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INTRODUCTION et CONSLUSION DU LIVRE QU’EST-CE QUI DIRIGE LE MONDE ? Les élites, la finance, l’idéologie, les Etats, la psychologie... ? [email protected] Sociologue INTRODUCTION Parmi les principales questions auxquelles cherchent à répondre les différentes théories de la sociologie politique internationale, c’est celle du pouvoir, afin de comprendre comment le monde est véritablement dirigé. Elles visent à hiérarchiser les acteurs internationaux et les processus, qui dirigent l’espace des relations internationales au point de vue du pouvoir politique, économique et socioculturel. Pour les dirigeants politiques la justesse de ces analyses et leur compréhension s’avèrent cruciale pour parvenir à agir efficacement sur les véritables leviers du pouvoir international et obtenir des résultats probants à cette échelle. La question centrale à laquelle nous allons chercher à répondre dans ce livre est celle-ci : Qu’est ce qui dirigent le monde ? Il s’agit principalement des 7 structures sociétales du pouvoir que sont la structure du pouvoir économique, psychologique, des pouvoirs publics, du pouvoir des idées (dont l’idéologie), du pouvoir répressif, communicationnelle, des réseaux. Les mouvements sociaux transnationaux luttent contre l’hégémonie de la mondialisation ordo-libérale sans le social, dirigée par les classes dirigeantes économiques et politiques. Avec la croissance de la mondialisation, on observe un accroissement des théories visant à l’analyser et à en comprendre les mécanismes. Chacune des théories dominantes la gouvernance globale, le néo-réalisme, le néo-gramscisme (notamment celui de Robert Cox), les libéraux, etc. offre des analyses différentes concernant la hiérarchie du pouvoir réel de chacun des acteurs ou des structures (les Etats, les entreprises, l’idéologie…) et des moyens d’actions (la

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INTRODUCTION et CONSLUSION DU LIVRE

QU’EST-CE QUI DIRIGE LE MONDE ?Les élites, la finance, l’idéologie, les Etats, la psychologie... ?

[email protected]

INTRODUCTION Parmi les principales questions auxquelles cherchent à répondre les différentes théories de la

sociologie politique internationale, c’est celle du pouvoir, afin de comprendre comment le monde est véritablement dirigé. Elles visent à hiérarchiser les acteurs internationaux et les processus, qui dirigent l’espace des relations internationales au point de vue du pouvoir politique, économique et socioculturel.

Pour les dirigeants politiques la justesse de ces analyses et leur compréhension s’avèrent cruciale pour parvenir à agir efficacement sur les véritables leviers du pouvoir international et obtenir des résultats probants à cette échelle. La question centrale à laquelle nous allons chercher à répondre dans ce livre est celle-ci : Qu’est ce qui dirigent le monde ? Il s’agit principalement des 7 structures sociétales du pouvoir que sont la structure du pouvoir économique, psychologique, des pouvoirs publics, du pouvoir des idées (dont l’idéologie), du pouvoir répressif, communicationnelle, des réseaux.

Les mouvements sociaux transnationaux luttent contre l’hégémonie de la mondialisation ordo-libérale sans le social, dirigée par les classes dirigeantes économiques et politiques. Avec la croissance de la mondialisation, on observe un accroissement des théories visant à l’analyser et à en comprendre les mécanismes. Chacune des théories dominantes la gouvernance globale, le néo-réalisme, le néo-gramscisme (notamment celui de Robert Cox), les libéraux, etc. offre des analyses différentes concernant la hiérarchie du pouvoir réel de chacun des acteurs ou des structures (les Etats, les entreprises, l’idéologie…) et des moyens d’actions (la puissance, les normes, les structures…) qu’ils utilisent pour agir et réguler le monde.

L'analyse plus structurelle des mécanismes du capitalisme mondialisé reste un des fondements de l’explication des inégalités socio-économiques et démocratiques. Cependant, dans la mesure où a déjà largement été développée, en particulier par les marxistes, nous n’entrerons pas trop dans le détail, bien que ces éléments soient fondamentaux. Nous nous intéresserons aussi à ce qui s’oppose à la démocratie au point de vue des acteurs, telle la hiérarchie et les rapports de forces entre acteurs concrets (OMC, Banque Mondiale, Etats, Entreprises transnationales…). Mais aussi, au niveau des principes, tels les excès de l’ordre contre les excès de la liberté et de l’égalité, qui s’opposent à l’équilibre dynamique démocratique.

Certaines théories sont communes à l’économie politique internationale, à l’étude des relations internationales et la sociologie politique. Nous les regrouperons sous l’appellation de sociologie politique internationale. Trois disciplines dont les théories se recoupent largement. Or chacune des théories dominantes la gouvernance globale, bien qu’elles se fondent sur une approche scientifique, se dégage difficilement des courants politiques. Parfois c’est un choix de l’auteur et parfois sa théorie est reprise par un courant politique particulier. Ainsi la régulation est un enjeu de politique internationale, un objet de conflit et de négociation dont l’issue dépend des rapports de forces en présence1.

Nous prenons en compte la dimension psychologique et psychanalytique dans notre analyse de la gouvernance globale, car nous pensons que cette dimension manque aux analyses économiques et politiques classiques. Spinoza fut sans doute, l’un des plus grands philosophes. Il fut notamment le précurseur de la psychanalyse freudienne, il inspirera aussi de nombreux marxistes. Ce fut le cas par exemple de Negri, Lordon... Pour Spinoza, c’est principalement les désirs, les passions, les affects, les peurs, qui déterminent la société et les institutions. Les passions et non la raison sont les premières causes de la création de la société et elles viennent de surcroit la transformer, de manière constructive et destructive. Plus généralement, Spinoza considère que les passions tristes nuisent au bien commun. C’est pourquoi, il faut se libérer de l’esclavage de nos passions individuelles et collectives, pour

1 SMOUTS Marie Claude, Badie Bertrand, Le retournement du monde, sociologie de la scène internationale, Presses de la FNSP, 1995, p.118.

