les fentes oro-faciales

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fentes labio-maxillo-palatines, fentes oro-faciales, chirurgie et phonation, résultats phonétiques, classification phonétique, Suzanne Borel, Victor Veau, insuffisance vélaire, chirurgie maxillo-faciale, pharyngoplastie, sphincteroplastie, rééducation orthophonique, traitement ortho- dontique, vidéoscopie vélo pharyngée, incompétence vélo pharyngée, voile neurologique, rhinoplastie, ventilation nasale, fonctions oro-faciales, lambeau Fédération Nationale des Orthophonistes 41 e Année Décembre 2003 Trimestriel N° 216 Fondatrice : Suzanne BOREL-MAISONNY ISSN 0034-222X Rééducation Orthophonique Rencontres Données actuelles Examens et interventions Perspectives s l es or o- onation, r és la ssification zanne Borel, fisance vélaire faciale, pharyng oplastie, réédu e, traitement o oscopie mpétence vélo eurologiqu on nas lam Les fentes oro-faciales

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Fédération Nationale des Or thophonistes

41e AnnéeDécembre 2003TrimestrielN° 216

Fondatrice : Suzanne BOREL-MAISONNY

ISSN

003

4-22

2X

RééducationOrthophonique

RencontresDonnées actuelles

Examens et interventionsPerspectives

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Les fentesoro-faciales

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Revue éditée par la FédérationNationale des Orthophonistes

Rédact ion - Admin is t ra t ion :2, rue des Deux-Gares, 75010 PARIS— Té l . : 01 40 34 62 65 —— Fax : 01 40 37 41 42 —e-mail : [email protected]

Membres fondateurs du comité de lecture :

Pr ALLIERES • A. APPAIX • S. BOREL-MAISONNY

G . D E C R O I X • R . D I AT K I N E • H . D U C H Ê N E

M. DUGAS • J. FAVEZ-BOUTONNIER • J. GERAUD

R. GRIMAUD • L. HUSSON • Cl. KOHLER • Cl. LAUNAY

F. L H E R M I T T E • L . M I C H A U X • P. P E T I T

G. PORTMANN • M. PORTMANN • B. VALLANCIEN.

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Téléphone : 01 43 46 92 92

Comité scientifiqueAline d’ALBOYDr Guy CORNUTGhislaine COUTUREDominique CRUNELLEPierre FERRANDLya GACHESOlivier HERALJany LAMBERTFrédéric MARTINAlain MENISSIERPr Marie-Christine MOUREN-SIMEONIBernard ROUBEAUAnne-Marie SIMONMonique TOUZIN

Rédacteur en chefJacques ROUSTIT

Secrétariat de rédactionMarie-Dominique LASSERRE

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Commission paritaire : 0907 G 82026

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LES FENTES ORO-FACIALES

Sommaire Décembre 2003 N° 216

Rééducation Orthophonique, 2, rue des deux gares, 75010 Paris

Ce numéro a été dirigé par Catherine Thibault, orthophoniste

1 Erwan 5Eric Le Guen, Sartrouville

2 Décrire ma vie de la naissance à aujourd’hui. Comment je l’ai vécue à l’école ou avec ma famille 9Stéphane Péraste, Vanves

3 Chirurgie et phonétique des fentes palatines ou comment Suzanne Borel a jeté le fondement de la recherche orthophonique 13Chantal Talandier, Orthophoniste, Bernard Pavy, Jacques Huart, Aurélie Majourau-Bouriez, Paris

Catherine Thibault, orthophoniste, psychologue, Paris 3

1 Démarche pédiatrique vis-à-vis d’un nouveau-né atteint d’une fente labio-maxillaire et/ou palatine 25Véronique Abadie, Pédiatre, Paris

2 La prise en charge des fentes labio-maxillo-palatines de 0 à 20 ans 35Christian Paulus, Chirurgien, Lyon

3 Le traitement de l’enfant porteur de fente vélo palatine : rôle de l’orthophoniste dans l’équipe pluridisciplinaire 43Chantal Talandier, Orthophoniste, Bernard Pavy, Jacques Huart, Aurélie Majourau, Paris

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1 Fente palatine sous-muqueuse 53Christian Paulus, Chirurgien, Marielle Laurent, Orthophoniste, Lyon

2 Un examen para clinique : la vidéoscopie vélo pharyngée 59Chantal Talandier, Orthophoniste, Paris

3 Les pharyngoplasties dans le traitement de l’insuffisance vélo-pharyngée des fentes palatines 65C. Gbaguidi, S. Testelin, B. Devauchelle, Chirurgie Maxillo-Faciale et Stomatologie, Amiens

4 Evaluation clinique après sphincteroplastie 79Stéphane Comiti, Béatrice Morand, Chrystele Deschaux, Bernard Raphael, Chirurgie Plastique et Maxillo-Faciale, B Raphaël, B. Morand *Grenoble

5 Rééducation des incompétences vélo-pharyngées 91Elisabeth Tsymbal, Orthophoniste, B. Raphaël, B. Morand, Grenoble

6 Traitement des séquelles nasales des fentes labio-alvéolo-palatines 97Raymond Gola L.Guyot, O.Richard, T.Kaffel, O.Prost-Magnin, Stomatologie, Chirurgie maxillo-faciale, Marseille

7 Le traitement orthodontico-chirurgical des séquelles de fentes labio-alvéolo-palatines 105Sandrine Sébille, Joël Ferri, Lille

8 Spécificités de la rééducation orthophonique dans les cas de fente palatine 111Hélène Baylon, Orthophoniste, M. Roger, Orthophoniste, M. Bigorre, Chef de clinique, P. Montoya, Chirurgien des hôpitaux, Montpellier

9 L’éducation gnoso-praxique orale. Son importance dans la prise en charge des enfants présentant une fente palatine postérieure 121Catherine Thibault, Orthophoniste, Paris

10 Fentes oro-faciales : une première expérience de prise en charge 135Sophie Dokhan, Orthophoniste, Montigny-sur-Loing

11 Une prise en charge orthophonique d’un enfant présentant une séquence de Pierre Robin 143Véronique Maire, Orthophoniste, Sainte Savine

1 La consultation prénatale et la préparation des parentsà l'intervention pour tumeur, dysplasie et fente faciale de leur nouveau-né 149Gérard Couly, Stomatologue et Chirurgien, Paris

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Catherine THIBAULTOrthophoniste, Psychologue16, avenue du Maine75015 [email protected]

Lorsque Jacques Roustit m’a proposé de diriger ce numéro spécial sur lesfentes oro-faciales, je me suis sentie investie dans le prolongement de mamission d’orthophoniste : aider et accompagner mes collègues dans la

prise en charge spécifique des patients présentant une fente oro-faciale.

Depuis quinze ans dans le service de chirurgie maxillo-faciale de l’hôpitalNecker, j’ai pu mesurer l’importance de la sphère oro-faciale, les fonctions deventilation, de succion, de déglutition, de mastication, de phonation ; le bondéroulement de l’oralité alimentaire et verbale constituant les étapes indispen-sables au développement harmonieux de tout enfant, et plus particulièrementdes enfants porteurs de fente labio-alvéolo-palatine. L’orthophoniste a un rôleprépondérant d’information, d’accompagnement parental et de personnalisationdu travail phonétique et linguistique de l’enfant opéré de chéiloplastie (ferme-ture labiale) et d’urano-staphylorraphie (fermeture vélo-palatine) dont l’auditionest surveillée. Cette prise en charge précoce permet à l’enfant d’aborder l’écolematernelle et d’intégrer le cours préparatoire avec une bonne communication etdes habiletés langagières efficaces.

Les fentes oro-faciales

Catherine Thibault

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Les troubles propres aux fentes oro-faciales résultent, le plus souvent, del’impossibilité pour le voile d’assurer sa fonction essentielle au cours de la pho-nation : l’occlusion vélo-pharyngée. C’est alors qu’un suivi orthophonique,audiologique particulier et surtout chirurgical est nécessaire (pharyngoplastie).

L’enfant est suivi pendant toute son enfance par les différents acteurs soi-gnants.

La prise en charge pluridisciplinaire voire transdisciplinaire permet aupatient et à sa famille de se reconnaître et de se vivre en tant que sujet propredans l’univers médical et paramédical.

Si l’état du voile du palais est prédictif quant à l’évolution de la paroled’un enfant opéré de fente oro-faciale, son comportement et celui de son entou-rage le sont tout autant. Il faut donc appréhender l’enfant dans sa globalité.N’oublions pas que l’environnement affectif, culturel, pédagogique et média-tique jouent un rôle déterminant dans la plus ou moins grande concrétisation destroubles et leur évolution.

Merci à tous les participants de ce numéro pour leur aide à mieux fairecomprendre et à susciter l’intérêt de la prise en charge des patients présentantune fente oro-faciale

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Mon fils est né

Il sut se faire attendre. Un accouchement long, plein de mystères.Tout devait bien se passer. Les échographies n’avaient rien laissé voir.Mon petit était déjà très pudique masquant toujours son visage de sesmains. Nous, parents, avions voulu voir et prévoir.C’était maintenant l’heure de la Nature...

***

L’attente du bonheur soudain se fige. La tête de notre enfant apparaît. Enune fraction de seconde je croise le regard de la sage-femme, et je comprendsque nous nous arrachons au monde paisible de l’insouciance. Nous n’aurons pasdroit au plus bel acte du monde, le seul acte pouvant dire qu’aux malheurs suc-cède le bonheur, aux souffrances les joies, à l’espoir la vie : la naissance.

Tout se disloque en quelques secondes, notre monde s’écroule.La sage-femme est parfaite. On s’en remet à elle.Elle sait faire venir la vie, là où nous sommes impuissants devantl’épreuve.Cette nuit là, au 5 mai 1991, mon être profond se métamorphose.Dans les salles de travail voisines, les cris cèdent place aux larmesd’émotion.

Erwan

Eric Le Guen

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C’est la joie pour tant de mères et de pères.Des parents comblés accueillent leur enfant, dans l’effort et l’amour.Entre tous ces miracles de la Vie, un autre enfant.Un enfant pour qui les choses seront différentes.Cet enfant est le mien.

L’injustice frappe de plein fouet, de toutes ses forces, avec une violenceinouïe, et met à genoux. La maman n’a pas bien vu son bébé, rapidement sortide son ventre et dérobé à son regard pour être emmené plus loin. Elle sait qu’ilse passe quelque chose, récupère, rassemble ses moyens, alors que je suis déjàdans la maternité, avec celui que je voulais appeler mon petit.

Mais à cet instant, je ne lui trouve pas de nom. Impossible.Le temps s’arrête pour me laisser entrevoir tout ce que cela signifie.J’appelle au secours médecins, sages-femmes. Qu’ils me renseignent.Vite.

Jusqu’où cet enfant est-il hors-normes ? Je n’ose le regarder en face. J’aipeine à soutenir son regard. Sous la lumière rouge qui le réchauffe, il me toise,yeux grand ouverts, totalement éveillé au monde alentour. Des yeux noirs, durscomme de l’obsidienne.

Il affronte. Il est plus fort que moi. Mais il ne sait pas, il n’a pas encorevu.Pourquoi bouge-t-il, pourquoi vit-il malgré cette inacceptable différence ?Sait-il qui il est ? L’épreuve que sera sa vie ? Il paraît tellement sûr de lui...La Nature veut lui donner force de réagir ? Mais pourquoi lui prendretant ?Il n’a pas de bouche formée, il en manque deux morceaux.Sa lèvre supérieure est d’un modèle inconnu. Ce qui aurait du être un nez ne porte pas de nom.Rapidement on s’apercevra qu’il n’a pas de palais.

Avant même la moindre explication, je sais que le parcours sera lourd.Mais notre fils s’en moque et nous devance. En quelques secondes il s’estengagé à vivre.

Au plus profond de mon être je suis soumis au combat de mes craintes etde mes vanités. La souffrance insoutenable va pourtant enfanter d’une mission : Erwan sera. Il naîtra en deux fois. On se le promet.

Notre enfant est là. Vivant. Il est drôle. Il est beau comme lui-même.

Il faut construire. Réconforter sa mère, soulager et répartir les culpabili-tés, me déclarer responsable, endosser génétiquement le fait d’être sans doutetransmetteur de l’anomalie.

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Nous allons construire une bouche, des lèvres, un palais, un voile dupalais.Espérons qu’il parle. Espérons qu’il rie. Espérons qu’il chante.Espérons qu’il entende. Espérons qu’il comprenne et qu’il aime.

Alors avec lui nous parlerons et rirons.Nous chanterons pour qu’il nous entende.Nous l’aimerons pour qu’il comprenne.Et nous comprendrons pour qu’il nous aime.

Aventure peut-être bien souvent vécue chez les médecins, sages-femmes,infirmières, qui nous entourent... Un enfant sur sept cents naît avec ce typed’anomalie… Nous l’apprendrons de ces gens, tous remarquables, qui nousamèneront l’unique solution : accorder notre absolue confiance, là où leur voca-tion est de sauver nos enfants.

Erwan pourrait être l’enfant d’un autre, les médecins seraient lesmêmes.Je m’en remets à eux, et les entends encore :

« Vous êtes les parents, c’est vous qui l’intégrerez dans la Vie. Pour lereste, ne craignez rien et laissez nous faire. Vous verrez, il sera très beau votrepetit garçon ».

Ce sont là les douze premières heures de la vie d’Erwan. Je pleure.

***Erwan a maintenant douze ans. Toutes les opérations ont donné un pleinsuccès.

C’est un garçon accompli. Il a une petite soeur de six ans, Cléo.La Nature s’est calmée, et nous laisse le bonheur.

Cléo est née sans encombres. C’était donc cela une naissance…Elle est née sans soucis, mais ne continue pas sans épreuves... blessures,

chutes... divorce de ses propres parents… Tout comme son frère, elle connaîtdes souffrances, et restaure peu à peu son équilibre... à la conquête d’elle-même.

Erwan, petit enfant, fit de chacune de ses journées une même conquête.

Il fut obligé de manger à la petite cuillère dès sa naissance, puisqu’iln’avait presque pas de bouche. Il s’entraîna et y parvint. On eut peur de trouverdes détériorations dans le système auditif. Il grandira avec un violoncelle, etrévèlera une oreille musicale. Il s’entraînera et la développera. On eut peur qu’ilne parle pas correctement. Il décidera d’apprendre à lire presque seul, s’entraî-nera, lira et parlera, jouera au théâtre.

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Il sera Erwan. Il fabriquera lui-même chaque jour un peu plus son his-toire.

L’injustice qui frappa sa naissance s’estompe lentement. Amplifier monrôle de père fut une des clés du succès dans la reconstruction de notre fils.

Rester entiers nous habilite à transmettre une part de nous-mêmes.Soyons fragmentés et nous enfantons la poussière. Soyons entiers et nous pou-vons donner.

Au lendemain des souffrances, nous vîmes toujours arriver les solutions.

Seul l’abandon aurait été un échec.

Faire était donc obligatoirement réussir.

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Décrire ma vie de la naissance à aujourd’hui.Comment je l’ai vécue à l’école ou avec ma famille

Stéphane Péraste

J’ai 20 ans.

Je suis né avec une fente bilatérale et d’après ce que j’ai compris, monpalais aussi était mal formé puisqu’il était ouvert, selon les mots de mes parents.

J’ai hérité de cette malformation de ma mère qui elle, n’avait qu’uneseule fente. Mais il y a d’autres cas dans cette famille, notamment une cousinede vingt ans qui n’a eu qu’une malformation palatine, un cousin de seize ansatteint du même mal et enfin une autre cousine qui aura bientôt dix ans qui estnée avec une seule fente.

J’ai subi ma première opération alors que je n’avais que trois mois. Elleconsistait à refermer une première fente et pour ce qui est de la seconde, il afallu me réopérer deux mois plus tard car le chirurgien qui me suivait pensaitque traiter les deux fentes en une seule intervention aurait été trop dur à suppor-ter pour un enfant en bas âge. Je pense surtout qu’il préférait attendre pour voircomment évoluait et cicatrisait la première partie pour pouvoir se lancer.

J’ai pris conscience de mon mal assez tôt puisque je ne venais alors quede rentrer à la crèche. C’est arrivé à cause du regard que me portaient lesautres enfants de l’école car ils venaient tour à tour se placer en face de moi,puis se rapprochaient jusqu’à en arriver à 30 cm de moi afin de me scrutercomme si j’étais une bête sauvage. S’en suivaient régulièrement les questionsdéstabilisantes et on ne peut plus embarrassantes telles que : « t’as le nezaplati…Pourquoi t’es comme ça ? Qu’est-ce qu’il t’est arrivé ? » Ca se termi-

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nait souvent par des réflexions et des moqueries qui ont été pour moi trèspénibles à supporter jusqu’à très tard puisque je l’ai ressenti jusqu’à l’âge dequinze ans. J’en ai réellement souffert puisque c’est un phénomène que j’aisubi au quotidien et je dois admettre que je me suis renfermé sur moi-mêmetrès vite, ce qui a automatiquement déclenché chez moi un instinct de défensequi se traduisait par de l’agressivité, de la violence. J’ai donc souvent étéamené à me battre pour faire taire les autres, qu’ils aient mon âge ou pas. Ilsse calmaient souvent mais je suppose qu’ils devaient continuer malgré tout encachette.

C’est à mon arrivée à l’école primaire, au cours préparatoire que lesréelles difficultés se sont faites ressentir car j’arrivais dans un monde nouveau.J’ai perdu tous mes repaires du fait que j’ai changé d’école alors qu’elle ne setrouvait seulement qu’à trente secondes de mon ancienne école. Je ne me suisretrouvé qu’avec des enfants plus âgés donc je marchais fatalement avec la peurau ventre que ces individus s’en prennent à moi. Je partais pessimiste en medisant que j’allais vivre un vrai calvaire et ce que j’avais prédit arriva. Dès ladeuxième semaine, les élèves des classes supérieures m’avaient déjà repéré et jesubissais leurs moqueries à chaque récréation. Plus les années passaient etmieux ça allait jusqu’au moment où j’ai encore dû changer de section puisque jerentrais en classe de sixième.

Là encore, je pressentais ce qui allait se produire. Comme si j’avais fait leremake d’un mauvais film français en version américaine puisqu’il s’est passéla même chose en puissance dix. J’avais éprouvé une certaine difficulté àm’adapter à l’école primaire, mais ce coup-ci, je pense que c’était pire que toutparce qu’il y avait une certaine discipline à entretenir de la part des professeursenvers les élèves étant donné qu’ils sont en pleine adolescence et que c’est làqu’ils s’affirment et qu’ils se font le plus remarquer. Les enseignants se mon-traient donc assez sévères, voir méchants. Je me sentais donc encore plus mal àl’aise et j’ai commencé à me poser de sérieuses questions qui sont revenues sou-vent pendant les quatre ou cinq années qui ont suivies. Je m’interrogeais sur lefait que c’était moi qui avais hérité de ça et pourquoi pas un autre ? Il y avaitaussi le fait que je rentrais dans la tranche de la puberté puisque j’avais déjà 11ans et c’est un âge où l’on commence à s’intéresser sérieusement aux filles. Ducoup, je me persuadais que je n’arriverais jamais à sortir avec une fille. Jem’étais mis en tête que même la fille la plus hideuse et repoussante du mondene voudrait pas de moi. Ma mère ne cessait de me répéter que j’étais un joli gar-çon et qu’un jour je ferai tomber les filles. Je n’y croyais pas du tout, si bien quej’ai souvent eu des envies suicidaires et à chaque fois que je voulais m’exécuter,il y avait cette petite voix au fond de moi qui me répétait qu’il fallait que je me

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laisse une chance, que je sois patient et qu’un jour allait basculer. J’ai donc noyémon désarroi dans le sport car je ne pensais plus à rien.

Ce n’est que vers l’âge de quatorze ans que j’ai commencé à me sentir unpeu libéré de ce poids. J’ai commencé à m’ouvrir petit à petit et j’ai commencétout doucement à avoir des relations amicales avec des filles sans qu’on envienne à parler de mes cicatrices. C’est à ce moment-là que j’ai pu commencer àdire « ouf » car les gens ne m’en parlaient plus comme avant, mais il y avaittoujours le regard des étrangers dans la rue. Je dois dire que je me suis littérale-ment ouvert vers l’âge de quinze ans même si je ne me trouvais pas parfait aupoint de vue de l’esthétique. C’est pour ça que j’ai subi une autre opération àl’âge de dix-sept ans. Je pensais être définitivement sorti de ce problème maisce n’était pas le cas.

En effet, à l’âge de dix-huit ans, des jeunes de mon âge qui se disaientêtre mes meilleurs amis se sont ligués contre moi et m’ont sans cesse fait res-sentir que j’étais différent alors que dans le fond j’étais aussi normal qu’eux. Dufait que ça vienne de ces gens-là, je n’avais jamais autant souffert car ils l’affi-chaient vraiment en dessinant des caricatures de moi en bas de chez moi, enm’envoyant des SMS sur mon téléphone portable pour m’insulter ainsi que mamère puisqu’elle a eu le même problème que moi. Ma seule défense était la vio-lence mais plus je leur attachais de l’importance, et plus ils s’acharnaient contremoi. C’est une période ou j’ai énormément douté de moi. J’en étais venu à medemander ce que je faisais sur Terre puisque je n’étais confronté qu’à la souf-france. J’ai du mal à l’admettre, mais si aujourd’hui j’ai définitivement fait abs-traction de ce handicap qui me poursuivra toujours, c’est grâce à eux, parce quese faire maltraiter par ses soi-disant meilleurs amis prête à réfléchir. Je ne lesremercierai pas pour le service qu’ils m’ont rendu puisqu’ils ont avant toutvoulu me détruire mais j’ai su me montrer plus intelligent qu’eux en ne prenantque le côté positif de cette situation. Je dois dire que j’ai été bien appuyé par mamère pour en arriver à raisonner de la sorte.

Effectivement, les problèmes que j’ai rencontrés étant plus jeune pourséduire les filles sont moindres aujourd’hui, voir inexistants. Je suis le premierétonné par le résultat de toutes ces opérations même si j’ai dû attendre un bonbout de temps pour en arriver là. Il fut un temps ou j’étais on ne peut plustimide et réservé, mais maintenant quand je dis aux gens que je le suis réelle-ment, ils me disent que je me moque d’eux car j’ai l’air ouvert et décontracté.C’est bon à savoir pour moi que je projette cette image là.

Le seul problème qui m’a toujours poursuivi et qui persiste encoreaujourd’hui est sans nul doute ma phonation qui est défaillante. En effet, quand

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je m’exprime, le son de ma voix à tendance à passer par mon nez. J’ai subi denombreuses opérations, la dernière en juin 2003.

Cela implique donc que je doive faire de la rééducation orthophoniquependant un an environ. Il est vrai que je n’ai jamais été vraiment assidu mais lepeu de travail que j’ai fourni a quand même porté ses fruits. Ces exercices quiont l’air inutile à pratiquer au premier abord donnent des résultats assez rapide-ment si le patient prend le temps de les faire ne serait-ce qu’une fois par jourdevant son miroir.

On dit souvent qu’une personne ne connaît pas réellement le son de sapropre voix, qu’elle ne s’entend pas parler. Néanmoins une personne se trouvantdans mon cas pourra facilement voir la différence au bout d’un mois déjà s’iltravaille sérieusement.

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Chirurgie et phonétique des fentes palatines oucomment Suzanne Borel a jeté le fondement dela recherche orthophonique

Chantal Talandier, Bernard Pavy, Jacques Huart, Aurélie Majourau

RésuméC’est à l’hôpital Saint-Vincent-de-Paul que Suzanne Borel, phonéticienne, a été appelée parVictor Veau, éminent chirurgien, pour comprendre, analyser et traiter la parole des divisionspalatines, considérée alors comme un chaos phonétique. Cette collaboration est à l’origine del’orthophonie en France.

Mots clés : fente labio-palatine, chirurgie et phonation, résultats phonétiques, classificationphonétique, Suzanne Borel, Victor Veau

Surgical and phonetic treatment of cleft palate conditions : How SuzanneBorel laid the foundation for the field of speech and language therapy

AbstractOne of the most famous surgeons for clef lip and palate conditions, Victor Veau, (French sur-geon at the Hospital Saint Vincent-de-Paul, France), was very interested in the speech pro-blems and deficiencies encountered by cleft palate patients. For this reason, he askedSuzanne Borel, speech therapist, to join his team. In this context, Suzanne Borel developed acomprehensive protocol involving the diagnosis, classification, analysis and treatment ofcleft lip and palate speech pathologies.

Key Words : Cleft lip and palate, surgical palate repair, speech results, phonetic classifica-tion, Suzanne Borel, Victor Veau

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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Chantal TALANDIEROrthophonisteBernard PAVY, Jacques HUART,Aurélie MAJOURAUÉquipe multidisciplinaire de réparation desfentes labio palatinesHôpital Saint Vincent-de-Paul 74 à 82, avenue Denfert Rochereau75674 Paris Cedex 14

Grâce à son éducation, à son travail méthodique, guidée parune pénétrante intelligence, Melle Borel a su introduirel’ordre dans le chaos des troubles phonétiques.

Faites un bon palais, bien mobile, vous avez les plus grandeschances d’avoir une bonne élocution, même sans éducationphonétique

Victor Veau

Acelui qui veut connaître l’histoire de la chirurgie vélaire, la lecture del’ouvrage de Victor Veau donnera une leçon magistrale. L’histoire, latechnique, la réflexion, la philosophie, l’éthique de cette pathologie y

sont exposées avec finesse et intelligence.

La constance avec laquelle Victor Veau recherche essentiellement, l’amé-lioration des résultats phonétiques, ne peut que séduire les orthophonistes quenous sommes.

C’est à l’aune d’une parole correcte que Victor Veau va mesurer tous sesprogrès chirurgicaux.

Victor Veau, le premier, dans sa recherche de l’amélioration de la tech-nique chirurgicale, accorde une attention constante à une restauration anato-mique autant que fonctionnelle… Nul chirurgien au monde n’a été, à cetteépoque, plus soucieux de la qualité de la parole de ses opérés que Victor Veau.

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Il prend conscience de la nécessité d’une science orthophonique : c’est larencontre avec Suzanne Borel.

Suzanne Borel est alors une jeune gram-mairienne, élève de l’abbé Rousselot,génial inventeur de la phonétique expéri-mentale.

À partir de là, leur col-laboration va démontrerl’importance de l’inter-a c t i o n e n t r e l e u r sdomaines, la chirurgieet l’orthophonie, et les

progrès de la technique chirurgicale seront validés par lesrésultats phonétiques, explicités et quantifiés.

� Le volet orthophoniqueSuzanne Borel, un chercheur exceptionnel

Car le chirurgien Victor Veau a trouvé en Suzanne Borel un chercheur àsa mesure. Leurs techniques complémentaires sont fructueuses et tous leursefforts tendent à la recherche constante d’une amélioration des résultats phoné-tiques, seul enjeu de cette réparation.

Analyser et comprendre les troubles phonétiques typiques de fentespalatines, leur apporter une classification, inventer leur traitement, pouvoiraccéder à une évaluation objective, c’est la problématique à laquelle setrouve confrontée Suzanne Borel quand elle commence à travailler dans ceservice de chirurgie.

Puis-je citer la phrase que Madame Borel-Maisonny me disait,quand elle se rappelait ses premiers pas dans la pathologie : MonsieurVeau m’a dit « voilà, moi je ne les opère pas trop mal, mais il y en aencore qui parlent comme des cochons, est-ce que vous pouvez y voir clairdans tout ça ? »

Dans ses travaux, poursuivis avec les conseils de l’abbé Millet, continua-teur de l’abbé Rousselot, Suzanne Borel cherche à comprendre quel est le méca-nisme de ces troubles. Cette recherche « Etude physiologique de la phonationdans les divisions palatines », suivie de « Éducation phonétique des sujets opé-rés pour division palatine », constitue la deuxième partie du chapitre consacré àla phonétique.

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La phonétique expérimentale

L’utilisation d’enregistrements, sur le tambour de Marey, la comparaisonde l’élocution normale et de la parole pathologique, l’explication physiologiquequ’elle en déduit sont pour l’orthophoniste d’aujourd’hui, d’une intelligence etd’une intuition phonétique exceptionnelles.

COUP DE GLOTTE SOURD pour ATA articulé par une jeune fille de dix-huit ans, avantl'opération (obs. 417) - (Fig. 751 in Division palatine – 1931, V. Veau, S. Borel, Masson,Paris)

1. Emission de l' A initial.

2. Période de tenue de la consonne glottale émise pour T.

3. Explosion de la consonne et émission de l'A final.

Ce T n'était pas une occlusive normale. Le sujet l'articulait la langue immobile sur Ie plancher dela bouche, la pointe à peine isolée de l’arcade dentaire inférieure.

Ce tracé, qui présente une grande analogie avec celui d'une occlusive normale est remarquable :

1° par le fait que l'air ne s'échappe pas par le nez pendant la tenue du T. C'est donc qu'il est retenudès le larynx, puisqu'il ne peut l'être par le voile largement fendu et incapable d'obturer le naso-pharynx ;

2° Le retrait du larynx au début du T glottal se manifeste sur tous les tracés de coup de glotte. Cemouvement anormal est ce qui décèle nettement la présence de ce vice d'articulation.

Il en est même si nettement caractéristique, que, plusieurs fois, nous avons dû à l'enregistrementseul, ou bien la découverte d'un coup de glotte pour une articulation isolée, généralement le K aumilieu d'éléments normaux et qui avait, pour cette raison sans doute, complètement échappé ànotre oreille ; ou bien de précieux renseignements sur l'évolution fâcheuse de quelques articula-tions nouvellement apprises et trop tôt négligées.

Pour exemple, l’enregistrement sur le cylindre, (fig. ci-dessus). Coup deglotte sourd pour ATA articulé par une jeune fille de dix-huit ans, avant opéra-tion, montre une parfaite conjonction du sens clinique et du savoir phonétiquede Suzanne Borel, elle explique :

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« Ce T n’était pas une occlusive normale. Le sujet l’articulait, la langueimmobile sur le plancher de la bouche, la pointe à peine isolée de l’arcadedentaire inférieure ». En observant le tracé plat de la ligne nasale, elle pour-suit :

« 1° L’air ne s’échappe pas par le nez pendant la tenue du T. C’estdonc qu’il est retenu dans le larynx, puisqu’il ne peut l’être par le voile, lar-gement fendu. »

Or, combien d’entre nous, instruits de cette pathologie, ont l’habitudede considérer comme, allant de soi, une fuite nasale associée au coup deglotte.

« 2° Le retrait du larynx au début du T glottal se manifeste sur tous lestracés du coup de glotte. Ce mouvement anormal est ce qui décèle nettement laprésence de ce vice d’articulation.

Il est même si caractéristique que plusieurs fois, nous avons dû, à l’enre-gistrement seul, ou bien la découverte d’un coup de glotte pour une articulationisolée, généralement le K au milieu d’éléments normaux, et qui avait pour cetteraison sans doute, échappé à notre oreille ; ou bien de précieux renseignementssur l’évolution fâcheuse de quelques articulations nouvellement apprises et troptôt négligées. »

L’utilisation de ces enregistrements permet ainsi de déceler un coup deglotte parfois non perçu même par l’oreille avertie du spécialiste qu’estSuzanne Borel et celle même du chirurgien complaisant pour son opérationcomme le souligne Veau dans sa critique des résultats publiés par sesconfrères.

Encore aujourd’hui, lors des bilans de contrôle après rééducation, notrepratique nous expose à des surprises identiques.

V. Veau écrit : « Pour l’analyse des troubles de l’élocution, MademoiselleBorel a appliqué les principes scientifiques de la phonétique expérimentale.Grâce à la connaissance exacte de ces troubles, sur le plan clinique, physiolo-gique et scientifique, l’évaluation phonétique est sortie du domaine de l’empi-risme ».

Ainsi, pouvait se constituer ce canon phonétique dont avait rêvé VictorVeau et qui lui permettait d’évaluer avec précision ses résultats chirurgicaux, cequ’il était le premier à faire dans le monde.

Ces travaux vont permettre la première communication scientifique mon-diale sur la fermeture du voile, en 1929.

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« Les résultats phonétiques de 100 staphylorraphies » dont on retiendra lesidées essentielles.

Le nombre et le recul sont suffisants, dit Veau pour avoir une idée surla valeur d’une opération qui ne vaut que par ses conséquences phoné-tiques.

Nous n’intervenons pas pour fermer une fente que personne ne voit...La palatoplastie n’est pas une opération esthétique.

Et son corollaire : Un voile mobile permet toujours la parole.

Mais, nous savons, par ailleurs, que Victor Veau mène de front larecherche d’une réparation esthétique de la fente labiale, dans laquelle, pourl’époque, il excellera, mais dont nous ne parlerons pas ici. C’est ainsi qu’onlit, cette « coquetterie » dans la présentation de ses résultats phonétiques « jevous ai présenté cet enfant car c’est la plus belle lèvre que j’ai faite en1924. »

La première classification dans l’élocution

Les statistiques de phonation sont faites suivant les formes et suivantl’âge.

La phonation est « groupée sous trois chefs » :

I Élocution normale

II Bruits surajoutés :

Souffle nasal, nasonnement, troubles d’origine diverse, englobant le ron-flement nasal, les articulations labiales défectueuses dues à une déficience mus-culaire du bec-de-lièvre bilatéral, ou à un mauvais articulé dentaire, ou à undéfaut d’audition.

III Déficience vocale :

Ces troubles ont pour cause une insuffisance fonctionnelle du voile.

Ces enfants ne peuvent prononcer P, T, K, B, D, G. Ils remplacent cesconsonnes par un bruit appelé le coup de glotte.

Ils ne peuvent prononcer CH, S, J, Z, F ; ils y suppléent par un soufflerauque de la gorge, connu en phonétique sous le nom de chuintement.

La statistique annonce 40% de phonation normale, passant à 70% quandl’opération est pratiquée avant l’âge de deux ans. Des cinq formes bilatérales,quatre sont classées en catégorie III, déficience vocale, une en catégorie II,bruits surajoutés.

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L’éducation phonétique :

la révision de nos opérés nous a permis de constater un fait auquel nousne nous attendions pas : Le rôle de l’éducation phonétique est accessoire.

Les éléments du pronostic fonctionnel de la staphylorraphie :- L’âge de l’enfant et la nature de la division palatine.- L’intelligence de l’enfant et des parents.- Acuité auditive de l’opéré.

