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15 ans de bande dessinée à Tetouan

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Cet ouvrage a été publié grâce au soutien de:

Responsable de publication : l’Association Chouf pour la promotion de la BD au Maroc

Coordination générale : Said Nali

Conception graphique : Omar Ait Sekkou Zaid, Said Nali

Illustration de couverture : Aziz Oumoussa, Said Nali, Omar Ait Sekkou Zaid

Impression : Alkhalij Alarabi

ISBN : 978-9954-34-982-3

Dépôt légal : 2015MO0613

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SommaireAvant-propos, Said Nali

Introduction, Abdelkrim Ouazzani

Mot de l’Agence pour la Promotion et le Développement du Nord

La BD marocaine en devenir, Jaouad Diouri

- Création du département bande dessinée à l’INBAL’INBA : 70 ans d’enseignement artistique

Quelques dates repères

La filière bande dessinée

Témoignages

- Daniel Sotiaux

- Jean Auquier

- Denis Larue

- Renaud De Heyn

- Bouzaid Bouabid

- Abdelaziz Mourid

- Said Nali

Le fanzine de BD « CHOUF»

Liste des lauréats du département BD

- Le Festival International de Bande Dessinée de Tétouan (FiBaDeT)

Pourquoi un festival ?

Dessins et bulles de Tétouan, un festival de charme, Jaouad Diouri

Afrique centrale-Maroc, perspectives de collaboration, Christophe Ngalle Edimo

L’Institut Français : un partenaire du festival, Anita Dolfus

Una viaje de ida y vuelta a través del cómic, Cecilia Fernández Suzor

Coming Moroccan comics, Mohamed Ghazala

Les professionnels de la BD invités au festival

Le festival en images

- Créations des étudiants du département BD

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Avant-propos

L’association Chouf est née en 2006, à l’initiative des enseignants et de quelques lauréats du département de bande dessinée de l’INBA, dans le but de promouvoir le neuvième art

au Maroc et de faire de Tétouan la capitale marocaine de la Bande Dessinée.

Sa démarche est éminemment pédagogique et s’articule autour de trois axes qu’elle estime complémentaires :

Les ateliers : L’association encadre des ateliers au profit des enfants aussi bien dans les établissements scolaires que dans le cadre associatif afin d’encourager les jeunes talents, susciter de nouvelles vocations et promouvoir la lecture de la bande dessinée auprès des nouvelles générations.

Le festival international de la bande dessinée de Tétouan (FiBaDeT): Créé en 2004, le festival a pour objectifs de diffuser les nouveautés de la bande dessinée marocaine, repérer et mettre en valeur les nouveaux talents, créer un lieu de rencontre avec des écoles, des professionnels et des artistes internationaux, encourager l’échange d’expériences, créer des réseaux entre les divers acteurs du neuvième art et mettre en place de nouvelles voies de promotion, de diffusion et de dynamisation du secteur de la BD.

La Publication : Le troisième axe d’intervention est d’ordre éditorial sachant que l’édition est un ressort important pour la diffusion de la BD. L’association travaille dans ce sens en exploitant, d’une part, l’immense possibilité qu’offre internet, notamment via les réseaux sociaux, et d’autre part en publiant des magazines, albums et livres et ce afin d’encourager la lecture de la bande dessinée et participer à sa diffusion dans la société marocaine.

Dans le présent ouvrage, nous avons voulu retracer l’expérience de la bande dessinée à Tétouan, depuis la mise en place des premières classes de BD à l’INBA en 2000, jusqu’à la 8ème édition du FiBaDeT en 2014.

Nous profitons, par ailleurs, de cette occasion pour présenter, dans la dernière partie du livre, une sélection des projets d’albums réalisés par les étudiants de l’INBA, une sélection représentative des différentes promotions ainsi que de la diversité des styles et des sujets abordés et ce afin de mettre en lumière le talent de nos lauréats.

Notre objectif n’est pas tant de célébrer un anniversaire mais de mesurer le chemin parcouru et celui qui reste à faire. Nous sommes loin d’avoir atteint tous nos objectifs mais forts de presque 15 ans d’expérience, nous pouvons tracer de nouvelles perspectives d’avenir et donner une nouvelle impulsion au département et au festival.

L’association Chouf remercie, à cette occasion, toutes les institutions officielles et privées, les personnes et les partenaires qui ont à divers titres contribué au développement de la bande dessinée à Tétouan ainsi que tous ceux qui ont collaboré à la publication de ce livre.

Nos remerciements vont également à l’Agence pour la Promotion et le Développement du Nord pour son soutien à la publication de cet ouvrage et pour son accompagnement depuis le démarrage de cette expérience.

Said NaliPrésident de l’association Chouf

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Introduction

Vouloir présenter cette magnifique expérience de « 15 ans de bande dessinée à Tétouan » en quelques lignes est un exercice difficile.

Ce livre est le couronnement d’un effort collectif de longue haleine, entamé depuis 15 ans, avec la création au sein de l’Institut National des Beaux Arts d’un département propre à la Bande Dessinée, grâce à l’apport pédagogique de nos amis belges.

Je voudrais tout d’abord rendre hommage à feu Gilbert Raquez, éminent expert belge et ex-Directeur de l’Académie Royale des Beaux-arts de Tournai, décédé en 2004. Il a cru en ce projet et l’appuya de toutes ses forces auprès des autorités belges compétentes, notamment l’APEFE.

Cet ambitieux projet n’aurait pas non plus connu sa pleine réussite sans l’amitié profonde que nous avons tissée avec Daniel Sotiaux, ex-délégué de Wallonie Bruxelles au Maroc et qui fut un interlocuteur attentionné.

Enfin ce département est tributaire de l'appui personnel de Monsieur Mohamed Achaari, Ministre de la Culture entre 1998 et 2007, qui a voulu ouvrir l’INBA sur d'autres horizons et intégrer la BD en tant que formidable outil d'expression artistique et de communication dans la plaquette pédagogique de l'institut.

Je voudrais, par ailleurs, rendre hommage à Denis Larue, qui a su encadrer par sa compétence et son dévouement la première promotion du département de BD et à Renaud De Heyn qui a pris sa relève et poursuivi jusqu'aux derniers instants de sa mission son travail de formation des étudiants qui ont opté pour cette spécialité.

Après le lancement de la filière, le projet du fanzine Chouf a vu le jour pour lier la formation des étudiants à la diffusion, donnant ainsi une nouvelle impulsion au département BD à l’INBA.

Il y’a eu ensuite le Festival International de la Bande Dessinée qui a été créé non seulement pour accompagner la création d’une section spécialisée dans l’enseignement de la Bande Dessinée au sein de l’INBA mais aussi et surtout pour promouvoir le monde du neuvième Art dans notre pays, stimuler et encourager ses créateurs et ses amateurs.

Ce festival est une entreprise ambitieuse née d’une volonté commune maroco-belge pour mettre en valeur le travail pédagogique et artistique réalisé dans le département BD et créer, à Tétouan, un forum annuel dédié au neuvième Art, un lieu de prédilection pour tous les professionnels et amateurs de la bande dessinée, ou tout simplement, un espace de rencontre et de lecture pour le jeune public passionné, qui ne trouve pas suffisamment de publications BD dans les rayons de librairies et les kiosques marocains.

Je tiens à remercier tous ceux qui ont participé de près ou de loin au succès de cette expérience et surtout l’Agence pour la Promotion et le Développement du Nord, qui a soutenu cette expérience à différents stades, soit par l’aide financière au département ou par le soutien aux différentes éditions du Festival international de la bande dessinée de Tétouan.

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Je remercie également nos partenaires, l’Institut français et l’Institut Cervantès, qui ont contribué à la réussite de cette expérience et qui collaborent toujours avec nous que ce soit pour le festival ou pour d’autres activités artistiques. Un autre grand merci aux professeurs de l’Institut, pour leurs efforts et leur contribution à la réussite de ce grand projet et spécialement le professeur Said Nali, Chef du département de bande dessinée et directeur du festival, qui a contribué au développement de la filière et ouvert de nouveaux horizons au festival via son travail au sein de l’association «Chouf» qu’il préside.

Sans oublier Monsieur Jaouad Diouri, directeur du festival dans sa quatrième, cinquième et sixième éditions et qui a su diversifier la programmation, développper la coopération internationale et élargir le cercle des pays participants.

Abdelkrim Ouazzani Directeur de l’Institut National des Beaux-arts de 1997 à 2014

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Les régions du Nord, ont toujours été le berceau des pratiques artistiques. La succession de civilisations et la position géographique au pourtour de la méditerrané a permis au

Nord de s’ouvrir sur la culture et l’art plastique plus précisément.

Plusieurs générations de peintres se sont succédé pour former des courants qui ont marqué l’histoire des Arts plastiques dans le Nord du royaume. C’est ainsi que l’INBA témoigne de la diversité des expressions artistiques, où la bande dessinée est perçue comme une filière désormais émergente qui séduit de plus en plus des jeunes talents avides de s’exprimer à travers l’Art.

Consciente de l’importance que revêt la culture dans le développement d’un territoire, L’Agence pour la promotion et le développement du Nord est considérée comme étant un acteur incontournable dans le rayonnement artistique et culturel des villes du Nord.

En effet, on note avec fierté, qu’en 2005, l’APDN avait contribuée à la mise en place de la branche de la Bande Dessinée en tant que spécialité au sein de l’INBA, cette contribution consistait en l’aménagement et l’équipement de ladite section.

De même, il est à souligner que l’appui soutenu de l’APDN à différentes activités organisées à l’INBA, et aux différentes éditions du festival international de la Bande dessinée, ainsi que celui de la gravure, et bien d’autres événements culturels à Tétouan ne font que confirmer la conviction de l’Agence que le produit culturel est porteur de grandes dynamiques socio-économiques et culturelles à forte valeur ajoutée.

Ceci s’est traduit, par l’accompagnement soutenu de l’APDN aux différents projets et produits culturels, durant cette dernière décennie, et ce n’est que l’expression de la consolidation des acquis en matière d’accompagnent au développement durable et un levier pour l’excellence ; Vu que l’on se trouve face à une niche à valoriser davantage, car c’est un secteur d’avenir pour la région du Nord et la ville de Tétouan en particulier.

A titre d’exemple, et dans cette même dynamique incitative à travers le développement des vocations, s’en est suivi une expérience similaire engagée par l’APDN, qui cette fois avait porté sur l’équipement de la section arts graphiques du lycée Imam El Ghazali de cette même ville.

On se trouve aujourd’hui comblés, surtout si on voit les résultats satisfaisants de cette expérience africaine aux portes de l’Europe, à l’instar de ce qui a été capitalisé en la matière par tous les initiés à cette expression artistique au niveau national et qui se trouvent de nos jours sollicités en tant que professionnels à l’international.

Ainsi, on a assisté très vite à la naissance d’un collectif d’artistes marocains considérés pionniers et qui font école dans cette nouvelle branche version Maroc moderne qui creuse de jour en jour des écarts avec les anciennes pratiques.

Ces jeunes talents devenus aujourd’hui incontournables sur la scène artistique contribuent au développement de l’industrie artistique au niveau national, et sont une source qui développe les petites entreprises ayant pour vocation le produit culturel.

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Ceci n’étant que dans le prolongement de la vision stratégique de l’APDN qui vise à enrichir davantage la créativité Nationale, en matière d’industrie culturelle, des nouvelles générations. Et qui repose sur la démarche de repositionnement de la ville de Tétouan sur le créneau de la peinture et des arts apparentés.

Car l’omniprésence de la peinture dans le paysage culturel de Tétouan et le rôle emblématique qu’a joué l’Ecole National des Beaux Arts - devenue INBA- dans l’apparition des principaux courants artistiques au Maroc sont des éléments qui confèrent à Tétouan une vocation innée pour l’art et un potentiel incontestable pour le développement du tourisme culturel dans la région.

Mounir El Bouyoussfi Directeur Général de l’ Agence pour la Promotion et le

Développement Economique et Social des Préfectures et Provinces du Nord du Royaume

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D’histoire récente, les premières productions de la bande dessinée au Maroc remontent aux débuts des années soixante sous forme d’illustrations en quelques planches dans

les journaux (La fin, saleté de santé, Jil Al Hazikine, Tekchab de Hamid Bouhali et Satirix avec Mohamed Filali ) et de contes épisodiques.

Satirix et Tekchab deux journaux illustrés, créé par Bouhali et Filali

En 1979 apparaîtra l’album faisant l’éloge du régime Il était une fois … Hassan II (de Serge Saint-Michel, Bernard Duffosé et Philippe Sternis. Editions Fayolle). Mais ce sont les classiques en provenance de France à caractère éducatif ou récréatif (Zambla, Bleck, Tintin, Asterix, Popeye, Schtroumpfs, Titeuf, Mickey, Pif, Picsou etc.) qui séduisent la jeunesse marocaine et nourrissent leur imaginaire. Ils vont par ailleurs jouer un rôle important dans la consolidation du niveau de la langue héritée du colonialisme et constituer un outil pédagogique non négligeable dans la formation de la nouvelle élite du Maroc indépendant.

La BD marocaine en devenir

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Mais avec la politique d'arabisation instituée en 1984, la bande dessinée arabe (provenant pour la plupart des pays du Golfe et du Liban) va envahir le marché pour concurrencer et même supplanter la bd francophone. Cela n’empêchera pas le retour de la BD francophone comme outil d’apprentissage du français dans les manuels scolaires (série A grands pas lancée par le MEN qui ne durera que quelques années).

