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Littérature française Histoire du XVII: La prose d’idées (lettres, portraits, maximes, discours, dialogues, pensées, etc.) * À partir de 1630, René Descartes (1596-1650), philosophe, mathématicien et physicien français, marque le XVIIe siècle. Règles pour la direction de l’esprit (1628) et ensuite le Discours de la méthode (1637) sont ses principales œuvres philosophiques. * Des genres nouveaux (ré)apparaissent : les lettres, les maximes et les portraits. La marquise de Sévigné (1626-1696) publie ses Lettres qui sont les chroniques de la Cour. * En 1656, Blaise Pascal (1623-1662) défend le jansénisme (doctrine selon laquelle nul ne peut être sauvé sans l’intervention de la grâce divine) avec Les Provinciales. La Rochefoucauld (1613-1680), avec ses Maximes et sentence morales (1664) et Jean de La Bruyère (1645-1696), avec Les Caractères (1688), vont porter ces genres à leur apogée et la littérature morale se transforme en satire sociale. Ils permettront aussi d’ouvrir la voie à l’esprit de réforme du XVIIe siècle. Le roman * Au XVIIe siècle, le roman apparaît dans la littérature comme un espace de liberté. Néanmoins, les romans ne sont pas épargnés par les métamorphoses du XVIIe siècle. La « folie du romanesque », présente au début du XVIIe siècle, est marquée par le merveilleux, le spectaculaire et l’excessif. * Madeleine de Scudéry (1607-1701) exploite la veine du roman héroïque avec ses écrits épiques : Artamène ou le grand Cyrus (1649-1653 ; cf. Artamene.org), Clélie (1656). * Quant aux « histoires comiques », elles ont été inspirées par le goût des bourgeois. Charles Sorel répond donc à ce courant romanesque avec La Vraie Histoire comique de Francion (1622). Illustration 1: Blaise Pascal (1623-1662)

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Littérature française

Histoire du XVII:La prose d’idées (lettres, portraits, maximes, discours, dialogues, pensées, etc.)

* À partir de 1630, René Descartes (1596-1650), philosophe, mathématicien et physicien français, marque le XVIIe siècle. Règles pour la direction de l’esprit (1628) et ensuite le Discours de la méthode (1637) sont ses principales œuvres philosophiques.

* Des genres nouveaux (ré)apparaissent : les lettres, les maximes et les portraits. La marquise de Sévigné (1626-1696) publie ses Lettres qui sont les chroniques de la Cour.

* En 1656, Blaise Pascal (1623-1662) défend le jansénisme (doctrine selon laquelle nul ne peut être sauvé sans l’intervention de la grâce divine) avec Les Provinciales.

• La Rochefoucauld (1613-1680), avec ses Maximes et sentence morales (1664) et Jean de La Bruyère (1645-1696), avec Les Caractères (1688), vont porter ces genres à leur apogée et la littérature morale se transforme en satire sociale. Ils permettront aussi d’ouvrir la voie à l’esprit de réforme du XVIIe siècle.

Le roman

* Au XVIIe siècle, le roman apparaît dans la littérature comme un espace de liberté. Néanmoins, les romans ne sont pas épargnés par les métamorphoses du XVIIe siècle. La « folie du romanesque », présente au début du XVIIe siècle, est marquée par le merveilleux, le spectaculaire et l’excessif.

* Madeleine de Scudéry (1607-1701) exploite la veine du roman héroïque avec ses écrits épiques : Artamène ou le grand Cyrus (1649-1653 ; cf. Artamene.org), Clélie (1656).

* Quant aux « histoires comiques », elles ont été inspirées par le goût des bourgeois. Charles Sorel répond donc à ce courant romanesque avec La Vraie Histoire comique de Francion (1622).

Illustration 1: Blaise Pascal (1623-1662)

* Viendront ensuite les romans de Scarron et de Furetière.

* Mais c’est bien l’œuvre de Madame de La Fayette, La Princesse de Clèves (1678), qui demeurera le "joyau du Grand Siècle".

La poésie (baroque)

* Après les œuvres poétiques remarquables du XVIe siècle, le XVIIe apparaît comme peu inventif. Cependant, l’âge baroque voit, au début du siècle, une "révolution" : la noire inspiration des "vers funèbres" et la somptuosité d’images surprenantes avec Saint-Amant, Tristan L’Hermite, etc.

* Malherbe est le principal artisan de cette évolution décisive. Ses œuvres jouent en outre un rôle essentiel dans la formation de la doctrine classique. Il réforme également la langue française afin d’en finir avec les archaïsmes et les mauvais usages.

• D’autre part, La Fontaine, avec les Fables, réalise un parfait équilibre entre les exigences classiques et une éblouissante fantaisie.

Le théâtre

* Le XVIIe siècle fut l’âge d’or du théâtre. Jean Mairet (1604-1686) et Jean Rotrou (1609-1650) en sont les représentants avec leur tragi-comédies (genre théâtral dont l’intrigue est caractérisée par un dénouement heureux, à l’inverse de la tragédie).

* Une tragédie fameuse : Le Cid de Corneille.

* La règle des trois unités est instaurée : l’action doit se dérouler en un jour, en un lieu et il ne doit y avoir qu’une seule intrigue. Par ailleurs, les pièces ne doivent présenter rien d’extravagant et de choquant.

* Ces nouvelles règles, qui rendent le théâtre moins libre, permettent à la comédie de prendre une place très importante avec, notamment, Molière et son Malade imaginaire dont le but est de "corriger les vices en les ridiculisant".

Illustration 2: Jean de la Fontaine (1621-1695)

La littérature française du XVIIIe

Elle s’inscrit dans une période le plus souvent définie par deux dates repères : 1715,date de la mort de Louis XIV, et d’autre part, 1799, date du coup d’État de Bonaparte qui instaure le Consulat et met d’une certaine façon fin à la période révolutionnaire. Ce siècle de transformations économiques, sociales, intellectuelles et politiques est riche d’une multiplicité d’œuvres qui peuvent se rattacher, en simplifiant, à deux orientations majeures : le mouvement des Lumières et ses remises en cause des bases de la société et, par ailleurs, la naissance d’une sensibilité que l’on qualifiera postérieurement de préromantique.

La littérature d'idées est illustrée notamment par Montesquieu (Lettres persanes (1721), Voltaire (romans philosophiques comme Zadig, 1747 ou Candide,1759), Diderot ou Rousseau que l'on découvre aussi comme romanciers aux côtés de Prévost, Bernardin de Saint-Pierre, Laclos ou Sade alors que le théâtre retient en particulier Marivaux et Beaumarchais.Le XVIIIe siècle voit se fragiliser progressivement la monarchie absolue avec la Régence de Philippe d’Orléans, puis avec le très long règne de Louis XV et ses guerres perdues (guerre de Sept Ans sur le continent européen et outre-mer, en Amérique et en Inde particulièrement, achevée par le traité de Paris de 1763 qui consacre la puissance de l’Angleterre et le poids de la Prusse). La monarchie mourra finalement de l’impuissance de Louis XVI : la Révolution de 1789 et ses soubresauts violents transformeront fondamentalement l’Histoire de la France qui deviendra une République le 21 septembre 1792. La naissance en 1776 de la République des États-Unis d’Amérique, soutenue par la France contre l’Angleterre, symbolise aussi l’entrée dans un monde nouveau à la veille du XIXe siècle où apparaît le personnage de Bonaparte.

Par ailleurs, au cours du XVIIIe siècle, la société française change avec l’essor démographique et l’activité d’une bourgeoisie d’affaires et d’entreprises liée au progrès technologique (machine à vapeur – métallurgie) et au commerce avec « les Indes », fondé sur la traite négrière. En même temps se développent les villes avec leurs salons, leurs cafés et leurs académies qui affaiblissent le poids de l’aristocratie dans le domaine culturel comme dans le domaine social où s’affirme peu à peu le tiers état qui sera le vainqueur des luttes révolutionnaires à partir de 1789. Alors que la grande majorité des écrivains du XVIIe siècle étaient des courtisans à la recherche de mécènes et de protecteurs, le XVIIIe siècle et les siècles suivants voient l'émergence d'une nouvelle éthique de l'écrivain, exprimée à l'origine par Voltaire[1], consistant en son autonomisation progressive par rapport aux pouvoirs (politiques, religieux). Cette éthique se construit dans le cadre de la lutte pour la liberté d'expression avec en corollaire une responsabilité accrue de ces écrivains dont les pouvoirs veulent désormais qu'ils répondent de leurs œuvres[2].

Les mentalités évoluent elles aussi avec le développement de l’éducation et des sciences (Newton, Watt, Volta, Leibniz, Buffon, Lavoisier, Monge…) et la diffusion des œuvres de l’esprit, par le colportage et par le théâtre. La foi dans le Progrès que symbolisera l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert correspond à une déchristianisation progressive de la société que révèlent les conflits entre le haut et le bas clergé, ou les tensions avec les Jésuites (expulsés du royaume en 1764) ou l’évolution du statut des protestants, admis à l’état-civil en 1787. Mais l’Église catholique reste un pouvoir dominant qui lutte contre les Lumières en faisant interdire leurs œuvres et en obtenant, par exemple, la condamnation à mort du huguenot Jean Calas en 1762 ou, pour blasphème, celle du chevalier de La Barre en 1766, barbaries qui susciteront l’indignation de Voltaire.

