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VILLES AFRICAINES – AFRIQUE DES VILLES - URBANISATION Emmanuel Bonnet – Université de Caen – GO 553 - 2009

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VILLES AFRICAINES – AFRIQUE DES VILLES - URBANISATION

Emmanuel Bonnet – Université de Caen – GO 553 - 2009

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LES VILLES AFRICAINES AUJOURD’HUI De quelles villes parle-t-on ? Entre l’Afrique du Nord, l’Afrique Australe et l’Afrique

subsaharienne, la ville prend des formes différentes

Partout la transformation depuis les années 50 est spectaculaire : elle bouleverse l’espace et les mentalités

Les villes d’Afrique subsaharienne et du nord présentent des traits communs : vigueur du phénomène urbain, ségrégation spatiale, problème de gestion de la ville, problème d’emploi de la population active

Si l’écart entre les tailles de villes diminuent, il existe des déséquilibre internationaux et internes aux Etats (poids disproportionné de la capitale)

Continent rural et agraire, L’Afrique noire subit aujourd‘hui les effets de l’urbanisation et se transforme en continent urbain où prédominent des métropoles surpeuplées et débordées par l’exode rural.

Mais l’Afrique noire urbaine est-elle « mal partie » comme le dirait René Dumont ?

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LES VILLES AFRICAINES AUJOURD’HUI Les migrations, les replis identitaires, la pauvreté, la gestion des déchets, l’économie

urbaine sont autant de domaines présents dans toutes les villes…

Le premier enseignement est que la ville africaine dans sa gestion, sa planification, son quotidien exacerbe les problèmes et les rend visibles

Abidjan vit cette situation depuis bientôt 30 ans ! les habitants ont trouvé des « arrangements pour réagir face aux manques, aux pénuries et autres paupérisations des sociétés. La gestion urbaine n’est donc pas uniquement basée sur du développement économique

Le deuxième enseignement de la ville africaine est qu’elle n’est pas cette entité auto-construite et autorégulée comme décrite régulièrement - ou fantasmée - mais qu’elle est « planifiée ». Elle fait l’objet d’une tentative de contrôle de la production de l’espace de la ville.

Les villes d’Afrique de l’Ouest ont été conçues et planifiées et gérées de la même manière depuis leur fondation. Il n’y a pas eu de changement de paradigme, ni aux l’Indépendances, ni dans les années 80, lors des grandes crises urbaines.

Les colonies ont imposé un modèle de forme urbaine basé sur la séparation des populations, et aujourd’hui encore, les villes se développent et se planifient de cette manière.

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LES VILLES AFRICAINES AUJOURD’HUI Donc, la planification existe, les modèles existent, les aspirations des élites à se projeter

dans un type d’espace - urbain – existent. Il n’est dans ce cas plus possible de dire que la ville n’est pas planifiée, rêvée ou dessinée.

Malgré cela, la ville africaine semble chaotique, sans gestion

Impossibilité pour les élites de prendre au sérieux les dynamiques urbaines. A force de rêver la ville, les dynamiques en présence, la population vivant dans les rues, le fait que les populations se déplacent, dorment, mangent dans ces villes est oublié.

La réalité de la ville et de son fonctionnement semble exclue des analyses au profit d’une ville rêvée

La planification doit se centrer maintenant sur les individus, sortir de l’uniformisation des villes.

Intégrer l’environnement comme une variable principale

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PLAN DU COURS

Ville et géographie française : un « objet » ville « au Sud » 

Villes africaines : croissance, organisation et développement

La crise urbaine

Td : exemple d’une gestion urbaine mal contrôlée : les déchets dans la ville

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VILLE ET GÉOGRAPHIE FRANÇAISE : UN « OBJET » VILLE « AU SUD » 

Dans les années 60’s et 70’s, au sein de la recherche française dans les pays du Sud, les recherches ruralistes dominent. La ville n’est appréhendée que dans ses relations avec la campagne

Il faut attendre les années 80’s et jusqu’en 1995 pour voir se développer une recherche urbaine dans les pays du Sud.