Dans cette publication de 1929, tout est dit : l’incidence de l’âge auquella staphylorraphie est faite, la forme de la division palatine, simple ou associée àune fente de la lèvre. Le niveau intellectuel de l’enfant et la gêne que consti-tuent les troubles otiques sont pris en compte.

Veau commente : « Il est un fait incontestable c’est que l’intellect de l’en-fant est un facteur pronostic de premier ordre. À côté de l’intelligence de l’en-fant, il faut tenir compte de la mentalité des parents. D’abord, il y a des mèrescomplètement stupides, qui sont incapables de parler correctement à leurenfant. Il y a ensuite les mères qui ne s’occupent pas de leur enfant et ce ne sontpas les plus pauvres. »

Un texte fondateur« Étude physiologique de la phonation des Divisions palatines » 1931

« Nous avons dû tout d’abord chercher quelque clarté dans l’ensemblecomplexe des troubles présentés par nos sujets, puis nous avons essayé expéri-mentalement de comprendre quel était le mécanisme de ces troubles. »

L’étude physiologique de la phonation est faite à partir de l’observationde 192 enfants. L’examen clinique, l’évaluation phonétique et l’enregistrementde la parole sur le tambour de Marey sont les éléments qui valident les hypo-thèses et fondent les certitudes de Suzanne Borel.

Bien que, comme un authentique chercheur, Suzanne Borel, avec modes-tie, précise. « Nous sommes les premiers à reconnaître tout ce que cette étude ad’imparfait. Beaucoup de points sont encore obscurs dans notre esprit ; lestroubles que nous avons décrits devraient être repris et étudiés plus attentive-ment par la méthode expérimentale. » Quelle leçon d’humilité, à une époque oùelle est le seul chercheur en phonétique pathologique !

L’exposé du matériel clinique, âge des patients, type de lésions, méthodechirurgicale précisée quand ce n’est pas celle du service, est le préalable à cetteétude exhaustive des troubles des fentes.

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� Les troubles phonétiques propres aux divisions palatines.À partir de ces premiers travaux très approfondis dans le domaine,

Suzanne Borel distingue :

Les troubles spécifiques.

Le coup de glotte : Suzanne Borel est la première phonéticienne dansle monde à décrire largement le coup de glotte, à en justifier le mécanismephysiologique par des schémas et des enregistrements. Elle n’a pu trouverd’ailleurs que peu d’éléments de référence dans les « Principes de phoné-tique expérimentale » où l’abbé Rousselot n’a décrit que sommairementl’occlusion glottale en arabe et en danois et elle dit en être réduite à deshypothèses.

Pour ce mécanisme compensatoire, l’étude exhaustive des tracés est à lafois une étude descriptive, une analyse quantifiée, une justification physiolo-gique, une réflexion ou une interrogation sur le phénomène phonétique observé.

Le souffle rauque

Le souffle nasal, la déperdition nasale, le nasonnement, la description deces mécanismes parfois associés, peut permettre une différenciation sans ambi-guïté au thérapeute.

Les tracés que Suzanne Borel y joint, excluent, dit-elle, toute erreur d’in-terprétation.

Ils sont pour l’orthophoniste une démonstration d’évidence.

Les troubles non spécifiques.

Le ronflement nasal, résultant de la présence d’un encombrement nasal,ou de végétations adénoïdes.

L’insuffisance articulatoire : l’élocution manque de netteté ou est mêmeincompréhensible.

Les troubles d’origine otilique : les confusions décrites sont dues unique-ment à un défaut d’audition, écrit Suzanne Borel. Plus tard, elle distingueratrouble auditif et trouble perceptif.

Les troubles d’origine laryngée : raucité, monotonie de la voix, troublesphonétiques pour insuffisance laryngée.

Les troubles d’origine glosso-labiale et maxillaire : qui décrivent tous lestroubles dus à une inertie musculaire ou insuffisance de la langue ou de la lèvresupérieure. Les défauts dus à la malformation du maxillaire supérieur atteignant

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l’articulation des labio-dentales, souvent associée à une inertie ou rigidité desmuscles des mâchoires.

Grimaces : « enfin bon nombre de nos opérés grimacent en parlant. » Etl’on aura plaisir à lire cette description des syncinésies que nous connaissons,qui sont ici un véritable film du phénomène.

« Les ailes du nez sont trop mobiles ; les joues, la lèvre supérieure se contractent, les sourcils se rapprochent, lefront se plisse pour l’émission de toutes les consonnes, sauf M, N, L, R. Nous attribuons ce défaut à un effort exagéré et faitdans de mauvaises conditions pour parler avant l’opération, ou acquis au cours d’une rééducation maladroite et imprudente.Beaucoup de nos enfants grimacent pour avoir été invités à parler quand ils ne le pouvaient pas encore. »

Les troubles d’origine thoracique : inertie respiratoire, débit haletant,mauvais débit d’air qui demeurent et sont à traiter après la restitution d’articula-tions normales.

Après la classification des troubles spécifiques ou associés à la divisionpalatine, l’étude physiologique de la phonation se termine par une statistique sur155 sujets retenus, montrant la distribution de tous ces troubles.

Dans la tradition médicale classique, à cette analyse fine, argumentée destroubles, succède le traitement :

� Éducation phonétique des sujets opérés pour D.P.

• Les conditions de prise en charge de l’éducation phonétique du jeuneenfant sont analysées avec l’expérience clinique que l’on sait. Comme toujours,chez Suzanne Borel, les réflexions de bon sens se succèdent et cherchent tou-jours à valoriser l’enfant.

« L’enfant très jeune jouit d’une facilité insoupçonnée ; - il s’intéresse à son travail et s’y donne tout entier ; - il nese fatigue pas si l’on sait ménager des repos entre les exercices et les varier (j’ai pu faire travailler utilement et sans lesennuyer des enfants de 4 ans, trois heures par jour régulièrement pendant un mois) ; - il a peu ou point d’habitudesvicieuses ; il est souple et adroit » et plus loin, elle note : « la facilité avec laquelle l’enfant plus jeune introduit dans laconversation courante les bonnes habitudes qu’on lui a données ».

Tandis que « la maladroite bonne volonté des parents, l’évaluation de leurintelligence » sont notées par Suzanne Borel avec la franchise qu’on lui connaît.

Pronostic et durée d’une rééducation tirés de l’examen de l’enfant.

Correction des troubles annexes : rééducation respiratoire, rééducationmusculaire, rééducation auditive.

Correction des troubles phonétiques proprement dits.

Les principes élémentaires communs à toute rééducation précèdent laprise en charge spécifique de chaque mécanisme vélo pharyngé de compensation.

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La rééducation du coup de glotte, du souffle rauque, du souffle nasal et detous les autres troubles de la nasalité est proposée : la description progressivedes mouvements, des enchaînements et de tous les exercices sont accompagnésde réflexions cliniques judicieuses.

Des tracés illustrent la présence de nasalité non audible, de souffle nasal,de coup de glotte et par la connaissance qu’ils en donnent, sont une aide pourl’orthophoniste et parfois pour le sujet lui-même.

L’évaluation de la durée du traitement tient compte des éléments chirurgi-caux, de l’âge du sujet. La présentation de cas qui illustre le type de rééducationcomplète cette magistrale leçon d’orthophonie.

Les travaux de Suzanne Borel-Maisonny, son intelligence, sa persévé-rance, l’analyse en phonétique expérimentale de cette pathologie, aboutirontà la classification que l’on connaît, publiée à plusieurs reprises. Actuelle-ment, seule cette classification nous permet d’échanger nos résultats avecd’autres équipes.

Phonation I Parole normale

Phonation II Parole avec nasalité

Phonation III Mécanismes de compensation.

Classification qui permet une combinatoire, incluant les degrés PHI/II ;PHI/III ; PH III/II…. selon la parole spontanée, la parole appliquée. Le degréd’intelligibilité et les troubles d’articulation pouvant se surajouter à chaque typede phonation.

Ainsi, Victor Veau avait introduit l’esprit du travail en équipe : sesrecherches pour améliorer la reconstruction d’un voile fonctionnel, pouvaientêtre validées par l’analyse d’une phonéticienne, attentive à la parole et au lan-gage de ses opérés.

Nous lui devons d’avoir proposé à Suzanne Borel, phonéticienne, le pre-mier champ d’expérimentation de la pathologie, et de l’avoir séduite au pointqu’elle en a été la pionnière dans notre pays, publiant des travaux mondialementreconnus.

Suzanne Borel est la première à avoir décrit et analysé scientifique-ment ces troubles. Elle a créé avec ingéniosité leur traitement. Elle exposeses travaux de phonéticienne et ses réflexions de clinicienne dans unelangue d’une grande pureté, d’une grande finesse, intelligible par tous. Ellea été le chercheur, la clinicienne, la praticienne qui a tracé la voie de notreorthophonie.

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REFERENCES

VEAU V. avec la collaboration de Melle S. Borel. 1931. Division Palatine. Anatomie chirurgie phonétique, Masson.

VEAU V. avec la collaboration de J. Récamier. 1938. Bec-de-lièvre. Formes cliniques ; chirurgie. Masson.

Les successeurs de Victor Veau à St Vincent de Paul, Pierre Petit, puisRené Malek ont tenu à garder l’organisation de l’équipe mise en place par leurmaître, c’est-à-dire l’orthophoniste, puis le stomatologiste qui mettant à profit lanouvelle science orthodontique se devait de donner aux opérés de fenteslabiales, des articulés dentaires corrects. Suzanne Borel-Maisonny et DeniseSadek ont prêté leur concours à Pierre Petit. René Malek assisté de Marie-RoseMousset lui a succédé, J. Psaume ayant collaboré aux deux équipes.

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Démarche pédiatrique vis-à-vis d’un nouveau-néatteint d’une fente labio-maxillaire et/ou palatine

Véronique Abadie

Résumé

La démarche pédiatrique vis-à-vis des fentes labio-maxillaires et/ou palatines a été profon-dément modifiée par les progrès de l’échographie obstétricale et par conséquent par l’aug-mentation de la proportion de diagnostics évoqués pendant la grossesse. Il faut séparer pourdes raisons à la fois physiopathologique, diagnostique, fonctionnelle et thérapeutique, lesfentes antérieures (labio-maxillaire avec ou sans fente palatine) et les fentes postérieures.Les premières sont en règle diagnostiquées en période anté-natale ; elles s’associent dansenviron 35% des cas à d’autres malformations, notamment de la ligne médiane ; ellesposent des problèmes d’attachement précoce car elles modifient drastiquement l’image del’enfant. Lorsqu’elles sont isolées, elles posent peu de problèmes fonctionnels et thérapeu-tiques. A l’inverse, les fentes postérieures sont rarement repérées en anténatal ; elles repré-sentent un spectre nosologique en continuum avec celui des séquences de Pierre Robin. Sileur nombre absolu est plus faible que celui des fentes antérieures, leur association àd’autres malformations est plus important (40 à 50%) ; elles n’altèrent pas l’aspect duvisage de l’enfant mais posent davantage de problèmes fonctionnels, donc de thérapeu-tiques médicales.

Mots clés : fente labio-maxillaire, fente labio-palatine, fente palatine, séquence de PierreRobin.

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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A pediatric approach to cleft lip and cleft palate conditions in newborn children

AbstractThe paediatric assessment of a child born with a cleft lip (with or without cleft palate) or acleft palate has recently undergone drastic modifications due to the improvement of prenatalultrasound investigations. Anterior cleft conditions, (i.e. cleft lip; cleft lip and maxilla; cleftlip, maxilla and palate) are different from posterior cleft conditions (cleft palate), in terms oftheir physiopathology, diagnosis, and therapeutic implications. Anterior cleft conditions areusually detected during the prenatal period, they are associated in 35% of the cases withother malformations, especially of the brain midline. They may be responsible for mother-child bonding difficulties, but create few functional (regarding feeding and speech) and the-rapeutic problems when they are not associated with other malformations. On the contrary,posterior cleft conditions are rarely detected during the prenatal period. They are less fre-quent but are more often associated with other malformations. The author thinks they mayrepresent a continuum with the U-shaped cleft palate of the Pierre Robin sequence. They donot change the child’s facial aspect although they are often responsible for feeding and ENTproblems.

Key Words : cleft lip and maxilla, cleft lip and palate, cleft palate, Pierre Robin syndrome.

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Véronique ABADIEPédiatreHôpital Necker-Enfants Malades149 rue de Sèvres75015 Paris

Le rôle du pédiatre vis-à-vis d’un nouveau-né atteint de fente labio-maxil-laire et/ou palatine est, dans son principe, similaire au rôle qui est le sienvis-à-vis de tout enfant qui naît avec une malformation congénitale.

Trois objectifs guident cette action précoce : - Le premier consiste à accueillir l’enfant tel qu’il est, dans cettefamille-là, c’est-à-dire à accompagner les parents dans la constitutiond’un lien parental perturbée par l’annonce d’une anomalie. La situationest tout à fait différente si le diagnostic échographique prénatal suivid’une consultation prénatale spécifique ont eu lieu ou non. L’accueild’un enfant atteint d’une malformation tente d’éviter de séparer l’enfantde sa mère par un transfert immédiat dans une unité pédiatrique spécia-lisée. Pour les fentes labio-maxillaires (FLM) et/ou palatines (FP), lajustification médicale de ce transfert est rare, et le pédiatre doit tenterde ne pas céder à la pression de l’équipe soignante de maternité, sou-vent inquiète par la prise en charge précoce de ce type de nouveau-né.Ceci est d’autant plus vrai pour les malformations faciales qui donnentà l’enfant une image traumatisante pour ses parents comme pour les soi-gnants. L’attitude de l’équipe de maternité vis-à-vis de ce couple mère-bébé sera essentielle pour la qualité de la suite des soins et de la structu-ration psychique de cet enfant.

- Le deuxième axe de réflexion du pédiatre vis-à-vis d’un nouveau-néatteint d’une fente palatine est celui de l’analyse du retentissement decette anomalie sur son adaptation à la vie extra utérine. Les fonctions ali-mentaires et respiratoires seront évaluées attentivement afin que l’héma-tose soit préservée et que la croissance pondérale soit assurée. Cecinécessite quelques petites procédures pratiques spécifiques, position decouchage, type de tétine, texture du lait… L’attachement mère-bébé estbien sûr conditionné par la qualité de l’oralité alimentaire précoce quidoit donc être sereinement soutenue par l’équipe de la maternité.

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- Enfin, dès les premiers jours de vie, la précision du cadre diagnosticdans lequel s’intègre cette fente doit être évoquée et dirigée dans la voiecompétente. Le pédiatre doit par un examen clinique complet et par lesconnaissances théoriques concernant ces fentes, dessiner un projet théra-peutique et d’investigations à court et moyen terme. Ceci impliqued’avoir des correspondants médico-chirurgicaux rôdés à la prise encharge de ces enfants.

� Rappel d’embryologie permettant d’envisager le mécanismede genèse des fentes orales, leur retentissement sur les fonctionsvitales (succion/déglutition/ventilation/motricité digestives et desvoies aériennes supérieures/régulation végétative cardiaque),et leur association possible à d’autres malformations.

La continuité de la lèvre supérieure et de la gencive est constituée vers la5ème semaine de vie embryonnaire par la fusion du bourgeon naso-frontal médianet des deux bourgeons maxillo-mandibulaires droit et gauche, formés par lescrêtes neurales prosencéphalique et mésencéphaliques respectivement. Entre la7ème et la 9ème semaine de vie embryonnaire, le palais secondaire se forme, lesmouvements de déflection du pôle céphalique embryonnaire et les premièresséquences motrices mandibulaires permettent l’horizontalisation de la langue etla progression postérieure et médiane des procès palatins, jusqu’à la formationcomplète du voile séparant la cavité buccale de la cavité nasale.

Ces éléments d’embryogenèse laissent penser que les fentes antérieures,c’est-à-dire les fentes labiales, labio-maxillaires ou labio-gingivo-maxillo-palatines sont des anomalies de fusion tissulaire des structures faciales d’ori-gine prosencéphalique et mésencéphalique. On comprend ainsi que ces fentespuissent être larges anatomiquement sans altérer de façon marquée la sensori-motricité des organes responsables des fonctions alimentaires et respiratoiresmédiées par le tronc cérébral. En revanche, elles peuvent s’associer à des ano-malies prosencéphaliques c’est-à-dire principalement la ligne médiane (corpscalleux, axe hypothalamo-hypophysaire) et les hémisphères cérébraux.

Les fentes palatines postérieures sont pour la majorité d’entre ellesmédianes et ogivales touchant soit exclusivement le voile du palais, soit le palaissecondaire partiellement ou dans sa totalité. Elles sont constituées au cours du 3e

mois de vie embryonnaire et sont le reflet d’un défaut de coalescence des procèspalatins, probablement par l’interposition persistante de la langue. La motricité oro-faciale embryonnaire et fœtale est une activité neuro-motrice précoce et dont onpeut penser qu’elle est responsable du positionnement intra-oral de la langue et de

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la croissance de la mandibule. Il n’est donc pas étonnant que les fentes palatinespostérieures soient fréquemment associées à des anomalies du rhombencéphale(tronc cérébral primitif), que ces anomalies soient centrales sous la forme detroubles de l’intégration des fonctions de succion/déglutition/ventilation ouqu’elles soient périphériques sous la forme d’anomalies morphologiques des struc-tures cervico-faciales issues des arcs branchiaux. Plus rarement, les fentes palatinespostérieures peuvent être plus latérales, ou étroites, à berges abruptes, respectantdeux hémi-luettes fendues. Il est alors moins probable qu’elles correspondent à unobstacle lingual mais plutôt à des processus anormaux de fusion tissulaire/mort cel-lulaire. Ces fentes sont en règle associées à d’autres éléments malformatifs (1, 2).

Les fentes antérieures ou fentes labiales, labio-maxillaires et labio-maxillo-palatines unies ou bilatérales

- Leur diagnostic anténatal est actuellement le plus souvent fait. L’amé-lioration des techniques d’échographie (3D) permettra d’étendre encore l’ex-haustivité des diagnostics anténatal de ces fentes. La découverte anténataled’une fente labio-maxillaire implique une analyse morphologique fine du fœtus,de son cerveau (ligne médiane), la réalisation éventuelle d’une IRM fœtale céré-brale, une échographie cardiaque fœtale, une bonne analyse de la morphologiefaciale notamment des oreilles, des orbites, de la distance intercanthale, de lapyramide nasale et enfin la réalisation systématique d’un caryotype. En cas denormalité de toutes ces investigations, il est conseillé de poursuivre la grossesse,ce que les parents acceptent le plus souvent en cas de fente unilatérale. Il estalors utile que le couple voit le chirurgien au cours d’une consultation longue etdifficile (voir chapitre de G. Couly dans ce numéro).

Lorsque le diagnostic anténatal n’a pas été fait, les fentes labio-maxillairesdécouvertes à la naissance provoquent toujours un choc. Il s’agit d’un trauma-tisme d’autant plus intense que les parents attendent toujours avec impatience dedécouvrir le visage de leur enfant. Pour minimiser ce traumatisme, l’enfant doitêtre placé contre sa mère qui par ce peau-à-peau va pouvoir se construire en tantque mère et donc apprendre à aimer cet enfant tel qu’il est. L’allaitement materneldoit être favorisé et une consultation chirurgicale néonatale est proposée afinqu’un projet réparateur puisse rapidement soutenir les parents.

- Les problèmes fonctionnels : les fentes labio-maxillo-palatines gênentpeu la succion, n’entravent ni la déglutition, ni la ventilation. Le seul obstacle estcelui de la moins bonne dépression intra-buccale autour du mamelon ou de latétine. Cet obstacle est compensé par des moyens facilitant la succion (tétinelongue en caoutchouc souple), voire l’utilisation de tétine à plateau afin que l’en-fant trouve un appui supérieur soutenant le mouvement de came linguale antéro-

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postérieur préalable à la déglutition. Sur le plan ventilatoire, hormis les remon-tées nasales lactées auxquelles la muqueuse nasale s’habitue rapidement, il n’y apas de risque d’atteinte laryngée. Ceci est vrai lorsque la fente n’est pas associéeà des malformations mettant en jeu en elles-mêmes les fonctions respiratoires.L’allaitement maternel n’est pas contre-indiqué, au contraire. La qualité de saréalisation dépend de celle de la montée de lait. Cet allaitement doit être favorisécar il est très bénéfique pour la mise en place du lien mère - bébé. Il est néan-moins fréquent qu’il soit difficile et l’entourage maternel doit minimiser le senti-ment d’échec si tel est le cas. Lorsque la fente labio-palatine est isolée, le pronos-tic phonatoire ultérieur est en règle satisfaisant après uranostaphylorraphie. Eneffet, les difficultés phonatoires sont essentiellement mécaniques, survenant surun voile chirurgical, mais sans anomalies de la commande neuromusculairevélaire.

- Les diagnostics et malformations associés : les fentes labio-maxillo +/-palatines antérieures touchent un peu moins d’une naissance sur mille. Dans lesformes isolées unilatérales, le risque de récurrence est de l’ordre de 3%, (5% pourles formes bilatérales). Les formes familiales représentent environ 5% des cas (3).Les FLM s’associent dans environ 35% des cas à d’autres malformations. Ceschiffres sont actuellement très modifiés par le diagnostic anténatal. Dans une sérieparisienne de 165 fentes antérieures diagnostiquées à la naissance, 65 % étaientisolées, 19% s’associaient à au moins une autre malformation et un caryotypestandard normal, et 16% s’intégraient à une anomalie du caryotype (4). Ces mal-formations touchent essentiellement la ligne médiane, agénésie du corps calleux,insuffisance anté-hypophysaire, anomalie des lobes frontaux, holo-prosencépha-lie, anomalie ophtalmologique. Ce spectre des anomalies de la ligne médiane jus-tifie une IRM cérébrale. La gravité des tableaux cliniques est variable, touchantles fonctions hormonales centrales (anté-hypophyse), la régulation de l’hormoneanti-diurétique (post-hypophyse), et les fonctions supérieures. Les tableaux oùexistent des anomalies des lobes frontaux donnent en règle des déficits psychomo-teurs majeurs avec comitialité.

Les fentes peuvent s’associer à des anomalies issues de spectres embryo-logiques différents notamment dans le syndrome CHARGE, le syndrome deVan der Woude, les syndromes oro-digito-faciaux, ou d’autres anomaliesnotamment chromosomiques où la fente n’est qu’un symptôme inclu à un syn-drome spécifique identifié ou non. Le syndrome de Van der Woude associe unefente labio-palatine, une hypodontie des incisives et des micro-fistules de lalèvre inférieure (3). Sa transmission est dominante, le pronostic intellectuel estnormal. Le syndrome CHARGE est un tableau malformatif complexe associantà divers degrés de gravité et de fréquence, une cardiopathie congénitale, un

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colobome rétinien, une atrésie choanale, un retard de développement et de crois-sance, un hypogénitalisme et des anomalies des oreilles (externes, moyennes etinternes). Cette description correspond à l’acronyme CHARGE (Colobome,Heart, Atresia, Retardation, Genital, Ear). Du point de vue fonctionnel orofacial,ces enfants ont très souvent une atteinte sévère des paires crâniennes, avec para-lysie faciale unilatérale en règle périphérique et atteinte du carrefour aérodiges-tif grave par atteinte de la coordination des nerfs 9, 10 et 12. Ces enfants ont desdifficultés de langage importantes d’origine à la fois praxique, auditive et cogni-tive. Ne sont pas représentés dans l’acronyme, deux autres symptômes impor-tants du syndrome CHARGE, l’atteinte vestibulaire et l’atteinte olfactive. Lesyndrome CHARGE est avant tout un grave handicap plurisensoriel (5). LesFLM peuvent également être d’origine iatrogène (Hydantoin, Dépakine).

Les fentes postérieures

Le diagnostic anténatal

Dans la majorité des cas, il n’est pas fait. La continuité de la lèvre n’estpas altérée ; le flux Doppler, permettant de visualiser une communication entre lenez et la bouche en cas de fente antérieure, n’est pas altéré en cas de fente posté-rieure. Lorsqu’elles s’accompagnent d’éléments symptomatiques de la séquencede Pierre Robin, le rétrognathisme, voire la verticalisation linguale, sont visuali-sables entre des mains entraînées. Un excès de liquide amniotique est souventnoté a posteriori chez les enfants atteints de séquence de Pierre Robin. Du fait dela non-spécificité de ce symptôme, il est exceptionnel qu’un hydramnios évoquele diagnostic anténatal de Pierre Robin. Lorsque le diagnostic de Pierre Robin estsuspecté, il impose un examen complet du fœtus, non seulement morphologiquemais fonctionnel. En effet, la séquence de Robin peut être la conséquence d’undéfaut de mobilité foetale qu’il faut rechercher avec attention. La motricitéfœtale, globale, des extrémités, et orale, sera réévaluée à quelques semaines dedistance pour en évaluer la dynamique au cours du temps. Sur le plan morpholo-gique, le fœtus sera examiné attentivement, notamment sur le plan facial (oreille,orientation des fentes palpébrales) des extrémités, cardiaque et cérébral. La réali-sation d’un caryotype avec recherche de microdélétion du chromosome 22. Dansnotre série de 150 cas en dix ans, le diagnostic anténatal avait été suspecté chez 8enfants dont 2 parce qu’il s’agissait de fratrie (6).

Les problèmes fonctionnels

A l’inverse des fentes antérieures, les fentes palatines postérieuresmédianes qu’elles soient vélaires ou vélo-palatines exposent à des troubles desuccion/déglutition/ventilation. En effet, un grand nombre de ces fentes sont

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liées à une hypo-mobilité anténatale qui est soit d’origine neuro-musculairepériphérique, soit d’origine centrale, c’est-à-dire le fait d’une anomalie de laréticulée du tronc cérébral ou d’une anomalie des noyaux des nerfs crâniens (2).Il est donc important d’observer la qualité de la succion et surtout la coordina-tion succion-déglutition-ventilation chez ces nouveau-nés. Les tétines spéci-fiques, notamment à plateau, ne sont d’aucune aide, au contraire, car elles sonten règle générale rigides et encombrent la cavité buccale qui a déjà une dyna-mique insuffisante. Une obstruction ventilatoire glosso-pharyngée-laryngée doitêtre recherchée avec précision (SaO2, PCO2, polysomnographie, laryngosco-pie). Il est rare que ce type de syndrome soit d’emblée grave. En revanche, lesenfants atteints de séquence de Pierre Robin, initialement non symptomatiques,sont susceptibles de le devenir au cours des premières semaines.

Le problème de l’attachement est un peu différent pour les enfantsatteints de séquence de Pierre Robin car il n’existe pas de cicatrice faciale ren-dant l’enfant plastiquement monstrueux. En revanche les difficultés alimentairesprécoces sont très difficilement vécues par les mères qui en conçoivent toujoursun sentiment d’incompétence et de culpabilité.

Les diagnostics et malformations associés

Les fentes vélaires et vélo-palatines sans rétrognathisme ni glossoptosesont à considérer avec prudence dans la mesure où dans la séquence de PierreRobin, il n’existe pas de parallélisme entre l’intensité des anomalies anatomiquesfaciales (rétrognathisme, glossoptose) et les troubles fonctionnels. Autrement dit,la frontière nosologique entre séquence de Pierre Robin modérée et fente posté-rieure isolée est floue. Ces fentes postérieures sont plus rares que les fentes labio-maxillo-palatines (environ 1 pour 10). Dans le groupe des séquences de PierreRobin (triade complète), il existe dans un cas sur deux une anomalie associée.Dans notre expérience, les 5 diagnostics les plus fréquemment associés à uneséquence de Pierre Robin sont : 1) le syndrome de Stickler dont le diagnosticrepose sur la réalisation de radiographies du squelette et d’un examen ophtalmo-logique. Il s’agit d’une arthro-ophtalmopathie liée à une anomalie d’un gène ducollagène. Le diagnostic en est parfois difficile, mais le pronostic neurologiqueest bon. Les sujets atteints ont, à des degrés variables, une atteinte ophtalmolo-gique, faite d’une myopie constitutionnelle précoce et grave, plus rarement unecataracte ; une atteinte osseuse qui n’est en règle symptomatique qu’à l’âgeadulte, une hyperlaxité ligamentaire des premiers mois, une morphologie facialespécifique. La transmission est autosomique dominante. Il existe d’autres syn-dromes touchant les gènes du collagène, de transmission différente, parfoisrécessive, grevant davantage le pronostic statural. Les radiographies squelet-

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tiques et un avis spécialisé permettent de différencier ces entités qui ont en com-mun un bon pronostic intellectuel ; 2) les anomalies chromosomiques arriventaprès par ordre de fréquence. Elles sont variées, plus ou moins connues, respon-sables en majorité de tableaux malformatifs complexes avec retard mental sévère; 3) les anomalies latéro-faciales notamment des anomalies du premier etdeuxième arc, syndrome de Franceschetti (Treacher-Collins) et le syndrome deNager. Ces deux syndromes ont en commun une atteinte faciale, avec hypoplasiemalaire, atteinte de l’angle externe de l’œil, hypoplasie des oreilles externes +/-moyenne, hypoplasie mandibulaire majeure. Cette atteinte faciale est d’intensitévariable d’un sujet à l’autre. Dans le syndrome de Nager, elle s’associe à desanomalies des extrémités (axe radial). La fréquence de la présence d’une fente detype Robin dans ces syndromes est faible. Ces enfants ont des difficultés de lan-gage à la fois d’origine auditive et d’origine praxique, mais leurs fonctions intel-lectuelles sont normalement préservées. La transmission est autosomique domi-nante ; 4) La microdélétion hétérozygote du chromosome 22 (del 22 q11) est ensoi, l’anomalie chromosomique constitutionnelle actuellement considéréecomme la plus fréquente. Les fentes palatines postérieures de type Robin sontrares dans les microdélétions 22 mais possibles, les fentes labiomaxillaires sontégalement possibles. En revanche, une insuffisance vélaire neurologique ou unefente vélaire sous-muqueuse touchent près de la moitié des enfants et expliquentla gravité potentielle des troubles phonatoires chez ces enfants. La microdélétion22 q11 associe de plus, là encore à des degrés variables d’un sujet à l’autre, unehypoparathyroïdie, une lymphopénie CD8, une cardiopathie conotroncale, unemorphologie faciale et des extrémités particulières, des troubles des fonctionssupérieures et/ou du comportement ; 5) L’alcoolisme fœtal ou d’imprégnationaux anti-épileptiques (Dépakine) sont également possibles. Il s’agit en règle d’untableau de retard de croissance intra-utérin, avec microcéphalie, dysmorphiefaciale, +/- cardiopathie, retard intellectuel avec agitation et troubles de concen-tration et du caractère. Les autres diagnostics associés sont des syndromes rares,variés, parfois intégrés à des maladies osseuses constitutionnelles. Dans un tiersdes cas, l’identification étiologique de l’association malformative ne peut pasencore être précisée (6). Dans la série du registre des malformations de Paris, lesdonnées sont à peu près similaires : sur 128 fentes palatines postérieures, 61 %étaient isolées, 27 % étaient associées à au moins une autre malformation aveccaryotype normal et 12% s’intégraient à une anomalie du caryotype (4).

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REFERENCES

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La prise en charge des fentes labio-maxillo-palatines de 0 à 20 ans

Docteur Christian Paulus

RésuméLe traitement des états de fente faciale implique une approche d'équipe et est mieuxaccompli et organisé dans un centre spécialisé. À la fin d'une consultation prénatale, la syn-chronisation et les techniques de la chirurgie primaire sont expliquées. Le patient est alorssuivi annuellement à l’occasion de consultations multidisciplinaires. L'évaluation de laparole et les soins orthodontiques, la chirurgie plastique, et la réadaptation dentaire peu-vent, chacune, être organisées au bon moment.

Mots clés : fentes labio-maxillo-palatines, insuffisance vélaire, chirurgie maxillo-faciale,pharyngoplastie, traitement orthodontique

The treatment of facial cleft conditions from birth on to the age of 20

AbstractThe treatment of facial cleft conditions involves a team approach and is best accomplishedand organized in a specialized center. After completion of a prenatal consultation, the timingand techniques of primary surgery are described. The patient is then followed yearly throughmultidisciplinary consultations. Speech evaluation and orthodontic therapy, orthognathic andplastic surgery, and dental rehabilitation can each be organized at the right time.

Key Words : cleft lip, maxilla and palate, velar deficiency, maxillary-facial surgery, pharyn-geal plastic surgery, orthodontic treatment.

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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Docteur Christian PAULUSCentre de traitement des malformations facialesService de Chirurgie Maxillo-Faciale etStomatologie pédiatriquedu Professeur Maurice FREIDELHôpital Debrousse29 rue soeur Bouvier69005 LYONTel :+ 33 4 72 38 47 31fax :+ 33 4 72 91 62 [email protected]

I l s’agit d’une malformation congénitale liée à l’absence ou à l’insuffisanced’union des bourgeons de la face. Les formes importantes sont actuellementbien détectables lors des échographies obstétricales et les parents sont alors

orientés vers une consultation anté-natale dans le service de Chirurgie Maxillo-Faciale.

La pathologie affectant le domaine maxillo-facial, dentaire, O.R.L., laprise en charge doit être pluri-disciplinaire. Les enfants doivent être vus defaçon régulière par l’ensemble de l’équipe qui est composée du chirurgienmaxillo-facial, du dentiste, de l’O.R.L., de l’orthophoniste, de l’orthodontiste,éventuellement du psychiatre.

C’est au prix de ce suivi régulier et rigoureux que le résultat fonctionnelet esthétique sera le plus parfait possible.

� Embryologie

C’est à partir de la quatrième semaine de grossesse que les bourgeons dela face (bourgeon naso-frontal et bourgeon maxillaire) doivent fusionner à partirde l’emplacement de la future artère palatine antérieure. Cette fusion s’effectued’arrière en avant en ce qui concerne le palais primaire et ce de chaque côté dubourgeon naso-frontal. Une absence de fusion à ce niveau aboutira à une fentelabio-maxillaire plus ou moins complète.

L’insuffisance ou absence de fusion peut être droite ou gauche aboutis-sant le cas échéant à une fente labio-maxillaire droite et/ou gauche.

