la prise en charge des cicatrices - sfrm-gemmsor.fr · il contient les annexes cutanées, les...

41
Emilie VANCOPPENOLLE Sous la direction du Professeur François MOUTET Grenoble 2013/2015 La prise en charge des cicatrices Mémoire présenté pour l’obtention du Diplôme Inter Universitaire Européen de Rééducation et Appareillage en Chirurgie de la main. G R E N O B L E 1 UNIVERSITE

Upload: duongngoc

Post on 13-Nov-2018

442 views

Category:

Documents


8 download

TRANSCRIPT

Emilie VANCOPPENOLLESous la direction du Professeur François MOUTET

Grenoble 2013/2015

La prise en charge des cicatrices

Mémoire présenté pour l’obtention du Diplôme Inter Universitaire Européen de Rééducation et Appareillage en Chirurgie de la main.

G R E N O B L E 1

UNIVERSITE

La prise en charge des cicatrices - 2 -

REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier le Professeur François Moutet et l’ensemble des intervenants du DIU de Rééducation et d’Appareillage en Chirurgie de la Main, pour leur investissement et leur partage passionné.

Merci encore aux professionnels qui nous ont accueillis en stage, pour le temps qu’ils nous ont consa-cré et les connaissances qu’ils nous ont transmises.

Enfin, je remercie chaleureusement ma soeur Flore pour son aide précieuse.

La prise en charge des cicatrices - 3 -

RÉSUMÉ

Ce travail s’intéresse aux moyens thérapeutiques dont nous disposons aujourd’hui pour traiter les cicatrices. Il recense les différents moyens non-invasifs disponibles dans la littérature.

Il a pour objectif de pouvoir proposer au thérapeute un « tableau pratique » de prise en charge, établi en fonction des recommandations internationales et de faire le recueil des nombreuses techniques à notre disposition.

Après un chapitre sur les rappels anatomo-physiologiques, un deuxième chapitre est dédié au bilan de la cicatrice. Ce bilan sera essentiel pour mettre en place notre traitement. Ensuite vient un chapitre sur les différents moyens thérapeutiques à notre disposition puis un autre sur les conseils que nous pouvons prodiguer aux patients pour optimiser leur traitement. Et enfin, la conclusion.

La finalité de ce travail est de montrer que parmi toutes ces techniques, certaines comme le traitement compressif et la pressothérapie ont fait leurs preuves depuis de nombreuses années et doivent être utilisées, et d’autres, comme les massages, les orthèses, ou les techniques instrumentales peuvent optimiser notre prise en charge si elles sont utilisées correctement et surtout au bon moment.

La prise en charge des cicatrices - 4 -

INTRODUCTION

RAPPELS ANATOMO-PHYSIOLOGIQUES

1.

2.

2.1 ANATOMIE

2.4 CICATRISATION PATHOLOGIQUE

2.5 FACTEURS INFLUENÇANT LA CICATRISATION

SOMMAIRE

2.3 PHYSIOLOGIE DE LA CICATRISATION

2.2 LA CICATRICE

BILAN DE LA CICATRICE3.

3.1 L’INTERROGATOIRE

3.2 L’ASPECT ET LA CONSISTANCE TISSULAIRE

3.3 LES DIMENSIONS DE LA LÉSION

3.4 TEST D’ÉTIREMENT ET DE PLISSEMENT CUTANÉ

3.5 TEST DE VITROPRESSION OU TEST DE RECOLORATION CUTANÉE

La prise en charge des cicatrices - 5 -

3.6 TEST DE PRURIT

3.7 L’ÉCHELLE DE VANCOUVER

3.8 LE BILAN ARTICULAIRE

3.9 LE BILAN PHOTOGRAPHIQUE

3.10 L’AVIS DU PATIENT

3.11 LE POSAS

3.13 EVOLUTION

3.12 PATHOLOGIES ASSOCIÉES

MOYENS THÉRAPEUTIQUES4.

4.1 TRAITEMENT COMPRESSIF

4.2 TRAITEMENT OCCLUSIF

DRAINAGE LYMPHATIQUE MANUEL

MASSAGE

4.3 TECHNIQUES MANUELLES

La prise en charge des cicatrices - 6 -

4.4 MASSAGE INSTRUMENTAL ASPIRATIF

4.5 LES ORTHÈSES

4.6 L’EXERCICE

4.7 LA PHYSIOTHÉRAPIE

4.8 CRÈMES, HUILES ET LOTIONS

4.9 DOUCHES FILIFORMES

4.10 MICRONEEDLING

SOINS DES PLAIES

CONCLUSION

EDUCATION THÉRAPEUTIQUE

ANNEXES

BIBLIOGRAPHIE

6.

7.

5.

8.

9.

La prise en charge des cicatrices - 7 -

INTRODUCTION1.

En tant que thérapeutes spécialisés en rééducation de la main, nous sommes amenés dans notre pratique quotidienne à prendre en charge des cicatrices.

Qu’elles soient d’origine traumatique ou chirurgicale, elles peuvent parfois poser des problèmes :ceux-ci peuvent être fonctionnels, esthétiques, algiques.

Il est important de comprendre les mécanismes physiologiques de la cicatrisation pour pouvoir ensuite adapter notre prise en charge en fonction de l’évolution de la cicatrice. Après évaluation de la lésion et de son potentiel évolutif, le thérapeute a plusieurs instruments efficaces à sa disposition : compression, traitement occlusif, drainage, massage, dépressomassage, physiothérapie, appareillage par orthèses.

Au final, «  si l’on n‘efface jamais complètement une cicatrice  », on peut presque toujours en atténuer la visibilité, et le plus souvent rendre aux tissus la souplesse et la liberté compatibles avec une fonction acceptable.

La prise en charge des cicatrices - 8 -

RAPPELS ANATOMO-PHYSIOLOGIQUES2.

STRUCTURE DE LA PEAU (1)

La peau correspond à l’enveloppe corporelle de chaque individu. C’est un organe étendu composé de trois couches ; l’épiderme, le derme et l’hypoderme.

• L’EPIDERME est une couche épithéliale de surface, en contact avec l’environnement extérieur. Cette couche, contenant les glandes sudoripares, les follicules pileux et d’autres annexes cutanées, s’étend en profondeur. Les keratinocytes représentent la classe majoritaire parmi les mélanocytes, les cellules de Langerhans et les cellules de Merckel.

• LE DERME est une couche intermédiaire de tissu de soutien fibroélastique synthétisé par les fibroblastes ; il contient les annexes cutanées, les vaisseaux sanguins, les nerfs ainsi que les terminaisons nerveuses.

• L’HYPODERME, couche la plus profonde, est composée essentiellement de tissu adipeux. C’est un tissu vascularisé et innervé. Sur le plan biomécanique, l’hypoderme dispose d’une propriété physiologique d’isolation, de glissement de la peau par rapport au plan de glissement inférieur et de répartition des contraintes.

2.1 ANATOMIE

Coupe de la peau (2)

La prise en charge des cicatrices - 9 -

La peau est un organe complexe auquel on attribue cinq grandes fonctions vitales pour l’organisme (3) :

• une fonction de protection du milieu intérieur contre les agressions du milieu extérieur,

• une fonction d’échanges avec ce même milieu extérieur, parce que le revêtement cutané n’est pas une barrière totalement étanche,

• une fonction de thermorégulation :

- elle permet le maintient d’une température corporelle constante (36,8°C),- elle protège le corps contre les déperditions caloriques par les poils, les cheveux et le tissu adipeux sous-cutané,- elle facilite également la déperdition de chaleur par l’évaporation de la sueur à partir de la surface cutanée et par l’accroissement du débit sanguin dans le réseau capillaire du derme,

• une fonction sensorielle  : la peau, organe sensoriel le plus étendu de l’organisme, contient de nombreux types de récepteurs qui assurent la sensibilité,

• des fonctions métaboliques avec au premier plan la synthèse de la vitamine D.

Au niveau de la main, la peau palmaire et la peau dorsale ont une architecture et une fonction fondamentalement différentes ;

• la fonction prédominante de la peau dorsale est de permettre l’enroulement digital,• la fonction de la peau palmaire est de permettre une bonne efficacité de préhension.

• LA PEAU PALMAIRE est épaisse et peu extensible, constituée de crêtes papillaires qui permettent d’optimiser l’efficacité des mécano-récepteurs au niveau de la pulpe des doigts. Elle est beaucoup plus riche en mécano-récepteurs, en tissus graisseux et en tissus conjonctifs que la peau dorsale. Elle est glabre mais pourvue de glandes sudoripares qui permettent son hydratation (maintient d’une bonne souplesse tégu-mentaire - amélioration de la préhension).

Elle possède par ailleurs des systèmes d’amarrages entre le derme et l’hypoderme qui améliorent sa résis-tance mécanique; c’est la peau de la préhension.