À la même période, les conquêtes coloniales intéressent toutes les puissances européennes (voir

Guerre de Sept Ans) et introduisent l’exotisme et le thème du bon sauvage qui nourriront les arts et la littérature, de Robinson Crusoé à Paul et Virginie par exemple. Les échanges se multiplient et les influences étrangères sont importantes autant pour la marche des idées que pour l’évolution des genres littéraires : c’est vrai en particulier pour l’influence anglaise avec ses avancées démocratiques (monarchie constitutionnelle) et la création romanesque ou poétique que découvrent beaucoup d’écrivains qui séjournent en Angleterre tout au long du siècle. L’influence allemande est aussi importante : elle nourrit le changement préromantique des sensibilités avec un apport marqué dans le domaine du fantastique et du sentiment national qui s’accentuera au siècle suivant.

En ce qui concerne l’art, le XVIIIe siècle présente longtemps un art tourné vers la décoration avec le style Régence et le style Louis XV et ceux qu’on a appelés les « peintres du bonheur » comme Boucher, Fragonard, Watteau ou Chardin, ou les portraitistes Quentin de La Tour, Nattier ou Van Loo, avant de valoriser, dans la deuxième partie du siècle, un art sensible et moral avec Greuze, Hubert Robert ou Claude Joseph Vernet. La musique française est illustrée par François Couperin et Jean-Philippe Rameau, mais d’autres compositeurs européens dominent le siècle, de Vivaldi à Mozart en passant par Haendel, Bach, Haydn…

Pour avoir un panorama littéraire du siècle précédent on se reportera à Littérature française du XVIIe siècle.

Références automatiques

1. ↑ Voltaire écrit dans l'article « Lettres, gens de lettres ou lettrés » de l’Encyclopédie : « Les gens de lettres qui ont rendu le plus de services au petit nombre d’êtres pensants répandus dans le monde, sont les lettrés isolés, les vrais savants renfermés dans leur cabinet, qui n’ont ni argumenté sur les bancs des universités, ni dit les choses à moitié dans les académies ; et ceux-là ont presque tous été persécutés. »

2. ↑ Gisèle Sapiro, La Responsabilité de l'écrivain. Littérature, droit et morale en France, XIXe-XXIe siècle, Seuil, 2011

Continuateurs des libertins du XVIIe siècle et d’esprits critiques comme Bayle et Fontenelle, ceux que l’on appellera les Lumières dénoncent au nom de la Raison et de valeurs morales les oppressions qui perdurent à leur époque. Ils contestent la monarchie absolue en revendiquant un contrat social comme fondement de l’autorité politique et une organisation plus démocratique des pouvoirs dans une monarchie constitutionnelle avec une séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire et militaire(Montesquieu, Diderot, Rousseau entre autres). Voltaire combat particulièrement les abus du pouvoir (censure, lettre de cachet, collusion avec l’Église) et rêve d’un despote éclairé, conseillé par des philosophes. Par ailleurs, les « philosophes » eux-mêmes, bien que n'étant pas tous issus du « Tiers état », défendent une société fondée sur les talents et sur le mérite qui s’oppose à une société de classes (ou de castes) héréditaires, introduisant ainsi les valeurs de liberté et d’égalité qu’affirmera la République à la fin du siècle.

Ils défendent aussi la liberté de conscience et mettent en cause le rôle des institutions religieuses dans la société. La tolérance est une valeur fondamentale pour ceux qui « nous ont appris à vivre libres » comme le dit la Convention en honorant les cendres de Voltaire au Panthéon.

Bien sûr, le mouvement des philosophes n’est pas uniforme, mais tous fixent pour objectif à

l’humanité et plus encore à l’individu, le bonheur, « idée neuve en Europe », hésitant entre le rêve d’un bon sauvage disparu (Rousseau) et une vie de mondain à la recherche du raffinement (Voltaire). L’optimisme n’est cependant pas triomphant et les auteurs restent lucides : le combat est constant et ils y jouent le rôle fondamental d’agitateurs d’idées.

Les œuvres importantes sont nombreuses et relèvent de différents genres comme le conte philosophique avec Voltaire Candide (1759), Zadig (1747) ou la satire distanciée avec les Lettres persanes (1721) de Montesquieu et les essais comme De l'esprit des lois (1748) du même, les Lettres anglaises (1734) ou le Traité sur la tolérance (1763) de Voltaire, le Contrat social (1762) ou Émile ou De l'éducation (1762) de Rousseau, le Supplément au voyage de Bougainville de Diderot ou l’Histoire des deux Indes de l’abbé Guillaume-Thomas Raynal.

Participent aussi à cette littérature d’idées certains aspects des comédies de Marivaux ou de Beaumarchais et bien sûr le grand œuvre de l’Encyclopédie, animé par Diderot et D'Alembert, et ses 35 volumes (textes et illustrations), publiés de 1750 à 1772, ainsi qu’une grande diversité de textes de longueur et d’importance variables : essais, discours, dialogues, entretiens…

Le théâtre du XVIIIe siècle

L’influence des grands dramaturges du « siècle de Louis XIV » persiste sur la scène de la Comédie-Française mais des renouvellements apparaissent avec les tragédies de Voltaire (1694-1778) qui introduit des sujets modernes en gardant la structure classique et l’alexandrin (Zaïre, 1732, Mahomet, 1741) et qui obtient de grands succès. Néanmoins la censure est toujours active comme en témoignent, sous Louis XVI encore, les difficultés de Beaumarchais pour son Mariage de Figaro.

La libération des mœurs de la Régence apporte un autre renouvellement du théâtre avec le retour, dès 1716, des Comédiens-Italiens chassés par Louis XIV et le début d’une très grande vogue du spectacle théâtral : on se presse pour admirer des acteurs réputés (Lélio, Flaminia, Silvia…) et rire des lazzi et du dynamisme des personnages issus de la commedia dell'arte comme Arlequin, Colombine ou Pantalon. C’est dans cette lignée que trouve place Marivaux (1688 -1763) avec ses comédies qui associent la finesse de l’analyse du sentiment amoureux et la subtilité verbale du marivaudage aux problèmes de société en exploitant le thème emblématique du couple maître-valet. Les Fausses Confidences (1737), le Jeu de l'amour et du hasard (1730), ou l'Île des esclaves (1725) constituent quelques-unes de ses œuvres majeures.

Regnard et Lesage (1668-1747) ont eux aussi marqué la comédie de mœurs avec le Légataire

Illustration 3: Marivaux (1688 -1763)

universel (Regnard, 1708) et Turcaret (Lesage, 1709), mais l’autre grand auteur de comédies du siècle est Beaumarchais (1732-1799) qui se montre habile dans l’art du dialogue et de l’intrigue mais aussi dans la satire sociale et politique à travers le personnage de Figaro, valet débrouillard qui conteste le pouvoir de son maître et qu’on retrouve dans deux œuvres majeures : le Barbier de Séville (1775) et le Mariage de Figaro (1784).

Le théâtre du XVIIIe siècle est marqué aussi par des genres nouveaux, aujourd’hui considérés comme mineurs mais que reprendra et transformera le XIXe siècle, comme la comédie larmoyante et le drame bourgeois qui mettent en avant des situations pathétiques dans un contexte réaliste et dramatique qui touchent des familles bourgeoises. Quelques titres explicites : le Fils naturel (Diderot, 1757), le Père de famille (Diderot, 1758), le Philosophe sans le savoir (Sedaine, 1765), la Brouette du vinaigrier (Louis-Sébastien Mercier, 1775) ou encore la Mère coupable (Beaumarchais, 1792).

Mentionnons enfin le développement de genres qui associent texte et musique comme le vaudeville ou l’opéra comique ainsi que des textes de réflexion sur le théâtre avec Diderot et son Paradoxe sur le comédien, les écrits de Voltaire pour défendre la condition des gens de théâtre toujours au ban de l’Église et les condamnations du théâtre pour immoralité par Rousseau.

Le roman du XVIIIe siècle est marqué par le renouvellement des formes et des contenus qui préfigurent le roman moderne considéré comme une œuvre de fiction en prose, racontant les aventures et l’évolution d’un ou de plusieurs personnages. Le genre, en pleine croissance avec un lectorat élargi, est marqué par le développement de la sensibilité, par le souci d'une apparente d'authenticité (avec le procédé du manuscrit trouvé, l’emploi de la première personne, de l’échange épistolaire ou des dialogues) et par l’esprit des Lumières en prenant en compte les valeurs nouvelles d’une société qui évolue. L’influence de la littérature anglaise est également sensible à travers la traduction des œuvres de Richardson, Swift ou Daniel Defoe. Néanmoins le roman restera, au cours du XVIIIe siècle siècle, un genre en quête de légitimation et de définition, comme le montrent les nombreuses réflexions sur le roman au XVIIIe siècle.