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émanciper les êtres humains et la société2. Pour Spinoza, la raison est un des principaux instruments pour parvenir à prendre conscience des affects et désirs subconscients, afin d’être heureux et de construire une société fondée sur la justice et l’harmonie. Pour Spinoza, les affects sont plus puissants que la raison. Les affects et les désirs sont liés à des idées adéquates (vraies) ou inadéquates (fausses, car fondées sur l’imagination et non la raison). Par conséquent, si les désirs sont les plus puissants et dominent la raison. Nous avons l’illusion d’une liberté fondée sur l’intellect et la volonté consciente, alors que ce sont les affects et les désirs subconscients qui nous domine. En ce sens il est le précurseur de la théorie psychanalytique freudienne. La raison est l’instrument de la libération, puisqu’elle peut permettre de différencier les affects accompagnés d’idées adéquates ou inadéquates.

Notre méthodologie consiste à prendre en compte l’approche psychologique individuelle et collective dans l’analyse économique et politique, afin d’éviter une dichotomie trop manichéenne entre collectif et individu, déterminisme et liberté, structure et volonté, socio-économie et psychologie. L’approche uniquement psychologique consisterait à considérer qu’un syndicaliste défend ses droits, uniquement parce qu’il souffre d’une névrose de rébellion, tandis que la gouvernance de l’économie et de la politique se construirait sans des actes concrets initiés par des pensées et des émotions subconscientes d’êtres humains incarnés dans des corps de chairs, pétris par leurs émotions et leurs désirs.

Par le passé, l’approche freudo-marxiste fut initiée par Wilhem Reich un des collaborateurs de Freud à Vienne dans les années 19303. Elle fut poursuivie ensuite dans les années 1960, par d’autres auteurs freudo-marxistes, tels Herbert Marcuse4, puis dans les années 1970, par Reuben Osborn, Lucien Sève5 et plus récemment par Christopher Lasch aux Etats-Unis, Dany robert Dufour en France, et par les membres du groupe Krisis en Allemagne autour de Robert Kurz et Anselme Jappe. Cependant, il nous semble que L’Asch, comme le membre du groupe Krisis négligent en particulier les peurs subconscientes d’être faible, de possession et survalorisent les désirs narcissiques.

Ainsi, parallèlement à la dimension politico-économique, nous centrons notre analyse sur le rôle de la prise de conscience par la connaissance politique collective, le subconscient collectif (composé principalement d’affects) et la conscience collective. Cette dernière a été définie par le sociologue Emile Durkheim comme « l’ensemble des croyances et des sentiments communs à la moyenne des membres d’une société »6. Nous définirons ces différentes notions plus en détail plus loin.

Notre approche s’inscrit dans le cadre des théories marxistes et plus précisément néo-gramsciennes. Ainsi, il y a 3 structures prédominantes, que sont les infrastructures économiques disposent du pouvoir dominant, suivent les structures de classe, puis les superstructures. Mais notre apport à ces théories se situe prioritairement, dans la dimension psychologique de l’analyse marxiste. Nous verrons, qu’il y a plusieurs principaux niveaux de controverse dans l’analyse du pouvoir dominant dans la mondialisation de même qu’entre les marxistes, les freudo-marxistes et plus généralement dans la psychologie et la psychanalyse, que nous développerons.

La question qu’est ce qui dirige le monde ? Génère d’autres sous questions : Est ce que ce sont des acteurs (des personnes ou organisations) ou plutôt des structures (économiques, idéologiques…), des structures de classe, qui domine l’évolution de la société globalisée ? Mais surtout quelles sont les structures les plus déterminantes et pour quelles raisons ? Est-ce que ce sont les Etats, les organisations internationales publiques, les transnationales, le pouvoir militaire, la société civile, les mouvements sociaux internationaux, l’opinion publique ou encore les citoyens du monde ? Si ce n’est pas un acteur particulier, alors qu’elles sont alors les structures dominantes, l’économie avec la finance et la production, les pouvoirs publics, les idées, la psychologie des peuples et des élites et plus précisément leur subconscient... ?

Afin d’éviter de perdre le lecteur dans le dédale d’explications détaillées et complexes, nous répondons dès à présent à ces questions, au risque de provoque certains lecteurs par ces affirmations un peu abruptes. Cependant, nous chercherons à démontrer ensuite le fondement de ces assertions.

2 SPINOZA Baruch, PROPOSITION XXI, Éthique, (1842), Les Éditions Ivrea, 1993, 367 p.3 PALMIER Jean-Michel, Wilhelm Reich. Essai sur la naissance du Freudo-marxisme, Ed. U.G.E., Paris, 1969.4 MARCUSE Herbert, Eros et civilisation, Contribution à Freud, Ed. de Minuit, 1963.5 SEVE Lucien, L’homme ? Penser avec Marx aujourd'hui, tome 2, La Dispute, 2009, p. 463.6 DURKHEIM Émile, De la division du travail social, Paris, PUF, 8e édition, (1897) 1967, 416 p.

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Qu’elles sont les principales structures qui déterminent la société mondiale ? Est-ce la structure financière, productive, idéologique, répressive, psychologique… ? Nous estimons que c’est prioritairement la structure financière et économiques de manière plus ou moins équivalente avec la structure psychologique du subconscient collectif, suivit des structures de classes fondées sur les rapports sociaux de production par la propriété des moyens de production. Il s’exerce entre elle des influences dialectiques. Le subconscient collectif est fondé principalement sur les peurs subconscientes d’être faible (ou de ne manquer de maitrise), donc d’être en insécurité, de ne pas être reconnu, de ne pas être aimé et finalement sur la peur ultime, celle de la mort.

Qu’est ce qui détermine majoritairement l’économie mondiale ? Ce sont les forces de production, les rapports sociaux de production, les rapports de classe, les rapports de propriété (privée) des moyens de production juridique ou de fait ? Nous pensons qu’il s’agit de ces dernières prioritairement, mais à nouveau dans le cadre d’une relation dialectique.

Qui sont les acteurs qui dirigent le monde ? Il y a bien 7 structures principales du pouvoir sociétal, mais il n’y a que 6 types d’acteurs principaux. En effet, la structure psychologique n’est pas un acteur spécifique, mais une force, une énergie psychique située à l’intérieur de chacun des 6 types d’acteurs. Néanmoins, les 4 structures principales du pouvoir sociétal sont la structure économique, psychologique, la structure des pouvoirs publics et la structure idéologique.