• LA PEAU DORSALE possède une couche cornée très fine sans fixation profonde. Elle est beaucoup plus extensible que la peau palmaire; c’est la peau de la mobilité. En effet, les réserves cutanées dorsales sont in-dispensables à une bonne liberté articulaire. (4)

Le rééducateur doit donc s’adapter aux impératifs fonctionnels liés à la localisation de la plaie :

• PEAU PALMAIRE prévention des troubles de la préhension et syndrome d’exclusion fonctionnelle. Elle adhère et se rétracte facilement.

• PEAU DORSALE prévention de la raideur en flexion digitale (qui peut être à l’origine d’une exclusion fonctionnelle du doigt atteint).

La prise en charge des cicatrices - 10 -

Le mot anglais scar (cicatrice) vient du grec eskhara qui veut dire croûte. La cicatrice est définie dans l’Oxford English Dictionary (2004) comme une marque laissée sur la peau après la cicatrisation d’une plaie ou d’une brûlure. Elle est dépourvue de stries et d’annexe cutanées, et peut être de couleur hyper- ou hypopig-mentée.

Une cicatrice reflète le mode de guérison d’une peau lésée. Les plaies qui affectent une partie de l’épiderme et du derme superficiel, tout en épargnant les annexes cutanées, ont tendance à cicatriser sans former de cicatrices.

Les plaies touchant toute l’épaisseur de la peau, y compris le derme profond, cicatrisent avec forma-tion d’une cicatrice. L’importance de celle-ci varie, allant de la cicatrice minime à la cicatrice excessive (cica-trices hypertrophiques ou cheloïdes). (5)

La cicatrisation est la dernière étape d’un processus inflammatoire qui se déroule en 4 phases :

• phase initiale inflammatoire et vasculaire,• phase inflammatoire granulomateuse,• phase de bourgeon charnu,• phase de cicatrisation proprement dite.

Le processus inflammatoire a pour but :

• de réagir aux dégâts dûs à l’agression tissulaire quelle qu’en soit la nature- en limitant son extension (phase vasculaire)- en assurant la détersion (phase granulomateuse),

• de rétablir une continuité tissulaire temporaire (phase de bourgeon charnu),

• de rétablir une continuité définitive (re-épithélialisation et cicatrisation définitive).

Eléments du processus inflammatoire : facteurs humoraux et cellulaires multiples permettant le recrutement et l’activation des différentes cellules. Les cellules intervenant dans le processus inflammatoire :

• éléments inflammatoires : - les mastocytes : rôle dans la vasodilatation et la perméabilité capillaire,- les polynucléaires,- les histiocytes macrophages : rôle majeur de phagocytose,- les lymphocytes et plasmocytes : rôle dans l’immunité et les interactions cellulaires,

• cellules endothéliales,• fibroblastes et myofibroblastes synthétisent  :

- les collagènes,- les éléments non fibrillaires de la matrice extra-cellulaire,

• cellules épithéliales à partir desquelles se déroule la reépithélialisation de la plaie (kératinocytes).

2.3 PHYSIOLOGIE DE LA CICATRISATION (6)

2.2 LA CICATRICE

La prise en charge des cicatrices - 11 -

PHASE INITIALE INFLAMMATOIRE ET VASCULAIRE

Son importance et sa durée sont variables selon l’agent agresseur et l’intensité des dégâts tissulaires.

Elle associe :

• vasodilatation,• oedème et exsudat fibrineux,• leucodiapédèse (mouvement des leucocytes vers les tissus inflammés).

Elle débute en quelques minutes. L’agression tissulaire va générer de nombreux médiateurs vasoactifs et des facteurs chimiotactiques sériques ou libérés par les plaquettes ou par les cellules parenchymateuses lésées. Ces facteurs  vont être responsables :

• de la vasodilatation et de l’augmentation de la perméabilité capillaire,• du recrutement des leucocytes et notamment, dans cette première phase, des polynucléaires.D’autres facteurs attireront plus spécifiquement les histiocytes macrophages et les lymphocytes.

La vasodilatation et l’augmentation de la perméabilité capillaire permettent l’issue de substances sériques (exsudat) et de cellules circulantes en dehors du circuit vasculaire, dans et autour du foyer lésionnel. Elle sont responsables de l’oedème et de l’exsudat qui vont :

• diluer les substances toxiques,• apporter des protéines sériques,• permettre la constitution d’un réseau de fibrine (par transformation du fibrinogène) : ce réseau de fibrine réalise un maillage qui limite l’extension des lésions et guide les cellules inflammatoires.

La leucodiapédèse ou migration des leucocytes hors du réseau vasculaire concerne essentiellement à cette phase les polynucléaires neutrophiles ; ce sont des microphages : capables d’une certaine phagocy-tose, c’est à dire d’englober et de digérer certains corps étrangers et bactéries ; ils seront ensuite évacués avec l’exsudat fibrineux ou phagocytés par les macrophages ; ils sécrètent également des facteurs chimiotactiques pour les histiocytes/macrophages et les lymphocytes.

La prise en charge des cicatrices - 12 -

PHASE INFLAMMATOIRE GRANULOMATEUSE

Rapidement les facteurs chimiotactiques at-tirent d’autres éléments inflammatoires pour aboutir à la formation d’un granulome inflammatoire composé à ce stade de monocytes/macrophages, lymphocytes et de plasmocytes (et de polynucléaires résiduels).

L’ensemble de ces cellules vont coopérer pour assurer la détersion maximale indispensable pour le rétablissement de la continuité. Cette détersion est assurée par les monocytes circulants attirés sur la zone du foyer lésionnel. Ils sortent du réseau vasculaire et se transforment en macrophages dont la fonction essentielle est la phagocytose. Les macro-

phages ont également un rôle pivot par leur sécrétion de multiples cytokines.

La qualité de cette détersion est fondamentale pour le reste de l’évolution du processus de cicatrisation.

PHASE DE BOURGEON CHARNU

Parallèlement à la détersion, à partir des 2e - 4e jours, se met progressivement en place un tissu transitoire qui va combler la perte de substance résultant de l’agression et de la détersion. C’est le «  tissu de bourgeon charnu  » ou « tissu de granulation »

Il est constitué :

• DE NÉO VAISSEAUX : à partir des vaisseaux périphériques au foyer lésionnel il va se dérouler une multiplication puis une migration de cellules endo-théliales tout d’abord sous forme de cordons pleins qui se creusent et ensuite de lumière vasculaire aboutissant à la reconstitution de nouveaux vais-

seaux. Ces vaisseaux immatures « pénètrent » dans le foyer détergé (avec les fibroblastes/myofibroblastes) s’anastomosent en un réseau anarchique, indifférencié, richement maillé,

• DE FIBROBLASTES - MYOFIBROBLASTES synthétisant du collagène et les autres éléments de la matrice extra cellulaire qui accompagnent les néovaisseaux et élaborent une nouvelle matrice conjonctive provisoire; celle-ci est tout d’abord grêle, fragile, riche en fibronectine et en acide hyaluronique; elle réalise un échafau-dage permettant la migration d’autres fibroblastes et des néo vaisseaux,

• D’ÉLÉMENTS DU GRANULOME INFLAMMATOIRE qui continuent de migrer vers le lieu de la détersion et sécrètent des cytokines.

La prise en charge des cicatrices - 13 -

CICATRISATION PROPREMENT DITE

Une fois le foyer lésionnel détergé, l’agent agresseur éliminé (bactéries), la perte de substance éventuelle comblée, le processus de cicatrisation continue par :

• le remodelage du bourgeon charnu,• la ré-épithélialisation,• la ré-orientation du néo tissu formé.

Le remodelage du bourgeon charnu résulte de complexes interactions entre cellules, matrice extra-cellulaire et cytokines:

• La contraction (myofibroblastes) 2e et 3e semaines ; est liée aux possibilités contractiles des myofibroblastes (filaments d’actine intracytoplasmiques), leur adhérence par les récepteurs des intégrines aux fibres de colla-gène et au rythme de synthèse de ces dernières.

• La raréfaction et hiérarchisation des vaisseaux  : le réseau touffu et indifférencié s’organise avec arrêt de l’angiogenèse, disparition de nombreux néo capillaires (par apoptose) formation de meta artérioles et de veinules post capillaires et reconstitution d’un réseau proche de la vascularisation antérieureDiminution des fibroblastes : au fur et à mesure que le réseau de fibres de collagène devient plus dense et que les besoins de synthèse diminuent.

• La trame collagénique devient plus dense grâce à un équilibre entre synthèse et catabolisme du collagène et de la matrice non fibrillaire.

Au final, la cicatrisation est le résultat d’un ensemble de phénomènes d’intensité variable selon :• l’importance et le type de l’agression, • l’importance des dégâts tissulaires qui s’articulent, de façon plus ou moins harmonieuse, afin de restituer l’intégrité tissulaire initiale.

Il existe en outre des facteurs individuels, certains inconnus et imprévisibles, qui interviennent dans le déroulement de ces phénomènes.