Le roman de ce siècle très riche explore toutes les possibilités romanesques : question du narrateur, éclatement du récit, engagement, analyse psychologique minutieuse, peinture réaliste du monde, imagination et confidence, apprentissage, souci de la forme… et les textes sont difficilement réductibles à des catégories indiscutables ; on peut cependant risquer un regroupement par sous-genre.

* Les romans philosophiques : on peut discuter le genre des œuvres narratives de Voltaire comme Zadig (1747) ou Candide (1759) mais l’appellation la plus fréquente aujourd’hui est « contes philosophiques ». La discussion est plus pertinente pour l'Ingénu, plus tardif (1768), qui s’éloigne du merveilleux et introduit une large part de réalisme social et psychologique.

* Les romans réalistes : l’association du réalisme social et du parcours amoureux s’installe au cours du siècle. Citons les romans-mémoires la Vie de Marianne (1741) le Paysan parvenu (1735) de Marivaux, Manon Lescaut (1731) de l’abbé Prévost (1697-1763), le Paysan perverti (1775) et son deuxième volet la Paysanne pervertie (1784), roman épistolaire de Restif de la Bretonne (1734-1806)[1]. On peut aussi déterminer un sous-genre né de l’influence espagnole : le roman picaresque avec sa truculence satirique, sa variété des milieux sociaux et l’apprentissage de la vie et qu’illustre l’Histoire de Gil Blas de Santillane (1715-1735) de Lesage (1668-1747).

* Le roman d’imagination est, pour sa part, représenté par des romans d’anticipation comme l’An 2440 de Mercier (1771) ou des romans fantastiques comme le Diable amoureux de Jacques Cazotte (1772).

* Les romans libertins associent grivoiserie, érotisme, manipulation et jeu social avec Crébillon fils (le Sopha, 1745), Diderot (les Bijoux indiscrets, 1748 ; la Religieuse, 1760-1796) ; Laclos (les Liaisons dangereuses, 1782) et finalement Sade (Justine ou les Malheurs de la vertu, 1797).

* Les romans du sentiment s’imposent dans la deuxième moitié du siècle avec la Nouvelle Héloïse (1761), le roman par lettres de Jean-Jacques Rousseau (sur le modèle anglais du Pamela de Richardson) qui sera le plus gros tirage du siècle en séduisant par sa peinture préromantique du sentiment amoureux et de la nature, ou Paul et Virginie (1787) de Bernardin de Saint-Pierre (1737-1814).

* Les romans « éclatés » comme Jacques le fataliste et son maître (1773-1778) ou le Neveu de Rameau (1762-1777) de Diderot sont des œuvres assez inclassables mais porteuses de modernité.

La naissance de l’autobiographie moderne au XVIIIe siècle :

Le goût des récits de vie est très fort tout au long du siècle avec des œuvres notables comme la Vie de mon père (1779) ou Monsieur Nicolas (1794-1797) de Restif de la Bretonne, mais c’est l’apport essentiel de Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) qui fonde l’autobiographie moderne avec les Confessions (1782-1789) et les Rêveries du promeneur solitaire (1776-1778) dans lesquelles il nous offre un portrait exemplaire et approfondi de lui-même centré sur son « moi ».

La poésie du XVIIIe siècle

Si la forme versifiée est utilisée avec habileté par Voltaire dans son Poème sur le désastre de Lisbonne ou dans le Mondain, la poésie, au sens commun du terme, ne se libère pas des influences du classicisme et l’histoire littéraire ne retient que quelques noms comme ceux de Jacques Delille (1738-1813) (les Jardins, 1782) ou Évariste Parny (1753-1814) (Élégies, 1784) qui préparent modestement le romantisme en cultivant une certaine sensibilité à la nature et au temps qui passe. Mais c’est essentiellement André Chénier (1762-1794) qui réussit une poésie expressive comme dans le poème célèbre de la Jeune Tarentine ou celui de la Jeune Captive (son œuvre ne sera publiée qu’en 1819, bien après sa mort tragique lors de la Terreur).

On mentionnera aussi Fabre d'Églantine pour ses chansons (Il pleut bergère) et sa participation « poétique » au calendrier révolutionnaire.

Autres genres du XVIIIe siècle

Saint-Just.

* La critique d’art est inventée par Diderot dans ses Salons où il explore la part de la sensibilité dans l’émotion artistique comme à propos de la poésie des ruines peintes par Hubert Robert.

* Buffon offre quant à lui une réussite littéraire intéressante avec ses écrits de vulgarisation scientifique dans son imposante Histoire naturelle, publiée avec grand succès de 1749 à 1789.

* Le discours politique et sa rhétorique peut être lui aussi d’une certaine façon considéré comme un genre littéraire avec les orateurs de talent comme Mirabeau, Saint-Just, Danton ou Robespierre qui ont marqué la période révolutionnaire.

Bilan

La littérature française du XVIIIe siècle montre une grande richesse d’œuvres dans tous les genres, en associant plus qu’en opposant l’engagement des Lumières et la naissance de la subjectivité et de la sensibilité deux valeurs modernes. L’histoire littéraire n’a pas tout retenu mais l’originalité du XVIIIe siècle tient pour une bonne part au fait que l’expression des idées relevait encore de la littérature - ceux qu’on appelle les « Philosophes » étaient des hommes de lettres à part entière - et les créateurs ne répugnaient pas à faire de leurs romans ou de leurs pièces des œuvres de combat tout en exprimant leur personnalité et leur sensibilité dans une langue qui devenait la langue de la culture de toute l’Europe.

Histoire du XIXLa littérature française du XIXe siècle s'inscrit dans une période définie par deux dates

repères : 1799, date du coup d'État de Bonaparte qui instaure le Consulat et met d'une certaine façon fin à la période révolutionnaire, et 1899, moment de résolution des tensions de l'affaire Dreyfus et de la menace du Boulangisme et où s'imposent finalement les valeurs de la IIIe République. La modernité littéraire s'affirme dans ce siècle à l'Histoire mouvementée avec des courants marquants qui touchent tous les arts, comme le romantisme, le réalisme, le naturalisme ou le symbolisme. Les créateurs les plus importants échappent cependant à un étiquetage étroit et offrent des œuvres multiples et encore proches de nous, particulièrement dans le domaine de la poésie (avec Lamartine, Vigny, Musset, Hugo, Baudelaire, Rimbaud, Verlaine, Mallarmé…) comme dans le domaine du roman (avec Stendhal, Balzac, Dumas, Hugo, Flaubert, Zola, Maupassant, Verne…) et dans une moindre mesure au théâtre avec le drame romantique et ses épigones (avec Musset, Hugo, Edmond Rostand…).

Siècle très riche aux œuvres encore proches de nous, le XIXe siècle reste pour la littérature française un âge d'or de la poésie et du roman, avec de très nombreux chefs-d'œuvre qui laissent percevoir, au-delà des courants littéraires qui se succèdent, des créateurs aux fortes personnalités artistiques.Ce siècle des Révolutions (Restauration – Révolution de juillet 1830 et de 1848 – Commune de Paris en 1871) voit se succéder des systèmes politiques différents (Premier Empire - monarchie d'Ancien Régime restaurée – monarchie constitutionnelle – éphémère IIe République - Second Empire – IIIe République) qui cherchent à répondre (ou à s'opposer) aux aspirations démocratiques nouvelles et aux transformations économiques qui s'accélèrent avec l'industrialisation, la colonisation et les conflits entre les puissances européennes.

Les changements de société sont extrêmement importants tout aux longs du siècle avec par exemple l'instruction publique qui finit par devenir générale et qui, accompagnée par de remarquables progrès scientifiques et techniques, participe à l'évolution des mentalités. L'aristocratie et l'Église perdent peu à peu leurs positions de force et une société laïque s'installe à la fin du siècle, marquée aussi par le poids croissant de la bourgeoisie et de la classe ouvrière qui s'affrontent. La République s'impose finalement à tous et vote des lois sociales tout en organisant les conquêtes coloniales et en préparant la revanche contre l'Allemagne. Les auteurs rendent compte de ces transformations dans leurs œuvres et pour une part d'entre eux s'engagent dans les camps politiques, progressistes (comme Lamartine, Hugo ou Zola) ou parfois réactionnaires comme Maurice Barrès, ou Léon Daudet (Le Stupide XIXe siècle). Ils se rejoignent cependant souvent pour exalter la figure de l'artiste libre contre le bourgeois vulgaire et matérialiste, en créant le mythe de l'artiste bohème et rejeté qu'illustre notamment la figure du peintre ou du poète maudit. Alors que la grande majorité des écrivains du XVIIe siècle étaient des courtisans à la recherche de mécènes et de protecteurs, ce siècle est emblématique d'une nouvelle éthique de vérité (contre la morale religieuse sous la Restauration ou la morale bourgeoise qui prévaut sous le second Empire) de l'écrivain, exprimée à l'origine par Voltaire[1], consistant en son autonomisation progressive par rapport aux

pouvoirs (politiques, religieux). Cette éthique se construit dans le cadre de la lutte pour la liberté d'expression et l'avènement d'un régime de liberté de presse avec en corollaire une responsabilité accrue de ces écrivains dont les pouvoirs veulent désormais qu'ils répondent de leurs œuvres : ce siècle est marqué par des procès littéraires et des emprisonnements dont l'écrivain (comme Flaubert, Paul-Louis Courier, Pierre-Jean de Béranger) en fait un titre de gloire[2].

