impératif, avant autorisation de mise sur le marché de nouvelles fibres ou matériaux de substitution, que des études toxicologiques approfondies, avec des expérimentations animales à court et à long terme soient faites pour ne pas répéter les mêmes erreurs.

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5 CONCLUSION La toxicité des FMA et leurs effets sur la santé, s’ils ne sont pas encore complètement évalués et élucidés à ce jour, sont quand même assez bien cernés au vu de la littérature. Les données des études épidémiologiques et des études toxicologiques in vivo et in vitro permettent d’avoir un avis assez précis sur ce sujet. Le principe de précaution doit s’appliquer, surtout avec le précédent de l’amiante (mieux vaut passer pour un imbécile que pour un criminel….) et c’est un peu ce que la réglementation de la CE a mis en place. Mais encore faut il que cette réglementation soit appliquée. Ne pas prendre en compte ce que l’on sait déjà, ne pas prendre en compte la réglementation, c’est jouer aux apprentis sorciers….avec la santé des travailleurs et de la population générale. Les FCR doivent être considérées comme aussi dangereuses que les fibres d’amiante. Les études épidémiologiques doivent être poursuivies pour bien conforter ce fait. On doit appliquer pour les FCR les mêmes mesures préventives que celles mises en place pour l’amiante. La laine de roche doit être considérée comme un carcinogène de catégorie 2 et on doit appliquer le principe de substitution chaque fois que cela est possible et réserver son utilisation aux situations où il est impossible de la remplacer, mais avec des mesures de précaution renforcées. La laine de verre et la laine de laitier semblent les FMA les moins dangereuses mais la laine de verre doit être considérée comme un cancérogène de catégorie 3. La laine de laitier serait la moins dangereuse, sans doute non cancérigène, mais elle est classée cancérogène de catégorie 3. La moindre biopersistance peut éventuellement déplacer la toxicité des éléments solubilisés vers d’autres sites que le site pulmonaire et n’est donc peut être pas une caractéristique obligatoirement rassurante. Tout doit être mis en œuvre pour que la prévention soit réellement mise en place. Cette prévention passe également par une formation et une information des utilisateurs.

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Glossaire : définitions issues pour la plupart du dictionnaire des termes de médecine, Garnier Delamare, Maloine, 26ème édition Asbestose : variété de pneumoconiose due à l’inhalation de poussière d’asbeste (amiante) Bronchite chronique : survenue de toux et expectoration au moins 3 mois par an depuis 2 ans (définition clinique). Bronchite chronique obstructive : bronchite chronique avec altérations des débits respiratoires donnant un trouble ventilatoire obstructif (TVO). Emphysème pulmonaire : état pathologique du poumon caractérisé par la dilatation et la destruction des bronchioles respiratoires et des éléments conjonctivo-élastiques de la paroi des alvéoles. On distingue l’emphysème centro-lobulaire (localisé aux bronchioles respiratoires), pan-lobulaire (touchant de façon diffuse toutes les structures des acini pulmonaires : bronchioles respiratoires, canaux et sacs alvéolaires) et paracicatriciel (lésions limitées autour d’un ancien foyer pulmonaire fibrosé). Escalator muco-ciliaire : à l’état normal les particules inhalées sont transportées hors du tractus respiratoire par la clairance muco-ciliaire. Les cils de l’épithélium bronchique battent de manière synchronisée dans une couche liquidienne périciliaire, revêtue d’une couche de mucus visco-élastique, l’ensemble formant le système muco-ciliaire, l’escalator muco-ciliaire. Les particules inhalées, poussières, micro-organismes, allergènes carcinogènes et les débris cellulaires se fixent sur le mucus, qui est propulsé par les battements des cils sou-jacents vers le pharynx, où il est dégluti ou expectoré. Fibrose pulmonaire : développement de tissu conjonctif (fibroblastes et collagène) dans le parenchyme pulmonaire, localisé ou généralisé, anarchique et mutilant ou systématisé ; La fibrose peut être cicatricielle et fixe ou bien évolutive et extensive. Elle peut être secondaire à une maladie connue ou apparaître primitive ; Les fibroses évoluées entraînent la survenue d’une insuffisance respiratoire, le poumon n’assurant plus normalement sa fonction respiratoire (extraction de l’oxygène et rejet du dioxyde de carbone) ni sa fonction ventilatoire (la fibrose « rigidifie » le parenchyme pulmonaire qui devient moins « souple »).

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Fibrose pulmonaire idiopathique : le terme idiopathique cache notre ignorance quant à l’origine de la maladie…..du grec « idios » , homme du commun, ignorant. Mésothéliome : tumeur maligne ou bénigne dérivée des cellules tapissant les séreuses (plèvre, péritoine, péricarde, vaginale testiculaire). Le mésothéliome pleural est un cancer primitif de la plèvre développé aux dépens de l’endothélium pleural (ou mésothélium), caractérisé cliniquement par un épanchement pleural hémorragique récidivant et très douloureux, l’envahissement fréquent du péricarde et du péritoine et une évolution mortelle en quelques mois. Pneumoconiose : ensemble des altérations causées par l’inhalation et la fixation dans le poumon des particules solides répandues dans l’atmosphère (charbon, silice, fer,…….) Volume courant : volume gazeux mobilisé lors d’une inspiration ou d’une expiration normale. Chez l’adulte normal,au repos, il varie de 400 à 600 ml.

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