La prise en charge des cicatrices - 14 -

DÉBUT/PLAIE DURÉE ETAPE EVENEMENTS

Quelques minutes 1 à 3 jours Phase vasculaire (hémostase)et inflammatoire

- Arrêt du saignement : coagulation, adhésion et agrégation plaquettaire

- Sécretion et activation des médiateurs

- Migration et activation des cellules inflammatoires (neutrophiles, macrophages)

- Détersion

- Recrutement des fibroblastes et des cellules

endothéliales

Quelques heuresà quelques jours

1 à 3 semainesPhase de réparation tissulaire

- Granulation

- Epidermisation

- Formation du tissus de granulation  : prolifération des fibroblastes, des cellules endothéliales  ; synthèse d’une nouvelle matrice extracellulaire ; angiogenèse

- Epidermisation  : transformation des fibroblastes en myofibroblastes  ; migration des cellules épithéliales (kératinocytes) à partir des berges  ; restauration de la jonction dermo-épidermique  ; restauration de la fonction barrière des kératinocytes

1 à 2 semaines Quelques moisà quelques années Phase de maturation

- Remodelage

- Néovascularisation

- Réorganisation de la matrice extra-cellulaire

- Modification du collagène

- Apoptose des myofibroblastes

- Néovascularisation

Les étapes de la cicatrisation (7)

La prise en charge des cicatrices - 15 -

2.4 CICATRISATION PATHOLOGIQUE (8)

Les cicatrices pathologiques peuvent être un retard du processus (plaies chroniques), une altération (cicatrices rétractiles) ou un excès de celui-ci (chéloïdes, botryomicome).

Plusieurs types de cicatrices anormales sont répertoriés dans les recommandations cliniques internationales de 2002. (9)

CICATRICE MATURE

Cicatrice plate, de couleur claire.

CICATRICE IMMATURE

Cicatrice rouge, parfois prurigineuse ou douloureuse, légèrement surélevée, en phase  de modelage. Nombre de ces cicatrices vont normalement devenir matures et plates avec le temps et prendre une pigmen-tation comparable à celle de la peau avoisinante, bien qu’elles puissent être soit plus pâles soit légèrement plus foncées.

CICATRICE HYPERTROPHIQUE LINÉAIRE (CHIRURGICALE/TRAUMATIQUE)

Cicatrice rouge, surélevée parfois prurigineuse, confinée à la limite de l’incision chirurgicale d’origine.

Ce type de cicatrice se développe habituellement dans les semaines qui suivent l’intervention chirur-gicale. La taille de ces cicatrices peut augmenter rapidement pendant trois à six mois, puis, après une phase stationnaire, commencer à régresser. Ces cicatrices évoluent généralement en prenant un aspect surélevé, ressemblant un peu à un cordon, de largeur augmentée, variable. Le processus complet de maturation peut prendre jusqu’à deux ans.

CICATRICE HYPERTROPHIQUE ÉTENDUE (BRÛLURE)

Cicatrice rouge, surélevée, parfois prurigineuse, qui demeure dans les limites de la brûlure.

CHÉLOÎDE

Cicatrice volumineuse, localement surélevée, parfois douloureuse ou prurigineuse, s’étendant au-dessus d’un tissu normal. Les chéloïdes peuvent se développer jusqu’à un an après la lésion et elles ne régressent pas spontanément. L’excision chirurgicale simple est souvent suivie de récidive. Une anomalie génétique peut être à l’origine de la cicatrisation sous forme de chéloïdes.

La prise en charge des cicatrices - 16 -

En pratique courante, on pourra retenir (10) :

• LES HYPERTROPHIQUES posant essentiellement un problème esthétique puisqu’elles guérissent en principe spontanément en 6 à 18 mois. Elles ont pour caractéristiques le volume, la couleur souvent rouge, la consistance plutôt molle des bords restant parallèles.

• LES CHÉLOÏDES, terreur du thérapeute et heureusement très rares à la main, posent un double problème ;- d’abord esthétique par leur aspect envahissant. Les chéloïdes ont en effet pour particularité de déborder largement des limites initiales de la lésion et présentent un aspect en « pinces de crabe », - ensuite fonctionnel si elles se retrouvent au carrefour d’une articualtion ou pli de flexion.

Les chéloïdes sont histologiquement très hétérogènes, difficiles à distinguer des hypertrophiques mais, le plus souvent, présentent une prolifération conjonctive dans le derme moyen. C’est une lésion en expansion. Leur localisation est préférentiellement le visage, le cou, les oreilles, les épaules et le thorax, les zones où la peau est épaisse. On peut les considérer comme des maladies chroniques.

• LES ADHÉRENTES ET RÉTRACTILES ; les cicatrices hypertrophiques et rétractiles peuvent se compliquer d’adhérences ou rétractions. Adhérences et rétractions peuvent aussi se voir en lésions essentielles.

- Les cicatrices adhérentes limitent le glissement des différents tissus dans tous les plans de l’espace. Elles correspondent à un processus de cicatrisation profond qui colle les éléments au voisinage des plans de glissement, os, graisses, aponévroses, tissu conjonctif, gaines, tendons, nerfs et peau.

- Les cicatrices rétractiles sont aussi des adhérentes mais se rétractent en brides sous la stimulation de tractions répétées. On les retrouvera dans les zones de forte mobilité, articulations, commis-sures et plis de flexion. Elles se rétractent et évoluent vers la formation de brides. Celles-ci peuvent être souples ou prendre un caractère rétractile.

- Les cicatrices de brûlures  : lésions le plus souvent de grande surface laissant au final une peau sèche, fragile, fine, raide, hypo-ou hypersensible, hyper ou hypo-colorée. Les rétractions sont ici la règle. Nous retrouvons dans ces lésions la notion de CCM (capacité cutanée maximale).Ce risque rétractile est ici stéréotypé selon le schéma de rétraction préférentielle de Langer pour les brûlures.

Schéma de rétractation préférentielle de Langer pour les brûlures

La prise en charge des cicatrices - 17 -

2.5 FACTEURS INFLUENÇANT LA CICATRISATION (7) ( 11)

FACTEURS LOCAUX

- L’ORIENTATION DE LA PLAIE influe sur son évolution cicatricielle. Il existe des lignes cutanées de tension liées à l’orientation des faisceaux de collagène, appelées lignes de Langer. Si la tension est faible, c’est-à-dire que la plaie est orientée parallèlement aux fibres de collagène, la cicatrisation sera plus facile et donnera un meilleur résultat esthétique. Une incision pratiquée transversalement dans les rangées de fibres aura ten-dance à laisser une cicatrice large et épaisse.

- LES BERGES DE LA PLAIE doivent être franches et les points de suture réduits au strict minimum pour une bonne cicatrisation.

- LE SIÈGE DE LA PLAIE est également important. Certaines zones (épaules, thorax) présentent souvent une cicatrisation anormale. La cicatrisation est meilleure sur peau fine. Les tissus soumis à des tensions et détentes peuvent développer une mauvaise cicatrisation.

- LA PRÉSENCE DE CORPS ÉTRANGERS

FACTEURS GÉNÉRAUX

- L’ORIGINE ETHNIQUE ET LA COULEUR DE LA PEAU influence l’évolution de la cicatrisation. Les popula-tions noires ou asiatiques présentent une très forte prédisposition aux cheloïdes.

- L’ÂGE intervient également. Avant 18 mois, il ne se forme pas de cicatrices chéloîdes, même chez les nour-rissons de peau noire. Cette tendance s’inverse complètement entre 18 mois et la puberté. La cicatrisation se fait sans problème chez les personnes âgées.

- LE TABAC qui provoque une hypo-vascularisation au niveau de la plaie par différents mécanismes :- il favorise les artériopathies athéromateuses ou inflammatoires,- il favorise la carboxyhémoglobinémie qui limite les capacités de transport d’oxygène de l’hémoglobine.

- LA MALNUTRITION ralentit le processus de cicatrisation, ainsi que certaines carences spécifique comme la déficience en zinc, fer, vitamine C, A.

- LE DIABÈTE augmente le risque d’infection des plaies ; il est en outre souvent associé à une pathologie mi-crovasculaire qui réduit la perfusion et l’oxigénation des tissus.

- LES MÉDICAMENTS : immunosuppresseurs, chimiothérapies et anti-inflammatoires

- Les glucocorticoïdes altèrent toutes les étapes de la cicatrisation : l’inflammation bien évidemment, mais également les proliférations cellulaires , la synthèse de collagène, la formation et la contraction du tissu de granulation, l’épithélialisation. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens altèrent le processus inflammatoire en inhibant les synthèses de prostaglandines.

- Les cytostatiques utilisés dans le cadre de chimiothérapies inhibent les proliférations cellulaires dans les tissus à renouvellement rapide, et donc dans les plaies en cours de cicatrisation.

- Les immunosuppresseurs altèrent également la cicatrisation en favorisant les infections et en inhibant les proliférations et différenciations cellulaires.

La prise en charge des cicatrices - 18 -

BILAN DE LA CICATRICE3.