Au sein des structures dominantes, qu’elles sont les facteurs dominants ? Nous considérons que ce sont les structures qui dominent la classe, dominant à leur tour les élites (ou les acteurs) de cette classe, tandis que les élites dominent elles mêmes la majorité des individus de leur classe. Les élites individuelles, tels De Gaulle, Churchill, Napoléon contribuent à construire l’histoire, néanmoins les peuples en sont aussi fortement les instigateurs. Poulantzas distingue 3 classes exerçant le plus de pouvoir, ce sont la classe hégémonique, dominante et régnante7. Aussi, la classe des élites est composées de la fraction supérieure de chacune de ces trois classes. Par ailleurs, nous suivons l’approche de Miliband Ralph, qui dissocie l’Etat, de la classe capitaliste8. Nous définirons donc cette dernière comme un classe disposant de la propriété privée individuelle ou partiellement collective des moyens de production et regroupant la classe hégémonique et de la classe dominante

Ainsi, les acteurs les plus puissants des 4 structures principales sont la classe des élites économiques (hégémoniques et dominantes), la classe des élites des pouvoirs publics (la classe régnante ou gestionnaire, tels les élus ou les dictateurs). Pour la structure du pouvoir idéologique, il s’agit de la classe des élites de la société civile, composée des acteurs les plus influents de la société civile dans le monde, tels les grands intellectuels, les grands médias, les leaders des grands syndicats et des associations internationales, telle Greenpeace, Oxfam, Attac... Cependant, on oublie trop souvent que c’est la classe, puis l’organisation (Etat, entreprise, association...) qui disposent généralement d’un pouvoir supérieur à l’élite en tant qu’individu. Mais prenons garde, dans l’approche de Gramsci (et de Cox dans laquelle nous nous inscrivons majoritairement (car nous y ajoutons la psychanalyse), la société civile se compose de l’ensemble des acteurs qui influencent l’hégémonie idéologique, donc pas seulement les associations citoyennes, les syndicats, les intellectuels. En effet, il faut y ajouter, aussi l’école, l’église, les médias....

Les structures du pouvoir, du mondial au local sont donc composées :- Des 7 structures du pouvoir sociétal (composées des « moyens » et des acteurs que l’on peut

disposer « horizontalement »),- Puis, il y a 9 structures de classe (que l’on classera alors « verticalement »).- Enfin, il y a les individus avec les élites individuelles et la majorité des individus du peuple.

7 POULANTZAS Nicos, Pouvoir politique et Classes sociales, Paris, Maspero, 1971, tome 28

MILIBAND Ralph, L'Etat dans la société capitaliste - Analyse du système de pouvoir occidental, Editions de Bruxelles, 2012.

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Pour la clarté de l’analyse, nous simplifions notre propos, en dissociant les 7 structures du pouvoir sociétale. Or, en réalité, il s’agit aussi de 7 pôles unis par un relatif continuum, qui forment un tout, une unité, qu’est la société. Cette dernière s’insère dans ensemble plus grand qu’est le système planétaire, composé de la nature et de l’humanité, si tant est que cette séparation soit vraiment judicieuse. Les facteurs structurants et déclencheurs, telles les variations climatiques, qui viennent quant à elles de la nature, puis à présent de aussi la société humaine.

Les élites individuelles exercent leur domination ou leur hégémonie sur la masse des individus. Au sommet de la pyramide du pouvoir, il y a la classe dirigeante composée de 4 classes (la classe des élites, la classe hégémonique, la classe économique, dominante et la classe régnante (surtout la classe politique et les pouvoirs publics). A la base de cette pyramide, il y a les classes moyennes et populaires. Mais on oublie parfois, les trois classes d’encadrement, que sont la classe tenante, les classes relais et les classes d’appuis. Ces 6 différentes distinctions de classes sont formulées par Poulantzas 9, dans la continuité de Marx, puis de Gramsci. Nous en ajoutons trois, la classe moyenne, la classe populaire et la classe des élites.

Au sommet de la pyramide du pouvoir mondial, il y a donc la structure des élites économiques mondiales et en particulier des élites financières, tandis qu’à la base se situent les classes moyennes et populaires des peuples des différentes nations. Chaque individu de chaque nation, dispose soit du pouvoir potentiel de voter, soit de se révolter, lorsque la démocratie élective n’existe pas, ou encore de la possibilité d’élargir sa marge de pouvoir au sein des différents niveaux des 7 types structures. Au milieu de ces dernières, se situe la structure des pouvoirs publics (la classe régnante) et les acteurs de la société civile (qui résident au sein de la structure du pouvoir idéologique principalement). La représentation pyramidale ci-dessous combine la hiérarchie horizontale des 7 structures de pouvoir (composées des acteurs et des moyens), avec la hiérarchie verticale des 9 structures des classes socio-économiques, comme le montre le schéma ci-dessous.

9 Cependant, Poulantzas ne les regroupe pas en classes des élites et en classes d’encadrements, de plus c’est nous qui ajoutons les classes moyennes et populaires.

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D’où une seconde question, plus secondaire : comment grâce à la gouvernance globale adémocratique, la classe des élites économiques capitalistes mondialisées, conditionne-t-elle les décisions de la classe des élites des pouvoirs publics nationaux, internationaux et des différents secteurs qu’ils dirigent ? Nous verrons qu’il y a différents mécanismes, telle les menaces de délocalisation, de licenciement, de récession si leurs intérêts ne sont pas suffisamment pris en compte dans les lois et que leur liberté d’entreprendre n’est pas suffisante... Ainsi, la classe gestionnaire des pouvoirs publics soutient de manière plus ou moins directe, les intérêts de la classe des élites économiques, car ils défendent des intérêts communs, c'est-à-dire les intérêts des classes dirigeantes. Ces dernières sont composées de trois classes, que sont la classe hégémonique, la classe dominante (toutes deux composent la classe capitaliste) et de la classe régnante (c’est à dire la classe dirigeante des pouvoirs publics et la classe dirigeante politique).

Mais qu’est ce qui détermine la psychologie humaine des élites et des humains en général ? Les déterminismes externes (économie, société, culture, éducation…) ou les déterminismes internes, avec en particulier les fonctions psychologiques (conscientes et surtout subconscientes, telles les peurs et les désirs) ? Ce sont les deux à égalité selon nous, même si c’est parfois l’une ou l’autre qui prend l’ascendant. Par exemple, une découverte technique dans la production économique va être le facteur dominant pendant une période, mais rapidement le besoin subconscient de pouvoir va rapidement réorienter ces découvertes pour satisfaire ce besoin de domination. Cependant, nous verrons que les structures sociétales viennent ensuite exercer leurs propres déterminismes de manière multifactorielle.

