le rock et les femmes

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Peut-on déconstruire les « genres » musicaux ? Ce qu'être une femme dans un groupe de rock veut dire. Neko Case s'y essaye. Elle chante et joue de nombreux instruments quand elle ne manie pas l'épée ou ne détourne pas d'autres symboles phalliques. Cet essai s'appuie une étude de la sociologue américaine Mary Ann Clawson, menée en 1991 dans la région de Boston. DOSSIER

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Une femme a t-elle sa place dans un groupe de rock ? William Etievent prête sa plume au Blackout et nous livre un article original et pertinent. A déguster sans modération.

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Peut-on déconstruire les « genres » musicaux ? Ce qu'être une femme dans un groupe de rock veut dire.

Neko Case s'y essaye. Elle chante et joue de nombreux instruments quand elle ne manie pas l'épée ou ne détourne pas d'autres symboles phalliques.

Cet essai s'appuie une étude de la sociologue américaine Mary Ann Clawson, menée en 1991 dans la région de Boston.

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Bassistes et chanteuses, corps et hiérarchie (sexuée) des rôles dans le rock

« Now you're not even a cool band unless you have a girl bass player - named Kim » Kim Deal.Cette affirmation de la bassiste des Pixies en clin d’œil à son aco-lyte Kim Gordon de Sonic Youth peut sembler candide, et pourtant force est de constater que les an-nées 80 à 90 ont vu une déferlante de filles brandir des 4 cordes et se frayer leur chemin jusqu'aux scènes rock, alors (et aujourd'hui encore), très largement disputées par de jeunes mâles blancs. Tant et si bien que la basse en est ve-nue à y être largement considérée

comme « l'instrument de fille ».

Une conquête en demi-teinte ce-pendant, dans la mesure où la basse est l'instrument le plus « dominé » dans le rock ; la guitare électrique demeure à la fois l'instrument le plus « masculin » ainsi que celui au-quel est associé le plus de prestige.Nous allons essayer dans le pré-sent article de décrypter cette tendance justifiée dans la culture populaire par des explications aus-si scientifiques que « la basse c'est plus facile, y'a moins de cordes, les filles ont de petites mains ».

Allez demander à un(e) bassiste ce qu'il en pense et il vous dira que c'est un guitariste (petites mains, grande gueule) ou un im-pie qui vous a dit ça. Il est clair qu'entre appuyer sur des cordes de basse - épaisses de 3mm - et de guitare - épaisses de 1.2 mm - le calcul est vite fait pour savoir lesquelles réclament le plus de poigne. La basse est également plus lourde, plus volumineuse, a un manche plus long et plus large que la guitare (pourtant considé-rée comme plus « phallique »).

Personnellement je compterais mes doigts avant de serrer la main à Paz Lenchantin, bassiste au punch redoutable de The Entrance Band, A Perfect

Circle, j'en passe et des meilleures...

De même, dans le monde de l'or-chestre symphonique, la contre-basse et les cuivres, instruments puissants et pesants au timbre grave réclamant tonus et force physique dans leur exécution sont associés à la virilité et majoritaire-ment joués par des hommes tan-

dis que les violons et la flûte tra-versière le sont par des femmes1. De nombreuses autres excuses, « culturelles » comme « biologiques », ont cependant été largement avancées pour justifier cette di-vision sexuelle du travail dans le rock, laquelle n'est en réalité que

l'expression d'un rapport de force défavorable aux femmes.

Le passage des filles derrière un instrument constitue quoi qu’il advienne une évolution notable, il contribue à rompre l’hégémo-nie masculine du milieu du rock

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et contrecarre la tendance de ces dernières a s’y voir cantonnées au rôle de chanteuse avec les présup-posés que cela véhicule.Car avant d’être bassistes les filles étaient majoritairement vocalistes, ce qui dans le milieu du rock, comme du jazz ne constitue pas une ressource symbolique comme dans la pop. Une étude de Marie Buscatto sur le milieu du Jazz en France au début des années 2000 montre qu’en effet 70 % des chan-teurs de jazz sont des chanteuses2. Ce qui pose déjà problème au

niveau du Jazz, ou la musique est (souvent) déjà écrite, et où l’on juge de la créativité des instru-mentistes à la manière dont ils se la réapproprie par l’improvisation, est d’autant plus handicapant dans le rock où « le groupe » est censé être une unité créative autonome.La musique rock n’est pas une mu-sique « écrite ». La composition y doit donc beaucoup à l’impro-visation en groupe, le chant est généralement rapporté plus tard. Les groupes de reprises sont peu estimés de leurs pairs et les chan-

