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Association pour la Fondation Internationale de Finances Publiques

26 rue de Lille – 75007 PARISTel : + 33 1 42 60 20 19Mail : [email protected] : www.fondafip.org

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Ce rapport est le produit de réflexions, de consultations et d’auditions de différentes personnesqualifiées qui ont été menées dans le cadre du groupe de recherche Contrôles financiers publics deFONDAFIP.

Ce rapport ne reflète pas les opinions et n’engage en aucune manière ni les personnes auditionnéesni les institutions dont elles sont membres.

Ce rapport n’engage pas non plus les institutions ou corps dont sont issus les auteurs.

Paris, le 9 décembre 2010

© Tous droits réservés. Toute reproduction ou adaptation intégrale ou partielle, par quelqueprocédé que ce soit du présent rapport est interdite sous peine de poursuites.

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Groupe de recherche Contrôles financiers publics

de FONDAFIP

Rapport

Pour une conceptualisationdu contrôle interne et de l’audit interne

dans la gestion financière de l’Etat

Membres du groupe de recherche :

Bernard CIEUTAT, Président de chambre honoraire à la Cour des comptes

Frank MORDACQ, Contrôleur budgétaire et comptable ministériel, Ministère du Budget,des Comptes publics et de la Réforme de l’Etat

Stéphane THEBAULT, Maître de conférences à l’Université de Bourgogne, Secrétairegénéral adjoint de FONDAFIP

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Liste des personnes auditionnées (par ordre alphabétique) :

Guillaume Boudy, Secrétaire général, et Catherine Ruggieri, Directrice

adjointe des affaires financières, Ministère de la Culture

Alain-Gérard Cohen, Inspecteur général des finances honoraire

Patrick Delage, Chef de la Mission de l’audit et du contrôle interne

budgétaires (MACIB), Ministère du Budget, des Comptes publics et de la

Réforme de l’Etat

Michel Dellacasagrande, Directeur des affaires financières, Ministère de

l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie

Christian Fontanel, Directeur de l’audit, Electricité de France

Henri Guillaume, Inspecteur général des finances

Alain Josserand, Chef de la Mission doctrine comptable et contrôle interne

comptable à la DGFIP, Ministère du Budget, des Comptes publics et de la

Réforme de l’Etat

Jacques Mordant, Ingénieur du génie rural, des eaux et des forêts, Mission

permanente d’inspection générale et de l’audit, Ministère de l’agriculture et de

la pêche

Pierre Hivert, Inspecteur général de l’agriculture, Mission permanente

d’inspection générale et de l’audit, Ministère de l’agriculture et de la pêche

Nathalie Morin, Chef du service comptable, Ministère du Budget, des

Comptes publics et de la Réforme de l’Etat

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SOMMAIRE

1. LA LOLF, MOTEUR DE TRANSFORMATION DES CONTRÔLES FINANCIERS ADMINISTRATIFS PUBLICS 7

2. UNE PRÉFIGURATION DE NOUVEAUX CONTRÔLES : L’INFLUENCE DU SECTEUR PRIVÉ, L’INFLUENCEINTERNATIONALE ET LA MULTITUDE DES NORMES 10

3. L’INTRODUCTION DU CONTRÔLE ET DE L’AUDIT INTERNES DANS LE SECTEUR PUBLIC FRANÇAIS 12

4. OBJECTIF DU RAPPORT DE FONDAFIP 14

1RE PARTIE : APPREHENDER LE CONTRÔLE INTERNE 15

1-1 LE CONTRÔLE INTERNE, UN DISPOSITIF DE MAÎTRISE DES RISQUES 16

1-1-1 UNE TRANSFORMATION DE LA LOGIQUE DES CONTRÔLES TRADITIONNELS EXERCÉS PAR LEMINISTÈRE EN CHARGE DU BUDGET ET DES COMPTES PUBLICS 161-1-2 DISTINCTION ET DÉFINITION DES NOUVEAUX CONTRÔLES 191-1-3 ORGANISATION STRUCTURELLE : NOUVEAUX ACTEURS, NOUVELLES STRUCTURES 23

1-2 LE CONTRÔLE INTERNE INVITE À APPRÉHENDER AUTREMENT LE CONTRÔLE FINANCIER PUBLIC24

1-2-1 CONTRÔLE INTERNE ET CONCEPTS TRADITIONNELS DU DROIT PUBLIC FINANCIER 241-2-2 LE CONTRÔLE INTERNE, UN NOUVEAU CONCEPT 25

1-3 LES MODALITÉS DU CONTRÔLE INTERNE BUDGÉTAIRE, DU CONTRÔLE INTERNE COMPTABLE ETDE L’AUDIT INTERNE. 27

1-3-1 CONTRÔLE INTERNE BUDGÉTAIRE 271-3-2 CONTRÔLE INTERNE COMPTABLE 281-3-3 AUDIT INTERNE BUDGÉTAIRE ET COMPTABLE 29

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2E PARTIE : INTERROGATIONS RELATIVES AUX CONTRÔLES ET AUDITS INTERNES ETRECOMMANDATIONS DU GROUPE DE RECHERCHE DE FONDAFIP 30

2-1 LA PLACE DU MINISTÈRE DU BUDGET ET LE RÔLE DES ACTEURS MINISTÉRIELS 31

2-1-1 MISE EN ŒUVRE AUTONOME OU STRUCTURE INTERMINISTÉRIELLE ? 312-1-2 LA FONCTION DES RESPONSABLES DE PROGRAMMES DANS LE CADRE DU CONTRÔLE ET DE L’AUDITINTERNES 322-1-3 LA PLACE DES CONTRÔLEURS BUDGÉTAIRES ET COMPTABLES MINISTÉRIELS (CBCM) DANS LECADRE DU CONTRÔLE ET DE L’AUDIT INTERNES 332-1-4 LA PLACE DU MINISTÈRE DU BUDGET DANS L’AUDIT INTERNE 332-1-5 AUDIT INTERNE DE SECOND NIVEAU OU COMITÉ D’HARMONISATION ? QUELLE PLACE DOITRECOUVRIR LE MINISTÈRE DU BUDGET DANS LE CADRE DE L’ORGANISATION ET LA MISE EN ŒUVRE DESNOUVEAUX CONTRÔLES ? 352-1-6 DÉVELOPPER DES COMITÉS D’AUDIT AU NIVEAU MINISTÉRIEL 38

2-2 CONFÉRER AU CONTRÔLE INTERNE ET À L’AUDIT INTERNE UNE LÉGITIMITÉ JURIDIQUE 392-2-1 ASSEOIR LES DÉFINITIONS ET LES CONTOURS DE CHACUN DES TERMES : CONTRÔLE, CONTRÔLEINTERNE, AUDIT, ÉVALUATION, INSPECTION 392-2-2 ENCADRER ET LÉGITIMER LE CONTRÔLE ET L’AUDIT INTERNES 402-2-3 UN OU DES TEXTE(S) ? 412-2-4 INTÉGRER LE CONTRÔLE ET L’AUDIT INTERNES DANS LE DÉCRET DU 29 DÉCEMBRE 1962 422-2-5 ASSEOIR LE CONTRÔLE ET L’AUDIT INTERNE COMME DES ÉLÉMENTS D’ORGANISATION DESSERVICES DE L’ETAT 422-2-6 APPUYER ET ASSURER LE DÉVELOPPEMENT DU CONTRÔLE INTERNE BUDGÉTAIRE 43

7

PREAMBULE

1. La LOLF, moteur de transformation des contrôles financiers

administratifs publics

Il y aura bientôt presque dix ans, la loi organique du 1er août 2001 relative aux

lois de finances (LOLF) était adoptée pour modifier profondément la structure

et l’exécution budgétaire en y introduisant, notamment, une logique de

performance. En ce sens, elle donne à l’ensemble des ministères plus de

liberté et de responsabilité en matière financière. Mais les transformations

qu’elle induit dépassent le seul domaine budgétaire s’agissant, notamment,

des contrôles financiers.

En ce domaine, de nombreuses transformations peuvent être observées.

C’est le cas s’agissant des missions de la Cour des comptes, du contrôle

parlementaire ou encore de celui des corps d’inspection. Par ailleurs, si le

contrôle des comptables publics tend à s’alléger, le contrôle financier a

également mué en un contrôle budgétaire recentré sur les principaux enjeux1.