D’où la question suivante qui est un peu différente : comment se structure la relation d’influence entre la structure psychologique et les structures économiques et sociétales ? Il s’agit d’une influence réciproque exercée tout au cours des siècles, par conséquent la personnalité humaine n’est pas seulement le résultat des structures économiques et sociétales. Mais elle aussi la résultante de

7 structures sociétales du pouvoir (acteurs et moyens) dominées - par les structures économiques et psychologiques et composées :

Les 9 principales structures de classe : - La classe dirigeante composée de : - La classe des élites composées de la fraction supérieures des 3 classes les plus puissantes que sont : - La classe hégémonique, dominante (qui forment la classe capitaliste) - La classe régnante - Les classes d’encadrements (tenante, d’appui, relais) - Les classes moyenne et populaire (ou prolétaire)

Les individus composant les structures de classe, dont :

LA HIERARCHIE DES STRUCTURES DU POUVOIR DE LA SOCIETE DU LOCAL AU MONDIAL

La

structure

psychologique

(est

transversale,

car située à

l’intérieure de

l’ensemble

des individus)

- des moyens (ressources, institutions, techniques, etc.) - et des 7 types d’acteurs, dont les 3 acteurs principaux qui sont :

- les acteurs économiques, les pouvoirs publics - et la société civile (liées au pouvoir de l’idéologie)

- Les élites individuelles de la classe des élites (ou classe hégémonique)- Les individus des structures de la classe moyenne et populaire : (la majorité du peuple ou la masse des individus)

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processus biologiques (telle l’évolution du cerveau au cours des millénaires) et de mécanismes psychologiques (tel le mécanisme d’apprentissage par imitation des enfants envers les désirs et peurs névrotiques subconscientes des éducateurs), qui disposent de processus et de déterminismes spécifiques non réductibles aux seuls facteurs économiques et culturels. Après avoir présenté notre plan fondé sur une approche pluridisciplinaire, nous allons expliquer les raisons de ce choix.

L’approche globale et interdisciplinaire favorise une vision synthétique. Depuis la fin des

encyclopédistes, tels Diderot à l’époque des lumières au XVIIIe, il n’y a plus véritablement de discipline scientifique qui cherchent à mener une analyse globale des fonctionnements du monde en intégrant la multidisciplinarité. Seul les journalistes et les hommes politiques continuent par nécessité fonctionnelle à suivre cette analyse synthétique, cependant ce ne sont pas des scientifiques. Cette dérive est assez logique néanmoins, car une des fonctions de la science consiste à parvenir à la plus grande scientificité possible, c’est à dire à obtenir en particulier des preuves les plus précises et fiables possible. En effet, pour accéder à une vérité la plus rigoureuse possible, il est plus facile de limiter son champ de recherche à un tout petit secteur, tels les mécanismes micro-économiques de la gestion financière des entreprises de l’acier, dans le secteur de la Creuse en 2005. Sinon, le risque sera de généraliser ses découvertes de manière abusive, donc non scientifique.

La vérité scientifique spécialisée se révèle donc la plus vrai localement, mais la plus relative et limité globalement. C’est une vision de plus en plus réductionniste, puisqu’elle réduit le réelle à l’analyse d’une portion très étroite. Sans une vision globale de la société, l’analyse de celle-ci s’apparente à celle d’humain étudié au microscope par des spécialistes, qui ne voit donc qu’un pantin désarticulé, un squelette dévitalisé et disloqué, car sans articulations, à qui on aurait sectionné les organes et les os. Ils n’ont plus de vision globale des organes et fonctions humaines. Le réductionnisme scientifique, est un peu comme si un Oto-Rhino-Laryngologiste (ORL) prétendait connaitre scientifiquement un être humain parce qu’il est un scientifique spécialisé dans l’étude de l’oreille humaine. Or, la compréhension médicale scientifique d’un être humain suppose une analyse globale de ses organes par une approche multidisciplinaire : cardiologie, pneumologie, dermatologie.... Face à ces limites, se développe actuellement, les services de la médecine interne à l’hôpital, mais de manière encore relativement balbutiante. Ils cherchent à étudier globalement la biologie humaine, (à ne pas la confondre avec les internes de l’hôpital, qui sont encore des étudiants en médecine). Paradoxalement, on peut dire que la médecine interne se spécialise dans la synthèse, à l’instar du médecin généraliste, mais au niveau de la médecine du quotidien. Cependant, dans les sciences humaines et sociales, il n’existe pas de discipline scientifique globale multidisciplinaire. Seuls certains chercheurs s’y lancent au risque d’être traité de non scientifique et donc d’être rejeté du monde de la recherche académique, tandis qu’un nombre croissant choisissent au contraire une analyse micro, c’est à dire sur un champ et un terrain microscopique. Ils y sont poussés par les comités de rédaction des revues scientifiques et le financement de la recherche, de plus en plus orientés vers la spécialisation, afin d’obtenir des résultats de plus en plus scientifiques. Ils s’éloignent donc, d’une approche pluridisciplinaire et globale synthétique (plutôt qu’analytique), étendue (globale plutôt qu’étroite et micro), élevée (abstraite plutôt que concrète), profonde (puissante plutôt que superficielle). Cependant, l’analyse micro parvient aussi à explorer généralement profondément un secteur limité dans l’espace.

Actuellement, dans le domaine des sciences humaines et sociales, on observe ainsi une vision de plus en plus réductionniste des mécanismes sociaux fondés sur une approche morcelée du réel. Généralement ces analyses se veulent hyper spécialisées, mais sans liens cohérents et profonds entre elles, car elles sont formulées chacune séparément par des économistes, des juristes, des sociologues, des anthropologues, des psychologues, des politistes, des médecins…

Dans son ouvrage « la guerre des sciences », la philosophe Isabelle Stengers considère que la dimension scientifique de « LA science » reste limitée 10. La fragilité de la science, s’avère encore plus grande dans les sciences sociales, qu’on qualifie de « sciences molles », en opposition aux « sciences dures », ou sciences exactes, telle la physique qui est considérée comme la plus scientifique des disciplines. Pourtant, même en physique, les vérités scientifiques ne résistent que rarement à l’usure du temps. La conception newtonienne de la physique a été ébranlée par la théorie de la relativité 10 STENGERS Isabelle, Cosmopolitiques 1 - La guerre des sciences, L'invention de la mécanique : pouvoir et raison, Thermodynamique : la réalité physique en crise, La Découverte, 2003.

