dr. pamo tedonkeng etienne professeur directeur des pâturages, de lalimentation et des...

Dr. PAMO TEDONKENG Etienne Professeur Directeur des Pturages, de lalimentation et des infrastructures dlevage MINEPIA

I. Introduction

La complexit des situations des productions animales dans lAfrique daujourdhui ne saccommode pas de jugements simplistes. Dans ce domaine, la rflexion conomique ne saurait tre dissocie dapproches plus comprhensives recourant lobservation approfondie de lespace et lintuition. Le cas particulier du Cameroun est fort loquent. En effet, le Cameroun est une terre de diversit et de contrastes. Il rassemble sur une superficie denviron 475 000 km 2 les principaux cosystmes des zones quatoriales et tropicales.

Cependant, laccroissement de la population rurale entrane un accroissement de la pression sur les ressources donc une baisse des rendements. Au Cameroun comme partout en Afrique, laccroissement de la pression foncire sest traduit par une surexploitation du milieu et une dgradation de lenvironnement mettant en pril la durabilit de la production rurale

Pourtant, depuis le rapport de la commission Brundtland, notre avenir tous, paru en 1987, lespace rural et au-del lenvironnement est devenu un sujet de proccupation pour tous les tats de la plante. Une telle croissance a profondment modifi les conditions de production. Le changement de rapport entre population et espace sest fait dans un laps de temps trop court pour que les populations rurales concernes puissent adapter leurs systmes de production ces nouvelles conditions environnementales.

Elles ont conserv des modes dexploitation devenus obsoltes qui ont entran une dgradation progressive de leur environnement Notre satisfaction est, la participation du Cameroun tous les fora internationaux o sont dbattus les diffrents aspects de lutilisation de lespace. Cet effort donne la mesure de la prise de conscience des enjeux pour les gnrations prsentes et futures.

La diversit des zones agro-cologiques allie une ingale rpartition de la population se traduit par des activits anthropiques varies. Lacuit des problmes lis lutilisation de lespace varient donc en fonction des zones agro-cologiques. Pour mieux cerner lobjet de notre expos, il convient de se pencher sur les concepts cls de notre thme savoir :

II. Contraintes lutilisation de lespace en production animale

Les contraintes dsignent la pression exerce sur quelquun pour lobliger agir ou len empcher. Pour ce qui est des contraintes lutilisation de lespace il est question de recenser les principales causes qui mnent vers une drive dans lutilisation de lespace. Les incidences sont des rpercussions ou les consquences dune action ou dun phnomne.

Dans la plus grande partie de l'Afrique sub-saharienne, une croissance dmographique rapide et incontrle est la cause de problmes sociaux, conomiques et cologiques, face la fixit de lespace exploitable et des ressources naturelles qui leur sont associes. Cette population exerce une pression accrue sur lespace et du fait de lutilisation des pratiques qui ne permettent pas une production durable, cette pression concourt la rgression de la productivit du milieu.

2.1.Contraintes lies lutilisation de lespace dans la partie septentrional Les migrations en zone soudano-sahlienne sillustre depuis plusieurs sicles travers des mouvements spontans ou organiss. Les longues priodes de scheresse qui conduisent la dgradation de lespace dans les zones de dpart des migrants ;

La surpopulation de certains espaces notamment dans les plaines de lextrme Nord et les Monts Mandara ; Lintolrance des populations locales vis--vis des leveurs quils considrent comme tranger et laquelle ils aimeraient imposer le payement dun tribut. Limbrication sans aucun amnagement des activits agricoles et pastorales dans le mme espace ;

La non matrise des techniques intensives permettent laccroissement de la production par unit de surface et la diversification de la production sur des espaces limits ; La volont de ladministration de rsorber les dsquilibres en crant des zones de colonisation, dans un but social (rsoudre les problmes de surpopulation) mais aussi conomique (initier le dveloppement de cultures de rente)

Dans tous les cas de figure, les migrations mettent en opposition deux catgories sociales : Les autochtones et les trangers. Les problmes rsultent aussi bien de lincompatibilit des us et coutumes en prsence, de la comptition foncire, que de la lutte pour le pouvoir. Sur le plan du droit foncier, laccs la terre, trs rglement, accorde une marge bien facile la spculation

2.2.Contraintes lies lutilisation de lespace dans les zones du Centre, du Sud et de lEst Dans ces zones, en raison de la disponibilit des terres et la faible propension llevage du gros btail, les contraintes lis lexploitation de lespace sont moins frquents et existe principalement entre les populations et les exploitants forestiers. Selon les considrations traditionnelles, la terre et tout ce quelle comporte appartiennent la population locale. Or, ltat par le biais de concessions dexploitation des forts, leur arrache leurs forts pour le faire exploiter par des exploitants forestiers.

Autour des aires protges, les problmes naissent de loccupation des rserves de faune ou de forts par les leveurs. Cette occupation, irrgulire pour ltat est tout fait normal pour la population au regard du droit coutumier.

du point de vu foncier, un tel conflit rsulte de la pression dmographique qui oblige les populations tendre leur espace vital, le contexte conomique dfavorable et la mise en place de la nouvelle politique agricole qui incite les couches sociales, particulirement les plus dfavorises trouver refuge dans les activits rurales.

2.3.Contraintes lies lutilisation de lespace dans les rgions de lOuest, du Nord-Ouest, du Sud-ouest et mme du littoral Dans ces rgions, les contraintes lies lutilisation de lespace sont plus nombreuses et plus exacerbes que dans les autres rgions du pays. Les problmes lis lutilisation de lespace dans ces rgions opposent soit les particuliers entre eux, soit des particuliers ltat, soit des villages entre eux. Les problmes entre particuliers sont particulirement nombreux dans ces rgions en raison dune trs forte densit de la population et de la raret consquente de terres.