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Parallèlement, la fusion médiane entre les deux bourgeons maxillairess’effectue d’avant en arrière pour la constitution du palais et du voile du palais.Cette fusion également peut être interrompue à un stade plus ou moins avancé.Il en résulte une fente palatine plus ou moins complète.

� Formes cliniquesLes fentes situées en avant de l’artère palatine antérieure sont appelées

fente du palais primaire. Il peut s’agir de fente unilatérale ou bilatérale droite et/ougauche, qui peuvent être associées à une fente palatine plus ou moins complète.

Le palais primaire peut présenter une fente totale. Dans ce cas, il existeune fente labiale cutanée musculaire, muqueuse osseuse et alvéolaire, muqueuseet osseuse palatine antérieure.

Une fente partielle peut n’affecter que la lèvre avec, dans ce cas, unedéformation peu importante de l’aile narinaire et une encoche de l’os alvéolaire.

A l’extrême, il existe une simple irrégularité de la ligne cutanéo-muqueuse avec un diastasis du muscle orbiculaire de la lèvre. Celui-ci produitalors un renflement de chaque côté de la crête philtrale, alors remplacée par unerainure.

La fente palatine qui peut être ou non associée à une fente labiale uni oubilatérale plus ou moins complète, est appelée fente du palais primaire.

Dans le cas d’une fente complète, à partir de l’emplacement de l’artèrepalatine antérieure, il n’y a pas de palais osseux, ni muqueux, ni musculaire. Lesmuscles du voile du palais servant à la phonation ont une direction aberrante etdoivent être suturés dans la bonne position transversale lors de la fermeture chi-rurgicale. La fente palatine peut être plus ou moins complète et, à l’extrême,exister sous la forme d’une fente palatine sous-muqueuse.

Un pont muqueux alors peut se faire, camouflant ainsi l’existence d’unefente palatine.

Les enfants sont généralement adressés par la médecine scolaire pour desproblèmes phonatoires qui se révèlent être une insuffisance vélaire.

L’examen clinique permet dans 95 % des cas de voir une luette bifide, etsurtout de voir la disposition sagittale des muscles du voile du palais et leurnon-union dans le plan sagittal médian, une zone translucide au centre du palais,mais surtout, à l’examen clinique, la palpation met en évidence une encocheosseuse palatine à la place de l’épine nasale postérieure..

Malgré l’aspect apparemment normal, il s’agit d’une indication opératoire.

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� La prise en charge

Avant la naissance

Dès le diagnostic anténatal, les parents sont orientés vers le service de chi-rurgie maxillofaciale infantile. Ils y rencontrent le chirurgien et éventuellement lepédopsychiatre. Nous rassurons les parents à l’aide de notre banque d’imagesriche en photos d’enfants traités à différents âges. Nous ne montrons jamais dephotos préopératoires. Il faut donner une information claire et réaliste et nousinsistons sur le suivi régulier indispensable et ce, jusqu’en fin de croissance.

A la naissance

L’alimentation est en général possible au biberon. Une tétine très souplesans trop agrandir l’orifice est recommandée. Dans certains cas, la tétine deVeau (Victor Veau) ayant des ailettes latérales qui permettent de prendre appuisur les apophyses palatines juxtant la fente palatine est utile. Généralement laforce de succion ne suffit pas pour la prise au sein.

Le reflux alimentaire par le nez est régulier et ne doit pas être confonduavec une fausse route vraie. S’il s’agit cependant d’un syndrome de PierreRobin (microrétrognatisme, glossoptose et fente palatine), la situation peut êtredramatique à la naissance. En effet, la pathologie n’a pas pu être détectée àl’échographie anténatale et l’enfant présente à la naissance un arrêt respiratoireavec obstruction laryngée par la glossoptose et une insuffisance de maturité dutronc cérébral. Il existe une absence de réflexe de respiration, de succion et dedéglutition. La réanimation est extrêmement difficile car la glotte est quasimentinexposable. Les enfants présentant un syndrome de Pierre Robin sont transfé-rés en réanimation néonatale. Leur séjour se prolonge jusqu’à l’acquisitiond’une respiration et d’une alimentation spontanée.

La plaque palatine

Pour favoriser la prise alimentaire, la croissance du maxillaire et la ciné-tique de la langue, nous confectionnons une plaque palatine pour tous lesenfants présentant une fente palatine dépassant les bords postérieurs des lameshorizontales palatines. Dès les premiers jours de préférence, nous prenons uneempreinte du palais et nous faisons réaliser une plaque en matériau souple ther-moformable qui passe en pont sur la fente palatine. Ainsi la cavité buccaleprend une forme quasiment normale et la langue peut prendre ses appuis nor-maux. Sa forme suit la croissance de l’enfant. Elle doit être portée 24 H/24 H etnettoyée après chaque repas. Parfois, il faut avoir recours à la colle pour pro-thèses dentaires pour lui assurer une tenue adéquate.

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A l’âge de 3 mois

Nous proposons la véloplastie précoce à trois mois en cas de fente labio-maxillo-palatine et devant un syndrome de Pierre Robin.

Il s’agit de la reconstruction du voile du palais à l’aide des deux hémi-voiles existants. Nous ne touchons pas à la voûte palatine osseuse afin de ne pasentraver la croissance transversale de la face. La plastie labiale peut parfois êtreréalisée dans la même séance opératoire.

A l’âge de 4 mois

Devant une fente labiale isolée sans fente palatine, la reconstructionlabio-narinaire est réalisée à partir de 4 mois. Dans certains cas, la véloplastiepeut y être associée. Nous faisons, dans le même temps, la septoplastie et laplastie de l’aile narinaire.

A l’âge de 6 mois

La fermeture définitive des fentes labio-narinaires a lieu à cet âge si ellen’a pas été faite auparavant. Ce sont en particulier les fentes bilatérales dont lesdeux côtés doivent être réparés durant la même séance opératoire et dans uneséance différente que la réparation vélaire.

A 18 mois

Devant une fente palatine, la fermeture totale en un temps est réaliséeentre 12 et 18 mois.

A partir de 3 ans et demie

Un premier bilan orthophonique est demandé et, devant l’existenced’une insuffisance vélaire, une rééducation orthophonique est prescrite. Defaçon systématique, le bilan O.R.L. est fait à la recherche d’une otite séromu-queuse et d’un déficit auditif. Au moindre doute l’O.R.L. aura recours auxdrains transtympaniques. Compte-tenu de la fréquence des otites séromu-queuses, certaines équipes placent des drains transtympaniques de façon sys-tématique.

Devant des difficultés relationnelles et scolaires, une consultation depédopsychiatrie et dans certains cas de neuropsychologie s’impose.

Si en dernière année d’école maternelle il persiste une insuffisancevélaire, il est possible de proposer une pharyngoplastie. En effet, nous avonspour objectif que les enfants puissent intégrer l’école primaire avec une phona-tion normale.

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Si une communication bucco-nasale restante est très gênante pour l’ali-mentation et pour la phonation, celle-ci peut être fermée à titre isolé pendantcette période. Sinon, elle sera fermée à l’occasion d’une éventuelle pharyngo-plastie ou d’une greffe osseuse.

Entre 7 et 12 ans

Devant une fente uni ou bilatérale, nous avons pour objectif une arcadedentaire maxillaire continue avec si possible toutes les dents. Cette arcade doitse trouver sur un maxillaire supérieur en bonne position tant sur un plan sagittalvertical que horizontal et tranversal pour obtenir un résultat esthétique de l’en-semble du visage satisfaisant et ce, de face et de profil.

En fin de traitement, l’occlusion dentaire avec l’arcade dentaire mandibu-laire doit être de bonne qualité et stable.

Ainsi, il faut envisager un traitement orthodontique et une greffe osseusedurant cette première période sans perdre de vue qu’en fin de croissance ungeste chirurgical de chirurgie orthognathique pourra corriger la malposition desmaxillaires.

D’abord, l’orthodontiste élargit l’arcade maxillaire à l’aide d’un appareilpalatin amovible ou fixe. Quand la canine du côté de la fente est suffisammentdéveloppée, un greffon osseux alvéolaire peut être placé entre les fragmentsmaxillaires. Le prélèvement osseux peut s’effectuer sur l’aile iliaque ou sur l’ospariétal, il est alors totalement indolore.

Durant l’adolescence

Les patients doivent être vus tous les ans par l’équipe au cours d’uneconsultation commune permettant à l’enfant le moins de contraintes scolairespossibles. Le traitement est essentiellement orthodontique pour aligner l’arcadeet ménager l’espace de l’incisive latérale côté fente qui est souvent malforméeou absente. Elle sera remplacée au mieux par un implant dentaire placé dans lagreffe osseuse ou par une prothèse amovible ou non. Dans certains cas demacrodontie, les dents voisines peuvent être mésialisées orthodontiquement etainsi la canine remplace l’incisive latérale. Pour plus de perfection, elle aurabesoin d’une retouche de sa couronne afin de ressembler à une incisive latérale.

Dans certains cas de rétromaxillie majeure (supérieure à 10 mm), il estpossible de réaliser une avancée précoce du maxillaire supérieur. Ceci permet eneffet à l’enfant une adolescence bien plus agréable car la mastication est amélio-rée mais surtout l’effet disgracieux majeur de la rétromaxillie a disparu. Il fautcependant prévenir que le pic de croissance faisant, surtout chez le garçon, gran-

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dir la mandibule de façon considérable peut être à l’origine d’une récidive de larétromaxillie qui sera cependant toujours mineure. La technique consiste en laréalisation d’une ostéotomie de LEFORT I sans déplacement. L’hospitalisationcourte est suivie par le port d’un masque facial assurant la protraction progres-sive du maxillaire supérieur.

En fin de croissance

Parfois, l’appareil orthodontique peut alors être ôté jusqu’en fin de crois-sance. En effet, il est très important de réaliser le traitement chirurgico-ortho-dontique, s’il doit avoir lieu, avant d’envisager une chirurgie plastique naso-labiale. L’amélioration considérable de la région naso-labiale consécutif à lacorrection du « prognathisme » par rétromaxillie a, dans un bon nombre de cas,permis de surseoir à la révision naso-labiale. En prévoyant une ostéotomie leplus souvent bimaxillaire en fin de croissance, le traitement orthodontique estrepris et après alignement dentaire maxillaire et mandibulaire tenant compte deleur position post-opératoire, l’ostéotomie peut alors être programmée. Celle-cicomporte dans les cas les plus fréquents de séquelles de fentes labio-maxillo-palatines, une ostéotomie maxillaire de Lefort I avec un mouvement d’avancéeassocié dans certains cas à une ostéotomie sagittale des branches montantes derecul. Durant cette intervention, la déviation de la cloison nasale peut être par-tiellement traitée et une éventuelle insuffisance de perméabilité des fossesnasales peuvent être traitées.

Le traitement orthodontique se termine idéalement dans l’année qui suitet 6 mois après la chirurgie orthognathique, la révision labio-narinaire peutavoir lieu. Elle reconstruit les muscles orbiculaires de la lèvre et du nez et vise àobtenir une symétrie dans les ailes narinaires.

� ConclusionLe traitement des fentes labio-maxillo-palatines est un traitement en

équipe faisant intervenir les différents acteurs au bon moment. La chronologiedu traitement en France est encore discutée et peut varier d’une équipe à l’autre.Un suivi régulier durant toute la croissance permet d’obtenir une vie normalepour la grande majorité des enfants.

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Le traitement de l’enfant porteur de fente vélopalatine : rôle de l’orthophoniste dans l’équipepluridisciplinaire

Chantal Talandier, Bernard Pavy, Jacques Huart, Aurélie Majourau

RésuméA l’hôpital Saint-vincent-de-Paul, nous poursuivons, en équipe pluridisciplinaire, l’objectif debons résultats esthétiques et phonétiques pour la bonne intégration familiale et sociale detous les enfants porteurs de fente labio palatine.Mots clés : équipe pluridisciplinaire, résultats esthétiques et phonétiques, intégration fami-liale et sociale

Treatment of cleft palate conditions in children : the role of the speechand language therapist as a member of the multidisciplinary team.

AbstractAt Saint Vincent-de-Paul Hospital, the very hospital where Suzanne Borel worked, our pre-sent multidisciplinary team tries to work towards the same objectives of excellency in termsof esthetic and speech results, in order to facilitate family and social integration of cleft lipand palate patients.

Key Words : multidisciplinary team, esthetic and speech results, social and family integra-tion.

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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Chantal TALANDIEROrthophonisteAttachée de consultationBernard PAVY, Jacques HUART, Aurélie MAJOURAUÉquipe multidisciplinaire de réparation desfentes labio palatinesHôpital Saint Vincent-de-Paul 74 à 82, avenue Denfert Rochereau75674 Paris Cedex 14

ASt Vincent de Paul, poursuivant l’exemple donné par Victor Veau etSuzanne Borel-Maisonny, le chirurgien plasticien réparateur des fentes atenu à organiser la consultation avec une équipe pluridisciplinaire, à

laquelle appartiennent de façon constante, le chirurgien, l’orthophoniste,l’O.R.L.-audiométriste, l’orthodontiste, et, de façon éventuelle, l’échographiste,le généticien, le pédopsychiatre.

Lors de toute consultation, la présence du chirurgien, de l’orthophoniste,de l’O.R.L, et de l’orthodontiste permet d’apporter à l’enfant porteur de fente età sa famille les soins appropriés.

L’enfant n’a pas systématiquement rendez-vous avec tous, mais chacundes intervenants peut demander un avis à tel autre membre de l’équipe.

Cette consultation a lieu au même moment, dans un bureau commun,avec des échanges permanents entre les différents membres de l’équipe. Seule,l’orthophoniste, pour des raisons de meilleure écoute de la parole des patients setrouve dans le bureau voisin mais la porte de communication entre les deuxbureaux s’ouvre fréquemment. Ainsi, chacun des membres de l’équipe peutdemander un avis, envisager un examen complémentaire, discuter de la conduiteà tenir, et prendre une décision bien adaptée.

La personnalité du chirurgien a établi une conception implicite du rôleprépondérant de chacun à la réussite du traitement, qui efface la pesanteur d’unehiérarchie, et réalise ainsi une véritable équipe multidisciplinaire.

Lors de la 1ère visite après le diagnostic anténatal de fente, le chirurgienaccueille les parents et leur présente les membres de l’équipe, expliquant lerôle essentiel de chacun auprès de l’enfant, que ses soins soient préventifs oucuratifs.

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L’importance du rôle de chacun est respectée et toute modification ducalendrier est approuvée par tous les membres de l’équipe.

Ainsi, le chirurgien est toujours sensible aux justifications orthopho-niques d’une fermeture vélaire avant la modulation phonémique, à celles del’O.R.L qui souhaite que les muscles aérateurs de la caisse soient fonctionnels, àcelles de l’orthodontiste qui choisit de débuter son traitement.

� Le volet chirurgical

Le calendrier thérapeutique

Pour la fente unilatérale.La lèvre et le nez sont opérés soit en néonatale soit à l’âge de 1 mois.Le palais est fermé à 6 mois. Lorsque l’enfant est vu plus tard, la lèvre etle palais sont opérés en un temps.Pour la fente bilatérale (figure),

la réparation de la lèvre se fait en deux temps : Premier côté au cours du premier moisDeuxième côté traité à 3 ou 4 mois en même temps que la division palatine.

Ainsi la blessure narcissique supportée par la famille devant la malforma-tion est écourtée lors de la fermeture précoce de la lèvre.

Bien que le diagnostic anténatal de la fente labio-palatine ait modifiécomplètement le comportement des parents qui nous disent parfois : « à la nais-sance nous avons reconnu notre enfant comme nous l’attendions », nous pou-vons encore citer Victor Veau :

« C’est qu’à cette opération de la lèvre, les parents eux-mêmes nouspoussent et nous devons presque toujours modérer leur impatience ; ils ne peu-vent supporter la laideur de leur enfant. »

La lèvre réparée est souple, de bonne qualité tissulaire, de bonne hauteur.L’enroulement narinaire est reconstruit dans le même temps.

La fermeture de palais est toujours effectuée à 6 mois.

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Cette date de la staphylorraphie était différée à 18 mois pour Victor Veauet Pierre Petit.

L’évolution de notre société a modifié le comportement de la famille. Lebébé ne vit plus à l’écart, dans une chambre silencieuse, il participe très rapide-ment à la vie familiale et bénéficie de sollicitations multiples, visuelles etsonores qui l’incitent à babiller. La réparation du voile à 6 mois le met doncdans de bonnes conditions d’apprentissage de sa langue maternelle.

Pour quelques enfants qui présentaient de troubles otologiques récurrents,nous avons dû procéder à une fermeture vélaire plus précoce, à 3 mois.

Nous n’avons pas observé, pour ces enfants, un développement phoné-tique plus précoce ou de meilleure qualité que pour ceux qui sont opérés à 6mois, ce qui nous a confortés dans le choix de notre calendrier.

La fermeture du voile, après celle de la lèvre, permet toujours un meilleurrecul du voile, avec un pusch-back, la fonction vélaire peut être mieux assurée.

Le geste chirurgical, la staphylorraphie, reconstruit un voile anatomique, avecune cicatrice médiane discrète. Ce voile est long, bien mobile et assure sa fonctionspontanément, sans qu’il soit nécessaire de prescrire une rééducation phonétique.

� Le volet orthophonique

Le rôle de l’orthophoniste : conseil et prévention

Ce calendrier chirurgical permet à l’enfant de se trouver dans les condi-tions les plus favorables pour que se mette en place, à partir de 6 mois, sa paroleet son langage.

Le rôle de l’orthophoniste est donc limité à un rôle de conseil et de pré-vention, d’accompagnement de l’enfant et de sa famille.

L’intégration sociale et familiale de l’enfant porteur de fente faciale est lapriorité absolue de notre équipe. Elle s’appuie sur la restitution précoce d’unaspect esthétique et l’acquisition d’une phonation de qualité. Ceci définit l’impor-tance du rôle de l’orthophoniste dans la prise en charge de l’enfant de 1 à 5 ans.

Après la réparation chirurgicale de la lèvre et du voile, l’orthophoniste vasurveiller et évaluer la mise en place du système phonétique de l’enfant, et sonévolution langagière. Elle s’assure toujours de la bonne audition de l’enfant,condition d’une bonne acquisition du langage. L’O.R.L exerce une surveillanceotologique et audiométrique et traite les otites séro muqueuses. (56% desenfants porteurs de F.V.P ont besoin de drains transtympaniques.)

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Les enfants opérés par Victor Veau et Pierre Petit étaient revus parSuzanne Borel-Maisonny à 5 ans, les parents ayant reçu, après la staphylorra-phie à 18 mois, une feuille de conseils pour développer le souffle de leur enfant.

Les modifications du calendrier chirurgical et l’évolution de l’éducationdes enfants nous ont amenées, dès les années 70, à assurer une consultation desjeunes enfants, à la fin de la première année, pour accompagner les parents etexercer une action préventive. Une information continue auprès des parents,surtout, nous a semblé indispensable, dans une société si sensible aux informa-tions multiples dans le domaine médical.

Cette guidance éducative vise à rassurer les parents dans l’importance deleur rôle. Tout en établissant une relation de confiance avec eux, elle déculpabi-lise ceux qui ont été très blessés par la malformation de leur enfant.

Cette consultation orthophonique, semestrielle, jusqu’à 4 ou 5 ans permetdans la petite enfance de s’assurer de la qualité des sollicitations des personnesqui élèvent l’enfant.

Après une information sur la fonction du voile du palais et son rôle dansle système phonétique, l’accent est mis sur le développement normal de laparole, les parents doivent savoir qu’eux seuls apprendront à parler à leurenfant, et que, sous prétexte de la malformation, ils ne seront pas spoliés de cetapprentissage de la langue maternelle à leur enfant, quelle qu’elle soit, par untechnicien du langage.

Il est particulièrement important de rassurer ainsi les parents non franco-phones, qui sont incités à utiliser, sans restriction, leur langue maternelle.

Puis, au fur et à mesure du développement de l’enfant, on contrôle l’ins-tallation du phonétisme, des occlusives puis des fricatives et leur combinatoiredans la parole. L’apparition de l’occlusive sourde bilabiale a une valeur prédic-tive d’un bon fonctionnement vélaire.

L’inventaire du premier lexique spontané en manipulant des petits jouets,puis, l’observation de la construction progressive du langage, tels que nous lesconnaissons, permettent de noter l’évolution langagière de l’enfant.

Tandis que sont contrôlées les structures morphosyntaxiques de com-plexité croissante, les progrès langagiers sont explicités pour les parents, lesconfortant dans leur rôle et leur responsabilité « banale » de parents d’un enfant« ordinaire ». Leur attention est attirée sur le fait que la compréhension précèdetoujours l’expression et qu’ils doivent y être sensibles, alors même que l’enfantne fait que balbutier. Des exemples de compréhension réelle, hors facilitationcontextuelle, sont proposés.

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L’accès au jeu symbolique, les premières acquisitions cognitivo-concep-tuelles sont commentés pour les parents.

Une attention toute particulière est accordée à l’évaluation du timbre,dans toutes les stratégies de parole.

La notion de retard de langage, attachée à la pathologie des fentes labio-pala-tines, n’est pas retrouvée dans la cohorte des enfants que nous suivons depuis 1970.Notre statistique rejoint en effet celle de la population sans fente, c’est-à-dire 15%.

Nous attribuons cette absence de retard de langage à un faisceau « multifactoriel » :

� La qualité du résultat esthétique et fonctionnel de la réparation chirurgicale ;

� Le contrôle de l’audition, et la mise en place éventuelle de drainstranstympaniques ;

� La guidance éducative précoce, et la fréquence de la consultationorthophonique ;

� Son rôle affiché d’accompagnement ;� Le refus de recourir à un traitement particulier en rapport avec

la pathologie.

En effet, lors de ces consultations, les parents ne sont pas incités à sollici-ter la musculature labiale, à pratiquer des exercices spécifiques de souffle,de mouchage, de motricité oro-faciale. En un mot, aucun autre rôle n’estdemandé aux parents que celui d’être des parents.� Cette attitude non « pathologisante » a sûrement rasséréné les parents

et fait en sorte qu’ils ont acquis la conviction que, la fente étant répa-rée, sans préjudice esthétique ou fonctionnel, leur enfant est tout à faitnormal, et qu’il ne requiert pas un traitement particulier ou une priseen charge orthophonique systématique.

Les consultations s’espacent ensuite, à 6 ans, 7 ou 8 ans, au cours desquelleson s’assure que les apprentissages de l’écrit se mettent correctement en place.

Un contrôle est proposé à la puberté pour s’assurer qu’une croissance har-monieuse du voile et du cavum permet de conserver l’étanchéité attendue lorsde la parole et par là, la persistance d’un timbre correct.

À vingt ans, un bilan sera effectué par chacun des membres de l’équipe.

Qu’en est-il de la rééducation ?

Les indications de rééducation orthophonique sont posées à l’âge requispour le traitement des troubles d’articulation, vers 5 ans.

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Le recours à une rééducation très précoce de l’articulation, peut conduireà une fixation des troubles compensatoires, et nous n’en sommes pas partisans.

Le voile est d’emblée fonctionnel et les phonations marquées par la nasalitésont rares. Selon le principe de bon sens de Bernard Pavy, « en cas de défaut dans latechnique, une cicatrice fibreuse peut apparaître, et tous les efforts de l’orthophonistesont vains. », nous ne prescrivons pas de rééducation au long cours pour un voileanatomiquement incompétent, et nous posons alors une indication chirurgicale.

Les troubles d’articulation des consonnes.De tous les troubles lourds décrits par Suzanne Borel, peu subsistent

actuellement. Seuls se rencontrent quelques défauts atteignant les consonnes anté-

rieures.

L’atteinte des consonnes sifflantes est devenue rare. Si elle est induite parune brèche, elle justifiera une rééducation de courte durée qui sera interrompuesi le résultat n’est pas obtenu, remettant à plus tard sa rééducation, lors du traite-ment sur la denture mixte.

La postériorisation des occlusives, K-G pour T-D, souvent, mais pas sys-tématiquement associée à la persistance d’un pertuis au niveau du foramen inci-sif, par une procédure d’évitement de ce pertuis rétro incisif, se rencontre plusparticulièrement chez les F.B.T, elle sera rééduquée avec attention, son inci-dence sur le lexique créant des quiproquos désagréables.

Les articulations compensatoires.Les mécanismes vélo pharyngés de compensation, essentiellement le

coup de glotte, car peu d’autres mécanismes rencontrés antérieurement subsis-tent, sont devenus rares (1%).

La nasalité.La qualité de la réparation vélaire a permis de supprimer toute incitation

systématique à faire pratiquer à l’enfant des jeux ou de véritables exercices desouffle buccal.

Cependant, l’incompétence vélaire pour 5% des cas opérés, est évaluéedès 2 ans, un programme de jeux de souffle est alors proposé : il sera toujoursconfié aux parents et contrôlé trimestriellement.

Nous évaluons à 10% le recours à une chirurgie secondaire, type pharyn-goplastie et nous observons qu‘elle est souvent la séquelle d’une brièvetévélaire congénitale que la staphylorraphie n’a pu entièrement corriger dans lepremier temps chirurgical.

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Lorsque le voile est insuffisant à réaliser une PHI, la pharyngoplastie estprogrammée vers l’âge de 5 ans. Un examen objectif de l’incompétence vélaire,la vélovidéoscopie, pratiquée par l’orthophoniste, est une aide à la décision chi-rurgicale.

Bien entendu, les enfants qui présentent des fentes palatines syndro-miques, catch 22, etc., avec troubles associés, sont traités selon leurs différentespathologies.

Lors des rares indications d’adénoïdectomie ou d’amygdalectomie, l’or-thophoniste, avec l’O.R.L, fera une évaluation attentive de la phonation en postopératoire.

Par ailleurs, la cohorte des patients qui présentent une incompétence vélopharyngée, I.V.P, nous est adressée par des orthophonistes de ville. Le recours ànotre plateau technique, examen clinique de spécialistes, examen objectif avec lavidéoscopie vélo pharyngée et l’endoscopie nasale répond à leurs attentes pour lesdivisions sous-muqueuses, D.S, les I.V.P anatomiques et les voiles neurologiques.

Les entretiens que l’orthophoniste conduit avec les parents visent aussi àcontrôler les habitudes de vie de l’enfant, sommeil, alimentation… À ce propos,dans les habitudes alimentaires de l’enfant, on veillera à déceler une prise trop

(Radiographies d’IVP primaires de type malformatif ou neurologique : prononciation d’un « A ».)

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importante de boissons sucrées et autres friandises, c’est le « syndrome du bibe-ron ». L’orthodontiste, alerté, viendra exposer aux parents du jeune enfant, et àl’enfant lui-même, dès que c’est possible, la nécessité de réduire sa consomma-tion de sucre et de se familiariser avec une hygiène bucco-dentaire rigoureuse.Cette consultation de pédodontie de la petite enfance, qui évite tout délabrementdentaire, est préalable à tout traitement orthodontique, celui-ci ne commenceraque vers l’âge de 8 ans sur la denture mixte.

Le contrôle du positionnement lingual et l’indication de rééducationseront faits en rapport avec le traitement orthodontique qui comprend deuxphases :

Première phase de ce traitement

Mise en place d’un dispositif d’expansion maxillaire fixe avec quad’hélixou disjoncteur. Greffe osseuse, qui donne une stabilité maxillaire permettant lesimplants dentaires.

Deuxième phase

Traitement orthodontique multi attaches.

Ainsi, suivons-nous dans le même lieu les préceptes de nos maîtres VictorVeau et Suzanne Borel-Maisonny, en ayant, comme ils l’avaient prédit, encoreamélioré leurs résultats.

Nos travaux et nos recherches sont présentés lors des Journées de St Vin-cent de Paul que notre équipe pluridisciplinaire organise depuis huit ans. Nous yavons le souci de réunir les équipes francophones pour échanger nos points devue, et rechercher de façon constante l’amélioration du traitement desenfants porteurs de F.V.P.

C’est ainsi que :

Le chirurgien plasticien a perfectionné sa technique chirurgicale pourobtenir une lèvre qui réalise au mieux le canon esthétique et pour reconstruireun voile long et mobile qui permette une phonation d’emblée normale. Lenombre limité des interventions et le choix attentif des dates opératoires, pour lachirurgie secondaire, a permis de supprimer l’absentéisme scolaire, responsablede retard dans les études que l’on évaluait à un ou deux ans, dans les années1970, et qui n’existe plus.

L’O.R.L surveille et traite les problèmes otologiques des petits enfants,responsables d’hypoacousie, pour qu’il n’y ait pas d’entrave à leur acquisitiondu langage.

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L’orthodontiste apporte à l’équipe le bénéfice des plus récentes tech-niques odontologiques. Son suivi et ses conseils incitatifs auprès de confrères deprovince permettent à l’enfant d’être traité dans sa région.

N’ayant que peu de rééducations à prescrire, l’orthophoniste limite sonrôle à celui d’une surveillance préventive, mais elle offre à l’équipe des élémentsdécisionnels avec les examens clinique et phonétique mais aussi para clinique,comme la vélo vidéoscopie qui donne des images cinétiques plus informativesque la radiographie vélo pharyngée à laquelle j’avais recours antérieurement, telleque me l’avait enseignée Suzanne Borel-Maisonny.

Ainsi, chacun des membres de l’équipe pluridisciplinaire a, dans sondomaine, apporté les derniers progrès de sa technique, ce qui a permis de traiterla fente en limitant les inconvénients du traitement, tout en conservant une vienormale à l’enfant.

Mais nos objectifs restent toujours ceux de V. Veau et S.Borel, la qualitédu résultat esthétique et la qualité de la phonation, car nous pensons que l’inté-gration familiale et sociale de l’enfant se fait par la qualité de ces résultats.

Nous refusons de considérer l’enfant porteur de fente faciale commeun handicapé et nous tenons à l’élever comme un enfant normal. Cette attitude apour effet de minimiser la malformation et d’intégrer, le plus vite possible et lemieux possible, l’enfant dans son milieu familial puis scolaire.

Notre équipe pluridisciplinaire a toujours le souci de ne pas seulementtraiter une fente, mais de considérer et de suivre l’enfant dans sa globalité,tout au long de sa croissance. Quand nous voyons la belle assurance des adoles-cents de vingt ans, nous sommes sûrs d’avoir atteint notre objectif, en équipe etavec leur famille, en leur donnant les moyens de réussir leur intégration socialeet professionnelle.

REFERENCES

TALANDIER C., (1991) L’incompétence vélo pharyngée. Glossa.

PAVY B, TALANDIER C. HUART J. MAJOURAU-BOURIEZ A. MITROFANOFF M., (2002) Fenteslabiales et palatines : la prise en charge de l’équipe de Saint Vincent-de-Paul, Annales de Chirur-gie Plastique Esthétique 47 pp280-285 Elsévier

PAVY B., VACHER C., VENDROUX J., SMARRITO S. (1998) Techniques chirurgicales-chirurgie plas-tique reconstructrice et esthétique. Encyclopédie Médico-Chirugicale. 45-580.

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Fente palatine sous-muqueuse

Christian Paulus, Marielle Laurent

Résumé

Le diagnostic de fente palatine sous-muqueuse est souvent évoqué par l’orthophoniste qui aen rééducation un enfant pour une insuffisance vélopharyngée. Devant une relative ineffica-cité d’une rééducation bien menée avec persistance de fuite d’air dans le nez lors desconsonnes explosives, une consultation auprès d’un centre de traitement des fentes pala-tines est alors demandée. Après un diagnostic précis, ajoutant à l’examen clinique et aubilan orthophonique, la radiologie et l'endoscopie nasale un plan de traitement est alors pro-posé. Celui-ci comporte une association entre préparation orthophonique, chirurgie vélo-pharyngienne puis une rééducation orthophonique post-opératoire.

Mots clés : fente palatine sous-muqueuse, insuffisance vélopharyngée, muqueuse vélaire,rééducation orthophonique

Submucous cleft palate

AbstractThe diagnosis of submucous cleft palate is often suspected by speech therapists who treatchildren with velo-pharyngeal incompetence (V.P.I.)

When a well conducted remedial treatment program does not succeed in controlling nasalair-flow during the production of explosive consonants, the child should be referred to a spe-cialised centre for an assessment. After a comprehensive clinical and paraclinical evalua-tion, a treatment plan is established including pre and post operative speech therapy andvelopharyngeal surgery.

Key Words : submucous cleft palate, velo-pharyngeal incompetence, velar mucous mem-brane, speech and language therapy.

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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Christian PAULUS, MD Marielle LAURENTCentre de traitement des malformations facialesService de Chirurgie Maxillo-Faciale et Stomatologie pédiatriqueHôpital Debrousse29 rue Soeur Bouvier69005 LYONTel :+ 33 4 72 38 47 31fax :+ 33 4 72 91 62 [email protected]

S’il est quasi impossible de faire le diagnostic de fente palatine sous-muqueuse à la naissance �, ce diagnostic doit être évoqué plus tard lorsde l’apprentissage de la phonation. La fuite d’air dans le nez est le signe

qui alerte ou l’orthophoniste ou l’oto-rhino-laryngologiste. La famille a alorsremarqué des passages fréquents d’aliments dans les fosses nasales lors de l’ali-mentation au biberon (appelées « reflux nasal ») ou à l’occasion de vomisse-ments.

� Etiologie EmbryologieLa fente palatine résulte de l’absence de fusion entre les bourgeons

maxillaires. Celle-ci doit normalement se produire entre la quatrième et la hui-tième semaine de grossesse, d’avant en arrière à partir du canal palatin antérieur.

En cas de fente palatine, il n’y a pas eu de fusion du tout. Dans la fente pala-tine sous muqueuse, la fusion a été presque complète. Il persiste toujours une insuf-fisance de soudure osseuse palatine qui sera palpable. Les muscles du voile n’ontpas pu s’unir sur la ligne médiane et gardent une direction presque sagittale incom-patible avec une bonne fonction vélaire. Sur la ligne médiane, les muqueusesvélaires antérieures et postérieures sont accolées sans l’interposition ni de l’aponé-vrose du voile, ni des muscles. De ce fait, cette zone a l’air translucide �.

� DiagnosticLe diagnostic repose sur un faisceau d’arguments concordants � compre-

nant toujours le même type de chronologie avec une certaine période de tâton-nement diagnostique, un examen clinique, une endoscopie nasale et une radio-

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graphie du voile du palais.