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d’Einstein, qui a elle-même été remise en cause en partie par la physique quantique, notamment avec la théorie des cordes. De même, en sciences économiques, le simple fait qu’il y est de nombreux et incessants désaccords entre les différents courants théoriques, sur l’analyse des faits économiques, par exemple entre les marxistes et les néolibéraux, montre les limites de ces prétentions scientifiques.

Il n’existe donc pas de vérité scientifique absolue, mais plutôt une vérité scientifique relative dans le temps et l’espace. C'est-à-dire que la vérité scientifique dépend en large partie, du niveau d’évolution des connaissances d’une époque et/ou d’une culture.

D’où la volonté, de chercheurs, tels Edgar Morin11 avec sa théorie de la complexité, de développer une approche interdisciplinaire et donc de prendre le risque de s’écarter un peu de la vérité scientifique locale, afin de s’approcher de la vérité globale, plus proche de la « vérité absolue », même si elle reste bien sur une vérité relative, puisqu’il existe toujours des approximations, des imperfections. La théorie de la complexité ose l’approche interdisciplinaire, donc ses preuves risquent d’être moins solides.

L’esprit analytique devient destructeur et mortifère, s’il ne trouve pas un équilibre avec l’approche synthétique. C’est ce qu’explique à sa manière Edgar Morin dans le cadre de la théorie de la complexité12. « La morale et l'intelligence ont besoin de s'éclairer mutuellement » ; « la pensée complexe nourrit d'elle-même l'éthique. En reliant les connaissances, elle oriente vers la reliance entre humains. Son principe de non-séparation oriente vers la solidarité »13.

Pour utiliser une analogie, nous pourrions dire que l’approche globale et interdisciplinaire utilise une longue vue, voire un télescope, tandis que l’approche monodisciplinaire et micro utilise un microscope. Entre ces deux pôles extrêmes, il y a l’approche multidisciplinaire micro (locale) ou l’approche interdisciplinaire macro (globale). On peut ainsi opposée la vérité locale à la vérité globale et la vérité relative et la vérité absolue. Cette dernière est un but impossible à atteindre, mais pour s’en rapprocher les deux méthodes dont nous disposons, relève d’une quête de la vérité locale la plus scientifique possible et d’une vérité globale, qui sera mécaniquement moins scientifique. La vérité scientifique spécialisée, si elle est plus proche de petits segments de la vérité absolue, reste cependant fort éloignées de la vérité absolue globale. Ainsi, la vérité relative globale est susceptible de se rapprocher plus près de la vérité absolue, que la seule vérité scientifique locale, spécialisée et réductionniste.

Dans cet ouvrage, notre méthode consiste donc à lutter contre cette approche réductionniste du réel et du monde. Aussi, nous utiliserons une approche multidisciplinaire globale, intégrant la dimension économique, politique, sociale, culturelle, psychologique et écologique. Cependant, il est probable, que les autres scientifiques menant prioritairement une approche micro y trouveront à redire et relèveront certaines erreurs d’analyse micro. C’est sans doute le prix à payer pour la quête d’une connaissance scientifique globale et non morcelée et partielle du monde.

La première partie portera sur les mécanismes de la géopolitique mondiale. Nous présenterons les 7 types de structures du pouvoir sociétal mondial et des politiques économiques qui dirigent le monde. Au sein de chacune d’elles les intérêts de classe unissent les élites économiques et celles des pouvoirs publics. Leurs idées et leurs actions convergent dans le cadre d’une gouvernance mondialisée ordo-libérale sans le social, qui s’opposent en partie à une régulation sociale internationale. Pour comprendre cette opposition politique, mais aussi les différences entre les différents courants politiques et théorie de relations internationale, nous mettrons en évidence, les 3 grands principes des systèmes politico-économiques, que sont la liberté, l’égalité et l’ordre (ou la puissance de l’ordre).

Nous tenterons de hiérarchisés les acteurs et les structures qui dominent le monde, de même que les acteurs dominants de la scène nationale et des relations internationales les relations. Nous expliquerons comment certains membres de la classe dirigeante des pouvoirs publics et des élites économiques parviennent à exercer un pouvoir insuffisamment démocratique sur le plan national ou international et même à vivre trop souvent, au-dessus des lois, qu’ils édictent. La classe des élites économiques capitalistes représente la « classe hégémonique », tandis que la classe des élites des

11 MORIN Edgar, Ethique, La méthode, Tome 6, Seuil, 2004.12

MORIN Edgar, MORIN François, Relier les connaissances, Le défi du XXIe siècle, Seuil, 1999. 13 MORIN, 2004.

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pouvoirs publics (présidents élus, dirigeants des partis politiques, élites bureaucratiques et technocratiques) représente la « classe régnante » selon la définition de Poulantzas14.

Nous verrons que les avis divergent sur ce sujet entre différentes théories de la sociologie politique internationale. Parmi ces dernières, la théorie de la gouvernance globale qui s’inscrit dans l’institutionnalisme libérale est celle qui a les faveurs des organisations internationales les plus puissantes, telle la Banque Mondiale et le FMI. Que ce soit du point de vue de l’analyse théorique, comme des orientations politiques qui en découlent. Nous nous interrogerons ensuite sur la question suivante : qu’est-ce qu’un fait scientifique dans le secteur de l’illégalité ? En effet, si la majorité de la gouvernance globale économique et politique s’avère licite, une minorité ne l’est pas, comme l’atteste les grands procès, telle l’affaire Elf. Mais comment parvenir à définir scientifiquement la quantité et surtout le poids politique de ces actions illégales des élites ? Or, cette question importante de même que les pratiques illicites des dominants, ne sont quasiment jamais abordées par les chercheurs scientifiques français, à quelques exceptions près, telles le courageux Pierre Lascoumes 15. En effet, ces questions ne sont pas vraiment bienvenues dans le monde académique.

Ensuite, nous chercherons à comprendre les caractéristiques de la classe dirigeante et en quoi elle diffère vraiment des autres classes ? Au sommet de la classe dirigeante, se situent, les trois principaux types d’acteurs qui influent sur l’orientation du monde. Ce sont d’une part, les élites économiques et les élites des pouvoirs publics (État, organisation internationale publique, armée, police, justice…). D’autre part, les acteurs du pouvoir idéologique, avec en particulier les élites et les cadres de la société civile.