Ce n’est qu’au début des années 90 que le 9ème art va entrer en scène au Maroc avec la publication de l’encyclopédie en trois volumes Histoire du Maroc, en 1993, (illustrée par Ahmed Nouaiti et écrite par Wajdi et Mohamed Maazouzi). Dans la même lignée, onze ans plus tard, Meryem Demnati, chercheure universitaire, publie sous les auspices de l’Institut Royal de Langue Amazigh (ICRAM) en langue berbère Tagellit nayt ufella (La reine des hauteurs), album d’une vingtaine de pages racontant les aventures d’une jeune reine contre les forces du mal.

Le début du siècle va connaître une nette progression et diversité dans la publication de la bande dessinée au Maroc. Mohamed Benmessaoud, professeur des arts plastiques à Tanger, publie sous l’égide de l’UNESCO des albums à caractère pédagogique, Ecole de qualité en 2004 et Notre vie notre environnement en 2006.. Il a aussi co-publié avec A Chbabou, une série de 16 fascicules sur l’histoire de l’Islam en langue arabe. Animé par un sentiment de retour aux sources et de mise en valeur de la culture marocaine, Larbi Babahadi, consacre sa retraite à sa vocation retrouvée de la bd et co-publie avec Mahfoud Babahadi deux albums L’haj Belaïd, (2007, éditions Sapress) et les racines d’argania (2008, éditions Babahadi) où il met en action des personnages (divinités) de la mythologie d’Afrique du Nord. C’est pour l’auteur, un moyen de « réconcilier les marocains qui ne lisent plus à la fois avec leur culture et leur mémoire ».

Série « A grands pas », publication du MENLes racines d’argania de Larbi Babahadi et Mahfoud Babahadi (2008, éditions Babahadi)

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Dans le registre de la bd sociopolitique, l’on peut noter les publications d’Abdelaziz Mouride, ancien détenu politique, On affame bien les rats (Éditions Tarik, 2000), suivi de le coiffeur (Éditions Nouiga, 2004) où il relate les atteintes aux droits humains et la lutte des prisonniers politiques pour les libertés démocratiques. Dans le même répertoire, Mohamed Nadrani initie ses personnages dans la cellule de détention secrète du complexe de Rabat (1976/84) et publie son autobiographie Les Sarcophages du complexe (Éditions Al Ayam, 2005) puis l’épopée du prince du Rif L’émir ben Abdelkrim en 2008.

Ce regain d’intérêt à la bd se concrétise par la participation de plumes françaises installées au Maroc en la personne de Jean François Chanson, édité par Nouiga, qui, depuis quelques années fait un effort non négligeable pour soutenir le rythme. Il publie Maroc Fatal en 2007 (prostitution, migration, corruption) suivi de Nouvelles maures en 2008. Il vient de parachever un album collectif qui fera sa parution officielle au festival de Tétouan en mai 2010, la traversée, l’enfer du Hrig écrit et illustré par un panel d’auteurs et de dessinateurs du Maroc (dont certains diplômés de l’INBA) et de France qui rapportent des témoignages authentiques d’aventures d’immigration clandestines. Il travaille actuellement sur Le trésor des Oudayas, dessins du belge Dominique Meuniet. Du même éditeur est paru en 2008 l’album Tempête sur le Bouregreg (Dessins : Hassan Maanani, diplômé de l’INBA, Scénario : Miloudi Nouiga ).

Les Sarcophages du complexe (Éditions Al Ayam, 2005) et prince du Rif L’émir Ben Abdelkrim Abdelkader (Éditions Al Ayam, 2008)

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A cela il faudra ajouter les contes illustrés pour jeunes associant généralement des lauréats de l’INBA (2009, la forêt raconte en arabe, de Youssef Raihani, dramaturge, illustré par Ismaïl Oulhaj Alla, promotion BD 2008) ainsi que les dizaines d’albums de projets de fin d’études des lauréats de l’INBA depuis la création de la branche de BD en 2003 et qui sommeillent dans les rayons de la bibliothèque de l’Institut.

La contribution des bédéistes marocains ne se limite pas au pays, bon nombre d’entre eux commencent à se faire une place dans les grandes maisons d’édition en France et en Belgique. Citons-en Youssef Daoudi (éditions Casterman, 3 albums), Afif Khaled (éditions Soleil, 4 albums), Mehdi Boualam (Bruxelles, participation à des salons en France et en Belgique, premier prix BD de l’UE en 2009). Bien d’autres dessinateurs de différentes nationalités ont mis le Maroc en BD. Mentionnons-en Daphné Collignon, résidente au Maroc ( Coelacanthes, Le rêve de pierres, éditions Vents d’Ouest), Denis Larue (La maison d’éther, éditions Futuropolis, 2009) où il raconte ses deux années passées à Tétouan lorsqu’il était venu lancer la section BD à l’INBA.

C’était en effet en octobre 2003, suite à un partenariat avec la délégation de Wallonie Bruxelles à Rabat, que la branche BD a été créée à l’Institut National des Beaux Arts à Tétouan et qui, depuis, a livré pas moins de vingt jeunes professionnels en BD. C’est l’unique filière du genre en Afrique. Dessin, anatomie, découpage, scénario, synopsis, projets de fin d’études, sont autant de pivots autour desquels s’articule la formation qui permet d’alimenter le marché en professionnels de haut niveau du 9ème art. Bon nombre d’entre eux sont d’ailleurs recrutés chaque année par la société de jeux vidéo Ubisoft à Casablanca. Curiosité de l’histoire, c’est à Tétouan que nous avons déniché la plus ancienne BD marocaine qui nous est parvenue éditée en arabe Sakr Assahra (Le Faucon du désert) d’une vingtaine de pages datant de 1950 (sans mention de l’auteur).

En somme, au terme de ce tour d’horizon bien non exhaustif, la bd marocaine semble avoir de beaux jours devant elle. En effet, la phase de gestation actuelle est accompagnée d’efforts non négligeables de promotion du 9ème art au Maroc. Trois événements majeurs lui sont entièrement consacrés. D’abord le festival international de la bd de Tétouan, qui est à sa sixième édition (24-29 mai 2010) est en passe de devenir un rendez vous international de haut niveau qui rallie formation, diffusion et mutualisation des compétences. Depuis sa dernière édition (mai 2008) en effet, bon nombre d’ateliers précédent le festival (scénario, fresque, animation), un concours jeunes talents de moins de trente ans réunit une vingtaine de bédéistes du pourtour de la méditerranée, des rencontres entre professionnels du métier permettent de se pencher sur l’état de l’art dans le pays en plus des expositions qui, cette année quitteront les murs de l’INBA pour aller à la rencontre du grand public.

Sixième édition du festival international de la bd de Tétouan (24-29 mai 2010)

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Un hommage particulier sera rendu à la bd et au film d’animation en Afrique. Vient ensuite le festival universitaire de la BD (organisé tous les mois de juillet par l’université Ibn Tofaïl à Kénitra) qui a trois éditions à son actif et qui « vise à promouvoir la bande dessinée comme outil didactique, à faire connaître les œuvres des jeunes auteurs et à faciliter les échanges avec les professionnels du neuvième art et les éditeurs ». Le dernier festival était consacré à la bd et les sciences. Enfin, le festival de Fès la ville en bulles, organisé par l’Institut Français de Fès qui « ambitionne de mettre en valeur ce genre artistique et de créer un espace d’animation, de discussion et d’échange autour de la bande dessinée».Un autre outil de promotion de la bd au Maroc, et non des moindres, fait son chemin. C’est le magazine spécialisé. D’abord, avec la revue Chouf, éditée par l’association qui porte le même nom (voir blog chouflabd) créée dès le premier festival de Tétouan par des professeurs et des étudiants de l’INBA, est à son quatrième numéro. Elle met en cases les plumes et les pinceaux des jeunes créateurs de l’INBA. L’association initiatrice de cette expérience ambitionne de promouvoir la BD au Maroc et dans la Région de Tanger Tétouan en particulier. Elle a à son actif plusieurs ateliers pour jeunes scolaires et diverses associations de la place. L’on s’attend d’ailleurs à ce qu’elle prenne en main l’organisation du festival de Tétouan à partir de la prochaine édition. Une autre expérience fort intéressante mais de courte durée hélas, est celle du magazine BédoMag dont le premier numéro est paru à Casablanca en avril 2009. Illustré de 48 pages, distribué et téléchargeable gratuitement, il rallie « humour, décalage et divertissement » selon les termes de Mehdi Laâboudi, directeur de publication. Financé entièrement par la publicité qui couvre à peine les frais d’impression, il a du cesser de paraître à son troisième numéro du 27 mai 2009. Belle et prometteuse tentative qui, espérons le, parviendra à passer le cap et pourquoi pas revenir en force. Le panorama n’est donc pas sombre. Les talents et les lecteurs sont là, reste à trouver les moyens de les rapprocher et les réconcilier notamment par l’encouragement d’une production abordable et à la portée du large public. En effet, le malaise réel est celui de la lecture, elle même victime des coûts exorbitants de l’édition et de la diffusion. Vendu à 100 DH, l’album reste hors de portée et, semble-t-il, ne rapporte rien à l’éditeur. Deux conditions à mon avis sont nécessaires pour conquérir le lecteur : d’une part trouver un compromis entre la qualité de l’édition et la bourse du lecteur potentiel et d’autre part créer des personnages typiques marocains puisés dans l’imaginaire collectif , capables de séduire et de tisser en même temps le lien avec la nouvelle société marocaine moderne émergente. Des tentatives sont en cours, vont-elles aboutir, à cela il faudra beaucoup de patiences et de persévérance.

Jaouad DiouriMars 2010

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Création du département bande dessinée

à l’INBA

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NBA : 70 ans d’enseignement L’INBA, est un établissement supérieur d’enseignement artistique sous tutelle du

Ministère de la Culture. Il forme des artistes et des créateurs. Sa vocation est de stimuler l’émergence de nouveaux talents, de former des personnalités créatives (artistes, designers, bédéistes…) pouvant mener des parcours différents au sein d’un large spectre de disciplines. Une équipe d’artistes et de professionnels confirmés assurent l’encadrement théorique, artistique et technique des études.

Formation: l’INBA offre trois filières d’enseignement: art, design graphique et bande dessinée. La formation est organisée en deux cycles comportant chacun deux années d’études.

Le projet pédagogique de l’Institut s’appuie à la fois sur une approche culturelle et artistique tout en favorisant la recherche et l’expérimentation. Les cours théoriques et les travaux pratiques sont consolidés par des stages, master class, visites sur le terrain et la réalisation d’un projet de fin d’études. L’ensemble de la formation est conçu pour accompagner les étudiants vers la gestion autonome de leur engagement artistique.

En sus de sa vocation pédagogique, l’institut participe activement à l’animation de la scène artistique marocaine: Il organise plusieurs événements par an et participe à plusieurs manifestations, aussi bien au Maroc qu’à l’étranger. Il a, par ailleurs, signé plusieurs accords de coopération, nationaux et internationaux pour promouvoir les échanges pédagogiques, culturels et artistiques.

Perspectives professionnelles: Un grand nombre d’artistes actuellement reconnus ont été formés à l’INBA de Tétouan et ses jeunes diplômés continuent de marquer le monde des beaux-arts au niveau national et international.

À côté de la carrière artistique, le diplôme de l’INBA donne accès à des champs professionnels variés : enseignement, médiation, communication graphique, publicité, édition, presse, graphisme ainsi qu’à tous les nouveaux métiers liés à la création numérique.

Ils peuvent, par ailleurs, exercer leur profession avec des statuts variés : indépendant, salarié (agences de presse, de communication, de design…), fonctionnaire de l’Etat (ministère de la culture, éducation nationale…) ou des collectivités territoriales.

L’INBA : 70 ans d’enseignement artistique

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1945/1957- Ecole préparatoire des beaux-arts

L’Ecole préparatoire des beaux-arts de Tétouan, qui donnera naissance plus tard à l’actuel INBA, a été fondée en 1945 par le peintre espagnol Mariano Bertuchi et domiciliée dans le bâtiment qui abrite aujourd’hui l’Ecole des Arts et Métiers. L’école sera créée officiellement par dahir, le 27 novembre 1946.

1957/1993- Ecole nationale des beaux-arts

En 1957, le Roi Mohammed V inaugure un nouvel établissement, «l’Ecole Nationale des Beaux-arts », dirigée cette fois-ci par un artiste marocain, Mohammed Serghini, et dotée d’un corps pédagogique marocain composé de la première promotion de l’école (Meghara, Fakhar, Ouazzani, Bouzid, Ben Seffaj…). La nouvelle direction œuvrera à la marocanisation de l’institution et à la formation de nouvelles générations d’artistes marocains.

1993- Institut national des beaux-arts

En 1993, l’école est élevée au rang d’établissement supérieur, par un décret du ministère de la culture, sous l’appellation « Institut national des beaux-arts ». Le décret redéfinit les missions de l’institut et lui confie la mission de former des cadres supérieurs dans le domaine des arts plastiques et arts appliqués.

L’INBA n’a cessé depuis d’étoffer ses offres de formation. Il crée la filière « design» en 1993 et l’option « bande dessinée » en 2000.