teurs (a fortiori les chanteuses) qui ne doublent pas leur voix d’un instrument sont souvent considé-rés avec circonspection. De fait, les vocalistes ne sont pas considérés comme de « vrais » musiciens de groupe car ils ne participent pas « directement » à la composition, ce qui est moins vrai pour certains « solo-acts » - respectés dès lors qu’ils composent l’intégralité de leur musique, comme Björk par exemple - mais qui conditionne largement l’image que l’on se fait des vocalistes dans ce milieu3.

PJ Harvey compose par exemple seule l'intégralité de sa musique, on remarque cependant qu'elle ne se sépare que rarement de sa

guitare quand elle chante

Cerise sur le gâteau, les vocalistes sont dénigrés par les « vrais » amateurs de musique, attentifs aux détails et donc à l'arrière-scène, car ils voleraient la vedette aux instrumentistes, « juste » avec leur physique et leur charisme.

Un affront pour ceux qui ont la légitimité d'avoir eu à apprendre une technique clairement iden-tifiable comme telle, nécessitant dextérité, adresse, créativité et

endurance. Le chant étant lui jugé sur des critères moins faciles à formaliser, comme « l'attitude » et la « sensibilité ». Il est plus difficile de se voir reconnu comme un bon « musicien » quand on est chan-teuse ou chanteur ; quand bien même de plus en plus de musi-ciens considèrent la voix comme un instrument, le chant est tou-jours très lié au corps et à l'image.

Un(e) vocaliste est au front de

la scène, et se fait relais direct de la musicalité avec le public, sans possibilité de se cacher der-rière un instrument et ne se justifie de sa présence que par celle de son corps, de sa voix.

Quand on est une femme vocaliste, cela conduit irrémédiablement à se voir réduite à son corps et jugée à l'aune des principes de la « féminité ». De même, les « attitudes » et le jeu de scène que peut déployer une

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chanteuse seront certainement interprétés comme l’expres-sion d’un « charme » naturel, et non comme une démarche ar-tistique réfléchie. Quoi que vous fassiez, vous avez de grandes chances de passer pour une po-tiche, oui c’est ça, pour un objet.

Cette tendance à réifier les femmes et leurs compétences se

confirme lorsque l'un des argu-ments les plus avancés pour justi-fier leur engouement pour la basse dans les années 90, consistait à dire que c'était un instrument plus « sensuel », plus « rythmique », lié au « corps », notamment à la danse – c'est bien connu le « deu-xième sexe » ne pense qu'à ça - et à une supériorité « émotionnelle » présumée du genre féminin. Une

explication qui certes aura été re-prise à leur compte par les bas-sistes féminines, qui entreprirent de « féminiser » cet instrument mais aura été largement rejetée par les bassistes masculins. Un ar-gument qui semble d'autant plus douteux que l'instrument mobili-sant le plus le corps et le rythme, la batterie, demeure un instru-ment « de mec » en dépit de cela.

« Ok, on fait quoi du coup pour Karen O des Yeah Yeah Yeahs ? On n’a qu'à mettre son jeu de scène sur le compte de l'hystérie, comme

pour Björk ! »

Autre stéréotype que cela évoque, la sépara-tion arbitraire entre corps et esprit, entre pra-tique et théorie. D'autant plus que pour certains la guitare n'en est pas moins « cérébrale » quand bien même sa pratique mobiliserait le corps. Les membres de Sonic Youth estimaient notamment que l'enseignement le plus cher que Jimi Hen-drix ait jamais pu faire au monde du rock, c'est que l'on jouait de la guitare avec tout son corps. Et si on invite aujourd'hui Kim Gordon à se pro-duire dans des musées avec son projet – juste-ment – nommé Body/Head, c'est qu'à l'évidence certaines instances dominantes du monde de l'art sont bien prêtes à l'admettre quand ça les arrange.

Comme quoi, même laborieusement, du chemin a été fait... Nous allons désormais tenter de com-prendre comment les lignes ont bougé en faveur de cette féminisation du monde du rock, puis nous ver-rons ensuite comment prolonger ce mouvement.