L’exigence d’une qualité comptable

Portant au niveau organique le principe de sincérité des comptes de l’Etat2, la

LOLF confère à la comptabilité de l’Etat une nouvelle dimension et une

importance confirmée par le Conseil constitutionnel3 dans un premier temps

puis, plus récemment, par le pouvoir constituant4 qui introduit dans le texte

constitutionnel un article 47-2 qui dispose in fine : « Les comptes des

administrations publiques sont réguliers et sincères. Ils donnent une image

fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation

financière »5. La LOLF met en place une comptabilité générale fondée sur les

1 Décret n°2005-54 du 27 janvier 2005 relatif au contrôle financier au sein des administrations de l’Etat.2 Cf. sur ce point : Le principe de sincérité en finances publiques, RFFP, n°111, sept. 2010.3 Décision n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001.4 Loi constitutionnelle 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Vème République, JORF du 24juillet 2008, art. 22.5 Sur la qualité comptable, voir :- N. Morin, La qualité comptable, un enjeu méconnu mais primordial pour la réussite de la LOLF, Rev. du Trésor, n°10,oct. 2005.

8

droits et obligations. Les comptables publics sont garants de la qualité

comptable. En outre, la LOLF confère à la Cour des comptes, dans le cadre

de sa mission d’assistance au Parlement et au gouvernement, le rôle de

certificateur de la comptabilité générale6 de l’Etat.

L’exigence d’un contrôle de la soutenabilité budgétaire

Par ailleurs, en plus d’être garant de la qualité comptable le ministre du

Budget est également “garant de la soutenabilité budgétaire”, c’est-à-dire du

de l’autorisation budgétaire parlementaire dans ses dimensions annuelle et

pluriannuelle.

En ce sens, les contrôleurs budgétaires et comptables ministériels sont

chargés, notamment par le biais d’un visa préalable sur les engagements de

dépenses à forts enjeux7, de s’assurer que l’exécution budgétaire est

conforme à l’autorisation ainsi que de suivre la situation financière du

ministère8.

De plus, et mettant en œuvre les dispositions organiques relatives à la

comptabilité de l’Etat, un référentiel de comptabilité budgétaire a été défini en

janvier 20099 qui est un document destiné à définir et préciser les principales

notions qui régissent et structurent la comptabilité budgétaire.

L’exigence d’un nouveau partage des fonctions d’ordonnateur et decomptable public

L’exigence de qualité comptable, la liberté de gestion conférée aux ministères

ainsi que le développement de nouveaux outils d’enregistrement et

d’information comptable ont favorisé l'émergence et le développement de

nouveaux rapports entre les acteurs de la dépense. En ce sens, les contrôles

- A. Caumeil, Qualité comptable et contrôle interne comptable, Rev. du Trésor, n°2, fév. 2006.- N. Morin, La nouvelle comptabilité de l’Etat, une dynamique partagée au service de la gestion publique, RFFP, n°93,fév. 2006.- S. Thebault, A quoi sert la qualité comptable ?, RFFP, n°112, novembre 2010.6 Décision n° 2009-585 DC du 6 août 2009.7 Décret n° 2005-54 du 27 janvier 2005 relatif au contrôle financier au sein des administrations de l’Etat.8 Décret n°2005-1429 du 18 novembre 2005 relatif à l’organisation et aux emplois de direction des services du contrôlebudgétaire et comptable ministériel (art. 7).9 Référentiel de comptabilité budgétaire, Ministère du Budget, janvier 2009.Disponible sur :http://www.performance-publique.gouv.fr/fileadmin/medias/documents/ressources/circulaires/recueil_comptabilite_budgetaire.pdfA ce titre il reprend les éléments contenus dans les textes de niveau supérieur (LOLF, lois de finances, décrets etarrêtés) pour en donner une vision aussi complète et intégrée que possible. Il reprend également des dispositionsexistantes qui peuvent se trouver dans différents textes d’application.

9

du comptable public ont été allégés et hiérarchisés et s’intègrent désormais

dans une logique partenariale. De nouveaux processus d’exécution ont été

mis en œuvre au sein de certains services de l’Etat (centres de services

partagés, services facturiers). L’ensemble des acteurs de la dépense sont,

dès lors, invités à prendre part à l’enregistrement comptable.

Ces changements induisent une transformation des modes traditionnels de

contrôle de la dépense ainsi que le développement de nouveaux processus

garantissant la bonne tenue de la comptabilité. Néanmoins, on soulignera ici

que reste effective la spécificité française du contrôle et de l’exécution des

opérations de recettes et de dépenses par un agent relevant du statut unique

de comptable public.

10

2. Une préfiguration de nouveaux contrôles : l’influence du secteur privé,

l’influence internationale et la multitude des normes

L’exigence de qualité comptable a été importée du secteur de l’entreprise où

est né et s’est développé le contrôle interne, en raison de la certification des

comptes par les commissaires aux comptes.

En leur sein, les entreprises ont développé et mis en place des processus de

contrôle interne visant à identifier, maîtriser et informer leurs dirigeants quant

aux risques liés à leur secteur d’activité. Plus spécifiquement, à la suite de

certains scandales financiers, l’exigence de confiance dans l’information

financière et comptable communiquée par les entreprises a conduit les

législateurs à donner force obligatoire au contrôle interne afin de garantir la

fiabilité des comptes. Ainsi, en 2002, la loi Sarbanes-Oxley a renforcé le lien

entre certification des comptes et contrôles internes en obligeant les

commissaires aux comptes des sociétés américaines côtés en bourse à

valider par un rapport le contrôle interne établi par la société. En Europe, et

notamment en France, le législateur s’est inspiré de la législation américaine

en prévoyant l’observation par les commissaires aux comptes des procédures

de contrôle interne pour les sociétés faisant appel à l’épargne dans le cadre

de la loi dite « de sécurité financière » du 1er août 200310.

Dès lors, la qualité comptable s’est imposée comme une exigence ayant fait

naître un mouvement de standardisation de la maîtrise interne des risques par

la normalisation des processus d’exécution : le contrôle et l’audit internes.

10 Loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière, JORF du 2 août 2003, modifiée.Cf. art. 225-37 al. 6 et 225-68 al. 7 du code de commerce (s’agissant des sociétés anonymes).Cf. art. 225-235 du code de commerce (s’agissant des commissaires aux comptes).En savoir plus : « Le dispositif de contrôle interne : cadre de référence », IFACI, janvier 2007, pp. 7 et suiv.http://www.ifaci.com/fo/page.asp?id=330

11

En matière comptable, plusieurs standards internationaux ont été définis puis

étendus au secteur public. On trouve notamment ceux édictés par :

Le COSO (Committee Of Sponsoring Organizations of the Treadway

Commission) : Groupe associatif (avec l’IIA et l’AAA American Accounting

Association) formé en 1985 auprès de la Commission nationale de lutte contre

la fraude financière aux Etats-Unis qui formule des recommandations ainsi

que des standards d’organisation et de contrôle interne. Le COSO a proposé

un premier référentiel dénommé COSO 1 puis, en 2002, un second appelé

COSO 2.

en savoir plus… : http://www.coso.org

L’IIA (Institute of Internal Auditors) : Association créée en 1941 et membre du

COSO.

en savoir plus… : http://www.theiia.org

L’IFACI (Institut Français de l’Audit et du Contrôle Interne) : Fondé en 1965

sous le statut associatif, l'IFACI fédère des auditeurs internes et différents

autres acteurs du contrôle interne. Il aide les entreprises et toute autre

organisation à se doter d'un dispositif de contrôle interne et promeut l'audit

interne dans les secteurs privé et public.

en savoir plus… : http://www.ifaci.com

Par ailleurs, à partir des années 1990, la Commission européenne a

développé et proposé des normes de contrôle interne directement empruntées

à la gestion des entreprises : le PIFC (Public International Financial Control)

(contrôle financier interne public).

en savoir plus… : http://www.pifc.eu

12

3. L’introduction du contrôle et de l’audit internes dans le secteur public

français

Comme il s’était précédemment diffusé et imposé dans les grandes

entreprises pour l’ensemble de leurs risques, le contrôle interne s’impose

aujourd’hui à l’Etat et se développe, en matière financière*, sous deux formes

: le contrôle interne budgétaire (CIB) et le contrôle interne comptable (CIC)11.

Ils expriment deux enjeux en matière de gestion financière publique. D’une

part, un enjeu de soutenabilité budgétaire et, d’autre part, celui de qualité des

comptes en référence à la tenue des différentes comptabilités de l’Etat.

Dans un rapport de décembre 2008, l’Inspection générale des finances

analysait les fonctions d’audit et d’évaluation dans les administrations de cinq

pays. D’une manière générale, ce rapport révélait que les pays observés

avaient mis en place une activité d’audit et de contrôle interne préalable à un

audit externe visant à certifier les comptes, et que la France « était en retard

par rapport à ses homologues étrangers »12.