Pour toute prise en charge de cicatrice, l’évaluation sera un point important à ne pas négliger. Comme énoncé précédemment, l’évolution d’une cicatrice peut parfois être longue et compliquée. Un bilan complet et une prise en charge précoce permettent d’éviter ou de minimiser les préjudices fonctionnels et/ou esthé-tiques.

Pour cela, nous disposons des outils d’évaluation suivants (10) (12) :

• l’interrogatoire et la palpation,• la mesure physique des dimensions (toute cicatrice débordant des limites initiales de la lésion est susceptible d’être chéloïdienne),• les tests de décollement,• le test à la vitropression mesurant le niveau inflammatoire de la lésion,• le test ou échelle de Vancouver, référence internationale,• le bilan articulaire,• le test de prurit,• la photographie,• l’avis du patient, autoévaluation du préjudice par EVA,• le POSAS.

3.1 L’INTERROGATOIRE

« On considère qu’une cicatrice n’est fixée qu’au bout de 18 mois à 2 ans. La première démarche lors de l’examen d’une cicatrice sera donc de se faire préciser son ancienneté »

L’interrogatoire devra également préciser :

• l’âge du patient, sachant que la période puberté-30 ans serait le plus à risque,• les antécédents cicatriciels personnels, familiaux ou ethniques,• la localisation anatomique,• le type du traumatisme initial : l’historique de la plaie,• la consommation de tabac,• l’existence d’un diabète.

3.2 L’ASPECT ET LA CONSISTANCE TISSULAIRE

Les cicatrices chéloïdes et hypertrophiques ont un diagnostic différentiel difficile car elles ont de nombreux points communs : leur histologie commune dans les premiers mois d’évolution montre un excès de fibres collagènes et un aspect de masse en relief plus ou moins coloré.

Certains détails divergent cependant :

• les chéloïdes sont de consistance ferme ou dure, les hypertrophiques étant plutôt souples, les chéloïdes présentent un aspect caractéristique en « pinces de crabe », expansions pseudo-podiques dé-passant largement les limites de la lésion initiale, les hypertrophiques restant confinées au site primitif, leurs bords restant parallèles,

La prise en charge des cicatrices - 19 -

3.3 LES DIMENSIONS DE LA LÉSION

3.4 TESTS D’ÉTIREMENT ET DE PLISSEMENT CUTANÉ

Elles pourront facilement être mesurées au centimètre ou au pied à coulisse :

• longueur,• largeur,• épaisseur ou profondeur.

Si au cours d’évaluations ultérieures, il y a une augmentation des mesures au-delà des limites de la cicatrice, on pourra penser à une évolution vers une cicatrice cheloïde.

Ces deux tests apprécient le niveau d’adhérence de la lésion aux plans profonds et seront utiles dans le cas des cicatrices « collées ». Ils vont être importants pour mesurer le degré de séquelles possibles au niveau fonctionnel.

• Test d’étirement : un point précis de la peau sert de repère pendant que l’index et le pouce de la main op-posée vont effectuer une traction horizontale de la peau pour mesurer l’allongement de celle-ci avec une règle ou un « adheremeter » (annexe 1). Cela va permettre de mesurer l’adhérence de la cicatrice sur le plan superficiel.

• Test de décollement cutané : il consiste à soulever la peau entre le pouce et l’index afin d’évaluer la souplesse cutanée grâce à une cotation allant de 1 à 5. Ce test mesure l’adhérence de la cicatrice sur les plans profonds.

- 1 : possibilité d’effectuer un pli roulé,- 2 : peau souple mais début de tension,- 3 : peaux solides, peu extensibles, résistant à la tension manuelle,- 4 : brides avec blanchiment de la peau à l’étirement,- 5 : impossibilité de décoller la peau.

• les rétractiles sont orientées dans une direction parallèle aux lignes de tension maximale.  C’est ce qui les rend dangereuses puisqu’elles brident progressivement le mouvement. Elles sont de consistance ferme, en tension,• les adhérentes collent aux plans profonds et sont souvent en dépression. On peut observer un déplacement de la peau lors d’un glissement tendineux limité par le collage.

3.5 TEST DE VITROPRESSION OU TEST DE RECOLORATION CUTANÉE

Ce test s’effectue à l’aide d’une lame ou d’une lentille transparente, couplée à un chronomètre.

Il mesure le temps de recoloration cicatriciel après une pression verticale maintenue. Un temps de recoloration court,  inférieur à 3 secondes, signera une activité inflammatoire de la cicatrice. Plus ce temps de recoloration est court, plus intense est l’activité inflammatoire. À partir et au-dessus de 3 secondes, le test est considéré comme normal. Un temps de recoloration atteignant 2 secondes autorisera le massage de la lésion.

La prise en charge des cicatrices - 20 -

3.6 TEST DE PRURIT

3.7 L’ÉCHELLE DE VANCOUVER

3.8 LE BILAN ARTICULAIRE

Il va évaluer la gêne occasionnée par les démangeaisons (dues à une trop grande libération d’his-tamine dans la zone lésée). Cette gêne est côtée sur une échelle de 0 (aucun) à 3 (insupportable). Un prurit cicatriciel accompagne souvent la chéloïde.

Un test de prurit positif témoigne d’une intense activité de la cicatrice.

C’est LA RÉFÉRENCE INTERNATIONALE en matière d’évaluation d’une cicatrice.

Ce test intègre :

• L’INFLAMMATION par appréciation de la pigmentation cutanée, cotée de 0 (normal) à 2 (hyperpigmenta-tion), mais paraît moins précisément évaluée  que par le test à la vitropression,• LA COULEUR, cotée de 0 (normal) à 3 (pourpre),• L’ÉPAISSEUR DU PLI, coté de 0 (<2 mm) à 3 (> 5 mm),• L’EXTENSIBILITÉ DE LA PEAU, allant de 0 (normale) à 5 (rétraction permanente).

Il permet de chiffrer en degrés la limitation de liberté d’un segment articulaire bridé par une cicatrice. Attention à faire la part entre la limitation articulaire dévolue aux plans cutané et sous-cutané et la limitation due aux adhérences des plans profonds intra- ou extra-articulaires. Il doit toujours être bilatéral et comparatif.

3.9 LE BILAN PHOTOGRAPHIQUE

S’il est impensable de photographier systématiquement toutes les cicatrices, il semblerait judicieux de photographier précocement les lésions à risque évolutif pour en assurer le suivi et objectiver l’apport thérapeutique.

Attention : pour que le comparatif soit exploitable, il faut veiller aux conditions de prise de vue (éclairage, distance, programme).

3.10 L’AVIS DU PATIENT

La peau est la mémoire de nos émotions. Les raisons de cette interaction entre le cerveau et la peau sont simples : ils ont tous les deux la même origine embryologique. L’ avis du patient, bien que subjectif et porteur d’une charge émotionnelle forte, doit être pris en compte. Ceci dans le contexte délicat que peut être l’appréciation esthétique ou fonctionnelle d’une lésion souvent ressentie comme un traumatisme, voire une agression. Ce ressenti pourra être évalué par une échelle EVA cotée de 0 à 10, tracée par le patient lui-même.

La prise en charge des cicatrices - 21 -

3.11 LE POSAS (12)

Il existe également un outils d’évaluation intéressant ; le POSAS (The Patient and Observer Scar As-sessment Scale). C’est une échelle subjective développée par Draaijers et Al (2004). Le patient et un observa-teur doivent évaluer la cicatrice. Cette échelle ne peut pas être utilisée chez l’enfant en bas âge. Le patient doit remplir 7 items et l’observateur externe 6.

La grille d’évaluation du patient contient les items suivants :

• la douleur, • les démangeaisons, • la coloration, • la souplesse, • l’épaisseur, • les irrégularités,• une comparaison par rapport à la peau saine.

Celle de l’observateur en contient d’autres :

• la vascularisation, • la pigmentation,• l’épaisseur, • le relief,• la souplesse,• l’étendue.

Pour chaque item il y a une cotation de 1 à 10. Plus le score final est élevé, plus la cicatrice ressemble à une cicatrice « pauvre ». Plus le score est faible, plus la cicatrice est proche d’une peau saine (annexe 2).Tout l’intérêt d’un bon examen initial sera de pouvoir, à son aspect, pressentir le potentiel évolutif d’une cica-trice et ne pas perdre de temps.

Parmi ces tests, certains paraissent particulièrement importants ;

• le test à la vitropression, précieuse indication du niveau inflammatoire cicatriciel qui peut être réalisé rapidement avant chaque séance,• l’interrogatoire du patient ainsi que l’étude de l’aspect de la cicatrice qui vont « profiler » la lésion et indiquer son avenir évolutif probable,• les mesures physiques, simples à réaliser,• le test de Vancouver et le POSAS internationalement reconnus,.

Ces tests synthétisés dans une fiche-bilan (annexe 3) permettent d’assurer le suivi du patient et l’évo-lution de la cicatrice.

3.12 PATHOLOGIES ASSOCIÉES (10)

Ici, on retrouve essentiellement le névrome. Il peut développer une désafférentation cérébrale et une hypersensibilité telle dans le territoire concerné qu’il peut conduire à une exclusion de tout ou partie de la main.