Il y a par ailleurs quatre structures de pouvoirs qui prédominent dans l’évolution des systèmes sociétaux. Il s’agit des infrastructures économiques (capacité technique et matérielle, ressources économiques), des structures de classe (fondés sur les rapports sociaux de propriété des moyens de production), des « infrastructures psychologiques » du subconscient collectif et des superstructures (l’idéologie, l’Etat…). Parallèlement à ces facteurs structurants, nous verrons dans le dernier chapitre que la société est aussi déterminée et mise en mouvement par des facteurs déclencheurs (humains, techniques, environnementaux...). Ainsi, les 4 structures qui dominent la société humaine mondiale, sont-elles mêmes déterminées par des structures écologiques (climats, ressources...).

Le schéma suivant vise à aider le lecteur à comprendre de manière synthétique notre conception de la hiérarchie des différentes structures mondiales.

14 POULANTZAS Nicos, Pouvoir politique et Classes sociales, Paris, Maspero, 1971, tome 2.15 LASCOUMES P., Corruptions, Presse de la Fondation Nationale de Sciences Politique, 1999.

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Nous développerons donc chacun de ces points, afin de mieux comprendre quelles sont les caractéristiques principales des structures mondiales et en particulier des structures du capitalisme, qui constitue le système conditionnant toute la mondialisation actuelle. En effet, pour changer le monde, une des conditions majeures consiste à bien comprendre son architecture et son fonctionnement.

CONCLUSION

Les 3 principes fondamentaux :Liberté, égalité, puissance de l’ordre

LES DETERMINISMES DES STRUCTURES MONDIALES

Les 13 facteurs déclencheurs :L’innovation technique (agricole, industrielle, informatique...), les nouveaux types de propriété des moyens de production et d’organisation du système économique (système de vente, travail à la chaine, sous traitance...), la lutte des classes (dont les mouvements sociaux), les idéologies nouvelles, les paliers dans la conscience collective (tel l’accès au langage) et le subconscient collectif, les nouveaux modes de gouvernement, les changements de ressources (énergies, métaux...), les transformations climatiques, le déclenchement des guerres, l’apparition de famines, les seuils de la croissance démographique, les seuils quantitatifs des marchés (des travailleurs, des monnaies, des terres, des biens...), les seuils d’accumulation des richesses (financières, patrimoniales, industrielles...).

Les 15 facteurs structurants (humains et non humains) : (Ce sont les mêmes que les 13 facteurs déclencheurs,

plus la structure du pouvoir communicationnel et du pouvoir des réseaux.

Le 7 structures sociétales du pouvoir(composées des moyens et des humains):

économique, psychologique (subconscient), les pouvoirs publics (les Etats et les organisations internationales), le pouvoir de l’idéologie (et

des systèmes de pensée), le pouvoir répressif (l’armée, la police...), communicationnel et des réseaux.

Les 9 structures de classe : la classe des élites,les classes hégémonique, dominante, régnante,

les 3 classes d’encadrements (tenante, d'appui, relais), puis la classe moyenne et populaire.

La puissance

des structures

(non humaines)

naturelles :

climatique,

minérale,

végétale,

animale...

La structure géopolitique des classes :Occidentaux (les plus riches, les classes moyennes et populaires, plus

pauvres) contre non Occidentaux (idem pour les classes)

Le pouvoir des individus (dominé par les structures de classes) :

Les élites individuelles, dominant les cadres, dominant la majorité des individus du peuple.

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Actuellement, les grandes théories de la sociologie des relations internationales s’affrontent donc pour expliquer les forces principales qui dirigent le monde. Les théories néolibérales et ordo-libérales (sans le social) considèrent que le pouvoir dominant est principalement économique et elles privilégient l’analyse de la convergence des intérêts. Il en est de même pour la théorie de la gouvernance globale (Rosenau, 1992), mais elle introduit en plus le pouvoir relationnel. Pour les néo-réalistes le pouvoir dominant relève du pouvoir politique des États, en particulier au sein des institutions internationales. Les enjeux sont donc des conflits de puissances entre États plus que de conflits entre entreprises (Krasner, 1983). Susan Strange (1996) considère que ces théories ne donnent qu’une vision limitée de la réalité, aussi s’appuie-t-elle surtout sur une analyse des structures d’autorités. Quant au néo-gramscien Robert Cox, il se centre sur les conflits d’intérêts et il estime que le pouvoir est fondé à la fois sur les capacités matérielles (capital fixe et financier) et également sur les forces sociales (institutions, société civile internationale…). Ces dernières figurent parmi les acteurs majeurs qui détiennent le troisième pôle des structures historiques que sont les idées (l’hégémonie idéologique et politique), à côté du pôle des structures économiques et de celui des pouvoirs publics. En effet, les mouvements sociaux transnationaux cherchent à court terme à renforcer la régulation des normes sociales, sa légitimité et sa démocratisation au risque d’un excès de privatisation et de ne pas atteindre leurs objectifs consistant à améliorer les respects des normes fondamentales.

Au sein de la société civile il existe une lutte des classes selon Gramsci, dont l’objet consiste dans la maitrise du pouvoir hégémonique idéologique et politique, du local au plan international. Les néo-gramsciens attribuent donc une importance fondamentale au rôle de la société civile. Cette dernière est un terme qui devient à la mode actuellement, on la qualifie souvent de société civile internationale avec le développement de la mondialisation. Mais son renouveau s’explique aussi par la diffusion croissante de la théorie de la gouvernance globale, qui s’appuie largement sur ce concept. Or les définitions de la société civile s’avèrent très différentes en fonction des courants auxquelles elles se réfèrent, car c’est un enjeu de pouvoir politique.

Les théories de la science économique et politique sont utilisées par les partis politiques, de manière à servir et à étayer leurs idéologies politiques. Comme Bourdieu le soulignait lui-même l’élaboration théorique est rarement dissociée des enjeux politiques. C’est pourquoi elles semblent parfois conçues dès lors origines comme des instruments au service d’un courant politique, bien qu’elles affirment chacune que leur fondement est absolument scientifique. Lorsque Hayek16 tente de démontrer le caractère central du marché, il n’ignore pas que ce travail théorique pourra servir le courant du libéralisme économique. Lorsque Marx analyse les limites du capitalisme et envisage le socialisme, puis le communisme comme l’évolution inéluctable de l’histoire, il défend lui-même les courants politiques opposés au libéralisme économique.