Chronologiquement, l’enfant est le plus souvent adressé chez l’orthopho-niste à l’initiative de la maîtresse ou des parents. L'intelligibilité est alors plusou moins bonne.

L’orthophoniste note alors des signes évidents d’insuffisance vélopharyn-gée (IVP). Le bilan phonétique fait état de troubles articulatoires spécifiquesd’IVP, des coups de glotte sont notés sur les explosives, des souffles rauques surles constrictives, ou bien dans certains cas l’articulation des phonèmes estaccompagnée d’un souffle ou d’un ronflement nasal mis en évidence sur lemiroir de Glatzel placé sous les narines. Les types de phonations se répartissentselon la classification de Borel-Maisonny entre type III ou IIm.

Une rééducation orthophonique est alors décidée (cf. infra).

Après 6 mois de rééducation, une amélioration a été remarquée mais lesprogrès stagnent nettement.

L’avis d’un centre de traitement des fentes labio-palatines est alorsdemandé.

A l’examen clinique, on peut noter les signes suivants :- luette bifide (90 % des cas)- zona pellucida avec renflements latéraux sagittaux des muscles vélaires.

En examinant le voile sous un bon éclairage, il existe une zone sagittalecentrale qui semble déprimée « pellucide ». De chaque côté, se trouvent lesvoussures obliques en avant et en dedans des muscles vélaires (levator et tensorvelipalatini, palatoglosse et palatopharyngien). Leurs fibres ont une directiontrès sagittale et non pas transversale. Cette configuration provoque lors de la

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contraction non pas uneascension du voile, mais unraccourcissement.

- encoche osseuse palatineau lieu de l’épine nasalepostérieure. Le doigt del’examinateur suit d’avanten arrière la ligne médianepalatine. Il note que le bordpostérieur des lames hori-zontales des os palatins seprésente sous la forme d’unV à pointe antérieure au lieud’une épine centrale posté-rieure (épine nasale postérieure). Ce signe existe dans 100% des cas.

La naso-fibroscopie permet de constater une insuffisance d’occlusionvélopharyngée.

La radiographie du voile du palais est réalisée de profil avec des rayonsmous. Deux prises de vue sont nécessaires : l’une au repos, l’autre en pronon-çant la voyelle « i ». La longueur du voile peut être appréciée mais surtout samobilité. Lors de la contraction, l’image du voile doit toucher celle de la paroipharyngée postérieure.

� Conduite à tenirL’objectif premier du traitement est la correction de l’insuffisance

vélaire. D’abord est entreprise une rééducation orthophonique centrée sur lesexercices de souffle qui seront dans un premier temps à visée purement mus-culaire. Ils essayent d’obtenir la fermeture du rhinopharynx en excluant lepassage d’air dans le nez (gonfler des ballons de baudruche est un bon exer-cice). En cas d’impossibilité, la solution est de boucher le nez puis progressi-vement quand le mécanisme est mieux compris, il est recommandé de conti-nuer l’exercice nez ouvert.

Dans un deuxième temps, on pourra visualiser le souffle buccal lors de l’ar-ticulation des explosives ou des constrictives en soufflant sur de petits morceaux depapier ou de coton (là aussi l’exercice pourra se faire nez bouché puis nez ouvert).

Si au terme d’une rééducation bien conduite, la phonation n’a pas atteintle type I qui est l’objectif, une indication chirurgicale est posée. Celle-ci

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consiste en une ouverture de la fente palatine à travers la zona pellucida. Lamuqueuse vélaire postérieure est alors reconstruite. Les muscles du voile sontdisséqués et transversalisés. Selon les auteurs, l’intervention se termine par unepharyngoplastie ou par une fermeture simple vélaire antérieure. Personnelle-ment, nous avons opté pour la première solution avec une pharyngoplastie àpédicule inférieur. La remise en bonne position des muscles du voile (levator ettensor velipalitini) améliore l'aération de la trompe d'Eustache. Les otitesdeviennent alors moins fréquentes.

Il est bien entendu recommandé de ne pas faire d'adénoïdectomie.

La prise en charge commence en général par la rééducation orthopho-nique compte tenu des conditions tardives de découverte de la fente palatinesous-muqueuse. L’âge de la chirurgie se situera juste avant l’entrée au courspréparatoire. Idéalement, après rééducation orthophonique et intervention chi-rurgicale, la phonation devrait être devenue de type I.

� ConclusionLa fente palatine sous-muqueuse est de diagnostic aisé quand elle a été

évoquée. Avec une prise en charge orthophonique énergique associée éventuel-lement à une intervention chirurgicale, le pronostic devrait être bon.

REFERENCES

1. Bowen D.G. ; Lehman J.A. ; Neiman G.S. 1997: Management of submucous cleft palate. Transactions8th Congress on cleft palate and related craniofacial anomalies. Singapore 7-12 Sept.

2. Somerlad B. ; Harland K. ; Sell D. ; Birch M. ; Fenn C. 1997: Submucous cleft palate - A review of 40patients. Transactions 8th Congress on cleft palate and related cranio-facial anomalies. Singa-pore 7-12 Sept.

3. Ã Velasco M.G. ; Ysunza A.. Hernandez X. ; Marquez C. 1988 : Diagnosis and treatment of submucouscleft palate : a review of 108 cases. Cleft palate J; 25(2) : 171-3.

4. Õ Huet P. : Evaluation de la fonction vélaire après pharyngoplastie à pédicule inférieur au moyen del'aérophonoscope II C. 1993 : Thèse Médecine Nantes.

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Un examen para clinique : La vidéoscopie vélo pharyngée

Chantal Talandier

RésuméUn examen para clinique, la vidéoscopie vélo pharyngée, permet à l’orthophoniste d’un ser-vice de traitement des fentes palatines de trouver des informations complémentaires àl’examen clinique et phonétique. Les images du comportement vélaire dans les stratégiesdiverses de la parole, permettent d’affiner le diagnostic et les indications thérapeutiques.Mots clés : vidéoscopie vélo pharyngée, incompétence vélo pharyngée, voile neurologique.

A paraclinical examination : soft palate evaluation through video imaging techniques

AbstractSpeech therapists can use velovideoscopic approaches to complete the clinical examinationand speech evaluation. Soft palate evaluation by video imaging gives valuable complemen-tary information to the speech therapist and allows him to sharpen his diagnostic and treat-ment strategies.Key Words : Video imaging examination, neurological soft palate, Soft palate insufficiency.

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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Chantal TALANDIEROrthophonisteHôpital Saint-Vincent-de-Paul74 à 82, avenue Denfert Rochereau75674 Paris Cedex 14

C’est un examen objectif qui complète l’examen clinique et phonétique dusujet présentant une incompétence vélo pharyngée, I.V.P.

Depuis de longues années et dans le sillage de Suzanne Borel-Maisonnyqui m’en avait donné la curiosité, j’avais recours à la radiographie pour évaluerl’occlusion vélo pharyngée.

Les plans fixes permettent d’évaluer le comportement vélaire et d’appré-cier la lumière pharyngée, mais le fonctionnement du voile n’est alors saisi quedans les phonèmes d’épreuve : voyelles et fricatives qui ont une durée de leurtenue.

Mais avec la vidéoscopie vélo pharyngée les informations sont multipleset très intéressantes.

� Caractéristiques

Simplicité de l’examen :

- pas d’absorption de solution de contraste

- légère immobilisation de la tête

- âge : à partir de 4 1/2 ans d’âge mental et parfois 3 1/2 ans

- durée brève de l’examen : moins d’une minute.

- résultat immédiat

Le protocole phonétique :

La répétition de phrases à dominante, occlusive ou fricative, sourde ousonore ; mais surtout une séquence de parole plus spontanée, quelques phrasesde poésie ou de chanson qui donnent une image du réel fonctionnement vélairequotidien.

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Toxicité réduite :

- irradiation équivalente à celle d’un t.o.g.d.

beaucoup moins irradiante que le radio cinéma abandonné pour cette raison.

Lecture et interprétation :

- immédiate

- partagée par les parents que je fais assister à l’examen.

En effet, s’il y a suspicion de dysfonctionnement vélaire et indicationprobable d’un geste chirurgical, il est préférable de montrer et d’expliquer cesimages aux parents.

Quelques explications préliminaires leur permettent d’identifier lalumière pharyngée. Ils visualisent le dysfonctionnement vélaire et sont convain-cus, de facto, de la nécessité d’une intervention chirurgicale de réparation.

En revanche, si je conclus à une incompétence mineure, les parents sontheureux d’apprendre qu’une rééducation orthophonique ou la pratique d’un ins-trument à vent sera suffisante pour effacer la nasalité.

� Les données de la vidéoscopieLa vidéoscopie vélo pharyngée procure des informations multiples dont

la radiographie ne m’avait donné qu’un faible échantillon.

On est surpris par l’extrême variabilité du système musculaire de cesvoiles pathologiques.

Car la vidéoscopie pendant la parole permet d’apprécier non seulement lerapport d’occlusion voile/cavum, tel que le donnait la radiographie, mais fournitdes renseignements précieux quant au fonctionnement et au dysfonctionnementdu voile et de la paroi.

Le voile

On peut évaluer :

- l’ascension vélaire ;

- le contact ou l’absence de contact avec la paroi pharyngée ;

- la hauteur de ce contact : surprise de trouver des contacts anormalementbas de moignons vélaires avec la paroi ;

- l’obliquité fréquente du voile, en déclive inverse de ce que l’on trouvechez l’enfant sans D.P. alors que nous attendons une horizontalité vélaire ;

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- l’absence de genou vélaire, bien marqué à 90° ;

- la vitesse de contraction ;

- l’absence de contraction limitée à certains phonèmes, ou constante ;

- un comportement dichotomique de la face buccale du voile, qui a puparaître atone à l’examen clinique, et de sa face nasale qui se contractefortement pour tenter de rejoindre la paroi pharyngée ;

- une fermeture inconstante ;

- un comportement vélaire anarchique, tel celui que nous avons observéchez un enfant bien opéré par René Malek : le voile ne se contractaitjamais pendant la parole et avait un comportement absolument normaldans le jeu de hautbois ;

- une atteinte neurologique.

La paroi

Lors de l’examen clinique, on peut observer :

- les contractions de la paroi ;

- l’effacement des gouttières latérales, effet de rideau ;

- parfois le bourrelet de Passavant, toujours trop bas pour être efficace,fonctionnel.

Avec la vidéoscopie, on observe, chez certains enfants, une contractionimportante de la paroi, à l’alignement du sommet de l’atlas. La paroi se porteau-devant du voile, et dans certains cas, elle participe à l’occlusion de façonessentielle.

La vidéoscopie vélo pharyngée permet d’observer également :

- les anomalies de la déglutition quand le voile est insuffisant.

- le coup de glotte : on est frappé par la violence de la base de la languequi cogne contre la paroi.

� L’indication de vidéoscopie vélo pharyngée est requise :- pour étayer un diagnostic d’I.V.P. avec un examen objectif ;

- pour donner un diagnostic quand plusieurs thérapeutes se contredisent ;

- pour comprendre le fonctionnement vélaire ;

- pour démontrer aux parents, après une éducation vélaire, son insuffisance ;

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- pour donner au chirurgien des informations sur les anomalies fonction-nelles ;

- pour éviter une rééducation orthophonique inutile.

� Les limites de la vidéoscopie vélo pharyngée.- dans les cas d’asymétrie vélaire, si elle n’a pas été décelée à l’examen

clinique, elle doit être suspectée quand l’image de vidéoscopie est cor-recte alors que la nasalité est flagrante ;

- quand la pharyngoplastie donne des résultats insuffisants chez un patientneurologique ;

nous avons recours à l’endoscopie nasale pratiquée par le chirurgien oul’O.R.L. et commentée à trois.

La présentation de films de ces enregistrements vidéoscopiques offre unedocumentation intéressante aux orthophonistes.

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Les pharyngoplasties dans le traitement de l’insuffisance vélo-pharyngée des fentes palatines

C. Gbaguidi, S. Testelin, B. Devauchelle

RésuméL’insuffisance vélo-pharyngée secondaire à une fente vélo-palatine opérée constitue l’unedes étiologies des troubles de la phonation à type de rhinolalie ouverte. L’aérophonoscopeest la méthode clinique objective permettant une évaluation de l’insuffisance vélo-pharyn-gée. Hormis la rééducation orthophonique, le traitement fait appel à différentes techniqueschirurgicales de pharyngoplastie.Deux séries de patients ont été comparées selon deux techniques différentes, sphinctéro-plastie dynamique et lambeau pharyngé à pédicule supérieur, ne montrant pas de différencesignificative. Ces résultats s’améliorent lorsque la technique chirurgicale a été réalisée sui-vant l’indication posée grâce aux méthodes d’évaluation de la physiopathologie de l’insuffi-sance vélo-pharyngée.Mots clés : pharyngoplastie, lambeau pharyngé à pédicule supérieur-sphinctéroplastiedynamique, Orticochea, aérophonoscope

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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The use of pharyngoplastic techniques in the treatment of cleft palatevelopharyngeal insufficiency

AbstractChildren born with a cleft palate sometimes have phonation disorders, such as nasal airescape and hypernasality. Aerophonoscopy is a clinical device which, within the frameworkof a speech evaluation, assesses nasal escape during phonation in an objective manner.Several types of treatment exist: medical treatment such as speech therapy, and surgicaltreatment, generally called pharyngoplastic surgery.We compared two groups of patients. Each group had been treated with two different surgi-cal pharyngoplastic procedures, the sphincter pharyngoplastic procedure on one hand and apharyngoplastic procedure which uses a pharyngeal flap with a superior pedicle on the otherhand. There were no significant differences between the two groups. Speech improvementcould be obtained when the surgical procedure was chosen according to the physiopatho-logy of the velopharyngeal insufficiencyKey Words : pharyngoplasty, pharyngeal flap with a superior pedicle, sphincter pharyngo-plasty, orticochea, aerophonoscopy

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C. GBAGUIDIS. TESTELINB. DEVAUCHELLEService de Chirurgie Maxillo-Faciale et StomatologieCHU Hôpital NordPlace Victor Pauchet80054 Amiens cedex 1

Les enfants porteurs de fente palatine, plus ou moins associée à une fentelabio-alvéolaire, présentent avec une fréquence non négligeable destroubles de la phonation, à type de rhinolalie ouverte, malgré une répara-

tion anatomique de leur voile. Ces troubles de la parole sont secondaires à unmauvais fonctionnement du voile et/ou des parois du pharynx, provoquant uneinsuffisance vélo-pharyngée. Il existe de nombreux traitements, médicaux commel’orthophonie permettant une rééducation de ce voile, et chirurgicaux, regroupéssous le terme générique de pharyngoplasties. Nous avons mené une étude, compa-rant deux techniques chirurgicales de pharyngoplastie secondaire, d’une part unetechnique de pharyngoplastie utilisant un lambeau pharyngé postérieur à pédiculesupérieur, et d’autre part, une technique de sphinctéroplastie dynamique.

Cette comparaison a pu être réalisée grâce à l’étude de deux séries de patients,chacune ayant été prise en charge spécifiquement selon l’une des deux techniques.Les premiers résultats ont été surprenants, ne montrant pas de différence significativeentre les deux séries, donc pas de supériorité d’une technique par rapport à l’autre. Denombreuses questions se sont alors posées, quant à l’indication d’une technique parrapport à l’autre selon les mécanismes intervenant dans l’insuffisance vélo-pharyn-gée, l’âge de réalisation de la pharyngoplastie, une intervention concomitante sur letissu lymphoïde. Nous allons donc tenter de proposer un algorithme de prise encharge des insuffisances vélo-pharyngées des fentes vélo-palatines.

� Matériel et méthode

Méthodes d’évaluation de l’insuffisance vélo-pharyngée

Méthodes d’évaluation fonctionnelle

Ces méthodes évaluent le fonctionnement vélo-pharyngé, comme le pas-sage d’air nasal lors de la phonation, la résonance ou les pressions. La première

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de ces méthodes est l’examen clinique, d’une part grâce à l’oreille de l’exami-nateur qui pourra, à l’écoute, détecter les signes de l’insuffisance vélo-pharyn-gée, et d’autre part, par l’examen minutieux de l’anatomie de la cavité orale,permettant d’analyser le voile au repos et sa mobilité lors de l’émission du pho-nème [a], ainsi que la mobilité des parois pharyngées latérales et postérieure.

La classification de Madame Borel-Maisonny, classant les phonations de1 à 3 permet de qualifier de façon clinique la phonation des patients porteurs defente palatine.

La deuxième méthode d’évaluation clinique est l’aérophonoscope. Cetappareil, simple d’utilisation, non invasif, permet d’observer de façon objectiveles fuites nasales lors de la phonation. L’examen peut être répété, permettantainsi une comparaison des résultats chez un même patient, ou d’un patient àl’autre. De plus, grâce à la visualisation des fuites nasales sur un écran, la réédu-cation orthophonique est facilitée par l’effet rétro-actif visuel.

L’aérophonoscope semble être la méthode la plus appropriée pour uneévaluation clinique de l’insuffisance vélo-pharyngée chez les enfants porteursde fente palatine.

Méthodes d’évaluation anatomique

Ces méthodes permettent de visualiser directement l’orifice vélo-pha-ryngé lors de la phonation. La téléradiographie de profil strict doit être réaliséeau repos et lors de la phonation. Au repos, elle permet l’étude de la position duvoile, de sa longueur, de la profondeur du cavum, du volume des amygdales.Pour la phonation, le phonème [i] est utilisé pour la téléradiographie de profilcar il nécessite une position très reculée du voile permettant de mieux étudier lavaleur fonctionnelle du sphincter vélo-pharyngé en visualisant le contact oul’espace résiduel éventuel entre le bord postérieur du voile et la paroi pharyngéepostérieure, ainsi que le point d’occlusion.

Une étude radiographique dynamique peut être utilisée pour une analysetridimensionnelle de l’insuffisance vélo-pharyngée. Après instillation d’un pro-duit de contraste dans chaque narine, des vues de profil, frontale et basale sontréalisées. Cette méthode d’évaluation est surtout utilisée aux Etats-Unis, maissemble apporter des données complémentaires à la classique téléradiographie deprofil (Witt,1998- Golding-Kushner, 1990).

L’endoscopie, grâce à l’utilisation d’un nasofibroscope souple, permet d’obtenirune vision globale du sphincter vélo-pharyngé par sa face supérieure, tant aurepos que lors de la phonation. Mais, sa réalisation est difficile chez les enfantsde moins de six ans (LeBlanc, 1996).

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Matériel

Pour cette étude, deux séries distinctes de patients ont été comparées, defaçon rétrospective. Seuls les patients présentant une insuffisance vélo-pharyn-gée secondaire à une fente vélo-pharyngée ont été étudiés. La même techniquede fermeture primaire du voile avait été utilisée dans chacune des deux séries.Chaque série a été prise en charge par un même opérateur, selon une mêmetechnique chirurgicale.

Première série

Trente-neuf patients ont été pris en charge entre 1999 et 2000.Le traitement de l’insuffisance vélo-pharyngée à fait appel pour cette série à unetechnique de pharyngoplastie utilisant un lambeau pharyngé à pédicule supé-rieur (Keunig, 2000 - Shprintzen, 1979 et 1980).

Dans cette technique, un lambeau à pédicule supérieur est levé du murpostérieur du pharynx. La largeur de ce lambeau correspond à la totalité de lalargeur du mur pharyngé postérieur, et sa longueur est de quatre à cinq centi-mètres. Ce lambeau est disséqué le long du fascia pré-vertébral, et sa base estsituée au-dessus du tubercule antérieur de la première vertèbre cervicale. Levoile est ensuite incisé sur sa ligne médiane.

Au niveau du plan nasal du voile, de chaque côté de la ligne médiane, unlambeau muqueux est levé pour créer un lit dans lequel le lambeau pharyngé estsuturé. La zone donneuse de ce lambeau pharyngé est suturée par rapproche-ment des berges. Le lambeau pharyngé est suturé au plan nasal du voile et levoile est ensuite fermé sur la ligne médiane. En fin d’intervention, l’orificevélo-pharyngé est remplacé par 2 orifices latéraux de part et d’autre du lam-beau, dont la fermeture pendant la parole est permise par le déplacement médialdes parois pharyngées latérales. La moyenne d’âge de réalisation de cette pha-ryngoplastie, pour cette série, était de 7,3 ans.

Parmi les trente-neuf patients, douze ont bénéficié d’une amygdalecto-mie. Deux de ces douze patients ont été opérés deux mois avant la pharyngo-plastie, un pendant le même temps opératoire. Les autres patients avaient étépris en charge dans un délai de trois à six mois avant la pharyngoplastie.

Deuxième série

Dans cette série, vingt-huit patients ont été pris en charge entre 1991 et1999. Ces patients ont été opérés selon la technique de sphinctéroplastiedynamique, dérivant de la technique d’Orticochea (Orticochea, 1968 et1983).

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Dans cette technique, les piliers postérieurs du voile du palais contenantles muscles palatopharyngiens sont désinsérés de la paroi pharyngée postérieurepuis transposés sur la ligne médiane afin d’être suturés bout-à-bout, au niveaud’un petit lambeau musculo-muqueux de paroi pharyngée postérieure, situé enregard de l’arc antérieur de la première vertèbre cervicale (Robert, 1983 - Riski,1984 - Moss, 1987). Le but de cette intervention est de créer un nouveau sphinc-ter grâce à la contraction des piliers postérieurs du voile. Le diamètre de l’ori-fice vélo-pharyngée est ainsi diminué, et ce nouvel orifice peut-être fermé defaçon active.

La moyenne d’âge pour cette série était de 9,9 ans.

Huit patients parmi les vingt-huit ont bénéficié d’une amygdalectomie,dont six dans le même temps opératoire que la pharyngoplastie. Pour les deuxautres patients, le délai par rapport à la pharyngoplastie était d’au moins sixmois.

� Résultats

Phonation

Dans la première série, la pharyngoplastie a permis une amélioration glo-bale de la phonation avec une intelligibilité du discours dans 84,6%, avec sixpatients passant d’une phonation 2M à une phonation 1, quatorze patients pas-sant d’une phonation 2B à une phonation 1, et trois patients passant d’une pho-nation 2M à une phonation 2B. Trois patients présentant une phonation de type3 ont retrouvé une phonation normale de type 1 ou 1-2, et cinq patients sontpassés d’une phonation de type 3 à une phonation de type 2B. Les déperditionsnasales sont constantes et la parole est inintelligible dans 5,1% des cas, corres-pondant à deux patients dont l’un avait une phonation de type 3 en pré-opéra-toire, et l’autre une phonation de type 2M. Les mécanismes compensatoires per-sistent dans 10,3% des cas. Ces patients présentaient déjà une phonation de type3 en pré-opératoire. Aucune modification de la phonation n’a été apportée par lapharyngoplastie dans quatre cas, soit 10,2%.

Dans la deuxième série, l’amélioration globale de la phonation est de82,1%, avec cinq patients passant d’une phonation de type 2M à une phonationde type 1, neuf patients passant d’une phonation de type 2B à une phonation detype 1, et huit patients passant d’une phonation de type 2M à une phonation detype 2B.

Aucun des patients ayant une phonation de type 3 n’est passé à une pho-nation de type 1 ou 2B.

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Le discours reste inintelligible avec des déperditions nasales constantesdans 14,3% des cas. Parmi ces cas, deux patients n’ont eu aucune amélioration,restant en phonation de type 2M. Un patient est passé d’une phonation de type 3à une phonation de type 2B.

Par contre, un patient présentant une phonation intelligible 2B s’estaggravé en passant à une phonation de type 3.

Les mécanismes compensatoires persistent dans 3,5% des cas, correspon-dant à un patient présentant déjà une phonation de type 3 en pré-opératoire.

Aucune modification n’a été apportée par la pharyngoplastie dans quatrecas, soit 14,3%.

Rôle de la rééducation orthophonique

Une amélioration immédiate de la phonation après pharyngoplastie per-mettant la disparition complète des fuites vélaires est retrouvée dans 12,8% descas dans la première série.

Les trente-deux patients restants ont nécessité une rééducation orthopho-nique post-opératoire.

Cette rééducation a permis à treize patients présentant une phonation 2Ben post-opératoire immédiat de passer à une phonation de type 1.

Dans la deuxième série, la pharyngoplastie a permis une disparition totaledes fuites vélaires dans 21,4% des cas. Une rééducation orthophonique à éténécessaire chez vingt-deux patients. Pour six patients, cette rééducation a permisle passage d’une phonation 2B post-opératoire immédiate à une phonation 1.

Pharyngoplastie secondaire

Dans la première série, trois patients ont bénéficié d’une seconde pharyn-goplastie, avec pour conséquence une amélioration de leur phonation (deuxpatients sont passés d’une phonation de type 2B à une phonation de type 1, etun patient est passé d’une phonation de type 3 à une phonation de type 2B).

Trois patients de la deuxième série ont également été pris en charge pourune seconde pharyngoplastie, passant d’une phonation de type 2B à une phona-tion de type 1.

� Discussion

La comparaison des résultats des deux séries ne montre pas de différencesignificative quant à l’amélioration de la phonation. L’analyse de la littérature

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retrouve une amélioration de la phonation comparable aux chiffres retrouvésdans nos deux séries, que se soit pour la technique de pharyngoplastie utilisantun lambeau pharyngé à pédicule supérieur comme pour l’équipe de Shprintzen(Argamaso, 1980) ou celle d’Epker (Epker, 1990), ou pour la technique desphinctéroplastie dynamique, comme pour les équipes de James (James, 1996),Witt (Witt, 1994) ou Moss (Moss,1987).

Seul Orticochea rapporte une amélioration de la phonation dans 95% des casavec disparition de fuite vélaire après sphinctéroplastie dynamique (Orticochea,1983). L’explication de cette augmentation significative du taux de bons résultatscorrespondrait d’une part au niveau d’insertion des piliers postérieurs du voile à unniveau plus bas, en dessous du niveau attendu du contact vélo-pharyngé, et d’autrepart, à l’âge de réalisation de la pharyngoplastie. En effet, cet auteur pratique cetteintervention de façon systématique à l’âge de deux ans et demi, chez tous lesenfants porteurs de fente vélo-palatine. Pour nous, l’âge de réalisation de la pharyn-goplastie n’est pas un facteur déterminant. Le fait important est la nécessité pourles enfants de débuter leur scolarité dans de bonnes conditions.

De plus, tous ces résultats sont généralement obtenus après évaluation cli-nique par un médecin spécialiste de la phonation, ou un orthophoniste, selon descritères différents, comme la résonance, les fuites nasales ou l’intelligibilité dela parole. La comparaison de ces résultats est donc difficile, la majorité desauteurs présentant pour leur série des résultats globaux.

Comme l’indique Moss (Moss, 1987), il n’existe pas dans la littérature deméthode universelle d’évaluation de la phonation. L’aérophonoscope sembleêtre l’examen le mieux adapté pour l’évaluation clinique de la phonation. Grâceà sa simplicité d’utilisation et son caractère non invasif, cet examen peut êtrerépété à la demande. Cet appareil permet l’étude de la compétence vélaire grâceà la visualisation des fuites nasales lors de la prononciation de différents pho-nèmes, et est donc plus précis que l’oreille de l’examinateur.

Par ailleurs, un défaut de perméabilité nasale peut être détecté avantl’analyse des fuites nasales lors de la phonation grâce à l’étude de la ventilationnasale droite et gauche par ce même appareil. Les résultats faussés par une obs-truction nasale pouvant masquer les fuites vélaires lors de la phonation sontdonc éliminés.

La reproductibilité de cet examen permet une analyse et une comparaisonobjective de la phonation, chez le même patient ou sur une série de patients dif-férents, avant et après intervention. L’autre avantage de cet appareil est son aideà la rééducation orthophonique, permettant au patient de se rééduquer grâce àun effet visuel rétroactif.

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Lorsqu’une insuffisance vélo-pharyngée a été détectée lors de la consulta-tion de suivi d’un enfant porteur d’une fente palatine, et que l’indication opéra-toire d’une pharyngoplastie a été posée, nous proposons la réalisation d’un bilanpar aérophonoscope dans le mois précédant l’intervention, puis à un mois, sixmois et un an post-opératoire. L’étude du bilan aérophonoscopique un moisaprès l’intervention permet d’une part d’en évaluer le résultat précoce, et d’autrepart, de décider de la reprise de la rééducation orthophonique. L’efficacité decette rééducation est estimée lors des examens aérophonoscopiques suivants.

Cet appareil semble idéal quant à l’évaluation des résultats sur la phona-tion tout en permettant leur comparaison, mais ne donne pas d’indication sur lemécanisme de l’insuffisance vélo-pharyngée, ne permettant donc pas d’effectuerle choix d’une technique par rapport à une autre. Chez les patients opérés d’unefente vélo-palatine, l’insuffisance vélo-pharyngée est rapportée en général à undéfaut de fonctionnement soit du voile, soit des parois pharyngées latérales, soità une association des deux. Une seule technique chirurgicale semble insuffisantepour tous les patients présentant différents types d’anomalies de fermeture dusphincter vélo-pharyngé.

Une pharyngoplastie utilisant un lambeau pharyngé réalisée chez despatients présentant de faibles mouvements des parois pharyngées latérales est engénéral vouée à l’échec. En effet, dans ce cas, les parois pharyngées latéralespeuvent difficilement venir au contact du lambeau pharyngé reliant le mur pha-ryngé postérieur et le voile. Cette constatation peut également s’appliquer auxtechniques de sphinctéroplastie dynamique.

Selon Riski (Riski, 1984), les individus avec des mouvements latérauxfaibles ou absents semblent être les meilleurs candidats à une technique desphinctéroplastie dynamique.

L’indication d’une technique de pharyngoplastie doit donc être poséeselon le mode de fonctionnement du sphincter vélo-pharyngé examiné en pré-opératoire (Peat, 1994).

Il semble logique de proposer une sphinctéroplastie dynamique en cas demouvements vélaires efficaces. Dans les cas pour lesquels les mouvements pha-ryngés de bonne qualité sont prédominants, une pharyngoplastie utilisant unlambeau pharyngé à pédicule supérieur doit être effectuée. Le choix d’une tech-nique est plus difficile dans les cas intermédiaires, pour lesquels les mouve-ments vélaires sont faibles et les mouvements pharyngés latéraux faibles ouabsents. Ces cas correspondent généralement à des formes sévères d’insuffi-sance vélo-pharyngée.

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L’analyse de nos deux séries de patients montre qu’une disparition desfuites nasales dans les formes sévères, cotées 2M ou 3 chez les patients ayantbénéficié d’une pharyngoplastie avec lambeau pharyngé postérieur, représente23.1% des cas, alors que ce taux est de 17.5% pour les patients ayant bénéficiéd’une sphinctéroplastie dynamique. Là encore, il n’existe pas de différencesignificative entre les résultats obtenus (p=0.801). Dans les formes graves, unepharyngoplastie utilisant un lambeau pharyngé à pédicule supérieur, en y asso-ciant un push-back du voile pourrait être proposée, comme pour l’équipe dePeat (Peat, 1994) ou celle de Albery (Albery, 1982).

Il est difficile de tirer des conclusions des résultats obtenus sur les deuxséries étudiées en ce qui concerne la place d’une intervention sur le tissu lym-phoïde sur la phonation. Il semble tout de même qu’une amygdalectomie et/ouune adénoïdectomie dans le même temps opératoire que la pharyngoplastie aitun rôle néfaste quant aux résultats sur la phonation. La majorité des auteurscomme Riski (Riski, 1984), Moss (Moss, 1987), Stoll (Stoll, 2000), ou Ortico-chea (Orticochea,1983) pensent que l’amygdalectomie et l’adénoïdectomie nedoivent pas être réalisées dans le même temps opératoire que la pharyngoplas-tie. Il semble donc qu’une amygdalectomie et/ou une adénoïdectomie ne doi-vent pas être réalisées dans le même temps opératoire que la pharyngoplastiequelle que soit la technique chirurgicale employée. Le délai minimum entre cesdeux interventions est de trois mois (Witt, 1995). De plus, ces interventions doi-vent être réalisées en laissant le moins de faces cruentées possible afin d’éviterles cicatrices rétractiles.

Les résultats jugés non satisfaisants par le patient et la famille, ou parl’équipe médicale nécessitent parfois une reprise chirurgicale de la pharyngo-plastie. Le taux de réussite des pharyngoplasties secondaires quant à l’intelligi-bilité de la phonation est supérieur à 90% pour la majorité des auteurs, maisavec un pourcentage aussi élevé de patients présentant une rhinolalie fermée. Ilsemble évident que les patients présentant une rhinolalie ouverte après une pre-mière pharyngoplastie doivent bénéficier d’une seconde intervention. La ques-tion qui reste posée est la technique chirurgicale à employer. Pour les cas danslesquels l’indication avait été posée après évaluation précise de l’insuffisancevélo-pharyngée, il semble logique d’utiliser la même technique chirurgicalepour la seconde pharyngoplastie (Witt, 1998 - Friedman, 1992 - Barone, 1994).Par contre, lorsqu’une seule et même technique a été appliquée à tous lespatients, comme pour les deux séries étudiées ici, le choix est plus difficile.

Une ré-évaluation clinique et para-clinique reste indispensable afind’adapter la technique aux mécanismes d’insuffisance vélo-pharyngée, soit en

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gardant la même technique, soit en réalisant une technique différente si lesconditions locales le permettent.

Au terme de cette analyse, une conclusion s’impose : l’amélioration desrésultats sur la phonation résulte de la technique chirurgicale employée selonl’indication posée. Nous avons donc tenté de proposer un algorithme de prise encharge des insuffisances vélo-pharyngées dans les séquelles de fentes palatines.

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� Conclusion Aucune technique chirurgicale de pharyngoplastie dans le traitement de

l’insuffisance vélo-pharyngée n’a montré sa supériorité quant aux résultats surla phonation. Telle est la conclusion de ce travail qui s’est efforcé d’éliminer lesbiais fréquemment rencontrés dans les études statistiques, grâce à l’homogénéitédes séries, la prise en charge par un opérateur unique pour chaque population depatients, une même technique chirurgicale employée dans chaque série.

On peut donc penser que par l’adaptation de la technique à la physiopa-thologie de l’insuffisance vélo-pharyngée, les résultats sur la phonation s’amé-liorent. Pour nous, l’indication de l’une ou l’autre des techniques est décidée enfonction d’un arbre décisionnel ainsi résumé :

- la pharyngoplastie utilisant un lambeau pharyngé à pédicule supérieurest indiquée soit seule en cas de motricité pharyngée latérale efficace etde mouvements vélaires faibles ou absents, soit associée à un push-backdu voile en cas de mouvements inefficaces du voile mais aussi desparois pharyngées latérales.