La prise en charge des cicatrices - 22 -

Toute chirurgie ou plaie accidentelle de la main peut provoquer une lésion nerveuse d’un tronc plus ou moins important. Cette hyperesthésie s’accompagne d’hypoesthésie qu’il faudra rechercher, cartographier et évaluer.

Le bilan de l’hypoesthésie comporte quatre étapes :

• l’esthésiographie,• le test de discrimination aux deux points statiques,• les signes de fourmillements,• les qualificatifs du QDSA (Questionnaire Douleur de Saint Antoine).

Deux autres mesures peuvent s’y ajouter :

• le seuil de perception à la pression,• le seuil de perception des vibrations.

Une section nerveuse s’accompagne initialement d’une perte d’axoplasme, de myéline et d’une ré-tractation axonale. La régénération des fibres nerveuses, sous l’influence de divers facteurs neurochimiques, se fait de façon non rectiligne. Elle conduit à une formation bulbaire enchâssée dans la cicatrice ou les tissus mous avoisinants. C’est le névrome, qui est le mode de cicatrisation normal de l’extrémité proximale d’un nerf sectionné.

3.13 EVOLUTION

Dans les premiers mois de cicatrisation, il est normal de trouver une hypertrophie cicatricielle : elle correspond à la phase inflammatoire du tissu cicatriciel vu précédemment. Cette inflammation va progressi-vement diminuer et l’aspect définitif de la cicatrice s’observera entre 9 et 12 mois.

La phase inflammatoire peut parfois perdurer de 4 à 6 mois puis régresser progressivement pendant 18 à 24 mois dans le cas de cicatrices hypertrophiques.

Les chéloïdes ne régressent pas spontanément. Leur évolution est généralement plus longue que celle des hypertrophiques et prend le plus souvent un caractère chronique, résistant ou récidivant à tout trai-tement.

Evolution de la cicatrisation (13)

2 mois

Volu

me

de la

cic

atri

ce

6 mois 12 mois

cicatrisationchéloïdienne

cicatrisationhypertrophiquecicatrisation

normale

La prise en charge des cicatrices - 23 -

MOYENS THÉRAPEUTIQUES4.

La stratégie non-invasive la plus répandue dans le traitement et la prévention des cicatrices est la combinaison du traitement occlusif avec un traitement compressif. (seuls moyens non-invasifs reconnus dans les recommandations cliniques internationales de 2002).

Ensuite, les méthodes de traitement non-invasives pour lesquelles le fondement scientifique n’a pas été franchement démontré sont: techniques manuelles (drainage, massage), massage instrumental aspiratif, physiothérapie, utilisation de crèmes ou de lotions, douches filiformes, microneedling.

4.1 TRAITEMENT COMPRESSIF

L’utilisation de pression locale sur les cicatrices n’est certainement pas nouvelle et est appliquée comme forme de thérapie depuis plus de 30 ans. Ce n’est qu’à la fin des années soixante que, pour la première fois, Silverstein, de l’hôpital militaire de San Antonio (USA), a décrit l’effet positif du bas de soutien vasculaire sur une cicatrice suite à une brûlure grave.Ce sont surtout Linares et ses collaborateurs du centre pour brûlés Shriners à Galveston (USA) qui, au début des années soixante-dix, grâce à toute une série de publications (14), popularisèrent le recours à la pression et aux vêtements compressifs pour prévenir les cicatrices dues à des brûlures.

Par un procédé mécanique, la pression entraîne une réduction des fibroblastes vraissemblablement induite par une hypoxie tissulaire. La pression semble également diminuer les alpha-macroglobulines qui inhibent normalement la dégradation du collagène par la collagénase.

Un autre mécanisme éventuel repose sur la diminution de l’hydratation de la cicatrice, entraînant une stabilisation des mastocytes et une réduction du développement des vaisseaux néoformés et de la produc-tion de matrice extracellulaire. (15)

APPLICATIONS

Une pression continue peut s’exercer avec des bandages élastiques (Coheband® ou Peha Haft®), des gants en tissu élastique (Raucopress® ou tissu lycra) sur mesure ou des pansements élastiques en forme de tube (Tubigrip®)

La valeur maximale de la pression exercée reste une matière controversée. En théorie, il fau-drait une pression supérieure à 25 mm Hg pour dépasser la pression capillaire. Plusieurs auteurs (16) (17) ont cependant postulé qu’une pression d’au moins 15 mm Hg est nécessaire, surtout lorsque l’on veut favoriser l’accélération de la maturation de la cicatrice. Ces mêmes auteurs affirment également qu’il faut adopter le principe selon lequel « plus la pression est élevée, meilleure est la maturation de la cicatrisation ». Toutefois, il faut tenir compte ici de la possibilité d’appliquer ces recommandations. Des pressions continues supérieures à 40 mm Hg, par contre, augmentent les risques de complications telles que les paresthésies et la macération.

La prise en charge des cicatrices - 24 -

Le traitement occlusif repose sur l’utilisation de gels ou de films de silicone, ainsi que sur l’utilisation de film de polyuréthane.

A l’origine, les pansements-gel étaient exclusivement utilisés dans le traitement des cicatrices de brû-lures hypertrophiques mais, dès le début des années quatre-vingt dix, ils furent également utilisés progressi-vement comme auxiliaires préventifs et la méthode fut élargie au domaine de la dermatologie.

Quant au mécanisme d’action de cette forme de thérapie, différentes possibilités ont été citées. (18) Le mécanisme le plus souvent évoqué est celui de l’hydratation de la peau et plus particulièrement du stratum corneum (couche cornée). Cette hydratation diminuerait à son tour l’activité capillaire avec une pro-duction réduite de collagène dans la cicatrice et, donc, moins de risques d’hypertrophie. La pénétration des particules de silicone dans la cicatrice avec influence locale sur la structure n’a pas été dé-montrée in vivo. In vitro, par contre, elle l’a été.

Des études récentes démontrent également que la présence des silicones dans un pansement occlusif n’est pas en soi indispensable pour obtenir les mêmes résultats cliniques.

Il a été avancé que l’électricité statique générée sous le film de silicone pouvait constituer la raison des effets antichéloïdiens. Cependant, les conditions d’humidité élevée produite sous les films occlusifs sont peu propices à la création de charges d’électricité statique. (15)

L’occlusion pourrait réduire les concentrations de cytokines pro-inflammatoires/profibrotiques. L’augmentation de la température, même de 1°C, provoquée par l’occlusion, peut entraîner des différences significatives dans les propriétés cinétiques de la collagènase. Par conséquent, l’occlusion et l’hydratation peuvent toutes les deux altérer le remodelage des cicatrices. (15)

Le terme « silicones » désigne des polymères basés sur un élément siliconé. Ces polymères peuvent prendre des formes physiques différentes :

• liquides à viscosité diverse, • gels ou même polymères solides plus durs que le plastique.

On ne trouve pas l’élément silicone en tant que tel dans la nature; il apparaît très souvent lié à l’oxygène (par exemple : dans le sable et des minéraux). Il s’agit du second élément le plus répandu sur la terre (28 %) après l’oxygène (47 %).

L’application de silicone entraîne une amélioration de la rougeur de la cicatrice, une plus grande élas-ticité de la peau et une diminution des plaintes subjectives, telles que démangeaisons et douleurs. (9)

4.2 TRAITEMENT OCCLUSIF

La prise en charge des cicatrices - 25 -

SPÉCIALITÉS COMPOSITION EFFETS RECOMMANDATIONS

Cerederm® (laboratoire Cereplas) Plaque de gel de sili-cone

Pansement auto-adhésif qui :• améliore l’apparence des cicatrices hypertrophiques et chéloïdes,• assouplit et atténue les cica-trices récentes ou anciennes,• est lavable, réutilisable et facile à découper.

Le pansement doit être porté 24 h sur 24.Il doit être changé tous les trois jours.La durée du traitement est comprise entredeux et six mois.

Medigel Z® et Medipatch Gel Z® (laboratoire medical Z) Existe sous forme de tube (Digi-tub) bien adapté aux cicatrice des doigts.

Cica-care® (laboratoire Smith et Nephew)2 modèles rectangulaires

Dermatix® (laboratoire Meda Phar-ma)Plaque ou gel de silicone

Elastoplast® réducteur de cicatrices (laboratoire Eucerin)

Film de polyuréthane • Améliore l’apparence des ci-catrices anciennes ou récentes de type hypertrophiques, ché-loïdes, colorées.

Le pansement doit être appliqué 12 h mini-mum,le jour ou la nuit.Il doit être remplacé tous les jours.On observe des résultats au bout de 8 semainesde traitement.