Deux séries de thématiques sont alors privilégiées :

* Les unes ont des implications plus théoriques – savoir définir le secteur informel, l’habitat des pauvres, production foncière et immobilière

* Les autres sont plus en lien avec l’action – gestion urbaine, services urbains, et se penchent notamment sur les questions d’assainissement, de transports, de finances et de construction.

De ces recherches, il ressort une série de processus qui sembleraient identifier la ville du Sud :

Croissance explosive, explosion urbaineExode rural et insertion urbaine

Système « informel » : transports, logementPauvreté et manque d’équipement (accès à l’éducation, aux soins, à l’eau)

Endettement

On distingue les approches développementalistes et culturalistes

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VILLE ET GÉOGRAPHIE FRANÇAISE : UN « OBJET » VILLE « AU SUD » 

1. L’approche développementaliste  Chez les géographes français de la seconde moitié du XXe siècle, il existe une forte

tendance à assimiler la ville du Sud (dite encore du Tiers Monde) au modèle de ville ségrégée. On parle de ségrégation « brutale », « violente »…

Ces études utilisent l’analyse de la ségrégation en tant que phénomène au sein de l’espace urbain, pour insister sur la spécificité des villes du Sud. La ville est alors perçue comme excessive, démesurée et pathologique

Entre les villes du sud et celles du monde développé, les caractéristiques peuvent être communes mais l’écart quantitatif est tel qu’un fossé séparerait les deux mondes.

La ville du Nord devient la ville de référence, « la bonne ville » alors que celle du sud représente les « dysfonctionnements » exacerbée par la le gigantisme démographique et spatial

La ville du Sud va jusqu’à apparaître comme le négatif de la ville. Elle serait une non-ville.

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VILLE ET GÉOGRAPHIE FRANÇAISE: UN « OBJET » VILLE « AU SUD »

Si il existe une bonne ville c’est qu’il existe un modèle. C’est le début des hypothèses développementalistes avec l’idée que la ville du sud peut évoluer vers une autre forme urbaine et une autre organisation

Les dysfonctionnements seraient alors la traduction de crises d’adaptations visant à l’alignement sur le modèle occidental

On évoque les modèles de ville du Nord : ville industrielle, ville nouvelle, ville globale…Mais au Sud, il n’existe même pas de modèle de ville spécifique. Expertises et recherche, tendent à faire correspondre la ville du Sud à un modèle, celui de la ville du Nord.

Les représentations s’avèrent donc fortement eurocentrées : elles comparent la ville du Sud à la ville du Nord.

Dans les 50’s et 60’s, en anthropologie et en géographie, les chercheurs insistent sur les différences : pas d’industrialisation à l’origine de l’urbanisation ; fortes migrations et démographie explosive

Dans les 70’s les chercheurs vont tenter de les expliquer : ex : la « dépendance » développée principalement en Amérique latine

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VILLE ET GÉOGRAPHIE FRANÇAISE: UN « OBJET » VILLE « AU SUD »

Chez les marxistes : l’urbanisation (concentration spatiale de la force de travail) est liée aux besoins du capitalisme

L’urbanisation est analysée non comme un processus autonome, mais comme un processus lié strictement à des facteurs externes : ex la dépendance de la périphérie au centre

A force de présenter la ville du Sud comme une ville ségrégée, il devient moins question d’en chercher la cause et de mener des politiques de lutte contre la ségrégation. Le phénomène ségrégatif devient « normal », « naturel ».

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VILLE ET GÉOGRAPHIE FRANÇAISE: UN « OBJET » VILLE « AU SUD »

2. Les approches culturalistes : la ville importée

L’histoire urbaine au Nord diffère de celle du Sud. La révolution industrielle fonde la ville au Nord. Ce n’est pas le cas au Sud( P George, 1952). Les villes du Sud ont une autre origine.