Quelques dates repères

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Le département bande dessinée a été mis en place à l’INBA, en 2000, dans le cadre de la coopération entre le Ministère de la Culture et la Délégation Wallonie-Bruxelles à Rabat.

Ce sera le premier département du genre dans le monde arabe et en Afrique.

L’ambition du département peut tenir en une seule formule : former des « auteurs complets ». Cette notion implique une parfaite maîtrise de tous les aspects de la narration graphique, d’où la nécessité d’offrir aux étudiants un enseignement rigoureux et diversifié pour qu’ils acquièrent une autonomie créatrice dans le domaine du récit en images.

A cet effet, ils sont initiés aux techniques de cadrage, de découpage, de lettrage, de scénario, de dessin, de gravure d’infographie, d’édition etc. afin de les amener progressivement à concilier les exigences de la production d’images narratives avec leur propre univers et leurs choix personnels.

L’INBA ne se contente pas d’assurer une formation artistique et professionnelle au sein de ses locaux, il œuvre également pour la promotion et la diffusion de la bande dessinée à Tétouan en particulier et au Maroc en général. L’objectif étant de donner au 9ème art la place qu’il mérite comme moyen d’expression artistique.

Filière «bande dessinée»

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Le projet de créer une section BD à l’INBA revient à son directeur, Aldelkrim Ouazzani et au Ministre de la culture de l’époque, M. Mohamed Achaari.

Le premier a conçu le projet, le second lui a donné sans soutien sans faille.

Il s’agissait pour l’INBA d’ouvrir ses formations aux aspirations des étudiants désireux d’apprendre les métiers artistiques tout en se sentant particulièrement en harmonie avec la création contemporaine. Il s’agissait aussi d’ouvrir l’Institut, à côté des métiers traditionnels des beaux-arts, aux métiers de l’information. Le choix de développer une section BD c’est donc très vite et très logiquement imposé, car la bande dessinée peut être considérée comme une des meilleures écoles de la communication qui synthétise en permanence la force (et l’inventivité) du dessin à la pertinence de l’écriture. La BD est un métier de la rigueur extrême où l’auteur doit être à la fois scénariste, plasticien, metteur en page, avoir le sens du découpage, écrivain capable de raconter des histoires simples et attachantes, journaliste, pédagogue, …

La décision prise, restait à la mettre en œuvre et surtout à trouver les moyens de construire une formation de haut niveau.

La première étape fut l’élaboration du programme de formation. Ne disposant pas à Tétouan de spécialistes de la bande dessinée, quelques experts étrangers furent appelés en consultation. Le résultat fut l’élaboration du programme des cours étalés sur 4 années. Un cursus qui allait à la fois tenir compte des compétences à acquérir (savoir dessiner, savoir écrire, savoir découper une histoire, …), mais aussi des ressources humaines disponibles (professeurs de dessin, de cinéma, d’écriture, …). Il convenait d’emblée d’être professionnel et crédible en donnant une formation de haut niveau inspirée de ce qui ce fait dans les meilleures écoles de France et de Belgique notamment.

Cette tâche accomplie, les professeurs marocains identifiés, il restait à chercher des appuis auprès des coopérations étrangères pour « combler » les vides.

C’est à ce moment que l’INBA et le Ministre de la culture se tournèrent vers la Communauté française de Belgique connue internationalement pour la qualité de sa production BD. Très vite j’ai été séduit par l’Institut National des Beaux-arts de Tétouan et par l’énergie de son directeur.

Délégué de la Communauté française Wallonie-Bruxelles et de la Région Wallonne au Maroc, entre 1999 et 2004, Daniel Sotiaux a pleinement contribué au projet de création du département de bande dessinée à Tétouan en 2000, ainsi qu’au lancement du Festival International de la Bande dessinée de Tétouan. Ce dernier lui rendra hommage lors de sa 8ème édition.

Daniel Sotiaux

Témoignages

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Avec lui et ses collaborateurs nous allions élaborer un des projets les plus cohérents de la coopération Wallonie-Bruxelles – Maroc. Un projet qui allait se concevoir dans un tout cohérent : enseignement, formation des futurs professeurs, réflexion sur les débouchés, création d’activités de promotion autour de la BD dont un Festival et une revue, « Chouf ».

Pour soutenir cette action cohérente, Wallonie-Bruxelles allait, via son agence de coopération, l’APEFE, détacher pour une période de 4 ans un professeur spécialiste de la BD (en fait deux professeurs se sont relayés: Denis Larue durant les deux premières années, Renaud De Heyn pour la fin de la mission)

L’idée étant de confier à ces enseignants belges, outre l’enseignement aux étudiants, la formation des pédagogues qui, une fois la période d’accompagnement achevée, allaient reprendre la formation et l’enseignement.

Denis et Renaud ramenèrent de leur séjour non seulement des amitiés fortes, mais aussi des histoires publiées maintenant depuis quelques années. Vinrent aussi des auteurs comme Marianne Duvivier, Stephen Desberg et Cossu et des infatigables animateurs de la BD comme Jean Auquier qui anima plusieurs moments des festivals de la BD créant notamment une très belle exposition sur « l’image du Maroc dans la bd belgo-française ».

Très vite des résultats encourageants furent enregistrés.

L’assise pédagogique confirmée, les responsables de l’Institut allaient pouvoir s’attaquer aux autres problèmes. Car réussir une formation n’est rien si elle n’est pas accompagnée de la possibilité pour les jeunes lauréats de trouver, une fois leur diplôme en main, des débouchés et de l’emploi. Conscient que la BD était un genre peu connu au Maroc, la direction de l’INBA et les responsables de la section BD estimèrent devoir travailler à faire connaître aux professionnels du secteur des possibilités offertes par la BD en proposant des collaborations permettant de développer les potentialités du medium (des projets furent

ainsi entrepris avec, par exemples, les services des pompiers et de la protection civile avec lesquels furent élaborés des dizaines de planches BD : chaque planche mettant en évidence un danger ou une pratique de sécurité à pratiquer au quotidien ou encore, autre projet réalisé cette fois avec le PNUD, l’élaboration et l’édition d’une BD de vulgarisation sur « Jeunes et objectifs du millénaire pour le développement »).

Aujourd’hui toutes ces activités se poursuivent et Tétouan est en passe de devenir un des lieux importants de la BD internationale. C’est en tout cas une création unique en Afrique puisque tous les paramètres nécessaires à la réussite

du projet ont pu être réunis.

De ces moments, je conserve le souvenir de moments précieux ceux des échanges, des rencontres avec les jeunes dessinateurs.

La première édition du festival eu lieu en 2004 quelques semaines avant que je quitte le Maroc. D’auteurs artistes rejoignirent le groupe des Belges. Je pense en particulier à Tembo qui fit le voyage de Kinshasa : la BD d’Afrique noire rencontrant celle du Maroc !

Abdelkrim Ouazzani avec le Ministre de la culture M. Mohamed Achaari lors de l’inauguration de la première édition du festival de BD de Tétouan en 2004

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Et plus tard, alors que j’étais en poste en Roumanie, c’est Lamisse Khaïrat qui vint de Tétouan présenter son travail à Salon de la BD de Constantia. Roumanie qui fut elle-même invitée à Tétouan quelques mois plus tard.

Une fois de plus par l’art, et par cet art particulier, des échanges nouveaux étaient possibles.

Ces souvenirs si rapidement rassemblés ici ont 10 ans et plus. Depuis, de loin en loin, mais avec l’amitié qui caractérise les relations vraies, des nouvelles me viennent de Tétouan. Quelle joie d’apprendre que le projet, je devrais dire le rêve, de créer une formation BD à l’INBA et plus largement une animation BD à Tétouan, vit toujours.

Cette aventure est une des plus belles parmi celles que j’ai pu vivre dans ma vie de représentant Wallonie-Bruxelles à l’étranger.

Merci à tous ceux qui m’ont permis de vivre des moments aussi riches.

Renaud De Heyn, Jean Auquier, Daniel Sotiaux, Hassan Echair, entourés des étudiants du département BD à la première édition du FibaDet en 2004

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Tout avait commencé comme il se doit, au Centre Belge de la Bande dessinée… Nous étions au début de l’automne 2003. Les responsables des Relations internationales de

la Fédération Wallonie-Bruxelles (WBI) m’avaient proposé un rendez-vous avec Abdelkrim Ouazzani, un artiste de grand renom de passage à Bruxelles. Jusque-là, j’ignorais complètement qu’il était également directeur de l’INBA de Tétouan et qu’une classe de bande dessinée avait vu le jour un peu plus tôt dans cette dynamique institution.

De notre rencontre, ce jour-là, naquit le projet d’une conférence. Une invitation relayée par Daniel Sotiaux, Délégué de la Fédération Wallonie-Bruxelles à Rabat. Au début décembre, sous un ciel presque belge – frisquet et humide – je débarquai pour la première fois au Maroc… Enfin, presque. Mes seuls souvenirs, c’étaient les escales techniques des vénérables DC6 de la Sabena, sur l’ancien aéroport de Casa, au temps du Congo belge. Et justement, c’est le même soir de décembre 2003 que naquit l’idée d’organiser un festival international de bande dessinée reliant le nord et le sud, Tétouan étant au centre de la partie.

Le sujet de cette conférence de 2003 rehaussée par la présence exceptionnelle du Wali de Tétouan : « La bande dessinée, œuvre ou outil ? ». Le langage de la bande dessinée est tout à la fois un mode d’expression artistique aux potentialités impressionnantes et un outil de communication universellement utilisé… dès lors qu’on regarde de plus près tout ce qui, autour de nous, se lit ou se découvre au moyen d’images réunies en séquences scénarisées.

Etudier le langage de la bande dessinée au Maroc, c’est bien. S’initier aux joies du plus narratif des arts plastiques, c’est formidable mais… encore faut-il que le public susceptible de s’intéresser aux récits créés en bande dessinée existe ! Pour le toucher et le séduire, il existe plusieurs moyens dont l’édition et l’organisation d’événements ne sont pas des moindres. C’est le constat que nous avons fait le soir même de cette conférence. Nous : Abdelkrim Ouazzani, Daniel Sotiaux et moi, réunis chez Renaud De Heyn qui enseignait la BD encore pour quelques mois à l’INBA.

Tous, nous savions que cette conférence devait s’inscrire dans une démarche de longue haleine. C’est ainsi que les deux années suivantes, j’ai eu le privilège de retourner à Tétouan à l’occasion de Rencontres internationales réunissant là auteurs de BD venus du Sénégal ou de RD Congo, de France, d’Espagne ou de Belgique. A chacune de ces étapes, j’ai découvert avec satisfaction – et quelquefois beaucoup d’enthousiasme ! – les travaux réalisés par les étudiants de l’INBA, publiés dans Chouf.

Directeur du centre belge de bandes dessinées, Jean Auquier a participé à la programmation des deux premières éditions du Festival International de la Bande Dessinée, où il a donné des conférences tout en travaillant sur la production d’une exposition de bandes dessinées ayant pour thème «Aventures du Maroc au Royaume de la bande dessinée».

Jean Auquier

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Pas plus qu’en Belgique, toutes celles et tous ceux qui ont suivi ou suivent encore des cours de bande dessinée à Tétouan ne deviendront des auteurs reconnus. Certains, certaines, oui. J’en suis convaincu. Parce qu’ils ont compris que sans la ténacité les plus beaux talents ne s’expriment pas longtemps. Mais en tout cas, tous seront devenus les ambassadeurs d’une discipline artistique devenue adulte et appréciée sous différents formats, un peu partout de par le vaste monde. Nul doute que dans un pays où l’écriture elle-même est calligraphie, le Neuvième Art ne soit pleinement à sa place. Il était une fois, à Tétouan…

Aziz Oumoussa, Renaud De Heyn, Daniel Sotiaux, Nadia Raviscioni et Antonio Cossu

Denis Larue et les étudiants de département avec Stephan Desberg, scénariste de BD

L’auteur de BD Eric Lambé lors d’une rencontre avec les étudiants

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Au cours de l’année 1999, je reçois dans mon casier de professeur une proposition de voyage pour me rendre à l’INBA de Tétouan au Maroc. La Communauté Française de

Belgique cherche un expert BD. L’objectif de ce déplacement : la faisabilité de la création d’une filière Bande Dessinée au Maroc.

Durant mes deux premiers séjours à l’INBA, je suis accompagné par Gilbert Racquez, Directeur de l’Académie de Tournai. Il m’accompagne pour expertiser le côté administratif (programmes, professeurs, matériel,…). De mon côté, je rencontre les futurs étudiants, j’expose notre méthode de travail au sein de l’Atelier de Bande dessinée à l’ESA Saint-Luc de Bruxelles.Ces diverses rencontres me stimulent au plus haut point. Je postule pour le poste.

Tétouan, septembre 2000.

Fruit de la coopération entre la Communauté Française Wallonie-Bruxelles et le Maroc, une section « Bande dessinée » se créé à l’Institut National des Beaux-arts de Tétouan.

Le plus dur reste à faire : former des jeunes Marocains à la Bande Dessinée; des jeunes artistes motivés mais sans aucune référence de ce qu’est la Bande Dessinée et l’image narrative en général.