Dans le domaine des arts, en France, à côté d'un néo-classicisme officiel et académique (allant parfois jusqu'à l'art pompier), on retrouve les grands courants esthétiques du siècle comme le romantisme avec Delacroix ou Berlioz et, plus tard, le réalisme avec Courbet et, à la même période, en musique Gounod et Bizet. Dans les dernières années du Second Empire s'impose peu à peu l'Impressionnisme auquel on peut rattacher Manet, Monet ou Renoir, pour ne citer que les plus grands. La fin du siècle est plus diverse avec des mouvements comme le pointillisme ou le groupe des Nabis et des personnalités comme Cézanne, Gauguin ou Van Gogh, ou du sculpteur Rodin, alors que Gabriel Fauré, Camille Saint-Saëns et Claude Debussy dominent la composition musicale française.

Le romantisme nourrit toute la première moitié du XIXe siècle et pour la poésie plus précisément les années 1820- 1850 : par convention, des Méditations poétiques de Lamartine, en 1820, aux Contemplations de Victor Hugo en 1856. Ce mouvement esthétique européen fait une place toute particulière au lyrisme et à l'effusion du moi avec un goût marqué pour la mélancolie :les poètes vont donc exprimer leur mal de vivre et leurs souffrances affectives en méditant sur la mort, sur Dieu, sur l'amour et la fuite du temps, sur la nature et sur la gloire, et au-delà de ces thèmes lyriques traditionnels sur la fonction du poète (Hugo) et sur une perception plus originale du fantastique avec Gérard de Nerval, Charles Nodier ou Aloysius Bertrand. Au-delà des thèmes pas toujours novateurs[réf. nécessaire], les poètes romantiques revendiqueront un assouplissement de l'expression versifiée à la recherche d'une plus grande musicalité et de quelques audaces dans les mots et dans les images[réf. nécessaire], chez Victor Hugo en particulier.

Cette recherche de nouveauté se concrétisera aussi par « l'invention » du poème en prose par Aloysius Bertrand (1807 - 1841) dans Gaspard de la nuit, publié en 1842 après sa mort, où il nous fait entrer dans un monde onirique, et qui initie une forme que reprendront plus tard Baudelaire et Rimbaud.Vigny.

Poésie de la sensibilité et d'une certaine musicalité, la poésie romantique se plaît dans des poèmes plutôt longs que la génération suivante trouvera pesante, oratoire, bavarde et convenue (Rimbaud parlera de « la forme vieille »[réf. nécessaire]), avec des exceptions notoires comme Nerval et son recueil des Chimères (1854) ; certains poèmes de cette période constituent cependant des pièces de référence qui touchent encore le lecteur d'aujourd'hui. Caïn - Booz endormi - L'aigle du casque - Les Pauvres gens).

En réaction contre l'effusion égocentrique du romantisme, un mouvement se fait jour: le Parnasse, qui veut recentrer la poésie sur le travail formel du poète et développe une théorie de « l'art pour l'art »[réf. nécessaire]. Cette école, héritière de Théophile Gautier, est représentée surtout par Leconte de Lisle (1818 – 1894) avec ses Poèmes antiques (1852 - 1874) et ses Poèmes barbares (1862 – 1878), et Théodore de Banville (1823 - 1891) (Odelettes - Odes Funambulesques en 1857 et animation de la revue du Parnasse contemporain).

Influence :

L'influence de ce mouvement n'est pas à négliger : la densité et l'expressivité seront retenues par les poètes suivants et c'est d'ailleurs à Théophile Gautier que Baudelaire dédiera Les Fleurs du mal et à

Théodore de Banville que le jeune Rimbaud[réf. nécessaire] écrira en 1870. Le recueil tardif des Trophées de José-Maria de Heredia en 1893 témoigne aussi de la pérennité de l'approche parnassienne, symbolisée par la forme contraignante du sonnet.Baudelaire.

Il est l'un des poètes majeurs du XIXe siècle. Associant le souci formel des poèmes courts (ou plutôt courts) et le réalisme (Une charogne – Tableaux parisiens…) à l'expression d'une angoisse existentielle partagée entre le Spleen et l'Idéal (Harmonie du soir – La cloche fêlée – La Mort des pauvres, il a su réussir une « alchimie poétique » exemplaire en extrayant Les Fleurs du mal dans son recueil publié en 1857 (condamné partiellement pour outrage aux bonnes mœurs) qui contient ce vers révélateur : « Tu m'as donné ta boue et j'en ai fait de l'or ». Poète du monde réel et de la beauté, du bonheur et de la souffrance, de la morbidité et du péché, il a en grande partie fondé le type du poète tourmenté et inadapté au monde. Baudelaire a également donné au poème en prose sa notoriété avec ses Petits poèmes en prose (Le port – Un hémisphère dans une chevelure…).

Les figures de Verlaine (1844 – 1896) et de Rimbaud (1854 – 1891) prolongent le type du poète maudit par leurs vies hors des normes sociales. Si Arthur Rimbaud (Une saison en enfer - Illuminations) reste comme le « voleur de feu », le voyant et l'aventurier éphémère de la poésie avec

Illustration 4: Charles Baudelaire (1821 – 1867)

Illustration 5: Guy de Maupassant (1850-1893)

ses fulgurances et ses révoltes, Paul Verlaine, avec une œuvre plus longue, est associé à la musicalité, au lyrisme mélancolique et à une sorte d'impressionnisme avec son art de la nuance, « Sans rien en lui qui pèse ou qui pose ». (Poèmes saturniens – Les Fêtes galantes – Sagesse…). On peut leur adjoindre Lautréamont (1846 – 1870) qui laisse inachevé Les Chants de Maldoror, prose flamboyante de révolte contre Dieu et la société que découvriront les Surréalistes.Mallarmé.

Mallarmé (1842 – 1898) recherche quant à lui le raffinement et la concision parfois hermétique dans une œuvre rare (L'Après-Midi d'un faune - Poésies, regroupement posthume) qui influencera Paul Valéry[réf. nécessaire].

Les années 1880 voient s'affirmer des courants aux contours incertains comme le décadentisme et le symbolisme qui ont en commun l'éclatement de la forme poétique avec l'utilisation du vers libre et le refus du prosaïsme au bénéfice de la suggestion avec un goût pour le raffinement et l'irrationnel. On peut citer les noms de Jean Moréas, Henri de Régnier, Albert Samain, Georges Rodenbach. La fantaisie de Charles Cros et Jules Laforgue, n'est parfois pas si loin des chansons d'Aristide Bruant, lui-même lointain successeur de Béranger[réf. nécessaire].Le théâtre du XIXe siècle

Le théâtre devient un divertissement pour toutes les couches sociales au cours du XIXe siècle avec une grande variété de salles et de genres. C'est aussi l'époque de l'extraordinaire célébrité des comédiens comme Talma, Frédérick Lemaître (cf. le film de Marcel Carné Les Enfants du Paradis), Marie Dorval, Rachel et plus tard Sarah Bernhardt.Musset

Le texte de théâtre connaît cependant un nouveau souffle avec le drame romantique qui s'impose durant une décennie de 1830-1840 en revendiquant, comme Victor Hugo dans la Préface de Cromwell en 1827, une esthétique de la sensibilité, de la liberté et de la vérité avec le rejet des règles classiques et de la distinction des genres et des tons, la recherche de la couleur locale avec des sujets empruntés à l'histoire des XVIe-XVIIe siècles et l'utilisation de la prose ou, pour Victor Hugo, de l'alexandrin libéré. Les principales œuvres de cette période sont : Hernani (1830) et Ruy Blas (1838) de Victor Hugo, On ne badine pas avec l'amour (1834) et Lorenzaccio (1834 - non représenté) de Musset, Chatterton (1835) de Vigny, Kean (1831) et La Tour de Nesles (1832) d'Alexandre Dumas père; et un peu plus tard, dans une catégorisation difficile[réf. nécessaire], La Dame aux camélias d'Alexandre Dumas fils (adapté en 1852 de son propre roman ; ce que fera aussi Zola avec Renée adapté de La Curée).

Le théâtre romantique, complexe à représenter et passé de mode[réf. nécessaire], cédera ensuite la place au mélodrame aux effets forcés avec rebondissements et victoire des bons sur les méchants qui en feront un genre populaire à grand succès, mais que ne retient guère l'histoire littéraire[réf. nécessaire].

D'autres formes de théâtre vont cohabiter dans la suite du siècle, par exemple le théâtre de boulevard avec le vaudeville qui associe divertissement et satire conventionnelle et qu'illustrent Labiche, Courteline ou Feydeau. Le théâtre musical s'installera lui aussi dans la deuxième moitié du siècle avec l'opérette et l'opéra comique que représentent bien les œuvres d'Offenbach.Edmond Rostand.Ubu Roi – Alfred Jarry

L'histoire littéraire garde le souvenir de tentatives de renouvellement à la fin du siècle comme le Théâtre-Libre et le théâtre naturaliste et son regard sombre sur le monde contemporain (Henry Becque : Les Corbeaux - 1882, Octave Mirbeau : Les Affaires sont les affaires - 1903) ou le théâtre

symboliste avec sa force de suggestion et ses correspondances poétiques (Pelléas et Mélisande de Maeterlinck en 1892 que mettra en musique Debussy).