Tableau des principaux pansements occlusifs disponibles en France

DRAINAGE LYMPHATIQUE MANUEL (10)

Il a une action essentiellement circulatoire accélérant la cicatrisation, aide à limiter la phase inflam-matoire et améliore les échanges dans la zone cicatricielle. Il peut débuter dès le lendemain de la chirurgie, à distance ou au plus près de la lésion. Son action précoce va permettre de décongestionner la région, et si l’état de la main l’autorise, de permettre une mobilisation tissulaire ou articulaire immédiate. La douceur de la technique va également permettre de dédramatiser la suite de la kinésithérapie, établissant un climat de confiance favorable.

MASSAGE

Le massage vise à assouplir la cicatrice, améliorer l’élasticité et rendre leur liberté aux tissus en les désolidarisant et rétablissant les plans de glissement au plus proche de la physiologie. Il améliore aussi la vascularisation tissulaire et diminue le prurit. Le massage amène cependant une composante psychologique bénéfique grâce au toucher. (21)

Au premier abord, le patient pour qui une prescription de mobilisation précoce est souhaitée, va se présenter avec une plaie non encore bien nettoyée, avec des croûtes, et le plus souvent des points encore présents. Par leur rigidité, les croûtes sont une gêne à la mobilisation. Pour les faire tomber rapidement et sans risque, il faut conseiller au patient, en pansement nocturne, une crème grasse type vaseline ou calendula qui les imprégnera,favorisera la cicatrisation par le fond de la plaie et les fera tomber plus vite lors du lavage des mains. (10)

4.3 TECHNIQUES MANUELLES

Utilisation à titre préventif sitôt après la fermeture de la plaie (soir vers le 8e/ 10e jour), ou dès l’apparition des premiers signes d’hypertrophie cicatricielle. Contre-indication : plaies suintantes ou infectées, allergies (rare).

La prise en charge des cicatrices - 26 -

Contre-indications du massage manuel : infection de la plaie, chéloïde.

Attention de ne pas être trop agressif dans le massage car cela peut endommager la peau fragile et créer des ampoules.

Les techniques décrites ici sont proposées par Marchi‐Lipski et Duviau. (22)

- VIBRATIONS

Action : visée sédative et circulatoire.Modalités :

. succession de pressions relâchements avec la main toujours en contact avec les téguments,

. en pointée (pulpaire) ou plane (palmaire),

. les vibrations peuvent être effectuées de manière mécanique (rapide, régulière).

- PRESSION

Action : défibrosante.Modalités :

. d’intensité variable mais toujours progressive et légère,

. avec la pulpe ou la phalange,

. on peut ajouter des frictions au niveau des adhérences tissulaires. Mobilisation d’un bloc pour assouplissement de surfaces larges et désolidarisation par rapport aux plans profonds.

- ETIREMENT ORTHODERMIQUE « RENÉ MORICE »

Action : lutte contre la rétraction des fibres de collagènes.Modalités :

. on pose la pulpe des doigts, en faisant une pression soutenue puis on fait un étirement des téguments. Les pressions réalisées sont symétriques. A réserver aux cicatrices de plus de 21 jours. Attention au risque de désunion des berges.

- PÉTRISSAGES FRICTIONS

Action :. assouplir, modifier l’épaisseur des tissus, améliorer la fibrose et supprimer les adhérences,. antalgique en décomprimant les terminaisons nerveuses des cals vicieux.

Modalités :. premier temps : les pulpes des doigts se placent sur toute la partie traitée et le pouce écarté,. second temps : elles effectuent une légère pression vers le pouce opposant,. troisième temps : le praticien conserve le pli et fait bouger les pulpes vers le pouce opposant.

Massage longitudinal-transversal pour mobilisation des tissus dans un plan superficiel, assouplissement. Technique parallèle aux berges jusqu’à J30/J40.

- MASSAGE PLASTIQUE DE JACQUET LEROY

Action : défibroser, assouplir et décoller.Modalités :

. pincer, pétrir, malaxer les téguments avec une augmentation progressive de la durée et de la force du travail,. il existe une variante, le « pincer‐tourner » de rythme rapide avec une action sur le derme et l’épiderme.

Indiqué sur les cicatrices atones mais contre-indiqué sur les cicatrices inflammatoires à test vitropression inférieur à 2 secondes.

La prise en charge des cicatrices - 27 -

- LE PALPER‐ROULER

Action : lutter contre les adhérences et les fibroses.Modalités :

. le praticien crée un pli de peau avec un roulement progressif du plan superficiel sur le plan profond, dans le sens de la cicatrice pour commencer puis perpendiculairement.

Visant à décoller les adhérences profondes : pas avant J40 pour ne pas risquer de désunir ou distendre les berges de la cicatrice ; de 0,5 bar à 1 bar maximum après 1 an.

Si des programmes adaptés aux cicatrices inflammatoires existent, il conviendra d’être prudent si la vitropression indique un temps de recoloration cutané inférieur à 2 secondes. L’apparition de rougeur péri-cicatricielle devra signifier la fin de la séance. (10)

Une étude récente (23) a montré que l’utilisation d’un appareil de dépressomassage (PRUS) sur des cicatrices de brûlures a un effet positif sur la douleur, le prurit et la sensibilité cutanée.

Les orthèses sont généralement indiquées pour éviter une déformation provoquée par la rétraction cicatricielle ou pour maintenir en tension une cicatrice. Les matériaux thermoplastiques sont le plus fréquem-ment utilisés pour confectionner ces orthèses.

ORTHESES STATIQUES

Elles sont généralement utilisées dans les premières phases de formation de la cicatrice, modelées et appliquées après la mobilisation pour maintenir le gain d’allongement de la cicatrice réalisées pendant la session. Elles peuvent être gardées pendant une période prolongée pour conserver le gain d’amplitude.

ORTHESES DYNAMIQUES

Elles permettent d’appliquer une force à un segment ou de résister à un mouvement. Ce type d’attelle peut être utilisé pour continuer d’appliquer une tension douce sur la cicatrice

4.4 MASSAGE INSTRUMENTAL ASPIRATIF

4.5 LES ORTHÈSES (24)

Les massages, même réalisés selon les principes énoncés ci-dessus sont hyperhémiants, donc pro-inflammatoires au niveau cutané.

Il est donc important pour contrer ces effets nocifs de placer une compression après notre massage.

Dès que la cicatrice n’est plus inflammatoire (test à la vitropression négatif), il sera intéressant d’ap-prendre au patient à masser régulièrement sa cicatrice. Cette démarche lui permet de s’impliquer dans la prise en charge de son traitement. Il permet aussi d’aider le patient à moins appréhender le toucher de cette zone qu’il projette souvent comme douloureuse et à risque.

La prise en charge des cicatrices - 28 -

PAR ULTRASONS

Leur action défibrosante et assouplissante peut se localiser en superficie ou en profondeur par le choix de la fréquence. Superficiel par un faisceau court en 3 MHz, plus profond en 1 MHz. Il n’existe pas d’étude relatant les effets physiologiques des ultra-sons sur la cicatrice.

PAR THERAPIE VIBRATOIRE

La thérapie vibratoire par Vibralgic® ou vibradol® pour traiter le névrome, limité à 100 Hz. Au début du traitement, la stimulation est très faible, par exemple 250 Hz à 1 volt, mais comme l’accoutumance peut se faire très rapidement, l’intensité vibratoire doit constamment être adaptée aux variations du seuil de la dou-leur. Le résultat final est jugé excellent lorsque le patient peut supporter dès le début de chaque séance une stimulation de 120 Hz à l’amplitude maximale. (25)

4.7 LA PHYSIOTHÉRAPIE

A noter que l’on peut facilement ajouter une compression ou du silicone à l’intérieur d’une orthèse, ce qui permet d’augmenter notre effet sur la cicatrice.

Pour les cicatrices de brûlure, il existe des conformateurs palmaires qui permettent d’associer une posture en capacité cutanée maximale d’ouverture de la main avec

la compression de la face palmaire.

Cesser le port de l’orthèse si celle-ci provoque une douleur associée, un trouble sensitif ou une lésion de la peau.

L’exercice est essentiel pour contrecarrer la contraction associée à la cicatrice hypertrophique active. Les exercices dirigés sont aussi importants pour empêcher le déconditionnement, la limitation ou l’incapacité fonctionnelle. Il est important de prendre en considération l’emplacement, la taille de la cicatrice ou le stade de cicatrisation avant de mettre en place ces exercices. Le blanchiment de la cicatrice est une indication cli-nique raisonnable de la tension suffisante de la cicatrice. Il faut également tenir compte de la tolérance à la douleur du patient.

L’étirement d’une cicatrice devrait être réalisé avec un allongement lent et progressif du tissu et main-tenu quelques secondes. (24)

4.6 L’EXERCICE

ORTHESES EN SERIE

Ce sont des attelles essentiellement statiques qui sont remoulées dans une nouvelle position. Les attelles en série peuvent être utilisées si une cicatrice s’étire difficilement. Lorsque la capacité tissulaire maximale est obtenue, alors l’attelle est remoulée à la nouvelle position tendue. Cette procédure en série est suivie jusqu’à ce que l’amplitude complète de mouvement soit obtenue.