Il y aurait nettement une différence de nature…

(La ville. Le fait urbain à travers le monde, Paris, PUF, 1952 - p. 37)   [On n’y trouve] « rien de ce qui fait l’originalité de la ville italienne ou flamande de la fin du moyen-âge. Rien de l’opposition ville-campagne caractéristique du mouvement urbain européen. »

… avec un point de vue largement misérabiliste

p. 39 « La ville devient lieu d’attraction pour tous les paysans sans terre ; des cohues faméliques se pressent à ses portes, campent dans ces amas de huttes, de baraques improvisées avec des débris urbains que l’on appelle le plus souvent les bidonvilles. »

On trouve un discours descriptif, peu analytique et souvent manichéen (tradition/modernité) fondée sur l’idée d’une différence irréductible entre Nord et Sud

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VILLE ET GÉOGRAPHIE FRANÇAISE: UN « OBJET » VILLE « AU SUD »

la ville du Sud va apparaître comme un produit d’importation, un héritage de la période coloniale

Dans la littérature de la 2nde moitié du 20e siècle, chez les géographes, l’histoire des villes africaines commence à la colonisation, année zéro de la ville

Toute urbanité est déniée à l’Afrique précoloniale. Par extrapolation, les capitales créées à la colonisation résument l’ensemble des phénomènes urbains en Afrique et font table rase des traditions urbaines, modestes mais existantes. Ex Djenné

On trouve donc dans la production scientifique (fondée sur l’idée d’une différence de nature) la succession de monographies.

La ville du Sud donne lieu à de simples descriptions, de l’exotisme au misérabilisme.

Parfois, le vocabulaire d’analyse du Nord est utilisé : ségrégation. Parfois, on forge de nouvelles notions : habitat spontané…

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VILLE ET GÉOGRAPHIE FRANÇAISE: UN « OBJET » VILLE « AU SUD »

La ville du Sud est donc souvent présentée sur un mode binaire : avec par exemple en Afrique subsaharienne, l’opposition de la ville coloniale aux villages africains. Les quartiers urbains abritent les Européens et les villages, les Africains.

Pierre George, Précis de géographie urbaine, Paris, PUF, 1961,   « De ces quartiers urbains que l’on appelle dans les villes africaines "les

villages" par opposition aux quartiers bâtis par les Européens, les seuls urbains »

Ainsi, si certains auteurs ne nient pas le statut de ville à celles du Sud, ils la définissent comme irrémédiablement différentes des villes du Nord, dans une approche fortement culturaliste.

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

Quels sont les traits spécifiques de la dynamique urbaine en Afrique ?

Un modèle d'organisation et de fonctionnement de l'espace urbain est-il spécifique à ce continent ?

Frappées par la crise depuis les années 1980 et marginalisées par rapport aux centres d'impulsion de l'économie mondiale, les villes africaines peuvent-elles innover pour répondre aux multiples défis du développement ?

4 sous parties pour tenter de répondre à ces questions :

1/ La croissance des villes 2/ L’organisation et diversité des villes africaine

3/ L’urbanisation est elle un vecteur de développement ? 4/ La crise des villes et sa gestion

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

1 – Croissance urbaine africaine : tardive mais la plus forte au Monde

un continent encore peu urbanisé

L' Afrique approche les 2-3/5 de citadins contre ½ pour l'ensemble du monde ; les habitants des villes représentent en Afrique environ 8 % des urbains du monde, alors que la population africaine totale   comptabilise 13 % de la population du globe. Seulement 4 villes sont mentionnées parmi les 50 premières mondiales

l'inégale urbanisation du continent africain 

- les contrastes entre Afrique noire (taux de 30 %) et Afrique blanche (taux de 50 %)

- les contrastes aussi à l'intérieur de l'Afrique noire : faible urbanisation de la frange sahélienne < 30 % ; plus élevée dans les états côtiers que dans l'intérieur

les plus urbanisés sont les Etats insérés dans les échanges mondiaux ; au contraire, les Etats enclavés sont faiblement urbanisés : Bamako et Ouagadougou

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

le semis des grandes villes  Le semis urbain privilégie trois principaux

espaces : * la frange septentrionale du continent, * la

côte de l' Afrique occidentale et du golfe de Guinée, * la dorsale méridienne de l'Afrique orientale.