1 Bernard Lehmann, L'orchestre dans tous ses éclats : ethnographie des formations symphoniques, Paris, La découverte, 2002 2 Pourtant les chanteuses ne jouissent que d'une faible reconnaissance de la part de leurs pairs et n'arrivent pas à vivre de leur art contrairement à leurs homologues instrumentistes, majoritairement masculins.Marie Buscatto, « Chanteuse de Jazz n'est point métier d'homme : L'accord Imparfait entre voix et instrument », Revue Française de sociologie, 2002 3 Marie Buscatto a observé à ce titre qu'un(e) vocaliste jazz ne peut quasiment jamais se faire engager dans un groupe, mais qu'il ou elle doit créer le

sien par lui même pour espérer trouver des collaborateurs, on ne peut qu'être leader de son groupe en tant que vocaliste jazz.

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Genre et genres musicaux

Le mouvement punk, son sens de la transgression et le principe du « Do It Yourself » qui en dé-coule, ont encouragé nombre « d'outsiders » à dépasser leurs ap-préhensions et à se lancer dans le rock. La présence de femmes – ces éternels outsiders - dans les groupes était dès lors perçue comme une manière de rompre le statu quo. Les femmes se jouant des normes établies de la féminité étant d'ailleurs les mieux accueil-lies dans ces cercles. Ce qui n'au-rait pas été possible dans le Heavy

Metal, genre dominant à cette époque, qui était d'ailleurs large-ment taxé de « cock-rock » par les tenants de la scène hardcore.La scène punk féministe « Riot Grrrl » et des groupes embléma-tiques comme Bikini Kill ou Team Dresch doivent leur existence à cet esprit de transgression. En dépit de cela, la scène punk est restée statistiquement très mas-culine et a eu tendance à se « machiser » de plus en plus en dé-pit de certaines bonnes volontés, notamment du fait de ses figures

de proue, qui chemin faisant ont commencé à s'en désolidariser.Ian Mc Kaye de Minor Threat et Fugazi s'est notamment mis en tête d'éliminer les danses violentes de-venues systématiques et incontrô-lables dans les concerts punk. Mc Kaye gardait des enveloppes de 5$ sur la scène et quiconque pris à « mosher » ou à « slamer » se faisait calmement rappeler à l'ordre4 et, s'il ne coopérait pas, escorter vers la sortie avec ses 5$5 de dédomma-gement. Cela n'a pas pour autant empêché cette scène de péricliter.

"Hello... like all you guys floating around on the top with your big boots on, you're like kicking people in the head and like hurting people, so I would like you to stop. You're like trying to be cool but it looks really stu-

pid. Like you're trying to imitate MTV or something."

Kathleen Hannah, activiste et initiatrice du mouvement Riot Grrl avec son groupe Bikini Kill a souvent interrompu ses concerts pour faire reculer les garçons en train de « mosher » et laisser les filles venir au premier rang. Elle a formé par la suite le célèbre groupe d'électro-clash « Le Tigre » et est actuellement en

tournée avec son nouveau projet « The Julie Ruin ».

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De fait, les figures de proue du mouvement « Riot Grrrl » comme toutes les « filles du rock » avant elles ont largement dû jouer « les gros bras » pour se faire une place au soleil dans ce milieu – sans jouer les « groupies ». La « rock-chick » telle qu'incarnée justement par l'iconique Joan Jett, montre qu'une femme peut aussi bien faire qu'un homme... en faisant comme un homme.Se pose dès lors une question qui peut sembler anodine mais qui renvoie dos à dos les deux cou-rants de pensée principaux du féminisme, à commencer par les tenants et les détracteurs de la théorie queer. La transgression des normes de genre permet certes de les subvertir et de contribuer à faire évoluer la conception du rôle des femmes dans la société, mais elle ne remet pas nécessai-

rement en question l’origine des rapports de force qui leur sont défavorables, comme par exemple ceux qui aboutissent au virilisme. Alors que le mouvement punk hardcore était à son apogée, de petits groupes, largement fémini-sés, en ont pris le contrepied. Le hardcore, catharsis de la frustra-tion adolescente est une musique violente, nihiliste et abrasive. Les groupes « d’indie-pop » - quali-fiés indélicatement de « twee-pop » (la pop mièvre) par la critique et leurs détracteurs - qui se for-mèrent en marge de cette scène se firent, naïfs, idéalistes et intimistes.Les concerts de hardcore se dé-roulaient dans des caves, face à des audiences remuantes majori-tairement blanches et mâles, tan-dis que les concerts de « twee », souvent organisés dans des mai-sons particulières, faisaient figure