Sept candidats se présentent à l’examen d’admission. C’est la première fournée de bédéistes marocains. Des jeunes étudiants charmants, deux filles, cinq garçons, venant de tous les horizons du Maroc. Avec eux, et avec l’intermédiaire de l’apprentissage de la Bande dessinée, j’apprends, je découvre le Maroc, son contexte social, culturel, religieux. J’essaye de comprendre comment tout cela fonctionne. Côté pratique, pédagogique, je tente de former un groupe de professeurs motivés avec lequel je peux travailler.

En s’engageant dans cette option, les étudiants n’ont pas ou très peu réfléchi aux sujets des histoires qu’ils devraient un jour raconter. C’est donc dans un contexte délicat que je tente de les amener à parler de sujets qui les interpellent, qu’ils côtoient au quotidien et ce, sous toutes les formes: de manière humoristique, caricaturale, réaliste et dans tout les genres : science-fiction, policier, western… Abdelkrim Ouazzani, directeur de l’école me met en relation avec Mr Ahmed Housni qui s’occupe à l’époque du Festival du cinéma à Tétouan. Grâce à lui, les étudiants ont une autre vision du scénario. Son aide me sera précieuse tout au long de mon séjour.

Enseignant de bande dessinée à l’Ecole Supérieure des Arts Saint-Luc à Bruxelles, Denis Larue a veillé de près sur les premiers pas de la bande dessinée à l’INBA de Tétouan, que ce soit au niveau pédagogique ou encore celui de l’organisation. Dans le cadre de sa mission de coopération, il a supervisé pendant deux ans (2000-2002) la formation de la première

promotion du département, la publication du premier numéro du magazine Chouf en plus de l’organisation d’un ensemble d’expositions et activités au profit de la filière. Un hommage lui a été rendu lors de la 6ème édition du Festival International de la Bande Dessinée en 2010.

Denis Larue

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Les premiers mois se déroulent agréablement. Je suis motivé plus que jamais avec la petite équipe d’étudiants que j’apprends à mieux connaître. Ils ne sont pas nombreux, j’ai beaucoup de temps à leur consacrer. J’ai les clés de l’école, je rentre et je sors comme chez moi, le samedi, le dimanche, j’ai leur GSM, je les appelle, je les motive, je leur apprends la Bande Dessinée, le français pour certains… la plupart du temps, les deux.

J’enseigne autrement, différemment, j’improvise et j’aime cela. Je pense à créer un Festival de BD. Mais c’est trop tôt. Il faut d’abord produire.

Pour enrichir l’apprentissage de la formation, des professionnels viennent nous rendre visite. Stephen Desberg, Eric Lambé, Jean-Philppe Stassen parlent de leur travail, mais également critiquent les travaux des étudiants. Tous ces échanges sont fructueux.

En partenariat avec le Ministère de la Culture Marocain, Daniel Sotiaux, responsable de la Délégation Wallonie-Bruxelles, me propose de concrétiser le travail de l’atelier par une publication.

Lors de son deuxième séjour, Stephen Desberg vient nous aider à préparer les scénarios de la future revue.

Abdelkrim Ouazzani propose de l’appeler « CHOUF ».

La revue sera en Arabe et en Français. Il faut traduire les textes des histoires, et surveiller le sens de lecture. Ce n’est pas une mince affaire. On bosse dur. C’est intense, tout progresse très rapidement.

On trouve une imprimerie, un graphiste. Tout cela prend du temps, mais l’ensemble est sur la bonne voie.

Malheureusement, tous les scans, les fichiers seront perdus, suite à un mauvais formatage des ordinateurs de l’imprimeur. Rien n’a été sauvé. Il faut tout recommencer.

On participe au premier festival de la caricature à Chefchaouen en exposant nos planches de bande dessinée sur les grilles d’enceinte de la Kasbah. Une exposition dans la rue, c’est extraordinaire. Les passants (des paysans, des enfants, des vieux, des jeunes, …) s’arrêtent devant les dessins. Dommage qu’on n’ait pas filmé tout ce petit monde gravitant autour de ces grilles. ..

En octobre 2001, une nouvelle fournée d’étudiants arrive. Nous sommes maintenant une quinzaine d’élèves dans le département. Nous préparons l’exposition à la galerie des Oudayas à Rabat. Cinq jours pour monter l’exposition.

Les bandes dessinées exposées me paraissent déjà vieilles par rapport aux progrès des étudiants. Un an qui s’est écoulé entre l’expo et la réalisation des pages.

La cérémonie est très officielle et le vernissage se déroule dans un cadre magnifique. Le Ministre de la Culture est présent, la télévision, la presse et les petits fours. Une belle soirée.

Le lendemain, la presse est mauvaise. Le projet passe mal. Les sujets abordés sont trop noirs (drogue, corruption, passage du détroit). On m’accuse de manipuler les étudiants pour donner une mauvaise image du Maroc…Trop encré dans la réalité. Pour moi, c’est juste la réalité de mes étudiants…leur Maroc.

Nous prenons une claque, je suis blessé…

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A partir de là, nous allons devoir travailler sur des sujets plus neutres, plus didactiques, que ce soit pour les pompiers, pour la purification de l’eau, le tout, pour conscientiser les marocains des différents dangers qui les entourent.

En mars 2002, le numéro 1 de « Chouf » est enfin imprimé. Dans la foulée, nous participons à la « Foire du livre » et au premier « Salon du livre pour la jeunesse » de Casablanca. Nous essayons de nous faire connaître par la vente de la revue, ainsi que par les expositions. Lors de ces salons, on essaye de rencontrer des éditeurs et de proposer des planches de BD ou des illustrations. Difficile. Les éditeurs marocains sont peu nombreux et frileux à l’innovation.

En mai, pour des raisons familiales, je sais que je vais devoir rentrer en Belgique. Je n’ose pas l’annoncer à mes étudiants. J’ai l’impression de les abandonner. C’est très dur de les quitter après toutes ces aventures.

Renaud de Heyn prendra la relève pour les deux prochaines années et concrétisera le numéro 2 de « Chouf » et le premier Festival de BD. Mais également la formation des futurs professeurs qui devront prendre la relève du projet.

Quinze ans après, avec ma mémoire sélective, je ne garde que les bons souvenirs.

Des élèves qui deviennent des amis, des rencontres culturelles, des échanges à tous les niveaux, une chouette ambiance d’enseignement, de la confiance et du respect pour chacun d’entre nous.

C’est aussi grâce au soutien de plusieurs enseignants que nous sommes arrivés à concrétiser cette filière Bande dessinée. Je pense notamment à Hassan Echair (professeur d’infographie), pilier du département dès ses débuts, ainsi que Bouzid Bouabid (professeur de couleur et histoire de l’art), le tout chapeauté par le directeur de l’INBA, Abdelkrim Ouazzani. Et bien sûr, la Délégation Wallonie/Bruxelles en la personne de Daniel Sotiaux qui à soutenu le projet de A à Z et l’A.P.E.F.E. avec Philippe Mottet.

Denis Larue entouré de ses étudiants en 2001

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La possibilité d’enseigner la bande dessinée au Maroc m’a tout de suite emballée. L’idée de donner aux Marocains la possibilité de créer et de développer une narration graphique

avec son identité propre, alors que rien, ou presque, n’existait en ce sens, me semblait un peu fou, et surtout très beau.

Lorsque je suis arrivé aux Beaux-arts de Tétouan, les publications et les événements organisés et réalisés sous la houlette de Denis Larue lors des deux premières années de la section bande dessinée avaient porté leurs fruits. Le cursus était dans sa majeure partie établi, les professeurs choisis et une quinzaine d’élèves en avaient bénéficiés. De nouveaux candidats venaient des quatre coins du Maroc pour étudier la narration en image. Certains connaissaient les classiques de la bd franco-belge, d’autres avaient été nourris au manga japonais, d’autres encore, croyaient venir apprendre le cinéma d’animation et découvraient la bande dessinée. Tous étaient avides d’apprendre. Ce fut un régal d’être leur professeur. Les sources d’inspiration et les références étant limitées, développer la petite bibliothèque de bandes dessinées initiée par Denis Larue était essentiel. J’étais stupéfait par la vitesse à laquelle les étudiants assimilaient les nouveaux styles graphiques et narratifs pour se les réapproprier, développer leurs univers et partager l’intimité de leur imaginaire.

J’avais toute confiance dans les bases établies par Denis Larue et dans les capacités des étudiants pour finaliser la formation d’auteurs de bande dessinée. Mais l’édition de bande dessinée marocaine restait un défi majeur.

En Belgique et en France, de nombreux jeunes auteurs confrontés à la frilosité des éditeurs spécialisés avaient créé leur propre maison d’édition. Fort de cette expérience, il me semblait essentiel d’offrir aux étudiants les connaissances nécessaires pour qu’ils puissent s’éditer eux-mêmes. Chouf était l’outil adéquat. Il était important d’associer les étudiants à toute la chaîne de création du numéro deux. Nous avons démarché ensemble auprès des imprimeurs. Nous nous sommes partagés la mise en page en collaboration avec le cours d’infographie d’Hassan Echaïr. Nous sommes revenus à une production personnelle de récits, de styles et d’imaginaire et nous avons abandonné le travail de commande. Le livre qui en résulta fût une réussite dont chacun pouvait être fier. Mais sans être diffusé en librairie, il touchait un nombre très restreint de lecteurs.

Auteur de bande dessinée, illustrateur et scénographe, Renaud De Heyn a succédé à Denis Larue au département BD à l’INBA, dans le cadre d’une mission de coopération de deux ans (2002-2004). Il a supervisé la sortie du deuxième et troisième numéro du magazine Chouf et a fait de son mieux pour les publier, les commercialiser et les faire connaitre auprès des

lecteurs marocains. Il a, par ailleurs, contribué à l’organisation de la première édition du Festival International de la Bande Dessinée à Tétouan en 2004 et de toutes les activités organisées par le département.

Renaud De Heyn

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Développer l’édition de bande dessinée au Maroc alors qu’elle est quasi inexistante est indispensable pour assurer un avenir aux auteurs. C’est une tâche ardue mais aussi une chance phénoménale. Il y a un grand rôle à jouer. Le cours d’histoire de la bande dessinée portait sur les manières dont les âges d’or des différentes patries de la bande dessinée se sont développés. Il proposait un éventail de méthodes et de possibilités pour le Maroc. Il fallait tenter de nouvelles impulsions en ce sens. Toutes les chances étaient de notre côté grâce au soutien de Daniel Sotiaux et de la délégation Wallonie-Bruxelles, à l’aide de l’APEFE et de Philippe Mottet, à l’enthousiasme et à l’engagement du directeur de l’INBA, Abdelkrim Ouazzani, et au talent et à l’énergie des étudiants.

J’ai pris contact avec un distributeur pour que le numéro trois de Chouf soit disponible en kiosque. Il fallait tirer 3 000 exemplaires et rendre le livre accessible au plus grand nombre par un prix abordable en l’imprimant sur du papier journal. Lors de la venue de Jean Auquier, nous avons décidé de créer la première édition du Festival international de la bande dessinée de Tétouan. Toute l’équipe de l’école y a travaillé d’arrache-pied. Les soutenances de fin d’année et de fin d’études approchaient pour les étudiants comme pour les professeurs. Trois candidats à ma succession avaient été choisis pour m’assister et être formés. Rachid Belfkih, Nourdine Bouali et Saïd Nali, étaient associés de près au final de la mission de coopération belgo-marocaine pour prendre la relève.

Les nuits blanches pour l’accrochage des expositions, la mise en page, la finalisation et les corrections de Chouf, et tous les ajustements de dernière minute m’ont laissé des souvenirs impérissables de complicité avec les étudiants, malgré les inévitables heurts dus au stress et à la fatigue. L’INBA était une ruche en ébullition. L’imprimeur, malgré l’urgence et les problèmes techniques, parvint tant bien que mal à ce que le numéro trois de Chouf soit imprimé juste en nombre suffisant pour l’inauguration du festival, mais la vente en kiosque était devenue impossible. Le festival, inauguré par le ministre de la Culture fût une réussite. La bande dessinée était affichée partout dans la ville de Tétouan, des fresques bd réalisées par les étudiants s’étalaient sur les murs de la ville. Des auteurs et des expositions étaient venus d’Europe et d’Afrique rencontrer le public marocain et ses auteurs.

Ce fût le final en apothéose d’un parcours particulièrement riche en rencontres, en expériences et en découvertes. Ma participation à ces années fondatrices m’a énormément apporté. Je suis heureux de voir aujourd’hui que les graines semées lors de ces échanges grandissent également au sein de la section bande dessinée de l’INBA. Grâce à elle, la bande dessinée marocaine est chaque année un peu plus féconde en auteurs et en possibilités.

Renaud De Heyn, M. Mohamed Achaari et Mme Nezha Chekrouni à l’inauguration de la première édition du FiBaDet en

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La bande dessinée a connu une large diffusion dans la ville de Tétouan surtout dans les années 50’ et 60’. Elle était devenue peu à peu une passion chez les Marocains

et les Espagnols grâce aux nombreux lieux de vente qui ne se limitaient pas à l’époque aux librairies. On pouvait s’en procurer dans les kiosques, les boutiques et même sur les trottoirs.