Cette répartition différenciée se fonde sur des héritages successifs :

semis urbain précolonial : Fès, Djenné, Tombouctou, Yoruba

l'impact de la colonisation : naissance des villes capitales administratives (Bamako, Yaoundé) ou villes portuaires (Abidjan), ou interface océan – continent (Dakar).

depuis les indépendances  : explosion urbaine (Pikine indépendante) ; exode devant la désertification (Rosso) ; décision politique (Capitale transférée à Yamoussoukro Abuja)

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

2) une croissance spectaculaire en voie de ralentissement

la plus forte croissance urbaine au monde : Conakry, capitale de la Guinée, a vu sa population

multipliée par 60 entre 1950 et 1990. .

De 1950 à 1990, la population urbaine a été multipliée par 10 en Afrique sub-saharienne, tandis que la population totale triplait

taux moyen de 5 % l'an - soit un doublement de la population urbaine en 14 ans- l'Afrique vit sur un temps court un processus que l'Europe a réalisé sur 2 à 3 siècles.

Avec les plans d'ajustement structurel qui frappe particulièrement les villes, la croissance se ralentirait ... mais en chiffres absolus, elle reste considérable (le Caire s'accroît de 220 000 habitants par an)

La croissance urbaine aura été particulièrement explosive au lendemain des indépendances avoisinant les 10 % par an et profitant aux grandes métropoles

Scan carte p 103

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

les facteurs de l' explosion urbaine  :

la dynamique naturelle est devenue aujourd'hui le facteur principal. Même si l’urbanisation accélère le processus de transition démographique par rapport au monde rural (contraception mieux diffusée, plus scolarité, plus de salariés...) car la natalité reste en raison de la jeunesse de la population, et d'autre part, la baisse de la mortalité est également plus forte que dans les campagnes

Les mouvements migratoires, facteur principal dans la phase de forte croissance de la période 1950-1970, ne sont plus aussi déterminants ; la crise économique conduit les mouvements dans les deux sens ;

les migrants ruraux sont attirés par l'espoir de trouver l'emploi, d'être mieux scolarisés et soignés, de s'approprier les biens de la modernité proposés par la ville en contact avec les flux mondiaux.

D'autre part on assiste à des retours à la campagne, notamment dans les Etats fortement touchés par la crise depuis les années 1980, suite à la chute des cours des matières premières, au développement de l'insécurité urbaine et à la montée de la corruption : Kinshasa pour la croissance trop rapide ou Dakar pour le sous emploi

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

Une croissance consommatrice d’espace  l'horizontalité de la ville avec parfois un caractère semi-rural. Cet étalement est une

reproduction de la trame de l'habitat des campagnes, mais il est aussi provoqué par la précarité de l'habitat et à une occupation du sol mal maîtrisée

La croissance peut se réaliser aussi par densification du tissu urbain pré-existant,  par extension verticale ou par formation de villes satellites en périphérie de l'agglomération ; les trois processus peuvent se réaliser simultanément dans le cas de la métropole du Caire.

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

2 – L’organisation et diversité des villes Africaines Des villes –capitales, des villes dominantes, des villes importantes !

Les villes primatiales, voire macrocéphales regroupent en moyenne 30 à 60 % de la population urbaine et sont de 3 à 5 fois plus peuplées que la seconde ville du pays ; on pourrait les classer en trois types :

       - systèmes macrocéphales : Sénégal, Tunisie, Côte d' Ivoire, Mali, Guinée, Madagascar... La capitale concentre > 1/5 de la population totale du pays et > 60% de la population urbaine (55 % pour Dakar et 80 % pour Conakry)        - systèmes bipolaires : au Cameroun, Yaoundé est la métropole administrative et Douala, la métropole économique.        - systèmes multipolaires hiérarchisés fréquents :Afrique du nord (Algérie, Maroc) et en Afrique australe, mais aussi Nigeria, la République démocratique du Congo.

Quel urbanisme ?

L’héritage précolonial et colonial transparaît dans les paysages actuels des villes africaines.

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

Afrique arabo-musulmane : la médina souvent édifiée sur un site défensif (Casbah d' Alger) est le cœur ancien de la cité ; elle s' organise autour de la mosquée avec son dédale de rues étroites et ses impasses ou venelles. Malgré des programmes de réhabilitation, les quartiers de la médina sont gagnés par la paupérisation et la surdensification. S'y juxtaposent la ville européenne et les extensions urbaines.

l'Afrique de la ségrégation raciale : l'exemple de Harare, capitale du Zimbabwe, l'ancienne Rhodésie du sud devenue indépendante au début des années. Le compartimentage de la ville montre les effets toujours visibles de l'application de la loi d'apartheid ayant conduit à une ségrégation raciale et sociale.