De même, dans son rapport sur la certification des comptes de l’exercice

2008, la Cour des comptes réitère une réserve substantielle soulevée depuis

2006 s’agissant de « l’incapacité des dispositifs ministériels de contrôle interne

comptable et financier et d’audit interne à donner au certificateur une

assurance sur la maîtrise, par l’ensemble des ministères, des opérations

concourant à la production des états financiers (…) »13.

Qu’il s’agisse d’une entreprise ou de l’Etat, la certification des comptes

implique et impose un contrôle interne et une fonction d’audit interne.

En octobre 2009, l’Inspection générale des finances a rendu public un rapport

relatif à la structuration de la politique de contrôle et d’audit internes de

• Ci-après “Contrôle interne” dans le rapport.11 V. infra.12 Inspection générale des Finances, n° 2008-M-052-01 ,Rapport de la Mission de comparaisons internationales relativeà l’audit et l’évaluation dans les administrations de cinq pays de l’OCDE et de la commission européenne, établi par H.Guillaume et N. Colin, Décembre 2008. Synthèse, p. 3.13 Cour des comptes, Certification des comptes de l’Etat, exercice 2008, mai 2009, p. 21.

13

l’Etat14. Les auteurs de ce rapport ont examiné les dispositifs de contrôle

interne et d’audit interne développés et mis en place dans les ministères. Il en

ressort que même si le développement de ce processus est très inégal selon

les ministères ou les administrations en fonction de leur périmètre d’activité,

on peut en souligner l’essor et la diffusion.

On notera que, dans son rapport de certification des comptes de 2009, la Cour

des comptes reconnaît « l’importance des progrès accomplis depuis trois

exercices » ainsi que les « avancées importantes en 2009 » de la démarche

ministérielle d’identification et de maîtrise des risques comptables.

Néanmoins, elle réitère sa précédente réserve substantielle relative à

« l’effectivité et à l’efficacité insuffisantes » des dispositifs ministériels de

contrôle et d’audit internes encore en cours de déploiement dans certains

ministères15.

14 Inspection générale des finances, Rapport relatif à la structuration de la politique de contrôle et d’audit internes del’Etat, n° 2009-M-043-01, octobre 2009.15 Cour des comptes, Certification des comptes de l’Etat – exercice 2009, mai 2010, pp. 23 et suiv.

14

4. Objectif du rapport de FONDAFIP

Contrôle interne ou audit interne sont d’autant plus difficiles à cerner que ces

notions sont nouvelles, étrangères à l’Etat, tout en étant voisines d’autres

concepts beaucoup plus traditionnels en droit public financier.

Se limitant au contrôle interne budgétaire et comptable ainsi qu’à l’audit

interne en matière budgétaire et comptable (que l’on peut qualifier de contrôle

et d’audit interne en matière financière), et sachant que les enjeux d’un

dispositif de contrôle interne portent d’abord sur les activités liées aux

missions assurées par les ministères, l’objectif de ce rapport est triple :

• Analyser le contrôle et l’audit internes au sein des services de l’Etat et

contribuer à leur compréhension et à leur conceptualisation,

• Clarifier le concept de contrôle interne au sein de la classification des

contrôles financiers publics,

• Formuler des propositions compte tenu du développement et de la diffusion

croissante du contrôle et de l’audit internes en matière financière.

Le groupe rejoint sur ce point certains des constats formulés par les auteurs

du dernier rapport de l’Inspection générale des finances (IGF)16. Le rapport de

l’IGF considère que « les missions d’audit interne sont centrées sur des

enjeux de contrôle interne concernant l’organisation administrative, plus que

sur des enjeux du ressort de l’échelon politique : elles n’attirent donc pas

aujourd’hui l’attention directe des membres du gouvernement et de leurs

cabinets »17.

Aussi, le groupe de recherche de FONDAFIP entend favoriser par ce rapport

la compréhension et la diffusion du concept de contrôle et d’audit internes.

16 Rapport precit.17 Rapport précit., p. 16.

15

1re partie : Appréhender le contrôle interne

Le développement du contrôle interne au sein de l’Etat illustre une

transformation globale de la logique de contrôle. Il se distingue d’autres

formes de contrôles et sa mise en œuvre s'appuie sur de nouvelles structures

(1-1). Ce contrôle est un contrôle interne à l’administration et, plus encore,

intégré au sein des services. Mais l’audit interne, avec lequel il est lié,

s’appuie, quant à lui, sur un organe extérieur au service. C’est le sens du

terme « interne » ou « externe » qu’il convient d’appréhender différemment

par rapport aux concepts de contrôles internes ou externes traditionnellement

utilisés.

Le contrôle interne est difficile à appréhender car le sens même du terme

contrôle s’écarte de celui que le droit public financier lui réserve

habituellement (1-2).

16

1-1 Le contrôle interne, un dispositif de maîtrise des risques

L’ensemble des contrôles financiers se transforme. Les contrôles traditionnels

évoluent et se recentrent sur les enjeux financiers les plus importants. Dans le

même temps, apparaissent de nouveaux contrôles exercés par les ministères.

Ces contrôles naissent ou se développent sous des formes et dénominations

liées à l’introduction, dans la sphère publique, d’une logique de gestion faisant

appel à des méthodes utilisées dans le cadre du management des entreprises

(contrôle de gestion, évaluation …). Dans leur nature, ils se rapprochent des

contrôles en vigueur dans le secteur privé, leur objectif étant la mesure de

l’efficacité de la gestion et sa performance18.

1-1-1 Une transformation de la logique des contrôles traditionnelsexercés par le ministère en charge du budget et des comptes

publics

L’élaboration et le suivi du budget, comme la tenue des comptes, reposent sur

un seul ministre pour l’ensemble des ministères. Les contrôles budgétaire et

comptable sont donc exercés sous l’autorité du ministre du Budget, au sein de

chaque ministère par le contrôleur budgétaire et comptable ministériel

(CBCM).

Le recentrage du contrôle financier issu de la réforme de 2005

Élément fondamental du système d’information budgétaire, le contrôle

financier, dont les acteurs prennent le nom de contrôleurs budgétaires,

acquiert une dimension nouvelle regroupant à la fois une fonction d’analyse et

une fonction de contrôle.

18 V. sur ce point et sur le caractère international de ce phénomène : M-C. ESCLASSAN, Un phénomène international :l’adaptation des contrôles financiers publics à la nouvelle gestion publique, RFFP, n° 101, Mars 2008, p. 29 et suiv.

17

Le contrôle budgétaire est placé en amont de la dépense à travers le visa sur

la programmation budgétaire initiale des crédits et l’avis sur la soutenabilité

des Budgets Opérationnels de Programme (BOP). En cours d’exécution, son

volet de contrôle sur les engagements de dépense est recentré sur les enjeux,

limité aux seules données budgétaires (et non plus juridiques) et s’exerce

dorénavant de manière modulée en fonction de seuils19.

Le contrôle budgétaire peut être qualifié de contrôle interne au sens du droit

public financier car il s’agit d’un contrôle exercé par l’entité elle-même, en son

sein, autrement dit par l’Etat sur ses propres services. Parce qu’il dépend

étroitement de la qualité des activités budgétaires des services ministériels

gestionnaires des crédits, le contrôle budgétaire exercé par le ministre du

budget doit reposer sur un « contrôle interne budgétaire »20, qu’il faut entendre

comme un contrôle défini, arrêté et mis en œuvre par les services eux-

mêmes. En réalité, le contrôle interne doit ici être appréhendé comme un

processus d’exécution - vérification intégré aux activités des services.

Le rapport de l’IGF souligne en ce sens que « la réforme du contrôle financier

a été conçue dès l’origine dans un esprit de développement du contrôle

interne. (…) Le contrôle financier se positionne comme une fonction support

assurant des missions de conseil à l’attention de l’ordonnateur »21.

On le comprend, les appellations « contrôle budgétaire » et « contrôle interne

budgétaire » ne permettent pas de les positionner au regard de la

classification doctrinale et entretiennent une confusion par rapport à la

qualification moderne de contrôle interne22.

19 Décret n° 2005-54 du 27 janvier 2005 relatif au contrôle financier au sein des administrations de l’Etat, op. cit.20 Cf. Infra.21 Rapport relatif à la structuration de la politique de contrôle et d’audit internes de l’Etat, précit., p. 622 Cf. Infra, 1-1-2.