Beaucoup de marocains, capables de lire la langue castillane, n’ont pas échappé à cette merveilleuse contamination qu’est la lecture des bandes dessinées. Cette nouvelle addiction -chez les enfants, les jeunes et même les plus âgés- a encouragé l’échange de BD entre ses amateurs ou encore sa location auprès de certaines personnes dans les quartiers. Cette large diffusion et de surcroit dans les différents milieux sociaux a assuré le succès et la popularité de plusieurs magazines de BD espagnols tels que Captain Treno, mortadelo y filemon…

Les enfants que nous étions dans les années 60 -mes amis et moi- étaient habitués à lire ces bandes dessinées. On s’identifiait aux personnages dotés d’un sens de l’humour et de l’aventure et nous étions émus par leurs dialogues éducatifs. C’est avec ces BD que nous avons appris la langue espagnole et développé nos imaginaires et notre sens artistique en reproduisant les illustrations et leurs personnages célèbres. Cela nous a été utile, par la suite, dans notre pratique du dessin et du coloriage, car il est difficile de trouver un plasticien de mon âge dont les premiers pas ne doivent rien à ces bandes dessinées.

La consommation des BD espagnoles a baissé dans les années 70, à cause notamment des changements qui se sont opérés à ce moment là : la propagation des dessins animés avec l’arrivée de la télévision et ses multiples chaînes dans tous les foyers tétouanais, l’apparition de nombreux magazines de BD (en français et en arabe) et spécialement ceux qui provenaient des pays du golf dans les années 80’ et qui ont conquis le marché grâce à leur prix avantageux. C’était aussi l'une des raisons qui ont retardé les débuts de l’expérience marocaine dans cette expression artistique.

L’idée d’enseigner la bande dessinée à l’INBA fera son chemin à la fin des années 90 et sera concrétisée lors d’une rencontre entre Mohamed Achaari, ministre de la culture et Daniel Sotiaux délégué de la Wallonie-Bruxelles, à l’ambassade de Belgique à Rabat. Le Ministre a exprimé son désir d’intégrer cet enseignement à l’INBA en collaboration avec la Wallonie Bruxelles sachant que l’expérience belge dans ce domaine est connue et reconnue à travers le monde grâce à ses auteurs et leurs publications tel qu’Hergé et son personnage Tintin.

Professeur à l’Institut National des Beaux-arts, Bouzaid Bouabid enseigne l’histoire de l’art et des civilisations, la peinture et le dessin. Il a enseigné l’étude des couleurs lors de la création du département BD et a participé à l’élaboration du programme pédagogique de ce dernier.

Auteur de plusieurs articles parus dans la presse marocaine notamment sur l’importance de ce nouveau département de bande dessinée.

Bouzaid Bouabid

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La première étape de cette collaboration sera une mission d’expertise et de consultation pour étudier la faisabilité de la création d’une filière BD à Tétouan. Elle sera menée par deux experts: Gilbert Racquez, Directeur de l’Académie de Tournai et Denis Larue, professeur de bande dessinée à l’Ecole Supérieure des Arts Saint-Luc de Bruxelles. Je me souviens d’avoir participé à une réunion d’étude organisée par ce dernier et des rencontres qu’il a organisées avec les étudiants pour mesurer leur degré d’intérêt pour la bande dessinée et leur disposition à l’étudier.

L’option BD sera créée lors de l’année scolaire 1999-2000. Dans le cadre d’une mission de coopération, Denis Larue assurera pendant deux ans, en coordination avec la direction et les professeurs de l’INBA, l’installation de cette nouvelle filière et la mise en place des programmes pratiques et pédagogiques pour assurer une formation professionnelle en bande dessinée au profit des étudiants de la filière.

Après le lancement des cours à l’INBA, un jumelage a été conclu avec l’Académie Royale de Tournai et plusieurs étudiants de la filière ont pu effectuer un stage à l’Académie. Ce jumelage a renforcé la collaboration et donné naissance à d’autres activités qui ont soutenu efficacement le succès et le développement de la filière. De nouveaux projets verront le jour tel que l’organisation du festival international de bande dessinée de Tétouan et dont l’idée fut évoquée lors d’une visite du ministre de la culture Mohamed Achaari accompagné d’Abdelkrim Ouazzani le directeur de l’INBA, à Bruxelles.

Suite au succès de cette expérience à l’institut, Daniel Sotiaux a déclaré qu'elle était l'une des meilleures collaborations entre le Maroc et Bruxelles et qu’elle a ouvert de nouveaux horizons à cette expression artistique au Maroc.

La première promotion de la filière était composée de sept étudiants : Said Nali, Nourreddine Bouali, Rachid Belfkih, Lamisse Khairat, Saed Tirizit, Iman Douayou, et Mohamed kharkhour ; et les premiers membres du corps enseignant étaient Denis Larue (BD et composition), Bouabid Bouzid (étude des couleurs), Ahmed Elhousni (scénario), Mohamed Larbi Boudrissa (dessin) et Abdesslam Eljaidi (perspective).

En 2003, les trois meilleurs étudiants de la promotion ont suivi une formation pédagogique afin d’assurer la continuité de la branche et désigner un successeur à Renaud De Heyn, à la fin de sa mission de coopération, en tant que professeur de bande dessinée et de composition. Ce sera Said Nali en 2005.

Depuis la création du département, les étudiants de la filière participent à de nombreuses expositions nationales et internationales et gagnent prix et distinctions. Ils participent également à l’organisation du festival de bande dessinée de Tétouan et auquel sont invités de nombreux artistes de renommée mondiale pour exposer, animer des ateliers et partager leurs expériences professionnelles.

Par ailleurs, un magazine de BD« Chouf » a été lancé et dont les trois premiers numéros sont parus en 2002, 2003,2004. Le quatrième, sous forme d’album collectif, a été publié en 2013 et comporte des histoires courtes réalisées par les étudiants et lauréats de la filière.

Bouzaid Bouabid, Denis Larue et les étudiants du département au Salon Régional du Livre de Tétouan

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Ils s’appellent Aziz, Jamal, Abdelilah, Ali, Houda, ils sont une dizaine de jeunes artistes, des artistes en herbe qui rêvent de devenir un jour des auteurs de bandes dessinées.

Si tout va pour eux, on pourra dire que la bande dessinée a un bel avenir devant elle. Le grand atout de ces jeunes est leur talent et de ce point de vue, ils n’ont plus rien à envier aux jeunes d’ailleurs. La force de la ligne, le geste, la graphie, le colorie, tout y est.

M. Ouazzani, le directeur de l’Institut des beaux arts de Tétouan, en éprouve de la fierté et ne s’en cache pas : « La réussite du festival de la BD revient à 70% au travail des étudiants ». Et de fait, les travaux que l’école expose à l’occasion du festival, sont là pour en témoigner.

Depuis l’ouverture de la branche BD au sein de l’INBA de Tétouan, beaucoup de jeunes, venus des quatre coins du pays, y suivent des cours sous l’encadrement d’enseignants marocains et belges.

Depuis, trois générations de lauréats en sont sortis. Le festival que l’Institut organise pour la seconde fois, leur donne l’occasion de s’exprimer et de côtoyer des professionnels étrangers dont des Belges, des Français, des Suisses et bien d’autres.

Le festival est également une sorte de levier pour leur école : « nous avons adopté une stratégie pour l’avenir qui comprend trois volets : l’enseignement, l’édition et le festival annuel » confie M. Ouazzani.

Parallèlement au festival qui est déjà bien lancé, on ne cesse d’étoffer l’enseignement et l’édition de la revue Chouf que l’école édite depuis trois ans.

Depuis un an, des cours de scénario et d’analyse visuelle sont dispensés à l’école mais la nouveauté de cette année est le travail de scénarisation effectué sur certaines œuvres du patrimoine arabe classique -telles que Kalila wa Dimna et Al Boukhala d’Al Jahid- et qui peuvent être adaptées à la BD. On travaille également sur des œuvres récentes notamment les nouvelles de Mohamed Zafzaf. « Le but est que les étudiants s’expriment à travers leur propre culture et apprennent à faire de scénarios dignes d’intérêt ».

Pionnier de la BD au Maroc, journaliste et ancien détenu politique (10 ans de prison dans les geôles marocaines de 1974 à 1984). En 2001, il raconte sa détention de façon originale sous forme de BD « On affame bien les rats ». Son deuxième album « Le coiffeur », paru en 2005, se déroule dans le Casablanca des années 60, dans le salon d’un

coiffeur et pour arrière fond les luttes politiques de l’époque.

Il a écrit l’article que nous reproduisons ici lors du 2ème festival international de bande dessinée de Tétouan (2005) et auquel il était invité. Le festival lui a rendu hommage lors de sa 8ème édition en 2014.

Abdelaziz Mouride (1949-2013)

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Il y a un problème cependant, l’édition. Le département en sait quelque chose. La revue Chouf n’arrive toujours pas à se faire une petite place au soleil. C’est la difficulté à laquelle l’institut entend faire face. « Nous allons nous ouvrir à d’autres talents pour intéresser le public et nos étudiants auront, par la même occasion, l’opportunité de se mesurer à d’autres et de s’en inspirer».

Pour l’heure et à l’occasion du festival, l’école a eu la bonne idée de s’ouvrir aux jeunes, aux écoliers notamment, en organisant des visites dans leur établissements pour leur parler de la BD et de son élaboration.

Il faudra sans doute du temps, beaucoup de temps pour espérer cueillir les fruits de ce travail, l’essentiel pour l’heure est de jeter la semence. C’est fait.

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15 de bande dessinée à Tétouan veut dire 15 ans de ma vie passés au cœur de cette expérience, tout d’abord en tant qu’étudiant de la première promotion de la filière BD à l’INBA, ensuite et progressivement en tant que professeur de bande dessinée, président de l’association « Chouf » et directeur du festival dans sa 7ème et 8ème éditions.

Mes débuts avec le neuvième art remontent à l’enfance. J’ai découvert, en cherchant dans les livres de mes grands frères, les tomes 1 et 2 de l’album « A grand pas », une bande dessinée inscrite au programme scolaire de l’époque, «les aventures de Tarzan» en version arabe ainsi que sur des magazines provenant des pays du golfe.

J’ai été tout de suite ébloui par ce trésor d’images et de personnages fictifs…

Je n’oublie pas non plus la première BD que j’ai dessinée -une histoire de Joha- dans le cadre d’un cours de dessin au collège : Une 1ère expérience marquante et un souvenir d’enfance gravé, à ce jour, dans ma mémoire…

A la création de la filière BD à l’INBA, j’étais déjà inscrit à l’institut. Je l’ai choisi comme spécialité sans hésiter ou penser aux débouchés professionnels de cette filière sur le marché du travail au Maroc. A chaque exercice avec mes professeurs, Denis Larue ou Renaut Dehayn, j’étais de plus en plus convaincu de mon choix.

Le département de BD était très actif : stages avec des scénaristes et dessinateurs de bande dessinée tels que Stephen Desberg, Eric Lambe, Jean-Philippe Stassen ou encore André Geerts, l’auteur de la série « Jojo »; participation et/ou organisation de plusieurs expositions et surtout création d’un fanzine de BD Chouf. Nous étions très heureux et fiers de publier nos histoires et de les voir lues par d’autres. C’était aussi une occasion de recueillir les remarques et les réactions des lecteurs.

Auteur et professeur de bande dessinée à l’INBA depuis 2005, lauréat de la première promotion du département BD en 2002, membre fondateur et Président de l’association « Chouf pour la promotion de la bande dessinée au Maroc», organisatrice du Fibadet depuis 2012.

Said Nali participe activement à la promotion et la diffusion de la BD à Tétouan aussi bien via l’enseignement que le travail associatif.

Said Nali

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L’idée de créer l’association Chouf m’a hanté depuis que Denis Larue a abordé le sujet et nous a parlé de l’importance d’une association qui regrouperait les lauréats du département BD. Alors étudiant en quatrième année, je me suis occupé des démarches administratives, mais cette première tentative a échoué vu la complexité des procédures administratives à ce moment là.

En 2005, j’ai rejoint l’INBA en tant professeur de BD. En sus d’assurer une formation professionnelle au profit des nouveaux étudiants de département et d’améliorer le niveau de chaque promotion, j’ai eu à cœur de reprendre le projet de création d’une association d’autant plus que les procédures administratives étaient devenues plus souples. Ce sera chose fait en 2006.

L’une de ses premières activités de l’association fut d’organiser des ateliers au profit des élèves des établissements scolaires. Elle a, par ailleurs, œuvré pour améliorer la communication entre les lauréats du département et les différent acteurs du domaine. Dans le cadre de festival, elle a encadré diverses activités avant de devenir, en 2012, l’organisatrice de l’événement sous l’égide de l’Institut National des Beaux-arts de Tétouan.

Ma relation avec le festival date de l’année de son lancement en 2004. Dans un premier temps, je me suis occupé des ateliers, des espaces d’exposition et des fresques; puis avec le développement des activités de l’association, mon rôle s’est étoffé et de nouvelles attributions m’ont été confiées (programmation, contacts, presse, budget…) et ce avant de reprendre la direction du festival en 2012, une grande responsabilité que je n’aurai pas pu assumer sans l’aide et le soutien de Monsieur Jouad Diouri, commissaire des 4ème, 5ème et 6ème éditions du festival.

J’ai également beaucoup appris auprès de Monsieur Abdelkrim Ouazzani, directeur de l’INBA, grand artiste et véritable chef d’orchestre de l’équipe du festival.