- l'exemple de la ville du Cap (Cape Town) ou de Durban en Afrique du sud : La législation de l'apartheid avec notamment le "group areas Act" de 1950 sectionne la ville en quartiers racialement homogènes : quartiers blancs, indiens, townships de la  population africaine. 

La ville de l'apartheid est donc éclatée, fragmentée avec des zones de vide qui introduisent une discontinuité dans le tissu urbain.

la ville coloniale : la différenciation entre les quartiers européens et la ville indigène : L’exemple de Dakar

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DAKAR (SÉNÉGAL

un promontoire à l'extrémité de la presqu'île du cap vert la ville européenne dénommé "le plateau" avec une division fonctionnelle du territoire, des lotissements standardisés la ville indigène délimitée après 1914 (la "médina" dakaroise), est aménagée après la guerre en lotissements destinés aux "évolués" .

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

Des villes "légales" et des villes "illégales"

- la ville légale est celle qui relève des normes occidentales, avec l' héritage de la période coloniale ; elle comprend :* le centre politique, administratif et les quartiers des services marchands de la finance et de l'import-export ( Dakar et le quartier du "Plateau"); le paysage urbain est caractérisé par de grandes avenues bordées d'immeubles à étage, de carrefours et parcs ayant conservé des monuments rappelant le passé colonial

* les quartiers des classes aisées à Dakar s'étirent le long de la corniche maritime entre Fan et Ouakam, et se prolongent jusqu' à la pointe des Almadies.

* les quartiers de logements sociaux, détournés au profit des classes moyennes et des fonctionnaires de l'Etat, mais souvent dégradés (le "Grand Dakar" ) : on y trouvent des lotissements de maisons d'un seul niveau et des immeubles de type HLM

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

la ville illégale est constituée de quartiers d'habitat populaire avec une propension à s'étaler considérablement et anarchiquement sur les terrains non parcellisés. Elle reçoit la grande majorité des citadins rejetés de la ville moderne : ex Dakar-Pikine :

cet habitat autoproduit permet de résoudre partiellement la crise du logement non maîtrisée par les pouvoirs publics et montre la capacité des africains à gérer la précarité ; l'espace "irrégulier" pourra ultérieurement bénéficier de projets d'amélioration dans le cadre de lots viabilisés

des habitats précaires auto-construits sont restructurés avec l'aide de la Banque mondiale (desserte en eau et électricité, voirie hiérarchisée, assainissement, légalisation foncière)

DAKAR-PIKINE :est une banlieue située à 13 km au nord-est de Dakar, aménagée à partir de 1952 sur les terres de deux villages de pêcheurs lébou (Thiaroye et Yembeul) afin de décongestionner les quartiers populaires de la capitale.

A partir de lots "assainis" et ordonnés par la voirie qui dessine une trame géométrique, des villages ethniques se reconstituent avec leurs associations de solidarité, la mosquée, le poste de santé, l'école : la ville est africanisée sans une copie servile du modèle occidental, mais en tenant compte des traditions des villages d'origine.

Finalement, aux portes de Dakar, s'est développé une ville qui compte autant d' habitants que la capitale.

Aujourd'hui, majoritairement la croissance spatiale des villes africaines se fait selon un processus illégal : l' espace ainsi occupé représenterait plus de 40 % de la surface urbaine et logerait 70 % des citadins

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

La diversité des grandes villes africaines

- la grande ville arabo-musulmane : Le Caire, Alger, Tunis, Casablanca.

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

-le grand port maritime de l' Afrique occidentale et du golfe de Guinée : Dakar, Abidjan, Lagos, Douala.

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- le grand port fluvial d'Afrique centrale: Brazzaville, Kinshasa.

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

- la capitale macrocéphale de l'état sahélien au caractère semi-rural : Bamako

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

- la grande métropole d'Afrique australe post-apartheid : Johannesburg, Le Cap, Durban.