18

La rénovation du contrôle de régularité

La réforme du contrôle financier de 2005 a mis fin, en grande partie, au

contrôle de la régularité des actes au regard des lois et règlements par le

contrôleur budgétaire (par exemple s’agissant du respect de code des

marchés publics ou de la réglementation européenne). Le contrôle budgétaire

des actes d’engagement porte désormais sur l’imputation de la dépense, la

disponibilité des crédits et des emplois, l’exactitude de l’évaluation et l’impact

sur les finances publiques : sauf exception23, le visa ne peut être refusé pour

un motif de légalité.

En revanche, la tradition française d’un contrôle de régularité24 de la dépense

au moment du paiement, par le comptable public, n’est pas remise en cause.

Le contrôle du comptable connaît pourtant de profonds bouleversements.

Visant à le recentrer sur les principaux risques et enjeux, le contrôle du

comptable évolue progressivement vers un contrôle hiérarchisé de la

dépense, dont le moment, le champ ou l’intensité sont modulables. En outre, il

s’oriente vers un contrôle partenarial avec les services de l’ordonnateur,

consistant en une réorientation du contrôle en fonction de la maîtrise des

pratiques financières par les services de l’ordonnateur.

Le déploiement du nouveau progiciel de gestion intégré (« Chorus ») et de

nouvelles procédures d’exécution financière (centre de services partagés des

ordonnateurs et services facturiers chez le comptable) permettent d’améliorer

le processus de la dépense. Par ailleurs, l’instauration de la comptabilité

générale conduit à un partage de la fonction comptable auparavant

exclusivement dévolue au comptable public, celui-ci étant in fine, le garant de

la qualité comptable.

23 Au regard du statut de la fonction publique par exemple.24 Tel qu’il est actuellement déterminé par les articles 12-B et 13 du Décret n°62-1587 du 29 décembre 1962 portantrèglement général sur la comptabilité publique (RGCP).

19

Dans son acception traditionnelle, le contrôle exercé par le comptable public

est un contrôle interne, dans le sens où il est mis en œuvre et exercé par un

service de l’administration. S’il est conservé, le contrôle de régularité prévu au

RGCP évolue et se rénove, s’appuyant une nouvelle fois sur la qualité des

opérations réalisées, en amont, par les services gestionnaires. Ceux-ci

doivent donc s’assurer du respect des procédures, de la régularité et des

informations financières ou comptables qu’ils fournissent par le biais de

processus normalisés, mis en œuvre en interne : le contrôle interne

comptable.

Si une première spécificité du système français25 est de confier le contrôle

budgétaire, au sein de chaque ministère, à un agent placé sous l’autorité du

ministre du budget26, la seconde est le regroupement, sous une même autorité

- le CBCM - de deux fonctions distinctes, c’est-à-dire l’exercice du contrôle

budgétaire d’une part et l’exercice des fonctions de payeur et de comptable

public d’autre part. Ce particularisme repose cette fois sur le principe d’unicité

comptable de l’Etat. De même, au niveau déconcentré, contrôle budgétaire et

contrôle du comptable sont confiés aux directeurs régionaux et

départementaux des finances publiques.

Cette évolution engendre également un flou conceptuel s’agissant d’un

contrôle administratif interne (au sens traditionnel du terme) reposant, en

amont, sur un contrôle interne ou intégré. Malgré un vocable commun, le

contrôle interne financier se distingue des contrôles traditionnels et rénovés de

notre droit public financier.

1-1-2 Distinction et définition des nouveaux contrôles

Exercé au sein de chaque ministère, le contrôle interne budgétaire et

comptable se distingue également d’autres formes de contrôle.

25 Sur les origines du contrôle budgétaire, cf. S. KOTT, Le contrôle des dépenses engagées, évolutions d’une fonction ,CHEFF, 2004.26 Cf. Supra.

20

Le contrôle de gestion : un contrôle en interne dédié à la performance dela gestion

Le contrôle de gestion est un dispositif mis en œuvre par un responsable,

dans le cadre de son champ d’activité, qui mesure le rapport entre les

moyens, l’activité et les résultats obtenus. Il a pour finalité d’assurer le pilotage

des services à chaque échelon (central et déconcentré) et d’améliorer

l’efficacité et l’efficience de la gestion. Il est mis en œuvre par chaque

ministère (ou structure), en fonction de ses spécificités propres. Il est donc

placé sous la responsabilité de chaque ministre “gestionnaire” et mis en

œuvre par des équipes propres et dédiées.

Le contrôle interne en matière financière : un processus de maîtrise desrisques budgétaires et comptables

Le contrôle interne doit plus volontiers être appréhendé comme un processus.

Il s’agit d’un dispositif qui regroupe des procédures et processus

(institutionnels et formalisés) internes destinés à maîtriser un ensemble de

risques. Il a pour finalité de fournir une assurance raisonnable quant à la

bonne réalisation des opérations, à la fiabilité des informations (financières,

budgétaires et comptables) et quant au respect de la réglementation. Il est

déployé dans chaque ministère en fonction de ses spécificités, son

organisation, ses processus et missions. Placé sous la responsabilité de

chaque ministère, le contrôle est intégré dans la structure même.

L’IFACI définit le contrôle interne comme « un dispositif de la société, défini et

mis en œuvre sous sa responsabilité, qui vise à assurer : la conformité aux

lois et règlements ; l’application des instructions et des orientations fixées par

la Direction générale ou le Directoire ; le bon fonctionnement des processus

internes de la société, notamment ceux concourant à la sauvegarde de ses

actifs ; la fiabilité des informations financières ; et d’une façon générale,

contribue à la maîtrise de ses activités, à l’efficacité de ses opérations et à

l’utilisation efficiente de ses ressources »27.

27 « Le dispositif de contrôle interne : cadre de référence », IFACI, janvier 2007, p. 14.http://www.ifaci.com/fo/page.asp?id=330,

21

Le contrôle interne regroupe l’ensemble des dispositifs choisis par

l’encadrement et mis en œuvre par les responsables de tout niveau pour

maîtriser le fonctionnement de leurs activités. Il n’est pas spécifique à la

matière financière, mais prend en compte l’ensemble des risques liés aux

activités d’une entité. Il doit s’entendre comme une maîtrise et non comme un

contrôle. Il s’appuie sur des procédures écrites (recueil des normes,

organisation et procédures) et sur un examen complet des procédures en

cours (cartographie des activités, de l'organisation, des processus). Après

avoir défini les spécificités de chaque phase d’une opération, il identifie et

évalue les risques associés compte tenu des objectifs recherchés et, en

fonction, détermine les contrôles les mieux adaptés.

Le contrôle interne en matière financière constitue un sous-ensemble du

contrôle interne. Pour l’Etat, le contrôle interne financier vise à maîtriser le

fonctionnement des activités financières et a été défini par les services du

ministère du Budget et des Comptes publics. Il se subdivise en un contrôle

interne budgétaire (CIB) et un contrôle interne comptable (CIC).

Le contrôle interne budgétaire a pour vocation de s’assurer de la qualité de

la comptabilité budgétaire28 et de la soutenabilité budgétaire de la

programmation, de la gestion et de son exécution29. Les référentiels ont été

arrêtés par la Mission de l’audit et du contrôle interne budgétaires (MACIB)

qui, à la Direction du budget, aide à son déploiement et sa mise en œuvre.

Le contrôle interne comptable contribue, quant à lui, à s’assurer de la

qualité comptable de la comptabilité générale. Il vise à donner une assurance

raisonnable de la qualité des comptes.

Les référentiels ont été définis par le service comptable de l’Etat à la Direction

générale des finances publiques (la Mission doctrine comptable et contrôle

28 La comptabilité budgétaire enregistre et restitue les opérations d’ouverture et la consommation des autorisationsprévues à l’article 34 de la LOLF ainsi que les opérations d’affectation : principalement autorisations en AE, CP,emplois et découverts, évaluations de recettes, consommations en AE, CP et ETPT, recettes, découverts, tranchesfonctionnelles retracés dans des états financiers.

29 La programmation met en adéquation l’activité des services avec les crédits et les emplois notifiés ou attendus. Soncaractère soutenable s’apprécie par le respect de l’autorisation budgétaire dans ses dimensions annuelle etpluriannuelle.

22

interne comptable - MDCCIC) qui s’assure de l’accompagnement des

ministères.

L’audit interne : une connaissance de la maîtrise des risques parl’évaluation périodique du contrôle interne

L’audit interne est “une activité indépendante et objective qui donne à une

organisation une assurance sur le degré de maîtrise de ses opérations, lui

apporte ses conseils pour les améliorer, et contribue à créer de la valeur

ajoutée. Il aide cette organisation à atteindre ses objectifs en évaluant, par

une approche systématique et méthodique, ses processus de management

des risques, de contrôle, et de gouvernement de l’entreprise, et en faisant des

propositions pour renforcer leur efficacité”30.