On retient également quelques autres aspects originaux de la période comme le théâtre de provocation burlesque d'Alfred Jarry (Ubu Roi – 1888), le théâtre à la fois lyrique et épique, d'Edmond Rostand avec ses alexandrins flamboyants (Cyrano de Bergerac -1899, L'Aiglon - 1900) ou les premières œuvres, catholiques et patriotiques, de Charles Péguy (Jeanne d'Arc - 1897).Les romans du XIXe siècle

Le roman va devenir le genre dominant par sa diffusion massive entretenue par l'instruction publique croissante et le développement de la presse et des feuilletons dans la deuxième moitié du siècle. La plupart des romanciers sont issus de la bourgeoisie[réf. nécessaire] et vivent désormais de leur plume (parfois très bien comme Hugo, Maupassant ou Zola…). Le roman devient un genre attrape-tout[réf. nécessaire] autour d'une base minimum : récit en prose, d'une longueur relativement importante, comportant une part d’imaginaire et s'attachant à des moments de vie des personnages. La typologie est évidemment discutée mais quelques grandes lignes de force sont bien définies.

Voisin de l'autobiographie qu'illustre l'imposant Mémoires d'outre-tombe de Chateaubriand (1848), le roman autobiographique à la première personne marque le début du siècle avec le goût pour la confession intime cachée derrière un prête-nom, en associant lyrisme et narcissisme pour explorer le mal de vivre d'une génération. Il constitue l'un des apports importants du romantisme à la littérature avec des œuvres personnelles comme René (Chateaubriand -1802), Corinne (Madame de Staël -1807), Adolphe (Benjamin Constant -1816) ou La Confession d'un enfant du siècle (Musset – 1836).

Walter Scott a mis à la mode le genre du roman historique. Les écrivains y cultivent nostalgie et pittoresque avec un souci de documentation (parfois pesante) et de récréation du passé en mêlant personnages et faits imaginés à des personnages et des actions historiques[réf. nécessaire]. Quelques titres exemplaires : Les Chouans (Balzac - 1829), Cinq-Mars (Vigny – 1828), Notre-Dame de Paris (Hugo – 1831), Les Trois Mousquetaires (Alexandre Dumas père – 1844), Le Bossu (Paul Féval – 1858). Le genre se prolonge tout au long du siècle avec quelques œuvres notables comme Le Roman de la momie (Gautier – 1857), Salammbô (Flaubert – 1862), Quatrevingt-treize (Hugo – 1874)… Il est cependant concurrencé par le genre voisin du roman-feuilleton qui fait la fortune de la presse et le bonheur des prosateurs comme Eugène Sue avec ses Les Mystères de Paris (1842-1843) et sa fresque pittoresque et moraliste de la société du temps.Le roman réaliste

Le roman réaliste est une catégorisation sujette à caution, et largement rediscutée de nos jours. Mais on peut retenir un objectif esthétique clair : il s'agit de produire un « effet de réel » en peignant avec un souci constant du détail et de la vraisemblance les décors, les personnages et les faits[réf. nécessaire]. Les expressions de Stendhal (roman = miroir) ou de Balzac (romancier = historien du présent) montrent dans la première moitié du siècle une voie qu'approfondiront Gustave Flaubert et Maupassant (préface de Pierre et Jean), puis Zola et son naturalisme. Le roman du XIXe siècle fera parallèlement une large place au roman d'apprentissage, en accompagnant les débuts dans la vie sociale des personnages.

La fin du siècle est marquée cependant par une réaction contre ce réalisme jugé trop « bas » et par une attitude « idéaliste » associée à un retour à la perspective religieuse avec Huysmans (A Rebours - 1884), Léon Bloy (Le Désespéré - 1886) ou Maurice Barrès (Les Déracinés -1897). D'autres ouvertures apparaissent comme l'exotisme, impressionniste et réaliste à la fois, de Pierre Loti

(Pêcheur d'Islande- 1886) et la naissance du roman d'analyse « pré-proustien » avec Paul Bourget (Le Disciple - 1889) ou Anatole France (Le Lys Rouge - 1894).Stendhal.

Stendhal (1783-1842) a laissé des romans importants, avec des figures emblématiques comme Julien Sorel ou Fabrice del Dongo dans Le Rouge et le Noir (1830) et La Chartreuse de Parme (1839) en laissant inachevé Lucien Leuwen (1835). Entre romantisme et réalisme, l'étiquette qu'on lui attribue est elle aussi discutable.Balzac.

Honoré de Balzac (1799-1850) est un créateur d'exception, auteur d'une œuvre immense qu'il intitulera tardivement La Comédie humaine en classant en trois groupes les 91 romans, contes et nouvelles écrits entre 1829 et 1848. Le groupe le plus important (de très loin) est celui des études de mœurs découpées en « scènes de la vie privée » (Le Père Goriot, Le Colonel Chabert…), « scènes de la vie de province » (Eugénie Grandet, Le Lys dans la vallée, Illusions perdues), « scènes de la vie parisienne » (César Birotteau, La Cousine Bette…), « scènes de la vie politique » (Une ténébreuse affaire…), « scènes de la vie militaire » (Les Chouans…) et « scènes de la vie de campagne » (Le Médecin de campagne…). On trouve ensuite les études philosophiques (La Peau de chagrin, Louis Lambert, Le Chef-d'œuvre inconnu…), ces dernières œuvres ramenant davantage au fantastique et au mysticisme qu'au réalisme. La Comédie humaine comprend aussi des études analytiques (la Physiologie du mariage).FlaubertMaupassant

* La génération suivante amplifiera cette approche réaliste avec Gustave Flaubert (1821-1880) dont on doit mentionner au moins deux chefs-d’œuvre où apparaissent aussi son souci de la perfection du style et son ironie pessimiste : Madame Bovary (1857) et L’Éducation sentimentale (1869). Son « disciple », Guy de Maupassant (1850-1893), maître incontesté de la nouvelle, s'est essayé également au roman en approfondissant les observations psychologiques et sociologiques comme dans Pierre et Jean (1888), Une Vie (1883) et surtout Bel-Ami (1885).

De nombreux romanciers participent aussi à la création romanesque dans la seconde moitié du siècle. Les frères Goncourt (Edmond et Jules) avec leur minutie descriptive et leur écriture « artiste » (Germinie Lacerteux – 1865), Alphonse Daudet (Le Petit Chose – 1868) et Jules Vallès ( L'Enfant – 1879) se rattachent au genre réaliste. Jules Verne aborde les romans d'aventure et d'anticipation avec Cinq semaines en ballon en 1863.Le roman socialGeorge Sand.

À côté de ces œuvres phares de la première moitié du XIXe siècle, le roman social (et champêtre parfois) trouve sa place dans la littérature avec les textes de George Sand (Consuelo – 1842, La Mare au diable -1846, La Petite Fadette – 1849) et, un peu plus tard, avec la grande fresque humaniste de Victor Hugo, Les Misérables (1862).

Émile Zola (1840-1902) est le dernier très grand romancier du siècle : il théorise dans le Roman expérimental (1880) le naturalisme et donne au réalisme extrême, au-delà même des bienséances et en prenant en compte la physiologie, une ambition scientifique en voulant montrer l'influence des milieux sur les individus. Son œuvre, Les Rougon-Macquart (sous-titrée Histoire naturelle et sociale d'une famille sous le Second Empire) est une somme romanesque de 20 volumes présentant à travers cinq générations successives les conséquences du déterminisme physiologique et social et les manifestations diverses d'une tare initiale. Ses romans puissants, souvent dramatiques et parfois

épiques, montrent un tableau critique de la société du Second Empire avec la dénonciation de l'immoralisme des nantis comme dans La Curée (1872), Nana (1879), L’Argent (1891)… et sa compassion pour le peuple et ses souffrances individuelles et collectives, par exemple Gervaise dans L'Assommoir (1877), les paysans dans La Terre (1887), les mineurs dans Germinal (1885), les soldats dans La Débâcle (1892)…La nouvelle et le conteBarbey d'Aurevilly.

Le genre narratif est aussi, tout au long du siècle, largement représenté par la nouvelle qui exploite aussi bien l'approche réaliste que la veine fantastique : les grands romanciers ont laissé des traces importantes. Le conte est aussi un mode d'expression, surtout le conte fantastique dont la mode est lancée en France dès 1829 par la traduction des textes de Ernst Theodor Amadeus Hoffmann publié en France en 1829 par Honoré de Balzac qui s'en inspire, entre autres pour Maître Cornélius, l'Élixir de longue vie. L'influence d'Hoffmann se fait sentir également surThéophile Gautier dans les Contes fantastiques, Prosper Mérimée pour La Vénus d'Ille, Colomba. Guy de Maupassant poursuivra dans la même veine, mais avec un autre style dans Les Contes de la bécasse, Le Horla, Barbey d'Aurevilly dans Les Diaboliques, Villiers de l'Isle-Adam dans Contes cruels.