Said Nali et M.Mohamed Achaari lors de l'exposition collective organisée au Musée des Oudayas à Rabat en 2001

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Le magazine CHOUF est le premier fanzine marocain 100 % bande dessinée. Totalement intégré à la formation, il présentait le travail des étudiants des troisièmes et quatrièmes années du département BD. Depuis la mise en page jusqu’au choix du papier, CHOUF a entièrement été réalisé par les étudiants. Les sujets étaient entièrement libres et bilingues (arabe et français). Les couleurs (noir et blanc) et le nombre de pages étaient les seules contraintes en sus, bien entendu, des spécificités scénaristiques et techniques propres à la BD.

La bande dessinée est un médium à part entière, au même titre que le cinéma ou la littérature et ne s’adresse pas qu’aux enfants. Les histoires racontées par les étudiants étaient très différentes les unes des autres. Du cynisme au drame amoureux en passant par le conte, ces récits témoignaient de la vivacité de l’imaginaire marocain et de la volonté de ces jeunes d’exprimer une réalité, leur réalité.

Le magazine se voulait un échantillon représentatif et prometteur de ce que pouvaient produire ces jeunes talents plein d’énergie en sortant de l’école. Nous espérions faire de sa parution annuelle une tradition mais nous nous sommes heurtés à des problèmes de financement et de distribution. Aussi sa publication est-elle -à ce jour- irrégulière et sa diffusion limitée à une distribution gratuite à l’occasion de certaines activités culturelles ou à une diffusion, via le net, de copies numériques.

Le fanzine de BD « Chouf »

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Le numéro 1 du fanzine est paru en mars 2002 sous la direction de Denis Larue. Il contenait sept histoires réalisées par les sept étudiants de la première promotion du département (Said Nali, Saed Tirizit, Nourddine Bouali, Rachid Belfkih, Iman Douayou, Lamisse Khairat, Mohamed Kharkhour).

Le deuxième numéro est sorti en automne 2003 sous la direction de Renaud De Heyn. Il présentait dix histoires dont les auteurs étaient les étudiants de la première et deuxième promotion du département BD, (Said Nali, Saed Tirizit, Nourddine Bouali, Rachid Belfkih, Lamisse Khairat, Mohamed Kharkhour, Ahmed Rouissa, Redouan EL Hamouchi, Rafik Lamkouaf, Samir el Kaoukabi)

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La parution du troisième numéro, en été 2004, a coïncidé avec la première édition du Festival International de la Bande Dessinée de Tétouan. Il a été réalisé, sous la direction de Renaud De Heyn, par les étudiants de la deuxième et troisième promotion du département (Ahmed Rouissa, Redouan EL Hamouchi, Rafik Lamkouaf, Samir el Kaoukabi, Houda Lambarqui, Ali Slassi, Abddine Abdelilah)

Le quatrième numéro, paru en 2007, sous la direction de l’Association Chouf, a été fabriqué manuellement, en version petit format. Il présentait le travail de cinq étudiants du département (Issam El Asri, Redouan Chetuan, Ismail Oulhaj Alla, Abdelkrim Souri, Fatiha Boulamane)

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Le cinquième numéro, imprimé en 2013, sous la direction de l’Association Chouf, est un numéro spécial paru sous forme d’un album collectif, version petit format et en couleur. Il a bénéficié du soutien financier de la Wilaya de Tétouan dans le cadre de la 7ème édition du festival. L’album regroupe les travaux de dix-sept étudiants et lauréats du département (Mohamed Elkho, Ahmed khiri, Said Nali, Mariam Lakhdar, Houda El Arabi, Abdelkrim Souri, Sara Ghazouan, Afaf Bellaoui, Jihad Eliassa, Ismail Oulhaj Alla, Soukaina Mokhtari, Nadir Elarraoui, Zakaria Tmalah, Issam El Asri, Nabil Laouar, Youssef Ouazzani Thami, Sabra Ennili )

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2010-2011

- Said Nali- Saed Tirizit- Nourddine Bouali- Rachid Belfkih- Iman Douayou- Lamisse Khairat- Mohamed kharkhour

- Issam El Asri- Redouan Chetuan- Ismail Oulhaj Alla- Abdelkrim Souri

- Ahmed Rouissa- Redouan EL Hamouchi- Rafik Lamkouaf- Samir el Kaoukabi

- Maryam Rachidi Alaoui- Fatiha Boulamane- Batoule Badr Essafa Alimam

- Houda Lambarqui- Ali Slassi- Abddine Abdelilah

- Hajar Moussa- Achraf Regragui- Abderrahim Nidalha- Sara Ghazouan

- Aziz Oumoussa- Mohamed El-hassany- Abdelouahad Mahmoudi

- Rihab Kandi

- Mariam Lakhdar- Houda El Arabi- Zakaria Tmalah

- Ahmed khiri - Sabra Ennili- Youssef Ouazzani Thami- Fakhreddine Louhi- Afaf Bellaoui- Ayoub Khalifa- Abdellatif Elayyady- Soukaina Mokhtari- Mustafa Ameur

- Bouchra EL Ghoul- Moussa Lbiad- Nadir Elarraoui- Nidal Saikak- Oualid Rmaiche- Taha Moussaddak

2009-2010

2010-2011- Hind Acharki- Abdessamad Ouazzani- Omar Ait Sekkou Zaid- Khalid Eddaoudi- Adil Boulaich- Mohamed Lamsaouri- Nabil Laouar- Mohamed Elkho

2011-2012

2012-2013

2013-2014

2002-2003

2003-2004

2004-2005

2005-2006

2006-2007

2007-2008

2008-2012

Les lauréats du département BD

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Le Festival International de Bande Dessinée de

Tétouan (FiBaDeT)

Les lauréats du département BD

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Créée en 2004, cette manifestation culturelle entièrement dédiée au neuvième art et 1ère du genre dans le Monde Arabe, a pour ambition de :

- créer un forum bisannuel réunissant tous ceux qui se passionnent pour la BD, artistes, éditeurs, enseignants, journalistes marocains et étrangers et de mettre à leur disposition un espace de libre expression, d’échange et de dialogue avec le grand public,

- donner au neuvième art, au niveau régional et national, la place de choix qu’il mérite en tant que moyen universel d’expression artistique et de communication interculturel entre les peuples,

- soutenir et promouvoir le département de bande dessinée à l’INBA,

- contribuer à l’animation culturelle et artistique de la ville de Tétouan et son agglomération qui accueille des milliers de touristes et visiteurs durant la période estivale et renforcer ainsi l’image de Tétouan en tant que cité culturelle et patrimoine mondiale de l’UNESCO.

Le programme de cette manifestation internationale, qui s’est étoffé au fil des éditions, comporte plusieurs activités destinées à la fois aux professionnels de la BD et au public le plus large : ateliers spécialisés, expositions thématiques, projections cinématographiques, salons de lecture, rencontres avec les créateurs du neuvième art, séances de dédicaces d’ouvrages et des tables rondes réunissant d’éminents experts nationaux et étrangers.

Pourquoi un festival ?

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Recommandations toujours d’actualité

Lors de la 2ème édition du festival en 2005 et au terme des deux tables rondes organisées autour des thèmes « La diffusion de la BD au Maroc, Quelles: perspectives ? » et « Bande Dessinée & Inter culturalité », les participants ont formulé un certain nombre de recommandations que nous reproduisons ici, car elles sont toujours d’actualité pour promouvoir et soutenir davantage la bande dessinée au Maroc.

Le festival bénéficie certes d’un appui logistique et financier de son département de tutelle et du soutien de différents partenaires nationaux et étrangers mais l’implication de nouveaux opérateurs publics et privés, contribuerait davantage au rayonnement de ce rendez-vous international et ouvrirait de meilleures perspectives à la bande dessinée au Maroc.

Les recommandations du 2ème FiBaDeT (19-21 mai 2005):

- Les participants encouragent la décision d’organiser annuellement et régulièrement un Festival International de Bande Dessinée à Tétouan, et remercient le Ministre de la Culture d’avoir intégré ce Festival dans les activités annuelles officielles du Ministère.

- Demandent d’appuyer fortement le Département de BD à l’Institut National des Beaux Arts, matériellement et pédagogiquement, de renforcer son encadrement éducatif et artistique (…)

- Invitent les jeunes artistes qui s’adonnent à la BD, à s’inspirer de la réalité quotidienne marocaine, du patrimoine national écrit et oral pour développer leurs sujets et puiser leurs scénarios. Et appuient, dans ce sens, le projet d’organiser un concours national de scénario BD.

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- Apprécient le projet de publication du magazine CHOUF spécialisé en Bande Dessinée, et proposent qu’elle soit éditée régulièrement, et de s’ouvrir sur les créations artistiques de qualité de tous les artistes marocains travaillant dans ce champs. Ils proposent, à cet égard, de contracter un éditeur professionnel pour améliorer la qualité technique et élargir l’audience de cette publication.

- Exhortent la presse nationale audiovisuelle et écrite, de s’intéresser à ce bel art, d’exploiter ses qualités artistiques et communicationnelles, de réserver une place adéquate pour couvrir ses activités, de consacrer des espaces pour la création des jeunes artistes, notamment ceux lauréats du département BD de l’INBA. Ils voudraient attirer l’attention des entreprises travaillant dans le domaine de la publicité, de la communication et des industries du cinéma et du spectacle, aux formidables pouvoirs que procure cet outil en matière de communication et d’influence auprès d’une large tranche de la population.

- Encouragent les jeunes Bédéistes et lauréats de l’INBA à se lancer dans le processus de vulgarisation et publication de leurs travaux à travers tous les médias qui s’y intéressent, et de soumettre leurs projets d’édition aux services compétents du Ministère de la Culture et notamment le Fonds d’Appui à l’Edition.

- Invitent les éditeurs marocains à encourager la publication d’albums et œuvres artistiques basées ou inspirées de la Bande Dessinée, surtout destinés aux jeunes quelque soit les langues ou les expressions linguistiques employées. Et saluent les rares initiatives remarquées dans ce domaine.

- Demandent aux Ministères et secteurs gouvernementaux et non gouvernementaux, et notamment ceux concernés ou intéressés par les champs de la sensibilisation sanitaire, éducative, sociale, écologique et touristique, à adopter ce médium en tant que support de choix pour ses campagnes de communication ; pourvu qu’ils coordonnent leurs actions avec le département BD à l’INBA, en le consultant à chaque fois qu’ils projettent de lancer des programmes et campagnes de sensibilisation.

- Demandent au Ministère de l’Education Nationale d’inclure la Bande Dessinée dans le programme d’enseignement au sein des centres Régionaux de Formation spécialisés dans les arts plastiques, en coordination avec l’Administration de l’Institut National des Beaux Arts.

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Je ne savais pas que l’invitation de mon ami Ouazzani fin 2006 à prendre en charge le volet communication de l’INBA allait m’entrainer dans une formidable aventure. Moi qui

venait de tout un autre horizon, en l’occurrence celui de la science et de la physique, mais il est vrai avec quand même des rudiments d’expérience en communication et en animation théâtrale et de groupes.

Tout a commencé par la rencontre des écoles de beaux arts de la méditerranée en février 2007 à la regrettée Damas où j’ai fais connaissance avec moult d’artistes et de jeunes artistes locaux dans une ambiance festive et riche en créations. En mai de la même année, c’était mon premier festival de BD que j’ai organisé avec les moyens du bord : partenaires traditionnels locaux, collectes et subventions d’organismes régionaux. C’était pour moi l’occasion de renouer avec le plaisir de l’album BD et de découvrir l’état du 9ème l’art au Maroc, encore embryonnaire avec, en premier plan, des jeunes talents de l’INBA où la branche BD se mettait en place et ceux venus d’autres villes du royaume. Emporté par l’enthousiasme suscité par cette première expérience et conscient de l’importance que revêt la BD comme support pédagogique et outil de sensibilisation aux questions de citoyenneté et de modernité, j’ai doublé d’efforts pour consolider cet événement en cherchant à obtenir des fonds substantiels à la hauteur de mes ambitions et de celles de l’équipe locale engagée dans le processus. C’est ainsi que j’ai pu obtenir une subvention honorable de la commission de l’UE à Rabat pour mener à bien la 5ème édition en 2008. Le succès était sans précédent et a marqué un tournant décisif dans la vie du festival. Pour la première fois, on a franchi le seuil de 10 pays participants effectivement présents venus d’Europe, d’Egypte, d’Algérie et de Tunisie. La BD suisse et la BD belge étaient à l’honneur. Un programme unique, riche en événements et très varié : dédicaces, prix, résidence d’artistes, ateliers au bénéfice d’écoliers et des étudiants de l’INBA, éditeurs, spectacles de théâtre et de musique contemporaine. Avec cette édition, on peut dire que la programmation standard a été arrêtée. Et c’est sur cette base que vont se dérouler les éditions suivantes. En guise de préparation de la 6ème édition, j’étais invité par l’Institut Français de Tétouan à visiter le festival d’Angoulême de janvier 2010. C’était pour moi l’occasion de prendre des contacts, de faire connaître le festival de Tétouan et de m’enquérir sur le niveau d’organisation et le mode de déroulement du plus grand festival de BD en France et peut être aussi en Europe. Des nouvelles idées commençaient à germer notamment le concert dessiné, les manifestations de rue et l’ouverture sur la BD africaine.