de soirées pyjama. Des groupes comme Beat Happening ou Cub (ce dernier étant qualifié de « cuddlecore ») distribuaient des sachets de bonbons dans le pu-blic pendant leurs prestations.La twee-pop aura souvent été cri-tiquée comme un genre musicale-ment « pauvre », et « léger », mais il n’en demeure pas moins sub-versif. En rejetant tout à la fois le virilisme du hardcore, l’érotisation du corps féminin de la pop mains-tream et le cynisme de la « cool » attitude, la twee a permis à tout un(e) chacun(e) de s’exprimer sans masque, sans crainte d’être jugé(e).Des groupes comme Heavenly ou les Blake Babies, en dépit de leurs instrumentations légères se payent même le luxe d’avoir des textes poignants et militants.

Le P.U.N.K. Girl EP d'Heavenly avec sa couver-ture bariolée et ses chan-sons sautillantes en par-viendrait presque à nous faire oublier qu'il raconte

l'histoire d'un viol avant de se conclure sur une chan-son en spoken word parti-

culièrement sombre.

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La « twee » a également pavé la voie pour l'indie-rock, genre au-quel est associé un très grand nombre d'instrumentistes fémi-nines. L'indie rock est un genre « introverti » et intellectuel, laissant

la part belle aux instruments, le chant y est secondaire – et sou-vent faux. L'accent est mis sur l'audace et la qualité de la com-position, les « poses » et le jeu de scène viriliste du rock traditionnel

y sont souvent déconsidérés. Vou-loir faire de l'indie rock c'est avant tout vouloir jouer d'un instru-ment et faire de la bonne musique.

Les murmures et lamentations éthérées que noient Bilinda Butcher et Kevin Shields de My Bloody Valentine dans un ouragan de guitares hurlantes traduisent bien « l'introversion » de cette scène musicale.

L'indie-rock c'est également la mu-sique de ceux que les critiques ap-pelaient les « student types », ces gens cultivés, idéalement progres-sistes et enclins à la mixité. Cette ouverture culturelle explique en partie pourquoi de nombreuses filles se sont faites instrumen-tistes – et bien souvent bassistes - dans cette scène en particulier.Mais « indépendant » ou pas, ça reste du rock, l'élusive guitare électrique y est toujours reine6 et les postes de bassistes y sont donc les moins disputés7. Moins convoi-tée et subordinée à la guitare, la basse semble être un instrument moins exigeant, qui pèse moins

dans le processus de création.La moindre concurrence pour les postes de bassiste ne pousse pas non plus les bassistes à rivaliser de virtuosité pour trouver un groupe – contrairement à leurs homo-logues guitaristes qui passent leur temps à se pavaner - ce qui contribue à ternir un peu plus la réputation de la basse, qui ferait figure d'instrument « facile » et « subalterne »... mais également plus accessible, une ouverture pratique providentielle pour les dernièr(e)s arrivées, mais aussi pour celles et ceux qui se refusent tout sim-plement à cette compétition8 ri-dicule dans laquelle se retrouvent

embarqués les guitaristes9. Auparavant exclusivement mas-culine, l'activité de bassiste a été ouverte au plus grand nombre au fur et à mesure de sa déqua-lification comme d'autres ac-tivités avant elle10, offrant ainsi une opportunité aux femmes d'accéder à un milieu qui jusqu'alors leur était inaccessible.L’arrivée tardive des filles dans le milieu du rock l’est généralement également au niveau individuel, en terme de trajectoires de vie, la socialisation différenciée selon le genre, notamment au moment de l’enfance, tend à retarder l’exposi-tion des filles à la musique amplifiée,

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et contrairement aux garçons qui commencent à jouer au lycée, les filles commencent généralement à l’université11 , un moment ou la vie sociale est plus « mixte ». De fait la basse se présente comme l’option pragmatique pour qui commence tardivement la musique et souhaite rapidement trouver un groupe.En dépit de sa mauvaise réputa-tion, la basse n’en demeure pas

moins un instrument passionnant avec ses propres logiques pour qui prend la peine de bien vouloir s’y intéresser, les démonstrations de virtuosité dans sa pratique ne manquent pas y compris chez les filles, écoutez un morceau de The Entrance Band et vous verrez si Paz Lenchantin ne tire pas l’en-semble de son groupe vers le haut.Si le moindre doute venait à

subsister sur une présumée moindre compétence des filles pour produire de la musique originale ou manier des instru-ments avec fougue et dextérité (en dehors de la basse), je vous suggère d’aller jeter une oreille a Come, ou a Sleater-Kinney.