La prise en charge des cicatrices - 29 -

De nombreuses crèmes sont décrites dans la littérature et utilisées dans le traitement des cicatrices.Certaines de ces crèmes contiennent de la vitamine A (ou rétinol), d’autres crèmes testées contiennent de l’allantoïne, de l’oxyde de zinc ou de l’acide hyaluronique. (26) On peut également trouver des produits conte-nant certaines plantes cicatrisantes comme l’Aloe vera, l’hydrocotyle ou encore le calendula. (27)

Des huiles siliconées pures ou des crèmes-gels sont parfois utilisées comme topiques.

Certaines huiles essentielles sont réputées antiseptiques et cicatrisantes, parmi celles-ci on peut citer : H.E. de romarin, H.E. de lavande, H.E. d’hélichryse italienne et H.E. de niaouli. (28)

Les publications scientifiques qui étayent l’utilisation de ces produits sont rares et se limitent souvent au descriptif ou à l’anecdotique.

Le traitement des cicatrices par la crénothérapie a vu le jour en 1959 à Saint- Gervais. Difficiles à pratiquer en cabinet, les douches sont appliquées en centre de cure spécialisé (La Roche-Posay, Saint-Gervais) par cure de trois semaines.

Elles consistent à projeter sur les cicatrices l’eau thermale à forte pression (8 à 18 Kg/cm2), sous forme de jets parallèles et très fins (0,4 à 1 mm de diamètre). En variant la distance médecin-malade, la durée de l’impact et le mode de balayage, on réalise :

- soit un effleurement léger,- soit une percussion plus traumatisante avec rubéfaction intense,- soit si cela est nécessaire et supportable (lésions scléreuses, nodulaires ou fibreuses) une véritable dermabrasion.

Les indications sont les cicatrices inflammatoires, hypertrophiques et surtout prurigineuses comme les séquelles de brûlure. Deux cures par an sont prises en charge par la Sécurité Sociale. Après 3 à 5 cures le maximum du bénéfice thermal est obtenu.

4.8 CRÈMES, HUILES ET LOTIONS

4.9 DOUCHES FILIFORMES (29)

Aloe Vera Calendula Hydrocotyle

La prise en charge des cicatrices - 30 -

Crédits photos : Dermaroller®

Il s’agit d’un petit rouleau composé d’une centaine d’aiguilles en acier extrêmement fines de 0,1 à 1,5 mm de long qui à chaque passage sur la peau provoque de petites perforations de l’épiderme.

Notre peau à la faculté de se régénérer et réagit au traitement par micro-aiguilles de la façon suivante :

• fabrication de nouvelles fibres de collagène et d’élastine,• remplissage des cicatrices atrophiques et plus précisément des cicatrices d’acné, • revascularisation, • réduction des pores importants et normalisation de la production de sébum, • repigmentation, production de mélanine.

Les réussites de traitement par micro-aiguille des cicatrices hypertrophiées sont très encourageantes. Le but du traitement est de perforer à l’aide du roller le tissu cicatriciel et de faire exploser les agglomérats durcis de collagène afin de provoquer un relâchement de l’ensemble du tissu cicatriciel. Les micro-aiguilles ont montré une amélioration significative de la souplesse, de l’élasticité et de l’épaisseur de la peau sur des cicatrices de brûlures. (30) (31)

4.10 MICRONEEDLING

Utilisation :

A la fin de la phase inflammatoire, deux traitements par semaine pendant un à deux mois. Une vingtaine de passages dans toutes les directions et répeter jusqu’à angiogénèse.

La prise en charge des cicatrices - 31 -

EDUCATION THÉRAPEUTIQUE5.

En ayant connaissance des différents facteurs influençant la cicatrisation (chapitre 2.5), on peut aisément prodiguer certains conseils au patient pour améliorer celle-ci. Des mesures préventives pour tous les types de cicatrices sont recommandées comme :

• ÉVITER L’EXPOSITION DE LA CICATRICE À LA LUMIÈRE DU SOLEIL et utiliser des crèmes solaires avec un indice de protection maximal (>50). (32)• ARRÊTER LE TABAC.• AVOIR UNE ALIMENTATION ÉQUILIBRÉE.

L’alimentation a un grand rôle à jouer afin de permettre, voir d’accélérer la cicatrisation des tissus à réparer. Certains nutriments sont essentiels :

LES PROTÉINES ET CERTAINS ACIDES AMINÉS

Leur apport en quantités insuffisante retardent la cicatrisation (baisse des capacités de synthèse et de prolifération).

LES GLUCIDES

Ils sont indispensables à la cicatrisation comme source énergétique pour la réponse inflammatoire qu’engendre toute agression cellulaire.

CERTAINS LIPIDES

Un déficit d’apport en acides gras poly-insaturés perturbe la formation des membranes cellulaires, retarde la cicatrisation, altère la qualité de la peau.

LES VITAMINES

LA PROVITAMINE VITAMINE A OU BÊTA CAROTÈNE permet le renouvellement des cellules de la peau.

LA VITAMINE C intervient dans la synthèse du collagène. Un déficit diminue la production de celui-ci, augmente la fragilité capillaire et le risque infectieux.

LA VITAMINE E par ses propriétés anti-oxydantes intervient en maintenant l’intégrité des membranes cellulaires et permet de moduler la réponse immunitaire.

LA VITAMINE B contribue à l’hydratation de la peau et intervient dans la libération d’énergie depuis les glu-cides et le pontage chimique entre les fibrilles du collagène.

5.1 CICATRISATION ET NUTRITION (33)

La prise en charge des cicatrices - 32 -

LES OLIGO-ÉLÉMENTS

Ils sont impliqués dans de nombreux processus biologiques intervenant dans la cicatrisation :LE ZINC est un cofacteur de nombreux systèmes enzymatiques indispensables à la synthèse protéique et à la prolifération cellulaire, à l’expression génétique de facteurs de croissance et de récepteurs stéroïdiens.

LE CUIVRE, LE FER, LE MAGNÉSIUM ET LE MANGANÈSE interviennent comme cofacteurs enzymatiques dans la synthèse du collagène.

L’HYDRATATION

L’apport hydrique est très important pour le développement de la plaie. L’apport recommandé est d’au moins 2000-2500 ml d’eau par jour. (24)

La prise en charge des cicatrices - 33 -

SOINS DES PLAIES (34)6.

Dans la phase précoce de prise en charge, le patient aura certainement un pansement. Il est intéres-sant de travailler en équipe avec une infirmière pour pouvoir réaliser les soins de plaies après la séance.

Un pansement est un dispositif occlusif stérile permettant de recouvrir une plaie opératoire ou traumatique située sur la peau. Le pansement a plusieurs buts fondamentaux :

• protéger la plaie (contre une infection, une irritation),• permettre une meilleure cicatrisation en conservant l’humidité de la plaie,• faire cesser un saignement minime en comprimant les petits vaisseaux,• rapprocher les berges d’une plaie (pour raccourcir la durée de cicatrisation et limiter les séquelles esthétiques),• apporter un confort et diminuer la douleur de la plaie.

Un pansement est un acte para-médical qui doit être effectué dans des conditions normées. C’est un soin propre mais non stérile.

• Le pansement doit être propre : il doit être changé régulièrement.

• Le pansement doit être indolore.

• Le pansement doit être le plus petit possible : c’est la règle des 4P de Raymond Vilain : le pansement ne doit pas gêner la mobilité des articulations de voisinage ; la commissure entre chaque doigt et les articulations doivent être libres. « Ne pas aveugler les pulpes » pour garder une des fonctions fondamentales du doigt : toucher et sentir.

• Le pansement ne doit pas empêcher la mobilité de la main : celle-ci doit bouger et ne doit pas être immobilisée par une écharpe. Le patient doit lutter contre l’œdème en surélevant sa main au-dessus du plan du cœur, en fléchissant et en allongeant les doigts pour éviter la stase veineuse préjudiciable.

La prise en charge des cicatrices - 34 -

CONCLUSIONS7.

En pratique, pour la prise en charge des cicatrices, il faudra, après un bilan précis, établir un protocole thérapeutique.

• Principes (gold-standard) :

- application de SILICONE (patch, gel ou pate siliconée),- COMPRESSION (infection contre-indiquée).

• Dans l’immédiat : nous pouvons utiliser des techniques comme : - le drainage lymphatique local ou à distance pour limiter l’oedème,

- le massage doux (convergent si début d’adhérence sans désunion des berges cicatricielles, puis d’un bloc) avec des crèmes ou lotions hydratantes, la confection d’orthèse si rétraction tissulaire, bride ou placard cicatriciel, un programme d’exercices.

• Dès que le test de vitropression se révèle négatif : nous pouvons ajouter des techniques comme :

- le massage aspiratif (après J30 sans dépasser 0,3 hectopascal), - le traitement par micro-aiguilles,- les ultra-sons.

Il est important de faire un bilan régulier pour pouvoir adapter nos techniques.