L’audit est un dispositif qui évalue la qualité du contrôle interne et propose les

corrections nécessaires à son amélioration et à son renforcement. Il a pour

finalité de mesurer le degré de maîtrise des opérations, des risques et de la

fiabilité des informations. Il peut porter sur la régularité, l’efficacité, l’efficience,

la qualité de direction, l’organisation structurelle, des processus et des

systèmes d’information. Si l’auditeur mesure l’assurance raisonnable, il peut

également, par ses conseils, réorienter le processus de contrôle interne.

L’audit est donc intimement lié au contrôle interne et l’audit financier en

constitue un sous-ensemble. Les dispositifs de contrôle et d’audit internes

doivent être formalisés, normés, par le biais de référentiels pour chaque

activité et processus.

Dans sa partie comptable, l’audit interne est avant tout une méthodologie et

constitue donc un préalable nécessaire à la certification des comptes.

30 Définition approuvée le 21 mars 2000 par le Conseil d’administration de l’ IFACI (Traduction de la définitioninternationale approuvée par l’IIAA le 29 juin 1999).

23

1-1-3 Organisation structurelle : nouveaux acteurs, nouvelles

structures

Le contrôle interne est développé par deux nouvelles structures au sein du

ministère du Budget, des comptes publics et de la réforme de l’Etat. Son

déploiement et sa mise en œuvre s’appuient avant tout sur le Secrétaire

général et le Directeur des affaires financières de chaque ministère assistés

par le CBCM au niveau central.

La MDCCIC et le contrôle interne comptable

Le CIC a été mis en place à l’issue du vote de la LOLF, par la Direction

Générale de la Comptabilité Publique pour une mise en œuvre en 2006.

Aujourd’hui, la Mission doctrine comptable et contrôle interne comptable

(MDCCIC), rattachée au Service comptable de l’Etat de la DGFIP (pôle

Gestion publique) est chargée de la conception et de l’animation du contrôle

interne.

La MACIB et le contrôle interne budgétaire

La Mission de l’audit et du contrôle interne budgétaires est, quant à elle,

rattachée au Contrôle général économique et financier (CGEFI) instauré en

200531. Placée sous l’autorité fonctionnelle du directeur du Budget, elle

élabore les référentiels interministériels de contrôle interne budgétaire en lien

avec ceux du contrôle interne comptable et assiste les ministres dans le

développement et l’animation de ce contrôle interne.

En savoir plus… la MACIB

31 Décret n° 2005-440 du 9 mai 2005.

24

1-2 Le contrôle interne invite à appréhender autrement le contrôle

financier public

Les logiques, les enjeux et les processus du contrôle interne ainsi que de

l’audit sont fondamentalement différents des contrôles que notre système

financier connaît et développe depuis le XIXe siècle.

Si le contrôle interne apparaît particulièrement difficile à classer au regard des

distinctions que l’on opère traditionnellement en matière de contrôles

financiers publics, le sens et l’emploi du terme contrôle nous paraissent mal

appropriés ou peu habiles.

1-2-1 Contrôle interne et concepts traditionnels du droit publicfinancier

Au sein des contrôles financiers publics, la doctrine opère une distinction entre

contrôles administratifs et juridictionnels selon leur nature, entre contrôles

internes et externes s’agissant du critère organique, ou encore entre contrôles

a priori et a posteriori selon le moment où ils sont exercés.

Parce qu’il n’implique pas de sanction individuelle, le contrôle interne n’est pas

un contrôle juridictionnel.

À l’image de la transformation des contrôles exercés par les contrôleurs

budgétaires et comptables (passage d’un contrôle a priori systématique à un

contrôle a priori modulé et a posteriori par sondages), le contrôle interne n’est

pas figé dans le temps mais est exercé tout au long de la chaîne d’exécution

financière. Il ne peut donc pas non plus s’inscrire dans la distinction

traditionnelle des contrôles a priori ou a posteriori.

25

Par opposition au contrôle juridictionnel, le contrôle interne peut effectivement

être appréhendé comme un contrôle administratif, car il n’emporte pas de

sanction individuelle.

Parce qu’il est mis en œuvre au sein de l’administration, sous la responsabilité

d’un ministre, il s’agit d’un contrôle interne à l’organisation. Néanmoins, il se

distingue des contrôles administratifs traditionnels car il n’est pas exercé par

un corps spécialisé mais intégré à l’ensemble de la chaîne de la dépense32. Il

n’a aucune finalité répressive ni même vocation à empêcher ou interdire

l’exécution financière. Le contrôle interne repose sur de multiples acteurs de

positionnement hiérarchique différent intégrés à la chaîne d’exécution

financière. Enfin, le contrôle interne budgétaire et comptable peut s’appuyer

sur un processus d’audit à la fois interne à l’administration et externe à

l’administration (Cour des comptes).

1-2-2 Le contrôle interne, un nouveau concept

Le terme "contrôle" (en français) : un moyen de vérification

En français, le terme “contrôle” recouvre naturellement le sens de vérification.

Il s’agit là de son sens étymologique (“contre-rôle”)33 et du sens que lui ont,

jusqu’à présent, conféré les dispositifs administratifs en matière de dépense,

ayant pour objectif de rechercher une vérité et pour enjeux d’empêcher, de

limiter ou, à défaut, de sanctionner. Aussi le terme contrôle est-il naturellement

synonyme de vérification de la régularité, se référant à la conformité à une

réglementation, et repose avant tout sur le mythe d’une vérification exhaustive

et la recherche d’un risque nul.

C’est là le sens des contrôles financiers publics traditionnels.

32 Le contrôle interne est également intégré à d’autres cycles que celui de la dépense (immobilisations, engagementset provisions, prduits…).33 A. Barilari, Les contrôles financiers comptable, administratifs et juridictionnels des finances publiques, LGDJ, 2003,p. 17.

26

Le contrôle et l’audit internes comme outils de maîtrise de la gestion :

En anglais, le terme control prend le sens de “maîtrise” et repose sur le

diagnostic d’un processus (test, check) afin d’en mesurer l’effectivité. Le

contrôle n’a donc pas pour enjeu de limiter ou d’empêcher mais de mesurer et

de donner une assurance raisonnable. Il ne s’inscrit donc pas dans la logique

traditionnelle des contrôles français et ne constitue pas un moyen mais un

processus intégré.

Les processus de contrôle interne et d’audit interne s’écartent de la

conception traditionnelle attachée, en français, au terme de contrôle. Ils

apparaissent, dès lors, comme de nouveaux concepts.

Contrôle et audit internes : un enjeu culturel au sein de l’administration

Le contrôle interne s’écarte fondamentalement des contrôles administratifs

que nous connaissions jusque-là, s’agissant tant de sa logique, de sa

procédure que des conséquences qu’il emporte. Les concepts de contrôle

interne et d’audit doivent impérativement et concomitamment à leur

développement, être distingués des contrôles ou de l’inspection. Il s’agit là

d’un enjeu culturel propre à l’administration publique française. Leur diffusion

constitue, sur ce point, un véritable défi pour le ministère du Budget.

S’agissant de l’audit, mal appréhendé car peu connu des gestionnaires, il faut

rappeler l’adage anglo-saxon : « Audit is not control ».

En raison de sa coexistence avec les contrôles traditionnels et en raison du

sens connoté attaché au terme « contrôle », il apparaît que le terme de

« contrôle interne » marque les limites de la transposition à l’Etat et au secteur

public d’un vocabulaire emprunté au secteur privé dont il s’inspire.

27

1-3 Les modalités du contrôle interne budgétaire, du contrôle interne

comptable et de l’audit interne.

(avec l’aimable collaboration de la Direction du budgetet de la Direction générale des finances publiques)

1-3-1 Contrôle interne budgétaire

Les dispositifs de contrôle interne budgétaire, formalisés et permanents, sont

arrêtés par le directeur des affaires financières de chaque ministère sous

l'autorité du secrétaire général pour être mis en œuvre par les responsables

de tous les niveaux. Ils visent à maîtriser le fonctionnement des activités en

vue de fournir une assurance raisonnable de la qualité de la comptabilité

budgétaire et de la soutenabilité budgétaire de la gestion.

Ils sont conformes aux normes de comptabilité budgétaire et au cadre de

référence interministériel de contrôle interne budgétaire. Ils s’appuient sur des

systèmes d'information, une cartographie des risques au regard des objectifs

du contrôle interne budgétaire. Ils comprennent des procédures documentées

sur les processus budgétaires ainsi que des méthodes formalisées, diffusées

et appropriées, tout particulièrement s'agissant de la programmation, de son

suivi et de son actualisation. Ils prévoient des contrôles de la mise en œuvre

des procédures et du bon fonctionnement des activités.