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

L'URBANISATION EST- ELLE UN FACTEUR DE DEVELOPPEMENT ?

La dualité entre le secteur formel et informel est à la base de la réponse !

Le secteur formel concentre :les activités du tertiairel'activité manufacturière légale les activités de l’artisanat place croissante de l'agriculture

L’importance du secteur informel…

un ensemble d'activités non officiellement déclarées, difficilement répertoriées, ce qui fait dire aux critiques qu' il détourne une partie des recettes fiscales de l 'Etat ; au contraire d'autres y voient le régulateur économique et social face à la crise.

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

l'économie informelle fait vivre ou survivre un grand nombre d'actifs (90 % à Cotonou ; 51 % à Douala ; 37 % à Bamako ...)

l'importance des métiers de la récupération ou "économie de la débrouille«  : des petits services de la reprographie à Yaoundé ou dans le secteur des transports assuré par des minibus privés à Dakar

-l'informel peut-il continuer à jouer un rôle régulateur face à la crise urbaine ?

- l' économie populaire du secteur de l'informel répond aux urgences de la société fournissant des produits à faible prix, créant des emplois et développant l'apprentissage ;

Mais avec la pression démographique et les politiques d'austérité, on peut s'interroger sur les capacités de l'informel à répondre aux nouvelles nécessités

Si le secteur est inventif, il ne gagne pas en productivité ; le secteur informel peut même être destructeur des écosystèmes dans le cas du négoce du bois de feu pour la consommation domestique

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

La ville est un lieu d'échanges et de socialisation

La ville est l'espace privilégié du changement social par le contact avec le monde extérieur et la diffusion de la connaissance.

Des liens de solidarité communautaires se maintiennent entre le jeune migrant et le village d'origine. Ces rapports sont définis par un système coutumier de droits et d'obligations au présent et au futur.

la crise urbaine dissocie les solidarités et rend les liens plus lâches. Les liens existent mais jusqu’à quand ?

la ville africaine est un foyer de création, d'innovation

l'identité citadine et l' image positive de la ville sont défendus par les promoteurs de la musique moderne africaine et urbaine : les chanteurs et compositeurs Youssou N'DOUR, Wasis DIOP, Oumou Sangare... puisent leur inspiration dans la  tradition du griot africain et dans les apports du monde occidental.

La ville est un lieu d'échanges et de diffusion culturelle, à l'exemple de Bamako et ses rencontres littéraires, ses ateliers de sculpteurs

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VILLES AFRICAINES : CROISSANCE, ORGANISATION ET DÉVELOPPEMENT

Si la ville est l' espace de la vie et de la survie, il apparaît qu'elle apporte plus de bien-être que le monde des campagnes, qu'elle contribue à la création, à la modernité pour le futur. Mais les défis à gérer sont à la démesure de sa croissance

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LA CRISE URBAINE

1- les dysfonctionnements de la ville africaine 

Le problème du foncier et la crise du logement l' étalement spatial et la fragmentation du tissu urbain manifestent l’impossibilité des

autorités à canaliser l’avancée anarchique du front d’urbanisation ou la surdensification des centres.  On rappellera que 40 à 70 % des citadins vivent dans des constructions illégales.  

Les afflux importants de population en périphérie rendent dérisoires les programmes d’habitat insuffisants ou financièrement inaccessibles aux couches les plus pauvres de la population ; sans compter les méfaits de la corruption et du clientélisme qui détournent les programmes de leurs destinataires initiaux

Les flux intra-urbains et le problème des transports 

Aux flux de migrants des campagnes vers la ville, s’ajoutent donc les migrations intra-urbaines que les autorités ne peuvent accompagner, compte-tenu de l’indigence des services publics

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LA CRISE URBAINE

Les problèmes d'environnement 

l'alimentation en eau : à Dakar, le taux de branchement à l'eau potable est de 30 %, sans pouvoir préciser s’il s’agit de desserte à domicile ou aux bornes-fontaines publiques plus facilement sujettes à des formes de pollution

l'évacuation des eaux pluviales, des eaux usées et des ordures ménagères : leur traitement dépasse les capacités financières des villes 

la consommation de bois de feu utilisé pour les besoins domestiques ;

L’insécurité est une autre donnée de la vie urbaine : l’insécurité sanitaire plane sur les quartiers d’habitat spontané et se double de l’insécurité foncière menaçant les

familles récemment installées.