Les problmes entre les particuliers et ltat ont deux sources principales en milieu rural : Dune part, lexpropriation pour cause dutilit publique non suivie de lindemnisation des victimes. Dautre part, lattribution par ltat des terres coutumires des particuliers, gnralement les fonctionnaires ou danciens fonctionnaires.

Dans ce dernier cas, ces terres non immatricules appartenant au domaine national au regard de la loi de 1974 sont rputes sans matre alors quelles appartiennent gnralement des communauts villageoises, mme si elles ne sont pas mises en valeur. Des conflits opposent galement plusieurs villages dans les rgions considres. Les causes de ces conflits sont parfois la mconnaissance des limites territoriales fixes par les colonisateurs, et quelques fois les ambitions hgmoniques dun des protagonistes.

III. Incidences lies lutilisation de lespace pour les productions animales

Au Cameroun comme dans les autres tats du continent, lagriculture comme llevage peut tre lorigine des problmes cologiques non ngligeables surtout quand, cela, est associ des pressions diverses. 3.1.Incidences lies lutilisation de lespace pour les productions agro-pastorales Ces rpercutions ont une influence sur les ressources naturelles dj fortement entames par un climat austre et une vgtation quasi aride dans la partie septentrionale du Cameroun. Ces incidences sont nombreuses et se manifestent aussi bien sur lquilibre cologique que sur lenvironnement social :

a) Sur lquilibre cologique La restriction de l'espace pturable due l'incursion des agriculteurs conduit invitablement au surpturage ; La dgradation des espces de fourragres parce que trop apptes suite lexigut croissante des terrains de parcours ; La prolifration des espces indsirables (Chromoleana odorata, fougres,...) ; La dnaturation des sols due la surexploitation des surfaces, les prdisposant ainsi l'rosion ;

La raret des points d'eau d'abreuvement libre pour le btail, ce qui entrane une surexploitation voire une dgradation des points d'eau existants ; La diminution des zones de transhumance entranant une surexploitation et une dgradation concomitante de celles existantes ; Lexploitation communautaire des pturages. b) Sur lenvironnement social La diminution de la production agricole, ce qui entrane une recrudescence de la famine et de la disette dans les villages; La dissmination des maladies, due au regroupement plthorique des btes dans les rares zones de transhumance ;

Les pertes de poids des animaux enregistres par les leveurs cause des dplacement des btes sur de longues distances, faute de la disponibilit des points d'eau et des zones de transhumance rapproches, ce qui entrane des pertes montaires lors des ventes ; La migration des leveurs chasss d'une localit donne est susceptible de crer des difficults d'approvisionnement en btail dans cette localit, ce qui renchrit le prix de revient de la viande ; Lobstruction des pistes btail ou couloir de transhumance.

Au total, les consquences de ces contraintes sont extrmement graves. De telles situations entranent pour les diffrents protagonistes, des pertes matrielles normes (destruction des rcoltes, extermination des cheptels), des batailles ranges o on arrive parfois regretter des pertes en vies humaines.

IV. Perspectives du secteur

4.1.Evaluation Au regard de tout ce qui prcde, il y a lieu de faire les remarques suivantes : a) La prdominance des pratiques coutumires et relle en zone rurale et la rgulation foncire s'opre en grande partie l'cart du droit moderne. Le problme du foncier, en l'occurrence du rapport la terre est culturel.

La notion du foncier est intimement lie aux pratiques sociales et l'on ne peut en faire l'conomie lors de la mise en place d'une codification au niveau national. Le droit foncier moderne a introduit la notion de proprit individuelle et l'on constate que l'accs la rgularisation foncire par le biais des titres fonciers est faible.

b) L'absence d'une politique foncire qui prenne en compte l'ensemble des aspects du problme conduit au dcalage actuel. Le problme foncier se pose galement en termes de politique et lon peut se demander si l'organisation actuelle du foncier est favorable une bonne gestion de l'espace. Le domaine national n'est pas cartographi, et le chevauchement des rles dvolus aux divers intervenants ne favorise pas une gestion conservatoire de ce domaine.

c) La conservation du potentiel des espaces productives n'est pas une proccupation majeure. Or, les ressources en terre fertile ne sont pas illimites et les pratiques de production actuelle, aggraves par la pression dmographique constate dans certaines zones cologie fragile provoquent des dgts considrables sur l'environnement.

4.2.Recommandations a) Bien clarifier et dlimiter les proprits fonciers en encourageant particulirement l'appropriation prive. Le domaine national ne devrait tre exploit que sur des rgles tablissant un programme d'utilisation de l'espace arrt d'un commun accord par l'Etat, les agriculteurs et les leveurs. b) Rintroduire l'usucapion (accession la proprit rsultant de lusage ou de la possession) disparue depuis la loi foncire du 6 juillet 1947 en droit camerounais. Le titre foncier ne devrait dans ce cas, tre qu'un instrument de rgularisation. c) Prendre en considration les situations particulires des paysans travers les procdures d'immatriculation simplifier davantage.

d) Multiplier les campagnes d'information sur les mthodes d'utilisation, de conservation et de fertilisation des terres cultivables ; les villageois les utiliseraient pour leurs proprits prives et pour l'exploitation du domaine national. e) Renforcer l'autorit des Chef traditionnels qui, au lieu d'tre de simples membres d'une commission consultative devraient prsider en milieu rural de vritables juridictions de conciliation traditionnelles pour le rglement des litiges fonciers, puisqu'ils connaissent mieux que quiconque les hommes, la coutume, leurs mentalits et le fond des problmes.

dr. pamo tedonkeng etienne professeur directeur des pâturages, de lalimentation et des...

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