Dessins et bulles de Tétouan, un festival de charme

Jaouad Diouri Commissaire du 4ème, 5ème et 6ème FiBaDet

Professeur de physique, de communication et de méthodologie de projets à l’université Abdelamlek Essaadi de Tanger-Tétouan (faculté des sciences et faculté des lettres) et à l’École Nationale d’Architecture, site de Tétouan. Titulaire d’un doctorat en physique

de l’université de Montpellier (1984) et d’une licence en linguistique de la faculté des lettres de Tétouan (2002). Acteur associatif et animateur de théâtre. Il a enseigné la communication à l’INBA durant plusieurs années et continue d’y encadrer des projets de fin d’études. Commissaire des éditions 4, 5 et 6 du festival de la BD de Tétouan..

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Ces éléments seront inclus dans la programmation du 6ème festival de mai 2010. Entre temps, j’ai pu introduire l’INBA dans le réseau marocain de la Fondation Anna Lindh qui regroupait alors environ 150 associations et organismes culturels. C’est à ce titre que j’ai représenté l’INBA au forum de Barcelone en mars 2010 où j’ai pu de nouveau multiplier les contacts et faire connaître l’expérience de l’INBA et de son festival de BD.

L’édition de 2010 allait connaître elle aussi un succès aussi important sinon plus que celui de l’édition précédente malgré son petit budget. Elle était marquée en particulier par une exposition spéciale Maroc-BD, l’invitation de l’association l’Afrique Dessinée (de France) et d’artistes d’Afrique subsaharienne, l’introduction du film d’animation avec la présence de Mohamed Ghazala, président de l’Association Internationale du Film d’Animation section d’Egypte, la présence du festival de comics de Palma de Mallorca (Espagne) et l’hommage rendu au pionnier de la caricature satirique du Maroc des années 70, Hamid Bouhali. L’année suivante, le festival de Mallorca a rendu un hommage particulier au festival de Tétouan en la personne de 2 lauréats du 6ème festival : Brahim Raïs et Batoule Badr Essaffa (maroco-syrienne) et de moi-même. Une ouverture de plus.

Le 7ème festival 2012 est passé aux mains de l’association Chouf pour la promotion de la BD, idée géniale proposée par le directeur, notre ami Ouazzani car avec cette formule, le festival avait plus de chance d’obtenir des subventions internationales. En effet, cette édition a pu bénéficier du soutien, certes modeste mais conséquent, du Fonds Arabe pour l’Art et la Culture avec la thématique « dessine-moi le printemps arabe », actualité politique oblige, et a connu une participation importante de jeunes artistes de divers pays arabes, du Maroc et de jeunes bédéistes d’Afrique subsaharienne qui ont pu eux aussi bénéficier du soutien de l’organisation Move Africa pour couvrir les frais de déplacement.

L’ensemble de ces mouvements et de cette dynamique lancée autour de la BD a permis d’inscrire le festival dans l’agenda des activités artistiques et culturelles importantes de la ville et d’en faire un rendez vous internationalement reconnu. J’en suis personnellement ravi et je pense que le festival finira par s’imposer et de se frayer une place dans le panel des rencontres internationales spécialisées dans la BD et le cinéma d’animation. En tout cas le pari semble être acquis puisque l’intérêt pour la BD gagne du terrain auprès des jeunes créateurs (en témoigne le nombre grandissant des étudiants de la branche BD à l’INBA et la future création d’une antenne à Essaouira) notamment avec la perspective de l’animation et ses techniques numériques attrayantes et passionnantes qui s’impose de plus en plus comme moyen de création et d’expression artistique de notre temps.

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J’ai représenté l’association L’Afrique Dessinée, rassemblement de bédéistes africains résidents en Europe, lors de la 8ème édition du festival FIBADET. En cela je faisais suite

à Simon-Pierre MBUMBO, qui a représenté notre association lors de la 6ème édition du FIBADET.

De ce fait nous pouvons considérer que le FIBADET a permis une rencontre entre la bande dessinée du Maroc et la bande dessinée de l’Afrique centrale, dans la mesure où L’Afrique Dessinée regroupe surtout des dessinateurs venus du Tchad, du Cameroun et de la RDC, pays faisant partie de cette zone de l’Afrique.

Par les diverses conférences auxquelles Simon-Pierre MBUMBO (6ème édition) et moi (8ème édition) avons participé, que ce soit à l’Ecole des Beaux Arts de Tétouan ou à l’Institut Français, nous avons remarqué un vif intérêt des étudiants de l’école pour ce qui se fait ailleurs en Afrique en terme de scénario ou de dessin.

Et lors de la 8ème édition du festival, la « Conférence sur l’état de la bd marocaine » suivie de la « Conférence sur l’état de la bd africaine » ont été très suivies par les étudiants de l’école et par les bédéistes marocains ou étrangers présents.

De ces débats il ressort que les bédéistes ne peuvent pas tout attendre des pouvoirs publics, mais doivent solliciter les entreprises privées ou se diriger vers la création de maisons d’éditions locales.

J’ai pu présenter lors des conférences une initiative qui marche, à savoir le journal dessiné « G’bich ! », devenu un fleuron de la presse de Côte d’Ivoire : ceux qui l’ont créé étaient tous des étudiants de l’école des Beaux Arts d’Abidjan. J’ai pu parler aussi d’une expérience qui n’avait pas marché au Cameroun, avec les éditions Akoma Mba de Yaoundé. Les jeunes participants à la conférence ont ainsi pu savoir que des initiatives existent ailleurs, dans des pays plus faibles économiquement que le Maroc. Certaines de ces initiatives marchent, d’autres pas. Il appartient aux étudiants marocains de bien connaître leur public, afin de ne pas se tromper lorsqu’ils créeront des livres ou des journaux à sa destination.

Afrique centrale-Maroc,perspectives de collaboration

Christophe Ngalle Edimo

Scénariste, fondateur et Président de l’association «L’Afrique dessinée» qu’il a créée en 2001. Christophe Ngalle Edimo a, entre autres, publié « Une enfance volée », dessinée par Simon Pierre Mbumbo dans l’album collectif « A l’ombre du Baobab », et « Gri-gris d’amour », dessiné par Titi Faustin (cette BD a obtenu le Grand

Prix de la ville au Festival de Grand Bassam en 2001).Co-scénariste des scripts de trois épisodes du dessin animé « Kabongo le griot », réalisé par le Studio Pictoons de Dakar. Invité à la 8ème édition du Festival en 2014, il a donné une conférence sur la bande dessinée africaine et ses perspectives.

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Un autre élément que j’ai retenu de ma participation au 8ème FIBADET, c’est que les étudiants sont sensibles au fait qu’il est dangereux de s’isoler, le risque de se perdre et d’abandonner la création artistique étant grand dans ce cas. Pour y pallier, la solution la moins coûteuse est la création d’association, les étudiants de l’école des Beaux Arts de Tétouan en sont conscients. Les associations qui durent sont celles dont les membres s’entendent bien, et dont les buts sont très clairement définis.

Par ailleurs, ce que j’ai pu constater lors de mon séjour à Tétouan, c’est le nombre relativement élevé d’étudiantes dessinatrices : beaucoup plus en tout cas qu’en Afrique centrale (on compte deux dessinatrices de bd au Cameroun, une pour la RDC, aucune au Tchad). Compte tenu que le public de la bande dessinée franco-belge se féminise de plus en plus (au moins 30% de lectrices en France et en Belgique), il se peut que de ce côté le Maroc soit sur la bonne voie.

Des perspectives de collaboration

A la suite de nombreuses conversations informelles avec les élèves de l’école des Beaux Arts de Tétouan durant le festival, j’ai remarqué qu’ils ne seraient pas opposés à des collaborations avec des dessinateurs d’Afrique Centrale.

Cela a d’ailleurs déjà commencé, avec la participation des étudiants Brahim RAIS et Batoule ALIMAM à l’album collectif « Thembi & Jetje, tisseuses de l’arc en ciel », album paru en novembre 2011. Des droits d’auteur (faibles, mais des droits quand même) ont été versés par l’éditeur à chacun des auteurs (dont Brahim et Batoule) en juin 2014. Une autre expérience est en cours : la participation prévue de un ou deux dessinateurs marocains issus de l’Ecole des Beaux Arts de Tétouan au numéro 13 du fanzine Waka de Yaoundé au Cameroun, fanzine qui est à sa deuxième année d’existence.

A la suite de cette collaboration j’essaierai de solliciter les responsables du fanzine Kin label de Kinshasa en RDC, pour intégrer également un ou deux dessinateurs marocains. Kin label est le plus prestigieux fanzine d’Afrique centrale.

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L’Ecole des Beaux Arts de Tétouan recèle de nombreux jeunes étudiants et étudiantes talentueux. Il me semble que l’école peut les aider en ouvrant un « bureau des élèves » permettant des rencontres entre les promotions successives. Mais peut être que ce bureau existe déjà. Un autre avantage lié à l’existence de ce bureau serait de collecter les informations sur les productions des élèves et anciens élèves, afin de promouvoir ainsi le savoir faire de l’Ecole des Beaux arts de Tétouan.

Enfin, toute bande dessinée « forte » se développe sur un terreau local : ce fut le cas de la Belgique et de la France, des USA, du Japon, de la Corée, de la Finlande. D’autres pays, pourtant pourvus de dessinateurs de bd de talent (Italie ou Espagne) n’ont pas su ou pas pu faire de la bd une activité économique. Plusieurs facteurs expliquent le succès ou l’échec d’un pays dans le domaine de la bande dessinée. En Afrique centrale, pour l’instant seule la RDC semble avoir la capacité de devenir une « puissance » de la bande dessinée. Il appartient aux jeunes marocains de s’imposer dans leur pays, afin qu’il devienne lui aussi producteur de bandes dessinées.

La collaboration entre Afrique centrale et Maroc est possible dans le domaine de la bande dessinée : la participation de dessinateurs au fanzine camerounais Waka le prouve. Ce type de collaboration est utile aux auteurs, qui s’enrichissent toujours en se confrontant à des méthodes différentes de celles qu’ils connaissent ; elle est aussi utile au public : par l’intermédiaire de dessinateurs marocains, le public camerounais va découvrir une facette du Maroc. C’est important dans l’optique du rapprochement des peuples. Et nous ne pouvons qu’espérer qu’un fanzine marocain invitera un ou deux dessinateurs camerounais pour qu’à leur tour les marocains découvrent une parcelle du Cameroun.

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Tétouan, de par son environnement, entre mer et montagne, sa médina classée au patrimoine mondial de l’UNESCO et son histoire, est une ville à forte identité culturelle et

artistique. L’Institut français de Tétouan entretient depuis toujours des relations privilégiées avec l’Institut national des Beaux-arts qui contribue fortement au foisonnement artistique de la ville. L’atelier de gravure installé au sein de l’Institut français depuis près de 25 ans, actuellement rénové et ouvert aux arts visuels, les activités liées à l’art contemporain et au patrimoine, la création récente de la résidence d’artistes de Dar Ben Jelloun renforcent jour après jour les liens entre les deux Instituts.

En septembre 2000, la création d’une filière Bande dessinée à l’INBA, initiée par son directeur, Abdelkrim Ouazzani, et par le Ministre de la culture, Mohamed Achaari, fut développée dans le cadre d’un projet de coopération mené avec Daniel Sotiaux, Responsable de la Délégation Wallonie-Bruxelles au Maroc. Le lancement de la section fut accompagné par l’Agence de coopération APEFE qui a participé à la mise en place de l’enseignement de la BD, la création de la revue Chouf et, quelques années plus tard, à celle du Festival. Lors de l’ouverture de la filière, l’Institut français de Tétouan fut naturellement présent. L’idée de valoriser le 9ème art et ses jeunes talents au travers une formation professionnelle, rapidement accompagnée de la publication de la revue Chouf, fut soutenue et relayée par l’enrichissement du fonds BD de la médiathèque de l’Institut français et ses actions menées autour de la BD, contribuant ainsi à la visibilité de cette expression artistique et littéraire.

La création du Festival International de la Bande Dessinée de Tétouan en 2004, à l’initiative des enseignants de l’INBA et avec l’impulsion du Centre Belge de la Bande Dessinée, est le reflet de la vitalité et de la production des jeunes artistes, mais aussi de la volonté d’échanges et d’ouverture qui anime la filière Bande dessinée. Des bédéistes français, invités par l’Institut en collaboration avec l’INBA tels Edmond Baudoin, Olivier Supiot, Tehem, Jérôme Lereculey, ont participé à cette effervescence artistique aux côtés d’auteurs et d’illustrateurs venus de Belgique, d’Afrique et du monde arabe. La diversité des styles présentés, les rencontres professionnelles, contribuent à l’enrichissement et à la stimulation des jeunes auteurs. L’invitation du commissaire du FIBADET, Jaouad Diouri, au Festival d’Angoulême de 2010 a renforcé les liens unissant le Festival et l’Institut français.

Reconnu et ancré dans la ville de Tétouan, le Festival participe à la vie culturelle et artistique de la cité par l’organisation d’animations pour tous les publics. Les expositions, les salons de lecture, les ateliers, sont autant de moments privilégiés pour la découverte de la Bande dessinée. L’Institut français de Tétouan y participe en faisant la promotion de la Bande dessinée par les très riches collections de sa médiathèque, régulièrement actualisées, ainsi que sa programmation culturelle. Engagé aux côtés de ses partenaires, l’INBA et l’association Chouf, il contribue ainsi au rayonnement de cet art et à l’accès à la jeune création contemporaine.