L’animation du contrôle interne budgétaire s’appuie sur un réseau de référents

et des structures de gouvernance aux différents niveaux de responsabilité en

assurent le pilotage. Un dispositif de reporting permet d’en suivre le

fonctionnement et retrace la mise d’un plan d’action.

Le contrôle interne budgétaire est intégré à la conduite et à la réalisation de

toute activité. Il est exercé par tous et porté par l'encadrement. Il est décliné à

chaque niveau de l'organisation dans une logique de délégation : chaque

niveau est responsable de son contrôle interne budgétaire et en rend compte

au niveau immédiatement supérieur.

28

Il doit en permanence être adapté aux risques et enjeux du ministère, ainsi

qu'aux moyens humains dont celui-ci dispose. Il doit faire l'objet d'évaluations

périodiques en vue de l'améliorer, notamment dans le cadre de l'audit interne.

1-3-2 Contrôle interne comptable

Le contrôle interne comptable est une démarche itérative et permanente qui a

pour objectif d’assurer la qualité des comptes de l’Etat. Le cadre de référence

du contrôle interne comptable décrit une boucle de trois phases principales.

La première phase concerne le pilotage du contrôle interne par le

recensement et la hiérarchisation des risques. Elle vise à enrichir les plans

d’action, par des mesures structurelle s’agissant de la réingéniérie des

procédures et l’évolution de la conception des systèmes d’information, par des

mesures complémentaires relevant des acteurs de la fonction comptable. Il

s’agit de plans de contrôle interne à la charge de l’encadrement des services.

La seconde phase est relative à la mise en place des mesures de contrôle

interne. Elle réside dans l’organisation de la fonction comptable, s’agissant de

l’attribution et la séparation des tâches (profils informatiques), des points de

contrôle (hiérarchisé ou exhaustif, a priori ou a posteriori), des sécurités

physiques des fonds et des valeurs. Elle concerne également la

documentation des procédures, des risques (élaboration des référentiels de

contrôle interne) et des organisations (élaboration des organigrammes

fonctionnels). Enfin, elle vise à établir une traçabilité des acteurs et des

opérations en s’appuyant sur une piste d’audit, à savoir la sécurité de l’accès

et l’intégrité du système d’information, le plan de continuité, l’archivage et la

sauvegarde de l’information comptable.

La troisième phase consiste en l’évaluation du dispositif aux fins

d’enrichissement de la cartographie des risques et des plans d’action, soit par

29

les acteurs (en fonction des résultats des opérations de contrôle et des

diagnostics de procédures), soit par l’audit interne et l’audit externe.

1-3-3 Audit interne budgétaire et comptable

L'audit interne est un élément indispensable à la maîtrise des risques

budgétaires et comptables. Il est complémentaire du dispositif de contrôle

interne. Il s'en distingue par sa périodicité -il procède par missions

programmées-, ainsi que par ses acteurs, ses domaines d'intervention et ses

conséquences.

Selon la programmation établie par le comité d'audit, il évalue l'efficacité du

dispositif de contrôle interne et fait toutes préconisations pour l'améliorer. Les

audits sont conduits dans le respect des conditions et modalités défines par

les standards de l'audit. En particulier, la fonction d'audit interne est

indépendante des activités qu'elle audite, ce qui doit se refléter par le

rattachement de la mission au plus haut niveau du ministère. Les auditeurs ne

doivent pas exercer d'activité opérationnelle pouvant entrer en conflit avec leur

fonction de surveillance. Les missions sont programmées en vue d'assurer

une ouverture optimale des différents types de services en fonction des

risques majeurs recensés et des enjeux.

On peut distinguer deux catégories d’audit interne :

D’une part l’audit de conformité, autrement appelé « compliance » ; il

vise à donner l’asurance de la maîtrise des risques et, en matière

financière, consiste essentiellement à évaluer le respect normatif. L'audit

interne budgétaire et comptable est un audit de conformité.

D’autre part, l’audit de performance qui vise, à partir d’une analyse, à

améliorer un processus, faciliter son exécution ou en réduire le coût.

30

2e partie : Interrogations relatives aux contrôles et audits internes et

recommandations du groupe de recherche de FONDAFIP

Les rapports de l’Inspection générale des finances mettent en lumière les

différentes formes que peut recouvrir le contrôle interne. L’inspection souligne

notamment les spécificités de l’organisation centralisée française ainsi que les

interrogations soulevées par l’organisation et la mise en place des contrôles

internes budgétaires et comptables au sein des ministères. À partir de

l’observation de l’expérience de certains ministères ou entreprises, le groupe

de recherche formule des propositions ou recommandations relatives au

développement du contrôle interne en matière financière au sein des services

de l’Etat.

Les ministères organisent leur propre contrôle interne et commencent à

développer leur audit interne. Si la définition du contrôle interne implique une

appropriation par chacune des structures composant une entité, s’agissant de

l’Etat la question de son organisation renvoie à la conception même de sa

structuration en ministères. Ainsi doit-on appréhender chaque ministère

comme une entité distincte ou, à l’inverse, les considérer comme formant

ensemble une structure globale ? Autrement dit, une interrogation peut être

soulevée s’agissant du caractère ministériel ou interministériel du contrôle et

de l’audit internes et quant au rôle du ministère du Budget et de chaque

ministère (2-1). En outre, cette interrogation conduit à s’interroger sur la place

légitime du droit face à ce nouveau processus (2-2).

31

2-1 La place du ministère du Budget et le rôle des acteurs

ministériels

2-1-1 Mise en œuvre autonome ou structure interministérielle ?

Faut-il instaurer une structure gouvernementale afin de mettre en œuvre les

fonctions de contrôle et d’audit internes ou laisser à chaque ministère le soin

de les organiser ?

Contrôle et audit internes reposent sur un référentiel défini par les services du

ministère du Budget. Mais il appartient nécessairement à chaque ministère

d’une part d’organiser le contrôle interne de chacune des structures et d’autre

part d’instaurer, en son sein, une fonction d’audit placée sous la responsabilité

de chaque ministre et, en pratique, sous la direction du Secrétaire général du

ministère. Néanmoins, l’Etat tient une comptabilité budgétaire et une

comptabilité générale pour l’ensemble de ses opérations budgétaires et

comptables. Aussi, l’exigence de qualité comptable est identique pour chacun

des ministères et l’on doit considérer l’Etat comme une seule et même

organisation dont les ministères sont les structures.

Les services de la DGFIP (MDCCIC) et ceux de la Direction du budget

(MACIB) œuvrent, depuis la LOLF, au développement du contrôle interne et

de l’audit interne. On ne peut que souscrire à l’idée de les conforter dans leur

compétence interministérielle pour la tenue des référentiels, leur diffusion et

l’accompagnement méthodologique de la mise en place du contrôle interne

budgétaire et comptable au sein des ministères.

S’agissant d’un contrôle interne s’exerçant dans toute la sphère financière, on

pourrait à terme se poser la question de leur fusion au sein d’une structure

spécialement chargée du « contrôle et de l’audit internes financiers ». Plus

encore, une mission interministérielle chargée de la doctrine et de la diffusion

du contrôle interne (concernant d’autres risques que financiers) pourrait voir le

jour comme dans certaines grandes entreprises.

32

Toutefois, le caractère novateur de ce processus, la taille des services de

l’Etat, la spécificité de son organisation déconcentrée, la multitude des risques

qu’il encourt à raison de ses fonctions et l’originalité de ces processus pour le

secteur public ainsi que l’enjeu de soutenabilité budgétaire nous conduisent à

rejeter une telle entreprise. En outre, la Constitution et le texte organique

prévoient la tenue de deux comptabilités distinctes. Leurs enjeux sont

différents et seule la comptabilité générale fait l’objet d’une certification. De la

même manière, le contrôle interne budgétaire et le contrôle interne comptable

constituent deux spécificités pour l’Etat ce qui conduit, naturellement, à

distinguer, au sein du ministère du Budget, deux structures dédiées relevant

chacune de l’autorité fonctionnelle de chacune des directions compétentes en

matière budgétaire et en matière de comptabilité générale.

2-1-2 La fonction des responsables de programmes dans le cadre ducontrôle et de l’audit internes

Dans le cadre de la structure budgétaire par programmes ministériels, les

responsables de programmes sont amenés à tenir une place de plus en plus

importante à la fois dans la programmation, le suivi et la restitution de

l’exécution. Le contrôle interne étant une fonction managériale à tous les

niveaux de la hiérarchie, il est justifié que le responsable principal d’une

structure de pilotage d’une politique publique soit le responsable du contrôle

interne.