- la sphinctéroplastie dynamique s’impose en cas de supériorité des mou-vements vélaires par rapport à ceux des parois pharyngées latérales.

La rééducation orthophonique post-opératoire reste indispensable afind’améliorer les résultats obtenus par la chirurgie.

Une interrogation persiste malgré les conclusions apportées par cetteétude : pourquoi certaines pharyngoplasties, réalisées suivant une indicationprécise, posée après évaluation de la physiopathologie de l’insuffisance vélo-pharyngée et selon une technique chirurgicale rigoureuse, ont un mauvais résul-tat sur la phonation ?

Nous avons réalisé, dans le cadre d’un travail de recherche, une étudeanatomique sur les muscles palatopharyngiens contenus dans les piliers posté-rieurs du voile du palais et utilisés dans la technique de sphinctéroplastie dyna-mique. La localisation de l’innervation motrice de ce muscle se situerait auniveau de sa face latérale, au niveau de son tiers moyen. La majorité des auteurssectionnerait cette innervation lors de la dissection des piliers postérieurs jus-qu’à leur pôle supérieur. Cette donnée pourrait être prise en compte dans le tauxd’échec de certaines sphinctéroplasties dynamiques.

Les autres causes restent à définir par des études complémentaires.

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Evaluation clinique après sphincteroplastie

Stéphane Comiti, Béatrice Morand, Chrystele Deschaux, Bernard Raphaël

Clinical evaluation following sphincter pharyngoplasty

Abstract

The authors analysed results obtained post-sphincter pharyngoplasty in the treatment of softpalate insufficiency, in a series of 87 cases. They found an improvement in phonation in92% of the cases, with an interruption of nasal escape in 46% of the cases. 77% of thepatients were categorised as showing « good results » after one year of follow up. Theseresults remained stable over time. Various factors seemed to contribute to the results : themotility and size of the sphincter, post-operative speech therapy, the age of staphylorraphy.Whether speech therapy should be continued beyond one year after surgery is questionable.

Key Words : velo-pharyngeal insufficiency, sphincter pharyngoplasty, speech and languagetherapy.

Résumé

A travers une série de 87 cas, les auteurs évaluent les résultats de la sphincteroplastiecomme traitement de l’incompétence vélo pharyngée. Les résultats montrent une améliora-tion de la phonation chez 92% des sujets avec disparition des fuites nasales dans 46% descas. 77% des patients sont classés en « bons résultats » après un an. Ces résultats sontstables dans le temps. Différents facteurs interviennent dans ces résultats : la mobilité et lataille du sphincter, la rééducation orthophonique post-opératoire, l’âge de la staphylorraphie.La poursuite d’une rééducation au delà d’un an post-opératoire est jugée discutable.

Mots clés : types de mémoire, processus mnésiques, supports neuroanatomiques et neuro-chimiques.

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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Stéphane COMITI *Béatrice MORAND *Chrystele DESCHAUX **Bernard RAPHAEL ** Service de Chirurgie Plastique et Maxillo-FacialeUnité de StomatologieCentre Hospitalier Universitaire de Grenoble,B.P. 217, 38000 Grenoble Cedex 09

** Laboratoire du sommeilDépartement de Médecine Aigue SpécialiséeCentre Hospitalier Universitaire de Grenoble.B.P. 217, 38000 Grenoble Cedex 09

Le sphincter vélo-pharyngé est une structure dynamique complexe respon-sable de l’occlusion de l’isthme naso-pharyngé, par mise en contact duvoile, du mur pharyngé postérieur et des parois latérales du pharynx

(figure 1) (2, 4, 5, 6).

Figure 1 : le sphincter vélo-pharyngé.D’après Chancholle

M.élévateur du voile du palais

M.palato-pharyngien

Le muscle en X

M.constricteursupérieurdu pharynx

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L’incompétence de ce sphincter définit l’insuffisance vélo pharyngée.L’étiologie la plus fréquente est représentée par la fente palatine et sesséquelles.

Ses conséquences sont dominées par la déperdition aérienne vers lesfosses nasales, et justifient souvent le recours à un traitement chirurgical adapté(1, 3).

Différentes techniques ont été proposées à travers les décennies pour res-taurer la compétence vélo-pharyngée et limiter les fuites nasales.

Orticochea a développé en 1968, une technique visant à reconstituer unsphincter vélo-pharyngé dynamique, par transposition des muscles palato-pha-ryngiens (figure 2) (12, 14).

Figure 2 : la sphinctéroplastie selon Orticochea modifiéDessin de Lebeau.

Cette approche chirurgicale est proche des conditions physiologiques, eta été confortée par les travaux anatomiques de Chancholle. C’est devenu avecle temps et les adaptations techniques, un traitement de référence de l’insuffi-sance vélo-pharyngée, en particulier dans le cadre des séquelles de fentes pala-tines (7, 8, 10, 11, 13, 17, 18, 20, 21, 24, 25, 26, 27).

La technique de sphincteroplastie selon Orticochea, est pratiquée dans leservice de chirurgie Maxillo-Faciale de Grenoble, depuis bientôt trente ans.

Dans notre équipe, le diagnostic, l’indication, la surveillance et l’évalua-tion des résultats sont basés sur une appréciation clinique codifiée rigoureuse,faisant intervenir l’opérateur et un orthophoniste spécialisé.

A travers une étude de 87 cas, nous évaluons les résultats de la tech-nique, et nous cherchons à définir les différents facteurs susceptibles d’interve-

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nir.

� Matériel et méthode

Matériel

Lors du recueil rétrospectif des données, nous avons conservé 87patients qui avaient bénéficié d’un double suivi complètement informé, parl’opérateur et les orthophonistes attachés dans le service. Ce suivi completcomprenait un double examen clinique et orthophonique en préopératoire eten post-opératoire à 2/3 mois, 6 mois et 1 an post-opératoire. 51 de cespatients ont été revus à 2 ans. L’âge moyen de la sphincteroplastie est de 11ans avec un écart-type de plus ou moins 9, les extrêmes sont respectivement5 ans pour le minimum et 51 ans pour le maximum. La majorité des patientsétant opérée autour de six ans, âge de l’apprentissage de la lecture et début dela socialisation.

Tous les patients ont fait l’objet d’une prise en charge orthophonique pré-opératoire. Dans un tiers des cas on notait une amélioration de la phonation etdes fuites nasales lors de cette rééducation, sans arriver à un résultat satisfaisant.La rééducation post-opératoire, débutée à 3 mois, était suivie par 83,9% despatients. Elle était peu ou pas suivie dans 16,1% des cas.

Le sphincter était noté large dans 16,1% des cas, il était dynamique pour96,5% des sujets.

Méthode

Examen orthophonique :

L’évaluation de la phonation se fait selon la classification de Borel-Mai-sonny modifiée. Dans le service, une phonation parfaite type 1, selon l’apprécia-tion auditive de l’examinateur, mais accompagnée de quelques fuites nasalestransitoires minimes (quelques traces de buée au miroir), n’est pas cotée 1/2b,mais demeure 1. Le 1/2b concerne une phonation 1 altérée de façon discrète etinconstante selon les phonèmes, par des fuites nasales légères et transitoiresmais audibles. En cas de fuites nasales permanentes on revient à la classificationusuelle.

L’évaluation des résultats est basée sur l’évolution de la phonation et desfuites nasales en post-opératoire immédiat, à 6 mois puis 1 an (87 patients), à 2ans (51 patients) :

• Afin de comparer nos résultats à ceux de la littérature, ces derniers ont

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été classés en bons, moyens et mauvais résultats :

- les bons résultats réunissaient les phonations 1 et 1/2b,- les résultats moyens étaient représentés par les phonations 2b,- les mauvais résultats désignaient les phonations 2b/m et plus.

• L’évolution des fuites nasales a fait l’objet d’une évaluation distincte,selon un gradient de sévérité décroissant (figure 3)

Technique chirurgicale :

La technique utilisée a été la même pour tous les patients et est présentée dansla figure 2.

� Résultats

Phonation

• Evolution globale de la phonation sur 1 an

Elle est appréciée sur la figure 4.La population étudiée a présenté une amélioration globale de la phonation dès 3mois post-opératoire. Cette amélioration s’est accentuée avec le temps. Après 1

Figure 4

Figure 3

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• Détail de l’amélioration de la phonation à 1 an

Il n’a pas été noté d’aggravation de la phonation.

Dans 92% de cas la phonation a été améliorée.

77% des sujets ont été classés en bons résultats, 16,1% en résultats moyens, et6,9% étaient considérés mauvais.

• Evolution globale des patients suivis sur 2 ans

La comparaison des niveaux de phonation à 1 an post-opératoire, des patientssuivis sur 1 an et de ceux suivis sur 2 ans, est appréciée sur la figure 5. Lesniveaux de phonation exprimés en pourcentages, des suivis à 1 an (n=87) et à2 ans (n=51), étaient quasiment superposables. Cette similitude a été retrou-vée à 3 mois et à 6 mois post-opératoires. Les 51 patients suivis sur 2 ans sui-vaient donc une évolution tout à fait comparable à celle des 87 sujets suivissur 1 an.

• Evolution de la phonation à 2 ans post-opératoires

Elle est appréciée sur la figure 6.

Entre 1 et 2 ans post-opératoires, les courbes étaient tout à fait comparables : les résultats étaient stables, avec une très discrète amélioration.

A 2 ans, le taux d’amélioration était de 99%, mais le niveau de bons résultatsétait peu augmenté (78,4%), les résultats moyens stagnaient (15,7%) et on rele-vait une légère réduction des mauvais résultats (5,9%).

Figure 5

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Déperdition nasale

• Evolution globale des déperditions nasales sur 1 an

Elle est appréciée sur la figure 7.

On a noté une diminution constante des fuites nasales en post-opératoire : avecdisparition dans 46% des cas.

Figure 6

Figure 7

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• Détail de l’évolution des déperditions nasales à 1 an

Elle est appréciée sur la figure 8.En préopératoire, les fuites nasales en phonation portaient sur l’ensemble desvoyelles dans 94% des cas. Elles étaient retrouvées au souffler chez 60% dessujets. A 1 an post-opératoire, les fuites nasales au souffler étaient réduites à 10,3%des cas. La déperdition nasale en phonation est devenue sélective : 50% des fuitesnasales sur les phonèmes à 1 an survenaient à l’émission des voyelles fermées ([i]et [u]). Le niveau global d’amélioration de la déperdition nasale (diminution del’intensité et/ou sélectivité de la survenue des fuites) a été de l’ordre de 93%.

Variables susceptibles d’intervenir dans l’amélioration de la phonation et/oude la déperdition nasale

Les résultats étaient significativement moins bons en cas de sphincter large peumobile. Ils étaient meilleurs, à 1 an post-opératoire, chez les sujets ayant correc-tement suivi une rééducation orthophonique.

L’âge de la staphylorraphie intervenait également de façon significative : dans legroupe des patients améliorés, la moyenne d’âge au moment de la staphylorra-phie était de 18 mois contre 25 mois pour les patients peu ou pas améliorés.

ComplicationsLe taux de complications générales est faible : de l’ordre de 4,6%. Il n’a pas étérelevé de déhiscence des lambeaux. Aucune apparition de syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) n’a été observée (23).Le taux de reprise chirurgical est faible (1,1%).

Figure 8

��

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� DiscussionL’intérêt et les modalités de la rééducation orthophonique sont discutés dans lalittérature (14, 16, 17, 26).

La rééducation avant sphincteroplastie est supposée améliorer les mouvementsdu sphincter vélo-pharyngé.

Dans notre équipe, la reprise de la rééducation est autorisée deux mois aprèsl’intervention, à distance de la phase de cicatrisation.

Chez les sujets qui ont correctement suivi une rééducation orthophonique post-opératoire, les résultats ont été significativement meilleurs à 1 an, avec 93,1 %d’amélioration de la phonation et 75,3% de réduction de la déperdition nasale.

Parmi les patients ayant peu ou pas suivi de rééducation post-opératoire, 72%avaient une phonation initiale mauvaise. On peut l’expliquer par le fait que lespatients présentant une altération majeure de la phonation, bénéficient d’unerééducation préopératoire intensive, de durée souvent prolongée, avant la réali-sation du geste de sphincteroplastie. Un certain nombre arrivent à « saturation »,voient dans la sphincteroplastie la fin de leurs efforts, et se satisfont de l’amélio-ration obtenue.

Les avis divergent sur l’indication de la rééducation post-opératoire, le momentde début, et celui de l’arrêt (14, 22). L’objectif de la rééducation orthophoniquepost-sphincteroplastie est d’entretenir et de développer la dynamique sphincté-rienne.

Les résultats phonatoires obtenus à 1 an, après régression de la phase oedéma-teuse et cicatrisation complète, sont stables et peu modifiés par la poursuite dela rééducation orthophonique. On peut donc s’interroger, sur la nécessité d’unerééducation prolongée au delà d’un an post-opératoire.

Il y a-t-il un intérêt à rééduquer de façon prolongée un néo-sphincter, en voulantà tout prix faire correspondre sa fonction à celle d’une structure normale, anato-miquement différente ?

Ces interrogations pourraient faire l’objet d’études ultérieures, afin d’évaluerplus précisément les places à attribuer à la chirurgie et à l’orthophonie dans laprise en charge de l’insuffisance vélo-pharyngée persistante.

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Rééducation des incompétences vélo-pharyngées

Elisabeth Tsymbal, Pr. B. Raphaël, Dr B. Morand

Résumé

Le rôle de l’orthophoniste, au sein de l’équipe soignante, dans la rééducation des incompé-tences vélo-pharyngées.

Mots clés : incompétences vélo-pharyngées, rééducation orthophonique, sphinctéroplastie

Remediation of velo-pharyngeal insufficiency

AbstractThis article studies the role which speech and language therapists play, as part of a thera-peutic team, in the remediation of velo-pharyngeal insufficiency.Key Words : velo-pharyngeal insufficiency, speech and language therapy, sphincter pharyn-goplasty

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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Elisabeth TSYMBALOrthophonisteService de Chirurgie Plastique et Maxillo-Faciale Unité de traitement des fentes labio-maxillo-palatines Pr. B. RAPHAËL - Dr B. MORANDCHU de Grenoble B.P. 217 38000 Grenoble Cedex 09

La parole n’est que le moment d’un geste global ». Cette assertion qui reposesur une conception anatomique des interconnections et de la coordinationmotrice entre les sangles musculo-aponévrotiques (A.R. CHANCHOLLE (1)),

régit le principe même de notre protocole de rééducation inspiré par Madame IrèneMAURETTE (2), qui tient compte du corps dans sa globalité avant de se focaliserprogressivement sur la musculature orale, les lèvres, la langue, et le vélo-pharynx.

Dans cette optique, à la notion d’incompétence vélaire se substitue cellede sphincter vélo-pharyngé, dont les performances sont fréquemment limitées(25% des cas) à l’issue du traitement chirurgical d’une fente palatine.

Il est essentiel à nos yeux que la reconstruction de la musculature vélo-pharyngée désorganisée par la fente ait eu lieu avant la période de prélangagesoit au plus tard le 8ème mois.

Au cours de cette période, l’orthophoniste rencontre l’enfant et sesparents de manière occasionnelle et informelle, en consultation ou en hospitali-sation, les écoute et répond à leurs questions en complétant, dans son domaine,le discours du chirurgien.

A partir de 10 mois, les enfants et leurs parents ont des entretiens réguliersavec l’orthophoniste dans le cadre d’une guidance parentale, tous les 6 à 12 mois.

A 10 mois, nous sommes particulièrement attentifs à trois conditionsessentielles pour l’éveil au langage :

- Une bonne qualité de relation entre la mère et son enfant ;

- Une intégrité anatomique palato-vélo-pharyngée permettant à l’enfantde produire tous les jeux vocaux en rapport avec son âge ;

- Une bonne acuité auditive.

«

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Nous sensibilisons les parents au rôle du voile du palais dans la phona-tion, la déglutition et la bonne aération de l’oreille moyenne. Nous insistons surl’importance d’une surveillance de l’état des tympans et de l’audition avec posed’aérateurs transtympaniques si nécessaire.

Le mode d’alimentation doit également faire l’objet d’une surveillance endéconseillant le passage prématuré à la petite cuillère et en privilégiant la tétéequi assure une bonne stimulation des muscles du voile par la succion et l’aspira-tion du lait et un contact privilégié avec la mère.

Au début de l’alimentation solide, nous conseillons de varier les saveurset les consistances pour développer la sensibilité de la langue, les sensorialitésdu goût, de l’odorat et l’installation progressive de la mastication. Les mouve-ments articulatoires sont mis en place au cours de l’alimentation. Téter etmâcher organisent le « bien parler ».

Une grande place sera donnée aux facultés d’imitation et de répétition dujeune enfant : il apprend à se servir de ses lèvres et réalise les premiers mouve-ments de souffle. Nous suggérons aux parents de commencer à mobiliser lesouffle de l’enfant à l’occasion des bains, des repas, des promenades. La motri-cité bucco-faciale sera activée par des jeux moteurs de praxies de la langue, deslèvres et des joues. L’audition et la mise en place du langage seront stimuléespar l’écoute de comptines à répéter, à mimer, à danser.

De 2 ans à 3 ans nous surveillons le développement du vocabulaire, etles premières constructions de phrases. Dans les productions vocales de l’enfantnous pouvons déjà détecter un nasonnement. Nous réitérons si nécessaire lesexplications déjà données sur le voile, la surveillance O.R.L. et sur les exercicesde souffle, sans oublier les comptines.

Si le développement du langage prend du retard et inquiète les parents,nous proposons sans attendre que ces derniers se fassent aider par un orthopho-niste dans le cadre d’une prise en charge précoce. Il est parfois nécessaire d’in-sister pour que l’enfant commence une vie sociale avec ses congénères (halte-garderie) afin que le processus d’une relative autonomie par rapport à la mèrepuisse s’opérer avant l’entrée à l’école maternelle.

De 3 ans à 5 ans, l’enfant est suffisamment grand pour accepter à chaqueconsultation de contrôle l’examen au miroir de Glaetzel qui met en évidence l’im-portance de la déperdition nasale. A partir de 3 ans 1/2 ou 4 ans, si le nasonne-ment persiste et qu’une déperdition nasale est audible associés à un retard deparole et de langage, une rééducation orthophonique est alors proposée pour sou-tenir les parents dans le travail rééducatif qui doit être poursuivi à la maison.

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Vers 5 ans 1/2 ou 6 ans, avant l’entrée au cours préparatoire, l’examenorthophonique se fait plus précis. Dans le cas d’une phonation toujours altérée(type IIb) ou défectueuse (type IIm, voire III) avec une déperdition nasale quireste importante malgré une rééducation orthophonique régulière, des téléradio-graphies dynamiques du voile, à l’émission des voyelles et au souffler, permettentd’apprécier le degré d’incompétence vélo-pharyngée. La collaboration avec lechirurgien se fait alors plus étroite et permet de discuter de l’opportunité d’ungeste chirurgical supplémentaire. Il se résume pour nous dans l’énoncé d’uneseule technique : « la sphinctéroplastie ». Un sphincter vélo-pharyngé incompé-tent dans l’effort et la répétition, le sera plus encore dans la parole courante, etperturbera non seulement la communication familiale mais surtout la scolarité del’enfant.

La rééducation orthophonique spécifique de la phonation sera alors inten-sifiée en préopératoire et surtout en post-opératoire. Elle sera reprise entre six àhuit semaines après l’intervention et durera de quelques mois à un an. Pourquelques cas, elle continuera au-delà d’un an.

Après 6 ans, nous devons être vigilants sur le bon déroulement de la sco-larité de l’enfant car certains d’entre eux possèdent encore des problèmes audi-tifs, d’autres seront gênés par des séquelles articulatoires qui pourront être amé-liorées par un traitement orthodontique.

Vers 12 /13 ans, la surveillance de la dynamique vélaire doit de nouveaus’intensifier. Le pharynx connaissant à cet âge une poussée de croissance coïnci-dant avec la régression du volume adénoïdien, une déperdition nasale peut appa-raître ou réapparaître chez des enfants dont la phonation avait atteint un niveaucorrect sans avoir eu recours à la sphinctéroplastie. Il faut donc convaincrel’adolescent et ses parents de reprendre les exercices de souffle quotidienne-ment. Nous leur suggérons d’apprendre à jouer d’un instrument de musique àvent qui permet de gérer le souffle, de contrôler lèvres et joues, de vérifier parl’oreille ; les percussions permettent d’évacuer le trop plein de tonicité, d’agres-sivité. Eventuellement, ils peuvent aussi faire partie d’une chorale.

Pour les plus grands, ne pas négliger la pratique d’un sport, d’un jeu deplein air qui tonifie sans contracter, fait baisser la tension, l’agressivité et contri-bue au développement de l’expression corporelle.

Tout ce travail ne peut être mené à bien sans la pluridisciplinarité et lacomplémentarité de l’équipe soignante, chirurgiens, infirmières, orthophonistes,orthodontistes, dentistes et prothésistes, sans oublier l’importante contributiondes orthophonistes libéraux qui assurent les rééducations dans le cadre d’unetriple prise en charge de la parole, du langage et de la voix.

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Nous ne soignons pas seulement une fonction chez un enfant, mais l’en-fant tout entier et l’enfant dans son entourage.

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Traitement des séquelles nasales des fenteslabio-alvéolo-palatines

Raymond Gola, L. Guyot, O. Richard, T. Kaffel, O. Prost-Magnin

RésuméLe rétablissement précoce de la ventilation nasale est indispensable à une croissancefaciale harmonieuse et à l'efficacité des traitements orthopédiques, orthodontiques et ortho-phoniques des fentes labio-alvéolo-palatines. Dans les fentes unilatérales, il existe toujoursune déviation septale. Dans les fentes bilatérales, il existe souvent une brièveté columel-laire. Ces anomalies doivent être prises en compte dans la prise en charge chirurgicale lorsde la chéilorhinoplastie fonctionnelle et esthétique.

Mots clés : fente faciale, fente labio-alvéolo-palatine, rhinoplastie, ventilation nasale.

Treatment of nasal sequelae in labioalveolar palatal cleft conditions

AbstractCleft lip and palate conditions require adequate treatment planning. Anatomical structuresand orofacial functions need to be surgically restored before orthodontic and speech treat-ment can be initiated. In unilateral cleft conditions, the nasal septum is usually deviated andmust be corrected. In bilateral cleft conditions, the short columella must be elongated.Key Words : facial cleft, labioalveolar palatal cleft, rhinoplasty, nasal ventilation.

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Raymond GOLAL. GUYOTO. RICHARDT. KAFFELO. PROST-MAGNINService de Stomatologie, Chirurgie Maxillo-Faciale et Plastique de la Face (Pr. R. GOLA)Hôpital Nordchemin des Bourrelys 13915 Marseille cedex 20

Les fentes labio-alvéolo-palatines (LAP) réalisent, lorsqu'elles sont totales,une triple incompétence : antérieure labio-nasale, intermédiaire alvéolo-palatine et postérieure vélo-pharyngée. Le traitement doit rétablir une

anatomie la plus proche possible de la normale et un fonctionnement le plusphysiologique possible des lèvres, du voile, de la cavité buccale et du nez. Laventilation nasale joue, en effet, un rôle fondamental dans le mécanisme desdéformations pré et postchirurgicales des fentes congénitales. Le traitement pri-maire est à ce titre, primordial. Il représente à la fois le traitement curatif de lamalformation et le traitement préventif des séquelles morphologiques et fonc-tionnelles ventilatoires. Trop souvent négligés chez l'enfant, les troubles de laventilation nasale appellent un traitement précoce pour rétablir les conditionsd'une croissance faciale normale.

� Rappel physiologique de la ventilation nasale

Le nez, formé de l’auvent nasal et des fosses nasales, remplit de multiplesfonctions : olfactive, ventilatoire, immunitaire et morphogénétique chez l'enfant(Gola, 2000 (3)).

Cette dernière fonction met en jeu l'expansion volumétrique naso-sinu-sienne et palato-dentaire. Tout trouble de la ventilation quasi constante dans lesfentes unilatérales, fréquente dans les fentes bilatérales et/ou toute pathologiede la muqueuse nasale pendant les premières années de la vie s'accompagne

Pour la correspondance : Pr Raymond Gola, Service de Stomatologie, Chirurgie Maxillo-faciale et Plastiquede la Face, Hôpital Nord, Chemin des Bourrelys, 13915 Marseille cedex 20.Tel : 04 91 96 86 90 - Fax : 04 91 09 05 80

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d'anomalies de la croissance naso-sinusienne et dento-maxillaire (dysmor-phoses maxillo-mandibulaires, encombrement dentaire) dont la gravité estfonction de la durée, de l'ampleur et de la date de survenue de l'obstruction :« L’adulte garde toute sa vie les stigmates de l’obstruction passagère de l’en-fance » (Worms, 1927 (8)).

Toute obstruction nasale s’accompagne d’une augmentation des résistancesnasales et a pour conséquence le passage rapide à la ventilation orale, intermittentediurne et permanente nocturne. En raison des modifications de la perméabiliténasale, les « nez limites » dans la journée s’obstruent complètement pendant la nuità cause de la congestion veineuse de décubitus qui augmente le volume de lamuqueuse pituitaire, particulièrement érectile en regard des cornets et du septumantérieur. La ventilation nasale optimale est la ventilation exclusivement nasale,bouche fermée, pendant le sommeil (Talmant, 1992, 1995 (6, 7)).

� Traitement des séquelles nasales des fentes LAP unilatérales

Avant la naissance

La déformation nasale est la résultante du décalage des berges osseuses,de la rupture de la sangle musculaire et du déséquilibre des forces s'exerçant depart et d'autre de la fente. Le cartilage inférieur apparaît dans une aile narinairedéjà déformée par la fente et l'action musculaire. (figure 1)

Le seuil narinaire, ouvert, plus ou moins élargi, plonge dans la fenteosseuse. La narine est écartelée entre les berges osseuses. Le vomer apparaît surun septum déjà dévié.

L'auvent nasal, solidaire du septum, est dévié du côté sain. Dans certainscas, le cartilage supérieur du côté fendu est également étiré par rapport à l'osnasal sus-jacent.

01A 01B 01CFig. 1 : Fente labio-alvéolo-palatine unilatérale totale. a) Décalage des bases osseuses. 1) Traction musculaire orbiculaire, 2) Poussée septale, 3) Pres-sion musculaire linguale, 4) Traction musculaire ptérygoïdienne, 4) traction musculaire vélaire ; bet c) Séquelles de fente labio-alvéolo-palatine unilatérale totale droite. Endomaxillie et recul dupetit fragment (coupes axiales de l'arcade dentaire et des fosses nasales).

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Après la naissance

Le nouveau-né présente des déformations osseuses complexes dont cer-taines évoluent depuis près de 7 mois. In utero, le fœtus, en déglutissant leliquide amniotique puis en tétant son pouce, expérimente déjà des fonctionsdéfectueuses. Après la naissance, la dysfonction ventilatoire nasale s'ajoute auxdysfonctions labiales et linguales et contribue à en aggraver les conséquences.

La dysfonction ventilatoire nasale, constante, joue un rôle considérable etsouvent sous-estimé. Malgré la fente ou à cause d'elle, le nouveau-né ne peut respi-rer par le nez, du fait des déformations narinaires, septale et turbinale (il existe sou-vent une hypertrophie des cornets du coté fendu). (figure 2). Ces difficultés ventila-toires nasales, aggravées par des épisodes de rhinites ou d'infectionsrhinopharyngées, en partie liées aux fausses routes alimentaires, l'incitent à adopterrapidement un mode de ventilation orale. L'endomaxillie est aggravée par les pres-sions latérales jugales consécutives à l'étirement du masque facial lié à la ventila-tion orale.

02A 02B 02CFig. 2 : Fente labio-alvéolo-palatine unilatérale totale. a) Apparition du vomer sur un septum déjà déformé (coupe frontale passant par les fosses nasales et la cavité buccale) ; b et c)Séquelles de fente labio-alvéolo-palatine unilatérale totale droite. Même patient que 11. Obstruction nasale par déviation septale (coupes coronale et axiale des fosses nasales).

La pointe de la langue qui s'interposait entre les fragments doit s'abaisseraprès la naissance pour permettre la ventilation orale. La posture basse de lalangue induite par la ventilation orale et la glossoptose expliquent le rétrécisse-ment en quelques jours de la fente par endognathie antérieure du fragment latéral.

Le sphincter vélopharyngé et la fonction tubaire se trouvent profondé-ment modifiés et fonctionnellement insuffisants : rhinolalie, otite séreuse, pertede l'audition.

Les dysfonctions occlusales apparaissent avec les dents.

L'endognathie du fragment latéral peut induire une latérodéviation mandi-bulaire homolatérale au côté fendu. L'épine nasale antérieure étant attirée ducôté opposé, cela réalise une déviation arciforme de la face.

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Ce sont également les troubles de la ventilation nasale qui sont respon-sables de l'endognathie observée dans certaines fentes totales unilatérales dupalais primaire sans fente palatine ou dans certaines fentes localisées au voilemou et à palais secondaire indemne.

Ces anomalies fonctionnelles nasales interfèrent avec les autres fonctionsfaciales et diminuent l'efficacité et la stabilité des résultats des traitementsorthopédiques et/ou orthodontiques.

Après chirurgie.

Les interventions chirurgicales ajoutent leur propre morbi-dité à l'hypoplasie congénitale liée au déficit mésenchyma-teux de la malformation et aux troubles fonctionnels préopé-ratoires. (figure 3)

Fig. 3 : Fente labio-alvéolo-palatine unilatérale. Séquelles nasales. Chéilo-rhinoplastie fonctionnelle secondaire.

Dès lors que la lèvre ou le nez présente un trouble fonctionnel susceptiblede retentir sur la croissance faciale du sujet, il convient de réaliser une chéilo-rhinoplastie fonctionnelle secondaire (Delaire, 1979 (1)).

Celle-ci est indiquée chaque fois que la lèvre supérieure présente un aspectatypique avec déformation des éléments dento-maxillaires sous-jacents. En effet, ledéséquilibre musculaire labio-nasal induit et pérennise les malformations nasales, etpar conséquent les troubles ventilatoires. L'intervention consiste en la remise en posi-tion fonctionnelle des faisceaux labiaux et labio-nasaux du muscle orbiculaire (Stric-ker, 1993 (5)). Cette reconstitution anatomo-fonctionnelle musculaire améliore d'au-tant plus l'état du squelette osseux sous-jacent que l'intervention aura été effectuée àun stade plus précoce. Elle améliore aussi l'efficacité des traitements d'orthopédiedento-maxillo-faciale et assure une meilleure stabilité de leurs résultats (figure 4).

04A 04B 04C 04DFig. 4 : Fente labio-alvéolo-palatine unilatérale totale. Chéilorhinoplastie secondaire avecimpaction de l'auvent nasal, projection et symétrisation de la pointe. a et b) Aspects pré et post-opératoires (vue de face) ; c et d) Aspects pré et postopératoires (vue de profil) (avec la permis-sion de Springer).

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Une gingivo-périostéoplastie ou une greffe osseuse de l'arcade alvéolaireest pratiquée dans un certain nombre de cas pour stabiliser les fragments osseux,favoriser l'éruption et l'évolution de la canine, plus tard pour permettre la miseen place d'un implant dentaire, enfin pour redonner un soutien à la lèvre.

Rhinoseptoplastie et turbinoplastie sont fréquemment pratiquées versl'âge de 6 ans, car les déformations septales sont quasi constantes, même dansles fentes labio-alvéolaires simples.

Dans les séquelles nasales des fentes labio-alvéolo-palatines chez l'adulte,la rhinoplastie fonctionnelle et esthétique trouve une de ses meilleurs indica-tions. En effet, la rhinoplastie classique, en amputant la bosse nasale, aggravesouvent les problèmes ventilatoires.

La correction de la déformation narinaire doit se faire avec le souci per-manent de rétablir la ventilation nasale.

� Traitement des séquelles nasales des fentes LAP bilatérales

Avant la naissance

Le nez est petit et symétrique. La pointe est très rétruse du fait de lagrande brièveté columellaire. Le développement de la columelle est lié au déve-loppement du bord caudal du septum. Si ce dernier est atrophique, la columelleest petite et la lèvre courte et saillante. Arête nasale et septum sont rectilignes,sauf dans les formes avec déviation du tubercule médian. L'auvent nasal estaplati et élargi. Les ailes narinaires sont élargies, le grand axe des narines esttransversal (figures 5 et 6).

05

Fig. 5 : Fente labio-alvéolo-palatine bilatérale totale. Décalage des basesosseuses. 1) Traction musculaire orbiculaire, 2) Poussée septale, 3) Pression musculaire linguale, 4) Traction musculaire ptérygoïdienne, 4) traction musculaire vélaire.

06Fig. 6 : Fente labio-alvéolo-palatine bilatérale. Séquelles nasales.

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Après la naissance

Les problèmes ventilatoires liés à la présence du bourgeon médian en avantdes fosses nasales, peuvent expliquer la conjonction des fragments maxillaires enarrière du bourgeon médian par ventilation orale et position basse de la langue.

Après chirurgie

Le pronostic fonctionnel dépend de la forme anatomique (Gola,1964 (3)).La fente bilatérale totale retentit sur la croissance du prémaxillaire et du maxillaire :

* du fait de l'absence d'union avec les fragments latéraux maxillaires, empê-chant sa croissance transversale ;

* par une lèvre supérieure cicatricielle et fibreuse ;* en raison d'une agénésie dentaire plus ou moins sévère.

Chéilo-rhinoplastie fonctionnelle secondaire (figure 7)

La chéilo-rhinoplastie fonctionnelle des fentes bilatérales répond auxmêmes principes que pour les fentes unilatérales (Millard, 1980 (4)).

07A 07B 07C 07DFig. 7 : Fente labio-alvéolo-palatine bilatérale totale. Chéilorhinoplastie secondaire avecimpaction de l'auvent nasal et projection de la pointe. a et b) Aspects pré et postopératoires(vue de face) ; c et d) Aspects pré et postopératoires (vue de profil) (avec la permission deSpringer).