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LA CRISE URBAINE

Quelles réponses aux défis de la crise urbaine ?

Des ambitions internationales …

La Conférence Habitat d'Istanbul en 1996 a insisté sur la nécessité de mener des actions intégrées et participatives en vue de rendre les villes plus sûres, saines et justes : le droit au logement est reconnu comme une des priorités dans les droits de l'homme, de même que l'accès aux services de base comme l'eau potable et l'assainissement

les nouvelles stratégies recommandées par la banque mondiale privilégient les programmes de parcelles assainies (les trames d'accueil) et des logements sociaux. Il s'agit d'africaniser la ville sans une copie servile du modèle occidental. En partant de l’existant, les quartiers se voient octroyer progressivement la distribution de l'eau et de l’électricité

Les tentatives de planification urbaine et de recomposition spatiale 

dans les ville du Maghreb : Tentative d'aménagement métropolitain : l'exemple de la ville du Caire. Intégrer les villes satellites ; dvp les infrastructure de transport en commun ; imposer les normes de pollution aux industries

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LA CRISE URBAINE

dans les villes d'Afrique noire :les politiques de freinage de la croissance des grandes villes qui vise à renforcer les niveaux inférieurs de la hiérarchie urbaine ou en procédant à des opérations de transfert de compétences administratives (création de nouvelles villes capitales : Côte d’Ivoire, Nigeria) ou en dotant les extensions urbaines périphériques d'une véritable autonomie administrative avec les effets induits pour leur équipement (exemple de la ville de Pikine au nord-est de Dakar

dans les villes de l'apartheid  rompre le cloisonnement géographique hérité de la période de la politique de l'apartheid.

Recréation d’un espace public en y faisant vivre collectivement des groupes sociaux qui s'ignorent ou qui exercent un effet de repoussoir.

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CONCLUSION

Quelle croissance future pour les grandes villes d'Afrique ?

Le ralentissement qui paraît s'être amorcé depuis une vingtaine d'années va -t-il durer ?

Peut-on interpréter ce ralentissement  comme s'inscrivant  dans une phase de transition urbaine avancée ?

Le ralentissement s'explique par la crise économique et sociale qui frappe l'Afrique sous-industrialisée et marginalisée dans les échanges mondiaux. Une industrialisation de l'Afrique redonnerait à la ville sa fonction attractive pour l'emploi et contribuerait à l'accélération de l'urbanisation… ?...

Pour l'ONU, le taux d'urbanisation restera le plus fort  du monde et une croissance annuelle de 4 % jusque 2015 est possible

Restent  les problèmes qui donnent dans la démesure, compte-tenu de la soudaineté et la force du processus d'urbanisation

Les villes africaines montrent des niveaux de pauvreté, mais pas systématiquement de la misère... les populations innovent et vivent dignement. Formidable capacité à se solidariser. Ils inventent des solutions avec un sens de la débrouille remarquable…

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CONCLUSION

La grande ville en soi n’est ni un facteur de non développement, ni un facteur de développement. Elle est facteur de développement si les acteurs sociaux, les Etats investissent dans les infrastructures et assument leur rôle. (Dubresson)

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BILBIOGRAPHIE

Ce cours est inspiré de : Marie Morelle (cours politiques de développement, Paris) Michel Lesourd (cours de géographie de l’Afrique, Rouen)

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TAUX D’URBANISATION EN 2001

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Le Caire : 17.5 millions d’habitants

Lagos: 11.3 millions d’habitants Johannesburg : 7.6

millions d’habitants

Kinshasa : 10 millions d’habitants

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DJENNE UNE VIELLE VILLE

Habité depuis 250 av. J.-C., le site de Djenné s'est développé pour devenir un marché et une ville importante pour le commerce transsaharien de l'or. Aux XVe et XVIe siècles, la ville a été un foyer de diffusion de l'islam..

Ses maisons traditionnelles, dont près de 2 000 ont été préservées, sont bâties sur des petites collines toguere et adaptées aux inondations saisonnières