Il nous paraît important de conférer aux responsables de programmes un rôle

dans la mise en œuvre du contrôle interne. Au fond, c’est la fonction même de

responsable de programme qui devrait être définie par le droit.

33

2-1-3 La place des contrôleurs budgétaires et comptables ministériels

(CBCM) dans le cadre du contrôle et de l’audit internes

Le Contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM), payeur et

comptable public de chaque ministère, effectue un contrôle de régularité au

stade du paiement et assure la tenue des comptes des services centraux en

étant garant de la qualité comptable.

Il est également un acteur essentiel du contrôle de la qualité de la comptabilité

budgétaire et du caractère soutenable de la programmation de la gestion et de

son exécution, notamment par l’exercice de son pouvoir de visa.

Aussi, il n’y a pas de doublon entre le contrôle interne du gestionnaire et celui

opéré par le CBCM. Au contraire, celui-ci participe à l’animation et aide à la

mise en place du contrôle interne budgétaire et comptable au sein des

ministères et doit être chargé de sa diffusion dans les services déconcentrés.

En outre, il doit être considéré comme un vecteur et un relais de mise en

œuvre au sein des opérateurs de l’Etat de leur secteur de contrôle dans le

cadre de la qualité comptable et de la consolidation des comptes.

2-1-4 Audit interne et inspections ministérielles

De même que le contrôle interne doit être organisé au sein de chaque

ministère par les différents niveaux de la hiérarchie, la fonction d’audit interne

doit être réservée à des acteurs propres à chacun des ministères.

Le groupe de recherche soutient l’idée de confier à chaque corps d’inspection

ou d’inspection générale ministérielle la fonction d’audit interne, à condition de

l’identifier clairement.

34

En effet, chaque ministère possède aujourd’hui un corps d’inspection ou une

inspection générale et le groupe de recherche propose, qu’en plus de ses

fonctions d’inspection, de conseil et d’évaluation, chaque corps d’inspection

soit chargé de la fonction de l’audit interne de son ministère. La nouvelle

catégorie d’acteurs chargés de l’audit n’aurait donc pas à être créée ex nihilo.

De surcroît, l’IGF constate que, déjà, « la fonction d’audit interne s’est

majoritairement développée au sein des services d’inspection ou d’inspection

générale »34.

Leur fonction actuelle comprend par ailleurs quelques similitudes avec

l’activité d’audit de performance. Comme le souligne le rapport de l’IGF, les

services d’inspection ou d’inspection générale « sont les plus proches de

l’audit avec lequel elles partagent de nombreux outils et méthodes », même si

« l’audit interne ne recouvre pas tout le champ des métiers traditionnels des

services d’inspection ou d’inspection générale »35.

S’agissant de l’organisation et de la diffusion du processus d’audit au niveau

interministériel, deux options sont possibles : la première consiste à confier

cette fonction à l’Inspection Générale des Finances ; l’autre option serait de la

donner aux directions via la MDCCIC et la MACIB. Au préalable, ces options

supposent d’arrêter précisément la notion et la méthodologie de l’audit interne.

L’important est la recherche de l'homogénéité et des meilleures diffusions des

pratiques de contrôle interne et d’audit, en cohérence avec le certificateur.

La mise en place de contrôles internes autres que financiers sur des risques

propres à chaque ministère doit aussi se développer à l’aide de corps de

contrôles spécifiques (agriculture, services vétérinaires, DGCCRF…). En

matière d’audit, la mission des inspections ministérielles pourrait donc, à

terme, être élargie à d’autres risques que ceux spécifiquement financiers.

Cette option suppose au préalable de former et de réserver à la fonction

d’audit des membres de chaque inspection.

34 Rapport relatif à la structuration de la politique de contrôle et d’audit internes de l’Etat, précit., p. 1435 ibid., p. 13

35

Une question peut être posée. Eu égard au risque budgétaire et comptable

spécifique à l’Etat, est-il envisageable de confier respectivement à la MDCCIC

et à la MACIB une fonction d’audit propre ?. Elles seraient alors chargées

outre de la diffusion et de l’accompagnement du contrôle interne dans chaque

ministère, de s’assurer par cette fonction d’audit propre de sa maîtrise et de

son effectivité.

Cela peut paraître difficilement envisageable d’autant que les ministères

vivraient cette fonction d’audit propre comme un nouveau « contrôle » du

ministère du budget.

Ces interrogations laissent entrevoir en filigrane la question de la place du

ministère du Budget dans le cadre et la mise en œuvre du contrôle et de

l’audit internes.

2-1-5 Audit interne de second niveau ou Comitéd’harmonisation ? Quelle place doit recouvrir le ministère duBudget dans le cadre de l’organisation et la mise en œuvre desnouveaux contrôles ?

L’unité interministérielle doit être réalisée

L’exécution et la tenue de la comptabilité de l’Etat sont placées sous la

responsabilité du ministre du Budget. En matière financière (budgétaire et

comptable), il appartient naturellement au ministre du Budget de s’assurer, au

niveau interministériel, de la qualité des comptes de l’Etat s’agissant tant de la

comptabilité budgétaire que de la comptabilité générale et, par là, de

l’effectivité du contrôle et de l’audit internes.

Si la responsabilité de l’audit interne financier revient à chaque ministère, une

unité du système doit être réalisée à un niveau interministériel. Sur ce point,

une alternative est possible.

36

Audit de second niveau ou Comité d’harmonisation ?

L’unité interministérielle peut être assurée de deux manières distinctes :

• L’instauration d’un réel audit de second niveau, à savoir un deuxième audit

interne (audit de l’audit), centralisé et unitaire.

• La mise en place d’un comité susceptible de guider et d’orienter l’ensemble

des audits internes sur les risques financiers budgétaires et comptables. Le

rapport de l’Inspection générale soutient cette option et propose la création

d’un Comité d’harmonisation36. L’IGF « suggère de ne pas faire jouer à cette

structure le rôle d’auditeur supérieur »37 et s’oppose à l’instauration d’un audit

de second niveau.

Le groupe de recherche estime qu’il est certainement trop tôt pour répondre à

cette interrogation et que l’ambition de cette réforme doit être mesurée et sa

mise en œuvre pragmatique. Dans l’attente, le groupe de recherche soutient

l’idée de la constitution d’un Comité d’harmonisation. Quoi qu’il en soit, se

posera alors la question de l’autorité ministérielle de rattachement.

Le choix de l’autorité ministérielle

Le choix entre audit de second niveau ou comité d’harmonisation implique

également de s’interroger sur l’autorité ministérielle de rattachement. Là

encore, deux possibilités paraissent envisageables :

• Il pourrait être rattaché au ministre du Budget en tant que responsable

de l’établissement du budget et des comptes de l’Etat,

• À l’inverse, il pourrait être rattaché au Premier ministre en tant que Chef

du gouvernement et autorité unificatrice de l’ensemble des ministères.

36 « Dans tous les pays étudiés par l’Inspection générale des finances, il existe une unité centrale d’harmonisation qui ,a minima, a pour attribution d’animer la communauté des auditeurs internes, de diffuser voire d’édicter les normesapplicables à leur activité ainsi que d’harmoniser la méthodologie, l’organisation et le fonctionnement des comitésd’audit et des entités d’audit interne. Par ailleurs, l’échelon interministériel est utile pour traiter certainesproblématiques dépassant le périmètre d’un seul ministère ». Rapport, precit., p. 29.37 « (…) ce qui compliquerait l’architecture du dispositif en multipliant les niveaux de contrôle. Il appartient simplementà l’unité centrale d’harmonisation de veiller à l’application des conditions professionnelles pour les démarches qualitéet les certifications collectives des entités d’audit interne ». Ibidem.

37

Le groupe de recherche considère que, eu égard à la spécificité financière et

technique de cet audit et compte tenu de la nature de la mission d’audit qui

n’est pas un contrôle et n’emporte aucune sanction, la légitimité du ministre du

Budget est fondée et sa compétence n’interfère en rien avec celle du Premier

ministre.

Rattaché au ministre du Budget, ce comité devrait comprendre le chef de

l’Inspection générale des finances, le président de la Cour des comptes, un

représentant de chaque comité d’audit ministériel et des personnalités

extérieures.

Confier à l’Inspection générale des finances la fonctiond’harmonisation ?

L’Inspection générale des finances constitue un corps dont les

caractéristiques lui confèrent la place et la légitimité nécessaires pour

assumer la fonction d’harmonisation en matière financière, pour l’ensemble

des services de l’Etat, c’est-à-dire au niveau interministériel.