Les principales déformations nasales séquellaires sont symétriques etcaractérisées par l'absence de projection de pointe nasale avec brièveté plus oumoins importante de la columelle, par l'aplatissement et l'élargissement de l'au-vent nasal et des ailes du nez. Les séquelles labiales sont dominées par l'hypo-plasie du prolabium.

Les nez plats et larges sont traités par simples ostéotomies latérales desprocessus frontaux des maxillaires et rapprochement et/ou par apposition degreffons osseux ou cartilagineux sur le dorsum. Un rapprochement des dômes etune greffe cartilagineuse en apposition sur le lobule sont souvent nécessairespour parfaire le résultat esthétique.

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REFERENCES

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Les nez projetés relèvent de la rhinoplastie fonctionnelle et esthétique quipréserve la valve nasale (Gola, 2000 (3)).

� Conclusion

Le traitement des fentes labio-alvéolo-palatines reste encore aujourd'huiun compromis entre la réparation anatomo-fonctionnelle la plus parfaite et laplus faible rançon cicatricielle. La croissance faciale nécessite non seulementune bonne reconstitution des muscles vélaires et labio-nasaux, le respect tempo-raire de la fente palatine mais aussi une bonne perméabilité nasale. La mécon-naissance de la dysperméabilité nasale a pour conséquences des troubles mor-phogénétiques réduisant la croissance naso-sinusienne, des troubles posturauxtouchant la langue, le rachis et la mandibule et des troubles fonctionnels interfé-rant avec les autres fonctions faciales. Le rétablissement précoce de la ventila-tion nasale est indispensable à une croissance faciale harmonieuse et à l'effica-cité des traitements orthopédiques et/ou orthodontiques des fenteslabio-alvéolo-palatines.

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Le traitement orthodontico-chirurgical desséquelles de fentes labio-alvéolo-palatines

Sandrine Sébille , Joël Ferri

RésuméLa prise en charge des patients présentant des séquelles de fentes labio-alvéolo-palatinesest pluridisciplinaire. Elle nécessite une coopération totale entre le patient et les différentspraticiens du fait de la durée du traitement, de sa complexité et des ajustements du schémagénéral de prise en charge en fonction de l’évolution. Différentes phases thérapeutiques sesuccèdent, chirurgie fonctionnelle, soins dentaires, orthopédie dento-faciale, orthodontie,orthophonie, et psychothérapie. Les résultats sont probants lorsque la prise en charge peutêtre menée à son terme.

Mots clés : fentes labio-alvéolo-palatines, traitement orthodontico-chirurgical.

Orthodontic-surgical treatment of cleft lip and palate sequelae

AbstractIt is essential to have a multidisciplinary approach to cleft lift and palate treatment. This article describes the treatment protocol we use for cleft patients from birth on to adul-thood: it includes orthodontic, psychological and speech treatment, as well as surgery.Results are good when all treatments can be adequately performed.Key Words : cleft lip and palate, orthodontic-surgical treatment.

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Sandrine SÉBILLEJoël FERRICHRU - Hôpital Roger SalengroService de Stomatologie et ChirurgieMaxillo-faciale59037 Lille [email protected]

La prise en charge des patients présentant des séquelles de fentes labio-alvéolo-palatines est pluridisciplinaire.

Notre thérapeutique orthodontico-chirurgicale débute après l’établissementd’un schéma général de prise en charge émanant de l’avis de plusieurs praticiens(dentiste général, orthodontiste, chirurgien maxillo-facial et psychologue). Unbilan clinique et paraclinique complet permet d’envisager les différentes phasesdu traitement.

� Les lésions rencontrées

Les séquelles sont souvent stéréotypées avec cependant des degrés diversd’atteinte.

Elles comprennent :

Les troubles de l’élocution avec la classique rhinolalie ouverte par insuf-fisance vélaire ou persistance de communication bucco-sinusienne oubucco-nasale. Les coups de glotte qui correspondent en fait aux tentativesde compensation de l’incompétence vélaire.

Les troubles de l’équilibre maxillo-facial avec une insuffisance globaledu développement maxillaire (vertical, transversal et antéropostérieur). A cela s’ajoutent les anomalies dento-alvéolaires directement liées à lafente elle-même : agénésie et /ou dystrophies dentaires, brèche alvéolo-nasale. Ces anomalies ont contribué aux malpositions dentaires plus glo-bales que l’on constate dans ces cas.

Les troubles dysfonctionnels avec notamment les incompétences de lavalve musculaire orbiculaire labiale et plus largement, de l’ensembledes muscles du pourtour labio-narinaire fendu (impossibilité de siffler,souffler dans une direction précise, de relever les lèvres, etc.

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Enfin les troubles de la venti lat ion narinaire sont souvent présents.

Les troubles morphologiques comprenant les déformations labio-nari-naires directement liés aux dysfonctions et aux séquelles cicatricielles.

� L’examen clinique et radiologique

Un bilan clinique complété par un bilan radiologique est systématique-ment établi lors de la première consultation. Il permet d’évaluer l’état général dela denture, les diverses caries, les pertes dentaires, l’os alvéolaire de part etd’autre de la fente, le décalage squelettique des bases osseuses.

La recherche d’une communication bucco-nasale est systématique, mêmedans les formes ou aucun signe d’appel clinique n’est présent. L’aspect esthé-tique du visage est également évalué lors de la première consultation même si laprise en charge ne se fera qu’en fin de traitement (rhinoplastie secondaire,retouche labiale, etc.).

Dans le cadre de la prise en charge orthodontico-chirurgicale, les anoma-lies fonctionnelles sont primordiales à repérer. Ainsi doit-on rechercher une res-piration buccale, des troubles de la déglutition avec pulsion linguale, etc.

Enfin, le profil psychologique est noté, intégrant l’attitude de l’enfant, sasituation scolaire, le contact avec les parents, leur motivation et leur demande.

L’ensemble du bilan permet de déterminer le schéma thérapeutique.

� Le schéma thérapeutique

Le traitement orthopédique

Le traitement orthopédique est institué lorsque le patient est en phase decroissance, le plus tôt possible. En pratique, une évolution minimale de la den-ture est nécessaire pour adapter les appareillages (rarement avant l’âge de 6ans).

Les tractions par masque orthopédique (type Delaire) sont préconisées encas d‘hypomaxillie. Le port du masque est nocturne et doit être quotidien.

L’efficacité est notée par des visites régulières chez l’orthodontiste. Lesaut de l’articulé incisif est primordial pour assurer un calage antéro-postérieur.Les échecs sont le plus souvent dus :

- à une mauvaise compliance du patient,

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- à une mauvaise réponse biologique des sutures maxillo-faciales entrantdans le cadre d’un syndrome malformatif complexe pour lequel la « fente n’estqu’un signe parmi tant d’autres ». Enfin, certains traitements chirurgicaux ini-tiaux ou répétés peuvent entraîner des séquelles fibreuses rétractiles majeuresrendant les traitements orthopédiques inefficaces.

L’endomaxillie peut être traitée par quad’helix permettant d’obtenir rapi-dement une bonne dimension transversale. L’appareil est fixe et ne nécessitedonc pas la participation active du patient.

L’orthophonie

Elle est débutée dès que l’ensemble des « effecteurs fonctionnels » et lesrapports occlusaux auront été normalisés. En effet, il sera très difficile, voireimpossible d’obtenir un fonctionnement normal sans des organes et des rapportsanatomiques eux-mêmes normaux. En cas de déficit de cette nécessaire entitéanatomo-fonctionnelle, la rééducation aboutit le plus souvent à des compensa-tions. Si dans certains cas « désespérés » ces compensations sont parfois obliga-toires, elles doivent rester exceptionnelles. Enfin, dans quelques cas, la rééduca-tion peut être nécessaire avant la normalisation anatomique en aidant à cettenormalisation (il s’agit là de rééducation intervenant dans le cadre de l’orthopé-die dento-faciale et non plus directement sur l’élocution).

Quoi qu’il en soit, elle nécessite une bonne coopération et une bonnecompréhension du patient.

Le traitement orthodontique

Il permet le nivellement des arcades dentaires avec correction des malpo-sitions et des rotations dentaires.

Le traitement chirurgical

- Il débute par la normalisation anatomique des effecteurs fonctionnels(muscles vélaires, sangle naso-labiale).

- La fermeture d’une communication bucco-nasale.

Elle s’effectue par transposition de lambeaux muqueux sous anesthésiegénérale.

- La greffe alvéolaire.

En cas de défect osseux au niveau de la fente, une greffe est envisagée.La date d’intervention doit être assez précoce avant l’édification radicu-laire d’une éventuelle canine ou d’une incisive latérale incluse (pour per-

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mettre le mouvement d’éruption au sein de l’os nouvellement greffé).

- Le suivi à long terme est important surtout en cas de parafonction linguale.

L’arbre décisionnel thérapeutique est adapté aux anomalies présentes.

Il peut comprendre les étapes suivantes :

1- Fermeture d’une communication bucco-nasale, traitements desdiverses anomalies anatomiques à l’origine de dysfonctions (traitementchirurgical des insuffisances anatomiques vélaires et naso-labiales).

2- Rééducation orthophonique à la fois phonique et occlusale.

3- Orthopédie dento-faciale :

a. Expansion transversale palatine par quad’helix

b. Traitement orthopédique par masque de Delaire

c. Traitement orthodontique avec nivellement d’arcade et conserva-tion de la denture lactéale au niveau des berges de la fente pourpérenniser l’os alvéolaire

d. Greffe alvéolaire sur le site de la fente

e. Alvéolectomie de canine incluse et mise sur arcade

f. Chirurgie orthognatique

g. Réhabilitation prothétique

4- Rééducation orthophonique à la fois phonique et occlusale avec lesnouveaux rapports occlusaux.

5- Chirurgie esthétique : rhinoplastie, chéiloplastie secondaires, retouchescutanées.

� ConclusionLe suivi thérapeutique des patients présentant des séquelles de fentes

labio-alvéolo-maxillaires s’envisage à long terme avec de multiples phases detraitement. Elle nécessite une totale coopération et confiance du patient et uneréelle motivation. Les résultats sont probants lorsque le traitement peut êtremené à terme.

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Spécificités de la rééducation orthophoniquedans les cas de fente palatine

Hélène Baylon, M. Roger, M. Bigorre, P. Montoya

RésuméLa prise en charge orthophonique des enfants présentant une fente palatine ou une incom-pétence vélo-pharyngée est facile du point de vue technique mais elle ne se limite pas àquelques jeux de souffle. Il faut considérer les problèmes auditifs, les difficultés d’installa-tion du langage oral et écrit, le retard de parole de façon légèrement différente de ce quiexiste en pratique courante en gardant une vue globale du développement de l’enfant. Nousdévelopperons ici les spécificités de cette prise en charge.

Mots clés : fente palatine, incompétence vélo-pharyngée, rééducation orthophonique.

Specific features of speech therapy in the treatment of cleft palate conditions

AbstractSpeech therapy in cleft palate children is technically quite easy to carry out. Nevertheless, itcannot be reduced to the training of velar competence through breathing-blowing games.Hearing loss, oral and written language problems, speech delays should all be taken intoaccount in a specific manner.Key Words : cleft palate, velo-pharyngeal incompetence, speech therapy.

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Hélène BAYLONOrthophonisteM. ROGEROrthophoniste, M. BIGORREChef de clinique, assistant des hôpitauxP. MONTOYAChirurgien des hôpitaux, Unité de Chirurgie Plastique PédiatriqueCHU Lapeyronie34595 Montpellier cedex 5

Nous parlerons ici des fentes palatines complètes, incomplètes (divisionsous-muqueuses du voile du palais), isolées ou associées à une fentelabio-maxillaire ou à une micrognathie (syndrome de Pierre Robin).

La présence d’une fente palatine entraîne la perturbation de plusieursfonctions : la déglutition, la respiration, l’audition, la phonation. Les deux pre-mières fonctions se rétablissent rapidement avec la prise en charge médicale etchirurgicale précoce (Montoya et al, 2002), l’audition plus tardivement. La pho-nation a un développement ralenti durant les 2 ou 3 premières années. Celan’empêche pas ces enfants d’avoir une intelligence normale : dans la populationd’enfants que nous suivons, nous retrouvons la même proportion d’enfants enavance ou d’enfants en retard que dans la population normale (Montoya, Bay-lon, 1996).

La phonation est ralentie et parfois perturbée pour plusieurs raisons :même après la réparation chirurgicale qui se fait dans la plupart des équipesavant 7 mois, les muscles du voile du palais reconstruits ne fonctionnent pasd’emblée au maximum de leur efficacité. La déglutition, les cris entraînent biences muscles, mais pour la fonction tubaire et pour la délicate mise en place despoints articulatoires, les progrès sont plus lents. Après l’intervention, cesenfants en général s’alimentent bien, mais ils ont souvent une baisse auditive detransmission de 20 à 50 décibels fluctuante, plus importante lorsqu’ils présen-tent une rhino-pharyngite (Lederlé E., Kremer J.M., 1991). Dans certains ser-vices hospitaliers, des drains transtympaniques sont placés avant 1 an.

Cette baisse auditive, peu gênante pour un enfant de 4 ans car il a déjà unsavoir perceptif très important qui lui permet de mettre un mot mal entendu en

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correspondance avec un mot déjà connu grâce au contexte, l’est énormémentpour un enfant qui entre dans la communication orale. De ce fait, à 2 ans, 1enfant sur 2 ou sur 3, selon la malformation, présente un retard de langage enexpression de 6 mois ou plus.

L’orthophoniste qui prend en charge un jeune enfant présentant une divi-sion palatine doit savoir qu’il peut présenter en plus une baisse auditive de 20 à50 décibels fluctuante, et un retard de langage.

Cela implique deux choses : il doit parler à une intensité plus forte, sur-tout dans les périodes pendant lesquelles l’enfant est enrhumé, il peut en tenircompte dans la cotation des actes.

Le traitement chirurgical comporte plusieurs interventions au niveaufonctionnel et esthétique. Lorsqu’une pharyngoplastie ou une myoplastie vélairesont effectuées en âge phonétique, la rééducation orthophonique débute aprèsaccord du chirurgien en général 3 semaines après l’intervention. Si un ou deuxpoints non encore résorbés sont encore visibles sur le palais, il ne faut pas s’in-quiéter, l’enfant ne risque rien.

� La rééducation du langage oral

Les différences avec la prise en charge d’un retard de langage simple sontpeu importantes mais elles méritent que l’on en tienne compte.

Du fait de leur baisse auditive de transmission et de la difficulté de miseen place de l’articulation, ces enfants sont lents à démarrer dans l’expression. Ilsne font des phrases qu’à 2 ans et demi et parlent peu. De 3 ans à 11 ans, lesparents disent souvent qu’ils « se rattrapent », qu’ils parlent trop souvent. Al’adolescence, par contre, ils ont tendance à être très silencieux.

Il faut impérativement donner de l’assurance dans le comportement decommunication, particulièrement à ceux dont la malformation est visible del’extérieur, fente labio-maxillo-palatine unilatérale ou bilatérale, car selonune étude que nous avons réalisée (Baylon, Montoya, 1998), à l’adolescence,ces enfants initient peu la communication, probablement parce qu’ils sontgênés par leurs défauts esthétiques. Comme ils ne seront suivis en rééduca-tion orthophonique que de 3 à 7 ou 8 ans au maximum, et pour certainsd’entre eux seulement pendant 1 an, il faut donc les rendre hyper performantspour qu’ils puissent garder un bon niveau de communication à l’adolescence.L’orthophoniste rendra les parents vigilants aux conditions de la communica-tion : ils doivent être à l’écoute sans être intrusifs, varier les situations et lesinterlocuteurs ; par exemple, c’est cet enfant que les parents enverront faire

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des courses difficiles ou demander un renseignement plutôt que l’un de sesfrères ou sœurs.

En ce qui concerne la longueur des phrases, ils ont tendance à employerdes phrases plus courtes, peut-être à cause d’une moins bonne utilisation de l’airexpiratoire. Il faut donc les amener à enrichir leurs phrases et à penser à gérer legeste respiratoire en fonction de la longueur de la phrase.

Au niveau lexical, lors de l’apprentissage de mots nouveaux, il faut fairedavantage d’exercices de réutilisation du vocabulaire qui sinon reste davantagepassif que chez les enfants qui ont un retard de langage simple.

Dans la série de 400 enfants que nous suivons actuellement, 5 enfantssont dysphasiques, ce qui représente un pourcentage minime (2 enfants présen-tant un syndrome de Pierre Robin, 3 enfants avec fente palatine isolée).

Les enfants présentant une fente palatine dans le cadre d’une délétion 22q11 ont un retard de langage plus marqué que les autres enfants (Philip, 2001),un retard mental variable, et toujours des difficultés d’apprentissage. Ils sontsuivis en orthophonie pendant au moins 5 ans.

� La rééducation du langage écritL’existence d’un retard de langage fait que l’enfant ne comprend pas bien

ce qu’il lit car il lui manque du vocabulaire, donc il n’aime pas lire, il apprendmoins de vocabulaire nouveau et cela entretient son retard de langage (Rondal,1985). En orthographe, la non perception de la différence entre les consonnessourdes et les consonnes sonores entraîne souvent une dysorthographie phoné-tique. Il s’installe chez ces enfants un doute constant sur ce qu’ils entendent etils finissent par faire beaucoup de fautes, y compris par hyper correction.

Dans la série des enfants que nous suivons, nous avons de 20 à 25% d’en-fants dyslexiques ou dysorthographiques et jusqu’à 33% de dysorthographiquesdans les cas de syndrome de Pierre Robin (Baylon, Montoya, 1998).

Selon Eliason (1990), les enfants présentant une fente palatine ont desperformances moins bonnes que les enfants normaux sur la mémoire auditive, lelangage, la perception visuelle, la reconnaissance auditive et visuelle des mots,la compréhension du texte lu, l’identification des erreurs phonétiques. De ce faittous ces points sont à travailler préventivement en rééducation orthophoniquedès que l’on aborde le langage oral. Il faut proposer encore plus d’exercices dediscrimination auditive, sur la différence sourde-sonore autant que sur la diffé-rence orale-nasale au niveau du phonème isolé, dans le mot, dans la phrase. Lamémoire auditive peut se travailler dans des comptines, des jeux musicaux de

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reproduction de rythme, de succession d’instruments ou de jouets sonores, surdes logatomes, des mots nouveaux ou des combinaisons de mots connus. Endictée de mots, il sera très important de travailler l’auto correction afin quel’identification des erreurs phonétiques devienne plus systématique. On peutproposer des jeux de d’orientation spatiale de figures ou de signes écrits avantde travailler sur la mémoire visuelle au niveau du mot.

On voit donc ici que la rééducation des enfants présentant une fente pala-tine ne se résume pas à faire souffler dans un ballon, mais qu’il faut être attentifaux troubles du langage oral et/ou écrit qui peuvent se développer dans certainscas et y remédier par des exercices plus variés que dans les cas de retard de lan-gage habituels.

� Les jeux de souffle

Le principe des jeux de souffle est d’améliorer la souplesse et l’effica-cité de contraction des muscles du voile du palais. La plupart des enfants pré-sentant une insuffisance vélo-pharyngée ont un timbre de voix nasonné, par-fois associé à une fuite nasale ou à un ronflement nasal et lorsqu’on leurdemande de souffler par la bouche, l’air passe à la fois par la bouche et par lenez. Certains peuvent même éteindre la flamme d’une bougie en soufflantuniquement par le nez.

Il faut parvenir à ce que l’enfant souffle fort et uniquement par la bouche.Pour cela, on utilisera les jouets sonores à embout. Tous les jeux de souffle neprésentent pas la même difficulté. Les sifflets en plastique sont en général ceuxd’où sort un son le plus facilement. La différence de forme des embouchurespermet au passage de travailler les praxies des lèvres.

Les jeux de souffle les plus faciles sont ensuite ceux que l’on peut faireen soufflant dans un tube. Plus le tube est large, plus la force du souffle à pro-duire est grande. L’enfant devra souffler sur des objets posés sur une tabledans le but de les faire tomber : cubes en mousse, boîtes de céréales vides,petits animaux ou personnages en plastique. On peut les présenter les uns àcôté des autres ou empilés. Cela donne l’occasion de travailler le vocabulairedes couleurs, des formes et les possibilités de mémorisation (exemple : « tuvas souffler sur le cube rouge, puis le vert, puis le bleu »). On placera lesobjets de plus en plus loin de l’enfant, ainsi il devra souffler de plus en plusfort.

Une autre série d’exercices consiste à souffler sur des objets qui peuventse déplacer : petites balles en papier, billes, voitures, bateaux, avions en plas-

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tique. On peut poser des marques de couleur pour montrer jusqu’où chaqueobjet arrive, faire des courses, des parcours avec des tunnels. Les bulles deman-dent un contrôle du souffle assez fin.

A la maison, les jouets sonores lassent vite les parents. Il est préférable dedemander aux parents d’acheter des pailles droites ou coudées. L’enfant aspirerad’abord avec une demi paille puis avec une paille entière des liquides, puis desyaourts liquides, enfin des yaourts brassés et des compotes. Le rythme idéalserait de faire cela tous les jours à chaque repas. Un rythme de deux fois parsemaine constitue un minimum.

Les jeux de souffle les plus difficiles consistent à faire gonfler un ballonde baudruche, des jouets gonflables avec valve de sécurité, des bouées.

Lorsqu’un souffle buccal fort est obtenu, la difficulté qui se présenteensuite est l’articulation des phonèmes sans déperdition nasale. On peut alorspasser d’un tuyau à une paille de plus en plus courte pour les constrictives, et àun petit bout de papier posé sur les lèvres pour les occlusives bilabiales.

� La rééducation de la paroleNous avons vu qu’il était très important de donner à l’enfant l’envie de

communiquer, même et surtout si l’enfant arrive chez l’orthophoniste avec uneparole inintelligible. Les jeux de souffle constituent une bonne introduction à lafois à une atmosphère ludique et au développement d’une compétence vélo-pha-ryngée favorisant la mise en place des points articulatoires.

La principale indication de rééducation est l’existence d’un retard deparole. Les troubles de la parole propres à l’incompétence vélo-pharyngéecoups de glotte, souffles rauques, sigmatisme nasal sont rares (4 % à 10% desenfants selon la malformation). Ils peuvent être effacés dès leur apparition par laguidance qui se fait dans la plupart des équipes hospitalières.

Il est peu fréquent de recevoir en cabinet un enfant qui n’articule que desconsonnes nasales. Dans ce cas, il faut faire beaucoup de jeux de souffle avantd’aborder l’articulation. Certains enfants passent plus facilement des jeux desouffle aux constrictives qu’aux occlusives. D’autres commencent à dire des« p » à partir du moment où ils arrivent à gonfler les joues. Dans les deux cas,une fois la première consonne orale obtenue, le montage articulatoire est lemême que celui qu’on utilise dans le cas d’un retard simple.

Les occlusives ne posent pas de problèmes particuliers importants. L’arti-culation de p, b peut être gênée au niveau de l’occlusion bilabiale par la formedu maxillaire supérieur dans les cas de fente labio-maxillo-palatine bilatérale

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totale, ou par l’asymétrie de la contraction labiale dans certaines formes de fenteunilatérale. Un travail praxique rapide des lèvres est nécessaire ; il sera renforcéchez les enfants qui en plus respirent la bouche ouverte et ont donc des lèvrespeu toniques. Dans ce cas, avant de leur demander de fermer la bouche plussouvent, il faut penser à travailler la respiration par les deux narines. Parfois enmême temps que la fermeture bilabiale se produit une déperdition nasale quin’existe que sur ces phonèmes. Les massages autour des lèvres sont alors inté-ressants pour casser ce conditionnement.

Dans le montage des constrictives s-z et ch-j, la forme de la voûte pala-tine, du maxillaire supérieur, l’implantation des dents sont à considérer.Lorsque les conditions anatomiques sont défavorables, il faudra se contenterd’une articulation atypique, pour laquelle on reconnaîtra chacun de ces pho-nèmes mais on remarquera qu’ils sont légèrement différents de la norme.Dans les cas de fente labio-maxillo-palatine unilatérale, les enfants ont unenette tendance à dévier la pointe de la langue du côté de la fente, ce qui rendégalement l’articulation des constrictives atypique. Le travail praxique réa-lisé très tôt dans certaines équipes hospitalières prend ici son importance :mise en bouche particulière du biberon ou de la cuillère, stimulation d’uncôté de la langue.

Les coups de glotte et souffles rauques apparaissent chez des enfants trèstoniques avec une incompétence vélo-pharyngée importante. Après avoir faitbeaucoup de jeux de souffle, l’enfant doit apprendre à antérioriser son articula-tion avec des petits exercices de mobilisation des lèvres (ouvrir, fermer, serrer,tenir un petit bout de papier entre les lèvres et le projeter en soufflant), de gon-flement des joues fort, moins fort, jusqu’à ce que la pression d’air intra buccalsoit contrôlée. A partir du montage du p et du b qui est assez facile, les autrespoints d’articulation se mettent en place comme lors d’un retard de parole. L’ap-port du chant ou des comptines est indispensable pour rétablir une courbe mélo-dique plus harmonieuse et ralentir le débit de la parole.

Dans tous les cas, un enfant qui présente une incompétence vélo-pharyn-gée ne doit pas avoir un débit de parole trop rapide, il faut qu’il parle à un débitnormal, sinon, même après une pharyngoplastie, une fuite nasale ou un nason-nement intermittents persisteront. Si l’un des deux parents parle très vite, il fautlui demander de parler plus lentement ; c’est difficile mais fondamental pourdonner à l’enfant un modèle de parole favorable. Les mouvements articulatoiresdoivent être suffisamment amples et bien différenciés pour que les assimilationsde nasalité soient évitées et que la voix ne reste pas enfermée dans le masque, cequi concourt à la présence d’un nasonnement.

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� La rééducation de la voixLa rééducation concernant le nasonnement passe essentiellement par les jeux

de souffle. Les voyelles les plus faciles à travailler sont a puis eu, o, è, enfin ou, u, i.

Pour vérifier qu’il n’existe pas de déperdition nasale sur les phonèmes isolésou les syllabes, on peut utiliser un miroir que l’on place sous le nez de l’enfant et luimontrer la buée qu’il produit lorsqu’il laisse l’air s’échapper par le nez. Après avoircontrôlé l’absence de nasalité sur les voyelles isolées et les syllabes, il faut passeraux syllabes et aux mots sans nasales. Dans les mots et les phrases courantes, la pré-sence de consonnes ou de voyelles nasales ne permet pas d’utiliser le miroir. Ils doi-vent être proposés en répétition bien plus tard. Le contrôle visuel de la déperditionnasale est intéressant lorsque l’enfant présente une perte auditive de plus de 25 déci-bels. Les enregistrements sur cassettes sont indispensables car l’enfant peut s’écou-ter à une intensité plus forte que celle qu’il a utilisée et que, dans le même temps oùl’on établit d’autres habitudes articulatoires, on lui fait mémoriser sa nouvelle voix.

La fuite nasale se travaille comme le nasonnement avec beaucoup de jeuxde souffle.

La rhinolalie fermée est plus rare mais plus difficile à faire disparaître sielle est due à un rétrécissement de l’une des deux narines ou à une déviation dela cloison nasale. Les exercices de respiration nasale forcée et amplifiée doiventêtre repris à la maison plusieurs fois par jour pendant une à deux minutes audépart puis avec une durée augmentée ; l’utilisation d’un calendrier est pratiquepour motiver l’enfant et la famille.

� Quelques cas particuliersLa rééducation est plus longue dans les cas de retard mental, de surdité pro-

fonde, de troubles neurologiques associés ou si la malformation anatomique dedépart est très importante. Dans les autres cas, les résultats sont assez rapides.

� Conclusion Cette rééducation ne comporte pas de difficultés techniques particulières.

Elle demande de respecter une progression d’exercices praxiques et phonétiquesqui peuvent s’effectuer sur un mode très ludique. Il faut garder à l’esprit lescaractéristiques anatomiques individuelles de l’enfant en même temps quel’idée de son développement au long cours dans sa globalité et ne pas craindrede se lancer dans ce type de rééducation très gratifiante lorsqu’on s’intéresse àtoutes les composantes de cette pathologie et que l’on accompagne le futuradulte dans sa dynamique de communication.

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REFERENCES

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L’éducation gnoso-praxique orale.Son importance dans la prise en charge desenfants présentant une fente palatine postérieure.

Catherine Thibault

RésuméL’éducation gnoso-praxique oral est primordiale, l’accompagnement parental précoce indis-pensable. Ils doivent tenir compte du cap de maturation gnoso-praxique, ainsi que du lienentre oralité verbale et oralité alimentaire chez les enfants présentant une fente palatinepostérieure.

Mots clés : fente palatine, rééducation neuro-musculaire, fonctions oro-faciales, guidanceparentale.

Oral gnosopraxic remediation in the treatment of children with posterior cleft palate

AbstractIn treating children with posterior cleft palate conditions, the concept of oral gnosopraxicremediation is central and early parental support is essential. Both treatments must takeinto account the peak period of gnosopraxic development, as well as existing links betweenoral expression and oral feeding in these children.Key Words : cleft palate, neuromuscular therapy, oro-facial functioning, parental guidance.

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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Catherine THIBAULTOrthophoniste, psychologueAttachée de consultation Hôpital Necker-Enfants MaladesService de Chirurgie Maxillo-faciale149 rue de Sèvres75743 Paris Cedex 15

� RappelLa déperdition phonétique du voile de l’enfant a :

Une origine anatomique :

soit le voile n’est pas réparé dans les cas de :

- division vélo-palatine

- division sous-muqueuse, bifidité du voile, reflux alimentaire pharyngo-nasale

- voile court

- agénésie du voile

- agénésie musculaire

soit le voile est réparé insuffisamment ➝ le voile est court sans pilier postérieur(sans pharyngo-staphylin)

Une intervention chirurgicale est nécessaire.

Une origine neurologique (fente postérieure) dans le cas de :

- syndrome du 1er Arc (V) : Absence du péristaphylin externe

- syndrome du 2ème Arc (VII) : Syndrome de Moebius, absence de lacommande neurologique du péristaphylin interne

- syndrome du 3ème Arc ➝ Séquence de Pierre Robin

- syndrome du 4ème Arc ➝ syndrome Catch 22, Di-georges, syndromevélo-cardio-faciale

Nous sommes en présence d’un dysfonctionnement néonatal de la commandedu tronc cérébral (DNTC)

- Para-Robin (encéphalopathie)

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- Syndrome de malformation cérébrale : syndrome de C.H.A.R.G.E, syn-drome de Kabuki, syndrome X.fragile…

- Neuropathie et myopathie

La prise en charge orthophonique précoce pour les enfants présentant un voileneurologique est primordiale.

� L’oralité est fondatrice de l’être

La cavité bucco-nasale ou stomadeum se met en place au cours des deuxpremiers mois de l’embryon. La bouche embryonnaire et le nez sont constituésde peau qui s’est internalisée. Notons l’unité d’origine de l’oralité buccale etgustative et de la nasalité ventilatoire et olfactive.

La face se construit à partir de cellules qui migrent du cerveau. L’originecommune de la face et du cerveau permet de faire correspondre :

- aux structures naso-frontales, le prosencéphale

- aux structures maxillo-mandibulaires, le tronc cérébral.

L’oralité débutante : passage de l’embryon au fœtus

Le réflexe de HOOKER objective l’oralité débutante : le passage de l’em-bryon au fœtus.

C’est au cours du troisième mois que l’on peut identifier le réflexe deHooker, au cours de la déflexion céphalique, le palais se forme, la langue

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descend, la main touche les lèvres, la bouche s’ouvre et la langue sort pourtoucher la main.

Alors apparaissent vers la dixième semaine les premiers mouvementsantéro-postérieurs de succion, puis vient la déglutition entre la 12 et la 15èmesemaine.

La succion apparaît donc avant la déglutition.

Ce couple moteur automatique qu’est la succion-déglutition requiert l’in-tégrité de tous les noyaux moteurs du tronc cérébral.

� L’oralité, marqueur qualitatif de maturation corticale de lafonction respiratoire, digestive et cardiaque.

La succion et la respiration sont intimement liées puisque la succionreflète les conditions ventilatoires du nouveau-né et contribue à les améliorer.Ce n’est qu’à partir du troisième mois qu’il sera capable de se ventiler par labouche (après un épisode d’obstruction nasale par exemple).

5 nerfs du tronc cérébral sont nécessaires pour sucer et déglutir :

- le nerf facial assure la contraction de l’orbiculaire des lèvres et des buc-cinateurs

- le nerf hypoglosse permet la contraction de la langue

- le nerf trijumeau pour les mouvements de translation de la mandibule

- les nerfs glosso-pharyngien et pneumogastrique assurent la commandede la déglutition et sa coordination.

L’oralité alimentaire motrice est assurée par ce travail de succion.

Nous savons aujourd’hui que la séquence de Pierre Robin (SPR) résultant de ladéfaillance précoce des fonctions du tronc cérébral touche l’oralité primaire, lesrégulations respiratoires, cardiaques et digestives (1 cas sur 8500 naissances).La langue qui reste incluse dans la cavité stomadéale imprime sa forme en « U »à la fente palatine.

La micrognathie témoigne du défaut de succion-déglutition, tandis que laglossoptose et les obstructions respiratoires correspondent à un trouble centraldu tonus musculaire mandibulo-pharyngo-lingual et pharyngo-laryngé. Lespauses respiratoires, les bradycardies profondes et l’asynchronisme pharyngo-sphinctérien complètent l’expression de cette grave anomalie de l’organisationsensori-motrice du tronc cérébral (activité motrice des nerfs crâniens 5 à 12).

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L’exploration de ces défaillances, diversement associées, permet une classi-fication selon un indice de gravité et une prise en charge thérapeutique adaptée.

Tant en ce qui concerne son rôle ventilatoire indirect que sa participationdynamique à la déglutition, à la mastication ou à la phonation, la langue présentedans la séquence de Pierre Robin un degré de dysfonctionnement neuromuscu-laire et une vitesse de maturation qui varient d’un enfant à l’autre et qui jouent unrôle capital dans le choix du traitement et dans la durée de son maintien.

Une SPR peut survenir dans des contextes soit malformatifs variés ethétérogènes (environ la moitié des cas), soit hors de tout contexte malformatif(l’autre moitié des cas).