Littérature du XX

La littérature française du XXe siècle s'inscrit dans un siècle tumultueux marqué par deux guerres mondiales, par l'expérience des totalitarismes fascistes et communistes et par une décolonisation difficile. La littérature verra aussi son statut évoluer sous l'effet des transformations technologiques comme l'apparition et le développement des éditions de poche ou la concurrence d'autres loisirs comme le cinéma, la télévision ou la pratique informatique. On assistera parallèlement à une dilution progressive des courants esthétiques et intellectuels après l'époque du Surréalisme, de l'Existentialisme et du Nouveau Roman.

Le XXe siècle commence dans un esprit de liberté qu'évoque l'atmosphère des années 1900 : les artistes novateurs sont nombreux dans le domaine de la peinture avec le fauvisme et le cubisme qui ouvre le chemin à l'abstraction ou dans le domaine de la musique avec, en France, Erik Satie (1866 - 1925), Maurice Ravel (1875 – 1937) et plus tard Pierre Boulez, né en 1925 . C'est aussi le moment où s'installe l'art du cinéma avec Méliès (qui ne deviendra parlant qu'à partir de 1927) et où la modernité s'impose aussi dans le domaine littéraire. La littérature française du XXe siècle va à l'évidence être traversée par les coups et contrecoups de l'Histoire que nous allons rappeler à grands traits.

Les antagonismes nationaux en Europe conduisent rapidement à la saignée de la Guerre de 14-18 d'où sortiront le communisme soviétique avec Lénine puis Staline et les fascismes mussolinien puis nazi. L'après-guerre est en effet un temps de tensions internationales et sociales avec des crises économiques graves (1929) et des choix politiques déterminants, c'est ainsi que le Front populaire en France est perçu comme une victoire sur la droite conservatrice et ses avancées sociales (congés payés…) sont saluées par les classes populaires. Très vite, le deuxième conflit mondial se préfigure avec la guerre d'Espagne (1936 - 1939), où les partis progressistes et l'URSS luttent contre le coup d'État réactionnaire de Franco et les soutiens que lui apportent Benito Mussolini et Adolf Hitler. La défaite des Républicains espagnols apparaît comme le prologue de la défaite de la France en 1940 face à l'Allemagne nazie qui, ayant conquis l'Europe, entreprend bientôt une extermination raciale des « sous-hommes », et au premier chef, des Juifs . La Shoah reste comme la marque absolue de

l'abomination nazie et révèle en même temps toutes les compromissions et toutes les collaborations des individus et des pouvoirs en Europe comme l'illustre le pétainisme en France. Mais l'Occupation allemande fait naître des mouvements de Résistance qui ont aussi l'ambition de transformer la France, ce qu'entreprend le gouvernement du général de Gaulle à la Libération avec des nationalisations économiques et une politique sociale (Sécurité sociale…).

Les alliés Anglais, Américains et Russes l'ont emporté sur Hitler et sur son allié japonais à la fin d'un conflit terrifiant par ses destructions et ses morts (plus de 50 millions), mais très vite les grandes puissances victorieuses, lancées dans la course aux armements atomiques, entrent dans une « guerre froide » où s'affrontent l'URSS qui contrôle les États de l'Europe de l’Est et les États-Unis qui s'investissent du rôle de défenseur de l'Occident et de la liberté. Cet affrontement trouvera son terme dans la dernière décennie du siècle qui verra la chute du communisme dont la face totalitaire et l'échec économique étaient devenu patents.

La deuxième moitié du siècle est également marquée par la décolonisation et la France après les guerres d'Indochine ou d'Algérie cherche une redéfinition de son avenir dans une Europe en construction. Cependant la diffusion mondiale de la langue française a abouti à une éclosion d'œuvres littéraires hors du territoire national, en Afrique en particulier, que l'on nomme communément « littérature francophone ».

Par ailleurs, le XXe siècle montre également une accélération rapide des avancées scientifiques et technologiques qui vont participer à la richesse des pays occidentaux où s'étend l'influence américaine. La diffusion des œuvres imprimées est devenue très importante (livre de poche – phénomène des « best-sellers ») avec une féminisation du lectorat qu'accompagne une féminisation du monde des écrivains. Par ailleurs, le livre entre de plus en plus en concurrence avec le cinéma, la radio et le disque puis la télévision et la bande dessinée, et aujourd'hui les loisirs informatiques : les révolutions technologiques du XXe siècle modifient les mentalités du monde entier que certains voient s'uniformiser avec des succès planétaires comme ceux de Harry Potter et du Da Vinci Code. La France est elle aussi dans ce monde de concurrence économique de plus en plus accentuée et « américanisée » où l'on rêve de société de jeunesse, de loisirs et de consommation en s'interrogeant sur son ou ses identité(s), en évoquant la rébellion juvénile de 1968.

Le combat féministe avec Simone de Beauvoir comme figure de proue a également participé à la transformation des mentalités tout comme l'engagement pour les causes « humanitaires » qui remplacent partiellement les causes politiques, l'individualisation de la société étant une autre marque du temps avec en parallèle un affaiblissement de la notion d'école artistique et de mouvement littéraire.

Pour avoir un panorama littéraire du siècle précédent on se reportera à Littérature française du XIXe siècle.

Panorama de la littérature française du XXe siècle

Le XXe siècle est marqué par une remise en question progressive des genres littéraires : si la narration devient le genre de plus en plus dominant avec un roman polymorphe, les frontières avec

l'autobiographie se troublent avec la mode de « l'autofiction » des années 1980-2000, tout comme la poésie tend à se confondre avec la chanson en même temps que l'œuvre de théâtre est remplacée par des mises en scène à partir de textes non spécifiques où le metteur en scène l'emporte sur l'auteur dramatique.

Par ailleurs la deuxième moitié du siècle est particulièrement marquée par les expériences de " littérature de laboratoire "et le jeu intellectuel (nouveau roman – littérature potentielle), mais aussi par le poids d'une littérature commerciale en forte concurrence avec les traductions de l'américain (collections sentimentales – romans policiers – romans de science-fiction – chansons…) que retient peu l'histoire littéraire.

Rappelons en outre que le manque de recul rend évidemment difficile les catégorisations et les échelles de valeur pour les créateurs contemporains. Il est de plus illusoire de chercher l'exhaustivité et des choix ont été faits au bénéfice de la plus grande notoriété des auteurs.

La Poésie du XXe siècle

La poésie française du XXe siècle est à la fois héritière et novatrice dans ses thèmes comme dans sa forme avec une nette prédilection pour le vers libre, mais elle semble en déclin ou du moins déplacée dans le domaine plus incertain de la chanson.

Le début du siècle montre une grande diversité avec les héritages du siècle précédent, qu'il s'agisse de la continuité du mouvement symboliste et décadentiste avec Sully Prudhomme, Saint-Pol-Roux, Anna de Noailles et certains aspects d’Apollinaire, de la lignée de la cérébralité et du travail formel mallarméen avec Paul Valéry (Charmes, 1929), ou encore de la libération des thèmes nouveaux comme l'humilité du quotidien avec Francis Jammes (Les Géorgiques chrétiennes, 1912) ou Paul Fort (Ballades françaises, 1922-1951) et l'ouverture au monde moderne avec Émile Verhaeren (Les villes tentaculaires, 1895 – Toute la Flandre, 1904-1911).

Dans les mêmes années, des voix singulières se font entendre avec ceux qu'on a appelé « les Poètes de Dieu » comme Charles Péguy avec son inspiration patriotique et religieuse et la force d'une poésie simple (Jeanne d’Arc, 1897 - Tapisserie d’Eve, 1913), ou Paul Claudel avec sa quête spirituelle exprimée à travers l'ampleur du verset (Cinq Grandes Odes, 1904 - 1908 - 1910).

C'est aussi le temps des « découvreurs » comme Blaise Cendrars (Les Pâques à New York, 1912 - La Prose du Transsibérien, 1913), Guillaume Apollinaire (Alcools, 1913 - Calligrammes, 1918), Victor Segalen (Stèles, 1912), Max Jacob (Le cornet à dés, 1917), Saint-John Perse (Eloges, 1911 – Anabase, 1924, avec une œuvre prolongée dans la durée par exemple Amers en 1957) ou Pierre Reverdy (Plupart du temps, 1945, regroupement des poèmes de 1915-1922) qui explorent « l'Esprit nouveau » en recherchant la présence de la modernité et du quotidien (la rue, le voyage, la technique) et l'éclatement de la forme (disparition de la rime, de la ponctuation, du vers métré et audaces stylistiques exploitant l'expressivité des images, les ressources du rythme et des sonorités…). Ils préfigurent des recherches plus systématisées comme celle du Dadaïsme de Tristan Tzara et après lui du Surréalisme qui confie à la poésie l'exploration de l'inconscient en utilisant des dérèglements rimbaldiens et en bousculant les « assis ». L'écriture automatique apparaît également

dans un même objectif. Les poètes majeurs de cette mouvance surréaliste sont André Breton, le théoricien du mouvement avec le Manifeste du Surréalisme en 1924, Paul Éluard (Capitale de la douleur, 1926), Louis Aragon (Mouvement perpétuel, 1926), Robert Desnos (Corps et biens, 1930), Philippe Soupault (Les Champs magnétiques, 1920, en collaboration avec André Breton) ou Benjamin Péret (Le grand jeu, 1928), auxquels on peut associer des peintres comme Dali, Ernst, Magritte ou Miro.