Rattachée au ministre du Budget, l’IGF s’inscrit dans une fonction, une

tradition et un savoir financiers. En outre, elle dispose d’une compétence

interministérielle ainsi que d’une compétence sur les opérateurs de l’Etat.

Enfin, l’IGF assure d’ores et déjà une fonction d’audit financier sur les services

du ministère du Budget.

Aussi, dans un premier temps, l’IGF serait susceptible d’assurer une fonction

d’harmonisation au niveau interministériel. Au surplus, dans un second temps,

l’IGF pourrait être amenée à exercer une quasi fonction d’auditeur de second

niveau, sur l’ensemble des ministères, dans le cadre de compétences

élargies : lancement d’audits interministériels. Cette proposition s’appuie enfin

sur l’observation de l’IGF qui, dans son rapport de 2009, constate que « les

inspections générales interministérielles s’ouvrent à l’audit interne, mais se

38

positionnent principalement en auditeurs internes de deuxième niveau »38.

Toutefois, ce positionnement s’explique par la dualité de l’audit que ces

inspections générales opèrent, s’agissant d’un audit de conformité et d’un

audit de performance.

Il s’agit donc d’un mouvement administratif naturel et l’on peut considérer que,

s’agissant exclusivement de l’audit budgétaire et comptable de second niveau,

une organisation simple et homogène est nécessaire et qu’il faut s’appuyer sur

la compétence interministérielle globale de l’IGF.

2-1-6 Développer des comités d’audit au niveau ministériel

Le développement d’un audit interne en matière financière repose également

sur l’instauration de Comités d’audit, à la fois au niveau ministériel et

interministériel.

Sur ce point, le groupe de recherches préconise :

Au sein de chaque ministère, la création d’une Mission de Contrôle et d’Audit

Internes, rattachée au Directeur des affaires financières ou au Secrétaire

général, chargée d’organiser et de mettre en œuvre le contrôle interne dans

les services du ministère. En outre, un Comité d’audit ministériel composé du

ministre, du Secrétaire général, du Directeur des affaires financières, du

CBCM et de personnalités extérieures au ministère sera chargé de la

définition des travaux d’audit interne ministériel.

Au niveau interministériel, pour accompagner le fonctionnement des comités,

la MACIB et la MNA seraient chargées de la diffusion et du conseil auprès des

ministères ainsi que, éventuellement, de l’organisation de la formation des

auditeurs.

38 Rapport précit., p. 16.

39

2-2 Conférer au contrôle interne et à l’audit interne une légitimité

juridique

D’origine anglo-saxonne, le développement du contrôle et de l’audit internes

financiers n’est pas nécessairement assis sur une base normative, d’autant

qu’il s’agit de processus ne reposant pas sur des contrôles, entendus au sens

traditionnel du terme et qui n’emportent pas de conséquences pour les agents.

Néanmoins, le groupe de recherche estime que notre tradition juridique et

administrative implique d’instituer par un texte le développement du contrôle et

de l’audit internes au sein des services de l’Etat.

Comme le souligne le second rapport de l’Inspection générale des finances,

“le corpus de règles et de contrôles régissant l’administration de l’Etat ne peut

s’apparenter à un dispositif de contrôle interne, pas plus que la fonction

d’inspection n’est assimilable directement à celle d’audit interne”39. Il convient

donc de les différencier.

2-2-1 Asseoir les définitions et les contours de chacun des termes :contrôle, contrôle interne, audit, évaluation, inspection

Le groupe de recherche considère que définir le contrôle et l’audit internes

dans un texte juridique permettra également de fixer les définitions et contours

de chacun de ces processus et d’éviter ainsi une confusion entre les différents

contrôles et entre le contrôle interne et l’audit interne. De même pourra-t-on

alors clairement distinguer l’audit de conformité de l’audit de performance qui,

quant à lui, vise à mesurer et améliorer le processus de “rendre compte” et

non la “maîtrise raisonnable”.

Par ailleurs, les normes proposées par les différentes institutions

professionnelles (IFACI…) n’ont aucune portée normative et proposent des 39 Inspection générale des finances, Rapport octobre 2009, op. cit., p. 3.

40

définitions et des critères de fonctionnement en certains points différents du

secteur public.

Ancrer ce processus dans notre ordre normatif constitue la voie la plus solide

pour le doter d’un cadre général et spécifique à l’Etat.

2-2-2 Encadrer et légitimer le contrôle et l’audit internes

Notre tradition administrative étant fondée sur un droit écrit, les services de

l’Etat ne peuvent se satisfaire et « s’imprégner » durablement de ces

processus si novateurs et étrangers à nos pratiques.

Si l’on souhaite que les activités d’audit puissent être intégrées dans les

carrières des agents, le recours au dispositif normatif s’impose, selon nous,

comme la condition première de leur légitimité et de leur attrait. Sur ce point,

on soulignera que, dans son rapport, l’IGF soulève la question de la place de

l’audit interne dans les carrières et recommande qu’il « soit considéré comme

une étape dans le parcours de carrière des cadres supérieurs et dirigeants de

l’administration de l’Etat »40.

La mise en place d’une démarche de contrôle interne commune à l’ensemble

des services de l’Etat dépend de sa légitimité. Aussi, il convient d’apporter au

contrôle et à l’audit internes une légitimité avant tout juridique. Son absence

serait interprétée comme une marque de désaveu de la part des décideurs

publics.

40 Rapport précit., p. 34.

41

2-2-3 Un ou des texte(s) ?

Le contrôle interne et l’audit sont liés et constituent un processus systémique

qui vise à maîtriser un ensemble de risques liés à une activité ou une

organisation. Le contrôle interne financier, à savoir budgétaire et comptable,

ne constitue donc qu’un élément de ce processus.

Aussi, s’agissant de la voie normative, une alternative est possible :

• Prévoir un texte général au contrôle interne, duquel pourrait naître les

textes spécifiques au contrôle interne en matière financière mais

également dans d’autres domaines. Cette option implique d’édicter

plusieurs textes. Elle conditionne la mise en œuvre du contrôle et de

l’audit internes budgétaires et comptables à la publication préalable

d’un texte introduisant le contrôle et l’audit internes au sein de l’Etat.

Une telle voie aurait le mérite d’imposer une nouvelle démarche

structurante pour l’ensemble des activités à risque, mais imposerait de

définir uniformément le contrôle et l’audit internes.

• Considérer qu’il appartient à chaque activité ou secteur de prévoir

juridiquement et de mettre en œuvre un processus de contrôle et

d’audit interne. Ainsi, en raison de la spécificité et de l’importance du

risque financier pour l’Etat, le contrôle interne et l’audit interne

budgétaire et comptable pourraient être organisés et définis par un

texte unique sans en passer par un texte général sur le contrôle et

l’audit.

42

2-2-4 Intégrer le contrôle et l’audit internes dans le Décret du 29

décembre 1962

Le groupe de recherche préconise de profiter de la réforme du Décret du 29

décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique pour

introduire le contrôle et l’audit internes budgétaires et comptables au sein de

ce texte comme des éléments structurants de l’exécution financière.

Le contrôle et l’audit internes ont une place légitime dans un décret de 1962

rénové et à vocation élargie aux aspects de la gestion financière de l’Etat. Ils

doivent en effet être appréhendés comme faisant partie des procédures de

gestion financière. En ce sens, et malgré quelques aspects obsolètes, le

Règlement général sur la comptabilité publique reste un texte fondamental

s’agissant des acteurs et des procédures. Selon nous, le contrôle interne doit

y être intégré sous peine de l’afficher maladroitement comme un élément à

part, à côté et distinct des procédures d’exécution et des acteurs traditionnels

de la dépense.

2-2-5 Asseoir le contrôle et l’audit interne comme des élémentsd’organisation des services de l’Etat

Au titre du Décret n°87-389 du 15 juin 1987 relatif à l'organisation des services

d'administration centrale, leur organisation doit être prévue par un texte de

nature réglementaire.

Pour un meilleur déploiement dans l’ensemble des services, le contrôle et

l’audit internes doivent être appréhendés comme des éléments structurants,

faisant partie de l’organisation des services de l’Etat.

43

2-2-6 Appuyer et assurer le développement du contrôle interne

budgétaire

La soutenabilité budgétaire constitue un élément clé de la bonne gouvernance

financière et la comptabilité budgétaire ne doit pas être amoindrie par la

comptabilité générale au motif qu’elle ne fait pas l’objet d’une certification.

Moins avancé qu’en matière comptable, il nous paraît donc essentiel que la

même démarche s’agissant du contrôle interne budgétaire soit rapidement

mise en œuvre et qu’une fonction d’audit interne budgétaire soit déployée au

sein de chaque ministère.


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