En l’absence d’anomalie neuromusculaire ou osseuse, ni d’anomalie cor-ticale, la gravité de la séquence tient essentiellement au degré de l’atteinte fonc-tionnelle respiratoire, orodigestive et neurovégétative, liée à la fois au statutanatomique des voies aériennes supérieures des enfants atteints et au dysfonc-tionnement néonatal du tronc cérébral (DNTC). Celui-ci est de sévérité trèsvariable d’un enfant à l’autre, et comporte des troubles de succion-déglutition,de la motricité oro-oesophagienne, de la dynamique glosso-pharyngienne, ainsiqu’une dysrégulation ortho-parasympathique cardiaque. De gravité variable,quasi constants dans les premières semaines de vie, ces symptômes s’améliorentprogressivement pour disparaître totalement après l’âge de 2 ans, en règle géné-rale.

Dans le cas des patients présentant une séquence malformative (une ouplusieurs autres malformations associées), il peut s’agir d’entités cliniques bienidentifiées (PR syndromiques ; parmi elles, citons, en raison de leur fréquence,le syndrome de Stickler, diverses anomalies chromosomiques, la microdélétion22Q11, les anomalies faciales des arcs branchiaux (syndrome de Franceschetti,de Nager), syndromes tétratogéniques, ainsi que des syndromes plus rares telque le syndrome de Williams (BLANCO-DAVILA et al.2001), le syndrome Xfragile (N.EM 2003)).

Certains syndromes PR surviennent dans un contexte malformatif non éti-queté (PR associés), avec des atteintes touchant surtout le conotroncus cardiaque,le SNC, l’œil et le squelette. Les syndromes d’immobilité fœtale, quelle que soitleur cause, peuvent aussi s’accompagner d’une séquence de Pierre Robin.

Au niveau génétique, la séquence de Pierre Robin isolée est sporadiquedans la majorité des cas. Cependant environ 10 à 15% des cas sont familiaux etune transmission autosomique dominante est alors évoquée. Il n’y a pas à cejour de localisation génique déterminée.

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Le diagnostic de PR impose une évaluation précoce, précise, des symp-tômes de dysfonctionnement du tronc cérébral. Trois types de gravité croissante,sont distingués :

- le type 1. Il ne nécessite qu’une surveillance staturo-pondérale.

- le type 2. Dysoral, il est caractérisé par la défaillance centrale de la suc-cion-déglutition, dont le gavage permet de suppléer les premiers moisen attendant l’apparition de la praxie orale à la cuillère. L’équilibre res-piratoire reste précaire.

- le type 3. Dysoral, il est défini par une obstruction respiratoire majeure.Les nouveau-nés sont trachéotomisés et gavés. Ce gavage est progressi-vement relayé par l’apport alimentaire à la cuillère.

La prise en charge médicale des enfants atteints de PR s’est beaucoupaméliorée depuis quinze ans, grâce à la meilleure connaissance de l’entité fonc-tionnelle du dysfonctionnement néonatal du tronc cérébral, et grâce à desmesures thérapeutiques adaptées : soins de nursing, nutrition entérale, préven-tion des risques d’aspirations trachéales, levée de l’obstacle ventilatoire (s’il estmajeur) par trachéotomie, prise en charge du RGO et de l’hyperactivité vagale.

Les désordres oesophagiens sont fréquents et semblent résistants au trai-tement anti-reflux classique. BAUJAT et al (2001) identifient une configurationmanométrique peu commune.

Les difficultés ORL doivent être dépistées et prises en charge dès l’âged’un an (MEDARD et al 1999). NOWAKOWSKA (2000) montre qu’entre 3 et8 mois, 93.3% des enfants de leur population présente un dysfonctionnement dela trompe d’Eustache.

Le pronostic vital et développemental des PR isolés a été radicalementamélioré. Un effort doit être maintenant entrepris pour réduire l’aspect iatrogènede ces techniques, sans perdre les bénéfices de stimulations psychomotrice etsensorielle visant à accélérer les processus de maturation spontanée de la corti-calisation de l’oralité à travers une prise en charge psychomotrice et kinésithéra-pique au début de l’hospitalisation.

Notons que les désordres d’alimentation sont toujours présents, mais quele type de désordre varie d’un enfant à l’autre.

� Les deux oralités alimentaires et verbalesUne homologie de développement apparaît dans le processus de la verba-

lisation et de l’alimentation. Les praxies de mastication et celles du langage se

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mettent en place parallèlement en utilisant les mêmes organes et les mêmesvoies neurologiques.

Au cours de la première année de vie, l’oralité primaire, succionnelle,réflexe, est progressivement doublée puis relayée par une nouvelle stratégie ali-mentaire : la praxie à la cuillère, c’est le début de l’oralité secondaire, corticale.Cette double stratégie alimentaire orale correspond à la superposition, pour untemps, de deux stades de maturation neurophysiologique du bébé.

Notons que l’enfant avec une SPR, allant d’une dysoralité moyenne à unedysoralité majeure, ne passe pas par le stade de la double stratégie alimentaire.

� La fonction orale : première expérience de l’angoisse et du conflit.

L’évolution globale de l’enfant se fait autour des fonctions du carrefouraérodigestif : respiration, déglutition, succion, mastication, praxies orales, pho-nation.

L’examen clinique de la déglutition (temps buccal), du bavage, de la mas-tication, de la qualité d’interaction entre la mère et l’enfant, de la position del’enfant pendant l’alimentation est nécessaire dans tout examen clinique ortho-phonique de l’enfant avec une SPR.

Les plaintes sont le plus souvent une difficulté pour mordre, un refus d’ali-mentation, l’exclusion des solides, un reflux nasal, des vomissements, un bavage.

A l’examen nous retrouvons des résidus sur la langue, un mauvaiscontrôle de la motricité linguale, une progression de l’aliment mal contrôlée,une perte prématurée de liquide, une déglutition en plusieurs essais.

La déglutition peut alors devenir le symbole de l’acceptation de l’incor-poration alimentaire. Génératrice d’angoisses, elle correspond au mouvementpar lequel nous franchissons la frontière entre le dehors et le dedans, entre lemonde extérieur et notre intimité digestive. La diversification alimentaire etl’utilisation de nouveaux outils, comme la cuillère puis la fourchette vont réelle-ment caractériser la signification de la bouche comme médiatrice entre le dehorset le « moi intestinal » commençant à partir du voile du palais.

Soulignons l’origine différente de la bouche et du pharynx. La boucheest constituée d’ectoderme, de la peau internalisée, elle communique enarrière avec le pharynx qui lui a une origine endodermique, le pharynx a lamême origine que l’intestin. Le voile du palais et la langue correspondent àce passage ectoderme-endoderme et sont à l’origine de la catastrophe d’in-gestion.

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Angoisse d’avaler, angoisse pour la nouveauté, troisième angoisse pourl’enfant alimenté par gavage, celle de mettre dans sa bouche.

Nous sommes à l’entrecroisement de fonctions neuropsychologiques spé-cifiques et génétiquement programmées et de la mise en place de processusaffectifs, à travers lesquels est impliquée l’histoire propre des parents.

� L’éducation gnoso-praxique orale et l’accompagnement parentaldans le cas de fente postérieure avant trois ans.

Dans de nombreux syndromes, nous retrouvons une hypotonie orofaciale,peu de différenciation des mouvements de la pointe de la langue, de mauvaismouvements latéraux, une mauvaise coordination succion-déglutition, uneabsence de mastication des solides, une hypersensibilité buccale, une postériori-sation sur de nombreux phonèmes, une déperdition nasale.

Objectifs de l’éducation gnoso-praxique orale

- Elle aide l’enfant à prendre confiance en lui, permet de rompre la com-pacité de la relation mère/enfant, pour enfin engager celui-ci vers la voiede l’autonomie ; elle doit essayer de rendre plus serein le climat autourdu repas et ainsi l’enfant peut s’insérer socialement.

- Elle restaure l’oralité alimentaire en évacuant la peur et le dégoûtengendrés par le contact des aliments avec la bouche et la manipulationde la nourriture, elle doit créer la sensation de faim.

- L’enfant peut prendre conscience de ses possibilités perceptivo-motriceset augmenter ses compétences face au comportement inadapté.

Mise en place du soutien orthophonique

Il est important de montrer aux parents :

- Les jeux bucco-faciaux (praxies labio-linguo-jugales) permettant l’édu-cation phonologique.

- Les jeux de souffle, la différenciation orale/nasale amenant à l’équili-brage des flux ventilatoires.

- Les jeux favorisants l’éclosion du langage et rétablissant la boucleaudio-phonatoire (attention portée à ce que dit l’enfant et non à laforme de sa parole).

- Education perceptive et sensibilisation aux caractéristiques des sons.

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- Le retour à la sensorialité :

• le toucher : jeu avec le sable, la pâte à modeler, sentir les différencesentre doux et rugueux, pointu et rond, chaud et froid, mou et dur…latexture et le travail du toucher de la nourriture.

• apprendre les différentes qualités de l’aliment : sa couleur, son aspectavant la consommation avec le support de l’image.

• L’olfaction : l’odeur est soumise à l’apprentissage, il faut donc l’éduquer.

• La gustation : la saveur, le salé est souvent préféré au sucré chez lesenfants présentant des problèmes d’alimentation.

Tous ces « jeux » doivent permettre la régression en prenant en compte lasensibilité individuelle et les conflits surajoutés ; les différentes thérapeutiquesvisant à faire manger l’enfant et le faire grossir, doivent lui permettre de trouverle plaisir de manger et par conséquent d’échanger.

L’accompagnement parental précoce

L’accompagnement parental consiste en la mise en place d’entretiens oùl’empathie joue un rôle essentiel qui vise à maintenir et à favoriser les liens inter-personnels, un espace d’écoute de la souffrance des parents permettant un soutienet une véritable réhabilitation narcissique, une réhabilitation de la démarcheparentale dans un registre qui n’est plus celui du déni ou de la culpabilité.

Soulignons la détresse des mères qui ne peuvent nourrir « normalement »leur enfant.

Les parents sont le plus souvent soucieux d’apporter une aide effective àleur enfant. Cependant, ils font preuve d’anxiété et de maladresse et ne font pasforcément le rapprochement entre les difficultés auxquelles ils se heurtent dansl’alimentation de leur enfant, les difficultés de succion-déglutition et les pro-blèmes de parole (oralité alimentaire et oralité verbale).

Il faut renforcer les tendances positives des parents et les inciter à adoptercertains comportements, les rendre créatifs, actifs. Les exemples sont essentielscar ils les reprendront plus ou moins consciemment avec leur enfant.

� L’éducation gnoso-praxique orale dans la prise en chargeorthophonique de l’enfant de plus de trois ans présentant une fentepostérieure.

La prise en charge orthophonique est motivée par :

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- une inquiétude trop manifeste des parents et une attitude néfaste face àla parole de leur enfant,

- un retard de parole et ou de langage,- un travail spécifique de la voix, du souffle, de la ventilation nasale, une

éducation plus fine des praxies orales, afin de supprimer d’éventuelsmécanismes de compensation.

- une difficulté pour l’enfant à recouvrer une alimentation par voie orale.

La rééducation orthophonique

Il faut éviter les mouvements de compensation, les tics, les syncinésies etaméliorer le timbre de la voix et la phonation ;

La rééducation dépend de la classification de la phonation, le plus sou-vent nous rencontrons les PH I, PH II, PH III, PH mixtes.

Phonation I :

L’intelligibilité est bonne, il n’existe pas de nasonnement. Cette phona-tion peut se réaliser par une fermeture normale en clapet, mais aussi par une fer-meture sur les végétations adénoïdes ou une occlusion sur de grosses amyg-dales, parfois par adjonction d’importants mouvements pharyngés après denombreux exercices de souffle.

L’indication de l’adénoïdectomie et/ou de l’amygdalectomie doit êtredûment pesée.

Des troubles d’articulation, une ventilation buccale, un retard deparole/langage peuvent exister et être rééduqués.

Phonation II :

L’enfant présente une insuffisance vélaire rendant sa parole plus ou moinsintelligible, dont la cause est soit la brièveté du voile, soit sa non-mobilisation cequi entraîne une déperdition nasale, un nasonnement. Nous rencontrons de mau-vaises habitudes comme le souffle nasal et le ronflement nasal. Les exercices desouffle, de relaxation, de respiration sont dans un premier temps nécessaires.

Phonation III :

La déperdition est intense et nuit grandement à l’intelligibilité de laparole. Ils utilisent des mouvements articulatoires anormaux (coup de glotte etsouffle rauque) ; toutefois ces mouvements de compensation se rencontrent fortheureusement de moins en moins et ce grâce à la plus grande précocité du traite-ment chirurgical primaire et à l’accompagnement parental.

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Phonation I/II :

La parole est intelligible, en voix projetée, mais une déperdition nasaleest notée pour certains phonèmes en voix conversationnelle. Cette phonationdeviendra phonation I après rééducation. Les exercices de voix et de respirationsont une aide précieuse pour déconditionner les mauvaises habitudes.

Phonation II/I :

La déperdition nasale est constante mais le voile peut fermer dans l’effort.Orientée sur les exercices de souffle, la rééducation portera sur tous les pointscités ci-après.

Principes généraux de la rééducation : (C.Thibault., F.Vernel-Bonneau 1999)

Exercices de souffle :

Ces exercices doivent aider à diriger et à discipliner le souffle, à assurer sonorientation et sa durée, de difficulté croissante, ils sont à pratiquer au quotidien.

Exercices pour améliorer la ventilation nasale :

On apprend le mouchage, le nettoyage du rhino-pharynx avec des solutésphysiologiques d’eau de mer et des exercices de balayage (bouche ouverte, tirerla langue droite, la rentrer en balayant la pointe sur le palais jusqu’à la luette,puis déglutir).

Le massage des narines, les stimulation des muscles du nez calment, sou-lagent, libèrent et favorisent une meilleure ventilation.

Exercices de relaxation et de respiration :

Il s’agit de faire sentir à l’enfant les mouvements de va et vient de sonventre qui accompagne les deux phases de sa respiration et ainsi l’aider à trou-ver son propre rythme respiratoire sans rallonger le temps d’inspiration ni celuide l’expiration.

Exercices pour améliorer la voix :

Exercices de différenciation du mode d’articulation oral/nasal.

Exercices de voix modulée, projetée, chantée. La notion d’espace vocalest fondamentale ainsi l’enfant apprend à mieux s’écouter et à écouter l’autre.

Rééducation du comportement neuromusculaire de la sphère oro-faciale :

Ce travail proprioceptif développe et affine la motricité des lèvres, desjoues, de la langue.

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De façon à rompre avec les mauvaises habitudes et les mécanismes decompensation, il convient de tout mettre à plat et de restituer une certaine dyna-mique. Toute la fonction musculaire va être exploitée, les différentes zonesferont l’objet d’un travail dissocié dans cette drôle de gymnastique.

Ce travail se fait selon quatre directions :- agrandissement des résonateurs.- détente générale de la musculature. - prise de conscience des tensions et précisions des actions musculaires.- indépendance des actions musculaires.

Il faut apprendre à l’enfant à connaître sa bouche.

La musculation des lèvres, le travail des masséters favorisent la fermeturelabiale, augmentent les dimensions intérieures du pharynx et desserrent l’en-semble de l’appareil vocal. Il faut impérativement travailler l’avancée de lalangue pour dégager le pharynx, l’agilité de sa pointe et la non-contraction de saracine. Il est important d’obtenir la platitude de la langue.

Exercices pré-articulatoires :

Il est important dans un premier temps de dissocier le mouvement àeffectuer de la perception du son, de redonner des stéréotypes fonctionnels.

Il est recommandé d’antérioriser les points d’articulation et de concevoirles occlusives dans le souffle.

Tous ces exercices entrent souvent dans le cadre d’une rééducation plus glo-bale d’un retard de parole/langage. Toute intervention orthophonique doit porterbien évidemment sur le rapport général de l’enfant avec le langage : constructionde la phrase, conscience de la phonologie, précision du lexique, conscience de lasyntaxe, augmenter la capacité à faire du discours, à traiter l’information verbale.

Après rééducation orthophonique, en concertation avec le chirurgien, uneindication de vélo-pharyngoplastie est posée avant l’entrée en classe de CP, jus-tifiée par une déperdition nasale entravant l’intelligibilité de la parole.

� ConclusionSoulignons l’importance de la prévention, de l’accompagnement parental et

de la rééducation orthophonique mise en place le plus tôt possible : des praxiesplus rapidement et plus correctement acquises permettent à l’enfant de mettre enplace une articulation plus précise, sans moyen de compensation ; par conséquent,l’enfant améliore sa fermeture labiale, son agilité linguale, sa ventilation nasale.Sa parole est alors plus intelligible et permet de meilleurs échanges au sein de lafamille, donc une normalisation de la relation mère-enfant.

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L’étude de Kapp-Simon et Krueckeberg (2000) rapporte que les enfants avecune SPR obtiennent les scores les moins élevés à l’échelle de Bayley entre 4 et 36mois, les risques de retard de développement pendant la deuxième année de vie serencontrent plus fréquemment chez les enfants qui ont montré des retards dans l’ac-quisition des capacités perceptivo-motrices pendant la première année de leur vie.

Les résultats de l’étude de Fair et Louw (1998) montrent qu’une interven-tion régulière et précoce avec de jeunes enfants entre 5 et 28 mois présentantune SPR donne des résultats positifs spécialement sur les habiletés langagières.

Toute intervention doit non seulement prendre en compte l’âge et lesapprentissages de l’enfant, mais également revêtir une dimension dynamique.

Incluant le milieu familial, l’intervention précoce doit être de naturedéveloppementale et reposer sur une identification précise des conduites del’enfant dans le domaine cognitif, pré-linguistique, linguistique et moteur. Deplus, l’intervention précoce vise à prévenir les difficultés de parole, le risque dedifficultés d’apprentissage et de réalisation sociale de l’enfant.

Après investigation et synthèse, l’équipe pluridisciplinaire sera à même derévéler un déficit qui nécessite une action afin d’en limiter les conséquencesnéfastes. Elle devra être attentive au fait de ne pas « étiqueter » cette population àrisque alors qu’une partie seulement de cette population se révèlera ultérieurementen difficulté. Elle se devra également de demeurer vigilante face à un interven-tionnisme de type « normatif », et laisser s’exprimer les variations individuelles.

En effet, d’un dépistage précoce et objectif, dépendent une rééducation etun soutien pédagogiques efficaces.

Soulignons que nous rencontrons de nombreux enfants présentant des dif-ficultés visuo-spatiales et des habiletés sociales inadéquates.

Enfin, l’enfant opéré de fente palatine syndromique devra être suivi pen-dant toute son enfance par les différents acteurs soignants. Une personnalisationde la prise en charge (psychomotricité, psychothérapie, le plus souventmère/enfant, orthophonie) permettra à l’enfant et à sa famille de se vivre et dese reconnaître en tant qu’entité propre et se tourner vers l’avenir avec confiance.

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Fentes oro-faciales : une première expériencede prise en charge

Sophie Dokhan

RésuméLa prise en charge d’un enfant présentant un syndrome de Pierre Robin peut apparaître trèsobscure pour tout orthophoniste non initié.Cet article relate l’expérience que j’ai vécue au cours de ma première prise en charge decette pathologie.Mots clés : syndrome de Pierre Robin, incompétence vélo-pharyngée, trouble de l’oralité

Oro-facial cleft conditions : an initial treatment experience

AbstractTreating a child with Pierre Robin syndrome may appear complicated to those speech thera-pists who have no experience in this particular field.This article summarises my experience as a therapist dealing with this condition for the firsttime.Key Words : Pierre Robin syndrome, velo-pharyngeal incompetence, speech therapy

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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Sophie DOKHANOrthophoniste2 rue Raymond Frot77690 [email protected]

Accepter ou non une prise en charge faisant appel à des compétencesvoire à des connaissances que l’on maîtrise mal, voilà la question quen’importe quel orthophoniste s’est posé un jour face à un appel télépho-

nique de parents ou d’un patient nous demandant un rendez-vous.

Si certains troubles, bien que mal connus par l’un ou l’autre d’entre nous,appellent une rééducation évidente, d’autres en revanche apparaissent commeparticulièrement obscurs du fait qu’ils touchent une zone anatomique surlaquelle nous ne sommes pas habitués à travailler.

Il est fréquent de connaître nos collègues de proximité et d’envoyer alorsle patient en question vers celui ou celle plus spécialisé que nous dans ce genrede rééducation.

Or il arrive un jour que nous soyons obligés, malgré tout, de nouslancer dans une prise en charge dont la rééducation nous échappe quelque peu.

C’est ce qui m’est arrivé avec la petite Pauline et c’est cette expérience sienrichissante que je vais développer ici.

� Prise de contact

C’est un matin de bonne heure que la mère de Pauline me téléphone pourla première fois. Elle m’expose le cas de sa petite fille suivie à l’hôpital Neckeret présentant un syndrome de Pierre Robin caractérisé, pour ce qui me concer-nait, par une fente palatine, un nasonnement très prononcé, un trouble de l’ora-lité alimentaire et un retard de parole et de langage.

Après avoir écouté plusieurs minutes, sans oser l’interrompre, cettemaman anxieuse et tellement inquiète, je l’envoie, certaine de la rassurer, versun cabinet spécialisé dans ce genre de prise en charge à une quinzaine de kilo-mètres de son domicile.

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Mais, à mon grand étonnement, la maman est formelle, elle a quatreenfants et ne veut pas faire quarante minutes de trajet trois fois par semaine.

La petite doit donc être suivie par moi (a priori spécialisée en neurologie).L’équipe soignante de l’hôpital Necker est au courant et elle m’assure que tousproposent de m’aider et de m’épauler à chaque étape de cette rééducation.

Je raccroche après lui avoir fixé un rendez-vous une semaine plus tard cequi me laissait le temps de me documenter sur ce fameux syndrome de PierreRobin dont j’avais si peu entendu parler quelques minutes auparavant (où êtes-vous très chers aphasiques, traumatisées crâniens et autres Alzheimer dont jemaîtrise tellement mieux la prise en charge !)

� Retour à la théorieJe commence alors à me reformer sur toutes ces notions enseignées il y a

pour moi dix ans et que, bien sûr faute d’expérience, j’avais totalementoubliées.

J’essaie de m’imprégner d’anatomie, de toutes sortes de schémas, defentes faciales, labiales, labio-maxillaire vélo-palatine et des traitements chirur-gicaux proposés, du rôle de l’orthophoniste passant d’abord par un accompa-gnement parental puis par une rééducation à proprement parler.

Petit à petit les notions reviennent et les lacunes commencent à se combler.

Moi qui, quelques jours auparavant, avais voulu envoyer cette petite filleconsulter ailleurs, voilà que je commence à attendre ce premier rendez-vouscomme une démonstration réelle de tout ce que je venais de réapprendre.

� Le bilanLe jour du bilan arrive et je vois entrer une dame suivie d’une petite fille

de 2 ans et demi qui s’accroche à elle autant qu’elle le peut. La petite ne souritpas, elle a peur.

Après avoir côtoyé tant de blouses blanches, être passée par tant dechambres d’hôpital, de salles d’opération et de réveil, je suis la nouvelle et jesens que par là même je lui parais antipathique.

Je la regarde, lui souris, elle ne cille pas, elle semble terrorisée.

L’entretien commence.

Pauline est la benjamine d’une famille de quatre enfants, elle a trois sœurs.

Un mois avant le terme, alors que la grossesse de la maman se déroulait

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normalement sans aucun souci, on découvre un problème cardiaque sur lefœtus. Une échographie spécialisée sur Paris est effectuée en urgence et le dia-gnostic d’une myocardiopathie est posé. A partir de là, tout s’enchaîne : pro-grammation de l’accouchement et découverte à la naissance que la myocardio-pathie est associée à une séquence de Pierre Robin de grade 2.

Pauline est alors emmenée en réanimation avant d’être transférée dans leservice de cardiologie puis de pédiatrie.

A chaque fois, on ne laisse que peu d’espoir aux parents. Mais malgré cequ’on leur avait annoncé, Pauline s’accroche et vit.

A trois mois et demi, première opération chirurgicale dont le but est destopper le reflux gastro-œsophagien et mettre en place une gastrostomie desti-née à remplacer le gavage par le nez.

Le retour à la maison de Pauline se fait dans la foulée, mais à onze mois,le chirurgien maxillo-facial ferme la fente palatine par une nouvelle interventionchirurgicale

Depuis, il n’y a pas eu d’autre hospitalisation ni acte chirurgical.

Pauline retourne quand même régulièrement à Necker pour être vue enpédiatrie, en chirurgie maxillo-faciale et en ORL afin de contrôler chacun desdomaines de son évolution.

L’entretien avec la maman se termine : elle a compris qu’il s’agira ici derééducation, ce travail qui vient souvent quand le plus dur est passé. Je la sensconfiante. Ce lieu deviendra pour elle l’endroit où Pauline finira de devenir unepetite fille comme les autres.

Pauline quant à elle n’a pas bougé. Les feuilles et les feutres que je luiavais proposés sont restés à leur place. Elle vient d’entendre pour la énième foistoute son histoire.

J’ai décidé alors que je ne m’approcherai pas trop d’elle ce jour là. Je luiprends juste la main quand elle s’en va et lui annonce que je la reverrai.

� Début de rééducationLa diminution du gavage est la première priorité : il faut donc que Pauline

parvienne à déglutir ce qui, pour le moment, est impossible bien qu’il n’existeplus de trouble organique de la déglutition et qu’elle ne fait pas de fausse route.Pauline refuse seulement d’avaler. Sa praxie orale est perturbée avec une stagna-tion des aliments dans les joues. Rien ne peut être propulsé vers l’arrière par peurde déglutir. Les aliments ainsi mastiqués et conservés sont ensuite recrachés.

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Je l’attends pour la première séance munie de petits pots de compote et depetits suisses à tous les parfums.

A l’heure dite, Pauline arrive et je lui sors très fière tout mon panier àprovisions, certaine de la tenter.

Pauline regarde tour à tour chacune de mes victuailles ainsi que la dînetteque j’avais mise en évidence pour l’appâter. Puis elle me regarde et sans plus decérémonie se dirige vers les poupées de chiffon rangées à l’opposé de tout ceque j’avais préparé.

Quelle ingénieuse idée ! Nous voilà toutes les deux à donner la compoteaux deux poupées qui n’ouvrent pas plus la bouche que ma petite patiente.

Il a fallu plusieurs séances pour que Pauline accepte une petite cuillère decompote, et alors que n’importe quel enfant l’aurait avalée aussi vite, Pauline lagarde effectivement dans sa bouche une dizaine de minutes et la déglutition pro-voque aussitôt un réflexe nauséeux.

Plusieurs mois ont été nécessaires pour parvenir à une déglutition réflexedu bol alimentaire. Mais avec quelle satisfaction !

Petit à petit de nouveaux aliments ont été introduits tels que des puréesaux goûts et textures divers ainsi que des liquides aux parfums variés.

Nous étions parvenus à bout de notre première mission. Pauline commen-çait à me faire confiance.

� Poursuite de la prise en charge

Notre deuxième objectif est travaillé en même temps que le troisième. Ils’agit d’une part de réduire le nasonnement en atténuant ou mieux encore ensupprimant la déperdition nasale et d’autre part de mettre en place une rééduca-tion de la parole et du langage.

Pauline est maintenant totalement à l’aise dans la prise en charge. Ellearrive heureuse, toujours de bonne humeur, elle est encore une petite fille fra-gile, souvent malade et beaucoup de séances sont donc annulées. Mais quandelle est présente, c’est un vrai rayon de soleil.

Nous commençons pratiquement chaque séance par quelques minutes derelaxation et de prise de conscience de chacune des parties de son corps aveclesquelles Pauline doit être réconciliée.

Une petite baleine en plastique léger posée sur le ventre montre à la petitefille comment celui-ci se gonfle et se dégonfle quand l’air entre et sort. Les bras,

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les jambes, la tête et le cou sont manipulés dans un but de relâchement extrême.Ce moment de relaxation est le moment préféré de Pauline qui part à chaquefois dans un fou rire lorsque je joue l’étonnée devant un bras ou une jambe quireste en l’air alors qu’il aurait du retomber lourdement sur le matelas.

Puis viennent les exercices de souffle avec tous les engins possibles etimaginables. Pauline doit apprendre à gérer son souffle et à le moduler enfonction de ce qu’on lui demande. Souffle fort pour une dizaine de petitesbulles de savon mais souffle léger et retenu pour une bulle qu’on essayeénorme. Course de boules de sarbacanes de toutes les couleurs afin de voirlaquelle va être envoyée le plus loin. Paille dans un verre d’eau avec laconsigne de maintenir le liquide dans le récipient ou au contraire de le fairedéborder.

Quant aux exercices praxiques, chaque partie de la sphère oro-faciale estd’abord travaillée individuellement puis nous utilisons tous les muscles enmême temps pour faire des grimaces et nous enlaidir. Laquelle de nous deuxsera aujourd’hui la plus affreuse devant le miroir ?

La rééducation de l’articulation, de la parole et du langage doit aussi trou-ver une place : lotos, dominos et pictogrammes entrent alors en jeu.

Le phonétisme est monté mais les phonèmes postérieurs ainsi que l’oc-clusive sonore « d » sont encore impossible à obtenir.

La rééducation est chargée et les séances toujours trop courtes. Tout doitêtre travaillé mais Pauline n’a que 5 ans et il faut parfois pouvoir faire autrechose.

La petite fille inquiète et inhibée est devenue une petite fille joyeusemême si elle reste encore très réservée à l’école encore soucieuse de parlerdevant ses camarades. Et ceci parce que malgré le travail effectué avec beau-coup de sérieux le nasonnement de Pauline reste encore très prononcé.

Pauline doit donc être revue à Necker pour subir une pharyngoplastie.

Il n’y a pas pour l’instant de fin prévue à la rééducation de Pauline quisera sans doute longue. Je la garde avec bonheur.

� ConclusionDans cet article, vous l’avez compris, je ne prétends nullement me décrire

comme une « spécialiste » dans la rééducation du syndrome de Pierre Robinpuisque chaque étape de cette prise en charge m’a été « soufflée » par des pro-fessionnels spécialisés dans ce genre de troubles.

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Cet article n’a donc pour but que de témoigner de la satisfaction qui nousenvahit lorsque nous acceptons une prise en charge à laquelle nous ne sommespas formés et que nous découvrons, pas à pas, lorsque des collègues compétentsse rendent disponibles et partagent leur savoir.

J’ai largement été remerciée, par ces mêmes professionnels, de me « lan-cer ». À moi maintenant de dire merci à ceux qui m’ont permis de faire laconnaissance de cette petite Pauline.

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Une prise en charge orthophonique d’un enfantprésentant une séquence de Pierre Robin

Véronique Maire

RésuméCet article relate la prise en charge orthophonique d’un enfant présentant une séquence dePierre Robin.Loin d’être une simple rééducation centrée sur le souffle et l’articulation nous allons voir queces pathologies de la face relèvent d’une prise en charge multi-modale dont la restructura-tion du schéma corporel en est la clé de voûte.Mots clés : fentes oro-faciales, séquence de Pierre Robin, schéma corporel, perceptions,langage.

Speech and language therapy in a child with Pierre Robin syndrome

AbstractThis article describes the implementation of a speech therapy program in a child with PierreRobin syndrome.Far from requiring simple remediation of breathing and articulation, these facial pathologiesnecessitate a pluralistic approach that involves the restructuring of the child’s knowledgeregarding his body and the development of a positive body image.Key Words : cleft palate, Pierre Robin syndrome, knowledge of one’s body, perception, lan-guage

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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Véronique MAIREOrthophoniste63bis rue Lamartine10300 Sainte Savine

� Compte-rendu du suivi de JeanJean est arrivé à mon cabinet en novembre 97, à l’âge de 3 ans. Il pré-

sente une séquence de Pierre Robin II dû à une collagénopathie familiale. Opéréd’une uranostaphilloraphie à l’âge de 9 mois. Ses nombreux troubles O.R.L.persistants ont entraîné une hypoacousie de transmission, non appareillée.

Sa prise en charge débute très tôt et la démarche rééducative apparaît, audépart, très simple : exercices praxiques, de souffle, et d’articulation. Mais mal-gré un travail régulier et une bonne volonté évidente, les progrès sont lents etl’enfant a toujours autant de difficultés à réaliser les exercices.

Il m’apparaît alors que Jean n’a pas de représentation de sa personne phy-sique, pas de connaissance de son corps.

De plus, à une incoordination motrice linguale et buccale, se surajouteune hypersialorrhée et des problèmes de bavage par hypotonie de la sanglelabio-jugale.

N’ayant aucun potentiel kinétique et sensoriel, il ne peut concevoir sonarticulation et les mouvements du visage. Je décide alors de réorienter mon tra-vail et de remonter à la source : le corps. La rééducation va suivre alors troisaxes qui vont me permettre de redonner une organisation de soi, une représenta-tion mentale du corps et donc amener à une meilleure perception :

I - Restructuration corporelle.

II- Amélioration des perceptions.

III- Travail de la voix

Restructuration corporelle et massages

La restructuration du schéma corporel commence par des auto-massagesselon la méthode inspirée du « Do-In ». Ce sont soit des tapotements, soit deslissages de la pulpe du pouce ou de tous les doigts sur le crâne, le visage, les

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bras, les jambes. Nous pratiquons face à face car le feed-back visuel du miroirvient s’interposer aux sensations kinétiques et perturber l’enfant.

Néanmoins, même devant moi, il a toujours beaucoup de difficultés àorienter ses gestes, à coordonner les deux mains : succession et sens du mouve-ment sont sources de problèmes. Par exemple, il remonte vers l’épaule à partirdu creux du coude au lieu de descendre vers le poignet. Il n’arrive seulementpas à suivre la ligne d’un sourcil ou l’arête du nez.

Malgré ces difficultés, je persiste quand même à lui proposer cet abordtrès corporel car les massages permettent de réhabiliter la notion de plaisir dansle respect du corps restructuré.

On retrouve en effet souvent chez ces enfants opérés très tôt de la face, unflou dans la constitution de leur image et une perte du plaisir du toucher. Plus leressenti de l’enfant est gratifiant, plus son image corporelle est précise.

De plus, les massages constituent une pratique particulièrement adaptéede communication et d’écoute. Ils réduisent les attitudes de défense et de blo-cage. Cela m’a beaucoup aidé dans l’abord du bégaiement dès son apparition,quelques temps après le début de la prise en charge.