Des dissidences apparaissent assez vite dans le groupe en particulier à propos de l'adhésion au communisme, et les violences de l'Histoire comme l'Occupation de la France vont amener de nombreux poètes à renouveler leur inspiration en participant à la Résistance et à publier clandestinement des textes engagés. C'est le cas de Louis Aragon (Les Yeux d'Elsa, 1942 - La Diane Française, 1944), de Paul Éluard (Poésie et vérité, 1942 – Au rendez-vous allemand, 1944), de René Char (Feuillets d'Hypnos, 1946) ou de René-Guy Cadou (Pleine Poitrine, 1946). Les poètes ne seront pas épargnés par l'extermination nazie : Robert Desnos mourra dans un camp allemand et Max Jacob dans le camp de Drancy.

Cependant, des individualités produiront des œuvres qui feront apparaître des approches différentes avec l'onirisme touche à tout de Jean Cocteau (Plain-Chant, 1923), les recherches d'expressivité d'Henri Michaux (Ailleurs, 1948), le jeu verbal repris par Jacques Prévert, poète du quotidien et des opprimés (Paroles, 1946-1949) ou par Francis Ponge (Le parti-pris des choses, 1942) à la recherche d'une poésie en prose descriptive. Tous traduisent des émotions et des sensations dans la célébration du monde avec Jules Supervielle (Oublieuse mémoire, 1948)ou Yves Bonnefoy (Pierre écrite, 1965), célébration renouvelée par des voix venues d'ailleurs comme celle d'Aimé Césaire, l'Antillais (Cahier d'un retour au pays natal, 1939 – 1960), de Léopold Sédar Senghor (Chants d’ombre, 1945) ou de Birago Diop (Leurres et lueurs, 1960) qui chantent l'Afrique.

La diffusion de plus en plus massive des disques va fortement participer à un genre nouveau, la poésie-chanson qu'illustrent dans les années 1950-70 Boris Vian, Léo Ferré, Georges Brassens ou Jacques Brel. L'importance de leurs successeurs (Serge Gainsbourg par exemple) est bien délicate à établir tant ils sont nombreux, avec des auditoires très variables et des effets de modes comme le folk song, le rap ou le slam…

Le Théâtre du XXe siècle[modifier]

Le genre du théâtre montre des évolutions repérables même si les distinctions ont tendance à se brouiller et si on assiste à la prééminence accentuée des metteurs en scène (Louis Jouvet, Jean Vilar, Roger Planchon, Patrice Chéreau…) qui met en partie en crise le texte de théâtre à la fin du siècle.

La persistance du théâtre de boulevard, populaire, amusant et satirique est assurée par Jules Romains (Knock, 1928), Marcel Pagnol (Marius, 1929 - Topaze, 1933) puis par Sacha Guitry (Désiré, 1927 – Quadrille, 1937), Marcel Achard (Jean de la Lune, 1929) - Patate, 1954), André Roussin (Les Œufs de l'autruche, 1948) et d'autres, jusqu'à Agnès Jaoui /Jean-Pierre Bacri (Cuisine et dépendances, 1989) ou Yasmina Reza (Art, 1994) aujourd'hui.

Une mention particulière doit être faite pour Jean Anouilh qui approfondit dans une œuvre

abondante et variée une approche « moraliste » de l'humanité avec des sujets souriants et grinçants à la fois (Pièces roses) comme Le voyageur sans bagage (1937), L'Invitation au château (1947), Cher Antoine (1969), ou des sujets historiques, graves et tragiques, (pièces noires) comme Antigone (1944), L'Alouette (1952) ou encore Becket ou l'honneur de Dieu (1959).

La première moitié du XXe siècle est en même temps un moment de renouvellement du théâtre littéraire avec les compositions dramaturgiques totalisantes et foisonnantes de Paul Claudel marquées par la foi chrétienne, le lyrisme et l'évocation historique (Le Soulier de satin, écrit en 1929 mais monté en 1943, d'une durée de cinq heures). Un peu plus tard, c'est par la reprise des mythes antiques que va s'exprimer le tragique de l'homme et de l'histoire perçu avec acuité dans la montée des périls de l'Entre-deux-guerres et qu'illustrent Jean Cocteau (Orphée, 1926 - La Machine infernale, 1934), Jean Giraudoux (La Guerre de Troie n'aura pas lieu, 1935 - Electre – 1937), Albert Camus (Caligula, écrit en 1939 mais créé en 1945) et Jean-Paul Sartre (Les Mouches, 1943). On peut associer à cette approche certaines pièces d'Henry de Montherlant comme La Reine morte (1942) ou Le Maître de Santiago (1947), nourries d'une méditation sur l'Histoire.

Cette interrogation sur la marche du monde et l'influence de Brecht et de Pirandello vont déboucher sur des pièces plus engagées politiquement et se nourrissant de réflexion philosophique sur l'action, la révolution et la responsabilité individuelle ou sociale. En témoignent les œuvres d'Albert Camus (L'état de siège, 1948, Les Justes, 1949), de Jean-Paul Sartre (Les mains Sales, 1948) ou de Jean Genet (Les Bonnes, 1947). L'Existentialisme sartrien s'exprime aussi au théâtre comme avec Huis clos, en 1945.

Le reflux de l'idéologie communiste et la complexité de la modernité vont trouver leur échos dans ce qu'on a appelé le « Théâtre de l'absurde » qui, dans les années cinquante, reflète la perte des repères et la défiance vis à vis du langage manipulateur. Les dramaturges, bien différents cependant les uns des autres et autonomes, représentent le vide, l'attente et, influencés par Antonin Artaud (Le Théâtre et son double, 1938), la vacuité du langage à travers des personnages dérisoires, à l'existence absurde et aux échanges vides. Ce mélange du tragique métaphysique et de l'humour dans la dérision et la déstructuration du langage et de la forme théâtrale (pas de scènes, actes très longs, didascalies abondantes) se retrouve chez Eugène Ionesco (La cantatrice chauve, 1950 - Les Chaises - La Leçon - 1951) et plus encore chez Samuel Beckett (En attendant Godot, 1953 - Fin de partie, 1957).

Ajoutons quelques noms d'aujourd'hui qui montrent que le texte de théâtre demeure vivant à côté des expériences dramaturgiques des metteurs en scène actuels : Jean-Claude Grumberg (L'Atelier- 1979), Bernard-Marie Koltès (Roberto Zucco, 1988) ou Jean-Claude Brisville (Le souper, 1989).

Ce genre très large voit la continuation du roman traditionnel mais aussi des innovations et des remises en cause comme celles du statut du narrateur, de la notion de personnage ou de l'intrigue, souvent éclatée et parfois rejetée. La présentation à grands traits du roman du XXe siècle (qu'il faudrait peut-être appeler « récit ») est évidemment une gageure mais on peut définir quelques lignes de force en suivant l'avancée du siècle.

Accompagnant la forme classique et les idées progressistes d'Anatole France (L'île des pingouins, 1908), des romanciers écrivent de grands cycles romanesques constituant des fresques sociales et historiques marquent l'époque, que ce soit Les Thibaut (1922-1929) de Roger Martin du Gard, Les

Hommes de Bonne Volonté (1932-1946) de Jules Romains, la Chronique des Pasquier (1933-1945)de Georges Duhamel ou encore des œuvres plus complexes comme Les Chemins de la liberté de Jean-Paul Sartre(1945) ou Les Communistes (1949-1951)de Louis Aragon.

Parallèlement le roman va se nourrir des différentes expériences de la vie de chacun en mettent au jour des itinéraires singuliers, que ce soit à travers la guerre avec Henri Barbusse (Le feu, 1916) ou Roland Dorgelès (Les croix de bois, 1919), l’adolescence avec Alain-Fournier (Le Grand Meaulnes, 1913), Romain Rolland (Jean-Christophe, 1903-1912) ou Raymond Radiguet (Le diable au corps, 1923), la condition féminine avec Colette et la série des Claudine ou La Chatte (1933), la nature et le régionalisme avec Louis Pergaud (La guerre des boutons, 1912), Charles-Ferdinand Ramuz (La grande peur dans la montagne, 1926), Jean Giono (Colline, 1928 - Regain, 1930), Henri Bosco (L'Âne Culotte, 1937) ou l’interrogation morale et métaphysique avec Georges Bernanos (Sous le soleil de Satan, 1926) ou François Mauriac (Thérèse Desqueyroux, 1927)).