Le concept de gouvernance globale diffère quelque peu de celui de régulation internationale. Mais au-delà de la définition du mot, c’est surtout les différents courants théoriques qui se travaillent sur chacun des deux concepts qui s’opposent. Il y a les néolibéraux pour la gouvernance (du local au global) et les socio-démocrates pour la régulation. La politologue Smouts estime que la régulation au plan normatif et théorique est un enjeu de politique internationale, un objet de conflit et de négociation dont l’issue dépend des rapports de forces en présence17. C’est un rapport de force entre élites intellectuelles, politiques et économiques.

Concernant, la production et la gouvernance globale, la majorité des actions des élites sont légales et une partie engendre des inégalités, car elles favorisent l’exploitation, la domination et l’aliénation, qui sont trois caractéristiques fondamentales du système capitaliste mondialisé. D’autre part, on observe chez ces élites des actes illicites, ce qui pose un vrai problème éthique et démocratique, en particulier dans les Etats de droit. Or, ces actes sont très peu analysés par les chercheurs et même par les militants associatifs, en dehors de quelques rares journalistes d’investigation.

On relève parallèlement des pratiques légales, mais adémocratiques de la classe des élites des pouvoirs publics, mais aussi des élites économiques, militaires, policières, intellectuelles et médiatiques. Une partie des élites, abusent de leurs pouvoirs ou qu’ils limitent, par exemple, la transparence et la

16 HAYEK Frederik, Droit, législation et liberté, PUF, (trad. de la publication de 1973 aux Etats-Unis), Paris, 1995.17 SMOUTS Marie Claude, Badie Bertrand, Le retournement du monde, sociologie de la scène internationale, Presses de la FNSP, 1995, p. 118.

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démocratie participative, la démocratie représentative, telles que l’excès du cumul des mandats, le manque de proportionnalité dans les élections, de démocratie directe (référendum…), etc.

La démocratie véritable passent donc par la découverte et l’application de nouvelles procédures, mais aussi par un plus juste équilibre et surtout mise en œuvre entre les principes de l’égalité, de la liberté et de l’ordre. Ce dernier peut être un ordre autoritaire, mais aussi un ordre démocratique, notamment grâce au respect de l’Etat de droit, de lois et d’un ordre fondé sur l’égale liberté des citoyens.

Ensuite, faut-il encore que les dirigeants, du niveau local au niveau international, disposent de capacités psychologiques suffisamment détachées des besoins de pouvoirs subconscients. Sinon même dans une société disposant de procédures les plus démocratiques, les dirigeants et les élites chercherons à les contourner, car leurs passions seront plus fortes que leurs raisons...

LES TROIS PRINCIPALES COMPOSANTES DU POUVOIR MONDIAL Les trois composantes principales du pouvoir mondial sont constituées : des 7 structures du pouvoir

sociétal, des 9 structures de classes et des individus. Elles se décomposent et sont hiérarchisées ainsi :

a- Il y a 7 structures du pouvoir sociétal composées des « moyens d’actions » et des acteurs. - Il y a 2 structures du pouvoir sociétal dominants (économique, psychologique), - 2 structures du pouvoir sociétal semi-dominantes (l’idéologique et les pouvoirs publics),- et 3 structures de pouvoir plus secondaires (la structure répressive, la communication et les réseaux).

- Puis, il y a 3 structures d’acteurs dominants, appartenant à 3 des 4 structures dominantes (économique, pouvoirs publics et idéologique) (la psychologie étant une des 4 structures dominantes, mais elle est transversale, puisqu’il y a des individus dans toutes les structures).- Les moyens sont (les forces matérielles (la techniques, les ressources...) et les institutions).

b - Puis, il y a 9 structures de classes, dominées par ordre de pouvoir décroissant, par la classe des élites, la classe hégémonique, la classe dominante, la classe régnante, la classe tenante, les classes relais, les classes d’appuis, la classe moyenne et la classe populaire). Nous classons les structures de classes en les empilant verticalement et donc hiérarchiquement (avec le plus dominant au dessus), tan -dis que nous juxtaposons horizontalement, les 7 structures du pouvoir sociétal (économiques, idéolo -giques, pouvoirs publics...) du plus dominant à gauche, au moins dominant à droite. Ainsi, il y a par exemple, la classe hégémonique économique, la classe dominante économique, etc. Voir, le tableau précédent, intitulé les structures qui dirigent le monde 7 structures (horizontales) du pouvoir sociétal et 3 structures (verticales) d'acteurs.

c- Puis, il y a les individus avec :- les élites individuelles de la classe des élites (ou classe hégémonique), (mais qui restent

des dominées par les structures de pouvoirs). Avec les élites économiques, idéologiques...- Enfin, il y a les individus de la classe moyenne et populaire (la majorité et la base du

peuple). Ces individus se répartissent aussi dans chacune des 7 structures de pouvoirs. Ils sont aussi présents dans la structure du pouvoir des réseaux, dont le capital social, qui s’avère un pouvoir moins influent et puissant.

Chaque structure du pouvoir se compose des moyens d’actions concrètes (moyens de production, ressources, matériaux, institutions...) et des acteurs (économiques, publics...). Parmi les 7 structures de pouvoir, il y existe 4 structures principales : la structure économique, psychologique, idéologique et celle des pouvoirs publics. Au sein de ces structures trônent la classe des élites économiques, des élites des pouvoirs publics et des élites de la société civile (le pouvoir idéologique hégémonique). La société civile représente une part des corps intermédiaires, c’est à dire les acteurs qui influent sur l’hégémonie idéologique : les partis politiques, les associations citoyennes, les syndicats, les représentants des

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entreprises, les médias, les lobbies, les intellectuels, les enseignants, les religieux... En bas de la pyramide du pouvoir se situe les classes moyennes et populaires, qui forment la majorité du peuple.