La prise en charge des cicatrices - 35 -

Une équipe pluridisciplinaire de 24 experts européens a établi un consensus sur le traitement de trois types de cicatrices : les cicatrices linéaires, les cicatrices hypertrophiques et les chéloïdes. Ils ont développé de nouvelles directives de stratégie de traitement. (35 )(36)

Voici un tableau qui résume ces recommandations.

Je souhaiterais conclure par cette phrase du professeur Raymond Vilain : « La cicatrisation est l’histoire naturelle d’une plaie, d’une nécrose ou d’une brûlure aboutissant à une cicatrice séquellaire, plus ou moins visible. »

Au final, si une cicatrice ne disparaît jamais complètement, nous avons entre nos mains un panel de techniques pour atténuer les séquelles esthétiques, fonctionnelles et psychologiques.

TYPE DE CICATRICE AU DÉPART APRÈS 3 MOIS APRÈS 6 MOIS APRÈS 12 MOIS

CICATRICE LINÉAIRE (après chirurgie ou trauma)

• Eviter l’exposition au soleil.

• Traitement préven-tif :- hydratation,- taping,- silicone,- compression ?

• Toujours réévaluer la cicatrice après 6 semaines.

• Si maturation normale de la cicatrice : arrêt du traitement à 3 mois.

• Si début d’hypertro-phie : -continuer ou intensifier le traitement aussi long-temps que nécéssaire,- pressothérapie.

• Si maturation tardive de la cicatrice : continuer le silicone aussi longtemps que né-céssaire.

• Si hypertrophie :- continuer le traitement précédent,- envoyer chez le spécia-liste pour injection de corticostéroïdes,- chirurgie à étudier.

Diagnostique différentiel entre cicatrice hypertro-phique permanente ou pas.• Envoyer chez un chirur-gien spécialisé. • Continuer le traitement préventif (pressothérapie, silicone, ...)

TYPE DE CICATRICE AU DÉPART APRÈS 3 MOIS APRÈS 6 MOIS APRÈS 12 MOIS

CICATRICE HYPERTROPHIQUE ÉTENDUE (après guérison de plaie prolongée)

• Eviter l’exposition au soleil.

• Traitement préven-tif :- silicone + compres-sion,- hydratation, - autres thérapies.

• Toujours réévaluer la cicatrice après 6 semaines.

• Si maturation normale de la cicatrice  (rare) : arrêt du traitement à 3 mois.

• Hypertrophie débu-tante :- vêtement de compres-sion sur mesure,- envoyer chez le spé-cialiste pour injection de corticostéroïdes ou chirurgie si nécessaire.

• Sur l’hypertrophie  : continuer ou intensifier le traitement :- vêtement de compres-sion sur mesure + sili-cone,-envoyer chez le spé-cialiste pour injection de corticostéroïdes ou chirurgie si nécessaire.

Cicatrice hypertrophique permanente.• Envoyer chez un chirur-gien spécialisé. • Continuer le trai-tement préventif (pressothérapie,silicone, ...)

TYPE DE CICATRICE AU DÉPART 1 À 6 MOIS APRÈS 12 MOIS

CICATRICE CHÉLOÏDE • Eviter l’exposition au soleil.

• Chéloïde débutante : - silicone + compres-sion,- hydratation.

• Chéloïde évolutive :- silicone + compression,- envoyer chez le spécialiste pour injection de cor-ticostéroïdes.

• Si pas d’amélioration : - envoyer chez un chirur-gien spécialisé (excision cicatrice).

La prise en charge des cicatrices - 36 -

ANNEXES8.

ANNEXE 1: ADHERMETER

La prise en charge des cicatrices - 37 -

ANNEXE 2 : LE POSAS (THE PATIENT AND OBSERVER SCAR ASSESSMENT SCALE)

La prise en charge des cicatrices - 38 -

La prise en charge des cicatrices - 39 -

ANNEXE 3 : FICHE BILAN

La prise en charge des cicatrices - 40 -

BIBLIOGRAPHIE9.

1. LOWE, A.S. et J.Histologie humaine, Elsevier, 2006.

2. NETTER F.H. Atlas d’anatomie humaine, Masson, 2004.

3. PEYREFITTE, G.Biologie de la peau - cahiers d’esthétique cosmétique, SIMEP, 1993.

4. MESPLIE G.Peau et rééducation de la main, www.espacemain.com/peaudelamain.html, 2014.

5. KENNETH A.ArndtTraitement des cicatrices, Elsevier, 2007.6. VEROLA O.Aspects anatomo-pathologiques de la cicatrisation, www.cicatrisation.info, 2006.

7. MELISSOPOULOS A., LEVACHER C.,La peau, structure et physiologie, 2e édition, Lavoisier,2012.

8. SENET P.Physiologie de la cicatrisation cutanée, EMC Dermatologie, 98-040-A-10. , 2007.

9. MUSTOE T.A. et al, International Clinical Recommendations on Scar Management. Plastic and reconstructive surgery 2002, 1 10:560-571, 2002.

10. RUELLE P.Rééducation de la main et du poignet, Elsevier Masson, 2013.

11. HENRY M., THOMPSON J. Chirurgie clinique, technique et pratique, De boeck, 2001.

12. DRAAIJERS et alThe patient and observer scar assessment scale : a reliable and feasible tool for scar evaluation,Plast Reconstr Surg. 2004, 113:1960-1965, 2004.

13. ECHINARD C., LATARJET J.Les brûlures, Elsevier Masson, 2010.

14. LINARES et alHistorical notes on the use of pressure in treatment of hypertrophic scars and keloids, Burns, 19, 17-21, 1993.

15. KENNETH A.A,Traitement des cicatrices, Elsevier, 2007.

16. GIELE H.P. et al.Direct measurement of cutaneous pressures generated by pressure garments, Burns, 23 (2), 137-141, 1997.

17. VAN DEN KERCKHOVE E. et alAssessment of the influence of silicone and pressure on burn related scars, [PhD. Thesis 2003], Department of Kinesiology and Rehabilitation Sciences of the Catholic University of Leuven (Belgium), 2003.

18. VAN DEN KERCKHOVE E. et alSilicones in the Rehabilitation of Burns: a Review and Overview, Burns, 27, 205-214, 2001.

La prise en charge des cicatrices - 41 -

19. ROSENGREN H. et alDoes taping torso scars following dermatologic surgery improve scar appearance ?, Dermatol Pract Conc. 2013; 3(2):13.

20. ATKINSON J-A. et alA Randomized, Controlled Trial to Determine the Efficacy of Paper Tape in Preventing Hypertrophic Scar For-mation in Surgical Incisions that Traverse Langer’s Skin Tension Lines. Plastic And Reconstr. Surg., November 2005.

21. ROH YS. et alEffects of skin rehabilitation massage therapy on pruritus, skin status, and depression in burn survivors, Tae-han Kanho Hakoe Chi., 2007.

22. MARCHI‐LIPSKI et DUVIAUPossibilité de la kinésithérapie dans les cicatrices, Encycl Méd Chir , Elsevier, Kinésithérapie‐Médecine physique‐Réadaptation, 26‐275‐A‐10, 1998.

23. MEIRTE, J. et alThe effects of PRUS depressomassage on pain, pruritus and sensory perception in burn scars, Scar Club Congress, Montpellier, France, 22-24 March 2012, Abstract No. Clinical Trials 02, 2012.

24. SUSSMAN C., BATES-JENSEN B.Wound Care: A collaborative Practice Manual, Lippincott Williams & Wilkins., 2007.

25. DURAND P-A, ROMAIN M.Vibralgic, appareil de stimulation vibratoire transcutanée : intérêt, méthode et indications, www.electronic-conseil.com/docs/svt-indications.pdf, année ?

26. MARTINI MCIntroduction à la dermopharmacie et à la cosmétologie, 3e édition, Lavoisier, 2011.

27. CHAUMONT J-P., MILLET-CLERC J.Phyto-aromathérapie appliquée à la dermatologie, Lavoisier Tec et Doc, 2011.

28. ZAHALKA J-P.Les huiles essentielles, Dauphin, 2010.

29. SONNECK J.M.Crénothérapie et cicatrices, www.cicatrisation.info, 2005.

30. MOORTGAT P. et alMicroneedling on mature burn scars: a case series repport, Scar Club Congress., Montpellier, France, 22-24 March 2012, Abstract No. Clinical Trials 05, 2012.

31. DODDABALLAPUR S.Microneedling with Dermaroller, J Cutan Aesthet Surg. 2009 Jul-Dec; 2(2): 110–111, année ?

32. MIDDELKOOP E. et alScar Management Practical Guidelines, Maca-Cloetens, 2011.

33. AERTS A., NEVELSTEEN D., RENARD F.Soins de plaies, De Boeck, 1997.

34. http://www.urgencemain.fr/LesSoinsInfirmiers

35. TEOT L.The nex scar management practical guidelines, Scar Club Congress, Montpellier, France, 22-24 March 2012, 2012.

36. MONSTREY S. et alUpdated scar management practical guidelines: non-invasive and invasive measures, J Plast Reconstr Aesthet Surg. , 2014.