Cette prise de conscience de soi, cet éveil spontané permettent aussi dedévelopper les qualités de concentration.

Amélioration des perceptions - « Relaxation active »

Peu à peu, le corps mieux structuré et mieux appréhendé me permet detravailler les mouvements corporels grâce à la « Relaxation active ». Celle-ci secompose de mouvements des bras, des épaules, de tout le corps, sorte de choré-graphie présentée sous forme de jeux (le lancer de feuilles, le plongeon,l’échelle...).

Elle enrichit la découverte de son corps et affine la perception du schémacorporel. C’est avant tout une prise de conscience des sensations provoquées parun mouvement. C’est aussi apprendre à réaliser un geste avec le minimum decontraction musculaire : premier pas vers la contraction « minimale mais suffi-sante ».

Cette recherche de la maîtrise d’une tension est particulièrement intéres-sante dans des périodes de fortes dysfluences avec la possibilité d’aborderensuite des exercices comme le « bégayage inverse, le parler relax ».

Tout effort crée des tensions donc des blocages. La « Relaxation active »apprend à laisser faire, à lâcher prise. Il n’y a pas de recherche de résultats carcela entraînerait forcément une tension. Ne dit-on pas « être tendu vers un but »!

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Donc, comme il n’y a pas de but à atteindre, il n’y a pas de notion d’échec. Ceque ressent chacun, ne peut être ni bien, ni mal, pas de perfection à atteindrecomme se l’impose le bègue dans sa parole.

La relaxation, comme les auto-massages, se déroule dans le silence : l’en-fant n’a pas à parler. Seul, l’intervenant prodigue les quelques conseils utiles àla réalisation de l’exercice. Mais c’est un silence riche de l’écoute de nos sensa-tions, riche de la présence de l’autre : apprendre le silence, apprendre à écouterson interlocuteur.

« Relaxation active » : active car à l’inverse d’autres relaxations dont ledésir est l’oubli, la rêverie, l’évasion, notre souci est ici, au contraire, un éveilde plus en plus intense de notre état de conscience, de notre immersion dansl’ici et maintenant.

Les auto-massages sont une découverte du corps, la relaxation est ladécouverte des rapports constants entre son corps et son environnement.

Cette mise en harmonie m’a ensuite permis d’aborder des exercices plusclassiques de détente loco-régionale en utilisant des mouvements instinctifs telsque les étirements, le bâillement, le soupir et le rire.

Travail vocal

Ainsi préparé, Jean peut aborder les premiers exercices de voix.

La thérapie de la voix ou par la voix débute souvent par une recherched’un équilibre psychosomatique nécessaire à une bonne communication déten-due et aisée. Nous réalisons donc un travail sur la statique corporelle, le port detête, le regard, l’ouverture du thorax, l’ancrage au sol ….

Des dessins illustrant les différentes qualités vocales (intensité, hauteur,timbre, rythme), nous permettent de mieux comprendre puis reproduire decourtes phrases vocales chantées (cf le livre de J. Perrier).

De petites saynètes sont jouées en faisant varier les intonations pourtranscrire différents sentiments ou personnalités : ex. dire une même phrase surdifférents tons : « bonjour » ou « Ah ! voilà le chien » (cf. le livre de P. Gravol-let). Nous jouons avec notre voix pour mieux la réincarner, pour qu’elledevienne le véhicule fidèle de nos idées et de nos émotions.

Pour lutter contre la pression temporelle, nous chantons en marquant letempo à l’aide de la main ou d’un instrument et parfois nous changeons ou accé-lérons le rythme de plus en plus. Les comptines à doigts de notre enfance fontici merveille.

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Le mime est aussi un bon médiateur gestuel car il permet de nous libérerde la parole. Mais pour Jean, il s’avère pour l’instant assez peu efficace car sesgestes sont toujours étriqués (comme les praxies), imprécis et même parfois ilsne correspondent pas à l’action mimée. Il a encore du mal à se projeter dansl’imaginaire.

Nous sommes bien loin, j’en conviens, d’une rééducation classique baséesur le souffle, les praxies bucco-faciales et l’articulation. Mais il n’est pas pos-sible de construire une parole sans avoir au préalable consolidé et unifié leschéma corporel. Une représentation mentale claire de son corps est un préa-lable indispensable au bon développement du langage. Permettre à l’enfant deréincarner sa parole, de réinvestir de manière positive son corps est un travail delongue haleine qu’il faut construire petit à petit avec parfois des tâtonnementsmais toujours avec confiance.

� L’accompagnement parental et familial

Guidance parentale

Tout au long du suivi de ces deux enfants, le rôle des parents a été pri-mordial par la régularité et le sérieux dans les rendez-vous et surtout par laconfiance que la maman a tout de suite accordée à tous les intervenants médi-caux et para-médicaux.

Même si, à l’apparition du bégaiement, une guidance parentale n’a puêtre mise en place du fait de la séparation des parents, les conseils ont pu êtredistillés au jour le jour et ont été bien suivis.

Il a fallu beaucoup de temps à la maman pour dépasser son angoisse etchanger son regard sur son fils.

Cela était fondamental pour Jean car tout enfant se construit aussi à traversle regard que l’on pose sur lui. Et même si, selon Françoise Dolto, l’image de soise construit dans les premiers instants de vie, ce regard peut et doit évoluer.

Prise en charge d’Anne

Dans ces syndromes familiaux, la fratrie peut être touchée de manière dif-férente. Anne, la sœur aînée, présente un syndrome de Stickler sans trouble oro-facial à la naissance mais avec un retard staturo-pondéral et une forte myopieévolutive.

Je suis cette enfant une première fois pour un retard de parole et langage« classique » assez vite résolu. Mais elle m’est réadressée en septembre 2002

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car son déficit visuel s’accentue (myopie forte de –15) et entraîne d’importantstroubles en lecture et en transcription. Le placement en établissement spécialiséest pour l’instant repoussé et nous mettons en place rapidement le suivi ortho-phonique.

Pour combler le manque d’apport d’informations visuelles, la rééducationvise le développement de ses autres capacités : affinement du toucher, augmen-tation de sa mémoire visuelle avec prise d’indices rapides et enrichissement duvocabulaire pour permettre une lecture plus efficace. Le but est de lui redonnerconfiance car, son trouble trophique persistant, elle vit difficilement sa pré-ado-lescence, se renferme et somatise beaucoup.

� ConclusionNous avons pu voir ici toute l’importance du travail, sur et par le corps,

dans la rééducation des fentes oro-faciales. Il en va de même pour beaucoupd’autres pathologies comme le bégaiement ou les troubles vocaux. Il s’agitd’une lente réunification du corps et de la redécouverte du plaisir du langagecorporel. Redonner la parole à son corps, c’est revaloriser une image de soi pourla construction d’une identité plus harmonieuse.

Le corps est un indispensable outil thérapeutique pour mieux réinvestirson langage.

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La consultation prénatale et la préparation desparents à l'intervention pour tumeur, dysplasieet fente faciale de leur nouveau-né

Gérard Couly

RésuméLa découverte d’une fissure palatine, d’une dysplasie ou de tumeurs faciales aux stadesfœtaux par la technique à ultrasons en 2D ou en 3D, exige un accompagnement parentalprénatal. Ce type de consultation est psychologiquement nécessaire pour créer de « bonnesconditions de naissance » et est indispensable pour une organisation adéquate de la théra-pie post-natale et chirurgicale.

Mots clés : fente palatine, accompagnement familial prénatal.

Prenatal consultation: Preparing parents for the treatment of tumors,dysplasia and facial cleft in their new born child

AbstractThe discovery of facial cleft, dysplasia or tumors at foetal stages through 2D or 3D ultra-sound techniques, requires prenatal parental counselling. This type of consultation is psy-chologically necessary for creating "good birth conditions" and is indispensable for the ade-quate organisation of post natal surgical therapy.Key Words : facial cleft, prenatal counselling

Rééducation Orthophonique - N° 216 - Décembre 2003

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Gérard COULYStomatologie et Chirurgie Maxillo-Facialede l'enfant Hôpital des Enfants malades 149 rue de Sèvres75743 Paris Cedex 15et Directeur de l'Institut d'EmbryologieCellulaire et Moléculaire du CNRS et du Collège de France UMR 7128

La consultation prénatale, dans le but d'organiser l'intervention néonataleou postnatale des malformations, tumeurs ou dysplasies de la régionfaciale du foetus est le corollaire naturel de leurs diagnostics anténatals.

A partir du moment où une femme se sait enceinte, son foetus est vécu parelle avec une sereine plénitude, dans son imaginaire comme normal, naturelle-ment normal bien que « non vu ». L'obstétricien échographiste, en mettant uncoup de projecteur sur le foetus, sort celui-ci de sa nuit utérine et contribue àl'instauration d'une nouvelle dyade mère-bébé. La représentation par échogra-phie maintenant tridimensionnelle pendant la grossesse de l'anatomie et de lamorphologie foetales a changé le vécu maternel du foetus et du nouveau-né ettransformé l'imaginaire en réalité. L'échographie, en objectivant le foetus, lefait devenir ainsi une réalité physique car celui-ci est alors observé et mesurélors de son développement. Il n'est plus totalement fantasmé et mystérieux.L'annonce de l'existence de tumeur, dysplasie ou malformation faciale, estalors génératrice d'angoisse immédiate, terrible et obsédante. Elle est générépar le « non-vu » résultat de la distorsion entre le fantasme premier de norma-lité foetale et la réalité « bien réelle » révélée et objectivée par l'échographie.L'échographie tridimensionnelle, en fournissant une imagerie proche de laphotographie d'identité du visage foetal, a changé radicalement la relationavec les parents qui deviennent ainsi intégrés dans ce colloque si particulierde l'échographiste et du chirurgien thérapeute. Cette situation interpelle lesparents en ce qui concerne le risque pour la vie même de leur foetus et lesdécisions thérapeutiques immédiates ou différées à partir de la naissance àmettre en oeuvre.

Ainsi, la consultation de chirurgie réparatrice pour tumeur, dysplasie oumalformation, conseillée entre les 20ème et 30ème semaines de grossesse parl'obstétricien échographiste, et demandée par le couple, a fini par s'imposer

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comme une « nécessité urgente et anticipatrice pour la bonne naissance » del'enfant. Cette consultation, ou plutôt cet entretien, a un caractère particulier carelle concerne un être en devenir non vu physiquement mais objectivé par l'écho-graphie tridimensionnelle. Nous l'avons conçue comme une sorte de « psycho-drame » personnalisé et adapté à chaque couple ou à chaque femme si elle seprésente seule. Il est centré sur le rôle éthologique de la face humaine : sonobjectif en est l'anticipation de l'intervention faciale de l'enfant à venir.

� La consultation anténatale pour fente faciale et l'organisationpostnatale de la chirurgie réparatrice

Elle a lieu après l'échographie de la 22e semaine, échographie qui a per-mis d'objectiver le caractère isolé ou non isolé de la fente. Nous n'envisageronspas la situation de fente s'intégrant dans une situation syndromologique graveayant abouti à une décision d'une interruption de grossesse. L'entretien prénatalest pour nous une urgence et demande du temps pour sa mise en oeuvre et sondéroulement. Son contenu consiste à amener le couple dans la réalité de la dys-morphologie.

Parfois, la femme enceinte s'exprime : « avant l'échographie, je ne pen-sais pas que mon enfant pouvait avoir cette malformation » ou « c'est mons-trueux » ou « j'aurais préféré en définitive ne pas le savoir ». En fait, tout sepasse comme si cette future mère entrait en résistance contre la réalité annon-cée.

Le visage est cette partie de nous-même que nous montrons au monde etce faisant en interactions permanentes avec autrui. Dans la dyade, mère-bébé, levisage du nouveau-né est l'objet de soins, d'attention, de regards, (le premiersourire), de préoccupation constante, actuelle et projections narcissiques futures,d'interrogations où se mêlent apparence, ressemblances et modifications dues àla croissance. Ce rôle du visage inscrit l'enfant dans la lignée mais aussi dans le« transgénérationnel » de par sa fonction éthologique individuelle et inter-indi-viduelle.

Les principes de l'entretien reposent sur la vérité embryologique, biolo-gique et anatomique du foetus. « En sortant » la femme de son fantasme de nor-malité foetale, cette vérité fait prendre conscience au couple de la réalité de l'ac-cident morphologique. Puis se mettent ensuite en place le deuil de la normalité.Ce deuil est partiel grâce au projet réparateur postnatal précoce rapidementexposé, projetant les parents dans le futur et l'espérance d'une normalisationmorphologique. Cet entretien personnalisé informatif mais neutre, répond auxquestions, aux attentes et au besoin d'anonymat du couple. Il ne fait pas appel à

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d'autres couples ayant vécu la même situation ou à des associations ; en effet,dans ces conditions, les informations et réponses parfois mal adaptées aux ques-tions du couple en raison de ses caractéristiques socio-économiques, culturellesou ethniques paraissent un risque et sont prématurées. Les couples le demandentexceptionnellement. Le contenu de l'entretien n'est jamais standardisé, il estmodulable, fonction du vécu dissemblable de chaque couple et semble comblerl'attente entre le moment de l'annonce de la malformation, en général, vers la22ème-23ème semaine et l'accouchement. La femme vient seule ou accompa-gnée de son conjoint. Les conjoints lors de l'entretien, son réservés voire enretrait ou muets. Pour 100 consultations récentes de diagnostic anténatal, 88femmes sont venues en couple, 7 sont venues seules et 5 sont accompagnées demère, soeur, frère, enfant ou voisine. Les antécédents du couple, de la famille etle nombre d'enfants sont recueillis en premier lieu. Puis, l'entretien se déroule en3 actes.

- Le premier acte est pédagogique : Sont exposés de façon simple les principeset fondements du développement embryonnaire de la face (le 40ème jourembryonnaire, les bourgeons de la face, et leur collage). Cette étape est ancréedans le réel, c'est à dire fondée sur la vérité, la réalité biologique humaine dudéveloppement et de ses modalités. Les documents photographiques utiliséssont ceux de Lennart Nilsson et les nôtres. Le couple réagit aux documents sou-vent impressionnants, qui ne sont ni choquants, ni mystérieux. Des phrasescomme « nous avons tous été comme cela, votre foetus également » sont parexemple utilisées. Ces documents issus de la réalité permettent de déplacer ainsil'inquiétude latente générée par l'aspect tant redouté de leur foetus. Les parentsl'expriment parfois, ils redoutent l'aspect « monstrueux et inhumain » de leurenfant. La rationalité de ce premier acte permet de camper les idées, d'empêcherles dérapages émotionnels et d'accrocher le couple à des documents photogra-phiques préludant l'acte suivant, qui les concerne.

- Le deuxième acte consiste pour le couple en la confrontation à la réalitéphysique de son foetus malformé. L'étude attentive de l'imagerie fournie parl'échographie bi et maintenant tridimentionnelle, véritable photographied'identité du foetus, permet très souvent de préciser le type d'accident mor-phologique : simple, uni ou bilatéral, avec ou sans fente vélo-palatine etainsi de conditionner le choix du document photographique d'un nouveau-nésemblable présenté au couple parmi un panel existant. C'est l'étape la plusdouloureuse de l'entretien car elle correspond à la prise de conscience réellede la dysmorphologie dont est atteint leur enfant : elle consiste à présenter leportrait d'un autre nouveau-né ayant une fente semblable car l'imagerieéchographique n'est malheureusement pas toujours explicite. Cette photo-

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graphie en portrait est associée au résultat chirurgical de la réparation de cetautre enfant à un an, 3 ans, 5 ans ou 10 ans. La femme et parfois le conjointse mettent très souvent à pleurer. Ces pleurs témoignent du vécu de cetteréalité, de l'impossible rébellion et de la soumission à la situation présente.Elle est constituée par la blessure narcissique et le deuil que cette femme ouce couple font de la normalité de leur foetus. Mais ce deuil nous parait par-tiel car dans le même temps, le résultat de la réparation est présenté, c'est laréparation d'un autre enfant. De notre point de vue, nous pensons que l'as-pect du visage du foetus du couple, obtenu de plus en plus souvent parreconstruction échographique tridimensionnelle, n'empêche pas d'éviterl'utilisation tant attendue des résultats chirurgicaux photographiques d'unautre nouveau-né.

Les questions concernant cette réparation sont alors émises. C'est le troi-sième acte : la rapidité de la réparation après la naissance contribue également« à réparer » psychologiquement le couple. Elle lui permet de surmonter cetteépreuve très dure, en terminant la grossesse avec une certaine sérénité.

- Ce troisième acte constructif, orienté vers l'avenir est centré par l'or-ganisation de la réparation à partir de la naissance. Le couple et le chirurgienvont alors oeuvrer ensemble durant quelques années ; les rôles de chacundoivent être parfaitement définis. Revient aux parents le rôle de l'oralité ali-mentaire si réparateur à partir de la naissance : l'allaitement est non seule-ment possible mais recommandé à condition de bien préparer les bouts deseins. Il est volontairement surévalué, car il est le facteur indéniable d'atta-chement réciproque et agirait en la prévention d'une rupture d'attachement. Ilrevient au chirurgien d'oeuvrer pour reconstituer les structures faciales selonles principes exposés lors de l'entretien. Les parents quittent la consultationavec une date opératoire « en poche », ce qui pour nous est indispensablepour « borner » d'espérance l'avenir de leur foetus, foetus devenu nouveau-né. L'ensemble de l'entretien nous parait contribuer à déculpabiliser lecouple. Des compléments d'informations sont également donnés lors d'entre-tiens téléphoniques ultérieurs jusqu'à l'accouchement, si les parents le souhai-tent.

Nous n'aborderons pas dans cet exposé l'éventuelle demande parentaled'interruption de grossesse, située en amont de cet entretien. Parfois, lorsqu'ils'agit de fente bilatérale, la confrontation avec la réalité de la dysmorphologieest tellement insurmontable que certains parents demandent cette interruptiondurant notre entretien.

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Le projet de réparation et sa réalisation

Le protocole utilisé dans le service de Stomatologie et de ChirurgieMaxillo-Faciale de l'enfant à Necker-Enfants Malades est un protocole minima-liste de réparation précoce :

Au cours de la deuxième quinzaine post-natale, une première interventionde chéilopastie de 30 à 40 minutes, sous anesthésie générale associée à l'anes-thésie locale tronculaire des nerfs sous orbitaires et palatins, permet la réfectionde la lèvre, du palais primaire et du plancher narinaire grâce à une hospitalisa-tion de 24 heures. La réparation est fondée sur les principes embryonnaires :exérèse des excédents cutanés, réparation de la dysmigration musculaire,reconstitution de la symétrie naso-labiale. L'allaitement au sein est tout à faitpossible en post-opératoire, même recommandé, et repris 8 heures après l'inter-vention. Si l'alimentation se fait par tétine et biberon avant l'intervention, elleest apportée par petites seringues pendant une semaine jusqu'à l'ablation des fils.Les parents sont prévenus que l'intervention transformera le visage de leurenfant ; la possibilité de ne plus le reconnaître « transitoirement » après l'inter-vention est également abordé : ceci a une fonction de détente chez le couple.Nous expliquons aux parents que la plaque palatine précoce chez le nourrissonn'est pas nécessaire : la comparaison qualitative de l'élevage de deux effectifségaux de nourrissons présentant tous les mêmes fentes labio-maxillaires et vélo-palatines dont l'un était constitué de nourrissons portant une plaque et l'autrepas, n'a pas démontré la supériorité de l'efficacité de la plaque ; d'autre part, laprésence de la plaque empêche l'allaitement.

Les avantages de la réparation labio-narinaire sont exposés :- cicatrice de plus bel aspect, de qualité dite « vagale » (proche de la

période foetale),- reconstruction de l'appareil labial suceur, afin de « capturer » oralement

le mamelon ou la tétine.- changement de l'aspect de l'enfant afin « qu'il soit montré » et non

caché, comme c'est souvent le cas.

Les risques inhérents sont également abordés : un accident infectieux labialpour 2340 fentes labio-maxillaires opérées.

L'entretien se termine en annonçant aux parents qu'ils auront à masser la cica-trice, deux mois après la réparation : cette forme terminale d'implication dans letraitement, les responsabilise dans l'atténuation future de la cicatrice.

En cas de division vélo-palatine, une deuxième intervention a lieu vers 7-8 mois lorsque l'enfant est passé à la cuillère. Le protocole opératoire est tout

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aussi minimaliste : 24 à 48 heures d'hospitalisation pour un temps d'interventionde 30 à 40 minutes d'urano-staphylorraphie. Les enjeux orthophoniques etorthodontiques sont exposés : guidance, exercices éventuels de souffle et appa-reillage.

L'échographiste, l'obstétricien et le pédiatre de famille reçoivent lecompte-rendu de l'entretien qui se termine par la proposition de date de l'inter-vention.

L'absence de diagnostic anténatal

Actuellement, une fois sur dix, malgré l'existence d'un diagnostic possiblepar échographie, la fente n'est découverte qu'à la naissance, ce qui nous faitvivre et revivre l'ère où l'échographie foetale n'était pas de routine.

- Soit la fente labio-maxillaire ou vélo-palatine existe déjà dans la famille(le père ou la mère, un ou plusieurs de leurs enfants en sont déjà atteints) : lanaissance d'un nouvel enfant s'inscrit alors dans une sorte « d'éthnologie fami-liale ». L'enfant est, dans la circonstance, accepté, entouré. L'enfant le plus« accepté » est celui d'une femme présentant cette anomalie.

- Soit la malformation est inconnue de l'histoire familiale du couple :leur nouveau-né est alors vécu comme un « étranger » : l'enfant est bien l'en-fant du couple mais en raison de cette anomalie morphologique du visage siévidente et quasi « monstrueuse » (expression souvent utilisée), il n'est pasreconnu totalement comme enfant du couple. Au cours de ces 25 années oùnous avons pratiqué cette chirurgie, nous avons observé des situations drama-tiques post-natales : tentatives de meurtre de l'enfant par étranglement ouétouffement, abandons définitifs ou partiels (jusqu'à la réparation). La mal-traitance subie par l'enfant atteint de fente et son rejet familial sont l'objetd'un dépistage attentif.

Difficultés rencontrées

L'interprétation de l'échographie est difficile

Cette situation fait l'objet d'un colloque serein avec l'échographiste et éventuel-lement d'une nouvelle analyse. Elle concerne le type de fente (uni ou bilatérale)et la présence ou l'absence de fente palatine. Les performances croissantes del'échographie tridimensionnelle livrant une « photographie d'identité » facialedu foetus permettent d'aplanir ces difficultés.

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Le diagnostic échographique est tardif (au-delà de 30 semaines).

Il semble générer des situations douloureuses à vivre avec détresses psy-chologiques profondes, conséquence d'une demande d'interruption de grossessenon clairement formulée.

La fente palatine isolée et le syndrome de Robin

Leurs diagnostics échographiques sont encore exceptionnels.

Seul, le rétrognathisme est le signe prédisant le syndrome de Robinquand, de profil, il est important. Néonatologistes et pédiatres sont alors préve-nus des risques inhérents à cette situation (détresse respiratoire et dysoralité).

� La consultation anténatale pour tumeur ou dysplasie faciale etl'organisation du protocole thérapeutique.

Diagnostiquées précocement en échographie, ces grandes formationstumorales orales et maxillo-faciales nécessitent souvent une imagerie complé-mentaire par IRM foetale ; les résultats font alors discuter en fonction de l'ex-tension, des risques vitaux et du pronostic souvent réservé, malgré les traite-ments proposés, une possible interruption de grossesse

Les épulis géants à myéloplaxe

Développés au dépend de la gencive, ils sont de taille respectable, et font sailliehors de la cavité buccale. leur diagnostic échographique est facile ; leur traite-ment chirurgical par section simple du pédicule gingival est organisé le jour dela naissance, car il gêne la prise du sein ou du biberon. La cicatrisation de lazone opératoire se fait en 48 heures. C'est une tumeur spectaculaire d'excellentpronostic.

Les teratomes faciaux.

De taille variable, à contenu liquidien et/ou solide, ils nécessitent une imageriecomplémentaire par IRM foetale. Leurs traitements chirurgicaux sont réalisésdans les premiers jours et sont de bon pronostic.

Les grenouillettes congénitales et kystes salivaires par imperforationcanalaire

Ce sont des cavités translucides, uni ou bilatérales sous la langue parfois detailles respectables, qui imposent la perméabilisation des canaux salivaires, trai-tement de la rétention. Leur pronostic est excellent.

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Les kystes branchiaux du plancher buccal

Chez le foetus, leurs aspects échographiques ressemblent à ceux des gre-nouillettes, formations kystiques homogènes dans le plancher buccal. Ils sontréséqués après ponction évacuatrice après la naissance. Leur pronostic est excel-lent.

Les lymphangiomes faciaux et péribuccaux.

Dans leur forme isolée faciale, leur pronostic, après exérèse chirurgicalepar dissection des éléments nobles de la face (nerfs facial, lingual, hypoglosse),est encore réservé car dominé par des poussées ultérieures, accessibles au traite-ment associant antibiotiques et corticoïdes ou sclérothérapie. Les formes exten-sives à la base de langue, larynx et médiastin font discuter l'interruption de gros-sesse.

� ConclusionLe foetus est devenu un être identifié, observé, surveillé, mesuré grâce à

l'échographie bi et maintenant tridimensionnelle. Cette échographie tridimen-sionnelle permet, aux couples qui la demandent, d'accéder à la réalité dysmor-phologique de leur enfant.

La découverte, en général, vers la 22ème semaine d'une anomalie mor-phologique, qu'elle soit de type tumoral, dysplasique ou malformatif déclenchela nécessité de l'entretien anténatal du couple parental avec le chirurgien théra-peute de l'anomalie constatée. Cet entretien « incontournable » pour une bonnenaissance, permet d'aborder tous les aspects de la pathologie présente et surtoutd'organiser, par anticipation en fonction de la date théorique de la naissance, leprotocole chirurgical. Lors de la constatation de malformation, telle que fentelabiale ou labio-maxillaire, la réparation précoce postnatale aurait ainsi pourfonction de réinscrire l'enfant dans l'humain. L'épanouissement de cet enfant,dont le rôle éthologique du visage est reconstitué rapidement après la naissanceen est l'objectif. La qualité de l'oralité alimentaire en représente alors l'expres-sion de son succès.

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� Ouvrages

BAYLON-CAMPILLO H., MONTOYA y MARTINEZ. (1996) L’incompétence vélo-pharyngée.215 p. L’Ortho Edition. Isbergues

REEDUCATION ORTHOPHONIQUE, (2001) Les maladies rares, 205, 200p. Paris

SERRE M., CHANCHOLLE A.-R. (1998) A visage différent. Collection « savoir cultures ». Editions Hermann, Paris

THIBAULT C., VERNEL-BONNEAU F. (1999) Les fentes faciales, embryologie, rééducation,accompagnement parental. 116 p. Collection orthophonie, Masson, Paris

� Associations

Association TREMPLIN- Syndrome de Pierre Robin

Membre d’Alliance Maladies Rares (AMR)

42 bis rue Gaston Brogniart

62219 Longuenesse – France

Tél : 0321381096 – 0321951133

Fax : 0321381945

E-mail : [email protected]

Site-Web : www.tremplin-spr.org

Association Francophone des Fentes Faciales

L’A.F.F.F. créée en 1998, regroupe les équipes pluridisciplinaires qui justifient d’un minimum de20 cas nouveaux / an. Elle compte environ 120 membres.

Elle est actuellement la seule association qui regroupe les professions différentes concernées parle traitement des fentes faciales.

L’assemblée générale a lieu tous les deux ans, lors du congrès national, lors des « Journées deSaint Vincent-de-Paul » où tous les spécialistes qui s’y intéressent se rencontrent.

A.F.F.F. 7, rue du Laos 75015 Paris.

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DERNIERS NUMÉROS PARUSN° HS : HISTOIRE DE L’ORTHOPHONIE EN FRANCE : JACOB RODRIGUE PÉREIRE (1715-1780) -

Recherches sur sa vie : Notice sur sa vie et ses travaux d'Edouard Seguin (1812-1880) (A. BRAUNER) - Unsavant juif engagé : Jacob Rodrigue Péreire (1715-1780) (R. NÉHER-BERNHEIM) — Recherches sur sestravaux : Analyse raisonnée de la méthode de Péreire (1847) (E. SEGUIN) - Un pionnier dans l'art de faireparler les sourds-muets : Jacob Rodrigue Péreire (R. NÉHER-BERNHEIM) — Documents : Une famille juivede La Rochelle au XVIIIe siècle : les Beaumarin (J.-C. BONNIN) - Rapport de la Commission nommée parl'Académie des Sciences - Extrait de l'Histoire naturelle générale et particulière : avec la description duCabinet du Roy. Tome troisième (M. le Comte de BUFFON) - Jacob-Rodrigues Péreire, premier instituteurdes sourds-muets en France, sa vie et ses travaux (E. LA ROCHELLE).

N° 212 : LE BILAN ORTHOPHONIQUE - Rencontre : Labo 2002, aide au bilan orthophonique (GillesLELOUP, Jacques ROUSTIT) — Examens et interventions : Le bilan du langage oral (Françoise COQUET)- Evaluation du langage écrit (Monique TOUZIN) - Le bilan vocal (Bernard ROUBEAU) - Le bilan des acti-vités logico-mathématiques : indications pratiques et cliniques (Alain MÉNISSIER) - Le bilan du bégaiementde l’adulte et de l’enfant (Véronique BOUCAND, Bernard ROUBEAU) - Aphasie de l’enfant : Protocoled’examen (Gilles LELOUP) - Evaluation des troubles neurologiques : une aide au bilan dans la perspectivede la psychologie cognitive (Philippe LHUISSIER) - Aide au bilan surdité (Audrey COLLEAU) - Bilan dupatient suspecté de démence (Thierry ROUSSEAU) - Epilepsie et troubles des apprentissages chez l’enfant :Protocole d’examen (Gilles LELOUP) - La déglutition dysfonctionnelle : Protocole d’examen (IsabelleEYOUM, Gilles LELOUP) - Bilans des fonctions oro-faciales (Isabelle EYOUM) - Protocole du bilan de ladysarthrie (Isabelle EYOUM) - Maladies neuro-dégénératives : Protocole d’examen (Isabelle EYOUM) —Perspectives : Vers un bilan idéologiquement maîtrisé ? (Marie-Pierre THIBAULT)

N° 213 : LANGAGE ÉCRIT : MORPHOLOGIE ET CONSCIENCE MORPHOLOGIQUE - Rencontre :Orthographe et morphologie (Béatrice POTHIER) — Données actuelles : La morphographie du français :un cas sémiographique (Jean-Pierre JAFFRÉ) - Morphologie et acquisition de l’orthographe : état desrecherches actuelles (Sébastien PACTON) - Morphologie des mots et apprentissage de la lecture (PascaleCOLÉ, Carine ROYER, Nathalie MAREC-BRETON, Jean Emile GOMBERT) — Examens et interventions :Développement des processus d'identification de mots écrits : une étude transversale entre 6 et 8 ans(Jean ECALLE) - Réviser la morphologie flexionnelle verbale : étude chez l’enfant et l’adulte (AlexandraDÉDÉYAN, Pierre LARGY) - Produire la morphologie flexionnelle du nombre nominal :étude chez l’enfant d’école primaire (Marie Paule COUSIN, Pierre LARGY, Michel FAYOL) - La dictéed’énoncé : un outil pour dépister un enfant dyslexique ? Approche phonologique et morphologique (VéroniqueREY, Carine SABATER) — Perspectives : L’acquisition/apprentissage de la morphologie du nombre. Bilanet perspectives (Michel FAYOL) - Devenir un bon orthographieur : l'importance de la morphologie (Marie-Pierre THIBAULT)

N° 214 : L’HYPERACTIVITÉ ET LES TROUBLES DE L’ATTENTION - Rencontre : Fabien, enfanthyperactif (FLORENCE) — Données Actuelles : Le Trouble Déficit de l’Attention - Hyperactivité :aspects cliniques et évaluation diagnostique (Valérie VANTALON) - Traitement médicamenteux de l’hyper-activité (Régis BRUNOD) - L’enfant hyperactif et les apprentissages (Monique TOUZIN) - Approches fami-liales dans le trouble déficit de l’attention/hyperactivité (Marie-Claude NEDEY-SAÏAG) — Examens et inter-ventions : Evaluation psychomotrice et neuropsychologique du Trouble Déficit de l’Attention/Hyperactivité(Régis SOPPELSA) - Proposition d’une intervention métacognitive visant à contrer le trouble de déficit del’attention avec ou sans hyperactivité (Marie LAZURE, Francine LUSSIER, Annie MÉNARD) - TroubleDéficit de l’Attention/Hyperactivité et rééducation psychomotrice : présentation d’un cas (Régis SOPPELSA,Jean-Michel ALBARET) — Perspectives : Douloureux parcours d’une familled’hyperactifs (Marlène WAHL)

N° 215 : IMMOBILITÉS LARYNGÉES - Rencontre : La place de l’orthophonie dans la prise en charge desimmobilités laryngées : les recommandations pour la pratique clinique (Bernard ROUBEAU) — Examens etinterventions : Rééducation des immobilités laryngées unilatérales (Emmanuel BAUDELLE, ChristianeORENSTEIN, Jean-Louis BRUN) - La pratique des chaînes d’occlusions dans la rééducation des paralysiesunilatérales du larynx (Benoît AMY DE LA BRETÈQUE) - Troubles de la déglutition et immobilités laryn-gées (Michel GUATTERIE) — Données Actuelles : La médialisation chirurgicale de la corde vocale : résul-tats vocaux (Isabelle LIESENFELT) - Confort de vie des patients avant et après médialisation de la cordevocale dans le cadre d’une paralysie laryngée unilatérale (Géraldine DEBONO) - La prise en charge ortho-phonique des paralysies récurrentielles unilatérales. Enquête auprès des orthophonistes : résultats prélimi-naires (Christophe TESSIER, Bruno SARRODET, Sylvie BRIHAYE, Lise CREVIER-BUCHMAN, StéphaneHANS, Daniel BRASNU) - Immobilités laryngées bilatérales. Place de la prise en charge orthophonique(Michèle PUECH) - Paralysie du nerf laryngé supérieur. Sémiologie, diagnostic et traitement (EmmanuelBAUDELLE).

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