Notre question centrale était « qu’est-ce qui dirige le monde ? ». L’économie, les pouvoirs publics, l’idéologie... Notre hypothèse générale, c’est à dire notre réponse est la suivante serait plutôt celle-ci : dans le cadre de la gouvernance globale, il existe une relation dialectique entre les infrastructures économiques (capital financier et économique, forces productives, forces de travail) et les infrastructures psychologiques du subconscient, mais aussi, de manière un peu plus secondaire, avec les structures de classe, les superstructures (les pouvoirs publics, les structures de l’idéologie, de la répression, de la communication, de relations (les réseaux)). Au plan, psychologique, par exemple, la peur d’être faible génère notamment la peur de l’insécurité physique, alimentaire, économique... Quant aux structures de classes, elles peuvent être définies comme un rapport social de propriété des moyens production, dans laquelle s’inscrit la lutte des classes entre la classe des salariés et la classe des propriétaires privés des moyens de production (la classe économique dirigeante du capitalisme). Parmi la classe des salariés, la classe des gestionnaires des pouvoirs publics et la classe d’encadrement sont généralement alliées avec les classes hégémonique et dominante du capitalisme, comme l’analyse Poulantzas (1972). Ces dernières figurent dans l’infrastructure économique, donc les classes politiques dirigeantes figurent dans la superstructure et sont donc aussi largement dépendante et servent principalement leurs intérêts. Cependant, dans les système socialiste ou communiste c’est relativement comparable. D’où l’importance de la démocratisation de l’économie, via des entreprises publiques démocratisées et des coopératives, fondées sur la propriété privée collective des moyens de production de travailleurs propriétaires.

Les luttes pour le pouvoir parcourent chacun des 7 pouvoirs principaux, tel le pouvoir répressif et sont actives au sein du complexe militaro-industriel, où se mêlent l’armée publique, les milices privées et l’industrie privée de l’armement. Ces multiples luttes de pouvoir parcourent les pouvoirs publics locaux, nationaux et internationaux, jusqu’aux agences de l’ONU telle l’OMS. Dans cette dernière, par exemple, d’un côté, certains cherchent à mettre en place des politiques sanitaires et sociales ambitieuses. De l’autre, certains tentent, à travers des politiques ordo-libérales (sans le social), d’en réduire le coût et donc finalement la portée. Les transnationales de l’industrie pharmaceutique, de l’amiante, du tabac, du nucléaire, etc., tentent d’influer sur les politiques et les normes des agences de Nations Unies. Elles le font directement, avec des pratiques de lobbying, de corruption. Mais, elles agissent aussi par le biais de leurs gouvernements, qui viennent encore limiter l’impact et l’orientation sociale des politiques mises en œuvre, notamment à l’OMS et à l’Unicef, dans le cadre des politiques libérales de privatisation des services publics, générant la pauvreté et des inégalités.

Le pouvoir de la classe des élites n’est pas suffisamment démocratique et c’est aussi ce qui fait sa force. Même si ce n’est pas toujours pleinement conscient, le but ultime des élites consiste à satisfaire pleinement leur besoin subconscient de pouvoir, afin de devenir une élite de « surhommes », à l’instar de ce qu’envisageait Nietzsche. L’accroissement des ressources financières, à partir d’une certaine limite, devient inutile sur le plan de la satisfaction des biens matériels, ce n’est donc plus seulement la croissance du pouvoir financier sur le monde, qui s’accroît, se transformant ainsi en un pouvoir de nature politique, une capacité de gouverner le monde même sans être élu, de tenir les commandes d’un gouvernement mondial en développement.

Ainsi, rappelons comment nous avons hiérarchisé par ordre d’influence décroissante des 7 principales structures mondiales : il y a d’abord les structures économiques (dans laquelle la structure financière domine la structure productive (industrielle, agricole…)), situées au même niveau que les structures psychologiques (des peurs subconscientes, telle la peur d’être faible, de l’insécurité...). Puis, il y a les structures de l’idéologie, des pouvoirs publics nationaux et internationaux, la structure répressive (militaire policière, paramilitaire…), la structure de la communication et du pouvoir des réseaux (entre humains et associations formelles ou informelles). Ces deux dernières peuvent d’une certaine manière être regroupées dans le cadre de la structure de communication au sens large (médias audio-visuels, technologie de l’information, marketing, supports de communication, organisation de la communication, des relations, des associations…). Sachant que dans chacune de ces structures, c’est la structure de la classe des élites qui disposent du plus de pouvoir, mais dans le

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cadre d’une influence dialectique avec les structures matérielles, idéologiques, psychologiques. Parallèlement à cette structuration horizontale des 7 structures principales du pouvoir sociétal, on observe une structuration verticale avec les 3 principales structures de classe : la classe dirigeante (dominées par la classe des élites), les classes d’encadrement et les classes moyennes et populaires.

A travers la privatisation de la dette des Etats, la puissance politique de la structure du capitalisme financier dépasse à présent celle du capitalisme industriel, même si celui-ci reste très largement le principal créateur de valeur par le travail. En effet, la dette s’avère un levier puissant pour orienter les politiques des Etats vers plus de libéralisme économique, notamment en les menaçant d’accroitre les taux d’intérêt du remboursement de leurs prêts. D’où la puissance croissante des agences de notation. Ce pouvoir croissant du capitalisme financier n’exerçait pas une pression aussi forte dans les années 1970, lorsque les Etats empruntaient à leur Banque centrale (publique), car ils se remboursaient en réalité à eux-mêmes.

La structure du pouvoir financier est cependant plus puissante que celle des élites du pouvoir financier, tels les célèbres Rothschild, Rockefeller, Morgan... contrairement à ce que pense certains théoriciens du complot. En effet, même quelques individus très puissants, ne peuvent diriger l’ensemble des autres individus, si les autres structures de pouvoir (l’idéologie, les pouvoirs publics, l’armée...) et leurs membres ne le permettent pas. Ce qui dirigent le monde est donc bien le système des 7 structures de pouvoirs, qui dominent la libre volonté des élites du pouvoir financier notamment. Actuellement ces 7 structures du pouvoir sociétal servent le système capitaliste, auparavant elles étaient au service du féodalisme et elles structurerons et déterminerons le prochain système. Cependant, la volonté des élites et du peuple existe bien et ils disposent de la capacité de modifier l’actuelle orientation capitaliste des 7 pouvoirs du système, afin de tenter de le transformer. Il s’agit toujours d’une relation dialectique et circulaire, mais dans lequel les structures du système déterminent en partie seulement la volonté individuelle. Lorsque qu’un système politique ou économique ou une civilisation a atteint son apogée et commence à décliner, tel que l’a connu l’empire romain par exemple, lorsque le balancier a terminé sa course, il suffit généralement d’une pichenette de la nature ou des humains, pour qu’une révolution fasse basculer un vieux système mourant vers un nouveau.