Vous comprendrez également pourquoi tous les groupes d'in-die s'arrachent leur batteuse Janet Weiss depuis la dissolution

du groupe. Un truc de mecs la batterie ? Je ne pense pas !

4 Mac Kaye cité dans le livre de Michael Azzerad, Our band could be your life, « See, [slam dancers] have one form of communication: violence ... So to disorient them, you don't give them violence. I'd say, 'Excuse me, sir...'- I mean, it freaks them out – 'Excuse me, sir, would you please cut that crap out?' » 5 D'autres initiatives du genre existent, les Beastie Boys ont notamment publié un « do et don't » du slam-dancing. 6 Matthew Bannister, « ‘Loaded’ : indie guitar rock, canonism, white masculinities », Popular Music, vol 25, 2006 7 Comme les postes dans les manufactures d’armement et à peu près tout les autres secteurs de la vie économique pendant la seconde guerre mondiale... 8 Parfois littéralement au rendement ! Certains guitaristes se faisant un honneur de développer leur « vélocité ». 9 Jetez un œil à une vidéo du G3, série de concerts réunissant 3 guitaristes particulièrement techniques, puis remémorez-vous les garçons jouant à qui pisse le plus loin aux colonies de vacances de votre enfance. C’est également ainsi que j’ai décidé de me mettre à la basse après 8 ans de guitare. 10 « Rather than pushing men out, women gain access to jobs that men have already begin to abandon. » pour approfondir la question du « Job Queuing » lire Reskin & Roos, Job queues, Gender queues: Explaining women’s inroads into male occupations. Ainsi que les travaux d’Everett Hughes sur les métiers du secteur médical. 11 Mary Ann Clawson observe que 50 % des filles commencent la basse pendant leurs études universitaires. Son étude porte sur

Boston, une ville universitaire dotée d’une scène musicale très dynamique au moment de son étude, en 1991.

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Quel avenir pour les filles dans le rock ?

Tout reste à faire, et comme on vient de le voir, le champ des possibles varie d'une scène rock à une autre pour les femmes.Il est cependant rassurant de voir aujourd'hui des femmes trouver leur place dans des groupes et scènes variées. Il est notamment rafraîchissant de les voir investir la scène « stoner rock » pour-

tant héritière du « hard rock » (assez macho dans son... genre), que ce soit en tant que specta-trices ou en tant que musiciennes. On y trouve même des forma-tions menées par des femmes. Comme Laura Pleasants de Kyle-sa et Lori S. d'Acid King, toutes deux guitaristes, la première est avant tout reconnue pour le gé-

nie de ses compositions, la deu-xième est une guitariste virtuose.D’autres guitaristes féminines méritant le détour sont égale-ment membres de formations dans le Doom Metal, genre musi-cal proche du stoner au son par-ticulièrement sombre et violent.

Liz Buckingham d'Electric Wizard, en plus d'être plus virile que pas mal de mecs (a commencer par moi), a certainement le style de jeu le plus lourd et agressif de l'histoire du rock. Ne me croyez pas sur

parole, écoutez « Dopethrone » ou « Legalise Drugs & Murder »

La lumière est plus véloce que le son. Wata de Boris a beau être plus menue et coquette que Liz, son style de jeu n'en est pas moins assourdissant. Guitariste audacieuse, elle navigue de l'ombre à la lumière et

pourfend sereinement les murs du son. Ecoutez « The Evilone Which Sobs »

Kathleen Hanna n’a de cesse d’encourager les filles qui le désirent à former des groupes : faire de la musique c’est s’exprimer, c’est exister. Qu’importe le « genre » auquel on aspire, l’instrument, le style, le niveau... tout ce qui compte, c’est de s’y retrouver, et je suis bien d’accord avec elle.

Je tiens tout particulièrement à remercier celles qui ont relu mon article d’un point de vue féminin et m’ont aidé à ne pas trop passer pour un petit-mâle-blanc-qui-crache-dans-sa-propre-soupe – et surtout à ne pas (trop) écrire comme une merde – Carole, Jihène, Maëlle et Sybille. Si vous aviez vous aussi, envie de réagir à cet article je serais honoré d’échanger avec vous par mail ou sur

mon site internet où cet article sera republié sous peu.William Etievent

[email protected] http://nextrack.co.uk