André Gide

Le roman d'approfondissement psychologique initié par Maurice Barrès ou Paul Bourget, va trouver deux maîtres avec Marcel Proust et son œuvre fondatrice sur la fonction du roman et le jeu de la mémoire (À la recherche du temps perdu, 1913-1927), et André Gide, également poète (Les Nourritures terrestres, 1895) et autobiographe (Si le grain ne meurt, 1920-1924) qui met en scène l'acte gratuit (Les caves du Vatican, 1914) et qui transforme la structure narrative dans Les Faux-monnayeurs (1925). Ce questionnement psychologique va déboucher à la génération suivante sur le sentiment de l'absurde avec le personnage de Meursault dans L'Étranger (1942) d'Albert Camus ou le Roquentin de La Nausée (1938) existentialiste de Jean-Paul Sartre. Des auteurs moins prestigieux peuvent leur être associés comme Valery Larbaud (Fermina Márquez, 1911) ou Paul Morand (L'Homme pressé, 1940).

Le poids des évènements historiques va aussi orienter certains romanciers vers l'engagement en exaltant les héros politiques et guerriers comme André Malraux dans La Condition humaine (1933) ou L'Espoir (1937), Antoine de Saint-Exupéry (qui est aussi l'auteur d'un joli conte mondialement célèbre Le Petit Prince, publié en 1943) dans Vol de nuit (1931)ou Terre des hommes (1939) ou Albert Camus dans La Peste (1947). À l'opposé apparaît le type du antihéros à la manière du Bardamu de Louis-Ferdinand Céline ballotté par les évènements et confronté au non-sens du monde oppresseur des faibles sur tous les continents dans Voyage au bout de la nuit (1932).

Ces orientations thématiques particulières sont accompagnées d'un certain renouveau formel :

Illustration 6: André Gide 1893

Marcel Proust renouvelle la prose romanesque avec sa phrase-rosace et cultive l'ambiguïté quant à l'auteur/narrateur, Louis-Ferdinand Céline avec sa langue oralisante, André Malraux applique le découpage cinématographique, André Breton (les récitsNadja, 1928 et L'Amour fou, 1937) et après lui Raymond Queneau (Pierrot mon ami, 1942 – Zazie dans le métro, 1959), Boris Vian (L'écume des jours, 1947 - L'herbe rouge, 1950) et Julien Gracq (Le rivage des Syrtes, 1951) introduisent une poétisation surréaliste, Albert Camus joue, sous l'influence du roman américain, avec le monologue intérieur et le rejet de la focalisation omnisciente dans L’Étranger(1942), Jean Giono donne un souffle puissant à ses métaphores créatrices dans Regain (1930) ou dans Le Chant du monde (1934), Francis Carco (L'homme traqué, 1922) et Marcel Aymé (La jument verte, 1933) ou plus tard Albert Simonin (Touchez pas au grisbi ! 1953) exploiteront la verdeur des parlers populaires…

La recherche formelle devient systématique avec le courant que l'on a appelé « le nouveau roman » des années cinquante aux Editions de Minuit : ces « romanciers de laboratoire » œuvrent à la disparition du narrateur, du personnage, de l’intrigue, de la chronologie au bénéfice de la subjectivité et du désordre de la vie, de la présence brute des choses avec surtout Alain Robbe-Grillet (Les Gommes, 1953), Michel Butor (La modification, 1957), Claude Simon (La route des Flandres, 1960) et Nathalie Sarraute (Le Planétarium, 1959) qui se différencient alors nettement des romanciers traditionnels comme Françoise Sagan (Bonjour tristesse, 1954), Hervé Bazin (Vipère au poing, 1948), Henri Troyat (La lumière des justes, 1959/1963) ou Robert Sabatier (Les Allumettes Suédoises, 1969)ou encore François Nourissier (Allemande, 1973).

À côté de ces romans « expérimentaux » ou de ces œuvres assez peu marquantes, les années 1960-80 offrent des auteurs de grande réputation avec des personnalités littéraires affirmées et des œuvres originales et fortes. Par exemple Marguerite Yourcenar (Mémoires d'Hadrien, 1951 - L'Œuvre au noir, 1968), Marguerite Duras, parfois rattachée à la mouvance du nouveau roman, (Moderato cantabile, 1958 - L'amant, 1989), Albert Cohen (Belle du seigneur, 1968), Michel Tournier (Vendredi ou les limbes du Pacifique, 1967 - Le Roi des aulnes, 1970) ou JMG Le Clézio (Le procès-verbal, 1963 - Désert, 1980) ou Pascal Quignard (Tous les matins du monde, 1991)…

Le siècle est également riche de la profusion des formes populaires issues du XIXe siècle comme le roman policier peu à peu influencé par le roman noir américain avec Georges Simenon, (Le chien jaune, 1932), Boileau-Narcejac (Celle qui n'était plus, 1952), ), Léo Malet (Nestor Burma et le monstre, 1946), Jean Vautrin (Canicule, 1982), Jean-Patrick Manchette ("Le Petit bleu de la côte Ouest" 1976),Didier Daeninckx (La mort n’oublie personne, 1989), Philippe Djian (Bleu comme l'enfer, 1983), Jean-Christophe Grangé (Les Rivières pourpres, 1998)… Le roman historique se multiplie avec Maurice Druon (Les Rois maudits, 1955-1977), Gilles Lapouge (La bataille de Wagram, 1987), Robert Merle (Fortune de France, 1977) ou Françoise Chandernagor (La Chambre, 2002). Abondent aussi les récits de voyage et d'aventure (Henry de Monfreid - Les secrets de la mer Rouge, 1932) et les romans d'action et d'exotisme avec Jean Lartéguy (Les centurions, 1963), Jean Hougron (La nuit indochinoise, 1950/1958) ou encore Louis Gardel (Fort-Saganne, 1980). La science-fiction et le fantastique produisent également un nombre très important d'œuvres avec René Barjavel (La Nuit des temps, 1968), Michel Jeury (Le Temps incertain, 1973), Bernard Werber (Les Fourmis, 1991)…, qui ont cependant une certaine difficulté à concurrencer les œuvre traduites.

La veine égocentrique est, elle aussi, très productive avec des formes plus ou moins innovantes d'autobiographie avec Marcel Pagnol (La Gloire de mon père, 1957), Simone de Beauvoir (Mémoires d'une jeune fille rangée, 1958), Jean-Paul Sartre (Les mots, 1964), Julien Green (Terre

lointaine, 1966), Nathalie Sarraute (Enfance, 1983), Georges Perec (W ou le souvenir d'enfance, 1975), Marguerite Yourcenar (Archives du Nord, 1977) ou Hervé Guibert (À l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie, 1990) et l'écriture de soi s'associe au roman dans le genre assez vague de l'autofiction avec Patrick Modiano (Rue des boutiques obscures, 1978), Annie Ernaux (La Place, 1983), Jean Rouaud (Les champs d'honneur, 1990), Christine Angot (Sujet Angot, 1998)…

Terminons ce survol du roman français du XXe siècle en notant l'apport, d'une certaine façon refondateur, de l'inspiration de l'ailleurs avec quelques noms de la période récente comme Réjean Ducharme (L'Hiver de force, 1973), Tahar Ben Jelloun (La Nuit sacrée, 1987) ou Ahmadou Kourouma (Allah n’est pas obligé, 2000). À noter également, l'émergence d'une génération d'écrivains inspirés par le bouillonnement littéraire du XXe siècle, Frédéric Beigbeder en est un bon représentant ; son étude, presque sociologique de la jet set et des différents milieux noctambules, apporte une fraîcheur et un humour grinçant que l'on retrouve chez Michel Houellebecq ou Amélie Nothomb ( Francophone belge ), chacun dans un registre différent traduise les peurs, les joies et les angoisses d'un siècle qui s'achève.

Bilan

La littérature française du XXe siècle présente des facettes nombreuses et de grands écrivains qui ont été souvent couronnés par le Prix Nobel de littérature (1901 Sully Prudhomme, 1904 Frédéric Mistral, 1915 Romain Rolland, 1921 Anatole France, 1927 Henri Bergson, 1937 Roger Martin du Gard, 1947 André Gide, 1952 François Mauriac, 1957 Albert Camus, 1960 Saint-John Perse, 1964 Jean-Paul Sartre, 1969, Samuel Beckett - Irlandais mais son œuvre est écrite pour l'essentiel en français, 1985 Claude Simon, 2001 Gao Xingjian 2008 Jean-Marie-Gustave Le Clézio). Le poids international de la littérature française s'amenuise et les traductions en langues étrangères semblent également marquer le pas, par exemple 2% de livres français traduits aux Pays Bas contre 23% pour les textes anglais – source [1] et trente fois moins de traductions françaises au Japon aujourd'hui qu'il y a trente ans - source [2].

Tout n'est pas noir cependant et se fait jour peu à peu, chez de nombreux romanciers en tout cas, une mise en cause d'une littérature nombriliste « sans autre objet qu'elle-même » : ils appellent de leurs vœux (voir [3] une « littérature-monde »), que peut vivifier l'apport des auteurs étrangers utilisant la langue française et que symbolise Jonathan Littell et son roman Les Bienveillantes, couronnée en 2006, et pour lequel on annonce une diffusion mondiale.

Table des matièresLittérature française .............................................................................................................................1

Histoire du XVII:.............................................................................................................................1La littérature française du XVIIIe ...................................................................................................2Histoire du XIX...............................................................................................................................8

Influence : ..................................................................................................................................9Littérature du XX...........................................................................................................................14