Anita Dolfus Directrice de l’Institut français de Tétouan

L’institut français de Tétouan,un partenaire du festival

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Aun a riesgo de ampliarme un poco, quisiera hacer previamente un brevísimo resumen de la historia del cómic en España a modo de homenaje a todos esos personajes que

nos han acompañado a lo largo de este dilatado tiempo.

En España, el arte de contar historias a través de imágenes y palabras tiene ciertos antecedentes en los dibujos satíricos medievales o en las caricaturas renacentistas. Sin embargo el humor gráfico hace su aparición a finales del siglo XIX, ligado a la prensa infantil y a la satírica para adultos. Las primeras revistas destacables son En Patufet (1904) publicada en catalán o el suplemento infantil de ABC (1906) Gente menuda, aunque las revistas Charlot (1916) y TBO (1917) se consideran como las primeras publicaciones de cómic en España. En la década de los treinta, la editorial Hispano-Americana de Ediciones comenzará a introducir personajes americanos como Flash Gordon o Tarzán.

Durante la Guerra Civil se mantienen historietas de corte propagandístico republicano, como El Pueblo en Armas, por ejemplo, o nacionalista, como la revista Flechas y Pelayos. Con la implantación de la dictadura, la censura, la escasez de papel y la falta de medios económicos permitirán que solo las revistas subvencionadas por el Estado se sigan publicando, pues se considera la historieta como un instrumento más al servicio de los fines del poder. Tal es el caso de Flechas y Pelayos, Maravillas, Clarín…

En la época franquista gracias a que se asientan las bases de una poderosa industria comienza la publicación de historietas en formato cuadernillo de editoriales como Hispano-Americana de Ediciones, Valenciana y Bruguera. Según el investigador Juan Antonio

Ramírez, el cómic español del franquismo se estructura en tres apartados temáticos dirigidos a diferentes segmentos de público; el tebeo de aventuras para un público masculino; el tebeo sentimental para el femenino; y el tebeo humorístico para el familiar. Los tres grupos se diferencian en temática, en apariencia y en el estilo de los dibujantes.

La Editorial Bruguera destaca de entre la publicación de los tebeos humorísticos con Pulgarcito, Mortadelo, Tío Vivo, etc., que contó con dibujantes como Peñarroya, Vázquez, Escobar, Jorge e Ibáñez. Los cómics femeninos, de estilo gráfico realista, ensalzaban cualidades como la virtud, el trabajo o el amor en una narrativa de tipo exótico-sentimental. Destacan autoras como Rosa Galcerán, Purita Campos y revistas como Sissi, Lily, Esther… En cuanto al tebeo de aventuras, sus historias se desarrollaban en ambientes exóticos, con personajes fijos rodeados de un realismo dramático en el que se cultivaba una mística de la

Una viaje de ida y vuelta a través del cómic

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masculinidad. El héroe es joven y atlético, por el contrario los malvados son bandidos, traidores y tiranos. Las temáticas abarcaban la época prehistórica (Purk, el hombre de Piedra), la antigüedad (El Jabato), los héroes medievales (El Guerrero del Antifaz creado por el guionista Manuel Gago, El Capitán Trueno, el mayor éxito comercial español), el oeste (El Coyote), las guerras (Hazañas Bélicas de Boixcar), los detectives españoles (Roberto Alcázar y Pedrín, dibujado por Eduardo Vañó) y ciencia-ficción (El Mundo futuro). Con la transición, la publicación del cómic se enfocará hacia un público adulto. Desaparece la Editorial Bruguera y se inician otras como La Cúpula, en la que se publica la famosa revista El Víbora, heredera del cómic underground estadounidense, que rompe con los tabúes sociales y morales de la época anterior. El Jueves, que continúa en la actualidad, es de corte satírico y político. El cómic más realista y social estará representado por Paracuellos de Carlos Jiménez.

La proyección internacional del cómic español llega en la década de los ochenta con la aparición de eventos especializados como el Salón Internacional del Cómic de Gijón (1976), el de Bilbao (1977) y el de Barcelona (1981). Creadores como Max ofrecen un reflejo de la sociedad del momento con el surgimiento de las tribus urbanas (Peter Pank) o Rodrigo con la historia del homosexual madrileño Manuel.

Finalmente, en los años noventa, la traducción de comic-books de superhéroes estadounidenses y la publicación de las historias de manga japonés centrarán la mayoría de la producción del cómic en España. Mientras, la creación española será atendida por editoriales independientes como Edicions de Ponent, Ediciones Sins Entido o Astiberri.

El Instituto Cervantes de Tetuán encontró en el Festival Internacional del Cómic de Tetuán, FIBADET, una excelente plataforma desde la que dar a conocer la producción española del comic y empieza a colaborar en 2004, con la proyección de las historias de tres de los personajes más conocidos del entorno español y latinoamericano: Mortadelo y Filemón de Paco Ibáñez, dirigida por Javier Fesser en 2003, y el corto de animación de Mafalda

(Quino) del cubano Juan Padrón, en el que Cristóbal Colón encuentra a Mafalda a su llegada a América.

En la siguiente edición de 2005, el hilo conductor fue el Cómic y la interculturalidad, una ocasión dar a conocer el panorama del cómic en la España de aquellos año y quien mejor que Felipe Hernández Cava, dos veces premiado en el Salón del Cómic de Barcelona, crítico y guionista de cómic, editor independiente y humorista.

Nuestra participación en la tercera edición del Festival, la dedicamos al personaje más internacional de nuestra literatura: Don Quijote. La exposición Lanza en Astillero: Dibujantes de cómic sobre Don Quijote partía de una idea original de Jesús Cuadrado y reunía las versiones y miradas de autores de historietas sobre los universos de El Quijote. Todos ellos compartían una cualidad con Cervantes: la inventiva. Una veintena de autores procedentes de la Mancha y de otros lugares del planeta homenajeaban a

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un contador de historias que quizás hubiera tomado también lápiz y colores para dibujar las andanzas del Caballero de la Triste Figura. En la muestra, producida por la Junta de Comunidades de Castilla la Mancha, se pudieron ver cuarenta y ocho dibujos de Álvaro Ortiz; Andrés G. Leiva; Antoni Garcés; Carlos Nine; Denis Deprez; Esther Gili; Filipe Abranches...

Publicidad y comunicación, fue el tema del año 2006 y el Instituto Cervantes ofreció dos talleres estrechamente ligados a la comunicación en su sentido más amplio: Sin palabras. La elocuencia silenciosa del dibujo en el cómic en el que Pedro Espinosa se centró en el lenguaje visual del cómic, en cómo se crea y desarrolla una historieta muda para contar algo. El segundo taller estuvo dirigido por el argentino Jorge Zentner, periodista y psicólogo, creó uno de los mejores tandems de artistas del cómic en lengua hispana con Rubén Pellejero.. Su taller La atención supuso un encuentro con la propia creatividad y nos introdujo en el laborioso proceso de creación del guión.

2007 fue el año de la animación. El director del Festival Animadrid Pedro Medina Díaz nos visitó y presentó tres programas que recogen la obra de animación de los directores catalanes Jan Baca y Toni Garriga, el trabajo sobre animación con plastilina de Pablo Llorens, y una recopilación de las mejores producciones de las animadoras contemporáneas.

Este programa se complementó con el buen hacer de uno de los mejores animadores del panorama español actual, Coke Rioboo, que fue galardonado ese mismo año con el Goya al mejor cortometraje de animación por El Viaje de Saïd, quien trabajó a lo largo del Festival con los alumnos del INBA en un taller de animación en plastilina. Los resultados del taller, así como su premiado cortometraje, se proyectaron en nuestra sala.

En la 5ª Edición del Festival Internacional del Cómic de Tetuán, nuestra participación fue la de aportar un colofón musical, con la actuación de Isaac Turienzo Trío.

La 6º Edición se celebra en 2010, cuando el festival se convierte en un evento bianual. A partir de ahora, se amplía el territorio de actuación a otros mundos y abre sus puertas a la promoción del cómic africano. El Instituto Cervantes exhibe la exposición colectiva La ciudad de Latón. Dibujantes españoles de mundos remotos, que reúne historias de los primeros espadas del dibujo español: José Fonollosa, Sergio García, Fernando Bellver y Miguelanxo Prado trasladan al espectador a lugares lejanos, perdiéndolo entre lo real y lo fantástico. Otro viaje festivo clausuraría el festival, un viaje sonoro y visual por las músicas del mundo, partiendo de ritmos del África, pasando por los nuevos de Brasil, haciendo escala en Turquía, en el mundo árabe, el bhangra, pasando por Jamaica, Colombia, el flamenco, los Balcanes... El Proyecto Vagamundo con Salitre (Ricardo de Castro) y K Vj (Carlos Mejías) cerró la fiesta en los jardines del Instituto Francés.

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Sin la colaboración de la Dirección General de Política e Industrias Culturales del Ministerio de Cultura español, estas aportaciones no hubieran sido posibles.

En el 7º FIBADET, varios organismos españoles convergieron. Gracias al Ministerio de Cultura español y a la Fundación Premio Convivencia, Bartolomé Seguí, dibujante de historias, ilustrador y editor español (Madriz, El Víbora), ganador en 2009 del Premio Nacional de Cómic por Las serpientes ciegas en colaboración con el guionista Felipe Hernández Cava, acudió de la mano de Còmic Nostrum, Festival Internacional de Mallorca, para realizar una residencia de artistas en el INBA y presentar la exposición De las serpientes ciegas al caos.

La Fundación Tres Culturas hizo venir al ilustrador andaluz José Luis Ágreda, colaborador habitual del periódico El País y del semanario de humor El Jueves, abordó temas como la producción, ejecución, formación y gestión del cómic en Andalucía y Norte de Marruecos y nos ofreció una creación in situ.

El Ministerio de Cultura español colaboró con el Instituto Cervantes para aportar un brillante cierre al FIBADET de 2012: la banda Glazz puso en escena el ecléctico espectáculo Cirquelectric, una historia contada a través del Jazz, el Rock progresivo, la danza, el flamenco y el video arte.

Glazz estuvo acompañado del ilustrador de sus discos que elaboró ante todos una hermosa imagen de la historia de Cirquelectric.

Para esta nueva edición de 2014, el Instituto Cervantes, quiere rendir homenaje a un clásico de la literatura española que cumple cien años: Platero y yo, el relato poético de Juan Ramón Jiménez, Premio Nobel de literatura en 1956. Una nueva publicación de esta obra acaba de salir al mercado con dibujos de los hermanos malagueños Ángel y Francisco Javier Rodríguez, que forman un equipo de humoristas gráficos, conocidos colectivamente como Idígoras y Pachi.

Por último, quisiera agradecer tanto a la Asociación Chouf como al Instituto Nacional de Bellas Artes de Tetuán, así como a todas las personas que han hecho posible la realización de las diferentes ediciones del Festival, la oportunidad que han brindado al Instituto Cervantes de compartir este viaje de ida y vuelta lleno de color y fantasía, pero también de realidad y conocimientos del mundo del cómic que rodea el Mediterráneo.

Cecilia Fernández Suzor Coordinadora General Instituto Cervantes de Tetuán

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France

liban

États-Unis

AlgérieYémenTunisie

• Hamid Bouhali • Abdelaziz Mouride • Mohamed Barrak, • Ahmed Nouiti• Aziz Oumoussa • Hanounia Baba • Miloudi Nouiga • Mohamed Benmessaoud • Said Nali • Mohammed Bellaoui • MEHDI Annassi • Zakaria Tmalah • Omar Ennaciri• Brahim Rais

• Joan Miquel Morey• Rafa Vaquer• Coke Rioboó• Gines Montero Rodriguez• Manuel Luis Gallardo Muñoz• Jose Francisco Duarte • Heredia• Bartolomé Segui• José Luis Agreda

• Edmond Baudoin,• Alex Baladi,• Olivier Supiot• Tehem • Patrice Cablat, • Jérôme Lereculey• Ngoc Varoqui,• Eric Cartier • Jean François Di Giorgio• Jean Auquier, • Nadia Raviscioni • JF Chanson • Fabien Rypert• Jean-Luc Sala• Sébastien Vassant

Les professionnels de la BD invités au Festival

2010-2011

Maroc

Espagne

États-UnisBelgique

• Etienne Schreider• Renaud Dillies• Ludovique Tollite• Denis LARUE, • Marianne Duvivier• Antonio Cossu

Egypte• Hanan Alcaragy• Mohammed El Shennawy• Hesham Ali Rahma• Mohamed Ghazala• Dina Said

Congo• Eustash thembo kashauri• Gildas Gamy• Nsana Jussie

Cameroun• Yannnick Deubou Sikoue • Christophe Ngalle Edimo

Suisse• Christophe Badoux • Alex Baladi

Finlande• Aapo Rapi

États-Unis• Philp Xavier

liban• Lena Merhej

Yémen• Adnan Al Mahaqeri

Tunisie• Othman Selmi

Algérie• Slim

Sénégal• T.T.Fons

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Le festival en images

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Affiches du festival

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Expositions

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Rencontres et tables rondes

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Ateliers pour enfants

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Ateliers et résidences artistiques

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Visites organisées pour les écoles

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Fresques murales

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Projections de films

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Salons de lecture

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Hommages

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Hommages Séances de dédicaces

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Spectacles de musique

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Spectacles de musique Remises des prix

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Créations des étudiants du département BD

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